Le quar tier ther mal de Vittel 1884 -1914
I n flu e n c e d e l’h ygié n isme su r le s amé nag ements urbai ns e t la c o n c e ptio n d e s vill as .
Camille RODRIGUEZ Mémoire de fin d’études Master Architecture, Histoire et Patrimoine / Ss la dir. de : Hélène VACHER / sept 2012 Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Nancy.
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S O M M A I R E
I/ Vittel thermale, l’oeuvre de la famille Bouloumié.
1) L’acquistion de la source de Gérémoy, 1854. 2) Le développement de la station. a) Le renouvellement constant des équipements de la cure. b) La mise en societé : création de la Societé des Eaux Minérales de Vittel. 3) La rencontre avec Charles Garnier. a) L’établissement thermal de 1883. b) Le plan d’ensemble de 1884 et la constitution de la propriété. Synthèse : De la station thermale à la ville d’eau.
II/ Le quartier thermal de Vittel : une scéngraphie urbaine au service de la cure. 1) Le Parc Madelon, 1890-1914. a/ Les architectes. b/ Le modèle de la ville régulière. c/ La place des médecins dans la cure.
2) Le lotissement Bouloumié ou ensemble des villas du Golf, 1909. a/ Les architectes et le contexte de la commande. b/ Une tentative de lotissement paysager sur le modèle du close anglais. 3)La politique hygiéniste de Vittel. a/ Les médecins : une vision négative de la ville. b/ Une politique d’hygiène qui s’étend à toute la ville. c/ Une politique d’hygiène qui pénètre jusque dans les intérieurs des villas. Synthèse : La cité-jardin comme idéal.
III/ Villas thermales ou l’application des principes hygiénistes à l’échelle domestique. 1) La villa hygiénique modèle. a/ La villa hygiénique modèle d’Arcachon. b/ Le type idéal de la maison aseptique. 2) Les villas thermales de Vittel. a/ Les villas du parc Madelon, 1890-1914. b/ Les villas du Golf d’Emile André et Gaston Munier, 1909. c/ Les villas jumelles pour 2 médecins, d’A. Colin, 1912. c/ Les villas Garnier. 3) Le courant hygiéniste : prémices de la modernité. a/ L’utilisation du verre b/ Transparences. Synthèse : Les principes de la villa hygiénique modèle. prémices de la modernité.
RESUMÉ BIBLIOGRAPHIE Remerciements ANNEXES
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«Sous l’impulsion du Docteur Pierre Bouloumié, médecin de la station et fervent hygiéniste, les villas sont disposées en «cité-jardin», non mitoyennes et entourées de verdure.»1
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Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, ed du Moniteur, 1982.
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Introduction L’hygiène est l’ensemble des principes et des pratiques tendant à préserver, à améliorer la santé. Dans toutes les civilisations, il existe des pratiques d’hygiène corporelle et alimentaire. Elle correspond à la prise de conscience de la notion de vie en collectivité et de solidarité. Les grecs et les romains furent les premiers à entreprendre des travaux urbains de grande ampleur (latrines, aqueducs, égouts, bains publics, ...) Au XVIIIe-XIXe siècle, les grandes découvertes scientifiques en physique, en chimie et en physiologie fondent alors les bases de l’hygiène moderne de notre civilisation. C’est une science du comportement dont l’objet est l’entretien de la santé. L’hygiène correspond à une nouvelle attention faite au corps et aux rapports avec notre environnement. Avec elle, se développe petit à petit une nouvelle démarche dans le domaine médical : l’idée de la prévention. «Mieux vaut prévenir que guérir...» Elle ne vise pas seulement l’individu mais concerne la vie publique et notamment les conditions de vie dans les villes où il y a une population de masse. L’hygiène est ainsi devenue progressivement un véritable projet politique et urbain, fondé sur la médecine. Comment l’hygénisme a influencé les aménagements urbains du quartier thermal de Vittel et la conception des villas qui le composent ? À travers ce mémoire, nous avons voulu interroger et approfondir cette notion d’un hygiènisme thermal : il semble jouer un rôle précurseur à la fin du XIXe siècle. Il correspond aux prémices des transformations que va subir le logement au tournant du siècle. La volonté hygièniste est-elle plus exacerbée dans l’habitat thermal que dans tout autre ville ? L’urbanisme thermale pose aussi la question sous-jacente de la création des villes nouvelles, aménagées, créées de toute pièce à partir de ces territoires que Bernard Toulier1 appelle «territoires du vide», que les hommes ont d’abord fuit avant de réussir à les apprivoiser : fronts de mer, terres marécageuses ... Nous ne voulons pas nous contenter d’un simple inventaire des différents styles qui caractérisent les villas thermales vitelloises. Nous essayerons de comprendre les conceptions de la ville et de l’habitat qui se jouent dans le milieu thermal.
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Bernard TOULIER, Architecture et urbanisme, Villégiature des bords de mer, XVIIIe-XXe siècle, éditions du patrimoine, nov 2010.
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Pourquoi concentrer notre étude sur la ville de Vittel ? Les conditions ‘‘exceptionnelles’’ de sa génèse dans l’histoire de la création des villes d’eaux en font un objet d’étude à part entière. Vittel est la ville de la famille Bouloumié. Trois générations différentes s’y sont succédées, avec le même rêve et le même projet en tête : faire de Vittel une ville d’eau de renommée internationale. Comme le souligne l’historien Jérôme Penez1 : «la domination de la famille Bouloumié perdurera bien au-delà de la première guerre mondiale, sans aucune remise en cause. Les exemples évoqués ( Louis Bouloumié ou Auguste Badoit) sont des destins toutefois exceptionnels dans le thermalisme. Pendant la première partie du XIXe siècle, la majorité des propriétaires de sources se contente de gérer sans grande ambition les griffons.»
Des architectes ont contribué à l’essor et à la renommée de la station et de la ville d’eau, comme le célèbre Charles Garnier, ou encore les nancéiens Emile André et Fernand César. Certaines villas font l’objet d’une incription à l’inventaire des Monuments Historiques et contribuent donc à l’histoire et au patrimoine de la Cité Thermale. Les villas thermales, qui n’ont pas subit de grandes transformations depuis leur édification, constituent des ensembles facilement identifiables et remarquables du tissu urbain de la ville. La station et le quartier qui s’est constitués autour constituent un univers à part de Vittel, qui semble avoir ses propres règles.
1 Jérôme PENEZ, Les réseaux d’investissements dans le thermalisme au XIXe siècle en France, In situ n°4, mis en ligne le 1 mars 2004. http://www.insitu.revues.org/1665
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On rappelera d’abord les éléments indispensables à connaître, concernant le développement de la station thermale de Vittel depuis ses débuts jusqu’à l’arrivée de Charles Garnier vers 1883. Une deuxième partie analysera la relation entre l’activité thermale et les aménagements urbains autour du parc thermal où se trouvent les équipements dédiés à la cure et les lotissements de villas qui se développent autour. La dernière partie s’intéressera à l’architecture domestique des villas, et interrogera plus précisément la relation entre les idées hygiénistes véhiculées par le thermalisme et la conception des habitations.
Nous nous intéresserons à : •
villa Nino (1886), construite par l’architecte Charles Garnier pour son fils Christian avec son extension la villa Minima, réalisée en 1905, • villa Saint-Pierre (1893) - ancienne villa Debrousse - par Ch. Garnier pour le Dr Pierre Bouloumié, • ensemble des villas du parc Ma(g)delon, 1890-1914, selon le plan d’ensemble de Charles Garnier,1884. • lotissement Bouloumié (1906-1907) dit ensemble des villas du Golf par Emile André et Gaston Munier, inachevé, poursuivi par Fernand César à partir de 1921.
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Le quartier thermal de Vittel Plan de situation des édifices étudiés1
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Légende
1. Thermes (comprenant l’édifice de Garnier de 1884) 2. Villa St Pierre, 1893. 3. Villa Nino, 1886 et son extension la villa Minima, 1905. 4. Entrée du parc thermal. 5. Villa double dite villa pour 2 médécins, de A.Colin, 1912. 6. Parc Madelon. 7. Gare SNCF. 8. Villas du Golf d’E.André, projet de 1909.
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fond de plan : cadastre 2012 disponible sur www.géoportail.com
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Généalogie simplifiée des principaux membres de la famille Bouloumié impliqués dans la station thermale de Vittel.1
Louis BOULOUMIÉ (Rodez,1812-1869)
Ambroise BOULOUMIÉ (1843-1903)
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Jean BOULOUMIÉ (1878-1952)
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voir fiches biographiques en annexes
Pierre BOULOUMIÉ (1884-1929)
I/ Vittel thermale, l’oeuvre des Bouloumié. Vittel thermale, c’est le rêve commencé en 1854 par Louis Bouloumié avec l’achat d’un pré en périphérie de Vittel où jaillit une source d’eau minérale. Sa descendance a poursuivi ce rêve au gré des rencontres, des opportunités et des moyens. Ce rappel historique s’inspire dans les grandes lignes de l’ouvrage de Marie-Hélène Contal1 sur la création de la ville thermale qu’est devenue Vittel.
1) L’acquisition de la source de Gérémoy, 1854.
A
u milieu du XIXe siècle, Louis Bouloumié (1812-1869), un avocat de Rodez, connaît quelques déboires politiques pour ses idées républicaines opposées au bonapartisme. Il fut rayé du barreau et placé sous régime de «haute surveillance de police» à Contrexéville. Mais avant tout, Louis Bouloumié a soif d’entreprendre. Il découvre une source d’eau minérale réputée diurétique dans le village de Vittel située à quelques kilomètres de là et en 1854, il achète au cultivateur Charles Rifflard un vaste champ de 81 hectares où se trouve cette fameuse source. Louis Bouloumié a de vastes projets pour ce petit village agricole de la plaine vosgienne : développer le thermalisme local déjà en place à Contrexéville et faire de Vittel une station thermale de grande renommée. 1
Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, ed du Moniteur, 1982.
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16 Vittel en 1884.
Le tracé de la voie ferrée départage la station du village.1 Séparés par le ruisseau «Le petit Vair», les territoires du Grand Ban et du Petit Ban sont regroupés autour de leur église respective.
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Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, ed du Moniteur, 1982.
2) Le développement de la station. a/ Le renouvellement constant des équipements de la cure. Un premier édicule en bois est construit pour les bains et douches pour accueillir les premiers malades. Ce sont les besoins de la cure qui vont dicter les lois d’édification : l’établissement des bains pour recevoir les soins, un casino pour occuper et distraire le curiste, un parc paysager pour le grand air et s’y promener... Une des caratctéristiques de l’architecture thermale est de se renouveller à chaque saison pour répondre aux besoins de la cure (modernisation des installations, rénovations pour suivre les effets de mode...) et ainsi attirer toujours plus de visiteurs. Louis Bouloumié a un projet d’ensemble dont les premiers bâtiments ne sont qu’une esquisse. Dans ce but, tous les travaux entrepris doivent tendre vers la recherche de pittoresque, d’agrément et d’hygiène.1 Paradoxalement, les édifices au service de la cure doivent être capables de s’adapter et de se moderniser s’ils veulent subsister. Les thermes de Charles Garnier n’échapperont pas à la règle et subiront le même sort que l’établissement de bains réalisé en bois au début de la station avec Louis Bouloumié. Pour asseoir sa renommée, les vertus médicales des eaux minérales ne suffisent pas. D’autant plus que cette branche de la médecine est encore balbutiante. Le milieu dans lequel les malades seront accueillis compte tout autant, voire plus. Le traitement médical ne fait pas seulement partie de la cure. La distraction et le dépaysement sont tout aussi importants. Il faut occuper les curistes quand ils ne recoivent pas les soins et quand ils ne boivent pas l’eau aux vertus thérapeutiques. Nous pouvons trouver des description des journées des curistes dans certains ouvrages ou guides. Le déroulement des journées des buveurs d’eau sont des plus surprenantes, voire surréalistes. Le buveur d’eau est quasi livré à lui même en dehors de sa consommation ritualisée. Une cure durant 21 jours, il est du devoir de la station d’occuper le curiste, de le distraire, de faire que son séjour soit des plus agréables ... et de le loger. Ainsi, il y reviendra et il en parlera à son entourage. Ce processus de renouvellement qui semble être une caractéristique de l’architecture thermale est moins présent dans les quartiers résidentiels qui bordent le parc. Nous essayerons d’analyser cela plus tard dans la seconde partie.
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Affiche publicitaire
(source : Lise GRENIER (ss la dir. de), Villes d’eaux en France,1985.)
1 Dr Pierre BOULOUMIÉ, Histoire de Vittel, Création d’une ville thermale, Des origines (1851) à 1924, Mirecourt : Imprimerie de la Plaine des Vosges, 1924, réédition de 1982.
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b/ La mise en societé : Création de la Societé des Eaux Minérales de Vittel. Le XIXe siècle connait de grands bouleversements, avec la Révolution Industrielle, tant au niveau social qu’économique. La création de la Société des Eaux Minérales de Vittel témoigne de l’industrialisation de l’activité du thermalisme au XIXe siècle. En effet, Louis Bouloumié a d’abord investi dans l’exploitation de la source d’eau minérale grâce à ses fonds personnels. C’est quelques années plus tard seulement qu’il a fait appel à des investisseurs privés - M. Jules Evrard, banquier des Vosges, - M. Koechlin-Schwartz, manufacturien et maire du 8e arrondissement de Paris, - M. Henri de Tricornot, maître de forge. «C’est seulement vers 1880 que Louis Bouloumié se résout à créer une société d’actionnaires, la «Société de Vittel», au capital de 1,7 millions de francs. Il conserve la tête de l’entreprise et s’associe avec d’autres actionnaires (...) qui sont un mélange d’investisseurs locaux et parisiens, faisant tous partie des relations personnelles de la famille Bouloumié.»1
Tout comme Auguste Badoit, Louis Bouloumié a connu un destin exceptionnel et rare dans l’histoire très diverse de la création des stations thermales françaises. C’est une autre raison pour laquelle Vittel se distingue des autres stations comme Vichy ou Plombières où l’Etat s’est investi dans la gestion de l’exploitation des sources. Cela permet aux Bouloumié de gérer leurs investissements et les bénéfices engendrés. En somme, cela permet de gérer l’exploitation des sources minérales - l’usine d’embouteillage et les activités liées à la cure - comme une grande industrie. Cela aura des conséquences sur la façon de gérer la ville thermale. La majorité des propriétaires d’exploitation d’eau minérale qui ne sont pas gérées par l’Etat se contente de gérer sans grande ambition les griffons, réduisant au minimum les investissements.
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1 Jérôme PENEZ, Les réseaux d’investissements dans le thermalisme au XIXe siècle en France, In situ n°4, mis en ligne le 1 mars 2004. http://www.insitu.revues.org/1665
L’établissement thermal en 1886, réalisé par Charles Garnier. (à droite se trouve les appartements de fonction et l’admnisitration) (source : Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, 1982)
Etablissement thermal de Charles Garnier
(source : M.-H. Contal, Vittel, création d’une ville thermale, 1854-1936, 1982)
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Atrium
Pavillon des sources Galerie Promenoire
3) La rencontre avec Charles Garnier.
Charles GARNIER (1825-1898) voir fiche biographique en annexe
Charles Garnier (1825-1898) est l’architecte de l’Empire. Il connait une certaine renommée grâce au concours de l’Opéra de Paris (1861-1874), appartenant au vaste projet de modernisation de l’Empire et de sa capitale à travers les travaux du baron Haussmann. Charles Garnier est aussi une personnalité atypique dans le milieu intellectuel de l’art. Habitué de la station vitelloise, Charles Garnier rencontrera Ambroise Bouloumié, successeur de son père à la tête de la Société des Eaux et promoteur de la station. Ambroise est un avocat et grand admirateur de Napoléon à la différence de son père.1 Charles Garnier, attentif aux besoins de la petite station en plein essor, va être choisi pour devenir l’architecte officiel de la station thermale de Vittel. Il rénovera l’établissement des bains en reprenant le principe de base du bâtiment primitif de Louis Bouloumié avec sa galerie ouverte sur le parc à l’avant et les cabines de bains à l’arrière. Ces choix et ses influences se répercuteront jusque dans la conception de certaines villas, qu’il réalisera également pour Vittel et ses promoteurs.
a/ L’établissement thermal de 1883. Pour situer architecturalement cette station parmi les villes d’eaux françaises, il convient d’abord de constater que la plupart d’entre elles ont fait preuve d’une volonté d’éclectisme et de monumentalité dans la seconde moitié du XIXe siecle et que Vittel ne s’est pas écarté de la tendance générale.2 Les nombreux voyages de Charles Garnier dans les pays méditerrranéens auront une grande influence dans le décor mauresque, comme on le verra dans une seconde partie plus en détails. Mais les thermes font partie d’un plan d’ensemble élaboré en 1884. Ce plan pose les grandes lignes de développement de la station. L’orientation donné par Ambroise Bouloumié est de «faire une station à l’anglaise, luxueuse et verdoyante.»3
1 Jean Paul ROTHIOT (textes réunis par), Des sources au thermalisme, Vittel - Contrexéville, actes des Journées d’études vosgiennes, Contrexéville, Vittel, 27 et 28 octobre 2001. 2 AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174 3 Dr Pierre BOULOUMIÉ , Histoire de Vittel.
