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Espace découvertes
Les caqueteuses sont en ville!
Par Sophie Gauthier, agr., Directrice générale Nature Bélisle
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Avoir des poules urbaines chez soi, c’est aller cueillir ses œufs frais tous les jours, nourrir ses petites bêtes à plumes, les regarder picorer l’herbe du jardin, observer leur mode de vie et les écouter égayer votre arrière-cour de leurs caquètements joyeux. C’est aussi une activité familiale. Les enfants apprennent tout en s’amusant à apprécier les ressources de la nature, à découvrir de nouvelles expériences de vie et à acquérir des connaissances inoubliables. Une passion à la portée de tous.
N’oublions pas qu’il n’y a pas si longtemps, les animaux de basse-cour faisaient partie intégrante de la vie urbaine. En 2013, la municipalité de Chambly a donné son feu vert et ouvert le bal pour l’entrée des poules en ville, comme le faisaient autrefois nos ancêtres, et depuis, plusieurs autres municipalités lui ont emboîté le pas à la demande de leurs citoyens.
Accueillir les poules urbaines chez soi est relativement facile, car l’espace requis n’est pas démesuré, les installations pas trop compliquées et les frais reliés à l’acquisition des volailles et à leur entretien sont abordables. Toutefois, certaines normes sont essentielles en vue d’assurer leur confort, leur bien-être et leur santé, et ce, dans un respect de l’environnement. Voici alors quelques conseils pratiques pour offrir une place de choix à ces nouvelles venues et assurez votre plaisir dans la réalisation de votre passion.
Tout d’abord, informez-vous
Vous y rêvez, alors bien avant de vous lancer corps et âme dans ce nouveau projet, vérifiez les possibilités et les règlements de votre municipalité. Prenez bien note que les poules ne sont pas les bienvenues dans toutes les municipalités. Celles qui autorisent les poules encadrent bien cette pratique et font des recommandations très précises pour la bonne marche à suivre. La détention d’un certificat d’autorisation est parfois obligatoire. N’oubliez pas que votre passion n’est pas nécessairement celle de vos voisins. Tout doit se faire dans le respect de l’environnement, et ce, à tout point de vue.
Bien faire son choix
Faire le choix d’avoir des poules, c’est tout de même un engagement qui peut représenter quelques années. L’espérance de vie d’une poule chouchoutée, à laquelle vous offrez des conditions optimales, peut aller de 10 à 12 ans et parfois davantage. Par contre, la production d’œufs d’une poule cesse complètement bien avant la fin de leur vie. Elle diminuera passablement après son troisième anniversaire et sera presque nulle au-delà de ses cinq ans! Toutefois, même à leur retraite, elles sauront gagner votre cœur au-delà de leur production et demeurer une compagne très agréable, attachante et surprenante.
Ces créatures sont uniques en leur genre, très sociables et apprécient la vie de groupe. Il est par conséquent toujours préférable d’accueillir dans vos installations plus d’une poule afin de leur éviter l’ennui. Les municipalités fixent bien souvent leur limite entre trois et cinq pondeuses par adresse civique et interdisent la présence du coq. Son chant matinal n’étant pas toujours apprécié des citadins. Alors, maintenant, à vous de déterminer la taille de votre cheptel à plumes, mais bien souvent, un groupe de trois poules est parfait pour le débutant.
Parmi la multitude des races de poules pondeuses disponibles, lorsqu’on parle de poules urbaines, la poule brune demeure bien souvent la préférée, pour son calme, sa docilité, sa rusticité et la couleur de ses œufs. La poule blanche, un peu plus légère et nerveuse, est également une excellente pondeuse. Certains préféreront les races de fantaisie pour l’attrait de leurs couleurs, leurs plumages parfois plus soyeux ou la coloration des œufs qu’elles produisent.
Quel que soit votre choix, le moment venu d’en faire l’acquisition, privilégiez un éleveur sérieux et reconnu qui saura vous guider pour faire l’achat de vos oiseaux. Choisissez celles qui sauront vous faire craquer, mais ayez un œil vigilant pour des oiseaux jeunes, en début de ponte et en santé… telle est la garantie de base pour un bon départ et une expérience mémorable.
