K I B L I N D AAA R G ! SURL S I È C L E D I G I TA L silence and sound C I T I Z E N J A Z Z STA R WAX D ig I t ! L A S P I RA L E I ndie R ock M ag UNION W- F E N EC S CO R E A / V c h romati q ue X P R E SS I O N EXIT MUSIK XSILENCE —
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MUSIQUE
Peaches A l ’ Ta r b a G re g G ra f f i n G u i l l a u m e P e r re t Ptôse J o ze f Va n W i s s e m — DESIGN
G A B E B A RTA LO S L E V I L L AG E D E S C R éateurs A ntoine G ary — C I N éma
poT E M kine F ilms “ politi q ue U S” — L I T T érature
R É M I S U SS A N G erard E vans V ladimir N abokov — ST R E E T C U LT U R E
Tattooisme arka ï c skateboard — S E XY
cO M M E U N E CO U I L L E DA N S L E P OTAG E — BD
DAV G U E D I N M I KA P U SS E
ATYPEEK MAG TRIMESTRIEL COLLABORATIF D’ACTUALITÉS GÉNÉRALES
NOUVEAU L’actualité culturelle : le condensé trimestriel des meilleurs médias compilés Une sélection des meilleurs reportages et interviews Découvrez nos chroniques d’albums, clips, livres, DVD, accessoires design et mode… La scène indépendante en images PRIX LIBRE
Peaches Devenue icône branchée, PEACHES ©Daria Marchik
elle sort deux albums supplémentaires Fatherfucker en 2003 et Impeach My Bush en juillet 2006. En 2012, elle écrit, réalise, et joue dans le film Peaches Does Herself, un opéra électro-rock qui s’inspire de l’histoire de sa vie. Une belle leçon de vie ! Vous retrouverez dans ce magazine une interview inédite de Peaches par Ira.
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Pea ch
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Atypeek Magazine, fort d’un premier
numéro qui a dépassé nos espérances, voici donc le N° 2 d’Apypeek Mag, en version augmentée. Peaches y fait une incursion prononcée, finalement Crass ne lèvera pas dans ce numéro le voile sur une partie de son histoire dans un livre de George Berger.
ÉDITORIA
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OURS Rédaction : Atypeek - 21 Rue Prof Weill 69006 Lyon - France Rédacteur : Christophe Féray cf@atypeekmusic.com
Pour les cinéphiles, une rétrospective sans précédent de Potemkine, qui entre dans l’année David Lynch entre autres. Côté couille dans le potage on tire aussi côté salles sombres. Dans l’obscurité Al’Tarba se dévoile quelque peu, comme Jozef Van Wissem et Greg Graffin d’ailleurs.
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Un peu plus loin Gabe Bartalos fait le grand écart avec Rémi Sussan dans un bestiaire forcément contemporain et bien Freak. Christophe Féray Atypeek Mag
Graphisme : Atypeek Design Distribution : Digital Publishing Platform for Magazines N° ISBN : 9782955693629 Commission Paritaire : ISSN 2497-8035 Contributeurs : Léa Vince - Juan Marcos Aubert Jonathan Allirand - Roland Torres Maxime Lachaud - Hazam - Fisto (Olivier Cheravola) - Oli - CF Aleksandr Lézy - Antoine Gary Pierrick Starsky - Valentin Blanchot Arnaud Verchère - Robin Ono Laurent Coureau - Ira Benfatto Flore Cherry - Mika Pusse Jérôme Tranchant - Alain R. Zoom : Peaches - Al’Tarba - Greg Graffin Guillaume Perret - Ptôse Jozef Van Wissem - Gabe Bartalos Le Village des Créateurs Le Géant Vert - ROVT Design Potemkine - Rémi Sussan Vladimir Nabokov Dav Guedin - Mika Pusse Antoine Gary - Tattooisme Arkaïc Skateboard… Publicité : cf@atypeekmusic.com Atypeek Mag est une publication d’Atypeek™.
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ATYPEE PEACHES ENTERTAINER
AL’TARBA
Ira Benfatto et Christophe Féray
Star Wax
8-17
INTERVIEW
18-21
le fléau hollandais Jozef Van Wissem
Greg Graffin ‘Millport’
PTÔSE Vers d’oreille
Interview Robin Ono, Journaliste
Interview Maxime Lachaud Journaliste
30-34
36-43
RÉMI SUSSAN LES UTOPIES POST-HUMAINES
COMmE UNE COUILLE DANS LE POTAGE
SCHLAASSS
Interview La Spirale, propos de Laurent Coureau Journaliste
Chronique Union Flore Cherry, Journaliste
148-157
160-161
Interview Robin Ono, Journaliste
22-27
CARNET DE VOYAGE MONGOLIE Alice Féray Photographe
132-139
Marques & consommateurs : les rituels à l’ère du digital Article Siècle Digital Valentin Blanchot Journaliste
Greg Graffin © DR
142-145
BD de Mika Pusse www.schlaasss.fr
164-167
SOMmAIR © DariaMarchik
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EK MAG GUILLAUME PERRET : Wild Wild JAZZ
CHRONIQUES ALBUMS & Singles
Interview Jonathan Allirand Journaliste
Chroniques
50-81
44-47
LE GÉANT VERT Article Kiblind Magazine J. Tourette Journaliste
102-103
Les DIX meilleurs films sur la vie politique américaine
POTEMKINE Les mystères du K inversé
Rubrique Cinéma Jérôme Tranchant, Journaliste
174-185
DOSSIER Maxime Lachaud avec Nils Bouaziz
Blanc comme neige
TATTOOISME 3
Mode
ROVT Design
Fred Inhvader Chris Coppola Journaliste
Le Village des Créateurs
108-111
Brice Baleydier
Créateur de Arkaïc Skateboards
112-117
104-107
séléctions POTEMKINE Jérome Tranchant et Maxime Lachaud Journalistes
186-199
Dans la cuisine DE Dav Guedin Interview AAARG ! Pierrick Starsky, Journaliste
124-131
LE LIVRE DU MOIS
LOLITA
George Berger : L’histoire de Crass
CHRONIQUE Vladimir Nabokov Par geminway.com
200-203
La scène indépendante en images Galerie Photos Hazam, Journaliste / Photographe
204-209
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Magazine trimestriel collaboratif réalisé à l’initiative d’Atypeek Music
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Musiques en sous-Sol
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Jonathan Allirand - Journaliste
LE CAHIER DES CURIOSITÉS PEACHES ENTERTAINER Interview
Ira Benfatto, Journaliste et Christophe Féray
AL’TARBA
Interview I Star Wax
PTÔSE
Vers d’oreille
Interview
Maxime Lachaud, Journaliste
GUILLAUME PERRET Wild Wild JAZZ
Interview
Juan Marcos Aubert, Journaliste
Jonathan Allirand, Journaliste
le fléau hollandais
CHRONIQUES
Jozef Van Wissem
ALBUMS & Singles
Robin Ono, Journaliste
instantanés
Interview
BAD RELIGION
Greg Graffin ‘Millport’
Interview
Robin Ono, Journaliste
des copains/Copines
VIDéoclipS Chronique
Léa Vince, Journaliste
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INTERVIEWARTISTE
PEACHES ENTERTAINER Texte : Ira Benfatto
Interview : Ira Benfatto ET Christophe Féray
INFOS : www.facebook.com/pg/officialpeaches/
Entertainer [ˌentəˈteɪnəɼ] noun [comedian] comique m, amuseur m, amuseuse f [in music hall] artiste mf (de music hall), fantaisiste mf -Traduction du Larousse Fin des années 90, Toronto et les rivages du lac Ontario. La musicienne Merill Beth Nisker éprouve le besoin de se réinventer. Elle s’achète un Roland MC505, travaille seule sur un nouveau son et se découvre une autre façon de chanter. « Peaches » est née. Lovertits, son 1er EP de six titres, sort en 2000. Sonorités minimales, sales, et paroles explicites, son attitude séduit le label allemand Kitty-Yo. Dans la foulée, la Canadienne déménage à Berlin pour y enregistrer son premier album studio, The Teaches of Peaches (2000). L’album devient culte et marque la pop-culture. Et bien que le succès commercial ne soit pas encore au rendez-vous, elle se voit propulsée au rang de superstar de l’underground. Influencé par Joan Jett, Iggy Pop, les Bikini Kill, le cinéaste John Waters et la photographe Cindy Sherman, son personnage séduit les
clubbers, les post-féministes, le milieu de la mode et les freaks de tous horizons. D’icône de l’underground, elle devient icône queer avec son 2e opus, Father Fucker (2003). Elle s’y joue des questions de genre, apparaît avec une barbe sur la couverture, s’approprie et renverse les clichés macho rock ’n’ roll, en mode riot grrrl. Jusqu’à marquer les esprits de manière indélébile, au point que plus un article ne manque de la qualifier de reine des queers ou de l’aborder sous l’angle du féminisme.
Quatre albums et 13 ans plus tard, c’est au-dessus d’une bassine, la tête recouverte d’une serviette chaude, que nous la retrouvons dans sa loge de l’Épicerie Moderne. Exténuée par un mois sur les routes, au rythme effréné des dates qui s’enchaînent. Car une nouvelle mutation s’est opérée chez Peaches au travers de ses deux derniers albums, clairement plus accessibles. Ses mélodies sont plus complexes et ses textes autobiographiques. Le sexe est toujours présent mais l’engagement politique plus diffus. Et son débit si spécifique s’entrecoupe désormais de refrains chantés sur des boucles plus disco qu’electropunk. Quitte à décevoir ses fans de la première heure qui le déplorent, c’est une réelle volonté de sa part, un choix artistique assumé.
“Elles ne devraient pas se préoccuper de ce que pensent les mecs parce qu’ils veulent juste s’insérer dedans, ils se fichent de ce à quoi il ressemble”
© DR
PEACHES
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INTERVIEWARTISTE
À SAVOIR Véritable bête de scène, Peaches s’est imposée sur la scène queer de Berlin comme la nouvelle icône de la musique électro par ses paroles ouvertement sexuelles et ses costumes provocants...
© Elodion
“Jusqu’à éjaculer littéralement sur le public...” Mais s’il est une chose que Peaches a toujours été et sera toujours, c’est une vraie bête de scène. Une femme de spectacle, ce qu’elle nous a encore prouvé ce soir-là. Une fois le rideau levé, la discrète Merill s’efface et le monstre « Peaches » prend vie, possédant non seulement son corps, mais la scène toute entière. Changements de costumes multiples, tous plus extravagants les uns que les autres, chorégraphies, utilisation d’accessoires, petites saynètes comiques, elle utilise et maîtrise tous les rouages du music-hall. On quitte la dimension du seul concert pour intégrer celle d’un « Rocky Horror Peaches Show ». Dimension fantasque, kitch et débridée, où le sexe est omniprésent : coiffes en forme de vagin, simulation de plan à trois avec ses danseuses, rayons lasers échappés des entrecuisses et bite translucide géante qui se développe au-dessus du public. Peaches dit de ses shows qu’ils sont à son image, avec beaucoup d’autodérision. Elle apparaît sur scène dans une boule géante de poils 10
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roses vifs, exécute une séance d’aérobic entre deux morceaux sorte de moment improbable où Jane Fonda rencontre John Waters, porte des bodies monstrueux à seins multiples, jette au public la serviette avec laquelle elle vient de s’essuyer les aisselles et l’entrejambe. Ses shows sont une invitation à la fête, à la fièvre et à l’excès. Toujours avec cette note d’humour qui manque souvent aux scènes électroniques. Et quand Peaches fait son show, elle nous en met plein la face. Au sens propre, comme au figuré. Jusqu’à éjaculer littéralement sur le public, en actionnant une pompe nichée dans son gland de plastique boursouflé…
Vaginoplasty, le sujet est assez improbable mais vraiment symptomatique du mal de notre temps, pourtant il semble que tu sois la première à parler de ce sujet dans un morceau Oui, je trouve juste très triste que de jeunes filles pensent que c est cool d avoir le vagin parfait. Elles ne devraient pas se préoccuper de ce que pensent les mecs parce qu’ils veulent juste s’insérer dedans [elle pointe son entre jambe du doigt] ils se fichent de ce à quoi ça ressemble. J’ai lu des statistiques disant que plus de 200 % de femmes ont subi cette intervention en Angleterre et ce, sans aucune raison médicale.
C’est juste fou ! Si c est pour raison médicale, je veux bien, mais pour l’esthétique ça n’a aucun sens ! Et puis vous sortez de ce truc, pourquoi vous en avez aussi peur ? (rire)
Ce dernier clip est sorti récemment, soit 1 an et demi après la sortie de l’album, ce qui est surprenant dans une logique promotionnelle classique, peux-tu nous en parler ? C’est pour des questions d’argent, tu sais, je finance tout moi-même. En plus je fais tout toute seule, de la conception de la musique aux clips. Je n’ai pas le temps de faire toutes les vidéos. Je ne veux pas impliquer trop de gens extérieurs et préfère les réaliser moi-même, et ça prend du temps. Je fais ça depuis mon premier album, je faisais beaucoup de super 8 à l’époque.
Oui, Vice Cooler est un ami, on a travaillé ensemble sur l’album. Il est vraiment talentueux. J’ai tout produit en un an, en travaillant 10 heures par jour. J’ai juste fait ça dans mon garage, une pièce qui fait peut être 2 fois la taille de celle-ci [ndlr: la loge était d’environ 2 m sur 4] et ça, c’est peut-être punk mais sinon, pour moi je serais plutôt une hippy, tu vois ce que je veux dire, je veux rassembler les gens, les emmener sur des projets avec moi. Je suppose que les hippies et les punks ont ce point commun, ce truc de rassemblement. Disons que ma musique est plutôt punk mais que dans ma tête mon attitude est plus hippy. © Christophe Féray
“tu sais, je finance tout moi-même. En plus je fais tout toute seule, de la conception de la musique aux clips”
Pour la promotion, encore, c’est moi qui finance tout et c’est aussi un travail d’équipe. Ça dépend où je suis. Pour cet album j’étais à LA, j’ai donc réuni une communauté de gens là-bas, des amis en qui j’ai confiance et qui ont du talent.
En parlant de gens talentueux, tu as produit Rub avec Vice Cooler qui, et ça te va bien, a commencé sa carrière dans un groupe plutôt punk, XBXRX. Henry Rollins dit de lui que c’est une source d’inspiration, toi qu’il est le meilleur show-man au monde… ATYPEEK MAG #02
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Il avait aussi réalisé 2 clips sur ton avant-dernier album (Burst et Mud) et Close Up sur celui-ci, qui est un featuring avec Kim Gordon (Sonic Youth). Comment tu en es venue à collaborer avec elle ? J’ai rencontré Sonic Youth parce qu’on a travaillé ensemble un temps. Puis dernièrement j’ai acheté une petite maison à LA (c’est là que j’ai produit l’album) et Kim a emménagé dans le coin juste quand j’y étais. Un jour, on traînait toutes les deux et je lui ai juste proposé de faire un peu de musique. Ça s’est fait comme ça, dans la seconde.
Simonne Jones dit de toi : « à 15 ans, j’ai vu mon premier concert de Peaches. C’était comme un spectacle de cirque dégénéré. J’ai découvert ce qu’était un godemiché, vu pour la première fois un travesti, c’était fort. Plus rien n’a été comme avant après ce concert ». Tu es une des rares artistes internationales qui n’hésite pas à pousser les groupes ou artistes qui te plaisent. C’est important pour toi ? Déjà, ce sont eux qui doivent me trouver et on ne leur facilite pas la tâche. Par exemple, Youtube supprime pas mal de mes vidéos. Et c’est marrant comment aujourd’hui beaucoup d’artistes viennent me voir en me disant qu’ils étaient fans de moi quand ils avaient genre 12 ans ! Et ça me fait vraiment plaisir parce que les gens pensent que je suis trop trash 14
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pour les plus jeunes, les jeunes filles, queers ou peu importe, alors qu’en fait non ! Ça ne l’est pas ! Ils n’ont aucune idée de ce qui les influence, les inspire, les motive. Et ça fait plaisir à entendre. Après bien sûr, je les aide si je le peux. On en revient encore à cette notion de « communauté ». Pour moi l’idée n’est pas de faire son truc tout seul dans son coin et de s’élever toujours plus haut, je ne trouve pas ça intéressant. © Christophe Féray
“Disons que ma musique est plutôt punk mais que dans ma tête mon attitude est plus hippy”
À SAVOIR Originaire du Canada, transportée à Berlin ou elle vit désormais, Peaches est, sans doute bien malgré elle, devenue une icône…
PLUS D’INFOS http://urlz.fr/51oe
© DR
“C’est marrant comment aujourd’hui beaucoup d’artistes viennent me voir en me disant qu’ils étaient fans de moi quand ils avaient genre 12 ans!” Il y a également Christeene dans un de tes clips, et que tu as invité à faire la première partie de ta tournée US, peux-tu nous parler de cette dynamique que tu impulses et qui dans ton sillage permet à une scène « queer » ou « riot grrrl » de se développer et toucher les médias ? D’ouvrir des débats ? Christeene, c’est comme ma sœur d’une autre mère. Christeene est juste Christeene, c’est le mec le plus gentil qui soit, avec dans le cœur la noirceur d’Alice
Cooper (rire). Donc c’est avant tout une histoire de famille mais je pense que donner une visibilité à des artistes comme lui est toujours pertinent, surtout aujourd’hui avec toutes ces idées radicales qui explosent à travers le monde. Mais il ne faut pas perdre de vue qu’il est avant tout question de divertissement et de liberté d’expression et pas seulement de la communauté LGBT ou des femmes. Ça s’adresse vraiment à tout le monde ! Mais oui, il faut mettre du sens dans ce qu’on fait. Si tout est fade, ça n’a aucun intérêt pour moi. Beaucoup de mon malaise vient du fait que tout est si lisse et désincarné, ça me met vraiment en colère. En gros, je veux juste que les gens se sentent bien dans leur corps. Je me bats pour qu’ils n’aient pas la sensation de devoir se soumettre à une règle sociale, politique ou religieuse qui leur interdirait d’être qui ils sont vraiment. ATYPEEK MAG #02
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Le film a été joué dans 70 festivals à travers le monde et, pour une raison que j’ignore, n’a jamais été diffusé en France. Il n’a été distribué qu’en Allemagne et au Canada, mais vous pouvez le trouver sur Vimeo.
Quels sont tes prochains projets ? La prochaine étape ? Dormir ! Un bon long sommeil (rire) sinon je viens juste de faire un morceau avec Mr. Oizo, c’était vraiment drôle. Nos deux univers ont bien matché, c’était cool.
être défricheuse ou lanceuse d’alerte, y a-t-il un prix à payer ? Je paye plus le prix de mon propre épuisement en étant en tournée, tu vois, parce que je ne suis pas dans les radars des chrétiens et autres radicaux. Je ne suis pas beaucoup médiatisée. Ils ne me diffusent même pas à la télé américaine. Ils me laissent m’exprimer sur des sujets mais ne me laissent pas me produire à l’antenne, ce qui n’a aucun sens, mais ils se mettent à flipper genre - « elle va retirer toutes ses fringues et porter un gode ceinture ». Je reste donc définitivement underground.
© Christophe Féray
“Ils me laissent m’exprimer sur des sujets mais ne me laissent pas me produire à l’antenne, ce qui n’a aucun sens, mais ils se mettent à flipper genre - elle va retirer toutes ses fringues et porter un gode ceinture”
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Parle-nous de ton long-métrage sorti en 2013 Il s’appelle Peaches does herself. C’était donc avant Rub, j’avais repris mes 4 albums précédents pour en faire une espèce d’autobiographie épique. C’est une version exagérée de mes shows sous forme de comédie musicale. On a vraiment soigné la réalisation et c’est devenu un film. J’étais entourée de gens qui savaient ce qu’ils faisaient. J’avais un super directeur artistique. Beaucoup du mérite revient à Robin Thompson, c’est lui qui l’a filmé et monté.
Interview réalisée le mercredi 29 novembre 2017 chez www.epiceriemoderne.com
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Extrait de Star Wax n°36
ADOLESCENT TOULOUSAIN, JULES FAIT SES CLASSES DANS UN GROUPE DE PUNK-ROCK. MAJORITÉ ACQUISE, IL NE LUI FAUDRA PAS PLUS DE DIX ANS POUR IMPOSER SA TOUCHE DE BEATMAKER. AUJOURD’HUI, (RE)CONNU COMME UN PRODUCTEUR HIP HOP, AL’TARBA EST UN PROFESSIONNEL QUI COMPTABILISE DÉJÀ CINQ ALBUMS ET PLUS D’UNE COLLABORATION. ATTENTION ÂMES SENSIBLES ENTRETIEN AVEC UN INSOMNIAQUE UN TANTINET SADIQUE, FAN D’HORRORCORE. Pourquoi le nom Al’Tarba ? As-tu été conçu hors des normes sociales et parfois n’est-ce pas difficile à assumer ?
Salut ! (rires). Je crois que je ne comprends pas ta question, ou bien fais-tu référence au « bâtard » dans mon blaze ? Voyons nous savons tous qu’il s’agit plus d’une insulte maintenant qu’une vraie appellation. Je ne suis pas John Snow (Game Of Throne, ndlr), je suis plus Joffroy en brun à la limite, pour le côté sadique (rires), mais mes parents ne sont pas frères et sœurs. Ce serait légèrement inquiétant n’est-ce pas ? Si je ne m’abuse tu es petit fils d’un collectionneur de vinyles. De quoi était composée cette collection ? En quoi ça t’a ouvert l’esprit ou qu’est-ce que cela t’a apporté ?
Y’avait beaucoup de jazz et de classique, mais aussi du reggae, du ska, du Vangelis… Quand je vais rendre visite à ma grand-mère, j’en écoute plein du coup et j’en prends quelques-uns à chaque fois, qui finissent souvent dans mes productions. écouter des musiques qui viennent de la collection de quelqu’un d’autre t’ouvre toujours l’esprit je pense. À ce titre, les brocantes et les magasins de Toulouse, à l’époque de mes deux premiers albums, m’ont beaucoup ouvert l’esprit aussi. Il y en avait un qui était spécialisé dans les ziks de films érotiques, de films d’horreurs et ce genre de truc entre autres. Ça s’appelait Bullit. Il a malheureusement ferme depuis je crois, mais gros big up à mon grandpère et à Bullit ! Mon grand-père n’avait pas de musique de films érotiques, soyons clairs, du moins pas tant que je ne trouverais la chambre secrète qui s’ouvre en enlevant un des livres de la bibliothèque. Tu es arrivé au beatmaking par le rap, écris-tu encore ?
Oui, j’en ai écrit quelques titres pour l’album de mon groupe Droogz Brigade, en plus ma voix est toute cassée maintenant ça fait bien rap punk. Ta première sortie date de 2007 mais depuis combien de temps composais-tu ?
J’ai dû commencer deux ou trois ans avant le premier, deux ans je pense. Avant, j’avais placé des productions pour des rappeurs à droite
à gauche. Le premier « skeud » sorti dans le commerce où tu peux entendre des productions à moi c’est Les Poésies Du Chaos » de Mysa ! Depuis tout ce temps y a til eu une évolution de tes machines, de ton home-studio ?
J’ai commencé avec Cubase et je suis toujours dessus depuis. J’avais aussi un Asr10 à l’époque mais comme je déménage beaucoup il est resté chez mes parents. Quelle est la place du sampling dans tes prods ?
Je dirais 70 %. J’aime en foutre des tonnes, des trucs qui viennent d’horizons complètement différents et les mélanger ensemble comme une grande orgie sonore, avec les participants en combinaison SM en vinyle. Donc parfois, mais pas que ! Et puis j’aime bien jouer des synthés, des guitares, des basses, dans ce joyeux bordel ! Dernièrement je ne samplais presque plus sur vinyle mais j’aimerais m’y remettre. Tu as eu pas mal d’invités d’outre Manche et français sur tes prods ; s’agit-il de rencontres virtuelles ou as-tu été en studio avec les rappeurs ?
Ce fut souvent virtuel, mais il y a des gens que j’ai rencontré en vrai pour taffer, genre Lord Lhus, qui est aussi un bon pote ! Pour d’autres, les rencontres se sont faites en backstage, par exemple Ill Bill ! Dans ta bio il est dit : «...délaissant l’étiquette du puriste trop souvent attachée au punk ou au hip hop ». Peux-tu nous éclairer ? As-tu décidé d’arrêter le hip hop hardcore ?
Non, d’ailleurs mes deux prochaines sorties sont clairement orientées hip hop pur et dur puisque. J’ai produit l’intégralité de l’album de Droogz Brigade ainsi que la moitié de la production avec le beatmaker INCH sur le prochain album de La Gale ! Y’a aussi un album qui n’était jamais sorti qu’on avait fait avec deux rappeurs de Caroline de Sud qu’on va peut-être sortir bientôt, le groupe s’appelait Planet X !
PARTENARIAT : www.starwaxmag.com / Star Wax N°36
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Fais-tu de la musique simplement pour distraire ou y attaches-tu une autre vocation ?
Les deux, disons que c’est avant tout une passion, un hobby, mais maintenant c’est comme ça que je paie le loyer donc forcément, il faut s’organiser un minimum. Et puis si je ne fais pas de musique je fais trop la fête, c’est un genre de garde-fou ! Depuis « Lullabies tor Insomniacs » en 2011 tes productions se peaufinent parfois ça swing, c’est plus groovy, plus singulier. N’est-ce pas cela qui t’a permis de signer sur des labels ?
Disons que l’abstract hip-hop touche un public plus large et qu’en tant que beatmaker tu peux faire du live avec. Mais à la base ma motivation c’était de faire ce que je kiffe et je kiffe l’abstract hip-hop ! Des prods un peu swing je n’en ai pas fait tellement que ça et j’en fais plus trop, mais c’est bien quand t’es ivre, non ? Quand et pourquoi as-tu commencé à collaborer avec Dj Nix’on ?
Il a trois ans, parce que c’est un tueur au scratch, parce que c’est mon bête de pote et puis parce qu’on ne s’ennuie jamais en tournée avec ce satané blond aux sapes trop grandes ! Avec Dj Nix’on et Vj Tomz vous venez de faire une belle tournée pour « Let’s the Ghosts Sing » ton dernier album. Peux-tu nous dire ce que chacun de vous produit sur scène, comment développez-vous la scénographie ? Pour la date à Dour cet été avez-vous pu proposer quelque chose de spécial ?
Et bien on a un set composé de mes sons, qui passe de sons cauchemardesques à des trucs plus psychédéliques ou sautillants. Nix’on envoie le paquet en scratch, moi je rejoue des samples sur les beats où je trifouille les batteries et Vj Tomz a une installe pour faire du mapping. Il envoie plein d’images sataniques pour que noire soit la messe ! Pour Dour on flippait comme des oies avant les fêtes de Noël et puis ça s’est bien passé, on en garde un souvenir de dingue !
Aujourd’hui que reste-t-il de ta pratique et de ton amour du punk rock ? « Do It » part 2, 3,4… ? Écoutes-tu encore du rock ?
Beh j’en écoute tous les jours et je fais chier mes potes en fin de soirée en en mettant à fond et en beuglant les refrains en levant les bras en l’air comme si j’étais à l’avant du Titanic, c’est fantastique ! J’aimerais remonter un groupe de punk un jour ! Selon toi en quoi le rock et le hip-hop sont similaires et en quoi sont-ils différents musicalement parlant puis culturellement ?
Je ne sais pas c’est assez large, mais je ne suis pas trop pour les gens qui se disent dans un « lifestyle » purement « rock » ou « rap ». Ça n’a pas de sens pour moi. Même si je reconnais que ce sont des cultures avec beaucoup de codes… Je sais un truc, c’est que dans le hip-hop ils ont des fois un peu du mal avec le côté punk et ses excès, surtout en soirée mais bon, au final tout se passe bien. (Rires) Dans le cadre de la rubrique rare wax spécial punk rock, dans ce numéro, Patrice Poch sélectionne des vinyles d’Agnostic Front, Mag Virgins, Vonn… Ça te parle ?
Oh que oui, je peux même te dire qu’il y a pas plus de trois jours, j’ai foutu « Gotta go » en fin de soirée et j’ai eu à peu près la même attitude que je te décrivais deux questions plus tôt mais j’étais avec des potes qui kiffent le hardcore New Yorkais, alors, on a chanté en chœur « From the east cosssst to the west cosssssst ! ». Et puis la montée de oi ! Fantastique aussi (rires). Que penses-tu du propos de Lino : « Le manque d’originalité dont souffre le rap aujourd’hui est en train de faire stagner le genre » ?
Bon, ils font un peu tous de la trap c’est vrai, de toute façon Lino est un maître et un ancien dans ce rap game, alors quoi qu’il puisse dire sur le rap je ne peux qu’approuver ! Peux-tu nous parler de « Projet Ludovico ».
Ça arrive à la rentrée, les flows sont saignants et les productions sales. Il y aura environ seize titres, tous inédits et on compte bien faire une
Extrait de Star Wax n°36
tournée à la suite donc si des gens sont chauds ils peuvent nous contacter ! On saute partout sur scène, faut nous inviter (rires) ! Le premier extrait clippé s’appellera « Street Trash » et ça va chier ! Y’a des titres rigolos comme « L’œil d’Alex » ou « Les feux De La Bourre » qui est déjà un hymne par chez nous à Toulouse ! As-tu d’autres projets pour la fin de l’année puis en 2016 ?
Je travaille sur un nouveau projet solo, je n’en dis pas plus, mais il y aura un peu plus de synthé ! Avec toujours des samples bien dégueux (rires) Si non tu fais toujours des burgers aux champignons ?
“…dans le hip-hop ils font des fois un peu du mal avec le côté punk et ses excès, surtout en soirée, mais bon, au final tout se passe bien…”
Je ne suis pas très champignons, je les digère mal. Tu t’imagines toi, passer une soirée aux toilettes en voyant des lutins sataniques danser au-dessus de toi ? Boarf très peu pour moi je laisse ça aux cartoons et leurs grosses pupilles d’Homer !
PARTENARIAT : www.starwaxmag.com / Star Wax N°36
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INTERVIEWARTISTE
le fléau hollandais
Jozef Van Wissem Jozef Van Wissem est sans doute l’un des joueurs de luth le plus reconnu de notre ère. Révélé au grand public aux côtés de Jim Jarmusch avec la B.O. de Only Lovers Left Alive en 2013, Jozef Van Wissem porte aujourd’hui le flambeau dans la réhabilitation de l’instrument dans la musique moderne. Que ce soit par sa discographie prolifique ponctuée de collaborations prestigieuses ou encore son travail de compositeur fortement loué, l’oeuvre du luthiste néerlandais a su redorer le timbre et l’image du luth en présentant une musique teintée d’une poésie forte transcendant les époques. Sorti d’une pause d’un mois et de retour sur une tournée Européenne pour lancer l’année 2017, nous avons sauté sur l’occasion de rencontrer le personnage.
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DU Rock’n’roll à LA VIE monastique D’après ce que j’ai compris votre initiation au répertoire du luth s’est d’abord fait via ton initiation à la guitare classique. Jozef Van Wissem : C’est exact. J’ai commencé à jouer la guitare classique de mes 11 à 18 ans puis je suis passé à la guitare électrique. J’ai ensuite ouvert un coffee-shop aux Pays-Bas où j’ai joué du rock expérimental et je suis tombé dans un mode de vie de rockeur décadent. Ça a fini par me fatiguer et je suis parti vivre à New York où j’ai fini par prendre des cours de luth avec Pat O’ Brien. C’est là que tout a changé. Je devais avoir 30 ans à ce moment-là par contre, tout ne s’est pas enchaîné. Je pense que j’avais besoin de passer par cette phase tumultueuse, sinon je n’aurais probablement pas étudié le luth. © DR
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INFOS : www.jozefvanwissem.com/
Jozef Van Wissem © Gwendal Le Flem
Interview : Robin Ono
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Vous avez tendance à fortement contraster les termes pour décrire votre vie de “Rock’n’roll” à Amsterdam et votre vie quasi “monastique” à New York. Jozef Van Wissem : C’est vrai, je ne sortais pas du tout. Quand t’es barman t’es entouré de gens qui veulent quelque chose de toi, ça m’a vraiment fatigué et drainé, personnellement et artistiquement. Avant tout ça je faisais de la musique avec des super groupes. Cette nouvelle vie s’est présentée comme un retour introspectif.
“La plupart des joueurs de luth aiment l’instrument pour la technique, ce qui n’est pas le cas chez moi. C’est important de remettre l’instrument à jour et lui redonner une nouvelle vie, ce que ne font pas toujours les autres luthistes.” INTERVIEW DE Robin Ono
D’où viennent vos instruments ? Jozef Van Wissem : Au départ j’ai eu un luthier basé au Canada qui m’a fait 5 luths. Je les ai depuis que j’ai commencé au milieu des années 90. À présent j’ai un autre luthier, un très bon ami à moi basé à Paris qui s’appelle Miguel Serdoura. Il fabrique des luths très abordables. Il m’en a fait un et quand je lui ai demandé combien je lui devais, il m’a répondu “garde ton argent, tu as assez fait pour l’instrument”. J’étais très content.
À SAVOIR En 2013, Jozef van Wissem a remporté le prix de la meilleure musique originale pour la bande originale du film Only Lovers Left Alive au Festival de Cannes, qu’il a composé avec Jim Jarmusch. (Wikipedia)
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À SAVOIR
Du fait de la particularité de son instrument, van Wissem reçoit des commandes assez particulières ; en effet la National Gallery de Londres lui a demandé de composer une bande-son pour le tableau de Hans Holbein, Les Ambassadeurs. Il a aussi réalisé la musique du jeuvidéo Les Sims Medieval (Wikipedia)
L’improvisation est comme un dessin d’enfant, c’est aussi simple que ça Dans votre œuvre vous avez replacé le luth dans un contexte contemporain aux côtés d’instruments électroniques et électriques ou encore au-dessus de sons d’ambiance d’aéroports. Est-ce que vous cherchez davantage à travailler avec le caractère historique de l’instrument ou à le flouter voire effacer via ces “recontextualisations” ? Jozef Van Wissem : J’accepte l’historicité du son du luth, mais j’aime bien le combiner avec des sons contemporains et le confronter à la société contemporaine pour qu’il en ait un dialogue entre les deux. J’aime bien utiliser le caractère historique de l’instrument et le replacer dans un contexte contemporain. La plupart des joueurs de luth aiment l’instrument pour la technique, ce qui n’est pas le cas chez moi. C’est important de remettre l’instrument à jour et lui redonner une nouvelle vie, ce que ne font pas toujours les autres luthistes.
Vous avez collaboré avec des musiciens de cultures musicales différentes, notamment Keiji Haino. Est-ce que les processus collaboratifs viennent naturellement ou est-ce qu’elles nécessitent une certaine réflexion afin de prendre forme ? 24
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Jozef Van Wissem : C’est toujours quelque chose de naturel. Ceci dit, c’était bizarre avec Keiji Haino. Il était au micro et on improvisait avec lui. J’avais composé 3 pièces pour lui mais il ne voulait pas les rendre accessibles au public. Il voulait seulement sortir les improvisations. Il avait peur de la composition, ce que j’ai trouvé un peu fermé d’esprit. On voit Keiji Haino comme ce musicien libre, mais le Free-Jazz et l’improvisation libre peut également faire office de veste de sécurité. C’est un style que t’apprends et un circuit que t’intègres, on finit par te connaître pour ça et tu finis par y être contraint. Je suis très fier de ces sorties ainsi que celui que j’ai fait avec Tetsuzi Akiyama et elle étaient intéressantes quand je les ai réalisées mais je ne pourrais plus faire ça aujourd’hui. L’improvisation est comme un dessin d’enfant, c’est aussi simple que ça. Je ne pense pas que ça ait de “valeur” aujourd’hui, c’est du “réchauffé”. Le Free-Jazz était une forme d’affranchissement pour son époque mais en jouer aujourd’hui ne serait qu’une copie d’une copie d’une énième copie. C’est “rétro”, c’est du “rétro” à la mode. Je préfère des œuvres comme celles de Merzbow, je trouve ça plus intéressant. J’aime particulièrement ses pièces pour piano à queue et entendre ces œuvres calmes venant d’un artiste de Noise Music. J’adore ça !
Jozef Van Wissem © Alan Kerloc’h - www.mycatisyellow.net © DR
“Je préfère les œuvres comme ceux de Merzbow, je trouve ça plus intéressant. J’adore ses œuvres pour piano à queue et entendre ces œuvres calmes venant d’un artiste noise. C’est excellent, j’adore ça!”
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Interview : Robin Ono
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“Sérieusement, les gars ! Vous avez quelqu’un sur scène qui vous livre son âme. Ce n’est pas rien !” Jozef Van Wissem © Gwendal Le Flem
Tout comme Keiji Haino, c’est un sacré personnage, un artiste reclus et hermétique. Jozef Van Wissem : Je deviens de plus en plus reclus lorsque je ne suis pas en tournée aussi. Je ne sors pas trop. Je sais qu’il y a beaucoup d’artistes qui ne parlent pas à leurs fans et qui rentrent direct à l’hôtel. Je ne fais pas ça, je reste toujours à discuter avec les gens. Je trouve que c’est important mais ça a son prix aussi. Au bout d’un moment je n’ai plus envie de parler à personne. T’as aussi une part de magie quand tu restes seul. Tout partager et être ouvert aux gens a son prix. Parfois j’ai envie de partir dans les bois et disparaître et composer de belles œuvres. Qui sait, peut-être que je le ferai un jour ! (rire)
Quelle place accordez-vous à la tradition et au répertoire traditionnel lorsque vous jouez et que vous composez ? Jozef Van Wissem : Lorsque je commence une période de composition, tout est condensé par le temps. Quand je suis tout seul je joue ces pièces du répertoire classique pour me mettre dans le bain. Ça commence comme ça. Au bout d’un moment je commence à me lasser de la technique et je commence à jouer ma propre musique et à improviser sur les mélodies du répertoire et sur les parties qui me plaisent à ce moment-là. J’ai toujours une œuvre préférée du moment que je répète tout le temps. Il y aura toujours une partie qui m’interpellera et qui se développe éventuellement en une composition. Il peut s’agir de 3 notes ou d’un simple accord.
Elles constituent toujours une base, un point de départ. Jozef Van Wissem : En effet. Il peut également s’agir d’une mélodie qui me vient à l’esprit. L’étape de composition est toujours une période très concentrée où je ne peux faire que ça. Elle a toujours un début et une fin bien définie. C’est très étrange. Ça peut durer entre une semaine et 3 semaines. C’est très clairement défini, tout est écrit dans cette période. Je ne reprends jamais des morceaux issus d’autres périodes ou sessions, ça ne me paraît jamais approprié. L’album est de ce fait un document qui définit la période en question.
Le luth est un instrument inscrit dans une tradition historique prédatant l’ère de la musique enregistrée. Comment abordes-tu la question des concerts par rapport à tes albums studio ? Jozef Van Wissem : Ça n’a rien à voir, ce n’est pas comparable. Un concert est une histoire, un dialogue avec le public. Je fixe le public et ils me fixent, il y a un flux dans les deux sens. Les albums sont des œuvres très personnelles, elles tournent autour d’un concept lié à mes lectures du moment, ce qui donne naissance aux titres et à mes humeurs du moment. Quand je monte sur scène pour jouer, les morceaux deviennent autre chose.
Il n’y a aucune volonté d’émuler l’expérience live sur disque. Jozef Van Wissem : Non, ce n’est pas censé émuler les concerts live du tout. Quand je fais un album je crée ces
grosses compositions avec plein de voix alors que sur scène je joue tout seul. Pour moi l’aspect live ne vient pas que de la musique mais aussi du voyage. C’est très dur de voyager aujourd’hui, notamment à cause des questions de sécurité. Les gens ont tendance à croire que les artistes vivent une vie de rêve, mais c’est l’inverse. Quand t’arrives sur scène t’es déjà complètement en phase à cause du périple que ça a été d’arriver là. J’ai toujours vu le trajet vers la salle comme étant tout aussi important que le concert en lui-même. C’est généralement quand t’arrives complètement stressé qu’ont lieu les meilleurs concerts (rires).
Vous évoquez souvent l’idée de sortir le luth des musées et la réhabiliter dans la musique contemporaine. Vos compositions utilisent notamment la répétition et ses effets sur la perception auditive, un procédé moderne qui échappe encore à la sensibilité du grand public. Comment envisagez vous garder cette part d’expérimentation tout en réhabilitant le luth au grand public ?
Jozef Van Wissem © Alan Kerloc’h - www.mycatisyellow.net
Jozef Van Wissem : Je ne sais pas trop, c’est surtout de la chance. Il y avait une période où je marquais des grands silences à mes concerts. Je jouais un morceau et je marquais des pauses de quelques minutes sans jouer. C’est toujours difficile d’habituer un public à ce genre de chose. J’ai arrêté de le faire mais je pense que je pourrais encore le faire aujourd’hui. D’un autre côté le set doit aussi m’amuser sinon je n’y arriverais pas. J’ai dû jouer plus de mille sets durant ces 8 dernières années. Certains étaient très difficiles d’accès et d’autres étaient plus abordables. C’est encore difficile, ceci étant dit, d’amener les gens à se taire pendant une heure. Malheureusement c’est trop demander parfois. Aux Pays-Bas on a ce phénomène que les Belges appellent “le fléau hollandais”. Les Hollandais ne viennent pas aux concerts pour la musique mais pour parler. J’adore cette expression, je la trouve marrante. La musique est dans un sale état aujourd’hui, c’est très triste. En France les gens sont silencieux et ils considèrent encore la musique comme une chose spéciale, ils la chérissent. T’as quelques pays comme en Europe de l’Est où la musique est encore quelque chose de sacré. J’aime beaucoup jouer dans ces endroits, et je n’ai plus à jouer là où ce n’est plus le cas. Je décline les offres, tout simplement. Je me dis “Sérieusement, les gars ! Vous avez quelqu’un sur scène qui vous livre son âme. Ce n’est pas rien !”.
Qu’est ce qui vous amène à préserver l’aspect religieux ou spirituel de la musique de luth dans vos œuvres ?
Jozef Van Wissem : Je suis passionné par les ouvrages de ces personnages obscurs qui décrivent les voyages de leur âme jusqu’à se rapprocher de Dieu, surtout les femmes. J’adore la force de cette littérature et ses descriptions détaillées. Il doit bien y avoir une raison à ça, je ne sais pas. En ce moment je fais des recherches sur les “Gottesfreunde” (Les Amis de Dieu), un cercle chrétien allemand mystique. J’ai vraiment envie de réaliser un longmétrage sur Henri Suzeau, qui étudiait au sein du cercle de Meister Eckhart. Je commence déjà à nommer certains de mes titres d’après ses ouvrages. Ce serait une sorte de “Gesamtkunstwerk” (Œuvre d’art totale) où je serai réalisateur, acteur et compositeur.
© DR - Land de Babak Jalali
Ça fait un moment que c’est en écriture. Ça serait un film ambiant, je n’ai aucune intention d’en faire un film rapide qui suivrait les conventions Hollywoodiennes. En parlant de ça, je suis en train de composer pour un nouveau film. Le film s‘appelle Land de Babak Jalali. C’est un western moderne qui adopte le point de vue des Indiens d’Amérique. C’est un film qui accorde beaucoup de place au paysage, avec des vrais Amérindiens au casting. Je suis vraiment content de composer pour ce film.
Pour finir : pouvez-vous citer un de vos albums, films et bouquins préférés ? Jozef Van Wissem : Mon album préféré du moment est Kreuzmuzik by Henning Christiansen. Mon bouquin préféré du moment est Life of the Servant d’Henri Suzeau. Mon film préféré du moment est Ordet de Carl Theodor Dreyer.
Retrouvez plus de photos sur http://ladnewg.net/ et sur www.mycatisyellow.net
Un grand merci à Jozef Van Wissem et au staff du Fgo-Barbara (Paris) pour avoir rendu cette interview possible !
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Le second album de Schlaasss ça dÊfonce trop ta schneck comme un dauphin dans un poisson mort, wallah
© THOINE - http://www.toinebehind.com/
www.schlaasss.fr / Youtube : http://urlz.fr/51Ed
Vinyl - DIGIPACK - Digital
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INTERVIEWARTISTE
BAD RELIGION
Greg Graffin ‘Millport’
© DR
Interview : Robin Ono
INFOS : http://www.anti.com/artists/greg-graffin/
Érudit et vétéran du punk rock, Greg Graffin se dresse parmi les figures les plus importantes de la scène Punk Américaine. Avec plus de 37 ans et 18 albums à son effectif, le chanteur et membre fondateur de Bad Religion ne montre aucun signe de relâchement, poursuivant son travail d’universitaire tout en publiant ses livres entre les tournées qui l’emmènent chaque année aux quatre coins du globe. En ce début d’année 2017, ce n’est non pas un nouvel album de Bad Religion que nous présente le chanteur mais un nouvel album solo. Poursuivant dans la veine de son prédécesseur, le dénommé Millport dévoile une nouvelle facette du musicien avec une série de dix titres marqués par l’héritage Americana et Bluegrass des États-Unis.
À quel lieu se réfère Millport ? Greg Graffin : Le titre se réfère à un lieu mythologique. Je voulais choisir un nom de lieu qui sonne très familier mais qu’on ne peut pas situer, un peu comme Springfield. Le choix du nom est aussi délibéré. La plupart des premières villes aux États-Unis se sont formées autour de Moulins (Mills) sur des cours d’eau, ils étaient le cœur industriel de la ville. 300 ans plus tard, l’industrie moderne a largement dépassé ces industries rudimentaires de l’époque et pourtant on trouve encore quelques vestiges de ces anciens moulins et de ces anciennes pratiques. Avec Millport j’essaye de comprendre cette permanence, comment est-ce que ces choses persistent au temps. Je trouve que c’est très pertinent à ma position dans le monde actuel et mon âge. La musique pour lequel je suis connu est à présent un courant culturel mais il y a également eu beaucoup de changements depuis le temps. Je trouve que Millport est une bonne métaphore pour cette forme de permanence.
Est-ce donc un thème qui englobe l’album ? En soi le style de musique même est basé sur ce thème. La roots music comporte cette permanence. Par définition, c’est une musique avec des racines profondes qui se fortifient au fur et à mesure qu’elle se transmet de génération en génération. Cet album, comme le précédent, est basé sur la musique qui m’a été transmise par ma famille.
© DR © DR
“Avec Millport j’essaye de comprendre cette permanence, comment est-ce que ces choses persistent au temps. Je trouve que c’est très pertinent à ma position dans le monde actuel et mon âge.”
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C’est cette forme de tradition qui me semble nécessaire pour créer de la roots music. C’est presque ironique que le style de musique auquel je suis associé, à savoir le punk rock, est assez vieux pour être perçu comme une forme de “roots music”. J’ai pu observer certaines des chansons que j’ai écrites il y a 35 ans se faire transmettre à une nouvelle génération. C’est un phénomène fascinant.
Est-ce que tu avais l’idée de ce son en tête depuis le début de l’écriture ? J’ai écrit 9 des 10 chansons sur Millport, sur Cold as the Clay j’en avais écrit que 5 sur les 11. La production est plus présente sur cet album, Brett Gurewitz avait une idée claire de ce qu’il voulait niveau production. On a pu tester le son sur l’album précédent avec Brett, vu que les titres que j’avais écrits avaient une formation complète. L’album a une plus grosse production que la musique traditionnelle, un peu dans la veine de ce qu’on appelle “country Rock”, popularisé par les enregistrements de Laurel Canyon à Los Angeles dans les années 1970.
Sur le premier titre j’ai noté un type de langage qui ne serait pas passé dans une chanson de Bad Religion, comme “Now the years flew by so swiftly and I can’t say they was kind”. C’est très bien vu. Tout ce que je peux dire c’est que pour ma famille, plus particulièrement du côté de ma mère, cette manière de parler est plutôt répandue. La famille du côté de ma mère vivait dans les contrées rurales d’Indiana et c’est comme ça qu’on parle là-bas (rire). Il y a beaucoup de ça. Sur Echo on the Hill je dis “We’ll soon be warshed in the light of a new day”, parce que du côté de mère on dit “warsh” (rire). Ils ajoutent un “r” à “wash” (laver). T’as sûrement raison, ce genre de langage ne finirait pas sur un album de Bad Religion. Ceci dit, ce sont les éléments stylistiques d’un certain genre qui le font avancer. Les conducteurs d’un certain style de musique se trouvent aussi dans la prononciation.
Tu as sorti 3 albums solo, un à peu près tou les 10 ans depuis 1997. Pourquoi aussi peu d’albums comparés à ta carrière prolifique avec Bad Religion ? C’est surtout une question de temps et de disponibilité. Avec l’âge je ferai peut-être moins de tournées mais pour l’instant on reçoit toujours autant d’offres. C’est compliqué, d’autant plus que mon travail universitaire et les livres que j’écris m’accordent encore moins de temps pour faire des albums solo. J’espère que j’aurais encore l’occasion d’en faire, j’en tire beaucoup de plaisir.
Un des termes les plus récurrents dans l’actualité est celle du “politiquement correct”. Alors que les musiciens dans le punk jouent sur cette ligne avec leurs textes, tes paroles ont toujours gardé de la distance à l’égard de discours polémistes et provocants. Est-ce une forme de rejet délibéré ou plutôt le résultat de ton style naturel d’écriture ? Je dirais que c’est un peu des deux. Ton observation est juste. Nous n’avons jamais été ouvertement politiquement engagés. Il faudrait que tu parles à mon co-auteur Brett Gurewitz pour une réponse plus exhaustive, on a nos divergences sur la question. Ceci dit, je pense pouvoir affirmer en mon nom ainsi qu’au sien que la caractérisation de Bad Religion en tant que groupe “politique” est erronée. On s’est toujours intéressés à des sujets plus philosophiques, des questions intemporelles qui dépassent beaucoup d’évènements politiques. Ce qui est populaire à une certaine période ne doit pas entrer en jeu dans ces questions plus larges. Si tu sors une chanson qui s’appelle “Fuck Trump”, ça va sonner un peu con dans 5 ans quand il sera destitué ou je ne sais quoi (rire). Ça ne fera pas de superbe morceau intemporel. Je crois qu’on s’est toujours engagés à creuser sur ces questions, pour écrire des chansons qui pourront être transmises à travers les générations, des contributions dans la culture musicale punk.
Est-ce que tu crois au “politiquement correct” ? Il y a une différence entre “politiquement correct” et “philosophiquement correct”, tu vois ce que je veux dire ? Je me suis toujours tenu à l’écart du concept du “politiquement correct”. En d’autres termes, on ne traite pas les femmes
avec respect parce que c’est “politiquement correct”, on les respecte parce qu’il y a des raisons de base philosophique et éthique derrière. Ça n’a rien à voir avec la politique. Je suis toujours confus quand on me parle du “politiquement correct”.
Tu fais usage assez rarement de termes vulgaires dans tes paroles. Le dernier album de Bad Religion avait un morceau qui s’appelle Fuck You, (qui existe également en version “clean”). Quel est ton regard sur ton usage de la vulgarité dans tes textes ? Je pense que quand j’étais plus jeune c’était moins toléré. J’étais juste un gamin qui voulait faire le rebelle, il y avait certainement un peu de ça. Sur le dernier album, Fuck You était un bon exemple où on adressait les réalités philosophiques derrière le slogan “Fuck you”. La chanson questionne la validité de l’expression et fait remarquer son usage un peu pavlovien. On s’est servi des sciences pour expliquer pourquoi “Fuck You” est un atout précieux dans notre culture. D’un autre côté, ça peut aussi te causer beaucoup d’ennuis (rire).
Pour rapidement évoquer l’actualité récente des États-Unis : qu’as-tu retiré des évènements récents depuis novembre dernier ? C’est terrible pour la démocratie, mais il y a eu des précurseurs à ces évènements depuis des années.
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Greg Graffin © Anthony St. James
“le punk rock, est assez vieux pour être perçu comme une forme de “roots music”
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Greg Graffin © Rennie Solis
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On ne peut pas juste pointer ces évènements tout cas du doigt, il y avait déjà énormément de problèmes liés au manque d’éducation du peuple, la manière dont ils reçoivent leurs infos et leur paresse d’apprentissage. J’ai toujours été un grand défenseur de l’éducation et je pense qu’on en a besoin maintenant plus que jamais, y compris les sciences naturelles. Les sciences naturelles nous forment à tout vérifier. Il n’y a aucune vérité s’il n’y a pas de preuves et de recherches scientifiques sérieuses derrière. Aujourd’hui ce qui passe pour des vérités semble passer par des statuts Facebook. Il y a très peu de regards approfondis. Bien évidemment, ce n’est pas le seul problème mais c’est un obstacle très sérieux pour une société démocratique.
On entend sur ces réseaux sociaux que la présidence de Donald Trump aura au moins le mérite de redonner de la vie à la “protest music” et au punk. C’est un concept ridicule. Comme j’ai dit : si une forme de “roots music” a une quelconque valeur, c’est grâce à ses traditions. Peu importe l’administration politique au pouvoir. Les racines transcendent les décennies, une présidence dure 4 ans. J’y crois, ça sonne comme le propos d’un expert en marketing qui essaye de faire grimper ses ventes.
« Aujourd’hui ce qui passe pour des vérités semble passer par des statuts Facebook. Il y a très peu de regards approfondis. Bien évidemment, ce n’est pas le seul problème mais c’est un obstacle très sérieux pour une société démocratique. »
Pour finir : est-ce que tu peux me citer un de tes albums, films et bouquins préférés ? Je vais citer Et quelquefois j’ai comme une grande idée (Sometimes a Great Notion) de Ken Kesey. C’est un bouquin et un film. Pour l’album je vais choisir Original Folkways recordings de Doc Watson & Clarence Ashley.
INTERVIEW DE Robin Ono
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« Nos compétences musicales étaient assez limitées et nous n’envisagions pas du tout de créer un groupe. Le déclic s’est produit en 78, à l’écoute de la version de « Satisfaction » par The Residents »
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PTÔSE
Vers d’oreille
JOURNALISTE : Maxime Lachaud INFORMATIONS : http://urlz.fr/523s
© Jef Benech
C’est l’histoire de ces adorateurs d’insectes dégoulinants et d’électronique vintage Niort, 1979. Deux frères, Benoit et Lionel Jarlan, autoproduisent leur premier disque, Boule (Viens Ici !). Contre toute attente, cette chanson électro-canine influencée par les délires grotesques des Residents devient vite un hymne repris dans le monde entier. Les années suivantes, le groupe enchaînera les productions, notamment sur leur label PPP, souvent sous la forme d’emballages inventifs, les cassettes pouvant se dissimuler à l’intérieur de paquets de viande sous vide ou de boîtes de médicaments. Devenus incontournables du réseau DIY français, ils finiront leur carrière par deux vinyles publiés sur le label néerlandais Eksakt et réédités en 2013 par Infrastition : The Swoop (1984) et Face de Crabe (1986). Cette existence, au final, assez brève, marquera durablement les esprits. Un album hommage paraît en 2004 sur Gazul, Ignobles Vermines : A Tribute to Ptôse, des dizaines de formations les ont repris et l’émission de radio culte La Nuit des Sauriens porte le titre d’un de leurs morceaux depuis plus de trente ans. Nous nous sommes entretenus avec Lionel Jarlan afin de revenir sur l’histoire de ces adorateurs d’insectes dégoulinants et d’électronique vintage.
Ptôse a publié deux cassettes sur leur label PPP actif entre 1979 et 1985 où ils ont rassemblé le gratin de la scène cassette de l’époque pour reprendre leur tube “Boule (viens ici !)”. On y retrouve Anne Gillis, Mark Lane, Die Form, Renaldo & the Loaf, Half Japanese ou encore Van Kaye & Ignit. ©DR
Alors, si je ne me trompe pas, tout a commencé à Niort à la fin des années 70. Pouvez-vous revenir sur le contexte dans lequel Ptôse est né ? Lionel Jarlan : D’abord nourris aux classiques comme les Stones, les Beatles ou les Pink Floyd et autres Spotnicks, puis initiés aux audaces du Velvet Underground ou de Brian Eno, nous étions devenus au milieu des années 70 de gros consommateurs de vinyles indépendants, généralement achetés par correspondance. Nous dépensions nos économies à découvrir un peu tout ce qui sortait de nouveau, hors des grands labels. Nous avons accueilli avec intérêt la vague Punk, sa démarche provocatrice et sa musique brute, éloignée de toute virtuosité… mais nos préférences allaient aux Wire, Talking Heads, Modern Lovers ou Pere Ubu. Nos compétences musicales étaient assez limitées et nous n’envisagions pas du tout de créer un groupe. Le déclic s’est produit en 78, à l’écoute de la version de « Satisfaction » par The Residents, achetée par hasard avec un paquet
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En 1980, le 45 tours “Women in the Moon” de Ptôse accompagne le premier numéro de la revue Isolation Intellectuelle lancée par le label mythique de Jean-Pierre Turmel, Sordide Sentimental (Throbbing Gristle, Joy Division, Tuxedomoon, Psychic TV...)
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« Malheureusement, en ces temps préinternet, nous ignorions l’existence du risque psychologique viral identifié en 76 par Richard Dawkins… » INTERVIEW DE Maxime Lachaud
Boule (viens ici !) de singles chez Rough Trade. D’un seul coup, nous avons eu envie de nous y mettre et nous avons bricolé tous les deux pendant plusieurs mois, sans guitare électrique, sans synthé et sans studio, avec deux magnétophones à cassettes, des caisses en carton, des jouets et de vieux instruments acoustiques… Notre objectif était de faire simplement une sorte d’objet musical, dans l’esprit du mail art, pour l’envoyer comme carte de vœux aux Residents… À notre grande surprise un nommé Hardy Fox, de la Cryptic Corporation, nous a gentiment remerciés en nous encourageant à continuer. Ces farceurs se sont même amusés à en infliger l’écoute à un journaliste d’Actuel venu les interviewer à San Francisco, à tel point qu’il mentionna la chose dans son article ! Après un accueil aussi prometteur, nous avons décidé de poursuivre nos expériences et d’autoproduire en 79 un mini vinyle (pressé à une douzaine
d’exemplaires et offert à des amis) suivi par une cassette, tirée à au moins une centaine d’exemplaires, pour faire du troc avec des labels indépendants.
Combien de musiciens se cachaient derrière le patronyme Ptôse ? Aviez-vous déjà pratiqué la musique auparavant ? Pendant la période « bricolage », nous étions deux : Benoit, qui avait déjà à l’époque des bases musicales, et moi même qui n’en avait aucune. Nous étions très ouverts aux contributions d’amis comme Ericka Irganon et Pascal Elineau (ZZe), qui devint rapidement le troisième membre permanent.
Le choix de l’électronique et de travailler avec des bandes magnétiques comme base à votre sens de la pop song était-il plus un manifeste ou lié à de simples contraintes techniques ? C’était un peu les deux, car nous aurions pu nous affranchir de ces contraintes rapidement, mais nous avons pris beaucoup de plaisir à jouer avec elles avant d’évoluer vers une formation plus standard, en apparence tout du moins.
© Jef Benech
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Le premier disque est un vinyle qui sort en 1979, sur lequel on trouve votre hymne « Boule (viens ici !) ». On dirait que c’est ce morceau qui a véritablement lancé le projet Ptôse et vous avez vous-même fait en sorte de nourrir un culte autour de cette chanson, la reprenant de manière presque obligatoire sur chacune de vos parutions. Le morceau a également fait l’objet de nombreuses reprises par des groupes prestigieux (Renaldo & the Loaf, DDAA, Legendary Pink Dots, The Grief, jusqu’aux texans d’Oblong Boys), dont une cassette sortie par vous-même. « Boule » c’est pour vous un morceau ultra-mégalo, une boutade géniale, votre étendard et votre fardeau ? Pouvez-vous revenir sur sa genèse ? En complément de nos expérimentations minimalistes, nous avons très vite eu envie de créer un morceau qui serait un condensé du vide inhérent aux hits pops, tout en fonctionnant comme un puissant « Orhwurm » (un ver d’oreille). Après différents tâtonnements pour trouver les paroles les plus simples et les plus bêtes possible, puis atteindre le minimalisme musical visé et nous assurer, par des tests sur des volontaires, de l’effet persistant des impacts auditifs : « Boule (viens ici !) » était né. Malheureusement, en ces temps pré-internet, nous ignorions l’existence du risque psychologique viral identifié en 76 par Richard Dawkins… Notre exposition prolongée lors du processus de fabrication de ce « même » musical a eu des conséquences lourdes sur notre intégrité créative. Non seulement elle nous a entraînés à reproduire à l’infini cette chanson infernale, mais aussi à pousser d’autres à l’interpréter, pour favoriser sa diffusion par tous les moyens ! © Mark Beyer
“Ironiques et immatures (au sens Gombrowiczien), c’est comme cela que nous percevions nos productions” Le choix d’un nom de groupe aussi fort était-il lié à l’esthétique punk/ post-punk et son sens de la provocation ? Le choix du nom était effectivement un indice de notre volonté de provoquer, mais à l’époque il ne signifiait rien pour la majorité des gens, alors qu’aujourd’hui une recherche sur Internet ramène instantanément beaucoup d’images !
D’emblée, vous avez opté pour une approche minimale du son, vous avez laissé la technique de côté et une grande part de votre travail se rapproche des musiques nouvelles ou expérimentales (la cassette Handmade Electronics). Cela était-il aussi dû à votre manière de travailler, entre frères, en home studio, avec une attitude très DIY ? Ptôse est un groupe profondément influencé par l’esprit DIY, c’est cela qui nous a d’ailleurs poussés à publier nous-même notre musique, à la diffuser par des réseaux parallèles et à réaliser des compilations des artistes que nous appréciions, au lieu de chercher à être pris en charge par une maison de disques.
Dès 1980, Ptôse s’associe à PPP (Ptôse Production Présente) et vous vous lancez pleinement dans l’art de la cassette, avec des packagings géniaux (Moxisylyte N dans une boîte de médicaments, AG 5 dans un emballage d’entrecôte, etc.). Pouvez-vous revenir sur les motivations qui vous ont amenés à vous lancer dans le mail art et tous ces emballages étranges ? Étiez-vous proches de l’approche plastique du son que développaient DDAA et Illusion Production par exemple ? Outre l’accessibilité de la duplication, l’intérêt du format cassette pour nous était sa capacité à s’intégrer facilement dans des packagings improbables, inaccessibles au vinyle. À l’époque, la musique était un produit physique à diffusion lente et la création de ces objets était un exercice très agréable, tout comme le plaisir de les découvrir pour ceux qui se donnaient la peine de les acheter. Nous avons très tôt échangé avec DDAA & IP dont nous aimons beaucoup la démarche artistique même si elle était plus formalisée et résolument esthétique, comparée à la nôtre, ironique et brouillonne.
Dans ces réseaux cassettes, les sonorités étaient souvent minimales, industrielles et expérimentales, mais Ptôse a toujours été bien plus accessible. Comment définissiez-vous votre musique ? Nous avons toujours cherché à faire simple et à nous amuser tout en conservant une apparence de sérieux. Naturellement, notre approche en live était souvent moins maîtrisée et plus expérimentale que la musique réalisée en studio… Ironiques et immatures (au sens Gombrowiczien), c’est comme cela que nous percevions nos productions.
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« Plutôt qu’une approche collective, il s’agissait bien déjà d’un fonctionnement en réseau, chacun gardant son caractère individuel, mais contribuant à la diffusion des autres, le tout généralement sans but lucratif. » INTERVIEW DE Maxime Lachaud
©DR
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Dès votre premier disque, vous avez repris « Smelly Tongues » des Residents, comme si ce morceau à lui seul avait inventé un genre. Quelle était votre relation aux Residents ? Nous avions découvert le single « Smelly Tongues » quelques semaines après celui de « Satisfaction » et le côté pop apporté à cette version par Snakefinger nous a vraiment plu. Cette reprise, systématique dans nos premiers concerts, était un signe de reconnaissance de la filiation… L’influence des Residents a été forte sur notre manière de jouer avec des voix grotesques à nos débuts, mais nous avons évolué. La direction que nous envisagions de prendre avant d’arrêter nous excitait beaucoup, mais s’est avérée un peu complexe… Il s’agissait de trouver un « interprète » différent par morceau, en les choisissant comme des instruments en fonction du son de leur voix ou de leur type de personnalité. Malheureusement, les heureux élus n’étaient généralement pas très motivés par cette approche… Nous devions sans doute être perçus comme des manipulateurs.
Et comment réagissez-vous quand des groupes encore aujourd’hui vous citent comme une influence majeure (il y avait eu par exemple la compilation Ignoble Vermine chez Gazul ou toute la scène zolo d’Austin qui s’inspire de votre travail) ? * Une première version de cette interview était parue en septembre/octobre 2013 dans le numéro #17 d’Obsküre Magazine.
Nous ne nous voyons pas comme des influenceurs mais plutôt comme des provocateurs qui suscitent parfois encore des réactions. Ceci dit, écouter d’autres groupes revisiter nos morceaux est très rafraîchissant, d’autant plus qu’ils sont généralement de bien meilleurs musiciens que nous et plus inventifs. Philippe Perreaudin de Palo Alto a fait preuve d’une ténacité incroyable pour nous convaincre de rééditer nos cassettes en CD, et la compilation qu’il a coordonnée a été une délicieuse surprise. Du coup, nous sommes au bord de la rechute et récemment nous avons discuté d’un projet pour le Web : « The Boule Shrine » une collection ouverte et collaborative d’interprétations de « Boule (viens ici !) »… Mais cela restera peut-être un projet inachevé.
Il y avait aussi une dimension ethnographique dans votre musique et vos productions. Vous sortiez beaucoup de formations japonaises sur vos cassettes, mais aussi vous vous inspiriez des rythmes et chants traditionnels indiens ou papous (« The Big Chief »). Pouvez-vous revenir là-dessus ? Nous avons effectivement beaucoup écouté d’enregistrements ethnographiques, surtout pour les voix extraordinaires qu’on y trouve. C’est Ericka Irganon qui les étudiait et nous poussait à l’occasion à les retravailler… Par contre, cela nous gênait de les singer et nous avons préféré
“Les comics de Mark Beyer nous semblaient très proches des micros histoires qui sous-tendaient une bonne partie de notre musique” recycler au second degré des caricatures occidentales de ces « musiques du monde » comme dans « The Big Chief » ou « In Your Bush ».
Quant à votre obsession pour les limaces, les souris, les sauriens, les crabes, les insectes dégoulinants et abjects, cela venait d’où ? Ce thème de première importance nous semblait négligé à l’époque, il fallait bien que quelqu’un s’en saisisse… Nous avons beaucoup emprunté à la littérature fantastique ou aux films de science-fiction et d’horreur des années 30 à 50 comme White Zombie, Them !, The Blob ou Invasion of the Body Snatchers, mais le plus souvent sans citations directes.
La discographie de Ptôse renvoie aussi à la vitalité de la scène indépendante française au début des années 80. Vous avez par exemple collaboré avec des labels comme Sordide Sentimental et AYAA, puis participé à des compilations pour de nombreux labels internationaux (Tooth & Nail pour Trax, etc.). Diriez-vous qu’il y avait un vrai état d’esprit collectif dans ces échanges ? Pour nos lecteurs habitués aujourd’hui à Internet, pensez-vous qu’il y avait des liens entre ce que vous développiez à l’époque et ce médium qui a profondément changé notre rapport à la musique aujourd’hui ? Plutôt qu’une approche collective, il s’agissait bien déjà d’un fonctionnement en réseau, chacun gardant son caractère individuel, mais contribuant à la diffusion des autres, le tout généralement sans but lucratif. Cela fonctionnait bien, mais lentement, on était loin de la fulgurance d’Internet.
On ne pourrait revenir sur l’intégralité de vos enregistrements, mais Ignobles Limaces, The Swoop et Face de Crabe ont représenté, en quelque sorte, l’apogée du groupe. De plus grosses productions. De plus gros tirages. Il semble étonnant que vous ayez arrêté après Face de Crabe, qui était sorti sur le label hollandais culte Eksakt et qui justement aurait pu vous ouvrir à un plus large public. Est-ce que vous sentiez que vous étiez arrivés à la fin de quelque chose ?
En fait, le passage à une distribution indirecte, par la médiation du label, était un système trop lourd pour nous. Cela a fait disparaître le plaisir que nous trouvions dans les échanges par correspondance avec les acheteurs de nos cassettes… En plus, notre projet de vocalistes multiples s’avérait un montage compliqué et nous avons donc choisi d’arrêter plutôt que de commencer à nous ennuyer. Si la musique numérique et le web étaient arrivés plus tôt, nous aurions certainement saisi cette opportunité, mais nous étions au milieu des années 80… 10 ans trop tôt !
Nous avons été marqués enfants par une Silly Symphony macabre de Ub Iwerks et Walt Disney, datant des années 30 et intitulée « The Skeleton Dance ». La musique de Carl W. Stalling était une interprétation délirante de « La Marche des Nains » de Edvard Grieg.
Quant à l’aspect visuel, il est également très important. Comme on l’a vu, vos cassettes avaient des emballages très singuliers et vous avez notamment travaillé avec le graphiste Mark Beyer. Il existe aussi une vidéo que l’on peut trouver sur RVB Transfert d’« Écraser la vermine » où l’on vous voit avec des bandes sur la tête, des chapeaux et des imperméables noirs. Pouvez-vous revenir sur ce tournage et ces collaborations ?
Le grotesque est une composante majeure de notre univers musical et notre humour, assez pince-sans-rire, est souvent basé sur le décalage, parfois peu perceptible, entre certains éléments musicaux ou extra musicaux comme les paroles et le titre. http://vimeo. com/63789172
Les comics de Mark Beyer nous semblaient très proches des micros histoires qui sous-tendaient une bonne partie de notre musique et nous avions été séduits par cette superbe peinture sur verre qui a servi pour la couverture d’Ignobles Limaces. Quant à la vidéo « Écraser la vermine », c’est une réalisation de FR3 Poitou-Charentes improvisée à la suite d’un festival Rock dans lequel nous nous étions subrepticement infiltrés. Le reportage qui la précédait vaut le détour, il était intitulé « Impact du rock sur le public » et peut se déguster sur le site de l’INA ou sur YouTube. http://www.youtube.com/watch?v=7lv4BzIL6_k
Pour finir, comment regardezvous avec le recul l’expérience Ptôse ? Avez-vous continué la musique ou les arts visuels par la suite ou êtes-vous partis dans d’autres domaines ? Quelles sont vos réactions face à ces rééditions de vos travaux ces derniers temps ?
Lors de vos concerts, étiez-vous aussi très portés sur les costumes, la performance ? Non, pas du tout de costumes, ou alors des tenues en décalage avec le lieu et le public, nous portions par exemple des chemises Lacoste lorsque nous partagions l’affiche avec des punks ou des performers industriels et nous utilisions une Mobylette comme instrument et un GSSA (Générateur de Sons Semi-Aléatoires) lorsqu’il s’agissait d’un environnement rock. Nous sommes de grands timides et donc sur scène nous étions à la fois un peu coincés et occasionnellement agressifs.
Il reste aussi un aspect majeur que l’on n’a pas abordé, c’est l’humour, qui chez vous se teinte de grotesque et de carnavalesque, pouvant même se faire parfois inquiétant (les morceaux « Face de Crabe », « Like a Mouse » ou « La nuit des sauriens »). L’humour selon Ptôse, c’était quoi ?
Retrouvez une version de cette interview dans le numéro #17 d’Obsküre : http://urlz.fr/52Ph
L’aventure de Ptôse était très motivante mais il faut savoir s’arrêter avant de tourner en rond… Ptôse devait finir inachevé. Nous sommes toujours de grands consommateurs de musique, mais seul l’un d’entre nous a continué dans cette voie et compose aujourd’hui des musiques de films. Malgré tout, nous n’avons jamais cessé d’assister Ericka Irganon dans ses travaux, mais comme elle n’a rien publié de nouveau depuis près de trente ans, qui sait quand elle daignera les rendre public ?
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Maxime Lachaud JANV./FEV./MARS 2017
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REGARDARTISTE
GUILLAUME PERRET :
Wild Wild JAZZ
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©Emile Holba
le Mad Max Jazz, pays de landes désolées
©Emile Holba
S’il est un avis de tornade qui puisse être considéré comme une bonne nouvelle, c’est bien un appel d’air à l’intérieur du saxophone de Guillaume Perret. Jaillissant des lèvres pincées de l’artiste, le souffle suit son chemin de traverse modulé par la pression des doigts de son initiateur tout en se ménageant une sortie ahurissante. Que se passe-t-il donc à l’intérieur du sillon de cuivre pour expliquer une déflagration aussi monumentale, un séisme aérien qui s’étend aujourd’hui sur quatre albums ? Entre son point de départ et son arrivée fracassante, no time pour la pudeur : Perret « strip » nos attentes du saxophone et « tease » nos jeunes espoirs qu’il comble dès les premiers braillements de son ténor. Aboiements et atermoiements sur un vibrato vrombissant décrivent l’entrée dans un nouveau genre de musique improvisée ! Encore plus abrupte, aride, acide,
gonflé que le free-jazz, Guillaume Perret propulse dans le monde sonique une circulation d’air instable, un triomphe euphorique de vents contraires rendus fous par leur passage intra-instrument et qui, dans la traversée des corps alentours, trouvent un deuxième souffle de destruction. À la frontière ultime du panel de notes entendues, le free-jazz se love dans une peau hérissée d’écailles métalliques. Le cerveau frappé par la mutation pourra lui donner un nouveau nom : le Wild Wild Jazz, le Mad Max Jazz, pays de landes désolées, steppes hostiles encore méconnus des hommes et venant s’inviter dans leur quotidien musical par l’intermédiaire d’un climax assourdissant. Coltrane semble se situer dans les parages : peut-on éviter l’un des piliers du jazz improvisé ? Pour autant, Perret ne s’y cogne pas dessus. La puissance filamenteuse de son sax ténor se confond en suramplifications électriques et va chercher des équivalences inattendues vers les guitares spatiales d’Empty Spaces de Pink Floyd. Vers le jeu dérangé de Marc Ribot lors de son célèbre Ceramic Dog. Le parallèle n’est pas anodin étant donné que le premier album de Perret a été produit par l’un des compagnons de route de Ribot, John Zorn. Qui plus est, sur ses trois premiers opus : Guillaume Perret and The Electric Epic, Doors, Open Me, l’artiste est magnifiquement secondé par un groupe s’inscrivant dans la lignée directe des amoureux de la musique expérimentale : le fameux The Electric Epic cité dans le premier album éponyme.
Plus d’informations sur Guillaume Perret : http://guillaume-perret.fr/
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“Aboiements et atermoiements sur un vibrato vrombissant décrivent l’entrée dans un nouveau genre de musique improvisée ! Encore plus abrupte, aride, acide, gonflé que le free jazz…” ARTICLE de Jonathan Allirand
IL A DIT : « Le jazz a de nombreuses couleurs, et ne saurait se limiter à un style en particulier. C’est un grand bac à sable ou tout est possible. »
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…transformer sa prose saxophonique en carrefour de collisions Par conséquent, cette formation ne recule pas devant la multiplication des références génériques comme en témoignent le reggae de Ponk et la funk dézinguée de Circe. Expérimentateur, chercheur, Perret l’est lui-même puisque son originalité sonore provient d’une de ses trouvailles : équiper son saxophone électrique de mixers audio et de micros reliés à des loopers, à des amplificateurs de basses ainsi qu’à une série de pédales à effets. Astuce technologique lui permettant de jouer boucles rythmiques et mélodies, de les entrecroiser, de les démêler afin de transformer sa prose saxophonique en carrefour de collisions.
Stridence hystérique, cahotements gutturaux, Shoebox et Kakoum reprennent ce martèlement anarchiquement mélodique au cœur duquel l’instrument crache sa réverbération plastronnante tel un primate roi tambourinant son torse altier. Les fragments en échos se heurtent aux pans naissants des cycles à venir. Les cycles se disloquent puis se reforment sur d’autres boucles vives et conquérantes. Même les ballades comme Ethiopic Vertigo, Irma’s Room, Opening et Chamo semblent étudier pour capturer l’étincelle d’écoute dans des nœuds de mailles dédoublées et les profondeurs de vertiges saturés.
Alors que le combo psychédélique fait tressaillir la moindre parcelle de ferraille contenue dans leurs cordes et peaux, Guillaume Perret fait monstre du coffre colossal de son saxophone arrangé. Un soupir versé dans le bec dégage alors une texture ultra-épaisse, une densité hyper membraneuse qui embrasse le squelette de l’auditeur et agite ce lego d’os sous l’enveloppe à vif de son cuir charnel. Massacra est l’exemple même d’un heavy guitaristique brouillon dont le désordre impérial est décuplé, célébré et salué par les voix hurlantes du cuivre ténor.
Le dernier album en date est une expérience solo de Perret. Ce qu’il laissait éclater dans ses collaborations voit le jour dans sa plus grande lueur : son aptitude à réunir une diversité d’instruments rythmiques et mélodiques en ne disposant que de son saxophone arrangé comme base de composition. Ses notes repartent à l’aventure et, grâce à sa maestria, paraissent riches d’une formation musicale nombreuse alors qu’il est le seul et unique membre de son orchestre. Même s’il revient à des références plus classiques de Big Band (She’s got rhythm, Susu) et qu’il remplace la hargne de son es-
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©Emile Holba ©Emile Holba
“La technique inventive de Perret apporte des fondements solides à un nouveau type de jazz, ce qui lui permet d’enrichir, de façon singulière, la profusion du genre”
sence brute par des ambiances immersives (Cosmonaut), il ne perd en rien la finesse de ses volutes spiralées dont les extraordinaires InsideSong, Birth of Aphrodite et Heavy Dance sont des exemples stupéfiants. La technique inventive de Perret apporte des fondements solides à un nouveau type de jazz, ce qui lui permet d’enrichir, de façon singulière, la profusion du genre. Déjà attendu à la fin de sa dernière collaboration avec The Electric Epic, il ne sera que mieux plébiscité après une expérience solo aussi convaincante. D’inspiration multiculturelle, héritier porteur d’un cosmopolitisme musical, il semble être également un pionnier aventureux, futur socle créatif de générations à venir.
FREE (Compagnie Electric Epic) Dans son nouvel album « Free », Guillaume Perret nous dévoile l’essence de sa musique.
Plus d’informations sur Guillaume Perret : http://guillaume-perret.fr/
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https://tropare.bandcamp.com/
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CHRONIQUES ALBUMS & Singles
NOTRE COUP
DE Coeur “la nuit SE LèVE”
AL’TARBA le grand retour
Al’Tarba, un beatmaker qui s’écoute, se conte et se raconte. En crew (avec Droogz Brigade) comme en solo, le toulousain est de ceux qui s’étendent en bon, en barge et surtout en travers. De l’arbre du hip hop, il en constitue l’une des branches les plus tordues. Tout comme l’est son imaginaire sonore et visuel empli de pop culture gore imbibée d’hémoglobine. Son album à venir, La Nuit se Lève, n’est pas pour nous rassurer sur la haute teneur en violence poétique de son subconscient saturé. À nos risques et périls, peut-être… pour notre plus grand plaisir, définitivement ! Jonathan Allirand
Pour lire un QR Code, il suffit de télécharger une application de lecture de QR Codes. D’ouvrir l’application et viser le QR Code avec l’appareil photo de son téléphone mobile et l’application lance l’écoute de l’album.
ALBUMS
Date de sortie : 03/03/2017 Durée : 00:47:25 Nationalité : FR Styles : CREEP HOP HIP-HOP / ELECTRO RAP ELECTRONICA
AL’TARBA
MONDKOPF
Alfie Ryner
LA NUIT SE lève (I.O.T. RECORDS / Atypeek MUSIC)
They fall but you don’t (In Paradisum)
WHAT’S WRONG
Quand au premier plan apparaît un type encapuchonné affublé d’une batte et d’un veston aux couleurs d’Orange Mécanique… Quand ce même type se dirige vers une ville surmontée d’une créature nanardesque…On est en droit de penser, dès la pochette d’album, que le propos ne va pas manquer d’animation. À plus forte raison si le titre de l’opus est La Nuit se Lève et que l’auteur en est Al’Tarba. La nuit sera-t-elle aussi agitée qu’un soir de purge dans American Nightmare ?
Actif depuis plus de dix ans, Paul Régimbeau a toujours eu une approche ouverte et quelque peu mutante de la musique électronique, aimant à se renouveler et à essayer sans cesse de nouvelles choses. Le virage est plus grand que jamais avec ce cinquième album paru le 27 février, de loin son meilleur. Exit les influences IDM, techno et electro, le compositeur en revient à une forme épurée, instinctive et minimale dans son utilisation des synthétiseurs. Un ambient noir cosmique quand il n’est pas franchement inquiétant et funèbre. Les six pièces sonores ont été composées comme un requiem divisé en cinq actes, puis un finale. Tout a commencé la nuit du 13 novembre 2015, lors des attentats à Paris. Démuni face à l’horreur, le musicien se met à improviser cette nuit même pour explorer son ressenti, alors que de nouvelles machines stagnaient chez lui depuis des mois. De cette session est né le premier morceau du disque, une lente procession spectrale très mélancolique et très chargée en émotions. Tout le reste a été composé ainsi, dans l’improvisation nocturne et les expérimentations avec le matériau électronique, un peu comme un journal intime, une musique brute conditionnée par la lune et le silence. Les voix sont fantomatiques et éthérées, les synthés souvent glacés et climatiques. Chaque titre tourne autour de motifs mélodiques lancinants, des boucles enveloppantes qui évoquent des paysages mentaux. Les rythmes ont totalement disparu pour laisser place à ces plages hantées par la mort. Le deuil et l’immensité, soulignés par l’artwork du disque. Une immersion totale dans les sentiments et la beauté. À écouter très fort.
(les productions du vendredi/ Atypeek)
Il faudra composer avec une menace aux multiples visages se déclinant sur des strates de beats hip hop-electronica aussi mélodiques qu’inquiétants et intrigants : Welcome to Fear City, chœurs entêtants de Ripped Eye, scratchs acharnés de Starship Loopers. La lumière incertaine qui les baigne se situe entre l’éclat éteint d’une lucarne lunaire et un appel vain au soleil. La nuit résonne de toute son explosion gore (Now More Fighting), de toute sa tristesse rongeuse (On the Prowl) et de tout son espoir sous-jacent : « La nuit, le ridicule devient audace » sur La Nuit se Lève. Al’Tarba ne s’embourbe pas dans un format caricatural grindhouse. Plutôt que de se concentrer sur un spectacle de fureur, Il n’hésite pas à revenir posément aux racines Soul du rap afin d’explorer le mystère de cette Nuit : She’s Endorphin’s. La Nuit se Lève, album cinématographique par essence, laisse alors en suspens deux questions fécondes qui correspondent respectivement à un préquel et à une suite à l’opus présent : Comment le jour s’est éteint ? Que se passe-t-il après la nuit ? À suivre sur platine ou sur écran !
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53o4 MONDKOPF ©DR
AL’TARBA ©DR AL’Tarba ©DR
Date de sortie : 31/10/2016 Durée : 42 min Nationalité : FR Styles : Jazz / Noise / EXPERIMENTAL / JAZZ ROCK
Date de sortie : 27/02/2017 Durée : 40 min Nationalité : FR Styles : experimental Electro /Ambiant
Du morceau spoken word sombre et déconcertant qui ouvre What’s Wrong s’annonce le ton de l’album. Caractérisé comme du “Jazz Trash” par le quartet Toulousain, c’est une musique schizophrénique que délivre Alfie Ryner sur ce quatrième opus, un album qui captive et qui hante avec son atmosphère onirique et déstabilisante de film Neo-noir surréaliste. Dans la lignée de King Crimson et Mahavishnu Orchestra, le groupe nous livre un cocktail expérimental de sonorités mêlant modernisme et ambiance vintage aux couleurs du rock progressif, de la musique ambiante, du jazz ou encore du métal. Avec ses rythmes saccadés et ses tirades extatiques et exaltants de saxophone, l’aptitude technique du groupe n’est plus à prouver. Ceci dit attention ; sans pour autant être timide sur ses influences, What’s Wrong est un album qui réconcilie le signifié avec le signifiant du vocabulaire Jazz, s’écartant de toute démonstration superflue de virtuosité. La place centrale se voit ici accordée au ton et à la narration, portée par un rythme maîtrisé et une mise en scène cinématique. Dissonances, voix chuchotées déconcertantes, atmosphères tendues et rebondissements à contretemps viennent désorienter l’auditeur immergé dans cet étrange univers imprévisible. Les titres respirent au rythme des montées et retombées de tension et maintiennent un terrible suspense chez l’auditeur, les crescendos aboutissant sur des explosions extatiques et majestueuses comme sur Some Black ou encore I am the Mountain. Vous l’aurez compris, What’s Wrong est un album qui maîtrise son discours et son univers qui prend un malin plaisir à nous alièner sans jamais nous perdre. Majestueux et ténébreux, les 7 titres qui composent What’s Wrong dépeignent avec grande dextérité un univers riche et nous offrent une experience aussi captivante que déroutante.
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✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53nZ
✎ Robin Ono http://urlz.fr/53o9 ATYPEEK MAG #02
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Date de sortie : 07/04/2017 Nationalité : DE Styles : Electronic / Industrial / Darkwave
Mank Down Thred EP (Atypeek Music)
TE/DIS Interrogation Gloom (Galakthorrö)
Mal être diffus, mal aise palpable. A se sentir étrange dans son corps et étranger à son propre être. Au sein de Thred, l’EP de Mank Down, le trip hop est moins une envolée légère au cœur d’un monde aérien qu’une déconnexion post-traumatique, trouée magistrale dans un électroencéphalogramme plat. Le duo vocal clair-grave offre aux curieux de son monde malade un bain de basses acides survolées par une langueur rocailleuse. Les voix développent dans la lenteur leurs déclamations traînantes. Le tempo de flow est établi dès le début du morceau et se stabilise, implacable, jusqu’à la fin, figé dans une glace inquiétante aussi froide que la réalité relatée. Les performers masqués, témoins impassibles de faits bruts, mâchent des mots qu’ils brassent, machines de verbes réduits à une information d’émetteur à récepteur renforcée par le morse des boîtes à rythme. Seul Circuit voit l’intensité de son tempo croître avant de retomber dans sa léthargie initiale, blues de robot neurasthénique en plein court-circuit mental. Au cœur d’Hovercraft et de Stray Dog, des notes de synthé aussi mal rangées que dérangées débarque à l’improviste avec un tel sens du timing qu’elles semblent avoir accompagné le morceau tout du long. Une menace plane, louvoie, son envol est lourdeur et est relayée par des titres comme Hide and Seek, Look Back Twice dans lesquelles ne reste parfois audibles que la dimension percussive. Réussite complète pour Mank Down qui déroule, avec talent, sa capacité à planter sur chaque track une série d’ambiances sombres aussi mystérieuses que fascinantes.
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Mank Down ©DR
✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53od
Le EP Black Swan (2013) puis le premier album Comatic Drift (2014) avaient fait de ce one-manband allemand une valeur montante de la scène angst pop, bien dominée par le label Galakthorrö. Avec une électronique glacée, fantomatique et granuleuse, Te/Dis - abréviation de Tempted Dissident - s’inscrivait, à l’instar de Herz Jühning ou Distel, dans un héritage cold wave et industriel qui aurait retenu les leçons apprises avec les premiers disques de The Klinik ou d’Echo West période Signalisti. Le son reste sensiblement le même avec ce second long format : douze titres froids et torturés, où le chant grave typé Ian Curtis (Joy Division) ou Patrick Leagas (Sixth Comm/Death in June) domine des atmosphères mystérieuses et plombées. Pourtant, il y a chez Te/Dis une dimension mélodique, romantique, qui pourrait rendre le projet accessible à des amateurs de synthpop un peu moins sinistre. “Two of a Kind” et “Reenactment Scenario” en sont de bons exemples et prouvent la capacité du musicien à écrire des chansons simples, efficaces, matinées de douce mélancolie. Ce n’est pas Depeche Mode, mais il y a quelque chose de définitivement fédérateur dans ce genre de morceaux. “Image of a Phantom”, avec ses synthés qui ondulent, révèle aussi une facette plus dansante et directe qu’à l’habituée. Pour le reste, le travail rythmique, bien que porté sur les sonorités métalliques/industrielles (“Dead Ember”), est assez personnel et contemporain pour ne pas faire tomber Te/Dis dans la nostalgie des sonorités eighties. L’électronique peut passer de résonances brumeuses à des couinements et interférences analogiques beaucoup plus délirantes, tout en ne s’éloignant jamais vraiment de l’esthétique noir et blanc : “Present life seems grey and cold”, il nous est dit sur le titre “Dissection”. Malgré l’aspect monocorde et un peu détaché du chant, les sentiments sont mis à nu, dévoilant des états souvent dépressifs : “lowest self-esteem”, “emotional outcast”… L’intimité se révèle, noire et troublante comme une procession de spectres.
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53og 52
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JANV./FEV./MARS 2017
Date de sortie : 23/09/2016 Durée : 00:40:23 Nationalité : US Styles : MATH Rock
Giraffe Tongue Orchestra Broken lines (Party Smasher Inc) Musicalement, le projet fait plus que tenir la route car il procure des frissons. Enfin, à condition d’avoir un penchant assumé pour le rock alternatif estampillé nineties parce que ça se situe plus autour de The Mars Volta vs Alice In Chains que dans le fracassage The Dillinger Escape Plan, le matraquage Mastodon ou le métal à l’ancienne de Dethlok. Grains de folie, plans aventureux, chants et mélodies ultra prenantes, son aux petits oignons, rythmiques en béton, à tous les niveaux, Giraffe Tongue Orchestra c’est du costaud. Et le charme opère immédiatement grâce à la présence monstrueuse de William DuVall, on le savait très bon pour s’être intégré à AiC, on l’a découvert exceptionnel sur scène, ici, il nous surprend à faire encore d’autres choses, avec “son” ton et pas celui emprunté à un autre, le contre chant plus lourd apporté par Brent Hinds sur quelques titres donne encore plus de volume à l’ensemble, même la venue de Juliette Lewis (“Back to the light”) passe presque inaperçue. Les zicos se font eux aussi plaisir avec des parties solo bien inspirées qui se calent parfaitement dans ce maelstrom d’idées cohérentes. Le “super groupe” sur le papier l’est donc aussi sur disque (et forcément sur scène). Perfect.
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✎ Oli www.w-fenec.org http://urlz.fr/53oj Giraffe Tongue Orchestra ©DR
Date de sortie : 31/07/2016 Durée : 00:19:34 Nationalité : DE Styles : Rap / Trip-Hop
Date de sortie : 01/04/2016 Durée : 00:32:22 Nationalité : NO/US Styles : Alternative / Experimental / Avantgarde
Justice ©DR
ALBUMS
Date de sortie : 18/11/2016 Durée : 00:54:13 Nationalité : FR Styles : ELECTRO
Kaada/Patton Bacteria Cult (IPECAC RecORDINGS)
Justice Woman ( Ed Banger Records - Because Music )
Bien qu’il s’agisse du second album et troisième sortie pour le duo rassemblant le compositeur Norvégien John Erik Kaada et Mike Patton, l’annonce de la sortie de Bacteria Cult a su susciter sa part d’interrogations. D’ores et déjà, 12 ans séparent cet effort studio de son prédécesseur, constat auquel s’ajoute la part de mystère qui entoure tout projet implicant le chanteur Mike Patton, artiste éclectique et lunatique à la carrière accordant très peu de place à la redite. Successeur éloigné de l’excellent Romances, Bacteria Cult se distingue de ce dernier avec des titres plus concentrés et un brin moins excentriques, la marque de Patton se faisant plus discrète. Le registre du chanteur reste ici principalement focalisée sur son ton de fausset qui accompagne l’instrumentation orchestrale de Kaada, qui revient en force grace à la participation de l’orchestre symphonique de Stavanger. Plus grandiose et cinématique, l’album n’est d’ailleurs pas sans rappeler le projet Fantômas de Patton. Bacteria Cult se rapproche d’une bande originale d’un film riche en codes et références hétéroclites rassemblés en un ensemble cohérent; la trompette et la guitare nasillarde et réverbérante sur Black Albino font écho au Western et Ennio Morricone, tandis que le ton envoûtant et féérique de A Burnt out Case ou Dispossession touchent au registre du conte. Ensorcelant et un brin étrange mais soutenu dans son excentricité, Bacteria Cult est un album expérimental mais accessible et facile d’écoute. Les compositions sont linéaires dans leur structure comme pour une bande originale mais relativement “standards” en terme de format et durée. Moins présent, on pourra reprocher le rôle quelque peu secondaire de Patton sur certains moments, qui se montre par la même occasion moins ambitieux et créatif dans sa performance. Plus soutenu que son prédecesseur, Bacteria Cult reste très agréable à l’écoute, porté par l’ambition des arrangements et des orchestrations des John Kaada, ces derniers éclipsant quelque peu la performance du chanteur de Faith no More.
Tapis rouge pour le dernier album de Justice : Woman. Il y a une dizaine d’années, le duo électro Gaspard Augé- Xavier de Rosany venait restaurer le parquet usé de nos dance-floor affadis par une avalanche d’autotunes douteux. Loin de s’empâter dans des strates robotiques vaseuses, Justice apportait et apporte toujours ce goût unique de la bringue dans sa plus sémillante forme comme le souligne le disco-dance de Safe and Sound chargé de slaps de basse. Le feu de la fête...mais pas que. L’agitation immodérée...mais pas que. L’album s’écoute aussi bien dans un style posé-réfléchi (Pleasure) que dans une attitude clubbing-destroy (Heavy Metal). Son électro est un trésor de superpositions sonores prenantes, assemblage de beats catchy qui match sans crash. Chaque cellule mélodique appelle à l’admiration dans son autonomie autant que dans son interaction avec les autres. Les liens tissés mettent à jour une véritable culture musicale et un amour profond de ce qui unit la diversité des pulsations. Randy : fort de son départ punk électronique, de son couplet rock mécanique et de son refrain pop magnifiquement interprété par Morgan Phalen, ce super tube a tout d’un futur standard du genre. Les uns diront : « trop poppy ? » Les autres opposeront un : « trop boomy ? » ou encore un : « trop heavy ? » Les reproches contraires sur le « trop » sont parfois gage de qualité et la ligne zigzagante qu’ils dessinent n’est autre qu’un chemin élégant par lequel une musique fait fusionner les tendances. Dans ce cas précis, le classieux « s » se moule sur la courbe du J de Justice.
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JUSTICE © DR
✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53ot
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✎ Robin Ono http://urlz.fr/53oo ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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ALBUMS
Emboe Aléa - Part 4 EP (Atypeek Music)
The Butcher’s Rodeo Backstabbers (AT(h)OME)
Alea – part 4 : La fin du voyage, quatrième et dernière étape du périple d’Emboe. Avec “Time to get Erased”, “Somebody in the Clouds” et “Wicked Lovers”, cela fera 12 titres au total, tous différents mais finalement tous unis par la même volonté créatrice d’explorer des territoires électroniques dévastés par les mèches, les casquettes et les chemises à carreaux, la vodka red bull et le poppers, les platformboots, les mecs qui se font appeler Antho, Mat ou Vince. En fait, ce que réalise Emboe a une forme d’utilité publique. Il s’agit de refaire comprendre aux “gens” (mettez qui vous voulez dans le sac) qu’il ne suffit pas de se pointer en soirée avec une clé usb et une veste Versace portée sur un jean élimé pour être riche à millions. Je voulais dire quoi déjà ? L’Electro, c’est comme tout, comme le Rock, comme le Rap, l’ordinateur ne confère aucun talent, mais si Emboe mixait en réesoi, j’irai. Parce que peu importe le support, le style choisi, ce qui compte c’est l’émotion qu’il y a à faire passer. Emboe, lui, il est à l’écoute. Peu importe que ce qu’il a à écrire doive passer par des plages de bruits abrutissants, des beats, une guitare ou des claviers : il prend l’instrument adéquat. Et c’est à ça que l’on peut reconnaître les vrais artistes, lorsque le fond l’emporte sur la forme, que toutes les facettes de la personnalité s’homogénéisent dans le climax instrumental. C’est pas clair ? Putain, pour moi non plus. J’aime Emboe pour ses capacités constantes de renouvellement. “Wicked Lovers” est tellement beau, il mériterait une voix de déesse, des cordes vocales bonnet E qui te branlette espagnole les tympans parce que le rythme est langoureux, parce que le tempo est chaloupé, parce que ce titre est incroyablement cool. Ce dernier EP conclut superbement une quadrilogie ambitieuse mais qui aura tenu toutes ses promesses. Impossible de savoir ce que fera Emboe au prochain coup, je le sens capable de tout. De jouer du Grind, de tenter l’expérience Hip-Hop, de produire une chanteuse Pop, c’est ça qui est génial dans la liberté de ton du bonhomme.
Si The Butcher’s Rodeo avait montré pas mal de talent avec son EP Ghosts in the weirdest place, ce premier opus dépasse les espoirs qu’on pouvait placer en eux. Production impeccable (peut-il en être autrement avec Francis Caste qui a déjà soigné celui de Zuul FX, Kickback, Hangman’s Chair, Cowards, Mur, Flying Pooh…), artwork réfléchi jusque dans ses déclinaisons (bravo Alex Diaz du Spaniard Studio déjà à l’œuvre pour The Prestige, Merge, Doyle Airence…) et douze compos en béton. On embarque avec “Setting sails” et un conseil, ne monte pas trop le son sur cette intro, elle est toute douce mais la suite risque de te déboîter les tympans. Chant éraillé, sonorités plombées, oppression des riffs, gradation dans la tension qui débouche sur un temps bien plus serein, en moins de quatre minutes “Little death” dévoile toute la richesse instrumentale du combo et Vincent en a encore sous la pédale puisqu’il ne dégaine ses premières véritables mélodies accrocheuses que sur “Conundrum”. “Nelson’s folly” porte, lui, bien son nom, le titre est chaotique au possible, ça bastonne dans tous les sens, les boulets et les balles fusent comme à Trafalgar et ce n’est pas le banc de sable sur lequel on finit par s’échouer qui nous sauvera de la sauvagerie ambiante (“Redemption cay”). L’espoir d’un peu de répit vient du navire de sa Majesté où, là encore, les riffs tourbillonnent jusqu’à notre entrée dans l’œil du cyclone, calme plat. La machine à riffs se remet en marche avec “The legacy” jusqu’à l’étouffement auditif, The Butcher’s Rodeo maîtrise totalement son sujet. S’il faut un faible tirant d’eau “In the shallows”, il faut être bien accroché, car ça secoue, hardcore, rock, screamo, math, on est lessivé par les influences compactées, “Good fuckin’ luck” pour faire le tri, on est de nouveau proche de l’épuisement tant le morceau est intense. Une plage de repos plus tard (“The devil of the wind”), le final nous assomme définitivement. ✎ Oli www.w-fenec.org http://urlz.fr/53oE
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✎ Arno Vice www.xsilence.net http://urlz.fr/53ow 54
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
Date de sortie : 2016 Nationalité : EN Styles : ambient
Nationalité : FR Styles : mathcore / experimental / hardcore
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Simon Fisher Turner Giraffe (Editions Mego)
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Simon Fisher Turner travaille le son comme on étale le pinceau sur une toile, débusquant l’insondable pour évoquer le merveilleux, jouant avec les pigments pour offrir des œuvres abstraites à la beauté parfois glaçante. Acteur et compositeur stellaire, ayant composé des musiques de films, dont celle pour Nadja, produit par David Lynch, Simon Fisher Turner est un artiste au parcours bien rempli, commençant sa carrière dans des groupes comme The Gadget avant de rejoindre The The, travaillant aux côtés de Derek Jarman. Auteur de plusieurs albums sous les noms de Simon Turner ou The King Of Luxembourg, Simon Fisher Turner est dans une recherche constante de climats viscéraux, bousculés par des torrents de beauté nuageuse. Giraffe est un le résultat d’un travail étalé sur 8 ans, récoltant et accumulant les field recordings pour en offrir un champ de possibilités aux ramifications infinies. Œuvre de sound design se voulant le reflet d’une certaine réalité déformée ou amplifiée, Giraffe parcourt le monde, redessine le visible pour en offrir une vision enfouie dans les mémoires et l’imagination. Hypnotique.
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✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53oJ Simon Fisher Turner ©DR
Date de sortie : 31/01/2017 Durée : 00:09:11 Nationalité : FR Styles : Electro / EXPERIMENTAL / IMPROVISATION
ALBUMS
Date de sortie : 30/11/2013 Durée : 00:37:08 Nationalité : FR Styles : DRONE / EXPERIMENTAL / METAL
Date de sortie : 04 /11/16 Durée : 27 min Nationalité : US Styles : grunge / metal
Date de sortie : 2017 Nationalité : US Styles : Garage Rock
Pore Dorsale (Atypeek Music/Permis De Construire)
Ty Segall Ty Segall (Drag City)
Tad God’s Balls (Deluxe Edition) (Sub Pop)
Si Davy Jones Locker bénéficie encore d’une belle aura dans le milieu Indé, et à juste titre d’ailleurs, je trouve le projet solo de David Valli bien plus fascinant.
Vous vous souvenez de Manipulator ? Oui, forcément. C’est ce moment où Ty Segall avait décidé de s’approprier une bonne partie des derniers qui, jusque-là, étaient parvenus à résister son charme. C’était alors une synthèse parfaite du talent du bonhomme. Une énergie vorace, un sens affûté de la mélodie qui tue et une pointe de sensibilité déjà démontrée dans l’étonnamment apaisé Sleeper. Et puis, après être parvenu à concilier les fans de la première heure tout en séduisant de nouveaux adeptes, Ty avait décidé de tout balancer aux orties. Sur Emotional Mugger, il faisait plus de bruit que jamais pour la plus grande joie de certains vieux fidèles mais au grand dam d’autres (dont je suis) déplorant que l’excès d’énergie, la volonté d’en foutre partout eût nui à l’efficacité de ses compos. Un an après, Ty Segall revient, flanqué de son équipe habituelle (Mootheart, Cronin…), et délesté de King Tuff présent sur Emotional Mugger. Après cette parenthèse désenchantée, le voilà avec la véritable suite de Manipulator. C’est-à-dire du garage tantôt versant punk tantôt versant folk, mais toujours délicieusement pop. Donc le Ty récite ses gammes. Mais après l’ouverture classique et efficace (« Break A Guitar », bien fuzzy comme il faut), le menu se révèle bien copieux. « The Only One » et ses grattes indomptées qui n’en font qu’à leurs cordes, l’épique « Warm Hands (Freedom Returned) », véritable morceau de bravoure. 10 minutes sous le capot. La punkette « Thank You Mr. K », la folk « Orange Color Queen » qui sonnerait presque comme du Elliott Smith sur son refrain. La très pop « Papers », avec même du piano dedans ! Le père Segall se transforme même en vieux briscard du blues (« Talkin »)… Il y aura toujours matière à pinailler, à dire que le Ty est ici parfaitement calé dans ses souliers faisant exactement ce en quoi il excelle (c’est-à-dire à peu près tout, vous l’aurez compris). Si on veut faire preuve d’un minimum d’objectivité, on signalera que son domaine de prédilection, reste de faire de sacrés bons albums. Et en voici un de plus. ✎ JL www.exitmusik.fr http://urlz.fr/53pe
1987, Seattle, une figure de la scène rock locale bosse dans son coin, il s’appelle Tad Doyle, il est boucher et son quintal ne passe pas inaperçu. Il apporte ses démos au studio Reciprocal où Jack Endino a enregistré le Screaming life de Soundgarden et le Dry as a bone de Green River. Un single composé de deux titres, “Ritual device” et “Daisy”, sort chez Sub Pop, le label local qui a signé les deux groupes précités et qui, en ce 1er août 1988, sort également un single de Mudhoney. La mayonnaise prend et ils retournent en studio pour enregistrer un premier album qui sort en mars 1989 : God’s balls. Cet album était devenu une rareté quasi introuvable, comme les autres disques Sub Pop, ils sont aujourd’hui réédités. En bonus sur ce premier album cultissime, on a le fameux single et même une version démo de “Tuna car”. En plat de résistance, on a donc cette première œuvre de Tad avec ce chant gueulé souvent mal tenu, une batterie sur laquelle on frappe fort, des riffs hachés, un son de distorsion bien crade, bref, une collection de titres pas sexy pour deux sous, carrément poisseux, ni à du punk. En 1989, le mot à utiliser est celui qui colle à la peau de Green River : grunge. 15 jours après avoir édité un split single Tad/Pussy Galore, le 15 juin Sub Pop met sur orbite un autre groupe qui sort aussi un premier album : Nirvana qui est allé enregistrer Bleach chez Endino… Et tout ce que tu entends sur ce Bleach est déjà sur God’s balls, certes Tad n’a pas un “About a girl” pour draguer mais pour le reste, on en est assez proche. Non, le groupe de Kurt Cobain n’a rien inventé… Pouvoir facilement se procurer ce premier opus de Tad aujourd’hui permet donc de remonter le temps et de se replonger dans une époque et une ambiance particulière, de revivre le tournant des années 90 avec ces jeunes groupes qui ont enterré les années 80 et transformeront bientôt le monde musical sans forcément le vouloir. Cette réédition est un petit miracle. Parce que oui, les beuglements de “Behemoth”, les déchirements inaudibles de “Cyanide bath” ou la pseudo-mélodie de “Hollow man” font partie de l’histoire du Rock.
Dans Pore, tout respire le minimalisme industriel : la photo, le nom des titres, de l’album, du groupe, la musique, tout est caractéristique d’une époque où “Métal Industriel” ne signifiait pas d’adopter un look Cyber Punk ridicule pour plaquer trois accords sur sa guitare en arborant un visage grimaçant derrière un masque à gaz. Ces trucs-là, c’est le décorum moderne qui cache trop souvent de la merde en barre, des mecs qui kiffent l’esthétique SM et qui doivent apprécier de se mettre un doigt dans le cul après une soirée tofu – vodka caramel, parce que c’est samedi et qu’on fait les fous. Ceux-là on n’en parle pas tellement ils font pitié. Dans les 90’s, faire du Métal Indus, cela avait un sens, une esthétique sociale de prolo encagé dans l’urbanité délirante. Et que tu t’appelles Godflesh, l’influence la plus évidente de Pore, Treponem Pal, Proton Burst ou M. Pheral, il était inconcevable de pratiquer ce style pour la hype. C’était sale, répétitif, hypnotique et je crois qu’en France c’est bien David Valli qui a porté le concept jusqu’à son extrême. Seul avec sa guitare et des machines, Dorsale s’écoute aujourd’hui avec le même esprit de déshumanisation qu’en 1992. Ni le style ni le propos n’ont vieilli pour qui aime l’épuration maximale (un ou deux riffs par titres), les mids tempos agressifs et cette approche musicale tellement représentative des années 90. Bien sûr Dorsale est un disque répétitif, dénué de mélodie mais son atmosphère est unique (“Radius”) et, au final, lorsque ce style est joué ainsi, je crois que c’est l’un de mes favoris : inexorable, dénué d’âme, ne visant qu’à exprimer froideur et vide.
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✎ Arno Vice www.xsilence.net http://urlz.fr/53oR
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✎ Oli www.w-fenec.org http://urlz.fr/53pW ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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ALBUMS
Date de sortie : 20/01/2017 Nationalité : FR Styles : ELECTRO / Indie
Margaret Catcher Singularity (Pied De Biche /Tandori / Atypeek) J’avais découvert ce duo particulier par le biais de Güz II, avec qui ils avaient fait tournée commune. Bien épaté par ce duo basse/batterie/vocoder, et surtout très intrigué par la bague magique de Xavier qui émettait des sons à l’envi, sans que j’en comprenne le fonctionnement. Il avait bien tenté de m’expliquer cette magie autour d’une bière au Petit Bain, mais comme ce n’était pas la première je vous avoue n’avoir pas tout saisi. D’un côté c’est pas plus mal, c’est toujours bien de garder un peu de mystère, comme quand on voit Yasuko Onuki de Melt Banana agiter son espèce de dictée magique miniature lors des concerts. Après un premier Ep en 2012 (“2 guys 1 CPU”, en référence à ce que vous savez) deux autres en 2015, voilà donc Singularity, le tant attendu premier album de Margaret Catcher. Le ton est donné dès le premier titre, on est comme dans un croisement improbable, quelque part entre une B.O. fantasmée de 2001 l’odyssée de l’espace, mais dans l’esprit du Batman de 1966. On visualise bien une filature peu discrète en batmobile “Emergency”, une rencontre avec des robots dansant le smurf sur “New Transe” ou une scène de bagarre en collants sur “Zouki Zouki”. Avec ses sonorités parfois proche des jeux vidéos (le bien nommé “Alex Quid”), ils se jouent des conventions et assimilent d’une certaine manière le math rock, le punk & un second degré évident, qu’on pourrait ranger dans la case fun-punk tant leur musique peut faire vriller le cerveau le plus terre à terre, pour peu qu’il se prête au jeu. Un dernier interlude et ils nous proposent une revisite de “TER”, beaucoup moins énervé que la première version disponible sur l’EP du même nom, mais pas moins intéressante. C’est pas simple pour un groupe tellement visuel de transposer cette folie douce sur disque. Sur Singularity, on a l’impression qu’ils le font sans vraiment se poser de questions, on sent bien les titres créés sur scène mais ils passent haut la main le passage sur disque, une belle occasion de découvrir ce duo de rock augmenté, histoire de vous donner envie de les voir en live, et de découvrir les secrets de cette bague magique...
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✎ X Lok www.xsilence.net http://urlz.fr/53q1
Date de sortie : 28/02/2017 Durée : 00:34:48 Nationalité : FR Styles : electronic / french electro / INDEPENDANT
HEMS ARTISAN (Atypeek Music) On ne saurait trop dire ce que l’on entend. Post-punk singulier ? Électro balbutiante ? New Wave déviante ? Une forme de blues occidental et urbain ? Un peu tout ça et bien plus sans doute. Peu importe, ce que l’on sait, c’est qu’Artisan va nous accompagner longtemps. Et donc, il y eut Hems. Passé sous les radars de l’époque - 90s’ balbutiantes, mais administrant une belle claque aux quelques oreilles qui s’y arrêtèrent. Pochette rose bubble gum, une vis ronéotypée en plein milieu. Plus ou moins ce que provoquait le disque. Noise rock déviant qui payait certes le tribut obligatoire à son époque mais n’en restait pas moins ultra-personnel. Ça s’appelait Idreamtiwasmyowncage et ça s’insinuait dans l’encéphale à grands coups de tournevis tête plate. Plus tard vint Lourd Comme L’Air et déjà, le groupe était ailleurs. L’électro, déjà présente, s’insérait plus avant dans l’équation et apportait son souffle malsain. L’air encore plus irrespirable, oppressant alors même que les compositions desserraient leurs mailles. La même couleur uniforme en arrière-plan, le rose cédait devant le gris accablé, la même iconographie ronéotypée si ce n’est que le dessin bleu laissait ici sa place à quelques lettres noires. Mais c’était cohérent et ce fut la fin. Ça aussi, c’était cohérent. La trajectoire était bien celle d’une implosion et dans une sorte de Big Bang à l’envers, Hems avait fini par se recroqueviller en lui-même. Fin de l’histoire, deux témoignages sonores qui réintègrent encore la platine aujourd’hui et le petit culte personnel tenace qui leur est associé. On ne savait pas grand-chose du groupe. Tout au plus qu’il venait de Thionville et qu’il comptait quatre membres : Alexandre Becker, Pierre Kremer, Vincent Ramseyer et Manuel Tichy. C’est peut-être bien pour ça qu’on ne savait pas non plus que Lourd Comme L’Air eut une suite. Enfin, pour tout dire, personne ne l’a su et l’histoire d’Artisan est un brin rocambolesque. L’album fut perdu puis retrouvé bien après dans les archives du studio où il avait vu le jour, produit par Yves Baudhuin (aka Duke, des industriels belges Noise Gate) qui y tient d’ailleurs la basse à l’occasion puisqu’à cette époque, Alexandre Becker est déjà ailleurs. La mue s’est poursuivie. Artisan n’a que peu de
points communs avec ses deux prédécesseurs et pourtant tout l’y ramène. Il y a vraiment une logique lorsqu’on écoute les trois à la suite. L’électro, sur Artisan, a tout envahi mais n’a pourtant pas effacé le reste. La guitare reste angulaire et on retrouve bien la syntaxe si particulière du groupe. La voix, jusque-là pleine de morgue et un brin déshumanisée à certains moments, à poil et presque susurrée à d’autres, a laissé tomber le mégaphone et avance désormais sans artifices. Stigmate d’un très prolixe monologue intérieur, elle balance ses mots taillés au scalpel sur un ton généralement monocorde et désabusé. Le climat général s’est largement apaisé mais les morceaux n’en restent pas moins étranges. Tour à tour résignés (Tu L’Auras) ou plus écorchés (Ma Carte À Puce ou Statique), en permanence coincés dans un clair-obscur particulièrement chiadé, ils parcourent le bitume sans but précis mais avec élégance et dessinent un itinéraire urbain abstrait sous un ciel de traîne lourd et poisseux. La balade est sombre, les idées rejoignent le moral dans les chaussettes et le propos tranche avec une musique pour le moins sèche et introvertie. Certes, Hems a lissé ses échardes et abandonné ses banderilles soniques mais les morceaux, ainsi mis à nu, résonnent encore d’une trouble et morne vibration étonnamment palpitante. La basse s’en va souvent explorer les tréfonds, à l’image des ondes moribondes habillant le très ténu Comme Tombé Du Ciel par exemple, l’ossature synthétique semble la plupart du temps à l’agonie mais refuse pourtant de capituler et tatapoume/tintinnabule à qui mieux mieux (Écarte-Toi en ouverture, La Nuit Noire plus loin ou encore Ma Carte À Puce), la guitare recouvre l’ensemble de sa belle élégance. Elle ne s’énerve jamais mais construit un réseau sec et hypnotique dont il est bien difficile de s’extirper. C’est tout à la fois très cérébral et complètement spontané, Hems taille à la serpe dans l’écorché et pose ses tripes sur la table jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un squelette dont la force demeure pourtant intacte. Cette fois-ci, c’est le noir qui habille l’arrière-plan. Une croix rouge s’en détache en même temps que les capitales d’imprimerie. Les pensées sombres et le sang, mis en exergue par une architecture chiche qui suggère beaucoup. Ainsi, après Lourd Comme L’Air, Hems était loin d’avoir tout dit et quels que soient ses habits, il restait également pertinent. On ne saurait trop remercier Atypeek Music d’avoir exhumé cette perle bien noire qui, un paquet d’années plus tard, garde la même pertinence. Très actuel, Artisan s’en va rejoindre sans discussion possible ses deux aînés sur lesquels le temps ne semble avoir aucune prise. Magnifique. ✎ Leoluce www.indierockmag.com http://urlz.fr/53q4
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JANV./FEV./MARS 2017
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Date de sortie : 19/08/2016 Durée : 33 min Nationalité : CA Styles : new rave electro Experimental
(Universal Music)
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✎ A.B www.exitmusik.fr http://urlz.fr/53q6
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JANV./FEV./MARS 2017
Date de sortie : 14/10/2016 Nationalité : NO Styles : Noise Rock
Loan In Space Time (I.O.T. Records)
MoE Examination of the Eye of a Horse
(Conrad Sound)
Peu sont les filles à donner dans l’electro hip hop qui décoiffe, à l’image de Loan, véritable trublion de la scène électronique hexagonale. Avec son nouvel opus In Space Time, elle nous convie à une danse de Saint Guy virevoltante, où les rythmiques secouent l’échine enrobée de basses percutantes. Passionnée de danse (voir la vidéo ci-dessous), Loan puise dans les courants dubstep et grime pour élaborer un missile dancefloor cannibal, poussé par un carburant stimulant qui donne la furieuse envie de bouger du cul. Sombre et électronique, In Space Time arrache les terminaisons nerveuses pour les torsader autour de lignes synthétiques aiguisées comme des scalpels, plongeant l’auditeur dans un espace-temps résolument tourné vers le futur. À écouter de plus près, on discernera certaines sonorités et percussions héritées de voyages tribaux sur des terres ethniques oubliées. Aux côtés du saxophoniste Guillaume Perret sur Deep Journey, elle envoie le jazz en orbite. Pour ne pas être en reste, Loan s’est entourée d’une armada de MC’s prestigieux, Antipop Consortium, Juice Aleem, Bang On !, The Spaceape (disparu malheureusement il y a quelques mois), histoire de peaufiner un album percutant, que l’on aurait imaginé sortir chez Big Dada. In Space Time embrase tout sur son passage avec sa production acérée, multipliant les pistes et les carrefours, tout en gardant précieusement en tête la cime à atteindre, affolant les compteurs avec ses beats tentaculaires et ses plages instrumentales aux lisières du breakbeat et de l’abstrakt déstructuré. VITAL !
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✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53q8 LOAN ©DR
Vitalic Voyager
C’est le synthé buchla qui lance les festivités du nouvel album de Vitalic aka Pascal Arbez-Nicolas. « El viaje » c’est une belle introduction que nous offre l’artiste façon générique de série des années 70. Pas de doute la suite nous intrigue. Aux multiples surnoms ; Dima, Hustler Pornstar, Vital Ferox, l’artiste dijonais est connu pour nous avoir fait transpirer sur « Stamina », « Still » mais surtout « You Prefer Cocaine » de son premier EP Poney. En guise de petite anecdote, ce nom d’EP n’est pas anodin puisqu’il traite de la maltraitance des poneys dans les fêtes foraines. Ouais plutôt original… Place à ce nouvel opus à la pochette rétrofuturiste clairement inspiré des années disco. On y retrouve de multiples guests comme Miss Kittin, David Shaw, Mark Kerr et bien d’autres. Voyager est tout aussi efficace qu’une boîte de vitamine, mais beaucoup plus naturel. C’est l’heure de danser en apesanteur, de rêver en regardant les galaxies perdues dans l’immensité du cosmos, avec « Hans Is Driving » en fond. Après deux ans de boulot, l’artiste compose 10 titres quasi excellents. Disco cosmique futuriste certes, mais on ne peut pas nier qu’il frappe toujours aussi fort. « Eternity » en est un bel exemple, les premières sonorités peuvent nous faire penser à « Cold Song » de Klaus Nomi. Les hautbois et les clarinettes nous plongent dans une légère mélancolie, un univers féerique, mais à 3’13, quand on a l’impression que la chanson est terminée, c’est le moment de la décharge… suivie de « Nozomi », inspiré grandement de Jean-Michel Jarre, ce titre ne nous laissera pas de marbre en live, les détenteurs de pacemakers pourront sûrement survivre. Tout comme avec « Lightspeed », un nouveau « Stamina » qui enflamme le dancefloor… Plus apeurant, la voix robotique de Tristan Stansburry nous répète en boucle « Sweet cigarette », comme si cet oxymore faisait de la nicotine une douce sucrerie. Enfin on clôture l’ensemble avec une reprise féminine de « Don’t Leave Me Now » avec Brenna MacQuarrie, une manière d’apaiser notre esprit après l’avoir enflammé.
Date de sortie : 06/05/2015 Durée : 33 min Nationalité : FR Styles : RAP / breabeat dubstep / electronic grime
On sait qu’ils sont Norvégiens, qu’ils sont trois et qu’ils ne sont pas là pour enfiler des perles. MoE, le nom du groupe est en fait le nom de la chanteuse / bassiste Guro Skumsnes Moe, une véritable possédée, démente, envoûtante. Entre rock et metal avant-gardiste à tendance noise et expérimental, ces Osloïtes pourraient être vos pires voisins, du genre de ceux qui déplacent les meubles à trois heures du matin. Il ne faut pas être cardiaque pour écouter Examination of the Eye of a Horse, quatrième album de ce power trio scandinave. C’est âpre, strident, velu, malsain, hargneux et décapant. Avec seulement six morceaux pour trente-quatre minutes de musique, MoE atteint l’objectif de mettre K.O son auditeur dès la première écoute. Parfois lent, sombre et angoissant à la Jesus Lizard comme sur « Realm of Refuge », tantôt rapide et apocalyptique à la Napalm Death comme sur « Paris », MoE racle le fond des tympans en maîtrisant son chaos sonore. Très bien ficelées, les compositions sont la résultante d’une véritable écriture mais aussi d’une savante recherche stylistique et phonique. Les saturations sont étudiées pour siffler, saigner et les expérimentations sur la voix ou sur les bruitages et autres larsens apportent à l’ensemble une dose d’hyperagressivité décadente. Tout cela, baigné dans une superbe production massive et stridente dirigée par le guitariste Håvard Skaset, Examination of the Eye of a Horse se pose comme un album extrêmement intense. MoE est une énième découverte renversante. Elle chamboule par bien des aspects les notions d’harmonie et de mélodie et assène de grands coups de marteau dans le crâne tout en activant les cellules nerveuses de l’auditeur. Sur la longueur, l’expérience peut s’avérer compliquée, renversante voire repoussante, mais après cela, au final, plus rien ne sera comme avant.
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✎ Aleksandr Lézy http://urlz.fr/53qt http://urlz.fr/53qn
MIKKI BLANCO ©DR
Date de sortie : 16/09/2016 Durée : 37 min Nationalité : US Styles : QUEER / RAP EXPÉRIMENTAL
Date de sortie : 25/11/2016 Durée : 00:34:03 Nationalité : WORLD Styles : Jazz / NOISE NO WAVE / RAP EXPéRIMENTAL
Mykki Blanco
Anarchist Republic of Bzzz United Diktaturs of Europe
Mykki (!K7)
(Bzzz Records / ATYPEEK MUSIC)
Il est certainement l’un des rappeurs les plus excentriques de sa génération et ne cesse de nous surprendre au fil de ses sorties. Issu de la scène queer et militant auprès du mouvement LGBT, Michael David Quattlebaum aka Mykki Blanco délivre avec son premier véritable album, sobrement intitulé Mykki, un opus gorgé d’hymnes à la tolérance, emprunt de combat envers la discrimination raciale et sexuelle. De loin son album le plus accessible, Mykki Blanco semble avoir trouvé le juste équilibre pour apposer définitivement son nom comme un des artistes incontournables de la scène hip-hop. Tout en finesse et en subtilité, l’artiste qui déclarait l’année dernière vouloir arrêter la musique après avoir annoncé sa séropositivité, revient plus fort que jamais, avec des titres taillés sur mesure, véritables écrins de velour pour sa voix à la fragilité engagée, où se côtoient cordes et beauté suspendue, bass music et hip-hop tribal à l’image des démoniaques My Nene ou For The Counts. Entouré de producteurs tels que Woodkid ou Jeremiah Mecee, Mykki Blanco n’est pourtant pas rentré dans le rang, continuant de délivrer des tracks à la radicalité furieuse, agrémentés de virages plus pop, ouvrant ainsi sa musique au plus grand nombre, sans perdre son âme. Un album à l’éclectisme virevoltant et aux textes percutants. Jouissif.
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Mykki Blanco © DR
✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53tH
Anarchist Republic of Bzzz, c’est tout un programme ! Confronter les idées, les genres, les principes fondamentaux qui régissent généralement les styles. Avec ce collectif regroupant personnalités d’horizons divers, le voyage risque d’être mouvementé et riche en émotions. Deux figures emblématiques du jazz sont à l’honneur : Archie Shepp, l’un des pionniers du free-jazz aux saxophones, et Arto Lindsay, éminent guitariste, initiateur de la no wave avec DNA entre autres. Dans la catégorie rock et associée, Luc Ex de The Ex à la basse et Timba Harris de Secret Chiefs 3 et Estradapshere au violon. Dans la catégorie hip-hop, c’est aussi un festival avec les présences étonnantes de Mike Ladd poète adepte du « spoken word », Juice Aleem, le « freestyler » anglais plus prolifique en invité qu’en son nom propre et Rojda Senses, une chanteuse orientale turque. Sans compter les joueurs de darbouka, de kanun et de saz électrique et l’improvisateur français ErikM aux platines. Tout ce beau monde est réuni sous la houlette de Seb el Zin, guitariste multi-instrumentiste français du groupe psychédélico-futuriste Ithak. Des formations ou artistes hip-hop comme Jedi Mind Tricks ou Jeru the Damaja ont tenté le métissage des sons abstraits. Des formations plutôt rock comme Beastie Boys ou même Rage Against the Machine y ont mélangé le rap et les guitares électriques. Ici, c’est une orgie de mélanges, une grosse marmite expérimentale où tout s’intègre et se percute à la fois dans un chaos hyper organisé. « United Diktaturs of Europe » est un album hallucinant et subversif superbement produit qui réussit à réunir les contraires, les opposés, les faire cohabiter de manière totalement jubilatoire et transgressive. En une bonne demi-heure, Anarchist Republic of Bzzz renverse les codes établis et fait s’effondrer les barrières culturelles et musicales dans un capharnaüm prodigieusement dantesque.
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✎ Aleksandr Lézy http://urlz.fr/53qt http://urlz.fr/53tJ
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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GABRIEL HIBERT
ABDUCTé (Atypeek Music/Tandori Records/Permafrost/ Who’s brain Records/Econore/Cheap Satanism Records/ KdB Records)
Abducté est le troisième album de Gabriel Hibert – un petit gars de Toulouse – après Peindre Et Ne Rien Foutre en 2014 et Désenvoûtement en 2014 mais il s’agit surtout de son premier disque à bénéficier d’une sortie véritable, avec un tirage conséquent et en vinyle, s’il vous plaît. La musique de ce garçon a toujours été passionnante mais avec Abducté il a assurément franchi le cap d’un enregistrement réussi : Gabriel Hibert reste un musicien à découvrir absolument en concert, il y est tout seul sur scène avec sa batterie, ses dispositifs sonores et sa voix or, oui j’insiste, ce troisième album est aussi celui qui se laisse écouter avec le plus de plaisir à la maison, allongé par terre sur un vieux tapis rouge, les bras en croix (abduction ?) et la tête remplie de défilements d’images fugaces et cependant persistantes. Ni math-rock ni post-rock mais résolument cinématographique, la musique enregistrée pour Abducté joue la carte de la concision bien remplie : pas d’introductions qui s’étalent, pas de finaux qui atterrissent nulle part, pas de rembourrages au milieu et pas de parlottes pour ne rien dire mais un foisonnement d’idées qui virevoltent autour de la batterie, pilier central mais tordu d’un dispositif unipersonnel qui ne saurait pas fonctionner autrement. Pas sûr effectivement que les compositions d’Abducté tourneraient aussi bien si elles étaient interprétées par un « vrai » groupe, disons un groupe de trois personnes. Ce que je veux dire c’est que Gabriel Hibert possède cette force de savoir quand il y a des trous à remplir et surtout de savoir comment il peut le faire, tout seul ; j’extrapole sûrement en soupçonnant également que s’il ne trouve pas comment procéder d’une façon qui lui convienne totalement, il en vient à abandonner son idée de base – une absence de prétention non feinte qui peut expliquer le caractère si intense de sa musique. De tous les one man band qui fleurissent depuis ces dernières années, Gabriel Hibert est ainsi l’un des plus intéressants, peut-être bien parce qu’il a beaucoup compris de l’importance des rêves.
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✎ Hazam http://urlz.fr/53tK 60
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
Date de sortie : 09/09/2016 Durée : 00:54:22 Nationalité : UK Styles : electro
M.I.A. AIM (Interscope) Princesse, boxeuse, princesse en gant de boxe, boxeuse au port royal. M.I.A. frappe et refuse la révérence, seule sa voix salue, son débit déboîte et sa gouaille dégoise. Pour un poids plume qui envoie du plomb, pas de titres d’album plus appropriés que AIM, « cible ». Un mile qui n’en finit plus de s’élargir, passant de l’ouverture discrète au cratère massif. Il faut dire que M.I.A. enchaîne 17 morceaux, soit 17 façons de déchirer le cœur de cible. Un album dense mais cohérent. Il s’ancre à la fois dans l’actualité et son histoire personnelle, celle d’une des figures de la Nu Rave, également fille de militant politique. La trajectoire complexe des migrants constitue un fil rouge tressé de luttes, de survies et d’espoirs décrits dans Borders, Foreign Friend, Visa et Ali Ru Ok ? Le premier morceau cité fait écho aux aptitudes d’artistes visuelles de MIA à travers son magnifique clip montrant un bateau dont chaque être humain est une pièce. Les deux derniers se caractérisent eux par des inclusions de musiques du monde mettant en avant une maîtrise fine du séquenceur. M.I.A. traite du combat en général et en profite pour tacler les haters sur Finally : « I’m someone’s shot of whiskey. Not everyone’s tea ». Certaines tracks comme les deux versions de Bird Song et Swords méritent d’être particulièrement saluées pour leurs intros originales menées avec le même brio que les bruits de revolver sur son vieux tube Paper Planes. AIM, s’il est peut-être l’ultime album de M.I.A., sera une sortie de scène aux allures de victoire sur le ring… ce qui n’empêche pas d’espérer un autre round.
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✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53tN M.I.A. ©DR
Date de sortie : 15/10/2016 Durée : 28 min Nationalité : FR Styles : DRONE / EXPERIMENTAL
M.I.A. ©DR
ALBUMS
ALBUMS
Date de sortie : 26/12/2016 Durée : 00:51:36 Nationalité : US Styles : RAP
Date de sortie : 06/11/2015 Durée : 00:31:28 Nationalité : FR Styles : ROCK / GARAGE
Run The Jewels RTJ3 (Self Released) El-P et Killer Mike alias Run The Jewels sont de retour plus tôt que prévu, avec un troisième album, RTJ3, offert gratuitement via leur site, en guise de cadeau de Noël. Une nouvelle fois, le duo nous offre un concentré de rap rentre dedans à la production aiguisée et aux beats fats qui donnent la furieuse envie de bouger du cul, la tête pleine de slogans engagés et de prises de position politiques. Entouré d’une flopée d’invités prestigieux tels que Danny Brown, BOOTS, Trina, Joi, Tunde Adebimpe, Kamasi Washington, Run The Jewels s’en donne à coeur joie, affolant les compteurs de leurs flows tour à tour virevoltants comme le vent ou joueur et navigateur, où rondeur des titres et puissance se donnent la main pour donner naissance à une flopée de tracks aux senteurs de futurs classiques à l’image des entêtants Down ou 2100 entre autres. Elegant et rugueux, moderniste et classique, RTJ3 est la passerelle idéale entre plusieurs courants hip-hop, alliant puissance fédératrice et groove entraînant, titres addictifs taillés dans une roche dure et précieuse qui devraient prendre toute leur ampleur sur scène. Imparable.
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Date de sortie : 27 /01/2017 Durée : 00:42:11 Nationalité : FR Styles : Electro
LES SOUCOUPES VIOLENTES Dans Ta Bouche... (Nineteen Something Rds)
Le Peuple De L’herbe Stay Tuned (Boneplak/Verycords)
Réédition du premier album (la tablette de chocolat…) du groupe parisien 80’s récemment reformé. Avec en bonus le premier EP de 84 et le morceau “Rester Au Lit” extrait d’un single issu des mêmes sessions que l’album. Le tout est accompagné d’un livret qui retrace la saga d’un des meilleurs groupes garage du pays. (nineteensomething.bigcartel.com)
On a d’abord tous pensé que les membres du Peuple De L’herbe étaient des fumeurs de joints invétérés. Erreur ! Le Peuple De L’herbe ce sont de gros alcooliques. Des alcooliques qui ont su faire évoluer les moyens de se/nous torcher la gueule. Alors qu’à leurs débuts ils ne lésinaient pas sur les doses et les mélanges, les voilà désormais plus mesurés. Tout en sachant apprécier les bons crus forts en bouche (JC001 qu’ils ont toujours affectionné, Marc Nammour de La Canaille et Oddatee), Le Peuple semble assagi, préférant un bon alcool fort à déguster plutôt qu’un mélange qui pourrait se révéler indigeste (même si à l’époque ils étaient ô combien savoureux !). Avec l’âge on encaisse moins facilement. Aujourd’hui Le Peuple apprécie se faire un bon rock’n rhum tranquille, surtout quand les amis sont de la partie, même s’ils sont un peu sur les nerfs et revendicatifs (« Abuse »). Ça fait aussi du bien de vider son sac. Alors évidemment quand on se remémore un soir comme ce maudit vendredi 13, impossible de ne pas avoir l’alcool triste. Mais même l’esprit un peu embrumé, les mots de Marc Nammour sont justes. Triste mais beau et touchant (« V13 »). Et c’est aussi beau d’écouter JC001 embrasser la cause de réfugiés trop souvent vilipendés (« Refugees »). L’alcool libère la parole dit-on, là c’est juste le cœur qui parle. Mais la soirée est longue et si Le Peuple a mis un peu d’eau dans son vin, il sait varier les plaisirs, calmant le jeu avec un soft bien senti (« Lucy Fire ») avant de se faire un petit shot pour faire monter la pression et partir en soirée rock’n rhum (« Only A Few »). Dès lors, les bonshommes ont l’enthousiasme si communicatif qu’il devient inconcevable de ne pas se déhancher à leurs côtés (« Who’s Got It »). Finalement, même sans l’exubérance de sa jeunesse, le souvenir ne sera peut-être pas indélébile comme à l’époque mais c’est toujours aussi bon de passer une soirée en compagnie du Peuple De L’herbe à s’enfiler quelques canons.
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LES SOUCOUPES VIOLENTES ©DR
✎ Dig It! Fanzine http://urlz.fr/52xH http://urlz.fr/53tQ
Date de sortie : 21 /10/2016 Nationalité : FR Styles : garage-punk
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Run The Jewels. ©DR
✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53tP
VAGINA TOWN 11 LOVE SONGS (Kythibong Rds) On les avait découverts chez Kizmiaz Rds, voici les Nantais désormais chez Kythibong pour un album psyché garage “moderne”, original et chiadé, avec claviers, mêlant garage teigneux, ballades vicieuses, chœurs féminins, ambiances frénétiques ou plus tempérées, black groove early 70’s avec saxo (par le one-man-band Tom Bodlin), country brinquebalante à la Violent Femmes, clins d’œil furtifs (à “These Boots…” par exemple), passant sans manières d’une atmosphère acoustique à un déluge électrique qui vrille les nerfs en trois minutes chrono. Un trip complet. Bien joué. ✎ Dig It! Fanzine http://urlz.fr/52xH http://urlz.fr/53tR
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✎ JL www.exitmusik.fr https://youtu.be/AzCJNXO10gY ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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Vinyl - DIGIPACK - Digital
ALBUMS
Date de sortie : 22/10/2016 Durée : 01:01:32 Nationalité : FR Styles : Post-Rock / rock acid / noise psychedelic punk / STONER
Noyades Go Fast
(ATYPEEK MUSIC, S.K. Records, Kandala Records, Rejuvenation, WV Sorcerer Productions, Jungle Khôl et Degelite)
Chaotiques, fuselés mais renfermant aussi de belles accalmies, les sept instrumentaux de Go Fast se déplacent en eau vive. On était instantanément tombé sous le charme de l’éponyme de Noyades l’année dernière. Trois titres au grain crade et à la trajectoire majoritairement rectiligne, jusqu’au-boutistes dans leur dynamique et sidérants quant à l’amoncellement de notes sur lequel ils étaient bâtis. Une densité bruitiste qui rappelait le côté forcené d’un Psychic Paramount ou d’un Aluk Todolo (et donc aussi un peu Laddio Bolocko) couplé à une grosse vibration psychédélique (non pas qu’elle soit absente des groupes précités mais elle était plus centrale chez Noyades) que l’on retrouve plutôt chez quelques Japonais (Acid Mothers Temple, Mainliner, ce genre) et quelques Anglais (Earthling Society). Go Fast aujourd’hui suit exactement le même chemin. Du premier au dernier titre (dont trois étaient déjà présents sur la précédente cassette sous des formes légèrement différentes), la machine ne s’arrête jamais et ne connait pas de ratés. Droit devant certes mais pas tout à fait droit quand même. Le maelstrom de riffs se tord et se distord, la batterie tabasse et les ondes de la basse explosent autant qu’elles accompagnent. Il en résulte des morceaux une nouvelle fois extrêmement denses qui ricochent dans la boîte crânienne, désolidarisent le temporal de l’occipital, l’occipital du pariétal et poussent les yeux hors de leur orbite. Autant dire que l’on ressent quelque chose, l’ensemble pourrait même se montrer légèrement épuisant si le trio ne ménageait pas quelques enclaves purement solaires où les riffs maousses se diluent (sans disparaître le moins du monde) dans l’espace intersidéral. Les accents cosmiques et perchés des Lyonnais n’ont pas disparu avec ce premier long format. Certes, le gros-grain s’est un peu évaporé au profit d’un son plus fuselé mais pas les digressions psycho-patraques qui habitent des morceaux comme Machhapuchhare, Sidi Abderrahman ou Reflects. Ce dernier a d’ailleurs gagné en muscles depuis l’éponyme
inaugural, on le regrette un peu au départ mais on se rend vite compte qu’il conserve finalement la même ossature délitée, chamanique et qu’il est toujours capable d’emmener loin et haut. Pour le reste, c’est du disloqué à tous les étages. Depuis l’entame plombée d’un Réplique aussi charpenté qu’expéditif jusqu’à No Other Grave Than The Sea - qui suspend sa course subitement, pile avant d’atteindre le mur contre lequel il s’était lancé - en passant par les plus pesants Bear Rider ou Mevlana, c’est un festival de trajectoires azimutées, désorientées comme le vol d’un bourdon sous un verre. L’apex des morceaux suit des méandres qu’il est bien le seul à percevoir, donne parfois l’impression de ne pas savoir où aller tout en étant déterminé à y aller tout de même, fonce droit devant, se ravise, change d’azimut, rétrograde, s’arrête, reprend, se divise en mille morceaux puis se reconstitue. Go Fast peut-être mais sans oublier de parfois ralentir sa course histoire de laisser un instrument prendre les devants et occuper le spectre quand habituellement il s’en dispute avec les deux autres toute la hauteur. En effet, la plupart du temps, basse, guitare et batterie sont agrafées les unes aux autres et c’est bien de là que provient une grande partie de la densité de l’ensemble. Et puis, loin d’être un long fleuve tranquille, on trouve aussi dans la musique de Noyades nombre de chausse-trappes, bifurcations inopinées et développements inattendus qui battent en brèche son aspect de prime abord trop monolithique. Tout cela se montre parfaitement bien construit et joliment exécuté mais il faut dire aussi que ces trois-là n’en sont pas à leur coup d’essai et ont déjà traîné leurs guêtres au sein de « chapelles techniquement inconciliables » (pêlemêle MurMur(s), Lady Fitness, Torgnole pour Cyril Meysson, The Socks pour Jessy Ensenat, Sathönay pour Vincent Cuny, liste bien sûr non exhaustive) qu’ils ont pourtant réussi à techniquement concilier. Amalgame de noise-rock, de punk, de metal, de drone et j’en passe arrosée de grandes rasades de psychédélisme et de transe, la mixture concoctée par le trio provoque effectivement le même effet que ce que promet son nom. Manque d’air, apnée, asphyxie, remontée à la surface de temps à autre pour inspirer à grandes goulées et de toute façon, quoi qu’il arrive, des papillons devant les yeux, sous la peau et dans les tripes. Finalement, nul n’était besoin d’écrire tout ça. Noyades, Go Fast, quelque chose comme des arcs cinétiques multicolores se détachant d’un fond noir cosmique ornant la belle pochette (signée Synckop) : quoi de mieux pour résumer un tel disque ? Brillant.
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✎ Leoluce www.indierockmag.com http://urlz.fr/53tV
Date de sortie : 21/10/2016 Durée : 00:49:00 Nationalité : US Styles : Metal
KoRn The serenity of suffering (Roadrunner Records )
KoRn vient donc de sortir l’album qu’on attendait qu’il sorte en 2016 ! Avec toute la modernité technique et la richesse des arrangements qu’on espère d’un groupe culte et une forme d’honnêteté dans des titres directs, rageurs, aussi entraînants que percutants, des titres qu’on ne peut qu’apprécier, du premier au dernier. The serenity of suffering, poursuit le même chemin que The paradigm shift mais en s’enfonçant davantage dans la nostalgie des années 90’ avec quelques énormes clins d’œil à la marque de fabrique “KoRn”, comme ce passage de “Rotting in vain” qui reprend “Twist”. Autre fantôme ressurgi du passé, la peluche mal en point traînée par le gamin de la pochette, c’est bien entendu celle qui apparaissait dans Issues… Enregistré avec un maître du clair/obscur, à savoir Nick Raskulinecz (dont le CV enquille un paquet de jolis noms depuis 15 ans comme My Ruin, Velvet Revolver, Alice in Chains, Danko Jones, Deftones, Foo Fighters, Mastodon, Stone Sour…), les Californiens en ont profité pour alourdir la basse tout en gardant d’autres sonorités très limpides et quelques éléments électro qui se fondent assez bien dans l’ensemble, en tout cas, beaucoup mieux que dans un passé récent. Il s’agit ici plus d’un habillage subtil épisodique (“Insane”, “Next in line”) que de lourds sabots comme sur les tubes d’il y a quelques années. Revenu à chant guttural aux hurlements qui ont fait sa renommée, Jonathan Davis se lâche également sur les lignes mélodiques, variant énormément son chant (jusqu’à rendre anecdotique la présence de Corey Slipknot Taylor sur “A different world”), tous les registres gagnent en puissance tant il excelle dans l’exercice. Tu ajoutes un bon paquet de riffs incisifs et une batterie qui a retrouvé de la spontanéité et sa force de frappe et le cocktail est parfait.