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Plan de l’établissement de Vittel, 1884, réalisé par Charles Garnier.1
Avenue Bouloumié
Liaison avec la ville et la gare.
Parc Madelon
Gare
Casino PARC THERMAL
Hôtel de l’Établissement
Thermes
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Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, op. cit
b/ Le plan d’ensemble de 1884 et la constitution de la propriété. On y voit l’ébauche du parc Madelon pour la première fois, sous la forme d’un parc rectangulaire, sur la route menant de la gare au parc thermal. On voit le tracé de 2 axes orthogonales qui le sépare en 4 zones égales, soit l’idée d’une trame orthogonale, régulière. Charles Garnier conçoit la ville de cure comme un seul et vaste programme. 1 La ville thermale est un vaste parc paysager dans lequel sont posés les différents bâtiments avec leur programme bien défini : les thermes, la galerie promenoire avec les sources pour les buveurs, le casino, les édicules du parc, les hôtels, les villas pour les médecins et les différentes fonctions administratives. Même les Bouloumié logeront dans le parc ou ses abords dans de grandes villas. Plusieurs années vont être nécessaires à la constitution de la proprieté et à l’acquisition de tous les terrains entre la voie de chemin de fer et le parc thermal. En effet, la proprieté de la Société des Eaux est en fait la réunion de 713 parcelles, soit 329 actes notariés (un seul acte peut regrouper plusieurs achats). Il y a une véritable planification urbaine autour de la source acquise en 1854 par Louis Bouloumié. «Le projet urbain amorcé en 1882-83 peut se poursuivre grâce toujours à une politique foncière très volontariste. Ce tableau montre toute la patience, toute la persévérance qu’il a fallu déployer pour constituer l’assiette foncière nécessaire au développement du domaine, efforts qui se sont heurtés successivement à la réticence des paysans locaux attachés à leur terres, puis devant le succés grandissant de la station, au prix des terres qui, dans la période considérée, quintuplent.»2
Etat des acquisitions entre 1854 et 1923 Périodes 1854-1861 1862-1882 1883-1914 1915-1923 Total
1 2
Nombre d’acquisitions 36 26 192 75 329
Contenances (hectares) 8 9 110 38 165
Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, op. cit René THIVET, L’essor urbanistique de Vittel, in Des sources au thermalisme, ss la dir. de Jean-Paul ROTHIOT, 2001.
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24 Vue Générale de l’établissement thermal de Vittel, 1906.
réalisée par Gaston MUNIER (1871-1918), qui sera l’architecte du lotissement Bouloumié, dit ensemble des villas du Golf. Au premier plan, le chalet du Golf Club. (source : Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, 1982)
Synthèse de la première partie De la station thermale à la ville d’eau.
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oici posées les bases de la ville thermale que va devenir Vittel. C’est l’oeuvre d’une famille très impliquée dans l’entreprise fondée par le grand-père mais aussi dans la vie politique et les débats de l’époque. Charles Garnier a su poser les bases de son développement futur, dans une vision d’ensemble, installant les différents équipements dans un parc paysager. La croissance de Vittel est donc possible grâce à une vision d’ensemble qui permet le renouvellement sans déroger aux principes d’hygiène, de pittoresque et d’agrément.
Christian Jamot dans son ouvrage sur les villes thermales de France1 parle du pouvoir urbanisant de l’activité thermale. La ville «thermale» est définie comme une ville qui ne vit que du thermalisme. C’est une ville monofonctionnelle. Mais l’activité thermale a la particularité de permettre et d’autoriser la greffe d’autres fonctions urbaines. D’autres fonctions comme l’hébergement, les loisirs ou le tertiaire viennent se greffer sur le module de départ que constitue les thermes. C’est une forme de tourisme qui offre les moyens de sa transformation en organisme urbain. La saison thermale ne dure que 4 à 8 mois dans l’année (de mai à septembre en général). Les villes constituées grâce à une fonction unique doivent évoluer car elles ont la nécesité de devoir faire vivre leur population toute l’année. Cela parait évident. C’est ce processus qui est à l’oeuvre dans la constitution d’ensembles résidentiels autour de la station thermale de Vittel. Toutes les stations thermales n’ont pas eu la chance de pouvoir être assimilée à la ville, elles ne sont pas toutes parvenues au stade urbain. «Cette vision de Louis Bouloumié d’une station thermale enserrée dans son écrin de verdure a été déterminante pour l’évolution de la cité. (...) La création d’une véritable ville thermale ne pouvait résulter d’une somme d’opérations sans cette vision globale à long terme. L’oeuvre de toute une famille a trouvé sa cohérence dans leurs qualités d’intelligence, de persévérance, d’organisation mais sans doute aussi dans l’amour commun qu’ils avaient des choses de l’urbanisme et de l’architecture.» René THIVET, Vittel de 1850 à 1970 : l’essor urbanistique, les nouveaux quartiers2, 2002 Nous aimerions maintenant analyser la relation qui existe entre l’espace de cure et l’espace d’habitation. Comment l’activité thermale a influencé la conception de ces quartiers et des villas qui les composent ? 1 Christian JAMOT, Thermalisme et villes thermales en France, Université de Clermond-Ferrand II, publication de l’Institut d’Etudes du Massif Central, mai 1988. 2 in Des sources au thermalisme, Vittel - Contrexéville, ss la dir. de Jean-Paul ROTHIOT, 2002.
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II/ Le quartier thermal de Vittel : une scénographie urbaine au service de la cure. «Une habitation n’est jamais plus saine que lorsqu’elles est seule et isolée.» P.F. Vidalin, Traité d’hygiène domestique, 1825. Nous allons étudier maintenant l’étroite relation qui existe entre la politique hygiénsite qui s’étend à toute la ville et les quartiers résidentiels qui voient le jour aux abords du parc. 1) Le parc Madelon. a/ Les architectes.
C
omme expliqué précédemment, l’ébauche du parc Madelon apparaît pour la première fois dans le plan d’ensemble de Charles Garnier réalisé en 1884. Il est difficile de pouvoir attribuer les villas de cet ensemble à un architecte en particulier ou à plusieurs. Il n’y a pas de plaques sur les façades, seulement les noms bucoliques qui ont pu leur être donnés : villa Chanteclerc, villa Châtillon, villa Magdelon, villas Les Lilas et Les Bruyères, villa Cécile, villa Lucie, villas Marie-Louise et Adam ...
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Les premières villas du parc Madelon sont construites vers1890-1891 et sont destinées aux médecins de la cure, le pharmacien thermal, un entrepreneur des travaux publics et différents propriétaire hôteliers. 1 Toutefois, la Société des Eaux avait à son service un architecte officiel à son service. Nous pouvons donc supposer que ce dernier y ait fortement contribué. Charles Garnier est le premier architecte a remplir ce rôle, de 1882 à sa mort en 1898. François-Joseph Nachon, son collaborateur et «élève préféré», sera son successeur comme «architecte de Vittel»2
Caricature réalisée par Charles GARNIER, Nachon à Bordighera, 1886, plume et encre brune, Paris, Ensba. (source : ENSBA Paris, L’oeil et la plume, Ch. Garnier et la caricature, dossier pédagogique, 2010.)
L’ouvrage de Pierre Bouloumié ne nous donne le nom d’un seul architecte, «E. Chaise pour la villa Léa-Joséphine» en 1903-04 qui sera agrandie pour être l’Hôtel Beauséjour en 1906. Emile Chaise est un architecte prolifique de la région parisienne ayant rencontré Charles Garnier lors d’un concours.3 Ces éléments laissent penser que l’ensemble des villas du Parc Madelon a été réalisé par des architectes parisiens proches de l’entourage de Charles Garnier, et non par des architectes locaux.
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Le Dr Pierre Bouloumié consacre un chapitre de son ouvrage à « lister » les villas qui seront érigées, ainsi que leurs propriétaires. Dr Pierre BOULOUMIÉ , Histoire de Vittel. voir fiches biographiques de F.-J. NACHON et Ch. GARNIER en annexe AM Ivry-sur-Seine.
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a/ Le modèle de la ville régulière. Le parc Madelon est dessiné selon un plan en damier, régulier et orthogonal. C’est un plan courant pour les lotissements nouveaux qui voient le jour. C’est le plus facile à concevoir, satisfaisant aux exigences d’hygiène et de verdure tout en offrant la possibilité d’une extension future. Le tracé régulier et orthogonal du parc Madelon permet, selon les principes hygiènistes, à l’air de circuler entre les villas, de bénéficier de l’apport de lumière maximale et d’offrir la meilleur orientation aux pièces. De plus, le tracé orthogonal véhicule une image de régularité, d’ordre, par opposition au bourg de Vittel aux rues étroites et sinueuses. En choisissant une forme urbaine différente et ordonnée, cela distingue la station de Vittel. Ceci renforce la coupure déjà créé par la voie de chemin de fer. Le pont qui permet de relier la ville à la station, met en scène cette coupure, sorte de porte du thermalisme, en signalant le passage vers un lieu autre, vers un autre monde, aseptisé, verdoyant, sain, lumineux et ressourçant !
Gare SNCF
Plan de situation du Parc Madelon Extrait du plan d’ensemble de 1884 (cf p.22)
Avenue Bouloumié
Entrée du parc thermal
Le parc Madelon se situe à côté du parc thermal mais il n’en fait pas parti. Comme tout lotissement, le parc Madelon est doté d’un cahier des charges, qui fait office de réglement pour les nouvelles constructions. Il a ainsi été permis «d’imposer à tous ceux qui voulaient y bâtir ultérieurement les clauses d’un cahier des charges assurant les dispostions les meilleures du point de vue de l’esthétique et de l’hygiène : zones de non edificandi, clôtures, alignement, abonnement à l’eau, adduction des eaux usées, interdiction d’exposer du linge aux fenêtres, etc.»1 Ce cahier des charges permet aux promoteurs de la station de contrôler l’image du quartier jouxtant l’Établissement thermal et fait la transition avec Vittel-ville. Le quartier n’a pas subit de grands changements depuis l’édification des premières villas vers 1890, contrairement aux thermes ou au casino.
1
Dr Pierre BOULOUMIÉ , Histoire de Vittel p 320
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Le quartier est en fait là pour camper le décor et ainsi constituer l’épaisseur de la ville d’eau. Comme le dit MarieHélène Contal, les villas constituent un «immense paravent monumental offert au regard du curiste»1. Les villas, tout comme les hôtels de l’autre côté de la route, constituent un décor fixe par rapport aux édifices de la cure qui se renouvellent à chaque saison. Les villas font parties du parcours du curiste. On peut parler d’une scénographie urbaine de la gare jusqu’à l’établissement : après avoir voyagé en train jusqu’à la ville d’eau, il faut passer sous le pont de la voie de chemin de fer qui, comme on l’a dit précedemment, ouvre à la manière d’une porte sur le monde du thermalisme. Il y a tout un travail sur la mise à distance, avec une plantation d’arbres le long de l’avenue Bouloumié et des jardins clôturés à l’avant des maisons, avec leur porche d’entrée et leur marquise. Il y a une qualité des espaces intermédiaires entre l’espace public et l’espace privé.
Coupe sur l’avenue Bouloumié.
33 Hôtel
Prolongement
extérieur (bar..)
Trottoir
Avenue Bouloumié
Trottoir
Boutique
Villa
Jardin
L’avenue Magdelon offre une perspective sur le temple protestant, au centre de la composition. C’est un procédé classique employés par les urbanistes au XIXe siècle : le calage des perscpectives. Il y a une règle de composition simple mais qui suffit à structurer l’ensemble et à orienter les rues. 1
Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, op. cit, p 102-103.
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Evolution du cadastre du parc Madelon. 1
1884
1902
1905
35 Vue en surplomb du parc Madelon depuis la voie ferrée.
1 Marie-Hélène CONTAL, Vittel, Architecture thermale et politique de grands travaux, mémoire de fin d’études réalisé sous la direction de J.-P. EPRON, ENSA Nancy, 1980.
Hydrothérapie, Honoré Daumié, vers 1850
(source : Mathias ROTHE, L’eau de l’hygiène et l’eau de la prudence, in Culture des villes d’eaux, ss la dir. de Didier FRANCFORT et Antoine NIVIÈRE, publié par les Presses universitaires de Nancy, 2011.)
Etablissement thermal, douche au jet vers 1930.
(source : Guy DE LA MOTTE-BOULOUMIÉ, 125 Années de Vittel, 1852-1977, Vittel, 1977.)
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Appareil de mécanothérapie et chaise longue à UV. «L’étbalissement du Dr Pierre Bouloumié - 1905» (source : photos personnelles, Musée du Patrimoine, Vittel)
Hydrothérapie sauvage, Caricature de Cham, La saison des eaux,1847. (source : Lise GRENIER, Villes d’eaux en France, 1985.)
b) La place des médecins dans la cure.
La position du parc Madelon destinés à recevoir les médecins de la station et leur famille se trouve avant l’entrée du parc thermal. Avant d’aller recevoir le traitement, il faut une ordonnance d’un médecin.
Dr Pierre Bouloumié
1 médecin de cure à Vittel depuis 1893
Dr Henry Voirin médecin de cure à Vittel de 1906 à 1977 (tableau peint par sa femme)
Dr Henri Paillard Professeur à la Faculté de Médecine de ClermontFerrand, ayant exercé à Vittel de 1919 à 1949
Les rapports généraux du service médical des Eaux Minérales de la France, écrit par la Comission des Eaux Minérales, relatent les difficultés pour les médecins-inspecteurs des stations à établir des rapports sur les soins prodigués aux malades durant chaque saison2. En effet, la commission requiert auprès du ministère de l’agriculture et du commerce, et ce, depuis 1856, l’obligation pour les malades d’avoir une ordonnance d’un médecin en résidence ou non dans la station balnéaire. En effet, en cherchant les causes de cet apparent manque de professionalisme des médecins-inspecteur, il en est ressorti que cela ne venait pas d’un certain zèle de leur part mais d’une réelle difficulté à établir ces rapports eux-mêmes. Certains malades font un usage libre des eaux minérales, sans vraiment suivre les prescriptions d’un médecin. C’est dans l’intérêt des malades que d’aller consulter un médecin qui leur prescrira un traitement adapté à leur maux. Cela permet de contrôler et vérifier les vertus thérapeutique de l’eau de la source. Cela marque un tournant dans la pratique du thermalisme. On passe progressivement d’un mythe ritualisé à une pratique scientifique, médicalisée, petit à petit contrôlée et organisée par les médecins. Une nouvelle profession est née : la médecine thermale. Les médecins sont effectivement la raison d’être du thermalisme. Ils jouent un rôle non négligeable dans la gestion des stations et sont un gage de sérieux pour l’image de l’entreprise. Le roman écrit par Guy de Maupassant en 1887, Mont-Oriol, raconte la création d’une ville d’eau imaginaire en Auvergne. L’auteur dresse une satire de cette profession, où les médécins sont décrits comme prétentieux, âpres au gain, intrigants, peu compétents et sont tournés en ridicule tout au long du roman. Mont-Oriol met en évidence la naissance d’une médecine-industrie inquiétante en cette fin de siècle. 1 2
Guy DE LA MOTTE-BOULOUMIÉ, 125 Années de Vittel, 1852-1977, Vittel, 1977. AD Vosges, Fonds 5M Santé publique et hygiène dans les Vosges (1800-1940), Rapports de 1854 à 1879 (cote 5 M 163).
