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Cahier du Conseil de Développement Départemental

L’espace littoral de la Loire Atlantique Séance de travail du 10 octobre 2006

Le littoral : un espace à développer et à protéger Première séance de travail avec

Côté mer

— Monsieur Hubert GROSSEL, Chercheur à IFREMER Nantes et,

Côté terre

— Monsieur Didier FLEURY, Chargé d’études au Groupement d’Intérêt Public - Loire Estuaire,

Avec le concours de Monsieur Christophe LE VISAGE, Délégué Adjoint pour la Façade Atlantique à la Direction Régionale de l’Environnement (Diren Bretagne).

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1 - LE LITTORAL : UNE VISION AU DELA DU LOCAL

1.1 - DANS SA DIMENSION GEOGRAPHIQUE Sur le littoral, l’interaction entre la terre et la mer est dynamique. Les échanges et interdépendances entre l’une et l’autre sont permanents, en raison de l’hydrodynamique littorale et des transferts d’une zone à l’autre. On ne peut donc pas s’arrêter à des limites communales pour examiner des problèmes et développer des projets liés au littoral.

1.2 - DANS SA DIMENSION ENVIRONNEMENTALE, ECONOMIQUE ET SOCIALE Les conséquences des activités humaines sur un espace littoral, à un point local donné, peuvent concerner un ensemble littoral beaucoup plus vaste que ce dernier.

2 - LA QUALITE DU MILIEU : CONDITION DU DEVELOPPEMENT ET DE L’EQUILIBRE DES ESPACES LITTORAUX

2.1 - LES ACTIVITES HUMAINES SUR LE LITTORAL Les activités humaines d’aujourd'hui et de demain sur le littoral sont et seront essentiellement : la pêche près des côtes comme au large, la conchyliculture, l’aquaculture, la saliculture installée sur les zones de marais etc. qui sont directement inféodées à la mer et au littoral, tourisme (promenade, baignade, nautisme, plongée, pêche récréative… ) Les installations de ces activités sont très proches d’autres sites, également consommateurs du milieu naturel : les zones portuaires ou industrialo-portuaires, les zones d’agriculture intensive sur les bassins versants, les habitats denses …

2.2 - LEUR DEPENDANCE COMMUNE : LA QUALITE DU MILIEU Malgré leurs oppositions et conflits en termes d’occupation du littoral ou d’intérêts particuliers, de plus en plus les activités du littoral s’appuient sur une bonne qualité du milieu, et avant tout la qualité de l’eau. Exemples : prises d’eau pour la thalassothérapie, les criées, les centres d’expédition des coquillages… mais aussi bien sûr les baignades, les zones conchylicoles etc.

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3 - CHOIX ET PRIORITES DE DEVELOPPEMENT DU MILIEU LITTORAL : L’APPROCHE SCIENTIFIQUE

3.1 - FAITS STRUCTURANTS DE LA LOIRE ATLANTIQUE : A PRESERVER Voici quelques faits structurants de la Loire Atlantique, souvent soumis à pressions touristiques, industrielles etc., qu’il est essentiel de préserver :

• L’estuaire de la Loire, dont l’écosystème est extrêmement complexe - puisque c’est en ce point que se confrontent les deux masses d’eau marine et d’eau douce - et son bassin versant,

• Les petits bassins versants : notamment celui du Mès, de Guérande, de la baie de Bourgneuf

• Les zones humides, reconnues comme extrêmement riches en termes de biodiversité et utiles en termes de capacité d’épuration pour certains milieux aquatiques : Le Marais du Mès, le Marais de Guérande, le Marais de la Brière, les zones humides des bords de Loire (vasières et roselières), le Lac de Grand-Lieu, le Marais Breton …

• Les estrans vaseux, zones d’échanges entre la

terre

et la

mer

et de productivité biologique intense puisque de nombreuses espèces, (poissons, coquillages, …), qui seront pêchés, se nourrissent dans ces espaces.

3.2 - UNE BONNE GESTION DU LITTORAL : 3 NIVEAUX D’ANALYSE

Les contraintes et la sensibilité du littoral aux phénomènes hydro-morphologiques à court terme et à moyen terme A titre d’exemples : • Les problèmes d’érosion des côtes sensibles - telles que les côtes à falaises entre la Turballe et la Baie de Vilaine -, d’envasement des baies…

La Bernerie

• Les effets d’aménagements (comme la construction d’une digue, dans le cadre d’une création portuaire, ou d’un épi) sur le littoral peuvent être très perturbateurs pour le milieu marin : notamment influencer le niveau des transferts sédimentaires et la courantologie. Cahier du Conseil de Développement Départemental Littoral - numéro 1

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Un tel constat est important à prendre en compte, car en évaluant mal ce type de phénomènes et en ne se concertant pas dès aujourd’hui, la gestion ultérieure d’un aménagement se compliquerait et serait de plus en plus coûteuse. La prise en compte des flux sédimentaires est donc très importante pour la gestion de certaines activités : dragages portuaires, exploitation des sables et graviers marins… • L’élévation probable du niveau de la mer dans les années à venir risque également d’avoir une influence forte sur l’évolution du littoral en fragilisant le trait de côte.

La richesse biologique des milieux et leur fragilité A titre d’exemple : • L’efflorescence de phytoplancton Karenia peut se développer, lorsque les bassins versants (de la Loire, de la Vilaine etc.) et parfois les phénomènes océanographiques liés au climat, alimentent de façon excessive le milieu marin en sel azoté, en phosphate…

Eaux vertes en baie de Vilaine (été 1998) dues à l ’efflorescence du phytoplancton Karenia

Aussi, le plancton marin s’accroît et exprime la richesse biologique du milieu marin ; mais il peut devenir facteur de déséquilibre du milieu naturel et de mortalité pour la faune marine et ainsi avoir un impact néfaste.

Les différents usages et leur sensibilité à la qualité du milieu • Les différents usages portuaires (port autonome, ports de pêche, de plaisance, ostréicoles , Baie de Bourgneuf…) soulèvent des questions de capacité d’accueil et de priorités du territoire, mais aussi de traitement des effluents et donc de qualité de l’eau. • La Loire fait actuellement l’objet d’une surveillance et d’une évaluation. Il s’agit de mesurer les débits, les flux de sédiments et de matières organiques, les transferts et stocks de sédiments, les flux et comportements des polluants, le rôle biologique et écologique des rives de l’estuaire, le bouchon vaseux, les flux d’eau douce à la lans.

mer

La Loire

etc. et d’établir les bi-

Ce type de démarche devrait permettre d’amener des éléments de réponse à certains interlocuteurs (les collectivités…) qui s’interrogeraient quant à leur responsabilité vis-à-vis d’une éventuelle contamination de leur milieu naturel. • Un ensemble de réseaux de surveillance (de la qualité des eaux de baignade, conchylicoles, de la qualité microbiologique des coquillages, de la qualité des sédiments portuaires etc.) est actuellement mis en place par les administrations et l’IFREMER.

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3.3 - LA GESTION DES MASSES D’EAUX COTIERES : UNE NÉCESSITÉ

La Directive Cadre sur l’eau La Directive Cadre sur l’eau, du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2000, vise à établir un cadre communautaire pour la protection des eaux intérieures de surface, de transition, côtières et souterraines : • en vue de prévenir et réduire leur pollution, • promouvoir leur utilisation durable, • protéger leur environnement, • améliorer l’état des écosystèmes aquatiques, et • atténuer les effets des inondations et des sécheresses.

C’est à travers cette directive qu’ont notamment été déterminées : • la définition des masses d’eaux de transition et côtières, • la mise en place des réseaux de surveillance, afin d’identifier les risques, pour les eaux littorales, de « non-atteinte d’un bon état écologique ou chimique ». La Directive impose une obligation de résultat : la France devra normalement en 2015 tester le retour au bon état de ses masses d’eaux.

Exemple de la sole du Golfe de Gascogne Son cycle de vie : • Les soles adultes se reproduisent au large, au milieu du plateau continental, sur des fonds de 70 à 100 mètres.