Un espace de vie confortable
Le poulailler, cet indispensable, n’est nul autre qu’un abri contre les vents, les courants d’air, la pluie, les froids ou les chaleurs extrêmes, un toit pour la nuit et une protection sécurisante contre les prédateurs (renard, belette, chiens, rats…). Un refuge où la ventilation, la température et un éclairage adéquat sont de mise pour la santé et le bien-être de vos protégées. Sachez que les poules s’adaptent très bien à notre climat québécois, malgré ses froids hivernaux et ses canicules estivales. Ce qu’elles redoutent davantage sont les courants d’air et l’humidité, auxquels elles sont très vulnérables.
En tout temps, le logement de vos poules doit être salubre et de bonne dimension, donc suffisamment spacieux pour le nombre de ses locataires. Retenez que les poules ne doivent jamais être entassées. Offrez-leur la joie d’avoir suffisamment d’espace pour se dégourdir les ailes et la chance de vivre le plus naturellement possible.
L’accès à un parcours extérieur grillagé, relié au poulailler, est tout à fait de mise pour leur sortie quotidienne en plein air. Elles vaqueront avec plaisir à leurs petites habitudes innées de gratter et picorer le sol ici et là. C’est vraiment une valeur ajoutée pour le bienêtre de vos dames ailées. ►
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Les incontournables
Le matériel indispensable qui doit être mis à la disposition de nos poules va de la mangeoire, l’abreuvoir, le nid, le perchoir jusqu’à l’espace alloué pour le bain de poussière. Les accessoires en matériaux facilement nettoyables, tels que le plastique ou l’acier galvanisé, sont à privilégier.
Les mangeoires et les abreuvoirs doivent permettre la distribution de la nourriture et de l’eau tout en les préservant du gaspillage et des souillures. Adaptez la taille et le nombre selon la population de votre équipe de pondeuses.
Dès l’obscurité du soir venue, dans leur routine, les poules entre au poulailler avec le réflexe naturel de se jucher en hauteur pour passer une bonne nuit de sommeil sans le souci des prédateurs. L’installation des perchoirs s’avère ainsi essentielle pour le bienêtre de nos bien-aimées.
Puis, à la levée du jour, la disponibilité des nids bien garnis de litière, apposés sur les murs du poulailler, sera fort appréciée pour le moment de la ponte. Instinctivement, elles iront au nid par souci de sécurité et d’intimité. Sans nid, elles pondront au sol augmentant les risques d’œufs sales et brisés. Évitez cette pratique, car elle incite les poules à développer la mauvaise habitude, difficile à perdre une fois prise, de picorer et consommer les œufs. Les nids sauront assurément agrémenter votre cueillette d’œufs propres, intacts et vous épargner une chasse aux œufs sans fin.
En ce qui a trait à la boîte à sable, réservez-lui un espace à l’extérieur du poulailler et amusez-vous à observer vos gallinacés. Autant elles détestent être mouillées, autant elles adorent les bains de poussière pour leur hygiène corporelle. Observez-les réaliser ce comportement tout à fait naturel de s’y rouler et s’amuser à faire virevolter le sable sur leur plumage. Un comportement tout à fait naturel qui les aide à se débarrasser de leurs parasites externes. L’ajout de terre diatomée au sable du bain rehausse le contrôle parasitaire.
Bien entendu, vous devrez prévoir le système d’éclairage pour assurer la luminosité pendant les périodes de jours courts et l’équipement de chauffage nécessaire pour les aider à braver les froids hivernaux.
Un système digestif original
Comme vous l’entendez si bien parfois, « quand les poules auront des dents ». Eh bien, effectivement, les poules sont dépourvues de dents. Leurs papilles gustatives ne sont pas non plus très développées. Dès sa consommation, la nourriture passe du bec au jabot par l’œsophage et y est entreposée. Lorsque vous percevez un énorme gonflement dans le cou de la poule, il n’y a pas lieu de s’inquiéter, il correspond à un jabot plein de nourriture, issu de la gourmandise de votre poule. Un peu comme l’écureuil qui sait remplir ses bajoues pour le transport des aliments.
Poultry Production Guide. Misset International.
