O Descanso Urbano ---------------------------------------
Pr o j e t d e r é h a b i l i t a t i o n d e l ’a n c i e n n e p r i s o n d’Ourense : de l’enfermement à la retraite désirée
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Célia Bouzereau
O Descanso Urbano
--------------------------Pr o j e t d e r é h a b i l i t a t i o n d e l ’a n c i e n n e p r i s o n d’Ourense : de l’enfermement à la retraite désiré
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Célia Bouzereau sous la direction de Benjamin Chavardes
ÉTUD. BOUZEREAU Célia UNIT UE101C - PROJET 10 PFE - Métamorphoses
PROJ
DE.PFE DE.MEM
CHAVARDES B. COURTEIX S.
MARCH ARCH
S10 DEM AHD 18-19 Promo
Remerciements _______________________ Je souhaiterais adresser mes remerciements aux personnes suivantes pour m’avoir aidée dans mes démarches et ainsi permis à ce projet d’exister. Je remercie en premier lieu José Antonio Padrón Conde ainsi qu’Elsa Borbujo Marín, tous deux architectes du service de réhabilitation de la ville, pour m’avoir documentée et accompagnée dans mes démarches administratives, jusqu’à la visite de l’ancienne prison d’Ourense actuellement fermée au public. Cette visite de l’édifice m’a été permise par la Municipalité d’Ourense que je remercie donc également. Au même titre, je remercie José María Eguileta Franco, archéologue au service d’urbanisme de la ville, pour m’avoir documentée à son tour et prêté des ouvrages aux éditions limitées. Un grand merci également à José Abundancia Domínguez, avocat spécialisé en droit de l’urbanisme, pour m’avoir accueillie dans ses bureaux et renseignée sur le plan d’urbanisme en vigueur. Je me dois également de remercier Benjamin Chavardes pour avoir suivi et appuyé mon travail tout au long de l’année ainsi que tout le corps enseignant du domaine d’étude de master AHD (Architecture Héritage et Durabilité). Je souhaite enfin remercier Héctor Cortiñas Saco, ingénieur en énergie, pour m’avoir traduit de nombreux documents Galiciens, pour m’avoir accompagnée dans la plupart de mes démarches sur place et pour m’avoir soutenue en toute circonstance. J’en profite pour remercier ses parents María Teresa Saco Coya, professeure des écoles et Manuel Cortiñas Vásquez, constructeur, pour m’avoir hébergée pendant six mois sur place et pour m’avoir instruite sur les cultures -notamment constructives- locales.
Préambule _______________________ Me voilà donc dans les terres galiciennes depuis quelques mois. Me voilà au cœur des villages où ne se parle, non pas le castillan, mais bien le galicien, affectant à ces lieux un caractère local fort. Je descend chaque matin -et le terme descendre est fort choisi lorsque je vous parle d’un dénivelé de trois cent mètres sur une distance de sept kilomètres, vous donnant déjà un aperçu de la forte topographie-, jusqu’à la ville d’Ourense. Je traverse l’épaisse brume qui surplombe chaque matin le fleuve du Miño, offrant un certain caractère au paysage Ourensanien. Je longe ce large fleuve jusqu’à pénétrer dans la ville par la rúa do Progreso (rue du Progrès en galicien) qui traverse Ourense du Nord au Sud. Poursuivant le long de cette artère, j’arrive au niveau du centre historique. à ma gauche, une autre forme de brume se dessine dans le paysage, il s’agit cette fois de la vapeur des eaux thermales qui animent les fontaines urbaines. à ma droite, se dresse un bâtiment à la façade noble, composée et hiérarchisée : voici l’ancienne prison provinciale d’Ourense. Mais cette architecture à la pierre noircie et à la toiture maintenue par un échafaudage semble se mourir ; au grand désespoir des habitants. En effet, cet édifice est connu de tous et de discussions en discussions, j’ouïs de manière redondante qu’« Il faut vraiment faire quelque chose de la prison ! ». C’est ainsi qu’est née l’idée de ce projet de fin d’études, qui propose la réhabilitation de l’ancienne prison provinciale d’Ourense. Je souhaiterais alors rester fidèle à mon travail de rapport d’études de licence ainsi qu’à celui de mon mémoire d’initiation à la recherche de master consacrés tous deux aux enfants. Je souhaiterais de la même manière rester fidèle à ma référence de tous les jours : Le Petit Prince d’Antoine de SaintExupéry où ce dernier s’excuse de ne pas dédier son livre à un enfant et qui finalement le dédie à l’enfant qu’était la personne en question. Ainsi, je dédie ce projet au petit Jacobo, qui, chaque jour en passant devant la prison pour se rendre à l’école demande à sa nourrice « Alors qu’est-ce qu’elle va faire avec la prison Célia? ».
1
Souvenir et patrimoine
_________________
Introduction ..............................................................................11
I. 1 D e L a P r i s o n
du
XIX è m e
siècle à la
M E M O I R E
prison franquiste
I.1.a - La Prison Galicienne du XIX ème siècle .........13 I.1.b - Souvenir franquiste : de l’héritage bâti à l’héritage mémoire ..............................................17 I. 1. c - La M émo ire co mme enj eu fo rt p o u r l e projet ..............................................................................21
a r c h i t e c t u r a l c e r ta i n
I.2.a - Qualité constructive et matériaux ...............25
I.2.b - Typologie : la parenté avec le palais .........31
A
R
C
H
I
.
I.2 U n P at r i m o i n e
8
I.2.c - Typologie : la parenté avec le monastère, éloge de l’isolement ............................................35
2
3
Des Héritages multiples au projet
_________________________
______________________
III.1 P ro g ramme
II.1.a - état sanitaire : un bâtiment qui va mal........45
R .
III.1.a - Un édifice à vocation thermale ..................73
II.1.b - Une Situation urbaine stratégique ...........49
III.1.b - De l’emprisonnement à la retraite urbaine .......................................................................77
II.1.c - Trois espaces pour un projet ..........................53
II.2 à L a C o nf lue nce
III.1.c - Un projet à trois entités ..................................81
III.2 M até rialité ,
d e s hé ritag e s
II.2.a - Patrimoine hydrominéral .................................57
ma t iere s
H é ri t a g e s
mixte
ro g
pro je t
P
e n j e u x
II.1 L a N é ce ssité d ’ un
Un projet de retraite urbaine
II.2.b - Héritage programmatique ..............................63 II.2.c - L’Héritage du chemin de Saint-Jacques de Compostelle ......................................................69
structure e t unité
III.2.a - Des Morphologies plurielles à l’unité matérielle ................................................................91 III.2.b - L’Eau comme matière ....................................95 III.2.c - Rythme thermal ..................................................99
Conclusion ..............................................................................103 Bibliographie ........................................................................107
9
La Corogne Saint-Jacques Compostelle
Vigo
de
Ourense
0 20
50
100km
Galicia Mer Cantabrique
OcĂŠan Atlantique
0
10
100
200
300
500km
Introduction _______________________ Puisque je m’éloigne un tantinet de notre environnement français, je vous dois une petite mise en contexte. Nous sommes à Ourense, ville d’une centaine de milliers d’habitants et capitale de la province éponyme, constituant le quart Sud-Est de la communauté autonome de Galice. Lorsqu’on évoque la Galice, on entend bien souvent parler de « Bretagne Espagnole » et cette analogie est loin d’être infondée. En effet, cette pointe gisant à l’extrême Ouest de l’Espagne (et même de l’Europe) arbore des paysages atlantiques rocheux couplés à une histoire celte qui ne peuvent que nous rappeler le finistère français. Dans cet environnement de granite et au son de la cornemuse des musiques traditionnelles, j’ai alors redécouvert l’Espagne loin de mon imaginaire très méditerranéen de celle-ci. Mais laissons de côté les stéréotypes et éloignons nous de la côte atlantique pour rentrer dans les terres galiciennes. En effet, Ourense ne jouit pas d’une façade sur mer, c’est auprès de l’eau douce qu’elle a grandi. Il s’agit de l’eau des fleuves et rivières qui la jalonnent mais aussi celle qui gît sous ses roches, une eau à soixante degrés qui lui vaut aujourd’hui le titre de Capitale Thermale. Une eau thermale dont les romains jouissaient déjà et autour de laquelle ils ont bâti la ville. Car, bien que possédant des vestiges celtiques aux alentours, Ourense est belle et bien une ville romaine. Ces derniers l’ont d’ailleurs baptisée ainsi pour la présence d’or dans ses sols (Auriense : « cité de l’or »). Entre eau et or, Ourense a donc existée et existe toujours de par sa richesse géologique, une force qui ne saura qu’animer le projet. Et pour cause, à deux pas de la source «.originelle » de la ville, se trouve l’édifice qui fait l’objet de ce projet : l’ancienne prison provinciale d’Ourense. De sa valeur patrimoniale à la lourde mémoire qu’elle porte en passant par sa situation stratégique, nous verrons ce qui fait l’enjeu d’un tel projet, sa nécessité et ses potentialités.