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✎ Oli www.w-fenec.org http://urlz.fr/53tX
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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ALBUMS
Date de sortie : 03/03/2017 Nationalité : FR Styles : noise rock / grunge / Indie rock
SPANKED EP
Honey LOVE IS HARD (Wharf Cat Rds)
Flanqué de cordes lacérées et de fûts maltraités, le duo Spanked sort un avant-goût de son album à venir courant 2017 en quatre titres brutaux jouant la carte de la désorientation. Désorientation, car même si la guitare est toujours aussi abrupte que sur leur premier album, Spanked, datant de 2011, cette nouvelle salve porte en elle une urgence qui commence dès Merry Go Rounds et son crépitement de décibels ascendants qui s’accumulent jusqu’à l’explosion, à travers les successions de vélocité puis de retenue. Il n’y a qu’une guitare et une batterie mais on croirait entendre une légion tant leur son est dense, puissant et massivement investi. La voix est plus assurée par rapport aux précédentes productions, il faut écouter Etherlude qui pousse l’endurance à bout de souffle et de frappe. Certains verront du post-rock dans les samples vocaux de cet Etherlude, d’autres une reviviscence grunge à travers la saturation de Walk, morceau que d’autres encore proclameront comme marche de guerre noise. Mais qu’importe les définitions, Spanked s’apprête à asséner une foudroyante rafale poisseuse et stridente.
Trio de Brooklyn portant un nom trop anodin pour être au net. Honnête, Honey l’est. Anodin, moins. Dan Wise au chant et à la guitare, Cory Feierman à la basse et Will Schmiechen à la batterie, ces trois-là ont du tempérament. Leur méthode de fabrication de miel n’est pas très écolo compatible. Je ne sais pas ce qu’ils donnent à bouffer aux abeilles dans le coin, j’imagine qu’elles butinent plus souvent aux tuyaux d’échappement et aux pipes de crack qu’aux pistils des fleurs ! Si on te susurre “honey” sur ce ton-là, tire-toi fissa, ils ont l’apiculture contrariée dans le quartier ! À moins que tu ne sois friand de tartines de barbelés et de beignets à la crème de marrons, vaudrais mieux te tenir à l’écart du buffet, Honey est vacciné à l’Amphetamine Reptile comme un Mudhoney avec un alligator dans le slip. Et ouais, c’est dur l’amour !
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✎ Dig It! Fanzine http://urlz.fr/52xH http://urlz.fr/53tZ
Date de sortie : 16/04/2016 Nationalité : US Styles : Rock ‘N’Roll / Rhythm AND Blues
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SPANKED ©DR
✎ John Do http://urlz.fr/53tY
Los Alamos Grind VA (Numero Group) Sur le modèle des Las Vegas Grind de chez Crypt, Numero Group remonte ces bonnes bouteilles de la cave. Preuve qu’on sait également s’amuser à Los Alamos et qu’on n’hésite pas à faire don de sa personne dans des lieux de perdition. Le “Staletto 135” des Royal Jesters est d’une perversion extrême. T’es pas arrivé au bout des 2’13” que tu as le slip sur la tête. Ils sont fadas d’envoyer comme ça. On dirait un Tex Avery mis en scène par Tarantino. Numero Group recycle aussi une Lou Ragland & the Bandmasters. Y’a pas de petit profit.
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✎ Dig It! Fanzine http://urlz.fr/52xH http://urlz.fr/53u2
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ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
Date de sortie : 05/11/2016 Durée : 38 min Nationalité : uk Styles : Noise Electronique / Prog Math-Jazz-Core
Date de sortie : 6/05/2016 Nationalité : US Styles : Noise ROCK
Barberos S/T (Offset Records // A Tant Rêver Du Roi // Dream
Machine // Et Mon Cul C’est Du Tofu ?)
Trio noise/electronique/prog’ originaire de Liverpool, Barberos distille avec son nouvel album (éponyme), un étonnant cocktail de structures poly-rythmiques et de math-jazz-core tribal appuyé par des effets vocaux lui conférant un côté rétro-futuriste plutôt malin pendant que son duo de batteurs en met plein la vue. L’intérêt du projet étant également largement visuel (notamment en live), reconnaissons que le groupe anglais a trouvé son segment musical, et a partager la scène avec des formations du calibre d’Action Beat, Capillary Action, Kayo Dot, Liars ou Melt Banana, excusez du peu. Peu importe que l’artwork et l’esthétique générale de ce nouvel album pique un peu les yeux, Barberos met directement les choses en clair – et accessoirement en orbite psychédélique – en assénant un « The Return Of The Ladius » qui emmène l’auditeur dans des sphères à la fois électroniques, pas mal noise/indie et surtout bien hallucinées. Tout cela étant habilement marqué par une (double donc…) dynamique rythmique obsédante, cette piste inaugurale marque déjà les esprits par son efficacité expérimentale à laquelle on peut greffer une boucle hypnotique se prolongeant, et se développant, même sur la piste suivante « The Ladius ». Un second titre directement imbriqué dans le premier, puis le troisième dans le second et invariablement. Le schéma adopté par le groupe se répète jusqu’à aliéner son auditoire. Alors que le groupe multiplie les effets sonores, « Timur » franchi une nouvelle barrière et nous pousse dans nos derniers retranchements. Formellement implacable d’un point de vue rythmique (« Akropolis »), Barberos démoli les murs de la ‘normalité’ et délivre un substrat auditive d’une fracassante efficacité, en sus d’une rigueur mathématique redoutable, quand il se s’abandonne pas à des pistes ambient et électro un peu absconses (« Hoyl ») voire à quelques digressions ‘avant-noise’ un peu délicate à suivre. Forcément, à toujours prendre des risques inconsidérés. Exigeant mais assez jouissif dans son genre. ✎ Aurelio www.scoreav.com http://urlz.fr/53u6
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Date de sortie : 3/03/2017 Durée : 01:00:26 Nationalité : FR Styles : Rap / Hip-Hop / ELECTRO / TRAP
SCHLAASSS CASA PLAISANCE (Atypeek MUSIC)
Date de sortie : 24/02/2017 Durée : 00:43:57 Nationalité : US Styles : Alternatif et Indé
Xiu Xiu FORGET (Teenage Menopause)
Duo stéphanois irrévérencieux, Schlaasss allie Charlie Dirty Duran et Daddy Schwartz qui ensemble pratiquent un hip-hop au groove électro, dont la particularité est de parcourir, au travers du délire des deux acolytes, un panel large. La dérision est de mise, on y singe le parler “de périphérie” avec dextérité (No drog yourself), le rythme y embarque aisément l’auditeur (Triste artiste). Kiki, en ouverture, ouvre l’antre d’un univers barré, déviant et inspiré. Relents dub, nappage électro, phrasés dingues et cependant dignes d’intérêt dans le contenu, la méthode est personnelle et ici très porteuse. Noenoeil, Tue la tête et nombre d’autres compositions font dans le loufoque, provoquent des hochements de tête, imposent des atmosphères sombres et délirantes. Avec un tel rendu, Schlaasss se démarque indéniablement. L’opposition entre les voix est marquante, complémentaire (Pupute). Derrière une prétendue attitude désinvolte, la paire issue du Forez donne matière à réflexion et suscite l’intérêt. Quelques traits rock surlignent son œuvre, également et à de rares endroits teintés de R’n’B (Thug Lilith). De l’étrangeté pensée, voilà ce à quoi s’adonne Schlaasss. Il le fait de manière ouverte et musicalement aboutie, sans jamais surcharger son discours. Nanarchie fait bouillir le dancefloor, groove sévèrement. Comme chez Stupeflip ou Sexy Sushi, on prend des chemins de traverse sans s’y perdre, on fait rire aussi (“Toujours ça qu’les Boches n’auront pas” sur Requiem), on balance du son en spirale (Ordo ab chao). C’est bon tout ça, ça se consomme sans faim et ça sert, aussi, d’exutoire. On peut faire dans le plus “sucré” (l’excellent Bisous), ça reste probant. L’aventure prendra fin sur Philippe le dauphin, taillé dans un hip-hop leste, et mérite de toute évidence sa brouettée d’auditions.
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SCHLAASSS © RA2
ALBUMS
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✎ Will Dum www.muzzart.fr http://urlz.fr/53u8
Pour un dépressif chronique, Jamie Stewart est en forme ces derniers temps. Rien qu’en 2016 il aura sorti un fantastique album de reprise de la B.O. de Twin Peaks, quelques disques de troll pur pour faire enrager ses fans, une collaboration dark-ambient avec Lawrence English sous l’alias HEXA et même un disque spoken-word déprimé. Et cette fois, ils jouent de la synthpop. Mais gare à ceux qui s’attendront à danser bien innocemment, ce serait mal connaître Stewart. Sa pop est tout ce qu’il y a de plus névrosée et angoissée, et les caresses synthétiques sont toujours accompagnées de leur pendant noise et industriel, qui secoue des morceaux d’apparence romantiques d’autant de saccades cauchemardesques. Et ça commence dès l’ouverture “The Call” qui intègre un rappeur trashy pour inonder la compo coldwave dansante de ses “CLAP CLAP CLAP BITCHES” et ses “WHY CUNT WHY WHY WHY CUNT”. Voilà de quoi en révulser beaucoup ; même si ça a le mérite de me rassurer sur la volonté de Stewart de prendre des risques et tenter de nouvelles choses. Mais heureusement le ciel s’éclaircit dès la seconde piste “Queens of Losers” qui amène à une fusion de styles que Jamie et sa bande maîtrisent bien mieux que le hip-hop : le rock industriel - enfin en l’occurrence ce qui devient plutôt de la synthpop indus. Et si la démarche principale de FORGET restera ce mariage de dancefloor synthétique glauque, Xiu Xiu nous emmènera visiter des paysages variés. En vrac on aura de l’Arcade Fire période Reflektor (“Wondering”, single de l’album), de l’indus gothique (“Hay Choco Bananas”), du spoken-word (la deuxième moitié de “Faith, Torn Apart”), du néofolk (“Petite”), du synthpunk, j’en passe. Malgré ses agressions, FORGET contient tout de même sa dose de “tubes” (“Jenny GoGo”, “Wondering”, “Get Up”, “Forget”…) et globalement tout le cœur de l’album est excellent. Dans l’ensemble FORGET est un succès. Xiu Xiu a toujours été la thérapie de Jamie Stewart, de son propre aveu. Pour être si productif ces derniers temps, sans doute que l’homme doit avoir encore beaucoup de soucis à régler. Cette pensée est très égoïste et insensible de ma part mais… pourvu que ça dure.
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✎ X Wazoo www.xsilence.net http://urlz.fr/53uc ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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Adult. © NKuperus
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Date de sortie : 17/03/2017 Durée : 01:01:32 Nationalité : UK Styles : Alternatif et Indé
Adult. Detroit House Guests (Mute) Il y a bientôt vingt ans sortait le premier maxi d’Adult. À l’époque, le couple Nicola Kuperus et Adam Lee Miller amenait une nouvelle énergie dans la musique électronique. On ne tarderait pas à les associer à l’émergence de l’electroclash bien que leur univers soit bien plus riche que cela, mélange d’énergie post-punk, de synthpop décalée, d’electro old school et d’un feeling indéniablement dark. Dès le début des années 2000, les musiciens avaient en tête l’envie d’un projet collaboratif, comme des résidences où ils inviteraient d’autres artistes à expérimenter avec eux en studio. Il faudra attendre 2014 pour que ce projet se concrétise avec une bourse attribuée par la Fondation John S. & James L. Knight. Le résultat de ces recherches est paru ce 17 mars et accentue la facette la plus arty du travail d’Adult. Il ne faut d’ailleurs pas oublier que Nicola et Adam font aussi de la peinture, de la photographie, de la sculpture, des installations ou de la vidéo, touchant à tous les aspects du champ créatif. D’emblée, avec le premier titre “P rts M ss ng” enregistré avec Robert Aiki Aubrey Lowe (Lichens), l’électronique se fait mystérieuse, reprenant l’héritage post-industriel des années 80, avec une approche nouvelle des percussions. On pense à Chris & Cosey notamment. L’autre morceau en collaboration avec Robert Aiki Aubrey Lowe (“This Situation”) creusera cette facette plus expérimentale, autour d’une longue plage sonore inquiétante et terrifiante, pas si éloignée des pionniers Throbbing Gristle, NON ou Cabaret Voltaire, avec une bonne dose d’échantillonnage, de boucles hypnotiques et de nappes vibrantes assez glaçantes. On comprend du coup aisément pourquoi le groupe a été signé sur Mute. La connexion n’est que trop évidente. L’autre partenariat fascinant est celui avec le leader des Swans, Michael Gira, pour deux plages rituelles, lancinantes, incantatoires et répétitives (“Breathe On”, “As You Dream”). Le mix est totalement réussi, noir et psychédélique. À première vue, Swans et Adult. n’avaient rien en commun, c’est là où on se trompe car la symbiose marche merveilleusement et ouvre des perspectives rafraîchissantes pour les deux projets.
Date de sortie : 23/10/2016 Nationalité : US Styles : Industrial / Noise
Nine Inch Nails Not the Actual Events (The Null Corporation)
La troisième collaboration très réussie est celle avec Dorit Chrysler, joueuse de thérémine autrichienne. “Enter the Fray” et “Inexhaustible” proposent une electronica mystérieuse, lynchienne, fantomatique, où les voix délirent et s’en donnent à cœur joie. Le chant part dans divers registres, du spoken word aux envolées éthérées jusqu’aux lamentations opératiques. Nicola reprend son registre de diva goth et nous rappelle même la Annie Anxiety des débuts sur “Inexhaustible” qui reste un de nos moments favoris de l’album. La voix s’amuse encore sur “Into the Dream” en compagnie de Lun*na Menoh, du râle aux soupirs sexy en passant par le chant de douche un peu imbibé. Le morceau traîne un peu en longueur et continue dans cette lignée Chris & Cosey tendance cour de récréation. Dans le genre, “Uncomfortable Positions” est bien plus convaincant, rappelant des groupes bien barrés de la scène cassette des années 80 comme BeNe GeSseRiT ou Messy. Le style electro old style réapparaît dans les titres en compagnie de Douglas J. McCarthy (Nitzer Ebb). “We are a Mirror” et “They’re Just Words” ramènent Adult. sur les dancefloors qui étaient leur lieu de prédilection jusqu’à présent. Ces chansons sont efficaces mais pas renversantes pour autant. La collaboration la moins réussie est à l’évidence celle avec Shannon Funchess (Light Asylum). “We Chase the Sound” est proche du ratage complet, avec son côté EBM lourdingue. “Stop (And Start Again)” bénéficie d’une basse post-punk et d’une dynamique goth assez pêchue, mais pas de quoi grimper aux rideaux. Cela ajoute juste quelques nouvelles couleurs à l’ensemble. Au final, Adult. ouvre pas mal de brèches nouvelles avec cet opus et c’est déjà énorme pour un groupe avec une carrière aussi fournie.
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Annoncé et sitôt sorti à la veille du réveillon, Trent Reznor et sa bande nous livre ici 5 titres se consacrant pour la plupart à l’humeur et la facette contemplative du son de NIN qui n’est pas sans évoquer The Fragile. Toujours aussi féroce et torturé, le vampire Reznor ne montre aucun signe de vieillesse dans performance et reste toujours aussi méticuleux dans ses arrangements. Bien qu’on puisse regretter la brièveté de l’EP qui nous laisse sur notre faim, NtAE marque un retour prometteur pour NIN qui revisite les vestiges des paysages futuristes et dystopiques de Year Zero et The Fragile.
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✎ Robin Ono http://urlz.fr/53ul
Date de sortie : Janvier 2016 Nationalité : US Styles : Contemporary / Post-Modern
John Zorn Madrigals (For Six Female Voices) (Tzadik) Compositeur et musicien d’avant-garde aussi prolifique et versatile, John Zorn s’attaque ici au Madrigal, musique vocale polyphonique originaire de la Renaissance. Entièrement Acappella, c’est un choeur de 6 chanteuses aux voix angéliques et crystallines qui se donne en performance sur ces 10 titres. Les voix parfaitement accordées s’entrelacent et se répliquent et mêlent harmonie et lyrisme antique avec contrepoints atonaux et touches d’avant-gardisme, empreintes d’un John Zorn s’appropriant de la forme musicale avec aisance et grâce. Une belle collection de titres minimalistes et berçants qui récompensera ses auditeurs curieux.
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uj
✎ Robin Ono http://urlz.fr/53uo
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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Rick Ross, Raphael Saadiq Apple of My Eye (Epic)
‘Rather You Than Me’, millésime 2017 signé Rick Ross Rather You Than Me de Rick Ro$$ ne suscitait guère d’attente particulière auprès du public rap, rien de moins qu’une galette de plus à son compteur. Sa recette habituelle – qui consiste à faire un parmentier de rap clinquant de chez clinquant sur une couche de trap music servie avec le gratin du moment – a fini par lasser, et engranger moins de recettes. Le départ du boss de Miami de Def Jam l’a-t-il contraint de complètement revoir sa copie ? Absolument pas : ce neuvième album est bel et bien une livraison Maybach Music full option, mais qui parvient à retrouver le standing de ses grands standards que sont Deeper Than Rap et Teflon Don. Et là, c’est l’épatement. 68
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
Rick Ross a toujours été vendeur de rêve avec son rap ‘deluxe’ bâti sur des fantasmes de petit gangster qui regarde Scarface tous les dimanches. On l’a vite compris – et entendu – depuis ses premiers singles majeurs “Hustlin’” et “Push It”, qui samplaient justement “Scarface (Push It To The Limit)”, issu de la B.O. du film culte. L’ascension du rappeur lancé chez Def Jam par Jay-Z, en dépit de quelques accrocs avec 50 Cent notamment, n’a ensuite été qu’irrésistible jusqu’aux très riches Deeper Than Rap (2010) et Teflon Don (2011) qui sont devenus ses mètres-étalons. Puis, sans trop de raison apparente, la qualité de ses albums n’a fait que décliner ou stagner. God Forgives, I Don’t était supposé nous emmener plus haut sur une montagne de pièces d’or avec sa guestlist digne d’un gala de charité (Jay-Z, Usher, Pharrell, Dr Dre, Andre 3000…) mais parce qu’il y avait des gobelets en plastique pour servir vin et champagne – la faute à des producteurs de second choix –, les gens ont reculé devant le buffet. L’album sera néanmoins
Date de sortie : 17/03/2017 Durée : 01:03:00 Nationalité : US Styles : Rap
certifié disque d’or, mais ce sera le dernier. Rick Ross fait donc appel à un millionnaire pour se renflouer (artistiquement), Sean Combs alias Puff Daddy, pour Mastermind. Cette fois ça manque de bangers. Hood Billionaires ne manquera pas d’être la cible des critiques face à cette auto-caricature de trop et sans saveur, et plus tard Black Market peinera à convaincre avec son format de mixtape améliorée, chic mais devenu ringard. Mais ça, c’était avant. Tandis l’écoute de Rather You Than Me se prolonge délicieusement, on se demande alors comment Rozay a pu revenir à un tel niveau de raffinement. Comment ? La vraie question est plutôt : grâce à qui ? Antonio ‘L.A.’ Reid. Coïncidence ? Personne n’y croit pas. Si vous ne connaissez pas ce nom, sachez juste que cette éminence de l’industrie du disque est à l’origine de l’émergence et des succès des Outkast, TLC, Usher, Ciara… C’est aussi lui qui a officiellement annoncé le retour inespéré de A Tribe Called Quest l’an passé. Alors, quel rapport avec Rick Ross ? L.A. Reid a
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Top 5
MORCEAUX DU MOMENT
Rick Ross © Krista Schlueter, GQ
By SURL, Bigger than hip-hop été le dirigeant d’Island Def Jam Music Group de 2004 (année où Jay-Z a pris ses fonctions de président chez Def Jam) jusque 2011, l’année où est sorti Teflon Don, avant de retourner chez Sony pour redévelopper la filiale Epic Records. Et le choix de Rick Ross de quitter la maison Def Jam pour Epic a été motivé par cette volonté de refaire des affaires avec son patron historique. “Quand je suis arrivé en 2006, tout ce qu’on faisait c’était gagner, on faisait de gros chiffres, raconte le boss de MMG sur XXL début 2016, L.A. a toujours compris ma vision artistique et créative. À chaque fois j’allais à son bureau, on s’asseyait et on discutait de différentes approches. On a toujours réussi à se mettre d’accord et on a toujours gagné gros. En fin de compte, c’est ce sur quoi j’ai basé ma décision.” Tout est dit.
Rather You Than Me, successeur naturel de Teflon Don Plus Rozay prend de la bouteille (Rozay, bouteille… vous l’avez ?), plus ses rimes deviennent intéressantes. “I’m Michael Jackson to the rich niggaz”, proclame-t-il sur “Santorini Greece”, faudra quand même poser la question aux gens qui paient l’ISF. En tout cas, quand il se met franchement à rapper, il s’ouvre sur des sujets plus personnels et même politiques comme sur “Apple of my Eye” (“I’m happy Donald Trump became the President / because we gotta destroy before we elevate”). “Powers That Be” avec Nas n’a en revanche rien de politique (contrairement à ce que l’intitulé peut laisser penser) mais il ne s’agit pas moins d’un égotrip de puissant chef d’entreprise qui fait bomber le torse. Rick Ross n’hésite pas d’ailleurs à se mettre au même niveau que les Puffy et Jay-Z. Birdman ? Il a raturé son nom de cette short-list.
Ross se dit choqué et déçu par l’attitude du boss de Cash Money qu’il adulait par le passé, au point de lui dédier un titre entier, “Idols Become Rivals”, sans refrain et très froid – avec ce sample déjà utilisé par Jay-Z sur “Where Have You Been”. Et comme l’homme n’est pas une petite nature, il n’utilise aucune forme de rimes subliminales : Stunna est clairement la cible. En lisant entre les lyrics très cash, le rappeur se sent sincèrement trahi par son idole et revient longuement sur la chute du millionnaire à la tête étoilée, en se rangeant du côté des artistes qui ont été abandonnés par Birdman, que ce soit DJ Khaled, Turk ou B.G., voire abusés comme Lil Wayne – même au sens physique, si on se fie aux rumeurs. L’intro de Chris Rock semble anecdotique en comparaison de cette attaque. On apprend également grâce à Rather You Than Me que Rick Ross a froncé du regard quand il a va Nicki Minaj débarquer dans la vie de Meek Mill (“I told Meek, I wouldn’t trust Nicki / Instead of beefin’ with your dog, you just give ‘em some distance”). On ne pourrait pas mieux résumer cet opus que par une métaphore automobile, puisqu’on parle du patron du groupe Maybach Music. Rather You Than Me, par rapport à Deeper Than Rap ou Teflon Don, c’est comme passer d’un modèle de Rolls Royce de 2010 à la gamme renouvelée, flambant neuve et plus au point que jamais. La philosophie est identique, le luxe surabondant, les dimensions statutaires, des petites choses dont on a jamais osé imaginer. La grande classe, en somme, en plus moderne. La préférence de Rick Ross va à une Rolls Royce Wraith ; la trappe s’accorde bien avec le côté dynamique de cet exceptionnel coupé.
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✎ Sagitarius www.surlmag.fr http://urlz.fr/53uq
COMmENT LIRE UN QR CODE ? Pour lire un QR Code, il suffit de télécharger une application de lecture de QR Codes. D’ouvrir l’application et viser le QR Code avec l’appareil photo de son téléphone mobile et l’application lance l’écoute de la playlist.
Al’Tarba X Vîrus La Nuit se Lève
Al’Tarba vient de sortir un nouvel album, La Nuit Se Lève. Sur le track éponyme, il convie un autre expert en noirceur : Vîrus (notre interview sur le site SURL). Le résultat est d’une beauté poisseuse, à écouter au chaud.
Consequence x Chance The Rapper x Alex Wiley x Chuck Inglish x GLC Spaceship III Mieux que Trainspotting 2 : la suite de la suite de “Spaceship” de Kanye West, avec Consequence, Alex Wiley, GLC, Chance et Chuck Inglish. Moins de drogue, mais plus de vibes.
Tee Greezley X Lil Yachty From The D To The A
Après avoir passé trois ans en taule, Tee Grizzley a la rage. Il a signé chez 300 Entertainment début 2017 et vient de dévoiler un nouveau track en featuring avec Lil Yachty, “From The D To The A”.
Slim 400 X A$AP Ferg Hol’Upppp
Slim 400 est un soldat de la West Coast auteur de quelques sympathiques mixtapes qui ne brille jamais plus que lorsqu’il est bien entouré, comme il l’a prouvé plusieurs fois sur les albums de son complice YG. Sur “Hol’Upppp” il tente d’établir un viaduc traversant les States en invitant le représentant d’Harlem A$AP Ferg.
Creestal x CONWAY x Hus Kingpin Problemz On dirait bien que Creestal, le prolixe beatmaker marseillais, a décidé d’inviter les rappeurs les plus chauds du moment sur son album à venir Diffrences. Ici encore, Conway et Hus Kingpin nous démontrent de façon grisante toutes les vertus de rapper sous weed la dureté de la vie des ghettos US.
