Le périurbain: Un territoire d'actions, l'architecte face au patrimoine périurbain, Antoine Baudy

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BAUDY Antoine

LE PÉRIURBAIN: UN TERRITOIRE D’ACTIONS L’architecte face au patrimoine périurbain

Master «Architecture entre usages et paysages urbains»



R E M E R C I E M E N T S

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier Cécile Leonardi pour son franc parler lors du démarrage de ce mémoire, de la recherche du sujet et de la problématique ainsi que cours des retours de séminaires. Ensuite, je remercie Stéphanie David pour sa disponibilité et son aide dans l’étoffement des problématiques engagées puis pour les corrections pertinentes et enrichissantes. Merci à eux pour le soutien et l’aide engagée.


LE PÉRIURBAIN: UN TERRITOIRE D’ACTIONS

Directeur de mémoire : Stéphanie DAVID Juin 2015 E.N.S.A.G.


S O M M A I R E

SOMMAIRE SOMMAIRE P.1 INTRODUCTION P.3 1 POLITIQUES D’AMÉNAGEMENT QUI ONT CRÉÉ LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DU PÉRIURBAIN P.9 1.1 QUELLES PROBLÉMATIQUES ?

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1.2 QUELS FACTEURS ONT PORTÉ CE PROCESSUS ? p.12 1.3 QUALITÉS ET LIMITES DU MÉCANISME p.15

2 CONSTITUTION DU TERRITOIRE PÉRIURBAIN: GÉNÈSE ET NATURE P.19 2.1 UNE SPATIALITÉ SYMBÔLE DE LA PENSÉE PÉRIURBAINE p.20 2.2 UNE ARCHITECTURE STANDARD:LA MAISON CATALOGUE p.22 2.3 UN RÉSEAU D’ACTEURS ... SANS ARCHITECTES p.25

3 L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN P.29 3.1 ÉCHELLE URBAINE: LA DENSITÉ HORIZONTALE p.30 3.2 ÉCHELLE ARCHITECTURALE: CONCEPTION ET FABRICATION p.34 3.3 L’ARCHITECTE, UN ACTEUR AU COEUR DES INTÉRÊTS HABITANTS, ARCHITECTURAUX ET POLITIQUES p.39

CONCLUSION P.45 NOTES P.50 TABLE DES ILLUSTRATIONS P.54 BIBLIOGRAPHIE P.57 LA VILLE RESSOURCE, MÉMOIRE 2015 P.58

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En Juin 2014, Jean-Marc Offner1 écrit dans Les Echos un court article ayant pour titre « La pensée urbaine en panne »2. Du périurbain, il dit cela: « Le périurbain, espace de vie d’un tiers des Français, appartient aux terra incognita urbanistiques. Le dogme technico-politique veut qu’il faille lutter contre l’étalement urbain, et ce depuis... quarante ans. Or l’étalement est désormais bien là. Il faut donc changer d’ambition : considérer le périurbain comme espace de projets légitime, au même titre que les centres-villes et les grands ensembles, pour promouvoir des agencements et des fonctionnements de ces territoires diffus plus vertueux, au plan social et environnemental. »3 La ville et son territoire, le territoire et sa ville. La connexion entre ces deux entités s’avère aujourd’hui être une nouvelle matière à penser face à l’urbanisation des modes de vie. La question du périurbain se pose comme un problème auquel politiques, législateurs et aménageurs sont confrontés. Si la périurbanisation est un phénomène en place depuis le début des années 60, il est maintenant en cours de métamorphose. Définir de manière formelle un territoire périurbain est semble t-il compliqué. Les premières tentatives de définition apparraissent au cours des années 90 lorsque l’INSEE propose une définition fonctionnelle et paysagère de ces territoires selon leurs usages, l’accroche fonctionnelle à un pôle urbain ainsi qu’une imperméabilisation des sols en périphérie de ville. Ces facteurs relèvent plus d’une approche stastitique du phénomène de périurbanisation que d’une réelle compréhension des phénomènes en place sur ces territoires. Il s’agira dans un premier temps, grâce à une approche prospective historique, de comprendre comment cette dynamique d’étalement de la ville s’est mis en place, pour quelles raisons est-il apparu. C’est donc à la fin des années 60 que la ville a commencé à grignoter sur les territoires ruraux en périphérie des coeurs urbains. Après deux périodes de politique des Grands Ensembles correspondant à l’entre-deux-guerres et aux années 50-60, l’État s’est tourné vers une nouvelle politique d’aménagement du territoire: le pavillon et son corollaire urbanistique, le lotissement. L’évolution des modes de vie, la demande de logement ainsi qu’un nouveau rapport

3 INTRODUCTION

I N T R O D U C T I O N

INTRODUCTION


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Tenter d’éclairer les dispositifs et les enjeux du processus de périurbanisation depuis sa naissance jusqu’à aujourd’hui permettra alors de révéler les différentes échelles d’actions du processus. Si les échelles urbaines et architecturales semblent être évidentes lorsque l’on parle d’espaces périurbains et permettent d’y rentrer formellement, l’échelle des jeux d’acteurs et d’intérêts est tout aussi importante. Elle est en effet à l’initiative de toute intervention formelle sur le territoire. Cette étude évoluera donc sur la compréhension de l’urbanité construite sur ces territoires, de la densité des lotissements sous-tendue par la construction du « rêve pavillonnaire ». L’échelle architecturale se révelera moindre puisqu’illustrée par l’idée de la « maison catalogue » et l’instauration de Plans Locaux d’Urbanismes draconiens. Les normes sont imposées par les Directions Départementales de l’Equipement, les architectes des Bâtiments de France homogénéisent la production dans des semblants de traits régionalistes. « L’habitat se banalise et conduit à cette France moche qui nie totalement l’esprit des lieux »5, cette phrase de Thierry Pacquot6 met en avant le problème contemporain des territoires périurbains. On rejoint alors le questionnement d’Yves Chalas7. Quelle position doit-on prendre face à ce patrimoine ?

Cette compréhension du phénomène de périurbanisation donne alors à penser à ce que représente aujourd’hui ces espaces périphériques en terme de potentiel d’actions urbanistiques et architecturales. Finalement, ces territoires ont été trop souvent délaissé par les architectes et les urbanistes et donc laissé à la disposition de décideurs et d’aménageurs éloignés de toute sensibilité spatiale. Pourquoi ne pas reprendre les différentes échelles de construction du périurbain en réfléchissant à la manière dont l’architecte en particulier pourrait s’inscrire dans les processus de pensées et de créations qui lui échappent? Car les zones pavillonnaires, les zones commerciales, les déplacements et les fluxs que la périurbanisation a instauré sont aujourd’hui un patrimoine territorial que l’on ne peut nier. Il semble de ce fait plus interressant de les étudier comme des espaces de potentiels, de re-nouveau afin d’en retirer les qualités en terme de nouvelles possibilités de jeu d’acteur, de densité, de trame urbaine et d’identité architecturale. L’idée de l’approche est de comprendre comment l’architecte peut ré-invoquer des processus de pensée propre à sa profession dans le cadre d’une action périurbaine. Ces processus peuvent ainsi provenir directement d’une reflexion sur le périurbain mais il est intéressant de chercher aussi dans les actions urbaines ou rurales. Dans tout les cas, des architectes sont au coeur de nouvelles initiatives tant dans le milieu périurbain que dans des espaces non-périurbains. Les outils et les compétences de l’architecte doivent être invoqués, utilisés à chacune des échelles de construction du périurbain. Nous verrons ainsi comment des architectes ont répondu spatialement aux problématiques posées par la réhabilitation des docks d’Amsterdam BORNEOSPORENBURG8. Ces problématiques s’avèrent être très proche de celles du périurbain avec le problème du logement individuel à forte densité. Aussi, le mouvement des BAUKUNSTLER9, dans la région plutôt rurale du Voralberg en Autriche, touche du doigt les problématiques de la construction et de la culture qui sont rencontrées dans les périphéries des villes. Enfin, le troisième cas d’étude principal portera sur le rôles des architectes dans le jeu d’acteur mis en place par la réflexion périurbaine. La démarche BIMBY10 nous aidera à illustrer une nouvelle façon de démarcher afin de mettre en valeur les qualités et les richesses du patrimoine périurbain.

5 INTRODUCTION

à la densité ont donc vu les territoires urbains s’étendre sur la campagne. Les lotissements se sont donc installés petit à petit autour des villes afin de répondre à une demande de logement hors de la ville, nouveau mode de vie qui instaure une nouvelle pensée du territoire : on ne veut plus vivre là où l’on travaille. L’étalement urbain, le fait qu’un habitant supplémentaire consomme d’avantage d’espace que ses prédécesseurs, se met en place. Le dogme de « la maison à soi » devient le premier désir des français puisqu’aujourd’hui, 56% des français admettent vouloir vivre dans une maison individuelle isolée, 20% dans une maison individuelle dans un ensemble pavillonnaire et 11% dans un petit habitat individuel de centre ville4. Il s’agit alors de relever et de comprendre les grands facteurs qui ont porté la périurbanisation. Nous questionnerons donc l’importance de l’automobile et du déplacement ainsi que l’impact que l’activité commerciale et immobilière, au sens économique du terme, ont eu sur l’artificialisation des sols des périphéries urbaines pour mettre en lumière le rôle des acteurs politiques, commerciaux et de l’aménagement dans le phénomène de périurbanisation.


Avec ces nouvelles façons de voir le rapport entre architecture et territoire, l’architecte serait à même de prendre une place au coeur du débat de l’aménagement du territoire périurbain en révélant ses capacités d’actions et ses qualités spatiales. Il paraît en effet compliqué de tourner le dos à des espaces qui occupent aujourd’hui plus du quart de la surface de l’Union Européenne et dans lesquels vivent en France 40% de la populationx. Mais avant de chercher des solutions, essayons de comprendre comment se sont construits ces territoires et à quelles questions ont-ils voulu répondre à la fin des années 60.

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« La modernité a construit dans les périphéries en dix ans, de 1970 à 1980, plus qu’elle n’a construit en un siècle. » Yves Chalas

1. POLITIQUES D’AMÉNAGEMENT QUI ONT CRÉÉ LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DU PÉRIURBAIN


Aujourd’hui, la France se retrouve confronté aux problèmes de ses territoires gagnés sur la nature. Si le faubourg constitue la première couronne des périphérie urbaine, les banlieux la deuxième, le périurbain représente aujourd’hui l’essentiel des problématiques de la diffusion territoriale des villes. Comme nous allons le voir, le périurbain a été pendant de longues années une ressource pour répondre aux crises de logement, aux exodes ruraux et urbains. Mais aujourd’hui, force est de constater les limites de la ressource et donc de porter un regarde différent sur le phénomène afin que les problèmes générés par ces territoires deviennent des solutions. Il s’agit de prendre conscience de ce que l’on a construit, pourquoi, comment, par quels moyens afin d’en faire sortir des imageries positives et durables.

1.1 QUELLES PROBLÉMATIQUES ? 10

La politique des Grands Ensembles comme réponse à la crise du logement Cette politique des Grands ensembles s’inscrit donc très bien dans l’idéologie de production de logements en masse ainsi que dans le dopage que les entreprises de Travaux Publics obtiennent grâce à la reconstruction. Ainsi, l’industrialisation de la construction permettra de construitre près d’un million de logement en 20 ans. En revanche, ce type d’habitat hors d’échelle humaine met de côté certaine qualités de vie, participe à la ségrégation spatiale sur le long terme et révolutionne considérablement les paysages urbains ou périphériques des villes. Face aux premiers constats d’échec de cette politique, Olivier Guichard12, alors Ministre de l’Équipement-Logement-Tourisme, propose en mars 1973 une circulaire qui stoppe la production des Grands ensembles13. La circulaire Guichard est ainsi introduite par ce texte: Après les efforts considérables accomplis pour augmenter la production massive de logements neufs, il est aujourd’hui indispensable de répondre plus efficacement aux aspirations à une meilleure qualité de l’habitat et de l’urbanisme, et de lutter contre le développement de la ségrégation sociale par l’habitat. La présente directive définit quelques règles simples en matière d’urbanisme et d’attribution des aides au logement; ces règles doivent contribuer: A empêcher la réalisation des formes d’urbanisation désignées généralement sous le nom de «grands ensembles», peu conformes aux aspirations des habitants et sans justification économique sérieuse; A lutter contre les tendances à la ségrégation qu’entraine la répartition des diverses catégories de logements entre les communes des agglomérations urbaines. L’homogénéité des types et des catégories de logements réalisés, la monotonie des formes et de l’architecture, la perte de la mesure humaine dans l’échelle des

Il est alors indispensable de répondre plus efficacement aux aspirations à une meilleure qualité de l’habitat et de l’urbanisme Nous sommes ici à un tournant majeur des politiques d’aménagement qui vont alors favoriser le logement individuel en réponse au phénomène d’éxode urbain qui s’installe au début des années 70. En effet, la vogue de l’environnement de la fin des années 60 amène une part de la population citadine à se retourner vers un rapport plus proche à la nature et à la maison individuelle. Comme nous l’avons vu dans l’introduction, la « maison à sois », est le premier désir des français. La pression financière des centres-villes ainsi que ses nuisances vont alors amener ses habitants à quitter les coeurs urbains pour s’installer dans les périphéries. Le cadre de vie y est meilleur car plus proche d’un cadre naturel et ses territoires permettent un établissement de la maison individuelle bien plus facile pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la densité du bâti est bien moindre comparée à un coeur urbain, l’espace est donc disponible. Ensuite, le foncier y est moins cher et permet l’accession à la propriété avec une maison et un jardin. La maison et le jardin représente l’idéal en terme de qualité de vie Si l’exode rurale en place depuis le début du XX° siècle a vu les jeunes populations quitter les campagnes pour rejoindre l’activité urbaine et a ainsi participé au vieillissement des zones rurales, le phénomène s’inverse au début des années 70. Les jeunes ménages, les couples ayant un enfant cherchent à s’éloigner des nuissances de la ville afin de migrer vers les périphéries. L’idée est de trouver un territoire, un espace calme, plus propice à une vie de famille. Certains parleront alors des territoires périurbains comme territoires d’élevage des enfants. Le périurbain devient dans l’imaginaire commun, l’espace de la famille avec une moyenne de trois jeunes pour deux personnes âgées. Pour Pascal Legué15, la maison individuelle est une traduction socio-économique positive, qui se doit d’être en propriété et isolée sur son terrain16. Ainsi, de la même manière que les Grands ensembles ont transformé les paysages périphériques des villes, l’éxode urbain et la recherche de sa propre maison va modifier des territoires qui vont devoir acceuillir cette nouvelle population. L’étalement urbain s’installe et, à l’image du modèle américain aux quartiers formés par un amoncellement de pavillon/jardin/piscine, les périphéries des villes sont bouleversées par ce nouvel immobilier idéal. Il s’agit alors de comprendre quels sont les facteurs qui ont porté cet étalement et ont en quelque sorte fait exploser la distance entre la frontière urbain/rural et le centre-ville depuis le début des années 70.

11 POLITIQUES D’AMÉNAGEMENT QUI ONT CRÉÉ LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DU PÉRIURBAIN

Á la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, une crise du loagement s’installe en France suite aux destructions considérables du parc immobilier dûes aux combats. Afin de palier à cette crise, l’État français décide de suivre une nouvelle politique d’aménagement, la politique des Grands Ensembles11. La France est d’ailleurs le seul pays capitaliste occidental à suivre cette politique puisque la Grande-Bretagne ou les pays scandinaves, pour ne citer qu’eux, vont choisir la construction de cité-jardin, d’immeuble bas et de maisons individuelles isolées ou en bande.

constructions ou des ensembles eux-mêmes, l’intervention d’un maître d’ouvrage, d’un architecte ou d’un organisme gestionnaire sur de trop grands ensembles ne favorisent pas une bonne intégration des quartiers nouveaux dans le site urbain, ni celle des habitants nouveaux au sein de la commune qui les accueille14. Cette introduction révèle bien les constats de l’échec des Grands ensembles et souligne un début de sensibilisation en terme de qualité de vie et d’aménagement du territoire.


1.2 QUELS FACTEURS ONT PORTÉ CE PROCESSUS ? Outre la politique des Grands ensembles, les années 60 voient apparaître l’ère des ‘’zones’’. Pour répondre à la question de l’aménagement du territoire, l’Etat créé toutes sortes d’acronymes visant à définir différentes zones d’actions selon leurs besoins ou leurs devenirs.

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De 1959 à 1967, les Zones à Urbaniser en Priorité (ZUP) permettent par procédure administrative de créer des nouveaux quartiers indépendants en terme d’usages quotidien afin de répondre à la demande de logement. Cette procédure permettra de maîtriser le développement urbain afin d’éviter les problèmes rencontrés dans l’entre-deux-guerres, période durant laquelle la crise du logement a tenté de se résoudre, déjà, par des lotissements de banlieue. En effet, si le terme de périurbanisation n’apparaît qu’au début des années 70, l’entre-deux-guerres voient déjà les populations ouvrières tendrent vers l’image de la maison-jardin par l’achat de parcelles à des spéculateurs. Le problème est alors que ces parcelles ne sont pas viabilisées et laisse en 1946 la moitié des logements en France sans eau courante, insalubre et surpeuplé. Les ZUP sont ainsi un réel moyen de maîtrise de la construction du logement. Mais suite au début de l’échec des Grands ensembles, les collectivités publiques et les promoteurs privés deviennent réticents à l’égard des ZUP. Ainsi, en 1967, le terme ZUP est remplacé par ZAC, Zone d’Aménagement Concertée, pour tenter de re-dorer le blason des opérations d’aménagement. De la même manière que les ZUP, les ZAC sont, à l’époque, indépendantes de tous documents de plannification de l’urbanisme. Ce n’est qu’en 1976 qu’elles devront s’adapter au Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme français tout en gardant une certaine autonomie grâce aux Plans d’Aménagement de Zone (PAZ) qui leur permet de s’affranchir des PLU des communes. Nous verrons plus tard comment la circulaire Guichard a quelque peu ré-orienté les ZAC vers une pensée de la maison individuelle en tant que marche à suivre pour l’aménagement des nouveaux territoires d’acceuil périphériques. L’ère des zones s’installe et plante le décor de la périurbanisation Mais avant cela, remarquons que cette idéologie du territoire n’est pas sans rappeler celle de l’architecte Le Corbusier17 qui en 1933 propose un modèle de ville rationnelle formée par un découpage fonctionnel définit par la vie, le travail, les loisirs et les infrastructures routières. Ce découpage est imaginé suite à une vision avant-gardiste sur l’hégémonie que prendra la voiture. Malgré une vision radicale et utopique, Le Corbusier n’était finalement pas loin de la vérité. En effet, lorsque l’on porte aujourd’hui un regard sur le fonctionnement des territoires périurbains en France, l’avénement de la voiture se constate de façon primaire avec près de 12000 km de réseau autoroutier en 2014 alors qu’il n’y en avait que 200 au début des années 60. Si l’exode urbain a favorisé le développement automobile, l’automobile a aussi permis l’exode urbain. Grâce à cette locomotion, les personnes qui le souhaitent peuvent quitter les coeurs urbains afin de rejoindre un espace de vie plus paisible tout en restant facilement connecté à leur lieu de travail. Pierre Merlin18 parle de «banalisation


de l’automobile, qui permet de vivre à la campagne et de travailler en ville »19. Afin de faciliter ces nouveaux déplacements quotidiens, échangeurs, bretelles et rocades tapissent le territoire français. Puis un second niveau de réseau routier s’installe avec comme image emblématique les enfilades de rond-points. Les modes de vie changent et l’on entre petit à petit dans une «ville-mobile»20, notion défendue par Yves Chalas et Jean Viar21, c’est-à-dire une ville dans laquelle les déplacements rentrent dans la normalité de la vie et deviennent même une nouvelle manière d’utiliser le territoire au quotidien22. D’un point de vue politique, la loi Pasqua de 1998 dit que tout citoyen doit se trouver à moins de quarante-cinq minutes d’une entrée et d’une sortie d’autoroute. Elle illustre bien cette idée de mobilité au coeur des nouveaux usages du territoire.

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Ill. 1: Carte du réseau autoroutier en France entre les années 60-70, 70-80, 80-90, 90-2000, David Mangin, 2004

Les hommes s’éloignent de la ville Ce quadrillage de réseau viaire devient un territoire propice à l’action commerciale de grands groupes qui, attirés par un prix du foncier faible, positionne leurs enseignes de manière stratégique. Flux de voitures et zone de chalandise sont étudiés afin d’accroître l’impact des zones commerciales sur le quotidien des citoyens. Construits en périphérie des coeurs urbains, ces zones touchent d’abord les consommateurs de ces coeurs en attendant l’arrivée des lotissements. L’étalement urbain est en place, l’artificialisation des sols s’accroît par la philosophie du ‘’no parking, no business’’. Dans leur film Le grand soir26, Benoît Delépine et Gustave Kervern27 mettent en place une comédie dramatique dans une zone commerciale qui révèle, de façon certes caricaturale, la manière dont ces espaces sont utilisés, perçus et instaures de nouvelles façon de vivre ainsi que de nouvelles centralités. Quelles sont alors les qualités mais aussi les limites de ce nouveau Meccano urbain ? Comment cette nouvelle approche quotidienne du territoire va-t-elle permettre de développer un nouvel idéal urbain ?

Comme nous l’avons vu précédemment, la qualité première du phénomène de périurbanisation est de répondre à de nouveaux modes de vie. Le retour à un environnement plus naturel, plus agréable, plus sécuritaire car éloigné du stress et des nuissances urbaine amène des populations à s’éloigner de la pression urbaine. Cet éloignement est alors synonyme d’un nouveau mode de vie. Si le modèle traditionnel des villes occidentales s’appuyait sur la sédentarisation et la concentration des usages quotidiens dans un centre-ville, il est aujourd’hui plus question d’une société contemporaine mobile ouverte à une quotidienneté en mouvement. On préfère un cadre de vie d’habitat plus agréable à la proximité des services. L’autonomie de se mouvoir dans un territoire grâce à la voiture rend à l’homme le droit de choisir individuellement là où il habite, là où il se divertit, là où il se cultive, là où il se dépense.Cet éclatement spatial des activités ouvre la porte à une nouvelle quotidienneté et donc une nouvelle société. Dans le modèle traditionnel, le lieu de travail était déterminant du lieu de vie, on vivait là où l’on travaillait. Aujourd’hui, la périurbanisation est presque synonyme de nomadisation de la société. L’autonomie de se mouvoir dans un territoire grâce à la voiture De 1950 à aujourd’hui, la distance quotidienne parcourue par un français a été multiplié par 9 en passant de 5 km à 45 km28. Jean Viard explique ce phénomène par un bouleversement entre le temps de travail et le temps libre dans son livre Nouveau portrait de la France29. Nous passons moins de temps au travail et avons donc plus de possibilité pour utiliser le territoire. Ce rapport temporel travail/temps libre influt directement sur le changement sociétal engagé au cours du XX° siècle. Avant, la société tournait autour du travail, les relations hors travail étaient directement liées à celui-ci. La mixité des échanges et des rencontres étaient moins permises, pas dans le sens proscrites, puisque chaque milieu professionnel avait sa « propre société ». Avec l’idée du déplacement généré par une nouvelle utilisation du territoire, le lieu de travail devient secondaire au lieu d’établissement du cadre de vie. Ainsi, on ne fait pas forcément du sport avec un collègue de travail et on ne fait pas ses courses là où l’on se cultive. Une nouvelle mixité sociale apparaît. L’exemple le plus concret est celui des centres commerciaux expliqué par Yves Chalas. Le périurbain crée de nouvelles centralités Là où la culture urbaine classique Européenne fait rimer centralité avec patrimoine, les nouveaux territoires périphériques voient des espaces devenir centre par effet de masse et par un brassage socio-économique. Les zones commerciales, à l’image du film Le grand soir, sont l’illustration d’une grande mixité sociale puisque des consommateurs de tous horizons, de toute couche sociale, de toute culture, se croisent et s’admettent mutuellement dans une espèce de compromis de coexistence, voire même d’aménité sociale, qui n’est pas sans rappeler ce qui fait l’attrait des centres-villes traditionnels30. Centres-villes

15 POLITIQUES D’AMÉNAGEMENT QUI ONT CRÉÉ LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DU PÉRIURBAIN

Dans L’Invention de la Ville23, Yves Chalas explique que la mobilité acquiert une telle importance car elle a la force de raccourcir les distances d’un point de vue temporel alors que celles-ci augmentent spatialement. Et il est bien une activité qui a alors senti la capacité de ces nouveaux réseaux à recevoir de nouvelles infrastuctures intégrées aux flux de ces mobilités: l’activité commerciale. En effet, si les hommes s’éloignent de la ville, ils s’éloigent aussi d’un certain confort de proximité. En 2003, David Mangin24 n’hésite d’ailleurs pas à donner un premier rôle à l’automobile dans le « nouveau Meccano urbain qui se met en place »25.

1.3 QUALITÉS ET LIMITES DU MÉCANISME


La périurbanisation a une empreinte environnementale très forte Ces nouvelles surfaces ont une influence considérable sur l’imperméabilisation des sols et donc un changement du fonctionnement naturel de l’environnement. Seront souvent pointés du doigt les cas d’inondations et d’érosions des sols par la non-infiltration des eaux dans la terre. De plus, artificialiser des sols est synonyme de faire disparaître les biotopes naturels donc les biocénoses et a pour conséquence de tuer des écosystèmes. La faune et la flore sont donc touchées à cause d’une population qui cherche à se rapprocher d’elles. Enfin, toujours d’un point de vue environnemental, les migrations pendulaires engendrées par les nouveaux usages du territoire ont un coût énergétique très élevés. L’accroissement du nombre de kilomètre parcourus quotidiennement avec son véhicule personnel est un facteur de pollution très important auquel les territoires périurbains doivent faire face. Ce mécanisme est alors difficile à stopper quand on sait qu’aujourd’hui, 80% des déplacements se font en voiture. En revanche, on constate que l’étalement urbain est un phénomène en perte de croissance. La distance entre la limite urbain/rural et le centre ville augmente de moins en moins vite depuis la fin des années 90. Comment réagir? La périurbanisation a créé le périurbain, mais quelles sont les caractéristiques de ce tissu qui peuvent être aujourd’hui matière à penser. Tentons maintenant de mettre en lumière les différentes échelles d’action qui ont tissé le périurbain afin d’en relever des réponses potentielles aux questions que posent ces territoires.

17 POLITIQUES D’AMÉNAGEMENT QUI ONT CRÉÉ LES CONDITIONS D’ÉMERGENCE DU PÉRIURBAIN

traditionnels qui, sous l’effet de la périurbanisation, se désengorgent que se soit fonctionnellement ou démographiquement. De la même façon que les zones commerciales, les espaces communaux et conviviaux, les zones de tris et de décheteries, les complexes de loisirs (piscines, stades etc ...) ou les abrisbus rentrent dans la logique du déplacement et des nouvelles mixités. Ils sont construits dans le périurbain afin de toucher les nouveaux flux quotidiens de population et d’avoir un rayon d’influence plus grand que celui de la commune. Mais si le phénomène de périurbanisation est une réponse qualitative à l’éxode urbain ainsi qu’un déclancheur de nouvelles sociétés plus modernes et adaptées aux nouvelles mobilités quotidiennes, il n’en est pas moins livré à la critique. Malgré l’apparition de nouvelles mixités sociales, les territoires périurbains sont confrontés à une ségrégation spatiale: un espace pour habiter, un espace pour acheter, un espace pour se divertir, un espace pour manger ... La liberté de choix de l’usager est grande mais cette liberté s’installe sur un territoire de plus en plus vaste voué à la domination du déplacement individuel. Relevons alors un paradoxe de la périurbanisation. Si ce phénomène s’installe suite au besoin des hommes de se rapprocher d’un cadre de vie plus végétal loin du minéral urbain, il faut noter que l’étalement urbain résulte de l’artificialisation des sols périphériques des villes. Ce phénomène a donc une empreinte environnementale très forte. L’artificialisation des sols ne s’arrête pas au simple terrassement du terrain pour une maison acceuillant de nouveaux habitants mais elle inclut aussi tous les réseaux qui permettent de viabiliser un terrain de construction. Ainsi, d’après l’Institut français de l’environnement, les surfaces artificielles augmentent trois fois plus vite que la population. En France, sur une période qui s’étend de 1982 à 1999, la population a augmenté de 8% tandis que les surfaces artificialisées bondissaient de 42%.


« Le pavillon se distingue de la maison par son détachement affirmé de la ville. » Daniel Pinson

2. CONSTITUTION DU TERRITOIRE PÉRIURBAIN: GÉNÈSE ET NATURE


2.1 UNE SPATIALITÉ SYMBOLE DE LA PENSÉE PÉRIURBAINE Sortons un instant du cadre politique et décisionnaire du périurbain pour s’orienter vers la formalisation concrète de ces territoires. Comme nous l’avons vu précédemment, la recherche de territoires plus propices à l’établissement d’une vie dans un cadre plus agréable amène au développement d’un nouvel idéal urbain. Son terrain, sa maison, son jardin et pourquoi pas sa piscine. L’étalement urbain est une réponse à cette demande car il permet de créer de toute pièce cet idéal et donc des formes d’urbanités spécifiques. Passons ainsi de l’échelle territoriale à une échelle plus urbaine. L’habitat individuel devient une stratégie de logement de masse

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Les croquis de David Mangin31 sur les différentes formes de lotissement illustrent très bien ce décrochage formel du lotissement. Lorsqu’on regarde ce qu’est un lotissement aujourd’hui, il est difficile d’en parler comme d’un habitat rural ou comme d’un habitat urbain. Le tissu généré par cette pensée d’ex-croissance urbaine ne s’inscrit pas dans une pensée urbaine mais se lit comme une superposition d’espaces individuels sans aucune relation spatiale. Pourquoi? Il n’y a pas eu de pensée urbaine dans la construction de ces lotissements, l’importance étant d’offrir une maison individuelle et d’optimiser l’espace au maximum. Cela crée une certaine monotonie spatiale par copiercoller d’espaces. La rue, la haie ou le muret, le portail, l’allée. Chaque habitant à sa propriété individuelle comme il la voulait en quittant les nuissances du centre. Finalement, le lotissement tente de résumer formellement les trois attentes des populations qui migrent vers les périphéries: se rapprocher de la nature, revenir vers une manière d’habiter proche du village mais aussi acquérir son terrain sur lequel ont batî sa maison.

Tout d’abord, le lotissement communal qui résulte de la viabilisation, du découpage ainsi que l’assurance de la constructibilité d’un terrain par la commune. Les terrains sont ensuite vendus sous forme de lots libres à des particuliers qui ont alors le choix pour construire leur maison entre maîtres d’oeuvre, artisans ou architectes. Ensuite, le lotissement privé, qui est la procédure la plus répendue, tend vers une stratégie globale de construction. Des promoteurs-constructeurs rachètent des parcelles privées, les redivisent après viabilisation et les vendent à des particuliers, ou bâtissent eux-même les maisons dans le cadre d’opérations d’ensemble; le dessin du plan masse de l’opération étant assuré par le promoteur et les géomètres. Enfin, la troisième

La nature

L’individualisation

L’individué L’offre

Le village Ill. 2: Photo aérienne d’un lotissement au Nord-Est de Paris

Ill. 4: Croquis de la construction d’un lotissement en terme d’offre et de demande, David Mangin, 2004

Dit comme cela, construire sa maison renvoie vers l’image du choix de la forme de son habitat, je veux ce plan, cette façade, ce matériau etc ... Mais l’architecture périurbaine ne renvoie finalement pas à l’image de la liberté de conception et de forme.

CONSTITUTION DU TERRITOIRE PÉRIURBAIN: GÉNÈSE ET NATURE

Ill. 3: Croquis des différentes formes de lotissement et accroches au tissu existant, David Mangin, 2004

La demande

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Le rêve de ces populations qui viennent s’installer aux franges des villes est celui du pavillon. Si le pavillon résonne à l’échelle individuelle et architecturale, il a son corollaire urbanistique qui est le lotissement. En France, 80% des lotissements sont implantés en périphérie. Les nouveaux habitants des territoires périphériques vont radicalement restructurer ces espaces en créant un nouveau tissu. Chacun veut la même chose. Il s’agît alors d’offrir à tout le monde la même réponse à sa demande. L’amoncellement de maisons individuelles crée des lotissements car il rentre dans une stratégie de logement de masse. La construction de ces lotissements est en tout point éloignée de la mise en place d’un tissu urbain. En effet, il s’agît, en utilisant le nouveau réseau viair présenté précédemment, de construire un réseau secondaire (viair et flux) afin d’implanter de l’habitat individuel en masse. Là où la construction de la ville s’est appuyée sur des axes existants, le périurbain se construit par la création d’axes qui permettent de viabiliser un terrain. La logique est alors completement différente. Il existe trois types de lotissements.

procédure est celle du lotissement aménagé qui s’inscrit dans le cadre de vastes opérations liées à des projets tertiaires ou de loisirs destinés à des populations plus favorisées. Dans les trois cas, la logique d’agencement des voies qui irriguent les parcelles répond à une économie de Voirie et Réseaux Divers et d’espaces publics. En effet, le lotissement illustre un individualisme fort en terme d’habitat. La parcelle constructible doit être facilement desservie et elle doit recevoir tout l’aménagement que projète l’habitat individuel: la maison, le parking, le jardin. L’objectif est de densifier un maximum le commun afin de laisser le plus de place à l’individuel. C’est à ce moment que l’image éternelle de la raquette de retournement pour les voitures ou la multitude d’impasse que créer un lotissement intervient. Le lotissement est une poche urbaine que l’on ne traverse pas en milieu diffus. Une forme d’enclavement s’installe alors puisque cette procédure d’intervention entre dans un réseau fermé, tant d’un point de vue formel que fonctionnel.


2.2 UNE ARCHITECTURE STANDARD: LA MAISON CATALOGUE La maison individuelle, le pavillon. Si Pascale Legué distingue de façon socio-économique ces deux termes, ils continuent d’illustrer ce besoin de s’éloigner de la ville. La maison individuelle est, dans l’imaginaire commun, synonyme de propriété, de privilège paysager.

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Nous avons vu qu’habiter en zone périurbaine amène à vivre dans un lotissement. Le lotisseur propose le terrain constructible, la maison est ensuite bâtie au centre de la parcelle individuelle. C’est à ce moment là que se joue l’identité architecturale du périurbain. La maison individuelle est, depuis les années 70, advenue en tant que logement de masse. Il faut donc construire vite, de façon efficace et économique. Les promoteurs-constructeurs s’emparent de l’architecture de ces maisons en construisant par lôts des maisons identiques. Il faut faire du clés en main, la maison devient un produit. On tartine du lotissement au kilomètre32 et donc de la non-architecture. De la même manière que le lotissement se décroche du tissu existant, l’architecture des maisons périurbaine est en grande majorité dénuée de toute réflexion formelle et située. Elle répond primairement aux besoins d’une maison traditionnelle et permet aux nouveaux habitants de s’installer rapidemment dans leur nouveau chez soi. Et la manière de pensée la construction est la même partout. La rupture architecturale avec la ville ancienne, avec les identités régionales se constatent sur chaque lotissement français. La personnalisation plastique extérieure de la maison est difficile du fait que les promoteurs se soient emparés du marché. Un paradoxe est alors important à relever. Malgré l’envie d’un chez soi, l’habitant du périurbain s’installe sur un territoire privatisé qu’il ne maîtrise pas car il n’a pas été impliqué dès l’origine de son aménagement. Habiter un espace qui n’est pas pensé pour soi Deux pistes sont alors à explorer. Premièrement, l’habitant s’installe dans une maison qu’il a choisi comme sur un catalogue. Cette maison est bâtie par un constructeur, elle est identique à sa voisine. Nous sommes alors dans un cas majoritaire en France que nous avons vu précédemment qui est celui du lotissement privé. Cette maison est la cause de l’homogénéisation de l’architecture car elle ne découle pas d’une pensée architecturale. Elle répond strictement aux normes des PLU, se monte en parpaing, propose une spatialité limitée à la simple fonction, prend place au centre d’une parcelle sans penser à l’optimisation de la surface de construction. Plastiquement, le crépis est choisi sur un éventail de couleur allant du blanc cassé au rose saumoné en passant par le jaune soleil. La porte fenêtre pour le salon, la fenêtre pour la chambre, le hublot pour la salle de bain, chaque façade apparaît comme un prototype que l’on a collé sur chaque élévation principale. Il n’y a pas de devant/derrière, de dialogue avec l’extérieur, de cadrage de vue. La pensée n’est pas esthétique mais fonctionnelle et économique. S’ajoute à cela les normes environnementales et, comme le dit Rudy Ricciotti33, on se met à construire de la même manière dans le Sud et dans le Nord de la France34. Il n’y a aucune reflexion sur le contexte, sur l’environnement dans lequel l’habitat s’instaure.


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Deuxièmement, le cas qui s’apparente plus à un lotissement communal, le futur propriétaire achète un terrain viabilisé à la commune et bâti sa maison soit en la dessinant lui-même puis en engageant un constructeur, soit en faisant appel à un architecte. En France, l’intervention d’un architecte est obligatoire pour une construction neuve d’une surface supérieure à 170m2 pour obtenir un permis de construire. Cette loi fait qu’aujourd’hui, sur les 150000 à 200000 maisons individuelles construites chaque année, seulement 5% sont conçues par un architecte. Malgré tout, il est intéressant de nuancer ce propos plutôt pessimiste par la personnalisation des espaces intérieurs typiques du périurbain. En effet, en introduction à l’idée du faire soi-même qui sera développée plus tard, l’inventivité de l’agencement des sous-sols ou des garages par les habitants révèle la richesse spatiale de ce patrimoine. Malgré l’uniformisation de l’enveloppe extérieure, Émilien Robin35 relève par le croquis la personnalisation du volume intérieur par l’implication des habitants dans leur maison. On peut voir dans ces actions une recherche fonctionnaliste pour enrichir son bien. Des actions que l’architecte doit prendre en compte et re-convoquer dans sa création d’espace. Si l’habitant cherche à personnaliser son intérieur, l’architecture aurait pu éviter l’uniformité et pourrait positionner les envies de l’habitant à l’origine de tout projet. La culture de l’architecture ne va pas de soi Que ce soit un constructeur ou un particulier, l’architecture n’est pas un acquis. Reproduction de ce qui marche, de ce que l’on a vu chez un ami ou dans un catalogue, la maison est éloignée de toute sensibilité formelle et ne profite finalement que très peu de ce que pourrait lui apporter le territoire périurbain. Les puissances publiques ont bien essayé de résoudre ce problème d’homogénéisation et discontinuité architecturale avec les centres-anciens en instaurant des Plans Locaux d’Urbanisme afin de maîtriser esthétiquement les nouvelles constructions. Les architectes des Bâtiments de France proposent des architectures aux traits régionalistes afin d’inscrire les maisons dans leur cadre. Mais la rupture reste totale. Dans son livre La ville franchisée36, David Mangin explique cela comme un équilibre instauré par les autorités publiques entre le délaissé de la continuité de l’espace public en faveur des aménageurs et l’homogénéisation de l’architecture: (...) l’autorité publique, largement démissionnaire face à sa responsabilité au regard de la continuité de l’espace public, compense en revache avec l’architecture des maisons, là justement où elle devrait accorder plus de libertés. (...) Les citations, pastiches régionalistes ou enduits passepartout s’imposent dans un consensus mou, tandis que le choix de la densification de parcelles bâties ou l’hétérogénéité y compris simplement des matériaux devient une gageure.37 Finalement, il faut maintenant tenter de contrer les procédures d’aménagement en place par un semblant de prise de conscience urbaine et architecturale. Les procédures et réglements actuels sont en effet des freins pour celui qui voudrait produire de l’originalité, personnaliser extérieurement son logement ou apporter une exception architecturale. Mais comment des acteurs qui n’ont aucune, sinon très faible, culture de la forme et de l’espace peuvent être les moteurs d’un changement des modes de pensées de la construction périurbaine? Des acteurs qui sont de plus à la base de cette idéologie ‘‘urbaine’’, qui ont porté ces territoires et permis au domaine privé de mettre la main sur le marché de l’habitat en milieu périurbain.


2.3 UN RÉSEAU D’ACTEURS ... SANS ARCHITECTE

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L’architecte a une place importante par décision politique En 1981, François Mitterrand39 est élu président de la République sur fond de mise en valeur de la mémoire rurale. Il illustre parfaitement ce changement de mentalité en terme de politique d’aménagement et ce besoin de retrouver un rapport plus proche à la nature et à la campagne. Les premiers acteurs sont donc bel et bien politiques.

Ill. 5: Affiche de la campagne présidentielle de François Miterrand, 1981, réalisé par l’agence Euro-RSCG

Pendant très longtemps l’urbanisme a été une affaire d’Etat en France40, Thierry Pacquot relève bien ce rôle des acteurs politiques. Mais c’est en 1983 que la

La décentralisation a donné le pouvoir aux maires et donc au privé Tout d’abord, pour palier à l’exode rural, les communes font construire des lotissements afin d’accueillir de nouveaux arrivants. Ces derniers sont des jeunes ménages avec un ou deux enfants et qui permettent donc d’éviter les fermetures des écoles. Mais lorsque les enfants grandissent et quittent le lotissement, la commune en construit un autre pour acceuillir de nouvelles familles et ainsi de suite. Cette répétition de la construction rentre dans un processus de rapidité d’intervention et d’économie financière. Les constructeurs et promoteurs l’ont bien senti et s’emparent du marché en proposant leurs services aux communes. À partir de là, l’architecte perd le rôle qui lui a été conféré dans la circulaire Guichard puisque face à une demande de logements individuels de masse, il lui est difficile de contrer le secteur privé. De la même manière, lorsqu’il s’agit d’un particulier qui a acheté son terrain à la commune, la surface maximum constructible sans l’intervention d’un architecte étant de 170m2, l’architecte a un très faible territoire d’action. Combien de maison de lotissement excède les 170m2 ? Très peu. Et puis, économiquement parlant, le particulier aura plus de raison de se tourner vers un constructeur que vers un architecte. C’est pourquoi l’architecte est très peu présent dans les jeux d’acteurs et d’intérêts qui permettent au périurbain de se construire, aux zones d’habitats pavillionnaires de s’étendre et à l’uniformisation de l’architecture de s’installer sur tout le territoire. Aujourd’hui, de la même manière que nous avons constaté l’échec de la politique des Grands Ensembles, nous apercevons les limites du modèle périurbain actuel. Il semblerait alors intéressant pour les architectes de s’immiscer dans un marché qu’ils ont délaissé puisqu’il lui tournait le dos. L’architecte a la possibilité de trouver un rôle dans la réflexion sur notre patrimoine périurbain, tant sur le plan urbain et architectural que d’un point de vue administratif et politique. Finalement, il doit retrouver la place que la circulaire Guichard lui a donné en 1973 mais que d’autres lois lui ont enlevé par la suite.

27 CONSTITUTION DU TERRITOIRE PÉRIURBAIN: GÉNÈSE ET NATURE

Les échelles urbaines et architecturales proposent de rentrer formellement dans le périurbain. Or, il est important de relever une troisième échelle dans la construction du périurbain. Physiquement invisible, l’échelle des jeux d’acteurs et d’intérêts est à la base de l’urbanisation des territoires périphériques. Faisons un retour en 1973 lorsque la circulaire Guichard met fin à l’idéologie des Grands Ensembles. Nous avons vu dans la première partie que cette circulaire est le premier facteur à avoir porté la périurbanisation. Si l’on zoom son influence non pas sur le processus mais sur la formalisation du périurbain, ce texte est un premier bouleversement en matière de politique d’aménagement. En effet, il va mettre en avant la construction de maisons individuelles comme un nouveau modèle à privilégier face à l’habitat collectif, social ou locatif. L’objectif est bien d’orienter la production de l’habitat vers l’accession à la propriété. De plus, les Grands Ensembles ont été un échec formel puisque hors échelle humaine. C’est pourquoi la circulaire insiste aussi sur la sensibilisation à l’architecture et donc sur le rôle de l’architecte dans la production du périurbain: Le renouvellement et la diversité de l’architecture doivent être assurés, spécialement dans les constructions aidées. Vous encouragerez les maîtres d’ouvrage à faire appel aux techniques et aux concepts qui permettent de rompre avec l’uniformité et la monotonie, et les maîtres d’oeuvre à exprimer leur imagination et leur talent. Vous éviterez de financer des programmes de plus de 500 logements aidés qui feraient appel, sur un seul site, à un même architecte.38 Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’architecte a une place importante à prendre dans la construction de ces nouveaux habitats et ce, finalement, par décision politique. Alors pourquoi aujourd’hui seulement 5% des maisons individuelles construites chaque année l’on été à l’aide d’un architecte ?

bascule intervient avec les lois de décentralisation. En effet, avec ces lois, l’État transfère des compétences administratives aux collectivités locales et délègue ainsi la fabrication de la ville; donc du périurbain; aux communes et aux maires. Là où l’État a commencé à se mettre au service du privé au début des années 80, les collectivités vont alors faire la même chose pour la construction de leur périurbain. La décentralisation a donné le pouvoir aux maires pour ce qui est de l’aménagement du territoire, des permis de construire et donc de l’habitat. Or les maires, les élus de manière général, sont totalement incompétents en matière d’urbanisme, et de plus ont un goût exécrable41. Thierry Pacquot pointe du doigt la décentralisation dans le sens où elle a laissé orphelines les communes et ouvert la porte du marché de l’habitat individuel aux constructeurs et promoteurs. Car la construction de ces territoires va devenir un raisonnement économique pour les communes afin de répondre à l’exode rurale ainsi qu’à l’exode urbain.


« Les architectes pourraient réfléchir à une offre nouvelle de produits immobiliers capable de s’adapter aux contraintes singulières des clients et caractéristiques spécifiques des terrains. » Émilien Robin

3. L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN


Par sa connaissance et sa maîtrise de l’espace, de la forme, des relations du plein et du vide, l’architecte a une légitimité de réflexion et d’intervention sur le territoire périurbain. Cette phrase semble enfoncer une porte ouverte mais n’est pas anodine au regard de l’implication des architectes dans la construction de ces territoires. Nous savons pour quelles raisons ils n’ont pas été présent sur le marché de l’habitat individuel en tant que stratégie de logement de masse. Mais aujourd’hui, il semble que l’architecte a un statut à retrouver quant au développement futur des périphéries urbaines et du tissu diffus.

Amsterdam est confrontée à une forte demande de logement et va utiliser ces délaissés urbains comme territoire de projet. Le site est donc la troisième extension des docks d’Amsterdam. Privé, il a fait l’objet de nombreuses spéculations financières et projectuelles depuis les années 70 avant d’être finalement vendu à la ville. C’est ensuite un programme gouvernemental qui a designé ces espaces comme des zones résidentielles, entre 1978 et 1982. C’est en 1989 que la décision est prise de penser Borneo et Sporenburg comme un projet global. The New Deal (collectif ) et le Département de la Planification Spatiale ont alors eu l’accord de la ville pour penser un plan urbain axé sur la construction d’habitats individuels denses afin de contraster avec les blocs de logement déjà en construction sur Java Island.

3.1 ÉCHELLE URBAINE: LA DENSITÉ HORIZONTALE

30

OK OK

Le lotissement a donc été la réponse la plus pertinente, économiquement et politiquement parlant, à la forte demande de maisons individuelles. Ce type d’urbanité crée un tissu lâche, à cheval entre la forte densité d’un coeur urbain et la faible densité d’un village de campagne. Or, face au constat environnementaux négatifs de l’étalement urbain, les territoires gagnés sur la campagnes doivent aujourd’hui être pensés comme de l’urbain à part entière et donc une densité propre. Il s’agît de re-penser la densité de ces territoires tout en gardant à l’esprit la demande de maison individuelle, de jardin et de tout ce qui a permis l’essort du périurbain en terme d’accomodités. Le constat des limites de ce processus étant récent, il n’y a peu, voire pas d’exemple de densification des zones d’habitats périurbaines. Le premier cas d’études propose donc de ré-invoquer une stratégie urbaine pensée à deux pas d’un coeur urbain mais qui finalement se rapproche beaucoup de la ligne à suivre pour la nouvelle densification des lotissements.

Densification linéaire

Superblocks

Superposition

Espaces publics

Le périurbain est un tissu lâche en terme de densité Le projet des docks de Borneo-Sporenburg à Amsterdam est lancé à la suite d’un constat de dégradation de certains quartiers des villes européennes tels que des anciens ports, des zones industrielles etc... Ces quartiers donnent une mauvaise image aux villes et un grand programme de réaménagement urbain a donc été mis en place dans de nombreuses villes européennes afin de réhabiliter ces zones urbaines délaissées et leur donner une nouvelle fonction. Les deux péninsules de Borneo et Sporenburg se voient délaissés de tout usage à la fin des années 80. Au cours de la même période,

OK OK

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Ill. 7: Composition du Master Plan des docks Borneo-Sporenburg

Ill. 6: Situation des docks dans la ville d’Amsterdam

Afin d’assurer la condition des 100 logements par hectare tout en ouvrant le champ de la diversité architecturale, l’agence coordinatrice West 8 a ‘‘standardisé’’ la production du logement en instaurant des règles communes de production: trois niveaux évoluant sur un maximum de 9,2m de haut, 4m

31 L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN

Ainsi, avec la contrainte de mettre en place une densité de 100 logements par hectare, une étude de faisabilité (formulée par Rudy Uytennaak, Claus en Kaan, Van Berkel & Bos, Heren 5, Holnast and Van Woerden42) a été lancé et confirma qu’atteindre cette densité avec du logement individuel sur 3 ou 4 étages est plausible. A la suite de cette étude, trois agences43 ont répondu au concours mis en place pour nominer le maître d’oeuvre qui dirigera le masterplan de l’intervention. C’est l’agence West 844 qui sera retenue par la municipalité d’Amsterdam en 1993. Si la commune a lancé l’appel à projet, ce sont bien des architectes qui prennent en main le dessin du projet global et du masterplan afin de répondre à une problématique d’habitats individuels à forte densité. L’enjeu a été de penser la densification sur deux espaces très étroits, très linéaires que sont les docks.


de large et 17,5m de profondeur. Ces 17,5m de profondeur vont engendrer une autre règle, celle du vide. En effet, des apports lumineux aux extrémités ne suffisent pas à éclairer naturellement un logement linéaire sur 17,5m. L’agence coordinatrice va donc demander un taux de vide compris entre 30 et 50% du volume totale. La mise en place de patio, de terrasse, d’entre deux pourra donc permettre un bon éclairage mais aussi, sur le plan urbain, une aération des façades donc des rues et des fronts bâtis. Aussi, ce modèle de maison permet de retrouver la demande de la maison périurbaine (individuelle, jardin, garage) dans une problèmatique d’extrême densité. L’inventivité de la densité horizontale

Ill. 8: Ré-interprétation en coupe de la maison de lotissement et de son jardin

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Ces règles communes permettent d’assurer la densité mais surtout, grâce à un découpage foncier de la trame, de diviser la production architecturale entre plusieurs architectes (deuxième maîtrise d’oeuvre). Tout en respectant les règles communes, les architectes ont une complète liberté de création. Les plus grandes parcelles provoqueront une ligne de façade très rigide tandis que la juxtaposition de petites parcelles apporteront des variations dans les fronts bâtis. L’exemple le plus frappant est le parcellaire cerné de rouge sur le plan ci-dessous. L’agence a redécoupé la bande de 17,5m de profondeur en 60 parcelles de 4m de large. Les parcelles ont été vendu a des particuliers qui, à l’aide d’un architecte, ont pu designer leur maison idéale en relation directe avec l’eau et toujours dans le cadre fixé par les règles communes. D’ailleurs, le résultat de cette diversité n’est pas sans rappeler les façades traditionnelles d’Amsterdam en bord de canal. Logements

Commerces

Bureaux

Ecoles

Sport

Médical

Restaurants

Espaces verts

Ill. 9: Plan de programmation de la réhabilitation des docks

Sans que les territoires d’interventions ne soient réellement comparables entre des docks portuaires et des périphéries de ville, les problématiques sont les mêmes. Pour aller plus loin, le périurbain est aujourd’hui confronté aux même contraintes que l’agence West 8 à Amsterdam. Il ne s’agît plus d’étendre mais

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de densifier des lotissements, de densifier le périurbain qui est un territoire restreint si on le pense comme figé en terme de surface. La réponse de la densité horizontale par les architectes est très interressante puisqu’elle a permis de construire de l’habitat individuel à forte densité tout en créant de la diversité architecturale, loin de l’image de la maison de lotissement au crépis saumon. Cette diversité architecturale peut et doit être assurée à l’échelle urbaine mais aussi à l’échelle de l’unité. De la même manière, l’architecte doit convoquer ses connaissances formelles et constructives afin de re-donner de la valeur esthétique aux territoires périurbains.

34 Ill. 10: Photo de la partie ‘‘architecture libre’’ depuis la rivière Ij

3.2 ÉCHELLE ARCHITECTURALE: CONCEPTION ET FABRICATION Lorsque l’on parle de promoteurs qui se sont emparés du marché de la construction du périurbain, il est essentiel de porter un regard sur la faible qualité architecturale de la production et de proposer des solutions en tant qu’architecte. La question des savoir-faires, de la co-conception et de la co-construction. L’objectif est d’ouvrir la culture architecturale afin de rendre plus compétent les habitants en terme d’architecture et de spatialité. La réflexion sur les savoirfaires de l’artisanat, du maçon, du bâtiment en règle général doit nourir la production de l’habitat. En accordant le penser et le faire, l’habitant et l’architecte prennent un rôle sur le marché du périurbain. La maison à soi est la valeure importante, il faut donc la penser par soi-même et à l’aide de professionnels de l’espace. Il s’agit finalement de professionnaliser ce qui ne l’est pas, d’enrichir la vision des habitants. Thierry Pacquot expose très bien cette idée du faire soi-même dans cette conversation avec Fanny Léglise pour le magazine d’A’A’: Je me souviens de la construction du pavillon d’une tante et d’un oncle, dans la banlieu parisienne, qui mobilisait toute leur énergie, leurs efforts, leurs économies, mais aussi et surtout, stimulait leur imagination. « Et votre maison ?», une farandole de rêves de déroulait devant nous ! Ils n’évoquaient que les bons côtés. (...) Une maison est imprégnée de la tenacité de ses habitants et de leurs désirs.45 À l’inverse, la production de l’habitat périurbain actuel préfère le copier/coller spatial plutôt qu’une logique d’adaptation aux futurs habitants. Et pourtant, le rêve pavillionnaire tel qu’il existe aujourd’hui continu d’attirer de nouvelles populations. Alors pourquoi ne pas ré-invoquer ce qui fait le rêve pavillonnaire


pour produire de l’architecture en zone périurbaine ? Le vocabulaire des zones pavillonnaires est très facilement transposable au vocabulaire de l’architecture: portail, garage, boîte aux lettres, parking, jardin ... L’architecte doit être le moteur de cette production immobilière en ‘‘banalisant’’ son intervention: lorsque nous sommes malade, nous allons voir un docteur; lorsque nous avons besoin d’être défendu, nous demandons un avocat; lorsque nous voulons créer de l’espace, nous devons faire appel à un architecte. Savoirs-faire, co-conception, co-construction

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Ill. 11: Plan RDC et coupe du projet de la maison-serre

Une toute autre forme mais une pensée proche, la villa en Haute-Savoie de Pierre-Alain Dupraz48 propose une architecture modulaire basée sur deux fondements du périurbain: le garage et l’industrialisation de la fabrication. Ainsi, le projet Grappe de garages est une architecture qui peut s’adapter à tout type de terrain par la duplication du module garage de 15m2. Les qualités plastiques de ces projets sont alors bien plus intéressantes que l’imagerie commune du pavillon49.

Ill. 12: Plan masse, photo de la mise en oeuvre et du projet fini, Grappe de garages

Détourner le vocabulaire spatial du périrubain

L’architecte peut agir par anticipation et devenir le souci de tous Ainsi, en 1979, les architectes Dietmar Eberle, Wolfgang Juen, Markus Koch et Norbert Mittersteiner réalisent le groupe de maisons Im Fang52 à Höchst. Toujours dans cette optique de respect de la tradition, les architectes et les futurs habitants dessinent ensemble leur unité à l’intérieur d’une ossature en bois montée par un charpentier. Les Baukünstler, celui qui possède l’art de construire au sens littéral, permettent de rapprocher l’architecture de la société civile par l’échange, la prise en main du débat et la modernisation de la tradition. C’est en 1989 que le mouvement se démocratise véritablement puisque ces jeunes architectes vont remporter tous les concours pour la rénovation des équipements publics du Voralberg53. Une troisième génération porte aujourd’hui le mouvement avec des architectes tels que Hugo Dworzak54, Oskar Leo Kaufmann et Johannes Kaufman55 (les deux derniers sont issus d’une famille de charpentiers et architectes). Il est d’ailleurs intéressant de noter que les Baukunstler sont issu d’une logique familiale lorsque l’on met en parallèle ce mouvement avec le périurbain, territoire d’accueil des nouvelles familles. Le magazine international de design Wallpaper écrivait en septembre 2000, en introduction à un dossier de dix pages : “Having scoured the globe we are unanimous in our decision to name Vorarlberg as the most progressive part of the planet when it comes to new architecture”.56

37 L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN

Regardons deux exemples d’intervention d’un architecte dans un contexte périurbain. À Coueron, en France, l’agence Fouquet Architecture Urbanisme46 a proposé une alternative à l’archétype du pavillon. En ré-invoquant tous les éléments de ce qui fait le pavillon jusqu’à la forme rectangulaire chapeautée par un toit à double pente, l’architecte requestionne complètement les logiques spatiales issues de la promotion immobilière. Le pavillon devient une maisonserre modulable, optimisant un maximum les volumes afin de passer de 158m2 habitables à 210m2 utilisables. La structure bois rentre aussi dans cette logique de co-conception et d’ouverture du monde de l’architecture à la société puisqu’elle a été en partie monté en autoconstruction par ses habitants47.

L’idée de ce propos n’est pas de plaidoyer en faveur d’une présence radicale et obligatoire de l’architecte mais d’illustrer ce que l’architecte peut apporter au débat sur le périurbain. La présence de l’architecte et de l’architecture permettrait d’ouvrir réellement les champs de compétence et de réflexion des habitants et pourquoi pas des promoteurs. Si l’architecte est aujourd’hui présent dans peu de projet, il peut devenir le garant de la qualité de la production architecturale du périurbain. C’est ce qu’il s’est passé en Autriche au début des années 80 lorsqu’un groupe d’architectes décide de rompre avec son Ordre professionnel qu’il juge trop conservateur. En quittant Vienne, ces architectes vont devenir l’emblême d’une résistance et d’une culture qui devient vecteur de l’identité architecturale. Isolée du reste de l’Autriche par la barrière de l’Arlberg mais riveraine du lac de Constance et de l’ouest européen, la région du Vorarlberg entame dans les années 80 un cycle de croissance en terme d’urbanisation et d’industrialisation du bâtiment. Face à cette croissance, comparable au changement de politique d’aménagement des années 70 en France, des architectes innovent en matière de construction afin d’assurer une pérennité de la culture et des savoirs de l’architecture traditionnelle du Vorarlberg : le bois et ses métiers, l’amour de la maison, une urbanité de bourgs. Une première génération d’architecte comme Hans Purin50 et Leopold Kaufmann51 avaient déjà, dans les années 60, réfléchi dans ce sens en axant leur architecture vers une simplicité extrême, une économie des moyens et des règles communautaires qui veulent renouer avec les traditions de l’habitat rural du pays. La deuxième génération, celle qui va mettre en lumière le mouvement des Baukünstler, va développer les principes de la première vers la recherche d’une nouvelle conception de la vie en société, par le choix d’une écologie intelligente, avec le recours aux énergies alternatives et le développement de l’habitat communautaire.


La force de ce mouvement est d’avoir tout de suite voulu prendre les rênes du débat au début du virage urbain et industriel de sa région. En alliant tradition, design et pensée constructive, ils ont réussit à toucher la populations et à intégrer la pensée architecturale dans la construction du territoire. L’architecture est devenue une question d’intérêt générale, chacun y porte attention. En intégrant la culture architecturale au plus tôt dans le débat, les Baukünstler sont entrés dans le jeu d’acteurs et d’intérêts de ces territoires comme le montre la création par le maire de Lustenau, troisième ville du Land, d’un conseil d’architectes indépendants. Plusieurs communes nommeront alors des comités d’urbanisme pour assurer la liaison entre les experts, les autorités politiques et la population. Les communes se sensibilisent à la qualité architecturale et ouvre le champ de la production aux architectes. Nous pouvons alors nous poser cette question en France: Comment les architectes peuvent-ils ouvrir leurs champs de compétences aux communes afin de trouver une place dans la réhabilitation et la densification de notre patrimoine périurbain ?

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Le 3 Janvier 1977, l’Assemblée Nationale et le Sénat adoptent et le Président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, promulgent la loi n°77-2 qui régit la profession d’architecte encore de nos jours. L’article 1 est alors introduit de cette façon: L’architecture est une expression de la culture. La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. Les autorités habilitées à délivrer le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir s’assurent, au cours de l’instruction des demandes, du respect de cet intérêt.57 Qu’en est-il aujourd’hui ? Les acteurs politiques, économiques et commerciaux ont laissé dans l’ombre les architectes lors du développement des territoires périurbains malgré les conditions posées par la circulaire Guichard de 1973 et le statut des architectes présenté dans la loi de 1977. Face à la puissance des promoteurs et des constructeurs, les architectes n’ont pas pu prendre une place importante dans les politiques d’aménagements. Si l’architecture devient une question d’intérêt général en 1977, cette loi est aussi une cause de l’absence des architectes dans le débat du périurbain suite à l’autorisation de construire sans intervention d’un architecte pour une surface neuve inférieure à 170m2. Plus que pour des raisons économiques, il semble que les politiques d’aménagement, que ce soit les Grands Ensembles ou les lotissements, se soient tournés vers le privé et la production de masse par manque de culture et de vision du territoire sur le long terme. Si la prise de conscience des limites du modèle périurbain tel qu’il a été instauré au cours des années 70-80 apparaît au début du XXI° siècle, les acteurs des territoires ne semblent pas encore se tourner vers les architectes. Alors ne serait-ce pas à l’architecte de prendre en main le débat, à l’image des Baukünstler, en s’imposant comme une solution logique et culturelle ?

L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN

3.3 L’ARCHITECTE, UN ACTEUR AU COEUR DES INTÉRÊTS HABITANTS, ARCHITECTURAUX ET POLITIQUES


L’architecture est une question d’intérêt général

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Miser sur l’individu et l’épargne foncière du périurbain

Ill. 13: Exemple de stratégie de division parcellaire en plusieurs phases

La démarche se base sur un calcul tout simple: sur les 19000000 de logements individuels installés en milieu urbain, si 1% des propriétaires accepte de rediviser sa parcelle afin de libérer du foncier propice à la construction, 190000 logements pourraient être construits sans étalement urbain supplémentaire. Or , en France, on estime la demande à 200000 logements de plus par an. Cet objectif de densification n’est pas sans rappeler la logique de densité horizontale instaurée à Amsterdam dans le projet des docks présenté précédemment. L’architecte et l’urbaniste seraient donc les moteurs de cette synergie entre intérêt individuel et intérêt collectif. En allant vers les habitants et les communes, ils sont à même de révéler les intérêts communs et de requestionner les PLU en place afin de rentrer dans une logique de la ville dans la ville. La où le PLU était générateur d’espaces pauvres et d’une construction sans qualité architecturale, il deviendrait le moyen de donner de la richesse

Le dossier62 cherche à montrer les limites du scénario BIMBY sur le plan économique. En effet, en 2013, David Miet et Benoit le Foll dépose la marque BIMBY en leur nom propre afin d’exploiter les produits et services de cette nouvelle filière du renouvellement urbain63. Émilien Robin relève ici une filière économique tournée vers la valorisation foncière et immobilière plus que vers la valorisation de l’architecture et d’un nouveau dialogue architecte/habitant. Il va même plus loin en critiquant l’idée de filière courte de production qui est susceptible d’ouvrir la densification des territoires périphériques aux promoteurs et constructeurs responsable de la pauvreté architecturale du périurbain. Finalement, l’idée est plus de montrer à l’habitant que son terrain à un potentiel financier plutôt que de promouvoir une production immobilière diversifiée et située. On entre encore dans une logique commerciale qui risque de se retrouver confrontée aux mêmes problèmes que les lotissements si la logique est exclusivement économique. Il faut donc faire attention afin d’ouvrir le marché aux professionnels de l’aménagement tels que les architectes et les urbanistes, et non aux promoteurs et politiques ignorant. C’est pourquoi Émilien Robin propose à l’architecte d’investir le champ politique afin de participer aux débats législatifs.64 L’architecte doit investir le champ politique et décisionnaire de l’aménagement Par leurs initiatives à l’échelle urbaine et architecturale, urbanistes et architectes peuvent s’approprier la question du périrurbain en s’infiltrant dans les réseaux d’acteurs qui ont construit ces territoires. Le marché actuel n’a pas encore trouvé de solution pour valoriser les périphéries urbaines, tant sur le plan des usgaes que sur l’aspect formel de la construction. En devenant moteurs d’actions, les professionnels de l’espace et de la forme ont la possibilité de révolutionner ces territoires. Pour aller plus loin, la logique de densification devrait aussi regarder le tissu pavillonnaire d’un point de vue fonctionnel pour ainsi réfléchir à une mixité d’usages. La division du parcellaire déjà viabilisé pourrait ainsi permettre de ponctuer les zones pavillonnaires par

41 L’ARCHITECTE: RÉ-INVOQUER DES PROCESSUS ARCHITECTURAUX POUR LE PÉRIURBAIN

En France, depuis 2009, la démarche BIMBY propose une vision plutôt moderniste et progressiste du périurbain. David Miet et Benoit le Foll58, tout deux architecte/urbaniste/ingénieur, ont imaginé cette démarche en réponse à l’appel à projets «Villes Durables’’59 de l’Agence Nationale de la Recherche. Si le projet de recherche a couru de 2009 à 2012, il a ouvert des portes quant à une nouvelle vision des actions possibles en zones périurbaines. L’idée principale est de faire émerger la ville durable des tissus pavillonnaires existants. La force de cette démarche est de penser l’évolution de ces territoires en les considérant comme un patrimoine culturel et donc avec des qualités potentiels d’actions. L’architecte et l’habitant deviennent les iniateurs de l’intervention sur le périurbain. En effet, il s’agît de miser sur l’individu et l’épargne foncière qu’a généré l’étalement urbain depuis 40 ans. BIMBY, Build In My Back Yard60, propose donc de densifier le périurbain afin de stopper l’artificialisation des sols et de penser ces espaces comme un tissu à part entière. Cette densification est permise par un nouveau jeu d’acteur: C’est la capacité des acteurs de l’urbain (habitants, techniciens, élus) à mobiliser le foncier des tissus pavillonnaires existants qui permettra de financer le renouvellement et la densification progressive de ces quartiers. On observe en effet que dans de nombreux cas, l’intérêt des individus (notamment à diviser un terrain pour mieux valoriser son bien sur le marché immobilier) peut aller dans le sens des intérêts de la collectivité (à proposer une offre diversifiée de logements individuels sur son territoire sans engendrer d’étalement urbain).61

au zones pavillonnaires. Idéalement, la logique est gagnant-gagnant puisque l’architecte entre sur le marché du périurbain, la commune densifie ces zones pavillionnaires sur de l’espace déjà viabilisé et l’habitant obtient un intérêt financier par la vente d’une partie de sa parcelle. Si la démarche est innovante et semble répondre aux problématiques contemporaines des territoires périrubains, elle reste encore peu présente dans les collectivités. Il est en effet compliqué aujourd’hui de trouver des projets construit sous la logique BIMBY. L’instauration de cette pensée dans les stratégies d’aménagement des communes demande une requalification globale des PLU et des SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale). S’engager dedans requiert une implication des acteurs à toutes les échelles et donc un bouleversement de la vision du périrubain. C’est pourquoi la démarche en est toujours à une échelle d’éxpérimentations et d’études sur des territoires de la région du Trégor ou encore dans l’Eure. De plus, Émilien Robin dresse dans le Critiquat n°12, une critique plutôt négative de la démarche BIMBY. Le problème n’est pas l’idée, au contraire celle-ci est à prende en compte pour re-penser les territoires périurbains.


des programmes annexes au logement tels que des maisons de quartiers, des lieux de réunions ou autre, afin de donner au périurbain une nouvelle culture de l’habiter. En regardant à l’étranger, nous pouvons trouver un exemple de re-division parcellaire qui propose un nouveau programme dans un quartier résidentiel.

Ill. 14: Croquis d’illustration de la relation maison/jardin/agence

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En effet, dans le Sud Ouest de Londres, des architectes ont transformé leur jardin en agence d’architecture. Du moins, ils ont intégré leur agence dans le jardin de leur maison. Sans étalement urbain, l’agence Fraher Architects Ltd65 diversifie la fonction du quartier et prouve qu’il est possible de densifier les quatiers d’habitations tant en terme de population que de fonction. Cet aspect fonctionnel de la densité amenerait l’architecte à diversifier son intervention et à entrer plus profondément au coeur du débat périurbain.


CONCLUSION Petit à petit, l’expansion urbaine diminue. L’évolution démographique, le vieillissement de la population, la multitude des pôles d’activités font que les coeurs urbains sont moins attractifs. La périurbanisation continue d’avancer mais à un rythme bien plus faible que dans les années 70-80. Le phénomène commence à se stabiliser. Cette stabilisation fait aujourd’hui ressortir les limites de la ressource du périurbain et nous amène à porter un nouveau regard sur ce phénomène. Nous prenons conscience des problèmes engendrés par la périurbanisation qui a malgré tout été la ressource principale de l’aménagement du territoire depuis le début des années 70.

Le virage de la maison individuelle comme nouvel éldorado est pris, les périphéries des villes vont être bouleversées. En effet, les envies de campagne et l’exode urbain sont permis par l’avenement de la voiture en tant que premier moteur de déplacements quotidiens. Il faut donc aménager le territoire afin de permettre ces nouveaux déplacements. Autoroutes, périphériques, routes, ronds-points, le territoire est redécoupé et s’ouvre à la spéculation foncière car ce découpage crée des zones d’intérêts stratégiques que des acteurs ne vont pas laisser passer. Les nouvelles centralités se mettent en place. L’une des plus notables est donc le centre commercial, illustration typique des nouveaux modes de vie du XX° siècle. Ces logiques d’aménagements vont amplifier le phénomène d’exode urbain puisqu’elles permettent aux habitants de ne pas travailler là où ils vivent. Le rêve pavillonnaire devient ainsi une réalité que beaucoup de populations vont atteindre et faire passer la maison

45 CONCLUSION

Les faubours, les banlieues, depuis que les remparts autour des villes sont tombés, l’homme a toujours construit autour du coeur urbain afin de répondre à la demande de nouvelles populations. Le périurban tel que nous le connaissons aujourd’hui est donc le résultat de trentes années d’une politique d’aménagement se voulant plus efficace et plus perenne que les Grands Ensembles. Le début des années 70 a en effet vu les Grands Ensembles confrontés à leurs limites. Projet hors-échelle humaine, l’urbanisme mis en place pour re-construire au plus vite à la sortie de la guerre tourne le dos à l’existant et crée petit à petit des ghettos humain enclavés. Or, cette période voit la société changée et se tourner vers de nouveaux modes de vie: on veut se rapprocher de la nature, s’éloigner des nuissances urbaines pour trouver un territoire sur lequel il sera plus agréable de faire grandir ses enfants et de devenir propriétaire d’un bien immobilier agréable. Ces nouveaux facteurs du bien-vivre engendre une nouvelle politique de l’aménagement du territoire illustrée par la circulaire Guichard qui en 1973 met fin à la politique des Grands Ensembles.


individuelle comme stratégie de logement de masse. Malgré une sensibilisation à la diversité de la production architecturale pronée dans la circulaire Guichard, seuls les promoteurs et constructeurs prennent le virage de cette nouvelle stratégie d’habitat de masse. Il faut construire vite, peu chère.

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La périurbanisation a donc amené à cette ‘‘France moche’’66 dans laquelle toutes les entrées de villes se ressemblent. On passe à côté des zones commerciales, des zones pavillonnaires sans les traverser. À quelque chose près, les lotissements sont les mêmes partout sur le territoire. Malgrès l’implication des habitants dans la construction de leur habitat, lorsque c’est possible, et dans l’appropriation des espaces intérieurs de la maison, Thierry Pacquot et Émilien Robin notent bien que ces territoires doivent être repensés. Là où les promoteurs et les décideurs politiques ont construit le périurbain sans aucune sensibilité urbaine et architecturale, l’urbaniste et l’architecte doivent prendre une place dans le débat. Tissu, forme, acteurs, environnement. Autant d’outils que l’architecte connaît et sait s’approprier. La ressource périurbaine ne doit pas être un problème aujourd’hui mais une solution à son propre développement. Le périurbain est finalement une boîte à outils. Il fait parti intégrante de notre patrimoine urbain et architecturale. Ils faut alors le penser comme de la ville qui émerge et non comme de la non-ville qui est sortie de terre seule. Yves Chalas propose de penser le périurbain, la périphérie pour elle-même et non comme une ex-croissance de l’urbain regrettable67. Les densités, les tissus, les formes, les frontières sont telles qu’elles sont. Il s’agît aujourd’hui de travailler sur cet héritage des évolutions démographiques et des

Les architectes doivent s’approprier le débat de l’aménagement, doivent faire face aux logiques en place et proposer de nouvelles façons de penser le périurbain. Les richesses de ses territoires peuvent se révéler en regardant des actions d’architectes dans d’autres contextes. Nous avons donc vu que des problématiques urbaines telles que la densité horizontale et l’habitat individuel dense peuvent être mis en parallèle avec la problématique périrubaine. Si l’on ne veut plus faire du mitage, il faut densifier. La réhabilitation des docks d’Amsterdam est un bonne exemple de la prise en main par des architectes de la problématique du logement individuel en masse. Cette densification peut alors être mise en perspective dans le périurbain avec la démarche BIMBY qui, malgré des critiques fondées sur sa stratégie commerciale, ouvre les territoires périphériques à la reflexion en terme d’intérêts. Mettre en relation les intérêts des communes à densifier leurs lotissements, les intérêts des individus à diviser leur parcelle et l’intérêt des architectes à être le moteur de ces démarches. L’objectif étant, à l’image de ce qui a pu se faire dans le Voralberg, de raisonner différemment et de construire en réfléchissant à la culture architecturale et à la durabilité des nouvelles constructions. L’architecte a la force de pouvoir réinvoquer des processus qui lui sont propres pour interroger le devenir des territoires périurbains, en alliant la puissance de la création aux acteurs de ces territoires. En intégrant le tissu des décisions sur l’aménagement des territoires, en implicant les habitants dans la construction de leur lieux de vie, l’architecte pourra instaurer petit à petit une réelle culture architecturale aujourd’hui très peu présente en France.

Voilà ce vers quoi le réflexion contemporaine du périurbain doit tendre et ce sur quoi des architectes et urbanistes sont susceptibles de travailler afin de répondre à une multitude d’enjeux. Sur un fond de Genius Loci68, utiliser l’existant pour inventer de nouvelle manière de construire le territoire est sûrement un début de solution à la certaine monotonie du quotidien et du paysage en place en périphérie des pôles urbains afin d’éviter que les lotissement périurbains soient les bidonvilles du futur. Pour aller plus loin, il serait interressant de réfléchir à comment

47 CONCLUSION

Ces acteurs s’emparent donc du marché et tapissent les territoires périurbains de lotissements afin de les rentabiliser au maximum. Les terrains sont moins honéreux que les coeurs urbains, les communes peuvent donc construire sans contraintes. Pour rentabiliser, il faut construire vite afin d’acceuillir rapidement les populations. La qualité architecturale passe alors au second plan au profit d’une uniformité de la construction. La production du ‘‘clé en main’’ de la maison/jardin s’impose. Avec elle, les formes, les espaces, les matériaux se standardisent. Les lotissements sont construits sous couverts de PLU draconiens, de pastiches régionalistes mais montre bien que le seul raisonnement constructif tiens à la relation entre sa voiture, son jardin et sa maison. De façon primaire, les communes ont viabilisé des terrains en grignotant petit à petit le rural. L’ère des zones accentues la production de lotissements puisqu’il divise spatialement les usages du quotidien. Ainsi, on continue à grignoter le territoire pour construire du logements individuels, encore et encore sans penser aux nouvelles franges créées, aux nouvelles frontières urbain/rurale, aux nouvelles densités mises en oeuvre.

styles de vie des années 70 en les positionnant comme des points de départs d’actions visant à en améliorer la qualité de vie et de mutation. Et c’est ici que les architectes ont un rôle important à jouer, à prendre dans un pays où leur capacité d’action reste faible face à la réglementation omniprésente, un fossé idéologique entre citoyens architectes et une concurrence difficile à gagner contre des constructeurs plus attractifs financièrement et temporellement.


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C O N C L U S I O N

est-ce que cette culture peut devenir inhérente aux populations par la question de l’éducation. Dans son mémoire de Master 1, Mélody Burté propose ainsi une réflexion sur la transmission de l’architecture en milieu scolaire69. Ce raisonnement pourrait permmettre de démocratiser l’architecture et d’ouvrir la population à une réelle culture architecturale qui serait suceptible d’éviter de nouveaux aménagements dénués de toute réflexion spatiale et située.


NOTES Introduction p.3-6 Jean-Marc Offner, géographe et urbaniste français. Il est directeur de agence d’urbanisme de la métropole bordelaise et de l’Aquitaine depuis 2009 2 Jean-Marc Offner, lesechos.fr, 11 Août 2014, La pensée urbaine en panne, http://www.lesechos.fr/11/08/2014/LesEchos/21747-036-ECH_la-penseeurbaine-en-panne.htm, consulté en Avril 2015 3 Ibid. 4 ’A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, novembre 2014, Édito, p.1 5 Comment la France est devenue moche, Xavier de Jarcy et Vincent Remy, Télérama n°3135, février 2010, citation de Thierry Pacquot 6 Thierry Paquot, philosophe. Professeur des universités à l’Institut d’urbanisme de Paris (université Paris-Est Créteil Val-de-Marne). 7 Yves Chalas, sociologue et urbaniste. Il est chercheur au CNRS et enseignant à l’Université Pierre Mendès France de Grenoble 8 Maître d’ouvrage : Municipalité d’Amsterdam; Maître(s) d’oeuvre : Agence d’architecture WEST 8. Projet qui s’étend de 1993 à 1997 sur les docks d’Amesterdam pour une surface totale de 25 hectares. 2500 logements individuels, activités et espaces publics 9 Groupe d’architectes fondé en Autriche au début des années 80 10 Projet de recherche dirigé par Benoît le Foll et David Miet de 2009 à 2012, financé par l’Agence Nationale de la Recherche dans le cadre de son appel à projet ‘‘Villes durables’’ 1

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Politiques d’aménagement qui ont créé les conditions d’émergence du périurbain p.10-17 Politique d’aménagement du territoire visant à construire du logement en masse à la sortie de la guerre. Elle s’appuie sur une production rapide et industrialisée du début des années 60 au début des années 70 12 Olivier Guichard, était un homme politique français, gaulliste. Il était Ministre de l’Équipement-Logement-Tourisme dans le gouvernement de Pierre Messmer, de 1972 à 1974 13 Circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d’urbanisation dites grands ensembles et à la lutte contre la ségrégation sociale par l’habitat 14 Ibid., Introduction 15 Pascal Legué, docteur en anthropologie, urbaniste et consultante. 16 ’A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, op.cit., p.37 17 Charles-Édouard Jeanneret-Gris, dit Le Corbusier, architecte, urbaniste, décorateur, peintre, sculpteur et homme de lettres, suisse de naissance et naturalisé français en 1930. Il est l’un des principaux représentant du mouvement moderne. 18 Pierre Merlin, ingénieur géographe, expert-démographe, statisticien et actuaire qui a fondé et présidé l’Institut français d’urbanisme à l’université de 11

Paris-VIII. Il est aujourd’hui professeur émérite à l’université de Paris-I 19 amf.asso.fr, tiré de l’interview donné par Antoine Blouet à Pierre Merlin en Décembre 2010 20 Chalas Yves, L’invention de la ville, Antropos, 2000, p.105-109 21 Jean Viar, chercheur (directeur de recherches) en sociologie française, économiste de formation. Il a notamment travaillé sur l’espace et les « temps sociaux », la mobilité et le politique 22 Viard Jean, Nouveau portrait de la France, l’Aube, 2013 23 Chalas Yves, L’invention de la ville, op.cit. 24 David Mangin, architecte et urbaniste français 25 Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, éd. De la Villette, 2004, p.83 26 Le Grand Soir, Benoît Delépine et Gustave Kervern, Long-Métrage, France, 2011 27 Benoît Delépine, humoriste, réalisateur, journaliste et comédien français; Gustave Kervern, réalisateur, scénariste et comédien français. Tout deux sont connus pour leurs émissions satiriques sur la chaîne Canal+ ainsi que leurs films du même genre 28 Viard Jean, Nouveau portrait de la France, op.cit., p.48-51 29 Ibid. 30 Chalas Yves, L’invention de la ville, op.cit., p.117

Constitution du territoire périurbain: génèse et nature p.20-27 Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, op.cit., p.167-188 32 Comment la France est devenue moche, Xavier de Jarcy et Vincent Remy, ob.cit., citation de Bruno Fortier, architecte et urbaniste français. Il est enseignant à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-Belleville 33 Rudy Ricciotti, architecte français. Il est connu pour son architecture spéctaculaire en béton et son franc parler. 34 Ricciotti Rudy, HQE, la HQE brille comme ses initiales sur la chevalière au doigt, Le Gac Press, 2009 35 Émilien Robin, architecte français. Il est cotraitant permanent de l’agence Boidot&Robin Architectes et enseignant à l’ENSA de Paris-Belleville 36 Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, op.cit. 37 Ibid., p.187 38 Circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d’urbanisation dites grands ensembles et à la lutte contre la ségrégation sociale par l’habitat, B.3. 39 François Mitterrand, homme politique français. Ancien résistant, il a été le 21° Président de la République Française du 21 mai 1981 au 17 mai 1995. Il était membre du parti socialiste. 40 Comment la France est devenue moche, Xavier de Jarcy et Vincent Remy, ob.cit., citation de Thierry Pacquot 41 Ibid. 31

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L’architecte: Ré-invoquer des processus pour le périurbain p.30-42 Les cinq sont des architectes/agences hollandais En réalité deux agences hollandaises, West 8 et (a) quadrat, et un architecte hollandais, Wytze Patijn 44 West 8 est une agence d’architecture hollandaise fondée en 1987 par Adriaan Geuze associé à Edzo Bindels, Martin Biewenga, Jerry van Eyck et Theo Reesink. Elle est situé à Rotterdam. La philosophie de West 8 est tournée vers le paysage contemporain 45 A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, op.cit., p.37 46 Agence d’architecture à Nantes composée de quatres collaborateurs: Xavier Fouquet, Gabriel Lefèvre, Isabelle Housset, Nadège Mazoué 47 Consulter le A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, p.101-103 48 Pierre-Alain Dupraz, architecte et directeur de l’agence ARCHITECTE ETS FAS, agence basé à Genève, en Suisse 49 Consulter le A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, p.96-97 50 Hans Purin, était un architecte autrichien, il est décédé en 2010. Il est d’abord maçon et constructeur avant de devenir architecte. C’est un élève de Roland Rainer. 51 Leopold Kaufmann, architecte hongrois issu d’une grande famille de charpentier. Il a, avec l’entreprise familliale, développé des concepts de constructions en bois innovant, fondés sur les techniques de charpente 52 Cité communautaire constituée de six maison desservies par une gallerie centrale et commune 53 A partir de 1988/89, une véritable vague de concours d’architecture couvre le Vorarlberg pour la rénovation des équipements publics - écoles, centres communaux, casernes de pompiers, centres sportifs…. Tous sont gagnés par les jeunes architectes du groupe 54 Hugo Dworza, architecte autrichien basé à Lustenau, une ville de la région du Voralberg, en Autriche 55 Oskar Leo Kaufmann et Johannes Kaufman, architectes autrichien basé à Dornbirn, une ville de la région du Voralberg, en Autriche. Ils sont tout deux issus de la grande famille de charpentier Kaufman 56 Après avoir parcouru le globe, c’est de façon unanime que nous nommons la région du Voralberg comme la partie du monde la plus innovante en terme d’architecture nouvelle, traduction proposée par Antoine Baudy 57 Loi n° 77-2 du 3 Janvier 1977 sur l’architecture. Introduction à l’article 1er 58 Tout deux ingénieurs des travaux publics de l’état (diplômés de l’ENTPE de Lyon en 2003), issus d’un cursus de double diplôme intégré ingénieur et architecte 59 Le programme de recherche Villes Durables vise à mobiliser conjointement les praticiens et la communauté scientifique. En 2009, il s’articule autour de 4 volets afin d’inventer la ville durable de demain: Volet 1 : «Nouveaux services, agencement des espaces et gouvernance» Volet 2 : «Dynamiques spatiales et mobilités»; Volet 3 : «Environnement et vulnérabilités»; Volet 4 : «Infrastructures, réseaux et constructions» 42 43

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Constuire dans mon jardin, traduction officielle du slogan bimby.fr, 4 Janvier 2011, le projet BIMBY en quelques mots, http://bimby. fr/2011/01/le-projet-de-recherche-bimby-en-quelques-mots, consulté en Mars 2015 62 L’imposture BIMBY, Émilien Robin, Criticat n°12, p 83-103, automne 2013 63 Ibid., p.93 64 Ibid., p.94 65 Fraher Architects Ltd, agence d’architecture basé à Londres dirigé par Joe Fraher et Lizzie Webster 60 61

Conclusion p.45-48 L’expression ‘‘France moche’’ est utilisé par Télérama et Thierry Pacquot dans l’article Comment la France est devenue moche par Xavier de Jarcy et Vincent Remy. Elle se rapporte à cette France qui se construit sans reflexion contextuelle, à coup d’aménagements motivés par la raison économique 67 Chalas Yves, L’invention de la ville, op.cit. 68 Norberg-Schulz Christian, Genius Loci, Mardaga, 1997, 69 Mélody Burté, Transmettre l’architecture en milieu scolaire, une démarche transversale, Mémoire de Master 1, Master Architecture entre usages et paysages urbains, Juin 2015 66

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TABLE DES ILLUSTRATIONS Illustrations double page pleine

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- p.8-9: carfree.fr, 7 Avril 2011, dessin par Victor Locuratolo, tiré de Viens chez moi, j’habite sur l’échangeur, http://carfree.fr/index.php/2011/04/07/vienschez-moi-jhabite-sur-lechangeur/, consulté en Avril 2015 - p.18-19: espacestemps.net, 2013, photo tiré de Flikr (18 Juillet 2010), Vivre le périurbain. Des espaces sous influence urbaine, http://www.espacestemps.net/ articles/vivre-le-periurbain-des-espaces-sous-influence-urbaine/, consulté le 20 Mai 2015 - p.28-29: demainlaville.com, 30 Décembre 2014, Le concept de division parcellaire peut-il venir au secours du périurbain ?, Aquarelle de Claire Arend, http://www.demainlaville.com/le-mouvement-bimby-au-secours-duperiurbain/c1-aquarelle-620/, consulté le 21 Juin 2015

