Revue W+B n°159

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ARNOLD GROJEAN, EN ÂME ET CONSCIENCE

#159 printemps 2023 ISSN 0773-4301 BUREAU DE DÉPÔT : BRUXELLES X WALLONIE + BRUXELLES Revue trimestrielle internationale Ă©ditĂ©e par la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles et la Wallonie
CULTURE

ÉDITO

ENTRE WALLONIE-BRUXELLES ET LE CHILI, 25 ANS D’AMITIÉ

Wallonie-Bruxelles et le Chili fĂȘtent 25 ans de coopĂ©ration. La Revue W+B a souhaitĂ© cĂ©lĂ©brer ces noces d’argent en mettant en lumiĂšre les liens historiques entre Wallonie-Bruxelles et le Chili, les Ă©vĂ©nements marquants de ces 25 annĂ©es, les projets qui ont pu ĂȘtre mis en place grĂące Ă  cette coopĂ©ration de longue date et ceux qui verront encore le jour dans les mois et les annĂ©es Ă  venir. DiffĂ©rents tĂ©moignages qui permettent de comprendre comment cette entente s’est construite, se poursuit aujourd’hui et continuera de faire briller tant les opĂ©rateurs wallons et bruxellois que les opĂ©rateurs chiliens.

Ensuite, focus sur Arnold Grojean, artiste multifacettes, Juliette Havelange, jeune comĂ©dienne promise Ă  un bel avenir, Studio Biskt, les designers de l’annĂ©e 2022, et Meurens Natural, entreprise de l’annĂ©e 2022.

Enfin, dĂ©couvrons comment les jeunes s’impliquent dans les projets Erasmus+ et Democracy Reloaded, comment le programme DĂ©fi Archipelago a soutenu la formation professionnelle et l’employabilitĂ© des jeunes au SĂ©nĂ©gal, comment le Smart City Institute de LiĂšge promeut les smart cities et comment les primo arrivants sont accueillis au BAPA Via de Bruxelles.

Et puis cĂ©lĂ©brons la naissance de Georges Simenon, qu’on ne prĂ©sente plus !

Bonne lecture ! ●

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Georges Simenon aurait soufflé ses 120 bougies cette année © WBT - Olivier Bourgi
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SECRÉTAIRE DE RÉDACTION

Emmanuelle Stekke e.stekke@wbi.be 02 421 87 34

COLLABORATION

Marie-Catherine DuchĂȘne, Fanny Tabart, Laurence Hermand et Anne Neuville

CONCEPTION ET RÉALISATION

Polygraph’ www.polygraph.be

IMPRESSION Graphius www.graphius.com

ÉDITRICE RESPONSABLE

Pascale Delcomminette

Place Sainctelette 2 B-1080 Bruxelles

Téléchargez la revue sur www.wbi.be/rwb/

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Illustration de couverture : Arnold Grojean, artiste pluriel © Arnold Grojean

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03 ÉDITO

Entre Wallonie-Bruxelles et le Chili, 25 ans d’amitiĂ© 06

DOSSIER

Noces d’argent pour la coopĂ©ration entre Wallonie-Bruxelles et le Chili par Emmanuelle Dejaiffe

16 CULTURE

Arnold Grojean, en Ăąme et conscience par Nadia Salmi

22 PORTRAIT

« Cet été-là », Juliette est devenue grande par Catherine Haxhe

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JEUNESSE

Engagez-vous, qu’ils disaient... par Philippe Vandenbergh

30 COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT

385 jeunes formés en entrepreneuriat et sur des métiers stratégiques par Laurence Briquet

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TOURISME

La légende Simenon par Nadia Salmi

38 DESIGN

Studio BISKT - Terre vivante par Marie Honnay

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ENTREPRISE

Meurens Natural, « Entreprise de l’AnnĂ©eÂź » 2022 par Jacqueline Remits

46 INNOVATION

Les Smart Cities, outil de transition pour les villes et territoires par Vincent Liévin

50

SOCIÉTÉ

« Si mon cƓur est Ă©troit, Ă  quoi me sert que le monde soit si vaste ? » par Philippe Vandenbergh

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NOCES D’ARGENT POUR LA COOPÉRATION

ENTRE WALLONIE-BRUXELLES ET LE CHILI

DOSSIER 6

Aujourd’hui, le Chili est le premier partenaire de Wallonie-Bruxelles en AmĂ©rique latine. Quels sont nos liens historiques ? Quels ont Ă©tĂ© les Ă©vĂ©nements marquants ? Mise en lumiĂšre d’une coopĂ©ration aux facettes multiples, qui a fĂȘtĂ© son 25e anniversaire Ă  Santiago en dĂ©cembre dernier.

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Exposition d’Alexandre Christiaens Ă  la Biennale d’Art Contemporain SACO © DGWB Chili et partenaires

LES ANNÉES 70 ET 80 AU CHILI : UNE PÉRIODE MOUVEMENTÉE

Flash-back. Tout a commencé pendant la dictature que connaßt le Chili sous Pinochet dans les années 70 et 80.

« A l’époque, nos universitĂ©s ont largement ouvert leurs portes et apportĂ© un vrai soutien Ă  ceux qui ont connu l’exil, relate Alexandre Gofflot, chef de service AmĂ©rique latine pour Wallonie-Bruxelles International (WBI). De premiĂšres bourses sont alors octroyĂ©es Ă  des citoyens chiliens ». Des liens forts se tissent entre nos deux communau-

tĂ©s, avec des acteurs du monde acadĂ©mique et culturel de Wallonie-Bruxelles. AprĂšs la chute du rĂ©gime, en 1993, un premier accord est signĂ© entre l’Association pour la Promotion de l’Education et de la Formation Ă  l’Etranger (APEFE) et l’Agence chilienne de coopĂ©ration internationale au dĂ©veloppement (AGCID), un bureau s’ouvre Ă  Santiago. L’objectif est d’aider le pays Ă  sortir de la dictature et Ă  se bĂątir un rĂ©gime dĂ©mocratique. Les thĂ©matiques sont variĂ©es : le droit des femmes, l’entrepreneuriat, l’éducation, l’éducation Ă  l’environnement, etc.

DOSSIER
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Santiago du Chili

THOMAS GUNZIG écrivain, scénariste, chroniqueur

Thomas Gunzig est arrivĂ© au Chili dans le cadre d’un accord dans le domaine de la littĂ©rature signĂ© en 2020 entre Wallonie-Bruxelles International et l’UniversitĂ© Diego Portales de Santiago. Une fois par an, un auteur ou une autrice belge francophone est invitĂ© avant de rĂ©aliser un plus large tour du pays.

« Cette mission d’une dizaine de jours Ă©tait prĂ©vue de longue date mais elle a Ă©tĂ© reportĂ©e jusqu’en juin passĂ©. Pour donner le contexte prĂ©cis, nous sommes partis, Isabelle WĂ©ry et moi-mĂȘme, dans le contexte de l’opĂ©ration « Lisez-vous le belge ? ». Le programme d’activitĂ©s, bien rempli, s’est rĂ©parti entre trois villes : Santiago, ConcepciĂłn et ValparaĂ­so. Sur place, nous avons animĂ© des ateliers d’écriture, donnĂ© des lectures, participĂ© Ă  des rencontres dans diffĂ©rentes universitĂ©s notamment avec des Ă©tudiants mais aussi dans la librairie francophone de Santiago. J’ai assistĂ© Ă©galement Ă  une projection du Tout Nouveau Testament, film de Jaco Van Dormael dont je suis coscĂ©nariste et participĂ© Ă  un dĂ©bat avec des Ă©tudiants de la filiĂšre cinĂ©ma Ă  l’issue de la projection. Il est enrichissant de provoquer ces rencontres qui permettent un partage d’expĂ©rience trĂšs concret sur l’écriture ».

Pour aller plus loin
 Cinq tĂ©moins, cinq retours d’expĂ©rience, entre Wallonie-Bruxelles et le Chili.
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Thomas Gunzig et Isabelle WĂ©ry au Chili dans le cadre de l’opĂ©ration « Lisez-vous le Belge ? » © DGWB Chili et partenaires

1997 : LA SIGNATURE D’ACCORDS DE COOPÉRATION

La relation Ă©volue et quatre ans plus tard, en 1997, un accord-cadre de coopĂ©ration bilatĂ©rale est signĂ© entre, d’une part la Wallonie et la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles (FWB) et d’autre part, la RĂ©publique du Chili. Cette coopĂ©ration se traduit via des Commissions mixtes permanentes (CMP) qui se rĂ©unissent tous les trois ans. Partenaire de WBI, l’AGCID coordonne ces commissions localement. En parallĂšle, de nombreux Ă©vĂ©nements culturels sont Ă©galement soutenus via des programmes d’actions.

Enfin, en 2005 sont inaugurés les bureaux permanents de la Délégation Générale Wallonie-Bruxelles à Santiago, devenue une Représentation multi-services au 1er janvier 2023.

UN QUART DE SIÈCLE PLUS TARD


Fin dĂ©cembre 2022, une dĂ©lĂ©gation de Wallonie-Bruxelles s’est rendue au Chili pour la signature du septiĂšme cycle de coopĂ©ration pour les trois prochaines annĂ©es, de 2023 Ă  2025. « Cette convention structure notre collaboration avec le Chili, rappelle Pascale Delcomminette, Administratrice gĂ©nĂ©rale de Wallonie-Bruxelles International. Les formes de synergie sont nombreuses : Ă©changes acadĂ©miques, recherche scientifique, promotion de la langue française, participation Ă  des Ă©vĂ©nements culturels, etc. Depuis tout ce temps, nos Ă©quipes, les universitĂ©s et hautes Ă©coles, les porteurs de projet, les opĂ©rateurs culturels de Wallonie et de Bruxelles maintiennent d’étroits contacts avec leurs homologues

DOSSIER
Fin 2022, Pascale Delcomminette, Administratrice gĂ©nĂ©rale de WBI, s’est rendue en mission officielle au Chili pour cĂ©lĂ©brer ce 25e anniversaire (entourĂ©e ici, notamment, d’Emmanuelle Dienga, reprĂ©sentante de WBI au Chili et d’Alexandre Gofflot, chef de service AmĂ©rique latine Ă  WBI - Ă  droite de Pascale Delcomminette) © DGWB Chili et partenaires
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Signature de la 7e CMP entre WallonieBruxelles et le Chili 2023-2025, en décembre 2022 © DGWB Chili et partenaires

chiliens. Aujourd’hui, l’ancrage de notre coopĂ©ration est trĂšs fort. A ce jour, avec la signature de la septiĂšme CMP, plus de 150 projets ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© soutenus ! ».

Sur les 26 projets sĂ©lectionnĂ©s l’an dernier, 23 Ă©manent du monde acadĂ©mique. A titre d’exemple, dans le secteur de la santĂ©, un programme d’innovation et de recherche sera menĂ© par des Ă©quipes de l’ULiĂšge - Gembloux Agro-Bio-Tech en partenariat avec la Pontificia Universidad CatĂłlica de ValparaĂ­so. « L’objet en est l’optimisation de la production d’enzymes prĂ©sentant un effet antiprolifĂ©ratif sur les cellules cancĂ©reuses en

utilisant une levure comme usine cellulaire. On produit ainsi des protĂ©ines recombinantes ayant des applications dans le traitement de certains cancers. C’est le troisiĂšme projet que nous dĂ©posons depuis 2018 et qui prend forme grĂące aux possibilitĂ©s de cofinancement, relate Patrick Fickers, professeur Ă  l’ULiĂšge. A ValparaĂ­so, ils possĂšdent une expertise que nous n’avons pas ici, nous sommes complĂ©mentaires. Ensemble, nous avons cosignĂ© plusieurs publications scientifiques et trois doctorants font actuellement leur thĂšse en cotutelle. Ils seront diplĂŽmĂ©s de nos deux universitĂ©s ».

CAROLE LOUIS artiste plasticienne

DiplĂŽmĂ©e de l’ENSAV La Cambre, Carole Louis rĂ©alise des performances in situ qui se dĂ©roulent dans des installations qu’elle crĂ©e au prĂ©alable. En 2021, elle Ă©tait l’une des invitĂ©es d’honneur de la Biennale d’Art Contemporain SACO au Nord du Chili dans la rĂ©gion d’Atacama.

« Cette rĂ©sidence de trois semaines a Ă©tĂ© une expĂ©rience intense, qui a nourri mon travail d’artiste. Je me suis ici rĂ©ellement inspirĂ©e de notre lieu d’accueil, j’ai beaucoup lu avant mon dĂ©part et recueilli des informations sur le contexte gĂ©opolitique du Chili et sur cette rĂ©gion miniĂšre oĂč s’extraient Ă  la fois du cuivre et du lithium. Pour cette performance, je suis partie d’une lĂ©gende locale qui raconte l’histoire d’un enfant qui a survĂ©cu dans un frigo aux inondations qui surviennent assez rĂ©guliĂšrement dans cette rĂ©gion, entre ocĂ©an et montagnes. La rĂ©ception de l’installation et de la performance a Ă©tĂ© incroyable, le public Ă©tait touchĂ© de retrouver des Ă©lĂ©ments de cette lĂ©gende. Depuis, Dagmara Wyskiel, commissaire de la Biennale, est venue en prospection Ă  Bruxelles, cela crĂ©e des synergies sur du long terme ».

L’exposition « Nosotros » de Simon Vansteenwinckel, une autre illustration de la coopĂ©ration culturelle entre Wallonie-Bruxelles et le Chili © DGWB Chili et partenaires
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DOSSIER 12

RAYONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE AU CHILI

Deux Ă©vĂ©nements majeurs Ɠuvrent Ă  la promotion de la langue française et au soutien de la crĂ©ation francophone en partenariat avec l’Institut français du Chili et de nombreux autres acteurs de terrain. « Autour du 20 mars, journĂ©e internationale de la Francophonie, une vraie FĂȘte de la Francophonie est organisĂ©e au Chili. Le concours d’art oratoire en langue française que nous avons lancĂ©, il y a quelques annĂ©es, rencontre un succĂšs grandissant. Le mois de mars est toujours important pour notre visibilitĂ© et requiert les Ă©nergies de toute notre Ă©quipe », souligne Emmanuelle Dienga, reprĂ©sentante de WBI au Chili.

DÉCENTRALISATION AVANT TOUT

Cap sur la ville cĂŽtiĂšre d’Antofagasta Ă  plus de 1.200 km de Santiago. En 2021, trois artistes de Wallonie-Bruxelles ont Ă©tĂ© invitĂ©s Ă  la Biennale d’Art contemporain SACO. Le contexte Covid n’était pas facile. Elodie Antoine, artiste plasticienne, partage son expĂ©rience : « Tout s’est bien passĂ© mais notre voyage a Ă©tĂ© marquĂ© par la crise sanitaire qui nous a obligĂ© Ă  rester une semaine en quarantaine dans notre hĂŽtel. AprĂšs l’apocalypse, le thĂšme de la Biennale, Ă©tait de circonstance. Je crois que nous Ă©tions les premiers europĂ©ens Ă  dĂ©barquer au Chili aprĂšs cette pĂ©riode trĂšs particuliĂšre mais c’est aussi important de continuer Ă  crĂ©er, Ă  bouger malgrĂ© le contexte qui a raccourci notre temps de travail. Le site est magnifique, les paysages incroyables. Je me suis sentie ailleurs, dans un paysage lunaire, qui ne ressemble Ă  rien de ce que l’on connaĂźt ici ». Le partenariat avec notre FĂ©dĂ©ration est particuliĂšrement apprĂ©ciĂ© au Chili parce que nos actions s’inscrivent dans une dynamique de rĂ©gionalisation. « Depuis longtemps, nous avons veillĂ© Ă  ne pas tout centraliser dans la capitale chilienne et avons donc cherchĂ© Ă  Ă©tablir des liens forts avec des partenaires en rĂ©gion, rappelle notre reprĂ©sentante de Wallonie-Bruxelles au Chili. Au fil du temps, se dĂ©veloppent de vrais rĂ©seaux professionnels mais en mĂȘme temps, nous restons ouverts Ă  tout nouveau projet d’échange porteur pour nos deux communautĂ©s ».

CLOÉ DU TRÈFLE musicienne

Autrice, compositrice et interprĂšte, CloĂ© du TrĂšfle est une artiste inclassable, la libertĂ© vibre au cƓur de ses crĂ©ations. A l’automne 2019, CloĂ© du TrĂšfle et CĂ©line Chappuis se lancent dans le Chili Tour (Vertige horizontal) avec plus d’une dizaine de dates de concert dans tout le pays.

« Cette tournĂ©e reste une trĂšs belle expĂ©rience et fait suite Ă  une premiĂšre invitation en AmĂ©rique du Sud, au BrĂ©sil, oĂč nous avons enregistrĂ© l’album Vertige horizontal Ă  l’initiative du label Tratore. Nous aurions aimĂ© allier un concept entre SĂŁo Paulo et le Chili mais la crise de la Covid l’a empĂȘchĂ© jusqu’ici, le projet est restĂ© dans les cartons. Lors de ce Tour, nous nous sommes produites aussi bien dans des universitĂ©s que dans un festival dĂ©diĂ© aux droits humains ou dans des espaces culturels comme le Centro Arte Alameda Ă  Santiago, un lieu assez hybride, entre cinĂ©ma, galerie d’art et espace culturel. Le public Ă©tait vraiment curieux et ouvert. Deux DJ sets ont Ă©tĂ© organisĂ©s, notamment Ă  Santiago. D’un point de vue plus politique, nous avons Ă©galement Ă©tĂ© tĂ©moins du climat social tendu de l’époque. Ce qui m’a frappĂ©e enfin, c’est la modernitĂ© des villes dans un pays tout en contraste qui laisse des impressions trĂšs diverses ».

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Tournée de Cloé du TrÚfle au Chili en 2019 © DGWB Chili et partenaires

2017, UN ACCORD DE COPRODUCTION CINÉMATOGRAPHIQUE ET AUDIOVISUEL

Au Chili, les FrĂšres Dardenne, Chantal Akerman sont des cinĂ©astes apprĂ©ciĂ©s et reconnus. Le public chilien est friand du cinĂ©ma d’auteur, et de ce qu’ils appellent l’exception culturelle europĂ©enne contrastant avec l’omniprĂ©sente culture nord-amĂ©ricaine. Ainsi, la FWB a signĂ© en 2017 son premier accord de coproduction avec le Chili. Nous souhaitons « jeter les bases de futures coproductions et provoquer de nouvelles synergies entre producteurs ou rĂ©alisateurs, au Chili, ici et dans les grands festivals. Par ailleurs, il faut souligner les Ă©changes qui existent avec nos Ă©coles supĂ©rieures artistiques. L’école de cinĂ©ma de ValparaĂ­so a eu un partenariat avec l’INSAS. Nous avons aussi pas mal de contact avec des festivals liĂ©s Ă  la question du genre et de la cause fĂ©ministe qui est marquante aujourd’hui au Chili, davantage encore que chez nous », explique Emmanuelle Dienga.

TEATRO A MIL, LE FESTIVAL SOUFFLE SES 30 BOUGIES AVEC WALLONIE-BRUXELLES


Partenaire de longue date, le festival a programmĂ©, pour cette Ă©dition anniversaire, quatre spectacles de notre communautĂ© : deux en prĂ©sentiel et deux en ligne. « Aujourd’hui, c’est l’un des plus importants dans le domaine des arts de la scĂšne au Chili et sa notoriĂ©tĂ© est grande sur tout le continent, relate Emmanuelle Dienga. Il reprĂ©sente une voie royale pour tourner en AmĂ©rique latine, les programmateurs s’y dĂ©plaçant en

grand nombre. Cette annĂ©e, les organisateurs ont sollicitĂ© le public pour qu’il plĂ©biscite les Ɠuvres marquantes des Ă©ditions prĂ©cĂ©dentes. Dans le top cinq, Kiss and Cry de MichĂšle-Anne de Mey et Jaco Van Dormael, qui a ainsi Ă©tĂ© reprogrammĂ© en 2023 ».

En janvier dernier, Discours Ă  la Nation d’Ascanio Celestini et David Murgia s’est Ă©galement jouĂ© en espagnol Ă  Santiago. AcclamĂ©e, la piĂšce a sans conteste touchĂ© le public chilien au regard du contexte social et politique qu’a connu le pays.

DOSSIER
« Discours Ă  la nation » d’Ascanio Celestini et David Murgia, jouĂ© en janvier dernier en espagnol Ă  Santiago © DGWB Chili et partenaires
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« Kiss & Cry » de MichĂšle-Anne de Mey et Jaco Van Dormael est une des Ɠuvres marquantes du Festival Teatro a Mil © DGWB Chili et partenaires

ET DEMAIN ?

Pascale Delcomminette en tĂ©moigne, « ces noces d’argent sont souvent dĂ©crites comme une relation pure, sincĂšre et durable. C’est grĂące Ă  l’ensemble des opĂ©rateurs de Wallonie-Bruxelles que la coopĂ©ration est concrĂšte et visible sur le terrain. Des liens forts ont pu ĂȘtre maintenus, mĂȘme pendant la pandĂ©mie ».

DĂšs cette annĂ©e, de nombreux projets sont soutenus, et ce jusqu’en 2025. L’avenir est ouvert
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ALEXANDRE CHRISTIAENS photographe voyageur

En 2021, Alexandre Christiaens Ă©tait invitĂ© par le Festival de photographie de ValparaĂ­so, il a participĂ©, dans la foulĂ©e, Ă  la Biennale d’Art Contemporain SACO. En septembre 2022, dans un esprit de regard croisĂ©, une exposition de la photographe chilienne Julia Toro s’est tenue Ă  l’Espace Contretype Ă  Bruxelles.

« J’ai adorĂ© travailler au Chili oĂč j’ai voyagĂ© Ă  plusieurs reprises, le pays me fascine tant sur le plan humain qu’au niveau d’un territoire que je trouve Ă©tonnant. Le Festival est le plus important au niveau de la photographie au Chili mais il compte Ă©galement comme un incontournable en AmĂ©rique latine. Ma rĂ©sidence a durĂ© environ trois mois avec un permis de travail qui m’a laissĂ© circuler librement. Les premiĂšres semaines, j’ai sĂ©journĂ© Ă  ValparaĂ­so et j’ai travaillĂ© autour du thĂšme de la mer, des pĂȘcheurs et de leurs origines. Ensuite, j’ai quittĂ© la ville pour me rendre, dans un premier temps dans le sud, en Terre de Feu, avant de revenir dans le nord pour participer Ă  la Biennale SACO. LĂ , mes photos Ă©taient exposĂ©es dans le dĂ©sert sur de grands panneaux publicitaires, mettant un paysage chilien en abĂźme dans le paysage chilien. Un beau moment. Certains clichĂ©s pris au Chili seront prĂ©sentĂ©s en avril prochain Ă  Bordeaux dans le cadre du festival ‘ItinĂ©raires des photographes voyageurs’ ».

ALAIN VANDE WOUWER enseignant et chercheur

Professeur Ă  l’UMons au sein de la FacultĂ© Polytechnique, Alain Vande Wouwer coordonne ici l’un des projets sĂ©lectionnĂ©s dans le cadre de la 7eme CMP avec ses homologues de l’Universitad Tecnica Federico Santa Maria (USM) de ValparaĂ­so.

« Ces projets de coopĂ©ration se dĂ©veloppent sur base d’affinitĂ©s nĂ©es des Ă©changes conviviaux menĂ©s ces derniĂšres annĂ©es. Nos anciens Ă©tudiants chiliens gardent souvent contact avec leurs professeurs. Aujourd’hui, une vĂ©ritable amitiĂ© nous lie Ă  nos homologues chiliens. Le travail de recherche qui dĂ©marre vise Ă  contribuer Ă  l’amĂ©lioration et l’intensification du procĂ©dĂ© de digestion anaĂ©robie pour la production de biomĂ©thane renouvelable dans le cadre d’une gestion innovante de l’environnement. Il fera l’objet d’une thĂšse de doctorat en cotutelle entre l’USM et l’UMons. C’est le second projet soutenu par WBI. Nous suivons aussi la thĂšse d’Alejandra Vesga sur un traitement d’épuration des eaux par l’utilisation de phages en partenariat avec la Pontificia Universidad CatĂłlica de ValparaĂ­so ».

“ C’est grĂące Ă  l’ensemble des opĂ©rateurs de Wallonie-Bruxelles que la coopĂ©ration est concrĂšte et visible sur le terrain. Des liens forts ont pu ĂȘtre maintenus, mĂȘme pendant la pandĂ©mie. ”
© D.R. 15
Pascale Delcomminette
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Arnold Grojean © Arnold Grojean

ARNOLD GROJEAN, EN ÂME ET CONSCIENCE

C’est un artiste pluriel, douĂ© pour la photographie, qui l’a rĂ©vĂ©lĂ©, et fĂ©ru de sculptures, qu’il commence Ă  dĂ©voiler. Mais qui se cache derriĂšre ces Ɠuvres impossibles Ă  rĂ©sumer par un adjectif ?

Portrait d’un homme habitĂ©.

Comme toutes les histoires de vie, celle d’Arnold Grojean commence par une naissance. Bruxelles, 1988. Information laconique il est vrai puisque le jour et le mois ne sont pas prĂ©cisĂ©s quand on l’interroge en visioconfĂ©rence. Et trĂšs vite, en l’écoutant se raconter depuis son studio situĂ© Ă  Bamako, on en comprend la raison. Ce sont lĂ  des dĂ©tails inutiles dans le parcours de l’artiste. L’essentiel est ailleurs
 Dans l’adolescence notamment, cette derniĂšre Ă©tant faite de plusieurs bouleversements. Le premier, Ă  douze ans Ă  peine. « Ma rencontre avec le prestidigitateur

Christian Chelman a Ă©tĂ© un moment dĂ©terminant pour moi, prĂ©cise Arnold Grojean. Elle a eu lieu par hasard dans l’arriĂšre-salle d’un magasin de magie bruxellois. Je rĂȘvais d’apprendre et j’étais en admiration devant lui. Imaginez
 C’est un des pionniers de ce qu’on appelle la magie bizarre, une pratique qui mĂ©lange le mentalisme et l’utilisation d’objets sacrĂ©s ». CoĂŻncidence heureuse : l’homme lui propose de l’initier Ă  cette pratique. Arnold Grojean suivra alors Christian Chelman quelques annĂ©es durant lesquelles il sera son seul Ă©lĂšve. Le reste du temps, il y a l’école. Et lĂ , rien Ă  signaler.

CULTURE
Le projet « Koungo fitini » à la Biennale de la photographie africaine de Bamako © Arnold Grojean
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CULTURE 18
Projet « Saané » © Arnold Grojean

Arnold Grojean prĂ©fĂšre parler de ce qui l’a façonnĂ©. Comme la dĂ©couverte de la mĂ©ditation et un dĂ©mĂ©nagement dans le quartier MatongĂ© Ă  l’ñge de seize ans. L’occasion d’apprendre Ă  vivre seul et de s’ouvrir Ă  d’autres univers. « C’était ma premiĂšre approche avec l’Afrique. Je ne savais pas encore que ce continent allait me passionner par la suite
 A cette Ă©poque, je mĂ©ditais quotidiennement en forĂȘt de Soignes en me servant de psychotropes et de plantes sacrĂ©es ». Une expĂ©rience qui lui donne envie de prendre une annĂ©e sabbatique une fois son diplĂŽme en poche. Le jeune homme voyage alors en Inde et au Mali pour approfondir ses connaissances. Le yoga n’est pas encore Ă  la mode. « Je ne pouvais pas en parler avec mes camarades. Ils ne m’auraient peut-ĂȘtre pas compris
 En Inde, j’ai pu aller dans diffĂ©rents ashrams. Mais le moment le plus puissant a eu lieu quand j’ai posĂ© le pied en pays Dogon. Je ne connaissais pas du tout cet endroit. Je ne pouvais mĂȘme pas imaginer que ça puisse exister sur terre. Ça a Ă©tĂ© l’expĂ©rience la plus incroyable de ma vie. Une vraie rĂ©vĂ©lation ! ».

De retour en Belgique, il n’a donc qu’une idĂ©e en tĂȘte : repartir au Mali. Aucune autre destination ne l’intĂ©resse. « Cela peut paraĂźtre paradoxal car je suis Blanc mais je me suis senti chez moi au pays Dogon. Ce lieu me correspondait et je voulais Ă  tout prix y retourner ». En attendant, il s’inscrit dans une Ă©cole d’art bruxelloise, le 75, oĂč il choisit la photographie comme discipline. « En fait, je ne m’identifie pas comme photographe mĂȘme si c’est un mĂ©dium avec lequel je suis Ă  l’aise. Aujourd’hui, je pratique davantage la danse et la sculpture. Mais ces Ă©tudes ont Ă©tĂ© trĂšs riches. Le 75 est une Ă©cole trĂšs ouverte et le corps professoral n’y est pas limitant puisqu’on m’a permis de faire mes projets au Mali ». S’ensuivent alors des allers-retours pendant les deux premiĂšres annĂ©es, la troisiĂšme Ă©tant chamboulĂ©e par une expĂ©rience personnelle trĂšs prenante. « Lors de ma derniĂšre annĂ©e d’études, j’ai dĂ©cidĂ© de me sĂ©parer de tout ce que j’avais : objets, photos, dessins, relations... Le processus a durĂ© douze mois et ne me permettait plus d’assister aux cours. Car je me suis beaucoup isolĂ©, j’ai fait une

Un des rares clichés pris en pays Dogon en 2011 © Arnold Grojean
“Mais le moment le plus puissant a eu lieu quand j’ai posĂ© le pied en pays Dogon. Je ne connaissais pas du tout cet endroit. Je ne pouvais mĂȘme pas imaginer que ça puisse exister sur terre. Ça a Ă©tĂ© l’expĂ©rience la plus incroyable de ma vie.
Une vraie rĂ©vĂ©lation ! ”
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Arnold Grojean
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sorte de table rase du passé  Mon cursus scolaire devenait dĂšs lors incompatible avec mes aspirations spirituelles ».

Retour alors au Mali oĂč il reste deux ans et oĂč il se remet doucement de son expĂ©rience. L’occasion de renaĂźtre autrement. Arnold Grojean s’intĂ©resse aux enfants des rues qu’il suit et photographie
 Ça donne « Koungo fitini », un projet qui va le pousser Ă  se rĂ©inscrire au 75 dont il sort finalement avec les fĂ©licitations du jury. Grande distinction et Prix Roger Deconinck 2015. De quoi se sentir pousser des ailes
 « Koungo fitini veut dire ‘problĂšmes mineurs’. C’est un jeu de mots pour mettre en avant le fait que ces enfants ne sont pas la prioritĂ© de l’État malien et puis, il y a une addiction Ă  la rue qui fait qu’ils ont beaucoup de difficultĂ©s Ă  ĂȘtre rĂ©intĂ©grĂ©s dans un parcours de vie ». Une situation qui a suscitĂ© pas mal d’interrogations chez l’artiste. Pourquoi ces enfants retournent-ils Ă  l’endroit dont on a voulu les sauver ? La question est lĂ , et pour y rĂ©pondre, il va tenter de retrouver ces jeunes personnes livrĂ©es Ă  elles-mĂȘmes.

« L’un d’eux m’a expliquĂ© qu’une fois que tu as goĂ»tĂ© Ă  la rue, ça entre dans ton sang et tu ne peux plus t’en passer ».

UN CERTAIN MYSTICISME

Arnold Grojean aime comprendre. Et s’il fallait le dĂ©crire au premier abord, on pourrait rajouter qu’il est posĂ©. Il parle avec beaucoup de douceur. Il est au diapason du serpent qui s’enroule dĂ©licatement autour de lui. Image saisissante et finalement trĂšs banale une fois qu’on entrevoit les contours de son univers.

« Je ne pratique aucune religion mais je dois dire que l’animisme m’intĂ©resse mĂȘme si je n’en connais pas la signification exacte
 En fait, je ne suis pas dans des recherches anthropologiques mais empiriques. Je prĂ©fĂšre me faire ma propre dĂ©finition des choses. J’aime sonder par moi-mĂȘme ». Une dĂ©marche qui va jusqu’au pays Dogon. Il a un tel respect pour ce lieu qu’il est incapable de le prendre en photo (Ă  l’exception de quinze nĂ©gatifs rĂ©alisĂ©s en 2011, conservĂ©s au Surnateum). Trop sacrĂ©. Trop peur que cette terre lui en veuille de capter des images. Il ne veut pas d’interfĂ©rence. Seule l’énergie compte


Et celle qu’il dĂ©gage est trĂšs forte. On pourrait mĂȘme parler d’aura. Arnold Grojean a quelque chose de mystique. Il privilĂ©gie le cheminement au rĂ©sultat. « Quand je me suis sĂ©parĂ© de tout ce que je possĂ©dais en 2012, je n’avais plus de repĂšres, et cela fait qu’on ne peut plus ĂȘtre le mĂȘme qu’avant. Peut-ĂȘtre que je le referai
 Je ne serais pas Ă©tonnĂ© que cela se reproduise. Du coup, ce que je crĂ©e n’est pas si important. C’est surtout le processus qui compte ».

Preuve en est donnĂ©e dans le temps nĂ©cessaire Ă  l’artiste pour accepter de montrer ce qu’il fait. Ce n’est qu’aujourd’hui qu’il diffuse le court mĂ©trage qu’il a rĂ©alisĂ© en 2015. Et il faudra peutĂȘtre encore des annĂ©es avant de voir ce qu’il fabrique actuellement. « Je suis patient
 J’ai besoin de prendre du recul. Je ne montre que des choses qui sont dĂ©passĂ©es pour moi. Je veux Ă©viter d’ĂȘtre influencĂ©. Je ne voudrais pas qu’on juge puisque moi-mĂȘme j’évite ça. J’ai envie d’apprendre Ă  connaĂźtre mon sujet avant de le livrer aux autres ». Le dernier projet n’a pas de nom. Mais il en impose. En 2019, Arnold Grojean a rĂ©alisĂ© une sculpture de deux mĂštres de

hauteur sur deux mĂštres de large. Profondeur : un mĂštre. Poids : deux cents kilos. Une Ɠuvre qui a nĂ©cessitĂ© cinq mois de travail, cinquante-six cornes de bovins et bien sĂ»r des objets sacrĂ©s
 Au centre se trouvent un masque en bronze senoufo et une coiffe camerounaise utilisĂ©e lors des danses traditionnelles. CrĂ©ation parmi d’autres qu’il souhaiterait voir exposĂ©es dans une galerie en concordance avec ses valeurs et qui pourrait le reprĂ©senter. « Pour moi, l’art est une danse au milieu de la forĂȘt. L’état dans lequel je suis lorsque je crĂ©e est ce qui m’importe le plus. Je suis prĂȘt Ă  tout pour risquer ça ». ●

‱ Arnold Grojean a reçu le Prix National de la Photographie 2021 de Belgique

‱ Le projet KOUNGO FITINI a participĂ© Ă  la 13e Ă©dition de la Biennale de la Photographie Africaine de Bamako sous la forme d’une exposition financĂ©e par l’Union europĂ©enne

www.arnoldgrojean.com

CULTURE
← Le projet « Koungo fitini » © Arnold Grojean Sculpture rĂ©alisĂ©e en 2019 avec 56 cornes de bovins et des objets sacrĂ©s © Arnold Grojean
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« CET ÉTÉ-LÀ », JULIETTE EST DEVENUE GRANDE

En cet Ă©tĂ© 2021, Juliette naquĂźt au cinĂ©ma. Pourtant, les projecteurs cinĂ©matographiques, elle les connaĂźt depuis l’ñge de six ans. Mais cet Ă©tĂ©-ci aura eu une autre saveur car l’ampleur de l’expĂ©rience la fait passer d’un coup dans la cour des grands.

PORTRAIT
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Juliette Havelange © Jean-Christophe Guillaume

En ces congĂ©s de dĂ©tente, Juliette et moi avons rendez-vous au bureau de sa maman, « Les Films du CarrĂ© ». Sa maman s’est lancĂ©e dans la production depuis l’entrĂ©e de Juliette par la grande porte dans le monde du cinĂ©ma. A onze ans, Juliette ne craint pas le face Ă  face avec une journaliste, elle est dĂ©tendue, souriante, charismatique, on devine immĂ©diatement ce qui a plu au rĂ©alisateur de Cet Ă©tĂ©-lĂ , Eric Lartigau. Il faut dire que Juliette n’en est pas Ă  sa premiĂšre interview, elle est aussi Ă  l’aise devant un dictaphone que devant une camĂ©ra de cinĂ©ma « C’est plutĂŽt sympa les interviews, dĂ©clare-t-elle d’entrĂ©e de jeu, c’est plus simple que devant une Ă©quipe de 30 personnes et puis il n’y a pas de texte Ă  apprendre, il faut juste ĂȘtre soi-mĂȘme, au naturel ». Et du naturel, Juliette n’en manque pas.

Juliette Havelange

Si vous n’avez pas vu le film, voici le pitch : Dune (Rose Pou-Pellicer) a onze ans. Comme chaque Ă©tĂ©, elle rejoint avec ses parents leur maison des Landes oĂč l’attend Mathilde (Juliette Havelange), neuf ans, avec qui elle fait les 400 coups. Car c’est une amitiĂ© sans faille qui les lie, celle oĂč les deux fillettes partagent toutes les questions de l’entrĂ©e dans l’adolescence. Mais cette fois, quelque chose a changĂ©. Le regard de Dune n’est plus si innocent
 Cet Ă©tĂ©-lĂ , l’enfance s’est Ă©loignĂ©e un peu plus.

Face à Juliette, des pointures : Marina Foïs, Gael García Bernal et Chiara Mastroianni donnent la réplique « adulte » aux deux jeunes comédiennes fraichement écloses.

Eric Lartigau, le réalisateur de La famille Bélier, signe une nouvelle chro-

nique intime dans Cet Ă©tĂ©-lĂ  et s’immisce comme il sait si bien le faire au cƓur des familles, de toutes les familles, en posant la question de la transmission et de l’hĂ©ritage familial. « La famille nous construit, nous dĂ©truit et nous Ă©lĂšve », dĂ©clarera-t-il. Et d’hĂ©ritage familial, chez Juliette, il en est aussi question. Les parents, tous les deux dans le monde du spectacle et de la production, encadrent leurs deux filles et les guident dans cet univers pas toujours facile.

« J’ai commencĂ© par des pubs Ă  l’ñge de six ans car ma sƓur Elise, qui a trois ans de plus que moi, a commencĂ© trĂšs tĂŽt et m’a donnĂ© envie d’en faire aussi, tĂ©moigne Juliette. Je me souviens de mon premier casting pour un film Ă  Paris, on jouait en cercle avec d’autres enfants et chacun Ă  notre tour on avait un bout d’essai dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je ne me

« Cet ÉtĂ©-lĂ  » d’Eric Lartigau © [2022] Tresor Films – Studiocanal –France 2 CinĂ©ma – Quarante 12 Films –Artemis Productions
“ Les castings, ce sont trente minutes amusantes, je me dis toujours que si je n’ai pas le rĂŽle, ce n’est pas Ă  cause de moi. Papa m’avait prĂ©venue, la rĂ©alisatrice ou le rĂ©alisateur a dĂ©jĂ  un enfant en tĂȘte et si je ne corresponds pas, c’est comme ça ”.
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rendais pas bien compte de ce qui se passait, je me rĂ©jouissais d’aller visiter Paris aprĂšs. Avec Cet Ă©tĂ©-lĂ , c’était tout Ă  coup diffĂ©rent, c’était un vrai grand film avec de grands acteurs et un rĂ©alisateur connu ».

Pourtant Juliette ne fut pas impressionnĂ©e. D’ailleurs, Juliette ne stresse jamais, elle trouve que les castings c’est plus cool que l’école. « Ce sont trente minutes amusantes, je me dis toujours que si je n’ai pas le rĂŽle, ce n’est pas Ă  cause de moi. Papa m’avait prĂ©venue, la rĂ©alisatrice ou le rĂ©alisateur a dĂ©jĂ  un enfant en tĂȘte et si je ne corresponds pas, c’est comme ça. Par contre, ma grande sƓur se met beaucoup plus la pression ».

Et pour ce qui est d’apprendre les textes, lĂ  aussi Juliette y trouve du plaisir : « C’est beaucoup plus facile qu’à l’école car ce n’est pas du mot Ă  mot, on peut mĂȘme proposer des choses. Eric Lartigau, le rĂ©alisateur, nous laissait parfois faire comme nous avions envie. Quand Dune et moi avions des fous rires ou des attitudes qui n’étaient pas demandĂ©s dans le scenario, il les gardait quand mĂȘme » Et Eric Lartigau d’ajouter en janvier Ă  notre confrĂšre de La Libre Belgique Alain LorfĂšvre : « Si on se rendait compte au cours d’une scĂšne qu’elles n’étaient pas Ă  l’aise avec un mot, on changeait. J’enlevais des dialogues parce qu’en fait tout Ă©tait lĂ ,

tout Ă©tait dit, simplement dans un jeu de regards, dans un geste, une maniĂšre de se dĂ©placer dans l’espace. Parfois, elles vont proposer un truc d’elles-mĂȘmes sans mĂȘme s’en rendre compte. Tourner avec des enfants est bien moins compliquĂ© que ce que l’on pense ».

Le cinĂ©ma, c’est rudement plus chouette que l’école mais Juliette compte bien poursuivre ses Ă©tudes quand mĂȘme. D’accord, une expĂ©rience comme cellelĂ , ça marque forcĂ©ment la vie : des castings Ă©liminatoires, des rĂ©unions zoom, des rencontres, la prĂ©paration, l’apprentissage des textes, le tournage de trois mois loin de chez soi et de sa famille et enfin la promo : « Ça je ne m’y attendais pas, je pensais qu’aprĂšs le tournage, l’aventure se terminerait mais en fait on va aux projections et avant premiĂšres Ă  Paris ou dans d’autres villes, on se revoit avec l’équipe et surtout Rose, on fait des interviews, c’est trop sympa »

Que retient-elle de cette belle aventure ? Du temps long ? Quelques lourdeurs dues Ă  l’incroyable machinerie cinĂ©matographique ?

« Non pas vraiment, tout Ă©tait mis en place sur le plateau dĂšs qu’on arrivait, poursuit Juliette, mais si on devait attendre avant les scĂšnes, on nous avait prĂ©vu des jeux de sociĂ©tĂ© et notre coach

s’occupait bien de nous. Il nous faisait rĂ©pĂ©ter, il nous donnait des petits trucs et des instructions, par exemple pour des scĂšnes de bagarres, pour ne pas nous faire mal on devait faire un creux dans notre main. Mes plus belles scĂšnes, c’était celles Ă  la fĂȘte foraine, j’ai adorĂ©. Celles que j’ai moins apprĂ©ciĂ©es ont Ă©tĂ© tournĂ©es sur deux jours sous une fausse pluie dans les bois, c’était difficile, on Ă©tait en short et en t-shirt, j’ai eu froid ».

Et puis Ă  la fin du film, une scĂšne pleine de tendresse et de douceur, un fou rire entre les deux jeunes comĂ©diennes et la magie opĂšre. Elle ajoute encore une chaleur Ă  ce rĂ©cit initiatique, entre enfance et Ăąge adulte. Le petit bonbon acidulĂ© que nous offre Eric Lartigau en bonus se trouve aussi dans les Ă©changes entre Dune et Mathilde. Un langage moderne mais habitĂ© par l’innocence de leur Ăąge. « Je pense que c’est parce que nos personnages ont hĂąte de grandir, ajoute Juliette, alors on parle comme des grandes mais plus vulgairement. D’ailleurs je n’en dis jamais moi, je n’aime pas des mots comme ça, mais j’ai bien dĂ» m’y faire », dit-elle en souriant Eric Lartigau avouera avoir mis beaucoup de temps Ă  Ă©crire les dialogues des deux jeunes filles avec Delphine Gleize, la coscĂ©nariste. Elles devaient ĂȘtre juste, de leur temps, sans ĂȘtre donneuses de leçon, ni trop intelligentes.

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Si Juliette a finalement beaucoup apprĂ©ciĂ© le film, elle admet tout de mĂȘme prĂ©fĂ©rer la saga des Harry Potter, Stranger Things ou AstĂ©rix et ObĂ©lix, l’Empire du Milieu, dernier film vu en famille. Juliette aime le cinĂ©ma et le cinĂ©ma lui rend bien. Elle a dĂ©jĂ  passĂ© d’autres castings et compte bien poursuivre la route. Elle ne fait que commencer. A onze ans tout comme lors de cet Ă©tĂ©-lĂ , en 2021, Juliette veut encore savourer les joies de ce parcours initiatique cinĂ©matographique.

Rappelons enfin que ce tendre scĂ©nario est l’adaptation d’un formidable roman graphique de Jillian et Mariko Tamaki paru en 2014, que l’on vous conseille de lire. « Moi je n’ai pas pu le lire avant le tournage pour ne pas ĂȘtre influencĂ©e, conclut Juliette, mais il est vraiment chouette et c’est comme replonger dans tout ce qui nous est arrivĂ© ». ●

« Cet ÉtĂ©-lĂ  » d’Eric Lartigau © [2022] Tresor Films – Studiocanal –France 2 CinĂ©ma – Quarante 12 Films –Artemis Productions
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Ça je ne m’y attendais pas, je pensais qu’aprĂšs le tournage, l’aventure se terminerait mais en fait on va aux projections et avant premiĂšres Ă  Paris ou dans d’autres villes, on se revoit avec l’équipe et surtout Rose, on fait des interviews, c’est trop sympa. ”
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Juliette
Havelange

ENGAGEZ-VOUS, QU’ILS DISAIENT...

JEUNESSE
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Projet « La rencontre des rĂ©cupĂ©rathĂšques (ROAR), terreau fertile Ă  la solidaritĂ© et Ă  la favorisation d’un meilleur usage des ressources », projet d’activitĂ© de participation financĂ© en 2022 dans le cadre des ActivitĂ©s de Participation Erasmus+ © BIJ

Erasmus+ et Democracy Reloading offrent aux jeunes d’intĂ©ressantes possibilitĂ©s de prĂ©parer l’avenir. LĂ bas comme chez nous. Et on est tous concernĂ©s.

Un peu avant la pandĂ©mie, une enquĂȘte1 a dĂ©montrĂ© que seulement 15% des jeunes de 14 Ă  19 ans se sentaient ou se disaient « concernĂ©s et prĂȘts Ă  passer Ă  l’action », dans le bon sens du terme, Ă©videmment. Mais pour faire quoi ? Et surtout comment, avec quels moyens ?

DĂ©jĂ , cette enquĂȘte avait conclu Ă  certaines prioritĂ©s Ă©voquĂ©es par les jeunes pour donner du sens Ă  leur engagement, Ă  savoir : d’une part, s’ouvrir au monde en partant d’abord de ce qui leur est proche, de ce qui les concerne en favorisant l’accroche Ă©motionnelle, via des tĂ©moignages dans les Ă©coles. Et de l’autre, dĂ©velopper leur esprit critique et aborder des choses positives.

Des prĂ©occupations, somme toute bien lĂ©gitimes, qui ont surtout comme intĂ©rĂȘt de s’exprimer Ă  un Ăąge prĂ©coce dĂšs lors que l’on n’est pas du tout sĂ»r que leurs prĂ©dĂ©cesseurs - dont nous sommes - aient fait preuve d’un tel altruisme quand la vie Ă©tait plutĂŽt devant que derriĂšre.

Quoi qu’il en soit, Erasmus+ et Democracy Reloading auront Ă©tĂ© les derniers surpris des rĂ©sultats de ces sondages tant ces conclusions sont au-devant de leurs prĂ©occupations depuis maintenant quelques annĂ©es.

EXPÉRIENCE ENRICHISSANTE

PrĂ©cisons d’emblĂ©e qu’ici, on Ă©voque le travail du Bureau International Jeunesse (BIJ) de la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles qui concerne les activitĂ©s dĂ©veloppĂ©es par et pour les jeunes dans

le cadre de l’éducation non formelle, c’est-Ă -dire en dehors du cadre scolaire ou acadĂ©mique.2

Pour rappel, Erasmus+ est « Le » programme de financement de l’Union europĂ©enne pour l’éducation, la formation, la jeunesse et le sport. Le nouveau volet a Ă©tĂ© adoptĂ© en avril 2021 avec un budget renforcĂ© (plus de 28 milliards d’euros) pour la pĂ©riode 2021-2027.

Ce programme, vieux de 30 ans, a pour objectifs principaux d’offrir Ă  un maximum de jeunes une expĂ©rience enrichissante qui favorise la confiance en soi, la curiositĂ©, la dĂ©couverte des autres cultures, l’apprentissage des langues et l’acquisition de compĂ©tences qui peuvent ĂȘtre utiles pour trouver un emploi. Mais aussi de soutenir la coopĂ©ration entre organisations afin de leur permettre d’acquĂ©rir de l’expĂ©rience dans le domaine de la coopĂ©ration internationale, d’échanger des bonnes pratiques, de dĂ©velopper de nouvelles mĂ©thodes, de rĂ©seauter autrement qu’à travers Tik-Tok ou Instagram.

Dans les faits, Erasmus+ est articulĂ© autour de 4 grandes prioritĂ©s : l’inclusion et la diversitĂ©, l’environnement et le changement climatique, la transformation numĂ©rique ainsi que la participation des jeunes Ă  la vie dĂ©mocratique. Parce qu’au-delĂ  d’ĂȘtre des Ă©lecteurs, ils seront surtout les acteurs de demain.

C’est donc portĂ© par cet espoir, cette sorte de lumiĂšre au bout d’un tunnel que certains se plaisent Ă  assombrir qu’est intervenu un autre projet : Democracy Reloading

INTÉRESSÉS ?

Prochaines activités pour mieux comprendre les Activités de Participation en 2023 :

‱ 2 sĂ©ances d’information par an

‱ 1 formation du 15 au 19 mai 2023 à Charleroi

‱ JournĂ©e sur la participation le 17 novembre 2023 Ă  Bruxelles

Prochaines activitĂ©s pour dĂ©couvrir l’outil Democracy Reloading en 2023 :

‱ 2 cycles de formation

‱ 3 x 1 journĂ©e de rencontre et d’échanges

‱ Projets de participation citoyenne soutenus en 2021

- 2022 :

- Appel à projets « Citoyens en action » : 157 jeunes de FWB sélectionnés

- Activités de participation Erasmus + : 3 en 2021 et 8 en 2022

‱ Budget 2023 pour les projets « ActivitĂ©s de Participation » : 356.730 euros

1. EnquĂȘte « Annoncer la couleur » et Enabel (Agence Belge de dĂ©vĂ©loppement). 500 jeunes de 14 Ă  19 ans, juin-juillet 2019, suivi de 3 mois avec les enseignants pour dĂ©gager des pistes de travail.

2. Si vous avez un projet dans le domaine de Education/Formation, soit pour les Ă©coles secondaires, professionnelles, ou du supĂ©rieur et l’éducation des adultes, adressez-vous Ă  l’AEF Europe. L’Agence exĂ©cutive europĂ©enne Education et Culture (EACEA) gĂšre aussi une partie d’Erasmus+.

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BATTRE LA CAMPAGNE

Ce projet a Ă©tĂ© portĂ© par des jeunes engagĂ©s dans le dĂ©veloppement rural. C’est au dĂ©part du constat d’un manque d’implication de la jeunesse dans les organes dĂ©cisionnels au niveau local, national et europĂ©en qu’est nĂ©e cette idĂ©e de projet. Ainsi, une quarantaine de jeunes belges, hongrois, grecs, espagnols, polonais, lettons et suĂ©dois se sont rendus en Pologne au European Rural Youth Parliament afin de formuler leurs recommandations politiques.

Petite prĂ©cision remarquable : tous ces jeunes s’expriment dans un anglais irrĂ©prochable


https://www.youtube.com/

watch?v=zICYW0S6SPY&t=4s

ÉCRIRE L’AVENIR

Émanation directe d’un projet Erasmus+, ce projet est nĂ©, en 2015, de la volontĂ© de plusieurs agences nationales - dont le BIJ - de se rĂ©unir au sein d’un projet commun « SPEAK! LISTEN! ».

Il est vrai que le contexte Ă©tait un peu le mĂȘme partout : baisse de la confiance, montĂ©e des nationalismes, extrĂ©mismes et populismes, rĂ©cession Ă©conomique, chĂŽmage de masse et paupĂ©risation, risques sur la stabilitĂ© politique, guerres et pandĂ©mies. N’en jetez plus. Et prenons les choses Ă  bras-le-corps. Et mĂȘme Ă  la racine.

Si les scrutins ont rĂ©vĂ©lĂ© plusieurs indicateurs sur les limites de la dĂ©mocratie reprĂ©sentative (taux d’abstention/ catĂ©gorie d’ñge) pourtant, il apparaĂźt clairement que les jeunes ne rejettent pas le modĂšle dĂ©mocratique. Bien au contraire. Comme les communes sont le niveau de pouvoir le plus proche des gens, et singuliĂšrement des jeunes, un partenariat3 s’est progressivement mis en place avec l’idĂ©e de soutenir les jeunes comme acteurs de changement et promoteurs d’une nouvelle culture de dĂ©mocratie, d’égalitĂ© et d’État de droit. Comment ? En identifiant le besoin de dĂ©velopper des structures plus dĂ©mocratiques et plus accessibles pour encourager leur implication.

ConcrĂštement, cela se traduit par une boĂźte Ă  outils en ligne qui soutient les pouvoirs locaux Ă  concevoir, Ă  mettre en Ɠuvre et Ă  Ă©valuer la participation des jeunes au processus dĂ©cisionnel.

Cela concerne aussi la promotion des programmes Erasmus+ Jeunesse et Corps Européen de Solidarité pour développer la participation des jeunes à la prise de décision grùce à des projets de qualité.

On essaye Ă©galement d’inscrire la question de la participation des jeunes dans les processus dĂ©cisionnels dans les agendas politiques locaux, nationaux et europĂ©ens, et, « last but not least », de mobiliser les parties prenantes (dĂ©cideurs politiques, administration communale, jeunes) par le biais d’activitĂ©s de formation, d’échanges, etc.

C’est lĂ , peut-ĂȘtre, que le bĂąt risque de blesser. Parce que si certains clichĂ©s ont la vie dure, notamment concernant le manque de dynamisme ou d’initiative de certaines structures, il est tout aussi vrai que la pression financiĂšre oblige parfois Ă  avoir le nez dans le guidon. Or lĂ , tout au bout, il y a la ligne de l’horizon. C’est demain. Et l’avenir appartient Ă  tout le monde. Surtout Ă  celles et ceux qui vont le vivre. ●

JEUNESSE
Formation « Municipalities for Democracy » dans le cadre du projet Democracy Reloading en 2022, qui a pour objectif d’outiller les communes en participation des jeunes
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3. Au dĂ©part, le comitĂ© directeur Ă©tait formĂ© par la Belgique FR, la Belgique NL, l’Italie, le Portugal, la Hongrie, l’Estonie, la France et la NorvĂšge avec 9 membres observateurs : Slovaquie, Croatie, Finlande, Chypre, SuĂšde, Espagne, Pologne, SlovĂ©nie et les Pays-Bas.

PARLONS FRANC

Le 6 fĂ©vrier dernier, au Théùtre Varia, s’est dĂ©roulĂ©e la soirĂ©e de lancement du nouveau mĂ©dia « Paressia » des Ambassadeurs d’Expression Citoyenne.

Durant la GrÚce antique, cela signifiait « parler franc ». En effet, « Penser, débattre, agir » sont les maitres mots de la création de leurs podcasts disponibles gratuitement sur Spotify.

Ici, l’activitĂ© de participation (Erasmus+) visait Ă  mettre en place plusieurs cycles de dĂ©bats et de discussions, pour permettre notamment de crĂ©er des espaces de prise de paroles pour les jeunes et par les jeunes. Lors de cette soirĂ©e, ils ont notamment abordĂ© les questions : « Fracture mĂ©diatique, fracture sociĂ©tale ? » et « Les tribunaux mĂ©diatiques, condamnation d’une justice Ă  la traĂźne ? »

Carte des compĂ©tences de la participation des jeunes dĂ©veloppĂ©e dans le cadre de Democracy Reloading Projet « I Vote, 24 » –juin 2019, Belgique
INFO Bureau International Jeunesse (BIJ) Rue du Commerce 18, 1000 Bruxelles, 02/219 09 06, bij@cfwb.be 29

385 JEUNES FORMÉS

EN ENTREPRENEURIAT ET SUR DES MÉTIERS STRATÉGIQUES

Le programme DĂ©fi Archipelago, une initiative africaine et europĂ©enne pour la formation professionnelle et l’employabilitĂ© des jeunes, vient de se clĂŽturer au SĂ©nĂ©gal. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a Ă©tĂ© une grande rĂ©ussite pour tous les acteurs concernĂ©s.

COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT CĂ©rĂ©monie de clĂŽture du programme DĂ©fi Archipelago © APEFE 30

DĂ©fi Archipelago, c’est une initiative pour la formation professionnelle, dotĂ©e d’un budget de 600.000 euros financĂ© par le Fonds Fiduciaire d’Urgence pour l’Afrique (FFU) de l’Union europĂ©enne. Son objectif principal est d’amĂ©liorer l’employabilitĂ© des jeunes, et en particulier des jeunes femmes et filles, par des actions ciblĂ©es de formation professionnelle et de renforcement des capacitĂ©s entrepreneuriales des dirigeants de PME dans 12 pays du Sahel et de la zone du Lac Tchad. L’initiative a dĂ©marrĂ© en 2019 avec initialement, l’objectif de boucler le programme en 2021. Comme la covid est passĂ©e par lĂ , la clĂŽture est finalement intervenue fin 2022.

Comment cela s’est-il passĂ© sur le terrain ? Partant d’une analyse des besoins des entreprises dans 4 rĂ©gions du SĂ©nĂ©gal, DĂ©fi Archipelago a proposĂ© de dĂ©velopper une offre de formation en alternance professionnalisante de court terme dans les secteurs du BTP, des filiĂšres de l’aquaculture, de l’eau para-agricole et de la transformation agro-alimentaire, pour doter les jeunes de compĂ©tences requises et de la certification y affĂ©rente. Le projet a Ă©galement permis de former des jeunes bĂ©nĂ©ficiaires en entrepreneuriat, et de renforcer l’offre de services des Chambres de Commerce aux MPME. Le projet a Ă©tĂ© portĂ© par des structures privĂ©es et publiques du SĂ©nĂ©gal et de Belgique dans le cadre normatif de la Charte sur la mise en Ɠuvre de programmes de formation professionnelle duale au SĂ©nĂ©gal, initiative conjointe de l’Etat, du Patronat et des Syndicats sĂ©nĂ©galais, datant de 2018.

LA WALLONIE ET LE SÉNÉGAL, PARTENAIRES DE MISE EN ƒUVRE DU PROJET

« Le leadership du projet DĂ©fi Archipelago a Ă©tĂ© confiĂ© Ă  l’Association pour la Promotion de l’Education et de la

Formation Ă  l’Etranger (APEFE), demandeur principal d’un consortium de 8 organisations - 5 sĂ©nĂ©galaises et 3 wallonnes-, qui a assurĂ© la coordination Ă  partir du siĂšge Ă  Bruxelles en tandem avec l’UnitĂ© de Gestion du Projet, ancrĂ©e Ă  la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Dakar (CCIAD). C’est Ă  partir de la CCIAD que Bara Ndiaye, le chef de projet recrutĂ© par l’APEFE, a orchestrĂ© la mise en Ɠuvre opĂ©rationnelle du projet, en collaboration Ă©troite avec toutes les par-

ties prenantes. Un ComitĂ© de pilotage, prĂ©sidĂ© par ChimĂšre Mbaye Ndiaye, SG de la CCIAD, a Ă©tĂ© mis en place et a rĂ©uni tous les 6 mois les principaux acteurs impliquĂ©s, dont l’Office National de Formation Professionnelle, les chambres consulaires et les opĂ©rateurs de formations, et les reprĂ©sentants des associations de jeunes, de femmes et de migrants », explique Anne Coppens, chargĂ©e de mission DĂ©fi Archipelago tenant le rĂŽle de « coordinatrice » du projet pour le compte de l’APEFE.

Cérémonie de clÎture du programme Défi Archipelago © APEFE
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ARCHIPELAGO est rĂ©gi par une association entre SEQUA (Agence de dĂ©veloppement du secteur privĂ© et de la coopĂ©ration fĂ©dĂ©rale au dĂ©veloppement allemande), EUROCHAMBRES (Association des Chambres de commerce et d’industrie europĂ©ennes) et le CPCCAF (ConfĂ©rence permanente des chambres consulaires africaines et europĂ©ennes).

Le programme DEFI a Ă©tĂ© mis en Ɠuvre par l’APEFE en partenariat avec la CCIAD, l’ONFP (l’Office Nationale de la Formation Professionnelle du SĂ©nĂ©gal), la CCIW (Chambre du Commerce et d’Industrie de Wallonie), ATS (Association internationale de dĂ©veloppement) et le CEFRA (Centre de formation et de recherche en aquaculture) de l’ULiĂšge.

AMÉLIORER L’EMPLOYABILITÉ DES JEUNES POUR MIEUX LES INSÉRER

L’objectif Ă©tait de mettre en place un dispositif « formation en alternance –insertion professionnelle » dans quatre rĂ©gions du SĂ©nĂ©gal, Ă  savoir Dakar, Diourbel, Kolda et Louga pour augmenter les opportunitĂ©s d’emplois pour les jeunes, chĂŽmeurs, dĂ©scolarisĂ©s et migrants de retour dans les 4 rĂ©gions, en particulier des jeunes filles et femmes. La tranche d’ñge de ces bĂ©nĂ©ficiaires a Ă©tĂ© fixĂ©e entre 15 et 40 ans. L’idĂ©e Ă©tant d’amĂ©liorer leur insertion sur le marchĂ© du travail.

« C’est un projet multi-acteurs, multi-mĂ©tiers et multi-rĂ©gions », expliquait Maider Mace, chargĂ©e de projet, Ă  l’occasion de la clĂŽture du programme.

« C’était trĂšs ambitieux mais les objectifs ont Ă©tĂ© atteints puisque sur deux ans, 225 jeunes ont Ă©tĂ© formĂ©s Ă  la formation professionnelle sur des mĂ©tiers stratĂ©giques, Ă  forts besoins en compĂ©tences qualifiĂ©es et Ă  fort potentiel de croissance. Il y a Ă©galement eu 160 jeunes formĂ©s sur les mĂ©tiers de l’entrepreneuriat, quand on sait que le SĂ©nĂ©gal est une nation d’entrepreneurs. Donc, ils ont besoin des outils nĂ©cessaires Ă  la gestion d’une petite entreprise », ajoute-t-elle.

ENTHOUSIASME LOCAL

Abdoul Aziz Sabaly , chef du département Formation Consulaire de la

Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture (CCIAD) de Dakar s’est fĂ©licitĂ© de l’initiative. « Le programme Archipelago touche une cible qui est vulnĂ©rable, les jeunes et les femmes, pour apporter du savoir-faire, de la compĂ©tence avec internet, pour intĂ©grer des entreprises ou crĂ©er une activitĂ© gĂ©nĂ©ratrice de revenus. Donc, c’est un programme qui vise aussi Ă  fixer les jeunes sur leur territoire et ainsi rĂ©duire l’émigration. On peut dire que c’est bienvenu parce que les jeunes ont envie de quitter nos pays pour venir en Europe, car la situation n’est pas toujours favorable. En les formant, en leur donnant des compĂ©tences et en les initiant Ă  l’entrepreneuriat, cela pourrait aider Ă  les stabiliser, Ă  les faire rester sur place et Ă  entreprendre pour obtenir d’autres conditions de vie », explique-t-il.

Mahamadou Dabo, chef de dĂ©partement financier et comptable de la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture (CCIAD) de Dakar partage cet avis. « Je pense que c’est un bon projet qui vient en son nom parce l’objectif, c’est de rĂ©gler le problĂšme de l’émigration. C’est une prĂ©occupation dans notre pays et d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale au niveau des pays du Sahel, d’autant plus que ce projet permet de freiner l’émigration des jeunes. Maintenant, l’objectif c’est d’aider les femmes et les migrants qui sont de retour. L’objectif recherchĂ© est de renforcer les capacitĂ©s des jeunes en leur donnant une formation adĂ©quate qui leur permet de s’insĂ©rer dans le tissu Ă©conomique ».

UNE OPPORTUNITÉ INÉDITE

Si la covid a jouĂ© les trouble-fĂȘtes, elle a aussi permis de montrer la capacitĂ© d’adaptation des intervenants. DĂšs mars 2020, des Ă©changes rĂ©guliers ont en effet eu lieu entre les codemandeurs et Sequa (cf. encadrĂ©) - chef de file dans la coordination du Programme Archipelago - pour adapter la planification et les modalitĂ©s de gestion aux contraintes liĂ©es Ă  la pandĂ©mie, qui, au SĂ©nĂ©gal comme en Belgique, ont fortement limitĂ© les rencontres en prĂ©sentiel et les missions internationales durant les deux premiĂšres annĂ©es du projet.

Sequa a permis d’investir dans l’achat d’équipements informatiques et de services digitaux pour faciliter le travail Ă  distance et la digitalisation, en restant dans les limites du budget initial. Depuis mars 2020, la plupart des Ă©changes entre tous les acteurs Archipelago ont Ă©tĂ© organisĂ©s en mode webinaire, ce qui a eu pour effet, et c’est un point positif, de dĂ©velopper l’agilitĂ© numĂ©rique des acteurs concernĂ©s qui n’a fait que progresser depuis. MalgrĂ© tout, la crise sanitaire a fortement compliquĂ© et causĂ© des retards dans la mise en Ɠuvre du projet.

Au final, le programme a tout de mĂȘme permis de tirer quelques leçons qui pourraient bĂ©nĂ©ficier aux expĂ©riences futures en matiĂšre de formation, comme l’appropriation totale du projet par les codemandeurs sĂ©nĂ©galais, influant positivement dĂšs le dĂ©marrage sur le dynamisme et l’implication de toutes les parties prenantes vers l’atteinte des objectifs du projet.

Bref, le programme Archipelago a offert une opportunitĂ© inĂ©dite de chercher Ă  rĂ©pondre au chĂŽmage des jeunes en mobilisant les entreprises et centres de formation sĂ©nĂ©galais et europĂ©ens, Ă©voluant dans des Ă©cosystĂšmes caractĂ©risĂ©s par des communautĂ©s d’affaires diffĂ©rentes mais visant les mĂȘmes objectifs. Et on ne peut que s’en fĂ©liciter quand on regarde le nombre de jeunes formĂ©s et l’enthousiasme qu’ils ont mis dans ce projet. ●

https://www.apefe.org/

https://archipelago-programme.org/

COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT
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Lauréats du programme Défi Archipelago © APEFE 33

LA LÉGENDE SIMENON

Si l’écrivain belge respirait encore, il soufflerait 120 bougies cette annĂ©e
 Un anniversaire qui va faire l’évĂ©nement dans la ville qui l’a vu naĂźtre en fĂ©vrier 1903. LiĂšge organise en effet un festival, une expo photo et de multiples activitĂ©s.

TOURISME
Par Nadia Salmi
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Georges Simenon © Victor Dinitz © Simenon.tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge

BIO EXPRESS

C’est l’apanage des grands
 Se rĂ©sumer Ă  un nom de famille. Comme Simenon. Un comble quand on sait qu’à ses dĂ©buts, il a publiĂ© sous 27 pseudonymes parmi lesquels « La DĂ©shabilleuse », « Germain d’Antibes », « Plick et Plock » ou encore « Poum et Zette » ! Mais qui est Georges ? Qui est ce LiĂ©geois mondialement connu ? AssurĂ©ment quelqu’un de prolifique. Simenon est en effet l’écrivain francophone le plus vendu, le plus traduit et le plus adaptĂ© du XXe siĂšcle. C’est 192 romans dont 75 Maigret, 155 nouvelles et un millier de reportages autour du monde. C’est aussi 9.000 personnages dans 1.800 lieux qu’il a parcourus
 Des chiffres qui donnent le tournis. Et pour cause. Comment une personne peut-elle Ă©crire autant en septante ans ? Car ici, tout commence officiellement Ă  l’ñge de 16 ans. Simenon est engagĂ© comme journaliste Ă  la Gazette de LiĂšge. Premiers mots couchĂ©s sur le papier pour ĂȘtre lus. Premiers frissons
 Et trĂšs vite, l’envie de s’envoler ailleurs se dessine. Ce sera la Ville LumiĂšre. A mĂȘme pas vingt ans. LĂ , il publie des contes, des nouvelles, des romans
 Il s’essaie Ă  tout. Mais c’est avec le personnage du commissaire Maigret qu’il connaĂźt le succĂšs. La premiĂšre enquĂȘte sort en 1931 chez Fayard. Et pour l’éditeur, c’est une belle leçon. Car s’il a publiĂ© et soutenu Simenon, il n’était pas totalement convaincu au dĂ©part de la qualitĂ© des premiers tapuscrits
 « Ce ne sont pas des romans policiers. Ce n’est pas scientifique. Il n’y a pas de jeune premier, ni d’hĂ©roĂŻne. Pas de personnage sympathique et cela finit mal puisqu’on ne se marie jamais. Vous n’aurez pas mille lecteurs ». L’erreur est humaine et cette phrase en est la preuve. Une chance, Simenon ne perd pas confiance en lui. Il a 28 ans et des dizaines d’histoires en attente d’ĂȘtre racontĂ©es.

Car il n’y a pas que Maigret qui l’inspire. La preuve avec ses romans durs, autrement dits non policiers, qu’il fait Ă©diter chez Gallimard. Simenon montre lĂ  qu’il ne se limite pas. Il surprend. Il passe mĂȘme de la fiction Ă  la rĂ©alitĂ© pour se livrer. Ça s’appelle Pedigree et c’est son premier roman autobiographique. Un livre axĂ© sur ses dĂ©buts : l’enfance et

l’adolescence, socles de sa vie future. De quoi apprendre Ă  mieux le connaĂźtre. Et ce ne sera pas la seule occasion. 24 autres livres du genre suivront. Et entre chacun d’eux, il y aura des livres et encore des livres. Y compris durant sa pĂ©riode amĂ©ricaine. De 1945 Ă  1955, il vit outre-Atlantique et Ă©crit 48 histoires. ExpĂ©rience riche qui lui fait dire alors :

« Je suis bien en AmĂ©rique parce que lĂ -bas, il n’y a pas de cafĂ©s littĂ©raires oĂč des intellectuels racontent les romans qu’ils n’écriront jamais ». Mais Simenon n’y reste pas. Il revient en France, sur la CĂŽte d’Azur, et puis, atterrit en Suisse oĂč il finira sa vie, les derniĂšres annĂ©es Ă©tant marquĂ©es par une Ă©preuve terrible : le suicide de sa fille Marie-Jo par arme Ă  feu. Geste fatal qui le ramĂšne Ă  l’introspection et au besoin de se raconter Ă  la premiĂšre personne


« Je me suis intĂ©ressĂ© aux hommes, Ă  l’homme de la rue surtout, j’ai essayĂ© de le comprendre d’une façon fraternelle
 Qu’ai-je construit ? Au fond, cela ne me regarde pas ». Conclusion humble d’un Ă©crivain talentueux et gĂ©nĂ©reux.

L’homme Ă  la sempiternelle pipe s’éteint Ă  Lausanne Ă  l’ñge de 86 ans en 1989. Mais adepte du rebondissement, il vit toujours grĂące Ă  l’immense Ɠuvre qu’il a laissĂ©e.

Georges Simenon © Sanjiro Minamikawa © Simenon.tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge
“ Je suis bien en AmĂ©rique parce que lĂ -bas, il n’y a pas de cafĂ©s littĂ©raires oĂč des intellectuels racontent les romans qu’ils n’écriront jamais. ”
Georges Simenon
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© Sanjiro Minamikawa © Simenon.tm –Collection Fonds Georges SimenonULiĂšge
TOURISME
Congo belge – Ă©tĂ© 1932 © Simenon.tm – Collection Fonds Georges SimenonULiĂšge Georges Simenon Ă  Odessa – mai 1933 © Simenon.tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge Varsovie – mars 1933 © Simenon.tm –Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge Enfants dans les rues de Vilnius – mars 1933 © Simenon. tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge
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TraversĂ©e entre Batumi et Trebizonde – mai 1933 © Simenon.tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge

PROGRAMME DES FESTIVITÉS

‱ LiĂšge a rendu hommage Ă  l’écrivain avec le « Festival Simenon ». L’occasion de (re)dĂ©couvrir gratuitement son Ɠuvre grĂące Ă  des rencontres littĂ©raires, des expositions, des projections de films et mĂȘme une balade thĂ©matique. Le tout Ă©tait organisĂ© par l’ULiĂšge et John Simenon (le fils de Georges) en collaboration Ă©troite avec la Ville de LiĂšge. Une premiĂšre Ă©dition qui pourrait ĂȘtre renouvelĂ©e
 L’objectif ici est de resserrer les liens entre les LiĂ©geois et l’auteur, mais aussi de rappeler tout ce qu’il a rĂ©alisĂ© et inspirĂ©. Simenon, ce n’est pas que du passĂ© en effet. C’est aussi une actualitĂ© riche avec des crĂ©ateurs qui revendiquent son influence.

Pour info : https://www.printemps-simenon. com/le-festival/

non romancier et reporter ? La rĂ©ponse se trouve forcĂ©ment quelque part
 Et si on ne la trouve pas, on peut juste se laisser porter par ses images magnifiquement rĂ©sumĂ©es par les responsables de l’évĂ©nement : « Ces photographies donnent Ă  voir un Simenon immergĂ© dans son Ă©poque et observateur de l’Histoire en marche, tout en fournissant le dĂ©cor vrai de certains de ses plus grands romans tels que Le Coup de lune, Les Gens d’en face, Les Clients d’Avrenos ou Quartier nĂšgre. Mais le Simenon qui fixe ainsi sur la pellicule les images d’un monde vouĂ© Ă  disparaĂźtre dans le cataclysme de la Seconde Guerre mondiale prĂ©pare aussi son Ɠuvre romanesque de l’aprĂšs-guerre en se lançant « Ă  la recherche de l’homme nu », c’est-Ă -dire d’un homme de partout et de nulle part, tel qu’il apparaĂźt une fois dĂ©barrassĂ© de ses attributs de rang, de caste ou de race, seul horizon de rĂ©conciliation possible dans ce monde en crise ».

Quand ? Du 8 mars au 27 aoĂ»t 2023. Tous les jours sauf le mardi. OĂč ? MusĂ©e Grand Curtius, FĂ©ronstrĂ©e 136.

‱ Un inĂ©dit : l’exposition « Simenon, du roman dur Ă  la bande dessinĂ©e ». IdĂ©al pour admirer les planches de Christian Cailleaux et Jacques de Loustal, dont les deux ouvrages seront publiĂ©s au printemps et Ă  l’automne aux Editions Dargaud.

Quand ? Du 8 au 12 mai 2023. OĂč ? Fonds patrimoniaux, Ilot St Georges.

‱ L’exposition photo « Simenon, images d’un monde en crise », c’est l’évĂ©nement Ă  ne pas rater puisqu’il permet de dĂ©couvrir les milliers de photographies que l’écrivain a ramenĂ©es de ses voyages Ă  travers le monde. Et chose importante Ă  savoir : les clichĂ©s pris entre 1931 et 1935 par ce reporter sont de trĂšs grande qualitĂ©. Un atout indĂ©niable si l’on veut explorer les diffĂ©rentes facettes de cet homme. D’ailleurs, l’exposition propose un parcours qui pose une question pertinente : que nous dit Simenon photographe de Sime-

Simenon insolite

Il a achetĂ© sa premiĂšre pipe Ă  l’ñge de 13 ans.

Il a vĂ©cu une histoire d’amour avec JosĂ©phine Baker et il a Ă©tĂ© mariĂ© deux fois.

Il était trÚs ami avec Jean Gabin et André Gide.

Il a, par son Ɠuvre, inspirĂ© 187 films français.

‱ Pour les amateurs de balades : le nouveau parcours « Sur les traces de Simenon » retrace la jeunesse de l’auteur en Outremeuse via notamment des enregistrements audio et une expĂ©rience en rĂ©alitĂ© augmentĂ©e. Une belle continuitĂ© pour ce projet initiĂ© en 1983, restaurĂ© en 2003 et modernisĂ© en 2023. ●

Inauguration : 11 mars 2023. OĂč ? Office du tourisme, Quai de la Goffe, 13.

Il a présidé le Festival de Cannes en 1960.

Georges Simenon © Sanjiro Minamikawa © Simenon. tm – Collection Fonds Georges Simenon - ULiĂšge
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Fondateurs de Studio BISKT, Charlotte Gigan (33 ans) et son compagnon et partenaire de travail Martin DuchĂȘne (33 ans), ont créé le vase Tulumba, un produit identitaire distribuĂ© en boutiques et en ligne, mais aussi un projet cohĂ©rent, Ă©volutif et hybride qui mixe artisanat et codes industriels ; une approche qui leur a permis de remporter le titre de Designer de l’annĂ©e 2022.

Le vase Tulumba bleu © StudioBiskAtelier Vase © Alexandra Colmenares – Avenue du Roi
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Vase © Alexandra Colmenares – Avenue du Roi

STUDIO BISKT TERRE VIVANTE

C’est dans l’atelier partagĂ© de LaVallĂ©e - un hub crĂ©atif qui regroupe 200 artistes et artisans - que nous avons rendez-vous avec Charlotte Gigan, co-fondatrice de Studio Biskt. CĂ©ramiste diplĂŽmĂ©e de la Cambre en 2015, elle orchestre avec son compagnon Martin, designer industriel, un projet de nĂ©o-artisanat qui conjugue leurs approches complĂ©mentaires de la crĂ©ation. « D’emblĂ©e, nous avons mixĂ© nos deux visions ; pour moi, chaque processus de crĂ©ation commence les mains dans la terre. Quand d’autres facettes du mĂ©tier (comme la communication ou le volet commercial du projet) m’éloignent trop longtemps de la matiĂšre, j’éprouve le besoin d’y revenir. Mais ce qui fait notre force, c’est d’avoir pu, grĂące au profil de Martin, ajouter une dimension industrielle Ă  notre projet. Notre particularitĂ©, c’est de pratiquer l’extrusion de terre, une technique qui nous permet de fabriquer des piĂšces en sĂ©ries tout en conservant une dimension artisanale ». Charlotte Ă©voque le vase Tulumba, leur piĂšce signature : « La premiĂšre version de cet objet Ă©tait plus longue et complexe Ă  rĂ©aliser. Elle entrainait aussi plus de dĂ©chets lors de sa fabrication. Nous l’avons donc simplifiĂ©e pour la rendre plus accessible d’un point de vue prix, mais aussi plus durable ». PiĂšce phare de leur projet, ce vase « pliĂ© » est vendu dans une poignĂ©e de boutiques en Belgique. D’autres piĂšces plus expĂ©rimentales - comme le banc Balik - ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© montrĂ©es lors de foires internationales comme Collectible. « Ce banc est la toute premiĂšre piĂšce que nous avons imaginĂ©e lors de la crĂ©ation du studio. Un projet dont l’élaboration a Ă©tĂ© trĂšs longue : un an et demi de travail, le temps nĂ©cessaire pour calibrer notre machine d’extrusion. Ce processus d’élaboration nous a permis de dĂ©construire le mythe de la piĂšce en cĂ©ra-

mique fragile et dĂ©licate. Nous voulions montrer qu’il pouvait s’agir d’un objet usuel et durable », raconte Charlotte. La collaboration du studio avec la galerie bruxelloise Avenue du Roi est l’occasion d’explorer d’autres pistes : « Dans une galerie, surtout lorsqu’elle nous laisse carte blanche, nous disposons d’un espace entier oĂč notre univers peut se dĂ©ployer », ajoute Charlotte.

UNE ÉNERGIE DE MAMOUT

Pour le duo, cette annĂ©e 2023 est placĂ©e sous le signe de la continuitĂ©. En marge des salons auxquels le studio va participer au printemps, Charlotte et Martin se lancent dans de nouvelles expĂ©rimentations. « Nous consacrons une journĂ©e par semaine Ă  notre rĂ©flexion commune autour du produit. Elle prend la forme d’un brainstorming basĂ© sur nos essais et nos erreurs. La cĂ©ramique, c’est beaucoup de casse et de ratages avant d’obtenir un produit

dont nous sommes fiers. GĂ©nĂ©ralement, quand nous sommes tous les deux d’accord sur un produit, c’est qu’il est bon (elle rit) ». Si les vases, les bancs, les miroirs ou encore les balançoires se classent dans la catĂ©gorie des objets usuels, les deux fondateurs du studio aiment s’inviter lĂ  oĂč on ne les attend pas vraiment : « Pour moi qui ne suis pas designer, mais bien artiste plasticienne, la fonctionnalitĂ© d’un objet n’est pas une fin en soi. Par le biais de nos crĂ©ations, nous cherchons Ă  questionner la notion-mĂȘme d’objet, mais aussi celle d’Ɠuvre d’art. Nous voulons Ă©galement poursuivre notre rĂ©flexion sur le sens de la matiĂšre. Concevoir un produit prend du temps. Notre objectif consiste donc Ă  capitaliser sur nos designs existants tout en Ă©largissant le champ des possibles. La cĂ©ramique n’est pas, de par sa nature, un produit durable. Nous faisons donc en sorte de conserver un ancrage local. Notre terre est belge (elle provient d’une carriĂšre Ă  Grez-Doiceau) et, Ă  l’exception des cintrages que nous faisons

DESIGN
Martin DuchĂȘne et Charlotte Gigan, le duo de Studio Biskt © Lydie Laville
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fabriquer par un atelier partenaire situĂ© Ă  la Micro Factory Ă  quelques centaines de mĂštres d’ici, nous rĂ©alisons toutes nos piĂšces Ă  l’atelier ». Pour la cĂ©ramiste, l’énergie qui se dĂ©gage de cet espace de co-working oĂč elle est installĂ©e depuis 2015, annĂ©e d’ouverture de LaVallĂ©e, est une aubaine : « J’ai besoin de ces Ă©changes entre artisans. Humainement, mais aussi artistiquement. Il y a 3 ans, nous avons notamment travaillĂ© avec MAMOUT Architectes sur la crĂ©ation d’un bord de piscine pour l’un de leurs clients », prĂ©cise Charlotte.

1.000 CASQUETTES

Au printemps dernier, Ă  l’invitation de la plateforme de soutien Belgium is Design, Studio Biskt a exposĂ© quelques piĂšces au salon Satellite. « Ce stand collectif nous a permis de participer Ă  la Design Week de Milan, mais ce type de rendez-nous nous rappelle aussi la difficultĂ© d’ĂȘtre sur tous les fronts. Notre activitĂ© implique d’endosser 1.000 casquettes Ă  la fois, une rĂ©alitĂ© Ă  laquelle je n’étais pas prĂ©parĂ©e. Notre challenge, aujourd’hui, c’est de rĂ©ussir Ă  dĂ©lĂ©guer

pour conserver un lien direct avec la terre. J’ai grandi aux cĂŽtĂ©s d’un pĂšre boulanger et d’un oncle pĂątissier qui m’ont donnĂ© le goĂ»t du travail manuel. Je les ai vus rĂ©flĂ©chir aux procĂ©dĂ©s de fabrication, aux cuissons... A l’époque, je n’avais aucun bagage artistique particulier. Le vrai dĂ©clic a eu lieu quand j’ai visitĂ© un marchĂ© de cĂ©ramistes Ă  Paris, lĂ  oĂč j’ai grandi : une rĂ©vĂ©lation. Je me suis d’abord formĂ©e pendant une annĂ©e en France. Puis j’ai rejoint La Cambre en 2011. C’est lĂ  que j’ai rencontrĂ© Martin. Lui, il a un profil plus matheux, mais il Ă©tait Ă©galement passionnĂ© de dessin. Au moment de choisir une filiĂšre d’étude, il a hĂ©sitĂ© entre ingĂ©nieur et plasticien. Finalement, il a choisi designer industriel, une sorte d’entre-deux ». Ce qui anime le duo ? Leur soif d’expĂ©rimentations : « A Milan, nous avons prĂ©sentĂ© notre vase dans une vingtaine de couleurs, mais actuellement, ce qui nous intĂ©resse, c’est de travailler sur l’idĂ©e d’un objet architectural dans une approche plus conceptuelle, mais aussi de rĂ©flĂ©chir Ă  d’autres rapports d’échelle. Nous testons de nouvelles dĂ©formations de notre vase et de plus grands formats ». Quant au prix de Designer de l’annĂ©e

DESIGN
↑ L’atelier de Studio Biskt © Jules Toulet
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↑ La fabrication des cĂ©ramiques © Louise Skadhauge – Avenue du Roi

qu’ils viennent de recevoir, ils le voient comme un encouragement : « Cette rĂ©compense dĂ©cernĂ©e par des journalistes et des directeurs de musĂ©es belges nous donne encore davantage de lĂ©gitimitĂ©. Elle nous a Ă©galement permis de dĂ©velopper des projets plus commerciaux (comme la crĂ©ation de trophĂ©es, par exemple). Pour un atelier comme

le nĂŽtre, ce type de commandes constitue une aubaine puisqu’elles nous permettent de continuer Ă  financer notre studio et d’élaborer de nouvelles piĂšces que nous prĂ©senterons Ă  l’occasion d’Art Bordeaux ce printemps. La cĂ©ramique, c’est vivant. Pour nous, l’important, c’est que notre travail le reste et qu’il soit vibrant, lui aussi ». ●

studiobiskt.com

Le banc Balik © Studio BISKT Le vase Saksi © Alexandra Colmenares –Avenue du Roi Miroir © Alexandra Colmenares – Avenue du Roi Banc © Alexandra Colmenares – Avenue du Roi
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ENTREPRISE
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Bruno et Bénédicte Meurens, CEO de Meurens Natural © Meurens Natural

MEURENS NATURAL, « ENTREPRISE DE L’ANNÉEÂź » 2022

C’est l’histoire d’une entreprise familiale nĂ©e en 1994 et d’une reconversion industrielle rĂ©ussie en Wallonie. « Auparavant, la sociĂ©tĂ© Ă©tait active dans la transformation de fruits du Pays de Herve, entre autres des pommes et des poires, en sirop, commence BĂ©nĂ©dicte Meurens, Co-CEO de Meurens Natural Notre grand-pĂšre avait créé cette sociĂ©tĂ© en 1935. Au milieu des annĂ©es 80, notre pĂšre et ses frĂšres ont eu la volontĂ© de diversifier l’activitĂ© pour qu’elle puisse continuer Ă  se dĂ©velopper ». A la fin de cette dĂ©cennie, l’entreprise reçoit une demande d’un biscuitier des Pays-Bas pour du sirop de cĂ©rĂ©ales. « Un processus de production trĂšs diffĂ©rent de ce qui se faisait jusque-lĂ . Il a fallu changer de matiĂšre premiĂšre et de secteur, passant d’une clientĂšle consommateur vers une clientĂšle business » DĂ©but des annĂ©es 90, les dirigeants d’alors revendent les parts de la sociĂ©tĂ© qui confectionne le sirop de LiĂšge et recrĂ©ent quasiment Ă  zĂ©ro Meurens Natural pour se concentrer sur l’hydrolyse de cĂ©rĂ©ales biolo-

giques. « Jusqu’en 2010, l’entreprise a dĂ©veloppĂ© et apportĂ© sur le marchĂ© ce type de produit dans le secteur bio oĂč, jusque-lĂ , il n’existait pas » Les dirigeants dĂ©cident ensuite de se diversifier avec une deuxiĂšme gamme, en produits naturels « C’est le mĂȘme procĂ©dĂ© de production que le bio, mais avec une matiĂšre premiĂšre conventionnelle. A partir d’une cĂ©rĂ©ale transformĂ©e, on obtient les mĂȘmes atouts, goĂ»t, couleur, pouvoir sucrant, etc. Ces gammes de produits biologiques et naturels rĂ©pondent aux besoins d’une large variĂ©tĂ© d’applications telles que les biscuits, barres, boissons vĂ©gĂ©tales, yaourts, glaces et chocolats. Cette gamme de produits naturels permet de rĂ©pondre Ă  la tendance de l’étiquetage plus simple pour le consommateur et de diversifier le portefeuille produits, mais aussi la clientĂšle, vers des sociĂ©tĂ©s moyennes et grandes europĂ©ennes, voire internationales, alors qu’avec le bio, on s’adresse plutĂŽt Ă  de petites entreprises » En 2014, BĂ©nĂ©dicte et Bruno Meurens, sƓur et frĂšre, reprennent les rĂȘnes de l’entreprise familiale.

PionniĂšre du bio, reconnue comme le spĂ©cialiste europĂ©en de l’hydrolyse de cĂ©rĂ©ales, Meurens Natural, qui se distingue par un projet innovant et une croissance fulgurante, a Ă©tĂ©
Ă©lue « Entreprise de l’AnnĂ©eÂź » 2022. La reconnaissance d’une belle reconversion industrielle wallonne.
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Meurens Natural a Ă©tĂ© Ă©lue « Entreprise de l’AnnĂ©eÂź » 2022, concours organisĂ© par Ernst & Young © Koen Luyten

L’INNOVATION AU CƒUR DE LA RÉUSSITE

Depuis prĂšs de trente ans, l’entreprise dĂ©veloppe un savoir-faire unique en bio grĂące Ă  l’originalitĂ© de son procĂ©dĂ© de production et la variĂ©tĂ© des matiĂšres premiĂšres transformĂ©es. L’innovation est au cƓur de la rĂ©ussite de Meurens Natural. « Au quotidien, la mission de notre entreprise consiste Ă  produire des ingrĂ©dients agroalimentaires biologiques, naturels et non-raffinĂ©s, provenant d’une transformation respectueuse de la matiĂšre premiĂšre et de l’environnement, reprend BĂ©nĂ©dicte Meurens. Ce qui nous distingue, c’est la couleur des produits grĂące Ă  ce procĂ©dĂ© naturel. L’entreprise est capable d’hydrolyser une large variĂ©tĂ© de matiĂšres premiĂšres biologiques et conventionnelles : riz, avoine, blĂ©, manioc, Ă©peautre, maĂŻs, orge maltĂ©, dattes, figues, pruneaux, etc. Cela nous donne une position unique, innovante et pionniĂšre sur le marchĂ© europĂ©en, notre marchĂ© de prĂ©dilection ». Dans le cadre d’un procĂ©dĂ© de transformation propre,

simple et respectueux de l’environnement, l’hydrolyse de cĂ©rĂ©ales prĂ©sente de nombreux atouts. « Nous n’utilisons pas d’additifs chimiques comme dans la grande industrie sucriĂšre. De la matiĂšre premiĂšre au sirop, la traçabilitĂ© est complĂšte ». Les produits sont Ă©galement innovants. « Ils conservent les goĂ»ts et les caractĂ©ristiques de nos matiĂšres premiĂšres car celles-ci sont 100 % naturelles, bio et durables ».

Aujourd’hui, Meurens Natural dispose de deux sites de production, le site historique Ă  Herve et un deuxiĂšme Ă  Thimister-Clermont, ouvert en 2017 dans le parc industriel des PlĂ©nesses. « Notre usine entiĂšrement automatisĂ©e est Ă  la pointe de la technologie. Depuis quatre ans, nous avons doublĂ© la capacitĂ© de production avec quatre lignes, deux Ă  Herve et deux aux PlĂ©nesses. DerniĂšrement, nous avons investi dans une ligne de protĂ©ines vĂ©gĂ©tales. Pendant notre production de sirop, on obtient un coproduit, riche en protĂ©ines, que nous distribuons aux agriculteurs de la rĂ©gion

pour l’alimentation animale. Nous avons dĂ©veloppĂ© un process afin de pouvoir utiliser ce coproduit Ă  la place d’une matiĂšre premiĂšre et d’en extraire un concentrĂ© de protĂ©ines pour rĂ©pondre Ă  la tendance d’aller vers les protĂ©ines vĂ©gĂ©tales plutĂŽt qu’animales. On rĂ©utilise un dĂ©chet noble pour refaire un ingrĂ©dient ».

CROISSANCE GALOPANTE

Depuis 2007, l’enveloppe globale des investissements s’élĂšve Ă  35 millions d’euros. « Nous avons aussi grandi, et de maniĂšre importante, au niveau de l’engagement du personnel, constamment formĂ© » L’entreprise du Pays de Herve emploie actuellement 85 personnes. Elle a enregistrĂ© une Ă©volution annuelle moyenne de 24 % au cours des cinq derniĂšres annĂ©es et a atteint un chiffre d’affaires de plus de 80 millions d’euros en 2022, dont 80 % Ă  l’exportation (10 % Ă  la grande exportation). Elle exporte ses produits en Europe chez les plus grands acteurs du secteur agroali-

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mentaire. Les marchĂ©s principaux sont l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne et les pays de l’Est. Hors Europe, elle compte des marchĂ©s comme les Etats-Unis, l’Asie et l’Australie.

Meurens Natural a Ă©tĂ© Ă©lue « Entreprise de l’AnnĂ©eÂź » 2022, concours organisĂ© par Ernst & Young (EY) entourĂ© par une Ă©quipe d’experts, pour sa croissance fulgurante dans des produits bio Ă  haute teneur en innovation et son projet innovant. « Nous avons rĂ©ussi une reconversion industrielle en partant de produits traditionnels vers des produits innovants, c’est hors du commun en Wallonie, souligne Bruno Meurens, Co-CEO. Nous sommes fiers d’ĂȘtre le subtil mĂ©lange d’une tradition familiale et d’un savoir-faire industriel en agroalimentaire dĂ©veloppĂ© depuis plus de cent ans. Les rĂ©sultats enregistrĂ©s nous dĂ©montrent aujourd’hui que nous avons eu raison de prendre ces risques en tant qu’entrepreneurs ».

NOUVEAUX PRODUITS, NOUVEAUX MARCHÉS

Pas question de s’arrĂȘter en si bon chemin. La sociĂ©tĂ© reste soucieuse de l’avenir et de l’environnement. « Nous sommes pionniers du secteur bio, cela rend notre sociĂ©tĂ© unique, souligne BĂ©nĂ©dicte Meurens. Notre volontĂ© est de continuer Ă  promouvoir des ingrĂ©dients biologiques et naturels innovants. Pour ce faire, nous avons mis sur pied une cellule de Recherche et DĂ©veloppement entiĂšrement dĂ©diĂ©e Ă  la mise au point d’ingrĂ©dients sur-mesure. Notre ambition est de poursuivre la croissance en continuant Ă  dĂ©velopper nos gammes, bio et conventionnelles, et de nouvelles catĂ©gories de produits innovants et durables pour toucher de nouveaux secteurs comme avec nos protĂ©ines vĂ©gĂ©tales. Par exemple, les produits pour sportifs, les substituts de viande. Des secteurs nouveaux pour nous sur lesquels nous avons un potentiel important. Nous voulons aussi nous ouvrir Ă  de nouveaux marchĂ©s en Europe et en dehors d’oĂč nous avons des demandes, et Ă  d’autres secteurs d’applications. En intĂ©grant de nouvelles technologies pour complĂ©ter notre outil de production ».

Au cours de son histoire, l’entreprise n’a eu de cesse de faire en sorte d’ĂȘtre toujours la premiĂšre dans son domaine. « Nous avons Ă©tĂ© les premiers Ă  sortir de nouvelles cĂ©rĂ©ales, de nouveaux concepts de produits. Notre Ă©quipe de 5 personnes en R&D est trĂšs active. Elle essaie constamment de trouver de nouvelles cĂ©rĂ©ales ou de nouvelles matiĂšres premiĂšres qui vont permettre de nouvelles applications, de nouvelles fonctionnalitĂ©s pour le secteur des ingrĂ©dients. La moitiĂ© de notre chiffre d’affaires de 2021 provenait des innovations des six sept derniĂšres annĂ©es ». Sans oublier l’aspect durabilitĂ©. « Il a toujours Ă©tĂ© dans notre ADN, mais au niveau de la supply chain, c’est trĂšs important. Nous avons rĂ©alisĂ© notre bilan carbone et nous avons remarquĂ© que le travail doit ĂȘtre mis dessus, rĂ©duire les circuits d’approvisionnement et aussi travailler sur le type de cĂ©rĂ©ale ayant la meilleure adĂ©quation entre les besoins nutritionnels du consommateur et les conditions d’agriculture les plus adaptĂ©es localement. Un travail encore plus indispensable Ă  l’avenir ». ●

www.meurensnatural.com/fr/

ENTREPRISE
© Koen Luyten
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Entrepreneur of the yearÂź 2022
L’Entreprise
de l’AnnĂ©eÂź 2022 Meurens Natural, situĂ©e Ă  Herve © Meurens Natural

LES SMART CITIES, OUTIL DE TRANSITION POUR LES VILLES ET TERRITOIRES

Le dĂ©veloppement des villes et des territoires demande une agilitĂ©, une curiositĂ© et des compĂ©tences en renouvellement constant. La Wallonie et la FĂ©dĂ©ration WallonieBruxelles entendent ĂȘtre Ă  l’écoute de toutes les Ă©volutions en la matiĂšre et notamment, au travers du Smart City Institute (HEC ULiĂšge), de permettre un dialogue et une recherche de solution entre les autoritĂ©s publiques, citoyens, entreprises multinationales et locales, associations, ONG, universitĂ©s... sur le territoire.

Par Vincent Liévin
INNOVATION
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Atelier « Stratégie » au Smart City Institute © Smart City Institute

«Avec cette dynamique de Smart City, les diffĂ©rents acteurs peuvent engager un processus de transition durable afin d’assurer la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique, le bien-ĂȘtre social et le respect des ressources naturelles sur ce territoire... tout en utilisant les technologies (technologies digitales, ingĂ©nierie, technologies hybrides) comme facilitateur » explique Audrey Lebas du Smart City Institute (SCI)

Pour elle, « avec les changements climatiques, les phĂ©nomĂšnes d’urbanisation (plus de 75% de la population vivra en ville dans les annĂ©es Ă  venir...), il y a de nouvelles attentes et les Smart Cities offrent de nouvelles possibilitĂ©s. Pour assurer une rĂ©elle transition, les dĂ©marches et projets doivent ĂȘtre entrepris Ă  diffĂ©rentes Ă©chelles de pouvoir : locale, provinciale, rĂ©gionale. En pratique, les communes sont intĂ©ressĂ©es par une variĂ©tĂ© de thĂ©matiques (mobilitĂ©, gouvernance, Ă©nergie, bien-ĂȘtre
). Les intercommunales de dĂ©veloppement Ă©conomique (Idelux, Spi, Ideta) jouent aussi un rĂŽle important en tant que rĂ©fĂ©rents opĂ©rationnels de la RĂ©gion ».

Pour nourrir ce dialogue, un matériel de qualité existe comme le Guide Pratique

de la Smart City : une collection pour guider les communes pas Ă  pas vers une gestion plus durable et intelligente de leur territoire. A travers cette notion de collection, l’ambition est de fournir, chaque annĂ©e, un nouveau guide pratique, pour accompagner pas Ă  pas les territoires et alimenter en continu leurs rĂ©flexions. Depuis fin 2022, il existe aussi des carnets didactiques permettant d’approfondir l’un ou l’autre concept abordĂ© dans les guides, mais non dĂ©veloppĂ© de façon dĂ©taillĂ©e. De plus, le Smart City Institute a aussi dĂ©veloppĂ© des modĂšles tels que le Smart Project Management Model et le Smart City Maturity Model pour soutenir les gestionnaires de projets Smart City.

DES EXEMPLES CONCRETS ET DES FINANCEMENTS

Cette dĂ©marche Smart City a un impact concret partout dans le monde dans le quotidien de la population puisqu’elle propose de rĂ©pondre aux dĂ©fis et enjeux auxquels les acteurs publics sont quotidiennement confrontĂ©s : mobilitĂ©, Ă©conomie, environnement, population, gouvernance, urbanisme, qualitĂ© de vie... RĂ©cemment, en novembre dernier, le Smart City Expo de Barce-

lone a d’ailleurs permis de dĂ©couvrir quelques solutions concrĂštes, comme le souligne Sofia Malbec du Service R&I de WBI qui Ă©tait prĂ©sente Ă  Barcelone : « Cette dynamique peut apporter des rĂ©ponses plus rapides aux besoins des citoyens d’amĂ©liorer les services (mobilitĂ©, santĂ©...) par le partage des donnĂ©es, l’optimalisation de la gestion du territoire (gain de temps), la stimulation de l’innovation, la crĂ©ation d’un environnement propice pour attirer de nouveaux talents... tout en diminuant l’impact environnemental ».

La délégation WBI, AWEX, FIT et hub.brussels lors du Smart City Expo de Barcelone en novembre 2022 © WBI
“ Le salon permet Ă©videmment de rencontrer l’écosystĂšme d’autres pays mais aussi d’autres chercheurs et de participer Ă  des confĂ©rences sur des thĂ©matiques nouvelles... ”
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A Barcelone, de nombreuses synergies ont vu le jour : « Beaucoup de participants sont passĂ©s par notre stand organisĂ© par l’Awex. Nous avons participĂ© Ă  ce salon avec les universitĂ©s, qui Ă©taient trĂšs intĂ©ressĂ©es : elles ont des chercheurs en Smart Cities notamment avec l’UNamur, l’UCLouvain et le Smart City Institute de LiĂšge. Le salon permet Ă©videmment de rencontrer l’écosystĂšme d’autres pays mais aussi d’autres chercheurs et de participer Ă  des confĂ©rences sur des thĂ©matiques nouvelles... »

Plusieurs cas concrets ont permis de mieux se rendre compte de l’impact au quotidien pour la population : application pour avoir des villes connectĂ©es, informations pour les communes sur les poubelles ou sur la gestion des feux rouges, rĂ©flexion sur les passages piĂ©tons avec des lumiĂšres (vertes ou rouges) qui s’allument par terre pour les gens qui marchent en regardant leur GSM sans regarder les feux, mais aussi des applications utiles pour la Silver Ă©conomie pour les personnes ĂągĂ©es...

A Barcelone, la question du financement n’est pas oubliĂ©e : « Nous avons

aussi pu approfondir nos connaissances en financements publics et privés de projets de Smart Cities. Il y a aussi des opportunités pour bénéficier de fonds européens pour développer des projets... avec des universités et/ou des entreprises ».

Sofia Malbec Ă©voque quelques projets comme celui « des places de stationnement pour les trottinettes Ă©lectriques. En Wallonie, des acteurs agissent aussi avec des projets pour dĂ©velopper des solutions de parking Ă  la demande, qui mettraient en relation les automobilistes avec des gestionnaires de parkings privĂ©s. Ils travaillent aussi sur un projet qui tendrait Ă  optimiser l’utilisation de l’énergie photoĂ©lectrique produite Ă  domicile pour la rĂ©injecter le soir dans la voiture »

L’IMPACT SUR LE CITOYEN

Les communes ont un rĂŽle majeur dans cette dynamique. Sur le terrain, en 2022, de nombreuses communes se sont investies comme Mons, Walhain, Esneux, Couvin, Heron, Gerpinnes, Ver-

viers, Stoumont, Engis. En 2021, Nassogne, BiÚvre, Wasseiges, Nivelles, Soumagne, Wellin, Chimie, Chaudfontaine avaient déjà franchi le pas.

Mais que pensent le citoyen et les communes de tels projets ? Le dernier baromĂštre du Smart City Institute a permis de prendre le pouls : la Smart City reste aussi toujours principalement associĂ©e Ă  la digitalisation de la commune (84%), Ă  l’amĂ©lioration de la qualitĂ© de vie (63%) et Ă  la participation inclusive des citoyens et des acteurs (60%).

Sur le terrain, les rĂ©sultats du baromĂštre montrent que les dĂ©marches sont toujours majoritairement initiĂ©es au niveau de la commune elle-mĂȘme et, plus prĂ©cisĂ©ment, par ses Ă©lus : Ă©chevins (31%) et bourgmestres (26%). Quant aux domaines d’application des projets, ceux-ci concernent principalement le Smart Environment (thĂ©matique liĂ©e au dĂ©veloppement urbain durable, Ă  l’optimisation Ă©nergĂ©tique, Ă  la gestion des dĂ©chets et des eaux usĂ©es, etc.) et la Smart Governance (thĂ©matique liĂ©e Ă  la participation inclusive de l’ensemble

©
Smart City Institute
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Le Smart City Institute, partenaire de choix en matiÚre de smart cities © Smart City Institute

Audrey Lebas, Chargée de recherche et Coordinatrice des relations et partenariats internationaux au Smart City Institute © 2019 Université de LiÚge

des acteurs du territoire ainsi qu’à la gouvernance). Sans oublier la dimension Smart People (thĂ©matique liĂ©e au systĂšme Ă©ducatif mais Ă©galement aux tĂ©lĂ©communications, Ă  la digitalisation et Ă  l’innovation).

LES SOUCIS EXISTENT

DĂ©velopper un tel projet n’est Ă©videmment pas toujours Ă©vident, comme le montrent les rĂ©sultats de ce baromĂštre. Parmi les obstacles rencontrĂ©s, on retrouve la difficultĂ© Ă  mobiliser les budgets (50%) et celle liĂ©e Ă  l’acquisition de l’expertise nĂ©cessaire Ă  la planification, la rĂ©alisation et le suivi des projets (49%). Sans surprise, lorsqu’on les interroge sur ce qui pourrait les aider Ă  mener Ă  bien leurs projets Smart City, les communes wallonnes mettent en Ă©vidence le besoin d’obtenir davantage de soutien financier de la part de la RĂ©gion wallonne, de l’Europe, etc. (76%), mais aussi de disposer d’outils pour former les membres de l’administration (71%).

DES FORMATIONS PRÉCISES

Une amĂ©lioration de la sensibilisation Ă  cette problĂ©matique est aussi primordiale pour augmenter l’adhĂ©sion Ă  ces projets : des programmes de formations continues sont mis sur pied par le Smart City Institute et sont destinĂ©s aux professionnels issus de tous les secteurs (public, privĂ© ou encore acadĂ©mique...) engagĂ©s dans une rĂ©flexion de transition durable et intelligente ou dĂ©sireux de l’ĂȘtre. ●

A noter, le prochain atelier thématique : 23 mai 2023 : Monitoring & évaluation des démarches Smart City

https://www.smart-city.uliege. be/cms/c_4316710/fr/smartcity

https://www.smart-city.uliege. be/cms/c_4871532/fr/smartcity-formation-continue

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Avec les changements climatiques, les phĂ©nomĂšnes d’urbanisation, il y a de nouvelles attentes et les Smart Cities offrent de nouvelles possibilitĂ©s. ”
INNOVATION
Atelier « Stratégie » au Smart City Institute © Smart City Institute
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Le Smart City Institute propose des ateliers autour du Smart Project Management Model © Smart City Institute
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« SI MON CƒUR EST ÉTROIT, À QUOI ME SERT QUE LE MONDE SOIT SI VASTE ?

Ă©tait un rĂȘve et il s’est rĂ©alisĂ© ! LancĂ© en 2015, le projet de VIA a abouti Ă  l’ouverture de deux implantations fin mars 2016. Il s’agissait de participer Ă  un moment important : la crĂ©ation du premier Bureau francophone d’Accueil pour Primo-Arrivants Ă  Bruxelles ». Tout Ă  son enthousiasme, Vincent Vanhalewyn, le PrĂ©sident, n’oublie toutefois pas ses objectifs « VIA (le chemin en latin) se veut une route, parmi d’autres, qui permette Ă  chacun de se rencontrer, de raconter qui il est, d’apprendre Ă  se connaĂźtre, pour vivre et faire ensemble. Une sociĂ©tĂ© se construit sur la richesse de toutes les personnes qui la composent. Nos villes demain seront de plus en plus multiculturelles. Les nationalitĂ©s se croiseront et les cultures se rencontreront de plus en plus. Notre rĂŽle, c’est de construire des ponts pour dĂ©passer les murs construits ailleurs. Chaque individu devrait pouvoir vivre en harmonie avec et dans le respect de tous ».

VIA n’est Ă©videmment pas le seul BAPA1 de Bruxelles. Il est agréé par la Commission communautaire française et soutenu par les communes de Schaerbeek et de Molenbeek. Pourtant, chaque jour, entre 5 et 10 personnes poussent les portes des deux implantations.

»
Ce proverbe armĂ©nien alimente l’ADN de VIA, l’un des bureaux d’accueil de primo-arrivants de la RĂ©gion Bruxelloise. Avec des actions bien concrĂštes.
«C’
Et une volontĂ© d’aller plus loin.
SOCIÉTÉ
Atelier de Formation Citoyenne chez VIA © Sarah Jean Villanueva
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1. Bureau d’Accueil de Primo-Arrivants

« Il faut savoir que nous n’accueillons que les primo-arrivants de plus de 18 ans qui bĂ©nĂ©ficient d’un titre de sĂ©jour de plus de 3 mois » , prĂ©cise Janaki Decleire , la directrice de VIA . « Ils l’ont obtenu parfois aprĂšs des annĂ©es d’attente dans un centre d’accueil, Fedasil ou autre. Aussi, une de nos premiĂšres missions est de leur rendre confiance en eux et en la vie, celle qui est possible Ă  condition de pouvoir se remobiliser ».

ACCUEILLI DANS SA LANGUE

Sur ces bientĂŽt six annĂ©es de fonctionnement Ă  la tĂȘte d’une Ă©quipe d’une petite quarantaine de professionnels, Mme Decleire se dit ainsi frappĂ©e par l’augmentation des problĂšmes dus Ă  la santĂ© mentale, surtout chez les femmes. « A une situation dĂ©jĂ  prĂ©caire, s’ajoute une problĂ©matique douloureuse issue du regroupement familial », rappelle Mme Decleire. « GĂ©nĂ©ralement, c’est l’homme qui arrive en premier et donc la femme reste trĂšs dĂ©pendante, y compris quand les choses Ă©voluent mal au sein du couple. Nous sommes trĂšs attentifs Ă  cet aspect des choses, si dĂ©licat Ă  faire ressortir et c’est la raison pour laquelle nous faisons un effort particulier pour que la personne soit entendue dans sa langue natale ».

Une diversification originale

Outre ses missions de base, le BAPA VIA Brussels a dĂ©veloppĂ© une sĂ©rie d’initiatives originales.

Citons ainsi le PEPA (Parcours Entrepreneurial pour Primo-Arrivants), lancĂ© en 2019, qui a pour ambition de faciliter les dĂ©marches d’auto crĂ©ation d’emploi ; la Maison d’Immersion (fĂ©vrier 2019) pour rĂ©pondre au besoin de pouvoir pratiquer et entretenir la connaissance du français dans un milieu informel se rapprochant le plus possible du rĂ©el, de leur quotidien ; le projet OUMMI (« maman » en arabe), lancĂ© en dĂ©but d’annĂ©e 2021, est proposĂ© au public fĂ©minin de VIA, afin de renforcer son autonomie ; le projet PERLE (Parents et Ecole pour la RĂ©ussite de Leurs Enfants) qui permet aux parents de mieux comprendre le systĂšme scolaire belge ; « Mon Parcours de Vie » pour offrir Ă  chacun un peu de temps pour soi et la confiance qui va avec ; une « Cellule BĂ©nĂ©volat » qui facilite autant l’accomplissement que le partage des missions.

Sans oublier IncluCities, un projet europĂ©en financĂ© par le fonds AMIF (Fonds Asile Migration et IntĂ©gration) portant sur le partage de bonnes pratiques en matiĂšre d’intĂ©gration des migrants et des rĂ©fugiĂ©s entre huit villes europĂ©ennes, issues de 6 pays diffĂ©rents, dont la Belgique (RĂ©gion de Bruxelles et RĂ©gion Flamande).

http://www.via.brussels/

“
Il faut savoir que nous n’accueillons que les primoarrivants de plus de 18 ans qui bĂ©nĂ©ficient d’un titre de sĂ©jour de plus de 3 mois. ”
Janaki Decleire, Directrice de VIA
© Philippe Vincke
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Accompagnement social chez VIA © Bertrand Vandeloise siasme et professionnalisme ». Et ce ne sont pas que de beaux mots si l’on en juge par les chiffres et les activitĂ©s complĂ©mentaires (voir les encadrĂ©s).

Car, Ă  VIA Brussels, on apprend le français, bien sĂ»r, mais surtout on accueille le bĂ©nĂ©ficiaire dans une langue qu’il comprend. Cela va de l’arabe au peul en passant par l’afar (Ethiopie), l’urdu (Inde, Pakistan), le dari (persan) ou le domari. Une langue propre Ă  l’ethnie Dom, cette population nomade provenant de diffĂ©rents pays du Proche et du Moyen-Orient qui, poussĂ©e par la force des choses et surtout des guerres, a trouvĂ© chez VIA un port d’attache provisoire. « C’est un constat », reconnaĂźt Mme Decleire. « Il y a bien sĂ»r eu la vague ukrainienne mais chez nous, nous avons beaucoup de rĂ©fugiĂ©s qui ont fui la guerre en Syrie, et parfois par des chemins dĂ©tournĂ©s. De toute façon nos valeurs restent toujours les mĂȘmes : respect, Ă©quitĂ©, partage, crĂ©ativitĂ©, enthou-

TRAUMATISME DE L’EXIL

Depuis le 1er juin 2022, le parcours d’intĂ©gration est devenu obligatoire en RĂ©gion Bruxelloise. Si les responsables politiques lui trouvent beaucoup de vertus, dont celle de la fermetĂ© face Ă  une opinion publique balayĂ©e de bruits en sens divers, cela n’a pas beaucoup changĂ© la maniĂšre de travailler des bureaux d’accueil, confrontĂ©s Ă  la rĂ©alitĂ© d’un terrain qui a toujours raison. « Nous n’avons mĂȘme pas encore 5% d’obligĂ©s » admet Mme Decleire. « Cela

ne fera qu’augmenter au cours des prochaines annĂ©es, mais j’ai toujours ce sentiment que d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, nous arrivons trop tard. Ou que nous perdons trop de temps. Ces mois, ces annĂ©es d’attente, d’angoisses, de prĂ©caritĂ©, augmentent le traumatisme de l’exil et finissent par peser lourd dans les tĂȘtes et dans les cƓurs au point d’oublier des droits pourtant Ă©lĂ©mentaires »

D’ailleurs, si un Merlin des temps modernes lui tendait une baguette magique, c’est certainement sur l’augmentation des dispositifs de soutien Ă  la santĂ© mentale, et singuliĂšrement celle des femmes, qu’elle porterait le fer, le plus loin possible, afin de soigner le mal Ă  la racine. « J’ajouterai aussi l’acces-

SOCIÉTÉ
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Des chiffres probants

8.863 parcours depuis 2016

747 modules d’informations Droits et devoirs (10h)

301 formations à la citoyenneté (50h)

919 personnes qui suivent le volet secondaire

2.632 personnes ont terminé le parcours

7.170 personnes ont terminé le volet 1

(Chiffres datant du 01/02/23)

sibilitĂ© Ă  des logements abordables », dĂ©clare la directrice. « La situation Ă  Bruxelles est, Ă  ce sujet, rĂ©ellement problĂ©matique, pour tout le monde d’ailleurs. Donc encore plus pour des primo-arrivants ».

Il faudrait aussi, pour terminer, tordre le cou Ă  certains canards sortant parfois d’eaux assez troubles. L’an dernier, la balance migratoire belge (diffĂ©rence entre immigration et Ă©migration) a Ă©tĂ© d’environ 58.000 personnes. MĂȘme si l’on ajoute les 100 Ă  150.000 clandestins, les fameux sans-papiers que notre pays abriterait, « ces gens-lĂ  » ne seraient que 200.000.

Pour rappel, la Belgique compte 11,5 millions d’habitants. ●

Depuis 2019, VIA gĂšre Ă©galement une Maison d’Immersion © Sarah Jean Villanueva Le Parcours Entrepreneurial pour Primo-Arrivants (PEPA), initiative lancĂ©e en 2019 par VIA © Sarah Jean Villanueva
“ VIA (le chemin en latin) se veut une route, parmi d’autres, qui permette à chacun de se rencontrer, de raconter qui il est, d’apprendre à se connaütre, pour vivre et faire ensemble. ”
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Vincent Vanhalewyn, Président de VIA
© Philippe Vincke

Carton plein pour le Tarmac Comedy au Centre Wallonie-Bruxelles de Kinshasa

Tarmac Comedy, l’émission de stand up qui met en avant des comĂ©diens et artistes issus de la francophonie, a posĂ© ses valises pour la premiĂšre fois Ă  Kinshasa en janvier 2023 pour l’enregistrement de sa nouvelle saison. Un projet soutenu par WBI, en collaboration avec le Centre Wallonie-Bruxelles de Kinshasa. L’enregistrement de cette soirĂ©e s’est dĂ©roulĂ© dans la salle de spectacle du Centre WallonieBruxelles. Une expĂ©rience unique et une performance artistique internationale autour de l’humour qui a rĂ©uni sur scĂšne 17 comĂ©diens et comĂ©diennes, dont des Français, des Belges, des Ivoiriens, des Camerounais et des Congolais. GrĂące Ă  cet Ă©change et aux talents des comĂ©diens, ce tournage a permis de produire 17 vidĂ©os qui sont diffusĂ©es sur les rĂ©seaux de Tarmac. Cerise sur le gĂąteau, cette expĂ©rience sera couronnĂ©e par la sortie d’un documentaire de 26 minutes qui arrivera en juin 2023.

https://www.wbi.be/fr/news/news-item/tarmac-comedy-debarque-au-centre-wallonie-bruxelles-kinshasa

Plan de relance des acteurs culturels de la FWB : 18 mesures actives jusque fin 2023

Suite Ă  la crise sanitaire et Ă  l’initiative de M. Pierre-Yves Jeholet, Ministre-PrĂ©sident de la FWB, le Gouvernement a adoptĂ© un «Plan de relance des acteurs culturels de la FĂ©dĂ©ration Wallonie-Bruxelles via leur diffusion internationale». Son objectif ? Accompagner les acteurs culturels dans la reprise de leurs activitĂ©s et dans la diffusion de leurs crĂ©ations Ă  travers le monde. WBI est chargĂ© de mettre ce plan en Ɠuvre. Pour ce faire, WBI travaille avec ses cinq agences spĂ©cialisĂ©es, Ă  savoir Wallonie-Bruxelles Design et Mode (WBDM), Wallonie-Bruxelles Théùtre et Danse (WBTD), WallonieBruxelles Images (WBImages), Wallonie-Bruxelles Musiques (WBM) et Wallonie-Bruxelles Architectures (WBA). Sur base des conclusions d’une vaste consultation des secteurs artistiques et culturels rĂ©alisĂ©e par WBI et ses agences, diverses mesures ont Ă©tĂ© prĂ©vues. Retrouvez-les sur le site de WBI.

https://www.wbi.be/fr/news/news-item/plan-relance-acteursculturels-fwb-18-mesures-actives-fin-2023

Exposition « MĂšres d’exil - regards d’artistes » Ă  La CitĂ© Miroir (LiĂšge)

Comment traduire l’exil dans l’art ? Et si c’est l’artiste lui-mĂȘme qui vit l’exil ? Comment s’en servir pour raconter la sĂ©paration avec la terre natale, les causes du dĂ©part, les traversĂ©es ? Comment continuer Ă  crĂ©er lorsque l’on est poussĂ© dehors ? L’exposition « MĂšres d’exilregards d’artistes » multiplie les regards posĂ©s sur l’exil, grĂące aux Ɠuvres de trente artistes l’ayant vĂ©cu ou travaillant sur cette thĂ©matique. L’asbl MNEMA, gestionnaire de La CitĂ© Miroir, a sĂ©lectionnĂ© les Ɠuvres en Ă©troite collaboration avec L’atelier des artistes en exil, structure d’accueil pour des artistes confirmĂ©s qui ont dĂ» quitter leur pays. Des Ɠuvres d’artistes de renommĂ©e internationale et d’artistes liĂ©geois viennent Ă©toffer cette exposition multimedium (installations, BD, peintures, vidĂ©os, sculptures, crĂ©ations textiles, photographies...).

Du 28 fĂ©vrier au 28 mai 2023 – du lundi au vendredi de 9h Ă  18h - samedi et dimanche de 10h Ă  18h - fermetures : 10/04 - 1/05 - 18/05 - 19/05

https://www.citemiroir.be/fr/activite/meres-dexil-regards-d-artistes

SURVOLS
©
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WBI

Wallonie-Bruxelles poursuit son engagement pour l’éducation des filles en Afrique avec l’UNESCO

Suite au succĂšs de l’exposition « Portraits d’agents du changements - promoteurs de l’éducation des filles au Nigeria » en octobre 2022 Ă  l’UNESCO, Wallonie-Bruxelles a poursuivi son engagement en montrant l’exposition au siĂšge de WBI Ă  Bruxelles. Pascale Delcomminette, Administratrice gĂ©nĂ©rale de WBI, a accueilli en janvier l’Ambassadeur du Nigeria auprĂšs du Royaume de Belgique, la DĂ©lĂ©guĂ©e permanente du NigĂ©ria auprĂšs de l’UNESCO, la Directrice du Bureau de l’UNESCO Ă  Bruxelles, ainsi que le DĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral adjoint de Wallonie-Bruxelles Ă  l’UNESCO pour le vernissage de l’exposition « Portraits d’agents du changements - promoteurs de l’éducation des filles au Nigeria ». L’exposition, qui prĂ©sente des portraits Ă©mouvants et sources d’inspiration d’acteurs du changement, de membres de la communautĂ© et de filles, raconte l’histoire d’une communautĂ© qui se mobilise pour l’éducation des filles.

La pandĂ©mie a creusĂ© les inĂ©galitĂ©s dans la rĂ©gion de l’Afrique subsaharienne : les filles et les jeunes femmes sont les premiĂšres Ă  quitter l’école, les moins susceptibles d’apprendre Ă  la maison et les derniĂšres Ă  retourner en classe. Pour prĂ©server les progrĂšs accomplis et plaider en faveur de l’éducation des filles, l’UNESCO a dĂ©ployĂ© sa campagne « Les filles au premier plan » dans quatre pays d’Afrique subsaharienne, le BĂ©nin, le Mali, le Nigeria et le SĂ©nĂ©gal, avec le soutien de Wallonie-Bruxelles.

https://www.wbi.be/fr/news/news-item/walloniebruxelles-poursuit-son-engagement-leducation-fillesafrique-lunesco

CASA VALONIA : Wallonie-Bruxelles à Madrid pour un événement de visibilité à 360°

Casa Valonia se tiendra du 25 au 27 avril 2023 Ă  Madrid. C’est un Ă©vĂ©nement Ă  360° unique, organisĂ© par WBI et l’AWEX pour prĂ©senter WallonieBruxelles sous toutes ses facettes, Ă  la fois acadĂ©miques, culturelles, touristiques, gastronomiques, diplomatiques et Ă©conomiques. Cette troisiĂšme Ă©dition madrilĂšne vise Ă  renforcer les liens entre les acteurs du numĂ©rique de Belgique francophone et d’Espagne. Ce secteur de pointe de Wallonie-Bruxelles intĂ©resse particuliĂšrement les Espagnols, grands amateurs de gaming, de life show et de XR (rĂ©alitĂ© Ă©tendue). De son cĂŽtĂ©, l’Espagne est aussi le 2e producteur europĂ©en et le 5e producteur mondial de long mĂ©trages d’animation. Durant trois jours, la FundaciĂłn Carlos de Amberes, l’UniversitĂ© Rey Juan Carlos et l’ESNE (Ecole Universitaire de Design, Innovation et Technologie) accueilleront cet Ă©vĂ©nement de visibilitĂ© pour les acteurs des industries culturelles et crĂ©atives de WallonieBruxelles. Mis sur pied en Espagne en 2019, Casa Valonia a Ă©tĂ© reconduit en 2021 Ă  Madrid et dĂ©ployĂ© en 2022 Ă  Milan. Cette opĂ©ration de visibilitĂ© est dĂ©sormais conçue comme un Ă©vĂ©nement itinĂ©rant, organisĂ© tous les deux ans dans une ville espagnole et amenĂ© Ă  Ă©ventuellement se dĂ©velopper dans d’autres lieux.

https://www.wbi.be/fr/events/event/ casa-valonia-wallonie-bruxellesmadrid-evenement-visibilite-360deg

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Maxime Woitrin, Louise Haxthausen, SEM Hajo Sani, Pascale Delcomminette, SEM Obinna Onowu

L’ UN SENS DE L’ACCUEIL ET DE OUVERTURE aux cultures

DES UNIVERSITES ET HAUTES ECOLES

de haut niveau

Une terre de CREATIVITE RECONNUE

en grand nombre QUALIFIES DES DIPLÔMES

exceptionnelle

UNE QUALITE DE VIE PÔLES DE COMPETITIVITE dans des secteurs-clĂ©s 6

Une recherche centrĂ©e sur l’ INNOVATION

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Revue W+B n°159 by Wallonie-Bruxelles International - Issuu