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L’autre drame des «sans papiers»
Des enfants privés d’écolePage 14
Rigueur budgétaire
Les programmes sociaux sont les plus mis en cause…
La terre tremblera au Québec le 16 octobre prochain à 10 h 16
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Festival des Films du Monde de Montréal
Polémique autour du film «The Algerian»
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Immigration et chômage
Ottawa se penche sur les obstacles à l’emploi
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C’est aussi un problème canadien
Ces jeunes qui se laissent tenter par le terrorisme… Page 31
Loyers exorbitants Un Montréalais sur dix consacre plus de 80 % de son revenu à son logement
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Editeur : Abdelghani Dades. Directeur Général Rachid Najahi. Rédaction : Hassan Boutabssil, Narjisse El-Bakkali, Zahira Ellahgui, Wahid Megherbi, Mona Doutabaa, Said Chayane, Reda Benkoula Publicité : Agence Odyssée Conception et Réalisation Graphique : Atlas Média Atlas.Mtl est un produit du. GROUPE ATLAS MEDIA Editeur de. * La Voix des Marocains à Montréal et du site web: www.atlasmedias.com
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Depuis 2002 Groupe Atlas Media Douze ans, c’est… • 233 numéros du bimensuel Atlas.Mtl, soit plus de 5690 articles exprimant la sensibilité maghrébine et valorisant la dimension maghrébine de la société dans laquelle nous vivons; • Une cinquantaine d'événements identitaires, artistiques, culturels et politiques; • De nombreux débats, colloques, séminaires et conférences, • 72 reportages sur la communauté pour les chaînes de télévision 2M, AlMaghribia, Ai Aoula, Arrayadia; • 365 émissions radio (de 2002 a 2009); • Un site web ayant accueilli plus de 6.7 millions de visiteurs depuis 2003 et qui dans sa nouvelle version (mise en ligne début 2012) et qui reçoit en moyenne 1300 visiteurs par jour.
Éditorial
Éditorial
De France et de Navarre…
La citoyenneté commence, dit-on, par une interrogation. Quiconque veut assumer sa citoyenneté doit en effet se questionner d’abord sur l’histoire, le territoire et l’avenir de la collectivité dans laquelle il est né ou au sein de laquelle il a choisi de vivre. Un certain nombre de conditions sont cependant à respecter dans cet exercice. D’abord, on ne doit ni ne peut exclure aucun des éléments du triptyque; ils sont en effet si étroitement liés que si l’on en retire un, tout le reste s’écroule, invalidant ainsi la totalité du raisonnement. Ensuite, le questionnement ne peut se faire à partir d’idées préconçues ou de préjugés. Sinon, la réflexion devient non avenue. Il doit être courageux également, en ce sens qu’aucune certitude confortable ne doit hypothéquer les idées novatrices qui peuvent en surgir.
sujet. Vous le savez sans doute, dans le gouvernement français formé il y a peu par Manuel Valls, prennent place quelques nouveaux enfants de la République. En premier, Manuel Valls, Premier ministre, né Catalan. Et à ses côtés une ministre de la Culture, née coréenne, une originaire du Québec en charge des technologies et du numérique. Blanc et/ou d’une confession majoritaire et familière, ces cas d’intégration n’ont pas semblés soulever d’objections. Il n’en est pas allé de même, avec deux autres membres du nouveau gouvernement de l’Hexagone. Najat VallaudBelkacem promue ministre de l’Éducation nationale, et Myriam El Khomri, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville.
Car elles sont toutes deux nées au Maroc, de parents musulmans. Cette «tare originelle» a, on s’en De surcroit, un tel exercice ne doute déclenchée l’ire de tout ce saurait être démocratique que si, que la France compte d’extrême étant forcément le fait d’une droite, qui s’est très vite répandue minorité de leaders d’opinion, il en propos nauséabonds. Najat n’est pas partagé et mesuré à Vallaud-Belkacem en particulier, l’aune de la majorité; et appuyé en à pris plus que son grade. par des média cultivant une Dès sa nomination en effet, des éthique ne se résumant pas milliers de commentaires et mesuniquement à une logique de sages racistes ont envahi les popularité (ou de populisme, c’est réseaux sociaux. La page selon…) sans souci de morale ou Facebook du ministère de d’utilité publique. l’Éducation nationale a reçu des milliers de messages hostiles. Ces idées nous sont inspirés par des faits qui se déroulent au loin; Plus condamnable encore, deux en France pour être plus précis. hebdomadaires s’en sont pris Au loin par la géographie cepen- directement et sournoisement à dant; car pour ce qui est des l’origine de la ministre de idées, les distances auraient tenl’Éducation nationale. Dans sa dance à être abolies. Et c’est cette une, l’hebdomadaire Valeurs élasticité de la notion de distances Actuelles titre « l’Ayatollah, qui nous amène à aborder ce enquête sur la ministre de la
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Rééducation nationale », alors que le magazine Minute est beaucoup plus direct et annonce « Une Marocaine musulmane à l’Éducation nationale ». Comment dire notre dégoût devant de telles insanités? Nous avons choisi de le faire en réaffirmant notre profonde citoyenneté canadienne, notre appartenance québécoise et canadienne, notre fidélité à nos origines et aussi, notre détermination à agir pour que, jamais au grand jamais, de tels faits puissent se produire chez nous, c’est-à-dire ici. Ce faisant, nous n’innovons en rien. De très nombreux autres Québécois, de toutes appartenances politiques, se sont livrés bien avant nous à de tels exercices, rendant possible une Révolution tranquille qui a produit le Québec dans lequel nous vivons. Certes de récents et pénibles débats ont pu un moment laisser croire que cet esprit avait été et que, désormais, était venu le temps des incertitudes. Mais très vite, une consultation électorale, expression de la volonté populaire, est venue remettre les choses en place et en perspective, rappeler surtout ce que le concept inclusion voulait dire. Ceci dit, il ne coûte rien de rester vigilant, de demander à la diversité de continuer de faire sa part. Même si le contexte de rigueur budgétaire peut amener quelque découragement. Même si cette diversité demeure en déficit de représentation…. Abdelghani Dades
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Enjeux
Démocratie et participation
Et si le vote devenait obligatoire? Partout à travers le monde les taux de participation aux élections marquent depuis quelques années une nette tendance à la baisse. La paresse électorale des citoyens est telle que sociologue, politologues et philosophe en viennent à s’interroger sérieusement sur l’avenir de la démocratie participative. Les politiciens ne sont pas en reste sur cette question. Au Canada, un parti vient de se distinguer, Le PLC, dont les députés étudient en ce moment l’idée de rendre le vote obligatoire aux élections fédérales.
Un sondage envoyé par courriel aux membres du parti explore l’idée du vote obligatoire, qui fait partie des « nouvelles idées » proposées par des députés lors de la retraite estivale du caucus, la semaine dernière. L’ajout du vote obligatoire dans la prochaine plateforme électorale des libéraux n’est pas chose faite. Mais le chef libéral adjoint, Ralph Goodale, croit que c’est une idée qui mérite d’être examinée sérieusement, compte tenu de la santé précaire de la démocratie canadienne. « C’est une notion intéressante qui, je crois, appelle à une réflexion », a avancé M. Goodale en entrevue. «Rendre le pays plus fort» M. Goodale insiste sur le fait que le cau-
cus libéral ne fait que tester les réactions des membres du parti pour le moment. Il a cependant noté que Justin Trudeau a fait de la réforme démocratique un pilier de son leadership et que son programme a été adopté avec enthousiasme par le parti. « Justin a indiqué qu’il était ouvert à de nouvelles idées, ouvert à aller dans de nouvelles directions si cela rend le pays plus fort », a-t-il souligné. Le taux de participation aux élections fédérales est passé d’un sommet de près de 80 % en 1958 à un creux record de 58,8 % en 2008, selon Élections Canada. Il a légèrement rebondi en 2011, atteignant 61,1 %. Par contraste, le taux de participation en Australie, où le vote est obligatoire depuis 1924, atteint en moyenne environ 95 %.
Pour un changement de culture politique Le sondage auprès du caucus libéral survient après la publication d’une analyse, le printemps dernier, par l’un des conseillers principaux de Justin Trudeau, le professeur de l’Université d’Ottawa Robert Asselin, qui proposait l’adoption du vote obligatoire et l’introduction du mode de scrutin préférentiel. Le sondage appuie la proposition de M. Asselin concernant le vote obligatoire,
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rappelant que les électeurs désenchantés ou non intéressés pourraient quand même choisir « aucun de ces candidats » et que ceux qui s’abstiendraient de voter ne recevraient qu’une « petite amende ». « Je crois qu’ils prennent l’idée au sérieux, mais c’est un projet qui modifierait grandement notre culture politique » a indiqué M. Asselin en entrevue. Le professeur admet que le vote obligatoire serait sans aucun doute controversé et pourrait peut-être même être contesté en cour par des électeurs qui jugeront que le refus de voter est un droit fon-
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damental. M. Asselin croit cependant que ce droit sera préservé puisque les électeurs pourront choisir de ne voter pour aucun des candidats ou d’annuler leur vote. Si les libéraux adoptent officiellement l’idée, ils se heurteront certainement à l’opposition des conservateurs, qui ont déjà aboli le formulaire long du recensement, jugeant que les Canadiens ne devraient pas être forcés de divulguer de l’information personnelle à une agence du gouvernement.
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Conjoncture
Une petite embellie économique
Le PIB a gagné 3,1% au deuxième trimestre 2014 L’économie canadienne semble tourner plus rapidement après un hiver particulièrement difficile, affirment des analystes. Les Canadiens ont remis la main au portefeuille au deuxième trimestre, alors qu’ils ont permis à l’économie du pays d’atteindre un taux de croissance annuel de 3,1 % qui a facilement dépassé les attentes des analystes. La hausse la plus vive depuis trois ans Statistique Canada a indiqué à cet effet que la progression du PIB réel avait été la plus vive en près de trois ans, précisant qu’elle se comparait à une hausse de 4,2 % du PIB au sud de la frontière. L’agence a aussi revu à la baisse son résultat pour le premier trimestre, passé à un taux de croissance annuel de 0,9 %, comparativement à sa précédente lecture de 1,2 %. « L’économie canadienne semble tourner plus rapidement après un hiver particulièrement difficile, a affirmé Randall Bartlett, analyste principal à la Banque TD. La deuxième moitié de l’année débute également avec élan. » Les économistes s’attendaient à un taux de croissance de 2,7 % au deuxième trimestre. Bien que la croissance économique du
deuxième trimestre ait été largement supérieure à celle des trois premiers mois de l’année, l’économie canadienne a jusqu’à présent été moins instable que celle des États-Unis, qui a trébuché au premier trimestre avant de rebondir lors des trois mois suivants. Sur une base mensuelle, le PIB a augmenté de 0,3 % en juin, ce qui constitue un résultat supérieur à la croissance de 0,2 % que prévoyaient les analystes. Consommation et logement Statistique Canada a dévoilé ses plus récentes données sur le PIB à quelques jours de la prochaine annonce de la Banque du Canada sur les taux d’intérêt. Malgré la solidité des données, les observateurs s’attendent dans l’ensemble à ce que la banque centrale maintienne son taux directeur à 1 %. Dans son rapport sur la politique monétaire du mois de juillet, la Banque du Canada a prédit que l’économie afficherait un taux de croissance annuel de 2,5 % au deuxième trimestre. Néanmoins, l’économiste principal de Banque HSBC Canada, David Watt, a fait remarquer que la croissance observée au cours de la première moitié de l’année correspondait grosso modo aux attentes de la banque centrale.
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Statistique Canada a indiqué que l’activité économique s’était accrue dans tous les secteurs de l’économie, à l’exception de celui des institutions sans but lucratif au service des ménages. Les dépenses de consommation des ménages ont mené la danse avec une croissance de 0,9 % au cours de la période de trois mois terminée le 30 juin, en raison
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d’une hausse de 1,2 % des dépenses en biens et de 0,7 % des dépenses en services. Les investissements en bâtiments résidentiels ont augmenté de 2,9 %, tandis que les coûts de transfert de propriété ont progressé de 9 %, après avoir reculé lors des deux trimestres précédents.
Perspectives
Opération «Dialogue Social» sur la Rigueur budgétaire et la révision des programmes
Les programmes sociaux sont les plus mis en cause…
À en croire les commentaires recueillis par le président du Conseil du Trésor, Martin Coiteux, sur son forum de consultation en ligne sur la révision des programmes, nommé « dialogue social », l’équilibre budgétaire du Québec pourrait être atteint en fermant les commissions scolaires, en mettant les fonctionnaires au régime sec, en abolissant les garderies à 7 $ ou en modifiant le programme par exemple en instaurant une modulation selon le revenu ou encore en pénalisant les bénéficiaires de l’aide sociale aptes au travail, par exemple. Le forum, qui a reçu plus de 3300 messages après deux jours d’opération, semble servir d’exutoire, constatent des experts, qui avertissent des limites d’un tel exercice. « On dit qu’on veut rejoindre les citoyens directement, mais ce n’est pas représentatif », dit Geneviève Tellier, professeure à la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa et spécialiste des mécanismes de consultation publique. Les citoyens à qui on demande quels programmes ont perdu leur pertinence tirent un peu dans tous les sens, même si des tendances se dessinent. En éducation, l’abolition des commissions scolaires est une suggestion très populaire. D’autres vont aussi loin que de proposer la fermeture de l’UQAM ainsi que des cégeps. Les garderies à 7 $ sont dans la mire de nombreux commentateurs. « Le prix devrait être en fonction du revenu familial et non pas uniforme sans égard au revenu », dit un citoyen, idée reprise par beaucoup d’autres. Les congés parentaux sont aussi accusés d’être trop généreux. Les HLM, l’aide sociale et l’aide juridique sont d’autres programmes sociaux taxés de dépassés à plusieurs reprises. Nombreux sont également ceux qui en
appellent à un allégement de l’appareil étatique. La diminution du nombre d’élus tant au niveau provincial que municipal suscite une certaine adhésion. Plusieurs évoquent les salaires considérés trop élevés des élus et des hauts fonctionnaires. En santé, le programme de procréation médicalement assistée arrive en tête de liste des mentions de services à éliminer.
Mais tous ne proposent pas des coupes dans les programmes sociaux. « Couper les programmes [pour décréter] une baisse d’impôts [puis des] coupures de programmes et une autre baisse d’impôts, est un cycle dont le gou- M. Martin Coiteux vernement doit se sortir », dit un le professeur à l’Université Laval. citoyen. La taxation des grandes entreprises afin Pourquoi mener une telle consultation ? d’investir dans la « justice sociale » est Pour mettre les priorités du gouverneune idée qui semble fédérer un certain ment à l’agenda, explique-t-il. « nombre de commentateurs. L’acteur met la table pour qu’on parle d’abord et avant tout du problème qui D’autres souhaitent plutôt, et dans l’enthousiasme, « bonnes coupures » au le préoccupe. C’est lui qui définit le problème. Ce faisant, il prépare le pubgouvernement ! lic à rechercher une solution. Un inquiétant mélange de genres C’est déjà 50 % du travail de séduction La professeure Geneviève Tellier croit qu’on assiste à un « mélange des genres réalisé. » Deuxième étape : faire ressortir les solutions que le gouvernement » inquiétant. « Ce qui me surprend, privilégie, en affirmant « qu’on ne peut c’est qu’on s’attaque à un problème de pas plaire à tout le monde » pour rejeter gestion, et on demande aux citoyens de les autres. gérer à la place des gestionnaires. Ils n’ont pas toute l’information en main ! Ce genre de consultations, qui emprunte » dans le style aux réseaux sociaux, sera Selon elle, c’est un « exercice de légiti- de plus en plus populaire, croit Bernard Motulsky. « La consultation de Bernard mité ». « Ils veulent nous entendre dire Drainville sur la charte des valeurs en qu’il faut couper dans les services. » était le premier exemple où on s’en servait comme un outil de démonstration Le spécialiste des relations publiques Bernard Dagenais abonde dans le même de l’opinion populaire », observe le titulaire de la Chaire de relations pubsens. « Ce n’est pas le propre de ce liques et de communication marketing. gouvernement. La consultation comme les sondages sont de tout temps et de S’il convient que l’outil devient rapidetous les partis, des stratégies de comment un exutoire, comme un gros « pot munication, jamais des recherches de à suggestions », il n’en rejette pas compréhension des enjeux et encore moins des recherches de solutions », dit d’emblée l’utilité. « Comme sur les
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médias sociaux, on voit des opinions excessives. Mais ça donne quand même une bonne idée de l’humeur générale », dit-il. « C’est une vague qu’on ne pourra pas arrêter. Comme on faisait dire n’importe quoi aux sondages et que nous avons appris à les encadrer et à les interpréter plus intelligemment, l’art de la consultation en ligne va se raffiner aussi. On ne peut pas dire que ces consultations ne valent rien, mais il faut en prendre les résultats avec précaution. Surtout que, comme une ligne ouverte, ça peut se “paqueter” ! » À droite comme à gauche. L’attachée de presse de Martin Coiteux indique que l’engouement pour la consultation a entraîné un délai de traitement des messages, qui sont tous relus avant d’être rendus publics afin d’éviter, par exemple, la diffusion de propos racistes. Les citoyens ont aussi la possibilité de garder secrets leurs commentaires. « Nous avons demandé à ce que le délai de traitement soit accéléré », indique Marie-Ève Labranche, ajoutant que des synthèses des suggestions recueillies seront rendues publiques.
Faits & chiffres
À peine 3% de «fraudes» à l’aide sociale
audes à l’aide sociale demeurent un phénomène marginal. Le gouvernement est toutefois très préoccupé par la persistance de groupes organisés de fraudeurs. Selon des données obtenues par Le Devoir, le gouvernement a réclamé l’an dernier pour 86 millions $ de fausses déclarations, sur 2,8 milliards $ de prestations versées, soit l’équivalent de 3%.
Les données indiquent en outre que la grande majorité des fausses déclarations sont dues à des erreurs de bonne foi (80%), c’est à dire que la personne s’est trompée sans le savoir en rédigeant sa demande. En additionnant les «fausses» fraudes et les «vraies», on obtient un total de 124 millions $ soit 4 % de l’ensemble. Au ministère, on juge toutefois qu’il y encore beaucoup trop de fraudes. «Ça peut paraître peu mais il y a quand même un enjeu de saine gestion des fonds publics», a expliqué David McKeown, porte-parole au ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale. «Il faut s’assurer que les sommes se rendent aux personnes qui en ont réellement besoin.» Le débat sur les fraudes à l’aide sociale a été relancé dans le dernier budget, en juin, par la décision du gouvernement Couillard d’augmenter le nombre d’inspecteurs. Québec Solidaire notamment, plaidait qu’on s’en prenait à un faux problème et que les fausses déclarations témoignaient surtout de la difficulté pour des personnes sans ressources de remplir des formulaires complexes adéquatement. Des réseaux organisés…
Or au ministère, on assurer que ce ne sont pas les cas individuels qui sont ciblés mais davantage les réseaux organisés de fraudeurs et les «stratagèmes».
L’an dernier, les enquêteurs du ministère ont levé le voile sur une fraude de plus 2 millions $ de fausses facturations de culottes d’incontinence. Le gouvernement reprochait notamment au réseau d’avoir convaincu des bénéficiaires d’utiliser leurs noms en échange de cadeaux. Autre exemple, des réseaux de travail au noir qui s’organisent sous forme d’agences de placement, explique M. McKeown. «Ce sont des réseaux qui vont embaucher des travailleurs qui sont une main d’oeuvre peu informée de ses droits. Ils vont offrir une rémunération qui est inférieure au salaire minimum. Ils vont placer ces gens-là dans diverses entreprises et souvent, les personnes vont être incitées à demander des prestations d’aide sociale de dernier recours malgré le fait qu’il reçoivent des revenus de travail.» Selon l’attachée de presse du ministre François Blais, Julie White, les résultats des enquêtes antérieures sont prometteurs. «L’intensification c’est particulièrement face aux stratagèmes et aux fraudes. Il y a eu des bons résultats dans le passé donc c’est pour ça qu’on a décidé d’intensifier», dit-elle. Pour ce faire, on compte mettre l’accent sur «l’échange de renseignement avec les autres ministères». Questions sans réponses Impossible toutefois de savoir quelle est la part de ces stratagèmes dans les mon-
tants des fraudes. Le ministère dit ne pas avoir non plus de rapport sur ce phénomène démontrant qu’il ait pu croître avec les années. Par contre, si on analyse les données de plus près, on constate que le nombre de «vraies» fraudes a oscillé entre 16 000 et 20 000 cas sans progression constante. Toutefois les montants, eux, ont augmenté de façon constante, passant de 68,6 millions $ en 2009-2010 à 86,4 millions $ en 2013-2014. Impossible aussi de savoir dans quelle mesure on compte intensifier la lutte aux petites fraudes. Les nouvelles ressources aux enquêtes les viseront-elles
en partie ? Peut-on dire que les nouveaux inspecteurs ne travailleront que sur les stratagèmes ? Interrogée à ce propos, l’attachée de presse s’est montrée évasive. «Évidemment, les prestataires qui respectent leurs obligations, on n’exercera pas de pressions supplémentaires sur eux-autres», a-t-elle dit. «On ne parle pas d’aller vérifier les personnes chez eux qui se conforment à leur obligations.» Depuis 2009, le nombre moyen d’enquêteurs au ministère est passé de 162 à 134. L’ajout de ressources devrait permettre d’en ajouter dix.
Des loyers exorbitants
Un Montréalais sur dix consacre plus de 80 % de son revenu à son logement Selon des chiffres dévoilés par le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), un ménage-locataire sur dix consacre maintenant plus de 80 % pour se loger. Un chiffre record, selon le coordonnateur François Saillant. « Il y a vraiment une détérioration accélérée quand on dit que dans la région métropolitaine de Montréal le nombre de ménages qui paient plus de 80 % a augmenté de 26 % (de 2006 à 2011), ce n'est pas rien! » Les locataires dans cette situation
représentent environ 8% des ménages locataires de la province, souligne le FRAPRU. Parmi ceux qui utilisent presque l'entièreté de leurs revenus pour se loger, on compte bien sûr beaucoup de gens qui vivent de l'aide sociale, dit M. Saillant. Mais il n'y a pas qu'eux qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts. Aujourd'hui, 40 % des ménages qui vivent en appartement consacrent plus du tiers de leur salaire à leur loyer, dépassant ainsi ce qu'on considère
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comme le seuil d'abordabilité. Au-delà de ce seuil, on estime que les gens devront couper dans d'autres besoins pour arriver à payer leur loyer. Mais qui sont ces ménages? « Pour une bonne partie, un peu moins à Montréal qu'à l'échelle du Québec, il s'agit de personnes seules, des femmes en grande majorité, des gens qui souvent sont soit très jeunes, soit très âgés, et des nouveaux arrivants, au Québec depuis moins de cinq ans. »
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Le loyer médian était de 231 $ il y a 30 ans dans le Grand Montréal. Il est maintenant de 694 $. Le problème, soulève le FRAPRU, est que le revenu médian, de son côté, a augmenté beaucoup moins vite. Malgré tout, Montréal demeure une des grandes villes au pays où le coût du logement est le moins élevé. Ces statistiques sont tirées de l'Enquête nationale sur les ménages de 2011.
Conjoncture
Devant une reprise économique qui se manfeste trop timidement
Le fléau du chômage continue de sévir…
Malgré une reprise « modérée » sur le marché du travail en zone OCDE, l’organisation internationale s’inquiète de la hausse persistante du chômage de longue durée (plus d’un an), appelant les États à lutter en priorité contre ce fléau. Selon son rapport annuel Perspectives de l’emploi publié une semaine avant la réunion des ministres du G20 à Melbourne, l’Organisation de coopération et de développement économiques a enregistré un recul « limité mais bienvenu » du chômage. Son taux, qui stagnait à 8 % jusqu’à fin 2012, est tombé à 7,4 % en mai 2014. Il reste toutefois supérieur de 1,8 point au niveau d’avant crise. La reprise économique - 1,3 % de croissance en 2013 mais avec de fortes disparités - « est restée trop faible, dans une large mesure, pour engendrer une nette amélioration de l’emploi », explique l’OCDE, qui « anticipe une poursuite de la baisse du chômage dans des proportions limitées », pour atteindre 7,1 % au dernier trimestre 2015, selon des prévisions réalisées en mai. Mais « malgré un certain recul du chômage global, le chômage de longue durée a continué d’augmenter », note l’étude. Au premier trimestre, 16,3 millions de personnes étaient au chômage depuis plus d’un an, soit plus d’un tiers des 45 millions de chômeurs recensés au total en zone OCDE. Les chômeurs de longue durée sont près de deux fois plus nombreux qu’en 2007.
Aux États-Unis par exemple, leur proportion a bondi depuis le début de la crise financière, passant de 10 % des chômeurs en 2007 à 25,9 % en 2013. Ce pourcentage a aussi plus que doublé en Espagne, en Islande ou encore en Nouvelle-Zélande. La situation est particulièrement préoccupante en Grèce, où l’on recensait en 2013 67,5 % de chômeurs de longue durée parmi la population au chômage. L’Irlande (60,6 %), l’Italie (56,9 %) et le Portugal (56,3 %) étaient également frappés de plein fouet. L’OCDE prévient que « cette montée du chômage structurel dans certains pays ne s’inversera peut-être pas automatiquement avec la reprise de la croissance ». L’organisation recommande aux pays concernés d’être particulièrement attentifs à ces populations les plus éloignées de l’emploi, en mettant en place des politiques ciblées. Elle suggère une « approche plus intensive et personnalisée avec, par exemple, des entretiens réguliers en face à face et l’élaboration de plans d’action individuels ». Niveau d’avant-crise De manière générale, le chômage reste dans de nombreux pays bien supérieur au niveau observé avant la crise, même si les situations sont très diverses, observe l’OCDE. Il connaît une baisse beaucoup plus marquée aux États-Unis (avec un taux de 6,1 % en mai), où il n’est plus qu’à 1,1 point de son niveau d’avant-crise, qu’en zone euro (11,6 %), où il ne baisse que modérément. De son côté, le
leurs sont souvent moins bien protégés et que les entreprises investissent généralement moins sur eux, « ce qui peut peser sur leur productivité ». Les pays les plus concernés sont le Chili (30,5 % de contrats temporaires), la Pologne (26,7 %), l’Espagne (24,5 %), la Corée du Sud (22,1 %) ou encore le Portugal (21,5 %).
Japon a totalement effacé les effets de la crise, avec ses 3,5 % de chômeurs contre 3,9 % fin 2007. D’ici à 2015, l’OCDE prévoit que l’Espagne et la Grèce restent au-dessus de 20 %. L’Allemagne et l’Islande, pour leur part, devraient rejoindre le club très fermé des pays où le taux de chômage est inférieur à 5 %.
L’OCDE leur conseille notamment, pour réduire le phénomène, de durcir la réglementation appliquée aux contrats temporaires tout en assouplissant celle qui régit le licenciement des travailleurs permanents, voire de mettre en place un contrat unique.
Par ailleurs, l’OCDE met en garde ses membres contre les effets néfastes sur leur économie du recours excessif au travail temporaire, que de nombreux pays utilisent pour renforcer la flexibilité de leur marché du travail. L’organisation note que ces travail-
Immigration et chômage
Ottawa se penche sur les obstacles à l’emploi Les conservateurs ont fait de la reconnaissance des titres de compétences des nouveaux arrivants l’une de leurs priorités, mais les immigrants ont déclaré lors d’une recherche commandée par le gouvernement qu’ils faisaient face à des « obstacles majeurs » les empêchant de trouver un emploi même quand leurs compétences sont reconnues.
que la barrière de la langue et l’exigence d’avoir de l’expérience au Canada mentionnée dans les offres d’emploi posaient les plus gros problèmes. Ils ont mentionné qu’ils croyaient que la demande d’expérience au Canada était « une manière déguisée pour un employeur de favoriser les personnes nées au Canada », selon le rapport.
Dans un rapport préparé plus tôt cette année par Environics Research, les nouveaux arrivants de 12 groupes de discussion à travers le pays ont déclaré que d’autres problèmes les empêchaient de trouver du travail. Les participants - parmi lesquels des médecins et des ingénieurs - ont dit
Les participants ont aussi évoqué le manque de contacts au Canada et « les difficultés dans les interactions sociales courantes en raison de la langue et des différences culturelles ». Les participants ont déclaré qu’ils ne croyaient pas que la reconnaissance officielle des compétences était un pro-
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blème majeur. Les points de vue variaient toutefois sur la valeur des compétences selon le pays d’origine des participants. « Plusieurs participants chinois croient que leur formation et leurs expériences de travail en Chine n’ont pas une grande valeur au Canada puisqu’ils pensent que les choses sont si différentes entre la Chine et le Canada qu’elles ne sont pas applicables », peut-on lire dans le rapport. « On a noté qu’un diplôme en droit de la Chine ne prépare aucunement une personne à pratiquer le droit au Canada. » Un porte-parole du ministre de l’Emploi, Jason Kenney, a expliqué
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que le gouvernement avait commandé l’étude afin de déterminer si les immigrants ayant des compétences particulières avaient de la difficulté à trouver du travail. Il a ajouté que les conservateurs prévoyaient dévoiler cet automne un plan d’initiatives pour contrer ces problèmes. Plus tôt cet été, M. Kenney avait annoncé un accord avec les provinces reconnaissant dix nouveaux emplois, dont les soudeurs, les charpentiers et les électriciens, afin d’améliorer la reconnaissance des compétences des nouveaux arrivants. Un des objectifs du gouvernement est de réduire les besoins en travailleurs étrangers temporaires.
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Éducation
L’autre drame des «sans papiers»
Des enfants privés d’école L’an dernier, Une citoyenne, Mme Abir Haouam a commencé à s’inquiéter lorsque le mois d’août est arrivé. Les deux petites portugaises, âgées de 5 et 8 ans, qu’elle croisait de temps en temps au parc ne se préparaient pas à la rentrée scolaire. Loin de là. Les deux fillettes n’étaient pas même inscrites à l’école. « C’était un vrai gâchis. Surtout pour la plus vieille, qui avait besoin d’être stimulée et d’apprendre le français. Elle avait beaucoup de potentiel », raconte cette enseignante d’anglais langue seconde. De fil en aiguille, Mme Haouam a fini par comprendre que la famille, en sérieuses difficultés financières, était arrivée à Montréal pendant l’été avec un visa de touriste, dans l’espoir d’une vie meilleure. N’ayant pas de statut migratoire reconnu, les parents ne pouvaient pas travailler légalement, avoir des assurances, et encore moins envoyer leurs fillettes à l’école. 6000$ pour un enfant sans papiers « Au début, le papa disait qu’il ne voulait pas les inscrire par peur d’être poursuivi ou d’être renvoyé. Il disait qu’il n’avait pas l’argent pour payer (jusqu’à 6000 $ pour certains immigrants sanspapiers). Et quand on lui a dit que la commission scolaire pourrait accepter de scolariser ses filles gratuitement, il ne voulait pas, par crainte qu’elles se blessent dans la cour d’école et que ça lui occasionne des problèmes », raconte l’enseignante, qui les a finalement prises sous son aile pour leur donner des cours de français à la maison. Le cas de cette famille portugaise est loin d’être isolé. Le Québec, comme d’autres provinces canadiennes, est une terre d’accueil très prisée où nombre de familles vulnérables, parfois sanspapiers, viennent s’installer. Le cas classique : la famille qui entre au pays avec un visa de touriste et qui reste une fois que celui-ci est échu. Elle devient une famille « fantôme ». « Ce sont souvent des visiteurs restés trop longtemps ou des demandeurs d’asile déboutés qui ont décidé de rester », explique Zina Laadj, intervenante sociale à La Maisonnée, un service d’aide aux immigrants dans Rosemont–La Petite-Patrie. «Familles fantômes» Ils viennent du Mexique, d’Haïti et du Maghreb, surtout. Et ces dernières années, du Portugal et de l’Espagne, en raison de la crise économique. « Il y a énormément de jeunes qui viennent comme touristes et qui restent ici, audelà du six mois permis », explique Stephan Reichhold, directeur de la
Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI). « Certains ne renouvellent pas leurs documents tout simplement par méconnaissance. » Viennent ensuite les soucis : ne sachant pas comment régulariser leur statut, et par crainte de représailles ou que leurs démarches échouent, ces familles préfèrent demeurer dans l’ombre, sans pouvoir travailler (autrement qu’au noir), sans assurances et sans inscrire leurs enfants à l’école. De nouvelles directives Ces dernières années, des pressions, notamment faites par le Collectif éducation sans frontières, ont forcé le ministère de l’Éducation (MELS) à agir pour que ces enfants ne soient pas laissés à leur sort. Le problème ? D’une part, pour inscrire leur enfant et lui donner un code permanent (qui le fait « exister » dans le système), les parents doivent fournir plusieurs documents et informations qu’ils n’ont pas toujours ou sont réticents à donner, comme, par exemple, son adresse, une carte de résident permanent ou un document d’immigration non périmé. D’autre part, même si l’enfant est inscrit, il n’obtient pas automatiquement la gratuité, ce que permet la Loi sur l’instruction publique pour tout « résident du Québec », et doit parfois payer des frais allant jusqu’à 6000 $. De quoi rebuter ces familles en situation précaire. « Ils ne peuvent évidemment pas payer ça », dit M. Reichhold. Enfin, le problème de la confidentialité demeure. Même si les commissions scolaires sont appelées à user de discrétion, rien n’empêche qu’on puisse exiger d’elles qu’elles fournissent des informations aux autorités migratoires, contrairement à l’Ontario, qui applique la politique « don’t ask, don’t tell ». Pire, les familles qui se risquent à inscrire leur enfant à la commission scolaire de Montréal (CSDM) doivent signer une fiche d’inscription indiquant qu’elles autorisent les deux ministères de l’Immigration, fédéral et provincial, à fournir des informations les concernant au ministère de l’Éducation et à la commission scolaire, et à ce que cellesci puissent se les échanger entre elles. « Ce n’est pas assurer la confidentialité aux familles, ça », constate Linda Guerry, postdocrante à l’Institut national de recherche scientifique et membre du Collectif. En juin 2013, Marie Malavoy, alors ministre de l’Éducation, a publié une
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série de nouvelles directives adressées aux commissions scolaires pour faciliter l’inscription et donner accès à la gratuité à certains élèves sans-papiers. Par exemple, il est désormais possible de demander un code permanent pour des élèves dont les parents détiennent un permis de travail ou d’études, et ce, même s’il n’est plus valide. Ces élèves peuvent aussi être exemptés des droits de scolarité, tout comme le peuvent désormais les enfants des demandeurs d’asile, ceux dont la demande est refusée, mais à qui on permet de demeurer sur le territoire, et ceux des réfugiés reconnus qui possèdent un Certificat de sélection du Québec. Tout n’est pas réglé Mais pour les élèves dont les familles vivent dans la clandestinité… le problème reste entier. Certaines d’entre elles, à qui on avait permis d’inscrire leurs enfants gratuitement, ont reçu une facture. La CSDM, où nombre de ces enfants échouent, ne s’en cache pas. « Oui, une facture est envoyée par la poste », confirme son porte-parole, Alain Perron. « On ne peut pas s’inscrire en faux contre la Loi sur l’instruction publique. » Il refuse de donner davantage d’information sur la prise en charge de ces familles, affirmant que sa commission scolaire suit les directives du MELS. Selon lui, le problème est marginal — deux ou trois cas d’enfants tout au plus. Pour Stephan Reichhold, le principal problème est « l’opacité et l’arbitraire des procédures parfois à l’avantage, parfois au désavantage des familles ». «
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Je pense qu’un certain nombre de parents sans statut n’osent pas prendre le risque de se pointer à la commission scolaire tout seuls, car ils ne connaissent pas leurs droits et les procédures », a-t-il dit. Il joint sa voix à celle du Collectif pour réclamer que la Loi sur l’instruction publique soit modifiée. Ce à quoi le ministre de l’Éducation, Yves Bolduc, ne ferme pas la porte. « Une modification à la loi est une possibilité envisageable. Ça fait partie des éventuelles solutions sur la table et la porte n’est pas fermée à ça », a déclaré à notre confrère Le Devoir Yasmine Abdelfadel, attachée de presse de M. Bolduc. Du reste, le ministre n’ira pas plus loin dans les directives données aux commissions scolaires et se contente de leur demander de les appliquer pour l’année en cours. En attendant, le Collectif s’apprête à demander un avis consultatif à la Commission des droits de la personne pour savoir si la loi est discriminatoire ou pas. Abir Haouam évite de se prononcer sur la question, mais dans son esprit, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Car au final, la famille portugaise a fini par plier bagage et est retournée dans son pays d’origine après six mois, sans jamais avoir envoyé les deux fillettes sur les bancs d’école. « C’est comme si le système n’avait pas été capable d’absorber. Il n’a pas réussi à les intégrer. C’est très dommage », a-t-elle conclu.
Éducation
En marge de la rentrée
Comment gérer les activités parascolaires de votre enfant? Pour la majorité des enfants et des adolescents, qui dit rentrée dit également activités parascolaires. Qu’ils optent pour la danse, le club d’échecs, le hockey ou la politique étudiante, leur engagement est gage d’une meilleure adaptation à la vie scolaire et sociale, selon diverses études. Encore faut-il que des conditions favorables soient réunies.
Une bonne chose C’est démontré, les élèves qui participent à des activités en dehors des heures de classe sont plus susceptibles d’avoir de bons résultats scolaires et d’être impliqués socialement à l’âge adulte. Ils risquent moins de décrocher, d’avoir des symptômes dépressifs et d’adopter des comportements déviants. À l’adolescence, les activités parascolaires contribuent à construire l’identité, à développer l’autonomie. Si le jeune opte pour un sport, les bienfaits associés à la pratique d'activités physiques s'ajoutent. Voilà une occasion en or de bouger ! Des effets concrets « Les jeunes font des apprentissages individuels : ils acquièrent des habiletés cognitives, physiques et sociales. Par exemple, ils vont améliorer leur capacité de travailler en équipe, apprendre à gérer leurs émotions, à faire preuve de créativité », explique Anne-Sophie Denault, professeure agrégée de psychoéducation à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval. « La majorité de ces activités se déroulent en groupe, avec un adulte responsable. Les élèves peuvent se faire de nouveaux amis, acquérir un sentiment d’appartenance. Ils peuvent avoir du soutien d’un adulte qui s’ajoute à leur réseau et qui peut devenir un mentor. « Les liens avec ce groupe de pairs et cet adulte expliquent les
bénéfices de la participation sur le plan des relations interpersonnelles. » Des choix volontaires d’abord On mise sur l’intérêt de l’enfant : « Si la participation à une activité est bénéfique, c’est avant tout parce qu’elle est volontaire, choisie selon les intérêts de l’enfant », indique Anne-Sophie Denault. Cela dit, on peut l’aider à les découvrir. Votre fille n’en a que pour la danse ? Soit. Et si elle devenait tout aussi passionnée pour la natation ou l’improvisation ? « La participation à diverses activités (surtout si elle comprend des activités communautaires) mène généralement à un plus grand engagement social à l’âge adulte », dit la professeure. Ce qu’il convient d’éviter Une activité peut-elle aussi se transformer en expérience négative? Malheureusement, oui. « Si le parent choisit une activité qui va à l’encontre des goûts de l’enfant, ça peut devenir une source de conflit et l’enfant manquera de motivation », dit Mme Denault. D’autres facteurs peuvent jouer sur la qualité de l’expérience : un climat trop compétitif, un manque de compatibilité avec l’adulte responsable, l’influence négative des pairs, l’intimidation, le manque d’implication des parents, etc. Éviter aussi les horaires surchargés et les activités multiples. Cela existe; mais il s’agit de cas extrêmes qu’on ne doit pas généraliser, insiste AnneSophie Denault. « Les élèves commencent à perdre les bienfaits associés aux activités parascolaires lorsque la participation atteint 20 heures par semaine, affirme-t-elle. Il y a alors une courbe inversée. » Ça concerne moins de 5 % des jeunes. « Malgré tout, ces adolescents ont une adaptation scolaire et sociale aussi
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bonne, voire meilleure, que les adolescents qui ne participent à aucune activité. » Selon Isabelle Gingras, qui a étudié la question alors qu’elle était chercheuse à l’Université McGill, le sentiment de surcharge, hautement variable d’un adolescent à l’autre, ne dépend ni du temps consacré à une activité parascolaire ni du nombre d’activités auxquelles il participe. « Certains adolescents en demandent toujours plus, alors que d’autres préfèrent prendre leur temps et ne pas ressentir qu’ils sont toujours à la course », explique l’auteure dans un rapport du MELS. Plus les buts sont extrinsèques (ex. : la reconnaissance, l’argent, la beauté), moins l’expérience sera enrichissante et plus la pression ressentie sera forte, a-t-elle observé. Et si l’enfant refuse? Doit-on s’inquiéter si un enfant refuse toute activité ? Pas vraiment. « Au début de l’adolescence, les jeunes sont en recherche d’identité. Une
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pause peut être une occasion de prendre du recul, un temps de réflexion. Un enfant sportif peut avoir envie d’explorer le théâtre, dit Anne-Sophie Denault. Ça fait partie du processus normal de l’adolescence d’explorer l’identité. En tant que parent, on peut jouer un rôle de facilitateur en aidant son enfant à mieux cerner ses intérêts et à l’aider à trouver une activité qui lui convient. » Comme parent, comment peut-on alors optimiser l’expérience de son enfant autrement ? On mise sur le plaisir de l’enfant. On l’encourage dans ce qu’il entreprend, en lui imposant néanmoins la discipline nécessaire. On s’intéresse à ses progrès sans lui mettre de pression. On tente de garder un équilibre familial, d’établir une routine afin de ne pas bousculer la famille au quotidien. L’activité ne doit surtout pas devenir un sujet de conflit collectif !
Société
Jeux de hasard
Les «pigeons», une image justifiée par la science…
Les amateurs de jeux de hasard se comportent comme des pigeons, démontre une étude réalisée au Royaume-Uni mais à laquelle ont collaboré des chercheurs albertains.
Des tests menés par l'équipe du docteur Elliot Ludvig, du département de psychologie de l'Université de Warwick, indiquent que les joueurs humains et les pigeons sont 35 % plus susceptibles de parier pour obtenir un prix de grande valeur, que pour obte-
nir un prix de faible valeur.
Autant les humains que les oiseaux, a dit le docteur Ludvig, évitent moins le risque quand ils croient que le jeu en vaut la chandelle. Ce comportement serait associé au souvenir de comportements risqués adoptés dans le passé. Humains et pigeons seraient ainsi influencés de manière égale par les gains engrangés et les pertes essuyées précédemment.
Hôpitaux
« J'ai trouvé ça drôle quand on m'a dit que c'était 5 $, non remboursables », raconte Marie-France, qui accouchera à l'hôpital Saint-Luc du CHUM le mois prochain. À sa 32e semaine de grossesse, elle et son conjoint sont allés visiter le centre des naissances de l'hôpital pour découvrir les lieux, savoir où se rendre le jour de l'accouchement et obtenir des réponses à certaines de leurs questions de la part d'une infirmière. « J'ai trouvé ça assez particulier, dans la mesure où c'est un service qui devrait être rendu à la population », ajoute la future maman qui précise avoir beaucoup apprécié cette visite. Le CHUM justifie sa décision par le recours à une infirmière externe et par le fait que ces visites sont facultatives. Une réponse « inacceptable » selon Pierre Blain, le directeur du regroupement provincial des comités des usagers : « Ce n'est pas un surplus, ce n'est pas un luxe ». Au Centre universitaire de santé McGill, les parents doivent payer 15 $ pour ce service. Une infirmière de l'organisme « Bientôt bébé » se charge de la visite.
Longueuil, si les parents veulent visiter l'unité des naissances, ils peuvent le faire virtuellement, en ligne. Mais pour obtenir davantage d'information prénatale sur la façon dont se déroulera l'accouchement, ils doivent verser 15 $ à un groupe de médecine familiale du territoire. Visite gratuite La plupart des établissements que nous avons contactés offrent la visite gratuitement. C'est le cas à l'hôpital Juif et St-Mary's de Montréal, à l'hôpital Honoré-Mercier de SaintHyacinthe, à Le Gardeur de Terrebonne, au CSSS du Suroît, de même qu'à l'hôpital général d'Ottawa. L'hôpital Maisonneuve-Rosemont a mis fin aux visites il y a deux ans, et offre maintenant une visite virtuelle, comme Sainte-Justine. Le CSSS Jardin-Roussillon de Châteauguay n'offre pas de visite. « On est trop occupés », nous a-t-on répondu. Autres « extras » Le Regroupement provincial des comités des usagers dénonce plus largement la facturation de certains extras ou avantages dans les hôpitaux publics. « Après une facture, certains offrent un plâtre de base gratuit, mais on propose au patient un plâtre de meilleure qualité, et là : il doit payer. C'est la même chose avec les lentilles dans le cas des cataractes », dénonce Pierre Blain.
À l'hôpital Charles-Lemoyne de
Le professeur Ludvig croit que les oiseaux et les humains, même s'ils sont très éloignés en termes d'évolution, partagent une psychologie
Des chercheurs de l'Université de l'Alberta ont contribué à cette recherche, qui a notamment été financée par le Alberta Gambling Research Council et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Les conclusions de cette étude sont publiée dans le journal Biology Letters.
Bientôt les mêmes règle que pour les produits du tabac? Les cigarettes électroniques gagnent toujours en popularité, mais les incertitudes à propos d'éventuelles normes de Santé Canada et de restrictions d'autres agences suscitent des inquiétudes pour l'industrie au Canada.
Selon Phillip Gorham, un analyste en matière de tabac pour la firme américaine Morningstar, la future croissance de l'industrie de la cigarette électronique sera ralentie si les organismes de réglementation décident d'imposer des contrôles similaires à ceux touchant les produits du tabac. Parmi ces mesures, il invoque l'augmentation des prix et taxes, ainsi que des lois restreignant la publicité, l'affichage en magasin et les règles sur la vente. L'agence onusienne de la santé a réclamé cette semaine que les pays membres interdisent la vente de cigarettes aux mineurs, et rendent illégale son utilisation à l'intérieur jusqu'à ce que davantage de preuves puissent être recueillies à propos des risques, ajoutant que la popularité croissante du produit représentait un dilemme en matière de santé publique. Selon le Dr Douglas Bettcher, directeur du département de l'OMS pour la prévention des maladies non contagieuses, la cigarette électronique comporte à la fois des risques et des promesses. Il précise que l'industrie du tabac se présente de plus en plus comme des «partenaires de la santé publique» en prétendant que la cigarette électronique fait partie de la solution à la «catastrophe de santé publique qu'elle a créée». De son côté, Tommaso Di Giovanni,
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de base en ce qui concerne la prise de risque.
Cigarette électronique
Des services et des «extras» payants… Plusieurs hôpitaux exigent de 5 à 15 $ aux futurs parents qui visitent les unités de naissances quelques semaines avant l'accouchement. Ces frais ne sont pas remboursés par la Régie de l'assurance maladie du Québec. Pourtant, dans la plupart des établissements, ce service est offert gratuitement.
Le test demandait aux participants de choisir entre une option qui leur garantissait une récompense prédéterminée (des points pour les humains, des graines pour les oiseaux) et une option qui offrait des chances équivalentes d'une récompense plus ou moins généreuse.
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chef des communications sur les produits à risques réduits chez Philip Morris, a critiqué l'OMS pour avoir réclamé une «expulsion de facto des compagnies de tabac du processus démocratique». Selon l'Electronic Cigarette Trade Association of Canada (ECTA), les détaillants membres écoulent de 10 000 $ à 20 000 $ en produits chaque mois. Les cigarettes électroniques, fonctionnant à pile, ne contiennent pas de tabac, mais peuvent être utilisées pour chauffer une solution de nicotine liquide, créant une vapeur que les utilisateurs respirent. Les cigarettes électroniques vendues sans nicotine peuvent être vendues légalement au Canada, selon Santé Canada. Cependant, si elles sont vendues avec de la nicotine, ou dans des emballages avançant des informations en matière de santé, elles tombent alors sous le coup de la Loi sur les aliments et drogues. Jusqu'à maintenant, aucune cigarette électronique de ce genre n'a été autorisée à la vente. Les experts en dépendances et les responsables de la santé publique sont divisés à propos de l'usage de la cigarette électronique pour aider à écraser. Certains affirment que les cigarettes électroniques sont plus sécuritaires que les cigarettes traditionnelles, et pourraient donc sauver des vies. D'autres contestent ce point de vue en estimant plutôt qu'elles peuvent pousser les fumeurs à réduire leur consommation de tabac, mais demeurer dépendant de la nicotine.
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Société
La terre tremblera au Québec le 16 octobre prochain à 10 h 16 La terre tremblera fictivement au Québec le 16 octobre prochain. Après avoir été mené dans Charlevoix l'an dernier, l'exercice de simulation de tremblement de terre la Grande Secousse se tiendra pour la première fois dans l'ensemble du Québec, cette année. À 10 h 16 précise, la population est invitée à se réfugier sous un meuble pendant une minute à l'initiative de l'Association de sécurité civile du Québec, qui a décidé d'étendre l'exercice à toute la province. Plusieurs villes ont déjà confirmé leur participation, dont Québec, Montréal, Lévis, Saguenay, Terrebonne et Laval. Des organismes, des établissements scolaires et le ministère de la Sécurité publique vont également participer à la Grande Secousse. À Québec, une centaine d'employés municipaux prendront part à cet exercice de prévention et se sensibilisation. « C'est une opportunité pour tester nos structures », explique le responsable des dossiers de sécurité publique au comité exécutif de la Ville, Patrick Voyer. « Ce n'est pas juste la minute.
C'est l'avant et l'après. On travaille beaucoup sur la capacité de se relever le plus rapidement possible », ajoute-til. La Ville testera la coordination entre les différents bureaux de la sécurité civile des arrondissements et celui de la sécurité civile centrale. Se préparer au pire L'exercice permettra de démystifier les meilleures façons de se protéger lors d'un tremblement de terre. Il y a trois gestes à faire : se baisser, s'abriter et s'agripper. Le préfet de la MRC de Charlevoix, Sylvain Tremblay, a appris de ses erreurs lors de l'exercice qui s'est déroulé dans sa région en septembre 2013. « On connaissait tous de fausses façons de faire. On a donné les bonnes méthodologies de travail pour faire en sorte qu'il y ait le moins de blessures possible si ça arrivait. Même moi qui était habitué d'aller sous un cadre de porte, maintenant, c'est la table de la cuisine », souligne-t-il.
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Un sondage SOM mené pour le compte du Bureau d'assurance du Canada en août dernier révèle que seuls 15 % des répondants penseraient à s'abriter sous un meuble. Près de 30 % des personnes sondées ont indiqué que leur premier réflexe serait de sortir de leur résidence ou de leur auto et 35
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% envisageraient plutôt de se réfugier sous un cadre de porte. La Grande Secousse a vu le jour en Californie en 2008, sous le nom de Great ShakeOut. Plus de 25 millions de personnes ont pris part à un tel exercice dans le monde en 2013.
Voyages
Transports aériens
La «guerre des jambes» fait rage
Incliner son siège en avion, au risque de gêner son voisin de derrière? Après deux incidents survenus aux États-Unis, la « guerre des jambes » fait rage alors que tous s'accordent sur un point: on manque de plus en plus de place.
«
Incliner ou non son siège, « c'est un sujet de débat depuis des années », explique Sarah Schlichter, rédactrice en chef du guide de voyage, IndependentTraveler.com. « Mais de récents incidents montrent bien que les gens ne sont plus satisfaits de la qualité de leur voyage à bord des avions », ajoute-t-elle. En quelques jours, deux avions viennent d'être déroutés à cause de passagers furieux de voir un voisin incliner son siège. Dans le cas du vol United Arlines Newark-Denver, dérouté sur Chicago, un passager avait même utilisé un « protège genoux » (« Knee Defender »), deux pinces que l'on coince sur les bras de sa tablette et qui bloquent l'inclinaison du siège devant soi. Le gadget, que l'on peut s'offrir pour 22 dollars, se « vend de plus en plus depuis deux, trois ans », affirme à l'AFP son inventeur, Ira Goldman, sans vouloir donner plus de précisions. « Les gens voyagent plus, sur des avions de plus en plus bondés, l'espace se rétrécit et les compagnies aériennes continuent à fournir des sièges inclinables », s'insurge l'homme d'affaires qui, fort de son 1,92 m et 150 000 km annuels en avion, a inventé l'objet il y a onze ans. Protestations et coups de genou Depuis une semaine, chacun y va de son commentaire, souvent avec humour, pour dénoncer les sièges étroits, la guerre larvée entre les rangs, le drame des gens de grande taille ou les coups de genou vengeurs, faussement par inadvertance, sur le siège avant. « La guerre entre ceux qui inclinent leur siège et ceux qui veulent de la place pour leurs jambes s'intensifie », ironisait vendredi le site Gawker.com. « Incliner son siège, c'est diabolique », estimait un éditorial de slate.com signé Dan Kois qui évoque un voyage « avec un dossier si près de mon menton que je devais quasi loucher pour regarder la TV ». Un autre du New York Times, signé Josh Barro, assure crânement que l'éditorialiste « incline son siège quand il prend l'avion. Je ne m'en sens pas coupable ».
Je serais extrêmement heureux si l'industrie du transport aérien daignait régler un problème qu'ils ignorent depuis des années », affirme l'inventeur du « Knee Defender », se disant prêt à se consacrer à autre chose. De fait, une enquête en octobre 2013 du Wall Street Journal montrait comment les compagnies aériennes réduisaient l'espace vital des passagers en classe économique, pour faire de la place aux premières classes et aux hommes d'affaires qui payent leur ticket plus cher. La norme pour les long-courriers, qui était de presque 46 cm dans les années 1970 et 1980, est passée à 47 cm ensuite avant de descendre maintenant à un peu plus de 43 cm, indiquait le quotidien. A titre de comparaison, un siège de train américain fait 52 cm et celui d'un cinéma 63 cm. Pour remédier aux grincements de dents, certaines compagnies comme easyJet ou Ryanair, ont renon-
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cé, pour les courts trajets, aux sièges inclinables. « Il y a les restrictions de bagages, les extras en plus à payer, on ne nous offre plus les repas, les sièges sont plus étroits, il faut payer en plus pour un meilleur service. Et donc le simple fait de se sentir coincé par un siège inclinable rend les passagers furieux, parce que le voyage en avion est moins agréable que par le passé », estime Sarah Schlichter. « Vous avez acheté le ticket d'un siège inclinable, personne ne peut vous empêcher de l'utiliser », estime pour sa part Anna Post, l'une des dirigeantes d'une célèbre école de savoir-vivre fondée au début du siècle dernier, le Emily Post Institute. « Mais avoir raison n'excuse pas de mal se comporter pour arguer de son bon droit, cela peut créer plus de problèmes que cela ne vaut la peine », ajoute Mme Post qui conseille simplement d'incliner très doucement son siège, sans le claquer, « un tout petit peu suffit quelquefois à se sentir mieux ».
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Voyages
Air Algérie s’invite
à la Commission Charbonneau Le groupe canadien SM International aurait obtenu le marché de construction du nouveau siège d’Air Algérie après avoir octroyé des privilèges à des responsables au sein de la compagnie nationale, a révélé, le 4 septembre, un témoin dans une affaire de corruption impliquant un entrepreneur et des responsables québécois. Le témoin, Antonio Accurso, a affirmé avoir prêté son yacht le Touch à Bernard Poulin pour amener « des gars de Air Algérie qui vont venir faire un tour (…) en Méditerranée ». Et il se trouve que Bernard Poulin est le président fondateur du groupe SM International qui a obtenu, en 2011, le contrat de construction du nouveau siège d’Air Algérie à Bab Ezzouar pour un montant de 83 millions d’euros. Le patron SM International a dit à Antonio Accurso, propriétaire du bateau, qu’« Il va avoir du monde, des gars de Air Algérie qui vont venir faire un tour ». « À ce moment-là, on soumissionnait à un contrat en Algérie en partenariat avec monsieur Poulin, et je crois qu’il a amené quelqu’un de Air Algérie », a précisé le témoin, selon le document portant la transcription de l’interrogatoire( P 57) de la commission d’enquête sur l’octroi et la ges-
tion des contrats publics dans l’industrie de la construction au Québec. Accurso n’a pas révélé l’identité du responsable ou des responsables de la compagnie aérienne algérienne qui a/ ont profité de ce séjour sur un bateau : « Je ne connais pas la personne, je ne sais pas sa fonction dans Air Algérie, mais il (Poulin ndlr) l’a pris dans la Méditerranée ». Le « cadeau » offert par Bernard Poulin aux responsables d’Air Algérie a porté ses fruits. « C’est un contrat par la suite qu’on a obtenu, que monsieur Poulin a repris par la suite. Moi, je n’ai pas exécuté le contrat, c’est lui qui l’a exécuté », a précisé le témoin, poursuivi dans d’autres affaires de corruption. Bernard Poulin dément Contacté par la presse, Bernard Poulin a démenti avoir reçu quelqu’un d’Air Algérie sur le bateau. « »Je n’ai jamais reçu sur le bateau un quelconque responsable d’Air Algérie. Je l’ai utilisé pour ma famille et mes amis », a t-il déclaré en exclusivité au journal algérien El Watan. Le marché portant construction du nouveau siège d’Air Algérie a pris une
Tony Accurso
autre tournure après que Wahid Bouabdellah eut été limogé en juin 2011. Son successeur à la tête de la compagnie, Mohamed Salah Boultif, a décidé de résilier le contrat après un litige relatif au payement des travaux supplémentaires qui ne figurent pas sur les plans du projet, réalisés par le bureau d’étude libanais Khatib et Allami. La résiliation du contrat a amené SMI à lancer, en avril 2013, une procédure d’arbitrage international. Le groupe candien réclame à Air Algérie 90 mil-
lions d’euros de dommages-intérêts, au niveau de la Chambre de commerce international (CCI) à Paris. Cette affaire de corruption est dévoilée à un moment où Air Algérie traverse une zone de turbulence. Les accidents au sein de la compagnie se succèdent à un rythme alarmant depuis le crash, en juillet dernier au Mali, d’un avion affrété auprès de l’espagnole SwiftAir. Source: El Watan
Syphax Airlines
Pas d’annulation des vols sur Montréal Syphax Airlines vient de démentir la rumeur selon laquelle la compagnie aurait annulé des vols à destination de Montréal. Dans ce sens, l’entreprise rappelle que pour faire face à l’afflux de passagers désireux de rentrer au Canada en cette période de fin de vacances, elle avait ajouté le 25 août dernier un vol supplémentaire vers Montréal, à bord de son Airbus A330 baptisé « Al Qods ».Un vol qui est
venu s’ajouter au vol hebdomadaire régulier du jeudi.
D’un autre côté, Syphax Airlines annonce que dans un souci d’utilisation optimale de sa flotte, la compagnie est en train de procéder à la régulation de certaines dates de ses vols vers Montréal. Des pourparlers avec d’autres com-
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pagnies aériennes sont en cours pour des accords commerciaux et particulièrement du code Share en basse saison sur l’axe Tunis-Montréal. Il est à noter que durant ses cinq premiers mois d’exploitation (avril- août 2014), la ligne a connu une énorme rentabilité et a réalisé 40% de parts de marché sur l’axe Montréal-Tunis.
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Ces dessertes constituent depuis quelque temps une source de rapprochement entre les deux peuples et une véritable aubaine pour les hommes d’affaires des deux pays qui n’auront plus à faire des escales longues et fastidieuses dans les aéroports, en attendant de rallier leur destination finale. Source : Tuniscope.com
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Cultures & media
Rapport 2014 du CRTC
Radiodiffusion : tendances et enjeux
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) vient de publier le Rapport de surveillance des communications de 2014, qui dresse le portrait de l’industrie canadienne des communications, soulignant tendances et enjeux émergents. Dans ce rapport, l’organisme se penche sur la radio et la télévision. Dans les prochaines semaines, il pub-
liera des données sur les télécommunications, puis sur les dépenses des consommateurs en services de communications, les prix et les comparaisons à l’échelle internationale.
télévision par semaine.
d’adeptes au pays. -En 2013, les Canadiens écoutaient en moyenne 19,3 heures de radio par semaine.
Quelques faits saillants du Rapport
-En 2013, le temps passé à regarder la télévision traditionnelle chaque semaine a diminué pour tous les groupes d’âge, surtout chez les auditeurs de 18 à 34 ans.
-Les Canadiens regardent des émissions de télévision sur de multiples plateformes. Cela a entraîné une légère augmentation du nombre moyen d’heures de visionnement de la
-Les adultes canadiens ont regardé 1,9 heure de contenu télévisuel sur Internet chaque semaine, une hausse par rapport à 1,3 heure en 2012. À noter que Netflix a de plus en plus
-En 2013, le total des recettes de radiodiffusion a augmenté de 1,3 % pour atteindre 17,1 milliards de dollars.
Festival des Films du Monde de Montréal
Polémique autour du film «The Algerian» Par Réda Benkoula
pas!).
Diffusé en avant-première mondiale lors de la 38ème édition du Festival des Films du Monde, « The Algerian » de l’américain Giovanni Zelko fera longtemps parler de lui avant sa sortie officielle dans les salles. Le longmétrage de quatre-vingt-dix-neuf minutes propose de suivre le parcours d’Ali, un jeune Algérien qui voyage aux États-Unis en tant qu’étudiant et qui prépare en parallèle un complot terroriste. Le réalisateur Giovanni Zelko qui se défend de stigmatiser l’image des Algériens, reconnaît que la trame du film a été adaptée à des fins cinématographiques, pour qu’elle coïncide avec les standards hollywoodiens. Ne disposant que de peu de moyens le cinéaste aura mis près de cinq ans pour finaliser le montage de ce film qui prône la tolérance.
Bref, les alternatives existent pour créer des endroits fictifs sans nommer de véritables pays afin de ne pas heurter les sensibilités des pays arabes ou du Moyen-Orient d’autant que la cristallisation des identités dans le contexte actuel fait naître des discours extrêmes. Le réalisateur aura d’ailleurs réussi un coup de maître en faisant paraître une interview fleuve dans le journal Algérien El Watan pour défendre son travail et orienter le regard qui pourrait être porté à son film. Pis encore, la journaliste qui n’a même pas vu le film se sera contentée de reprendre le discours du cinéaste.
Le souci du créateur du film de donner l’identité de Citoyen Algérien au personnage d’Ali, sera sans nul doute le reproche principal qui sera fait à cette production, d’autant que de nos jours les réalisateurs ont la possibilité de créer des pays imaginaires sans toutefois nommer de manière explicite tel ou tel pays. Cela s’est vu dans la huitième saison de la série « 24 heures chrono » où l’acteur Anil Kapoor interprète le rôle d’Omar Hassan « Le Président des Arabes » (comme s’il y avait un Président de tous les pays Arabes!), ou encore la toute dernière série « Tyrant » que diffuse la chaîne FX et qui se déroule quelque part au Moyen-Orient dans le pays d’Abbudin (un pays qui n’existe
Ainsi, on reconnaîtra au réalisateur d’avoir choisi l’acteur Ben Youcef qui est d’origine algérienne pour incarner le rôle d’Ali. On lui reconnaîtra aussi ce souci de la minutie en filmant des plans qui nous font visiter Alger et ses alentours en passant par Tipaza et Ghardaïa. Cependant, et c’est là où le bât blesse, le scénario donne l’impression que la haine viscérale que le personnage nourri à l’égard de l’Occident lui viendrait de ce qu’il aurait vécu dans une Algérie qui prônerait l’intolérance (comme si l’occident était responsable de la décennie noire que l’Algérie a vécu).
Deux questions se posent après avoir vu le film : Fallait-il être politiquement correct ? Où fallaitil avoir un souci de l’authenticité ?
Je dirais même que la dynamique du discours anti-occidental qui est
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décrit dans le film a plus des références Moyen-orientales. Sans uniformiser le regard que portent les Algériennes et les Algériens sur l’Occident, ces derniers pensent plus y aller pour y vivre et avoir une vie meilleure que pour le détruire. Les Harraga (brûleurs ou illégaux) en sont l’exemple parfait d’une jeunesse Algérienne qui ne pense qu’à quitter le pays. Telle est la réalité de l’Algérien(ne) d’aujourd’hui qui fantasme d’aller
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en Europe ou n’importe où ailleurs et pourvu que ce soit en dehors du pays. Et si l’affiche du film veut exprimer le regard d’un homme que l’on voit de dos et qui observe de loin une ville pour la détruire, j’y vois pour ma part un homme qui est derrière des barreaux qui l’empêchent de sortir de son pays et qui regarde vers l’Occident pour y construire un avenir.
Podium
Concours culinaires
Les Chefs! : Hakim obtient sa revanche
Hakim Chajar en terminant son pigeon aux petits pois verts, troisième service de son repas tout Bocuse, qu'il allait présenter aux juges, n’était pas franchement satisfait de sa préparation. C'était pourtant écrit dans le ciel qu'il remporterait cette cinquième saison des Chefs!, diffusée lundi 7 septembre sur ICI Radio-Canada Télé, obtenant sa revanche, devant Isabelle Plante, qui est arrivée deuxième, et Jonathan Rassi, troisième.
On a cru un moment que c'en était fait pour Hakim, dont le deuxième service a déçu les juges, notamment en raison des morceaux de corail dans son homard. Contrairement à ce qu'il croyait, les juges ont trouvé parfaite la cuisson de sa volaille, qu'il jugeait nettement insuffisante. «Le pigeon, surtout le suprême, se mange saignant», déclare le juge Pasquale Vari, après l'émission. Hakim, que plusieurs voyaient gagnant avant même que la saison commence, a littéralement sauté de joie en apprenant sa victoire, qu'il devait garder secrète depuis l'enregistrement au mois de mai. «Ça bouillait en dedans, je n'en pouvais plus de me faire poser la question», nous a confié le sympathique gagnant. Les candidats devaient préparer un repas trois services tout Paul Bocuse, dont son célèbre consommé en croûte aux truffes et au foie gras. Le reste était à leur discrétion, du moment que le deuxième service comprenait une viande, et le troisième, un poisson ou des fruits de mer. Pas de dessert, hélas. Durant la première demi-heure de l'émission, on aurait cru que les trois finalistes accomplissaient le défi en équipe, fin logique de cette cinquième saison, où les candidats n'ont jamais cessé de s'entraider. Pas de véritable crescendo de tension comme on peut en vivre un soir de finale. Même que la plupart des émissions de la saison nous en ont offert davantage. Pour la finale, Élyse Marquis et Daniel Vézina recevaient le chef Laurent Godbout, juge à la première saison des Chefs!
Isabelle avait pourtant la plus belle assiette en deuxième service; son rouget en écailles de pomme de terre, sauce à l'orange, était sublime, à l'oeil comme au goût, si l'on en croit les juges, qui n'avaient aucun bémol. À ce stade, tout semblait mener la chef pâtissière du 47e Parallèle vers la victoire. «Après ce plat-là, je pouvais quasiment écrire son nom sur le chèque», admet Pasquale Vari. Mais sa blanquette de veau en troisième service a tout gâché : pas assez de cuisson et une sauce qui goûtait la farine. «Ça a été fatal», lui a dit Jean-Luc Boulay. Les juges ont été si élogieux après avoir goûté la fricassée de volaille à la morille de Jonathan qu'on a cru qu'il pourrait se glisser entre ses deux concurrents. Son plat de poisson fade et le fait d'avoir laissé traîner son poulet sous le comptoir trop longtemps lui ont valu la troisième position. «On ne joue pas
avec la santé des gens», a même lancé Jean-Luc Boulay, visiblement incommodé. Chef au nouveau restaurant Laurea à Montréal, Hakim repart ainsi avec le grand prix d'une valeur de 55 000 $, comprenant des bourses en argent, un voyage gastronomique et une voiture. Aurons-nous droit à une sixième saison des Chefs!, l'émission la plus regardée cet été à la télévision? Pasquale Vari n'en sait rien, mais a évoqué l'idée de prendre une pause pour revenir tous les deux ans, question de voir le bassin d'aspirants-chefs se renouveler, un peu comme le fait Star Académie. À moins que les producteurs contournent ce problème en proposant une formule tout à fait différente, qui sait?
Hakim Chajar
Le visage de la relève culinaire québécoise Encore méconnu de plusieurs il y a seulement quelques mois, le nom d’Hakim Chajar est sur toutes les lèvres, surtout depuis sa prestation dans le dernier épisode des Chefs!, on fait l’éloge de sa cuisine au restaurant le plus couru de l’heure, le Laurea…
Bien qu’il ait toujours travaillé en restauration, histoire de gagner un peu de sous à l’adolescence, l’intérêt d’Hakim pour la cuisine s’est développé plus tard, vers 23 ans. Le jeune Sherbrookois d’origine marocaine s’était alors acheté un billet simple pour l’Europe et s’était promené durant quatre mois à travers Londres, la France, l’Espagne, le Maroc et l’Italie. Sur la route, il s’attablait aux cantines
locales et découvrait la culture des régions visitées à travers leur cuisine. «Là-bas, on retrouve des chefs exceptionnels dans les restos les plus anodins», se rappelle-t-il.
De retour à Montréal, son choix est fait: il s’inscrit à l’ITHQ en 2009 afin d’acquérir une formation supérieure en cuisine. Élève brillant et ambitieux, il méritera la prestigieuse bourse des Grands Chefs Relais & Châteaux, honneur qui lui a permis d’aller parfaire son art au sein d’établissements à la notoriété internationale, soit la Maison Troisgros en France, Can Fabes en Espagne et Meadowood à Napa Valley, en Californie. Que retient-il de ces trois expériences? «De la France, la rigueur, l’équilibre et l’assiduité. De
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l’Espagne, la simplicité et la fraîcheur des produits – c’est d’ailleurs là que j’ai réellement découvert les produits de la mer. Et en Californie, c’est le côté cosmopolite que j’ai trouvé enrichissant. Le fait qu’on s’y trouve au-dessus du Mexique et face à l’Asie donne lieu à des mélanges fascinants.» Puis, c’est l’aventure des Chefs! qui commence et qui le révèle au Québec, en 2012. Passage remarqué lors duquel son savoir-faire s’est vite imposé et où il s’est rendu jusqu’en finale. Bien qu’il ne soit pas reparti avec la première place, il y a trouvé un véritable mentor en Daniel Vézina, un deuxième père, même, ajoute-t-il. «Daniel m’a parrainé, il a su me lire comme un livre ouvert. Il m’a transmis sa rigueur, mais aussi sa joie de vivre!»
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Après une année aux fourneaux du resto de Vézina, le Laurie Raphaël, à Montréal, Hakim est désormais à la tête de sa propre cuisine et jusqu’à présent, clients et critiques n’ont que de bons mots pour la nouvelle table. La finale de la grande revanche des Chefs! a lieu le 8 septembre et les prédictions le font favori. «Je ne suis pas né sous une bonne étoile, j’ai travaillé fort pour me rendre où je suis aujourd’hui. Je n’aurais pas eu le même succès avec une autre attitude.» Bonne étoile ou pas, on ne peut qu’admirer son parcours et souhaiter le voir continuer à triompher, que ce soit sur le plateau des Chefs! ou dans la belle cuisine à aire ouverte du Laurea.
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Cultures & media
Le Festival Vue sur la Relève aura 20 ans en 2015
Appel aux artistes
Le Festival Vue sur la Relève invite tous les jeunes artistes et créateurs professionnels, issus de toutes les disciplines des arts de la scène, à proposer leur spectacle prêt à diffuser en vue de la 20e programmation du Festival Vue sur la Relève.
Ne manquez pas cette opportunité de présenter votre spectacle lors de la 20e édition du Festival qui se tiendra du 7 au 18 avril 2015 au Lion d’Or, la Cinquième Salle de la Place des Arts, la Sala Rossa, le Gesù et le Cabaret du Mile-End! Faites comme Alex Nevsky, Les Hay Babies, Klô Pelgag, Sarah ToussaintLéveillé, Lisa LeBlanc, Fred Pellerin, Evelyne de la Chenelière, Simon Boulerice, Mélanie Demers, Pierre Lapointe, Vincent Vallières, Yann Perreau, Virginie Brunelle, Daniel Boucher, Mes Aïeux, Karkwa,
Emmanuel Jouthe et de nombreux autres, qui ont profité du Festival Vue sur la Relève comme tremplin de duffusion, et proposez votre dernière création! Inscrivez votre spectacle en ligne, avant le 26 octobre 2014, à www.vuesurlareleve.com. 20 ans, ça se fête! Vue sur la Relève célébre aujourd’hui 20 ans d’expérience en diffusion d’œuvres originales de jeunes créateurs professionnels. Mûr, affirmé et bien ancré dans le paysage culturel francophone, le Festival reste à l’image de ses artistes : jeune, passionné, fougueux, amoureux des arts et animé d’une énergie revitalisante. Il est important de savoir que le Festival Vue sur la Relève n’est pas un concours. Il n’y a aucun gagnant. Il s’agit
d’un événement de diffusion qui, depuis 20 ans maintenant, défend d’abord et avant tout la jeune création, et qui met à l’affiche une programmation de spectacles pluridisciplinaires conçus par des créateurs professionnels âgés de moins de 35 ans. Appuyé par plus de 60 partenaires du milieu des arts vivants, le Festival Vue sur la Relève s’engage à offrir une vitrine à tous les artistes de la scène, toutes disciplines confondues, en plus d’offrir à chacun d’eux la chance de
faire de nouveaux apprentissages. Plus d’une cinquantaine de Coups de Pouce, sous forme de vitrines, diffusion de spectacles, participation à la Bourse RIDEAU grâce aux Entrées en scène Loto-Québec, bourses, séjours de prospection à l’étranger, enregistrement en studio, résidences, etc., d’une valeur de 126 000 $, pourraient vous être attribués, permettant ainsi un véritable lancement pour votre carrière. Informations : www.vuesurlareleve. com
Arts plastiques
Assia Assaimaeur : Femmes, toiles et légendes Le hasard fait parfois bien les choses. Ainsi de notre découverte de l’artiste peintre montréalaise Assia Assameur. Une rencontre professionnelle au départ, une pause et un petit échange presque mondain; et une découverte. Celle d’une femme, originaire du Maghreb, qui connait la peinture, aime les musées, sait regarder une photo et s’intéresse aux créations numériques… Celle d’une femme également dont le sens esthétique se nourrit de ses nombreux voyages colorés à travers le monde, de ses différentes expériences et rencontres artistiques.
Et puis apprendre, quelques années plus tard, elle s’intéresse de plus en plus aux chevalets, palettes et pinceaux et, à côtés de son métier, se consacre à créer, à mettre une œuvre en chantier. Le tout à travers une première exposition, discrète, mais dont l’impact sur ceux qui ont eu la bonne idée de partir à la découverte est plus que fort. Car ses toiles sont émotions aussi. Elle y décrit un univers, certes parfois onirique, mais rendu dans un éclatement de formes et couleurs qui
décrit des réalités seraient dures à accepter si elles n’étaient aussi imagination d’un monde meilleur inspiré de légendes d’ailleurs… Et à ceux qui n’auraient pas eu l’opportunité de visiter son exposition, en attendant la prochaine qui ne saurait tarder compte tenu de son talent, vous pourrez toujours vous consoler en découvrant ses toiles sur le site www.assiaassaimeur.com
Conseil Interculturel de Montréal
Appel à candidatures Le Conseil interculturel de Montréal (CIM), est une instance consultative de la Ville de Montréal composée de 15 membres bénévoles. Il a pour fonction principale de conseiller et donner son avis au conseil de la ville et au comité exécutif sur les services et les politiques municipales à mettre en oeuvre afin de favoriser l'intégration et la participation des membres des communautés culturelles à la vie politique, économique, sociale et culturelle. Candidatures Les membres du Conseil intercul-
turel sont choisis de façon à refléter la diversité de la société montréalaise.
relations interculturelles et posséder de l'expérience dans ce domaine;
réunions de ses comités spéciaux chargés d'étudier des questions particulières.
Ils sont nommés par le conseil de la ville, sur recommandation d'un comité de sélection. Les mandats des membres sont d'une durée maximale de 3 ans, renouvelables une seule fois.
2. connaître les secteurs d'activités municipaux et les enjeux urbains; 3. participer de façon active à un ou plusieurs des secteurs suivants de la vie montréalaise : économique, culturel, scientifique, communautaire ou éducationnel;
Toute personne intéressée à devenir membre du CIM doit soumettre son curriculum vitae accompagné d'une lettre d'une page expliquant les raisons pour lesquelles elle souhaite le devenir, avant le 7 octobre 2014, 17 h.
4. faire preuve de disponibilité afin de participer aux assemblées du conseil à raison d'un minimum de 8 assemblées par année et aux
Pour plus d'informations visitez le site web : www.ville.montreal.qc.ca/conseilinterculturel
Critères de sélection Pour devenir membre du Conseil interculturel, la candidate ou le candidat doit : 1. manifester de l'intérêt pour les
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Questions contemporaines
Ce que Najat Vallaud-Belkacem signifie n’est pas Najat VallaudBelkacem qu’on abaisse. C’est l’âme de la France qu’on abîme.
Driss Ajbali
Par Driss Ajbali* Sa vérité, Najat Vallaud-Belkacem la porte dans son nom. Celui-ci est la traduction d’une ambivalence identitaire dans laquelle se reconnaissent de millions de Français issus de l’immigration. Dans le «Vallaud», nom porté par ses deux enfants jumeaux, il y a un jaillissement du terroir qui s’immisce merveilleusement au milieu d’appellations qui évoquent l’étrangeté. Et ce «Vallaud» n’en fait pas nécessairement “ une femme française ” au sens évoqué par le film de Régis Wargnier et l'actrice Emmanuelle Béart. De « Belkacem », on ne retient qu’une giclée de marocanité. Qui peut croire qu’elle est absolument marocaine juste parce que née sur cette terre et pour y avoir passé les quatre premières années de son enfance ? Il y a en revanche une identité que personne ne peut soustraire à Najat Vallaud-Belkacem. C’est qu’elle est entièrement une enfant de la République. Elle porte en elle le lourd triptyque des valeurs qui ornent tous les frontons des écoles et communes de France. Elle les éclaire de son sourire. Car aux yeux de nombre d’entre nous, elle incarne l’aboutissement de nos combats d’antan (les années 80) pour de l’égalité dont la France manque tant, et de plus en plus, en ces heures de délitement et de fractures. Dans une société qui a mal en son immigration et qui, depuis 1989 avec l’affaire du foulard, a fait de ce sinistre fichu un marqueur de l’échec de l’intégration, il aurait fallu voir dans cette femme une bannière de modernité et un quitus d’une parfaite intégration. Car quoi de plus que l’intégration politique, stade ultime de l’intégration tout court ? Valls, en faisant applaudir, debout, tous les socialistes à la Rochelle, ne s’y est pas trompé. Il a offert à des militants désemparés une figure totémique de cette égalité républicaine. Et bien qu’elle soit fort appréciée par un grand nombre de ses concitoyens, il reste qu’avec le déferlement de haine d’une partie de l’opinion, ce
Il y a comme un désir d’exécution… séance tenante. Il est le fait d’aboyeurs qui font partie par cette indépassable partie de la France qui sent le rance. Grincheuse, acariâtre et il faut le dire raciste, elle se repait de beaufitude. Cette France qui aime se régaler des niaiseries d’une Nabila et qui exulte devant les charmes d’une Zahia Dehar. Car et aussi aux yeux de nombre d’entre nous, démocrates désabusés, aphones et tellement invisibles tant on est enfouis sous le fatras des nouvelles colportées par des médias qui n’ont plus de yeux de Chimène que pour les voyous, les burquas, les barbus, les Merah, les Nemmouche et autres intégristes de tout acabit, Najat Vallaud-Belkacem incarne le courage et surtout cette seconde valeur qu’est la liberté. C’est en femme libre qu’elle accoste des sujets de société audacieux qui frisent l’irrévérence. D’aucuns auraient voulus qu’elle ne dépasse pas le rôle d' « Arabe de service », engluée dans les drames des banliNajat Vallaud-Belkacem eues blafardes, plus prompte à gérer vainement les éclopés d’une société munautarisme. fracturée et les estropiés du libéralisme à visage social. Que ne s’est*Sociologue strasbourgeois. Auteur elle pas contentée de lénifier, à l’image d’une Fadéla Amara, entre putes et soumises, pour tranquilliser illusoirement les bobos et autres bourgeoises. Que n’a-t-elle pas crâné comme une Rachida Dati qui n’a survécu que parce qu’elle est de droite et qu’elle fut combattue Élue "Lyonnaise de l’année" en décembre par la gauche sur ses choix et 2007, Najat Belkacem, arrivée en France convictions et non pas sur ses à l’âge de 4 ans, où elle a rejoint son père origines. Il est vrai que la difouvrier dans le bâtiment, a grandi dans la férence entre Amara, Dati banlieue d’Amiens. et Vallaud-Belkacem est de taille. Les premières sont des Le Trombinoscope, annuaire professionproduits politiques. Najat nel du monde politique, l'avait consacré, Vallaud-Belkacem est une en 2013, au moment ou elle occupait la femme politique. fonction de ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement Enfin, on aurait espéré que français dans le cabinet dirigé par Jean Najat Vallaud-Belkacem incarna Marc Ayrault, "révélation politique de la fraternité. Cette troisième et l’année 2012". sublime valeur. C’est faire fi du travail de sape Elle confirme cette qualité en 2014, avec sa promotion et sa nomination à la tête du entrepris en profondeur par les prophètes du nombrilisme fran- ministère de l'Éducation nationale dans le gouvernement de Manuel Valls. chouillard. Les prédicateurs du désenchantement et du déclinNée à Beni Chiker, dans le nord-est du isme. Les nostalgiques des racines millénaires et leurs dia- Maroc, elle avait rejoint son père, immigré en France, à l'âge de 4 ans. Trente ans tribes incendiaires. Les oracles plus tard, par son travail et sa ténacité névrosés de la conscience malheureuse. Ils ont brisé toutes les citoyenne, elle se retrouve aux premiers rangs de l'actualité et de la responsabilité digues. Zemmour, Ménard, et dans sa seconde patrie. les autres ont préparé le bainmarie où prospèrent désormais Mais ce ne sont pas ses qualités que les germes de la haine. Et de la l'extrême droite française regarde. Ce sont discorde. Chassez donc la frases origines et confessions. Dès sa nomiternité ? vous hériterez de la nation en effet, des milliers de commenfratrie. Le tribalisme et le com-
de «Violence et immigration» et «Ben Laden n’est pas dans l’ascenseur»
Ce que le mot Inclusion signifie
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taires et messages racistes ont envahi les réseaux sociaux. La page Facebook du ministère de l’Éducation nationale a reçu des milliers de messages hostiles.
Plus condamnable encore, deux hebdomadaires s’en sont pris directement et sournoisement à l’origine de la ministre de l’Éducation nationale. Dans sa une, l’hebdomadaire Valeurs Actuelles titre « l’Ayatollah, enquête sur la ministre de la Rééducation nationale », alors que le magazine Minute est beaucoup plus direct et annonce « Une Marocaine musulmane à l’Éducation nationale ». Ces unes ont soulevé un tollé sur les réseaux sociaux et dans les sphères politiques françaises. Mais aussi au Maroc. Une telle affaire ne devrait au juste, laisser personne indifférent. Surtout pas dans les pays à forte identité migratoire, comme le Canada et le Québec. C'est pourquoi nous reprenons cette chronique dont la teneur, même au-delà du cas Najat Vallaud - Belkacem, rappelle aux extrémistes de tous pays, ce que les migrations peuvent apporter à l'humanité et ce que les mots intégration et inclusion signifient.
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Interlignes
A contre-courant
Un printemps pour rien ?
Par Ismaïl Harakat
Dans de nombreux pays arabes secoués par des manifestations à grande échelle entre décembre 2010 et mars 2011, la situation est tout simplement chaotique. Dans trois pays notamment, c’est désormais la loi de la jungle qui prévaut avec des scènes de pillage au quotidien, des régions entières contrôlées par des seigneurs du crime organisé, un taux de chômage hallucinant et une fuite massive des investisseurs étrangers hormis les grandes compagnies pétrolières et gazières qui, elles peuvent se permettre de se doter d’un service de sécurité armé jusqu’aux dents et payé rubis sur l’ongle. Tel est le lot de la Libye, de l’Irak et de la Syrie notamment. Ce qui ne signifie pas pour autant que dans d’autres pays comme l’Égypte la situation incite à l’optimisme. Dans les cas les plus extrêmes, c'està-dire en Syrie et en Irak, on en arrive à s’interroger si le salut réside dans l’instauration d’une démocratie à l’occidentale alors que dans ces deux pays, c’est une véritable poudrière ethnique. Des rancœurs tenaces cumulées depuis plusieurs générations entre les uns et les autres rendant tout compromis hasardeux. En prime, la mouvance islamiste y a le vent en poupe et constitue aux yeux d’une bonne partie de la population une alternative salutaire à la dictature ou à la corruption. Le pire, c’est ce sentiment de nostalgie nourri à l’égard des dictatures et qui devient presque généralisé en dépit des mises en garde de la classe intellectuelle. Les Arabes qui sont passés de la dictature au chaos préfèrent donc tout naturelle-
ment le moindre mal, c'est-à-dire ces régimes qui les soumettaient mais qui leur assuraient un minimum de sécurité et des marchés regorgeant de denrées de première nécessité à des prix accessibles, plutôt que ce simulacre de démocratie qui les ramenés plusieurs décennies en arrière. Dérapage sécuritaire et capitulation des institutions C’est donc l’une des incidences les plus préoccupantes de l’insécurité et de la capitulation des institutions. Bien entendu, l’idée de ramener au pouvoir les symboles de l’ancien régime peut sembler saugrenue dans le cas irakien et libyen, mais n’est-ce pas ce qui s’est réellement passé en Égypte? La dictature est un ensemble de pratiques et de mécanismes qui ne se limitent pas à un seul homme et le moins qu’on puisse dire c’est que l’Égypte, pays le plus influent du monde arabe a renoué de plus belle avec la logique de confrontation directe avec les Frères Musulmans. Une situation explosive qui rappelle étrangement la période de 1977 à 1981, c'est-à-dire lorsque Anouar el Sadate avait, à la stupeur générale manifesté son intention de braver tous les interdits et de se rendre en Israël. Son passage à l’acte qui a connu son apothéose avec les accords de Camp David avait alors constitué un pain béni pour les Frères Musulmans longtemps relégués au second plan par le panarabisme nassérien.
L’opposition à toute forme de normalisation avec Israël avait atteint des proportions telles que Sadate n’avait pratiquement plus aucun appui au sein de la population égyptienne y inclus
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au sein des libéraux. Voilà comment son assassinat a pu être perpétré au grand jour lors d’une parade militaire commémorant le huitième anniversaire de la guerre du Kippour. Son assassin, le militant jihadiste Khalid al Islambouli avait alors tiré comme à la parade, ce qui en dit long sur les complicités dont l’auteur de l’attentat a pu bénéficier. Avec l’arrivée au pouvoir de Moubarak, l’occasion était trop M. Ismail Harakat bonne pour que le régime militaire règle ses comptes avec les Frères Musulmans même s’ils se sont longtemps que le passage de Moubarak à la tête de l’État. Et quand officiellement dissociés de l’attentat. on sait que la fuite des cerveaux, des capitaux et des Coptes constitue une Les leçons de l’histoire Ce rappel historique nous ramène tout terrible saignée pour l’économie égyptienne, il y a lieu de s’interroger naturellement au contexte actuel où sur les jours à venir tellement le futur une grande purge cible les Frères Musulmans avec une dissolution pure proche s’annonce mouvementé. et simple du mouvement suivie de procès ridicules ayant pour objectif de Au milieu de ce sombre tableau, on peut dire que la Tunisie constitue une semer la zizanie et la terreur au sein exception. Même avec un bilan des militants. Certes, le général al économique mitigé, ce pays n’a pas Sissi semble bénéficier d’un soutien populaire assez large pour le moment, été entrainé dans une spirale de violence et la virulence des échanges mais il y a un gros risque de voir entre acteurs politiques a rarement ceux-là mêmes qui l’appuient excédé le stade des mots hormis aujourd’hui se retourner contre lui et quelques assassinats politiques qui ont lui demander des comptes, ce qui ne remis en question l’exception tunisisaurait tarder. Dans un pays de 83 enne. L’espoir est toutefois permis millions d’habitants où l’économie suite à la mise en place d’une nousouterraine prend des proportions velle constitution porteuse d’espoir et délirantes, les attentes sont évidemsynonyme d’acceptation des règles du ment immenses. Et quand on sait que jeu politique. Il reste à espérer que le la véritable guerre que mène cas tunisien, en dépit de ses limites l’égyptien ordinaire c’est contre la soit contagieux pour que le sacrifice cherté de la vie et l’inaccessibilité de consenti par la rue arabe ne soit pas nombreuses denrées de première vain. Or accepter l’autre est manifesnécessité, il serait franchement étontement l’épreuve la plus ardue à nant que la lune de miel entre le peulaquelle fait face la démocratie naisple et le général al Sissi dure aussi sante dans le monde arabe.
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Interlignes
C’est aussi un problème canadien
Ces jeunes qui se laissent tenter par le terrorisme…
Deux autres jeunes de Calgary se seraient ralliés aux étrangers qui se battent aux côtés de l'État islamique en Irak et en Syrie. Le cas, révélé par nos collègues de CBC, vient s'ajouter à la liste grandissante de jeunes qui ont quitté la métropole albertaine pour l'Irak et la Syrie. Les frères Gregory et Collin Gordon se sont récemment convertis à l'islam. Ils se sont fait connaître auprès des membres de la communauté musulmane de Calgary en tant que Abdul Malik et Khalid. Entre 2011 et 2012, ils partagent un appartement dans l'immeuble où ont habité Damian Clairmont et Salman Ashrafi. Ce dernier s'est fait exploser en Irak en novembre dernier lors d'un attentat-suicide de l'État islamique, qui a fait 46 morts. Damian Clairmont a été tué en combattant en Syrie plus tôt cette année.
Un autre Calgarien, Farah Shirdon, qui avait pris part à un « groupe d'étude » avec Salman Ashrafi, Damian Clairmont et les frères Gordon, s'est rallié à l'État islamique et aurait été tué dans un combat il y a quelques semaines. Sur les réseaux sociaux, Collin
Gordon se fait appeler Ibrahim Canadi et publie entre autres des photos du chef de l'État islamique Abou Bakr Al-Baghdadi. L'une de ses publications fait l'apologie de la mort du journaliste américain James Foley, disant qu'il s'agit de la perfection dans le domaine du terrorisme.
Selon des sources dans la communauté musulmane de Calgary, les frères Gordon auraient disparu fin 2012. C'est aussi à cette époque que MM. Ashrafi et Clairmont se sont rendus en Syrie. Dans un communiqué, les parents des deux frères Collin ont assuré qu'ils aimaient leurs enfants et qu'ils s'inquiétaient pour leur sécurité. La communauté musulmane réagit Cette situation pousse des membres
de la communauté musulmane à réagir. Mahdi Qasqas, un jeune musulman et psychologue de Calgary, estime que sa communauté doit se mobiliser pour combattre la radicalisation. « Il y a des signes qui nous indiquent que certains individus suivent ce chemin. C'est pourquoi nous voulons former les travailleurs sociaux. Pour qu'ils puissent faire
cesser ce processus. Nous voulons qu'ils soient efficaces », affirme-t-il. M. Qasqas croit qu'il faut mieux former les membres de la communauté et les intervenants sociaux pour reconnaître les signes de la radicalisation. D'ailleurs, une conférence avec des représentants de la communauté musulmane, des policiers municipaux et la mère d'un jeune mort en Syrie vient d’être organisée dans la métropole albertaine.
Comment «déradicaliser» les jeunes?
Une mère endeuillée tente de lancer un organisme pour déprogrammer les «djihadistes» canadiens La mère de Damian Clairmont, cet homme de Calgary tué en Syrie après s'être rallié à un groupe djihadiste en janvier, a décidé de lancer un programme pour contrer la radicalisation des jeunes hommes et femmes au Canada. Christianne Boudreau explique qu'elle en avait assez d'attendre après le gouvernement canadien. En quête de réponses sur la radicalisation de son fils, elle a écrit à maintes reprises au bureau du premier ministre Stephen Harper, au chef de la police de Calgary et au dirigeant du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Elle leur a, entre autres, demandé pourquoi personne ne l'a informée du fait que le SCRS surveillait l'extrémisme grandissant de son fils. « Si mon fils était surveillé pendant
deux ans parce qu'on soupçonnait qu'il collaborait avec une organisation terroriste potentielle, comment a-t-il pu obtenir un passeport deux mois avant son départ du Canada? », s'interroge-t-elle dans une lettre. Mme Boudreau affirme avoir tenté de communiquer avec d'autres parents au Canada, pour parler de sa peur et de son sentiment de culpabilité pour les actes de son fils. Elle sait qu'elle n'est pas le seul parent au pays dont le fils a rejoint l'islam radical et la lutte armée à l'étranger. Comme elle n'a reçu aucune réponse dans son pays, elle indique s'être tournée vers l'Europe. La Canadienne a alors fait la connaissance de Dominique Bons, de Toulouse, en France, dont le fils Nicholas a suivi le même parcours que Damian. Nicholas a aussi trouvé la mort en
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Syrie, dans les rangs de l'État islamique toutefois, aux côtés de son demi-frère Jean-Daniel. Mmes Boudreau et Bons ont décidé de former un groupe international de mères de djihadistes. Elles partagent leurs connaissances et exercent des pressions sur leur gouvernement respectif pour qu'ils agissent. À la suite d'une rencontre à Berlin, Mme Boudreau projette de créer le chapitre canadien de l'organisme allemand Hayat, qui aide les familles à « déradicaliser » les jeunes hommes et femmes. Le groupe Hayat s'est luimême inspiré de l'organisation Exit, qui vise à décourager les néonazis et qui connaît du succès. Mme Boudreau explique qu'il lui faut trouver les fonds, mais qu'elle a déjà plusieurs contacts. Elle a communi-
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qué avec des gens qui travaillent auprès des jeunes et avec des mosquées de Calgary. Elle fait aussi une allocution jeudi prochain durant une conférence qui réunira la police, des leaders communautaires et des familles. Des forces de l'ordre canadiennes ont aussi rendu visite à Hayat il y a quelques mois, a appris CBC. Des sources indiquent qu'une force de l'ordre en particulier étudie des programmes des Pays-Bas, du Danemark et d'ailleurs, qui font appel à des djihadistes revenus au pays et réformés pour convaincre des compatriotes à rejeter l'extrémisme. De son côté, la Gendarmerie royale du Canada est en contact avec la police britannique, qui peut compter sur des lois sévères et des campagnes d'information percutantes.
Interlignes
Deux imams, deux destins…
Dans l’actualité de la semaine, deux imams ont pris place. Pour des raisons radicalement différentes. Le premier, connu à Montréal (où il avait officié dans une mosquée de la rue Jean-Talon), pour ses prêches enflammés et contestés, vient de se voir signifier un arrêté d’expulsion des autorités philippines pour avoir fait du recrutement au nom de groupes terroristes. Le second, belge d’origine marocaine, décapité en Syrie par la prétendue armée Islamique, pour avoir tenté de ramener à la raison des jeunes belges enrôlés dans les rangs terroristes. Deux imams, deux destins, que nous retraçons dans le texte ci-après.
Le montréalais Bilal indésirable aux Philippines Les Philippines tentent d'expulser un prédicateur musulman canadien qu'elles accusent d'avoir fait du recrutement au nom de groupes terror-
istes. Un responsable du ministère de l'Immigration a expliqué à ce sujet que Abu Ameenah Bilal Philips sera déporté après avoir été déclaré « indésirable » par le ministère. Selon Siegfred Mison, le Canadien aurait « incité et recruté des gens pour qu'ils se livrent à des actes terroristes », sans donner de détails.
Les Philippines ont renforcé leur service de renseignements après avoir appris que 100 musulmans issus du sud ont quitté le pays pour se joindre aux groupes islamistes qui combattent en Syrie et en Irak. M. Bilal Philips a été interrogé quelques jours après son arrivée aux Philippines pour donner des conférences. Il devait principalement voyager dans le sud du pays, à forte majorité musulmane. Il est détenu depuis, a ajouté M. Mison, et son nom a été ajouté à « liste noire » du gouvernement. M. Bilal Philips, un professeur en
études islamiques et arabes à l'Université de Dubaï, a déjà été banni d'Allemagne, des États-Unis et d'Australie, entre autres, pour ses propos controversés, notamment sur l'homosexualité et la place des femmes en société. Il est accusé de promouvoir le djihad et la violence.
laboration avec l’ennemi. Le jeune imam belge d’origine marocaine Iliass Azaouaj aurait été décapité par les combattants de l’Etat islamique (EI) après des soupçons de collaboration avec les services de renseignements belge et marocain, rapportent plusieurs médias belges.
Le Canadien d'origine jamaïcaine, maintenant âgé de 68 ans, a grandi à Toronto, où il s'est converti à l'islam en 1972. Il a depuis étudié en Arabie saoudite et en Grande-Bretagne. Les États-Unis l'ont notamment désigné « co-conspirateur non accusé » de l'attentat de 1993 contre le World Trade Center.
L’homme n’est pas inconnu en Belgique. Il avait publié l’année dernière une vidéo dans laquelle on le voit avec Joëlle Milquet, ancienne ministre de l’Intérieur belge. Il était également très actif sur les réseaux sociaux, que ce soit Twitter, Facebook et même YouTube.
Iliass Azaouaj, Imam, décapité par l’Etat islamique Iliass Azaouaj, imam belge d’origine marocaine parti en Syrie avec la ferme volonté de ramener avec lui des jeunes Belges ayant rejoint les djihadistes, aurait été décapité par les combattants de l’Etat islamique, pour col-
Livres
Religions et laïcité : un nécessaire dialogue En septembre 2013, le gouvernement, alors formé par le Parti Québécois, rendait public un projet de « Charte des valeurs québécoises » qui poursuivait trois objectifs : définir les règles pour les accommodements religieux, affirmer les valeurs québécoises et établir la neutralité religieuse de l’État. Des débats tantôt sereins, tantôt houleux s’ensuivirent, particulièrement autour de la proposition gouvernementale d’interdire le port de signes religieux dits « ostentatoires » par les employés de la fonction publique.
Un des grands constats qui s’est dégagé de ces débats, c’est que la laïcité n’a pas qu’une seule acception. Est-ce une valeur? Un aménagement politique et juridique? La laïcité est-elle synonyme de neutralité? D’athéisme? Implique-t-elle une relégation des religions dans la sphère privée? Est-ce plutôt une voie permettant d’articuler la participation des religions dans la société civile? La laïcité fait-elle de la liberté religieuse un absolu? Devant ces questions complexes et la multitude d’opinions diffusées, alors que le nouveau gouvernement du Parti Libéral se prépare à déposer son propre projet de loi en matière de
laïcité, se fait sentir le besoin de bien cerner les notions et les enjeux au cœur de ce débat qui, au sein de nos sociétés pluralistes, est bien loin de s’estomper. Le livre que voici entend répondre à deux préoccupations : comprendre les défis que pose le processus de laïcisation d’une société et présenter des points de vue méconnus sur la question, issus des traditions religieuses monothéistes que sont le judaïsme, le christianisme et l’islam. Cet ouvrage, en partie tiré des communications présentées dans le cadre du colloque organisé par le CCCM les 20 et 21 septembre 2013 sur le thème Christianisme et laïcité : pour faire avancer le débat, réunit des contributions de Pierre Bosset, Bruno Demers, Mireille Estivalèzes, Victor C. Goldbloom, Lisa J. Grushcow, Sharon Gubbay Helfer, Asmaa Ibnouzahir, Hassan Jamali, Solange Lefebvre, Michel Morin et JeanPierre Proulx, responsable du comité de programmation du CCCM. Ce livre, codirigé par Bruno Demers, membre du conseil d’administration du CCCM, et Mathieu Lavigne, responsable des publications du CCCM, a été lancé le mercredi 24 septembre.
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Début juillet, des rumeurs faisaient état de la mort de ce jeune imam de 23 ans, formé à la mosquée Al Khalil de Molenbeek, dans la région bruxelloise. Son dernier message sur ce qui semble être son compte sur Twitter, remonte au 3 juin dernier.
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