• Les 4000 milliards d’œufs sont ensuite dispersés par les courants, puis éclosent (1 à 2 semaines), donnant des larves planctoniques. Une faible partie atteint la côte, où les larves se métamorphosent et colonisent le fond. La gestion des masses d’eaux côtières peut évidemment influer sur le cycle de vie de la sole et nécessite donc beaucoup d’attention. En effet, le cycle biologique de la sole au large est totalement dépendant de la qualité des eaux littorales. Les soles adultes vivent au large et les soles juvéniles viennent se nourrir dans les eaux côtières. Une éventuelle dégradation du milieu côtier serait préjudiciable aux soles juvéniles, aux écosystèmes et aux activités : pêche, conchyliculture, etc.

• Près de 33 millions de soles juvéniles se répartissent alors tout au long du littoral. Mais elles se concentrent en particulier dans six nourriceries principales de la Gironde à la baie de Vilaine, où elles trouvent des conditions favorables à leur développement.

• Les jeunes soles de 2 ou 3 ans migrent vers le large et se reproduisent au printemps.

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4 - LE LITTORAL : UNE ATTENTION CONSTANTE

L’attention des acteurs locaux doit donc être fortement portée sur la valeur environnementale et écologique de leurs écosystèmes naturels, mais également sur leurs relations avec les écosystèmes voisins.

Exemple de juxtaposition d’activités et de milieux sur le littoral : Vue aérienne de La Turballe-Pen Bron

Tous ces constats soulignent bien l’importance des notions d’appropriation des espaces littoraux, de capacité d’accueil et du difficile équilibre à trouver pour une bonne cohabitation des activités humaines et une vraie protection et qualité des milieux naturels.

5 - LITTORAL : COTÉ MER : 3 MOTS CLÉS Retenir 3 mots clés pour une meilleure compréhension et évaluation des risques chimiques encourus par les « eaux littorales » : persistance, bioaccumulation et toxicité des substances rejetées ou dispersées dans l’environnement. C’est ce type d’évaluation qui détermine aujourd’hui les normes de qualité environnementale à ne pas dépasser. Il s’agit, lors de l’examen d’un projet impliquant une substance potentiellement polluante, de se renseigner sur sa toxicité, sa persistance et sa bioaccumulation, afin de déterminer si elle représente localement un réel risque ou non.

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1 - LE LITTORAL : DEFINITION D’UN ESPACE

1.1 - UNE BANDE DE TERRE ET DE MER Le littoral est à la fois une bande de l’autre :

terre

et de

mer, où chaque côté dépend étroitement de

terre, le littoral se définit par la proximité de la mer : autrement dit par la vue sur la mer, mais aussi parce que les activités – baignade, tourisme, plai-

• Du point de vue de la

sance, loisirs... – en dépendent etc. Le littoral est en effet le bord de la mer, et non le bord de la listes de l’urbanisme ont généralement tendance à oublier,

terre, ce que les spécia-

mer, le littoral se définit non moins par la proximité de la terre : soit de faibles profondeurs, des apports de matériaux et de nutriments venus de la terre, des activités directement dépendantes de la terre située en face.

• Du point de vue de la

• Le littoral est également la partie de la mer d’où on voit la terre, et la partie de la d’où l’on sent la

terre

mer....

Cette définition n’est pas juridique mais opérationnelle et montre bien que le littoral ne sépare pas la

terre

et la mer, il les unit !

1.2 - UN ESPACE MULTIFONCTIONNEL ET UN LIEU DE CONFLITS D’USAGES

Le littoral est un espace multifonctionnel original, où les activités se partagent un espace réduit et des ressources très convoitées : c’est par excellence le lieu des conflits d’usages, à

terre

comme en mer. Un « conflit d’usages » est une compétition pour l’espace et les ressources ; il n’implique pas forcément un conflit entre usagers… Cette compétition est évidente à

terre, pour la propriété ou l’usage du sol, mais moins visible en

mer, où elle y est tout aussi vive : par exemple entre pêcheurs professionnels confrontés à la raréfaction de la ressource, ou entre pêcheurs professionnels et autres usagers (comme les plaisanciers ou les extracteurs de granulats marins). Enfin, plus récemment, sont apparus des conflits à travers l’interface entre résidents secondaires et cultures marines.

terre-mer

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: par exemple

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1.3 - UN ESPACE PRIVILEGIE AUX RICHESSES ATTRACTIVES Le littoral n’est pas un simple espace vide, libre à l’occupation. C’est avant tout par ses ressources qu’il attire : • ses richesses et ses ressources économiques, ou valorisables économiquement, comme les ressources halieutiques ou les algues, les ressources biologiques, les matériaux et les minéraux qu’on peut extraire de son sous-sol (comme le sable), ou encore l’énergie du vent ou des vagues ; • ses ressources patrimoniales, qu’elles soient naturelles comme les paysages marins ou terrestres, la faune et la flore originales qui l’habitent, ou culturelles comme les villages, monuments, savoir-faire, développés au cours des siècles par les populations littorales ; Toutes ces ressources et ce patrimoine se regroupent sur un espace très disputé, et ce sont pour l’essentiel des biens publics ou collectifs : le paysage appartient à tous, de même que les ressources vivantes ou minérales de la mer. • sa richesse immatérielle, mais parfaitement objective : c’est un espace privilégié pour les communications, les télécommunications, les échanges, les transferts, les rencontres. Ce statut privilégié peut aussi être un facteur de risque : pendant des siècles, le littoral a été le lieu d’où venaient les envahisseurs, et c’est toujours sur le littoral que se concentrent les trafics illicites et les risques pour la sûreté...

2 - LE LITTORAL : UNE VISION EN 4 DIMENSIONS

2.1 - LA DIMENSION ECONOMIQUE

Facteurs attractifs : Le littoral est un concentré des richesses de la tement exploité par les hommes.

Côté Mer

Interface

Ressources aquacoles

Ressources minérales

Ressources énergétiques

- frayères, - nurseries, - zones conchylicoles et - cultures marines,

- les sables siliceux indispensables au BTP, - les matériaux calcaires utilisés en amendement agricole …

- le vent, - les vagues, - la houle, - les courants

etc.

terre

Point de connexion des transports terrestres et maritimes

et de la

mer, directement ou indirec-

Mer-Terre Présence de câbles de communication, de, tunnels, pipe-lines …

débarquements de : - poissons, - marchandises, - pétrole, - minéraux, - engrais, - aliments pour animaux …

Côté Terre Sols enrichis d’alluvions

Vue et accès à la mer

- souvent très fertiles - valorisables dans des exploitations à haute valeur ajoutée …

- résidences permanentes et secondaires, ports de plaisance

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Quelques enjeux : • Le développement d’entreprises et d’industries : entreprises de transformation (des marchandises arrivées à quai…), des zones de productions marines, d’exploitations agricoles, d’industries agro-alimentaires, énergétiques … • Le développement d’une source majeure d’énergie renouvelable : la

mer

• « l’économie résidentielle » qui est un nouveau type d’enjeu économique, directement lié à l’occupation statique de l’espace …

Economie littorale : quelques chiffres Valeur ajoutée de l’économie maritime et littorale

Il est impossible de séparer maritime et littoral : toutes les activités maritimes doivent avoir une terminaison sur le littoral, et c’est sur le littoral que la plupart des activités maritimes produisent effectivement des richesses économiques. Le tourisme génère à lui seul presque la moitié de la valeur ajoutée de la mer et du littoral, soit 4 fois plus que le transport maritime, la construction navale ou la pêche et les cultures marines.

Valeur ajoutée entre 1999 et 2001 Source : IFEN

Economie maritime et littorale

Economie française

+ 10,8 %

+ 8,9 %

L’économie littorale se développe plus vite que la moyenne de l’économie nationale, ce qui pourrait laisser penser qu’un cadre réglementaire contraignant n’est pas forcément un handicap insurmontable pour le développement …

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2.2 - LA DIMENSION SOCIALE

3 types d’enjeux :

• LE LOGEMENT : Anticiper les problèmes : - de développement de situations précaires et - de sélection sociale sur le littoral.

Ces enjeux culminent dans les villes littorales, mais surtout dans les îles où le rétro-littoral est absent et où la mixité sociale disparait de façon accélérée. L’augmentation du prix du foncier étant continue, la tendance actuelle sur le littoral français est à la sélection sociale et notamment au rejet vers l’intérieur des foyers et personnes défavorisés, mais aussi aux conflits de plus en plus présents entre les résidents principaux, de plus en plus repoussés loin de la mer et au développement de situations précaires chez les catégories socioprofessionnelles qui, par choix ou par nécessité, ne peuvent s’éloigner du littoral.

• L’ACCÈS AU LITTORAL : Garantir un accès public au littoral

La mer et les plages sont des espaces publics, souvent dédiés aux loisirs, aux promenades etc. Mais encore faut-il pouvoir y accéder… Parfois même l’accès à la vue sur la mer devient tout simplement difficile, puisque progressivement privatisé.

• LES COMMUNAUTÉS ET TRADITIONS : Maintenir le « charme » et l’identité des petits villages de pêcheurs, préserver les coutumes et savoir-faire locaux …

Les communautés littorales originelles disparaissent petit à petit avec le changement des modes de vie, mais aussi sous la pression foncière.

Peuplement du littoral : quelques illustrations La densité de population de la bande littorale en Europe Il s’agit de population permanente, et non de densité de l’habitat. Source :

Le littoral français est dans la moyenne, avec des densités toujours supérieures à la densité moyenne, souvent même très supérieures, notamment dans le sud.

Agence Européenne de l’Environnement, 2006

Le littoral français s’inscrit progressivement dans un mouvement inexorable de densification.

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Les tendances globales sont aussi locales : Source :

• Comme un verre qui se remplit par le bas, « le littoral se remplit par le sud ». Construction sur le littoral français de 1999 à 2003

• Le taux de construction est désormais le même partout : que ce soit dans des régions comme le Pays basque, le sud de la Bretagne ou dans des zones dans lesquelles s’installent traditionnellement les retraités à la recherche du soleil et de la

mer.

2.3 - LA DIMENSION ENVIRONNEMENTALE

Le principal enjeu :

Protéger l’environnement de la zone littorale et préserver ses paysages

Atouts et contraintes : Qu’il s’agisse de faune et de flore, de • Le littoral est une des zones écologiquement les plus riches du globe :

mer

ou de terre (avec notamment les zones humides côtières comme les marais, véritables réservoirs de biodiversité), le littoral remplit des fonctionnalités écologiques importantes.

- Une zone soumise à toutes les pressions anthropiques et réceptacle d’une grande partie des déchets et pollutions terrestres acheminée le long des bassins versants (Doit-on rappeler que plus de 90% des pollutions du milieu marin littoral • Mais le littoral est aussi une zone fragile :

provient de la

terre ? )

- Une zone subissant des problèmes de ressource en eau liés à la densification des populations et des activités. - Un lieu concentrant les risques naturels (tempêtes, inondations … ), les risques liés au réchauffement climatique et à l’élévation du niveau de la mer, et les risques technologiques et industriels (marées noires … )

• Les paysages littoraux sont souvent exceptionnels et bien visibles, mais pourtant souvent mal protégés :

- Ils disparaissent insensiblement, grignotés par une route, un parking, un port, un lotissement, des éoliennes … - et sont progressivement banalisés par ce cumul de petits impacts.

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Observatoire du Littoral, 2006


2.4 - LA DIMENSION SOCIETALE

Le littoral : Un enjeu sociétal de haut niveau • Un enjeu sociétal se définit par ce que la société dans son ensemble – et non seulement chacun d’entre nous – considère comme important, mais qu’on ne peut pas analyser suivant une grille classique « économique – social – environnemental ».

• Le littoral, au « statut social » singulier, est avant tout une « affaire de société » : il est important pour tous ceux qui y vivent et pour tous ceux qui en vivent, mais également pour tous les autres : ceux qui n’y vivent pas et qui n’en vivent pas. Ainsi, le littoral, c’est la réalité de certains, mais aussi le rêve de tout le monde…

• Un tel enjeu ne doit pas être minimisé : il conditionne la vision de l’intérêt général telle que peut notamment l’exprimer l’opinion publique ou le législateur, parfois à l’inverse des impressions et des opinions des populations littorales… A titre d’exemple : la réaction de la population face aux marées noires et l’extraordinaire mobilisation de l’opinion publique …

La vision des Français sur l’espace littoral : Quelques données objectives Les constats suivants sont issus d’un sondage réalisé au printemps 2006 par l’institut CSA pour le compte du ministère de l’écologie et du développement durable.

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Pour les français, le littoral arrive en tête des facteurs d’attractivité de leur pays (à 51 %), pas très loin devant le patrimoine culturel (47 %), mais beaucoup plus devant la montagne (27 %) et la campagne (22 %)…

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Lorsqu’il s’agit pour les Français de répondre à la question « à qui faites vous confiance pour protéger le l ittoral en France ?» :

ce sont les associations de protection de l’environnement qui arrivent loin devant les autres intervenants.

Les acteurs auxquels les Français font confiance pour protéger le littoral et préserver les côtes en France

Base : ensemble des répondants

Ce qui peut laisser penser qu’il existe un certain déficit de confiance dans les pouvoirs publics pour protéger le littoral.

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4

L’ensemble des citoyens est globalement satisfait de la loi Littoral, dont ils estiment à une très large majorité qu’elle protège assez bien nos sites remarquables (81 % d’opinions favorables), alors que seulement 39% d’entre eux estiment qu’elle freine le développement des côtes.

Le décalage est étonnant entre l’opinion des français, (seulement 4% estiment que la loi Littoral doit être assouplie) et le point de vue le plus souvent exprimé dans la presse, (par des groupes de pressions économiques directement intéressés au relâchement de contraintes jugées excessives).

L’artificialisation du littoral européen

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Si à l’échelle de l’Europe, la France a plutôt mieux protégé son littoral que d’autres, une partie non négligeable de ce littoral est pourtant déjà artificialisée à plus de 15%. Par artificialisation du littoral, il faut comprendre aménagement et construction de villes, ports, jetées, digues, cales, murs, lotissements, etc.

Source : Agence Européenne de l’Environnement, 2006

2.5 - DES ENJEUX LEGITIMES A TOUS LES NIVEAUX

Une cascade d’enjeux légitimes : • Local - comme c’est souvent le cas des questions d’urbanisme et d’occupation de l’espace• Régional ou national - Imaginons qu’afin de favoriser le tourisme ou l’environnement, on décide de fermer le terminal de Donges ou les chantiers de St Nazaire ! On s’aperçoit alors, que notamment à travers la politique portuaire, mais aussi la pêche, l’énergie et les cultures marines, les enjeux du littoral dépassent très largement les enjeux purement locaux… •

Global - tel que la protection de la biodiversité, ou la prise en compte des effets du changement climatique… Cahier du Conseil de Développement Départemental Littoral - numéro 1

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Le niveau local : souvent synonyme de conflits Cette cascade d’enjeux se termine forcément à l’échelle locale – celle des élus, mais aussi celle des citoyens – et souvent par des conflits : il est en effet facile de souscrire à des principes généraux vertueux, mais il est beaucoup plus difficile de les mettre en œuvre dans les actions de tous les jours, ou dans les décisions locales. Tout le monde est évidemment conscient de la beauté du milieu naturel. Mais qui résisterait – si ses moyens le lui permettaient – à l’envie d’en grignoter un petit morceau pour s’y construire la maison de ses rêves, avec vue imprenable, en attendant du moins qu’un autre, plus chanceux ou mieux introduit, construise la sienne juste devant… ?

3 - LES ACTEURS

3.1 - TOUS LES HOMMES Tous sont légitimes à faire valoir leurs souhaits, leurs désirs ou leurs vœux, en faveur de leur vision du littoral ! Il est en effet tout aussi légitime de vouloir développer le littoral que le protéger, et de vouloir vivre au pays que de vouloir profiter pendant ses vacances d’un paysage de rêve… 3.2 - LEUR CLASSIFICATION

Les collectivités territoriales Porteuses du projet collectif local (légitimes pour exprimer ce que les acteurs locaux veulent pour leur littoral ?)

Les autres communautés Dont les intérêts communs ne sont pas forcément territoriaux, mais sectoriels : les pêcheurs professionnels et les conchyliculteurs, les surfeurs, les randonneurs du dimanche etc.

Les citoyens Qui enfin commencent à apparaître en France, comme des acteurs légitimes qu’il faut inviter aux discussions. Ils sont porteurs d’intérêts personnels parfois en conflit avec l’intérêt collectif, mais aussi très souvent porteurs, à travers des associations, d’un intérêt général qu’ils estiment mal défendu par leurs représentants.

L’Etat A qui revient, en tant que représentant de tous les Français, le soin de faire appliquer la loi, de faire respecter les engagements de la France, de gérer ce bien public qu’est la mer, et d’arbitrer en cas de conflit entre l’intérêt général et les intérêts particuliers. Cahier du Conseil de Développement Départemental Littoral - numéro 1

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4 - LE LITTORAL : UN ESPACE FINI AUX RESSOURCES LIMITEES

4.1 - PEUT-ON LAISSER FAIRE NOTRE GESTION ACTUELLE ?

Notre approche actuelle Même avec des difficultés, les équilibres locaux peuvent finir par se mettre en place : chacun décide lui-même - encadré par une réglementation toujours en retard sur la réalité - de ce qu’il convient de faire et de ne pas faire sur le littoral : • pêcher, ne pas pêcher ; • construire, ne pas construire ; • disposer d’une résidence vide la plupart du temps ou d’un espace à quai sur le domaine public occupé par un navire qui ne navigue pas…

Sa principale limite Néanmoins, l’offre limitée ne suffira à l’évidence jamais à équilibrer la demande. Le marché ne peut arbitrer entre usages différents d’un même espace ou d’une même ressource. Que faire si la somme des choix individuels ne mène pas à l’équilibre, ou du moins à un équilibre acceptable ?

4.2 - ALLER VERS UN PROJET COLLECTIF

Une réflexion collective nécessaire • Qui permette de hiérarchiser les enjeux, • De s’interroger sur ce qui rend le littoral exceptionnel, autrement dit ce qui est à protéger, • De s’interroger sur ses enjeux importants, qui ne peuvent s’exprimer que sur le littoral et non ailleurs. Ce sont ces enjeux auxquels la priorité devrait être accordée, même s’il faut pour cela sacrifier les enjeux portés par des acteurs certes légitimes, mais qui peuvent trouver ailleurs, que sur le littoral, de l’espace ou des ressources pour les exprimer. Ce diagnostic a clairement été posé en 2003 par la Commission du Littoral du Conseil National de l’Aménagement du Territoire.

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Le « paradoxe du littoral »

En le consommant, souvent de manière irréversible, comme un espace ordinaire et à force d’y venir :

On y détruit petit à petit ce qu’on était venu y chercher et qui en fait sa valeur...: nature, calme, bruit des vagues…

Le littoral est clairement un espace extraordinaire : les zones d’où l’on voit la mer ne représentent par exemple qu’une fraction minime de la surface du territoire national… Mais ne laissons nous pas traiter cet espace exceptionnel comme un espace ordinaire ? En effet nous consommons le littoral exactement comme n’importe quel espace anodin : - on y construit des maisons ordinaires (quoique peut-être plus chères...), - des routes ordinaires, - des villes ordinaires,

terre ordinaires, ou - on y habite sans le moindre contact avec la mer, comme on habi- on y cultive du maïs ou des pommes de terait à Vesoul ou à Tours…

Le littoral, un espace public ou privé ? Un espace, où s’expriment autant d’enjeux collectifs, peut-il encore être considéré comme un espace complètement privé, où chacun recherche son intérêt avant tout ? • La

mer est publique ; ses ressources appartiennent à tous et sont accessibles à chacun.

