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Diane von Fürtsenberg
DIANE VON FÜRSTENBERG
L’IMPÉRATRICE DU STYLE
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Elle a créé une robe culte que toutes les femmes ont dans leur dressing. Elle a lancé une marque éponyme respectée de tous. Elle a été une des muses d’Andy Warhol. Elle a fait la une de revues prestigieuses comme Newsweek. Elle est considérée comme l’une des femmes les plus influentes de la mode et elle a habillé des icônes telles que Michelle Obama ou Kate Middleton. « Je vais sur mes 75 ans, mais, avec tout ce que j’ai vécu, je devrais en avoir 150 », glisset-elle avec humour. Créatrice à la réputation internationale, femme d’affaires, princesse, (grand-) mère et philanthrope à ses heures perdues : il nous faudrait 7 vies au moins pour égaler celle de la grande Diane von Fürstenberg.
MOTS : LAURA SWYSEN © Roger Prigent
Vous avez toujours dit que vous étiez devenue la femme que vous vouliez être à 28 ans. Cette vision a-t-elle évolué ? Quelle femme voulez-vous être
aujourd’hui ? Quand j’étais petite, on me demandait tout le temps ce que je voulais faire. Je n’en avais aucune idée, mais je savais quelle femme je voulais être. Effectivement, je suis devenue cette femme, et même plus encore, à l’âge de 28 ans. Je voulais être une femme « in charge », qui s’assume pleinement. J’avais deux enfants, j’avais du succès, je venais d’acheter la maison à la campagne où je me trouve en ce moment même. J’étais une femme libérée. Est-ce que je suis toujours cette femme-là ? J’ai vieilli et j’ai appris énormément de choses car j’ai toujours mené une vie très intense. Mais cette femme de 28 ans qui passait sa vie dans les avions et portait des talons aiguilles est toujours en moi. C’est la femme à qui je parle tous les jours, celle que j’habille. Vous savez, je n’ai jamais voulu être une fille, je voulais être une femme.
Votre maman occupe une grande place dans votre biographie. Que vous a-t-elle légué de plus précieux ?
Ma mère est sortie d’Auschwitz en juin 1945, elle pesait 32 kilos. Ses parents devaient la nourrir toutes les 10 minutes, comme un oisillon. Six mois plus tard, elle avait retrouvé une corpulence presque normale. Son fiancé est revenu de Suisse et ils se sont mariés. Son médecin lui a dit qu’elle devrait attendre trois ans avant d’avoir des enfants, car elle risquait de ne pas y survivre et d’avoir un enfant qui ne serait pas « normal ». Neuf mois plus tard, j’étais là. Heureusement, c’est une chose dont on ne me parlait pas beaucoup, mais je réalise aujourd’hui que je suis une survivante. « Dieu m’a sauvée afin que je puisse te donner la vie. En te donnant la vie, tu m’as rendu la mienne. Tu es mon flambeau de liberté », me disait-elle. Elle m’a transmis ce flambeau qui pouvait être fort lourd pour une petite fille, mais moi, je l’ai bien pris. Elle ne m’a jamais permis de me plaindre, d’avoir peur ou d’être une victime. Si j’avais peur du noir, elle m’enfermait dans un placard pour apprendre à gérer mes émotions. Elle m’a toujours poussée à faire tout ce que je souhaitais, à prendre mes responsabilités et à être totalement moi-même.
D’après vous, qu’est-ce qui explique le succès de votre
robe signature, la fameuse wrap dress ? Honnêtement, je ne sais pas. Jamais de ma vie, je n’aurais imaginé vendre des dizaines de millions de robes portefeuille. Quand j’ai commencé, les autres designers me dévisageaient. Ils se disaient : « c’est quoi cette petite robe idiote ? ». Elle était peut-être idiote, ma robe en jersey, mais lorsqu’une femme l’enfilait, elle se sentait pleine de confiance. D’ailleurs, ce sont souvent les jeunes femmes qui craquent dessus...
Alors que vous avez une réputation internationale, j’ai lu que vous aviez mis du temps à vous considérer
comme une « vraie créatrice ». Pourquoi ? Car je n’ai pas étudié la mode. C’est un hasard si j’ai atterri dans ce secteur. La mode m’intéressait un petit peu. Pour mon premier job, j’ai travaillé pour Albert Koski. Il était agent de photographes et j’étais son assistante. Ensuite, j’ai rencontré Angelo Ferretti, un industriel italien qui m’a proposé de découvrir les coulisses de la mode et de me rendre dans son usine d’impression. Jamais de ma vie je n’aurais imaginé que cet endroit serait ma porte. J’ai appris un tas de choses là-bas.
On dit que l’on ne regrette que les choses que nous
n’avons pas faites. Avez-vous des regrets ? Je suis entièrement d’accord avec cette expression ! J’ai toujours fait ce que je voulais. Bien sûr, il faut parfois faire des compromis, mais j’ai eu une vie très remplie. C’est la raison pour laquelle je ne peux absolument pas mentir sur mon âge : je vais avoir 75 ans, mais je devrais en avoir 150.
Vous êtes une femme indépendante qui a toujours été « au volant de sa propre vie ». Quel est votre secret ?
Toutes les clés sont dans mon dernier livre Own it (rires). L’essentiel est d’accepter la personne que l’on est. Pour ce faire, il faut comprendre que la relation la plus importante, c’est celle que l’on a avec soi-même. Il est aussi essentiel de ne jamais se mentir, car on ne peut pas s’aimer pleinement si on ne s’accepte pas entièrement. En assumant vos défauts, vous transformez vos vulnérabilités en force.
Votre petite-fille, Talita, s’intéresse à la mode et a lancé une collection capsule il y a quelques années. Pensez-
vous qu’elle sera la digne héritière de l’empire DvF ? Je l’espère ! Elle a toujours voulu reprendre le flambeau et elle termine ses études à l’université en septembre prochain. J’espère que l’on pourra travailler ensemble.
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