Graduellement, les aliments humidifiés passent de cette poche de stockage vers l’estomac, où ils se mêlent aux enzymes digestives puis au gésier, où ils sont broyés. Le gésier, de par sa musculature, joue un rôle important de broyage des aliments. Lorsque les poules picorent le sol, elles consomment du gravier et des grains de sable qui se retrouvent directement dans le gésier où ils participent, avec les mouvements de ce dernier, à réduire la taille des particules alimentaires. Le gésier, en équipe avec le gravier, compense l’absence des dents chez la poule et fait l’action de mâcher les aliments.
Finalement, les ingrédients atteignent l’intestin, où les nutriments sont absorbés, tandis que les déchets liquides et solides sont expulsés par le cloaque.
Une alimentation de choix
Malgré une précision qui se doit d’être inégalée de la part du fabricant, l’alimentation de vos volailles est pour vous ce qu’il y a de plus simple. Assurez-vous seulement de faire le bon choix d’un aliment spécialisé pour pondeuse et de leur en fournir suffisamment.
Les protéines, glucides, minéraux et vitamines, essentiels à leurs besoins nutritionnels pour assurer leur production et leur santé, sont apportés prioritairement par les céréales (blé, orge, maïs), le soya et un supplément de minéraux et vitamines. Habituellement, aucun autre ajout n’est nécessaire à ces formulations. Cependant, un accès en libre-service à des coquilles d’huîtres broyées, comme source de calcium supplémentaire, et au gravier concassé peut être un ajout apprécié. Les animaux sauront aller y picorer selon leurs besoins. Les poules plus âgées requièrent plus de calcium que les jeunes, voilà pourquoi sans ajout supplémentaire de calcium, la coquille de leurs œufs sera plus mince et plus fragile.
Sur le marché, mis à part les moulées de ponte standard, il existe des aliments plus spécialisés avec ajout de graines de lin pour l’obtention d’œufs plus riches en oméga 3 et d’autres enrichis en sélénium organique. Le but étant d’améliorer les apports en sélénium chez l’humain par une consommation d’œufs de qualité, puisque ce nutriment est un puissant antioxydant très convoité pour la santé.
Le grand dilemme lors de l’achat de votre sac de moulée ponte réside bien souvent dans la forme de l’aliment. Votre préférence se tourne-t-elle vers un aliment cubé ou texturé? En réalité, les deux aliments sont bien équilibrés en chacun des nutriments nécessaires; par contre, pour la forme cubée ou granulaire, les ingrédients sont non seulement mélangés ensemble, mais également moulus très finement avant d’être exposés à un processus de cubage à haute température, permettant la compression des particules en granules ou en cubes. Il faut aussi savoir que le processus de cubage exige l’ajout de liants, tels que les ligno-sulfonates, auxquels s’additionnent des agents de conservation, car la vapeur nécessaire au processus de cubage en fait un aliment dont le taux d’humidité est plus élevé et qui par conséquent pourrait avoir des problèmes de conservation.
Pour sa part, l’aliment texturé consiste en un mélange de grains concassés et de soya avec un supplément de minéraux et vitamines. Un processus très simple vous direz, mais tellement plus naturel. Le client peut vraiment bien discerner visuellement les différents ingrédients qui composent cet aliment. Les morceaux de grains, de tailles plus ou moins grossières, font un très bon mariage avec le travail du gésier. Contrairement à la texturée, la moulée cubée retrouve rapidement sa forme moulue lorsqu’elle baigne dans le système digestif des oiseaux et la finesse de ces particules va à l’encontre d’une digestion optimale. De plus, la chaleur du processus de cuisson n’est pas sans hypothéquer la disponibilité de certains nutriments, par exemple les vitamines.
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Certes, la moulée texturée est plus poussiéreuse à la manipulation, mais elle s’avère plus nutritive pour les oiseaux que la cubée ou granulaire et combien plus naturelle. N’oubliez pas que l’alimentation de votre poule et sa santé se reflèteront sans contredit dans la qualité des œufs et leurs coquilles. N’est-ce pas de toute façon l’une de ces principales préoccupations des citadins qui optent pour l’autonomie alimentaire.