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Portrait d’Emile André et Gaston Munier. Photographie montée sur une feuille (H. 13, l. 18,5 cm) (Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, 2011.)
2) Le lotissement Bouloumié ou ensemble des villas du Golf, 1909.
a/ Les architectes et le contexte de la commande. Avant d’être des collaborateurs, Emile André et Gaston Munier étaient avant tout des amis. Ils ont fait leur études ensemble à l’école des Beaux-Arts, ont été formés par le même maître dans l’atelier de Victor Laloux. Ils partageaient une passion pour l’Orient et l’architecture musulmane et ont voyagé ensemble en Egypte. Il est difficile de distinguer quel part du travail revient à l’un ou l’autre. Jean Bouloumié fait appel à Emile André et Gaston Munier en 1906 pour loger ses employés. Ce sont des architectes avant-gardistes de la région et non plus des architectes parisiens. Hervé Doucet, dans sa récente monographie sur Emile André1, explique la notion d’art prôné par ce courant : «Bien que l’on ne retienne le plus souvent de l’Art Nouveau que quelques luxueux hôtels particuliers ou villas commandés par de riches clients, le mouvement répond à un idéal social. Créer un art nouveau pour tous, telle était l’ambition des principaux acteurs de l’Art Nouveau.»
La commande du lotissement Bouloumié s’est faite dans une période de dilatation de la Cité, dans l’effervescence des années 1910. C’est une période de recherche féconde, sur l’assise du plan de 1884.
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1
Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, éditions Honoré Clair, septembre 2011.
Le lotissement du parc Saurupt à Nancy, 1901 par Emile André et Henri Gutton.1
Evolution du plan masse du lotissement Bouloumié 2 1906
1907
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1 Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, éditions Honoré Clair, septembre 2011. 2 AD Meurthe-et-Moselle, Fonds d’archives André, Dossier du lotissement Bouloumié réalisé par Emile André et Gaston Munier(1906-1907), cote 119 J 149.
b/ Une tentative de lotissement paysager sur le modèle du close anglais. Contrairement au parc Madelon, le projet d’Emile André, sous la forme d’un petit hameau, possède une vraie dimension paysagère. Un rond-point en demi-cercle dessert les 4 villas doubles qui seront analysées plus en détails dans la troisème partie. _ Une cité-jardin dans la continuité de ce qu’aurait du être le parc Saurupt à Nancy. Emile André connait une certaine renommée grâce au Parc Saurupt de Nancy à partir de 1901. En 1903, Jean Bouloumié reprend la direction de la Société des Eaux en 1903 après la mort de son père Ambroise. Pour loger ses employés, dans cette période de dilatation de la Cité et de croissance, il choisi donc l’architecte Emile André, pour faire de Vittel une cité-jardin, et ainsi continuer l’oeuvre de son père : faire de Vittel une station thermale à l’anglaise, luxueuse et verdoyante. Sur la vingtaine de villas prévues par Emile André et Gaston Munier, seules 5 seront réalisées : les villas Lorima, Les Presles, Antoinette et Les Frênes.1 Le lotissement inachevé aurait été poursuivi par un autre architecte nancéien, Fernand César, successeur de Charles Garnier en tant qu’architecte de la Société des Eaux à partir de 1925. Sans dates ni signatures, il est difficile d’attribuer telle ou telle villa à César. De plus, la Société des Eaux n’aurait pas conservé d’archives concernant ces villas.2 Dans le projet initial, le lotissement Bouloumié devait être clos, tout comme le parc Saurupt. On peut alors dire que le milieu thermal est un terrain propice au développement des cité-jardins à la française et l’application des préceptes hygiènistes, beaucoup plus que dans une ville comme Nancy. La commande du parc Saurupt provient d’un investisseur privé, Jules Villard, n’ayant pas de lien avec le thermalisme. Les parcelles, visant une clientèle élitiste, ne trouvent pas preneur (seules 8 parcelles ont été vendues sur les 24 prévues)3 dans cette ville de province qu’est Nancy. Quelques villas isolées seront construites mais le projet sera remanié pour construire des maisons de villes mitoyennes et s’intégrer au tissu urbain de la ville. A Vittel, la réputation déjà bien établie de la station thermale et le contrôle du projet par la Société des Eaux ont pu faire du lotissement une cité-jardin appliquant les préceptes hygiénistes. L’activité thermale en ce début de siècle est régie par les mêmes principes d’air, de lumière, de verdure et de recherche du bien-être. 1 On ne connait pas les raisons pour lesquelles le lotissement est resté inachevé. Ce sont les recherches de Hervé Doucet qui ont mis à jour ce lotissement dans les archives du fonds André aux archives départementales de Meurthe-et-Moselle. Marie-Hélène Contal n’en fait pas mention dans son ouvrage. L’association de la maison du patrimoine de Vittel n’a pas pu nous donner plus de renseignements non plus, n’ayant pas connaissance de ce projet. La première guerre mondiale annoncera la fin du mouvement de l’Ecole de Nancy, avec d’ailleurs la mort de l’architecte Gaston Munier et d’autres personnalités de ce mouvement. Le traumatisme engendré par la grande guerre a en quelque sorte fait table rase des mouvements avant-gardistes d’avant-guerre. 2 Entretien avec les membres de l’ Association de la maison du patrimoine de Vittel.(janvier 2012). 3 Vincent BRADEL, Francis ROUSSEL, Nancy, Le Parc de Saurupt, plaquette réalisée par la Direction Régionale des Aff. Culturelles de Lorraine (DRAC), coll. Itinéraire du partimoine, éd Serpenoise, 1998..
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Carte du faubourg-jardin de la banlieue de Londres 19111
Carte des Villas du Golf d’EmileAndré - 1909. vers Ferme de la Tuilerie Hôtel de l’Ermitage (1929)
Terrain de Golf
Roseraie
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Thermes
1
Casino
Raymond UNWIN, L’étude pratique des plans de ville, coll. Archigraphy Poche, ed INFOLIO, 1923, réédition 1930.
_ Le modèle de la cité-jardin et du close anglais. Son tracé pittoresque, rappelant le tracé du projet initial du Parc Saurupt de Nancy (1901), en fait un lotissement qui se veut un prolongement du parc thermal. La forme d’un hameau de villas est une référence explicite aux cité-jardins qui se développent en Angleterre, qui a d’ailleurs influencé le lotissement du Vésinet en région parisienne. C’est la recherche d’une forme d’habitat idéal, en réponse à la croissance des villes pendant la révolution industrielle et à leurs conditions de vie difficiles. Un close est, selon la définition donné par Philippe Panerai dans son ouvrage Formes urbaines - De l’îlot à la barre (1997), un « groupement de maisons autour d’une impasse ou d’une placette en cul de sac. Cette impasse débouche généralement sur une rue, et on peut considérer comme faisant partie du close les maisons qui, situées sur la rue, annoncent ou ferment l’impasse. Une fois ce système défini, il existe une infinité de closes possibles, et Hampstead est un essai de typologie concrète du système, ou du moins de sa mise en forme.» Les recherches sur la forme de cité-jardin d’Emile André proviennent des théories de William Morris et du mouvements de l’Art & Crafts. L’étude du faubourg-jardin de Hampstead dans la banlieue de Londres (1911) faite par Raymond Unwin1 nous éclaire sur la conception du lotissement d’Emile André et Gaston Munier. Raymond Unwin (1863 -1940), pionnier de l’urbanisme, met en rapport cette forme urbaine avec une prise en compte du paysage alentour : le « principe d’interruption pratiquées dans les alignements grâce à des pelouses et des chemins traversaux », c’est-à-dire du close, permet de ménager des vues étendues pour les habitations. Ce principe est observable en particulier pour le faubourg-jardin de la banlieue de Londres : la vue sur «Hampstead Heath Extension» est diversement ménagée à un grand nombre de maisons qui sont bâties sur des terrains non immédiatement contigus à l’espace-même. Inversement, le groupement de maisons permet de fermer la perspective et de construire un tableau de rue agréable. _ La recherche du pittoresque. Les villas prennent l’allure de villas anglaises, dans le style néo-normand. C’est un style très répandu au début du siècle sur les côtes de la Manche, qui produit finalement des villas toutes différentes mais avec le même air de famille. L’architecture néo-normande des villas du Golf est avant tout la volonté d’Ambroise bouloumié d’avoir une station thermale à l’anglaise, pittoresque, et qui fait référence aux villas balnéaires qui fleurissent sur les côtes normandes et le littoral atlantique.
1
Raymond UNWIN, L’étude pratique des plans de ville, coll. Archigraphy Poche, ed INFOLIO, 1923, réédition 1930.
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3/ La politique hygiéniste de Vittel.
L’analyse urbaine du parc Madelon et du lotissement Bouloumié est fondée sur une volonté d’hygiène, d’air pur , de nature et de lumière naturelle. Ces préceptes hygiénistes reviennent comme un leitmotiv tout au long de l’ouvrage du Dr Pierre Bouloumié et celui de Marie-Hélène Contal. «Il faut conserver au nouveau Vittel son cachet de ville de saison hygiénique, de cité-jardin modèle, avec de grands espaces libres assurant une large et salubre aération, et par là son incontestable superiorité sur la plupart des villes d’eaux de la France et de l’étranger. (...) C’est bien la création d’une ville thermale qu’ont réalisé (...) Louis Bouloumié et ses descendants.»1
Les préceptes d’hygiènisme sont effectivement au coeur des préoccupations de l’urbanisme thermal. Mais nous aimerions essayer de comprendre d’où vient cette obsession pour l’hygiène, l’air pur, la nature, la lumière. Le quartier du parc Madelon pour les médecins de cure a permis de mettre en évidence le rôle de ces hommes qui sont la raisons d’être du thermalisme. Le Dr Pierre Bouloumié s’impliquera personnellement dans les débats relatifs à l’hygiène publique des villes d’eaux. C’est ainsi qu’il rédigea en 1887 un mémoire qui sera lu à la Societé de médecine publique dans sa séance du 27 avril 1887, intitulé De la police sanitaire dans les villes d’eaux et les stations santaires.2 Ce mémoire va nous servir à mieux comprendre la politique hygiéniste qui fonde les aménagements urbains d’une ville d’eau comme Vittel et ce qui la différencie des autres villes. a/ Les médecins : une vision négative de la ville. Les théories hygiénistes issues du domaine de la médecine se sont progressivement imposées dans l’aménagement urbain et l’architecture, à la fin du XIXe siècle, dans un but préventif, pour lutter contre les conditions de vie difficiles et les épidémies. L’ ouvrage de Sabine Barles, intitulé La ville délétère3, analyse le rôle des médecins et des ingénieurs dans l’espace urbain au XVIIIe et XIXe siècle. Les médécins sont des acteurs importants de la ville d’eau qui possèdent une certaine influence dans les aménagements urbains et les dispositions architecturales des édifices de la cure. La vision de la ville décrite par le Docteur Pierre Bouloumié dans son essai, s’inscrit dans la continuité des théories hygiénistes du XIXe siècle : Il dénonce notamment le rejet des eaux usées dans le ruisseau (et leur stagnation), les fosses d’aisances qui ne sont qu’un trou dans le sol sans souci d’infiltration dans le sous-sol, des égouts trop rudimentaires pour remplir leur fonction voire absents, les déchets des bouchers et maîtres d’hôtels dans la rivière qui devient un vrai dépotoir, des installations hygiéniques défectueuses dans les établissements thermaux, etc. La naissance de l’hygiènisme correspond plus ou moins à l’application d’une démarche nouvelle dans la pratique de la médecine : la prévention. 1 Dr Pierre BOULOUMIÉ, Histoire de Vittel, p325. 2 in Revue d’hygiène et de police sanitaire, n°9, 1887, sources : archives médecine http://www2.biusante.parisdescartes.fr voir annexe 3 Sabine BARLES, La ville délétère : médecins et ingénieurs dans l’espace urbain (XVIII-XXe siècles), Seyssel, Champ vallon, «Milieux», 1999.
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Louis Pasteur (1822-1895) Scientifique français Sa «théorie des germes» et la pratique de la vaccination révolutionnèrent la pratique de la médecine.
_ La ville est étudiée comme un organisme vivant. Les médecins s’engagent dans une véritable lutte contre les odeurs, les miasmes. Il est frappant de lire les descriptions des villes au XIXe par les médécins et de voir leurs efforts pour tenter de comprendre les processus biologique de la putréfaction, ou identifier les gazs présents dans l’air qui corrompt l’espace urbain, etc. Il existe tout un imaginaire de la crasse, de la saleté, de la boue, des odeurs, de la pourriture. Les médecins accordaient aux doctrines d’aération et de ventilation une place importante. C’est la naissance de l’hygiénisme au XVIIIe sièce. L’obsession de la libre circulation de l’air revient sans cesse dans les écrits des médecins et des scientifiques préoccupés par la salubrité. Ils cherchent en fait à lutter contre les effets de l’air vicié sur notre organisme et étudient les gazs nocifs pour notre santé. Mais l’ouvrage de Sabine Barles montre aussi que les médecins ne se préoccupent pas seulement de l’air ou de l’eau, de l’humidité. Son ouvrage accorde une importance particulière au sol dans les aménagements urbains. Les médécins croient pendant longtemps à la putréfaction du sol qui respire et transpire. Pour de nombreux scientifiques, une grande partie des exhalaisons souillant l’atmosphère provient de la terre. Le milieu est responsable de notre état de santé : les médecins se questionnent en effet sur les interfaces, sur les points de contact entre l’homme et son environnement. Les exhalaisons de la terre sont étroitement associées à l’humidité (vapeurs ...) La ville est un lieu où l’air est par nature vicié, l’homme se tuant lui-même par le fait de vivre. Les médecins ont une image très négative de la ville. En effet, elle est le lieu d’une dégradation tant physique que morale mais on constate aussi que l’espèrance de vie y est plus courte qu’à la campagne. L’atmosphère de la ville est selon eux, impure. Mais qu’en est-il pour les villes thermales où l’hygiène est placée au premier plan ? Comment les médecins ont-ils pris part dans les projets d’aménagements de ces embryons de ville ? Dans la première partie de son mémoire qui sera lu à la Société de Médécine, Pierre Bouloumié dresse un constat de l’insuffisance des installations hygièniques et des mesures prises pour assurer la salubrité des stations. «Dans l’état actuel de la législation et des habitudes administratives, l’hygiène des établissements ouverts au public comme station sanitaire est ce que veulent ou le laissent être les industriels qui les exploitent. (...) Tout y est fait pour le coup d’oeil, pour l’agrément, peu pour le confortable, rien pour l’hygiène».
Il propose un projet de réforme qui passe par l’instauration d’une police sanitaire organisée par l’Etat. Il dénonce l’impuissance des médecins-inspecteurs à remplir leur mandat, et notamment leur devoir de veiller à l’hygiène.
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Dans chaque station, l’Etat nomme un médecin-inspecteur chargé de prescrire le traitement adéquate aux malades venus prendre les eaux dans l’établissement (comme tout médecin) mais il a aussi d’autres droits et devoirs qui sont précisés dans la loi de 1823 1: - contrôler le bon usage médical des eaux et ses effets sur les malades (rédaction d’un rapport annuel à la comission des Eaux Minérales) - il a le droit de faire les propositions et observations qu’il juge nécessaire aux propriétaires (ou régisseurs ou fermier) exploitant la source et d’en signaler les abus. La loi de 1849 ajoute une précision : il a le devoir de proposer «tout» ce qui peut être utile à la bonne conservation et à la judicieuse application médicale des sources.
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1
AD Vosges, Rapport sur le service médical des eaux minérales de la France de 1856, (cote 5M 163)
1910 - Vittel dans la prairie. Au premier plan se trouve le Rupt Magdelon, actuellement souterrain. En arrière plan, on aperçoitun des hôtels et le casino à droite.
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(source : Guy DE LA MOTTE-BOULOUMIÉ, 125 Années de Vittel, 1852-1977, Vittel, 1977.)
b/ Une politique d’hygiène qui s’étend à toute la ville.
_ De l’ensemble de la station ... Les propos de Sabine Barles sur l’obsession pour les zones humides et pour la mâitrise du sol, prennent tout leur sens quand on met en parallèle les travaux mis en oeuvre par la Société des Eaux pour aménager les terrains autour des points d’emergence des sources. La Société des Eaux a effectivement fait progressivement l’acquisition de toutes les parcelles agricoles aux abords des sources, comme décrit dans la première partie. Le parc thermal est ainsi la réunion de plusieurs hectares de prairies marécageuses où affleuraient les sources et traversées par le ruisseau du petit Vair. Pour en faire un vrai parc d’agrément, un projet paysager a remodelé la topographie et supprimé les zones humides à abords du ruisseau. La question de la relation avec le tissu existant semble moins concerner que celle de la création d’un véritable site. C’est la vision romantique d’une Nature que l’on cherche à apprivoiser. Ce met alors en place un système de relations harmonieuses entre les zones les plus artificielles et les zones les plus vierges. La galerie-promenoire devient un élément caractéristique de l’Architecture thermale : elle sert à faire la transition entre le bâti et le planté. 1 Le parc thermal témoigne de la volonté de recomposer une Nature miniature et maîtrisée. «Les talutages, mouvements de terre ou arrasements se sont succédés ici pour bouleverser la configuration d’origine, jusqu’à l’obtention peut-être d’un paysage enfin analogue aux panoramas qui en avaient été dressés.»2
De la même façon, le parc Madelon où seront érigées les douzaines de villas, doit son nom au rupt Ma(g)delon, un affluent du Vair, qui traverse le parc. Il sera ‘enterré’ pour permettre le tracé des 4 voies et la construction des villas. Cela montre une volonté de maîtriser le territoire, et surtout d’assainir et de drainer les zones humides,
au profit d’une scénographie végétale offerte au curiste.
_ ... à toute la ville. Tous les efforts pour rendre le parcours du curiste des plus agréable commencent bien avant le parc Madelon et le parc thermal.
1 2
Lise GRENIER et Ph. DUBOY, Les villes de santé, in Villes d’eaux en France, (ss la dir. de Lise GRENIER) IFA, ed Fernand Hazan, 1985. Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale,1982., p212.
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Déjà en 1854, le chemin qui conduisait le curiste jusqu’à l’établissement des thermes était un enjeu pour le développement de la station. Pierre Bouloumié raconte1 : « En 1854, pour aller du bourg de Vittel, à la fontaine de Gérémoy, en suivant le faubourg de Perjus, on prend la route de Vittel à Norroy. À une distance de 50 mètres environ des dernières maisons est, sur la gauche, le cimetière ; puis ce ne sont que champs de blé, d’avoine, de luzerne, etc. Il n’y a pas d’autres demeures que celle des morts ; c’est peu gai pour les mortels malades qui, à cette époque, logeant tous dans les hôtels du village et faisant deux fois par jour le trajet aller et retour, longeant ainsi quatre fois le petit mur qui laisse voir toutes les tombes.»
Un épais rideau de sapins sera planté devant le muret du cimetière, qui sera finalement déplacé en périphérie de la ville. De même, l’allée menant à l’entrée de l’établissement, c’est-à-dire l’allée principale desservant le parc Madelon, sera plantée de part et d’autre de peupliers. Le cimetière ne sera pas le seul à subir les effets de la cure. L’usine électrique, l’abattoir, la blanchisserie, les remises et les écuries ... seront construits en dehors de la ville thermale : «Le souci constant d’éviter toute cause d’insalubrité et de gêne dans les environs immédiats de l’établissement et des hôtels en détermine l’emplacement.»2
C’était une époque où l’insalubrité dans les rues et dans les habitations étaient un réel problème. Des détails dans le cahier des charges du parc Madelon peuvent nous paraître anodins aujourd’hui, comme l’abonnement à l’eau ou l’adduction aux eaux usées. D’autant plus que Vittel était un petit bourg rural à la fin du XIXe siècle. On imagine très bien comment pouvaient être les rues de Vittel, bordées par les tas de fumier devant les fermes des cultivateurs. Plus le tas de fumier était gros (et odorant ...), plus cela montrait la richesse du paysan, ce qui n’allait pas sans provoquer quelques jalousies ! Les habitants déversaient leurs eaux usées dans le Petit Vair. Les égouts, les tas de fumiers, les déchets des brasseries, les écoulement des fosses à purin ... posaient de réels problèmes d’hygiène publique, comme dans toutes les villes à la fin du XIXe siècle. Mais à Vittel, l’enjeu est d’autant plus important qu’il nuit à l’activité thermale. Les curistes séjournant à Vittel chez l’habitant ou dans les auberges du village, ne pouvaient pas échapper à cela. D’autant plus que pour se rendre aux thermes tous les jours (pendant la fameuse cure de 21 jours) et recevoir les soins d’eaux thermales, il fallait passer devant le cimetière ! «Mais n’oublions pas que, Ambroise Bouloumié, outre ses fonctions à la SGEMV, est maire de Vittel de 1875 à 1879, et de 1882 à 1903 date de sa mort. Il agit pour que les quartiers anciens qui en sont dépourvus, soient dotés progressivements d’équipements comparables à ceux de la station : assainissement, distribution d’eau courante par les canalisations d’eau de source, éclairage qui deviendra électrique lorsque l’usine de production d’électricité sera construite en 1904. Par ailleurs, la circulation devient plus dens : il faut élargir les rues et les doter de nouveaux revêtements.»3 1 2 3
Dr Pierre BOULOUMIÉ, Histoire de Vittel, p316. Dr Pierre BOULOUMIÉ, Histoire de Vittel, p133. René THIVET, L’essor urbanistique de Vittel, in Des sources au thermalisme, ss la dir. de Jean-Paul ROTHIOT, 2001.
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Certe, cette volonté d’hygiènisme est comparable à celle qui s’exprime dans les autres villes, mais c’est la santé des malades venus trouvé du réconfort dans la cure qui est en jeu. «Pendant un siècle, la station thermale a joué le rôle de catalyseur du développement urbain. Avec l’essoufflement du thermalisme traditionnel, c’est la formidable expansion de l’industrie de l’eau qui a entrainé toute la ville dans son sillage.»1
_Les villes d’eaux : vitrines de la modernité de l’Empire, du progrès et de l’hygiène publique. Dans une seconde partie, il parle de l’urgence de l’assainissement des stations sanitaires et de la nécessité de leur maintien dans un parfait état de salubrité. Les villes d’eaux sont ainsi désignées pour être à «l’avant garde du progrès en matière d’hygiène publique.» Les eaux minérales font partie d’une politique préventive en matière de santé publique. Les eaux minérales, «ces médicaments naturels répandus si généreusement sur le sol de notre patrie, sont une des sources considérables de la santé publique au point de vue des maladies constitutionnelles et héréditaires, de ces maladies des familles qui atrophient les générations et menacent la société dans ses racines.»2 _Un projet de réforme. Dans une troisième partie, le Dr Bouloumié parle des mesures pratiques à prendre pour assurer la salubrité dans les stations sanitaires. Il faut tout d’abord scinder la réforme et la réclamer d’abord pour les villes exigeant le plus l’application des mesures d’hygiène. Les villes d’eaux doivent ainsi servir de vitrines en matière d’hygiène publique pour l’Empire : : ces villes serviront d’exemple et entraineront la réforme générale. C’est en cela qu’il parle d’être à l’avant-garde. La législation en cours à l’époque semble s’y opposé selon lui, en considérant que toutes les villes doivent être égales devant les lois de l’hygiène. La réforme demandée se ferait par le biais d’une meilleure organisation de l’instrument de contrôle des conditions sanitaires (divers contrôles et comissions d’hygiène et médicale indépendantes). C’est finalement après la première guerre mondiale que les villes thermales et balnéaires se verront atribuer un caractère spécial. Bernard Toulier met cela en évidence3 : «La loi Cornudet (14 mars 1919, modifiée et complétée 19 juillet 1924) jouera un rôle décisif pour les plans d’extension et d’aménagement des villes d’eaux. Dans les stations balnéaires, thermales et touristiques, la loi prévoit l’obtention d’un label : l’érection de communes en stations de climat, de bains, de promenade avec une « chambre thermale» désignée par l’administration, qui « seconde » la municipalité.»
1 2 3
René THIVET, L’essor urbanistique de Vittel, in Des sources au thermalisme, ss la dir. de Jean-Paul ROTHIOT, 2001. Rapport sur le service médical des eaux minérales de la France de l’année 1863. Bernard TOULIER, conférence prononcée au colloque sur les Villes d’eaux en 1994 à Salies-de-Béarn.
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c/ Une politique d’hygiène qui pénètre jusque dans les intérieurs des villas.
_Les moyens d’actions immédiats. Le mémoire se conclut enfin par une dernière et quatrième partie relatant les moyens d’actions immédiats à mettre en place en attendant le vote de cette proposition de loi. Il faut stimuler la vigilance et l’initiative des maires et des préfets sur l’importance des travaux à entreprendre en matière d’hygiène publique. Une dernière mesure a attiré notre attention car elle concerne plus spécifiquement la surveillance sanitaire des maisons. Cette surveillance serait mise en oeuvre essentiellement grâce à : - une inspection par la comission d’hygiène, - un certificat annexé aux plans des installations (signé par les présidents des comissions) et publié dans la presse, - la pose d’une plaque sur la façade de l’immeuble déclarant la salubrité de l’éablissement. On peut se demander quels étaient les critères des inspections sanitaires des maisons souhaitées par le Dr Bouloumié. Etait-ce simplement un contrôle de l’entretien des installations techniques liées au confort ? Quelle était la nature des modifications que devaient exécuter le propriétaire s’il voulait pouvoir continuer à louer sa villa et ses appartements ? L’organisation interne des maisons étaient-elles remises en cause ? Cela fait plutôt penser à l’ébauche d’une sorte de premier label touristique pour guider et mettre en confiance les malades en visites dans la ville d’eau. Cela nous mène donc à nous intéresser maintenant à la conception des villas de ces 2 ensembles urbains. On peut voir dans cette mesure les limites des idées hygiénistes véhiculées par les médecins à la fin du XIXe siècle. Cette volonté de tout contrôler, jusqu’aux intérieurs de la vie domestique se retrouvent également pour le logement social ou le logement ouvrier. Le rôle social de l’hygiéniste n’aura finalement un impact réel que pour les mesures concernant l’urbanisme : la création d’espace publique, de poumons verts dans la ville. Les villes d’eaux sont un point d’entrée de l’hygiénisme dans les villes du XIXe siècle : il doit viser à éduquer les classes les plus aisées qui entraineront ainsi toutes les autres. 1
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échange de mails avec Marie-Hélène Contal, janvier 2012.
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Synthèse de la deuxième partie. La cité-jardin comme idéal. Les deux ensembles de villas étudiés sont des exemples remarquables d’application des cité-jardins sur le modèle anglais. Ils représentent deux façons de penser la ville au XIXe siècle : • Le modèle ‘‘géométrique’’ de la ville régulière illustré par le parc Madelon. Prévu dans le plan d’ensemble de 1884 de la station thermale de Vittel, c’est un quartier caractéristique de l’extension des villes d’eaux du XIXe siècle. Selon un plan en damier, régulier et orthogonal, les villas bourgeoises sont isolées les unes des autres pour bénéficier du meilleur ensoleillement des pièces et d’un jardin privé. Elles sont un exemple remarquable de ce que pouvait être l’architecture éclectique courante du XIXe siècle. Ce quartier est avant tout une mise en scène des pratiques du thermalisme au XIXe siècle : les villas étaient réservées aux médecins de la station. Leur situation entre la gare et le parc thermal invite le curiste à suivre les prescriptions d’un médecin avant de recevoir son traitement dans l’établissement thermal. Il y a une mise en scène des pratiques ritualisées de la cure qui, au cours du XIXe siècle ont évoluées. Le thermalisme devient une pratique rationnalisée, organisée et contrôlée par les médecins. L’ensemble de la scénographie du quartier est ainsi subordonné aux besoins de la cure. • Le modèle ‘‘paysager’’, inspiré par les jardins paysagers anglais, illustré par le lotissement Bouloumié. Bien qu’inachevé, c’est un exemple de cité-jardin beaucoup plus abouti que l’ambitieux Parc Saurupt ébauché par le même architecte à Nancy. Sur le modèle des cité-jardins qui fleurissent en Angleterre, Emile André a ainsi ébauché un ensemble de villas pittoresques en relation avec le parc et le terrain de Golf qui s’étend de l’autre côté de la route sur plusieurs hectares, en ménageant des vues lointaines sur le paysage. _ La cité-jardin à la française. Pour reprendre la définition donnée par Léon Jaussely dans sa préface à l’ouvrage d’Unwin1 , la cité-jardin anglaise est un organisme complet, de faible densité (pas plus de 30 000 habitants) et trouvant lui-même tout ce qui est nécessaire à la vie (habitations bourgeoises et ouvrières, son administration, son centre urbain, ses services, ses édifices publics, ses commerces, ses usines ...). La cité-jardin est un organisme urbain qui se suffit à lui-même. Les ensembles de villas étudiées, bien qu’étant uniquement des ensembles résidentiels, se revendiquent des ‘‘cité-jardin’’. On appelle donc ‘cité-jardin à la Française’, tout groupement, même peu importants, de maisons ouvrières ou bourgeoises, ou à bon marché, pourvues de jardins particuliers suffisants, sans que le groupement puisse avoir par lui-même une vie autonome. Ce sont donc des lotissements traités dans la manière de l’urbanisme paysager des cités-jardin anglaises, et dépendants de la ville. L’exemple du Parc saurupt nous montre les difficultés (économique, politique , culturel ..) à mettre en application ce genre de programme en France. 1
Raymond UNWIN, L’étude pratique des plans de ville, coll. Archigraphy Poche, ed INFOLIO, 1923, réédition 1930.
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_ L’épaisseur de la ville d’eau ? vers une ville-parc. Comme on l’a vu pour le parc Madelon, ces lotissements de villas situés aux abords du parc thermal constituent l’épaisseur de la ville d’eau. Plutôt qu’un «paravent monumental» comme le décrit Marie-Hélène Contal, c’est en fait la végétation du parc thermal qui se dilue et vient s’infiltrer parmi les habitations. Ces zones moins denses et aérées, laissant passer la lumière, viennent faire la transition, avec la ville ancienne plus dense. Bernard Toulier, conservateur en chef du Patrimoine s’est consacré à l’étude des villes thermales et balnéaires en France. Lors d’une conférence prononcée au colloque sur les Villes d’eaux en 1994 à Salies-de-Béarn, il parle du schéma commun urbain que prennent les villes thermales et balnéaires : il présente «de nombreuses similitudes avec des villes nouvelles de l’intérieur comme la villégiature du Vésinet. Les plans de lotissement paysager, accompagnés d’un cahier des charges spécifiques pour l’aménagement de l’espace et l’édification des constructions exercent leurs influences sur le style mais surtout veillent au respect du site par la conception des voies et des jardins publics, la place des espaces privés, ...»
Vue aérienne du Vésinet _ Vue du lac
Tracé du Vésinet_évolution historique
(source : Sophie CUEILLE, Le Vésinet, modèle français d’urbanisme-paysager, 1858-1930, «Cahiers de l’Inventaire 17», Imprimerie Nationale Editions, 1989.)
La villégiature du Vésinet est le premier lotissement paysager à voir le jour en France, inspiré des cités-jardin anglaises. La ville est conçue comme un parc habité, selon le modèle des jardins paysagers anglais, avec des allées courbes, une végétation omniprésente, des lacs artificiels, des pelouses collectives ...
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Les lotissements de villas étudiés à Vittel sont des ensembles plus modestes que le Vésinet et moins aboutis mais ils témoignent du même idéal auquel aspire l’urbanisme moderne du XIXe siècle : rapprocher l’homme urbain de la Nature : Charles Garnier en concevant le programme thermal comme un vaste parc paysager dédié aux sports de plein air et Emile André avec ses lotissements paysagers de villas inspirés de la cité-jardin anglaise. L’histoire de la création des villes thermales et balnéaires regorgent de tentatives de création de villes paysagères. C’est ainsi que l’on retrouve Charles Garnie, 10 ans après son intervention à Vittel, cette fois dans la station balnéaire du Touquet, associé à deux anglais, un architecte et un paysagiste pour un projet qualifié par Bernard Toulier comme l’une «des plus folles utopies balnéaires». Le projet n’aboutira pas pour des raisons économiques. C’est l’idée d’une ville mondaine en bord de mer, consacrée aux sports de plein air, associée au concept de cité-jardin dans le goût britannique. Les allées sinueuses se prolongent pour venir desservir les villas disposées librement sur le front de mer, de la même manière que l’allée du casino de Vittel mène aux villas du Golf d’Emile André, à la lisière de la forêt.
