Tout l'immobilier Neuchâtel - Jura - Bonhôte-immobilier : la stratégie

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Février 2022

Edition Neuchâtel – Jura

M E N SU E

immobilier.ch

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Actualité · Immobilier · Commerce · Emploi · Gastronomie Monument

L’histoire de l’illustre château de Neuchâtel

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Nouvelle chronique

Douche ou bain? Le choix de Martina Chyba

LDD

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Commerce

Guillaume Perret/Lundi13

La SICAV entend favoriser une certaine qualité de construction pérenne. Notre inverview avec le vice-président de Bonhôte-Immobilier SICAV, Jean-Paul Jeckelmann. 4-7

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LDD

BONHÔTE-IMMOBILIER: LA STRATÉGIE

Liqueur d’Or, de la passion jusqu’aux nectars


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Edition Neuchâtel - Jura – Février 2022

SOMMAIRE

s l e i t n e d i f n o c s le

CTION DE L A RÉDA

4-7 Dossier Rencontre avec Jean-Paul Jeckelmann de la banque Bonhôte & Cie

8-17 Immobilier L’histoire de l’illustre château de Neuchâtel Les étudiants cherchent toujours désespérément des logements Le crowdfunding immobilier a la cote. Interview du fondateur de la société Foxstone Bain ça alors! La nouvelle chronique de Martina Chyba

18-19 Commerce Liqueur d’Or, des nectars précieux élaborés avec passion

20-21 Emploi et formation

Les dangers de l’autocritique au travail et comment y remédier

22-23 Gastronomie Mathieu Quetglas, le sommelier qui a pris de l’altitude

Éditeur: IMMOBILIER.CH SA Rédacteur en chef: Serge Guertchakoff DA et maquette: Agence EtienneEtienne Publicité: info@immobilier.ch Tél +41 22 307 02 20 Impression: CH Media Print AG Edition hebdomadaire • Genève Région: tirage 125’000 ex. envoi ePaper 40’000 ex. Editions mensuelles • Vaud: envoi ePaper 40’000 ex. • Valais: envoi ePaper 10’000 ex. • Fribourg-Berne: envoi ePaper 10’000 ex. • Neuchâtel-Jura: envoi ePaper 6’000 ex. Toutes les éditions sont disponibles sur immobilier.ch

CHRISTOPHE CHOCOLATIER OUVRE À LA CHAUX-DE-FONDS

LE PREMIER RÉSEAU SUISSE D’E-CIGARETTES EN FAILLITE

Après avoir ouvert à la mi-mai 2018 sa première chocolaterie, à Courtelary (Jura bernois), Christophe Bourquin a décidé d’ouvrir un second point de vente à La Chaux-de-Fonds. Fort de son succès, le pâtissierconfiseur s’inspire de son illustre voisin Camille Bloch et entend développer son affaire. Parmi ses spécialités, une pâte à tartiner, déclinée en six versions: pure noisettes, claire, cacao, noir intense, 62 (sans lactose et végane) et pistache.

La société qui exploitait les boutiques de vente de cigarettes électroniques sous l’enseigne «Sweet Spot» vient d’être déclarée en faillite. Plus vaste réseau de vape du pays dans ce domaine en vogue, les boutiques de Neuchâtel, La Chaux-deFonds, Bassecourt, Berne, Bienne, Bulle, Matran, Fribourg, Conthey, Morges, Payerne, Prilly, Crissier et Montreux sont donc en sursis. La société enregistrée sous le nom de WISH PROJECT fait appel aux créanciers et dispose d’un délai d’un mois avant faillite.

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IMPRESSIONNANTE PROGRESSION DE BATMAID Depuis son récent lancement, la plateforme Batmaid for Business comptabilise déjà plus de 427 clients issus du secteur professionnel parmi lesquels les magasins Viu, les centres de soins Clarins, ou encore des cabinets médicaux, des fitness et des bureaux. Un succès qui arrive après la levée de 25 millions de francs auprès d’AEVIS.

RACHAT DU STARLING VAUDOIS PAR ORLLATI Alors que l’Ecole Lemania va construire un campus avec le groupe Orllati, ce dernier vient de racheter le Starling Hotel à St-Sulpice, proche de l’EPFL, avec un terrain attenant, au banquier genevois René de Picciotto. Y créer le campus d’une école privée proche du campus de Dorigny – avec l’Unil et l’EPFL – aurait du sens. L’avenir le dira.


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Dossier

Banque Bonhôte & Cie

«LES PLATEAUX DE BUREAUX DE 2000 M2 ET PLUS SERONT SÛREMENT IMPACTÉS PAR LE COVID» La banque Bonhôte & Cie annonçait peu avant Noël avoir décroché le label B Corp, une certification très exigeante dans le domaine de la responsabilité sociale et environnementale. A cette occasion, nous avons rencontré Jean-Paul Jeckelmann, directeur développement et immobilier au sein de la banque.

A

yant son siège à Neuchâtel depuis 1815 et des succursales à Bienne, Berne, Zurich, Soleure, Lausanne et Genève, la banque Bonhôte & Cie est active principalement dans la gestion de fortune. Forte d’une centaine de collaboratrices et collaborateurs, elle avait lancé en mai 2020 ce processus de certification, mené par une équipe de huit collaboratrices et collaborateurs. L’obtention de cette certification B Corp récompense la performance sociale et environnementale élevée de la banque. Notre interview avec le vice-président de Bonhôte-Immobilier SICAV, Jean-Paul Jeckelmann. «Nous ne sommes pas des jusqu’au-boutistes du développement durable. Par exemple, lorsqu’un immeuble que notre fonds possède se situe en plein centreville, il ne sera pas possible d’utiliser la géothermie ou des pellets de bois pour le chauffer. En revanche, notre parc est désormais assez grand pour effectuer des ballons d’essais. Ainsi, nous venons d’acheter en octobre 2021 un groupe de petits immeubles à Bâle, construits en

«Notre parc vaut environ 1,150 milliard de francs, avec un degré d’endettement d’environ 25%»

Jean-Paul Jeckelmann.

2017 et qui avait 40% de vacants. En un mois et demi, nous sommes parvenus à diminuer de moitié ce taux, notamment en changeant de régie», relève le dirigeant. Pourquoi avoir transformé votre fonds en SICAV? Dans un fonds, le porteur de part n’a pas grand-chose à dire. Alors que dans une SICAV, il y a un droit de vote et on peut participer aux assemblées générales. La principale raison était donc liée à la gouvernance. Vous indiquez dans votre documentation que vous investissez «dans la mesure du possible» dans des immeubles offrant des perspectives de rendement supérieures à la moyenne. Ditesnous en davantage? Notre SICAV investit dans des immeubles devant offrir des perspectives meilleures que la moyenne. Dans le marché immobilier actuel, il existe plusieurs stratégies: il y a celle qu’on


Edition Neuchâtel - Jura – Février 2022

Dossier

Le projet de Beauregard-Dessus, à Neuchâtel, qui comptera 180 logements, représente un investissement de 75 millions de francs. LDD

appelle cash-flow qui consiste à maximiser les cash-flows au détriment de la pérennité, par exemple en économisant sur les frais d’entretien. En ce qui nous concerne, nous avons une approche que je qualifierai de patrimoniale: nous voulons favoriser une certaine qualité de construction, laquelle permettra de voir s’y succéder plusieurs générations. Nous disons «dans la mesure du possible», car nous ne pouvons pas toujours acquérir des immeubles qui respectent entièrement cette stratégie. Nous souhaitons aussi saisir des opportunités, comme avec les Innoparc. Il s’agit d’un ensemble de biens qui sont exploités en tant qu’hôtel d’entreprises. Nous avons régulièrement des start-up qui sortent du pôle innovation Microcity à Neuchâtel et qui y louent ensuite des surfaces. Pour que cela fonctionne, il faut connaître les besoins, les intervenants. A Neuchâtel, nous entretenons des contacts directs avec les responsables de la promotion économique. Nous avons acquis cette structure parce qu’elle se trouve dans

«Nous voulons favoriser une certaine qualité de construction, laquelle permettra de voir s’y succéder plusieurs générations»

un canton que nous connaissons bien. Nous ne le ferions pas à Genève, Lausanne ou Bâle. De plus, cette opération nous a permis de diversifier notre portefeuille alors que les prix dans l’immobilier résidentiel sont parfois trop élevés à notre avis, suite à la pandémie, dans certaines régions. Alors que nous n’avons pas constaté cette évolution pour les autres types de locaux. A fin décembre 2021, quel était l’agio de votre SICAV? Sachant que l’agio, qui correspond à la différence entre le cours de Bourse et la valeur nette d’inventaire, reflète le degré de confiance des investisseurs. Il s’élève à environ 35%. On parle beaucoup de ces agios mais ils ne sont pas forcément toujours comparables. Cela reflète aussi différentes stratégies de valorisation du parc. Nos experts sont plutôt prudents. Vous pouvez le constater par vous-même en observant l’évaluation conservatrice de notre parc.

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Dossier

Votre fonds investit essentiellement dans des immeubles d’habitation répondants aux critères suivants: proche des rives d’un lac et de voies de communication (route, autoroute, train). Pour quelle raison? La proximité d’un lac est généralement synonyme de qualité de vie. Il existe d’ailleurs une plus forte demande pour ce type de biens. Les objets vacants y sont plus rares. Quant aux voies de communication, cela paraît évident. Même si la gestion des parkings pose parfois quelques problèmes. A Lausanne, nos parkings sont de plus en plus utilisés par des pendulaires. Cela fait du sens dans ces villes où la desserte des transports publics est excellente. Quelles sont vos ambitions en termes de nouvelles acquisitions? 100 millions de francs par année? En 2020-2021, c’était un peu plus que d’habitude. Habituellement, nous étions aux alentours de 50 millions de francs d’acquisitions. Vu notre taille actuelle, ce sera plutôt 70 millions de francs. Cela s’explique par notre volonté de maintenir l’âge moyen de notre parc. Comme nous possédons une centaine d’immeubles, si nous n’investissions plus, le parc serait toujours plus vieillissant. Grâce à cette politique d’acquisition, nous avons pu maintenir l’âge moyen de notre parc au même niveau que quand nous avons démarré voici quinze ans. La dernière augmentation de capital de Bonhôte-Immobilier SICAV réalisée en décembre 2020 vous a permis de lever plus de 78 millions et de boucler l’acquisition du parc Light Industrial d’Innoparc SA pour 54 millions. Quand prévoyez-vous votre prochaine levée de fonds? Aucune n’est encore prévue. Nous n’en ferons une que si une importante opportunité se présentait. Aujourd’hui, notre parc vaut environ 1,150 milliard de francs, avec

«Dans une SICAV, il y a un droit de vote et on peut participer aux assemblées générales»

un degré d’endettement d’environ 25%. Or, nous pourrions être endettés à raison d’un tiers. Autrement dit, nous pouvons acquérir encore pour environ 100 millions de francs de biens immobiliers sans avoir besoin de capital. En plus, chaque année, nous payons un dividende mais nos actionnaires ont la possibilité de réinvestir leur dividende dans des actions. Cela représente chaque année, une injection de 20 millions de francs. Dans votre dernier rapport annuel, vous écrivez que les immeubles résidentiels, les surfaces administratives et même commerciales ne seront que peu impactées par la pandémie actuelle. Votre avis n’a pas changé? C’est une constatation. A l’exception de la restauration et de la vente au détail, les entreprises tournent. Nous n’avons pas eu de gros soucis. Mais, je reconnais qu’en ce qui concerne les grands plateaux de bureaux de 2000 m2, ceuxci seront sûrement impactés car un tiers des collaborateurs favorisent désormais le télétravail. Pour ce qui est de la gestion de la pandémie, notre fonds avait décidé de prendre les devants en écrivant à ses locataires pour leur annoncer la suspension du paiement du loyer, le temps de voir comment la situation allait évoluer. Cela nous a permis d’éviter de devoir répondre plus tard à 300 courriers. A partir de là, nous avons géré en fonction de chaque situation. Est-ce que votre initiative consistant à offrir un abonnement annuel à «Neuchâtelroule» a rencontré le succès espéré? Non, et cela nous a surpris. Sur les 480 foyers neuchâtelois pouvant en profiter, seuls un peu moins de 10% ont été intéressés. Mais je rappelle que ce service ne propose pour l’instant que des vélos traditionnels en libre-service, pas des vélos électriques.


Edition Neuchâtel - Jura – Février 2022

Dossier

Quand peut-on espérer voir s’ouvrir le chantier du quartier d’habitation de BeauregardDessus à Neuchâtel, lequel représente globalement un investissement de l’ordre de 75 millions (avec le terrain) pour édifier environ 180 appartements? Et quels types de logements y sont prévus? Nous attendons les autorisations de construire pour 2022. Le chantier devrait durer vingt-quatre mois. Comme le site est proche d’un home, nous avons prévu un certain nombre de petits appartements protégés. Nous réfléchissons aussi à y faire des appartements en colocation avec une grande pièce à vivre. Notre idée serait d’en prévoir deux assez grands. Et nous examinons aussi, avec notre architecte, la possibilité de concevoir des petits appartements qui peuvent s’agrandir. Il s’agit d’un concept d’appartements modulables, selon le moment de la journée, le bloc salon peut s’agrandir ou être diminué. En résumé, nous avons prévu une nomenclature très diversifiée, qui offrira un panel intéressant.

Des bâtiments achetés par le fonds Bonhôte-Immobilier SICAV (de haut en bas), à Neuchâtel, au Landeron et à Delémont. LDD

Toujours à Beauregard-Dessus, vous avez fait le choix d’y associer une association de quartier, pourquoi? C’est exact. Très vite au démarrage du projet, nous avons contacté les voisins et les deux associations de quartier de Serrières pour les associer au processus. Nous avons tenu de nombreuses réunions avec eux et les avons toujours tenues informées des développements. Il faut savoir qu’à Serrières, il existe un projet qui n’avance pas depuis maintenant vingt-cinq ans. Les voisins de Beauregard-Dessus ont surtout été rassurés de savoir que nous avions prévu de créer un parc accessible au public. Propos recueillis par Serge Guertchakoff

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Immobilier

Château de Neuchâtel

UN ABRI POUR LA SEIGNEURIE ET LA POÉSIE MÉDIÉVALE Bâti dès le XIe siècle, le château de Neuchâtel a hébergé d’illustres et nobles éminences au cours de son histoire, qui lui ont permis de conserver et de valoriser l’héritage de ce monument historique.

A

ujourd’hui encore, il est difficile d’ignorer le château qui surplombe la ville quand on se promène à Neuchâtel. Il s’agit du plus vieux bâtiment de la cité. Les recherches archéologiques ont montré qu’une vaste forteresse occupant toute la colline était en 1011 la propriété du roi de Bourgogne, Rodolphe III. Il l’aurait sans doute fait construire lui-même quelques années auparavant. Ce qui prouve que le bâtiment était occupé par la noblesse repose sur la taille des constructions, notamment de l’aula (la grande salle) située dans la partie orientale de l’espace fortifié et qui est à l’origine du château proprement-dit. «Une construction de quelque 200 m2 en pierre, alors que la quasi-totalité de l’architecture vernaculaire de l’époque était en bois, laisse peu de place au doute», éclaire Christian de Reynier, archéologue du bâti à l'Office du patrimoine et de l'archéologie du canton. Après le roi de Bourgogne et une ultime mention du site en 1056, on ignore le devenir de la forteresse pendant près de cent ans. Puis, une nouvelle aile est construite contre l’ancienne aula au milieu du XII

«Il ne suffit pas à un monument d’être beau et ancien pour être reconnu comme tel»

Christian de Reynier, archéologue du bâti à l’Office du patrimoine et de l’archéologie du canton. Source: researchGate

L’aile romane du Château, la plus ancienne, a été restaurée en deux temps. LDD


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Immobilier

siècle, de style roman, et abrite les nouveaux seigneurs de la région. L’occupation par la noblesse est cette fois attestée par la qualité des décors, de la maçonnerie ou encore des cheminées, dont des vestiges, presque uniques en Suisse, ont été retrouvés. A la fin du même siècle, cette aile romane abrite le comte-poète Rodolphe de Fenis, aussi appelé Rodolphe de Neuchâtel. Un personnage important dans le monde de la poésie médiévale, puisqu’il est l’un des trois poètes de cette époque à avoir transmis et adapté des œuvres franco-provençales en allemand. «La datation a permis de faire le lien entre le personnage et son lieu de vie, précise Christian de Reynier. Une chose exceptionnelle pour l’époque.» Un bel effort de conservation Le château connaît pendant les siècles qui suivent de nombreuses étapes d’agrandissement et de changements de styles. Hormis la résidence comtale, peu de constructions du Moyen Age subsistent à Neuchâtel puisque des incendies ont dévasté des quartiers entiers de la ville, au XVe puis au XVIIIe siècle. «Seules des investigations archéologiques ont pu révéler des traces médiévales derrière des façades de style Renaissance ou classiques», évoque le conservateur cantonal Jacques Bujard. C’est en particulier le cas de la maison située rue du Château 9, toujours habitée. Avec le temps, une vision utilitariste de la ville a gagné du terrain. Des tours ou des portes ont été démolies lorsqu’elles gênaient le passage ou se révélaient trop dégradées. Lorsque le château a dû être adapté pour recevoir la nouvelle administration républicaine depuis 1848, il a fallu se battre pour conserver ses parties les plus anciennes et sauvegarder cet héritage. «Il ne suffit pas à un monument d’être beau et ancien pour être reconnu comme tel, rappelle Christian de Reynier. Il faut aussi pouvoir montrer que ses parties historiques revêtent une importance d’identité nationale, ou du moins régionale, notamment en ayant hébergé des personnages importants.» L’aile romane du château a ainsi bénéficié de premiers travaux de restauration et de mise en valeur en 1866, ainsi que d’une seconde série de rénovations en 2009. Stéphanie de Roguin

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Immobilier

Etude JLL

LOGEMENTS ÉTUDIANTS, UNE PÉNURIE PERSISTANTE Manque de chambres dans les résidences, barrière du garant, colocation comme seul recours: trouver un toit durant ses études en Suisse ressemble à un réel parcours du combattant. Et pourtant, rien ne change.

R

aide comme un piquet, la courbe du nombre d’étudiants en Suisse ne cesse de grimper année après année. Avec plus de 268'000 personnes en formation supérieure en 2021, ce total aurait doublé en vingt ans d’après l’Office fédéral de la statistique et par la même occasion, son besoin en logements aussi. Afin de répondre à une telle demande en hébergement, 27'400 lits seraient à disposition dans le pays, laissant ainsi 90% de la population estudiantine sur le carreau. Les seules options s’offrant alors à eux: s’aventurer sur le marché du logement classique, tenter l’alternative de la colocation ou, pour la plupart, rester ad vitam aeternam chez leurs parents. Maigre augmentation à signaler Ce constat, appuyé par une récente étude de l’entreprise de conseil immobilier JLL, est d’autant plus vrai dans les grands pôles urbains. En effet, les étudiants se concentreraient actuellement à Zurich et Winterthour (76'800 étudiants), Lausanne (36'100) et Bern (28'200), Genève (24'300), Bâle (19'900). A noter que deux cantons romands figurent dans ce top cinq. Malgré des densités importantes de jeunes en formation, ces villes universitaires comme le chef-lieu vaudois n’offrent pourtant que 17,3% de logements adaptés aux études (voir tableau). Ce d’autant plus, que des édifices tels que le Vortex, nouvelle plus grande résidence étudiante d’un seul tenant de Suisse, abritant quelque 1000 habitants à proximité immédiate du campus de

Offre de lits par ville Région/Ville Coire

Nombre Nombre de lits/étudiants de lits Année 2021 Année 2021 Année 2024 2021-2024 (estimation) (tendance) (arrondi) 400

22,6%

22,4%

Lausanne

6'250

17,3%

18,2%

Neuchâtel

700

13%

12,9%

Fribourg

2'050

11,8%

11,8%

Zurich (y compris Winterthour)

8'900

11,6%

11,9%

Genève

2'400

9,8%

10,6%

200

9,6%

9,5%

Lucerne (y compris Rotkreuz)

1'000

6,9%

9,8%

Bâle

1'000

5,1%

5,4%

Berne

1'350

4,8%

4,7%

Lugano

350

3,5%

3,4%

Brugg-Windisch

100

2%

4,3%

St-Gall

200

1,3%

2,4%

Autres

2'500

Ensemble de la Suisse

27'400

Rapperswill

l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), affichent déjà complet. Une poignée de constructions inaugurées dans le courant de l’année ont elles aussi pu offrir une bouffée d’air frais à ce marché du logement étudiant, à l’image

n/a 10,2%

10,8%

de Kriens et ses 140 chambres, toutes déjà absorbées. Ainsi que la Haute école spécialisée bernoise qui s’est dotée à son tour de 140 dortoirs pour ses étudiants à Zollikofen. Enfin, 90 hébergements ont vu le jour sur le campus Facchinetti de


Immobilier

Edition Neuchâtel - Jura – Février 2022

JLL table sur une augmentation de 2000 lits supplémentaires en Suisse à l’échéance 2024

Neuf étudiants sur dix doivent se débrouiller. LDD

Neuchâtel et seuls deux sont encore disponibles. Une offre qui s’étend mais qui ne suffit toujours pas selon le rapport JLL qui table pour sa part sur une augmentation de 2000 lits supplémentaires en Suisse à l’échéance 2024, notamment à Lucerne et Saint-Gall. Le nombre de personnes en formation continuant de croître, «le ratio entre lits en résidence et étudiants en Suisse n’augmentera que marginalement, pour s’établir à 10,8% contre 10,2% à ce jour», indique JLL. Marché saturé de bout en bout La raison de ce décalage persistant? Une saturation du marché du logement en général. «Les 2000 places ajoutées sont un bon début mais il y aura toujours une pénurie. Ce n’est pas évident de construire des résidences pour étudiants car il y a une telle demande de terrains pour le logement classique que l’investisseur se retrouve à faire des choix sous la pression», souligne Sophie Carliez, vice-présidente senior de JLL.

Un problème d’offre globale que confirme Andreas Wetli, le gestionnaire grands comptes de Livit FM Services, un des acteurs majeurs de l’exploitation de résidences étudiants de Suisse. «Le coût de gestion des logements étudiants est plus élevé que dans des immeubles classiques, les durées de location sont plus courtes et les locataires changent plus souvent», précise-t-il. A cela s’ajoute l’investissement humain que de tels établissements requièrent, les équipes de Livit étant présentes sur place tous les

jours ou au minimum plusieurs fois par semaine selon la taille de l’objet. Si bien que le marché du logement destiné aux étudiants se voit dominé par des fondations à but non lucratifs et régionales, ou encore des coopératives et des associations. Autre élément particulier de ce marché qui ne connaît quasiment pas de vacance, il serait composé en majorité de résidents étrangers. La société Livit, qui gère un site lausannois (Student Village), constate que ses occupants suisses sont en proportions relativement faibles, «la majorité étant originaire d’A sie, des Etats-Unis, d’Allemagne ou des pays du sud de l’Europe». Même phénomène du côté de Renens, à la résidence Silo Bleu, que gère Dominique Dupin: «Les étudiants suisses se débrouillent plus facilement avec le marché du logement classique contrairement aux étrangers qui ne possèdent pas de garant valable et qui n’ont pas tellement d’autre choix que de se tourner vers les résidences de leur université.» Contre toutes attentes, la pandémie n’ayant pas détendu l’afflux de résidents dans les hébergements pour étudiants, reste à espérer que de nouveaux projets sortiront de terre courant 2025. Julie Müller

Cinq chiffres clés 268'000

Etudiants en Suisse en 2021

27'400

Lits à disposition en résidences étudiants

2000

Places supplémentaires attendues à échéance 2024

110 semaines

Durée moyenne de location par étudiant/chambre

5 à 10 ans

Durée de vie de l’ameublement d’un logement étudiant

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Immobilier

Financement participatif

LE CROWDFUNDING IMMOBILIER A LE VENT EN POUPE Ce nouveau mode d’acquisition de parts dans des constructions fait son chemin avec quelques acteurs romands à la pointe.

L

’idée de démocratiser l’immobilier fait sens en cette période où le prix des biens mis à la vente s’envole, freinant l’accès à la propriété pour une frange de plus en plus large de la population. Découlant de ces réalités, voilà une dizaine d’années que le crowdfunding immobilier a pris naissance dans les pays anglo-saxons. Concrètement, ce modèle associe financement participatif et acquisition immobilière de rendement. Grâce à des tickets d’entrée à partir de 10’000 francs (il s’agit toutefois le plus souvent de 25’000 francs), cette solution permet d’ouvrir à la classe moyenne ce type de placements et de les simplifier. Même si elle n’est pas dépourvue de risques, cette option présente d’évidents avantages. Ainsi, l’achat d’un appartement pour le mettre en location se révèle plus périlleux que l’acquisition en copropriété d’un immeuble de rendement. La raison en est que, en cas de défaut de règlement du loyer, le manque à gagner est réparti entre l’ensemble des copropriétaires. Plus d’un atout Avec des retours stables oscillant entre 5 et 7% en moyenne, cette classe d’ac-

tifs constitue une vraie alternative aux comptes d’épargne. Elle échappe également aux abruptes variations des marchés financiers. De plus, elle présente l’avantage d’être tangible et locale. En revanche, elle nécessite des fonds propres importants. Pour surmonter ce dernier écueil, il existe en fait deux modes d’investissement distincts: l’investissement direct qui consiste à acheter un bien que l’on met ensuite en location et l’investissement indirect qui, lui, repose sur la prise de parts dans un fonds immobilier. Il est à noter que l’on rencontre encore une formule hybride qui mixe ces approches. La formule magique Comment cela fonctionne-t-il? Le principe est simple: chaque investisseur devient propriétaire au registre foncier d’une partie d’un immeuble à hauteur de la participation qu’il souhaite. Cette formule lui permet de générer un rendement proportionnel à son investissement (une somme versée tous les trois mois la plupart du temps) et de bénéficier d’une potentielle plus-value en cas de revente. Ces prêts participatifs courent sur une

période de cinq ans normalement. Il est à noter que ce mode de préservation du capital peut être transmis à ses héritiers. Mais que se passerait-il si l’entreprise qui gère un tel prêt participatif venait à sombrer? Cette funeste issue serait en fait sans dommage pour l’investisseur. Celui-ci resterait en effet en possession du contrat de dette émis par la société qui détient le projet de développement immobilier inscrit au registre foncier au nom de la compagnie. Plusieurs points sont toutefois à analyser avant de s’engager sur cette voie. Sur son site, imvesters.ch, l’un des ac-


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Immobilier

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Grâce à des tickets d’entrée à partir de 10’000 francs, la classe moyenne peut contribuer à ce type de placements. LDD

Avec des retours stables oscillant entre 5 et 7% en moyenne, cette classe d’actifs constitue une vraie alternative aux comptes d’épargne

teurs principaux sur le marché romand, avertit ses futurs clients: «Il existe une multitude de risques qui doivent être supportés en tant qu’investisseur propriétaire ou copropriétaire d’un bien immobilier. Ces risques peuvent être de nature juridique (par exemple liés à des autorisations administratives, des permis de construire, des expropriations, des assurances), technique (en relation avec le sol ou des questions de faisabilité technique), commerciale (si un bien immobilier perd de la valeur au moment de sa vente), financière (en cas de dépassement de budget, de rénovation

nécessaire, etc.) ou fiscale (augmentation possible des impôts), évolutive (si de nouvelles lois modifient le contexte actuel au moment de l’acquisition d’un bien immobilier).» Prudence cependant Voilà pourquoi il est recommandé aux clients de se faire accompagner par un tiers (spécialiste en investissement immobilier, fiscaliste, avocat, etc.) ou de s’informer à titre individuel afin de déterminer une stratégie d’investissement à la fois claire et réaliste. François Praz

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Immobilier

«LES RETOURS POSITIFS DE NOS CLIENTS SONT PRIMORDIAUX»

Dan Amar, CEO de Foxstone (à gauche), avec ses deux cofondateurs Yossi Amar (debout) et David el-Eini. Foxstone

Lancé en 2018 à Genève, Foxstone s’est constitué une communauté de plus de 14’000 investisseurs. La compagnie a aidé ses clients à devenir copropriétaires de 24 immeubles d’une valeur cumulée record de 140 millions de francs. Interview de son CEO et fondateur Dan Amar. Vous offrez à vos investisseurs un service d’accompagnement administratif et technique complet. Vous êtes en plus d’une totale transparence sur les marges que vous vous ménagez, à savoir 3%. N’êtes-vous pas contraints de multiplier les projets pour être profitables?

«Nous perdons quelques points de rendement, mais nous gagnons en sécurité»

Nous nous en tenons à notre business model. Nous avons nos propres objectifs en termes de performances et surtout en termes de qualité, mais ceux-ci ne sont pas comparables à ceux des fonds de pension. L’an dernier, nous avons eu pour 4 milliards de francs de propositions d’investissements. Nous en avons retenu 80 millions. Nous sommes très exigeants sur la sélection des immeubles. Ce choix ne nous a pas empêchés de doubler nos résultats par rapport à 2020. Toujours dans un souci d’optimisation de vos marges, n’êtes vous pas tentés de vous concentrer sur des biens de luxe?


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Nous avons développé notre propre algorithme qui compile des millions de données, dont certaines en live, et qui intègre les critères qui sont judicieux pour nous. Ce programme nous a permis de répertorier et de ranger par ordre de préférence les 2222 communes suisses. Celles-ci sont classifiées en fonction de leur intérêt plus ou moins élevé grâce à des codes couleur. Nous évitons les biens trop onéreux. Nous nous focalisons sur les localités très stables plutôt que sur les grands centres urbains. Les agences immobilières voientelles d’un bon œil votre activité? Notre modèle fait que nous sommes appréciés de tout l’écosystème, y compris les fonds de pension, puisque nous ne visons pas les mêmes biens et que nous leur rachetons leurs petits immeubles. Les brokers nous apprécient, car nous leur achetons des biens. Les banques nous suivent aussi: nous leur avons apporté pour 50 millions d’hypothèques et des milliers de nouveaux clients en 2021. L’un des dangers de votre formule de crowdfunding ne se situe-t-il pas dans la communauté des investisseurs? Tous n’ont pas les mêmes objectifs ni les mêmes horizons de rentabilité, sans parler de la vie de la copropriété avec ses impondérables, voire le fait qu’un partenaire risque de devenir insolvable. Nous avons beaucoup travaillé sur la partie légale et administrative des copropriétés. Nos investisseurs signent un règlement très détaillé dans ce domaine. Le copropriétaire qui ne serait plus solvable serait contraint de vendre sa part grâce à un mécanisme de droit d’exemption extrêmement efficace. Il serait remplacé sur-le-champ par une autre personne. Quant aux assemblées de la copropriété, elles se passent en ligne avec un système de vote d’une toute nouvelle génération. Cette formule évite de devoir se déplacer et se gère de manière très souple.

«Nos clients pourront bientôt acheter des parts dans un bien ou un projet de construction immobilier dès 1000 francs»

Exemples d’opérations effectuées par Foxstone Cornaux (NE) ​ Achat d’une part de copropriété pour 4,6 millions. Rendement attendu: 6,84% Broc (FR) ​ Achat d’une part de copropriété pour 5,25 millions. Rendement attendu: 5,81% Belmont-Broye (FR) ​ Achat d’une part de copropriété pour 5,32 millions. Rendement attendu: 5,55% Lucens (VD) Achat d’une part de copropriété pour 8,25 millions. Rendement attendu: 6,67% Payerne (VD) ​ Achat d’une part de copropriété pour 6,3 millions. Rendement attendu: 6,31%

Immobilier

Vous prenez de nombreuses précautions afin de prévenir tous ces écueils. Pourquoi tant de prudence en définitive? Nous tenons cela de nos parents. Il faut vingt ans pour construire une bonne réputation et quelques minutes pour la détruire. La satisfaction totale des clients et des retours positifs sont essentiels pour que nos affaires prospèrent. D’où la totale transparence que vous souligniez. Il y a tout de même des risques impossibles à éviter, tels qu’une hausse des taux hypothécaires? En effet, il n’y a pas de rendement sans risque implicite. Nous participons aux évolutions du marché immobilier. Nous jouons avec lui. Nous pouvons gagner, mais nous sommes aussi susceptibles de perdre. Nous nous assurons de tout mettre en œuvre pour garantir des gains. Dans ce contexte, nous bloquons des taux fixes à sept ans. Nous perdons quelques points de rendement, mais nous gagnons en sécurité. Nous ne contractons des hypothèques que de premier rang pour un endettement modéré, ce qui nous prémunit contre des secousses trop violentes. Quelles sont les principales évolutions à venir pour Foxstone? Nous préparons une vraie révolution, dont la magnitude est bien plus importante que lorsque nous avons lancé le crowdfunding immobilier. Nous avons validé et sommes en phase de lancement d’un modèle de «tokenisation». Concrètement, nos clients pourront bientôt acheter des parts dans un bien ou un projet de construction immobilier dès 1000 francs, ceci en un seul clic sur leur téléphone portable. Nous allons de plus faciliter et amplifier les échanges directs entre investisseurs lors des transactions de marché secondaire, car toutes les frictions ont été levées grâce au nouveau modèle de structuration et à la technologie. Propos recueillis par F. P.

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Immobilier

Chronique chez soi par Martina Chyba, journaliste à la RTS

BAIN ÇA ALORS! Vous êtes partisan de la douche ou du bain? Certains logements n’ont d’ailleurs plus de baignoire. Horreur! Comment peut-on envisager sa vie sans prendre de bains?

I

l y a quelque temps, j’ai pu réaliser un exploit que je devrais faire figurer sur mon CV ou dans le Guiness Book tellement il est improbable: acheter, en tant que maman solo, un appartement à Genève. La première fois que j’ai vu les plans, je n’y connaissais rien, mais j’ai remarqué tout de suite que dans la salle de bains, il n’y avait pas de baignoire. Or, je ne peux pas envisager ma vie sans prendre un bain. Après une bonne JDM, comme on dit chez nous au bureau, ( journée de m... pour celles et ceux qui vivent les mêmes mais qui n’ont pas encore de petit nom pour les désigner) je suis désolée, mais j’ai besoin d’un bain. Je sais, c’est mal. Je suis prête à rouler électrique, à limiter l’avion, à utiliser du vinaigre pour laver la maison même si j’ai horreur de l’odeur, à accepter que ma cuisine ressemble à une déchetterie tellement il y a de poubelles de tri, à manger moins de viande et plus d’épluchures pour ne pas gaspiller, mais je veux pouvoir prendre de temps en temps un bain. C’est peut-être mauvais pour la survie de l’espèce mais c’est indispensable à ma survie. Dissoudre soucis et toxines D’ailleurs, s’il existe des salles de bains, c’est bien pour pouvoir se baigner. Même si l’eau a longtemps été considérée plutôt comme une source de maladies que de propreté, les humains ont de tout temps

apprécié le fait de se tremper dans l’eau chaude pour y dissoudre leurs soucis et leurs toxines. J’ai donc demandé de corriger les plans de l’appartement et de pousser un mur pour installer une baignoire. Et c’est là que feue ma mère, déjà très malade, a eu un trait d’esprit, elle qui était pourtant peu causante lorsqu’il s’agissait de couple et d’intimité. Elle m’a dit ceci: «Il faut que tu mettes aussi une douche. Parce que si un jour tu as de nouveau un homme dans ta vie, les hommes préfèrent les douches.» Personnellement, j’avais plutôt réfléchi au moment merveilleux et plus si lointain où je ne pourrai plus actionner ma hanche pour entrer dans la baignoire et je m’étais dit, qu’effectivement, une douche séparée pourrait être pas mal. D’ailleurs, d’après une étude, 62% des gens rêvent, comme moi, d’avoir les deux. Donc, retour chez l’entreprise générale, j’annonce que je veux une baignoire ET une douche. Tête de l’architecte. On repousse encore les murs et on sacrifie une armoire, j’aurai moins de bordel, mais une vraie salle de bains. Il y aura un WC séparé mais on m’avertit fermement: pas de place pour un bidet. Vous vous souvenez du bidet? Mais si! Ce lavabo bas sur lequel on s’asseyait élégamment à califourchon pour se laver euh... ce que vous savez. Franchement,

«Je suis revenue au savon. Oui, le truc carré qui sent bon.» LDD zéro regret, de toute façon cela ne se fait plus depuis les années 1970, non? Spa personnel Aujourd’hui, 98% des logements possèdent une salle de bains individuelle. Mais ce n’est plus un endroit où on se


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«Figurez-vous qu’ils veulent maintenant connecter cette pièce de déconnexion!» ce qui est une mauvaise idée à tous niveaux. J’en ai déjà ramassé deux au fond, ainsi qu’un chat qui avait glissé du bord. Contrairement aux smartphones, le chat a survécu. J’ai mis des petites mosaïques noires brillantes, un tableau de Warhol (non non, pas un vrai), une bougie. Oui je prends des bains, mais je fais un effort sur le plastique, je ne sais pas si ça compense. Je suis revenue au savon. Oui, le truc carré qui sent bon, qui glisse, et sur lequel des poils restent crochés. On m’a dit qu’il existait désormais également des shampooings secs sous cette forme. Je suis moins emballée à priori, mais je vais tenter la chose cette année, promis.

nettoie tchac tchac vite fait, c’est un endroit où l’on prend soin de soi. C’est un lieu dont on ferme la porte et dans lequel personne d’autre n’est donc censé entrer quand on y est. Une sorte de spa personnel et sensuel dans lequel on replie son intimité loin de la fureur du monde

et des trois écrans allumés dans le salon avec toute la famille qui demande ce qu’on mange. On se tartine de crème, on s’épile, on se rase, on se coiffe, on se maquille, on se démaquille. On bulle. Dans un bain moussant et parfumé, on peut aussi lire ou surfer sur son téléphone,

Miroir connecté tactile En revanche, j’ai aussi découvert un truc atroce. Figurez-vous qu’ils veulent maintenant connecter cette pièce de déconnexion! Je ne parle pas des balances intelligentes qui vous persécutent sur votre téléphone avec vos kilos en trop, je ne parle pas des murs qui chauffent dans la douche quand vous y êtes, je ne parle pas des lampes qui font aussi luminothérapie, je ne parle même pas du pommeau de douche branché sur bluetooth pour écouter votre musique. Non, il y a pire. Le miroir connecté tactile. Cet objet du futur est en fait une tablette géante affichant la météo, vos e-mails et vos réseaux sociaux par des notifications instantanées digne des meilleurs ordinateurs. Donc le matin, vous voyez votre sale tête (si, si, on a tous une sale tête) et vos mails. Non mais eau secours! P. S. J’ai évidemment rencontré un homme qui n’aime que les bains. A ce stade, la douche est très utile pour étendre le linge.

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Commerce

Liqueur d’Or

DES NECTARS PRÉCIEUX ÉLABORÉS AVEC PASSION Aux Ponts-de-Martel, Yannick Widmer produit des liqueurs à partir de produits bio et de saison. Dans une ancienne menuiserie transformée de ses mains, il accueille curieux et gourmands et livre déjà une dizaine d’épiceries dans le canton.

C

’est après avoir conçu des liqueurs de fruits dans sa cuisine pendant treize ans, écoulant alors sa production auprès de sa famille et de ses amis, que Yannick Widmer décide de se lancer professionnellement en décembre 2019. «J’avais développé quinze recettes, et donc accumulé pas mal de matériel. En gros, mon épouse m’a dit: soit tu te lances, soit tu arrêtes.» La marque Liqueur d’Or était née. Mais l’épidémie de Covid-19 vient retarder les projets de l’entrepreneur. Son lancement se fait réellement à l’été 2020, quand il participe au marché artisanal de La Sagne et vend 30 bouteilles en une journée. «Je me suis rendu compte que mes produits intéressaient plus largement que mon cercle social proche.» Entre septembre et décembre de la même année, il écoule 400 bouteilles, lui confirmant que la demande était là. Un tournant obligé A côté de son activité de distillateur amateur, cependant bien appuyée par une formation initiale de caviste, Yannick Widmer travaille à l’époque comme assistant social. Après un changement de poste à l’intérieur de son entreprise, il commence à connaître d’importantes crises d’angoisse et du surmenage. «J’avais toujours travaillé sur le terrain et je me suis retrouvé assis huit heures par jour derrière un bureau,

Des liqueurs fabriquées selon trois procédés différents: zestes macérés, fruits macérés et thés ou fruits secs infusés. Guillaume Perret/Lundi13 pour la première fois de ma vie.» Au printemps 2021, il «touche le fond», n’arrivant plus à se rendre au travail. Un signe qui lui indique la voie: tenter de vivre de sa passion pour les liqueurs de fruits. L’entrepreneur s’installe dans une arcade aux Ponts-de-Martel, occupée dans les années 1970 par une boucherie, puis plus récemment par une menuiserie. D’importants travaux sont menés pour remettre le lieu aux normes d’hygiène. «J’ai voulu donner à l’espace de vente un style industriel, en vieillissant et en brûlant des meubles moi-même.» Le lieu qui accueille les visiteurs donne sur un local de production séparé par de grandes baies vitrées, pour permettre d’observer les processus de fabrication.

Et du soin à la fabrication, Yannick Widmer en donne. Ses liqueurs répondent à trois procédés différents: des zestes macérés (pour les liqueurs d’agrumes),


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Commerce

des produits, au moins sans traitement. Et les fruits, de saison. «Les liqueurs aux agrumes se font entre janvier et mars. Quand il n’y en a plus, il faut attendre l’année suivante. Cela peut déranger certains clients, mais cela fait partie de mon identité. J’ai gardé certaines habitudes du milieu du vin, d’où je viens: on ne récolte le raisin qu’une fois par année.»

Yannick Widmer a repris un poste d’éducateur – à 60% – mais envisage d’engager un à deux employés. Guillaume Perret/Lundi13 des fruits macérés (fraise-basilic, framboise, mûre, cerise, mirabelle) et des thés ou fruits secs infusés. Ce dernier procédé est d’ailleurs unique en Suisse,

et peut-être même dans le monde. Tous les composants, de l’alcool aux fruits en passant par le sucre, doivent être issus de l’agriculture biologique ou, en fonction

Redonner autant que l’on reçoit Une sélection de bouteilles de Liqueur d’Or peut être assemblée, pour un cadeau par exemple, sur une petite planchette en bois. Ces dernières sont fabriquées par le menuisier qui occupait les locaux juste avant, et sont gravées par des jeunes de la fondation Sandoz, où Yannick Widmer a travaillé pendant dix ans comme éducateur. «C’est une manière de boucler la boucle: je fournis du travail à ceux qui m’en ont donné.» Une manière de faire qui lui tient très à cœur. Dans la même logique, Yannick Widmer vend également du vin de la cave où il a travaillé il y a une vingtaine d’années, juste après son apprentissage. Outre la vente en direct dans sa boutique, notamment pendant des soirées dégustation où les liqueurs s’accompagnent de produits de la région – viande de Neuchâtel, fromage de la vallée –, ou encore de soirées «liqueurware» (dégustation et vente de liqueurs chez des groupes d’amis à domicile, à l’instar des soirées tupperware), Yannick Widmer livre plusieurs restaurants et une dizaine d’épiceries dans le canton de Neuchâtel. Pour les commandes venant de plus loin en Suisse, les bouteilles sont envoyées par la poste. «J’aimerais démarcher des restaurateurs en dehors du canton, mais le temps me manque: je produis les liqueurs la semaine pour les vendre sur les marchés le week-end.» Car l’entrepreneur a repris un poste d’éducateur – sur le terrain – à 60% au début de l’année. Déjà accompagné de l’aide précieuse de son beau-père, retraité, pour l’embouteillage et l’étiquetage, Yannick Widmer envisage, dès que la situation le permettra, d’engager un à deux employés. Il a d’ailleurs toujours rêvé d’être patron. Pour cela, l’entrepreneur est assez confiant: ses ventes et son chiffre d’affaires ont quintuplé en un an et demi. Stéphanie de Roguin

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Emploi et formation

Peur de l’échec

LES DANGERS DE L’AUTOCRITIQUE ET COMMENT Y REMÉDIER Signe avant-coureur de la dépression, l’autocritique sévère fausse notre perception de la réalité et diminue nos chances de réussite, assurent les experts. Explications.

«J

e ne travaille pas assez», «j’abandonne trop facilement», «je ne suis pas à la hauteur». Qui ne s’est pas déjà parlé de cette manière? Persuadés que l’autocritique nous pousse à nous dépasser et nous met à l’abri des «bulles d’excès de confiance», nous sommes très souvent nos critiques les plus féroces. Beaucoup se félicitent même de cette auto-flagellation et arborent leur sévérité envers eux-mêmes comme une Légion d’honneur. «Après tout, si on ne se surveille pas, qui va le faire?» interroge Emma Seppälä, auteure de «La piste du bonheur» (éd. deboeck). Perdre ses moyens C’est oublier qu’être trop dur avec soimême nuit au bien-être psychologique et compromet la réussite. «L’autocritique prive l’individu de son sens de l’initiative, détruit le pouvoir de son imagination,

freine son individualité et lui vole son autonomie», assure Napoléon Hill, auteur du best-seller «Réfléchissez et devenez riche». De son côté, Kristin Neff, professeure associée de développement humain à l’université du Texas, fait observer que l’autocritique est souvent un signe avant-coureur de la dépression. «Au lieu de motiver, elle empêche d’essayer, de peur d’échouer.» Elle ajoute que, dans notre cerveau, deux systèmes sont en compétition: l’un cherche la récompense, l’autre craint l’échec. Or, la peur de l’échec, quand elle est excessive, se met directement en travers de la réussite. Des recherches effectuées sur des athlètes ont ainsi démontré que la peur d’échouer peut faire perdre ses moyens au pire moment et inciter à abandonner face à un obstacle. «C’est l’exemple du coureur qui trébuche (et ne se relève pas) dans une course à laquelle il s’est préparé depuis des mois.» Au travail, elle peut

Dans notre cerveau, deux systèmes sont en compétition: l’un cherche la récompense, l’autre craint l’échec. LDD

être si anxiogène que l’on finit par tricher plutôt que d’apprendre. Ainsi, une étude conduite sur des entrepreneurs intitulée «Take the Money or Run? Investor’s Ethical Reputation and Entrepreneurs’ Willingness to Parner» montre que ceux qui ont excessivement peur d’échouer sont plus susceptibles d’accepter un partenariat douteux avec un investisseur peu respectueux de l’éthique. Le fameux «lâcher-prise» A l’inverse, rien n’est plus utile à qui entreprend une action difficile que de mettre en veilleuse ses exigences. Pour poursuivre avec la métaphore sportive, citons le cas de Yannick Noah qui, en décembre 1982, la veille d’une finale de tennis contre le Tchèque Tomas Smid, était sur la piste de dance d’une boîte de nuit toulousaine dans un état d’ébriété avancé. Contre toute attente, et surtout contre la sienne, le lendemain il gagne 6-3, 6-2,


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«Le cerveau, libéré de toute inquiétude, l’athlète, plus reposé qu’il ne le croit, va pouvoir jouer dans un relâchement total» Ollivier Pourriol, philosophe

dans un état second. Quelle morale tirer de cette histoire? «Au lieu de gamberger seul dans sa chambre en pensant au match du lendemain et d’enchaîner sur une insomnie, faire la fête toute la nuit a permis à Yannick Noah d’oublier l’enjeu, analyse le philosophe Ollivier Pourriol, auteur de «Facile, l’art de réussir sans forcer» (éd. Michel Lafon). Le cerveau libéré de toute inquiétude, l’athlète, plus reposé qu’il ne le croit, va pouvoir jouer dans un relâchement total, puisqu’il n’a aucune attente. Sa relative indifférence au but lui permet de faire entièrement confiance à son corps, et d’expérimenter le fameux «lâcher-prise», une forme d’oubli de soi, de non-pensée, d’état zen spontané où on réussit tout parce qu’on ne vise plus rien.» Un a priori négatif Autre inconvénient de l’autocritique, être dur avec soi-même incite à se polariser

Emploi et formation

sur ses lacunes, ce qui est pénalisant sur le plan psychologique. «Des recherches ont montré que notre cerveau possède un a priori négatif, poursuit Emma Seppälä. Dans notre esprit, le mauvais est plus fort que le bon.» Elle cite des recherches menées par Roy Baumeister qui suggèrent que cette tendance a peut-être contribué à la survie de notre espèce, en permettant une focalisation sur les dangers qui la menaçaient. «Mais aujourd’hui, cet a priori négatif, sur notre environnement comme sur nous-même, nous porte préjudice. On a tellement tendance à privilégier le négatif que notre vision de la réalité est biaisée.» Jugez plutôt: une analyse de Shelly Gable et Jonathan Haidt suggère qu’alors que nous vivons trois fois plus d’expériences positives que négatives, nous nous polarisons sur les mauvaises. Si nous étions capables de voir les choses telles qu’elles sont, nous «souffririons» d’un a priori positif, puisque 75% de notre vie se passe plutôt bien! Mais, aveuglés par ce qui ne va pas, nous ne nous rendons pas compte de ce qui va. Sans parler d’en profiter... «Vis-à-vis de soi-même, la tendance est là même, note Emma Seppälä. Avant un entretien d’évaluation annuelle, on se souvient d’un projet bâclé ou d’une altercation avec son chef. Et lorsque votre manager vous complimente sur vos succès et vous fait part d’un ou deux points que vous auriez pu gérer différemment, vous allez sans doute ne retenir que ceux-là.» Last but not least, cet a priori négatif nous pousse à considérer nos succès comme allant de soi. «Les grands chercheurs, écrivains ou chefs ont travaillé dur des années. Pourtant, une fois le succès atteint, la satisfaction n’est souvent pas au rendez-vous. Pourquoi? Parce que l’on s’habitue à ce qui va bien.» Ces lignes évoqueront peut-être au lecteur une promotion ou une distinction publique ayant suscité une grande joie qui, au fil du temps et de l’habitude, s’est peu à peu estompée. En définitive, s’il ne s’agit pas d’ignorer ses faiblesses pour s’épargner une critique constructive, il y a une différence entre conscience de soi (être capable d’identifier ses faiblesses) et l’autoflagellation, qui ne fait qu’ajouter à la pression et empêche de donner le meilleur de soi-même. Amanda Castillo

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Gastronomie

Mathieu Quetglas

SOMMELIER EN ALTITUDE Mathieu Quetglas vient d’être élu Meilleur sommelier de Suisse par le GaultMillau. Depuis l’hôtel Valrose, à Rougemont, où il officie, portrait d’un jeune homme talentueux et ambitieux.

I

l n’y a rien à faire, prendre le train et se laisser porter en altitude vers des terres avoisinantes est une aventure exceptionnelle. Après une petite heure de voyage ferroviaire jusqu’à Montreux depuis Genève, un arrêt nous permet de changer de voie. Le fruit du hasard fait parfois bien les choses puisque nous embarquons dans la locomotive Belle Epoque, transportés vers notre destination et dans le temps, projetés en quelques virage à l’époque de l’Orient Express. Alors que nous quittons les rives de la ville célèbre pour son festival de jazz, nous grimpons en direction de Rougemont (VD) où le sommelier de l’année GaultMillau nous attend. C’est dans le nouvel écrin culinaire de l’hôtel Valrose que le jeune prodige Mathieu Quetglas fait chavirer le cœur des amateurs de vin. Rencontre sous le signe de la nouveauté où les accords mets et vins font déjà fureur. Cuisine ménagère Enfant du sud de la France, il grandit sur les bords de Méditerranée dans la ville de La Ciotat. Toute son enfance est bercée par les doux arômes de la cuisine provençale: soupes au pistou, pieds paquets, daubes mijotées, artichauts à la barigoule. Une cuisine traditionnelle et gourmande qui forme son palais dès le plus jeune âge. «C’est peut-être une cuisine ménagère

«Même s’il faut savoir s’adapter, je préfère faire découvrir une cuvée inconnue qu’un vin reconnu»

LDD / Amoiel

Mathieu Quetglas avec son équipe de salle de l’hôtel Valrose. LDD / Amoiel

mais c’est une approche culinaire sincère», se remémore-t-il non sans émotion. Peu assidu sur les bancs d’école, la période estudiantine est loin d’être épanouissante pour ce doux rêveur qui très vite désire s’échapper du carcan scolaire. Rabaissé par l’intransigeance d’un professeur manquant cruellement de pédagogie, le jeune étudiant quitte le milieu scolaire animé d’un désir de revanche sur la vie. L’hôtellerie lui tend les bras, mais ce n’est ni par dépit ni par obligation. Il découvre un univers qui le séduit avec une nette préférence pour la sommellerie, et ce dès la première journée porte ouverte de l’école. «Je suis immédiatement tombé sous le charme. La sommellerie est un mélange de voyages liés au terroir, d’échanges avec le vigneron, de découvertes avec le client et de relations étroites avec la cuisine. J’ai ce jour-là trouvé ma voie.» Très à l’aise au sein de son nouvel environnement, il aime le côté théâtral d’une


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salle de restaurant. «Que ce soit pour une bouteille ou un plat, nous avons la chance et la responsabilité de raconter une histoire. Il ne sert à rien de faire ce métier si c’est pour être un simple poseur d’assiettes.» Sommellerie 2.0 S’ensuit de prestigieuses expériences professionnelles qui commencent par les rives du lac d’Annecy au restaurant étoilé du Clos des Sens de l’inimitable chef Laurent Petit. Loin du confort de son école hôtelière, il apprend la dure réalité du métier. «Même si l’on s’y fait avec le temps, au début nous ne sommes jamais prêts pour affronter les difficultés quotidiennes de la restauration. Tant que l’on ne le vit pas, on ne peut pas savoir. C’est un métier de passion; soit tu l’aimes, soit tu le quittes.» Grâce aux personnes qu’il côtoie, il se rend vite compte que la sommellerie est

un terrain de jeu aux multiples facettes. Mathieu Quetglas souhaite faire passer sa profession à l’ère moderne en l’amenant bien au-delà de la «simple» dégustation, de la construction d’une cave ou de la création d’accords mets et vins standards. «A notre génération de faire en sorte d’apporter un supplément d’âme à la sommellerie.» En rentrant au restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier, il continue son impressionnante ascension viticole aux côtés de Benoit Violier derrière les fourneaux, de Louis Villeneuve en salle et de Michele Caimotto qui jongle avec les flacons. Le sommelier en devenir puise son savoir dans ce trio exceptionnel avant de suivre Jeremy Desbraux à la Maison Wenger. «J’ai vraiment appris la nécessité de comprendre et connaître parfaitement le client, ce qui nécessite une préparation et une anticipation du service à un niveau incroyable. Nous étions rarement

Gastronomie

pris de cours.» Mathieu Quetglas goutte des vins d’exception, mais réalise rapidement que ce n’est pas forcément la voie qu’il souhaite prendre. Le sentiment de découverte passe bien avant la nécessité de l’étiquette. «Même s’il faut savoir s’adapter, je préfère faire découvrir une cuvée inconnue qu’un vin reconnu.» L’hôtel Valrose vaut amplement le voyage, le détour, le déplacement et pour y aller tous les moyens sont bons. Cet établissement donne un véritable coup de fouet et un nouvel élan à une région qui semblait s’endormir et se reposer sur ses nombreuses institutions. «Tout en restant humble, nous souhaitons néanmoins réaliser de grandes choses», promet le sommelier. Avec un service de salle jeune et dynamique, orchestré par Mathieu Quetglas, l’avenir est prometteur pour cette maison qui n’a pas fini de faire parler d’elle. Edouard Amoiel

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