VIEILLIR EN VILLE Quels modes d’habitat en ville pour des populations âgées ? PEYRONNARD Ariane
VIEILLIR EN VILLE
«Architecture, entre usages et paysages urbains» 2014 E.N.S.A.G.
SOMMAIRE
INTRODUCTION
1. MUTATION DU PAYSAGE DE LA VIEILLESSE 1.1 Démographie et vieillissement 1.2 Vieillissement pluriel
2. OFFRES ET ACTEURS 2.1 Politique vieillesse 2.2 Évolution des offres 2.3 Objectifs communs / champs d’investigation différents
3. PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL 3.1 EHPAD du Bois d’Artas, Grenoble 3.2 Hélix, Meylan
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
INTRODUCTION CONTEXTE ACTUEL / À l’heure actuelle, les personnes âgées représentent une part de plus en plus importante de la population des pays développés. En 60 ans, la proportion des personnes de plus de 65 ans a doublé. Dans un contexte global de vieillissement démographique (arrivée à l’âge de la retraite des baby-boomers, hausse de l’espérance de vie, ...), les personnes vieillissantes ou âgées, et ce notamment depuis la canicule de 2003, sont au coeur des réflexions publiques.
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RÉFLEXIONS SUR LE VIEILLISSEMENT / Dans un premier temps, les recherches sur le vieillissement de la population étaient principalement centrées sur l’économie de la santé, où la vieillesse apparaissait souvent comme le territoire du médical, du paramédical ou encore du palliatif. Cependant, la part croissante de la population âgée et sa désignation comme cible des politiques publiques, dès les années 1960 avec le rapport Laroque en particulier, ont attiré l’attention sur ce groupe, suscitant les contributions des sociologues et la mise en place de programmes d’étude. Ces programmes et réflexions contestent, ou du moins nuancent le point de vue médico-centré présent jusqu’alors. Ces recherches abordent les personnes âgées en tant qu’êtres humains et sociaux. Elles s’intéressent non plus au vieillissement comme une affection, un problème, mais comme une expérience de vie pour ces personnes. Les travaux se sont davantage centrés sur les vécus individuels du vieillissement. Ainsi, on ne parle plus de la vieillesse comme d’un état mais comme d’un processus. Ces recherches portent sur les usages, les modes de vie, les pratiques quotidiennes des personnes âgées ou encore les modes d’habiter et l’expérience du vieillissement qui y est liée. On observe un certain rééquilibrage des recherches qui tendent aujourd’hui à mettre en équivalence la pathologie et l’Humain.
ARCHITECTURE ET VIEILLISSEMENT / La question du rôle de l’architecture dans ces recherches prend alors tout son sens, dans la mesure où ces considérations portent sur les modes d’habiter des personnes âgées et les relations qu’elles entretiennent avec leur habitat, notamment en zone urbaine. Ces recherches visent une amélioration de leur qualité de vie, d’autant plus que cette hausse de l’espérance de vie ne s’accompagne pas toujours d’une bonne santé. Un habitat (re)connu et habité en accord avec la personne et ses habitudes constitue un facteur très important d’apaisement psychologique, synonyme de santé et de bien-être personnel. L’objectif premier de ces recherches sur les modes d’habiter et les formes architecturales qui y sont liées est de trouver un habitat où, dans la mesure du possible, on puisse bien vivre, pour bien vieillir. Il s’agit alors pour les architectes d’engager des réflexions sur les lieux du bien vieillir, que ce soit dans les configurations les plus communes (main-
tien à domicile ou placement en institution) ou dans des configurations nouvelles, innovantes, qui re-questionnent, voire réinventent parfois même totalement l’expérience du vieillissement. Les objectifs principaux, quelque soit le type de structure, sont globalement identiques, et visent une amélioration du cadre de vie, du projet de vie, à travers différents mots d’ordre comme : éviter l’isolement, privilégier la prévention plutôt que la prise en charge, promouvoir l’autonomie et l’initiative... Tous ces thèmes renvoient à l’enjeu de la définition d’un projet de vie qui soit porteur d’un projet architectural. Il s’agit de concevoir des lieux où les personnes âgées restent acteurs et décideurs de leur vie, et qui comportent tout l’aspect psychologique et social lié à l’habitat, aussi bien sur le plan culturel qu’architectonique ou urbain, en veillant à articuler le court et le long terme dans la pensée du projet. Ce mémoire cherche à aborder le lien que peut créer l’architecture entre vieillissement et lieux de vie, ressource et non contrainte.
1 LORIAUX, Michel,Réinventer l’habitat pour mieux intégrer les personnes âgées, in Une architecture nouvelle pour l’habitat des personnes âgées, VERCAUTEREN Richard, PREDAZZI Marco, LORIAUX Michel, Editions Eres, Collection Pratiques Gérontologiques, 2001, p.16
9 INTRODUCTION
ACTEURS / Les catégories de personnes âgées qui sont «concernées» par ce mémoire sont plurielles : il y a le retraité actif, - encore en pleine forme, plein de projets, actif socialement -, le retraité fragile, - déjà plus fatigué physiquement, ou plus isolé socialement-, et enfin, le retraité dépendant, - très fragile, parfois malade, sans autonomie. Se pose alors la question des transitions entre ces étapes dans la construction mentale des lieux du «bien vieillir». La prise en conscience d’une future fragilité, l’anticipation des besoins à venir, ou encore les perspectives d’un avenir parfois différent de celui espéré, sont des points cruciaux à appréhender pour pouvoir construire les lieux d’une future vieillesse sereine, en accord avec qui ils sont et qui ils pourraient devenir. Or, on voit apparaître ces vingt dernières années une réelle volonté d’être acteur, de réinventer les lieux du vieillir, et de porter un regard nouveau sur l’expérience du vieillissement. Le poids social de ces personnes, souvent impliquées dans des associations, ou dans la vie de la ville, ou du quartier, lié parfois à l’expérience du vieillissement d’un proche (parents, aïeuls, amis, conjoints...) sont autant de leviers qui les poussent à s’impliquer dans un projet de vie qui leur correspondent et à penser aussi l’espace de vie qui pourra le permettre. Cette prise de conscience est très importante car gage d’un avenir dans un espace en adéquation avec les personnes telles qu’elles sont et/ou telles qu’elles vont être. En prise directe avec le présent, qu’elles apprennent à maîtriser, afin de porter l’élan d’un projet d’avenir, dans le but de construire elles-même les lieux de leur «bien vieillir», ces personnes âgées deviennent alors des acteurs, à toutes les échelles, de leur cadre de vie, en accord avec les processus de vieillissement. «Chacun, en effet doit pouvoir construire sa vieillesse comme il le souhaite, selon son propre «projet de vie» et non plus selon un quelconque projet de mort. (...) décidé par d’autres acteurs sans références à l’usager final, mais en fonction de normes administratives ou de contraintes budgétaires.1»
ÉVENTAIL1 /
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On observe depuis les années 60, que ce soit dans le cadre de recherches menées par les collectivités ou issues de volontés privées, une tendance à sortir des orientations les plus connues (maintien à domicile ou institutionnalisation). Parce que l’un comme l’autre n’étaient pas considérés comme des solutions satisfaisantes, une nouvelle génération de structures intermédiaires avancent sur la scène de l’habitat des personnes âgées. Véritables alternatives aux propositions traditionnelles, ces nouvelles structures pour l’habitat pour personnes âgées s’expriment sous des formes très diverses : cantous (Centre d’Activités Naturelles Tirées d’Occupations Utiles : faire cohabiter dans des petites unités des personnes âgées séniles avec d’autres moins désorientées pour stimuler les premières et tenter de préserver leur autonomie), relais Sépia (accueil de personnes âgées qui vivent à domicile et qui ont une difficulté momentanée pour y rester pour des séjours allant de 2 jours à 3 mois), habitat kangourou (cohabitation entre des personnes âgées et des étudiants et/ou de la famille, au domicile de la personne âgée), résidencesservices (pour personnes âgées autonomes, valides et semi-valides de plus de 60 ans, qui désirent vivre en appartement ou en maison, tout en profitant de la convivialité et de la sécurité assurées par les équipes en place), unités de vie autogérées, habitat intergénérationnel... Centrées sur le droit au logement et sur ceux des usagers, ces structures semblent répondre de manière plus adaptée à la diversité d’individus concernés par la catégorie «personnes âgées» et à la diversité d’attentes et de besoins qui y est liée. Cette diversité procure un éventail de structures, à taille humaine, adaptées aux différents profils de la personne âgée, offrant un «horizon plus vaste et plus articulé que la simplification domicile-établissement, (...) alternative pauvre en contenus et en possibilités.2».
VISIBILITÉ DES OFFRES / Ce n’est donc plus l’heure de privilégier l’une ou l’autre des orientations traditionnelles (le domicile ou l’institution), mais bien celle de proposer aux personnes vieillissantes la gamme de choix la plus large possible. Se pose alors la question de la généralisation des modèles. Seront-t’ils destinés seulement à un certain type de milieu social, assez sensible à ce genre d’approche ? Ou au contraire, est-ce qu’en prenant de l’importance, en assimilant de nouveaux savoirs, en développant de nouveaux outils aidant à la mise en oeuvre par d’autres groupes de personnes âgées, ces projets se propagent «par tâches d’huiles successives» et acquièrent ainsi une certaine visibilité, et tendent à devenir le fer de lance des nouveaux lieux du vieillir.
1 Le concept d’éventail est utilisé par Alexandre CARLSON , dans la publication «Où vivre vieux», 1999, Fondation du Roi-Baudouin. Il lui permet d’opposer une offre différenciée, basée sur la multiplicité et la diversité des options, à la traditionnelle «caractéristique binaire de l’alternative» 2 VERCAUTEREN Richard, PREDAZZI Marco, LORIAUX Michel, Une architecture nouvelle pour l’habitat des personnes âgées, Editions Eres, Collection Pratiques Gérontologiques, 2001, p.33
1 LORIAUX, Michel,Réinventer l’habitat pour mieux intégrer les personnes âgées, in Une architecture nouvelle pour l’habitat des personnes âgées, VERCAUTEREN Richard, PREDAZZI Marco, LORIAUX Michel, Editions Eres, Collection Pratiques Gérontologiques, 2001, p.17
11 INTRODUCTION
Le problème principal est que si ces informations circulent relativement bien dans les congrès ou auprès des spécialistes, les informations transmises au public et aux usagers potentiels sont souvent incomplètes, ce qui peut contribuer à la persistance d’idées fausses ou de stéréotypes. L’une des priorité est donc d’offrir une transmission plus accessible de ces informations sur ces formes d’habitat alternatives au public et aux principaux intéressés. Un autre aspect qui pourrait expliquer ce manque d’informations, voire ces résistances à une certaine généralisation de ces formes d’habitat tient au caractère parfois expérimental de ces solutions innovantes, assez originales, parfois en marge de la réglementation sociale. «Les politiques du logement et de la vieillesse des pouvoirs publics ne contribuent pas toujours à cette transparence (...). Il faut le regretter à partir du moment où l’idée de restituer à la personne vieillissante le droit de piloter son projet de vie en toute liberté est acquise et où il est admis qu’en matière d’habitat, «il n’y a pas de solution idéale ni de propositions meilleures ou pire que d’autres», chaque offre distincte doit seulement être correctement calibrée par rapport aux attentes et aux caractéristiques de ses destinataires présumés.»1 Ce travail de mémoire cherche à explorer deux des différentes solutions envisagées pour l’habitat des personnes âgées en ville et à les questionner dans ce qu’elles apportent, et pour quels usagers. Il s’agit aussi, par l’analyse de montrer l’adéquation entre projet de vie et projet architectural, et les éventuels changements à apporter, suite à un retour critique des usagers.
1. MUTATION DU PAYSAGE DE LA VIEILLESSE
1.1 DÉMOGRAPHIE & VIEILLISSEMENT EVOLUTION DÉMOGRAPHIQUE / A l’instar de nombreux pays développés, on peut aujourd’hui observer en France un certain «vieillissement» démographique. Effectivement, les effets conjugués de la baisse de la mortalité infantile et de la hausse de l’espérance de vie ont entraîné une modification de la pyramide des âges. Espérance de vie à la naissance (en années)
Taux de mortalité infantile (en %) 60
90
Espérance Espéranc Espé p rancee de vie des femmes femmes
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50 40
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Espérance de vie des hommes 20
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Taux de mortalité infantile
10 0
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1950
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1970
1980
1990
2000
2010
Graphique montrant les évolutions des espérances de vie et du taux de mortalité infantile en France. Source : INSEE, estimations de populations et statistiques de l’état civil
Chaque année, dans la population, augmente le pourcentage de personnes de plus de 60 ans. La configuration de la pyramide des âges aura tendance à évoluer depuis un profil pyramidal (base «épaisse», sommet en pointe, démontrant une forte natalité et une mortalité globalement croissante avec l’âge) qui était présent jusque dans les années 30, vers une configuration plus «linéaire», démontrant une baisse du taux de mortalité de personnes âgées.
Pyramides des âges entre 1900 et 1950, avec une configuration pyramidale qui commence peu à peu à évoluer Source : INSEE, estimations de populations et statistiques de l’état civil
Pyramides des âges entre 1970 et 2014. Le dessin est de moins en moins pyramidal, pour tendre vers une homogénéisation progressive Source : INSEE, estimations de populations et statistiques de l’état civil
Prévision des pyramides des âges de 2020 et 2050. Le sommet s’épaissit davantage, l’homogénéisation continue. Source : INSEE Projections de population pour la France métropolitaine à l’horizon 2050)
15 MUTATION DU PAYSAGE DE LA VIEILLESSE
Les personnes âgées représentent une part de plus en plus importante de la population : 13% de personnes de plus de 60 ans dans la population française en 1900, environ 22% en 2000 (soit environ 12 millions de personnes). Cette tendance tendra encore à s’accroître au cours du temps : les prévisions INSEE font état d’une part de 29% en 2020 et 32% de personnes de plus de 60 ans en 2050 (soit environ 24 millions de personnes).
EVOLUTION DE L’ÂGE DE LA ‘‘VIEILLESSE’’ / Malgré cette vision qui pourrait paraître un tant soit peu alarmiste, ces constats chiffrés ne permettent pas les nuances qu’il faut apporter au terme «vieillissement» de la population française. Des évolutions considérables sont survenues dans l’ «âge d’être vieux». L’espérance de vie sans incapacité (permettant de vivre de manière indépendante) a progressé plus vite encore que l’espérance de vie elle-même. Les «vieux» d’aujourd’hui sont plus jeunes et plus longtemps que leurs aînés. Leur état de santé, leur rôle familial, ou encore leur place dans la société ont beaucoup évolué au fil des cinquante dernières années.
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Les travaux des démographes les ont conduits à abandonner l’idée d’un âge de la vieillesse fixe afin de pouvoir tenir compte des changements qui, en termes d’état de santé, d’apparence, de situation physique, de rôle dans la société, etc., font qu’une majorité de personnes ne sont pas, à 60 ans, dans la situation où étaient, au même âge, leurs aînés et ancêtres. D’autres indicateurs ont été pris en compte pour tenter d’illustrer au mieux l’âge de la vieillesse. En plus de l’espérance de vie à un âge donné, Patrice Bourdelais1 a retenu quelques indicateurs qui permettent d’observer à quel âge, - différent à chaque époque de l’Histoire - , apparaissent certaines caractéristiques identiques : la probabilité de vivre encore 5 ans, la probabilité de vivre encore 10 ans et l’état de santé . Cet exemple permettra d’illustrer un peu ces propos : la probabilité de vivre encore 5 ans est la même pour une femme qui avait 63 ans en 1825 et pour une femme ayant 78 ans aujourd’hui).
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1850
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2000
2014
Évolution de l’âge d’entrée dans la vieillesse au fil du temps Source : Âge Vital
2. Patrice BOURDELAIS L’âge de la vieillesse. Histoire du vieillissement de la population Paris, Editions Odile Jacob, 1993
2050
La conjugaison de ces différents indicateurs permet d’établir un «seuil évolutif », un âge d’entrée dans la vieillesse qui évolue au fil du temps. En effet, le processus de vieillissement, loin d’être statique et codifié, est, au contraire, dynamique et en devenir. Ainsi la perception de la vieillesse évolue. Ces évolutions du stade d’entrée dans la «vieillesse» sont primordiales pour engager de nouvelles réflexions. Elles permettent notamment de remettre en cause la «définition» de la vieillesse et plus particulièrement l’emprise du modèle gérontologique sur l’appréhension de l’avancée en âge. Alors que le modèle actuel met davantage en avant une vieillesse qui va mal, on peut voir que ces propos sont à nuancer. La vieillesse apparaît comme le territoire associé au médical et au paramédical. Il ne s’agit pas de nier que certaines difficultés peuvent apparaître au fur et à mesure de l’avancée en âge mais plutôt d’apporter une nuance à ce point de vue «médico-centré»
2. Vincent CARADEC, Sociologie de la vieillesse et du vieillissement, Paris, Nathan, 2011
17 MUTATION DU PAYSAGE DE LA VIEILLESSE
La perception que se fait l’opinion collective des personnes âgées tend à changer, même s’il reste du chemin avant une prise de conscience par tous de la variété de personnes qui compose le terme trop générique de personnes âgées. «Il existe de plus en plus une dissociation entre âge biologique, âge subjectif, et âge social1»
CITADINS / À l’heure actuelle, plus de 85% de la population française est urbaine, dont la moitié se concentre dans 35 des 354 aires urbaines du territoire français, que ce soit en centre-ville ou dans un espace directement sous son influence. Une aire urbaine est, selon la définition de l’INSEE, «un ensemble continu et sans enclave formé par un pôle urbain (unité urbaine offrant plus de 10 000 emplois) et par sa couronne périurbaine, c’est-à-dire les communes dont 40 % de la population active résidente ayant un emploi travaille dans le pôle urbain ou dans une commune fortement attirée par celui-ci.»
PÔLE URBAIN COURONNE PERIURBAINE
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Représentation schématique de l’aire urbaine selon la définition de l’INSEE
L’une des tendances marquantes en terme d’habitat des personnes âgées est le fait que les générations successives de ces dernières sont de plus en plus urbaines. Le logement, de par sa localisation, doit permettre de rester actif : garder une activité sociale, culturelle ou associative suppose un réseau social et donc la proximité à une agglomération vivante. Les recherches sur l’évolution démographique font état d’un déplacement des personnes âgées vers les centres urbains, pour se rapprocher de leurs enfants, bénéficier de la diversité des offres de services urbains ou encore (re)trouver un réseau social. Une enquête, réalisée par l’INSEE en 1999, auprès des ménages de plus de 60 ans vivant à domicile, montre que si près de 25 % de ces ménages résident encore en zone rurale, les trois-quarts des ménages âgés (soit plus de 9 millions de personnes) vivent cependant en ville. Les quartiers péricentraux internes des villes-centres (quartiers à proximité du centre-ville sans en faire réellement partie) deviennent actuellement les lieux privilégiés de résidence des populations âgées. Cette tendance, déjà renforcée par les politiques de maintien à domicile, privilégiant le vieillissement chez-soi, est par ailleurs complétée par les stratégies publiques et privées, qui créent des hébergements spécifiques dans ces espaces, offrant ainsi une offre attractive pour les populations âgées périurbaines. Les zones plus ou moins centrales des villes comptent actuellement le plus de personnes âgées, les retraités étant, pour l’instant, relativement moins présents en périphérie.
Les villes ont comme principal avantage l’accès à une offre variée de services, qu’ils soient de l’ordre du logement, du loisir, de la culture, des transports en communs ou encore des soins. Ainsi, dans une optique de recherche de proximité de services, que ce soit pour l’âge de la retraite (loisirs, culture, ...) ou pour les temps plus lointains (soins, santé, aides, ...), les mobilités des personnes âgées sont, dans une certaine mesure, l’objet de projets anticipatifs à l’approche de la retraite.
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Cependant si l’on observe l’habiter au sens premier du terme1, on observe que celui-ci sous-entend une certaine permanence, une proximité et une appartenance aux lieux -demeurer. Cette perspective remet alors en question les phénomènes de déplacements résidentiels (qu’ils soient vers d’autres régions -héliotropisme-, ou vers un retour au centre-ville) au profit d’une stabilité résidentielle. Pour les populations urbaines, comme pour celles habitant le périurbain, cette stabilité dans le chez-soi se maintient jusqu’au moment où les préoccupations de santé et les difficultés qui peuvent y être liées prennent le pas sur la volonté de vivre chez soi.
2. «Faire sa demeure, son séjour en quelque lieu ; y vivre d’habitude.» http://fr.wiktionary.org/ wiki/habiter
MUTATION DU PAYSAGE DE LA VIEILLESSE
Les zones urbaines sont aussi mieux pourvues que les zones rurales d’établissements pour personnes âgées en perte d’autonomie, mais aussi en terme de logements adaptés. Il faut bien entendu prendre en compte que l’acceptation d’une certaine urbanité ne se fera que si elle est liée à la création de logements de qualité. C’est alors aux architectes de proposer des espaces qui créent cet équilibre tenu entre densité et aspiration à des espaces plus intimes.
1.2 VIEILLISSEMENT PLURIEL VIEILLISSEMENT PLURIEL / Aujourd’hui, le départ à la retraite n’est plus caractéristique de «vieillesse» ou d’un mode de vie plus «passif». Le modèle jusqu’alors dominant d’un cycle de vie en trois étapes - jeunesse, vie active et enfin période de retraite plutôt courte - est fortement remis en cause par les grands changements au sein de la société actuelle. L’âge de la retraite et celui de la vieillesse, proches jusqu’aux années 60, tendent à se distancer au fil du temps.
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Les années de la retraite ne sont plus une période résiduelle mais bien une saison à part entière de la vie. Alors qu’en 1950 un homme qui partait à la retraite à 65 ans pouvait espérer vivre une dizaine d’années, aujourd’hui l’espérance de vie à 60 ans est supérieure à vingt ans pour les hommes et à vingt cinq pour les femmes. Le passage à l’âge de la retraite marque désormais le seuil d’une troisième phase, d’une durée moyenne de 15 à 20 ans, sans activité professionnelle mais souvent très active, socialement et/ou physiquement. Désormais, la période de vie à la retraite, bien qu’encore inégalitaire par bien des aspects, est devenue pour tous une étape normale de l’existence. Les systèmes de sécurité sociale associés aux progrès considérables de la médecine ont permis d’augmenter la durée de la retraite. Mais l’arrivée à l’âge de la retraite ne signifie pas l’entrée dans la vieillesse. D’autres découpages redéfinissent les frontières. Le terme de «troisième âge» a connu une large diffusion au cours des années 1970 : en opposition à la vieillesse, le «troisième âge» semble définir une nouvelle jeunesse, dynamique, active, engagée. Le terme de «troisième âge» ne concerne pas la partie la plus âgée de la population. Un temps appelé «quatrième âge», ou»cinquième âge», cet ensemble est regroupé, dans les années 70, sous le terme de «personnes âgées dépendantes», selon les textes des politiques sociales et des médecins en gériatrie. Au début des années 90, c’est le terme «senior» qui apparaît. Venu du monde du marketing, il a connu un rapide succès et bien que désignant au départ, dans le domaine du marketing, les personnes de 50 ans et plus, il est finalement aussi adopté pour celles de 60 ans et plus, pour les pouvoirs publics, état et collectivités locales, qui placent à ces âges-là, le seuil d’accès à certaines prestations sociales (exemple de la carte senior SNCF). ou encore à 70 ans pour les professionnels de santé, car c’est la tranche d’âge à partir de laquelle peuvent survenir des accidents de santé assez importants. Le succès du terme «senior» tient à son flou et donc à la grande part de la population qu’il peut désigner, de manière homogène. La vieillesse est, en effet, difficile à définir, tant se lient ou s’opposent de nombreux termes : personnes âgées, vieillards, troisième âge, quatrième âge, aînés, retraités, seniors, etc.
L’objectif de cette multiplicité de terme semble être de vouloir «délimiter» la vieillesse, principalement selon le critère de l’âge. Cependant, on s’aperçoit que ces nouvelles catégorisations, selon l’âge, ne sont finalement pas représentatives de la complexité, de l’hétérogénéité des personnes qu’elles regroupent. Le critère de l’âge à lui seul n’est pas suffisant, non seulement parce qu’avec les progrès de la science, l’âge ne renvoie pas aux mêmes caractéristiques selon l’époque, mais aussi parce que, comme le dirait Pierre Bourdieu «l’âge est une donnée biologique socialement manipulée et manipulable »1
1 BOURDIEU P.ierre, La « jeunesse » n’est qu’un mot, Questions de sociologie, Paris, Éditions de Minuit, 1984, p.144
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Cependant, il faut garder en tête qu’on ne doit pas confondre vieillissement et vieillesse. Le vieillissement individuel représente la totalité du parcours de vie d’un individu. La vieillesse est le résultat de ce parcours social. La vieillesse est définie communément comme la dernière étape de ce parcours de vie, du vieillissement. Il y a donc d’innombrables vieillesses en fonction du parcours de vie des individus. Le processus de vieillissement est vécu très différemment par les individus en fonction de très nombreux aspects : le genre, la classe sociale, le statut matrimonial, l’état de santé, l’habitat, le territoire de vie, les liens sociaux, la formation , l’éducation, l’emploi, la philosophie de vie, la croyance religieuse, etc. En vérité, on observe que ce n’est pas l’âge qui définit une personne, mais une multitude d’autres critères. La même personne de 60 ans peut être à la fois un salarié expérimenté, le jeune président d’une association, un sportif chevronné ou encore un amoureux transi...
PARTICIPATION ACTIVE /
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La «vieillesse» urbaine actuelle est bien plus moderne que ce qu’en véhiculent certains discours actuels. Le regard porté sur la vieillesse et les personnes âgées est de plus en plus dédramatisé. Une partie de la génération née dans les années 30 a déjà connu des expériences de multilocalité avec des itinéraires résidentiels marqués par des changements de logements plus ou moins fréquents. Les individus qui vont entrer dans le 3ème âge dans les années à venir auront, pour la plupart, vécu plusieurs vies professionnelles, familiales et/ou sentimentales. Ils auront eu accès à plus de confort, de temps libre, et auront ainsi eu la possibilité d’entretenir un capital physique, intellectuel et culturel (associations, sport, loisirs, voyages, ...). La «retraite-retrait1» comme la qualifiait Anne-Marie Guillemard (auto-mise en marge sociale des personnes âgées) a finalement laissé place à la «retraite-loisirs» ou encore à la «retraite solidaire2». Une étude menée par France Bénévolat en 2010 montre que les plus de 65 ans ont un taux d’engagement dans le bénévolat de 51%. Le départ à la retraite n’a plus le même sens qu’auparavant. De moins en moins synonyme de désengagement social, la retraite devient une période «active» de la vie. Ils font partie de ces générations qui ont connu un nombre important de changements au cours de leur vie ; ils auront connu les évolutions marquantes de la seconde moitié du XXème siècle et du début du IIIème millénaire (confort moderne, téléphonie mobile, internet, ...). Ces personnes ont accumulé au cours de leur vie des références culturelles, des expériences passés, des valeurs. Elles ont été ou sont encore, pour la plupart, bien intégrées dans la vie sociale. Elles ont des pratiques citadines (usagers des transports en commun, restaurants, cinéma, théâtre, musées, ...). Elles démontrent une véritable connexion au monde urbain et numérique, et signifient leur place dans la communauté sociale (universités du 3ème âge, centre de jour autogérés) entraînant ainsi une révision du statut des personnes âgées dans la société, de leur place et de leur image. Les personnes âgées citadines, ont, pour la plupart, une grande capacité d’adaptation. Elles ont connu de nombreux changements dans leur vie et sont capables d’en connaître encore. «Les personnes âgées constituent un groupe en pleine mutation, dont les caractéristiques personnelles évoluent rapidement, ce qui transforme le paysage social de la vieillesse3».
1 - Anne-Marie GUILLEMARD - La Retraite, une mort sociale. Sociologie des conduites en situation de retraite, La Haye-Mouton, 1972. 2 - Anne-Marie GUILLEMARD - «De la retraite sociale à la retraite solidaire», in Gérontologie et société, n° 102, 2002. 3 Michel LORIAUX, «L’habitat : un lieu à vivre... et à mourir» in Réinventer l’habitat pour intégrer les personnes âgées - Colloque Habiter Autrement, Louvain La Neuve, 2000
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TITRE DU CHAPITRE
On observe une déconnexion croissante s’opérant entre l’âge social (défini par sa place dans le système social), et l’âge chronologique. Entre continuité de la vie d’avant et anticipation de celle à venir, la retraite constitue un cycle de vie à part entière. Cette «nouvelle jeunesse» offre les conditions de réalisation de soi. Le recul de l’âge dit «de la dépendance» contribue à allonger la période de vie active et permet de multiplier projets, mobilités et circulations résidentielles. Les anticipations portent sur une période de plus en plus longue, les perspectives d’avenir sont plus éloignées. La modification du rapport au temps qui en résulte influe sur les choix de mode de vie et de résidence.
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Ces retraités actifs, valides et autonomes, sont en mesure, comme leurs concitoyens plus jeunes, de faire entendre leur opinion et de faire respecter leur choix de vie, notamment concernant la question du logement («Français âgés mais néanmoins pleinement « acteurs » de leur logement1»). On observe une volonté très marquée de pouvoir rester dans cet environnement qu’elles connaissent, dans lequel elles se reconnaissent. La ville représente un territoire connu, autant au niveau de l’espace (notre quartier, notre rue, notre parc) qu’au niveau social (famille, amis, associations, ...). La vie en ville est aussi symbole de l’accès aux services urbains (aménités, loisirs culturels, transports en commun, etc.) Habiter, ce n’est pas seulement disposer d’un domicile, c’est surtout investir un lieu, pouvoir vivre au mieux la ville, accéder à un statut social. Le logement, l’habitat ouvre sur un environnement naturel, bâti mais aussi humain. Il détermine les modes de vies, la capacité à nouer des relations sociales et d’accéder aux aménités urbaines. L’habitat est une préoccupation majeure pour les personnes âgées car les effets plus ou moins importants du vieillissement (rapport à l’espace, à la lumière, ...) peuvent affecter l’usage du logement et remettre en cause la possibilité de s’y maintenir. La prise de conscience de sa future fragilité, du manque d’accessibilité du logement actuel, l’anticipation de ses besoins à venir les pousse à chercher des solutions pour un éventuel nouveau logement. C’est pourquoi les personnes, plus ou moins actives mais indépendantes, exigent aujourd’hui le droit de choisir le logement dans lequel elles passeront leur vie future. Ces revendications reflètent un certain «droit-devoir2» d’être acteur du projet de leur futur logement, de se construire sur mesure, de façon libre et créative, un habitat et un contexte relationnel pour leur vieillesse et qui soient conformes à l’identité personnelle de chacun.
1 Laurent BATSCH / Denis BURCKEL / François CUSIN / Claire JUILLARD «Vieillissement de la population, gérontocroissance et marché du logement», in Risques, n° 78, Juin 2009 2 - Anne-Marie GUILLEMARD - La Retraite, une mort sociale. Sociologie des conduites en situation de retraite, La Haye-Mouton, 1972.
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TITRE DU CHAPITRE
2. OFFRES ET ACTEURS
2.1 POLITIQUES VIEILLESSE HISTORIQUE DES POLITIQUES VIEILLESSE / Il s’agit ici de retracer les étapes les plus importantes, les plus marquantes des politiques publiques concernant les personnes âgées. 1945 : Fin de la seconde guerre mondiale. Importance du nombre de personnes âgées. Prise en considération par les pouvoirs publics : ordonnance du 04/10/1945 : instauration de la branche vieillesse de la Sécurité Sociale. Objectifs : -faire face à la pauvreté des personnes âgées - développer des régimes différenciés.
28 1946 : Création des pensions de réversion et de l’allocation veuvage. 1960 : Création de la Commission d’Études des Problèmes de la Vieillesse, présidée par Pierre Laroque. 1962 : Publication du rapport Laroque, «Politique de la vieillesse». Principes généraux de la politique en faveur des personnes âgées pour les vingt ans à venir :- Éviter l’exclusion et l’institutionnalisation. - Respect de l’autonomie par le biais d’un soutien à domicile - Veiller à l’adaptation du logement, au développement d’activités de loisirs, à la mise en place d’actions de prévention, au déploiement de maisons de retraites et de services gériatriques, etc. «Vous serez intégré si vous restez jeune. » 1971 : Le VIe Plan Quiquennal(1971-1975) organise un Programme finalisé 1975 pour le maintien à domicile des personnes âgées. 3 types d’action : - les services d’aide ménagère et de soins à domicile, - les équipements légers de quartier (clubs et foyers-restaurants), - les centres de jour. Par ailleurs, il développe l’idée de la coordination, clef de voûte de l’organisation du secteur. 1975 : Création de l’ACTP (Allocation Compensatrice pour Tierce Personne). Permet aux personnes dépendantes d’assumer l’emploi d’une tierce personne pour les aider dans les actes essentiels de la vie. Seules les personnes handicapées peuvent en bénéficier. 1976 : Programme d’Action Prioritaire n°15 du VIIe Plan. 1980 Destiné à favoriser le maintien des personnes âgées dans leur cadre de vie habituel. Vise à préserver et à développer l’autonomie des personnes âgées et leur participation à la vie sociale.
1979 : Rapport Maurice Arreks, «L’amélioration de la qualité de vie des personnes âgées dépendantes». Introduit le terme de dépendance. 1980 : Circulaire relative à la transformation des hospices. 1981 : Rapport Robert Lion dans le cadre du VIIème plan, «Vieillir demain». Autre regard sur la vieillesse. Les vieux ont le droit d’être différents des jeunes, mais une injonction leur est faite : « Devenez sages ! » 1982 : Ordonnance abaissant l’âge de la retraite à 60 ans. 1986 : Constitution de la Commission nationale d’études sur les personnes âgées dépendantes .
1993 : Mise en place de la grille AGGIR (Autonomie Gérontologique Groupes Iso-Ressources). Outil permettant d’évaluer le degré d’autonomie ou de perte d’autonomie des personnes, principalement des personnes âgées, qu’elles résident en institution ou à domicile, à l’aide d’une échelle allant de GIR-1 (indicateur de grande dépendance) à GIR-6 (indicateur d’autonomie). 1994 : Création de la PED (Prestation Expérimentale Dépendance). Prestation instaurée à titre expérimental dans douze départements. Composée de deux allocations : l’ACTP versée et une prestation supplémentaire à la charge des caisses de retraite. Son attribution repose sur la grille AGGIR. 1997 : Création de la PSD (Prestation Spécifique Dépendance). Aide destinée à prendre en charge les dépenses liées à la dépendance des personnes âgées à partir de 60 ans si ces dernières nécessitent une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie quotidienne, qu’elles vivent à leur domicile ou en établissement.
29 OFFRES ET ACTEURS
1987 : Rapports successifs dont la réflexion n’est plus axée, comme préconi1991 sée par le rapport Laroque, sur une approche relationnelle, au profit d’une approche monétaire de l’aide aux plus dépendants, assumée par les pouvoirs publics. Ils portent davantage sur l’aspect financier de la dépendance dans des perspectives gestionnaires. - 1987 : Rapport Malabouche, « Retraites : les périls de l’an 2030 » Focalisé sur la prise en charge financière de la dépendance, considérée comme un «nouveau risque». - 1988 : Rapport Braun, «Les personnes âgées dépendantes» Tournant dans les politiques de la vieillesse : la question de l’intégration des personnes âgées dans la société n’est plus à l’ordre du jour. - 1991 Rapports Schopflin, «Dépendance des personnes âgées», et Boulard, «Dépendance et solidarité», s’inscrivent dans une même perspective gestionnaire. Remettant en cause l’Allocation Compensatrice pour l’Aide d’une Tierce Personne (ACTP)(41) , dont le bénéfice était étendu aux personnes âgées, les rapport Braun, Schopflin et Boulard recommandent l’un après l’autre la création d’une nouvelle allocation pour les personnes âgées dépendantes.
1999 : Congrés international «Où habitera la personne âgée du IIIème millénaire ?» 2001 : Création des CLIC (Centre Local d’Information et de Coordination). Lieu d’accueil et d’information pour les personnes âgées et leur entourage. Missions déclinées en fonction du niveau de label. Informer, orienter, faciliter les démarches, fédérer les acteurs locaux, évaluer les besoins, élaborer un plan d’accompagnement ou un plan d’intervention, accompagner, assurer le suivi du plan d’aide, en lien avec les intervenants extérieurs, coordonner les différents acteurs.
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2001 : Création de l’APA (Aide Personnalisée à l’Autonomie). Aide financière, ajustée en fonction des besoins spécifiques de la personne. Destinée aux plus de 60 ans et s’élargit aux GIR-4. Permet à la personne en perte d’autonomie de choisir son projet de vie : rester à domicile, ou recourir aux services d’une structure d’hébergement collectif, en compensant les charges de la dépendance. 2003 : 1er Plan Canicule. 2004 : Création de la CNSA (Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie). 3 objectifs principaux : - Financer les aides en faveur des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées, - Garantir l’égalité de traitement sur tout le territoire et pour l’ensemble des handicaps, - Assurer une mission d’expertise, d’information et d’animation pour suivre la qualité du service rendu aux personnes.
2006 : • Rapport Le Bouler, « Personnes âgées dépendantes : bâtir le scénario du libre choix». Second Rapport de la mission Prospective des équipements et services pour les personnes âgées dépendantes, Centre d’Analyse Stratégique. • Plan Solidarité Grand Âge, présidé par Philippe Bas. Réforme en cinq grands axes : - Donner aux personnes âgées dépendantes le libre choix de rester chez elles (développement de services de soins et d’aide à domicile, soutien aux aidants familiaux, continuité entre domicile et maison de retraite), - Inventer la maison de retraite de demain et permettre aux personnes âgées vulnérables de mieux y vivre (augmentation du nombre de soignants, amélioration de la qualité de vie, maîtrise des prix.), - Adapter l’hôpital aux personnes âgées, en développant la filière gériatrique et en resserrant des liens tant avec le domicile qu’avec la maison de retraite, - Assurer pour l’avenir le financement solidaire de la dépendance, pour garantir un haut niveau de protection sociale face à la dépendance, - Insuffler une nouvelle dynamique à la recherche et à la prévention.
2007 : Mise en place des Plans Nationaux Bien Vieillir 2014 Ambition de proposer les étapes d’un chemin pour un “vieillissement réussi” autant du point de vue de la santé individuelle que de celui des relations sociales, en valorisant l’organisation et la mise en œuvre d’actions de prévention adaptées. 2009 : • Circulaire n° 2009-120 du 28 avril 2009 relative à l’appel à projets régional 2009 dans le cadre du plan national « Bien vieillir ». • Plan de relance pour les établissements d’accueil des personnes âgées et handicapées, par Brice Hortefeux. • Rapport par Boulmier « L’adaptation de l’habitat à l’évolution démographique : un chantier d’avenir ». 2010 : • « Rapport Franco suite à la mission : « Vivre chez soi ».
• Rapport Herbert, « La convergence des politiques publiques du vieillissement et des politiques locales de l’habitat. Réalités et perspectives» Agence Nationale pour l’Information sur le Logement. 2012 : Discours de Cécile Duflot, Ministre du logement, pour les rencontres de l’habitat participatif de Grenoble Très mobilisé pour l’habitat participatif. «Vous n’êtes plus seuls, l’habitat participatif va enfin pouvoir être à la hauteur de son ambition, celle de représenter une troisième voie pour le logement.» 2014 : Loi Alur / Dulfot II. Reconnaissance institutionnelle de l’habitat participatif. Principales mesures - Création de deux statuts permettant le développement de l’habitat participatif - Encadrer le développement de nouvelles formes d’habitat dans le but de créer de nouvelles formes d’accès au logement par l’habitat participatif.
Dans les années 2000, une conscience nouvelle apparaît, avec la promotion, non seulement, d’une politique centrée sur les personnes âgées mais aussi, plus ambitieuse, d’une conception d’une société pour tous les âges. Davantage concernées par les questions d’habitat, on observe diverses initiatives d’habitat groupé, intergénérationnel, autogérés... Le début des années 2000, suite à la canicule, remet l’accent sur la position des personnes âgées dans la société, et notamment concernant les questions d’isolement de ces dernières. Plusieurs rapports récents abordaient en ce sens l’urgence d’une politique globale de l’aménagement de l’habitat et des espaces collectifs, qui viseraient à favoriser l’insertion sociale des personnes âgées.
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• « Habitat et vieillissement : nouvelles pratiques professionnelles ? Nouvelles formes d’action publique ? Programme de recherche : Vieillissement de la population et habitat» Plan Urbanisme Construction et Architecture.
2.2 ÉVOLUTION DES OFFRES CHEZ SOI, CHEZ DES PROCHES /
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La grande majorité des personnes âgées habite dans un logement ordinaire (seul, en couple ou en cohabitation). Toutes les enquêtes confirment le désir majoritaire de «vivre et mourir chez soi». «Ce chez soi signifie avant tout la liberté d’y organiser sa vie et de maîtriser certains choix : avec qui vivre, garder un animal, conserver ses meubles et son décor, décider de son rythme entre vie privée et sociale, entre dedans et dehors.1 » Cependant ce choix peut avoir certaines limites. Peu ou pas adapté aux personnes dont les capacités physiques diminuent (mobilier peu adapté, escaliers à franchir entre des espaces de vie, espaces trop grands, faible ou trop importante luminosité, ...), il peut devenir l’espace d’une réclusion, car la personne ayant déjà des difficultés à se mouvoir, à se retrouver dans son environnement intime, prend peur d’aller au-delà, dans le quartier, la ville. Il s’agit donc d’ouvrir son logement sur l’extérieur, de faire entrer le dehors chez-soi pour compenser le maintien à domicile. C’est pourquoi, depuis les années 80, des efforts considérables ont été mis en place dans l’objectif de contribuer à répondre à cette demande (plus de 96% des 12 millions de personnes de plus de 60 ans vivent chez elles). Des services à la personne à domicile et des aides techniques pour adapter les logements ont été mis en place dans l’optique de permettre au maximum de personnes âgées de rester dans leur logement. Toutefois, il peut s’avérer que cette solution ne soit pas envisageable parce que trop coûteuse, trop contraignante au niveau du logement ou tout simplement insuffisante. Un des schémas courants, depuis longtemps, est alors de se rapprocher de l’un des membres de sa famille (souvent des enfants). Dans ces cas là, deux solutions sont envisagées : soit la personne âgée vit dans la maison l’un de ses enfants, aménagée pour l’accueillir, soit elle acquiert un nouveau logement personnel situé à proximité (dans la ville, dans l’agglomération, ...). Ce schéma d’emménagement à proximité d’un proche était très présent jusque dans les années 60-70 et tend à être ré-adopté quelque peu ces dix dernières années. Il s’accompagne parfois d’une médicalisation du logement, qui est parfois presque mise en avant à défaut des qualités d’espaces. Il faut aussi souligner que le maintien à domicile dans de mauvaises conditions d’adaptation du logement peut conduire à des situations de réclusion et de solitude, comme on a pu s’en apercevoir lors de la canicule de 2003 (20 000 décès en France).
EN ÉTABLISSEMENTS / Issu du monde caritatif et religieux, l’accompagnement des personnes âgées a beaucoup évolué depuis une quarantaine d’années : on a com-
1 (Extraits de «Personnes âgées et habitat - guide technique, juridique et réglementaire» - Hors Série du Moniteur, 1992.)
mencé par parler d’humanisation des hospices en cassant les salles communes. Puis, à partir de 1982-85, apparaît la médicalisation. Cette démarche renforce les équipes (infirmières, aides-soignantes) et les matériels mais présente le risque d’enfermer l’approche de la personne dans le traitement de la maladie et la référence hospitalière. «Aujourd’hui se répand la notion de projet de vie, qui considère le lieu d’accueil des personnes âgées comme un lieu de vie avant d’être un lieu de soins : au nom de la personne, on réintroduit l’idée de «domicile»1».
Salle des malades, hospice général
Mauvais traitements, insalubrité, non-respect de l’individu...A l’aube des années 60, les pouvoirs politiques prennent conscience du caractère inacceptable des conditions dans lesquelles les personnes âgées étaient accueillies au sein des structures d’hébergement collectives Bien qu’uniques institutions d’accueil de personnes âgées, les hospices deviennent «l’ennemi à abattre» du rapport Laroque. Un plan de modernisation, avec des moyens considérables mis en place, a permis de mettre fin, dans les années 80, à ces situations déplorables, en faisant disparaître ces «mouroirs». Le chapitre présente un aperçu des différentes solutions d’établissements d’accueil aux personnes âgées. Des structures collectives d’hébergement existent en France sous de multiples formes. Elles peuvent répondre à des besoins variés, selon l’autonomie et les revenus de la personne. Maisons de retraite, logements-foyers, unités de soins de longue durée, sont des exemples
1 Jean-Louis BASCOUL «Du projet de vie au projet architectural» in «L’habitat des personnes âgées»
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En France, avant les années 1950, la question de la prise en charge des personnes âgées par les pouvoirs publics était rarement à l’ordre du jour. Les seuls accueils pour personnes âgées se faisaient dans des asiles ou des hospices, ressemblant à ceux des siècles passés, dans des conditions sanitaires très précaires. Ces «mouroirs» tant décriés accéléraient le processus de dégradation des personnes. Alors que le maintien à domicile représentait une certaine forme de liberté, l’affirmation d’une autonomie encore suffisante bien que faiblissante, et donc une sorte de respect de la personne qu’elles ont été, le placement en institution renvoie à une réclusion, voire à une punition mais surtout à une négation de leurs parcours, de leurs expériences, de ce qu’elles ont été.
types de ces structures, autant dans le domaine privé que public. Maison de retraite,
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Malgré la publication du rapport Laroque en 1962, qui condamne les hospices et préconise le maintien à domicile, ces nouvelles politiques d’hébergement aux personnes âgées seront longues à se mettre en place. Ce n’est qu’à partir de 1975 qu’elles commencent à prendre forme, selon deux principales orientations : le développement du maintien à domicile et l’amélioration des conditions d’hébergement en institution. Cette dernière orientation a été particulièrement lente, et ne s’est achevée qu’en 1980. Créée en 1958, la maison de retraite est un lieu d’hébergement collectif pour personnes âgées. Elle s’adresse aux personnes âgées qui ne peuvent plus vivre de manière autonome, leur âge ou leur état de santé, les ayant rendues dépendantes. L’offre en maisons de retraite assure un hébergement en chambres individuelles, des services (repas, blanchissage, soins, aides quotidiennes, ...) et propose des activités de divertissement. Elles peuvent appartenir au secteur privé comme au secteur public, et être, ou non, médicalisées. Le secteur public est encore une fois celui qui propose le plus de places par établissement, avec en moyenne 70 places contre 52 pour le secteur privé et 60 places pour le secteur associatif. Ce sont des établissements médico-sociaux qui, à titre principal, assurent de manière collective l’hébergement des personnes âgées et ce dans le cadre d’une prise en charge globale. Les maisons de retraite offrent aussi la possibilité d’accueillir les personnes âgées désorientées, parfois dans le cadre d’unités de vie spécifiques.
MAPA(D) (Maison d’Accueil pour Personnes Âgées (Dépendantes)) Au début des années 1980, pour répondre à la montée en puissance de la dépendance, le ministère de la Santé et de la Sécurité sociale lance un concours d’idées pour la conception d’une nouvelle génération de maisons de retraite. Les MAPA et les MAPAD sont nées de cette initiative. Les MAPA (Maison d’Accueil pour Personnes Âgées) ont cherché à renouveler le concept de maison de retraite. Elles sont conçues pour recevoir des personnes âgées qui, sans relever d’une prise en charge médicale, sont dans l’incapacité de vivre seules à leur domicile. On prend soin d’elles davantage qu’on ne les soigne. Dans une Mapa, le mode de vie est collectif. Le personnel de garde assure une sécurité permanente. Leur capacité ne doit pas en principe excéder 80 places sauf dérogation. Les chambres sont individuelles, la superficie de 16 à 20 m² au minimum et comportent une salle d’eau avec des toilettes.
Les MAPAD sont des maisons de retraite également implantées dans les centres-ville, réservées en priorité aux personnes âgées en perte d’autonomie ou très dépendantes ne pouvant plus rester à domicile et ayant besoin d’assistance permanente et de personnel spécialisé pour les accompagner dans les gestes de la vie quotidienne : faire sa toilette, s’habiller, manger, et mar-
cher... Les MAPAD sont équipées pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes et très dépendantes, notamment celles atteintes de troubles du comportement et désorientées. Dans une MAPAD, le mode de vie est également collectif. Seuls les petits déjeuners peuvent parfois être servis dans les chambres. Implantées dans les centres-villes, insérées dans l’environnement local, les résidences de ce type) ne laissent pas beaucoup de place à l’initiative des résidents. Mais depuis plusieurs années, un effort est fait pour personnaliser le service et combattre l’anonymat. Les chambres sont individuelles (de 16 à 20 mètres carrés au minimum) et comportent un sanitaire courant. Le forfait hébergement des MAPA et des MAPAD varie entre 45 et 70 € par jour. L’allocation logement, l’aide sociale, l’aide au logement peuvent être attribuées au résident.
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Extrait de plan - Réalisation d’une MAPA à Flassans sur Issole, en 2013 paryves DEDEI
Plan de la MAPAD Le Vignet, à Calvisson, construite, par l’agence Philippe Deville
USLD (Unité de Soins Longue Durée) Les USLD sont des établissements sanitaires destinés à l’hébergement des personnes âgées ayant perdu leur autonomie et dont l’état nécessite une surveillance et des soins médicaux constants (article L 711-2 du Code de la santé publique). L’admission en USLD a en général lieu à la suite d’une hospitalisation ou d’un passage en service de soins de suite et de réadaptation (moyen séjour). Lorsque l’état de la personne âgée ne s’améliore pas, ou qu’il se dégrade, au cours de l’hospitalisation ou du passage en moyen séjour, le patient peut être orienté en USLD. Centrés sur la prise en charge médicale des personnes âgées accueillies, les USLD proposent un suivi médico-psychosocial rapproché, des actes médicaux, une permanence médicale, une présence infirmière continue et l’accès à un plateau technique minimum. L’ensemble des établissements est en mesure d’accueillir des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer (ou maladies apparentées). Certains ont créé des unités spécifiques particulièrement adaptées à l’accueil de ces personnes.
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Logements foyers. Formule intermédiaire entre le domicile et l’hébergement collectif, créés en 1954, ces établissements prennent la forme de logements autonomes regroupés auxquels sont associés des services collectifs, à usage facultatif, que les personnes n’auraient peut-être pas pu s’offrir seules, tels que restauration, blanchissage, infirmerie, aide ménagère... Le logement-foyer est un établissement médico-social destiné aux personnes autonomes (seules ou en couple). Ils offrent des appartements (studios le plus souvent, T1 ou T2), équipés d’un coin cuisine et de sanitaires indépendants. Ces logements individuels locatifs regroupés dans un même immeuble, avec la présence d’un gardien. Les personnes âgées ont la possibilité d’emménager avec leurs meubles, et effets personnels et de vivre de manière habituelle dans un logement indépendant. Ces établissements ne sont pas médicalisés et n’assurent pas de soins en interne. Cependant, de la même façon qu’à domicile, les personnes peuvent avoir recours à des services extérieurs (aide à domicile, infirmiers...). Les logementsservices sont disponibles en accession ou en location. Les logements-foyers relèvent le plus souvent du secteur social et médico-social, 70% étant publics). Les résidences-services Créées dans les années 1970 et 1980, relevant essentiellement du domaine privé, les résidences-services sont réservées aux plus de 55 ans autonomes. Souvent constituées d’appartements individuels de 1, 2, 3 ou 4 pièces, voire parfois de petits pavillons, elles proposent, à la vente ou en location, des logements dans des résidences qui intègrent des services à la carte, dont l’usage est facultatif et payant, ainsi que des services paramédicaux. Le problème principal est cette notion de services payants, qui peut vite s’avérer trop important car les services sont facturés aux propriétaires ou aux locataires, en plus des charges classiques, même si l’appartement est vacant et les prestations non utilisées. A terme, l’appellation EHPA (Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées) devrait recouvrir toutes les structures qui ne sont pas sou-
mises à l’obligation de signer une convention tripartite, les foyers-logements et résidences-appartements notamment. Par contre, si elles sont soumises à des conventions avec la DDASS, elles sont maintenant regroupées sous le sigle d’EHPAD (Etablissement d’hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes).
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Plan d’une résidence-service, à Angoulême, construite en 2010 par l’agence Meyer-Coustou et associés
OFFRES ET ACTEURS
Plan -Réalisation de logements-foyers, à Bruyère-sur-Oise, par l’atelier Laroche-Chorao
EHPAD (Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes)
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Peu à peu, les politiques de santé et du vieillissement ont visé à remettre en cause l’emprise du modèle gérontologique, médico-centré, voire palliatif dans les établissements d’accueil aux personnes âgées, à la faveur d’une approche plus personnelle des individus, avec leurs expériences, leurs passés, mais aussi leurs futures vies au sein de l’établissement. L’instauration du projet de vie dans les politiques des établissements marque un tournant important dans la manière de percevoir le vieillissement et la vie en institutions. Le projet de vie permet à la personne de faire part de ses attentes, ses besoins et ses aspirations. Exprimé, il permet de prendre en compte les attentes de chacun pour tenter de créer un établissement, des espaces, des ambiances, qui soient au plus près des attentes des personnes âgées concernées. Il permet d’inscrire une demande individuelle dans le cadre plus élargi de la collectivité. Les nouveaux établissements de type EHPAD doivent prendre en compte la définition de ce projet de vie dans l’élaboration du projet architectural, de manière à être plus en lien avec les modes de vie des personnes âgées, pour créer des lieux du vieillir au delà de la question du palliatif. Le terme EHPAD regroupe l’ensemble des établissements accueillant des personnes âgées (maisons de retraites, logements-foyers, ...) à la condition qu’ils soient soumis à la convention tripartite1. La signature de cette convention permet à l’établissement de percevoir des crédits de fonctionnement. En contrepartie, l’EHPAD s’engage à respecter un cahier des charges et une démarche qualité pour accueillir les personnes âgées dans les meilleures conditions. Tous les domaines sont concernés, en particulier la qualité de vie au sein de l’établissement (accessibilité, sécurité, hygiène...), la personnalisation de la prise en charge (projet de vie individualisé, respect des rythmes de vie, proposition d’activités adaptées...) et les relations avec le résident et ses proches (bonne information, participation de la famille...). Les EHPAD offrent les services de base d’une maison de retraite (hébergement, restauration), ainsi que des soins médicaux et des assistances. L’hébergement peut se faire en chambres individuelles ou même en petits studios de vie. Les institutions et les professionnels considèrent leurs résidents avec la complexité de leur vie, passée et présente, composée de souvenirs et d’expériences, mais aussi de changements d’ordres psychiques ou psychologiques. 1 Texte, obligatoire depuis 2002, décrivant les caractéristiques générales du projet de vie et du projet de soins proposés aux résidents, et les modalités d’organisation des soins au sein de la maison de retraite. Il définit les missions, les orientations, et les valeurs sur lesquelles les professionnels vont s’appuyer dans leur action quotidienne. Le projet d’établissement est élaboré en concertation avec les résidents, le personnel, les intervenants extérieurs, ainsi que les organismes de contrôle de la maison de retraite. Signée pour cinq ans, cette convention définit les conditions de fonctionnement de l’établissement, tant sur le plan financier que sur celui de la qualité de la prise en charge des personnes hébergées et des soins qui sont prodigués à ces dernières. Par ailleurs, elle précise les objectifs et les modalités de l’évaluation de la maison de retraite. Cette dernière prend en retour des engagements d’amélioration et de développement de l’offre aux résidents, et négocie le financement des mesures qu’elle envisage de mettre en œuvre pour ce faire (recrutements, formation du personnel, aménagement des locaux, etc.).
La plupart des EHPAD possèdent une ou plusieurs unités de soins spécifiques accueillant des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et troubles apparentés. Certains établissements leur sont entièrement réservés. Ils répondent à des critères précis concernant la formation du personnel, les soins, la participation des familles. L’environnement (lumière, couleurs, sons...) et l’architecture des bâtiments sont également pensés pour optimiser la qualité de vie des malades et atténuer leurs troubles comportementaux. Globalement, on observe que si l’accompagnement personnalisé des résidents est un critère essentiel à l’hébergement en EHPAD, il peut être, dans les faits, difficile à mettre en oeuvre dans un lieu de vie collectif. Cependant, de plus en plus d’établissements trouvent les moyens de s’organiser pour respecter les rythmes de vie individuels et permettre à leurs résidents de mener la vie qu’ils souhaitent. «Il ne faut plus voir les maisons de retraite comme des structures fermées», insiste le Dr Stephan Meyer, médecin coordinateur en EHPAD.
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Les études récentes d’opinion réalisées par la DRESS (Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques) montrent que l’image des institutions, encore très mauvaise il y a quelques décennies s’est sensiblement améliorée et les personnes âgées sont moins catégoriques dans leur jugement, reconnaissant espérer y entrer le plus tard possible sans exclure toutefois cette éventuelle possibilité. On voit donc que les deux types d’hébergement ne sont pas opposés mais plutôt complémentaires. Certains pays d’Europe du Nord (Danemark, Pays-Bas) ont bien compris l’enjeu que représentait la transition entre ces deux types d’hébergements, en tentant de gommer les frontières qui existent entre maintien à domicile et institution en proposant une réponse globale coordonnée : l’habitat offert en institution n’est plus, depuis 1987, composé de chambres, mais de véritables logements (studios ou deux pièces)groupés autour de services à la carte. Par ailleurs, les logements adaptés, implantés en ville, bénéficient de la même offre de service qu’en institution, et ce 24h/24. Les politiques françaises, en comparaison, manquent encore de cohérence, bien qu’on observe de plus en plus de projets qui vont dans ce sens.
STRUCTURES PARALLÈLES / Parallèlement à toutes ces modifications dans le paysage des offres d’hébergement en institution, la loi de 1975 a permis l’ouverture de services réservés aux personnes âgées, au sein même des établissements. L’unité de soins spécifiques Alzheimer Ces unités offrent un accompagnement et/ou des soins spécifiques aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’un syndrome apparenté. Situés au sein d’un établissement d’hébergement, ces lieux répondent à des critères précis d’adaptation architecturale, de qualification du personnel, de participation des familles, de projet de vie propre à chaque résident et de soins spécifiques. Deux modes d’accueil particuliers se sont principalement développés dans les maisons de retraite. Ils participent également à la prise en charge des personnes âgées : l’hébergement temporaire et l’accueil de jour.
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Les offres d’hébergement temporaire Il permet aux personnes âgées d’être hébergées quelques semaines ou quelques mois en raison d’un maintien à domicile momentanément compromis. Il permet aussi la prévention de situation de crise, d’épuisement de l’aidant, une gestion de la transmission entre l’hôpital et le domicile (sans se substituer à une prise en charge de soins de suite) ou, enfin, de préparer la personne âgée à un futur hébergement permanent en permettant un premier essai de vie en collectivité. Cette formule d’hébergement est proposée soit par des structures autonomes, soit par des établissements d’hébergement permanent (logement-foyer ou maison de retraite) qui disposent de chambres ou studios réservés ou non à cet usage. L’accueil de jour Ce sont soit des structures autonomes, soit des structures rattachées à un établissement d’hébergement avec des locaux dédiés à cet accueil. Elles reçoivent pour une ou plusieurs journées par semaine, voire demi-journées, uniquement des personnes vivant à domicile. On distingue plusieurs formes d’accueil. • Un accueil simple, voire quasi informel, par des établissements qui accueillent (certains depuis longtemps) des personnes extérieures pour le repas de midi. Ces personnes prolongent leur “visite” en participant aux diverses animations organisées dans l’établissement. • L’accueil de jour “classique” qui consiste à recevoir des personnes valides ou semi-valides qui participent aux activités d’animation de l’établissement. La qualité de cette animation est un facteur fondamental de l’accueil de jour. • L’accueil de jour avec prise en charge spécifique des pathologies des personnes accueillies, comme la maladie d’Alzheimer (ou syndromes apparentés). La prise en charge est réalisée par petits groupes avec un personnel qualifié et compétent qui intervient soit de façon constante (infirmier, psycho-
logue, aide médico-psychologique), soit en fonction du projet de vie et des besoins des personnes accueillies (psychomotricien, orthophoniste, masseur kinésithérapeute...). Les CANTOUS (Centre d’Activité Naturelle Tirées d’Occupation Utiles)
La salle du CANTOU, préparation du repas.
41 OFFRES ET ACTEURS
L’un des premiers acteurs à explorer une autre conception de la prise en charge des personnes psychiatriquement dépendantes (type maladie d’Alzheimer) est Georges Caussanel, directeur d’un foyer à Rueil-Malmaison. En 1977, il reprend le terme de CANTOU qui en Occitan signifie « coin du feu ». L’originalité du projet est d’associer un nouveau concept d’hébergement à un nouveau mode de prise en charge. Du point de vue spatial, le CANTOU est une petite structure de 12 à 15 chambres ouvertes sur un espace de vie collective, favorable à une sociabilité des habitants. Dans cette structure familiale animée par un(e) « maître(sse) de maison», la vie des personnes âgées est organisée autour de la participation aux tâches domestiques, chaque activité de la vie quotidienne étant exploitée à des fins de rééducation, de maintien de l’autonomie et également d’animation. Les familles sont largement invitées à participer à la vie quotidienne. L’objectif est de prévenir la détérioration mentale et physique des habitants en leur offrant des espaces où il est aisé de se repérer, avec des repères chronologiques simples d’identification. Il s’agit aussi de faire cohabiter dans des petites unités des personnes âgées séniles avec d’autres moins désorientées pour stimuler les premières et tenter de préserver leur autonomie. Aujourd’hui, ces petites unités peuvent être créés au sein des EHPAD.
ALTERNATIVES/ Les Relais SEPIA (Secteur Expérimental pour la Programmation Innovante et l’habitat des personnes Âgées)
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En 1989 est lancé le programme SEPIA. Jeanine Rivoire1 rappelle le contexte d’alors : « Nous constations une multiplicité d’établissements “ clés en main ” – peu satisfaisants, trop médicalisés – qui évitaient la question du projet de vie : la démarche SEPIA marque la volonté de réagir contre cette tendance, en se reposant la question des attentes des personnes âgées et en imaginant d’autres types de réponses que les habituels MAPA maisons d’accueil pour les personnes âgées) et les logements foyers. » Au centre de la démarche, il y a donc la volonté de se mettre à l’écoute des personnes âgées et des personnels qui travaillent avec elles afin de concevoir des lieux où les personnes âgées restent acteurs et décideurs de leur vie. Les opérations SEPIA cherchaient à concrétiser quelques principes : l’établissement est un lieu de vie, donc un lieu de choix ; la dépendance, handicap dans la capacité à faire seul, ne doit pas entraîner la confiscation des décisions de la vie quotidienne ; l’établissement doit permettre des prestations personnalisées... En somme, il s’agit d’affirmer que les personnes âgées restent acteurs et décideurs de leur vie.
Relais SEPIA, lieu de vie communautaire
Malgré les discours parfois alarmistes sur le vieillissement démographique, ces 20-30 dernières années ont fait face à une dédramatisation de la vieillesse. Les personnes âgées deviennent plus autonomes, plus actives. Elles affirment une volonté de prendre leur vieillesse (voire leur fin de vie) en main, de pouvoir choisir des solutions d’habitat qui leur conviennent. Cette dynamique cherche à apporter une nuance à une approche jugée trop collective des réponses actuelles (maisons de retraite avec des «batteries de chambres, alignées», ...) . On voit apparaître une réelle volonté d’être acteur, de réinventer les lieux du vieillir,
1 Jeanine RIVOIRE «Les enseignements du programme SEPIA» in Des bâtiments au public - L’habitat des personnes âgées, Direction Générale de l’Urbanisme, de l’habitat et de la Construction, 1997, p.41
et de porter un regard nouveau sur l’expérience du vieillissement. Par ailleurs, la hausse du prix de l’immobilier et du coût de la vie, beaucoup de personnes âgées éprouvent des difficultés à trouver une solution de logement qui leur soit abordable et confortable. De-même, les coûts importants d’un placement en maison de retraite ou même d’une adaptation du logement privé encouragent les familles et les personnes âgées elles-même à trouver de nouvelles alternatives.
Elles démontrent aussi une prise de conscience que le confort et la médicalisation, bien qu’ils séduisent par leur aspect sécurisant, ne sont pas des conditions suffisantes pour créer un logement qui prennent la mesure de l’expérience du vieillissement des personnes âgées. L’un des enjeux principaux en matière de politique de la vieillesse est de remettre en cause l’emprise du modèle gérontologique, médico-centré, à la faveur d’une approche plus personnelle des individus, avec leurs expériences, leurs passés, leurs vécus, mais aussi leurs futures vies au sein de l’établissement, du logement. Le vieillissement doit être un projet et non un événement subi, ce qui suppose des «acteurs», éduqués et équipés pour se construire un destin positif et original qui ne soit pas empruntés aux médias, ni inconsciemment fataliste, ni réductibles aux clichés sociaux. Il s’agit de conserver et de faire valoir ce droit-devoir d’être acteur de son habitat, du lieu de son vieillir.
Diversité des offres d’habitat pour personnes âgées. De haut en bas, cantous, habitat intergénérationnel, et habitat kangourou
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D’autres formes d’habitat, portées pour la plupart par des initiatives citoyennes, commencent à fleurir sur le territoire français : logements coopératifs, habitat intergénérationnel, habitat kangourou (colocation entre personne âgée et étudiant, avec échanges de service), colocation de personnes âgées, maisons Abbeyfield (habitat groupé autogéré de personnes âgées) ou maison des Babayagas (habitat groupé des femmes), etc. A travers cette diversité d’expérimentations, il nous faut percevoir la volonté de proposer un horizon beaucoup plus vaste et plus articulé que la simplification domicile-établissement qui finit toujours par enfermer la personne âgée dans un concept limité en contenus et en possibilités. Toutes ces expérimentations de nouveaux types de logements, impliqués dans le processus du vieillissement, ainsi que l’information qu’elles relaient petit à petit, ont créé un climat favorable à la réalisation de projets innovants.
2.3 OBJECTIFS COMMUNS / CHAMPS D’INVESTIGATION DIFFÉRENTS OBJECTIFS COMMUNS /
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Les questions du cadre de vie et de l’habitat représentent un nouvel axe fort des politiques du bien vieillir. C’est pourquoi cette branche devrait avoir partie liée avec la politique de l’habitat, de manière à répondre de façon la plus adéquate aux enjeux qu’elles représentent. La pensée du logement des personnes âgées comme un élément du bien vieillir, conçu dans un environnement favorable, mixant les générations, à proximité de services et d’équipements, devrait être fortement encouragé. Ces démarches doivent être réalisées en gardant à l’esprit que les politiques du bien vieillir sont à mener sur la durée. Tout d’abord parce que la mise en place de ces actions (adaptation du logement, politiques de l’urbanisme, développement des habitats intermédiaires, aménagement des logements...), puis leur réussite peuvent prendre du temps. Par ailleurs, pour avoir un retour critique avec suffisamment de recul, qui permette de «tester» de nouvelles formes d’habitat, de les évaluer et les adapter dans l’optique d’une éventuelle généralisation, la durée minimale envisagée est de cinq ans d’expérimentation. Puis, dans le cas où ces propositions seraient retenues, les politiques devront ajuster les outils et méthodes pour expérimenter et évaluer ces nouvelles voies. Une feuille de route présentant clairement le calendrier et les objectifs recherchés, liée à une organisation à la manière d’un projet pourraient être définies afin de tenir les démarches expérimentales des nombreux chantiers et en tirer des conclusions opérationnelles et pérennes. C’est ainsi qu’a procédé l’Allemagne depuis 15 ans maintenant. Les politiques urbaines doivent s’approprier les enjeux liés au vieillissement de la population, d’autant plus que les questions qui y sont liées ne représentent pas des problèmes ponctuels à résoudre, mais une lutte permanente, concernant de nombreuses personnes.« Les autorités locales doivent véritablement se saisir du problème. Il leur revient de donner le sens (dans la double acceptation du terme : la direction et la signification) des actions à entreprendre ou à poursuivre.1». Pour cela, il faut mener des recherches sur le terrain, afin de mieux connaître la réalité locale du vieillissement. Par la suite, on établit un diagnostic qui permettra, par une approche plus fine, d’apporter des réponses au plus proche possibles des besoins et attentes de la population, en intégrant les interventions ponctuelles dans une vision d’ensemble de l’agglomération. La perception citoyenne qui ressort de ces études débouche sur cinq grands objectifs fondamentaux à avoir vis-à-vis de l’architecture et des concepts d’accueil de notre secteur :
1Georges CAVALLIER, «Vieillir, un enjeu urbain», in Villes et vieillir, La Documentation Française, 2004, p.24
Traduisant un choix collectif pour le bien vieillir, ces recherches devraient impliquer de nouveaux acteurs. Comme les communes et les agglomérations qui se doivent de prendre en compte le vieillissement dans les documents locaux d’urbanisme, il s’agirait par ailleurs de favoriser les échanges de pratiques et la promotion d’expériences probantes entre les villes, les bailleurs sociaux, les agences d’urbanisme... Il s’agit, par ces initiatives, d’encourager le développement d’habitats adaptables et adaptés au vieillissement et à la perte d’autonomie, et pas seulement en terme d’espace privatif, mais aussi en termes d’espaces publics et de services de proximité, ou encore en terme de possibilités de sociabilité. Il s’agit là de nouveaux types de domiciles impliqués dans les processus de vieillissement. Ces démarches et recherches visent à enrichir un éventail de structures à taille humaine adaptées aux différents profils de la personne âgée.
1 Jean-Bernard RACINE «Pour une Maison des ainés et des générations au cœur de la cité» in Rapport «Seniors et Cité : un problème de politique publique», Suisse, 2009
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• la nécessité d’adapter l’espace et le mobilier intérieurs aux réalités quotidiennes de la personne âgée, voire du personnel. • l’adaptation de l’architecture familiale permettant le maintien à domicile, • le souci d’une bonne intégration dans l’environnement extérieur, qu’elle soit d’ordre social comme architectural, • la réalisation d’un éventail de structures à taille humaine qui soient adaptées aux différents profils des personnes âgées, • le développement d’un urbanisme accessible et praticable par tous Les questions de la dynamique du lien social, de l’intégration dans la ville et le quartier, du rôle dans les réseaux sociaux (familiaux, amicaux, ou associatifs), sont des composantes essentielles du bien vieillir et de la prévention de la perte d’autonomie. Il s’agit de créer un lien urbain, physique mais aussi social, qui soit une véritable connexion entre la personne âgée et son environnement. Cette connexion ne peut se faire que si l’on aborde les différentes échelles simultanément, au cours d’une recherche mêlant une diversité disciplinaire et œuvrant pour une mise en cohérence territoriale des différents acteurs, qu’ils soient privés ou publics. «Les enjeux du vieillissement doivent être explicitement intégrés aux stratégies d’agglomération1». A l’échelle de l’agglomération, intégrer la dimension du vieillissement dans les démarches globales de planification et de développement local (schéma de cohérence territoriale, programme local d’habitat, projet urbain, ...). A l’échelle du quartier, programme d’intérêt général dédié aux personnes âgées, dans une optique d’»utilité». A l’échelle de la proximité immédiate des personnes âgées en manque d’autonomie : assurer une coordination efficace des différents aidants (famille, sanitaires, sociale, ...) comme les CLIC : centre locaux d’information et de coordination gérontologique).
ACTIONS SOCIALES, «Ensemble on va plus loin» /
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Même si le vieillissement est encore perçu négativement dans l’imaginaire collectif, il faut admettre qu’avoir plus de 60 ans aujourd’hui n’a plus la même connotation que dans les décennies précédentes. Les nouveaux retraités peuvent escompter vivre encore plusieurs années actives, sans dépendance grave liée à la grande vieillesse. Cette évolution fait des retraités des acteurs majeurs de la vie publique. Il s’agit donc de changer les représentations sociales stéréotypées où la maladie, la mort sont encore prédominantes. La réalité actuelle du vieillissement démographique est tout autre dans la mesure où les personnes âgées sont globalement en bonne santé, mentale comme physique. L’arrivée à la retraite marque un seuil. On distingue deux théories concernant la retraite et son approche : La première, décrite par Cumming, Dean et Newel en 1960 et Guillemard en 1977 indique que le risque d’une retraite trop brutale et non préparée est qu’elle peut mener à un sentiment de dévalorisation, de frustration, à une dégradation de l’estime de soi et à des tendances dépressives. En effet, le retraité va tout d’abord démontrer un moins grand intérêt pour les activités sociales de tout ordre puis se retirer totalement de la société, se désinvestir : c’est la théorie du désengagement. La seconde, bien plus positive et exposée par Neugarten en 1974, Moschis en 1992 et Bourdelais en 1993, établit qu’il s’agit d’un événement normal de la vie et que l’on doit s’y préparer comme pour toutes les autres étapes de notre vie. Cependant, l’individu devra puiser davantage dans ses ressources personnelles et dans ses relations pour continuer à avoir son propre statut, sa propre identité au sein de la société et des personnes qui l’entourent. De cette façon, la retraite ne modifie en aucune façon le bien-être psychologique : c’est la théorie de la continuité. Mais de manière générale et quelque soit la façon dont se déroule ce passage à la retraite, celui-ci conduit l’individu à effectuer un certain nombre d’ajustements et de redéfinitions de ses rôles et objectifs, à se réorganiser dans cette nouvelle étape qui fait partie de sa vie. L’arrivée à la retraite marque l’entrée dans un nouvel espace des possibles : ils ont le temps, l’énergie, l’expérience et surtout la volonté de s’investir d’une manière qui ne soit plus professionnelle, mais toujours productive. Souvent, c’est la sociabilité associative qui prend le relais de la sociabilité professionnelle et assure une insertion sociale. On note d’ailleurs que 30% des 60-75 ans sont actifs dans une association. Il ressort d’études ponctuelles que les personnes âgées continuent à être actifs dans la vie sociale et qu’ils ne se limitent pas à la consommation de biens et de loisirs. Le vieillissement est alors vécu comme un processus dynamique et incessant de transformation dans son rapport à soi, aux autres et à son environnement.
Tirons un trait sur la solitude - Campagne de La Croix Rouge de Belgique
La participation, active et effective, de tous les habitants à la vie de la ville est plus souhaitable que jamais. Les personnes âgées sont les acteurs du devenir de leur ville et leur implication dans ce but est cruciale. Les personnes âgées deviennent des «outils» utiles pour la pensée d’un projet commun, car ils ont eu plus de vécus, d’expériences, de références. Elles sont un atout essentiel dans la transmission de leurs savoirs, élément moteur d’un savoir commun mieux consolidé, pouvant faire face en apportant certaines réponses aux enjeux de la société actuelle. Comme le montre le dicton populaire : «Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait» Il s’agit donc de valoriser une offre d’activités et de participation à la vie de la cité : vie municipale, relations intergénérationnelles, éducation, vie culturelle et sociale. D’où l’avantage de vivre en ville qui permet d’avoir l’occasion de vivre des expériences collectives et offre une proximité des services, écoles, d’accès aux soins et aux transports, en s’appuyant sur ce potentiel de sociabilité que la ville peut offrir. Par ailleurs, pour offrir les possibilités d’une meilleure insertion sociale des personnes âgées dans la vie de la cité, il s’agit d’assurer une mixité intergénérationnelle, permettant de lutter contre l’entre-soi.
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C’est pourquoi, afin de lutter contre la théorie du désengagement, il faut valoriser le potentiel d’action des personnes âgées. Elles sont véritablement des personnes ressources pour la ville. Il faut veiller à valoriser leur savoir-faire au profit de la collectivité territoriale. En leur donnant des moyens d’avoir un vieillissement actif, on démontre leur utilité sociale. Être reconnu et utile, accueilli et entouré,convaincu de son utilité, de sa place dans cette société urbaine sont autant de points essentiels au bien vieillir. En mobilisant le potentiel d’engagement des personnes âgées on agit selon une mentalité du «faire ensemble», qui tend à profiter et à mettre en valeur les compétences de chacun plutôt que ses faiblesses à travers des objectifs communs (potager commun, activités d’entraide sociale type aides aux devoirs, ateliers artistiques, ...) Contribuer aux projets qui les concernent directement est essentielle. Parties prenantes à l’ensemble des démarches de démocratie participative.
L’intergénérationnel, ou l’exemple type de la lutte contre l’entre-soi
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Cependant, pour assurer l’adéquation de ces actions sociales, il faut rendre visible cette offre à des personnes âgées parfois déconnectées de la vie de la cité. Pour ceci, l’enjeu des cercles sociaux est essentiel. L’anonymat propre aux villes a tendance à ne pas laisser transparaître ces actions. C’est pourquoi le développement d’un premier cercle de sociabilité que représentent les voisins, les commerçants de proximité est crucial pour lutter contre l’isolement. A travers des relations de proximité, cette microsociété est une première étape, une ouverture sur la société urbaine. Il est crucial de développer des relations d’échanges et de proximité pour lutter contre l’isolement. Comment construire une sociabilité dans cet anonymat propre aux villes ? A l’échelle du quartier, il s’agit d’instaurer des programmes d’intérêt général dédiés aux personnes âgées. A l’échelle de la proximité immédiate des personnes âgées en manque d’autonomie, il faut assurer une coordination efficace des différents aidants (famille, sanitaires, sociale, ...) (comme les CLIC : centre locaux d’information et de coordination gérontologique) mais aussi faire valoir le rôle important des CCAS (sorties culturelles, voyages, clubs, ateliers de création artistiques, activités inter-générationnelles, ...) La dynamique du lien social, l’intégration dans la ville et le quartier, dans les réseaux sociaux, qu’ils soient familiaux ou amicaux, sont des composantes essentielles du bien vieillir et de la prévention de la perte d’autonomie. On remarque que souvent les femmes (veuves ou non) sont souvent plus impliquées au départ dans ces actions sociales, car encore bien connectées au monde extérieur (aller faire les courses, aller chez le coiffeur, ...)
En meilleure forme générale que leurs aînés, on observe aujourd’hui que les personnes âgées entendent s’impliquer dans la vie politique, économique et sociale. Pour conserver une autonomie le plus longtemps possible et agir dans la ville, elles ont besoin de structures facilement accessibles et efficaces. Habitat, transport, ou encore services doivent être pensés pour répondre aux deux attentes majeures des personnes âgées : l’autonomie et la participation. La pensée du vieillissement est aujourd’hui en mutation et tend à favoriser l’accessibilité du logement, des espaces publics et des transports en commun car il a été acquis que c’est aussi hors du logement privatif que se créent les relations sociales.
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URBANISME /
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Les parcours résidentiels des personnes âgées ne doivent pas contribuer à l’éclatement des villes, facteur d’inégalité et exclusion. Il faut donc éviter à tout prix la ségrégation spatiale et générationnelle. La ville est un cosmos où se croisent des citadins de toutes origines, de toutes conditions, et c’est cette diversité qu’il faut encourager. «Elle (la ville) doit fonctionner comme un «shaker» qui mélange et homogénéise et non pas comme un «tamis» qui sépare et ségrège1.» C’est pourquoi la diversité sociale et la mixité générationnelle doivent inspirer toute politique urbaine responsable. Il faut éviter au maximum la spécialisation du territoire par le rassemblement des personnes âgées dans des établissements d’accueil spécialisés sans connexion avec l’extérieur («geriatrics parks»), dans des ensembles résidentiels (sénioriales) ou, pire encore, dans des villages réservés aux seniors2 construits dans la périphérie lointaine, complètement déconnectés du tissu urbain, pratiquement coupés de tout contact avec le reste de la ville. «La question n’est plus alors «Ville et Vieillir» mais «Ville ou Vieillir»3».Ces offres, privées, sont pensées épisodiquement, sans grande cohérence avec le territoire dans lequel elles s’implantent, sans lien avec le contexte, sans interdépendance... Intéressés par le marché de l’«or gris» que représentent aujourd’hui les personnes âgées, ces offres visent une population aisée, qui peut se permettre les offres proposées.
