Exposition autoportrait et portrait d’artiste

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Exposition virtuelle

Autoportrait et portrait d’artiste

La représentation de l’artiste, par lui-même ou par un autre revêt une signification toute particulière. Cette signification est plurielle et notre exposition vous invite à en découvrir les multiples aspects : L’artiste en majesté s’offre au spectateur dans toute la gloire de son accomplissement. Le vertige du reflet trahit le questionnement de l’artiste sur son identité, la dualité de sa personne vue dans le miroir et sur les traces du temps qui passe. L’intériorité dévoilée révèle la profondeur de l’âme de l’artiste, l’essence de son moi intime. Les traits de l’humour moquent l’artiste lui-même dans un clin d’œil de connivence au spectateur.


L’artiste en majesté

Ô semblable !… Et pourtant plus parfait que moi même, Éphémère immortel, si clair devant mes yeux, Pâles membres de perle, et ces cheveux soyeux, Faut-il qu’à peine aimés, l’ombre les obscurcisse, Et que la nuit déjà nous divise, ô Narcisse, Et glisse entre nous deux le fer qui coupe un fruit ! Qu’as-tu ? Ma plainte même est funeste ?… Le bruit Du souffle que j’enseigne à tes lèvres, mon double, Sur la limpide lame a fait courir un trouble !… Tu trembles !... Mais ces mots que j’expire à genoux Ne sont pourtant qu’une âme hésitante entre nous, Entre ce front si pur et ma lourde mémoire... Je suis si près de toi que je pourrais te boire, Ô visage !...

Charmes, Paul Valéry , Fragments du Narcisse

Autoportrait à la palette d’Henri d’Estienne Pastel sur papier brun http://www.lesatamanes.com/oeuvres/autoportrait-la-palette-dhenri-destienne

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L’artiste en majesté

Le Nil le calendrier et la blague à tabac Nature Comme doit être la peinture Morte Et la littérature Une tête sans chevelure Des yeux en traits Une virgule Un nez plat un méplat Au front Mon portrait Mon cœur bat Et c’est la pendule Dans la glace je suis en pied Ma tête fume Nature Morte-Portrait, Pierre Reverdy: extrait de Sources du vent, Poésie Gallimard, 1996

Portrait de M. Renouard par Paul Mathey Manière noire sur papier chiffon http://www.lesatamanes.com/oeuvres/portrait-de-m-renouard-par-paul-mathey

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L’artiste en majesté

Il faut voir les hommes de loin, dit le sage , sur l'horizon ils se confondent avec le ciel ; mais moi qui suis encore naif je les aime de près ; le ciel de leur regard me fascine Michel Seupho

Autoportrait de Albert Aublet Encre et lavis sur papier vélin fort http://www.lesatamanes.com/oeuvres/autoportrait-de-albert-aublet

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L’artiste en majesté Laques aux teintes de groseilles Avec vous on fait des merveilles, On fait des lèvres sans pareilles. Ocres jaunes, rouges et bruns Vous avez comme les parfums Et les tons des pays défunts. Toi, blanc de céruse moderne Sur la toile tu luis, lanterne Chassant la nuit et l'ennui terne. Outremers, Cobalts, Vermillons, Cadmium qui vaux des millions, De vous nous nous émerveillons. Et l'on met tout ça sur des toiles Et l'on peint des femmes sans voiles Et le soleil et les étoiles. Et l'on gagne très peu d'argent, L'acheteur en ce temps changeant N'étant pas très intelligent. Chanson des peintres , Charles Cros

Portrait de Félix Labisse Huile sur toile http://www.lesatamanes.com/oeuvres/portrait-de-felix-labisse

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L’artiste en majesté

Le tapis vert couché sous l’âtre est un piège. L’homme au profil perdu s’écarte du mur blanc. Est-ce le ciel qui pèse aux bras du fauteuil ou une aile. L’espace devient noir. Les murs sortent des lignes et coupent l’horizon. Après la course au faîte des maisons. Après l’espoir de revenir au signe on tombe dans un trou qui creuse le plafond. Les mains sortent à l’air. Le visage s’affine et tout rentre dans l’ordre, le cadre, le repos aux reflets d’encre et d’or.

Homme assis, Pierre Reverdy : extrait de Sable mouvant, Poésie Gallimard, 2003

Le dessinateur à Fontainebleau de Jacques Emile Edouard Nieuwenhuys Crayon sur papier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/le-dessinateur-fontainebleau-de-jacques-emileedouard-nieuwenhuys

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Le vertige du reflet

Entre à la nuit sans rivages Si tu n’es toi qu’en passant L’oubli rendra ton visage Au coeur d’où rien n’est absent Ton silence né d’une ombre Qui l’accroît de tout le ciel Eclôt l’amour où tu sombres Aux bras d’un double éternel Et t’annulant sous ses voiles Pris à la nuit d’une fleur Donne des yeux à l’étoile Dont ton fantôme est le coeur Joë Bousquet, L’ombre sœur, La connaissance du soir

Autoportrait en dualité de Kei Mitsuuchi Encre et lavis sur papier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/autoportrait-en-dualite-de-kei-mitsuuchi

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Le vertige du reflet

L’homme est revenu de son envers. Il conviendrait donc qu'il mette son chapeau à l’envers, ses gants, sa chemise et surtout son cœur. Il conviendrait aussi qu’il retourne ses mots, les regards qui s’effrangent au vent, l’histoire de ses jours incolores, les portes du silence, le semblant de pensée dont il se targue et l’inconduite obstinée de sa mort. Et lorsque tout sera à l’envers faire se retourner l’envers, pour voir s’il découvre alors sa figure, la figure d’homme qu’il n’a jamais rencontrée. Parce que l’envers de l’envers n’est pas l’endroit, Cette pauvre image qui ne nous sert pas davantage. Roberto Juarroz, extrait de Douzième poésie verticale, Orphée/La Différence

Trio d'autoportraits de Georges de Sonneville Encre et lavis sur bristol, papier ligné et vélin fin http://www.lesatamanes.com/oeuvres/trio-dautoportraits-de-georges-de-sonneville

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Le vertige du reflet

Il se fait des contes et ne peut les suivre, la terre à sa cheville. Alors, il redevient l’enfant inconsolable Et mains au dos Brise le jouet du temps. Retouche à l’homme de Daniel Boulanger, Les dessous du ciel

Portrait de Gen Paul par Regis Beque Technique mixte sur papier http://www.lesatamanes.com/oeuvres/portrait-de-gen-paul-par-regis-beque

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L’intériorité dévoilée

« Quand je commence, il me semble que mon tableau est de l'autre côté, seulement couvert de poussière blanche, la toile. Il me suffit d'épousseter. J'ai une petite brosse à dégager le bleu, une autre, le vert ou le jaune : mes pinceaux. Lorsque tout est nettoyé, le tableau est fini. » Propos de Georges Braque recueilli par Jean Paulhan

« Il n'est en art qu'une chose qui vaille: celle qu'on ne peut expliquer. » « Le tableau est fini quand il a effacé l'idée. » « Avec l’âge, l’art et la vie ne font qu’un. » Citations de Georges Braque

Braque dans son atelier Photographie. Tirage argentique d'époque sur papier Agfa http://www.lesatamanes.com/oeuvres/braque-dans-son-atelier

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L’intériorité dévoilée

Comme si tes yeux avaient tout vu : doucement tu tournes à demi la tête écoutant de loin une parole qui est dite quelque part dans l’espace : sur le malheur du cœur, comme muet il courbe l’arc tendre de ton cou arc sur le point de se rompre du désir — et voyez ! sur le soir de la fenêtre de clair avril se dessine indistinct ton profil la gorge tendue au-dessus du repos de la nuque…

Claes Gill, Portrait I, extrait de Les imperfections de la vie , Orphée/La Différence,

Portrait de Paulette Humbert par Berthold Mahn Sanguine sur papier crème http://www.lesatamanes.com/oeuvres/portrait-de-paulette-humbert-par-berthold-mahn

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L’intériorité dévoilée Vous me demandez mon portrait,

J'aime et le monde et son fracas,

Mais peint d'après nature :

Je hais la solitude ;

Mon cher, il sera bientôt fait

J'abhorre et noises et débats

Quoiqu'en miniature.

Et tant soit peu l'étude.

Je suis un jeune polisson

Spectacles, bals me plaisent fort,

Encore dans les classes ;

Et d'après ma pensée

Point sot, je le dis sans façon

Je dirais ce que j'aime encore

Et sans fades grimaces.

Si je n'étais au Lycée.

Oui, il ne fut babillard,

Après cela, mon cher ami,

Ni docteur en Sorbonne,

L'on peut me reconnaître ;

Plus ennuyeux et plus braillard

Oui, tel que le bon Dieu me fit,

Que moi-même en personne.

Je veux toujours paraître.

Ma taille à celle des plus longs

Vrai démon pour l'espièglerie,

Las ! n'est point égalée ;

Vrai singe pour la mine,

J'ai le teint frais, les cheveux blonds

Beaucoup et trop d'étourderie,

Et la tête bouclée.

Ma foi, voilà Pouchkine.

Mon portrait, Alexandre Pouchkine, écrit en français en 1814

Autoportrait de Jacques Kaplan Fusain sur papier Ingres gris http://www.lesatamanes.com/oeuvres/autoportrait-de-jacques-kaplan

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L’intériorité dévoilée

Qui Se tient Derrière le pelage du monde ? Quel visage au front nu Se détourne des rôles Ses yeux inversant les images Sa bouche éconduisant les rumeurs ? Quel visage Veillant par-delà sa vue Nous restitue Visage ? Quel visage Surgi du fond des nôtres Ancré dans l’argile S’offre à l’horizon ? Epreuve du visage, Andrée Chedid, Epreuves du vivant , Flammarion

Autoportrait de Georges de Sonneville Encre et lavis sur papier aquarelle http://www.lesatamanes.com/oeuvres/autoportrait-de-georges-de-sonneville

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Les traits de l’humour

Par un point situé sur un plan On ne peut faire passer qu’une perpendiculaire à ce plan. On dit ça… Mais par tous les points de mon plan à moi On peut faire passer tous les hommes, tous les animaux de la terre. Alors votre perpendiculaire me fait rire. Et pas seulement les hommes et les bêtes Mais encore beaucoup de choses Des cailloux Des fleurs Des nuages Mon père et ma mère Un bateau à voiles Un tuyau de poêle Et si cela me plaît Quatre cents millions de perpendiculaires. Par un point situé sur un plan…, Robert Desnos, Recueil : "La Géométrie de Daniel"

Portrait de Mireille Maïlhe d'Edouard Pignon Technique mixte sur vélin mince http://www.lesatamanes.com/oeuvres/portrait-de-mireille-mailhe-dedouard-pignon

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Les traits de l’humour NB : ce dessinateur a 2 mains gauches Pour en savoir plus, cliquez sur le lien

Halte pèlerin mon voyage Allait de danger en danger Il est juste qu'on m'envisage Après m'avoir dévisagé.

Epitaphe, Le Requiem, Jean Cocteau

Le dessinateur. Autoportrait charge. Crayon sur papier vergé gris http://www.lesatamanes.com/oeuvres/le-dessinateur-autoportrait-charge

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Les traits de l’humour

Je suis dur Je suis tendre Et j'ai perdu mon temps A rêver sans dormir A dormir en marchant Partout où j'ai passé J'ai trouvé mon absence Je ne suis nulle part Excepté le néant Mais je porte caché au plus haut des entrailles A la place ou la foudre a frappé trop souvent Un cœur ou chaque mot a laissé son entaille Et d'où ma vie s'égoutte au moindre mouvement

Pierre Reverdy, La liberté des mers. Flammarion.

Broodthaers, Hahn et une sculpture de Segal. De Maria Gilissen Photographie. Tirage argentique d'époque. http://www.lesatamanes.com/oeuvres/broodthaers-hahn-et-une-sculpture-de-segal-de-maria-gilissen

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