11
du
X I X ème
siècle à la prison franquiste
____________
I.1 De La Prison
13
L a
P r i s o n d u
X I X
g a l i c i e n n e è m e
s i è c l e
• Quelques prisons galiciennes représentatives
Ferrol Lugo Galicia
Prison
publique de
Ferrol
Vigo
• Plan rectangulaire à cour (patio)
Prison
Ourense
publique de
• Plan panoptique
1765
1791
1861
1837
1787
1880
1871
1909
édifice finalement érigé sur les plans d’Alejo Andrade Yáñez
1er projet des architectes López Freire et Miguel Ferro Caaveiro
Prison
• Plan carré à cour (patio)
Prison
provinciale d’Ourense
14
Vigo
• Plan panoptique provinciale de
Lugo
I . 1 . a - L a P r i s o n g a l i c i e n n e d u X I X ème s i è c l e _______________________ Octroyons nous dès lors un tête-à-tête avec notre prison, afin de mieux la comprendre. Avant d’exister par elle-même, elle est premièrement l’élément d’une série typologique : les prisons du XIXème siècle. Mais comme beaucoup d’entre elles, elle est avant tout héritière des avancées -notamment sociales- du XVIIIème siècle. Alors que depuis l’époque médiévale, le programme carcéral ne possédait pas d’édifice propre (se logeant en annexe d’autres bâtis tels donjons et châteaux par exemple), le XVIIIème siècle voit naître cette typologie qui se dignifiera tout au long du siècle.[1] Cette révolution architecturale semble intimement liée à une avancée sociale de taille.: le changement de considération de la peine du détenu. Le temps d’emprisonnement étant autrefois plutôt celui de l’attente avant la mort devient celui du redressement en vue de potentielles réinsertions. On passe de la punition à la rédemption, une transition qui change les manières de penser l’espace et qui amorce déjà les avancées hygiénistes que nous connaissons, non propres à la Galice mais bien d’influence internationale. Lors de la construction de la prison d’Ourense, la Galice ne connaît pas encore le plan panoptique imaginé par le britannique Jeremy Bentham mais ce sera le cas plus tardivement pour ses prisons voisines de Vigo ou encore de Lugo. Ces édifices sont donc témoins d’innovations architecturales importantes et la prison d’Ourense présente des qualités d’hygiène notamment grâce à son patio et à ses grandes baies permettant une certaine ventilation. Ces qualités sont une chance pour la réhabilitation (la ventilation étant par exemple une problématique contemporaine) et résonneront particulièrement avec les choix du nouveau programme.
____________
Sánchez García, J.Á. (1999). Tipo, función y sociedad evolución del espacio carcelario en Galicia. Cuadernos de Estudios Gallegos, 46 (111). 245-286.
[1]
15
du
X I X ème
siècle à la prison franquiste
____________
I.1 De La Prison
17
Souvenir franquiste : de l’héritage bâti à l’héritage mémoire
18
I.1.b - Souvenir franquiste : de l’héritage bâti à l’héritage mémoire _______________________ Une prison du XIXème siècle donc ? Architecturalement parlant, cela ne fait aucun doute. Mais il est pourtant fréquent d’en entendre parler telle « l’ancienne prison franquiste ». En effet, si la vague de construction de prisons au XIXème siècle s’inscrit dans le sillon international, l’Espagne connaît ensuite une seconde vague d’édification d’établissements carcéraux sous la dictature de Francisco Franco (1939-1975). En ces temps d’emprisonnements massifs, de nouveaux édifices voient le jour, mais la plupart des anciennes prisons telle notre prison Orensanienne deviennent également celles du régime franquiste et accueillent désormais de nombreux prisonniers politiques dans des conditions de détention déplorables.[1] On perd ici l’idée de rédemption que nous évoquions puisque beaucoup d’entre eux sont dans l’attente d’être fusillés. Quant à la question de l’hygiène, elle ne semble plus non plus au goût du jour avec la surfréquentation des espaces de détention et des maladies qui s’y manifestent.[1] Ainsi, notre prison s’imprègne d’une mémoire plus lourde. Ses murs témoignent d’une architecture du XIXème siècle mais la mémoire collective témoigne, elle, d’une époque beaucoup plus récente et au poids imposant. Elle revêt l’habit noir d’un deuil encore vif dans la mémoire Espagnole et dont on ne mesure peut être pas l’ampleur de l’autre côté de la frontière. Un aspect renforcé par son abandon et sa dégradation matérielle. Nous y reviendrons lorsque nous évoquerons les questions d’état sanitaire. Dès lors, comment faire projet dans le respect de cette lourde mémoire ? Comment révéler un héritage qui souhaite être collectivement oublié ?
____________
Rodríguez Teijeiro, D. (2015). Morir de hambre en las cárceles de Franco (1939-1945). Historia Contemporánea, 51. 641.
[1]
19
du
X I X ème
siècle à la prison franquiste
____________
I.1 De La Prison
21
La Mémoire comme enjeu fort pour le projet
• Mémoire lourde, réponse immaculée ?
Prison Publique
de
Vigo (Galice)
MARCO, Musée d’Art Contemporain
1861-1880 José María Ortiz y Sanchez
de
Réhab.
Prison Provinciale de Lugo (Galice) 1871-1909 Nemesio Cobreros
Centre Culturel O Vello Cárcere 2017 Juan Creus / Covadonga Carrasco
Réhab.
Prison
de
Vigo
2002 Salvador Fraga Rivas / Francisco Javier Garcia / Manuel Portolés San Juán
Palencia (Castille-et-León) Fin XIXème siècle
Centre Culturel Lecrác 2011 Exit Architects
Réhab.
22
I.1.c - La Mémoire comme enjeu fort pour le projet _______________________
Si beaucoup de prisons du XIXème siècle portent une mémoire relativement lourde, la majorité ne sont aujourd’hui plus en service. Plusieurs se sont vues fermées au profit de nouveau centres pénitenciers plus excentrés et aux capacités de détention plus importantes. C’est le cas à Ourense en 1987 où l’on ferme les portes de la prison provinciale pour inaugurer le nouveau centre pénitencier Pereiro de Aguiar à une dizaine de kilomètres de la ville. Certaines prisons sont alors détruites telle celle de Pontevedra -pour citer un exemple galicien- mais la plupart restent debout et très vite se pose la question de leur réhabilitation potentielle. Plusieurs d’entre elles sont aujourd’hui réinvesties et nous offrent ainsi un panel de références plutôt riche. En voici quelques unes cicontre : les prisons de Vigo, de Lugo -que j’ai pu parcourir- et de Palencia, un peu plus à l’est de notre région galicienne. Toutes trois sont aujourd’hui dédiées à des programmes muséaux et de centres culturels. Anciennes propriétés de l’état, elles restent bien souvent de l’ordre du domaine public, expliquant en partie ces choix programmatiques. Ce qui m’a alors frappée, c’est le caractère immaculé de ces nouveaux espaces avec l’usage massif du blanc et d’éléments on ne peut plus épurés (cf. photographies ci-contre). Cela peut être lié au programme muséal tels les « White Cubes » prêts à accueillir les expositions de manière neutre, mais il me semble qu’apparaît là une intention plus forte. Il y a comme une volonté de contraste avec le caractère obscur dont étaient dotés ces lieux, comme si les architectes de ces réhabilitations avaient répondu à ce sombre passé par le dessin de ces espaces immaculés, comme un besoin de nettoyer les lieux jusqu’à le faire de manière littérale et visuelle. Faut-il forcémment répondre au noir par le blanc ? Comment apporter une nouvelle lumière (au sens propre comme figuré) dans ces lieux de forte mémoire sans lisser le caractère des espaces ?