Sun City, en Arizona, Etats-Unis, ville réservée aux plus de 65 ans. Kendrick Brinson
1 Georges CAVALLIER, «Le vieillissement, un enjeu de société» in Villes et vieillir, Institut des villes, Collection Villes et Société, La documentation Française, 2004, p. 23 2 Exemple «type» de SunCity en Arizona (États-Unis). avec plus de 38 000 habitants, dont aucun de moins de 65 ans C’est une unincorporated area, c’est-à-dire qu’elle ne dépend d’aucune ville et est autogérée par ses habitants donc complètement déconnectée de son contexte. Elle est également protégée de l’extérieur par une enceinte et un accès contrôlé. 3 Michel ERASME, «La ville, lieu d’échanges et de partage - Point de vue» in Villes et vieillir, Institut des villes, Collection Villes et Société, La documentation Française, 2004, p. 82
Contrairement aux États-Unis, où la ségrégation spatiale et générationnelle est très marquée, l’Europe affirme son attachement à la mixité sociale et générationnelle, développant des activités centrées sur la famille, les amis, les loisirs, le quartier, la vie associative...Il est clair que le fait de spécialiser des territoires urbains pour les personnes âgées reviendrait à les exclure de la société urbaine, les rayer du nombre des citadins, et serait totalement en désaccord avec le concept recherché de ville pour tous les âges. C’est pourquoi il est primordial de travailler les différents plans d’agglomération (PLH (Plan Local de l’Habitat), PDU (Plan de Déplacements Urbains), SCOT (Schéma de COhérence Territoriale)...) en concertation, de manière à trouver un fil directeur commun qui soit générateur d’un «bien vieillir ensemble», en articulant politique locale de l’habitat et politique du vieillissement.
Ce polycentrisme implique une certaine liberté de mouvement, une mobilité urbaine qui permettent de créer des liens entre ces différents espaces. Les «traversées de la ville» favorisent une certaine mixité, un brassage de populations diverses. C’est pourquoi les déplacements, à travers une offre de transports en communs adaptée représentent un aspect important du travail sur le bien vieillir. Promouvoir la mobilité des personnes âgées, c’est leur permettre de garder un éventail de choix d’offres urbaines qui ne soient pas limitées géographiquement et ainsi maintenir la liberté de décisions. Ce réseau de déplacement offre la possibilité d’un accès à l’ailleurs, même si c’est pour ne jamais y aller, il reste envisageable. «Quand le lointain est inaccessible, le proche est douloureux» (Jack London) Importance de la relation entre accessibilité et mobilité, car l’un ne va pas sans l’autre. Pour les réseaux urbains de surface (bus, trams, trains) comme pour ceux enterrés, la question de l’accessibilité porte autant sur la conception des véhicules (plancher surbaissé, mains courantes, ...) que sur l’aménagement des points d’attente (arrêts de bus abrités, avec possibilité de s’asseoir, trottoirs franchissables, ou accès de plain pied...). On peut aussi développer des offres de transports innovantes, comme on a pu le voir dans certaines villes de France (Créabus : transport à la
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La qualité d’un habitat revient aussi à son environnement direct, hors de la sphère privée. Ce dernier doit être adapté et accessible, et offrir une mixité d’équipements, d’activités, de services et de commerces de proximité. Certains peuvent être plus spécialisés pour les personnes âgées, d’autres, la grande majorité, communs à tous. La cohabitation des âges ne concerne pas seulement la question de l’habitat, mais aussi celle des espaces publics. Il s’agit d’offrir une «ville de la rencontre» au travers, notamment, du travail sur les espaces publics (gares, grandes surfaces, parcs, centre-ville) qui doivent être aisément accessibles pour les personnes âgées, de manière à favoriser la rencontre, à multiplier les occasions d’échanges et d’acculturation mutuelle. Ces espaces, s’ils sont plaisants et accessibles, représentent autant d’opportunités urbaines, de rencontre, de mixité. Il est par ailleurs important que ce ne soit pas uniquement le centre-ville qui bénéficie de ces offres, mais aussi les autres quartiers ou communes environnantes, qui doivent aussi représenter un attrait. Il faut encourager un polycentrisme, facteur d’une autre sorte de mixité et qui empêche des morcellements de l’espace en différentes parts, qui pourraient cesser de «faire société» entre elles.
demande pour desservir des zones urbaines peu denses et aux heures creuses; chèques domicile-liberté, à Lyon, qui permettent aux personnes âgées de faire des sorties avec un accompagnateur qualifié, ou encore Grenoble, avec un réseau de transports en public totalement accessible...). Cependant, un des problèmes principaux des transports en commun est qu’ils sont organisés en fonction de la population active, permettant notamment des liaisons entre les territoires résidentiels des communes périurbaines et les pôles d’emploi considérés comme essentiellement centraux, selon une logique radiale. Or la gérontocroissance des communes périurbaines appelle une réorganisation des transports urbains, avec le développement des relations entre les territoires résidentiels et les zones commerciales ou les espaces de loisirs. « La mobilité, c’est-à-dire la capacité à se déplacer, est autant un besoin fondamental, celui d’accomplir des mouvements physiques, qu’une condition préalable essentielle pour faire face aux tâches quotidiennes, entretenir des contacts avec autrui et participer à tout type d’activité hors de chez soi.1 »
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Les espaces publics, dans le sens large du terme (voiries, places, squares, rues, jardins, entrées des immeubles, ...) représentent des espaces de ville, mais aussi et surtout des espaces de vie. Cadres du quotidien, lieux de passages ou de halte, ils jouent un rôle essentiel dans l’agglomération urbaine. Et ils peuvent être, pour les personnes âgées notamment, des lieux de convivialité, de retrouvailles ou au contraire des zones de danger car peu adaptés à un déplacement autonome. L’objectif est donc de tendre à ce que ces lieux soient hospitaliers, sûrs et surtout praticables par tous. L’aménagement physique de ces espaces et des itinéraires qui y mènent reste l’une des conditions primordiales à remplir pour repousser les limites géographiques de l’autonomie de certaines personnes âgées.
Des espaces publics accessibles et agréables, porteurs d’une sociabilité / www.ville-illzach.fr
1 MOLLENKOPF H., MARCELLINI F., RUOPPILA I., « La mobilité des personnes âgées en Allemagne et en Europe », in Retraite et Société, N°26, 1999
ARCHITECTURE / La réglementation de la loi du 11 février 2005 (pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées) implique une prise en compte des personnes à mobilité réduites dans les nouvelles constructions, permettant ainsi une accessibilité de tous. Les offres du domaine publique sont de plus en plus présentes et permettent des liens avec la ville, une meilleure intégration à la fois du bâtiment mais aussi des personnes qui y vivent. En proposant pour la plupart des nouveaux logements des programmes mixtes (tertiaire + logements), elles apportent une solution à la recherche de mixité sociale et programmatique. Par ailleurs, l’installation de locaux tertiaires tend à favoriser un accès PMR, qui peut finalement profiter aux logements dans les étages. Il s’agirait par ailleurs de mêler les promoteurs et propriétaires privés à ces réflexions, afin de construire des espaces en continuité. En France, la politique du maintien à domicile a peu développé les moyens d’adaptation des logements mais s’est d’abord bien plus focalisée sur les dispositifs d’aide à domicile. Aujourd’hui, l’enjeu de l’adaptation est très grande car on observe que toutes les enquêtes confirment le désir majoritaire de «vivre et mourir chez soi». «Ce chez soi signifie avant tout la liberté d’y organiser sa vie et de maîtriser certains choix : avec qui vivre, garder un animal, conserver ses meubles et son décor, décider de son rythme entre vie privée et sociale, entre 1 Paulette GUINCHARD-KUNSTLER, «Habiter ce n’est pas seulement disposer d’un toit - Point de vue,», in Villes et vieillir, Institut des villes, Collection Villes et Société, La documentation Française, 2004, p. 126
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Mais le premier chaînon pour accéder aux espaces publics se trouve finalement sur le pas de porte. Il faut créer du lien entre la sortie de domicile, depuis son seuil d’entrée, et la rue, le quartier, les activités extérieures. «Je ne sors plus de chez moi pour aller chez le commerçant ou pour aller prendre le bus, parce qu’il y a trop de marches d’escaliers au pied de mon immeuble,» ou «parce que le trottoir est trop haut» ou «parce que le feu rouge n’est pas suffisamment long pour traverser la rue1» L’espace public doit donc être aménagé dans ce qu’il implique comme seuil, comme liant entre le domicile et l’opportunité de relations urbaines. Les nouvelles constructions sont pensées dans cette optique, mais il reste encore du travail pour les habitations existantes, afin d’ouvrir les lieux de vie des personnes âgées sur l’extérieur. C e s actions sont proposées dans une logique de globalité, pour répondre de façon assez homogène aux problèmes de chacun. Sans doute qu’elles ne sont parfois peut-être pas assez proches des besoins des personnes âgées, mais elles tendent à s’en approcher. C’est dans le domaine de l’architecture, de l’habitat que pourront finalement être menées des actions presque au cas par cas, au plus près des réalités de chaque individu, afin d’apporter une réponse la mieux adaptée possible.
sdedans et dehors.1 »
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Maintien à domicile.
Pour ce qui est des logements existants et de leur adaptation, il faut tout d’abord identifier les besoins des personnes, comprendre leurs modes de vie (quels espaces ont le plus d’importance à leur yeux ? pourquoi ? comment les améliorer ?, ...) pour enfin mettre en place les aménagements destinées à mieux correspondre aux attentes des personnes. Ces modifications impactent plus ou moins le logement, elles peuvent représenter des petits aménagements ponctuels (abaissement des équipements de cuisine, remplacement de meubles qui ne sont plus adaptés, ...) ou des transformations plus importantes (reconfiguration des salles de bains, des escaliers, améliorations des revêtements de sols, ...). L’enjeu principal étant d’adapter le logement tout en conservant ses atouts principaux, de manière à faire que le domicile reste l’habitat ordinaire, c’est-à-dire un lieu où l’individu trouvera les repères, à la fois physiques et mentaux, nécessaires à son «bien vieillir». L’attachement à son chez-soi, dans lequel on est un véritable «maître chez soi» relève d’une véritable culture du domicile, très présente en France. Et ces modifications ont tendance à renvoyer à une perte du contrôle de son espace. C’est pourquoi la démarche d’un dialogue avec les habitants se révèle indispensable dans la mesure où ce sont eux qui prennent les décisions, voire les risques de l’adaptation de leur logement à leur condition physique, tout en étant conseillés au plus proches de leurs attentes. Cette médiation est très importante car elle implique la notion d’être acteur de son espace, de son chezsoi, et non pas «victime» du choix d’autre personnes pour notre espace. «- Cet espace est ma propriété, il m’appartient. Normalement, il ne m’est
1 (Extraits de «Personnes âgées et habitat - guide technique, juridique et réglementaire» - Hors Série du Moniteur, 1992.)
contesté par personne. On est dans le registre du social, dans le rapport à autrui. - Cet espace est adapté à mes besoins à mes aspirations profondes. On est dans la relation à soi.1».
Nouvel espace à conquérir
Pour ce faire, une fois de plus, l’importance d’un dialogue avec les personnes âgées, futures habitantes des lieux, et malgré tout, encore trop sou1 Elian DJAOUI, Le domicile comme espace psychique, in Dossier : La culture du domicile, Documents-CLEIRPPA - Cahier N°21 - Janvier 2006, p. 11
2 Philippe HEDIN, Danic KOSLOWSKI, «Aider les personnes âgées à domicile, des liens complexes», in Le Sociographe, 2003, p.11.
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Dans le cas de constructions neuves, il faut en priorité privilégier les solutions évolutives alliant diversité, souplesse, adaptabilité et réversibilité, pour créer un sentiment d’un chez-soi sûr, dans lequel les risques sont faibles. Le logement doit s’adapter au vieillissement futur de ses usagers, à leurs éventuelles difficultés, et non l’inverse. L’espace architectural du logement doit être un espace ressource, qui contribue au bien-être des habitants, et non un espace contrainte, qui le rend difficile à vivre. Comme le diraient Pierre Hedin et Danic Koslowski, «le domicile comme une surface-écran où se projette le paysage interne de la personne âgée avec sa continuité sécurisante qui permet qu’elle s’y reconnaisse. On fait corps avec son domicile2». Il est important que le bâti, dans sa conception et sa réalisation, puisse anticiper les pertes progressives d’autonomie, et ne devienne pas accidentogène. L’espace doit être aménagé en conséquence. Il ouvre aux émotions et contribue au bien-être physique et psychique de la personne nécessaire à la sécurité intérieure sans laquelle ne peut exister d’épanouissement.
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vent ignorées, est primordial. Pour essayer de faire un logement qui soit au plus près d’un état d’esprit, d’un mode de vie actuels, il faut avoir, dans l’appréhension du projet, et ce dès les premières esquisses, une prise en compte des trajectoires individuelles de chacun. Le droit à la parole, à la liberté de choix sont essentiels. Malgré ce qu’en disent les éventuels aidants, les personnes âgées ne sont pas des personnes à infantiliser, qui doivent accepter ce qui leur est proscrit. Il faut éviter à tout prix une simple adaptabilité du logement, basée uniquement sur des règlements et lois. Il faut penser les espaces au-delà de la simple norme PMR. Il est crucial de comprendre la nécessité du respect des désirs et du libre arbitre des personnes âgées, car chacun a des manières diverses de vivre son vieillir et donc autant de manière de vivre les lieux de son vieillir. Ce qui fonctionne chez l’un ne fonctionne pas forcément chez l’autre. «Il faut résolument passer d’une logique de «guichet» à une logique de «projet», faire du «sur-mesure» plutôt que du «prêt-à-porter».1». Par ailleurs, le rôle social dont sont pourvues les personnes âgées aujourd’hui fait qu’elles sont de plus en plus nombreuses à s’impliquer dans les lieux de leur vieillir. Au travers d’informations, de commentaires, de retour d’expériences, elles peuvent avoir développé une certaine culture de l’habitat, liée à un regard nouveau sur l’expérience du vieillissement. Et elles veulent affirmer ce droit-devoir de se construire sur mesure, de façon libre et créative, un habitat et un contexte relationnel pour la vieillesse et conformes à l’identité personnelle de chacun. La maison, plus encore que le paysage est un “état d’âme“ 2Il revient alors aux architectes de savoir porter ces idées du mieux qu’il puisse, même si ce n’est pas dans ses habitudes. Ces nouvelles questions, différentes pour chaque individu, sont à chaque fois des opportunités d’étoffer sa culture de l’habitat. Il s’agit de saisir l’importance pour les architectes et les urbanistes de projeter le vieillir en ville comme un véritable projet, une offre, prête à être vécue. Pour ceci, il faut privilégier un travail collectif d’élaboration d’un projet: réponses nouvelles, plus flexibles et localisées, qui font éclater les divisions traditionnelles entre le maintien à domicile d’une part et l’hébergement collectif d’autre part. L’un des enjeux principaux est de définir les conditions de la fluidité des trois espaces de l’habitat (logement, parties communes, espace public) Les architectes ne créent pas seulement un logement, mais un véritable habitat, avec la notion de mode de vie, qui y est liée. «L’espace habité est le non-moi qui protège le moi3». Le logement ainsi projeté doit être en accord avec la personne telle qu’elle était hier, telle qu’elle est aujourd’hui et telle qu’elle sera demain. D’où l’importance d’un projet de vie. Le projet de vie correspond à la démarche qui cherche à restaurer, protéger et développer le plus possible la marge de choix de la personne, afin d’accroître sa qualité de vie. Le projet de vie est donc par définition personnel et singulier, dépendant
1 Georges CAVALLIER, «Vieillir, un enjeu urbain», in Villes et vieillir, Institut des villes, Collection Villes et Société, La documentation Française, 2004, p. 126 2
Gaston BACHELARD, La Poétique de l’espace, Paris, PUF, 1983, p.77
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Gaston BACHELARD, La Poétique de l’espace, Paris, PUF, 1983, p.24
de ce que vit et de ce qu’a vécu la personne malade, de son ressenti (lien entre passé-présent-futur). Il est aussi évolutif : il ne peut être figé et n’est le reflet que d’un moment de l’existence. Le projet de vie est un point de départ : à partir du sens donné à son projet de vie, de ses attentes, la personne âgée peut élaborer un projet de logement. Le projet de vie est le support du projet architectural. Il est aussi le résultat d’une élaboration, d’une maturation. Se projeter suppose une construction, un processus d’aller et retour entre envies et réel : ne pas se limiter dans ses choix, prendre des risques mais faire des choix qui puissent se concrétiser. Afin de proposer une multiplicité de choix qui pourraient correspondre à des projets de vie, il est important d’offrir un éventail plus large de figures, moins focalisées sur la vieillesse et sur la dépendance, mais plutôt sur le bien vieillir. La transmission de l’information est alors cruciale.
57 OFFRES ET ACTEURS
L’importance de la médiation et du dialogue avec les principaux concernés...
... Pour élaborer un projet architectural porté par le projet de vie de ces derniers.
3. PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
3.1 EHPAD DU BOIS D’ARTAS CARTE D’IDENTITÉ DU PROJET /
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Résidence mutualiste Bois d’Artas / EHPAD 1 rue Augereau – (quartier ZAC de Bonne) 38000 Grenoble Maître d’oeuvre : Studio Gardoni Maître d’ouvrage : Pluralis / Société d’habitat des Alpes Montant des travaux : 11,21 M€, dont 1,19 M€ par le Conseil général de l’Isère, la Métro pour l’aide à la pierre et l’aide à la performance énergétique (300 000 €), la ville de Grenoble (730 000 € au titre du Prêt Locatif Social) et le CNSA (500 000) €. SHON : 8227 m² Études : 2007 Livraison : 2012 Programme :
Ensemble immobilier mixte composé d’un EHPAD + 26 logements locatifs dont 12 pouvant accueillir des personnes âgées ou handicapées+ espace Convivi’âge + plateforme de service.
Capacité d’accueil :
Hébergement permanent : 70 places, dont 12 places en Unité Psycho Gériatrique. Hébergement Temporaire : 10 places Accueil de jour : 4 places Services et activités proposés : • Accès aux droits / Prestations sociales :
-Permanences juridiques -Conciliateur de justice -Permanence écrivain public -Permanence microcrédit -Tarification solidaire TAG
-Aide socio linguistique -Permanence CESF -Psychologue point écoute -Dispositif avant’ âge -Enfance / Familles
-Consultation planning familial/médecin PMI -Atelier p’tits pots -Ludothèque
• Développement social / Activités -Paniers solidaires -Pass culture -Réseau d’Echanges Réciproques de Savoirs -Atelier apprentissage du français -Accompagnement social -Aide socio-linguistique
-P’tits dèj -Atelier couture -Jardin collectif -Pôle informatique -Marche active -Association l’Âge d’or
PROJET DE VIE COLLECTIVE / La Résidence mutualiste du Bois d’Artas est un très bon exemple d’insertion urbaine. Prenant en compte le rôle de l’institution dans le réseau social, la proposition de bâtiment vise à être intégrée dans le contexte dans lequel elle s’implante et ce de plusieurs façons. L’idée qui a primé, lors de la phase de projet était de réussir une insertion, aussi bien architecturale, qu’urbaine ou encore sociale. Le pari est globalement assez réussi. Pôle majeur du lien intergénérationnel et de la communauté locale, d’où une nécessité absolue d’ouvrir au d’ouvrir l’accés au public et d’insérer le bâtiment dans le tissu local existant, de manière à ce qu’il crée un signal urbain Parcs, espaces verts, café, cafétéria, restaurant, salle de sport, salle de conférence, bibliothèque, théâtre, parc de jeux, espace de gymnastique , salle de spectacles... sont autant d’opportunités de lien social avec la communauté urbaine et de lutte contre l’entre-soi. La résidence est située à proximité de voies de transports en commun notamment la ligne 13, reliant Echirolles à Grenoble, à hauteur des quais de l’Isère, qui possède un arrêt dans la rue. Mais aussi les trams C et E, qui se situent à 5-10 minutes à pied. Cette proximité du réseau ne profite pas tellement aux personnes dépendantes hébergées dans l’EHPAD, qui ne sortent que très rarement, mais elle est très appréciée par leurs proches qui viennent leur rendre visite, par les personnes qui fréquentent les différents services et activités proposées, ou encore par les personnes habitant les logements locatifs des derniers niveaux. Par ailleurs, pour ceux possédant une voiture individuelle, le parking de la Caserne de Bonne, situé de l’autre côté de la rue, est accessible à tous. On trouve aussi un point AutoLib dans la rue Lazare.
61 PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
• Accompagnement à la scolarité : -Programme Malin -Accompagnement / Aides aux vacances -Espace 0-6 ans -RAM
Résidence des Bois d’Artas
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En continuité, côté «rue», depuis l’espace urbain (traitement de sol uniforme, porche d’abri avant d’entrer dans le hall de plain pied et très dégagé pour ne pas créer d’obstacles, ...) sur lequel il offre des vues directes depuis le hall d’accueil. On trouve aussi, sous le même porche, l’accès à l’Espace Convivi’âges, où se regroupent les activités de quartier. Le bâtiment offre aussi, coté coeur d’îlot, un espace vert accessible depuis la rue ou depuis l’accueil de la résidence, les Jardins d’Artas, ouvert à tous, et plutôt fréquenté (nounous ou mères avec leurs enfants, joueurs de cartes, amateurs de jardinage, ...), offrant des bancs, des espaces ombragés et un éclairage à la tombée du jour. Par ailleurs, on trouve dans ce jardin, un jardin pédagogique, où jardiner ensemble en échangeant des expériences et des savoirs, et en enseignant aux jeunes l’art du jardinage. Ce jardin pédagogique a été imaginé et créé par les habitants du quartier, et est ouvert et accessible à tous, y compris aux personnes à mobilité réduite. D’autre part, la résidence est très bien située car à proximité directe de toutes sortes de services et commerces de proximité. La Caserne de Bonne, située de l’autre côté de la rue, abrite en effet de nombreux magasins, des restaurants, une pharmacie, un jardin public avec jeux d’enfants, une banque, ... De surcroît, l’offre culturelle de proximité y est aussi très développée, avec l’Espace Convivi’âges et ses nombreuses activités (Réseau d’Échanges Réciproques de Savoirs, ateliers d’apprentissage du français, aide sociolinguistique,...). Sans oublier le cinéma du Méliès, et ses programmations variées par rapport aux cinémas du centre-ville.
L’entrée côté rue, le porche donnant sur l’accueil de la résidence, et sur l’espace Convivi’âges
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Et ses jardinières pédagogiques
PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
Le Jardin public du Bois d’Artas
Il existe deux sortes d’espaces collectifs au sein des établissements : certains sont fonctionnels, dédiés à l’administration, aux soins ou encore à la logistiques, d’autres représentent les espaces de vie communautaires et impliquent une forte dimension sociale, et leur conception peut être facteur ou non des échanges sociaux. De même, les circulations sont aussi un lieu social, au-delà du caractère strictement fonctionnel. La question des accès est très importante, car facteur d’animation, même si la relation n’est que visuelle, et non physique, d’où l’importance des vues et ouvertures sur l’extérieur. Dans la résidence du Bois d’Artas, on peut observer, depuis la rue comme depuis le jardin, de nombreuses ouvertures sur l’extérieur depuis les logements.
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Ouvertures sur l’extérieur
Le traitement des circulations est aussi crucial car c’est un espace clé, à la fois pour les relations qui peuvent s’y créer, mais aussi car c’est là que commencent les relations sociales, donc il se doit d’être traité de manière plaisante pour inviter au cheminement : traitement de sol clairs, éclairage suffisant, signalétique claire, et aussi des espaces qui ne soient pas rectilignes, avec des «batteries» de chambre, les unes à la suite des autres, sans repères visuels possibles. L’organisation du plan, en anneau, tend déjà à être moins monotone qu’une organisation linéaire. Par ailleurs, le centre de l’»anneau» est occupé par des jardins publics, qui favorisent une certaine animation. On voit sur les plans de la résidence que les espaces de circulation ne sont pas traités de manière rectiligne, mais au contraire qu’ils offrent des dilatations de l’espace, permettant des seuils pour les chambres, ou encore des petits espaces de repos, cloisonnés ou non. Par ailleurs, on observe qu’à chaque extrémité du couloir, on a un espace assez grand, ouvert sur l’extérieur, qui permet à la fois des espaces de rencontre et un éclairage naturel des circulations. L’espace ainsi configuré n’est pas monotone et offre des repères identifiables le long du parcours.
Espaces de rencontres, ouverts sur l’extérieur Espaces de circulation dilatés, permettant la création de seuils d’entrée
ESPACES PRIVES, LIEU DE LA VIE INTIME / Les espaces de la sphère intime sont des espaces essentiels du bienêtre, et donc du bien vieillir des personnes âgées. Dans le cas d’une entrée en institution, l’espace privatif représente une (re)conquête personnelle. Il leur faut partir à la recherche d’un nouvel ordonnancement du cadre de vie, qui soit en accord avec qui elles sont. L’appropriation des logements est très importante, on doit pouvoir y retrouver certains de ses repères.
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Par exemple, dans la résidence, les résidants peuvent amener certains de leurs meubles, à condition qu’ils ne soient pas trop encombrants (commodes, fauteuil, étagère, télévision...). La chambre est déjà pourvue d’un lit, d’une armoire, d’un bureau, d’une chaise et d’une table. On est loin de la «chambre» à proprement parler où le seul mobilier se résumait au lit de la personne âgée. Ici l’espace est plus modulable et ce petit mobilier tend à donner un caractère plus personnel, plus convivial : on peut recevoir des personnes, s’installer autour de la table, en regardant par la fenêtre. L’idée étant que l’espace privé ne soit pas symbolisé comme étant uniquement basé sur les soins. C’est avant tout un lieu de vie. Dans certains établissements, les studios sont aménagés avec des petits cuisines, pour être encore plus axé sur le «chez-soi». Ici, les personnes ne sont plus assez autonomes pour rendre ces options possibles, il pourrait y avoir des risques de blessures. Dans la résidence, on trouve aussi dans les espaces privés des prises internet si jamais le résident veut installer une connexion, ou les personnes qui lui rendent visite. Par ailleurs, la présence d’animaux domestiques n’est pas permise à long terme, mais les visiteurs peuvent en amener, le temps de leur visite. Ce sont ce genre de petits détails qui peuvent rendre la vie en établissement agréable. Le respect de l’intimité des habitants est aussi un facteur très important de bien-être. Le personnel n’entre pas dans les chambres sans avoir auparavant frappé à la porte. Le résidant retrouve ainsi un peu le rôle de maître de maison, de «chef» de l’espace dans lequel il vit. De plus, l’espace des chambres est caché de la vue depuis l’entrée pour ne pas donner à voir la chambre entière dès l’entrée et respecter l’intimité de la personne. Et la porte d’entrée donnant sur la circulation n’est pas signalée par un numéro, mais parce les noms et prénoms du résident. Encore une fois, ce sont ces détails, au premier abord assez peu significatifs, qui font pourtant que l’espace de la chambre devient un espace à soi. Les espaces peuvent contribuer à enfermer lorsqu’ils renforcent les difficultés de mobilité ou qu’ils limitent la perception de la vie à l’extérieur. On voit ici que les espaces sont bien pensés, avec des ouvertures sur la rue ou sur le jardin, selon l’emplacement du logement. Cependant comme les personnes sont dépendantes, l’installation des balcons a été abandonnée au profit de grandes baies vitrées, qui laissent passer la lumière sans risque de problèmes.
Façade du bâtiment
L’insertion, à la fois sociale et urbaine de la résidence est un premier pas vers le rééquilibrage de binôme liberté-sécurité car il suppose une réintégration sociale «naturelle» des résidents. Cependant, le fait que les personnes résidant à l’EHPAD soient fortement dépendantes rend cette mixité sociale et intergénérationnelle difficile, dans la mesure où rares sont les occasions où les résidents peuvent sortir de l’établissement sans accompagnement. Néanmoins, il est à souhaiter qu’à l’avenir, les personnes qui fréquentent aujourd’hui les espaces de la Maison des Habitants, se construisant petit à petit un réseau social et affectif, voudront prolonger cette expérience pendant les différentes étapes de leur vieillissement, voire lors d’une entrée en établissement.
PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
Dans une optique de bien-être des personnes âgées, l’EHPAD possède des arrangements avec des services de soins à la personne. Ainsi, les personnes âgées peuvent recevoir dans leur espace des coiffeurs, des esthéticiennes, des pédicures. Le bâtiment possède aussi un espace de bien-être/balnéothérapie. D’autre part, des animations adaptées sont proposées de manière régulière, d’ordre manuel, physique, ludique, ou intellectuel, (travaux manuels, gym douce, chorale, jeux, ateliers multimédia et spectacles). Ces dernières sont organisées par le personnel et des bénévoles, afin de maintenir le lien social.
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3.2 HÉLIX CARTE D’IDENTITÉ DU PROJET /
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Hélix 2 Impasse du Tramier - ( Quartier des Béalières ) 38240 Meylan Maître d’oeuvre : Paul Giaume (l’un des membres du groupe) Maître d’ouvrage : Groupe Hélix (groupe d’habitants de l’ensemble d’habitation) Financement des travaux : Par les membres du groupe SHON : 880 m² de construction, 82m² de communs et 3615m² de terrain. Date permis de construire : 1979 Date début de chantier : 1983 Livraison : 1984 Composition du groupe à l’époque de la création : 14 adultes et 20 enfants Programme : Ensemble d’habitation situé sur la ZAC des Béalières, comportant 7 logements en accession, allant de 100 à 140m² + des locaux communs : • les locaux d’activités: - salle polyvalente centrale - ateliers techniques: bricolage, labo photo • les locaux de service: - hall commun - laverie-buanderie - celliers
- studios d’hôtes - garage à vélos
Pour expliquer le projet d’Hélix, il faut d’abord revenir sur l’expérience de l’Atelier Public d’Urbanisme pour la ZAC des Béalières en 1979.
Entre 1981 et 1982, les orientations sont choisies, il s’agit de fixer un plan masse. Ce sera un architecte chargé par la Mairie qui en sera responsable. Trois directives sont en prendre en compte : contribuer à résoudre le problème du logement sur l’agglomération (locatif particulièrement), préserver le site et son identité tout en s’intégrant dans la commune, et enfin, continuer l’élaboration du projet en concertation avec les usagers et l’APU. C’est dans ce cadre que le groupe Hélix a été créé. Suit ensuite une présentation des objectifs du groupe :
69 PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
Premièrement vient une décision municipale, qui va lancer toute la machine : «cette urbanisation se fera avec vous» L’habitant voit alors son rôle défini de la manière finalement la plus légitime, il est au coeur du débat L’idée de départ était de demander aux futurs habitants quel serait le qui répondrait le plus à ses attentes. Associer l’habitant à la conception de son futur quartier, de son futur logement est une démarche on ne peut plus démocratique et qui vise à améliorer la qualité de l’aménagement, de la vie du quartier, car en conformité avec les espérances des personnes. Pour permettre de recueillir et d’utiliser toutes ces réflexions dans la pensée du projet, a été crée l’Atelier Public d’Urbanisme (APU), auquel pouvaient participer toutes les personnes le souhaitant. En 1980, l’APU devient le lieu de concertation, où se réunissent associations, demandeurs de logements, ... de manière à participer à la réflexion générale sur différents thèmes tels que l’habitat, mais aussi l’environnement, l’éducation, la circulation, les équipements, ... Une synthèse issue de toutes ces réflexions et dégageant les grandes lignes est remise en Mairie pour le dossier de ZAC. En 1981, les grands principes d’aménagement définis servent de base à un concours d’idées lancé auprès d’équipes professionnelles. L’APU remettra, hors concours, un schéma d’aménagement formalisant les objectifs exprimés par les Meylanais (préservation de la coulée verte, des zones humides, des routoirs ; diversité architecturale, mélange de formes d’habitat et de statuts des logements ; école ouverte sur le quartier ; priorité aux déplacements doux, ...).
