B i b l i o t h è q u e d ’a g g l o m é r a t i o n d e S a i n t - O m e r
Les incunables
et leur mise en valeur dans le Catalogue
Régional des Incunables conservés en France volume IX
La bibliothèque d’agglomération conserve 206 incunables, imprimés par près d’une centaine d’imprimeurs des Pays-Bas, de la vallée du Rhin, de l’Italie du Nord et de France. Récemment, ces livres ont fait l’objet d’un récolement par l’équipe patrimoniale à partir des notices préliminaires du Catalogue régional des Incunables conservés en France, en vue de la finalisation du neuvième volume cette collection consacré à la Région Nord-Pas-de-Calais.
Les incunables sont les livres imprimés avec des caractères mobiles en métal par une presse. Le mot « incunable » vient du latin incunabulum, qui signifie « au berceau ». On a longtemps fait remonter ce terme à 1640 sous la plume de Bernhard von Mallinckrodt, mais il est apparu en fait dès 1563 dans un texte d’Hadrianus Junius publiée de manière posthume en 1588. Les livres sont imprimés dans 150 villes européennes. À l’époque, la France est le troisième pays producteur d’incunables après l’Allemagne et l’Italie. La majorité des éditions françaises sont en latin, et seulement 30% sont imprimés en langue vernaculaire (français). La date du 31 décembre 1500 clôt arbitrairement cette période éditoriale. Mais on parle éventuellement de post-incunables pour les deux première décennies du XVIe siècle.
Au moyen-âge, la transmission des connaissances s’effectue au travers des copies manuscrites. Dans un premier temps, les écritoires – les scriptoria – des monastères remplissent cet office. Mais l’évolution progressive de la société nécessite davantage de copies, et donc d’ateliers d’écriture. Les universités génèrent également un accroissement de la production de livres. De nouvelles structures se développent alors : les libraires – des clercs puis des laïcs ayant les connaissances pour lire et traduire le latin – prospèrent. Mais rapidement, ils n’y suffiront plus.
Au XVe siècle, les libraires expérimentent diverses techniques et tentent de reproduire les textes et les images mécaniquement. La xylogravure – gravure sur bois – connait un certain succès. Les images pieuses collées aux manteaux des cheminées, aux fonds des coffres ou encore aux têtes de lit, que l’on voit parfois rep r o d u i t e s d a n s l e s tableaux des primitifs flamands en témoignent. Mais la xylogravure ne peut reproduire de livres entiers : il faudrait une planche de bois gravée par page ! Les libraires testent alors d’autres procédés.
Saint-Omer, BASO, Inc. 5 : Placard (affiche) figurant l’Ecce Homo, probablement imprimé à paris vers 1510-1520, atelier de Wolfgang Hopyl ou Gillet Couteau (?).
Ainsi, à Haarlem dans les Pays-Bas espagnols, Laurent de Coster (1370-1440) aurait gravé au couteau les premiers caractères typographiques dans un hêtre. Et à Strasbourg, l’imprimeur Johanne Mentelin (1410-1478) aurait également taillé dans le bois des caractères mobiles troués qu’il enfilait sur une ficelle… En fait, l'imprimerie avec des caractères mobiles en pâte de terre cuite a été inventée par un certain 畢昇 Bi Sheng (990-1051) au milieu du XIe siècle. Ces techniques chinoises d'imprimerie avec des caractères mobiles se sont rapidement répandues en Corée avec Choe Yun-ui (1102-1162) qui invente les caractère métalliques et au Japon. cf. J. Poitou Mais elles ne sont développées en Occident qu’au milieu du XVe siècle par Johann Gutenberg.
métallographique (matrice dans laquelle on coule le métal en fusion) qu’utilisent les graveurs, les orfèvres et les fondeurs. Il est d’ailleurs entré en apprentissage d’orfèvrerie à Strasbourg. Exilé pour des raisons politiques, Gutenberg retourne à Strasbourg où il débute ses travaux sur l’imprimerie. Johannes Gensfleisch Gensfleisch, dit Gutenberg est probablement né vers 1400 et décédé en 1468 à Mayence, dans le Saint Empire Romain germanique. Il est issu d’un milieu d’orfèvres et connait donc la technique
Gracié en 1438, il rentre à Mayence et contracte un emprunt de 800 florins auprès de Johann Fust, lequel lui fera signer un contrat et exigera en hypothèque – outre des intérêts l’engagement de sa presse et de ses outils.
Entre 1450 et 1454, Gutenberg sur papier italien plus économique, tel peaufine la production des caractères en celui de l’Ancien Testament conservé à métal (alliage de plomb, fer, étain et la bibliothèque d’agglomération. antimoine), et teste la presse à bras et l’encre en imprimant de petits documents : poèmes, grammaire latine de Donat, lettres d’indulgence. Une fois la technique définitivement mise au point, Gutenberg et ses associés Pierre Schoeffer et Johann Fust, i mpriment les premiers exemplaires du texte de la Bible selon la Vulgate de Saint Jérôme. Ils en produisent environ 180 exemplaires. Les premiers sont des versions de luxe imprimées sur parchemin et enluminés, mais la majorité des volumes sont imprimés Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, par une Société de gens de lettres. Mis en ordre et publié par M. Diderot, et, quant à la partie mathématique, par M. d'Alembert
Le livre imprimé du XVe siècle s’inspire directement des manuscrits, qui conservent un certain prestige. C’est ainsi que les lettres italiques furent commandées par l’imprimeur vénitien Alde Manuce à son typographe Griffo, afin d’imiter au mieux l’écriture manuscrite des humanistes. Tous les formats sont représentés : de l’in-folio à l’in-octavo . Le texte est dense et généralement disposé sur deux colonnes. Ainsi, le texte de la Bible se présente-til aussi sur deux colonnes, en police de caractères textura reproduisant l’écriture gothique couramment employée pour les textes liturgiques. Les abréviations y sont nombreuses.
Pour en savoir plus voir l’article : Les Incunables : livres imprimés au XVe siècle Par Nicolas Petit
Pierre de Crescens, Le livre des ruraulx prouffitz,
Une table des chapitres est intégrée de manière plus systématique. À la fin du XVe siècle, la page de titre s’impose. Le recto est laissé vierge et le texte commence par incipit (ici commence en latin) et finit par explicit (ici finit). L’explicit est parfois suivi d’un colophon (achèvement en grec) qui précise l’auteur, le titre, les nom, date et lieu d’édition.
Paris : Jean Bonhomme, 15 octobre 1486 (Saint-Omer, BASO, inc. 69)
La présentation du livre va lentement évoluer. Les lettres gothiques sont remplacées par les lettres romaines ou les caractères dits bâtards.
L’imprimeur peut également apposer sa marque en tête ou fin de volume. Cet élément est alors informatif et publicitaire.
L’intérêt pour les « premiers monuments de la typographie » remonte à la seconde moitié du XVIIIe siècle.
qui eut un grand retentissement et donna, dans tous les pays, aux études typographiques, une impulsion irrésistible. Le catalogue des incunables du British Museum est le fruit direct de Depuis on a cherché à identifier ces ces travaux et la consécration immédiate de ces méthodes »*. éditions dans les fonds. Les premiers recensements d’incunables sont allemands. Ludwig C’est aussi en Angleterre, en 1980, que Hein publie son Repero trium s’est mis en place l’Incunabula Short bibliographicum en 1828, avec Walter Title Catalog des notices très abrégées Arthur Copinger et Dietrich Reichling. mais qui donne un numéro d’identité à chaque édition qui permet aux chercheurs de s’y référer de manière Les anglais suivent avec l’index de certaine. Cette base internationale Robert Proctor : « Ce savant instaura recense 30350 éditions en 2014. une technique encore inconnue [Classement par pays, par villes, puis *L.-N. Malclès. Les Sources du travail bibliographique , I-40par ateliers dans l’ordre chronologique] 41.
En France c’est Marie Pellechet qui régionaux (CRI). La campagne de s’attèle au Catalogue général des rédaction de ces catalogues est lancée en incunables des bibliothèques de France. 1979 par la Direction du Livre et de la Elle commence à en publier des Lecture : le 1er CRI réalisé fut celui de volumes dès les années 1870, mais elle Champagne-Ardenne par Jean-Marie ne pourra achever son travail qui Arnoult. s’arrête à Gregorius. La guerre va Tous les incunables conservés dans des interrompre le projet, et le grand collections publiques ou privées sont libraire Hans P. Krauss récupère les concernés, quel que soit le statut de fiches et les emmène aux USA d’où elle l’établissement, à condition que l’accès ne reviendront jamais. Il s’en est très a u x c o l l e c t i o n s s o i t p o s s i b l e . certainement servit pour constituer son « Inventory and Reference Library » En 2012, près de la moitié des CRI a été mit en vente par Sotheby’s en 2003. réalisée. Leur conversion rétrospective est en cours d’étude par le Service du C’est donc à partir du catalogue de M. Livre et de la Lecture (SLL) et le Pellechet que l’on va reprendre le Centre d’Etudes Supérieur de la Recatalogage des incunables conservés en naissance de Tours et devrait être France sous la forme des catalogues effective en 2014.