Illustrations page pleine - p.7-44: Première de couverture du livre de Jean-Baptiste Minnaert, Périurbains, Territoires, réseaux et temporalités, Lieux Dits, Mars 2013 - p.13 - Image 1: parismetropolitaine.fr, reproduction d’une carte postale, Drancy : “Paris campagne” – rue Michel-Hougardy, Banlieue subie - banlieue choisie, http://www.parismetropolitaine.fr/ naissancedes20arrondissementsparisiens/diapo5-4.html, consulté le 3 Mai 2015 - Image 2: ancienne carte postale édité par Bouchetal, début du XX° siècle. Ville de Stains, Nord de Paris, Avenue Charles Perrin. https:// commons.wikimedia.org/wiki/File:STAINS_-_Avenue_Charles_Perrin. JPG, consulté le 3 Mai 2015 - p.16: tirées de L’Architecture d’Aujourd’hui 403, Novembre 2014, pages 7172. Photographies aériennes en Flandres par Florence Marchal - p.23 - Image 1: optimum-constructions.fr, photographie d’illustration de l’entreprise Optimum Construction, constructeurs de maisons individuelles, consulté le 12 Juin 2015 - Image 2: eti-construction.fr, 24 Septembre 2012, photographie d’illustration de l’article Réglement de lotissement: une contestation de construction durant 30 ans, http://www.eti-construction.fr/reglement-de-lotissementune-contestation-de-construction-durant-30-ans-8369/, consulté le 12 Juin 2015 - Image 3: fbimmobilier21.com, 27 Mai 2011, photographie d’illustration de l’entreprise FB immobilier, un lotissement de 6 maisons de type 5 à 8 au nord de Dijon à Epagny, http://www.fbimmobilier21.com/ maisons, consulté le 12 Juin 2015

-p.25: croquis de relevé d’appropriation des garages en lotissement. - Salon double, porte condamnée par l’ameublement - Cuisine/Buanderie d’été au garage - Cuisine/Stock ‘‘ancien’’ au garage - p.33 - Image 1: flickrhivemind.net, photographie des façades traditionnelles d’Amsterdam, http://flickrhivemind.net/Tags/city,gevel, consulté en Avril 2015 - Image 2: west8.nl, image du site de l’agence West8, BORNEOSPORENBURG 1993-1996, Amsterdam, http://www.west8.nl/projects/all/ borneo_sporenburg/, consulté en Avril 2015 - p.35 - Image 1: tiré de L’Architecture d’Aujourd’hui 403, Novembre 2014, pages 101, photo de l’agence Fouquet Architecture Urbanisme - Image 2: tiré de L’Architecture d’Aujourd’hui 403, Novembre 2014, pages 96, photo de l’Atelier Urbain Anne Durand - p.38 - Image 1: proholz.at, 2001-2002, Lebens- und Patinafähigkeit im Holzbau, photo du groupement de maison Im Fang, à Höchst, par Gerhard Ullmann, http://www.proholz.at/zuschnitt/04/lebens-undpatinafaehigkeit-im-holzbau/ - Image 2: olkruf.com, photo tirée du site de l’agence de Oskar Leo Kaufmann et Albert Rüf, maison INNAUER à DORNBIRN, réalisée en 2002, http://www.olkruf.com/work/02-haus-innauer-dornbirn/ - p.42: fraher.co, photo de Jack Hobhouse tirée du site de l’agence Fraher, projet The Green Studio à Londres, réalisé en 2013, http://fraher.co/projects/ the-green-studio/

Illustrations intégrées au texte - p.14, Ill.1: Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, éd. De la Villette, 2004, page 77 - p.20, Ill.2: franceinfo.fr, 2 Juin 2013, Les maires vont-ils perdre leur pouvoir sur l’urbanisme?, photographe inconnu, http://www.franceinfo.fr/emission/ Unknown%20token%20emisaison-type-url/noeud-diffusion-temporairepour-le-nid-source-1009803-05-05-2014-11-47, consulté le 10 Mai 2015 - p.21, Ill.3-4: Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, ob.cit., pages167-188 - p.25, Ill.5: nouvelobs.com, 4 Mai 2012, Derrière l’affiche «La force tranquille», http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/10-mai-1981/20110506. OBS2536/derriere-l-affiche-la-force-tranquille.html, consulté le 6 Juin 2015 - p.30-31, Ill.6-7: BORNEO-SPORENBURG, AMSTERDAM, Réaménagement des docks, Antoine Baudy, travail de MASTER 1, Novembre 2014 - p.32, Ill.8: architecturenow.co.nz, 10 Janvier 2013, From polder to pavlova paradise, http://architecturenow.co.nz/articles/from-polder-to-pavlovaparadise/, consulté en Avril 2015 - p.32, Ill.9: BORNEO-SPORENBURG, AMSTERDAM, Réaménagement des docks, Antoine Baudy, travail de MASTER 1, Novembre 2014

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- p.34, Ill.10: west8.nl, image du site de l’agence West8, BORNEOSPORENBURG 1993-1996, Amsterdam, http://www.west8.nl/projects/all/ borneo_sporenburg/ The Netherlands, consulté en Avril 2015 - p.36, Ill.11: tiré de L’Architecture d’Aujourd’hui 403, Novembre 2014, pages 101-102, plans de l’agence Fouquet Architecture Urbanisme - p.36, Ill.12: tiré de L’Architecture d’Aujourd’hui 403, Novembre 2014, pages 96-97, Pierre-Alain Dupraz - p.40, Ill.13: arienatan.com, Build in my back yard mise en place de la démarche BIMBY - © CREA / ANR / BIMBY, http://www.arienatan.com/urbanisme/ build-in-my-back-yard, consulté le 7 Juin 2015 - p.42, Ill.14: demain-ma-maison.com, 27 Janvier 2014, Contre l’étalement urbain : to be or not BIMBY, http://www.demain-ma-maison.com/dossierpasser-envie-au-projet-bien-concevoir-sa-maison/contre-letalementurbain-to-be-or-not-bimby/, consulté en Mai 2015 - p.42: fraher.co, photo de Jack Hobhouse tirée du site de l’agence Fraher, projet The Green Studio à Londres, réalisé en 2013, http://fraher.co/projects/ the-green-studio/

BIBLIOGRAPHIE Livres - Ascher François, Organiser la ville hype-moderne, Parenthèse, 2009, 128 pages - Chalas Yves, L’invention de la ville, Antropos, 2000, 199 pages - Heidegger Martin, « Bâtir, Habiter, Penser », Essais et conférences, Gallimard, 1958, p. 170-193 - Lefebvre Henry, CRITIQUE DE LA VIE QUOTIDIENNE II Fondements d’une sociologie de la quoitidienneté, L’arche éditeur Paris, 1980, 357 pages - Lefebvre Henry, Du Rural à l’Urbain(3° édition), Anthropos, 2001, 299 pages - Mangin David, La Ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine, éd. De la Villette, 2004, 480 pages - Norberg-Schulz Christian, Genius Loci, Mardaga, 1997, 216 pages - Paquot Thierry, Demeure terrestre : Enquête vagabonde sur l’habiter, Europan, 2005, 187 pages - Paquot Thierry, Habiter, le propre de l’humain, La Découverte, 2007, 380 pages - Ricciotti Rudy, HQE, la HQE brille comme ses initiales sur la chevalière au doigt, Le Gac Press, 2009, 103 pages - Ricciotti Rudy, L’architecture est un sport de combat, Textuel, 2013, 112 pages - Secchi Bernardo, La ville européenne contemporaine et son projet, by Yves Chalas, L’imaginaire aménageur en mutation, L’Harmattan, 2004, 340 pages - Viard Jean, Nouveau portrait de la France, l’Aube, 2013, 168 pages - Zumthor Peter, Penser l’architecture, Birkhäuser, 2010, 112 pages

Article/Document/Dossier/Film - La Grande Illusion, Vincent Rémy, Dossier ‘’Ils parlent de la France périphérique, Télérama 3268, p 18-20, Août 2012 - Comment la France est devenue moche, Xavier de Jarcy et Vincent Remy, Télérama n°3135, février 2010 - Compte rendu du Stammtisch Scientifique n°8 : Benchmarking Transfontalier, Antoine Danet, Strasbourg, février 2010 - Présentation du mouvement des Baukünstler, Marie-Hélène Contal et Otto Kapfinger, Une provocation constructive - Architecture contemporaine au Vorarlberg, Éditions Ifa-VAI, 2003 - Les approches de la périurbanisation en Allemagne et en France, projet NEWRUR, 2001-2004 - L’imposture BIMBY, Émilien Robin, Criticat n°12, p 83-103, automne 2013 - Le Grand Soir, Benoît Delépine et Gustave Kervern, Long-Métrage, France, 2011 - ’A’A’ n°403, Pavillonnaire/Suburban housing, novembre 2014

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LA VILLE RESSOURCE, Mémoires 2015 - L’effet Bilbao, une réalité sur un piédestal Camille AZE - L’interstice en milieu urbain dense, un potentiel de régénération sociale et culturelle, Jordan BARNAUD - Le périurbain, un territoire d’action: l’architecte face au patrimoine périurbain, Antoine BAUDY - Mutation des quartiers-gares, d’un lieu de passage à un lieu de vie Walid BELAMRI

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- Transmettre l’architecture en milieu scolaire, une démarche transversale. Mélody BURTÉ - Les stratégies ferroviaires dans la requalification urbaine Mathieu CARDINAL - Commerces urbains, évolution des places marchandes dans la ville Hugo CHEVALLIER - Le déjà-là, une trace du passé et un support physique pour les projets d’avenir, Marystelle COQ - Postures d’architectes et démarche participative Pauline DUTRAIVE - La reconversion et la redynamisation des friches industrielles intra-muros à des fins culturelles : un enjeu de régénération urbaine, Lola DUVAL - Des architectes aux parcours riches et variés: se réinventer à travers l’expérience du «collectif», Siham ELKANAOUI - Field-recording et migrations architecturales Jérémie FAIVRE - Le jardin domestique: De l’espace individuel fantasmé aux «Do-Tank» contemporains, Quentin GUILLAUD - La crise, une opportunité de réinventer le métier d’architecte ? Justine GUYARD - L’Urbanité du temps libre -> L’Influence des nouveaux rythmes de vies sur la construction du milieu urbain, Kévin MALLEJAC - Territoires d’adultes, territoires d’enfants Alice MEYBECK

- Vie étudiante et implantation universitaire : la culture étudiante dépendelle d’une certaine forme d’enclavement urbain ?, Colin MIQUET - La mixité programmatique entre usages et paysages urbains Thi Thuy Quynh NGUYEN - Les nouveaux eldorados urbains -> A la conquête des espaces alternatifs Valentin POIRSON - Villes et industries du cinéma, des évolutions complémentaires Caroline RENAUD - Cœur de village, cœur de vie. Le rôle de l’équipement multiprogrammatique en milieu périurbain, Elaine SANCHEZ PERALES - Décors d’agriculture, Des corps d’agriculture Danil VADSARIA

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sous la direction de Stéphanie David, architecte DPLG à Saint-etienne, agence A-MAS, enseignante à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble reproduit et achevé d’imprimer le 24 Juin 2015 par l’imprimerie EUROPRIM, à Grenoble


La ville et son territoire, le territoire et sa ville. La connexion entre ces deux entités s’avère aujourd’hui être une nouvelle matière à penser face à l’urbanisation des modes de vie. La question du périurbain se pose comme un problème auquel politiques, législateurs et aménageurs sont confrontés. En revenant au début des années 60, ce mémoire ce voudra tout d’abords prospectif afin d’installer et de comprendre le cadre dans lequel la périurbanisation s’est installée. Ce processus a été développé afin de répondre aux problématiques du logements posées à cette période mais on en constate aujourd’hui les limites. Que ce soit d’un point de vue urbain, architectural ou vis-à-vis des intérêts politiques ou économiques, le périurbain est arrivé au bout de son idéologie puisque que l’on constate depuis le début du XXI° siècle les premiers inconvénients de la manière dont il a été construit. Ce constat ouvre aujourd’hui la porte à la réflexion sur quelle position doit-on prendre face à ces territoires qui souffrent d’une image négative mais représentent pourtant une partie du patrimoine de notre territoire. à travers des cas d’études tirés du périurbain mais aussi de coeurs urbains ou d’espaces ruraux, nous verrons comment l’architecte peut-il s’approprier le débat de l’aménagement des périphéries. Débat auquel il n’a jamais réellement prit part puisque la pensée de la périurbanisation ne lui a pas laissé de place.

Juin 2015 . Ecole Nationnale Supérieure d’Architecture de Grenoble


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