-sortir du cadre habituel du logement, en luttant contre l’individualisme, l’anonymat et le repli de la famille sur elle-même - promouvoir un niveau intermédiare entre le logement individuel et la dimension du quartier -permettre une utilisation rationnelle de l’espace et des équipements -favoriser la vie commune et de nouvelles formes de relations, tout en respectant les formes traditionnelles de la vie de famille -créer un dialogue entre usagers et concepteurs, pour déboucher sur une architecture personnalisée.
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Le groupe vise à réaliser un ensemble d’habitations «familiales groupées» dans la ZAC des Béalières. La démarche suivie se veut une démarche autogestionnaire à égalité de droits et de devoirs de tous les participants ; ceci implique la prise en charge par le groupe lui-même de la fonction de «promotion» du logement avec les responsabilités financières, sociales et politiques que cela implique. Concernant la structure juridique, il est énoncé que « la responsabilité sociale, juridique et financière doit être collective, indivise et solidaire.1»
PROJET DE VIE COLLECTIVE / Aujourd’hui, le quartier des Béalières est une réussite. Bien intégré à la commune, on n’y observe aucune différence visible entre logement locatif et logement en accession. Les mètres carrés collectifs résidentiels ont été regroupé pour créer des petits bâtiments collectifs, ou chacun peut organiser une fête, un anniversaire, ... La cour de l’école est ouverte en dehors des heures scolaires et est l’aire de jeux des enfants du quartier. La végétation y est abondante, permettant tout de même une mise à distance depuis la route, sans toutefois qu’il n’y ait de barrière. L’Union de Quartier est toujours aussi active. Par ailleurs, concernant l’insertion urbaine à plus grande échelle, le quartier possède une implantation urbaine intéressante, avec un point métro-vélo et une ligne de bus la reliant à Grenoble à 5 minutes à pied. On observe de la part des habitants du groupe une réelle volonté de s’intégrer à la vie du quartier. C’est pourquoi une ouverture de certains locaux pour la vie du quartier a été envisagée dès les premières réunions, à condition d’avoir toujours un des résidents de l’ensemble comme responsable présent. Par ailleurs, et c’était une des volontés énoncées clairement, la situation du projet dans le quartier de la ZAC des Béalières se doit d’être un «facteur d’équilibre entre le risque de ghetto et la nécessité d’une homogénéité». D’autre part, le réseau relationnel présent dans le quartier, dans le voisinage est fort, avec la fête des voisins, les relations d’entraide, d’aide scolaire, ... La recherche d’une vie collective au sein de l’ensemble d’habitation était l’un des points essentiels lors de la pensée du projet. Comme il est expliqué dans la charte du groupe2, «l’objet du groupe ne se résume pas à la construction
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Groupe HELIX, Charte de groupe Habitat Autogéré, 1981
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Groupe HELIX, Charte de groupe Habitat Autogéré, 1981
des logements. Le groupe prend en charge, dans les même conditions collectives, le fonctionnement de l’ensemble d’habitat ainsi créé.». Ce principe global concerne deux points importants. Premièrement la «répartition des espaces et des locaux devra favoriser la vie collective» des habitants. Cela induit la présence de locaux et d’espaces communs (une salle polyvalente accessible par tous et à toute heure, un atelier bricolage, un labo photo, un préau, des caves communes et des espaces extérieurs de types jardins et circulations). Par ailleurs, pour accueillir des séjours de courte durée, ont été intégrés au projet des chambres et studios d’hôtes. Deuxièmement, la gestion et le financement de ces espaces communs relève du groupe, ils ont été définis par rapport aux besoin du groupe. Les espaces de circulation et de jardins font la connexion entre les habitants et sont des lieux de rencontre et de sociabilité. La cellule de base de l’organisation de l’ensemble est la cellule familiale mais le groupe cherche à favoriser la vie collective. Les «Travaux Communs» («Danse du balai, entretien des jardins, des sols, grand nettoyage de printemps) participent activement à la vie collective.
71 PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
En ce qui concerne le plan masse, le dessin faisait partie d’un dessin global propre à la ZAC, dans lequel le projet s’est inséré. Par ailleurs, l’idée directrice étant un ensemble d’habitation, il a été convenu de travailler les projets individuels dans une vision d’ensemble, avec des contraintes communes, pour éviter une juxtaposition de projets sans lien les uns avec les autres. La construction tourne autour d’un patio central ouvert au sud qui représente l’espace de rencontres car il dessert, par des circulations, l’ensemble des logements ainsi que les parties communes. Les bâtiments ont été disposés en fonction de la pente (nord-sud), pour que chacun puisse bénéficier d’un apport de lumière et de vues sur le paysage. Ainsi les logements sud aux niveaux bas et ceux nord ouest aux niveaux hauts, au dessus des parties communes
ESPACES DE LA VIE PRIVÉE /
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Le groupe n’a posé aucune règle précise en ce qui concerne l’architecture intérieure des logements, mis à part la recherche de formes permettant des économies sur le coût de conception. Ce parti pris est réussi, d’autant plus que la vision qu’on peut avoir du projet de l’extérieur, en continuité les uns aux autres, est complètement bouleversée par l’intérieur des logements, où chacun a fait valoir sa propre conception du logement. Pour le côté financier, il a été établi que «de façon générale, le groupe souhaite réaliser une construction économe en coûts de fonctionnement individuels et collectifs. Cette option est une règle en ce qui concerne toutes les source de dépenses collectives, elle demeure une option en ce qui concerne les dépenses individualisées1».
La cellule familiale entre 100 et 140 m² : respecter un équilibre scrupuleux entre la vie individuelle, la vie familiale et la vie collective est une préoccupation centrale de notre projet. Pour cela chacun des membres , chaque famille a déjà imaginé et est prête à rédiger par écrit le logement dans lequel elle aimerait vivre. La démarche de l’architecte qui sera choisi devra entrer dans cette problématique et s’y insérer en tenant compte des contraintes ressortant du réglemement de la ZAC. Les logements se divisent en plusieurs «zones», de manière à penser l’évolution des familles. On trouve ainsi un niveau dit «familial» en demi niveau, puis les espaces pour les enfants en bas et ceux pour les parents en R+1. Pour l’agencement intérieur des parties familiales, Paul Giaume, architecte du projet et membre du groupe a proposé aux familles de remplir des questionnaires (voir double page prochaine) pour cerner au mieux les attentes de chacun. Ainsi, certains ont pu choisir d’avoir une cheminée, d’autres une terrasse, d’autres une mezzanine ou encore un patio. A travers tout un processus de recherche profonde sur leur habitat, les habitants affinaient chaque fois plus leurs attentes. Par ailleurs le questionnaire de Paul permettait de réfléchir à des solutions sortant un peu de l’ordinaire (voir la rubrique «Pourquoi pas ?») qui ont donné lieu finalement à des logements vraiment sur-mesure, où chacun (même les enfants) ont pu exprimer leurs désirs.
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L’ensemble Hélix fête cette année ces 30 ans et il est convenu que tout le monde soit de la partie. L’amitié qui lie les personnes du groupe, et ce autant pour les relations d’adultes d’âge équivalents qu’avec les «enfants» (qui sont maintenant des adultes), reste très forte. En conclusion, bien que l’espace architectural ne soit pas forcément pensé dans le processus de vieillissement (nombreux escaliers, pentes, sol peu pratique, ...), la solidarité et l’entraide présente au sein de l’ensemble Hélix laisse à croire qu’aucun des habitants ne souffrira d’isolement, tant la cohésion sociale et intergénérationnelle qui y est présente est forte. A l’avenir, peut-être que des modifications seront apportées au sein des logements individuels et de certains des espaces communs, mais du moment que la dynamique de ce groupe, qui agit en concertation pour prendre des décisions importantes continue de fonctionner, avec des esprits éclairés, le vieillissement qui les attend sera géré de la manière la plus éthique possible. L’exemple d’Hélix est aussi un modèle dans le sens où l’écriture du projet, depuis le plan masse du quartier jusqu’aux moindres détails de l’agencement intérieur a été pensé en fonction des désirs des habitants, de leurs attentes, de leur espérances et en accord avec leur mode de vie. En plus d’être un exemple pour les habitats autogérés en général, il pourrait devenir un exemple pour ceux en particulier qui accueilleraient des personnes âgées. D’autant plus que les habitants sont favorables à la transmission de cette expérience, avec les modifications qui pourraient être apportées. Notamment aujourd’hui, après trente ans de vie dans cet ensemble, et une certaine prise de conscience de leur futur vieillissement, ils pourraient sans doute donner des conseils sur la pensée du vieillissement pour des personnes qui chercheraient à créer eux-aussi leur habitat groupé. «Vieillir ensemble, ce n’est pas ajouter des années à la vie mais de la vie aux années» (Jacques Salomé, Si je m’écoutais, je m’entendrais, 1990)
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PROJET DE VIE PORTEUR DU PROJET ARCHITECTURAL
CONCLUSION
CONCLUSION
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Actuellement, la représentation encore parfois pessimiste, couplée à l’absence de cadre national de référence pérenne de la prévention, à la dispersion des actions et des acteurs, ou encore à la faible professionnalisation des opérateurs font de la prévention du vieillissement un axe faible des politiques publiques. Cependant, on observe une déconnexion croissante s’opérant entre l’âge social (défini par sa place dans le système social), et l’âge chronologique. Le recul de la dépendance, avec un gain de temps de vie active en pleine possession de ses moyens permet de multiplier les projets. Or, les anticipations portent sur une période de plus en plus longue, et la modification du rapport au temps qui en résulte influe sur les choix de mode de vie et de résidence. La retraite représente donc aujourd’hui le terrain d’une recherche sur les lieux de son futur, de son vieillir. C’est pourquoi il s’agit pour les personnes âgées, leur entourage et avec l’aide de certains professionnels de se saisir du problème du vieillissement afin de créer les lieux du bien vieillir de demain. On observe que les personnes âgées prennent les initiatives des lieux de leur vieillir et créent par leurs propres moyens et à hauteur de leurs ambitions, les lieux de leur vieillir. Le développement de ces initiatives citoyennes en marge de la réglementation sociale, tel qu’on a pu l’observer ces dix dernières années (avec la maison des Babayagas par exemple) n’est possible qu’avec l’assentiment des élus locaux. Cependant on observe qu’ils sont de plus en plus enclins à accepter ce type d’initiative dans la mesure où elles leur semblent apporter une réponse satisfaisante aux enjeux du vieillissement, qui soit en phase avec les attentes de la société (autonomie, intégration sociale, intergénérationnel, ...). Cependant ces solutions ont aussi des limites dans la mesure où, déconnectées du secteur social et médico-social, elles renvoient au risque que le libre choix de l’accompagnement de la dépendance par les personnes âgées ne soit plus respecté par la suite car le bâtiment ne le permet pas. Pour certains c’est un risque à prendre dans la mesure où le temps «avant dépendance» sera envisagé selon leurs modes de vie, en accord avec leur identité. Pour d’autres, c’est une perspective trop risquée et pour laquelle ils chercheront à trouver des alternatives, en envisageant par exemple dès les premières esquisses du projet des logements adaptés et adaptables qui rendront possible un maintien à domicile dans le cas d’une perte d’autonomie. Mais pour la personne âgée, en perte plus ou moins grande d’autonomie comme pour le jeune retraité en pleine forme physique, l’anticipation de sa future dépendance est cruciale. Car elle pose les bases d’un projet de vie qui pourrait être porteur d’un projet architectural dans l’éventualité d’un déménagement ou d’une adaptation du logement. Se pose alors la question du choix de ce projet de vie, de la manière de le penser, de le concrétiser. Et donc se pose dans le même temps la question de la visibilité des projets existants. Il s’agit de travailler au maximum sur cette visibilité de manière à développer un éventail qui rende compte des différents
«Que le temps de permettre à tout être vieillissant le choix d’un itinéraire libre et fortement personnalisé soit enfin arrivé n’est aujourd’hui ni une affirmation banale ni un principe confirmé par les faits : la liberté de choix des personnes âgées suppose en effet une série d’éléments de progression ou de projet difficiles à repérer dans les politiques sociales et institutionnelles» Robert Devilliers
81 CONCLUSION
projets, de leur mise en oeuvre, de conseils de la part de leurs acteurs, ou encore de retour critique sur le projet, ... Cet éventail permet de connaître la variété des offres, le vécu qui en ressort et donc l’atout de pouvoir se l’approprier, l’adapter en fonction de ses désirs et de ce que les conseils des autres invitent à changer. On assiste à une réelle volonté, par les acteurs de ces projets innovants, à faire connaître leur expérience, leurs ressentis. Il s’agirait de développer un projet global d’information. Les CLIC sont déjà l’un des supports de ce réseau d’informations, tout comme les sites internet ou encore certaines revues/ livres, mais c’est aussi du côté des politiques de coordonner tous ces acteurs pour offrir une certaine transparence des offres, qu’elles soient de domaine privé, comme du domaine public. Les orientations politiques à envisager conduisent à fédérer les acteurs par la mise en place d’un cadre stratégique à l’échelle nationale , à mieux cibler les actions de prévention sur les personnes qui en ont le plus besoin, ou encore à engager des expérimentations, évaluées, avec des professionnels de santé, des établissements médico‐ sociaux ou des caisses de retraite. Car, actuellement, ce réseau d’informations se trouve encore trop limité voire destiné seulement à un certain type de milieu social assez sensible à ce genre d’approche autogéré. On est en mesure d’espérer qu’au contraire, en prenant de l’importance, en assimilant de nouveaux savoirs, en développant de nouveaux outils aidant à la mise en oeuvre par d’autres groupes de personnes âgées, ces projets se répandent par «tâches d’huiles successives» et acquièrent ainsi une certaine visibilité. De cette manière, ces expériences tendront à devenir le fer de lance des nouveaux lieux du vieillir...
BIBLIOGRAPHIE
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BIBLIOGRAPHIE
• Monique LEMBRADO (sous la direction de), Habiter et vieillir, Vers de nouvelles demeures, Pratiques du champ social, Éditions ERES, février 2013 • «Méthodes de programmation génératives pour l’habitat de personnes âgées» Michel CONAN Collection EXPERIMENTATIONS, Plan construction et architecture, Conception et usages de l’habitat, 2009 • Jean CHOUSSAT, Architectures du grand âge - Variations architecturales sur la fin de vie, Collection Moniteur Technique, Éditions du Moniteur, 1988 • Ouvrage collectif, La ville des vieux, recherches sur une cité à humaniser, Éditions de l’Aube, 1999
• Philippe DEHAN, Habitat des personnes âgées, du logement adapté aux EHPAD, USLD et unités Alzheimer, Collection Techniques de conception, Éditions Le Moniteur, 2007 • Richard VERCAUTEREN / Marco PREDAZZI / Michel LORIAUX, Une Architecture nouvelle pour l’habitat des personnes âgées, Collection Pratiques Gérontologiques, Éditions ERES, 2001 • Vincent CARADEC, Sociologie de la vieillesse et du vieillissement, Paris, Nathan, 2011 • Remerciements à Paul GIAUME, du groupe Hélix, ainsi qu’à Mme PARENTE, de la Résidence du Bois d’Artas, pour toute la documentation et l’accueil.
BIBLIOGRAPHIE
• Georges CAVALLIER (sous la direction de.), Groupe «Villes et Vieillir», Institut des Villes, Collection Villes et Société, La Documentation Française, 2004
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Aujourd’hui, les personnes âgées représentent une proportion de plus en plus importante de la population des pays développés. En 60 ans, la part des personnes de plus de 65 ans a doublé. Dans un contexte global de vieillissement démographique, il s’agit d’engager une réflexion sur les modes d’habiter des personnes âgées, notamment en zone urbaine, pour permettre une amélioration de leur qualité de vie. D’autant plus que cette hausse de l’espérance de vie ne s’accompagne pas toujours d’une bonne santé. Ces dernières années, on a assisté à l’émergence de solutions alternatives qui remettent en cause la dualité maintien à domicile-placement en institution. Elles démontrent aussi la volonté des personnes âgées d’être acteurs de leur lieu de vie, en élaborant un projet de vie qui soit porteur du projet architectural en obéissant à un certain droit-devoir de se construire sur mesure, de façon libre et créative, un habitat et un contexte relationnel pour sa vieillesse et conforme à son identité.
Juin 2014 . Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble