3 minute read

A Montbenay, on élève du vin en amphores

MONT-SUR-ROLLE À MONTBENAY, ON Y ÉLÈVE DES VINS « AMPHORIQUES »

TEXTE [[[ Chantal de Senger

En mains familiales depuis un demimillénaire, le domaine de Mont-sur-Rolle se convertit en bio et produit désormais cinq de ses crus dans des amphores en terre cuite.

Le Domaine de Montbenay est indéniablement l’un des plus anciens domaines viticoles de la côte vaudoise puisque des signes de vignes débutent en 1141 déjà, dans ce lieu habité alors par les moines de l’Abbaye française de Montbenoît. En 1536, c’est la conquête du Pays de Vaud par les Bernois, d’où l’arrivée de la famille de Watteville à Mont-sur-Rolle. Même si les archives ont malheureusement toutes brûlé que ce soit du côté suisse ou français, la famille peut se targuer d’être la 16e génération à la tête de ce petit domaine viticole de Mont-sur-Rolle. Toutefois, Maurice et son fils Paul sont les premiers à exploiter et produire leurs propres vins, toutes les anciennes générations se contentant de laisser des vigneronstâcherons cultiver leurs vignes. Le domaine exploite aujourd’hui 7,1 hectares de vignes dont 80% de chasselas. Cette année, le domaine a commencé une conversion en agriculture biologique après avoir limité au maximum les intrants ces cinq dernières années.

LE DÉBUT DES AMPHORES Depuis l’été 2019, une cave entière du domaine abrite dans le plus grand secret 32 amphores en terre cuite du Roussillon, entièrement fabriquées à la main. Au plafond de la cave, des marques de flammes de bougies, des signatures de vignerons et des tonneliers qui ont écrit l’histoire du domaine au cours des siècles. «Cuvée Confidentielle», c’est le nom énigmatique de cette gamme de vin élevé discrètement dans ces contenants naturels. Il s’agit d’un nouvel assortiment de trois vins blancs et de deux vins rouges – un chasselas, un chardonnay, un sauvignon blanc, un pinot noir et une syrah – qui, grâce à l’élevage en amphores, ont une typicité, beaucoup de rondeur, une amplitude en bouche et surtout une pureté du fruit. Un vin plus digeste, au fond, et moins sur la structure.

Toute l’histoire a commencé lorsque le père, Maurice, est retourné en 2017 sur les bancs d’école à Marcelin afin de se spécialiser dans la viticulture biolo-

Rémi Clément

gique. Il rencontre un ami vigneron, Damien Mermoud, qui possède une amphore dans sa cave genevoise. Il tombe amoureux de l’objet et achète directement deux amphores en 2019 dans lesquelles il décide, avec son fils Paul, de vinifier un pinot noir et une syrah. «Nous sommes littéralement tombés amoureux du goût», explique Paul. Convaincus par ces contenants naturels, ils rachètent le stock de 31 amphores de cette fabrique de Castelnaudary dans le Sud-Ouest français. Aujourd’hui, le domaine a la capacité de produire 9000 bouteilles dans les amphores sur 50’000 au total.

PRIVILÉGIER LE CÉPAGE ET LE TERROIR Pour Paul et Maurice, il y a beaucoup d’intérêt à produire ces vins dans ce contenant naturel réalisé en terre cuite. «Cela permet d’élever du vin en apportant de l’oxygène sans marquer les vins. Elles permettent aussi une micro-oxygénation du vin plus rapide que les barriques. Et elles ont un effet de régulation des températures lors des fermentations. Le vin ne monte jamais plus haut que 20 degrés alors qu’il peut aller jusqu’à 28 dans les cuves en inox.» Avec les amphores en terre cuite, père et fils recherchent la pureté et la simplicité, privilégiant le cépage et le terroir plutôt que l’élevage. Pour cette gamme de cinq vins élevés exclusivement en amphores, le duo a sélectionné les vignes les plus qualitatives. Sans compter que le chasselas a été pressé avec un pressoir à l’ancienne. «Nous avons choisi de valoriser ces vins car il y a beaucoup de travail derrière, de patience et d’énergie pour les produire.»

Les amphores en terre cuite sont moulées à la main dans le sud de la France.

Rémi Clément

This article is from: