Habiter l'informel à Marseille

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CAROLINE GODDARD

H A B I T E R L’ I N F O R M E L À M A R S E I L L E E n t r e

V I L L E

p e r s i s t a n c e

P R O G R A M M É E

V I L L E

e t

i m p a c t

S P O N TA N É E

SEMINAIRE S9 - LAB43 - MARION SERRE / RÉMY MARCIANO - 2017-2018 - ENSA MARSEILLE


Mémoire de Master 2 réalisé dans le cadre du Séminaire Carnet Curieux Sous la direction de Rémy Marciano, Marion Serre et Muriel Girard Fin 2017 ENSA Marseille




« Si l’homme est à l’image de sa ville, la ville est tout autant à l’image de l’homme : édifiée par lui, marquée en tous ses lieux par son travail, ses peines et ses joies, tout ce que la présence humaine dépose. » Pierre Sansot

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En parcourant la ville on rencontre ses murs, qui viennent chahuter le paysage urbain en le fracturant. Le regard lui même est arrêté. Cette ville si organique, tout d’un coup, entrecoupée de cette forme si droite si violente. Il n’y à plus de continuité, on le sent bien, quelque chose de différent se passe derrière. Ou bien est-ce devant? Il n’est pas là pour rien ce mur, cette barrière, cette frontière. Lieux, non lieu. Espace public, espace privé. Formel, informel. On peux, on ne peux pas. Pas de ce monde.

Les Crottes - Septembre 2017

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I Préambule II Introduction

Les Calanques Habitées

Du Quartier Informel au village touristique

p. 15 p. 17

.

p. 29

I Les Cabanons

p. 31

II Callelongue

p. 35

III Niolon

p. 43

IV La Vesse

p. 53

V Conclusion

p. 73

Du cabanon au Village symbolique

Du Cabanon au Village touristique

Du Cabanon au Village Dortoir

Les Creux de la Métropole Lieux de dernières ressources

p. 75

I Lieux de vie

p. 79

II Paysages inhospitaliers

p. 101

IV Conclusion

p. 131

Fabriquer l'accueil Une urgence permanente

p. 133

I Prospection

p. 134

II Cité d’urgence

p. 137

III Micro Interventions

p. 141

Conclusion

p. 147

I Remerciements II Lexicographie III Bibliographie

p. 151 p. 152 p. 156

Photographies et dessins personnels. Sauf si stipulé autrement.

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PREAMBULE C’est après avoir posé et questionné mon attrait pour la ville de Marseille que le sujet de ce mémoire est venu. Je me suis rendue compte que cette ville me paraissait complexe, où le formel et l’informel s’imbriquaient et se répondaient. Cependant, après avoir approfondi ces termes j’ai perçu un décalage entre les représentations associées à l’habitat informel -souvent réduit à l’habitat précaire et ce qui pouvait exister ici. Tout au long du semestre j’ai arpenté le territoire afin d’en comprendre les complexités, et c’est à travers des interviews, des photographies et des dessins que j’ai essayé de retranscrire mon parcours, et mes impressions afin de mettre en avant les différentes typologies de cet habitat informel à Marseille.

Ce travail me permettra de raconter un récit sur son histoire, sa stratification, sa persistance dans le temps, ainsi que son impact sur la ville. Du Bidonville au Cabanon, de la stérilisation des espaces à sa patrimonialisation, je vais essayer de mettre en regard la ville programmée et la ville spontanée. Ce travail apportera peut être un nouvel éclairage sur la fabrique de cette ville à la croisée de dynamiques institutionnelles et d’initiatives citadines. Quelle est la part d’informel dans Marseille et quel à été son impact dans le développement de la ville et de la métropole ?

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INTRODUCTION L’habitat informel à Marseille, entre patrimonialisation et stigmatisation

Marseille parait se distinguer par une dimension informelle importante. Dans « Marseille Ville sauvage », l’auteur nous la présente comme une « ville qui nous invite à penser la civilisation autrement ». D’après Michel Perraldi, Marseille, même « assommée par la crise économique », reste « une ville imaginée et fantasmée » autant qu’habitée. Une partie de sa complexité tient justement à la fracture qui sépare « la ville légendaire », représentée par les médias, le cinéma ou la littérature, de la ville habitée. Marcel Rocayolo quant à lui, montre que Marseille s’était constituée de manière planifiée à certains moments, et spontanée à d’autres. Tous ces auteurs interrogent la complexité de cette ville, mélangeant la planification urbaine formelle, mise en place par les institutions, mais aussi de la ville informelle produite par les habitants. Se plaçant dans la continuité de ces travaux, ce projet de recherche vise à approfondir le questionnement sur cette dualité ville « programmée » et ville « spontanée », et, plus particulièrement cette ville habitée, formelle et informelle, afin de comprendre comment ces deux dynamiques se croisent sur un même

territoire. Marseille parait se distinguer par une dimension informelle importante. Les interrogations que soulèvent ce caractère motive la démarche mise en place dans ce travail. Il me paraît important d’appréhender le terme « programmé ». En l’étudiant de plus près on comprend qu’il englobe « l’ensemble des actions que l’on se propose d’accomplir dans un but déterminé », il s’agit donc de planifier et d’organiser une suite d’opérations. L’habitat et l’urbanisme normés, sous entendent l’utilisation de PLU, DTU, ABF et autres acronymes qui réglementent la manière de faire architecture et de faire la ville aujourd’hui. Il y a une volonté prospective forte dans ce type de ville, une inscription dans le temps, des objectifs, et une exécution d’intentions. Cette volonté est portée par les pouvoirs publics. Cependant, « spontané » se définit par quelque chose « que l’on fait de soimême, de sa propre initiative; qui se laisse aller à son propre mouvement, à son impulsion naturelle sans se laisser freiner ou entraver par les blocages du conformisme, de la raison, de la

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réflexion, de la volonté, etc. » Il apparaît donc qu’une architecture spontanée échappe aux règles. Elle possède un caractère vernaculaire et n’est pas induite par des prévisions ou près requis, mais portée par des usages, besoins et compétences de ses habitants. Malgré la centralité de la question de l’habitat dans les sociétés contemporaines, les formes non ordinaires, voire informelles d’habitat restent mal connues, et sous-entendent souvent quelque chose de précaire voire de négatif. Une première étude sur le terrain appuyée par le travail de ces auteurs nous montre que c’est plus complexe que cela. Il existe un paradoxe dans la notion d’habitat informel qui est en réalité protéiforme, construit en-dehors des règles urbanistiques, de façon spontanée et auto construite. Marcel Roncayolo l’illustre à Marseille en parlant notamment du quartier des Goudes qui est devenu un vrai morceau de ville normé à part entière. Les cabanons qui le constituent sont un des types d’habitat Marseillais, qui par la persistance, se sont patrimonialisés comme le montre Jean-Claude Chamboredon. Il expose les cabanons Marseillais en montrant qu’ils occupent une place centrale dans l’histoire iconographique de la campagne marseillaise, comme dans celle du regard du voyageur sur Marseille et ses environs. De prime abord populaires, décriés lors de la mise en place du parc des calanques, et décris comme « habitations abusives » par les premiers tenants de la protection, ils sont devenus aujourd’hui un symbole fort de Marseille et des calanques, alors qu’ils proviennent d’un processus d’urbanisation spontanée. Après une approche de terrain, la côte bleue est apparue comme un lieu

d’investigation tout aussi intéressant, en effet, l’implantation des cabanons a provoqué le développement urbain de ces calanques. D’une part - à Niolon - pour constituer un village touristique et d’autre part - à la Vesse un village dortoir où les cabanons sont revenus à l’état d’habitat précaire. Ces quartiers de prime abord précaires, constitués en dehors de la ville, ont fini par y être englobés, de part le processus de patrimonialisation. Aujourd’hui cependant, les espaces de marginalité ont changé. De la périphérie, ils se sont déplacés au sein de la ville et se trouvent désormais dans ses creux, et c’est là que l’on retrouve l’habitat informel actuel.Si les quartiers informels d’hier sont devenus pour la plupart partie prenante de l’image Marseillaise, et ont été intégré dans des quartiers de ville, cet habitat se retrouve aujourd’hui dans les creux de la métropole. De fait, la nomination de l’habitat informel dans les temps actuels pose question. On choisira dans ce travail de le nommer Bidonville, à l’instar de chercheurs qui travaillent dejà sur ce sujet - tels Thomas Aguillera et Martin Olivera - plutôt que campement, terme utilisé par les politiques aujourd’hui. Dans le terme choisi le mot ville n’est pas anodin. Il permet de réinscrire cet habitat dans la ville. Pour ces chercheurs le campement illicite renvoie au droit de propriété et au droit du sol. Ce terme évoque le temporaire et l’illégal, ce qui justifie l’expulsion. Alors que le Bidonvile nous interroge sur le droit à la ville et le droit au logement. Le Bidonville constitué généralement de cabanes n’est pas si éloigné étymologiquement des Cabanons, définis


dans le dictionnaire comme une « construction rudimentaire servant d’habitation, d’abri ou de resserre. » Cependant, la différence entre ces deux représentations d’habitat informel réside dans ses représentations (l’un étant patrimonial et l’autre illégitime) mais aussi dans des processus d’évolution différents. Et, c’est dans ce travail que l’on va s’interroger sur la constitution et les processus de ces différences. Habiter le cabanon, le bidonville, s’effectue dans les marges et les frontières de notre territoire. Cependant, aujourd’hui, plus d’un tiers de la population mondiale vit dans des quartiers dits informels. Ils sont bel et bien présents dans notre paysage urbain. Les camps, les squats, les bidonvilles et les espaces marginaux, suscitent des modes d’organisations spatiale et sociale. Dans un colloque international sur le thème « Formes et aspects de la vie des migrants en habitat précaire », le groupe Telemmig en partenariat avec le laboratoire « Histoire des économies et des sociétés méditerranéennes » de la faculté des sciences humaines et sociales de Tunis et l’URMIS expliquent que l’habitat précaire contribue à la fabrique de territoires interstitiels. Il y aurait donc d’après eux, audelà de la variété architecturale et de la diversité des contextes, des caractéristiques propres à ce type d’habitat. L’habitat informel à Marseille, doit être examiné dans son étendue, sa manière de donner à vivre mais aussi en articulation avec les sociétés et espaces environnants.

constituée puis intégrée. Comment un habitat qui était stigmatisé, signe d’une pauvreté, d’une classe populaire, devient, et acquiert un autre statut via la patrimonialisation ? Est-ce que la patrimonialisation, en donnant une dignité à l’informel serait un vecteur d’intégration? Ou il y en a-t-il d’autres ? Ce travail permettra une relecture de l’histoire de Marseille ainsi que de l’évolution de la place - et l’image - des cabanons et des bidonvilles dans la constitution de nos villes. Enfin, nous nous poserons la question de notre rôle en tant qu’architecte à l’heure où les réfugiés se font de plus en plus nombreux. Cette actualité politique nous questionnera sur les notions d’hospitalité et d’accueil qui lui sont inhérentes et la place que cela doit prendre dans la ville de demain. C’est donc à travers une variation d’échelle et par le croisement d’approches historique, sociologique et architecturale que je souhaite étudier les différentes formes de cet habitat à Marseille et plus particulièrement celle de l’auto-construction. Il me parait intéressant d’analyser les différentes relations entre ce type d’habitat et le territoire : son impact, ses influences et sa construction. Ceci, dans le but de mettre en regard la ville programmée et la ville spontanée, ainsi que de porter un nouvel éclairage sur la fabrique de cette ville à la croisée de dynamiques institutionnelles et d’initiatives citadines.

Il me parait intéressant dans ce travail de nous interroger sur l’intégration de l’informel dans la ville de Marseille, et comment elle s’y est

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La Côte Bleu

Les Crottes

La Rose


La Capelette

Les Goudes

Callelongue

Sites d’études à Marseille Image satellite retravaillé de Marseille

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Parcourir la ville c’est aussi essayer de comprendre comment les activités s’entremêlent, s’intersectent, se frôlent, se superposent Entres elles, et avec l’espace public. Cohésion ou fracture. Mélange ou ségrégation. Par où rentre-t-on? Passe-t-on? Quelle est notre place - à nous piétons - finalement? À eux habitants? Pratiquant cet espace qu’ils s’approprient? Le temps d’une vie, d’une matinée...

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LES CALANQUES HABITÉES Cabanons, quartier informel, patrimoine ?

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CABANONS « Les véritables cabanons ne sont pas des habitations permanentes, on ne s’y rend que le dimanche et les jours de fête. Les uns sont placés au bord de la mer et, après le bain, ou la pêche, on y déguste la bouillabaisse, la soupe de poissons ou l’oursinade.(...) Le propriétaire d’un cabanon passe ses heures de loisir, non pas à travailler mais à bricoler pour l’amélioration du cabanon. Avec ardeur, de l’aube au crépuscule, il établit des allées en escaliers, élève de petits murs, réussit à faire pousser sur le roc des légumes et des arbres fruitiers.» C’est ainsi qu’André Bouyala d’Arnaud nous dépeint les cabanons Marseillais en 19641. Il fut difficile de trouver une date quant à la première implantation

des cabanons. Mais cet extrait nous informe, qu’à cette époque, les cabanons étaient présents et commencaient à se pérenniser. Je me suis donc intéressée aux calanques habitées afin de mieux comprendre cette part de notre histoire Marseillaise. Constituée sur le même principe : au départ un cabanon de pêcheurs, puis l’urbanisation à pris de l’ampleur. Callelongue, Niolon et la Vesse posent de manières différentes la question de la patrimonialisation et du cabanon devenu symbole, à la fois identitaire et touristique. Chacun de ces trois cas va l’illustrer de différentes façons en fonction de leur position dans la métropole.

1 p.378, Evocation du Vieux Marseille, Edition de Minuit.

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La Côte Bleue


Les Goudes

Callelongue

Sites d’études des Calanques habités à Marseille Image satellite retravaillé de Marseille

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CALLELONGUE Du Cabanon au village Symbole Habiter un cabanon à Marseille c’était habiter une cabane de pêcheurs au bord de l’eau, de façon tout à fait informelle. Quatre planches de bois pour mur, un bout de tôle pour le toit, ni eau ni électricité... Mais un point de chute, un lieu pour s’abriter des intempéries, une appropriation de la pente, de la roche... Au fur et à mesure des années la cabane s’est pérennisée. D’un lieu de stockage, elle est devenue villégiature puis l’habitat de certains chanceux. Car les cabanons ne se donnent pas, ni ne se vendent, ils se lèguent et restent dans la même famille. Ce sont plusieurs générations qui ont amélioré ces espaces, passant de bois à brique ou béton, et, de tôle à charpente. Le lieu reste rudimentaire mais il s’est perpétué.

Le lieu de villégiature idyllique tend cependant à ne plus l’être totalement. Les calanques ont commencé à se peupler suite à la politique d’urbanisation, avec, jusqu’au début du XXème siècle la mer et les sentiers comme seules voies d’accès, faisant, de ces lieux retirés, un lieu rêvé. En discutant avec ses habitants on apprend que leur vie a bien changé depuis que les calanques sont devenues un parc national1. Certes, ils ont enfin pû se faire entendre et avoir accès à l’eau, l’électricité et les transports. Cependant, ils se trouvent aujourd’hui réduits à admirer de leurs jolies fenêtres les hordes de touristes. Il est bien loin le temps de la farniente, de la pêche en solitaire et des enfants qui jouent au milieu des maisons. 1 en 2012.

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D’informel à formel ces habitats sont devenus à leur manière un emblème de la ville de Marseille, et ont modifié le paysage urbain, celui des calanques. Car leurs petits cabanons sont vite venus se faire colonisés par de nombreuses autres constructions en dur. L’un appelant l’autre, ce sont de véritables villages qui sont venus coloniser le bord de l’eau. L’évolution de ces lieux tient en partie à la mutation de la pratique du loisir à Marseille.

du monde », ou de randonner en plein soleil durant plusieurs heures.

Du fait des mouvements politiques, des émissions de télé, des guides, les calanques sont de plus en plus pratiquées par les Marseillais et les touristes. Elles se méritent : ceux qui y habitent y sont depuis de nombreuses générations et ont construit leurs habitats de leurs propres mains. Ceux qui les visitent ont le courage d’aller au « bout

Ces cabanons nous amènent à nous questionner sur la façon dont la pratique du tourisme change les villes. Il est intéressant, à travers cette étude de l’habitat informel illustré par le cabanon, que celuici se situe dans la persistance, et est devenu un morceau de ville normé découlant de l’habitat spontané.

Finalement, c’est le tourisme - après la pêche - qui influence le développement actuel de Callelongue. Cependant après l'avoir fait connaitre c'est ce même tourisme qui risque d’entraîner sa perte, dût aux trop nombreuses fréquentations et aux pollutions que cela entraine.


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PATRIMONIALISATION

Michel Rautenberg définit le processus de patrimonialisation comme une action des populations, non contrôlée par les institutions, qui fait d’un objet un patrimoine, c’est-à-dire un élément dans lequel les populations se reconnaissent, dans lequel elles placent du sens. L’image provoque une identification au lieu.

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ROGER Roger - Callelongue Dimanche 15 octobre 17h30 Après avoir essayé - en vain - de rentrer dans un cabanon afin de rencontrer un habitant... Nous décidons de rebrousser chemin, un peu penauds... Nous rencontrons alors Roger et Mireille. Fort contents de trouver là, ce qui semble être, deux habitants de Callelongue nous allons les interrogeons ; l’acceuil froid nous surprend. « Oh vous seriez pas étudiante en architecture vous ? On en a marre des gens comme vous, vous passez votre temps à poser des questions, on n’a pas que ça à faire ! » Étonnés de la remarque, nous décidons de creuser un peu le pourquoi d’un tel mécontentement... Il semblerait finalement que Roger attendait patiemment une oreille attentive afin de pouvoir raconter son récit de vie et à quel point les pratiques de ce lieux ont changé. Eux qui n’avaient même pas d’eau et d’électricité et vivaient entre quatre planches de bois se voient envahir de touriste... Il faut comprendre : Roger est malade et à chaque infarctus ( 3 ! ) il doit attendre de façon interminable les pompiers qui refusent de s’aventurer ( selon ses dires ) au bout du monde. « Vous avez vu les voitures là ? Partout partout !! Il faut pas être mal ici, sinon on crève, jamais ils viendront les

pompiers ! Il n’y a pas de places pour passer, et puis, il faut 3 heures pour revenir en ville... Vé, vous verrez bien en repartant. » Là ils nous expliquent tout ce qui a changé : les enfants jouaient là, où les voitures sont garées. Que l’on jouait aux boules là, où il y à cette sorte de rond point. Qu’ils allaient mangé chez Dédé un sandwich. « Mais, oh, fallait le quémander ce sandwich et peuchère, il fallait vraiment y mettre du sien. Et si elle était de bonne humeur, elle vous en faisait un de casse-croûte. » Aujourd’hui le restaurant à changé de propriétaire plusieurs fois, s’est agrandi, et à clairement changé de clientèle. « Avant, si on voulait un café c’était à nous de passer derrière le comptoir. Aujourd’hui... Oh ! Vous savez combien on paye ? Allez dites... Un steak une pizza et deux whisky coca... Dites, dites ??!! 49€ ! Oh ! Fatch ! Du coup on y va plus... On est chez nous sans l’être maintenant. » C’est vrai qu’il y en a des touristes... On a arrêté de compter le nombre de personnes qui sont passées derrière nous et qui, on le voit bien, regardent Roger et Mireille comme une attraction. Des personnages plus que des personnes, témoins d’une époque révolue...

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NIOLON Du cabanon au village touristique Niolon se situe sur le littoral de la Côte Bleue, et plus précisément au Rove. De Marseille, il nous faut prendre la route, direction le Nord-Est. Arrivés au Rove, nous prennons la longue route serpentant entre les collines foisonnantes à la roche apparente. Et puis, nous y voici, en haut de la route menant a un des villages atypiques de la Côte Bleue : Niolon... Déjà, une ribambelle de voitures nous accueille. Garées sur le bas côté, elles nous accompagnent jusqu’au village. Cependant, un autre accès est possible. Dans le virage se dessine un point de vue, une échappée qui nous permet de contempler Niolon dans son ensemble. Le lieu est rocailleux et à l’aplomb du chemin de fer, autre accès possible, à nos pieds. Le chemin de fer a tracé sa route de façon rectiligne dans le paysage rocailleux et accidenté du bord de mer. Il en ressort une géométrie fascinante. Tant de rigueur dans ce fouilli environnant. Une fois que l’on réussi à détacher nos

yeux de la vue plongeante sur Niolon et sur la baie de Marseille on remarque un chemin étroit, creusé dans la roche, nous menant à un petit escalier, en direction des abords du village. On serpente, observant les différents jardins, et maisonnées de chacun. Ici, les cabanons se mélangent à des constructions plus modernes, de petits pavillons aux maisons plus contemporaines. On zigzague, on se perd. On découvre un autre point de vue (photo ci-contre) sur la crête vertigineuse qui semble marquée comme une limite au village qui accueille plusieurs cabanons. Vue d’ici, c’est un petit port pittoresque qui s’offre à nous. Le village - anciennement de pêcheurs - vit aujourd’hui essentiellement du tourisme : cinq restaurants, un centre UCPA de plongée et un port de plaisance. L’attrait important du lieu s’explique d’une part par ses cabanons atypiques, et d’autre part, par la facilité d’accès dûe aux différents transports : bateau, voiture, train.

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De plus, la Méditerranée y est facilement accessible. Plusieurs calanques entourent Niolon, et mise à part le viaduc qui les surmonte, elles sont restées à l’état sauvage. Les habitations composant le village se développent autour du petit port : des cabanons, puis, s’adaptant à la topographie en pente du site, d’autres constructions sont venues leur faire suite. Niolon apparait sur la carte de Cassini1 sous le titre de « batterie de Niolon », en effet une défense y est mise en place en 1870 par l’armée française. Au XVIIIème siècle le village se protège des barbares par des fortifications. Durant la seconde guerre mondiale le paysage environnant se trouve parsemé de bunkers allemands, qui vont aussi modifier les forts déjà présents afin d’en faire des avant-postes. Bien qu’aujourd’hui bouchés ou désaffectés, ils restent le témoin d’une partie de notre histoire militaire. Le chemin de fer, au XXème siècle vient profondément changer le paysage et l’accès au site. Aujourd’hui, les bateaux de pêcheurs se 1

18ème siècle

font rares, remplacés par un port de plaisance. Rocailleux, calcaire, verdoyant, le village possède une vue surprenante sur la baie de Marseille. Renommé pour ses calanques, ses ballades et ses spots de plongée, il se trouve assailli en été par les touristes. De nombreux cabanons sont maintenant sur Airbnb, et on se demande en s’y baladant si quelques habitants d’autrefois y séjournent encore. Cependant il est bon de s’y balader. L’urbanisation des cabanons s’est faite de façon spontanée, l’organisation spatiale chaotique, se ressent lors de notre traversée. Les bâtiments semblent n’être que fouillis, extensions d’extensions, chacun construisant comme bon lui semble. Il est alors amusant d’essayer de reconnaître quel en fût la première phase. Les parcelles tendent à déborder, ce qui rend le lieu dense visuellement. Après la surprise visuelle, et la découverte des cabanons les uns plus étonnants que les autres, le lieu ne semble pas si vivant que cela. Pas une place, si ce n’est le port. Du tourisme, certes, mais il manque cruellement une véritable vie de village ...


Historique du Village. XIXème : Premiers cabanons de pêcheurs XVIIIème : Des fortifications furent érigées pour faire face aux barbares et pilleurs de l’époque. 1870 : Deux forts sont construits par l’armée française, afin de fortifier la côte marseillaise après la défaite de la France durant la guerre de Prusse. XXème : Construction du chemin de fer. 2017 : Le village est devenu un port de plaisance.

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LA VESSE Village Dortoir C’est en arrivant par le chemin du littoral que l’on découvre La Vesse. D’abord, en hauteur, c’est la vue qui nous saute aux yeux en premier lieux : falaises calcaires blanches, eaux turquoises, pêcheurs... Une fois l’escalier en béton emprunté c’est du béton que l’on découvre. La côte entière en est recouverte. Le village de pêcheurs possède une côte inaccessible, bétonné, et les quelques bouts de calcaires qui ont réussi à subsister sont occupés par les touristes ou les marseillais venus pêcher ou déjeuner. Les cabanons entre le parking et la falaise font grise mine. Ils sont pour la plupart abandonnés et ont été squatté. Une terrasse les devancent tous, et c’est en pénétrant à l’intérieur que l’on découvre la pièce à vivre. L’ambiance balnéaire des lieux est encore présente dans les traces de ses vies passées, dans la vue plongeante sur la mer... Construits en profondeur jusqu’à la roche, les cabanons possèdent le plus souvent leurs chambres et salle d’eau à l’arrière.

On s’imagine sans effort le charme atypique des petits cabanons construits à flanc de falaise, face à la mer, la roche à leurs pieds. Aujourd’hui les cabanons donnent sur un immense parking, vide. La jadis sublime calanque habitée a perdu de son éclat. Si l’on accède par l’autre côté, il nous faut emprunter une route étroite bordée de maisonnettes offrant un panorama sur la vallée et sur le viaduc qui vient souligner Marseille et cadrer la mer. Ce viaduc n’est pas si étranger au charme d’antan de ce lieu et à son développement. Les premiers habitants sont venu investir - vers 1915 - les cabanons d’ouvriers de ce pont. La Vesse, située dans une vallée enclavée entre deux crêtes (culminant à 80m à l’est séparant le village de Niolon et 12m à l’ouest) est ouverte sur la mer méditerranée, offrant un magnifique cadre. Une fois descendus, il n’y a pas de place pour nous accueillir, mais plutôt des voitures garées

Doubles pages suivantes : Sequence d’arrivée à La Vesse par le chemin littoral. De la roche au béton.

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de partout et une myriade de maisons - entre cabanons et lotissements - construites le longs des nombreuses petites ruelles serpentant sur la colline.

Chaque nouveau bâti a essayé, lui aussi, de tirer partie de la pente afin d’obtenir un bout de vue. En résulte une sorte de désordre urbain.

Une moitié du village est envahie par des habitations et l’autre par le port. Cependant, totalement bétonné et clôturé il n’en est que peu accessible. D’ailleurs, peu de bateaux y sont accostés, donnant une ambiance assez morne au lieu. La côte, quant à elle, n’est normalement pas accessible. Cependant, les visiteurs à force de se frayer un chemin ont fini par en créer un, contournant l’imposant portail, contre la falaise.

De plus, les habitations sont principalement des logements secondaires ce qui crée un village dortoir. Ici, pas de place, ni de commerces de proximité, ni de ruelles pittoresques ou bien d’équipements publics. Les seuls restaurants sont consacrés aux touristes, et ouverts seulement aux périodes estivales. L’urbanisation s’étant produite de façon spontanée, La Vesse a subi les années folles du pavillonnaire, sans réagir par des infrastructures ou des activités plus adaptées au lieu.

L’attractivité du site à induit une urbanisation disséminée jusqu’au pied de l’ancienne carrière. Depuis l’implantation des cabanons par les ouvriers - lors de la construction du viaduc l’expansion du village s’est faite petit à petit le long de la vallée.

De lieu de villégiature et de pêche atypique, les cabanons ont donné place à une banlieue anodine où il fait tout de même bon d'admirer la vue.

Double page suivante : Les cabanons de pécheurs devenus habitations aujourd’hui abandonnés pour la plupart sont maintenant squatés et tagués.


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Historique du Village. 1915 : Premiers cabanons de pêcheurs 1930 : Première boite aux lettres commune aux villageois 1940 : Les allemands construisent un bunker au fond de la calanque. 1950 : Ramassage des ordures. 1970 : Eau et electricité 1999 : Suite aux chutes de pierres le site du bord de mer est placé en zone à risque. Mais sur les 11 cabanons, certains propriétaires refusent l’exploitation car ils tiennent là un pan de leur histoire familiale. 2009 : Le bord de mer est interdit au public suite à des éboulements. 2017 : Certains cabanons sont squattés et d’autres encore habités.

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De Cabanon de Pêcheur au Squat

Photos ci contres prises à l’intérieur des cabanons abandonnés

Suite aux éboulements de 1999, le bord de mer est placé en zone à risque, puis est totalement interdit au public en 2009. Les premiers cabanons que l’on aperçoit en arrivant par le bord de mer sont, eux, habités : ses propriétaires refusent l’expulsion. Ce lieu est un pan de leur histoire, ayant abrité de nombreux moments en famille et se transmettant de génération en génération. Durant la ballade nous n'avons pu en observer qu’un seul avec ses habitants, profitant de la terrasse pour prendre l’apéro. Agréables, ils m’ont dit refuser de partir et continuer à venir ici profiter des dimanches au bord de l’eau. La côte, défigurée par le béton, les attriste mais elle ne cache pas la vue. Quant aux éboulements, ils évitent de dormir au fond de leurs cabanons mais cela se limite à ça. Les suivant arborent des fleurs aux fenêtres ou du linge séchant sur la terrasse, signe d’un lieux habité. En continuant de les longer, on tombe sur le reste des cabanons : abandonnés, squattés, saccagés... Mais ils sont ouverts, ce qui nous permet de pénétrer à l’intérieur, observer l’agencement, les murs, les sols, les objets accumulés entreposés, de ci, de là ; les traces de vies revoluent. Certains ont eu le toit transpercé d’une roche, d’autres

ont simplement préférer s’en aller afin d’éviter qu’une pierre leur tombe sur la tête. On pénètre dans l’antre de ces cabanons, on les découvre, attentifs, on les traverse, puis, après une volée de marche un peu brinquebalante on en découvre d’autres. Ils sont enchevêtrés les uns sur les autres, grappillant l’espace disponible sur la falaise afin de s’offrir la vue, le soleil, le bon vivre. Aujourd’hui les derniers cabanons sont squattés ; des lits des objets y sont entreposés. Les fenêtres sont toutes brisées, les plafonds effondrés, le sol est jonché de déchets, de verre, de tuiles. Les murs abritent de nombreux tags, témoins d’un nouvel usage de ce lieu. De cahute, de chantier à cabane de pêcheurs, d’habitat luxueux et convoités du dimanche : le cabanon est aujourd’hui redevenu précaire. Ceci ne les a pas empêcher, entre temps, d’influencer le développement urbain de la vallée, et d’accueillir une nouvelle population et de nouveaux usages. Cependant ces cabanons, témoins de plusieurs époques, sont voués à être détruits. Certains le sont déjà et seuls quelques murs subsistent : informel, ils sont construits de brique et de broc et font tout autant partie du patrimoine marseillais.

Double page suivante : Plan de la vallée de La Vesse montrant l’implantation des cabanons en rapport avec le reste de la vallée.

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CAP CROISETTE D’autres modifications du littoral marseillais (issues de l’implantation spontanée de cabanons de pêcheurs, aujourd’hui transformés en habitats) ont eu lieux sur d’autres sites, comme ci-contre à la baie des singes... C’est en suivant la Corniche du littoral marseillais que nous découvrons cet endroit atypique, communément situé

par les marseillais comme étant au « bout du monde ». Ce fût un lieu de contrebande où l’on demandait aux enfants d’être muets comme des singes... C’est ensuite par un petit chemin étroit et rocailleux que l’on accéde en haut de cette petite baie, d’où l’on peux observer un restaurant, quelques cabanons et un petit port.


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« On va passer un dimanche aux Goudes En famille, entre amis, que l’on soit riche ou non C’est un plaisir que personne ne boude Le rêve marseillais, un soir d’été au cabanon. Du lundi au samedi, travailleurs et chômeurs Tous ceux qui étudient, les honnêtes, les fraudeurs Les papys, les mamies, les policiers, les voleurs Veulent tous recevoir le fruit de leur dur labeur Ils voudraient tous conserver quelques valeurs Ces valeurs auxquelles Marseille a toujours fait honneur La convivialité, la chaleur, et la bonne humeur Le rythme des marseillais au gré des saisons, des couleurs À l’automne on va passer quelques belles soirées dehors L’hiver il faut patienter, là-dessus on est tous d’accord Si le printemps le permet, on se promène sur le port Mais quand arrive l’été, l’appel des Goudes est le plus fort. »

Paroles extraites de la chanson « Dimanche aux Goudes » de Massillia Sound System


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Conclusion

De part leurs cabanons et par le site qu’ils viennent révéler, chacun de ces lieux étudiés ici sont touristiques, et font partie intégrante du patrimoine marseillais. Callelongue m’est apparu beaucoup plus sanctuarisée et symbolique, figée dans sa proximité avec le parc des calanques dans une évolution urbaine qui semble difficile. Les cabanons de la Vesse, eux, sont en danger : à moitié détruits ou abandonnés, seuls certains résistent. Certains s’adaptent, évoluent, égrainent une urbanisation, cependant d’autres deviennent illégitimes et reviennent à leur premier statut d’illégalité. Mais ils semblent tous figés dans leurs statut touristique. La situation escarpée de Niolon et La Vesse, ainsi que la topographie abrupte à compliqué l’urbanisme. À la vue

de leur importance dans le développement de certains quartiers marseillais et de leur présence dans son patrimoine, et bien qu’enclavée en fond de vallée, ces calanques habitées ont un avenir devant eux. Certains cabanons à Marseille sont détruits à l’heure actuelle, ne passant pas au travers de la Loi Littorale. Peut être qu’un travail plus important et plus large serait intéressant afin de les mettre en lumière et de proposer autre chose qu’une sanctuarisation ou une démolition. Car, ce que nous montrent ces cabanons, c’est une mise à l’épreuve de la norme. C’est après avoir analysé ces expressions de l’habitat informel passé que je me propose maintenant de m’intéresser à son actualité afin d’étudier les similitudes et les différences.

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LES CREUX DE LA MÉTROPOLE Comme dernière ressource

Quel est l’habitat informel, produisant une structure spontanée à Marseille ? Et comment fabrique-t-il la ville d’aujourd’hui ?

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Le Canet

Arenc

Les Crottes

La Rose


La Capelette

Sites d’études des Bidonvilles à Marseille Image satellite retravaillé de Marseille

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LIEUX DE VIE Les creux de la métropole comme dernière ressource


Si les quartiers informels d’hier sont aujourd’hui devenus des symboles pour la plupart et ont été intégré comme des quartiers de villes (comme vu précédemment avec Callelongue mais aussi La Madrague, L’Estaque...) les nouveaux quartiers informels se retrouvent quant à eux dans les creux de la métropole. Le déroulé de notre réflexion nous amène à nous poser des questions sur la constitution, et la nomination de ce qu’est un habitat informel. Dans ce travail j’ai choisi de le nommer Bidonville - à l’instar d’autres chercheurs travaillant sur le sujet, tel que Thomas Aguilera ou Martin Olivera - plutôt que campement, terme utilisé par les politiques aujourd’hui. Pour ces chercheurs, le campement (illicite) renvoie au droit de propriété et au droit du sol. Ce terme induit une notion de temporaire et de l’illégale. Cela justifie les expulsions. « Bidonville »1 quant à lui, est un terme parlant par son étymologie, du droit à la ville ainsi que du droit au logement. Le bidonville à recourt à des réalités différentes, spatiales,

architecturales, sociologiques... Cependant je souhaitais que ce travail s’inscrive dans la continuité de ces travaux de recherches afin de parler de droit au logement et de droit à la ville plutôt que de droit des sols. Après avoir étudié ces travaux et la simple définition de ces mots, ce mémoire s’oriente des cabanons aux cabanes. Ce travail permettra de comparer ces deux figures qui paraissent différentes mais se retrouvent sur certains points : elles partagent la notion d’auto-construction et sont définies comme de petites habitations sommaires. Ces deux termes partent d’une étymologie similaire or la différence réside à la fois dans les représentations - l’un étant devenu légitime, alors que l’autre est illégitime - et dans leurs processus - leurs inscriptions dans le temps, l’un ayant pérennisé alors que l’autre se retrouve dans un processus d’expulsion systématique. Cette recherche me permettra d’étudier pourquoi et comment ce phénomène à lieu.

1 Voir définition lexicographie p.153

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La Rose Intersection de l’avenue de Frais Vallon,Avenue Jean-Paul Sartre et de la D908 C’est en me baladant dans la ville en voiture, à la recherche de figures de l’informel, que je suis tombée face à ce bidonville. Situé sous l’autoroute, dans une parcelle qui semble être un rejet des différent tracés routiers, cet interstice abrite une dizaine de cabanes. Entre la grille de la tour et la grille de la route il s’insère sur un entre deux, un terrain vague à moitié protégé par l’autoroute et légèrement en décaissé par rapport à la route. Un muret les sépare des piétons et fonctionne comme une vrai limite. A moitié abrité, totalement exposé au bruit du train et des voiture plusieurs familles sont venus s’y installer. Les cabanons sont fait de planchettes, de morceaux de portes, de fenêtres, d’une multitude d’objets récupérés de-ci de-là, assemblés de façon rudimentaire.

La parcelle toute en longueur à permis aux habitants de construire leurs logements le long des murets périphériques, créant de ce fait une sorte de ruelle intérieur les abritant du regard et leurs permettant de se réunir. Il est intéressant d’observer comme ces habitants sont parvenus à habiter un lieu qui n’en était pas un, et lui donner d’un coup un autre usage. Grâce à la carte de Marion Serre -répertoriant les différents sites (actifs ou passés) des déplacements des roms sur le territoire Marseillais- j’ai put obtenir de plus amples informations quant à ce lieux. Il apparait que ce site fut habité en 2012, puis expulsé en janvier 2013. Il était alors occupé par 30 personnes dans des tentes ainsi que des cabanes. Expulsé depuis, le lieu est de nouveau habité.

Page ci-contre: Retranscription en dessins de l’implantation des habitations du bidonville entre route et tour.

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LES CROTTES Pincée entre le chemin de la Madrague et la rue Cazemajou Un dimanche matin, nous sommes partis à la recherche de ces bidonvilles qui façonnent notre ville. Situés en fin de parcelles, pincée entre deux routes qui se rejoignent. Au pieds de deux bâtiments abandonnés qui la constituent. Les populations sont venus y construire de nombreuses cabanes faites elles aussi d’objets récupérer. Il semble y avoir une structure faite de tessons de bois permettant de venir y clouer des panneaux, portes, fenêtres, morceaux de bois afin de créer des murs. Le toit quant à lui est fait d’un assemblage similaire auxquels à été rajouté sur certains, des bâches, afin de permettre une meilleur étanchéité à l’eau. Contrairement au bidonville étudié précédemment, celuici « déborde » des limites de la parcelles. Le grillage sert aux cabanons comme sorte de renfort structurel. Des objets sont entassés de ci de là. Classé ils forment

d’immenses tas aux abords du site. Quelques tentes sont aussi disséminés sur les trottoirs le bordant. Dense, le lieu possède tout de même une ruelle centrale ainsi qu’une sorte de placette où plusieurs personnes sont réunis. La carte de Marion Serre ne mentionne aucun état de ce bidonville, ni d’un usage passé de ce site. Ces photos prises en Octobre 2017 ne sont plus d’actualités. C’est sans la connaitre que je suis revenue fin décembre observer un terrain vide, brûlé, clôturé, stérilisé. J’apprends alors qu’un incendie à eu lieu tuant un membre d’une famille vivant là. Ils y étaient installés depuis juillet 2017. Aujourd’hui plusieurs systèmes de stérilisation ont été mis en place: gros rochers, portails scellé, double rangé de grillage, sol creusé...La parcelle est dorénavant soustraite à l’habitat non-réglementaire. Cependant un drame à déjà eu lieu. Un homme est mort.

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« C’est quoi finalement habiter cette ville ? Chaque quartier, chaque rue, chaque rencontrée, nous propose autre chose.

personne

On habite la grille, on se fait une maison d’objets récupérés, de briques et de brocs... surtout de brocs... d’objets ayant déjà une histoire. C’est dans les ouvertures, les creux. Les interstices les lieux non lieux. Ces lieux qui d’un assemblage de planches... deviennent maison, marché, ruelle et place. »


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LE CANET Situé entre l’avenue Arnavon, le boulevard Danielle Casanova Prolongé et l’autoroute du soleil. Arrivé en Janvier 2013 ce bidonville à subit des expulsions et installations successives. Situé à l’embranchement de l’autoroute, entre deux routes, lieu sans usage attitré, il est aujourd’hui occupé par 40/60 personnes. Situé entre les talus protégeant la route, ce bidonville possède une barrière visuelle, il est difficile en le contournant d’en appréhender les tenants, d’autant plus qu’il est situé dans une zone peu accessible aux piétons, entre plusieurs voies où les voitures circulent rapidement. C’est en prenant de la hauteur que j’ai pu appréhender au mieux de lieux. Situé entre les

talus, à l’abri des regards, il est composé de plusieurs cabanons. Contrairement à ceux étudié précédemment ceux-ci paraissent plus solides, chauffés, mieux isolés. Des enfants courent entre les cabanes, des gens circulent, une petite place centrale accueille des famille discutant tranquillement. Les gros rochers qui ont dut servir précédemment de système de stérilisation du lieu ont été poussés afin de laisser de la place aux habitations, certains se trouvent à «l’entrée» du site, comme un message d’accueil visant à exprimer que malgré les expulsions ils sont toujours là.

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PAYSAGES INHOSPITALIERS Processus d’expulsions et paysages produits

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LA CAPELLETTE NOVEMBRE 2017 J+1 expulsions Mardi 31 octobre 2017, les pouvoirs publics ont évacué un bidonville où vivait une centaine de personne et détruit leurs habitats. C’est à la manière du travail de Geoffroy Mathieu, que j’ai voulu m’intéresser à l’action du temps sur ces lieux accueillants l’habitat informel, et plus particulièrement à ces parcelles nettoyé de tout habitation illégale... Nous sommes mercredi et je me décide à m’aventurer à proximité de ce site. Les rues alentours sont quasiment vides, et au fur et à mesure que je m’approche, découvre des traces de ces habitants. Des poussettes, des habits, des pinces à linges jalonnent les rues, les trottoirs. De plus en plus nombreux je fini par me retrouver face à un immense

monticule d’affaires assemblés, rassemblés accumulés. Le terrain est depuis la veille fermé, de gros portails cadenassés empêchent l’accès, et l’ancienne usine squatté à vue ses portes scellés. Un vigile posté devant, profite du calme apparent pour revoir le match de la veille. Rivé sur son téléphone ma présence n’a pas l’air de le déranger. J’ose tout de même l’interpeller afin de lui demander si je peux m’approcher et prendre quelques photos. Il me dit que oui bien sur, lui n’est là que pour appeler la police si les populations expulsés hier tentaient de revenir sur le terrain. Il m’indique même une percée entre deux barreaux abîmés du portail par lequel je peux pénétrer.

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« Tu va voir c’est zombie land! Fait attention à ne pas te faire attaquer! » Il rigole « non vas y il n’y à personne. Mais ne reste pas trop longtemps non plus, on ne sait jamais ». Je m’aventure donc et découvre une sorte de « no man’s land », un terrain en terre jalonné d’objets en tout genre, une voiture carbonisé, des tas de pneu, des tables des chaises, mais aussi des cordes à linges. On devine encore facilement les ancien lieux de vie, et la précipitation avec laquel ces habitants ont dut le quitter.

Il reste un cabanon encore debout. Dernier de son genre dans un lieu qui ressemble aujourd’hui à une immense décharge d’objets de vie. Pour l’instant les pouvoirs publics ont appliqués des dispositifs anti-instalation seulement au niveau des entrées du site. Le portail se trouve cadenassé et de gros rochers empêche tout accès véhiculé. Le bâtiment industriel abritant une série d’habitations à quant à lui, été scélé. La stérilisation du terrain est en cours, et il y règne déjà une impression d’espace figé dans le temps, dans l’attente.

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LES CROTTES SEPTEMBRE 2017 C’est au détour d’une ruelle que je m’aperçoit de cette étrange dent creuse. Un doute me viens et c’est en regardant la carte des bidonvilles de Marseille de Marion Serres que je me souviens Effectivement cette carte affirme qu’un bidonville se trouvait là. Là où désormais gravats et grues s’accumulent en prévision d’un nouvel îlot. Les images placardés en grand sur les abords promettent une nouvelle résidence, jolie, toute blanche, où les habitant ont tous l’air plus heureux les uns que les autres. Sauront-ils que leurs nouveaux havre de paix est bâtit sur un ancien bidonville ?

D’ailleurs qu’en est-il de ces anciens habitants ? Car d’eux il ne reste aucune trace à part peut être ce petit point rouge qui persiste sur ma carte numérique. Ces traces d’anciens parcours de vie, de travail, de construction il en reste pourtant. En regardant bien on aperçoit l’endroit où la toiture d’une ancienne usine venait à rencontrer le mur en pierre de l’immeuble adjacent.Une ancienne publicité est encore présente, peinte à même le mur. De nombreux tags viennent eux aussi attester la présence passé d’un autre usage du site.

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SYSTEMES D’EMPECHEMENTS En s’intéressant de près au Bidonville, on prend conscience que les pouvoirs publics ne sont plus investis dans leurs devenirs. Enfin presque... Il y a bien un système qui est mis en place actuellement, celui de l’expulsion systématique des populations habitant de façon précaire ces lieux. Suite à l’expulsion, aucun - ou peu - relogement n’est prévu. Aujourd’hui le bidonville est perçu comme inexistant. Seulement il n’y à qu’à observer le peu qui est mis en place pour comprendre que le problème est tout autre... Il y a bien un système mis en place...Un système que l’on ne remarque pas vraiment au premier abord, mais qui prend sens quand on regarde les choses de plus près , et que notre pratique des lieux s’en trouve arrêtée. A l’issue de ces expulsions, des systèmes de typologies sont mis

en place afin d’empêcher une nouvelle installation. Ces empêchement de circulation, de pénétration dans le lieux viennent rendre totalement steril es ces espaces à tout type de pratiques. Cela à été fait afin de soustraire ces parcelles à l’habitat non réglementaire. C’est dans la suite du travail de Geoffroy Mathieu que je me propose de continuer à donner à voir ces phénomènes territoriaux afin de mieux les appréhender et en comprendre la complexité et l’impact. Ce système soulève un profond problème - dans la même mouvance que les objets urbains anti-sdf - celui de préférer faire «mourir» un espace plutôt que de s’occuper du problème plus important et réel de ces personnes mal logés.

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A55 ci contre : Photographie extraite du Travail de Geoffroy Mathieu - NIMBY - Sur les dispositifs anti-installations de bidonvilles dans la ville de Marseille. Page suivantes : photographie personnelle du même site en Décembre 2017.

Les deux photos suivantes, prises à une intervalle de trois ans, nous montre une parcelle habitée par des cabanons et des tentes de façon récurrente depuis 2012. De nombreuses fois expulsés, les habitants - entre 20 et 50 - finissent toujours par revenir malgré les systèmes mis en place par les pouvoirs publics. La première photo, de Geoffroy Mathieu, prise en 2014 suite à une énième expulsion, nous montre la mise en place récente d’amas de grosses pierre, empêchant toutes nouvelles constructions. Cependant suite à mon approche récente du terrain, j’ai put remarquer que depuis, d’autres cabanes avaient été construites et très récemment détruites. C’est sur cette même image que l’on comprend que les futurs habitants sont venus pousser et regrouper les pierres afin de dégager un simple espace permettant la construction de leur abris. Il est intéressant de voir comment, par leurs compétences, ces populations trouvent toujours le moyen de contrer ces installations stérilisant l’espace afin d’encore

une fois se faire une place pour habiter. Lorsque l’on arrive sur le terrain, entre deux embranchures de l’A55, il nous faut traverser la route, dangereuse et grimper sur l’amas de terre constitué en son centre. De là ce deploit une des plus belle vue de Marseille, sur la mer et la ville qui s’étend sous nos yeux. Une fois en haut de la butte on prend conscience des nombreuses vie que ce lieux à accueillis. Des monticules de terres mis en place par la mairie laisse place à de nombreux jouets et vêtements. Entre deux tas de terre un endroit légèrement aplanis laisse deviner la trace posthume de quelques cabanes récemment brûlés. Encore une fois malgrès les système mis en place et l’accès difficile au site, les habitants en ont détournés les contraintes. Ici il m’a été donné à voir un fragment de notre territoire, habité, expulsé, stérilisé de nombreuse fois il pose la question de la présence de ces habitants dans le paysage urbain.

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Dispositifs anti-installations Installés après l’expulsion du bidonville rue Gustave Eiffel Photographie prise dès le lendemain 123



Dispositifs anti-installations Installés après l’incendie du bidonville, chemin de la Madrague Rochers, portail scellé, sol creusé, grillage renforcé... 125



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CONCLUSION Ce travail m’a permis d’observer une certaine constance d’implantation. Contrairement aux cabanons, qui comme nous l’avons vu précédemment, s’inscrivaient dans le développement de quartiers informels aux abords de la ville. Aujourd’hui les populations, habitant les bidonvilles, occupent les creux de la métropole, les déchets urbains de la ville. J’ai pu remarquer que ces habitants avaient tendance à s’installer sous l’autoroute, dans des parcelles qui semblent à l’abandon, dans les interstices produits par l’urbanisation de la ville, de la plus petite à la plus grande. Les bidonvilles ont une difficulté à se créer une certaine qualité d’habitat, dans un contexte où ils se situent dans les rebuts de la ville et en sont systématiquement expulsés. Cependant ce n'est pas uniquement un amas de bout de bois, mais bien un amas social avec sa propre vie et sa propre

forme urbaine et sociale. Les différents bidonvilles étudiés ici et leurs implantations dans la ville m’amènent à me questionner sur leurs potentialité à mettre en avant les délaissés et les creux de la métropole : sorte de mise en matière d’un vide. L’étude des paysages inhospitaliers et des systèmes mis en place par les politiques nous amène à nous questionner sur le paysage urbain que cela crée. Est-ce vraiment ces paysages là que l’on souhaite ? Ne serait-on pas plutôt capable de créer des lieux de vie plus dignes ? Car, dans une volonté de protection des sols, les politiques finissent par les neutraliser totalement. De plus, on néglige la protection des familles. Peut-être qu’avec le même budget alloué aux expulsions et à la mise en place des stérilisations, tout autre chose - qui serait plus lié à l'humain pourrait être mise en œuvre. Du droit au sol plutôt que du droit à la ville, est-ce vraiment cela la solution ?

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FABRIQUER L’ACCUEIL Une urgence permanente

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PROSPECTION Nouvelles manières d’habiter

Au vu de toutes ces questions soulevés par ce mémoire, il me semble important de nous questionner sur notre rôle en tant qu’architecte ou futur architecte. Il semble compliqué de premier abord, de faire le lien entre études d’architecture et pratique illégales d’occupations. En effet les occupations de terrains vierges ou de bâtiments de façon illégale, informels ne dépendent pas d’une logique d’occupation architecturale ou de codes urbanistiques. Ils ne s’inscrivent pas dans une idée de longévité ou en terme de développement urbain et n’utilisent pas de PLU. Ces habitats proviennent d’une autre manière de

faire, aux antipodes de ce que l’on pourrai nommer la « ville normée ». Ils influent comme nous avons pût le voir le territoire urbain, pas de façon programmée mais bien spontanément à l’initiative de ses façonneurs. Les pouvoirs publics ont tendances à penser la ville sans ces initiatives informelles. Marseille serai lisse, un centre ville touristique, le mucem, les calanques, les quartiers nord et sud. Une ville faite selon des codes établis. Chaque lieux pensé pour des types de personnes pré établis. Cependant les villes aujourd’hui sont faites de toutes ces interventions petites ou grandes, pérennes ou éphémère qui viennent ce glisser dans ses


interstices, tirer partis de ses abandons…On a pu voir que les cabanons, simple cabanes de pécheurs ont enclenchés le développements de quartiers entiers aujourd’hui devenus icônes de Marseille. Depuis, l’habitat informel a évolué et ne prend plus la même forme. La prolifération de bidonvilles sous formes de petites poches que l’on expulse mais finalement déplace met en avant un problème de société important. A l’heure actuelle où la question des réfugiés est en plein débats politique, on peux se questionner sur le droit à la ville, et les réalités d’usages, pratiques et habitat qui seraient nécessaire.

dans la ville contemporaine et ce qu’elle donnent à voir de cette ville. Ce mémoire m’as permis de m’interroger sur ce que ces pratiques d’occupations illégales, et les actes de transgression et de spontanéité ont put apporter à la ville, au système et à la société. Nous sommes à un moment où il ne devrai plus être possible de faire dormir des gens dans la rue. Peut être est ce à nous en tant qu’architecte d’essayer de créer le lien entre les institutions et cette demande d’habitat.

On peux se demander quel est leur places, et quel est la place de l’habitat informel

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CITÉ D’URGENCE Envisager les Bidonvilles de demain Comment la ville peut répondre aux problèmes de notre société ? Quels genres d’espaces a-t-on besoin aujourd’hui ? Ce projet viens d’un profond travail d’analyse et de considération des énormes changements auquel notre monde fait face aujourd’hui. Et à quel point cela influence notre manière de vivre et d’habiter la ville et ses espaces. Notre façon de vivre et nos traditions changent, en lien avec un monde où l’économie , la révolution digitale, les échangent, changent nos manières de faire et percevoir le monde. A l’image du travail du centre d’hébergement pour réfugié conçu récemment à paris par l’Atelier Rita-Architectes. Le programme du projet se voudra basé sur l’hospitalité, la modularité et le partage des connaissances. Se faisant, les espaces devront être partageable, interchangeables, afin de favoriser un maximum de perméabilité de l’espace, mais aussi mettre en avant l’informel et des usages inconventionnels. Il me parait important de rajouter de l’espace public sur le toit. Lieux d’échanges, et de prise en hauteur sur la ville, ils permettront de s’évader et de prendre mieux conscience du monde qui nous entoure. Tout cela permettant de flouter la frontière intérieur-

extérieur encore une fois dans une volonté de perméabilité et de fluidité. Ces espaces proposeront des lieux d’expression, de représentation et surtout d’échange. Dans une volonté d’échange la phase de chantier devra être à part entière constitutive du projet grâce à une approche participative et inclusive des futurs utilisateurs ainsi que des entreprises se consacrant à sa mise en œuvre. En faisant cela, le chantier devient un processus qui s’enrichit progressivement. En plaçant la culture de chacun au sein de ce projet je souhaitais surtout créer des liens entres arrivant et habitants, entre nouveaux venus et sédentaires. Entre passé et futur. Mettre l’hospitalité au cœur du bâtiment, de sa constitution, et de son avenir. Il se voudrait modulable afin de parer aux futurs changements sociétaux, ne rien imposer et ne rien figer, mais bien proposer et avancer avec son temps et ses besoins. La plupart des projet répondant aux problèmes des réfugiés se trouvent actuellement dans le Nord de la France ( Calais, Paris...) Il me semblerai intéressant de poursuivre l’élaboration d’un projet de dispositifs et de cité de l’urgence dans une des ville la plus pauvre de France, Marseille durant mon travail de PFE à venir.

Le J1, situé entre la méditerranée et la ville me semblerai être un site de projet potentiel pour ce travail. 137


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Ébauche de programme pour la cité d'urgence. 139



MICRO INTERVENTIONS Accompagner les bidonvilles d’aujourd’hui par des micro interventions Une piste de projet intéressante serait peut-être l’intégration au sein des bidonvilles ou dans certains lieux de la ville de dispositifs sanitaires. Une simple cabane permettrait d’abriter une salle d’eau, des sanitaires ainsi qu’une cuisine. 2x2m, sa taille permettrait de le positionner dans les moindres interstices de la ville.

En bois, il devra s’assembler facilement, et être démontable afin de pouvoir subvenir aux différents occupants des terrains. Modulaire il pourrait s’agrandir afin d’accueillir un plus grand nombre d’usage et s’adapter à de plus grands sites.

Double page ci-contre : Site potentiel d'implantation 141



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CONCLUSION

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Maquette de l’ancien quartier informel de Chieuse Pasteur, exposée au Musée d’histoire de Marseille .

On a pu voir dans ce travail que l’habitat informel se renouvelle dans le temps. Nous avons observé qu’il prenait des formes différentes en fonction des époques. Protéiforme, il en reste beaucoup d’autres qu’il faudrait étudier en prolongation de ce carnet curieux. Avec l’intégration de la maquette de l’ancien quartier informel de Chieuse Pasteur au musée de Marseille, nous pouvons nous questionner sur la patrimonialisation de la précarité et de l’habitat informel. Le choix scénographique nous interroge d'autant plus. Disposé à coté de celle de la cité radieuse, elle semble sur le même rang patrimoniale, dans une salle nommée " Marseille ville singulière et plurielle". Les photographie de la cité radieuse se reflétant sur la maquette de l'ancien bidonville illustre au mieux cette pluralité, cet informel-formel dont est fait Marseille. Parmi ces autres formes, la question du Bidonville d’aujourd’hui soulève des problèmes sociétaux et humains

plus profond. Il me semble d’autant plus important de continuer à poser une réflexion sur ces problèmes car leur présence sur notre territoire tend à croître avec la question des réfugiés de guerre et des réfugiés climatique. Nous ne pouvons pas continuer tel qu’on le fait aujourd’hui, et Il me parait important de repositionner la dignité des personnes, ainsi que l’hospitalité au centre de l’action politique et de l’action sur les territoires. Dans ce cadre, il me semble que l’architecte a un rôle : continuer de pousser sa réflexion sur le territoire et la ville, comme en témoigne le prix de la première œuvre décerné à L’atelier Rita-Architectes pour sa cité des réfugié à Paris. Mon mémoire m’a permis de prendre conscience et de montrer que la fin de l’habitat informel et précaire est une utopie. Si l’on s’intéresse à la fabrique de la ville, nous nous devons de prendre en compte toutes ses facettes et par la même, la réalité de l’habitat informel.

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REMERCIEMENTS Je tiens à remercier tout particulièrement Marion Serre et Rémy Marciano pour leur suivi assidu et leur soutien durant tout ce semestre. Muriel Girard pour son temps et le partage de ses connaissances sur ce sujet. Philippine Moncombles pour ses conseils. Je tiens aussi à remercier toutes les personnes que j'ai pu croiser durant mon parcours de ce territoire. Celles qui m'ont donné

de leur temps et ont accepté de partager un bout de leur récit de vie avec moi. Tout cela m'a permis d'avancer, d'apprendre et de pouvoir répondre au mieux aux réflexions posées dans ce mémoire. Je tiens aussi à remercier tous les intervenants du séminaire, qui par leur partage, ont su nous enrichir et nous faire avancer tant personnellement que dans notre travail.

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LEXICOGRAPHIE

HABITAT PRÉCAIRE ♦ Est caractéristique de nombreux quartiers de grandes villes du tiers-monde. Il s’agit souvent d’un habitat construit par l’occupant du logement sur un terrain qui ne lui appartient pas, à partir de matériaux de récupération. ♦ Selon les régions du monde ces quartiers d’habitat précaire portent différents noms : Bidonvilles en Afrique francophone, favelas au bresil, villa miserias en argentine... Le plus souvent ils sont situés dans des partis de la ville délaissées par les catégories plus aisées : sur les fortes pentes, à proximité des sites industrielles, ce qui les rends d’autan plus dangeureux. les equipements collectifs (eau ellectricité) y sont réduits, les transports collectifs ne les deservent pas . Ce qui en fait également, au moins au depart des ghettos. Il peut arriver qu’avec le temps les municipalités, les intégrent dans leurs plans d’aménagement, si elles ne decident pas de les detruire.


HABITAT

PRÉCAIRE

♦ Espace qui offre des conditions qui conviennent à la vie et au développement d’une espèce animale ou végétale. ♦ GÉOGR. HUM. Ensemble des conditions d’organisation et de peuplement par l’homme du milieu où il vit. Habitat rural, urbain; habitat aggloméré, dispersé, disséminé, groupé. ♦ Rare. Fait d’habiter, de résider en un lieu.

♦ DR. Qui n’est octroyé, qui ne s’exerce que grâce à une concession, à une permission toujours révocable par celui qui l’a accordée. ♦ Détenteur précaire. V. détenteur A 1. − Loc. adv. À titre précaire. Par suite d’une autorisation toujours révocable. ♦ Dont on ne peut garantir la durée, la solidité, la stabilité; qui, à chaque instant, peut être remis en cause. ♦ Le précaire de qqc. Le caractère précaire de quelque chose. ♦ [Dans le domaine concr.] Dont on ne peut garantir la solidité, la durée; qui n’est pas sûr. Abri, refuge précaire; clôture, hutte précaire; ombre précaire.

Étymologie et Histoire : 1861 « ensemble des conditions physiques et géographiques favorables à la vie d’une espèce » (Cournot, De l’enchaînement, etc., t. II, p. 370 ds Littré); 1903 « mode d’organisation et de peuplement par l’homme du milieu où il vit » (Huysmans, Oblat, t. 2, p. 145). Dér. de habiter*; suff. -at*; cf. le lat. médiév. habitatus « domicile » (fin ixes. ds CGL t. 2, p. 346, 17) et « action de demeurer » (1031 ds Nierm.).

Étymologie et Histoire 1336 precoire dr. «qui ne s’exerce que grâce à une autorisation révocable» 1804 détenteur précaire 1618 «dont l’avenir, la durée, ne sont pas assurés»

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FORMEL

INFORMEL

♦ Qui existe de façon déterminée et, p. ext., qui est énoncé de façon déterminée, claire, sans équivoque. Avis, ordre, règlement formel; apporter, donner, opposer un démenti formel à qqc.; essuyer, prononcer un refus formel. ♦ Être formel employé absol. ou suivi de sur qqc., à cet égard. La loi est formelle; il a été formel sur ce point. ♦ Qui concerne la forme. Analyse, critère, science formelle; examiner qqc. du, d’un point de vue formel, d’une manière formelle; se placer sur un plan (purement) formel. ♦ LING. Grammaire formelle. Grammaire qui ne tient pas compte de la signification des éléments. Grammaires formelles syntagmatiques et transformationnelles. ♦ PHILOSOPHIE : Logique formelle; raisonnement formel; structure formelle d’un raisonnement.

A. − BEAUX-ARTS. Peinture informelle, art informel et, p. ell. du déterminé, (l’)informel. Peinture, art qui tendent à exprimer des états de sensibilité produits par le spectacle du réel sans recours à la représentation formelle de celui-ci. B. − PSYCHOL. SOC. Dégagé de tout formalisme (v. ce mot A), de toute structuration ou institution. Relations informelles, réunion informelle. ♦ Groupe informel. Sous-ensemble d’un groupe organisé qui se constitue sous l’effet de conditions socio-économiques et qui assure une fonction de protection de l’ensemble (d’apr. Lar. encyclop. Suppl. 1968 et Thinès-Lemp. 1975).

Étymologie et Histoire : 1270 terme de philos. la cause furmele. 1560 « précis, exact » 1579 « effectif » garand formel.

Étymologie et Histoire 1961 adj. art informel, peinture informelle (J. Paulhan, op. cit., p. 785); id. subst. les Informels (Id., ibid., p. 786). II. 1958 « qui n’a aucun caractère officiel »


CABANE

BIDONVILLE

CAMPEMENT

A. Construction rudimentaire servant d'habitation, d'abri ou de resserre.

A. Ensemble hétéroclite d’habitations de fortune construites à la périphérie de certaines grandes villes dans des zones réputées impropres à l’urbanisation et où vit une population sans ressources, difficile à intégrer dans la vie sociale normale.

A. Action de camper, installation d’un camp (militaire ou civil).

B. Maison d'habitation Étymologie et Histoire 1387 « petite habitation sommaire » (G. Phébus, La Chasse, 197, Lavallée d'apr. Delboulle); 1462 « abri pour les animaux » (Lettres de rémission dans Du Cange); 1928 « prison » (J. Lacassagne). Empr. au prov. cabana « cabane, chaumière » attesté en 1253 dans Rayn. dans le domaine ital. ca 800, utilisé par le scoliaste de Juvénal (H. Rönsch, Lexikalisches aus Leidener lateinischen Juvenalscholien der Karolingerzeit dans Rom. Forsch., t. 2, p. 305 : cabanna); la mention du mot dans les Gloses de Reichenau (éd. Klein-Labhardt, München, 1968, Glossaire alphabétique, no1619, p. 195 : cauanna) atteste aussi sa présence au viiies. dans la France du Nord.

Étymologie et Histoire 1ére attest. 1953, 9 sept. (R. Gauthier, Du Maroc dans Le Monde, p. 4, col. 2); composé de bidon1* étymol. 1 et de ville*. − [bidɔ ̃vil].

B. Le lieu où est faite l’installation des tentes et du matériel. C. P. ext., (domaine privé). Installation provisoire et généralement désordonnée. Fam. Pièce, chambre en désordre. Étymologie et Histoire 1584 (Thevet, Vies des hommes illustres, 310 rod’apr. Delboulle ds R. Hist. litt. Fr., t. 6, p. 290 : campement des Ballabaniens). Dér. de camper*; suff. -ment1*.

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LIVRES ♦Serge Letchimy. De l’habitat Précaire à la ville : l’exemple martiniquais. Editions L’Harmattan. Objectif Ville. 2000 ♦Valérie Laflamme. Le logement précaire en europe : aux marges du Palais. Editions l’Harmattan Editions L’Harmattan. Habitat et sociétés. 2007 ♦Henri Lefebvre. Le droit à la ville. Economica. 3e édition. 2009 ♦Eleonora Canepari, Béatrice Mesini et Stephane Marlane. Mobil Hom(m)es, formes d’habitats et modes d’habiter la mobilité ( XVIe et XXIe s. ) ♦Julien Damon et Thierry Paquot. Les 100 mots de la ville. PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE - PUF . 2014 ♦Chris YOUNÈS sous la direction de Thierry Paquot. Espaces et lieux de la pensée occidentale. La Découverte. RECHERCHES. 2012

♦Thierry PAQUOT. Terre urbaine. La Découverte. POCHES ESSAIS. 2016 Désastres urbains. La Découverte. CAHIERS LIBRES. 2015 l’espace public. La Découverte. PERES. 2015

RE-

Habiter le propre de l’humain. La Découverte. REPERES. 2007 ♦Anne Durand. Mutabilité urbaine La nouvelle fabrique des villes. Infolio. Archigraphy poche. 2017 ♦Ariella Masboungi. La ville est une figure libre. Parenthèses Editions . Grand Prix de l’urbanisme. 2010 ♦François Grether. Aucun territoire n’est désespéré: Yves Lion. Parenthèses Editions . PROJET URBAIN. 2007 ♦John R Lynch. The image of the City ( paper). MIT Press . Harvard-MIT Joint Center for Urban Studies Series. 1960

♦Jane Jacobs. The death and life of Great American Cities . Vintage. 1992 ♦David Mangin. La ville franchisée : Formes et structures de la ville contemporaine. Editions de la Villette. SC. 2004 ♦Mike DAVIS. Le pire des mondes possibles. La Découverte .POCHES SCIENCES. 2007 ♦Gaston Bachelard. L’intuition de l’instant. Le Livre de Poche .Biblio Essais. 1994 ♦Yona Friedman. L’architecture de survie. Editions de l’Eclat . 2016 ♦Thomas More. L’Utopie ou le traité de la meilleure forme de gouvernement. Editions de l’Eclat . 1987


SITES INTERNETS ♦Colloque int : Formes et aspects de la vie des migrants en Habitat précaire. http://teleming.hypothéses.org/388 ♦Christophe Lehousse. Deux cineastes se penchent sur l’habitat precaire en Seine Saint-Denis. https://www.seinesaint-denis.fr/ Deux-cineastes-sepenchent-sur-l-habitat-precaire-en-SeineSaint-Denis.html

CONFERENCES ♦Lucia. La poétique de la ville spontanée, neo-primitifs urbains http://www.arp l a . f r / m u / formes02/2016/01/25/ la-poetique-de-laville-spontanee/

♦Michel Agier. L’hospitalité aujourd’hui une question anthropologique, urbaine et politique. Octobre 2016 http://www.college-defrance.fr/site/colloque-2016/symposium2016-10-14-16h45.htm ♦ "Actualité du bidonville" Revue urbanisme les dialogues de l'urbain, rencontre n°10. Agnes Deboulet, Muriel Girard, Marion Serre

♦Barnabé Dovergne. Accueil des migrants à Marseille : entre financement institutionnel et gérance associative https://marsactu.fr/ agora/accueil-des-mig r a n t s - a - m a r seille-entre-financement-institutionnel-et-gerance-associative/ ♦Pierre Duquesne. Bidonvilles : démolissons enfin la politique du bulldozer ! http://www.habiterlaville.fr/demolissons-la-politique-du-bulldozer/

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AUDIO

MEMOIRES

AUTRES

♦Jean Lebrun. Les bidonvilles des «Trente Glorieuses » . 15 Mars 2016 https://www.franceinter.fr/emissions/lamarche-de-l-histoire/ la-marche-de-l-histoire-15-mars-2016

♦Betzabe Urquiola. Not just passing through. Migrants in the City . Apr 2016 https://issuu.com/betzabeurquiolar/docs/ notjustpassingthrough_ betzabeurquio

♦COMMUNIQUE DE PRESSE Évacuation du squat du 44 rue Gustave Eiffel 13010 Marseille, Mardi 31 octobre 2017.

♦Elsa Dejan. Pratiques d’occupation illégale . 2013/2014 https://issuu.com/ elsadejan/docs/pratiques_d_occupation_ ill__gale ♦Emeline Romanat. La maison éclatée, place à l’hospitalité urbaine. 2012 https://issuu.com/marie-miminedelascasas/ docs/08-07-14_maison-eclatee-weblight ♦Anne Gotman. Sociologue. recherches durant les années 90. L’hospitalité à un début et une fin.

♦ DOSSIER Actualité du bidonville La Revue Urbanisme n°22 Agnes Deboulet, Muriel Girard, Marion Serre


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" La métropole est un territoire hybride, tentaculaire ; elle est composée d’identités multiples, de cultures stratifiées, comme c’est souvent le cas en méditerranée. On y croise des paysages variés, littoraux, balnéaires, Provence, Camargue, villages, tissus urbains denses ou étalés. Il y a aussi de la fragilité dans ce territoire métropolitain, un caractère sauvage, rugueux. Il y a du chaos, des embruns, un climat rude et une lumière incroyable. C’est ce caractère sauvage qui offre des situations touchantes, attachantes ; qui fabrique de véritables moments de poésie. Avec la transformation de la ville, comment répondre aux besoins en termes de déplacements, de logements, etc... Et conserver suffisamment de surprise, d’inattendu, qui fait la magie de ces lieux. Métropole Carnet curieux propose de retracer le récit d’une déambulation dans ce territoire, pour y traquer l’ADN de ce qui compose cette identité précieuse et fragile. L’idée de s’infiltrer dans les interstices de cette métropole en devenir, et d’en établir un inventaire à la Perec, libre et poétique, thématique ou pas, sur les impasses, les friches, les passerelles autoroutières, les architectures, les franges, les délaissés, les vues, les rues, les espaces publics, les espaces de regroupement, les rites et les codes. " RÉMY MARCIANO Séminaire Carnet Curieux 161



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