memoire

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LUCCHESI AURELIA


LUCCHESI AURELIA

Pour(quoi) la peinture

Ecole Nationale Superieure d’Art de Nancy

DNSEP Art 2010


« La peinture est une histoire d’œil qui s’ouvre et se ferme. L’un perçoit, l’autre efface. »1

Introduction L’origine de mon travail par t du fait que je m’interroge souvent sur mon regard vers le monde. Je me suis toujours demandé comment représenter par exemple une pièce, un endroit comme je suis en train de le voir pour de vrai dans sa totalité (à ce moment bien précis) …c’est à dire avec ce point de vue, ou ces points de vues. Souvent le problème tient à la perspective, et au degré de réalisme que l’on doit choisir pour rendre compte de la totalité de ce que l’on voit. Durant maintenant presque trois ans je reviens régulièrement à cet exercice de faire des dessins d’obser vations où je commence par le contour de mon nez. C’est le contour de mon nez finalement qui cadre ma vision sur cette feuille de papier, qui du coup est souvent trop petite pour moi. La place de ce contour de mon regard dans la feuille est d’une grande impor tance. Le vide et le plein jouent toujours un rôle. Je pourrais parlé du dedans et du dehors, ou d’une fiction et de la réalité. En fait, je divise ma feuille. Pour ensuite instaurer des règles dont j’aime opérer des glissements à l’intérieur. Toujours est-il que cette nécessité de revenir sur cet exercice à différents moments et sous différentes formes est resté toujours là et m’a accompagné en parallèle de mon travail de recherches.

Voir en peinture, Eric Corne, La lettre volée, Paris, 2003.

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Stefan Themerson


Le regard et la relation à la photographie Quand il faut que je choisisse le degré de réalisme que je veux créer, la photo m’est d’une grande aide pour la mémoire. Les contours des objets, l’atmosphère de la lumière, sont fixés instantanément. Quand je fais des dessins d’obser vations, forcément mon regard n’est jamais fixe. Il tourne sans cesse autour d’un objet. Aussi mon regard est plus rapide que ma main. Le résultat est forcement pas pareil. Je n’essaye pas d’imiter forcement mon regard par la photographie. Ni de faire un dessin, ou une peinture, exactement d’après photographie. Plutôt j’essaye d’obser ver et de mettre en parallèles les différences et répétitions qui existent entre les deux possibilités, suivant ce que j’ai envie de dire.

Le découpage de la réalité visible: le cadrage La prise de vue a été faite à travers le viseur où on place l’œil pour prendre une photo. La boite noire où se trouve le viseur constituait le cadre noir, l’objectif de l’appareil photo est dans le prolongement du cadre et venait per turber la vision vécue. En mettant en parallèle les deux expérimentations je veux confronter la dualité qui existe entre les deux. La photographie étant considéré comme une forme hybride de l’œil. Mon but étant de rendre au spectateur son rôle actif dans sa présence à l’œuvre, des questions d’échelle (réelle ou surdimensionnée) se sont posées à moi. La photo a été placée sur une cimaise, celle-ci placée devant une vitre.

Installation DNAP juin 2008 à L’école supérieure d’Ar t de Nancy


La composition : acte organisateur des différentes parties de l’image. Ici je tentais d’unifier par la peinture un collage de dessins et de photos venant de divers endroits. J’ai emprunté l’ef fet de fenêtre avec les branches d’arbres de Caspar David Friedrich. Ainsi j’obtiens une vision subjective. Ces entremêlements de branches d’arbres, tel un réseau, qui par analogie mental me rappel les réseaux de notre savoir sur Internet ou le réseaux sanguin, rejoins la vision objective d’un intérieur. La perspective de cette pièce est néanmoins construite de manière instinctive. Celle-ci retranscrit mon expérience physique face à cette pièce. Caspar David Friedrich est un peintre qui me fascine pour sa façon de composer un paysage à par tir de plusieurs points de vues. J’ai lu quelque par t des anecdotes comme quoi on l’aurait obser vé grimper sur des arbres afin de contempler la nature du haut des cimes des arbres. Cela ne m’étonnerais pas du tout! J’ai également lu, qu’il ne faisait jamais de dessins d’obser vation dans la nature, contrairement à ses amis ar tistes naturalistes tel Carl Gustave Carus, avec qui il travaillait souvent. Pour Caspar David Friedrich il était essentiel de voir la nature de l’intérieur. C’est sur ce point qu’il se différenciait de ces contemporains. Lors du salon du dessin au palais de la bourse à Paris, en 2008, j’étais heureuse de pouvoir contempler un de son croquis d’arbre. J’étais fascinée par son trait très léger et précis.

Hommage à Caspar David Friedrich, 2008 peinture à l’huile, 80x 100 cm

FRIEDRICH Caspar David

Les Blanches falaises de Rügen, 1818 Huile sur toile, 90,5 x 71 cm


Choix du motif A par tir des différentes expérimentations précédentes, j’ai développé une réflexion sur la relation « intérieur/ extérieur » Depuis l’intérieur, le regard se pose sur l’extérieur, il s’agissait de seuils à franchir entre deux états de perception. Le « dedans » et le « dehors », entre le vide et le plein. Les intérieurs avec fenêtre et/ou por te devenaient des motifs impor tants pour moi. Le travail conduit à la contemplation, invitant ainsi le regard à entrer en scène. Je décidais de montrer une peinture faite d’après des dessins d’observations de mon appartement. Le coté gauche est légèrement bombé car il se trouvait le plus au bord de mon champ de vision. Puis je m’imaginais que le regard d’un spectateur allait se promener dans ma toile. Cette autre personne était avant tout moi, et je me promenais avec mon appareil photo dans cette peinture. Je le photographiais à par tir d’angle de vue différent, dans une idée de scénario de regard. Mes réflexions sur le cinéma ne sont pas loin. C’est en photographiant la por te qui ouvre sur la cuisine que la perspective de cette pièce redevint cohérente. C’est ainsi que je décidais de repeindre d’après mes photographies quatre autres petites toiles. Ce projet est le seul travaillé de cette manière. Ayant également d’autres préoccupations à ce moment là, je l’ai laissé un peu de coté. Et je décide de le présenter comme un projet qui pourrait

Diffraction du regard, 2007 Peinture acr ylique, 30x 40 cm

être développé encore dans le futur.

Diffraction du regard, 2007 Peinture à l’huile, 23x 30 cm (x4)


L’écran Le rôle de la fenêtre en tant qu’écran placé entre le spectateur et le paysage La fenêtre est un emblème de la peinture. Selon Daniel Arasse, « le terme d’emblème est a entendre en son sens à la fois étymologique et historique : emblème, pièce ou élément placé dans un autre (l’emblème grec), et emblème ou dispositif réglé de représentation selon la formule de ces « recueils d’emblèmes » »1. Un tableau de peinture est un modèle de la représentation du monde. Il ne représente pas une réalité proprement dite, mais une réalité elle- même déjà construite et constituée en monde, que ce soit celui de la Nature ou celui de la culture et de l’Histoire. Comment Caspar David Friedrich, puis Magritte et, sur un autre plan, Sabine Hornig et Gerhard Richter s’en sont-ils sor ti avec cette confusion entre réel et réalité ? Comment montrent-ils ce passage ? Ce qui m’interresse c’est cette opération de va et vient, à l’aide de la fenêtre, la réflexion entre ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur, et la stratégie d’inclusion et d’exclusion opérée. Obser vons, en premier, le travail de Caspar David Friedrich où il représente à plusieurs reprises la fenêtre de son atelier. Nous savons qu’il avait une connaissance très précise de la nature. Pour tant, ses croquis qu’il faisait d’après nature, il les oublie. Car ce qu’il lui impor tait, c’était de traduire une émotion. Les paysages de Friedrich sont des « paysages de l’âme » (Gemüt). Friedrich disait : « ferme l’œil de ton corps pour ne voir que par l’œil de ton esprit ». Il alliait ainsi réalisme et recomposition poétique. Les divers plans dont est constitué le paysage peuvent renvoyer à des points de vue de hauteurs différents. (Si bien qu’on peut se demander qui regarde le paysage et d’où il est vu). C’est le cas dans les « Falaises de craie de Rügen ». Ainsi Friedrich abandonne la perspective centrale au profit d’une perspective démultipliée. On a pu parler chez Friedrich d’une stratégie d’égarement du regard, d’ébranlement des repères habituels. Il décide de suggérer l’infini dans un cadre limité et établit ainsi un nouveau rappor t entre fini et infini. Ainsi la différence entre Alber ti et Friedrich, est que Friedrich montre plus for tement l’intérieur de la pièce. (l’autre côté de la fenêtre) Je dis ça car Alber ti avait écrit a propos de lignes parallèles projetées sur une sur face plane au point central que « d’une cer taine manière la perspective met en scène l’infini » 2 Dans les fenêtres de Friedrich l’ouver ture en profondeur est rendue par la notion de seuil, de passage ; l’épaisseur du mur est soulignée. La fenêtre n’ouvre pas directement vers l’extérieur, comme c’est le cas dans la structure classique, où à un premier plan touffu (encadrement par des masses de rochers et d’arbres) succède un deuxième plan plus vide et où des diagonales serpentent harmonieusement jusqu’à la ligne d’horizon. Chez Friedrich, le premier plan touffu a fait place au vide. La luminosité du lointain contraste avec la pénombre de son atelier ; la ligne d’horizon très basse fait apparaître le paysage 1

le Détail p.203, Daniel Arasse, Flammarion, 1996 douce perspective – une histoire de science et d’art p.85 , Denis Favennec, édition Ellipses, 2007

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comme ouver t sur un lointain inaccessible. L’intérieur sombre de la pièce symbolise l’obscurité et la limitation de l’existence terrestre. La lumière, qui peut éclairer cette existence, vient du christ, qu’on peut voir symbolisé par la croisée de la fenêtre au dessus de la fenêtre au dessus de la tête de la jeune femme. Dans la série de fenêtres je remarque que ceux ci ont par fois des volets, d’autres non. J’ai l’impression que Friedrich resserre le champ de vision en fonction de ce qu’il a envie de dire .Par exemple dans « Femme à la fenêtre » qui compor te des volets, Caroline Bommer, sa femme occupe presque tout le champ de vision. Que regarde-t-elle ? Les peupliers peints par Friedrich au travers de cette fenêtre sont un symbole funéraire. 1 Dans la mythologie grecque, une Hespéride fut transformée en peuplier pour avoir perdu les pommes du Jardin sacré. Le bois de peuplier blanc était le seul dont il fût permis de se ser vir lors des sacrifices offer ts à Zeus, et Hadès transforma Leucé en un peuplier qu’il plaça à l’entrée des Enfers (et Leucé veut dire blanc en grec). Peuplier, arbre funéraire, symbolise les forces régressives de la nature, le souvenir plus que l’espérance, le temps passé plus que l’avenir des renaissances. Ainsi Caroline serait nostalgique de son passé, ou consciente de la vanité des choses terrestres, et songe déjà à la mor t. Vision pessimiste peut-être, mais tellement romantique ! Il faut savoir que Caspar David Friedrich a vécu un drame qui a sans doute déterminé sa vision mélancolique des choses. En décembre 1787, il avait treize ans, lors d’une partie de patinage, la glace rompt sous ses pieds, et son frère Johann le sauve de la noyade, mais hélas celui-ci est englouti à son tour. Caspar se sentira responsable de la mor t de son frère. On peut aller plus loin dans l’interprétation philosophique, en remarquant dans cette image des navires sur le fleuve le passage dans l’au-delà après la mor t, un voyage sur le Stix en quelque sor te, une aspiration à une vie éternelle … Quand Friedrich se fait représenter par son ami Georg Friedrich Kersting, les volets sont fermés. Friedrich se retrouve en train de peindre dans son atelier coupé du monde extérieur. On remarquera dans les « Falaises de craie de Rügen », fait pendant les noces de son mariage, la composition au premier plan qui est un effet de fenêtre fait par les arbres et qui ont la forme d’un cœur. L’originalité de Friedrich réside aussi dans sa technique de restitution des objets, qui accentue les contours aux dépens des volumes, faisant apparaître bateaux et arbres comme plats, dépour vus de corps, sans profondeur. Les objets perdent leur épaisseur. L’excès d’exactitude déréalise l’ensemble. Ainsi il transmet une projection individuelle de la nature. D’ailleurs comme nous le fait remarquer Daniel Arasse, Friedrich glisse le détail révélateur, au bord de « la fenêtre droite de l’atelier », d’un miroir à la limite intérieure duquel se réfléchit le regard du peintre. On peut facilement comparer Magritte avec Friedrich dans ce rappor t de passage entre l’intérieur et l’extérieur. Par ticulièrement le tableau peint en 1936, « La Clé des champs » qui représente une fenêtre à travers laquelle on voit un paysage. Mais la vitre est brisée et les morceaux de verre qui jonchent le sol por tent des fragments de paysage. Magritte introduit ainsi une confusion entre l’intérieur et l’extérieur, entre illusion et la réalité palpable. Cette interrogation du réel est soutenue par 1

Dictionnaire des symboles de Gheerbrant et Chevalier, broché, 1997


une représentation objective des objets, qui ne fait à aucun moment inter venir la subjectivité de l’ar tiste. Il s’agit d’une variante complexe de « la condition humaine » peint en 1933. Cette problématique du tableau dans le tableau comme celle de la fenêtre sont héritées du romantisme allemand. Le climat mélancolique des œuvres de Friedrich est aussi celui de Magritte. La liber té prise par Magritte par rappor t à la réalité, à la tradition ou à ses propres tableaux se répète dans le titre de l’œuvre : « La Clé des champs » est une expression qui suggère la liber té d’aller où l’on veut.

René Magritte

La clef des champs, 1933

Huile sur toile, 80x 60 cm Lugano, Collection ThyssenBornemisza

Caspar David Friedrich Femme à la fenêtre, 1822 Huile sur toile, 44x 37 cm Berlin, Nationalgalerie

Caspar David Friedrich

Caspar David Friedrich

Encre de sépia sur papier, 31.4x 23.5 cm Wien, Österreische Galerie im Belvedere

Encre de sépia sur papier, 31.2x 23.7 cm Wien, Österreische Galerie im Belvedere

La fenêtre gauche de l’atelier, 1805/06

La fenêtre droite de l’atelier, 1805/06

Georg Friedrich Kersting

Georg Friedrich Kersting

1811 Huile sur toile, 54x 42 cm Hamburg, Kunsthalle

Huile sur toile, 51x 40 cm Berlin, Alte Nationalgalerie

Caspar David Friedrich dans son atelier,

Caspar David Friedrich dans son atelier, 1819


Obser vons maintenant le travail de Sabine Hornig. Elle photographie des vitres où s’opère une confusion entre l’intérieur et l’extérieur par le jeu de reflets. Si s’en œuvre est aussi for te, c’est qu’elle a pris conscience du dédoublement du réel qu’elle effectue à chaque prise de photographie. (La photo étant considérée encore aujourd’hui comme étant la représentation la plus proche de la réalité et la plus direct.) Ses photos deviennent transparentes telles des vitres qu’elle installe dans des pièces intérieures dédoublés par des cimaises qui deviennent réceptacle de ses photos. Le principe de redoublement qu’elle trouvait dans la photographie se trouve ainsi recrée dans le dispositif d’installation. La circulation du spectateur étant induit, celui-ci est confronté à deux espaces de visibilité de l’œuvre. Cadre et cimaise se confondent, opérant un désordre dans notre perception. Avec « Radikal Reduzier t », Sabine Hornig provoque un va et vient dans l’image : une collusion s’opère entre la sur face plane formée par les feuilles de papier et les reflets d’architectures, jouant sur l’illusion d’une profondeur. L’été dernier, le grand événement a sûrement été l’inauguration de la nouvelle fenêtre sud du Dom de Cologne. Gerhard Richter avait eu la commande de changer la grande vitre claire du côté sud est du Dom, qui amenait beaucoup trop de lumière vers l’intérieur ce qui était contraire à l’esprit de l’architecture d’un tel lieu. Apres plusieurs proposition de projets, Gerhard Richter à réussi finalement à trouver un compromis afin de respecter la tradition tout en restant ancré dans le 21ème siècle. Mais qu’ont à voir ces Pixels, que nous connaissons habituellement comme des images numérique avec une cathédrale catholique? Avec toutes ses figures, images et fenêtre diaphane, la cathédrale est comme une forme précoce de simulation totale – à l’opposé du Baroque, où l’illusion optique était appréciée et en même temps rendue claire (comme tel) ce par le biais de points de vue que devait prendre le spectateur afin de découvrir la bonne image. La cathédrale n’avait pas besoin de l’extérieur, et même se rendait imperméable a celui-ci. La fenêtre gothique n’était en cela pas faite pour laisser passer le regard. Elle n’était pas médium entre ce qui se passait dedans et dehors. Plutôt tous les souvenirs à la vie terrestre gênaient, seul la lumière comptait en tant qu’intensifieur de sentiment intérieur. C’est là où je fais le rapprochement avec Friedrich et même Goethe qui a beaucoup écrit sur l’architecture gothique en Allemagne1.

Celui qui aimera se recueillir, aura peut être l’impression que le vaisseau s’est amarré après un long voyage à travers les siècles à un endroit où l’extérieur du monde semblerait être plongé dans un chaos de pixel. Ou se serait-elle échoué dans une mer de pixel ? Ou est-elle arrivée dans un monde où Bits et Illusion semblerait se dissoudre, révélant de nouvel forces cachées ? Une chose est sûre, église et ar t contemporain ne s’étaient pas autant rapprochés depuis bien longtemps.

Sabine Hornig au Moma New York 17 juillet au 8 septembre 2003

Aujourd’hui une « SEHNSUCHT » (mélancolie) similaire à une simulation totale se retrouve dans le monde informatique. Les utilisateurs d’ordinateur veulent de plus en plus plonger dans un monde cybernétique, toutes les différences entre dedans et dehors étant à abroger. Par ce choix de Richter, la Cathédrale incorporant l’au delà dans le présent, à la frontière de la ville derrière les vitraux se réactualise aux yeux des croyants informatiques en se positionnant au présent digitalisé. Le tour de force de Richter étant d’avoir adoucit la rupture entre « gotischer gegenständlichkeit » (objectivation baroque ?) et abstraction digital, en équilibrant l’étrangeté des signes avec des couleurs choisi minutieusement bien que par hasard . au total les 72 couleurs miroitent dans leur propre système en harmonie avec les autres vitraux environnent provenant du Moyen-Age et du 19ème siècle. La silhouette des encadrements de la fenêtre gothique faisant le reste afin d’insérer les carrés colorés dans l’atmosphère générale dans le contexte religieux de la cathédrale. 1

écrits sur l’art, p.75, Goethe, éd. Flammarion, Paris, 1996

Fenêtre Cathédrale Cologne, 2007 Réalisé par Gerhard Richter

Sabine Hornig Radikal reduziert, 2004 C-print mounted behind Perspex, 139.7 x 184.2 cm Tanya Bonakdar Gallery


La vitre : transparence et opacité Dans la continuité de mon projet, j’ai été amenée à m’intéresser de plus près au travail de Sabine Hornig que j’essayais de mettre en relation avec le travail de Dan Graham, plus par ticulièrement ses pavillons. J’avais cette obsession de ces endroits quasiment vides où l’extérieur se reflétait à l’intérieur. Ainsi j’obser vais toutes les situations « géographiques » : trains, entrées, gare… Ce qui m’intéressait avant tout, c’étaient les configurations spatiales, ces différents plans de transparences qui absorbaient tout. Mon projet était de placer mes différentes prises de vue de reflets d’un lieu dans un autre espace intérieur à l’échelle une. En fait je tentais de recréer la configuration du lieu avec des images 2D, en jouant sur la texture de la photographie (transparence, brillance, matité) en tentant de rester le plus juste possible par rappor t à l’architecture, et suivant si le spectateur devait se refléter dans mes images ou pas, afin d’avoir ce que j’appelle des configurations spatiales de lieux que nous connaissons bien. En remettant en perspective mes photographies dans un lieu d’exposition, j’obtenais des structures vir tuelles, dans un espace réel et présent. Le spectateur devient acteur de la pièce. Scénographie du personnage et scénographie de l’oeil sont entraînées dans un tourbillonnement d’illusions. Ce travail se trouve à l’état de maquette pour l’instant. En 2009, en réfléchissant à une forme appropriée pour faire un livre d’ar tiste, j’ai eu l’occasion de réfléchir un peu plus sur mon idée de la transparence. Il est question d’espace dans un espace (ici celui du livre) L’espace représenté à l’intérieur est explosé, par les différentes perspectives. On ne peut comprendre le livre que on le disposant debout en forme d’étoile. Le livre forme alors comme une boucle ou le début et la fin ne joue plus d’impor tance. En cherchant le bon point de vue, on obtient un espace cohérent. La transparence est intéressant ici pour moi dans cette forme du livre, car elle représente aussi la superposition d’idées ou de pensées, qui trouve un sens qu’une fois qu’on a déplié tout le livre. Le verre nous montre aussi la fragilité. Pour explorer un peu mieux les questionnements autour de la peinture et de la photographie, j’ai réalisé plusieurs peintures également à par tir de mon travail de photographie de reflets, en variant les techniques. Le regard qui choisit de passer à travers la vitre ou non me permet toutes sor tes de glissements formels, à plusieurs niveaux.

(Sans titre) 2009 Livre en verre, 18x 13 cm Installation du livre à la Jahresausstellung à la Kunstakademie München (Allemagne)

















Conclusion : problèmes de la représentation de l’image Production d’image : questionnements (légitimité) de la peinture face à une photographie. Il m’était souvent difficile de reconnaître en quoi la peinture pouvait être nécessaire et appor ter plus qu’une photographie quand je travaillais d’après celle-ci. Souvent je montrais les photographies à côté de mes photos. Ainsi la dualité qui existe entre les deux était rendue plus lisible. Pourquoi peindre ce que je peux photographier ? Peindre me permettait par exemple de doser les couleurs. Je pouvais faire passer devant, ce qui se trouve derrière. Ainsi la photographie peut avoir quelque chose qui fascine. Mais la peinture, peut reconstruire des choses nouvelles. La photographie peut faire beaucoup de choses, la peinture peut faire tout. Finalement le dialogue devient intéressant, quand les deux mediums s’entrecroisent, et ainsi s’apprennent et profitent l’un de l’autre. Par exemple, la photographie peut saisir instantanément un mouvement soudain, qui pour l’œil et l’esprit serait trop rapide. Elle peut aussi nous appor ter des informations sur la perspective d’un espace à un point de vue par ticulier. Et elle nous offre des couleurs sur les choses suivant l’ambiance de la lumière au moment de la prise de vue. Ce qui m’impor te en peinture c’est la vision. C’est par la négation et l’isolation de cer tains éléments photographiques que je rends celle-ci plus évidente. Tandis que la photographie saisie les reflets sur la vitre au même plan, appor tant un surplus d’informations, troublant l’œil du spectateur. Je m’amusais à saisir et à recomposer avec la peinture. Choisissant tel degré de profondeur et à quel endroit de la toile la sur face allait être per turbé. C’est après avoir fait l’expérience de la peinture, que je peux réfléchir à de nouvelles photographies.

« Ceci n’est pas une image juste, c’est juste une image » Vent d’Est, Jean-Luc Godard, 1969.


Bibliographie : Catalogues : Hyperréalismes USA, 1965-1975, Musée d’art moderne et contemporain, Hazan, Paris, 2003 Gerhard Richter: paintings from private collections,Museum Frieder Burda, Baden-Baden, Germany Götz Adriani, Hatje Cantz (OstfildernRuit), 2008 Gerhard Richter, Antoine Jean-Philippe, Koch Gertrud, Lang Luc, Dis Voir, 1995 Objectivités: la photographie à Düsseldorf, Paris musées (Paris), 2008 Une poétique de la vision: Du Bauhaus à la perspective curviligne, Albert Flocon, Ecole des Beaux-Arts de Metz, 1992 Ma façon de voir, David Hockney, Kurt Liebig, Schmieheim (Allemagne), 2005 Savoirs secrets - Les techniques perdues des maîtres anciens, David Hockney, Seuil, Paris, 2001 Voir en peinture, Eric Corne, exposition_le plateau_FRAC Ile de France 18 Sept.-24 Nov. 2003, la lettre volée, 2003 Cécile Bart: Tanzen, Aargauer Kunsthaus, Éric de Chassey, Beat Wismer, editeur : Aargauer Kunsthaus (Aarau), 1998 L’œil ébloui, Georges Perec, Cuchi White, Sté Nlle des Editions du Chêne, Paris, 1981 Caspar David Friedrich, Werner Hofmann, C.H.Beck, München, 2000 Dan Graham: oeuvres, 1965-2000, Paris Musées, 2001 Video - architecture - television: writings on video and video works 1970 – 1978, New York University press, New York, 1979 La transparence dans l’art du XXe siècle. Musée des Beaux Arts André Malraux. Le Havre. Adam Biro, 1995 Essais : Ecrits sur l’art, Goethe, Flammarion, Paris, 1996 Ecrits sur l’art, Baudelaire, livre de poche (classique) 1992 Le visible et l’invisible, Merleau-Ponty, Gallimard, 1964 La peinture réaliste au XXe siècle, Brendan Prendeville, Thames & Hudson (Paris), 2001 Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture, Daniel Arasse, Flammarion, 1996 L’annonciation italienne, Daniel Arasse, Edition Hazan, Paris, 1999 Histoires de peintures, Daniel Arasse, Denoël, 2004, rééd. Folio-poche 2006, Transcription de la série d’émissions diffusées sur France Culture pendant l’été 2003, livre et CD-Rom sous mp3 On n’y voit rien. Descriptions, Daniel Arasse, Denoël, 2000, 2002, rééd. Folio-poche De la peinture, De Pictura (1435), Alberti, traduction par Jean Louis Schefer, Macula, Dedale, Paris, 1992 Les problèmes de la peinture, sous la direction de Gaston Diehl, éditions Confluences, 1945 L’art de l’observateur. Vision et modernité au XIXe siècle, Jonathan Crary, Editions Jacqueline Chambon, Nîmes, 1994 White Cube, L’espace de la galerie et son idéologie, Brian O’Doherty, JRP Ringier, Zürich, 2008 L’œil écoute, introduction à la peinture hollandaise, la peinture espagnole et autres écrits sur l’art, Paul Claudel, Gallimard, 1964 La part de l’œil, Dossier : Art et phénoménologie, dossier réalisé par Eliane Escoubas, revue annuelle, 1991 L’œil indiscret, l’œuvre comme question, la question comme œuvre, Alain Coulange, L’Harmattan, Paris, Collection : Esthétiques, série «Ars», 2003 La photographie, en effet, Alain Coulange, Châtellerault, Cardinaux, 2000 Douce perspective, Une histoire de science et d’art, Denis Favennec, Ellipses, 2007 L’œil qui pense, visions, illusions, perceptions, Roger N. Shepard, édition du seuil, mai 1992 La perspective comme forme symbolique, Erwin Panofsky, les Editions de Minuit, 1975 Peinture, Photographie, Film, Laszlo Moholy-Nagy, Editions Jacqueline Chambon, 1993 Anamorphoses, les perspectives dépravées, Jurgis Baltrusaitis, Flammarion, Paris, 1996 Le trompe-l’œil, les illusions de la réalité, Miriam Milman, édition d’Art Albert Skira, Genève, 1982 Neuf lettres sur la peinture de paysage: [1815-1824], Caspar David Friedrich, Carl Gustave Carus, Klincksieck, Paris, 1983 Scénographie d’un tableau, Jean-Louis Schefer, Edition du Seuil, Paris, 1969. La vision perspective, 1435-1740: l’art et la science du regard, de la Renaissance à l’âge classique, Philippe Hamou, Payot & Rivages ,Paris ,1995 Histoire matérielle et immatérielle de l’Art moderne, Florence de Mèredieu, Bordas, Paris, 1994 Interieurs_ les peintres de l’intimité, France Borzello, Edition Hazan, 2006 Vitamine P, Nouvelles perspectives en Peinture, Schwabsky Barry, Edition Phaidon, 2003 Films : La passion, Jean-luc Godard, 1982 Histoire(s) du cinéma, Jean-luc Godard, 1998 Soy Cuba, Mikhaïl Kalatozov, URSS, 1964 L’homme à la caméra, Dziga Vertov, 1928 Double vision, Peter Campus, 1971 Three Transitions, Peter Campus, 1973



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