24 mars >> 19 juin 2O22 un parcours photographique en normandie d a n e m a r k > > e s t o n i e > > fi n l a n d e > > i s l a n d e > > n o r v è g e > > s u è d e
2e édition 2O22-23
www.lumieresnordiques.com
www.abbayedejumieges.fr
umières nordi ues Une exposition présentée par le Département de la Seine-Maritime
Réalisation : Département de la Seine-Maritime / Direction de la Communication et de l’Information / Crédit photo : Joakim Eskildsen, Skagen XIII, 2008 (détail)
huit artistes danois abbaye de jumièges
Les œuvres réunies dans cette exposition sont l’occasion de découvrir une foisonnante création contemporaine au Danemark. La photographie y est ici associée à une riche palette de projets : des œuvres au profil documentaire croisent d’originales aventures plastiques et conceptuelles. La nature occupe une large place : exploration du monde minéral et végétal, contemplation de la lumière. Les artistes engagent une réflexion sur le temps, interrogent leur perception du monde ; ils revisitent l’histoire de la peinture, retouchent numériquement des images ou se réapproprient des procédés anciens, opérant parfois même sans recourir à l’appareil de prises de vue. D’autres supports que le papier et d’autres médiums que la photographie sont impliqués dans leur création. Mais au-delà de cette diversité de démarches, les œuvres viennent tisser des liens avec le lieu qui les accueille (pierres du monument, arbres du parc, lapidaires du logis abbatial), ainsi qu’avec le patrimoine historique et artistique de la Normandie dans laquelle est implanté le site de Jumièges.
The pieces assembled in this exhibition provides an opportunity to discover the abundance of contemporary creativity in Denmark. Photography combines here with a rich palette of artistic projects. Documentary-style images intersect with innovative visual and conceptual ventures. Nature has a prominent role through the exploration of the mineral and botanic worlds and the study of light. The artists address the question of time and their own perception of the world. They re-examine the history of art, digitally retouch images or revert to more traditional processes, sometimes without a camera. Other media than paper and other techniques than photography were used in their creation. Furthermore, beyond the diversity of styles, the works forge bonds with the site surrounding them (the stones of the monument, the trees in the grounds, the very fabric of the abbot’s residence), as well as Normandy’s historical and artistic heritage in which Jumièges Abbey is nestled.
Huit
artistesAbbaye danois de Jumièges 24 mars – 19 juin 2022
Merveilles du Nord
Wonders of the North
Les artistes danois invités par Lumières Nordiques nous présentent des œuvres d’une grande diversité ; ce groupe repousse les limites du médium photographique. Lotte Fløe Christensen examine et déconstruit la façon dont nous donnons sens à nos échanges avec la nature ; Veronika Geiger transforme entre autres des grottes en chambre noire afin de rapprocher la création visuelle de démarches scientifiques ; Emilie Lundstrøm a recours à la technique du cyanotype pour développer une gamme de bleus très expressifs, créant ainsi une atmosphère poétique, comme issue d’un autre monde ; Ebbe Stub Wittrup adopte une démarche extrêmement conceptuelle en retravaillant de vieux clichés pris en montagne pour lestransformer en d’époustouflants paysages. La dimension et la portée de ces œuvres venues du Nord sont très variées. Les masques mortuaires de Torben Eskerod semblent à nos yeux prendre vie d’une étrange façon, et ce grâce à la photographie, tandis que Peter Funch compose des horizons marins en noir et blanc, du nord au sud de l’Europe, et que les portraits de jeunes gens réalisés par Joachim Eskildsen sont empreints de cette lumière si particulière captée par les peintres de Skagen ; quant à Jeppe Lange qui mêle le procédé de l’animation à la vidéo, il donne une autre vie aux tableaux des peintres impressionnistes français.
All artists participating in Lumières Nordiques present works of great diversity, and as a group they push the frontiers of the photographic medium. Lotte Fløe Christensen examines and deconstruct how we make meaning in our interactions with nature; Veronika Geiger equates caves to the darkroom as a way to connect the creation of images with scientific processes; In an expressive manor, Emilie Lundstrøm turns all her work blue using cyanotype techniques, creating a poetic and otherworldly atmosphere; Ebbe Stub Wittrup’s approach is highly conceptual as he recreates old snapshots from Norway, turning them into mind-blowing landscapes. The breadth of the work created by the artists in the exhibition and in the North is diverse. Torben Eskerod’s death masks seem to come alive for the viewer an uncanny way through photography, while Peter Funch composes black and white sea horizons from Northern to Southern Europe, Joachim Eskildsen illuminates portraits of young people with light from Skagen painters, and Jeppe Lange’s manipulations with video and animation brings French impressionist painters alive.
En examinant ces approches très différentes, on peut aisément en conclure que les œuvres réunies ici sont l’expression de la formidable expansion des possibilités techniques de la photographie au cours de ces dernières années. Cela est vrai pour les artistes du Nord comme pour ceux d’autres pays : toutes et tous participent à une exploration globale du médium photographique. La dimension internationale de la création danoise, l’osmose entre les artistes qui la composent et le reste du monde sont caractéristiques de la scène photographique du Danemark. Même si, par certains aspects, leurs œuvres sont dotées d’une touche nordique, les approches et les inspirations ne connaissent aucune frontière. Les artistes réunis dans cette exposition par Lumières Nordiques ont été formés dans différentes écoles d’art en Europe et aux États-Unis et incarnent les différentes orientations de la photographie danoise contemporaine. Cinq d’entre eux ont présenté des expositions personnelles à Galleri Image et pris part à des expositions itinérantes en Europe et en Asie – la série Presumed Reality d’Ebbe Stub Wittrup a même été primée dans le cadre du Lianzhou Foto Festival en Chine. La polyvalence du médium photographique permet tous ces échanges ; de même, les images qui en résultent voyagent très aisément ! Beate Cegielska, directrice de Galleri Image, Aarhus, Danemark
By looking at these vastly different approaches, it can be concluded that the works reflect an immense technical expansion in the possibilities of photography in recent years. This is true for artists in the North as well as internationally, who all take part in a global exploration of contemporary photographic processes. The international orientation and osmotic exchange with a global community is typical for the Danish photography scene. Though there may be aspects of the works that have a Nordic feel, the approaches and inspirations are highly international. All Lumières Nordiques participants are educated in different art academies in Europe and USA and represent different aspects of Danish photography. Five of artists in Lumières Nordiques’ present show had solo exhibitions in Galleri Image and took part in our touring exhibitions in Europe and Asia – Ebbe Stub Wittrup’s Presumed Reality was even awarded a prize at the Lianzhou Foto Festival in China. The versality of the photographic medium has supported this international exchange, as photographic images travel easily! Beate Cegielska, director of Galleri Image, Aarhus, Denmark
Ebbe Stub Wittrup Presumed Reality
Joakim Eskildsen Skagen
Peter Funch Possibilities of the future - Realities from the past
Torben Eskerod Life and Death Masks & Damaged Portraits
Emilie LundstrØm Imprecisions
Lotte FlØe Christensen Isolated (plants) & Approach
Jeppe Lange Depiction of Light
Veronika Geiger Hraun
Lotte Fløe Christensen Isolated (Plants) & Approach, 2011 Lotte Fløe Christensen a développé une production d’images étroitement liée à l’observation d’un monde végétal particulier : l’artiste est en effet partie à la recherche de plantes endémiques qui se développent en pleine nature, sans intervention de l’homme. Et au hasard de ses découvertes, elle a choisi de les photographier in situ, c’est-à-dire sans jamais les déraciner, et opérant uniquement en lumière naturelle. Elle a chaque fois disposé derrière elles un fond de papier blanc : un mode de prise de vue qui se rapproche en fin de compte de celui du portrait, avec comme constante visuelle l’ombre portée de la plante sur la surface du papier. Ce travail à caractère documentaire et prenant la forme d’un inventaire s’inspire d’un célèbre atlas botanique danois dont les premiers relevés qui le composent ont été publiés au XVIIIe siècle, sous le titre « Flora Danica ». Quant au parti pris d’un protocole très dépouillé de prises de vue associé à la neutralité dans la façon d’approcher les plantes et de collecter leurs images, il est guidé par une référence à l’ouvrage Evidence publié en 1977 par les américains Larry Sultan et Mike Mandel. Livre qui fait date dans l’histoire de l’édition photographique et réunit des clichés provenant essentiellement de sources policières : ceux-ci montrent des objets de toute nature et susceptibles de constituer des preuves (evidences) dans le cours d’une enquête. Les photographies que réalise Lotte Fløe Christensen doivent sans doute être regardées au-delà du lien qui les rattache à une simple démarche botanique. Leur sens est ailleurs : elles nourrissent une réflexion plus globale en direction de la nature et que mènent beaucoup d’artistes aujourd’hui, en particulier dans les pays nordiques. « Je pense que la nature est d’une certaine manière liée à quelque chose de signifiant et qu’elle est donc un excellent outil pour parler du sens. »
Lotte Fløe Christensen has developed a body of images intimately associated with a specific kind of botanical realm. This artist went in search of endemic wild plants that grow and thrive without any human influence. She chose to photograph her discoveries as she happened upon them, i.e. in situ, without uprooting them and working only with natural light. In each case, she placed a white paper background behind them: a style of photography that is essentially similar to portraiture, with the shadow cast by the plant as a visual constant. This documentary work takes the form of an inventory inspired by a renowned Danish botanical atlas, first published in the 18th century under the title Flora Danica. The choice of a simplified photographic protocol, combined with the neutral approach to the plants and capturing their images, recalls the book Evidence published in 1977 by the Americans Larry Sultan and Mike Mandel. The book was a milestone in photography publication. It showed pictures of objects of all kinds, collated primarily from police sources, that could constitute evidence in an investigation. However, Lotte Fløe Christensen’s work should be viewed as more than straightforward botanical photography. The significance is more profound: it nourishes a more fundamental consideration of nature that many artists pursue today, particularly in the Nordic countries. « I think that nature is somehow linked to something meaningful and that it is, therefore, an excellent tool to talk about meaning. » Lotte Fløe Christensen Born in 1979 Lives and works in Humlebæk, near Copenhagen https://lottefloe.com
Lotte Fløe Christensen Née en 1979 Vit et travaille à Humlebæk, près de Copenhague https://lottefloe.com I.(P.)#1 et #7, 2011 Extrait de la série Isolated (Plants)
I.(P.)#5, 2011 Extrait de la série Isolated (Plants)
Joakim Eskildsen Skagen, 2008
Toujours comme jamais auparavant
Always like never before
Ces images qui ont été réalisées de nuit et mêlent des portraits à des paysages sont liées par la même lumière bleutée, presque surréaliste, qui enveloppe l’ensemble de la série de Joakim Eskildsen. Une dominante de couleur que l’on retrouve dans des œuvres que l’on doit à plusieurs peintres qui ont séjourné et travaillé à Skagen ; le plus célèbre d’entre eux, Peder Severin Krøyer, a peint dans les années 1890 des toiles marquées par la présence d’un bleu très lyrique. Dans l’une des images d’Eskildsen, un réverbère diffuse une lumière d’un bleu électrique qui a quelque chose de lunaire. Par ailleurs, au cours de son séjour dans la région, le photographe s’est interrogé sur le fait que les peintres de Skagen ne se représentaient pas dans leurs tableaux en compagnie des habitants. En fait, ce n’est qu’en 1892 que Krøyer en a eu l’idée et fait les premières esquisses d’un tableau représentant un feu de joie allumé en été sur la plage (Midsummer’s Eve Bonfire) et qu’il achèvera en 1906 ; une toile réalisée par un autre membre du groupe de Skagen figure également des artistes qui se mêlent à la population de la région. En 2008, Joakim Eskildsen recherche le Skagen dans ce qu’il a de plus vrai, en particulier parmi ses habitants. Et au cours de cette quête, il tombe sur une classe d’élèves fêtant la remise de leur diplôme. Ses photographies ont quelque chose d’onirique, parmi lesquelles cette scène où une jeune femme tourne son regard vers le spectateur : elle semble absente et comme emportée dans un rêve.
Shot at night and blending portraits with landscapes, but nevertheless, the images of Joakim Eskildsen’s series are all characterised by the same bluish, almost surreal light. This predominant colour is found in works by several painters who lived and worked in Skagen. The most famous, Peder Severin Krøyer, painted canvases in the 1890s marked by a very lyrical blue. In one of Eskildsen’s pictures, a street lamp gives off an electric blue light with a lunar quality. During his stay in the region, Joakim Eskildsen also wondered why the Skagen painters did not depict themselves in their pictures with the local people. In fact, it was only in 1892 that Krøyer had the idea and made the first sketches for a painting of a summer bonfire on the beach (Midsummer’s Eve Bonfire), which he completed in 1906. A later painting by another member of the Skagen group also portrays artists mingling with the local population. In 2008, Joakim Eskildsen sought out Skagen at its most authentic, especially in its inhabitants. And in the course of this quest, he came across a class of students celebrating their graduation. His resulting photographs have a dreamlike quality. For example, in the scene where a young woman turns her gaze towards the viewer: she seems absent and immersed in a dream.
D’après un texte de Lisette Vind Ebbesen
Based on a text by Lisette Vind Ebbesen
Skagen I, XIV, XVI, IX, X, V et XIII, 2008
Joachim Eskildsen
Joachim Eskildsen
Né en 1971
Born in 1971
Vit et travaille près de Berlin
Lives and works near Berlin
www.instagram.com/joakimeskildsen/
www.instagram.com/joakimeskildsen/
Représenté par la Galerie Polka, Paris
Represented by the Polka Gallery, Paris
Torben Eskerod
Life and death masks, 2001 Damaged Portraits, 2011
Extrait de la série Life and Death Mask, 2001 Johannes V. Jensen, écrivain
Deux variations sur le registre du portrait auquel Torben Eskerod est particulièrement attaché et qui motive une grande partie de son œuvre, constituent une empreinte originale du temps sur les visages. D’une part, la série Life and Death Masks, reproductions en grand format de moulages en plâtre de figures de personnalités danoises du siècle passé appartenant pour l’essentiel au monde culturel : ces pièces déposées au Musée National d’Histoire, dans le château de Frederiksborg, avaient été réalisées dans les années 1940 par un dentiste à des fins médicales. Une série qui nous renvoie à la tradition des masques mortuaires, mais aussi à celle des musées de cire tels que Grévin à Paris ou Madame Tussauds à Londres. Le masque arrête le temps, et la photographie vient s’y superposer pour donner une autre dimension à la représentation du visage, amplifiant l’ambigüité entre la vie et la mort. L’autre série de portraits, Damaged Portraits, est extraite d’un ensemble de tirages dont la surface a été accidentellement endommagée, alors qu’ils étaient entreposés dans le studio de Torben Eskerod envahi par l’eau, et qu’il a re-photographiés. Le processus qui a attaqué la surface du papier et par conséquent altéré la représentation des visages fait écho ici à l’épreuve du temps que subissent les lapidaires installés dans le logis abbatial. Le grain de la photographie dialogue ainsi avec celui de la matière minérale.
Extrait de la série Life and Death Mask, 2001 Ulla Poulsen Skou, danseuse et actrice
Two variations on the portrait theme, to which Torben Eskerod is particularly attached and which inspire a large body of his work. They present an original view of the passage of time on faces. Firstly, the Life and Death Masks series of large-scale prints of plaster casts of faces, primarily of Danish cultural celebrities of the last century. These are kept at the National History Museum in Frederiksborg Castle and made for clinical purposes by a dentist in the 1940s. They remind us of the death-mask tradition as well as waxwork museums such as the Grévin in Paris or Madame Tussaud’s in London. The mask freezes time, and the superimposed photograph adds another dimension to the face’s depiction, amplifying the ambiguity between life and death. The second series, Damaged Portraits, is drawn from a set of prints damaged by flooding in Torben Eskerod’s studio, and which he subsequently re-photographed. The damage to the paper’s surface and the consequent effect on the appearance of the faces echo the ravages of time on the stonework of the abbot’s residence. The grain of the photograph is thus in a dialogue with that of the mineral matter.
Torben Eskerod
Torben Eskerod
Né en 1960
Born in 1960
Vit et travaille à Copenhague
Lives and works in Copenhagen
www.torbeneskerod.com
www.torbeneskerod.com
Représenté par la galerie Kant, Copenhague
Represented by Kant Gallery, Copenhagen
Damaged portrait, 2011 Extrait de la série Equivalent
Peter Funch
Possibilities of the future Realities from the past, 2019 – 2021
Hirsthals, Danemark, 2020
Ces photographies s’inscrivent dans le contexte d’un projet que Peter Funch a entrepris sur le Mur de l’Atlantique édifié par les Allemands au cours de la Seconde Guerre mondiale afin de guetter les mouvements des troupes alliées et de les empêcher de débarquer sur les côtes de l’Europe. Un projet qui doit emmener le photographe de la Norvège à l’Espagne et s’enrichit, à l’occasion de cette exposition, d’un ensemble de prises de vue réalisées en Normandie. Mais ce n’est pas un inventaire que Peter Funch nous invite à découvrir ; il ne cherche pas à collectionner les bâtiments qui jonchent les côtes, dont beaucoup sont à l’abandon et s’enfoncent peu à peu dans le sol pour ne laisser apparaître parfois que des morceaux de béton. Il ne choisit méticuleusement les blockhaus que pour la justesse de leur emplacement face à la mer, quelle que soit leur architecture, et à l’intérieur desquels il est possible de pénétrer. Ceux où il peut envisager une composition dans laquelle l’horizon marin vient toujours se placer à la même hauteur, un peu comme Hiroshi Sujimoto a conçu sa série de « Seascapes ». C’est d’aboxrd la qualité du point de vue qui le guide. Son travail conjugue les traces de l’histoire (Realities from the past) avec l’expression de l’attente d’un événement dont on ne connaît la nature et qui peut ne jamais survenir (Possibilities of the future), inspiré en cela du roman de Dino Buzzati « Le désert des Tartares ». Mais Peter Funch a également à l’esprit l’ouvrage de Paul Virilio, « Bunker archéologie », qui voit dans ces bâtiments un phénomène récurrent de l’Histoire : l’illusion d’un rempart protecteur.
These photographs are part of Peter Funch’s project on the Atlantic Wall, built by the Germans during the Second World War to keep watch on Allied forces and prevent them from landing on the European coast. The project took the photographer from Norway to Spain. He has included a series of photographs taken in Normandy for this exhibition. But Peter Funch is not providing us with an inventory. He is not seeking to document the buildings that dot the coastline, many abandoned and gradually sinking into the ground, leaving only chunks of concrete behind. Instead, he carefully selected the bunkers for their ideal position facing the sea, whatever their architectural appearance and that it was possible to enter. He chose ones where he could devise a composition where the sea-horizon is always at the same height, rather like Hiroshi Sujimoto’s Seascapes series. It was foremost the quality of the viewpoint that guided him. His work combines the traces of History (Realities from the past) with the expectation of an unknown event’s nature that may never happen (Possibilities of the future). As well as being inspired by Dino Buzzati’s novel The Tartar Desert, Peter Funch also draws on Paul Virilio’s Bunker Archeology, which sees the recurring phenomenon in History of the illusion of a protective rampart in these buildings.
Heuqueville, France, 2021
Peter Funch
Peter Funch
Né en 1974
Born in 1974
Vit et travaille entre Copenhague et Paris
Lives and works between Copenhagen and Paris
www.peterfunch.com
www.peterfunch.com
Représenté par la galerie V 1, Copenhague
Représenté by V 1 Gallery, Copenhagen
Veronika Geiger Hraun, 2016 Ces images totalement abstraites sont l’aboutissement d’une démarche qui croise l’art et la recherche scientifique. L’artiste entraîne le spectateur dans une plongée au sein du monde minéral, en l’occurrence celui des roches volcaniques provenant d’un désert de laves (Holuhraun) situé en Islande. Un travail qui s’opère en étroite collaboration avec des équipes de géologues et les institutions qui abritent leurs recherches. Pour la série Hraun, c’est l’Institut d’Histoire Naturelle de l’Université d’Islande où Veronika Geiger reproduit des coupes microscopiques qui ont été pratiquées dans des roches datant d’époques très éloignées les unes des autres : certaines datent de plusieurs milliers, voire millions d’années, d’autres ont été collectées récemment au cours d’expéditions que l’artiste a pu suivre. Pas de prise de vue photographique : c’est la matière minérale dont elle projette et fixe directement l’image sur une grande surface de papier et qu’elle fait parler. Dès ses premiers travaux d’ailleurs, Veronika Geiger a mené des projets d’immersion dans la nature sans recourir à l’appareil de prises de vue mais en exploitant la chimie et les papiers photographiques ; un peu comme Man Ray, dans une autre dimension, avec ses photogrammes. Ce lien étroit qu’elle entretient avec la matière des paysages se conjugue avec son intérêt pour le land art qui est né lors d’un séjour aux États-Unis et de la découverte du désert du Nouveau Mexique. Ainsi, au-delà de la portée scientifique du message visuel, l’agrandissement des échantillons de roches déplace le projet vers le registre plastique. Et le noir et blanc contribue à détacher un peu plus l’image de la réalité du monde que l’artiste explore.
Conglomerate diptych, 2021
These entirely abstract images result from an exploration of combining art and scientific research. This artist takes the viewer into the mineral realm, specifically the volcanic rock from a lava desert in Holuhraun, Iceland. The work was undertaken in close co-operation with geologists and their parent institutions. At the Institute of Natural History at the University of Iceland, Veronika Geiger recorded microscopic sections of rocks dating from a wide range of periods for the Hraun series. Some of the rock is thousands or even millions of years old, while others were recently discovered during expeditions that the artist accompanied. She doesn’t photograph them, the rock matter is projected and recorded directly onto a large-format paper surface, and she lets it speak for itself. In her early work, Veronika Geiger carried out projects involving immersion in nature without a camera but rather chemistry and photographic paper, a little like Man Ray, in another dimension with his photograms. This close relationship with the very matter of landscapes combines with her interest in land art, born during a stay in the United States, where she discovered the New Mexico desert. Besides the scientific significance, the magnification of the rock samples moves the project into the visual art realm. Moreover, being in black and white contributes to detaching the image from the reality of the world that Veronika Geiger explores in her work.
Veronika Geiger
Veronika Geiger
Née en 1987
Born in 1987
Vit et travaille à Aarhus
Lives and works in Aarhus
https://veronikageiger.com
https://veronikageiger.com
Hraun, n°6285, 2016
Jeppe Lange Depiction of light, 2022
Dans cette œuvre, des centaines de tableaux impressionnistes se dissolvent pour créer un film d’animation aux effets hypnotiques. L’œuvre regarde le monde comme des motifs constitués de couleurs pures et de coups de pinceau. La meilleure façon de décrire le processus auquel j’ai recours est de dire que je « tamise » la peinture à travers différents filtres de couleur, fragmentant ainsi les motifs jusqu’à les traiter individuellement. Ces fragments sont superposés, de la même manière qu’un tableau est constitué de plusieurs couches de peinture, mais dans mon travail, les couches proviennent de tableaux différents. Depiction of Light (Peinture de la lumière) poursuit ainsi le mouvement initié par les peintres impressionnistes à la fin du XIXe siècle. Le culte qu’ils vouent au regard subjectif et aux qualités de la lumière est amplifié à un point tel que le sujet se transcende en couleurs et en gestes purs. La vidéo oscille entre des plans tactiles abstraits et des aperçus dynamiques de motifs reconnaissables (branches d’arbre, nuages, soleil). L’expérience est de l’ordre de l’hallucination, rappelant les éclaboussures de couleur qui peuvent apparaître dans l’œil interne lorsque l’on se lève trop rapidement, mais aussi dans le processus de développement d’un film couleur analogique. Je m’intéresse au regard pur, non pas dans le sens d’un regard objectif, mais comme un regard qui ne voit que la lumière et ne la lit jamais autrement que comme de la lumière. Une perception détachée de tout processus cognitif – à l’instar d’une langue qui serait abordée comme un ensemble de sons sans signification. Cette idée m’est inspirée par l’histoire de Virgil Adamson, dont la cécité a été guérie à l’âge de 50 ans et qui voit alors le monde pour la première fois : « Au premier instant, je n’avais aucune idée de ce que je voyais. Il y avait de la lumière, il y avait du mouvement, il y avait des couleurs, mais tout était mélangé, sans signification, flou. » Jeppe Lange
In this work, hundreds of Impressionist paintings dissolve into hypnotic animated films. The work treats the world as patterns of pure colour and brush strokes. The best way to describe the process I use is ‘sifting’ the paint through different colour filters, fragmenting the patterns down to individual pieces. These fragments are then layered in the same way that a painting comprises several layers of paint. Yet, in my work, the layers come from different paintings. As such, Depiction of Light follows the movement begun by the Impressionist painters of the late 19th century. Their devotion to subjective gaze and qualities of light intensified to the extent that the subject transcended into pure colour and gesture. The video moves between abstract tactile shots and dynamic glimpses of recognisable patterns (tree branches, clouds, the Sun). The experience is hallucinatory, reminiscent of the colour spatters that can appear in the inner eye when one stands up too quickly or when developing analogue colour film. The video oscillates between abstract tactile views and dynamic flashes of recognisable patterns (tree branches, clouds, Sun). I am interested in the pure gaze, not in the sense of an objective gaze, but one that only sees the light and never interprets it as anything other than light. A perception detached from any cognitive process - like language heard as a bunch of meaningless sounds. The idea was inspired by the story of Virgil Adamson, whose blindness was cured at the age of 50 and then saw the world for the first time: «At first I had no idea what I was seeing. There was light, there was movement, there were colours, but it was all jumbled, senseless, unclear.» Jeppe Lange
Video stills, extraits du film Depiction of Light, 2022, 5’30
Jeppe Lange
Jeppe Lange
Né en 1987 Vit et travaille à Copenhague
Born 1987Lives and works in Copenhagen
www.jeppelange.dk
www.jeppelange.dk
Emilie Lundstrøm Imprecisions, 2018 – 2021
Dans cette série intitulée Imprecisions, Emilie Lundstrøm a recours au cyanotype, procédé ancien de tirage photographique mis au point au milieu du XIXe siècle : il permet d’obtenir des épreuves monochromes (bleu cyan) mais aussi de jouer avec les incertitudes liées à ce type de production d’images. Le hasard fait ici partie intégrante du geste artistique. Chaque épreuve est donc unique : à partir d’un même négatif et de son tirage par contact, la longue exposition à la lumière naturelle ne produit jamais exactement le même résultat ; ces variations dans la fixation de l’image pouvant être accentuées, comme c’est le cas ici, par la façon dont est appliquée la solution photosensible sur la surface du papier et de la pierre. En effet, les sujets qui figurent dans cette exposition, paysages et autoportraits, sont déclinés sur des supports différents ; et les pierres de provenances et textures diverses instaurent ainsi un dialogue avec l’environnement minéral du logis abbatial et de l’abbaye, soulignant combien les images sont indissociables du matériau sur lequel elles sont imprimées. Emilie Lundstrøm utilise le cyanotype « avec, dit-elle, l’intention de contourner la précision technique de la photographie : les imprécisions de ce processus analogique particulier (à la fois voulues et accidentelles) introduisent des éléments à caractère pictural, dénaturent des formes qui nous sont familières et exigent de considérer un monde que l’on aurait pu tout à fait ignorer. Dans ses « Principes de psychologie », William James cite le scientifique Hermann von Helmholtz : « Si nous souhaitons maintenir notre attention sur un seul et même objet, nous devons constamment chercher à découvrir quelque chose de nouveau à son sujet, surtout si d’autres impressions puissantes nous attirent ailleurs. »
In the series entitled Imprecisions, Emilie Lundstrøm uses cyanotype, an old photographic printing process developed in the mid-19th century. It enables her to create monochrome prints in cyan blue and play with the inherent imprecisions in this method of image production. Here, randomness becomes an integral part of the artistic process. Each print is therefore unique, with the same result never obtained from the same negative and contact print being exposed to natural light over a long period. These variations in how the images fix can be further accentuated, as is the case here, by how the photosensitive solution is applied to the paper or stone’s surface. The exhibition’s themes of landscape and self-portrait are, in fact, depicted on different media. The stones of different origins and textures create a dialogue with the material surroundings of the abbot’s residence and the abbey, emphasising the extent to which the images are inseparable from the material on which they are printed. Emilie Lundstrøm uses the cyanotype « With,» she says, « the intention of circumventing the technical precision of photography: the inaccuracies of this particular analogical process (both intended and unintended) introduce elements of a pictorial nature, distorting forms that are familiar to us and requiring us to consider a world that we might otherwise have ignored. In his Principles of Psychology, William James quoted the scientist Hermann von Helmholtz: «If we wish to keep our attention on one and the same object, we must constantly seek to discover something new about it, especially if other powerful impressions draw us elsewhere. »
Heather Hill, Vejby, Danemark, 2020 Cyanotype sur papier fine art
Emilie Lundstrøm Née en 1985 Vit et travaille entre Copenhague et Gilleleje www.emilielundstrom.com
Emilie Lundstrøm Born 1985 Lives and works between Copenhagen and Gilleleje www.emilielundstrom.com
The view II, 2020 Cyanotype sur calcaire dur
The view, Copenhague, 2019 Cyanotype sur papier fine art
Ebbe Stub Wittrup Presumed Reality, 2007 – 2013
La série photographique Presumed Reality entreprise en 2007, s’inscrit dans le contexte d’une vision romantique de la nature, plus précisément celui de la contemplation du paysage. Une boîte de diapositives que l’artiste a découverte dans un marché aux puces et contenant des images d’excursions en montagne, en Norvège et en Suisse, constitue le point de départ de cette œuvre conceptuelle. Ces photographies dont l’auteur est inconnu, mais semble-t-il expérimenté, et que l’on peut situer entre la fin des années 1940 et le début des années 1950, montrent des groupes d’alpinistes organisés et motivés, qui évoluent au milieu du paysage, souvent encordés. Les couleurs sont délavées et leur patine laissent aussitôt entrevoir que les situations photographiées appartiennent à un passé lointain. Mais l’artiste utilise ces documents sans exprimer aucune forme de nostalgie ; au contraire, le matériel qu’il a trouvé est transformé en de nouvelles images. Grâce au traitement numérique, il estompe les détails ou leur donne une plus grande netteté. Il joue avec les couleurs, les formes, la lumière et l’ombre sans se soucier de ce qui est représenté. L’artiste apparaît comme un observateur ironique qui remodèle et réinvente la réalité représentée par les diapositives d’origine. Les photographies de l’ascension d’un sommet ou d’une pause entre deux mouvements du groupe deviennent des peintures presque abstraites : les contours des personnes au premier plan s’estompent et celles-ci se réduisent parfois à de simples ombres, alors que le paysage montagneux de l’arrière-plan devient plus net. Ce qui était réel ne peut plus être que deviné – « réalité présumée ». Ebbe Stub Wittrup pose ainsi, à travers ce travail, une question essentielle qui l’habite, celle de notre perception du monde.
The photographic series Presumed Reality was begun in 2007 and is framed in a romantic vision of nature, more specifically the contemplation of the landscape. The starting point for this conceptual work was a box of slides containing images of mountaineering in Norway and Switzerland the artist found at a flea market. The photos’ seemingly experienced author is unknown but can be placed in the late 1940s or early 1950s. They show groups of organised, enthusiastic climbers, often roped up, moving through the landscape. The colours are faded, and their patina immediately evokes that the situations photographed belong to a distant past. But the artist uses these documents without any expression of nostalgia; on the contrary, the raw material he found has been transformed into new images. Using digital processing, he blurs the details or gives them greater sharpness. He plays with colour, form, light and shadow with no thought to what is shown. The artist appears as an ironic observer who reshapes and reinvents the reality of the original slides. The shots of a summit’s ascent or a break in the group’s progression transform into near-abstract paintings. The outlines of people in the foreground blur, sometimes reduced to mere shadows, whereas the mountainous background becomes sharper. Now, what was real can only be guessed ‘a presumed reality’. In this way, Ebbe Stub Wittrup raises an underlying question in his work: our perception of the world. Kirchner Museum Davos, 2013
Kirchner Museum Davos, 2013
Ebbe Stub Wittrup
Ebbe Stub Wittrup
Né en 1973
Born in 1973
Vit et travaille à Copenhague
Lives and works in Copenhagen
https://ebbestubwittrup.net
https://ebbestubwittrup.net
Représenté par la galerie Martin Asbæk, Copenhague
Represented by Martin Asbæk Gallery, Copenhagen
Presumed Reality #5, 2007-2013
Presumed Reality #1, 2007-2013 Presumed Reality #10, 2007-2013
Un parcours photographique en Normandie
Fécamp
Logis Abbatial, abbaye de Jumièges Saint-Pierre-de-Varengeville Rouen Jumièges
> 24 mars - 19 juin 2022 Huit artistes danois.
Centre d’art contemporain de la Matmut, Saint-Pierre-de-Varengeville > 22 octobre 2022 - 12 février 2023 Photographies et vidéos de l’artiste estonienne Anna Lehespalu réalisées en Islande.
Bibliothèque Alexis de Tocqueville, Caen > 24 mars - 21 mai 2023 Niki Lindroth von Bahr, réalisatrice suédoise de films d’animation. Projet mené en association avec l’Institut Suédois à Paris qui accueillera une préfiguration de cette exposition à l’automne 2022.
Caen
Musée des Beaux-Arts, Rouen > 14 avril - 13 août 2023 Terje Abusdal. Ole Marius Joergensen et Marie Sjovold, dans le cadre d’une série d’expositions sur le thème des Normands.
Les Pêcheries, Musée de Fécamp > Automne 2023 Les paysages de la finlandaise Tiina Itkonen.
Tiina Itkonen, Dawn, Savissivik, 2012 Les Pêcheries, Musée de Fécamp
Anna Lehespalu, Islande, 2021 Centre d’art contemporain de la Matmut
A photographic journey in Normandy Jumièges Abbey
> From March 24 to June 19 2022 Eight Danish Artists
Centre d’art contemporain de la Matmut, Saint-Pierre-de-Varengeville > From 22 October 2022 to 12 February 2023 Photographs and videos by the Estonian artist Anna Lehespalu made in Iceland
Bibliothèque Alexis de Tocqueville, Caen Anna Lehespalu, Islande, 2021
Marie Sjøvold, Cadillac 1954, 2016 Musée des Beaux-Arts, Rouen
> From 24 March to 21 May 2023 Niki Lindroth von Bahr, Swedish animation film director. Project carried out in association with the Swedish Institute in Paris, which will host a prefiguration of this exhibition in the autumn of 2022
Musée des Beaux-Arts, Rouen
Niki Lindroth von Bahr, The Burden (film d’animation), 2017 Bibliothèque Alexis de Tocqueville, Caen
> From 14 April to 13 August 2023 Three Norwegian photographers, Terje Abusdal. Ole Marius Joergensen et Marie Sjøvold, as part of a series of exhibitions on the theme of the Normans
Les Pêcheries Musée de Fécamp > Autumn 2023 Landscapes by the Finnish artist Tiina Itkonen
L’exposition Huit artistes danois est réalisée par Lumières Nordiques pour le Département de la Seine-Maritime. Elle est placée sous le haut patronage de l’ambassade Royale de Danemark.
www.lumieresnordiques.com
The exhibition Eight Danish Artists is curated by Lumières Nordiques for the Département de la Seine Maritime. It is placed under the hight patronage of the Royal Embassy of Denmark. Un catalogue de l’exposition est disponible en version numérique. A catalogue of the exhibition is available in a digital version.
www.8artistesdanois.com
Textes et conception éditoriale : Gabriel Bauret Design graphique et photogravure: Benoît Eliot Traduction : Tim Hinam © Pour les textes : Gabriel Bauret, Beate Cegielska, Jeppe Lange, Lisette Vind Ebbesen © Pour les œuvres : Lotte FlØe Christensen, Torben Eskerod, Joakim Eskildsen, Peter Funch, Veronika Geiger, Jeppe Lange, Emilie LundstrØm, Ebbe Stub Wittrup © Édition Octopus - 76350 Oissel-sur-Seine ISBN : 978-2-900314-31-9 - Impression : Iropa
Remerciements Chantal Bauret, Pierre Bouho, Caroline Calpéna, Beate Cegieslka, Sarah Chevalier, François Georges, Philippe Jean, Klaus Ib JØrgensen, Benjamin Lesobre, Mikaël Lesueur, Véronique Mange, Sonja Martinson Uppman, Gitte Neergård Delcourt, Catherine Philippot, Sandra Prédine-Ballerie, Jeanne Taconet ainsi que l’agence Observatoire. Couverture/Cover : Joakim Eskildsen, Skagen XIII, 2008 (détail)