Plan général par Charles Garnier. 1894-96
Vue perspective par Thomas William Cutler.
Le projet de Mayville, du nom de la princesse May de Teck, s’inscrit comme une extension du lotissement Dalooz Paris-plage, en opposition au plan en damier. L’axe centrale, rue de la Paix rassemble commerces, gymnaseset bains turcs. Il commence à la gare, flanquée de l’église et du temple, pour se terminer par le casino encadré par les hôtels et prolongé par un pier en charpente métallique servant de débarcadère à bateaux. La voirie large et sinueuse, conçue pour les voitures, serpente autour des immeubles et des villas isolées. La forêt du Touquet est destiné à la pratique des sports (tennis, crocket, champ de courses, vélodrome) et à la promenade ( jardin d’acclimatation, Pré Catelan, petit lac ...) (source : Bernard TOULIER, Architecture et urbanisme, Villégiature des bords de mer, XVIIIe-XXe siècle, éditions du patrimoine, nov 2010.)
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_ Les villes d’eaux : un point d’entrée de l’hygiénisme dans la vie urbaine, ‘‘par le haut.’’ La forme urbaine d’un lotissement paysager composé de villas isolées témoigne d’une politique d’hygiène directement liée à l’établissement thermal. Les villes d’eaux sont ainsi désignées par le Dr Bouloumié pour être à «l’avant garde du progrès en hygiène publique.» Les médecins ont effectivement joué un rôle important dans la transformation des villes au XIXe siècle. Les idées hygiénismes véhiculées par le corps médical de la cure sont en fait une volonté de maîtriser les échanges entre notre corps et son environnement, en réaction à l’essor des villes au XIXe et à leur environnement délétère. Cette véritable obsession de l’hygiène, de la lumière et de l’aération est en fait une lutte contre les zones humides et la putréfaction dans l’espace public de la ville du XIXe siècle. L’hygiénisme est véritablement exacerbée dans une ville d’eau, créant un univers aseptisé où la nature est omniprésente. Ces villes doivent servir d’exemple aux autres villes et entrainer la réforme générale. Les villes d’eaux sont désignées pour être des vitrines en matière d’hygiène publique pour l’Empire. On peut se demander si l’on retrouve cette même volonté avant-gardiste dans l’architecture des villas de la station. L’architecture de villégiature, loin des contraintes croissantes imposées par la ville serait-elle un laboratoire d’expérimentation et peut-être d’innovation pour les architectes ? Cela nous mène donc naturellement à nous intéresser maintenant à la conception des villas de ces 2 ensembles urbains.
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III/ Villas thermales ou l’application des préceptes hygiénistes à l’échelle domestique .
«À la recherche du soleil, le cube originel est lesté d’Est en Ouest de bow-windows, de terrasses, de solariums et des baies thermales sont percées, atteignant parfois la dimension d’une verrière. Souscrivant ainsi aux nouveaux préceptes de l’architecture moderne des année 20, les villas bâties sont de plus en plus vastes et lumineuses.»
Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale,1982, p206.
Nous allons maintenant étudier la relation qu’il existe entre les villas et les équipements de la cure. On peut se demander si les villas du quartier thermal ont une spécificité par rapport à d’autres villas bourgeoises. La spécificité de la villa thermale ne serait-elle pas son caractère hygiènique ? En quoi les villas thermales peuvent servir de modèle dans une ville d’eau qui se doit d’être à l’avant-garde sur le plan de l’hygiène publique ?
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1/ La villa hygiénique modèle.
Nous allons essayer de définir ce que doit être la villa hygiénqiue thermale pour pouvoir confronter cette définition avec l’analyse des villas thermales vitelloises. L’étude du quartier Madelon a mis en évidence le fait que la profession des médecins a joué un rôle important dans la transformation des villes au XIXe siècle. Monique Eleb, dans son ouvrage sur les transformations de l’habitat au XIXe siècle1, parle de cette réforme de l’habitat qui s’opère à cette époque. C’est un moyen d’améliorer la santé des habitants : l’aération, le renouvellement de l’air, l’ensoleillement des logements permettent de lutter contre la tuberculose. «Les hygiénistes ébauchent la maison de demain : ils dictent son orientation, sa situation, réclament de l’air et de la lumière, décrivent les pratiques d’entretien, de nettoyage, de propreté.»
La maison, traversées par les fluides est comme un organisme vivant dont les artères donnent vie en apportant chaleur et lumière. On peut mettre cela en parallèle avec la volonté du Dr Bouloumié d’une inspection sanitaire des maisons de la station thermale. Marie-Hélène Contal fait mention dans son ouvrage d’un contrôle des intérieurs des villas par un service d’inspection hygiénique attaché à la Société des Eaux.
a/La villa hygiénique d’Arcachon.
Marie-Hélène Contal met en parallèle des villas vitelloises, des extraits d’un débat sur les villes d’eaux lors d’un congrès de climato-thérapie et d’hygiène urbaine de 1905, du Dr Fernand Lalesque : La villa hygiènique modèle est un véritable outils de prophylaxie antituberculeuse pour la ville d’Arcachon. La station balnéaire en plein essor au début du XXe siècle et se mue peu à peu en une ville de santé.
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1 Monique ELEB avec Anne DEBARRE, L’invention de l’habitation moderne – PARIS 1880-1914 – Architecture de la vie privée, suite, ed AAM / HAZAN, 1995.
70 Villa La Fourmi, petit modèle de villa hygiénique, 1908. conçue par le Dr Ferdinand Lalesque, pour faciliter la désinfection, aérer et créer des courants d’air.
Le points communs des villas qui se construisent dans un nouveau lotissement au bord de la mer pour les malades de la tuberculeuse est l’hygiène : - L’air et la lumière entrent à flots dans les appartements, jusque dans les couloirs et dépendances, - toutes les saillies sont supprimées (corniches, rosaces, moulures, sculptures, plinthes ...), les angles sont arrondies (raccordement murs/plafond, sol/mur, boiseries) pour éviter là la poussière de s’accumuler, - le sol est recouvert de ‘‘xylolyth’’ ou ‘‘sanitor’’, un amalgame spécial coulé en place, permettant d’obtenir une surface d’un seul tenant sans joint ni fissures, - les murs sont peints au ‘‘ripolin’’ ou tendue de toile lavable qui ‘‘meuble’’ mieux l’appartement, - les pièces ont une grande hauteur sous plafond et les baies sont presques aussi hautes que larges, avec des impostes spéciales pour faciliter la cure d’air, - la façade principale est exposée au Midi ou au sud-est, - les sous-sols sont vastes et sains, - les cuisines sont vastes et très éclairées, sans recoins obscurs pouvant échapper à la surveillance, et entièrement peintes et lavables, - les WC sont peints comme la cuisine, avec une chasse d’eau et de larges tuyaux d’aération, et une fosse cimentée, - le mobilier est simple et confortable, supprimant tout capitonnage, toute tenture, même les rideaux aux fenêtres. Les villas sont ainsi le résultat des efforts combinés du médecin et de l’architecte, pour le plus grand profit de la santé et du plaisir des yeux. Les villas hygiéniques d’Arcachon ne véhiculent pas d’emblée les idées de lumière, d’air et de verdure alors qu’elles le revendiquent pourtant. Seuls les intérieurs semblent avoir intéressé le Dr Lalesque, l’objectif étant de créer des logements aseptisés pour les tuberculeux venus faire une cure d’air à Arcachon. L’aspect extérieur est laissé au soin de l’architecte, dans le but d’intégrer les ‘bulles aseptisées’ du Dr Lalesque dans un lotissement paysager de la même veine que le lotissement Bouloumié. Les villas prennent donc l’aspect de petits chalets aux nombreuses fenêtres. L’hygiénisme dans l’habitat pose donc la question plus large du confort.
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Hôtel Carnot pour un médecin réalisé par Paul Guadet, 8 avenue Elysées-Reclus à Paris, 1908.
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Façade sur rue et Façade arrière. L’immeuble a été démoli et n’existe plus aujourd’hui. (source : site internet IFA)
Plans de RDC et du 1er étage. Les murs sont en ciment armé.
(source : Monique ELEB avec Anne DEBARRE, L’invention de l’habitation moderne – PARIS 1880-1914 – Architecture de la vie privée, suite, 1995)
b/ Le type idéal de la maison aseptique. Un hôtel parisien réalisé par Paul Guadet à Paris en 1908 vient compléter cette première définition donnée par la villa hygiénique arcachonaise. Construit en ciment armé, cet hôtel est, selon Monique Eleb1, est un modèle, un type idéal de la maison aseptique. Ses parois sont lisses. (Les façades sont recouvertes de céramique vernie.) La lumière y entre à flot : on constate une inversion des proprtions des pleins et des vides par rapport aux constructions traditionnelles. En effet, les murs en ciment armé permettent d’avoir des murs beaucoup plus fins et de gagner en surface. Le toit est amenagé en terrasse-jardin, prenant alors une forme préfigurant celle des villas modernes des années 20.
C’est 2 exemples nous permettent alors d’en déduire les critères architecturaux de la villa hygiénique modèle : La recherche de lumière et le souci de renouveller l’air de l’habitation guident la conception de la villa hygiénique «modèle». Les pièces doivent avoir de grands volumes et de grandes hauteurs sous plafonds, allant jusqu’à opter pour le toit en terrasse et gagner en volume pour le dernier niveau. Les baies sont élargies atteignant parfois les dimensions d’une verrière. La fenêtre n’est plus pensée comme un trou dans un mur mais comme une surface de verre laissant passer la lumière. Les pièces de vie auront la meilleure exposition par rapport à la course du soleil. La maison n’est plus pensée comme un plein, un abri qui nous protègerait de l’extérieur mais bien comme un vide, un volume d’air et de lumière. L’hotel Guadet l’illustre très bien, avec ses parois et ses cloisons en béton armé étonnamment fines. Les pièces de services gagnent le droit d’être éclairées par la lumière naturelle au même titre que les pièces de vie. Le sous-sol se doit d’être vaste et aéré. Le décor est épuré au maximum : la paroi devient lisse. On supprime les saillies, corniches ou autres modénatures dans un souci d’entretien et de nettoyage, allant même jusqu’à utiliser la céramique vernie en façade.
1 Monique ELEB avec Anne DEBARRE, L’invention de l’habitation moderne – PARIS 1880-1914 – Architecture de la vie privée, suite, ed AAM / HAZAN, 1995.
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Les villas du parc Madelon.
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2/ Les villas thermales de Vittel. Les villas du quartier thermal étaient destinées aux employés de la Société des Eaux : médecins de cure, entrepreneurs de travaux publics, propriétaires hôteliers, employés ... a/ Les villas du parc Madelon : un échantillon de l’architecture éclectique du XIXe. Ces villas thermales sont un échantillon d’architecture écléctique telle qu’on la produisait à la fin du XIXe, début du XXe siècle, issue de l’enseignement Beaux-Arts. Il est difficile de leur attribuer une particularité architecturale lié eau milieu thermal proprement-dit. Les raisons qui nous ont conduit à les intégrer à cette étude ont été longuement étudiées et détaillées dans la partie précédente : c’est l’ensemble urbain lui-même, son implantation entre le parc et la gare, la profession à laquelle les villas étaient destinées, etc.
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Le cahier des charges du parc Madelon est décrit dans l’ouvrage du Dr Pierre Bouloumié. (voir partie II). L’analyse des villas nous permet de déduire d’autres règles concernant l’implantation de celles-ci sur leur parcelle. Outre l’utilisation de matériaux durs (moellons, maçonnerie) et la clôture qui délimite clairement l’espace privé de la rue, les villas sont implantées en recul et s’élevent sur 2 niveaux plus un niveau sous comble. Les excroissances de ce volume quasi cubique ne pourront avoir qu’un seul niveau (extension, garage, boutique ou pharmacie sur l’avenue Bouloumié ...) L’abonnement à l’eau courante et l’adduction aux eaux usées les dotaient d’un confort particulier par rapport aux habitations de Vittel-ville.
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Les villas Marie-Louise et Adam sont construites symétriquement par rapport à la rue Magdelon, au bout de laquelle se trouve le temple Protestant. Les villas participent donc ainsi à la composition de l’ensemble et au calage des perspectives. L’extension de la villa Marie-Louise sous la forme d’un volume d’un seul niveau et couvert par une toiture en terrasse est quelque chose que l’on retrouve sur beaucoup d’autres villas du parc Madelon. Quand les volumes construits s’approchent des limites de propriété, ils prennent souvent cette forme : on l’observe pour la boutique de la villa Thouvenot de 1900 et la pharmacie thermale (voir p 73 et 75), mais aussi pour des pièces d’habitations annexes comme ici. Cela annonce une logique d’addition des volumes que l’on observera dans les villas suivantes.
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Vue aérienne du parc Madelon, Vittel. (vue Google earth)
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Les villas du golf, d’Emile André et Gaston Munier en 1914, à la lisière du parc. À gauche, la villa Alopreys, en arrière-plan à droite la villa Les Frênes. (source : AD Vosges, cote 4 Fi 516/335)
b) Les villas du Golf d’Emile André et Gaston Munier, 1907.
_Une économie d’échelle. Ce lotissement était destiné à loger les employés de la Société des Eaux. Sur la vingtaine de villas prévues par André et Munier, seules 4 ont été réalisées : les villas Lorima, La Prêle, Antoinette, Alopreys et Les Frênes. «Bien que l’on ne retienne le plus souvent de l’Art Nouveau que quelques luxueux hôtels particuliers ou villas commandés par de riches clients, le mouvement répond à un idéal social. Créer un art nouveau pour tous, telle était l’ambition des principaux acteurs de l’Art Nouveau.»1
Le lotissement est un outils de développement de la station. Tout comme le quartier Madelon étudié précedemment, le lotissement Bouloumié donne l’épaisseur de la ville d’eau. Les villas sont doubles et permettent de loger deux familles. En déclinant les plans et créant des variantes qui s’adaptent à la stuation et la parcelle, André et Munier jouent ainsi sur la distribution intérieure pour affirmer la singularité de chaque logement.
1906
1907
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1 Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, éditions Honoré Clair, septembre 2011.
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_ Variété typologique. Les villas du Golf témoignent d’un véritable travail typologique dans les plans d’habitation : - les villas La Prêle, Antoinette et Lorima sont des villas-double, avec une entrée séparée pour chaque logement qui occupe une partie de la maison sur toute sa hauteur. Les villas sont traversantes d’est en ouest, permettant une ventilation des pièces et ainsi un logement plus sain. - la villa Les Frênes, avec un appartement par niveau correspond plutôt à une typologie d’immeuble, avec son entrée et l’escalier en commun aux habitants. Ayant la même typologie et une organisation interieure similaire, elles sont à la fois toutes différentes et toutes similaires. Asymétriques, avec l’utilisation de la brique pour la polychromie, pignons en demi-croupe, poteaux de clôture en pierre ..., le style régionaliste pittoresque leur donne le même air de famille. «La richesse de cette architecture est sans doute le produit de ces contradictions.»1 En effet, les villas du Golf regorgent de contradiction, dans l’optique de concilier les enjeux urbains d’unité d’ensemble tout en préservant à chacun son indépendance : - loger 2 familles ... mais donner l’apparence d’une seule habitation, - préserver l’intimité des 2 entrées ... mais conserver l’unité de la villa, - répéter le schéma distributif dans la même villa ... mais créer un plan assymétrique, Les villas forment ainsi un ensemble sous la forme d’un petit hameau de villas ayant toute leur propre caractère.
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Panorama des 4 villas autour du rond-point en demi-cercle.
1 Jean-Claude VIGATO (ss la dir. de), Vincent BRADEL, Patrick DIEUDONNÉ, Existe-t’il une architectonique de la maison ? Nancy, 1904-1970, Contributions à une critique architecturale de la maison individuelle, LHAC, ENSA de Nancy, 1985.
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_ La villa pittoresque rationnelle. Les quelques villas isolées édifiées au Parc Saurupt de 1904 à 1914 selon les dispositions du plan masse d’Emile André se présentent comme des villas compactes dont la silhouette est proche du cube. «Toutes les villas, malgré une disparité architectonique certaine, peuvent être analysées comme des transformations d’un cube de réference de 11 à 14m de côté.»1
_ Villa Les Roches, d’Emile André (1902-1904), 6 rue des Brices à Nancy (Parc Saurupt).
Etude volumétrique de la villa Les Roches.
(source : Patrick DIEUDONNÉ, Etude des villas du Parc Saurupt, ENSA Nancy, 1982. )
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1 Jean-Claude VIGATO (ss la dir. de), Vincent BRADEL, Patrick DIEUDONNÉ, Existe-t’il une architectonique de la maison ? Nancy, 1904-1970, Contributions à une critique architecturale de la maison individuelle, LHAC, ENSA de Nancy, 1985.
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Les villas construites par André au parc Saurupt et les villas du Golf à Vittel sont conçues selon le même principe additif des volumes, à partir de la volumétrie compacte plus ou moins ‘transformée’ d’un cube.
Villa La Prêle Villa Lorima Villa Antoinette 1
LÉGENDE
Volume cubique de base : noyau salon/séjour ou séjour/cuisine
Annexes greffées en façades nord et sud (entrée - perron - bureau - esalier - terrasse)
Transparence est-ouest
1
AD Meurthe-et-Moselle, Fonds d’archives André, Dossier du lotissement Bouloumié réalisé par Emile André et Gaston Munier(1906-1907), cote 119 J 149.
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_Villa Lorima.
La composition est dissymétrique dès le départ. La dissymétrie de la villa est inhérente à la rotation de 90° d’un logement par rapport à l’autre.
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_Villa La Prêle.
La composition est symétrique. L’asymétrie est produit par la toiture. Cette villa possède à la fois une façade dissymétrique sur la route menant au Golf (photo ci-dessus) et une façade symétrique donnant sur le demi rond point. Elles déterminent chacune l’entrée d’un logement. Ainsi, la disposition des entrées préserve l’intimité des habitants. Les deux façades des logements se singularisent l’un par rapport à l’autre sans pour autant perturber l’unité de la villa.
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_Villa Antoinette.
La composition est symétrique. C’est la villa la plus petite, avec une économie des surfaces et du programme (séjour-cuisine sans salon ..). Elle montre les limites de la logique additive des volumes. En effet, c’est la villa qui se rapproche le plus du cube. L’effet pittoresque produit par l’addition des pièces annexes n’est possible que pour des villas de taille importante. On comprend alors l’intérêt d’André pour les villas-doubles ou triples.
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_ Le modèle du cottage anglais. Les villas du Golf fonctionnent selon une logique additive des volumes. Le noyau de base est constitué des pièces de vie : salle-à-manger, cuisine. Viennent alors s’y greffer les pièces de services, comme l’entrée avec son perron, un bureau, un salon avec bow-window, terrasses, etc. Les annexes améliorent l’habitabilité de la maison. C’est le modèle du cottage anglais, décrit par Viollet-le-Duc1 pour un programme de maison de campagne : agglomérer de petits corps de logis d’une ou deux pièces sans égard pour la symétrie, chacun à hauteur convenable (selon la pièce, les besoins), des jours percés vers l’orientation préférée. Ce mode d’habitation des champs témoigne du sens pratique des anglais. Le modèle anglais s’oppose au modèle français, qui est d’élever un pavillon, c’est-à-dire un corps de logis concret, symétrique et où les services ne sont pas disséminés comme dans le mode anglais mais réunis en plusieurs étages sous un même toit. De la même manière que le cottage anglais est un diminutif du château de plaisance français du XVIe siècle, le cottage anglais provient du manoir anglais du Moyen-Age, avec ses logis éparpillés suivant les convenances de ses habitants. On peut ainsi mettre en parallèle les premières villas du parc Madelon avec les villas du Golf pour illustrer ces 2 modes de conception de la maison de campagne. Finalement, la recherche de lumière pour toutes les pièces du logement n’est pas d’avantage dû à la référence du cottage anglosaxon qu’à la politique hygiéniste de la station thermale.
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1 Viollet-le-Duc cité par J.-C. VIGATO, Existe-t’il une architectonique de la maison ? Nancy, 1904-1970, Contributions à une critique architecturale de la maison individuelle, LHAC, ENSA de Nancy, 1985.
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c/ Les villas jumelles dites villa pour deux médécins, réaisé par André Colin (1912).1
_Rationnalité et usage. Cette villa double s’inscrit dans la continuité des villas du Golf d’Emile André, avec une recherche de pittoresque. L’emploi des colombages et la toiture en ardoise font référence à la villa balnéaire. Ce qui frappe dans cette villa, c’est la rationnalité du plan. Les 2 villas sont parfaitement symétrique mais il en est autrement de l’usage. Le plan du rez-de-chaussée montre comment les pièces privées s’articulent avec les pièces réservées à l’activité professionnelle du médécin de cure : la salle-à-manger devient un salle d’attente dans la deuxième partie. La villa s’adapte à la situation, préservant l’intimité (entrées privées à l’arrière) et différencier les 2 cabinets (entrées sur l’allée plantée du parc thermal. Plan du RDC
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LÉGENDE
1
plan et façades tirés de l’ouvrage de Marie-Hélène Contal.
Partie professionnelle (cabinet médical) Partie privée (pièces de vie - cuisine/salle-à-manger)
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d) Les villas Garnier.
Avenue des Tilleuls
_La villa Nino - 1886. Passionné par l’architecture orientaliste et méditerranéenne, Charles Garnier réalisa l’une des toute première villa de Vittel dans le même style mauresque que celui de son établissement de bains. Elle était destinée à loger les ‘‘buveurs d’eau’’ aux abords du parc thermal, Garnier y reprend le style mauresque de son établissement de bains (1884), mais dans un vocabulaire classique : tripartition socle-étage-corniche, fronton triangulaire en pierre de taille pour l’encadrement des baies, composition symétrique, travée centrale accentuée. L’effet de corniche est marqué par une frise polychromique en céramique vernie, au motif très géométrisé tendant vers l’abstraction, dans des teintes rouge, jaune et turquoise orientalisvantes. La villa Nino, et son extension la villa Minima (1905) s’inscrivent dans la lignée des villas déjà réalisées par Garnier sur la Côte d’Azur.
Avenue des Tilleuls
Avenue de Gérémoy
Villa Nino - 1886
La tour belvédère de la villa Minima apparait en arrière plan - En 1989, la villa accueillaitbureaux et cabinets médical. Plan du RDC ci-contre en haut. (source : AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
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Villa Minima - 1905
Extension de la villa Nino, avenue des Tilleuls. Plan du RDC ci-contre en bas.
(source : AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
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_ La villa St Pierre, 1893.1
Anciennement villa Debrousse, cette villa située avenue de Géremoy à l’entrée du parc thermal a été racheté par le Dr Pierre Bouloumié lorsqu’il décida de s’installer à Vittel comme médecin de cure. Il y amenagea son cabinet au RDC ainsi qu’un laboratoire en sous-sol. _Silhouette. Dans la continuité du parc thermal, la villa St Pierre, entourée par un vaste jardin est à l’image des l’édifice des thermes dans son parc. La villa St Pierre, est dotée d’un avant-corps avec une très haute fenêtre surmontée d’un fronton triangulaire en pierre de taille, qui fait office de belvédère. Cela offre des vues dans la campagne tout en imposant la silhouette de la villa dans le paysage. Charles Garnier distingue l’immeuble urbain de l’habitation balnéaire : « des silhouettes plus accidentées, plus pittoresques, avec des corps de bâtiment en saillie, des hauteurs variées, des balcons, des loggias, des campaniles, un ensemble svelte qui s’harmonise avec le ciel clair et chaud de l’été et qui exprime si bien le principal charme de la vie rurale : une heureuse indépendance.»2
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source photographie : AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174. Jean-Michel LENIAUD, Charles Garnier, Monum, Paris : Éditions du Patrimoine, 2003.
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102 Les villas de Bordighera, sur la Riviera. 1875-1882. Un volume parallélépipédique blanc d’où émerge un belvédère sur l’horizon infini de la mer. Construite pour Garnier lui-même, la villa de Borghera servira de modèle et sera publiée dans de nombreuses revues. (source : Jean-Michel LENIAUD, Charles Garnier, Monum, Paris : Éditions du Patrimoine, 2003.)
_Relation intérieur/extérieur. Garnier milite en faveur d’une diversification des formes en fonction des paysages dans lesquelles elle s’implante. Il mène un combat contre l’uniformisation mondiale du bâti (exigences hygiènistes, uniformisation des matériaux de constructions ...). Il dresse une critique du Paris haussmannien et de son cahier des charges très strict dans la contruction des immeubles de la capitale. Il oppose ainsi l’immeuble Hachette qu’il a réalisé en 1878 à Paris avec ses villas de villégiature. «Toute cette aristocratie urbaine a pris, de nos jours, l’habitude d’abandonner quelques mois chaque année le séjour de la ville. L’emplacement est choisi : on veut jouir d’un bel horizon, des vallées et des bois (...) ou sur le bord de la mer. On évite les formes froides et sévères. On préfère une architecture plus libre, des silhouettes plus pittoresques. L’espace à la campagne ne doit pas être mesuré, on aime à y prendre sa revanche des nécessités que la ville impose trop souvent (...) Mais surtout, on se préoccupe moins d’assurer la régularité du plan que de ménager aux diverses pièces une exposition convenable et de beaux points de vue. (...) Il faut que par le cadre des fenêtres, par l’enfilade des portes, on aperçoive des tableaux champêtres, de riantes perspectives.»1
Schéma illustrant les relations intérieur/extérieur Plan du RDC de la Villa St Pierre
(source : AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
LÉGENDE
Tour belvédère où se loge l’escalier
Recherche de lumière naturelle e de vues sur l’extérieur. (bow-window, verrière)
Transparence avec l’extérieur
1 Béatrice BOUVIER, Charles Garnier (1825-1898), architecte historien de « L’habitation Humaine » in L’architecte historien, Livraisons d’histoire de l’architecture, n°9, 2005.
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_ Un décor simplifié et épuré. Les thermes et les deux villas Garnier ont le même décor mauresque inspiré des nombreux voyages de Garnier dans les pays méditerrannéens comme l’Italie, la Grèce, la Turquie. Ainsi, les volumes parallélépipédiques simples et blancs (comme l’habitat vernaculaire méditerranéen) sont ornés par des décors de mosaïques et de céramiques dans des couleurs chaudes et vives aux motifs floraux et orientaux. La villa St Pierre s’impose dans une végétation envahissante et attire l’oeil du passant par ses motifs floraux et scintillants peints en rouge, doré et turquoise sous le débord de toiture. C’est byzance aux portes du thermalisme avec le consentement des hygiènistes.
Dans la continuité des villas de Bordighera, les décors sont le fruit d’un travail sur « la recherche de contrastes puissants, entre le blanc et l’ombre, entre le monochrome et le polychrome, par le combat du décor dans les parties hautes avec la lumière solaire.»1 Garnier s’éloigne ainsi de l’architecture néo-baroque de l’Opéra de Paris (1861) où il multipliait les effets qui permettent de transformer la surface plane et aveugle du mur par tout un art du modelé (niches, creux, renfoncement) relevant presque d’un travail de sculpture. Les villas de Bordighera et la villa St Pierre de Vittel ont une écriture différente qui annonce une nouveauté stylistique : un retour au linéaire et à la planéité du mur, une affirmation des corniches, des bandeaux et des axes des belvédères, une élimination de la modénature. Ce langage néoclassicique de plus en plus épuré préfigure les recherches de l’architecte autrichien Otto Wagner à Vienne.2
1 2
Jean-Michel LENIAUD, Charles Garnier, Monum, Paris : Éditions du Patrimoine, 2003. Jean-Michel LENIAUD, op. cit.
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Verrière demi-cylindrique et bow-window du salon. La lumière coule à flots. La Nature pénétre les pièces de la maison. (source : photos Michelle Trachbach)
_Lumière. La villa St Pierre s’inscrit dans la continuité des villas que Garnier réalisa sur la Côte d’Azur, marquées par l’influence de l’Italie et la recherche de pittoresque : «L’objectif est celui de la couleur locale. Il l’obtient par ces belvédères qui rappellent les tours de guets dites lombardes, ses loggias largement ouvertes...»1
Le Dr Bouloumié réalisera deux extensions de la villa de Charles Garnier2 : un pan de verre demi-cylindrique au nord-ouest crée la salle d’attente des patients et un bow-window en murs maçonnés agrandit la salle-à-manger au sud-est, tout en rééquilibrant la villa. La lumière naturelle penètre ainsi abandamment dans la villa :
Greffes réalisées par le Dr Bouloumié pour capter la lumière naturelle. Plan du RDC de la Villa St Pierre
(source :AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
Salon
Salle d’attente des patients
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LÉGENDE
1 2 2012.
Extensions faites par le Dr Bouloumié
Volumétrie générale
Jean-Michel LENIAUD, Charles Garnier, Monum, Paris : Éditions du Patrimoine, 2003. Travail de recherche mené par Michelle Trarbach dans le cadre d’un enseignement d’Histoire de l’Architecture à l’ENSA Nancy,
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1905 : Le nouvel établissement thermal - Plan du RDC Construit d’après les indications du Dr Pierre Bouloumié (source : Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, 1982.)
_ U l t Q p
On peut mettre cette évolution en parallèle avec les travaux entrepris pour l’agrandissement de l’établissement thermal par le Dr Pierre Bouloumié en 1905. On voit un changement dans la pratique de la cure. Le nouvel établissement applique les principes hygiénistes à la lettre.
p N T M
L’espace dédié à l’application des soins, des douches et des bains, déjà rationnalisé par Charles Garnier avec ses cabines, l’est tout autant chez le Dr Pierre Bouloumié. Reprenant l’idée du patio central des thermes Garnier, il imagine un grand atrium couvert par une immense verrière, en strucuture métallique et en verre, matières «propres» et préférées des hygiénistes.
p 1 s e t p J 1 c H
Etablissement thermal de 1905. Verrière et mezzanine de l’atrium.
(source : Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, 1982.)
On peut également noter une évolution dans la deuxième génération des villas du Parc Madelon, construites dans les dernières parcelles et au-délà, à partir de 1905. Elles annoncent les villas du Golf d’Emile André : la symétrie est progressivement abandonnée pour tendre vers une recherche de pittoresque, les baies vitrées se diversifient mais surtout elles s’agrandissent.
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1 n L 2 n L
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3) Les principes hygiénistes : prémices de la modernité.
Le statut particulier des villes d’eaux en fait un terrain fécond pour l’application des théories hygiénistes. Les préceptes d’air, de lumière et de verdure, que s’appropriera le mouvement moderne pendant les années 20 sont donc présents en germe dans les réalisations de la génération précédente.
a/ L’utilisation du verre.
Le verre est le matériau hygiénique par excellence. Il est utlisé pour sa facilité d’entretien et de nettoyage mais aussi pour sa transparence et l’apport de lumière naturelle. Associé au métal, le verre se développe particulièrement au XIXe siècle. Les hygiénistes s’attachent ainsi à dimensionner pragmatiquement les dimensions des baies en fonction de la surface et de la profondeur de la pièce à éclairer.
Schémas d’étude de l’éclairage naturel par Emile Trélat. surface de fenêtre = 1/3 de la surface au sol de la pièce
(source : Christian MOLEY, L’Architecture du logement : cultures et logiques d’une norme héritée,1998.)
111 Le verre est avant tout utiliser pour ses qualités de transparence «réelle». «L’idéologie hygiéniste est donc associée à celle de la transparence entendue comme manifestation du bon fonctionnement de la « machine à habiter » et jamais comme moyen de mettre en relation l’espace privé et l’espace public, le dedans et le dehors.»1 1 Simona TALENTI, La transparence dans l’architecture domestique du siècle dernier, université de Barcelone, mis en ligne en le 9 janvier 2006.
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Maison pour le Dr Dalsace, Ă Paris, 1932. Plans, axonomĂŠtries. (source : internet)
_La maison de verre de Pierre Chareau, 1932, pour le Dr Dalsace, gynécologue. La maison de verre de Pierre Chareau témoigne de la «volonté d’inscrire l’environnement moderne dans le verre et le métal.»1 Le pan vitré en pavés de verre n’établit pas de relation avec l’extérieur, c’est un filtre qui diffuse la lumière dans la maison : «La maison fut d’emblée conçue comme une machine de lumière, son plan libre étant inondé par la lueur diffuse qui entrait par les façades avant (sur la première cour) et arrière (sur le jardin), toutes deux quasi intégralement traitées en panneaux de pavés de verre Colorado, insérés dans de minces cadres métalliques recouverts de ciment.»2
113 La paroi en pavés de verre, diffuseur de lumière. (source : internet)
1 Kenneth FRAMPTON, De l’Art déco au Front Populaire, l’architecture française de l’entre-deux-guerres, in L’architecture moderne, une histoire critique, 1925. 2 op cit.
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b/ Transparences. Les habitations optent pour des dispositions traversantes d’est en ouest, comme les villas du Golf et la villa St Pierre. L’objectif premier est la bonne ventilation du logement et le renouvellement de l’air. Cela amène progressivement les architectes à jouer sur les effets de stratifications de l’espace. L’effet de profondeur donné par les différents plans successifs crée une succession d’espaces qui mettent en relation de façon progressive l’intérieur avec l’exterieur. La transparence de l’habitation hygiéniste ne se manifeste pas seulement par l’utilisation de matériau transparent physiquement mais aussi par la recherche de transparence dans l’organisation spatiale des pièces. La maison est pensée depuis le noyau intérieur pour ensuite établir des dialogues avec l’extérieur par le biais d’un bow-window pour le salon greffé au séjour, un perron pour l’entrée, une cage d’escalier pour relier les différents niveaux... En rejetant les pièces de services en façade pour animer celle-ci et créer une composition pittoresque,on établit des relations particulières entre l’intérieur et l’extérieur. La façade devient une enveloppe qui fait un espace tampon avec l’extérieur. La transparence de la maison de verre de Chareau ne se manifeste pas tant par l’utilisation de pavés de verre translucide mais par les jeu de double hauteur avec l’escalier qui monte à l’étage et crée une double-hauteur pour le salon. Le pan de verre demi-cylindrique de la villa St Pierre apporte une dimension supplémentaire : la relation avec l’extérieur, un des principes qui sera largement développé dans l’Architecture moderne. On peut mettre cela en parallèle avec un des principes de l’Architecture Moderne développé par Le Corbusier. « Un plan procède du dedans au dehors. Un édifice est comme une bulle de savon. Cette bulle est parfaite et harmonieuse si le souffle est bien réparti, bien réglé de l’intérieur. L’extérieur est le résultat d’un intérieur.» Le Corbusier, Vers une Architecture, coll. Champs Arts, 1923, réédition de 1995.
A l’image des hygiéniste comme le Dr Lalesque et la villa hygiénique modèle d’Arcachon, l’édifice est conçu à partir d’une intériorité. La métaphore hygiéniste est tentante. L’hôtel Carnot de Guadet est, avec ses parois très fines, comme rongée de l’intérieur, par l’air et la lumière. Le Dr Bouloumié sur la villa St Pierre insuffle les préceptes hygiénistes à la villa de Garnier, qui en ressort vers l’extérieur en une verrière demi-cylindrique.
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Synthèse de la troisième partie. Les principes de la villa hygiénique modèle, prémices de la modernité. Les villas du quartier thermal étaient destinées aux employés de la Société des Eaux : médecins de cure, entrepreneurs de travaux publics, propriétaires hôteliers, employés ... 1890-1914 Les villas du parc Madelon reflètent les multiples influences de l’Architecture éclectique de cette fin du XIXe siècle. Cette quête stylistique montre aussi la recherche d’une identité pour ce nouveau quartier, créé ex nihilo. 1886 La villa Nino de Charles Garnier, destinées en premier lieu à loger les buveurs d’eaux, possède une frise de céramiques vernies sous le débord de toiture aux motifs mauresques dans la continuité de l’établissement thermal déjà construit par Garnier en 1884. Elle annonce la villa St Pierre par son décor abstrait et hygiénique mais reste dans un vocabulaire encore classique. 1893 La villa St Pierre de Charles Garnier remplit tous les critères de la villa hygiénique modèle : villa isolée, grandes baies atteignant parfois la dimension d’une verrière, parois lisses, grands volumes sous plafonds, salon-salle à manger traversants d’est en ouest pour ventiler, etc. Son style mauresque est influencé directement par celui des thermes comme pour la villa Nino. C’est byzance aux portes du thermalisme avec le consentements des hygiénistes. 1909 Les villas du Golf sont des villas pittoresques rationnelles sur le modèle pragmatique du cottage anglais de Viollet-le-Duc selon une logique additive des volumes. La recherche de lumière est dû davantage à la référence du cottage anglais qu’à l’influence de l’hygiénisme thermal. Les villas suivent la volonté de faire de Vittel une station à l’anglaise, luxueuse et verdoyante. 1912 Les villas jumelles pour 2 médecins réalisées par André Colin (1912) s’inscrivent dans la même recherche de pittoresque, avec une rationnalité et un souci pour l’usage.
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Cette étude nous permet donc d’en déduire que l’hygiénisme des villas thermales découle de la forme urbaine. La cité-jardin, en imposant la forme de la villa isolée, favorise l’application des prescriptions hygiéniques à l’intérieur des habitations. Les préceptes hygiénistes sont finalement des principes très généraux qui laissent beaucoup de liberté aux architectes. Ils amorcent les principes de la modernité où l’espace de la maison se rationnalise.Ce sont des principes qui peuvent nous paraitre évident car ils font désormais partie de notre quotidien. Il faut replacer cela dans le contexte des villes délétères du XIXe siècle. La question de l’hygiénisme dans l’habitat pose la question plus large du confort dans l’habitat. Ces hygiénistes ont le mérite d’avoir rappelé l’importance des sens dans le plaisir d’habiter : lumière, odorat, toucher ... La maison en devenant rationnelle devient un outils à notre service pour plus de confort comme en témoigne les Villas du Golf d’Emile André conçues selon une logique aditive des volumes. Les pièces des services se multiplient : la maison devient un outils. En fervent hygiéniste, le Dr Pierre Bouloumié veilla à l’application des principes d’air et de lumière dans l’établissement thermal à partir de 1905. Les qualités d’espace et de confort le pousseront ainsi à faire de même pour sa villa personnelle où il reçoit ses patients. Les médecins des eaux n’ont laissé aucune oeuvre théorique importante dans le domaine de l’Architecture thermale. On trouve des textes très généraux, comme celui de Garrigou intitulé Conseils pratiques sur l’aménagement des établissements thermaux, publié dans la revue Le Midi médical à toulouse en 1893. Les médecins prescrivent donc des «conseils», des ‘‘dispositions’’, de façon très pragmatique et scientifique. Ils sont pourtant à l’origine d’une doctrine thermale.1 Les interventions du Dr Pierre bouloumié sont un manifeste pour l’application de l’hygiénisme thermale dans l’Architecture de la station. Rares sont les médecins qui se sont autant impliqués dans le domaine de l’Architecture thermale. Les villas hygiéniques d’Arcachon ne véhiculent pas les mêmes idées de lumière, d’air et de verdure que la villa Saint-Pierre, alors qu’elles le revendiquent pourtant. À l’image de la ville d’eau fondée sur la dualité santé/loisirs, la villa thermale est fondée sur la duplicité rationnalité/confort-plaisir d’habiter.
1
Dr Michel CRAPLET, La médecine thermale : du plaisir à la cure, in Les villes d’eaux en France, IFA 1985.
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Aujourd’hui, des pavillons et maisons d’habitations plus modestes et d’une architecture plus banale sont venus compléter, étendre le parc Madelon et le lotissement Bouloumié. Plus on s’éloigne de la station et plus les habitations sont banales. En effet, les lotissements qui voient le jour à partir des années 30 entre la station thermale et l’agglomération urbaine doivent se conformer au plan d’aménagement, d’embellissement et d’extension de la ville (1928) dressé par Léon Jaussely. Seul le logement est autorisé à être construit dans cette zone (sont interdits les usines, les fabriques, les entrepôts, les hôpitaux pour aliénés, les prisons, etc). Il se fera sous la forme de petites villas ou de maisons ouvrières.1 «Le temps de la construction des riches villas fait place au temps des constructions pour tous, accessibles à tous.»2
Le plan d’extension de Jaussely prévoyait aussi la réalisation d’un grand boulevard qui viendrait ceinturer la ville , à l’image d’un ring comme dans les villes allemandes. Son but est bien de contenir l’urbanisation et donner une limite à la ville. Ce boulevard ne sera pas réalisé. Aujourd’hui, l’étalement urbain ne semble pas vraiment avoir de limite et vient miter progressivement les collines boisées au delà des villas du golf notamment. On peut regretter la pauvre qualité des pavillons qui se construisent aujourd’hui, par rapport aux villas d’André ou celles des années 30. Bien que les villas du Golf soient pour la plupart aujourd’hui regroupées en une seule habitation et habitées par une population relativement aisé, le projet initial prévoyait des villas doubles voire quadruple avec une grande variété. Plan d’extension, d’aménagement et d’embellissement de Vittel, réalisé par Léon Jaussely, 1926. (source : site internet IFA)
Schéma illustrant la dilution du parc parmi les habitations. (fond google earth)
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AD Vosges, Dossier Lotissements-Projet de construction (1929-1933), cote 2 O 547 / 18. René THIVET, L’essor urbanistique de Vittel, in Des sources au thermalisme, ss la dir. de Jean-Paul ROTHIOT, 2001.
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RÉSUMÉ
Le quartier thermal de Vittel (1884-1914)
Infl ue n c e d e l ’ hy g i é n i s me s u r l e s a mé n a g e me nts ur bai ns e t l a conce pti on de s vi l l as .
V
ittel est la ville de la famille Bouloumié. Trois générations différentes s’y sont succédées, avec le même rêve et le même projet en tête : faire de Vittel une ville d’eau de renommée internationale.
Le thermalisme est passé durant ce siècle d’un mythe ritualisé autour de l’eau de source à une pratique scientifique, médicalisée, petit à petit contrôlée et organisée par les médecins. Une nouvelle profession est née : la médecine thermale. L’activité thermale agit comme un catalyseur de développement urbain. Le quartier thermal de Vittel est donc la création d’une ville nouvelle juxtaposée à la ville ancienne : elle est conçue comme une ville organique, aérée et hygiénique, en relation avec la nature, une nature maîtrisée mais omniprésente. Ces cités-jardin à la française qui fleurissent dans les stations thermales et balnéaires de la fin du XIXe siècle répondent à un idéal : celui de rapprocher l’homme urbain de la Nature. Les cités-jardins sont des utopies urbaines, difficilement applicables dans le contexte économique et social. Ces utopies ont le mérite de remettre en question notre conception de la ville. Ces utopies alimentent notre imaginaire et notre désir d’améliorer l’environnement dans lequel nous évoluons. La ville thermale n’est pas une ville idéale mais une synthèse de ces idéaux confronté à la réalité. Les villas thermales appliquent les principes d’air, de lumière et de végétation à l’échelle domestique. Elles portent en elles les germes, les principes de l’Architecture moderne : lumière, rationnalité, «machine à habiter», outils de confort, transparences, intéraction intérieur/extérieur ...
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B i b l i o g r a p h i e Ouvrages sur Vittel / Histoire locale Dr Pierre BOULOUMIÉ, Histoire de Vittel, Création d’une ville thermale, Des origines (1851) à 1924, Mirecourt : Imprimerie de la Plaine des Vosges, 1924, réédition de 1982. Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, préface de Guy de la Motte-Bouloumié, ed du Moniteur, 1982. Guy DE LA MOTTE-BOULOUMIÉ, 125 Années de Vittel, 1852-1977, Vittel, 1977. Pierre MOINE, Vittel, 150 ans de travaux, brochure éditée par la Municipalité de Vittel à la suite des « Journées du Patrimoine » de l’an 2000, Contrexéville : imprimerie inquarto, 1er trimestre 2001. Jean Paul ROTHIOT (textes réunis par), Des sources au thermalisme, Vittel - Contrexéville, actes des Journées d’études vosgiennes, Contrexéville, Vittel, 27 et 28 octobre 2001 ; publ. par le Cercle d’études locales de Contrexéville et le Cercle d’études de Vittel et sa région, [Nancy], [Association d’historiens de l’Est], 2002. Histoire de l’architecture et de l’urbanisme Sabine BARLES, La ville délétère : médecins et ingénieurs dans l’espace urbain (XVIII-XXe siècles), Seyssel, Champ vallon, «Milieux», 1999. Vincent BRADEL, Francis ROUSSEL, Nancy, Le Parc de Saurupt, plaquette réalisée par la Direction Régionale des Aff. Culturelles de Lorraine (DRAC), coll. Itinéraire du partimoine, éd Serpenoise, 1998. Sophie CUEILLE, Le Vésinet, modèle français d’urbanisme-paysager, 1858-1930, «Cahiers de l’Inventaire 17», Imprimerie Nationale Editions, 1989. Patrick DIEUDONNÉ, Etude des villas du Parc Saurupt, ENSA Nancy, 1982. Monique ELEB avec Anne DEBARRE, L’invention de l’habitation moderne – PARIS 1880-1914 – Architecture de la vie privée, suite, ed AAM / HAZAN, 1995.
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Kenneth FRAMPTON, De l’Art déco au Front Populaire, l’architecture française de l’entre-deux-guerres, in L’architecture moderne, une histoire critique, ed Thames & Hudson, 1925. Christian MOLEY, L’Architecture du logement : cultures et logiques d’une norme héritée, ed Anthropos, collection La Bibliothèque des Formes, sous la direction de Pierre Pellegrino, 1998. Philippe PANERAI, Jean CASTEX, J.-Ch. DEPAULE, Formes urbaines - De l’îlot à la barre, coll. Eupalinos, série Architecture et urbanisme, ed. Parenthèses, Marseille : 1997. Raymond UNWIN, L’étude pratique des plans de ville, coll. Archigraphy Poche, edI NFOLIO, 1923, réédition 1930. Jean-Claude VIGATO (ss la dir. de), Vincent BRADEL, Patrick DIEUDONNÉ, Existe-t’il une architectonique de la maison ? Nancy, 1904-1970, Contributions à une critique architecturale de la maison individuelle, Laboratoire d’Histoire de l’Architecture Contemporaine (LHAC) de l’ENSA de Nancy, 1985. Thermalisme et villégiature Christian JAMOT, Thermalisme et villes thermales en France, Université de Clermont-Ferrand II, publication de l’Institut d’Etudes du Massif Central, mai 1988. Jérôme PENEZ, Les réseaux d’investissements dans le thermalisme au XIXe siècle en France, In situ n°4, mis en ligne le 1 mars 2004. http://www.insitu.revues.org/1665 Mathias ROTHE, L’eau de l’hygiène et l’eau de la prudence, in Culture des villes d’eaux, ss la dir. de Didier FRANCFORT et Antoine NIVIÈRE, publié par les Presses universitaires de Nancy, 2011. Jean Paul ROTHIOT (textes réunis par), Des sources au thermalisme, Vittel - Contrexéville, actes des Journées d’études vosgiennes, Contrexéville, Vittel, 27 et 28 octobre 2001 ; publ. par le Cercle d’études locales de Contrexéville et le Cercle d’études de Vittel et sa région, [Nancy], [Association d’historiens de l’Est], 2002. Bernard TOULIER, Architecture et urbanisme, Villégiature des bords de mer, XVIIIe-XXe siècle, éditions du patrimoine, novembre 2010. Bernard TOULIER, Architecture des villes d’eaux. Stations thermales et stations balnéaires, conférence prononcée au colloque sur les Villes d’eaux en 1994 à Salies-de-Béarn.
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Monographies d’architectes Silvana BAUDROUX-ZEOLI, De Nancy à Vittel, l’itinéraire de Fernand César, architecte, mémoire de master réalisé sous la direction de Messieurs PUPIL, professeur d’histoire de l’Art et ROUSSEL, Conservateur de l’Inventaire Général de Lorraine. Faculté de Lettres et Sciences Humaines de Nancy, UFR d’Histoire de l’Art, octobre 1993. Béatrice BOUVIER, Charles Garnier (1825-1898), architecte historien de « L’habitation Humaine » in L’architecte historien, Livraisons d’histoire de l’architecture, n°9, 2005. Isabelle CHAVE (ss la dir. de) , Répertoire des architectes nés ou actifs dans les Vosges 1800-1940, Conseil Général des Vosges, ouvrage accompagnant le catalogue de l’Exposition « Chantiers publics, chantiers privés », 2007. Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, éditions Honoré Clair, septembre 2011. Bruno GIRVEAU (sous la direction de), Charles Garnier, un architecte pour un empire, catalogue de l’Exposition présentée à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris du 26 octobre 2010 au 9 janvier 2011. Jean-Michel LENIAUD, Charles Garnier, Monum, Paris : Éditions du Patrimoine, 2003.
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Remerciements
J
e souhaite remercier les personnes qui ont apporté une aide et ont contribué à mener ce mémoire à terme : Les archives départementales des Vosges et de Meurthe-et-Moselle ainsi que leurs documentalistes qui m’ont aiguillé dans mes recherches. Les archives municipales de Vittel pour m’avoir mise en contact avec l’Assocition de la Maison du Patrimoine de Vittel ainsi que sa présidente Mme Jacqueline Verrier, et sa vice-présidente Mme AnneMarie Croville. L’équipe enseignante également, qui nous a grandement aidé dans la construction de notre sujet, dans la construction d’un discours mais surtout pour avoir cru en l’intêret de nos sujets. La médiathèque et ses documentalistes, toujours à notre disposition. Et bien sûr ma famille ... pour tout.
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Annexes
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Les principaux membres de la famille Bouloumié impliqués dans la station thermale de Vittel.1 Louis BOULOUMIÉ (Rodez,1812-1869)
Avocat, puis magistrat Républicain, opposé au régime bonapartiste Condamné politique, déporté en Espagne. Placé sous régime de «haute surveillance de police» à Contrexéville en 1852. Acquéreur de la source de Geremoy en 1854. Fondateur de la station hydrominérale de Vittel
Ambroise BOULOUMIÉ (1843-1903) Fils de Louis Avocat de formation Conseiller général de 1889 à 1903 Directeur de la Société des Eaux de 1882 à 1903 Maire de Vittel de 1875 à 1879, puis de 1882 à 1903 Pierre BOULOUMIÉ (1884-1929)
Petit frère d’Ambroise Médecin de guerre Médecin de cure à Vittel à partir de 1898 Conseiller général de 1903 à 1907 Administrateur de la Société des Eaux de Vittel Président de la Société de Médecine de Paris Fondateur de l’association «Union pour les femmes des soldats blessés au combat» Auteur du mémoire De la police sanitaire dans les villes d’eaux (1887)
Jean BOULOUMIÉ (1878-1952)
Fils d’Ambroise Médecin de formation (études à la Faculté de médécine Nancy) Maire de Vittel de 1919 à 1945, républicain national. Succède à son oncle Pierre en tant que conseiller général de Vittel (de 1919 à 1945 puis de 1945 à 1952) Directeur de la Société des Eaux pendant près de 40 ans, succède à Pierre en 1938 et à son père en 1903
une personalité de notable 1 Sources
Guy DE LA MOTTE-BOULOUMIÉ, 125 Anneées de Vittel Jean-Paul ROTHIOT, Des sources au thermalisme, op cit.
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Charles GARNIER (1825-1898)1, premier architecte officiel de la Société des Eaux de Vittel (1883-1898). Issu d’une famille d’artisans, il est inscrit à l’École gratuite de dessin à Paris, avant d’intègrer l’École des Beaux-Arts, au sein de l’atelier de l’architecte Hippolyte LEBAS de 1842 à 1848. Cette formation s’achève par le Grand Prix de Rome remporté le 23 septembre 1848, lui permettant de séjourner 5 années à Rome et en méditerranée. Ses voyages auront une grande influence sur son oeuvre à venir, fasciné par les couleurs chaudes de l’Orient et les payasages pittoresques. Il obtient une certaine renommée grâce au concours de l’Opéra de Paris (1861). «Garnier est un pur produit de l’Enseignement rigoureux de l’Ecole des Beaux-Arts et qui pourtant fit toujours preuve d’une grande liberté de création.»2 Il possède une grande ouverture d’esprit, c’est un touche-à-tout : il est à la fois architecte, peintre, modeleur, caricaturiste, critique d’art, écrivain, poète, chansonnier, homme de spectacle, grand amateur de théâtre et d’Opéra, voyageur infatiguable et joueur invétéré.
Quelques réalisations 1861-1874 Lauréat du concours du Nouvel Opéra de Paris, édifice le plus monumental du siècle, dont il sera l’architecte jusqu’à sa mort, 1877-1879
Immeuble du Cercle de la Librairie (dit immeuble Hachette), bvd St Germain à Paris.
Les villas de Bordighera, 1875 Villa Bordighera, 1878 Villa Bischoffsheim, pour un riche banquier (villa similaire à la sienne), 1882-84 Villa Negro, Villa Studio, Villas Amica, Modesta et Minima,
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Station thermale de Vittel 1883-1886 Etablissement thermal avec galerie-promenoire, pavillon de source, casino et chapelle, 1886 Villa Nino pour son fils Christian et son extension la villa Minima 1905, 1893 Villa St Pierre, ancienne Villa Debrousse, pour le Dr P.Bouloumié, promoteur de la station, Ouvrage (écrit en collaboration avec l’historien ........) Histoire de l’habitation humaine, dans le cadre de l’Exposition Universelle de 1889.
1 AD des Vosges, Répertoire des architectes nés ou actifs dans les Vosges 1800-1940, Conseil Général des Vosges, ouvrage accompagnant le catalogue de l’Exposition « Chantiers publics, chantiers privés », p 23. 2 Bruno GIRVEAU (ss la dir. de), Charles Garnier, un architecte pour un empire, catalogue de l’Exposition présentée à l’Ecole des BeauxArts de Paris du 26 oct 2010 au 9 janvier 2011.
François-Joseph NACHON (-1909) Elève de Charles Garnier, il sera l’un de ces collaborateurs dans son agence pendant l’époque de l’Opéra. Architecte officiel de la Société des Eaux (1899-1909). Quelques réalisations 1901-1902
Galerie-Promenoire en structure métallique (en avant de la galerie-prome noire des thermes Garnier) élégante et très travaillée, comme c’était d’usage dans l’architecture thermale de l’entre-deux-guerre (galerie de Vichy ...).
1883-1886
Casino de Vittel, avec Charles Garnier (aujourd’hui disparu à la suite d’un incendie)
1890 ?
Agrandissement du Pavillon de Cérès (hôtel de l’établissement situé dans le parc thermal) - reconstruit en 1905 -
En 1895, il visite l’Eglise du Grand Ban (noyau villageois de Vittel situé sur la rive gauche de la rivière du Vair). Il encourage alors à la faire examiner par l’architecte diocésain du département, s’inquiétant pour des problèmes de consolidations urgents.
Caricature réalisée par Charles GARNIER, Nachon à Bordighera, 1886, plume et encre brune, Paris, Ensba. (source : ENSBA Paris, L’oeil et la plume, Ch. Garnier et la caricature, dossier pédagogique, 2010.)
Ces quelques éléments recueillis dans des ouvrages sur l’urbanisme et l’histoire de Vittel nous montre un des élèves de Garnier qui a activement secondé son maître dans tous les chantiers et projets de la Société des Eaux. L’anecdote de l’église du Grand Ban nous montre également qu’il s’impliquait dans la ville et pas seulement dans la station thermale. Il a également servi d’intermédiaire lors des acquistions des parcelles constituant la proprieté de la Société des Eaux, notamment des terrains du futur parc Madelon.1
Emile CHAISE (Ivry-sur-Seine, 1858-1916) Architecte prolifique de la ville d’Ivry-sur-Seine de la fin du XIXe, début du XXe siècle. En 1894, il est classé troisième au concours pour le nouvel Hôtel de ville d’Ivry-sur-Seine. Parmi les jurés supplémentaires du concours se trouvait Charles Garnier. 2 Emile Chaise n’a certes pas remporté ce concours mais peut-être a-t’il pu obtenir la commande de la villa «Léa-Joséphine» (1903) à Vittel, grâce à sa rencontre avec Charles Garnier, qui, en 1894, avait déjà réalisé l’Établissement des Thermes (1884), la villa Nino (1886) et achevait la villa St Pierre (1893) à Vittel ?
1
AD Vosges, Fonds des minutes de actes notariés, Vittel, Maitre Nestor Joseph FALQUE, 1884 (cote 5 E 523)
2
Archives municipales d’Ivry-sur-Seine et site internet : http://www.journeesdupatrimoine.culture.fr
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Emile André (Nancy, 1871 - Nancy, 1933)1 Petit-fils de François André (1811-1904), entrepreneur architecte et fils d’Antoine-Charles André (1841-1926), architecte départemental de Meurthe-et-Moselle, Emile André est issu d’une famille d’entrepreneurs architectes renommés de la ville de Nancy. Son père était notamment très impliqué dans la promotion de la culture lorraine et il dirigea la première Exposition d’Arts décoratifs lorrains (1894). Il est un des membres fondateurs de l’Alliance Provinciale des Industries d’Arts, aussi appelée mouvement de l’Ecole de Nancy, créée en février 1901. C’est un des architectes dont les bâtiments ont le plus marqué le paysage de la ville de Nancy. Son oeuvre dépasse le caractère purement décoratif de l’Art Nouveau, pour contribuer aux débats contemporains de l’art social et de la nécessaire industrialisation. Gaston Munier (Pont-à-Mousson, 1871 - Bayon, 1918) Architecte nancéien, formé à l’Ecole des Beaux-Arts et élève de Victor Laloux. Il a voyagé en Egypte avec son collègue et ami Emile André en 1906. Membre de l’institut archéologique oriental (1899). Il a réalisé de très belles peintures et aquarelles de la station thermale de Vittel vers 1906.
Quelques réalisations :
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- usine ferroviaire Dietrich (usines et cité ouvrière) , 1903-1913, par André, Munier et Bertrand. - lotissement du Parc Saurupt à Nancy, 1901 (inachevé) - Loge du concierge, 2 rue des Brices (entrée du parc), 1902-1903, par E. André et Henri Gutton - villa Les roches, 6 rue des Brices,1902-1904, par E. André (pour lui-même), - villa Les Glycines, 5 rue des Brices, 1902-1904, par E. André - lotissement Bouloumié à Vittel, 1906-1907 (inachevé) (villas Lorima, Les Prêles, Antoinette et Les Frênes) - 2eme prix pour le projet de reconstruction du théâtre de Nancy, 1907, par André et Munier Portrait d’Emile André et Gaston Munier. Photographie montée sur une feuille (H. 13, l. 18,5 cm) (Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, 2011.)
1
- Hervé DOUCET, Emile André, art nouveau et modernités, éditions Honoré Clair, septembre 2011. - Isabelle CHAVE (ss la dir. de) , Répertoire des architectes nés ou actifs dans les Vosges 1800-1940, 2007.
Fernand César (Nancy, 1879-1969) 1 Fils de l’ingénieur-architecte Félicien César (1849-1930). Architecte nancéien, formé à l’école des Beaux-Arts, élève de Paulin. Il a réalisé quelques bâtiments dans le style de l’Ecole de Nancy mais il a pris ses distances par rapport à ce mouvement. Il savait adapté le style à la commande et au client. Fernand César devient architecte officiel de la station en 1925, 40 ans après Charles Garnier. Il sera chargé de la gestion à long terme du renouvellement de la station. Ainsi, il se charge de moderniser l’image de la station : avec Auguste Bluysen, ils rénovent entre autre, la galerie promenoire metallique passée de mode en la recouvrant de stuc, sans pour autant la détruire.
Quelques réalisations :
- grand escalier de la Société des Eaux de Vittel, 1902 - immeuble Nicolas Kempf, 50 cours Léopold à Nancy (avec Félicien César), 1903-1904 - champ de course et tribune de Vittel, 1904 - maison du parc Saurupt, 5 bvd Clémenceau, Nancy, 1911 - maison Péquart (sa soeur), 3 avenue Paul Déroulède à Laxon (auj. mairie), 1911 - tea-room de Vittel, 1912 - chalet P.M.U. de la station thermale, chalet d’aisance ou des Boules et chalet des ânes du Parc des Enfants et pavillon chinois à Vittel, 1923 - pavillon Heudebert, chalets du Parc des Enfants, pavillon des Jouets, pavillon Emeraude, aménagement intérieur de l’hôtel Cérès, hôtel des Thermes à Vittel, 1925 - institut d’éducation physique à Vittel, 1926 - synagogue de Vittel, 1928 - lampadaires de la Société générale des eaux de Vittel, 1928 (fonte Durenne, Paris) - chalet du tir aux pigeons à They-sous-Montfort, 1928-1929 - hôtel Ermitage de Vittel (auj. Club Méditerranée), 1929 - villa et pavillon des caddys du golf de Vittel, 1930 - transformation de la villa Suzanne, 1930 - rénovation partielle de l’hôtel de la Providence et portail du Vittel Palace, 1930 - agrandissement du Vittel-Palace (1932-1934) (de F. Nachon, 1900) - aménagement de l’ancien embouteillage en palmarium et aménagements des abords du casino, 1934-1936 - exèdre à musique et salle à manger de l’hôtel des Thermes à Vittel, 1935 - villas particulières et mobilier urbain, 1936
L’originalité de César fut d’être un «harmonisateur», mot qui sert à désigner son talent de coordinateur, d’organisateur, de rénovateur qu’il déploya de manière remarquable à Vittel. C’est à Vittel que César obtient paradoxalement l’un des plus gros contrat de sa carrière d’architecte, en parallèle de son activité nancéenne d’où il est originaire. Dans une interview donnée par son petit-fils M.Mahault à Sylvana Baudroux-Zeoli, celui-ci conclut que pour son grand-père, «Vittel fut sa grande fierté !» Pour Marie-Hélène Contal, «l’intervention toute à la fois globale et fragmentaire de César, cette pratique moderne de l’embellissement le ménera à bâtir tout aussi bien des palaces, des édiciles, à composer des rajouts , à lotir des villas... (...) L’intervention de César, globale sans jamais être systématique, aura de la sorte régénéré l’architecture de toute la station.»
1 - Silvana BAUDROUX-ZEOLI, De Nancy à Vittel, l’itinéraire de Fernand César, architecte, mémoire de master. Faculté de Lettres et Sciences Humaines de Nancy, 1993. - Marie-Hélène CONTAL, Vittel, 1854-1936, Création d’une ville thermale, op. cit - Isabelle CHAVE (ss la dir. de) , Répertoire des architectes nés ou actifs dans les Vosges 1800-1940, 2007.
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De la police sanitaire dans les villes d’eaux et les stations santaires1, par le Dr Pierre Bouloumié.
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in Revue d’hygiène et de police sanitaire, n°9, 1887, sources : archives médecine http://www2.biusante.parisdescartes.fr
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AD Meurthe-et-Moselle, Fonds d’archives André, Dossier du lotissement Bouloumié réalisé par Emile André et Gaston Munier(1906-1907), cote 119 J 149.
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Villa Lorima
(AD Vosges, cote 4 Fi 516/389)
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Villa Les FrĂŞnes
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Villa Alopreys Tous les intérieurs des villas doubles ont été transformé pour ne faire qu’une seule habitation. La villa Alopreys ne figure pas dans le dossier du lotissement Bouloumié aux archives départementales de Meurtheet-Moselle. Les documents ci-dessous font parti du dossier sur l’architecte Fernand César du Service Régionale de l’Inventaire de Lorraine (situé à Nancy). Les poteaux de clôtures ainsi que les cartes postales anciennes de 1910 permettent de dire que cette villa à été dessinée par Emile André et Gaston Munier et fait bien parti de l’ensmeble des villas du Golf. Fernand César n’est arrivé à Vittel qu’à partir de 1921.
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Villa Nino. (AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
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Villa Minima, extension de la villa Nino. (AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.)
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Villa St Pierre1
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1 sources : Association de la Maison du Patrimoine de Vittel AD Vosges, Documentation pour le classement au titre de MH, 1990, cote 1J 1174.
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