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La boutique Cartier rouvre ses portes

MÉTAMORPHOSÉ, CARTIER ROUVRE SES PORTES

TEXTE [[[ Amanda Castillo

Après Londres, New York et Paris, c’est au tour du 35, rue du Rhône – autre adresse emblématique de l’histoire et de l’empreinte des boutiques Cartier – de subir une métamorphose. Les 1’200 m2 de la maison ont été intégralement repensés et réservent des surprises étonnantes qui raviront les esthètes épris d’artisanat et de design. Dont une de taille au premier étage… Explications.

Il aura fallu deux ans de travail acharné pour venir à bout du lifting titanesque du 35, rue du Rhône, qui s’est opéré à l’abri des regards derrière des échafaudages. Aux commandes de ce chantier spectaculaire mené sur trois étages, Claire Bétaille et Bruno Moinard, qui œuvrent depuis plus de vingt ans à la conception et à l’aménagement des boutiques Cartier. Le résultat est à la hauteur des ambitions. A l’entrée, une superbe panthère en mosaïque signée Mathilde Jonquière accueille nonchalamment les clients. Les visiteurs contemplatifs s’attarderont un instant pour admirer le félin, mais aussi le décor dans lequel celui-ci est inséré – le jet d’eau de Genève et les montagnes, monts et coteaux entourant le lac Léman – constitué de milliers de tesselles de marbre irisé aux éclats jaune d’or et bronze champagne.

Plus loin, un salon invite à suspendre la course effrénée du temps et profiter du calme apaisant du lieu en contemplant le tableau en cordage de l’atelier de Véronique de Soultrait. Partout, les tapisseries, les paravents de nacre et de feuilles d’or installent une atmosphère chaleureuse en faisant danser une douce lumière beige et bronze, les couleurs caractéristiques de Cartier. C’est ici que le 35 rue du Rhône fait la part belle à un artisanat d’exception. Seize maisons ont en effet été invitées à s’intégrer au parcours sensoriel, émotionnel et culturel qui constitue le fil conducteur du projet. Certains ouvrages tels que la marqueterie de paille ont nécessité plusieurs mois de travail, nous dit-on. Fendue brin après brin, la paille de seigle est aplatie, puis découpée à la scie de marqueterie, avant d’être assemblée pour former un dessin qui rappelle les rayons de lumière du soleil.

UN COULOIR DE GLACE Plus loin encore, les formes, les couleurs et les matières du premier salon privé situé au premier étage rappellent les fonds lacustres et les navigations sur le Léman. Ailleurs, un travail évoquant les ondulations concentriques de l’eau a été réalisé autour d’un lustre en verre. «Le 35, rue du Rhône reflète la dualité de Genève, détaille Cyrille Vigneron, président-directeur général

La boutique Cartier occupe trois niveaux de l’immeuble construit en 1969 par l’architecte Pierre Braillard, un des chefs de file du mouvement brutaliste.

de Cartier. C’est une ville entre lac et montagne, entre Nord et Méditerranée, à la frontière entre la Suisse et la France.» A noter que le parcours permet désormais de faire le tour complet du bâtiment, offrant au regard une variation inédite de points de vue sur le lac et la ville, et tout un kaléidoscope de sensations selon les saisons et l’heure du jour. Mais c’est au détour d’un espace de vente que le visiteur est à la fois ébloui et surpris. Dissimulé derrière une porte, un couloir de glace surgit (en réalité des verres facettés décuplant les vues et créant une illusion d’optique), rappelant les bises fraîches du lac mais aussi et surtout l’urgence d’agir contre le réchauffement climatique. «Lorsque j’avais 8 ans, j’ai visité une grotte dans la mer de glace, se souvient Cyrille Vigneron. Aujourd’hui, elle n’existe plus. Elle a fondu. Dans trente ans, le MontBlanc n’aura peut-être plus de neiges éternelles. Avoir conscience de cela est un devoir. A l’avenir, peut-être que la seule galerie des glaces que l’on pourra emprunter sera à l’image de celle que nous avons créée.»

Last but not least, la boutique Cartier dispose désormais dans sa résidence au 2e étage d’un espace de 160 m2 composé d’un hall, d’une cuisine, d’une salle de bains, de pièces dédiées au service ainsi que de deux salons. Cet écrin luxueux est destiné à accueillir les amis de la Maison, mais aussi à organiser des événements exclusifs. «La boutique joue de plus en plus un rôle social qui permet de sortir du commercial et de parler, par exemple, de l’engagement de Cartier dans l’art et dans la culture, l’environnement, mais aussi de sa contribution dans l’émancipation des femmes, via des expositions, des conférences, des dîners et des masterclasses.» La rue du Rhône n’a pas fini de faire rayonner la haute joaillerie mondiale...

Un mot rapide à présent sur les architectes d’intérieur qui ont pensé ce lieu. Depuis quarante ans, Claire Bétaille et Bruno Moinard séduisent les marques les plus exigeantes. L’agence Moinard Bétaille a en effet conçu plus de 400 boutiques Cartier autour du monde (Munich, Londres, Hongkong, New York, Shanghai, Tokyo, Cannes, Milan, etc.), rénové l’hôtel du Marc de Veuve Clicquot pour LVMH, aménagé les bureaux d’Hermès et les chais de Château Latour pour Kering. Bruno Moinard a enfin participé à la rénovation du Palais de l’Elysée et de la cabine de l’avion supersonique Concorde et collaboré avec les icônes de la mode Karl Lagerfeld et Yves Saint Laurent.

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