Oubliez le mythe qui dit bien souvent que l’aliment texturé est déséquilibré. Bien évidemment, les poules adorent le maïs et commenceront probablement à le manger en premier, mais soyez assuré qu’elles consommeront également tous les autres ingrédients, car ils lui sont naturellement essentiels. Bien des éleveurs commerciaux conventionnels et tous les producteurs biologiques font de l’aliment de ponte texturé leur préférence pour leurs animaux, car ils comprennent les multiples avantages qu’il leur procurent.
Une poule consomme un peu moins d’un kilogramme de moulée par semaine, soit entre 110 et 140 g par jour, principalement selon sa taille et la température. On parle souvent d’une consommation de 2 kg pour la production d’une douzaine d’œufs. Si vous trouvez que vos poules gaspillent trop leur nourriture, n’oubliez simplement pas d’ajuster les mangeoires à la bonne hauteur. Elles doivent être à la hauteur du dos de vos poules. Les poules aiment gratter, picorer et s’amuser… Pour elles, c’est leur passe-temps favori, mais une mangeoire bien ajustée saura vite restreindre ce comportement.
L’hydratation est essentielle
L’eau est d’importance vitale. Elle représente 70 % du poids de la poule et 65 % du poids de l’œuf. Assurez-lui en tout temps un accès illimité à de l’eau fraîche et propre. Bien que sa consommation journalière en eau varie entre 250 et 300 ml, elle peut se voir doubler et parfois même quadrupler dans les températures extrêmes (>27 oC), puisqu’elle aide à réguler la température de l’animal. Tout manque d’eau ne sera pas sans conséquence sur la production de votre poule.
Une production optimale
Élever des poules dans son jardin en leur offrant les conditions appropriées de confort, de salubrité et d’alimentation, tout en minimisant le plus possible les facteurs environnementaux de stress, est une recette gagnante pour optimiser la productivité de vos poules et la qualité des œufs frais qu’elles vous offriront. Bien reconnus pour leur valeur nutritive, les œufs font partie intégrante de notre alimentation quotidienne. Deux poules sauront vous procurer une douzaine d’œufs par semaine.
La vie productive de la pondeuse débute autour de sa 20e semaine d’âge (entre 18 et 22 semaines) et la quantité d’œufs produits dans sa première année approche les 250 unités. Vers l’âge de 18 mois, elle connaîtra sa première mue (renouvellement de son plumage), provoquant un arrêt temporaire de sa production, mais celle-ci reprendra de quatre à huit semaines plus tard, dès que la poule aura refait sa beauté. La mue n’est pas une maladie mais un phénomène tout à fait naturel qui se reproduit annuellement et généralement en automne. Les poules ont un pic de ponte autour de leur 28e semaine, puis graduellement voient leur productivité perdre peu à peu des plumes.
Bien que la race et l’âge aient un impact sur la production de vos cocottes, une période de luminosité allant de moins de 14 à 16 heures par jour, une intensité de lumière insuffisante, des températures extrêmes et une restriction de la disponibilité en eau d’abreuvement sont tout autant des facteurs qui l’influencent négativement.
Une fois la part du travail de la poule accomplie, la cueillette des œufs et leur conservation prennent une mesure tout aussi importante dans la qualité du produit que vous mettrez dans votre assiette. Ramassez vos œufs quotidiennement, passez doucement une lingette humide pour les nettoyer, puis conservez-les au réfrigérateur. Prenez bien soin de ne jamais gardez les œufs dont les coquilles sont fêlées ou fissurées. Ils peuvent être une source grave de contamination bactérienne.
En résumé
Vous êtes le protecteur de vos oiseaux. Dans ce regain du retour au naturel et d’alimentation de proximité, il est de mise de bien prendre soin de ces petites bêtes à plumes élevées en zone résidentielle. Un manquement à ces responsabilités peut grandement nuire au bien-être de vos animaux, la qualité des œufs produits et par conséquent, la santé humaine.
Vos poules méritent une multitude de petites attentions et leur offrir de bonnes conditions d’élevage est un gage de santé et de longévité. Assurez-vous de bien les alimenter et les abreuver pour leur vitalité, d’entretenir adéquatement le poulailler pour leur bien-être, d’avoir un programme de vaccination et de contrôle parasitaire pour leur santé, et veillez à leur sécurité la nuit tombée. Vous êtes leur ange gardien de tous les jours avec la prime d’un œuf par jour. ■