• La côte n’est-elle pas déjà un espace semi-public - compte tenu du nombre croissant de contraintes et de limitations qui s’imposent aux propriétaires, pour des raisons d’intérêt général (domaine public maritime, sentier littoral, bande des 10 mètres, accès au littoral, protection des sites et des paysages, espaces naturels protégés… ) - ?

Non contents d’occuper ou d’accaparer, ne sommes nous pas en train de consumer et de stériliser un patrimoine que la nature et les hommes ont mis des décennies, des siècles et même souvent des millions d’années à construire ou à modeler ? Est-il raisonnable de détruire ce patrimoine en quelques coups de bulldozer pour construire une maison banale, qui restera inoccupée l’essentiel de l’année, ou un port de plaisance, où s’entasseront des bateaux, dont la grande majorité sortira en mer moins de 10 jours par an ?

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5 - LITTORAL : COTÉ TERRE : CONCLUSION GÉNÉRALE 5.1 - LITTORAL : ATTRACTIVITE ET RISQUES MELES Certes, le patrimoine littoral est aujourd’hui exceptionnel et encore globalement préservé ; il attire un nombre croissant d’acteurs et d’activités. Mais son attractivité risque aussi bien de causer sa perte, car nous consommons à grande vitesse une ressource non renouvelable.

La rupture pourrait se produire dans la décennie à venir pour des littoraux très attractifs, comme celui de la Loire-Atlantique.

5.2 - LITTORAL : DES CHOIX A FAIRE

Si nous voulons conserver ce patrimoine tout en le valorisant au mieux, il semble qu’une des seules solutions pour l’avenir soit de : faire des choix. Ces choix devront forcément porter sur les activités qu’on voudra y admettre, et par ricochet sur les acteurs qui y seront prioritaires. Le premier critère qui vient à l’esprit - autrement dit favoriser les aspirations des acteurs locaux - ne peut être le seul pour ce choix. Aussi, ce choix devrait être sous-tendu par la recherche d’un équilibre entre aménagement et protection, ce qui suppose sans doute de rééquilibrer dans nos jugements et nos projets le poids donné à chacun de ces objectifs…

5.3 - LITTORAL : LE BESOIN D’UNE VISION PARTAGEE DE L’AVENIR

Quel est le littoral que nous voulons et surtout celui que nous ne voulons pas demain, pour nous et nos enfants ?

La vision de ce que nous voulions faire du littoral naguère n’était sans doute pas nécessaire, notamment lorsque le littoral n’était qu’un espace négligé, dont seuls s’en souciaient les acteurs locaux. Leurs actions à petite échelle ne pouvaient en changer que très lentement la nature. Mais la situation a changé : tout ce qui fait la valeur du littoral risque de disparaître si personne n’y prend garde… La solution passe forcément : • par une réflexion globale et collective associant tous les acteurs, • par une véritable gestion partagée de l’avenir de cet espace, qui « à

force d’appartenir à tout le monde finit par ne plus appartenir à personne ».

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QUELQUES ORIENTATIONS ...

• Organiser une réflexion globale et collective associant tous les acteurs, • S’appuyer sur des expertises dans une approche globale et de prospective de

l’aménagement du littoral … En définissant ensemble les capacités d’accueil d’une station balnéaire ou d’un port, les capacités de charge d’une station d’épuration, la capacité auto-épuratoire du milieu naturel, d’un milieu ou d’un usage, … (capacité ou non à subir une perturbation et respect des normes réglementaires …).

CODELA - CONSEIL DE DEVELOPPEMENT DEPARTEMENTAL 2, quai de Versailles - BP 44621 - 44046 Nantes Cedex 1 : 02 40 48 48 00 — Fax : 02 40 48 14 24 Emel : cdd44@codela.fr

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