Le Nord-Pas-de-Calais est une région A la fin des années 90, Pierre Aquilon a très riche en incunables (env. 1500 repris le travail fait par F. Barbier et a exemplaires), dont la plupart sont restés complété les notices selon les nouveaux d a n s l e u r s l i e u x d ’ o r i g i n e . standards de description. En janvier 2012, le SLL, en accord avec C’est dans ce cadre que le CRI IX a été la DRAC NPDC, a décidé de relancer entamé et bien avancé dans les années un chantier en y associant les 80 par Frédéric Barbier alors r e s p o n s a b l e s d e s b i b l i o t h è q u e conservateur à la BM de Valenciennes. concernées en région, avec la Le travail a été commencé à une collaboration de P. Aquilon, et en époque où les standards de description confiant la mission de coordination au (Short title catalogue) étaient moins Centre Régional du Livre Nord-Pas-de détaillés qu’aujourd’hui, notamment en -Calais qui en a chargé Marie-Claude c e q u i c o n c e r n e l e s d o n n é e s Pasquet. d ’ e x e m p l a i r e s . Les objectifs : remise à niveau des Un fascicule préliminaire, décrivant les notices du CRI IX et valorisation des collections d'Arras, de Bergues, de Lille et de Valenciennes, a été publié par fonds d’incunables. La publication par les Editions Droz est prévue pour 2014. l’ABF en 1982.
Les bibliothèques concernées sont les suivantes :
BM Arras BM Avesnes/Helpe Bibliothèque ancienne Bergues BM Boulogne/Mer BM Bourbourg BM Calais BM Cambrai Arch. Diocésaines Cambrai BM Douai Bibliothèque historique Hesdin BM Lille BU Lille Faculté catholique Lille BM Roubaix BA Saint Omer BM Valenciennes AM Valenciennes Abbaye St Paul de Wisques
Exemple de contenu de notice du CRI IX HOLKOT (Robertus). H-52. Super sapientiam Salomonis. – [Paris : Georg Wolf], 21 X 1489. – 4°. HC 8759. Pell 6035. Pol 1978. IGI 4791. Goff H‑290. BS 2834. BMC VIII 144. Arnoult 806. BN H 168. Pr 8127. Also recorded as: [Johannes Higman] Proctor and Polain assigned to Higman . Saint-Omer, Bibliothèque d’Agglomération, n° 32 – Prov. [f. a.i.] ex-libris ms gratté “Collegii Angl. [...] Sti Audomari Bibl.” (XVIIe s.). – Ment. Nombreuses notes mss. marginales concentrées sur les premiers feuillets (XVIe-XVIIe s.) ; [f. a.i.] ancienne cote “A. 4. 40”. – Rubr. Grandes initiales rouge, petites initiales rouges, pieds de mouche, soulignements et bouts-de-lignes rouges. – Rel. Ais couverts de veau brun portant un décor de filets et de fers à froid un fermoir central et une contre-agrafe ; dos à 4 nerfs (XVe-XVIe s.). dos à nerfs refait en au XVIIe s. La garde contrecolée inf. fragment d’un des Miracles de Notre Dame de Gautier de Coincy aparetenant à ceux édités par J. Ulrich, « Drei Wunder Gautier von Coincy », ZrP 6 (1882) 325346 (XIVe s.).
Plusieurs incunables conservés à la bibliothèque d’agglomération de Saint-Omer ont été numérisés et peuvent être consultés en ligne : -La Bible à 42 lignes de Gutenberg.
-Le Roman de la Rose. -Le propriétaire des choses .
Présentation réalisée par la section patrimoniale de la bibliothèque d’agglomération de Saint-Omer. Retrouvez l’actualité de la bibliothèque sur notre site. Consultez notre bibliothèque numérique. Ne manquez aucun de nos évènements on nous suivant sur notre page Facebook.
Bibliothèque d’agglomération de Saint-Omer – octobre 2013