VIDÉO EN POCHE
Mékong Stories
Film de Phan Dang Di |Vietnamien Sortie : 2016 | durée : 1h42
moiteur de la forêt, entre la violence des bagarres et la sensualité des corps qui se touchent. La pauvreté et la débrouille rythment un quotidien où chacun essaie de subsister. La politique nataliste cherche à maîtriser le flot des naissances et paie les pères de famille qui acceptent de se faire stériliser. Certains jeunes se privent de la possibilité d’être père et se font opérer contre quelques billets pour rembourser une dette, se payer le luxe d’un téléphone portable… D’autres se prostituent. L’avenir est incertain et n’offre aucune perspective d’évolution. Dans ce monde qui change, les traditions restent encore profondément ancrées : la presse est bridée, la femme n’a pas sa place à table avec les hommes et l’homosexualité est considérée comme une dérive. La photo réussit à magnifier cet univers fait de bric et de broc. La chaleur et l’humidité traversent l’écran et nous plongent dans les eaux sombres du Mékong. La caméra frôle les corps et filme de façon presque onirique les scènes d’amour. Tranche de vie d’une jeunesse en dérive, Mékong Stories déroule ses images avec la langueur des eaux qui coulent dans le fleuve.
Saïgon des années 2000 : trois jeunes cherchent leur place dans un monde en pleine révolution. Vu le jeune photographe, Thang le petit trafiquant et Van la danseuse évoluent dans un quartier de baraques faites de tôles ondulées et de bouts de bois, qui semble flotter Nouveau dans notre catalogue* sur les bords du Mékong. L’alcool et la drogue enjolivent artificiellement ce quotidien dans •This is my Land de Tamara Erde •La Mécanique des flux de Nathalie Loubeyre lequel ils tentent de faire aboutir leurs rêves. •Upstream Color de Shane Carruth Le film oscille entre l’âpreté de la ville et la •Tikkoun de Avishai Sivan *La bibliothèque des Studio dispose du catalogue Vidéo en poche, qui vous propose un choix de films trop rares sur les écrans (fictions, documentaires, films d’animation). Le principe : contre 5 euros, vous repartez avec le film sur votre clé USB - liste des films disponibles : www.videoenpoche.info, ou à l’accueil de la bibliothèque. Le cinéma à lire | n°38 juin-juillet-août 2018 2 rue des Ursulines, 37000 Tours | http://biblistudio.wordpress.com
www.facebook.com/pages/Bibliotheque-des-Cinemas-Studio/800082016707230
[ N°38 | JUIN -JUILLET-AOÛT 2018 ] UNE PUBLICATION DE LA BIBLIOTHÈQUE DES STUDIO
LA VIE DE LA BIB Sans Canal Fixe Encore une saison cinématographique qui s’achève, une saison en France, faite d’images venues des quatre coins de la planète. Quels souvenirs en garderons-nous ? Le premier contact avec le film, ce moment où, bien calés dans notre fauteuil, nous attendons l’apparition des premières images sur l’écran ? Ces images qui nous font voyager, réfléchir, nous indigner et rire aussi. Ces images qui reviennent parfois sur les heures sombres de notre histoire… À l’heure du bilan, resterat-il cette année un film si fort qu’il a fait la razzia sur tous vos sentiments, un film si prenant qu’à la fin, c’est tout le monde debout, les mains claquant des applaudissements nourris ? On oubliera vite les films qui n’ont pas tenu leurs promesses mais pour autant on ne rendra pas la monnaie de leur pièce aux réalisateurs
qui nous ont déçus. Puisque nous avons le sens de la fête, nous préparons déjà pour vous une journée spéciale à la rentrée avec découverte du fonds documentaire de la bibliothèque et animations. On vous sort le grand jeu alors prenez de quoi noter et ajoutez la journée des Studio à la date du 15 septembre dans vos agendas. En attendant, passez de bonnes vacances, lisez, voyez des films et revenez nous voir, curieux des événements qui jalonneront cette nouvelle saison.
passez de bonnes vacances, lisez, voyez des films
Pourquoi ces italiques ? Devinez...
DANS NOS RAYONNAGES
RENCONTRE
Lam Lê dans nos murs Lors de la dernière rencontre de la saison à la bibliothèque, nous avons eu le privilège de nous faire expliquer le storyboard par celui qui a introduit cette technique en France dans les années 80 : Lam Lê, réalisateur et scénariste. Sa formation en mathématiques et aux beauxarts lui donne une vision à la fois technique et artistique du cinéma, savoirs très complémentaires dans ce travail en amont d’un film. Le storyboard est comme une bande dessinée qui découpe le film scène par scène pour en préparer le tournage, il permet de définir les séquences à filmer et leur mise en scène, d’organiser le travail des chefs d’équipe (son, lumière), de prévoir la construction et l’emplacement des décors, le positionnement des acteurs, les mouvements de caméra… Lang, Welles, Hitchcock, Ray s’appuyaient déjà sur cette technique pour préparer leurs tournages. Le « storyboarder » n’est pas un simple dessinateur, c’est un vrai collaborateur qui fait des propositions au réalisateur et définit un style. Sur Garde à vue (Claude Miller, 1981) ses idées ont modifié l’approche du film, « Je m’ennuyais en travaillant sur le storyboard. Si je m’ennuie, il en sera de même pour le spectateur. » nous raconte-t-il. C’est pourquoi il a ouvert ce film, écrit à l’origine comme un huis clos, en créant un commissariat complet avec
ses va-et-vient, en mettant des fenêtres pour voir les lumières de la ville en arrière-plan… Il nous montre les planches qu’il a dessinées pour ce film ainsi que celles de son propre film Poussière d’empire (1983). Le travail de Lam Lê est de grande qualité picturale, chaque dessin est en lui-même une création artistique. Nous découvrons que sans son intervention Microcosmos (documentaire animalier, 1996) n’aurait jamais vu le jour. La succession des scènes ne permet pas de raconter une histoire et Jacques Perrin, producteur du projet, fait appel à Lam Lê pour sauver le film. Il va réorganiser les séquences déjà tournées et par le biais de son travail mettre en lumière celles qui manquent à la cohérence du sujet. Elles seront réalisées selon ses directives et le film rencontrera le succès qu’on lui connaît. Si le storyboard n’est pas utile à tous les films (pour certains réalisateurs il y a une grande part d’improvisation sur le plateau), il permet toutefois d’organiser son tournage en gagnant du temps car un plateau de tournage est un vaste champ de bataille bien plus facile à gérer si l’on sait à l’avance qui fera quoi. Il permet également à l’équipe du film de rencontrer les producteurs avec un projet abouti et concret pour obtenir des financements. Envie d’en savoir plus ? Plusieurs ouvrages sont à votre disposition à la bibliothèque pour prolonger votre intérêt sur le sujet.
Les Ailes du cinéma
Les Ailes du Cinéma est un ouvrage qui relate la longue histoire commune du cinéma et du monde de l’aviation, couvrant une période allant des maquettes bourdonnant autour de King Kong perché tout en haut de l’Empire State Building aux Boeing et F-14 des années 2000. Sous la plume de Philippe Durant, romancier, historien de cinéma et passionné depuis longtemps par l’aérien, ça décolle, ça virevolte, ça s’écrase. Du grand spectacle sur 240 pages extrêmement documentées et richement illustrées, rapportant notamment des statistiques sur les événements réels et complétées de commentaires précieux des spécialistes en trucages et acrobaties aériennes. Sont convoquées bien évidemment les scènes mythiques : Cary Grant dans La Mort aux trousses traqué dans un champ de maïs par un Stearman PT 17, Robert Redford planant sur la savane dans les vues d’une majestueuse beauté de Out of Africa, mais aussi Hélène Boucher, pionnière de l’aviation célébrée dans Horizons sans fin. Et nous sommes entraînés à leur suite dans l’évocation fascinante de films, certains restés célèbres, d’autres tombés dans l’anonymat, heureux de redécouvrir Les Merveilleux fous volants, La Kermesse des aigles, L’Homme de Rio, L’Étoffe des héros, Normandy Niemen, La Ronde de l’aube, Correspondant 17, Y a-t-il un pilote dans l’avion ? ... Les épopées de guerre telles que Pearl
Harbour, Apocalypse Now, Le Jour le plus long combleront les férus d’histoire avec nombre de détails précis sur les combats menés. Les amateurs d’anecdotes inédites apprendront que James Stewart consacra en 1932 ses premiers salaires à l’achat d’un Stinson 105 et envisagea de devenir pilote professionnel mais le cinéma l’accapara, que Cecil B. DeMille ne fut pas seulement le roi d’Hollywood mais pilote dans l’US Service, qu’il fonda la Mercury Aviation Company destinée à fournir du matériel aérien aux jeunes studios de cinéma. Star de Nimitz, retour vers l’enfer, Kirk Douglas profite de son passage sur le célèbre porte-avions pour prendre les airs à bord d’un F-14, il contera cet “exploit” dans ses mémoires. Bons Baisers de Russie marque l’arrivée en force des hélicoptères qui ne tarderont d’ailleurs pas à figurer en première ligne parmi les « éléments distinctifs » de 007, et comme le souligne Philippe Durant « un film de Bond sans hélico c’est comme une comédie sans orchestre ». Son superbe ouvrage est illustré de 600 photos glacées de films ou de tournages, parmi lesquelles, une symbolise le mariage du cinéma et de l’aérien : JP Belmondo, debout sur un avion dans L’Animal. « J’étais dévoré par la peur. Quand je suis sorti en plein vol, ça a été incroyable, j’ai découvert un monde étrange, mélange de silence et de bruit. C’était pour moi la réalisation de tout un rêve d’enfant ». Cote : 791.435 DUR