23
U
n
P
a t r i m o i n e
architectural
certain
____________
I.2
25
QualitĂŠ constructive et matĂŠriaux
• Une structure et des techniques de construction qualitatives
Pierre
porteuse (granite)
Brique
porteuse
Brique
non porteuse
Axes
Pierre maçonnée avec liant Piedra con mortero
trame porteuse
Pierre de taille maçonnée à sec (sans mortier ni autre liant) Sillería colocado a hueso
Plan
0 1 2
26
5
R+1 1 : 250
structure
10m
(fig. 1)
Entre
les cellules et espaces non
:
accessibles aux prisonniers
ˮ Ladrillo perforado colocado a medio pie (fig. 1) o formando muros de un pie ˮ (fig. 2) (fig. 2)
Dans
le reste de l’édifice
:
ˮ Hueco doble colocado a panderete ˮ (fig. 3)
(fig. 3)
Schémas axonométriques des différentes mises en œuvre des murs de brique
27
• Un riche pannel de matériaux
• Murs porteurs - Muros de carga
• Pierre (granite) Piedra (granito)
• Murs porteurs - Muros de carga
• Voûtes en berceau - Bóvedas de cañón • Mur de soutènement - Muro de contención
• Poteaux - Pilares
• Escaliers - Escaleras
• Hourdis - Bovedillas
• Linteaux - Dinteles
• Cloisons - Particiones
•
Minéral • Plâtre - Yeso • Brique creuse Ladrillo perforado
• Faux-plafonds - Falsos techos
• Plancher toiture - Tejado • Hourdis - Bovedillas
• Chaux - Cal
• Céramique - Cerámica
• Enduit intérieur - Enlucido interior
• Tuiles - Tejas • Revêt. carrelage - Embaldoso
• Profilés - Perfiles
Béton - Hormigón
• Fonte - Fundición
Métal
• Poutres et poutrelles - Vigas y viguetas • Poutres triangulées - Cerchas • Limons escaliers - Zancas escaleras
Végétal
• Portes extérieures - Puertas exteriores • Portes intérieures cellules - Puertas interiores celdas • Barreaux et grilles - Vallado y rejas
• Bois - Madera • Menuiseries - Carpintería
28
I.2.a - Qualité constructive et matériaux _______________________ Revenons alors à notre prison. Si nous soulevons la question de la réhabilitation (plutôt que de la démolition comme ce fut le cas pour d’autres), nous soulevons indéniablement la question de la valeur patrimoniale. La prison d’Ourense est premièrement riche de sa qualité constructive. Elle est édifiée en pierre de taille de granite dite « la meilleure du pays » dans les documents d’archive. Sa mise en œuvre est également de qualité puisqu’il s’agit de maçonnerie à pierres sèches, à savoir sans mortier ni liant. Cet assemblage à sec révèle d’autant plus l’art de la stéréotomie et la rigueur apportée à la construction. Il est à noter que ceci ne concerne que le corps principal du bâtiment. L’édifice annexe Ouest est, quant à lui, maçonné avec liant tandis que l’édifice annexe Est est bâti de brique[1] (cf. plan ciavant). Un seul espace fait exception à la structure de masse et aux murs de pierre : les ateliers de travail des prisonniers et leurs poteaux de brique creuse, libérant le plan pour -on l’imagine- des questions d’usages. Tous les cloisonnements sont également édifiés en brique creuse assemblées de manières diverses en fonction du programme selon les schémas présentés ci-avant. Cette qualité constructive, avec ces murs de pierres parfois épais d’un mètre, faisait de la prison un édifice massif et robuste, inspirant l’image d’une prison solide et infranchissable. Aujourd’hui, et au regard de la réhabilitation, ces murs et voûtes de granite offrent une qualité matérielle certaine (où la pierre apparente ne saurait que donner du caractère au lieu), ainsi qu’une qualité technique avec notamment une forte inertie dont nous ne saurions que tirer profit en vue des problématiques thermiques du projet.
____________ Vázquez Vázquez, A. (2006). Proyecto fin de carrera : Rehabilitación de la antigua cárcel provincial de Ourense para uso socio-cultural. école Universitaire d’Architecture Technique, Université de La Corogne.
[1]
29
U
n
P
a t r i m o i n e
architectural
certain
____________
I.2
31
Typologie : la parentĂŠ avec le palais
• U n e Faça d e co m p o s é e e t s e s q u e lq u e s d é ta i l s ra ff i n é s
La Toiture
saillante
qui couronne généreusement l’édifice
Le Fronton
triangulaire
qui anoblie la porte centrale de l’étage supérieur
élévation Est - Façade sur rue 1 : 250
Les
bossages maniéristes
qui marquent les angles de l’édifice ainsi que la porte d’entrée principale
élévations détails 1 : 50
32
I.2.b - Typologie : la parenté avec le palais _______________________ Une prison robuste et imposante : certes ! Pourtant, outre la présence de grilles en fonte forgée, sa façade n’évoque pas directement un établissement à caractère carcéral, loin des architectures parlantes que pourraient nous décrire Claude-Nicolas Ledoux et Étienne-Louis Boullée. Pour ainsi dire, elle m’a directement renvoyée à quelques codes du palais. Bien que peu ornementée, conservant ainsi son caractère robuste intimidant, elle présente quelques détails architecturaux raffinés. Ses bossages maniéristes redessinent ses angles ainsi que la porte d’entrée principale -participant d’ailleurs également à son apparence robuste-. Son balcon et sa grande porte surmontée d’un fronton triangulaire anoblissent son premier étage. Ceci est également renforcé par le petit attique et la travée centrale qui créent un élan vertical au sein de cet édifice massif et horizontal. Le tout se couronne d’une toiture relativement saillante qui apporte de l’élégance à l’édifice. Nous avons de plus, une façade composée et de manière symétrique rassemblant certains codes d’une architecture de palais. Puisque nous évoquons la symétrie, la présence du pavillon annexe Nord qui rompt cette symétrie pose question. Ceci se remarque plus particulièrement en plan où ce pavillon qui -à priori construit postérieurement- semble maladroitement greffé à l’édifice. Il en est de même pour le bâtiment annexe Ouest. Alors que le corps principal présente un plan symétrique qui s’organise autour du patio et de ses élégantes voûtes en berceau, cette annexe postérieure rompt légèrement la symétrie pour s’adapter aux limites de la parcelle cadastrale et propose un ensemble d’espaces étroit avec angle aigu, plutôt distinct de la qualité spatiale du corps principal (en plus de sa différence de qualité constructive n’étant, lui, pas maçonné à sec). Ces deux annexes sont donc objets de questionnement quant à leur devenir dans le cadre du projet de réhabilitation.
33
U
n
P
a t r i m o i n e
architectural
certain
____________
I.2
35
Typologie : la parenté avec le monastère, éloge de l’isolement
• Le Cloître Cloître, subst. masc. Étymol. et Hist. 1. 2èmoitié du XIè s. judéo-fr. cloistre « portique couvert encadrant la cour intérieure d’un couvent » (Gloses fr. de Raschi, éd. A. Darmesteter et S. Blondheim, 216, p. 28); 1172-74 (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 5447); 2. ca 1165 clostre « enceinte » (B. de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 3136); 3. XIIIès. cloistre « monastère » (G. de Coinci, Mir. Nostre Dame, éd. V. F. Kœnig, t. 3, p. 191, v. 42). Du lat. claustrum, le plus souv. au plur., « serrure, barrière » à l’époque class., d’où p. méton. « lieu clos » en lat. impérial, spécialement en lat. chrét. « enclos, clôture d’un monastère », d’où « monastère »; dér. de claudere (clore). L’évolution -o-oi- est probablement due à l’infl. de cloison.
Coupe Ouest-Est 1 : 400
Plan RDC 1 : 400 0 2
36
5
10m
C ONGRÈS
Les étymologie ainsi que les arbres de proxémie ci-contre et ci-après sont issues du site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (wwww.cnrtl.fr).
C O N V E N TS É M IN A I R E
A S S E M B LÉ E P É P IN I È R E
S C O L A S T ICAT C O M M U N AU TÉ
É G L IS E D ÉA M B ULAT EUR
C OUR
D ÉA M B ULATOIRE C A ROLE
P E N S I O N N AT
C O N V E N T UA L IT É
C OUVEN T
L AMASERIE E N F ERM EM ENT E MPRI SO N N E ME N T D É TE N T IO N
B É G U IN AG E
B A S - CÔT É P ROM ENOIR
M O U T IE R
C LO S
A B BAYE
R ÉCLUSI O N
C LAU STR ATI O N S É Q UE STR ATI O N
C O NF INEMENT
S É PA RAT I O N
C LO ÎTRE
P R IE U RÉ M ON A S TÈRE B ÉNÉFICE
A RCA D ES
I SOL E ME N T
P RÉAU
S O LI T UDE E X IL
D OYE N N É
C LÔTURE R ET RA IT E E R MITAGE C H A R T R E U SE
F OLIE A BRI
Notion d’enfermement Si le terme de cloître est initialement lié à une architecture religieuse (cf. étymologie et histoire ci-contre), sa parenté avec le champ lexical de l’enfermement nous renvoie directement à notre programme de la prison. Nous avons donc une similarité architecturale, spatiale, programmatique et nous pouvons aller jusqu’à la similarité de pratique de cet espace qui se veut celui de la déambulation en vue de la rédemption (qu’elle soit celle du moine ou du prisonnier).
V IL L A C HALET
H A B I TAT IO N
P AV I LLO N
Notion
de retraite
Ici, l’isolement n’est pas celui de la séquestration mais celui du retrait désiré avec l’image de programmes qui relèvent de l’individualité et par extension de l’intimité. C’est cette notion de retrait (qu’il soit religieux, spirituel ou autre), qui sera au cœur du travail du projet.
37
• La Cellule Cellule, subst. fém. Étymol. et Hist. A. 1. [1429 ds Bl.-W.5sans réf.]; 1541 « chambre d’un religieux dans un monastère » (Amadis, II, 32a cité par Vaganay ds Rom. Forsch., t. 32, p. 28); 1690 « logement réservé aux cardinaux réunis en conclave » (Fur.); 2. 1801 « pièce où l’on enferme séparément les prisonniers » (Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie, t. 3, p. 237). B. p. anal. 1. 1503 anat. « petite cavité qui se trouve dans certains organes des animaux » (Champier ds Presse médicale, t. 56, p. 647); 1520 (Le Guidon en françoys, nouvellement imprimé avec les gloses de Jehan Falcon, f. LXXVI ds Quem.); 2. biol. 1824 « unité morphologique et physiologique, élément constitutif de tout organisme vivant » (H. Dutrochet, Recherches anatomiques et physiologiques sur la structure intime des animaux et des végétaux, Paris, éd. Baillière, p. 34); 3. 1904 techn. (L. Marchis, Leçons sur la navigation aérienne, p. 530); 1910 (Le Radium, p. 244 : Cellules photo-électriques). C. fig. 1. 1883 (P. Bourget, Essai de psychologie contemp., p. 15 : l’individu est la cellule sociale); 2. 1920 polit. (Discours du Congrès de Tours rapporté par le journal Le Matin cité par J.-B. Marcellesi, Le Congrès de Tours, Paris, 1971, pp. 245-246). Empr. au lat. class. cellula (dimin. de cella) « petite chambre » spéc. « cellule de prisonnier » (av. 410, Rufinus ds TLL s.v., 764, 48) en lat. chrét. « cellule de moine » St Jérôme, ibid., 50; emplois techn. en lat. médiév. anat. (1110-20 Ps. Copho ds Mittellat. W. s.v., 440, 25 « cavité de la matrice »), bot. (1256-60 Albert le Grand, ibid., 440, 30).
Plan R+1 1 : 400 0 2
38
5
10m
T IS S U C LA N
Notion
N OYAU O S T ÉOC YT E
É LÉ MENT
Ici, la cellule est celle de l’unité que l’on multiplie et peut nous renvoyer directement à la notion architecturale du module.
S EC T IO N N EU R ONE
G ROUPE
F U S ELAGE G LOBU LE
D IVISION
T ÊTE
de subdivision
P OSEMÈTRE
DE LECTURE
P HOTOMÈTRE
CELLULE
P HONOCAPTEUR
C ABANET T E
C U L - DE - BA SS E - F O S S E B ASSE- FOSSE
E XPOSIMÈTRE
S OU T ER R AIN M ITAR D
O UB L IE TTE
A LVÉO LE
C OMPAR T IEMENT
F OS SE
I N - PACE
C HA MBRETTE C ABANON B OX
B LO C
R É D UI T
C ARRÉ
V IOLON C ACH OT
L OGE C HA MBRE C ASE
C A S EM AT E
P IÈ CE
A BRI
C A BI NE T G EÔLE H A BI TATION C A BA NE T ÔLE
P R IS ON
C AG E
B OÎT E
T AU LE
Notion d’intimité L’idée générale qui apparaît est celle de quelque chose de petite taille. Ceci se retrouve d’ailleurs directement dans l’étymologie du terme de cellule car issu de cellula, il contient la particule -ula qui n’est autre qu’un suffixe diminutif. Or, si cette notion d’espace exigu est d’abord liée à la privation d’espace (et particulièrement dans notre contexte carcéral), elle peut aussi être celle du petit espace qualitatif, celle de l’espace intime et confortable, ici représenté par l’image de la chambre, de l’abri ou encore de la cabane.
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I.2.c - Typologie : la parenté avec le monastère, éloge de l’isolement _______________________ Nous parlions donc de patrimoine architectural avec une qualité constructive qui ne fait aucun doute ainsi qu’une certaine noblesse dans le vocabulaire architectural. Mais je souhaite parler ici d’héritage programmatique à travers l’analogie des programmes carcéral et monastique. La prison et le monastère (voire même l’hôpital) sont intimement liés au cours de leur histoire. Certains édifices ont d’ailleurs hébergé simultanément ou bien successivement ces différents programmes. Je pense par exemple à l’Abbaye de Clairvaux ou encore de Fontervaud qui deviendront prisons au XIXème siècle.[1] Ces programmes présentent alors des caractéristiques communes. Nous pouvons d’abord relever leur situation bien souvent excentrée leur octroyant un premier aspect commun directement lié à l’isolement. Spatialement parlant, je me suis intéressée à deux éléments de programme communs : la cellule et le cloître. Ces deux termes nous renvoient aux notions d’enfermement, d’isolement et finalement de retrait dans sa connotation plus positive, comme je tente de le mettre en exergue à travers leurs étymologies et leurs arbres de proxémie linguistique générés par le site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales ; un travail étymologique qui accompagne la plupart de mes travaux de recherche et de projet. Nous retrouvons donc la notion d’isolement au cœur de nos deux programmes. Et pour cause, nos deux protagonistes que sont le prisonnier et le moine sont précisément dans ces lieux pour être retirés de toute vie sociale. Le premier pour empêcher de nuire et le second pour être fidèle à une vie chaste et pauvre. Finalement, ce retrait se
____________ Bretschneider, F., Claustre, J., Heullant-Donat, I. et Lusser, E. (2018, 26 septembre.) Le Cloître et la prison. Les espaces de l’enfermement. [webdocumentaire]. Récupéré de : http://cloitreprison.fr
[1]
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traduit par un recentrement sur soi-même et par un travail fort (voulu ou non) sur le mental. Ces espaces sont finalement ceux de la méditation, sujet d’ailleurs extrêmement présent dans nos réflexions contemporaines. La cellule, par ses proportions étroites, offre cette possibilité de se centrer sur l’essentiel ; un aspect que Le Corbusier avait bien compris lorsqu’il dessinait les plans du couvent Sainte-Marie de la Tourette. Quant au cloître, littéralement centré sur lui-même par son caractère symétrique (symétrie axiale et centrale) et bien souvent ponctué d’un élément architectonique en son centre, il est l’espace de la procession qui permet de marcher et de penser reliant ainsi le travail du corps et celui de l’esprit. Qu’il s’agisse de la promenade du prisonnier qui se repenti ou du moine qui prie, il apporte la notion architecturale du parcours. Notre analogie est alors linguistique, spatiale et va finalement jusqu’aux pratiques et usages de ces espaces. ________ L’idée serait alors de tirer profit de cet héritage programmatique en prenant ce caractère de l’isolement, non pas comme une contrainte, mais comme une opportunité pour le projet. L’enfermement devient la retraite désirée (cf. arbre de proxémie du terme cloître présenté ci-avant) et permettrait d’offrir des espaces de repos et de recentrement sur soi. Cependant, à la différence du monastère, l’ancienne prison provinciale d’Ourense se situe en plein cœur urbain. Ceci donne d’autant plus de sens à la proposition d’un projet dédié au repos là où la ville en offre peu. Il sera ainsi le projet d’une retraite urbaine comme le suggère le titre de ce travail en Galicien : O descanso Urbano.
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II.1
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état sanitaire : un bâtiment qui va mal
• Articles de presse témoins "L’état renforce la corniche de l’ancienne prison pour éviter son effondrement"
« La mauvaise conservation de la prison [...] qu’il répare une partie de la toiture »
Juillet 2000
Juin 2000
"La prison et sa longue condamnation"
Les articles de journaux ci-contre sont issus du périodique local La Región et récupérés aux archives de la Diputación (archives provinciales).
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II.1.a - état sanitaire : un bâtiment qui va mal _______________________ Malgré les nombreuses qualités architecturales dont nous venons de parler, la prison d’Ourense est face à un adversaire redoutable : le temps. En effet, si ses murs sont encore dressés, son état sanitaire se dégrade d’année en année depuis son abandon en 1987. Le sujet de sa réhabilitation est pourtant abordé très tôt suite à sa fermeture, mais les batailles politiques autour de sa cession de l’état à la Ville puis les enjeux économiques ont gelé tout projet jusqu’à ce jour. Depuis, l’édifice se meurt peu à peu comme en témoignent les articles de presse ci-contre. Aujourd’hui, la toiture menace de s’effondrer, ce qui vaut à la prison tout un dispositif d’échafaudage de protection en cas d’éventuelles chutes de matériaux. La pierre de la façade principale est noircie de pollution et la forte humidité du lieu a mis à mal la plupart des matériaux. Cette humidité est aussi celle qui a favorisé la nature à reprendre ses droits, la végétation prolifère dans tout le patio et ses murs se voient recouvrir de mousse végétale. De plus, la prison ainsi abandonnée était récemment occupée illégalement et dans des conditions des plus insalubres, obligeant les autorités à en condamner l’accès et à palissader tout l’arrière de l’édifice. Serait-ce un comble pour une prison de se voir encore plus verrouillée qu’elle ne l’était du temps où elle était en service ? En plus d’affecter le bâtiment en lui-même, cette dégradation touche également le paysage urbain et par extension les habitants de la ville. En effet, cette déchéance a lieu en vitrine de l’une des avenues principales d’Ourense et aux portes de son centre historique. Les habitants la jalonnent quotidiennement et, de discussions en discussions, m’ont tous fait part d’une volonté de projet. Cette volonté est d’autant plus forte lorsque l’on repense au lourd passé évoqué précédemment que la dégradation apparente de l’édifice ne cesse de rappeler...
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Une Situation urbaine stratégique
• Rupture(s) urbaine(s)
1
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Une prison en plein cœur de ville
Río Barbaña
Ancienne prison provinciale d’Ourense : entité remarquable dans la ville
3
Ourense ville à vitesse Nord-Sud
Rúa do Progreso
Axes Nord-Sud : réelles frontières urbaines
4
Un édifice aux portes du centre historique
Casco Antiguo Limite officielle du centre historique protégé comme patrimoine historique incluant la prison juridiquement mais l’excluant spatialement
Une Rupture urbaine Est-Ouest
Absence de connexions routières et piétonnes mais également visuelles et paysagères au détriment de l’état sanitaire de cet ensemble urbain
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II.1.b - Une Situation urbaine stratégique _______________________ Un projet s’avère donc nécessaire au regard d’un bâtiment au patrimoine architectural riche qui se meurt peu à peu, mais il apparaît également nécessaire urbainement parlant. En effet, la prison et son environnement proche forment un ensemble d’espaces charnière au sein du fonctionnement urbain. Premièrement, il faut savoir qu’Ourense est une ville aux vitesses Nord-Sud. Les axes majeurs, viaires et piétons, la traversent presque entièrement du Nord au Sud. Si vous jetez un œil au plan de lignes de transports en commun, ceci apparaît de manière flagrante. Viennent ensuite s’intercaler des respirations Est-Ouest entre ces grands axes : des voies à plus petite échelle mais aussi les places et parcs publics qui viennent aérer le tissu urbain. Le site de notre prison en est un bon exemple. Elle est jalonnée à l’Est par la Rúa do Progreso, boulevard urbain très emprunté qui l’isole du centre historique bien qu’elle en fasse partie juridiquement. En effet, la zone hachurée ci-contre est dite BIC (Bien d’Intérêt Culturel) et la place sous protection patrimoniale. à l’Ouest, c’est la rivière Barbaña qui fait limite. Elle s’écoule quelques mètres plus bas de notre édifice et scinde la ville de manière forte. Le lien entre ces deux axes se crée un peu plus au Nord de la prison grâce au parc de l’Alameda et grâces aux espaces de marché des anciens abattoirs qui créent tous deux de l’urbanité. Arrivé au niveau de la prison et en allant vers le sud, cette urbanité s’efface et le lien transversal n’existe plus. La façade Est de la prison regarde une sur-activité tandis que sa façade Ouest est coupée de toute vie et fait front à un espace naturel qu’elle ne regarde même pas. La prison apparaît dès lors comme une interface urbaine forte dont les limites et façades revêtent des rôles distincts. Le projet devra penser ces rôles avec ce visage Est presque vitrine urbaine sur avenue et aux portes du centre historique ainsi que ce visage Ouest dont il faut ré-ouvrir les yeux sur la rivière et l’espace naturel qu’il côtoie.
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Tro is e spa ce s p o u r u n p ro j e t
• Des Espaces délaissés
Plan Masse 1 : 1 000 0 5 10
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II.1.c - Trois espaces pour un projet _______________________ Nous parlions donc d’un ensemble urbain charnière, notamment Est-Ouest, présentant la prison comme interface forte avec ses façades aux rôles distincts. Prenant cela en compte, le projet ne peut faire fi des espaces qui jouxtent l’édifice. Il s’agit premièrement de la parcelle voisine nord, appartenant à la ville et que je qualifierais de résidu urbain telles ces nombreuses places triangulaires résultantes du tracé urbain et qui bénéficient de peu d’aménagement. Il apparaît ensuite nécessaire de de s’intéresser à l’espace ouest afin de se rouvrir à la rivière et de profiter d’un espace encore très végétal dans une ville extrêmement minérale. Ces espaces sont finalement intimement liés à la prison et leur sort semble en dépendre. En effet, l’abandon de l’édifice, sa dégradation sanitaire puis la mise en place de palissades a directement affecté ces lieux. Ils sont tous deux délaissés et tout aussi insalubres que la prison. Le projet se doit de composer avec ces espaces voire de les investir complètement (notamment au Nord) dans une certaine cohérence urbano-architecturale mais également dans l’intérêt des espaces en question dans un objectif de revalorisation face à leur dégradation quotidienne au même titre que la prison elle-même.
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P a t r i m o i n e h y d r o m i n é r a l
• S o u rc e s t h e r m a l e s e t d e v. d e l a v i l l e époque Romaine
Río M
Río M
iño
siècle
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XIIème
Río Loña
Río Loña
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ar ío B
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ar ío B
R
1950
Río
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Miñ
Miñ
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1900
Río Loña
Río Loña
aña arb
aña arb
B Río
B Río
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Époque Contemporaine
Río
Miñ
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Sources thermales - Fuentes termales
Río Loña
Prison provinciale
Río
a bañ r a B Plan
du développement de la ville d’Ourense
1 : 15 000 0 100
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250
500
1000m
Fuente do Tinteiro
Termas da Chavasqueira
Source de l’encrier
Thermes de Chavasqueira
• Fontaine et bassins pédiluves publics
• Station thermale et bains publics
Termas MuÍño da Veiga
Río
Thermes Moulin de la Veiga
ño
Mi
• Bains publics
Environnement urbanisé Sources et amén. thermaux
Río Loña Route des Thermes, parcours pedestre aménagé Termas das Burgas
Prison provinciale
Rí
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Ba
rb añ
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Cœur originel de la ville
1 : 25 000
Termas de Outariz e Burgas de Canedo Thermes d’Outariz et Burgas de Canedo • Station thermale et bains publics
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Thermes des Burgas • Fontaine historique et bains publics
II.2.a - Patrimoine hydrominéral _______________________ « Ourense capital termal », c’est ce que nous pouvons lire en grand sur les panneaux d’entrées de la ville. Et pour cause, les sols Ourensaniens abritent plusieurs sources d’eaux thermales qui sont l’un de ses caractères principaux. Il s’agit d’une ressource dont les Romains profitaient déjà et autour de laquelle ils ont bâti la ville laissant quelques vestiges de bains thermaux dans le centre historique, à deux pas de notre prison. La source en question, dite des Burgas, couplée à la rivière Barbaña forment alors le point originel de la ville. On parle bien souvent du fleuve du Miño comme du fleuve principal d’Ourense de par son envergure, mais d’un point de vue historique et au regard de l’importance urbaine du Barbaña, ce dernier serait, à mon sens, le réel cours d’eau principal de la ville. Plus tard, d’autres sources thermales ont été découvertes un peu plus au Nord de la ville et sont aujourd’hui aménagées formant l’ensemble de la Route des Thermes. Ce chemin pédestre distribue deux stations thermales privées mais surtout des espaces de fontaines et de bains publics tels la source de l’Encrier ou encore les thermes du Moulin de la Veiga. Au centre-ville, l’eau chaude de la source des Burgas anime la fontaine historique (cf. photographie ci-contre) ainsi que des bains publics ouverts sur la place urbaine du même nom. Ainsi, été comme hiver, les usagers se baignent en plein cœur de l’espace public du centre historique à côté des passants. Je contemplai ainsi des pratiques urbaines que je n’avais encore jamais observé auparavant. Ces espaces sont aujourd’hui l’atout touristique majeure de la ville d’Ourense et font sa renommée. Comme je l’esquissais en introduction, les Romains l’avaient baptisée ainsi pour la présence de l’or dans ses sols (Auriense : «.cité de l’or »). Entre eau et or, Ourense a donc existé et existe toujours de par sa richesse géologique, une force qui ne saura qu’animer le projet.
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H é r i t a g e p ro g ra m m at iq u e
• Une trame programmatique qui se dessine
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Patio intérieur 1
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Section
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Section
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Interface berges rivière
Interface rue
Plan
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• Une trame programmatique qui se dessine
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Section
Section
Section
garde
quotidien détenus
administrative
Interface berges rivière
Interface rue
Plan
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RDC 1 : 250
programme original
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• Une trame programmatique qui se dessine
Espaces
de distribution
1 - Vestibule - Vestíbulo 2 - Circulations verticales/Escaliers - Escaleras
Espaces
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3 - Prison des femmes - Cárcel de mujeres 4 - Cellules - Celdas 5 - Cellules particulières - Celdas particulares
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Patio Intérieur 2
Espaces
5
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5
5
5
Espaces
Patio Intérieur 3
Espaces
à accès exceptionnel et/ou contrôlé
23 - Zone de contrôle - Zona de control 24 - Parloirs - Zona de visita 25 - Sanitaires parloirs femmes - Aseos femeninos zona de visita 26 - Sanitaires parloirs hommes - Aseos masculinos zona de visita 27 - Infirmerie - Enfermería
Section quotidien détenus
Interface berges rivière
Plan
administratifs et/ou réservés au personnel
16 - Bureaux et appartements du dir. de prison - Despachos y estancias del alcaide 17 - Sanitaires - Aseos 18 - Local chauffage - Sala de calderas 19 - Vestiaires gardiens - Vestuarios guardia 20 - Sanitaires gardiens - Duchas y aseos guardia 21 - Terrasse/poste de surveillance - Terraza/puesto de vigilancia 22 - Autres salles gardiens - Otras salas guardia
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communs
6 - Sanitaires femmes - Duchas y aseos femeninos 7 - Salle T.V - Sala T.V 8 - Sanitaires - Duchas y aseos 9 - Professeur - Pedagogo 10 - Coiffeur/barbier - Peluquería/barbería 11 - Ateliers - Talleres 12 - Laverie - Lavandería 13 - Salle à manger - Comedor 14 - Cuisines - Cocina 15 - Salles diverses/fonctions incertaines - Otras salas/funciones inciertas
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5
de détention
R-1 1 : 250
programme original
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Trame
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programmatique
II.2.b - Héritage programmatique _______________________ Je parlais déjà d’héritage programmatique en esquissant l’analogie entre les programmes carcéral et monastique, nous amenant à penser le projet tel un espace de repos. Mais nous pouvons également noter que la prison est finalement un espace résidentiel commun. En effet, bien que cela se passe dans des conditions particulières, on y dort, on y mange, on y vit... J’ai dès lors tenté de reconstituer la répartition programmatique d’origine afin de mieux comprendre la prison. Les plans ci-contre et ci-avant sont une estimation personnelle de ce que pouvait être cette répartition programmatique. Elle est réalisée à l’aide de sources multiples combinées[1] et surtout grâce à la visite de la prison elle-même m’ayant permis d’appréhender directement les espaces afin de comprendre ce qui pouvait s’y passer en termes d’usages (observant les traces noires des cheminées suggérant les cuisines par exemple). Nous pouvons également noter que ces fonctions et usages ont pu évoluer au cours du temps. Ces plans en serait la version la plus récente. J’ai ensuite groupé ces fonctions comme exprimées dans la légende ci-contre laissant se dessiner une trame programmatique relativement rationnelle avec ces « travées » Nord-Sud intériorisant clairement les espaces dédiés aux prisionniers. Ceci nous guide dans la compréhension du plan et nous guidera dans le dessin de celui du projet qui ne saura que révéler cette rationalité du plan.
____________ Vázquez Vázquez, A. (2006). Proyecto fin de carrera : Rehabilitación de la antigua cárcel provincial de Ourense para uso socio-cultural. école Universitaire d’Architecture Technique, Université de La Corogne.
[1]
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L’ H é r i ta g e d u c h e m i n d e Sa in t -Ja cq u es d e Co mp o st el le
• L e C h e m i n d e S t- J a c q u e s : o u t i l de valorisation du patrimoine
• Programme de développement de la régénération et de la rénovation urbaine. Plan étatique 2013-2016. • Subventions 2018 pour la réhabilitation des édifices et logements situés le long des chemins de SaintJacques-de-Compostelle.
Ourense ville étape
Dixième étape de la Vía de Plata (route de l’argent) Ourense - Cea : 22.2 km
Carte
Neuvième étape de la Vía de Plata (route de l’argent) Xunqueira de Ambía - Ourense : 22.0 km
St -J acques- de-Compostelle Xunqueria de A mbía et de Cea
et profil du chemin de entre les villages de
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I I . 2 . c - L’ H é r i t a g e d u c h e m i n d e Saint-Jacques-de-Compostelle _______________________ Le pèlerinage de Saint-Jacques-deCompostelle est un héritage en lui-même, bien que moins tangible que le patrimoine architectural. Et s’il y a bien un héritage qui caractérise la Galice, c’est celui-ci. Ici, tous les chemins ne mènent pas à Rome mais bien à Santiago de Compostela. Or, cet héritage a de fascinant le fait qu’il ne soit pas de l’ordre de l’objet « figé» mais celui d’une marque itinérante qui a pourtant traversé les siècles. Il n’est pas lieu unique mais il imprègne une série de lieux tel un patrimoine ambulant à la mémoire forte. La ville d’Ourense est alors traversée par l’un des chemins du pèlerinage : la Route de l’Argent (Vía de Plata en castillan ou Vía de Prata en galicien) qui part de Séville et qui fait halte à Ourense une centaine de kilomètres avant Saint-Jacques-deCompostelle. En outre, les balises de l’itinéraire amènent les pèlerins sur la Ruà do Progreso qui jalonnent ainsi notre prison... Ce qui m’intéresse dans ce chemin, c’est premièrement son regain d’intérêt contemporain et les valeurs qu’il véhicule. Y randonner (de manière religieuse ou non), c’est redécouvrir le temps de la marche. A l’ère de la mondialisation et du numérique où tout est loin et proche à la fois, où des milliers de kilomètres peuvent être l’affaire de quelques secondes, il redonne une perception des distances et du temps à l’échelle humaine. De plus, il existe un programme intitulé Vivendas do Camiño qui propose une aide à la réhabilitation des habitations qui se situent le long des chemins de Saint-Jacques. Ceci ne concerne pas notre édifice mais il témoigne d’une volonté de valoriser le patrimoine qui jouxte le pèlerinage, plaçant ce dernier comme une réelle vitrine du patrimoine local. Ce pèlerinage serait donc une opportunité programmatique pour la réhabilitation de l’ancienne prison et un outil de revalorisation du patrimoine.
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vo cat io n t h e r ma l e
• D e u x p roj e t s d ’é d i f i c e s t h e r m a u x n o n réalisés sur le site des Burgas
élévation
et plan du projet des bains publics gratuits des
Burgas
Coupe
et plans du projet du
élévation
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du projet du
« Gran Balneario » des Burgas Octobre 1925
« Gran Blaneario » des Burgas A oût 1925
III.1.a - Un édifice à vocation thermale _______________________ Au début du XXème siècle, Ourense possède deux « maisons des bains » qui sont plutôt de l’ordre du mobilier urbain que de l’édifice architectural. Mais elle ne possède aucun bâtiment thermal à proprement parler. Pourtant, la présence d’un tel édifice semblerait bénéfique au développement de la ville, à l’heure où l’on parle de tourisme thermal.[1] Cela, l’architecte Pere Garcia Faria l’avait bien compris. En 1925, il offre à la ville deux projets thermaux pour le site des Burgas en lien avec ses préoccupations hygiénistes et de développement de la ville, en plein dans le mouvement régénérationniste. Il dessine alors un petit édifice de « bains publics » avec un fonctionnement bien défini où chaque usager se voit prêter une serviette et peut profiter gratuitement des bassins ; un petit projet au dessin moderne et symétrique et qui intègre une réflexion sur la ventilation et l’apport de lumière. à plus grande échelle, il dessine le projet du « Gran Balneario », une station thermale qui s’inscrit dans la typologie des palais à la façade massive et rythmée. Ventilation et éclairage sont à nouveau au cœur de la pensée du projet. Nous pouvons relever le fait que ces deux projets assument une distinction sociale et veulent offrir la jouissance des eaux thermales à différents publics. Cependant, la Guerre Civile Espagnole n’a pas permis la construction de ces projets et le site des Brugas n’a connu que des interventions urbaines maladroites loin des dessins rationnels de Pere Garcia Faria. Ainsi, Ourense ne jouit toujours pas de sa station thermale des Burgas, ni d’aucun édifice thermal en centre ville, un projet qui semble pourtant évident depuis plusieurs années et pour lequel l’ancienne prison provinciale semble la meilleure candidate...
____________ Crespo González, C. Peña Pereda, F. Prieto López, J.I. González Álvarez, S. (2017). Augas quentes : Argumentos para lo urbano. La Corogne, Espagne : Editions de l’Université de La Corogne. p.83-85. [1]
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De l’Emprisonnement à la retraite urbaine
• Schéma de réflexion de définition du programme
Entrée par l’existant, ce que le lieu offre
+
Patrimoine Architectural (Héritage programmatique)
Héritage du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle
Entrée par l'opportunité programmatique, ce que l'on peut offrir au lieu
La prison comme programme résidentiel
La prison héritière des théories hygiénistes
La prison parente du monastère
Spatialement /concrètement
Chambres, cuisines, sanitaires etc.
La cellule
Caractéristiques revêtues
Espaces de vie quotidienne
Espace vital minimum
Projet d’hôtel et auberge thermaux
Se loger, se restaurer
Le patio
Promenade du prisonnier, repenti
Chambre Notions du individuelle, parcours et de opport. de se la méditation centrer sur soi
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Patrimoine Hydrominéral
Aération, ventilation naturelle
Présence d’une source thermale
Richesse géologique
Eau à 60/70° directement accessible
Coïncide avec l'aspect santé recherché par le randonneur + bien être, bains de pieds etc.
III.1.b - De l’Emprisonnement à la retraite urbaine _______________________
Après avoir esquissé les divers héritages du lieu (architectural, hydrominéral etc.), l’idée est de penser le projet -et notamment le programme- à la confluence de ceux-ci. Prenons ce que le lieu nous offre afin d’en tirer profit pour le projet. Le schéma ci-contre tente d’exprimer ce passage de l’héritage au projet et les éventuelles transpositions des qualités existantes en cohérence avec un nouveau programme. Je propose alors de faire renaître l’ancienne prison en tant qu’hôtel et auberge thermaux. Je souhaite ainsi offrir à la ville l’édifice thermal qu’elle attend et d’y accueillir d’une part les pèlerins du chemin de Saint-Jacques et d’autre part une clientèle hôtelière. Le tout prend sens dans la définition d’un projet proposant des espaces de repos en plein centre urbain. Transposons l’isolement originel à celui d’une retraite urbaine -comme nous l’évoquions à travers l’analogie avec le monastère- et couplons le à la présence de l’eau thermale afin de proposer un projet lié au bien être. Cela résonne avec les volontés hygiénistes premières et coïncide avec la quête de nombreux pèlerins. J’ai personnellement emprunté le chemin durant une quinzaine de jours en France et rencontré bon nombre de randonneurs. Ces rencontres sont l’une des richesses du pèlerinage et s’il y a quelque chose que j’en retiens, c’est bel et bien cette quête de chacun d’entre nous, marcheurs. Tout pèlerin ne recherche pas la même chose mais tout pèlerin recherche. Et je remarquai que cette quête est bien souvent liée à ces aspects de santé et de bien être, qu’il soit mental ou physique (et bien souvent les deux puisque nous les savons extrêmement liés et influents l’un sur l’autre). Ainsi, le pèlerin pourra faire halte à Ourense et aller tremper ses pieds de marcheurs dans les eaux thermales du lieu tout comme le client de l’hôtel pourra profiter de bains thermaux plus intimes que les bains publics que proposent aujourd’hui la ville. Car l’idée n’est pas de concurrencer les bains de la place voisine des Burgas mais bien de proposer une autre forme de tourisme thermal placé, lui, sous le signe de l’intimité.
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• Répartition programmatique générale
2
1 L’hôtel-restaurant
qui se loge dans l’édifice principal ainsi que dans la surélévation
Les pavillons des pèlerins
qui viennent multiplier le module annexe existant et qui font façade sur rue (la «vitrine» que nous évoquions + la signalétique pour le randonneur)
N
Existant Intervention
3
contemporaine
Le collier de bains thermaux
Río Barbaña
qui vient s’ancrer dans l’espace naturel arrière et qui ouvre la vue sur la rivière
Schéma
axonométrique isométrique
Sans
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échelle
III.1.c - Un Projet à trois entités _______________________ Trois entités composent alors le projet et seront morphologiquement distinguées, rationalisant la lecture du programme. L’hôtelrestaurant se loge dans l’édifice existant avec un rezde-chaussée dédié au restaurant et aux fonctions d’accueil et administratives ainsi que deux étages dédiés aux chambres. Le deuxième étage propose alors une surélévation de l’édifice, rehaussant le volume face aux imposants bâtiments voisins et proposant une superficie plus cohérente avec le programme. De plus, le mauvais état sanitaire de la toiture d’origine ne permettait pas sa conservation. Il fallait donc la restaurer ou la réinventer, et cette surélévation fait le choix de la réinvention. Au Nord, l’édifice annexe existant vient se multiplier pour créer les pavillons des pèlerins tels de petits plots dédiés à l’accueil du randonneur. Ces bâtiment viennent investir la placette délaissée et tenir la façade sur rue. Ils sont ainsi la « vitrine » que nous évoquions au sujet du chemin de SaintJacques et peuvent également jouer un rôle de signalétique. En effet, le pèlerin perpétuellement en recherche de repère aura peut être vu une photographie ou description de l’édifice dans son guide de randonnée et le reconnaîtra aisément de par sa distinction morphologique. Enfin, je prends le parti de démolir l’édifice annexe ouest qui, construit à posteriori, venait légèrement briser la symétrie du corps principal et proposait un espace étroit difficilement aménageable de manière qualitative. Il n’était d’ailleurs pas de la même qualité constructive puisque maçonné avec mortier alors que le corps principal est fait de pierre sèche. Cette destruction laisse place à ce que j’appelle le collier de bains thermaux qui vient s’insérer dans le paysage arrière au niveau du R-1 original. On apporte ainsi de la lumière à la façade ouest de la prison qui était jusque là complètement occultée par l’ancienne annexe. Cette demi-lune amène le baigneur à descendre jusqu’aux bains (notion du parcours) et ouvre la vue de ce dernier sur la rivière Barbaña et la végétation qui y foisonne.
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Arrivée parking
Locaux et services hôtel
Bagagerie pèlerins
Bagagerie hôtel
Cuisines
Section accueil et distributions
Accès bain descente/parcours
Plan RDC 1 : 400 0 2
85
5
10m
Plan R+1 1 : 400 0 2
87
5
10m
Espace des bains : extérieurs intériorisés Accès sur rue pour poubelles restaurant
Sauna
Statue de ponctuation de la descente aux bains
Plan R-1 1 : 400 0 2
5
10m
89
M
a t é r i a li t é
s t r u c t u r e
e t
,
u n i t é
____________
III.2
91
Des Morphologies plurielles à l’unité matérielle
• Retour à mon imaginaire méditerranéen, intention en façade
Maison Knoll Castelbello-Ciardes, Italie Werner Tscholl Architekt
P. Lingeri
Maison d’artiste Île de Comacina, Italie puis A. Canziani et R. Fant
Owl’s House Gand, Belgique E. François et C. De Wolf
élévation Est - Façade 1 : 250 0 1 2
5
sur rue
10m
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III.2.a - Des Morphologies plurielles à l’unité matérielle _______________________
Nos trois entités explicitées forment un ensemble volumétrique hétérogène. Dès lors, le projet se doit de trouver une certaine unité, afin d’exister tel un ensemble harmonieux. Cette homogénéité sera apportée grâce à une structure bois verticale et rythmée qui se retrouvera dans chacune des trois entités. C’est elle qui surélève le bâtiment existant, s’affranchissant finalement de la fenêtre dans sa définition classique afin de ne pas dénaturer la composition originale de la façade historique. C’est elle qui vient subdiviser les petits édifices nord laissant entendre qu’il font bel et bien parti du même projet. Enfin, c’est elle qui composera le demi-cercle des bains thermaux et cadrera la vue sur la rivière Barbaña et le paysage ouest. Ici renaît mon imaginaire méditerranéen dans le dialogue entre la pierre et le bois, ce dernier apportant une certaine singularité à l’édifice dans un environnement bâti extrêmement minéral.
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M
a t é r i a li t é
s t r u c t u r e
e t
,
u n i t é
____________
III.2
95
L ’ E a u
c o m m e
m a t i è r e
• Des Vapeurs thermales au cœur de l ’a r c h i t e c t u re
Perspective Ouest, volumétrie générale et matières
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I I I . 2 . b - L’ E a u c o m m e m a t i è re _______________________ Le projet existe désormais de par son écriture architecturale propre et propose un ensemble plus harmonieux. L’élévation présentée précédemment nous affirmait cette unité créée en façade sur rue entre les pavillons des pèlerins et le bâtiment principal. La perspective ci-contre nous décrit, elle, comment le troisième élément vient également s’harmoniser. Cette harmonisation apparaissait d’autant plus nécessaire suite au choix formel de cet édifice auquel l’appellation de «.Collier de bains » fait écho (cf. plan page 89). Voyez-y, si vous le souhaitez, un clin d’œil au plan panoptique théorisé par le britannique Jeremy Bentham et arboré par les prisons contemporaines et voisines de notre édifice. Or, si ce dernier souhaitait déployer, à travers ce modèle rayonnant, le champ de vision du gardien de prison, je souhaite pour ma part déployer celui du baigneur sur le paysage. En effet, cette forme circulaire nous permet une certaine maximisation de la façade sans rupture angulaire et par conséquent un déploiement du panorama. On se reconnecte ainsi visuellement avec le paysage arrière ouest, comme souhaité dès le diagnostic. Cependant, n’oublions pas que ce projet est placé sous le signe de l’intimité. Ainsi, bien que cet espace s’ouvre sur le paysage, il se recentre également sur lui-même (grâce à la forme circulaire également) et intériorise paradoxalement les espaces extérieurs. On peut d’ailleurs repenser ici à l’image du cloître. Les espaces de bains sont alors, à la différence des bains publics proposés sur la place des Burgas, des lieux intermédiaires entre le dedans et le dehors, cernés de limites matérielles. De plus, ce sentiment d’être enveloppé de matière et dans une certaine forme d’intérieur est renforcé par la présence des vapeurs de l’eau thermale. Ces vapeurs animent, été comme hiver, le paysage urbain (et le rendent caractéristique de la ville d’Ourense) en s’échappant des fontaines et bains publics. Au sein du projet, elles révéleraient ce cœur intérieur chaud, s’échappant tout en étant contenues par l’architecture.
97
M
a t é r i a li t é
s t r u c t u r e
e t
,
u n i t é
____________
III.2
99
R y t h m e
t h e r m a l
• à L a re c h e rc h e d ’a m b i a n c e ( s )
Référence
de
rythme structurel et couloir d’eau
Réinterprétation
du motif
de la porte d’entrée
originale de la prison
Transition
à travers l’eau
Perspective
100
spatiale
uniquement
intérieure des bains thermaux
III.2.c - Rythme thermal _______________________ Bien que déployé par la paroi circulaire de la demi-lune, le panorama se voit ensuite subdivisé et cadré par le rythme structurel. Cette cadence verticale est l’occasion de jouer avec la lumière (tel un rôle de brise-soleil) et de renforcer l’intimité du lieu grâce aux ombres portées. Créer de l’ombre et concentrer la lumière, c’est également ce que j’ai voulu travailler en réinterprétant le motif présent sur la porte d’entrée de la prison (cf. photographie ci-contre et photographie en page de couverture) et en l’intégrant entre les éléments verticaux. L’idée serait éventuellement de travailler ce module de manière technique et d’en faire un élément de contreventement. En outre, si l’élan vertical crée une certaine élégance, il est étayé par l’« horizontalité » des bassins thermaux. Quand je dis horizontalité lorsqu’il s’agit déjà d’un élément plan, je pense surtout aux longues lignes horizontales créées par l’étroitesse des bassins tels de véritables couloirs d’eau qui assoient l’élan vertical. On a, de plus, la sensation d’un chemin d’eau qui s’inscrit dans la continuité de la notion du parcours, amorcée dès la descente aux bains depuis l’entrée principale de la prison. En termes de parcours, on peut également apercevoir -sur la perspective ci-contre-, la transition spatiale et matérielle (de la minéralité au bois) qui se fait par la descente dans l’eau, elle-même matière intégrante de l’architecture. Finalement, l’eau est elle-même porteuse de cette dualité intérieur-extérieur. Elle est à la fois cet élément naturel et sauvage qui court entre les roches on ne peut plus au contact avec l’extérieur et à la fois cet élément lié à l’intimité du bain, de la toilette personnelle (d’autant plus que dans notre cas il s’agit d’eau chaude) et de ce fait à la nudité (partielle ou totale) qui caractérise par excellence l’intimité. Quitter ses vêtements en pénétrant dans les lieux est d’ailleurs l’une des étapes du parcours vers l’espace intime. C’est ici l’usage qui fait lieu avant tout.
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Conclusion _______________________ Me voilà à nouveau dans les terres galiciennes. Me voilà concluant ce rapport à la bibliothèque de à la Cité de la Culture de Galice à Saint-Jacques-de-Compostelle entre les murs de Peter Eisenman. Me voilà achevant le travail d’une année de réflexion sur la réhabilitation potentielle de l’ancienne prison provinciale d’Ourense. Cet édifice a su me témoigner sa qualité architecturale et constructive et m’a menée à l’analogie de son programme carcéral à celui du monastère. Ceci afin de faire de son caractère principal, l’enfermement, la nature même du projet : la retraite désirée. Une retraite qui prend d’autant plus sens en plein cœur urbain créant de l’introversion là où il en existe peu. De plus, notre prison est assise à la confluence d’héritages multiples. Il s’agit premièrement de la richesse hydrominérale de ses sols qui la font jouir d’une eau thermale abondante. Puis, elle est jalonnée par l’héritage du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, marque itinérante qui imprègne fortement le patrimoine galicien. Autant de circonstances qui m’ont amenée à proposer la renaissance de ce bâtiment en tant qu’auberge (pour randonneurs) et hôtel thermaux ; un programme extrêmement lié au repos, à la santé, et au bien être faisant écho à la volonté première d’une retraite désirée. Ainsi, ce projet a pris forme en trois entités morphologiques : de l’hôtel-restaurant qui surélève le bâtiment existant aux pavillons des pèlerins qui habitent la parcelle nord délaissée en passant par le collier de bains qui vient s’inscrire dans le paysage naturel arrière de la prison et la reconnecter avec ce lieu végétal. Ces trois entités s’harmonisent ensuite à travers l’écriture architecturale, structurelle et matérielle, une écriture qui crée rythme, cadrage et dialogue singulier entre la pierre et le bois. L’eau thermale et la vapeur qui s’en échappe viennent ensuite participer à ce dialogue car, elles-mêmes matière, elles sont un élément architectural clé qui viendra étayer le caractère intime de ce projet.
103
à Héctor.
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O Descanso Urbano Résumé Voilà trente ans que l’ancienne prison provinciale d’Ourense, au cœur de la région Galicienne en Espagne, est inhabitée, au détriment de son état sanitaire et de celui de son environnement urbain proche. Située aux portes du centre historique, elle est connue de tous et plus particulièrement telle l’ancienne prison franquiste, lui affectant la projection d’une mémoire collective relativement lourde. De ce fait, et à la vue de sa dégradation quotidienne, un projet de revalorisation de cet espace bâti et environnant s’impose puisqu’ « Il faut vraiment faire quelque chose avec la prison ! » tel me l’évoquaient les habitants. En outre, ce bâtiment se trouve à la confluence de divers héritages : l’héritage bâti et constructif bien entendu avec une valeur patrimoniale certaine ; mais aussi l’héritage programmatique (analogique à celui du monastère), hydrominéral (avec la présence de sources thermales) et enfin l’héritage moins palpable du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle qui jalonne notre édifice. Cette rencontre du chemin de randonnée et de l’eau au cœur du patrimoine architectural est alors l’opportunité de faire renaître ce lieu en tant qu’auberge et hôtel thermaux. De l’enfermement historique du prisonnier en passant par l’isolement désiré du moine, ce bâti peut offrir les espaces d’une retraite urbaine propice au repos et au recentrement sur soi du pèlerin dans un certain éloge de l’isolement. Un répit au cours duquel il pourra tremper ses pieds de marcheur dans les eaux thermales du lieu...
abstract Since thirty years, the old provincial Jail of Ourense, in the middle of Galician region in Spain, is abandoned to the detriment of its state and close urban environment’s one. Located next to the old town, it is known by everyone and especially as the old jail of the dictator Franco, assigning to it the projection of a heavy collective memory. Consequently and seeing its daily deterioration, a renovation project of this building and its surrounding area is necessary as inhabitants were telling me : “We have to do something with the jail !”. Moreover, this building is the meeting point of various heritages : the heritage built and the constructive one of course but the functional one as well (analogical to the monastery), the hydro-mineral one (with the presence of thermals sources) and last, the one of the pilgrimage of Saint Jacques of Compostela which pass along our building. This meeting between this hiking way and the water in the architectural heritage’s heart is the opportunity to make this place living again as a thermal hostel and hotel. From the historical detainee imprisonment passing through the isolation wanted by the monk, this building can offer the spaces of an urban retreat favourable for the pilgrim for resting and refocusing. A time off while he may soak his hiker feet in the place thermal water...