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Vald AGARTHA (Oulala: CAPITOL)
« Vald est un enfant Indigo, c’est tout ce que j’ai à dire » Alors qu’on se le dise (merde j’ai déjà dit deux fois « dire » !) je ne vais pas faire une critique intelligente du nouvel album de Vald. Généralement je trouve ça très ennuyeux : « les chroniques », et je ne comprends pas comment une personne peut donner son opinion sur de la musique comme si c’était la vérité. Que des gens lisent ça pour se faire « un avis » me répugne encore plus. Et pis c’est pas mon travail. Mon travail c’est Schlaasss, et j’ai d’ailleurs rencontré Vald lors d’un concert ou nous partagions l’affiche dans un festival l’année dernière. L’enfer quand tu fais des concerts c’est de rencontrer « en vrai » des artistes que tu aimes beaucoup, lors d’une date commune par exemple. Souvent tu te rends compte, qu’à part te demander du speed et te décevoir terriblement par une suite de petites actions médiocres, ils sont comme la plupart des gens : des êtres humains nuls à chier. Quand tu es de sexe féminin, ils essaient généralement de te « bénène » en te faisant comprendre que ta place est bien plus avec leur bite dans ta bouche à l’hôtel Ibis que sur scène tout à l’heure ou t’as vraiment un problème avec ta féminité blablabla…
Vald ©DR
Date de sortie : 20/01/2017 Durée : 01:07:25 Nationalité : FR Styles : RAP
Bonne surprise, lorsque j’ai rejoint Vald et sa bande dans leur chambre d’hôtel, personne ne m’a réduite à une « Petite Chatte ». On a fumé de l’excellente weed, on a parlé et rigolé tranquillement entre « êtres de lumières », ils étaient chouettes, gentils et lol. Globalement, ils dégageaient une énergie arc-en-ciel maxi bienveillante. Vald m’a demandé pourquoi je n’enlevais jamais mon bonnet rose fluo. Je lui ai répondu que c’était pour une raison simple et mystérieuse. La même raison qui lui faisait garder ses lunettes de soleil alors qu’il faisait nuit. En 2017 le nouveau Vald est là, sans lunettes de soleil et sans son légendaire sweat Redskins bouclier, il a trouvé la force de se laisser regarder par Satan et les Francs-maçons. Dans le morceau « LDS » qui parle de ses Ray Bans justement, il clame : « J ‘me suis pas réincarner pour bouillave à Pattaya ». Valentin est là pour nous délivrer, gros taff. « LOURD » comme il dit en interview quand il faut bien combler le vide et l’ennui du dévoilement impossible de sa mission. Vald est très certainement un mage des temps 2.0. Il s’adresse à la partie magique de chacun d’entre nous en revêtant le costume de ses propres ennemis. Il infiltre le système et encourage tout le monde à le faire. Observons sa méthode alchimique subversive : dans le morceau numéro 4 par exemple « Je t’aime », il met en parallèle l’amour et l’amitié comme une même énergie, compliquée, mais indispensable et précieuse : « Tout niquer seul j’en ai jamais rêvé ». Il pose des couplets intimes adressés à la femme de sa vie, puis à son meilleur ami. Il pourrait se vautrer dans cette déclaration d’amour si touchante, presque du rap conscient oulala… mais si proche du couronnement il vient « tout niquer » avec un refrain cucul et pop à la limite du ridicule. Pourquoi ??? Qu’est ce que cela
signifie ? Comme pour « Selfie » et « Bonjour », titres de l’album précédent, il ruse le petit coquin ! Les gens vont chantonner ce refrain efficace sans comprendre la substance des couplets du morceau. Mais le mantra est là, les nouveaux circuits sont en marche. Le message va s’insinuer par la magie de la répétition. Les tracks de cet « Agartha » sont toutes composées de ce paradoxe, gnôle de luxe dans une canette de 8.6. Fais un ptit effort d’écoute et tu comprendras la leçon. Qui n’est d’ailleurs jamais assénée comme telle. Vald reçoit-il des subventions de l’éducation nationale ? Non, trop formaté. Ou des extraterrestres ? Non, trop facile. Ce qui est sur c’est qu’il aligne sur cet album une bonne dizaine de morceaux mégas puissants. Paie tes tubes « Mégadose », « Eurotrap », « Kid Cudi »… Valentin, le moine d’Aulnay, hurle sa dépression sur des prods commerciales qui feront danser les foules sous MD de ses concerts. Il fera du playback et célébrera la vacuité de ce monde en sautant et en dabbant « Turn up dans le club » avec son comparse AD à ses côtés. Suik’on Blaze AD, super rappeur incisif et discret, qu’on devine comme la flamme jumelle de Valentin, son ancrage en plus d’être son backeur. Et dont le feat sur « Blanc » résonne comme un pacte adolescent « La Vie de Ma Mère que je vais nous délivrer ». « Blanc » qui vient bien mettre une Volvo dans le cul à tout le monde. Avec la vaseline, Vald fait passer un gros morceau politique et AD en remet une couche : « J’me torche le cul avec le Point et le Figaro ». « Blanc comme dieu », vous trouverez votre place au paradis, parmi les babtous et les riches les minous, ou alors vous ferez autre chose, et je vous le souhaite. Ma préf reste « Totem » ou Valentin ajoute à son écriture énervée une interprétation brutale à se péter la voix, braillant l’inconfort à porter cette lumière que personne ne voit et que peu comprennent. Comme tous les sages ils souffrent de « savoir », si jeune et si blond, bichette ! Ouais bébé Vald je sais que tu vas sauver le monde, car faire rimer « Pégaze » et « Pétasse » c’est le truc le plus réellement thug et indispensable à faire aujourd’hui. Comme tu le dis dans ton dernier morceau « Tu retournes en enfer » parce que t’as décidé de t’incarner ici et maintenant. Et que faire péter les barrières de l’autoroute de la chiotte c’est pas toujours « easy », surtout dans le rap. Avant l’apocalypse et le changement de dimension, je veux bien faire un feat avec toi. Mais tu es trop malin pour ça. Et moi je suis trop conne, je viens de faire une chronique musicale. Je pars au donjon me faire fouetter pour blasphème. KIKOO
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✎ Charlie Dirty Duran http://urlz.fr/53uv ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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Date de sortie : 2016 Durée : 21min Nationalité : US Styles : classical electronic / queer r’n’b
Date de sortie : 03/03/2017 Durée : 01:01:01 Nationalité : FR Styles : Rap
Cakes Da Killa Hedonism (Ruffians)
djordjevic CompilATION à Paul Narèphe (Linge Records)
Stupeflip Stup Virus (Etic System )
Cakes Da Killa et son hip hop plus rythmique que mélodique, parfois proche, sur Keep it Goin et Been Dat Did That, du Diddley Beat. Un flow marathonien qui ne peut étancher sa palabre. Composition à nu, réception à cru pour ce debut album dépourvu de censure et considéré par son propre auteur comme une tribune personnelle à l’encontre de tout musellement. Et de toute étiquette puisqu’il refuse d’être associé uniquement à une « scène hip hop LGBT ». Cakes Da Killa est gay et entend jouir de la vie en tant que tel mais son album n’appartient qu’à lui et à ceux qui veulent découvrir sa manière de tracer son chemin. A vif, dans le fun, dans la multiplication d’expériences sexplicit (Frostin’) que relatent sa verve joyeusement impudique. Cet « Hedonism », titre de l’album, c’est SON hédonisme, sa manière intense et trépidante d’être au monde, way of life qui requiert d’être suspendu à son New Phone. Impudeur n’est pas vulgarité si l’on mesure que la joie, dans une société toujours aussi hostile aux homosexuels, est une forme de résistance face à l’ignorance crasse. La célébration de la vie se fait dans les clubs qui sont pour lui un home sweet home où loge sa liberté et son identité. Up Out My Face accueille d’ailleurs, au refrain, une invitée de choix, Peaches, qui a toute sa place dans l’univers de boîte de nuit bondée qu’est cet album. Et puis surgit un îlot de douceur assez isolé au milieu d’une ambiance générale de clubbing : Tru Luv, éclat soul réalisé en collaboration avec Josh DST, venant apporter une touche plus sereine à un opus survolté.
À la sortie d’un bar étiqueté Estaminet, sur la plage lors du Samynaire ou sur la scène du festival Off d’Avignon, j’ai rencontré Djordjevic. Il s’agit d’un mec de Paris qui pense quelque chose sur une vidéo Youtube de David Guetta préconisant ses précieux conseils de production (trouver le kick qui nous plaît le plus au monde et l’utiliser dans toutes ses productions). Un homme se lève pour s’opposer à ses dires, il s’agit bien sûr de Djordjevic, qui, en une seule chanson, ridiculise avec candeur cette star de la musique électronique mélodique pour stade ou amateurs de champagne premier prix vendu au tarif de boîte. Jeune actif fraîchement sorti d’une école dont nous tairons le nom, ce musicien nous livre son probable second album à moins qu’il s’agisse du dixième, impossible de le savoir dans le contexte informel qui l’entoure, soutenu par le label Linge Records qui accueille cette sortie. Après avoir abordé le sujet du graphite, lors d’une courte introduction enregistrée sur la table d’un jardin autour d’un café, Djordjevic balance des tubes. De la Dance guillerette et rebondie, le tout entrecoupé de morceaux acoustiques (piano, voix ou guitare) et chanté avec une justesse approximative. C’est pourtant bien de chansons à texte dont il s’agit, d’odes à la banalité qui le feraient passer pour un héritier de Tom Novembre ou Anne Laplantine, ou un Lizene qui aurait collaboré avec Gala. « Compilation à Paul Narèphe » est un assemblage de morceaux dansants et de chansons aux propos inoubliables, avec un ton hésitant et inconfortable. N’allez pas écouter ce disque si vite, car le meilleur moyen de découvrir Djordjevic c’est de foncer le voir en concert, pour admirer ses performances de guitariste, son lightshow miniature et spectacle d’objets construits sur mesure pour chacune de ces chansons. Attention Spoileur ! À noter : une reprise piano magnifique, intense et exsangue du hit putassier « Call On Me » d’Eric Prydz, et une piste qui traite de la sécheresse de certains gâteaux après ouverture de leur emballage. Lien à rajouter.
Stupeur, Stupéfaction… Stupéfiant retour de Stupeflip… dans la plus grande indiscrétion ! Un dernier album, Stup Virus, financé grâce à un crowdfunding sensationnel classé comme un record européen. Depuis leurs débuts dans les années 2000, le groupe aux mille visages, personnages et intrigues alterne périodes de veille profonde et réveil tumultueux. Mais à en juger le succès de la levée de fonds entreprise en 2016 pour son tout récent opus, la formation semblait avoir laissé un vide incomblable dans le paysage du hip-hop fusion. Ce hip-hop au tempérament de punk, dopé par un bouillonnement de références alliant rock, synth wave (Lonely Loverz), trip hop (The Solution) et surgissement de sons bizarroïdes assumés (La seule alternative). Et puis retrouver Stupeflip revient à renouer avec son univers de bric-à-brac ordonné selon les « ères du Stup » et l’organisation secrète du « Crou » dont le Stupeflip ne serait qu’une émanation. L’opus est scandé par de courtes plages narratives expliquant la propagation du « Stup Virus » ainsi que par des morceaux minimes d’une minute (Knights of Chaos, Fou-fou, Grosse Tête). Forcefield étend le scénario catastrophe du « Stup Concept » vers une divagation poétique magnifique. Crou Anthem et 1993 ravivent, eux, avec une rage teintée d’humour, la nostalgie des beats nineties du rap français. Sur 19 titres mêlant jeu de rôles dynamiques et dissymétrie constitutive, l’album s’écoute avec plaisir et fluidité mais nécessite plusieurs tours de platine pour prendre la mesure de son univers riche et de sa poésie énigmatique.
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Cakes Da Killa ©DR
✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53uw
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✎ Lühje Dallage http://urlz.fr/53ux 72
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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✎ Jonathan Allirand http://urlz.fr/53uy Stupeflip ©DR
Date de sortie : 21/10/2016 Durée : 00:32:19 Nationalité : US Styles : HIP HOP / RAP / ELECTRO
Cakes Da Killa © Alana Yolande
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Date de sortie : 25/10/2016 Nationalité : AT Styles : electronic / expérimental / Avantgarde
Date de sortie : 02/12/2016 Durée : 00:33:37 Nationalité : DE Styles : Electro
Renaldo & the Loaf Hurdy Gurding (Klanggalerie)
Rashad Becker Traditional Music of Notional Species Vol. II (PAN)
Ce fut le retour inespéré de la fin d’année 2016, presque trente ans après leur dernier disque en date : The Elbow is Taboo (1987). Créé dans les années 70, le duo britannique formé par Brian Poole (Renaldo) et David Janssen (Ted the Loaf) a produit une des musiques les plus étranges du monde. Parfois comparé à un singulier mélange entre les délires dadaïstico-surréalistes du Residents des débuts et une folk ethnique d’un autre âge, leur univers sonore n’a jamais eu de réel équivalent.
Plus connu pour son travail derrière les consoles d’un studio comme ingénieur du son, pour ses masterings tirés au couteau, que pour sa musique, l’allemand Rashad Becker revient trois ans après son premier album Traditional Music of Notional Species Vol.I avec un deuxième volume qui continue son travail de recherche sur le son et les tensions. Alors que l’on pourrait s’attendre d’un ingénieur son, qu’il nous sorte un album de techno aux sonorités gonflées à bloc, Rashad Becker lui, s’offre le luxe de jouer sur les ambiances dilettantes et les constructions électro-acoustiques aux résonances surgies d’une tribu perdue. Les outils qu’il utilise sur Traditional Music of Notional Species Vol. II font appel à une familiarité étrange, dérivant sur des eaux instables aux courants profonds, folklore souterrain d’une urbanité passant à coté de perceptions enfouies dans des systèmes microscopiques, que seule une attention particulière permettra de mettre en relief.
Vous pouvez aller voir la vidéo du morceau “A Convivial Ode” sur Internet pour juger par vous-même, un titre plus représentatif de la veine médiévale campagnarde du disque (les absolument excellents “Gurdy Hurding” et “Carrot Ballet”). D’autres compositions explorent un aspect plus fanfare (“Henri Rise”), des valses d’un autre monde (“Pessimistic Song”), une electro groovy déstructurée et grotesque (“Scent of Turnip”) ou des atmosphères plus énigmatiques (“Asper Dorsalis”), avec une grande présence des voix, retraitées, découpées et superposées à foison. Jouissif d’un bout à l’autre.
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uG 74
ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
Rashad Becker casse les images pour donner naissance à une musique moléculaire aux rythmes singuliers, distorsion permanente d’effluves spectrales pour des montées d’adrénaline inquiétantes. Construite autour de polyrythmies tribales et d’extensions oniriques, la musique de Rashad Becker est d’une intelligence absolue, condensant la musique dans un écrin de matières abrasives, mariant didgeridoos et trompettes enfantines, bruits de percussions indéfinissables et chants imaginaires nés de machines malades rafistolées au scotch. Traditional Music of Notional Species Vol. II est une beauté absolue pour celui qui saura en comprendre ses motivations et en accepter sa totale liberté. Magistral.
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✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53uI Rashad Becker ©Yusaku Aoki/RB
Les voix y sont suraiguës et cartoonesques, les rythmiques dynamiques quand elles ne sont pas hystériques. Les instruments traditionnels s’intègrent à des boucles sur bandes magnétiques et autres guitares préparées pour créer de bizarres mélopées médiévales. Struvé & Sneff (1979), Songs for Swinging Larvae (1981) et Arabic Yodelling (1983) ont définitivement imposé leur style, qui reste intact sur ce cinquième opus. Rien n’a véritablement changé si ce n’est la technologie. Les bidouilles électroniques, bien que plus sophistiquées que par le passé, gardent cette touche avant-gardiste, mêlées à un instrumentarium et tout un tas d’arrangements proches des musiques celtiques. L’ensemble est délirant comme jamais, les mélodies aberrantes, les samples revigorants et l’imagerie absurde et carnavalesque toujours de mise.
John Lydon / PIL ©DR
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ALBUMS
Date de sortie : 28/10/2016 Nationalité : UK Styles : Punk / New Wave
PIL METAL BOX (UMC / Virgin EMI) Une des pièces maîtresse et pionnière du post-punk, “Metal Box” de 1979, ainsi que le moins plébiscité “Album” de 1986 se voient réédités une nouvelle fois. Encore ? Oui mais cette fois-ci on est plus proche du documentaire que de la réédition à bonus. Rien de nouveau du côté de la remasterisation qui date déjà (2009) mais mérite d’être redécouverte. Après comparaison avec la version précédente au même volume, celle-ci bénéficie de médiums aigus plus équilibrés, moins métalliques et criards (bien ou pas, à vous de trancher), L’attaque des transitoires est légèrement accentuée, et, même avec le gain de volume, la dynamique reste similaire ce qui est un point crucial et louable. Le traitement sonore hétérogène des autres disques liés à « Metal Box » est loin des canons de notre époque, et tant mieux, avec un son plus mat et toujours cette belle dynamique. C’est naturel et sans artifices (même si parler d’artifices et un bien grand mot pour du PIL). Même si certains mixs ont plus de coffre, rien n’est mieux ou moins bien, il s’agit juste de choix, de sensations et de parti pris complètement différents.
Sur le CD3 de « Metal Box », on trouve une version géniale de « Death Disco », dont la section rythmique bien Fat est mise en avant. Pour le reste, on retiendra un mix alternatif de « Memories », plus chaleureux que l’original, une pré-version expérimentale de « Chant » ainsi qu’une blague sympathique à la fin de « Music for an Oven ». Les lives sont bruts, davantage choisis pour leur énergie que pour leur qualité sonore qui laisse parfois à désirer, comme en témoigne le live à Manchester, organisé à l’arrache juste après une session du groupe à Granada TV.
ALBUM (UMC / Virgin EMI) Place à “Album” de 1986, qui célèbre ainsi ses 30 balais, avec une autre flopée de compact discs, incluant un live à la Brixton Academy dont le son terne et beaucoup trop sage provoque une sensation de vide. Le CD le plus intéressant reste ici celui des démos. Enregistré dans des conditions moins soignées, ça sonne quand même du tonnerre. On sent que le passage studio avec Bill Laswell a totalement changé la donne, dans le bon comme dans le mauvais sens. Les morceaux empruntent un chemin beaucoup plus froid et radical, nourri d’improvisations et de mantras, d’expériences de studio et étonnent par leur éloignement avec les productions Killing Jokesques ou « américanisées » de l’album. L’omniprésence de boites à rythmes donne un tout autre caractère, beaucoup plus proche d’un climat cold wave / synthwave. On pense évidemment aux Cure de l’époque, mais aussi à Neon Judgement ou aux plus tardifs Revolting Cocks.
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✎ Lühje Dallage http://urlz.fr/53uK
Le point négatif, c’est que les coffrets de rééditions multi-CD, c’est toujours un peu la même sensation. Même si c’est bien, riche et soigné, il est rare que ce soit majoritairement inédit. On a alors l’impression de manger 4 jours de suite, et à tous les repas, son plat préféré, le gratin de courgettes. Cela n’est bien sûr qu’un exemple et aucunement le plat préféré de John Lyndon. Une succession des mêmes rondelles qui ne veulent pas dire grand-chose, sans visions folichonnes : CD1 : L’album, CD2 : Du live, CD3 : Des mixes rares, CD4 : Démos et autres : Un systématisme qui devient angoissant. Finalement, une des rares rééditions récentes dont je me souviens, et qui sortait (un peu) des sentiers battus, c’est le “Total” de New Order / Joy Division, compilation des morceaux de chacune des deux époques du groupe. Est ce que le résultat est une réussite ? Pas vraiment. Malgré tout, il y avait une vision, une prise de risque, avec un seul et même CD regroupant d’excellents mixes alternatifs rares et un mastering d’une qualité sensationnelle. Les rééditions en coffret ont également tendance à faire naître le sentiment frustrant qu’il nous est offert qu’une partie émergée de l’iceberg. Pour un groupe comme P.I.L on s’attendrait à quelque chose de plus conceptuel. À quand une réédition numérique avec les 30 mixes de la même chanson, et les jams rares ou autres fonds de tiroirs de chez grand-mère ? Bref, quelque chose de vraiment bluffant, passionnant ou drôle, par pitié !
Date de sortie : 3//06/2016 Durée : 00:37:08 Nationalité : DK Styles : Electro
BODY SCULPTURES A Body turns to Eden (Posh Isolation) Composé de musiciens de la scène noise suédoise et danoise, Body Sculptures pourrait être un super groupe. On y retrouve Jonas Rönnberg, Erik Enocksson, Frederikke Hoffmeier, Ossian Ohlsson et Loke Rahbek. Pourtant, le style qu’ils ont choisi d’explorer est à l’antithèse de ce à quoi on pourrait s’attendre : une musique ambient minimale de toute beauté, très mélancolique et mystique. Après un premier disque sous format singe + cassette en 2015, The Base of All Beauty is the Body, les cinq comparses continuent à explorer un univers où se mêlent l’électronique et l’acoustique, porté par les émotions visuelles. Cette fois-ci, ils se sont inspirés de la photographie d’un jardin marocain. Difficile de dire comment cela peut se ressentir dans ces compositions, si ce n’est que cette musique éveille l’esprit à de nombreuses visions, plutôt enneigées il faut bien dire car cet album se révèle particulièrement glacial. Comme bon nombre de leurs comparses, ils ont digéré l’héritage postindustriel pour le mêler à des mélodies synthétiques accessibles, tout comme Haus Arafna ou Antlers Mulm, dont chaque morceau s’apparenterait à un requiem (les orgues sur “The Pyre”, les cloches sur “Breath of Wind Sows the Seed”). En ce sens, on pense indéniablement au Coil de la période Astral Disaster/Musick to Play in the Dark ou à l’album de Caroline K., Now Wait for Last Year. Le John Carpenter mystérieux des années 70 nous revient aussi à l’esprit, en particulier quand des boîtes à rythmes vintage viennent se joindre à ce délicieux mixage, d’autant plus que Body Sculptures aime à reprendre des thèmes musicaux (“Turning Field”, “Turning Field II Sunflower”). C’est funèbre et brumeux. Les voix féminines monotones ajoutent encore un peu d’angoisse (“Feet Into Soil”, “On the Flowers Face”), jusqu’à friser la procession funèbre. Les légères rythmiques technoïdes ne dissipent jamais la froideur élégiaque. On se laisse envahir et on glisse dans cet univers de drones vibrants, de grincements ombrageux et de mélopées synthétiques. Le frisson nous prend jusqu’à la fébrilité des larmes. Beau et addictif au plus haut point.
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uP ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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Jarring Effects & Post World Industries présentent
Nouvel album Drapetomania
28 avril (2017) CD / Vinyle / Digital « Filastine sonne moins comme de la musique du monde mais plutôt comme de la musique d’un autre monde » Pitchfork
TOURNÉE MONDIALE : 22.04 • Sala Apolo • Barcelone (SP) 29.04 • Macao • Milan (IT) 30.04 • Tunis (TUN) - TBC 04.05 • Madrid (ES) - TBC 05.05 • Keroxen Festival • Lanzarote (ES) 20.05 • Gjirokaster Festival • Gjirokaster (AL) 28.05 • Lighting in a Bottle Festival • Bradley, Californie (US) 31.05 • Starline Social Club • Oakland, Californie (US) 01.06 • Los Angeles, Californie (US) 08.06 • Re-Bar • Seattle, Washington (US) 09.06 • Watershed PDX • Portland, OR (US) 10.06 • Starr Bar • Brooklyon, NY (US) 16.06 • Holland Festival • Amsterdam (NL) 07.07 • St Petersburg (RU) 08.07 • Bol Festival • Moscou (RU) 01.08 • Les Orres (FR)
FILASTINE
& NOVA
ALBUMS
Date de sortie : 16/09/2016 Durée : 33 min Nationalité : US Styles : Hardcore Rock/Punk
Date de sortie : 18/03/2016 Durée : 1:08:08 Nationalité : DE Styles : BO / Contemporary Jazz / Soundtrack
Date de sortie : 8/07/2009 Nationalité : JP Styles : Fusion / Contemporary Jazz / Electronic / Jazz / Rock
Touché Amoré Stage Four (Epitaph)
ERNST REIJSEGER Salt & Fire (Winter & Winter)
Mouse On The Keys An Anxious Object (Denovali Records)
À l’image de son titre, ‘Stage Four’, paru chez Epitaph et qui fait suite trois ans plus tard à l’excellent ‘Is Survived By’ – après deux albums commis via Deathwish Inc. – parle d’un sujet grave en évoquant de manière largement autobiographique le combat qu’a mené jusqu’à la fin la mère de Jeremy Bolm (le frontman et vocaliste du groupe) contre le cancer. Une thématique assez difficile donc, qui fait le cœur d’un album que les Américains ont su rendre à la fois sobre et particulièrement intense. Entre colère, désespoir, résignation, refus de la fatalité, Touché Amoré aborde la maladie de manière frontale, avec le magnifique « Flowers and You » inaugural et bouleversant qui ouvre ce nouvel album. Un titre à la fois touchant et rageur en forme de grand huit émotionnel qui nous fait passer par un peu tous les états et démontre que le groupe, à l’image de ce dont il veut ici témoigner ne se laissera jamais abattre (« New Halloween »). Sans fausse pudeur mais avec cette intégrité qui a toujours été l’une des marques de fabrique de leur musique depuis ‘…To the Beat of a Dead Horse’ en 2009, les Touché Amoré ne cachent rien et abordent les aspects les plus difficiles de cette lutte acharnée contre la maladie (« Eight Seconds », « Palm Dreams »). Du choc des premiers symptômes, de l’acceptation de la maladie, de la peur de ne pas s’en sortir, de l’espoir, de ces moments où l’on sent au fond de soi le besoin de profiter une dernière fois de ces petits instants de bonheur que réserve malgré tout l’existence (« Benediction »), le groupe parle à l’intime et le fait avec une classe étourdissante (« Posing Holy », « Water Damage »). Accompagné de ses frères d’armes, Jeremy a voulu rendre un dernier hommage à sa mère avec cet album se terminant sur le très beau « Skyscraper » (avec Julien Rose Baker). Une ultime ode à l’amour filial, émouvante, touchant mais jamais forcée qui conclue joliment cet album indispensable, autant de par sa thématique que de sa réalisation imparable. Sans doute parce que les grands groupes et musiciens se révèlent dans les moments les plus difficiles de leur vie. Respect. ✎ Aurelio www.scoreav.com http://urlz.fr/53uM
Avec Ernst Reijseger, le cinéaste Werner Herzog a retrouvé un univers mélancolique, incantatoire et ample comme celui qu’il avait développé avec Popul Vuh durant sa grande période (Aguirre, Cœur de verre, Nosferatu, Cobra Verde, Fitzcarraldo). Il s’agit ici de leur cinquième collaboration ensemble après The White Diamond, The Wild Blue Yonder, Dans l’œil d’un tueur et La Grotte des rêves perdus. Aucun synthétiseur chez Ernst Reijseger et un background tout autre que celui des planants Allemands. Violoncelliste, plus habitué aux musiques improvisées, musiques du monde ou musiques de chambre, le néerlandais combine ici tout son savoir-faire afin de proposer une musique immersive, élégiaque et languissante. L’originalité vient de la diversité des interprètes et des combinaisons culturelles étonnantes orchestrées par le compositeur. Cordes grinçantes, piano romantique, accordéon taciturne, flûtes acrimonieuses se mêlent aux complaintes de Mola Sylla, un chanteur du Sénégal. Les polyphonies, avec leurs vibrations gutturales (“Fin Tantos Cassatores”), renvoient même à ce superbe documentaire de Herzog qu’est Les Cloches des profondeurs. Pour ceux qui auront vu Salt and Fire, sorti en décembre dernier et coproduit par Potemkine (toujours dans les bons plans !), la musique y joue un rôle primordial, à la fois en décalage avec le récit (sorte de thriller écologique chamboulé par le goût de Herzog pour les farces grotesques et pour une liberté de ton anti hollywoodienne au possible) et soulignant une mysticité et un rapport entre l’homme et la nature, mis en avant dans la seconde partie qui se passe dans le désert de sable de Salar d’Uyuni en Bolivie. L’ambiance d’ensemble est recueillie, magique et parfois même un brin ludique dans sa combinaison d’un violoncelle free assez délirant et tellurique avec des chants d’élévation appuyés par des percussions tribales (“A una Rosa”). Par moments, des touches de musique répétitive minimaliste se font sentir (“Foreign Country”) mêlées dans un tout indéniablement cérémonieux et chimérique. Poétique malgré une dominante maussade (“Reunion”).
Après la révélation avec l’EP ‘Sezession’ vient le temps de la confirmation pour le trio Mouse On the Keys et son premier album forcément très attendu au tournant : ‘An Anxious Object’. On admire l’objet, plutôt classe comme souvent (toujours ?) chez l’hyperactif Denovali Records, on dépose fébrilement le disque sur la platine et voici que les premiers accords s’égrènent doucement, le temps d’un « Complete nihilism » à l’élégance gracile, ici déposée comme une ultime dernière respiration avant de se lancer dans un grand huit jazz fusion de très haute volée. Les Nippons dévoilent alors « Spectre de mouse » et refont le coup de ‘Sezession’, entre maestria technique effarante et sentiment d’urgence fébrile. Une pluie de notes parcourant les deux pianos qui se répondent, un duel fratricide arbitré par un batteur toujours aussi survolté. Comme à son habitude, Mouse On The Keys impressionne : mélodie entêtante, toucher de clavier au dessus de la moyenne et fougue peu commune, le tout pour un cocktail musical furieusement emballé. On l’a compris : dans leur frénésie instrumentale, les japonais font ici ce qu’il savent faire de mieux. Et plus encore quand il faut enchaîner avec un « Seiren » au groove fiévreux marqué un jazz incandescent, esquissé en clair/obscur. Le trio façonne ses ambiances et ne laisse rien au hasard. Impossible, sa musique est une merveille de précision, d’horlogerie suisse comme appliquée au free-jazz et directement importée depuis l’Empire du Soleil Levant. Ne redoutant pas la prise de risques, les Mouse on the Keys s’amusent avec l’exercice de style « Dirty realism », avant de revenir à quelque chose de plus classique chez eux, mélodique et raffiné avec le très beau « Forgotten children » avant le plus rythmé « Unflexible grids ». Experimental mais pas trop, inventif juste ce qu’il faut, toujours d’une imparable cohérence, le groupe révoque les clichés de l’expérimental avant-gardiste outrancier pour chercher l’originalité efficace, clairement assumée (« Double bind », « Soil », « Ouroboros »). Rien à redire, après deux sorties, le groupe s’impose comme une exception (à tous les sens du terme)… (Très) Classe. ✎ Aurelio www.scoreav.com http://urlz.fr/53uL
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✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53v0
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ATYPEEK MAG #02
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JANV./FEV./MARS 2017
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ALBUMS
Date de sortie : 30/09/2015 Durée : 1h 11 min Nationalité : FR Styles : INDUS / electronic / expérimental
Date de sortie : 04/11/2016 Durée : 00:58:30 Nationalité : FR Styles : JAZZ / RIO / expérimental / math rock
Date de sortie : 03/11/2016 Nationalité : PL Styles : Coldwave / Synth
Krackhouse Comes Alive (Sordide Sentimental /Atypeek Music)
Chromb ! 1000 (Dur et Doux / Atypeek Music)
7JK Ride the Solar Tide (Redroom)
Retour sur un groupe newyorkais un peu oublié aujourd’hui. Krackhouse fut un projet lancé dans les années 80 par Mike Sappol, rejoint ensuite par Murray Reams et Doug Henderson, ce dernier étant devenu entre-temps bien réputé dans le milieu de l’art contemporain. C’est lui d’ailleurs qui assure le remaster de cette version digitale proposée par Atypeek d’un disque initialement paru chez Sordide Sentimental en 1993. Les paroles de Mike Sappol s’y trouvent aussi, révélant un second degré et un sens de l’absurde tout beckettien pour ces amateurs de dadaïsme sonore. Leur univers peut d’ailleurs s’apparenter à celui des Residents, de Renaldo & the Loaf ou de DDAA, à la fois free, industriel et ludique, relevant presque d’une forme d’art brut mêlé de poésies et spoken words. Sur ces sept pistes sonores, ils avaient aussi bénéficié de l’apport d’instrumentistes extérieurs, dont le plus connu est sûrement Eugene Chadbourne. Dès “Flowers of Shit” se mêlent des collages de bandes magnétiques, un groove de percussions inversées, une guitare funk maladive et un violon neurasthénique. Les Fleurs du mal de Baudelaire y sont retraitées en mode urbain, humoristique et trashy. “These Kids” va plus loin encore dans cette musique déstructurée, spasmodique, aux textes scandés. Inclassable et fou, à la limite du psychiatrique, le morceau se base sur des samples grouillants et rythmiques qui lui apportent une dimension dansante, bien que totalement déglinguée. Ça tâche, c’est cradingue tout en restant toujours dynamique. Sur “Mediterranean Homesick”, la guitare évoque Snakefinger, alors que “Rusty Razor Blade” pourrait être la BO d’un comics chez les cajuns du bayou et que “Pornovista” se rapproche d’une ethnicité aberrante comme celle des Texans d’Ak’chamel. “Virginia”, avec sa nature obsessionnelle, révèle un climat plus inquiet dans sa bizarrerie. Vingt minutes de délires bien régénérateurs.
Il y a deux ans sortait le deuxième album de Chromb ! judicieusement nommé II, extraterrestre subjuguant. En misant sur le bon cheval, la prédiction voulait que ce quartet remette le couvert de haricots verts et c’est avec joie et bonheur qu’avec un peu de beurre, nous nous laissons entraîner par 1000 judicieusement nommé… euh non en fait… mais oui quand même ! Mille fois mieux ? En exagérant légèrement, cet album qui aurait dû s’appeler III en vaut bien le double, voire le triple puissance 4. Grâce à une collecte participative, 1000 est à peu de chose près la somme récoltée. Ce groupe français qui aime tant jouer avec les chiffres accentue ici son côté mathrock, réduit minutieusement son attache jazz et multiplie ses idées dans des structures élargies où l’insolence n’a d’égale que la maturité de l’écriture. La durée du disque a doublé, l’énergie est à son summum ; cependant, l’incursion dans 1000 ne se fait pas facilement. Rappelons que les Lyonnais n’ont pas de guitare ce qui fait reposer beaucoup de paramètres principalement mélodiques sur le saxophone, les claviers mais aussi la basse. Le groupe décline les influences stylistiques tout en gardant unité et énergie, se permet de rajouter par moments du chant humoristique. Parfois absurde et farfelue, la musique de Chromb ! est variée et consistante, même dans les expérimentations les plus poussées, l’aura de Mr Bungle planant furtivement de-ci de-là. Chromb ! a encore une fois mis dans le mille, c’est le cas de le dire avec un album léché dans les moindres détails, même si quelques micro longueurs effacent le côté immédiat des débuts. Fruit d’un travail considérable, semble-t-il, production incluse, 1000 suscite l’engouement et force le respect. Le groupe a su faire évoluer sa musique sans la dénaturer, c’est une réussite.
Recentré autour de Matt Howden (Sieben) et Maciek Frett (Job Karma), le nouvel album de 7JK se présente d’emblée comme un trip. Le titre, l’artwork, les voix samplées, les thèmes et les ambiances hallucinées ne trompent pas, et dès l’introductif “Liftoff for 7JK”, le décollage est garanti. Plus psychédélique et cosmique que le précédent Anthems Flesh (2012), la musique n’en oublie pas les touches electro-wave (Chris & Cosey, Clock DVA, Depeche Mode, John Foxx, Nagamatzu...) mais les amènent vers des territoires totalement originaux. Véritable odyssée, parsemée de messages ésotériques, le disque tire sa force de l’alliance parfaitement équilibrée entre acoustique et électronique, violons et rythmes digitaux, voix réelles et voix échantillonnées. Mélodique et atmosphérique, cette aventure spatiale regorge de très belles compositions : “The Centre of the Universe” et sa basse cold accrocheuse, le mélancolique “Barry the Astonishing” et son violon fou comme tiré d’un vieux Tuxedomoon, la synthpop sous acide de “Black Hole Entropy” et surtout “Guidance is Internal”, symbiose totale entre l’univers des deux groupes pour toucher à une ethno-pop baroque pour l’ère atomique. Du début jusqu’à la fin, on ne touche plus terre, et on peut même se laisser aller à danser comme perdu au fin fond d’un nightclub sur une planète inconnue (“Undergrowth”). Ça plane sévère, la voix de Matt est toujours aussi pure et ses couches de cordes émergent avec grâce des beats addictifs de Maciek. De la bonne défonce.
✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uQ
✎ Aleksandr Lézy http://urlz.fr/53qt http://urlz.fr/53uT
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JANV./FEV./MARS 2017
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7JK ©Cécile Hautefeuille
✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uW
ALBUMS
Masayuki Takayanagi & Kaoru Abe Mass Projection & Gradually Projection ( Diw )
C’est en Juillet 1970, soit 5 ans avant Metal Machine Music, qu’a lieu la session qui aboutira sur ces deux albums préfigurant la noise music telle qu’on la connait. Nés de la rencontre d’un jeune saxophoniste alto et d’un guitariste affranchi du Jazz, Mass Projection et Gradually Projection sont deux pièces complémentaires d’une seule et même oeuvre qui a marqué les grands improvisateurs de la scène d’avant-garde (de Derek Bailey à Ray Russel). Animés d’un talent et d’un caractère indomptable, c’est un Jazz féral d’une violence inouïe que livre le duo sur Mass Projection; le free Jazz de d’Ornette Coleman est ici porté à ébullition, ses limites repoussées jusqu’à ses frontières absolues. Mass Projection nous confronte d’entrée de jeu à une fanfare pandémoniaque, un mur de sonorités grinçantes et stridentes qui se maintiennent avec peu de relâchement jusqu’à son extinction. Le son pachydermique et stridulent des solos de sax d’Abe s’entrechoque avec les larcens de guitare de Takayanagi comme deux bêtes féroces s’entredéchirent sans répit pour leur territoire.
des meilleurs Albums Jazz
By CITIZEN JAZZ, le mag de Jazz COMmENT LIRE UN QR CODE ? Pour lire un QR Code, il suffit de télécharger une application de lecture de QR Codes. D’ouvrir l’application et viser le QR Code avec l’appareil photo de son téléphone mobile et l’application lance l’écoute de la playlist.
Gradually Projection, pièce située chronologiquement entre les deux parties de Mass Projection, se montre plus tempéré que ce dernier. Les phrases mélodiques de sax, de clarinette et de Shakuhachi prennent le dessus, soutenus par un Masayuki Takayanagi dissonant mais discret en accompagnement à la guitare acoustique.
Chromb ! 1000 Paru le 4 novembre 2016 ©Dur Et Doux / Atypeek http://urlz.fr/52pR
Le niveau sonore plus soutenu laisse occasionnellement entendre l’ambiance sonore du club qui vient se mêler à la performance. Progressivement, le jeu mélodique de Kaoru Abe se déforme et dérape, les cris stridents reviennent ponctuer les phrases mélodiques. Les solos reprennent peu à peu le dessus avant de laisser place à un solo disonnant d’harmonica pour clore la pièce.
Quatuor IXI & Melanoia
A la fois paroxysme du Jazz et précurseurs de la Japanoise, vous aurez compris que Mass Projection et Gradually Projection ne sont pas des albums facilement abordables.
RED Paru le 14 décembre 2016 ©BMC Records http://urlz.fr/52qr
Plus de 45 ans après leur sortie, le niveau de débauche sonore atteint par le duo sur Mass Projection par le biais d’instruments acoustiques se montre inégalé. Pièces fondamentales de l’avantgarde, la distribution limitée de ces albums font d’eux des perles rares qui s’arrachent à prix d’or chez les collectionneurs.
Paul Lay Alcazar Memories Paru le 17 février 2017 ©Laborie Jazz http://urlz.fr/52qC
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✎ Robin Ono http://urlz.fr/53uX Masayuki Takayanagi ©DR
Date de sortie : 2001 Durée : 00:29:25 Nationalité : JP Styles : Noise / Free Improvisation
Top 5
Ces fauves, aussi sanguinaires et indomptables qu’ils paraissent, font cependant preuve d’une coordination et de communication dans leur jeu dynamique: le registre de Takayanagi s’adapte à celui de d’Abe, le duo se synchronise et combinent leurs timbres respectifs pour créer une masse indissociable et opaque au timbre métallique et infernal.
Jean-Brice Godet Lignes de crêtes Paru le 20 janvier 2017 ©Clean Feed http://urlz.fr/52qJ
Emmanuel Scarpa Invisible Worlds Paru le 7 novembre 2016 ©Coax Records http://urlz.fr/52qP www.citizenjazz.com
ALBUMS
Date de sortie : 17/03/2016 Durée : 14 mn Nationalité : FR Styles : Alternative Post-Rock / Noise
Migos Culture (300 Entertainment/Quality Control)
Originaires d’Atlanta, Quavo, Offset et Takeoff, le trio composant Migos sont de retour, avec un deuxième album Culture qui devrait rafler la mise cette année. Même s’ils n’ont jamais vraiment quitté les radars depuis leur premier album Young Rich Nation, nous abreuvant régulièrement de mixtapes, Migos a définitivement imposé son style avec ses flows stylisés, gorgés d’onomatopées aux sens obscurs, voir surréalistes et de raclu res de gorges.
IMYRMIND Uniwersum Luxus (Money $ex Records)
Après un premier album en 2014 qui convainc aussi bien la presse que les oreilles curieuses, le trio de Bourg-en-Bresse ré-émerge au grand réjouissent de la scène post-rock française en ce début d’année. L’occasion en question est celle d’une inauguration, à savoir celle du successeur au premier LP.
Il y a des albums, dont on ne comprend pas pourquoi ils ne sont pas plus mis en avant dans la presse spécialisée, tant leur potentiel créatif se démarque par moult détails, à l’image du premier album de IMYRMIND, Uniwersum Luxus. On ressent sur Uniwersum Luxus une véritable jubilation, un plaisir de tous les instants disséminés sur chaque titre ou interlude, gorgé d’influences diverses et éparses, n’hésitant pas à faire se déhancher la house et à jazzifier la techno, à déployer des ambiances smooth au funk poisseux, pour nous faire virevolter au dessus de nuages baignant nos corps de grâce céleste. IMYRMIND possède un esprit explorateur en forme d’hommage à tout un pan de la musique, au sens très large du terme, alternant les tempos et les couleurs, alliant samples habilement choisis et production sans effet de style pour un impact immédiat. Uniwersum Luxus possède une capacité à nous prendre par les tripes et faire danser notre esprit sur un dancefloor à la sophistication groove dentelée, enrobée d’une certaine dose d’humour et de folie douce. Une très belle réussite.
Une fois de plus, la formation ne manque pas d’impressionner avec la richesse de leur son créé principalement par, faut-il le rappeler, un trio de deux guitares et une batterie.
La production assurée par leurs collaborateurs de longue date, 808 Mafia, Zaytoven, Metro Boomin et Nard & B, continue de faire des merveilles, mélangeant cloud rap, psychédélisme rêveur, groove trap et mélodies imparables, aux volutes parfois complexes, entourés de featurings à faire pâlir a concurrence : Travi$ Scott, Guci Mane, DJ Khaled, 2 Chainz. Tous les ingrédients sont réunis pour faire de Culture une pièce maîtresse de la nouvelle scène rap. Un must.
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L’Effondras Les Flavescences (Noise Parade)
Doté de 4 nouveaux titres numérotés de X à XIII, le groupe reprend les festivités là où il les avait laissés avec son dernier EP avec de grosses compositions instrumentales à mi-chemin entre une atmosphère desert rock à la Earth et une ambiance évoquant l’exploration de l’espace.
Cherchant avant tout à faire valser les mots, à leur donner des rythmiques particulières, Migos est une formation qui aura profondément marqué toute une génération de rappeurs, leur manière de faire danser les textes s’imposant de plus en plus chez les autres, créant une flopée d’émules.
Doté d’une production plus organique et détaillée qui remet une nouvelle couche de finition sur leur son, le trio orchestre une expérience d’écoute à la fois hypnotique et engageante. Les ambiances se fondent l’un dans l’autre, posées sur des rythmes de batterie syncopés qui ressaisissent l’attention de l’auditeur. Les compositions évoluent lentement et progressivement, faisant la part belle à la répétition pour densifier l’atmosphère et laisser le temps de contempler la matière sonore.
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MIGOS © DR
✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53uZ
Date de sortie : 10/03/2017 Durée : 00:53:00 Nationalité : DE Styles : electronic / expérimental
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✎ Roland Torres http://urlz.fr/53oK http://urlz.fr/53v2 IMYRMIND © DR
Date de sortie : 27/01/2017 Durée : 00:58:26 Nationalité : US Styles : Rap
Au-delà de la dimension contemplative de Les Flavescences se trouve une musique qui est bel et bien en mouvement, qui prend le temps de planter son décor sans se priver de moments plus dynamiques. Sorte de leitmotiv sur l’album, on regrettera cependant l’usage systématique des longues ouvertures qui introduisent chaque titre, d’autant plus que XII - Phalène, semble faire office de prologue au majestueux final de 25 minutes qui clôt l’album, pourtant largement autosuffisant. Sans révolutionner pour autant la formule du postrock tel qu’on la connaît, L’Effondras nous livre ici un album engageant quoiqu’un brin monochrome.
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✎ Robin Ono http://urlz.fr/53uN ATYPEEK MAG #02
JANV./FEV./MARS 2017
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RETR O U V EZ TOU T L E S G R A ND S C L A S S I Q U E S D U FR EE JA Z Z F U T U R A M A R G E s ur W W W. f ut u r a m a rg e . ba n dc amp. c om - Di s poni bl e en CD ou DIGITAL
AL’TARBA La nuit se lève
« Album
kaléidoscopique où de multiples horizons
s’agrègent dans un même carcan obscur et radical, « La Nuit Se Lève » donne de la nuance à la scène abstract hexagonale, quand de nombreux producteurs s’enlisent dans la nostalgie. Le contenu de ce nouveau projet risque de diviser, notamment à cause de la ballade violente dans laquelle il nous emmène, de l’impétuosité des rythmiques et de la densité du mix. Les références dans les samples et dans les titres sont assez jouissives lorsqu’on en décerne la provenance, mais resteront sans effet sur celles et ceux qui n’ont pas les clefs nécessaires pour en trouver l’origine. Une chose est cependant certaine : on ne restera pas de marbre une fois ce riche univers dévoilé à nos oreilles, avec un travail sur l’ambiance et les mélodies d’ores et déjà mémorable.» indie music
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ATYPEEK MAG #01
OCT./NOV./DEC. 2016
http://www.iotrecords.org/al-tarba
«Plus électro que Wax Taylor, moins funk que Doctor L, le Toulousain creuse son propre sillon et trouve un juste équilibre entre abstract hiphop et featurings efficaces» TRAX
© Amás Mészáros
NOUVEL ALBUM 3 mars 2017
instantanés
www.instagram.com/atypeek/ www.instagram.com/schlaasss/ www.instagram.com/dookoom/ www.instagram.com/ultrapanda/ www.instagram.com/duretdoux/ www.antoine44nantes.book.fr ©Antoine Gary - Merci à Angélique 86
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des copains/Copines
VIDéoclipS PAR LéA VINCE
ARTISTE : CHRISTEENE
RÉALISATEUR : MATT LAMBERT
LIEN CLIP : http://urlz.fr/52qQ et sans crier « GARE » tout le monde fait tomber le pantalon et se retrouve en slip ou justaucorps en latex multicolore à danser furieusement sur la musique endiablée. Joie de vivre et petit culs bien moulés entre le rayon des légumes et des produits laitiers, je n’ai rien à ajouter, je retourne danser. ✎ Léa Vince
Galantis - peanut Butter Jelly http://urlz.fr/52qR Vous savez quoi, je vais jouer carte sur table, plus de mensonges. Je vous dévoile aujourd’hui un petit plaisir coupable musical, ne mentez pas, nous en avons tous. Certains moins glorieux que d’autres mais là n’est pas le problème. Galantis – Peanut Butter Jelly est une chanson sur laquelle je suis tombée par pur hasard sur Youtube et il se trouve que CETTE CHANSON EST PUREMENT GÉNIALE. Je m’enflamme peut-être un chouia mais cela n’enlève rien au fait que Peanut Butter Jelly est une chanson « feel-good » ultra-énergique qui me donne toujours une folle envie de danser. Pour résumer le clip, nous nous trouvons dans un supermarché 88
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Et oui la culture musicale allemande ne s’importe pas vraiment en France. Pourtant Louane et Zaz sont très connues en Allemagne, allez savoir pourquoi.
Rammstein Mein Land - http://urlz.fr/52qS Si je vous dis musique allemande, vous me répondrez certainement (tristement) Tokyo Hotel, Nena, mais peut-être aussi la chanteuse de 99 Luftsballons, peut être Nina Hagen, Einstürzende Neubauten, Caspar Brötzmann et enfin Rammstein.
Avant de vous parler du célébrissime groupe de métal j’aimerais préciser que j’écris cet article sur le sol allemand, je suis une chroniqueuse qui prend ses rubriques à cœur, voyez-vous. Le groupe est donc plutôt connu pour leur musique métal industrielle légèrement provocatrice. Pour le clip de ‘Mein Land’ (Mon pays) on plonge dans l’univers Beach Boys des années 60 et le moins qu’on puisse dire c’est que ça dépareille avec la musique. ✎ Léa Vince
VIDéoclipS PAR LéA VINCE
des « phénomènes repris et décliné en masse sur Internet » par le biais de photo, gif, vidéo, etc. Ce clip est si drôle visuellement.
Die Antwoord Banana Brain
http://urlz.fr/52qU J’aimerais ouvrir cet article par un point prononciation, parce que ce débat a agité plusieurs de mes soirées auparavant. Allez c’est gratuit. On proscrit tout de suite la prononciation à l’anglaise, on se détend et on répète après moi ; Di ANT-wou-rde. Revenons à nos moutons, sachez que j’aime Die Antwoord. Beaucoup. Autant pour leur musique démente que leur univers perché. Die Antwoord sont des aliens de la planète ZEF (le style musical qu’ils ont eux même crée) venu pour te retourner le cerveau et te faire chanter le meilleur yaourt de ta vie, perso je n’ai pas fait Afrikaans LV3. Le groupe est de retour depuis septembre dernier avec un nouvel album « Mount Ninji and Da Nice Time Kid » dont Banana Brain est extrait. Nuit de débauche pour ¥olandi et Ninja sous le signe de la banane. Yolandi, cette petite friponne, refile une bonne douzaine de somnifères à ses parents, subtilement dissous dans une bonne tisane du soir, tout ça pour pouvoir faire la bringue en toute quiétude. Die Antwoord nous emmène dans un bad trip techno déchaîné. Honte à celui qui ne bougera pas sa tête de manière frénétique d’avant en arrière en écoutant Banana Brain. ✎ Jonathan Allirand
The Shoes - Drifted
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Donnez au groupe The Shoes un ordinateur portable Mac et un accès internet, cela suffira pour qu’il vous sorte un petit clip bien chaud pour le titre Drifted. OKAY ce clip ne date pas de la dernière pluie mais les piqûres de rappel ne font jamais de mal à personne. Drifted est une petite bombe musicale explosive avec un beat battant et net mais mélodieusement accompagné de la douce voix d’Ambroise Willaume. Je n’arrive pas à me décider sur mon avis concernant cette vidéo, pur génie ou pure flemmardise ? Probablement un peu des deux. Ce clip c’est la foire aux mêmes. Pour les plus de 40 ans qui ne suivent plus trop l’évolution d’Internet depuis Windows 95, les mêmes sont
✎ Léa Vince
Ça me rend un peu nostalgique d’écouter Boys Noize, vous voyez c’est l’un des premiers artistes que j’ai découvert il y a de ça quelques années lorsque j’ai commencé à m’intéresser à l’univers électro… oh attendez je raconte encore ma vie, désolé. Boys Noize, le DJ/producteur allemand a sorti son dernier album « Mayday » en mai dernier. 2019 Après J-C, dans ce clip légèrement futuristique, nous suivons les aventures d’un jeune couple arpentant les rues de Mexico city. Un clip ou l’amour vogue entre monde réel et virtuel. Ce fut un coup ce cœur musical instantané (comme les nouilles asiatiques) pour ma part, c’est si doux et dynamique à la fois. ✎ Léa Vince
JUSTICE – FIRE http://urlz.fr/52qW Oyé Oyé Justice est de retour, Vive Justice ! Le groupe français à la vibe électro la plus fraîche est de retour depuis fin 2016 et ça a fait grand bruit. Dans Fire, titre extrait de l’album Woman, sorti en décembre dernier, le groupe se fait plaisir et invite Susan Sarandon ni plus ni moins. Le clip tout entier est un véritable hommage au film Thelma et Louise, remplacez juste Thelma (Geena Davis) par le duo français Gaspard Augé et Xavier de Rosnay. Retour vers le passé dans un univers visuel on ne peut plus 80’s. Susan Sarandon, 70 ans tout de même, est tellement badass dans ce clip, conduisant cheveux au vent un vieux bolide décapotable et sillonnant les chaudes routes californiennes. Susan Sarandon est plus cool que votre grand-mère et sûrement la mienne d’ailleurs. Justice ne nous déçoit que rarement, et ce nouvel extrait ne fait pas exception, ils nous offrent un bon vieux son électropop disco toujours autant sucrée et dynamique, ça réchauffe mon petit cœur froid d’hiver. ✎ Léa Vince
Boys noize 2 Live - http://urlz.fr/52qX Encore un artiste allemand, je vous ai dit que j’aimais bien l’Allemagne ? Bien beau pays malgré les préjugés. Enfin nous ne sommes pas là pour parler de ma vie.
Anarchist Republic of Bzzz « Respect the Eye » http://urlz.fr/52qZ On part ici sur une expérience musicale totale, autant musicalement que visuellement. L’univers visuel du groupe Anarchist Republic of Bzzz signé par l’artiste Kiki Picasso est étrange, coloré et en somme un peu fou. Le clip est vraisemblablement constitué de nombreux extraits de publicités, clip musicaux et drama asiatiques. Un drama est une sorte de soap opéra un peu, voire carrément, kitsch mais version coréenne en majorité. Sous la patte de Kiki Picasso, l’effet rendu est très saturé mais étrangement hypnotisant, je vous laisse découvrir par vous-même. Musique expérimentale avec une pointe d’univers ‘musique du monde’, les Anarchist Republic of Bzzz sont comme le nom de leur groupe, unique. ✎ Léa Vince ATYPEEK MAG #02
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Le Design et plus encore…
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Pierrick Starsky - Journaliste
LE CAHIER DU DESIGN Les monstres grotesques de
GABE BARTALOS Entretien
Maxime Lachaud, Journaliste
LE GÉANT VERT
Article I Kiblind Magazine J. Tourette, Journaliste
Blanc comme neige
Mode I Le Village des Créateurs
ROVT Design
Article I Le Village des Créateurs
TATTOOISME 3,
Brice Baleydier
créateur de Arkaïc Skateboards
Article I The Daily Board LA GALERIE
ANTOINE, AMATEUR à NANTES Dans la cuisine DE
Dav Guedin
Interview I AAARG !
Pierrick Starsky, Journaliste ALICE Féray
Carnet de voyage : Mongolie
Article I Fred Inhvader Chris Coppola, Journaliste
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ENTRETIENARTISTE
Les monstres grotesques de
GABE BARTALOS ENTRETIEN : Maxime Lachaud avec GABE BARTALOS
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Quand as-tu eu ta première révélation pour les effets spéciaux ?
Rares sont les maquilleurs et les artistes d’effets spéciaux à avoir été exposés dans des galeries d’art contemporain. C’est pourtant le cas de Gabe Bartalos, dont les créatures hybrides et surréalistes ont pu aussi bien se retrouver dans des films gore de série B que dans les œuvres expérimentales de Matthew Barney. Passionné par le cinéma d’horreur, Bartalos s’est retrouvé dès l’adolescence à travailler sur des tournages et à rencontrer tous les plus grands noms du genre dans les années 80 : Tom Savini, Tobe Hooper, Stuart Gordon, Joe Dante ou encore Frank Henenlotter avec qui il continue à collaborer. Dans les années 1990, il crée Atlantic West Effects, sa propre compagnie à Los Angeles et enchaîne les commandes. Passionné de punk rock, il se lance dans la réalisation de clips dans les années 2000 et dirige son premier long métrage en 2004, Écorché Vif (Skinned Deep), suivi par Saint Bernard, son dernier film dans lequel il laisse libre cours à son imagination délirante. Ses masques et sculptures, à la fois monstrueux et fascinants, portent tous sa marque, et quand il en parle, son regard brille d’enthousiasme, car malgré sa carrure de grand balaise, Bartalos reste aussi passionné qu’un enfant qu’on amènerait à sa première fête foraine.
Gabe Bartalos : Très jeune, je sais que j’ai été affecté par le premier Godzilla. D’ailleurs, c’est amusant de le regarder aujourd’hui car il était très sombre en termes d’ambiance. Je devais avoir onze ou douze ans. J’imaginais Godzilla s’élever de mon voisinage à Ardsley Road et cela me terrifiait. Je savais que ce n’était pas réel, même si à l’époque je ne faisais pas encore la différence entre un costume de créature et un acteur, mais cette émotion que ce film a laissé en moi je l’ai recréée dans mes fantasmes. Ce devait être la première fois que je projetais des images dans ma tête. Un peu après, Creature from the Black Lagoon m’a impressionné. J’ai toujours été fasciné par ce qu’il y a sous l’eau, et voir un costume aussi bien fait dans un film aussi bien réalisé, cela atteignait un autre niveau. C’est à partir de là que les choses se sont mises en route et très rapidement, à douze ou treize ans, j’ai commencé à tourner mes propres films, en essayant de faire resurgir ces images. Mon père avait une caméra Super 8, j’ai commencé à apprendre les rudiments du tournage et du montage et à recréer et raconter mes propres histoires. C’est ainsi que j’ai compris que j’étais intéressé par la création des personnages. L’art de raconter des histoires s’est détourné vers l’art des effets spéciaux.
Et ton goût pour l’horreur elle-même ? Y a-t-il eu un film qui t’a amené à vouloir provoquer ce genre de sensations chez les autres ? Oui, je l’ai regardé à nouveau il y a quelques années, et ce n’était pas aussi horrible que dans mon souvenir. Il s’appelle The Legend of Boggy Creek. Il y avait quelque chose de brut, qui semblait réel. Ce qui est dingue, c’est qu’après l’avoir vu, je n’arrêtais pas de dessiner la créature. Mais ce n’était pas la créature du film, mon esprit s’était construit quelque chose. C’est marrant car on ne la voit quasiment pas, juste une main, une forme, donc c’est mon imagination qui dessinait le monstre. Il pouvait se trouver dans un ruisseau avec le clair de lune par exemple, et c’est intéressant de voir comme un jeune cerveau peut être fertile.
Maxime Lachaud
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“les créatures hybrides et surréalistes de Gabe Bartalos ont pu aussi bien se retrouver dans des films gore de série B que dans les œuvres expérimentales de Matthew Barney”
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À SAVOIR
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Le triomphe de l’imagination C’était déjà une narration que j’avais dans la tête. Je pense aussi que j’avais le bon âge quand le genre splatter a explosé, entre 1980 et 1983. Tous ces films étaient fantastiques et je les ai dévorés à l’adolescence. Aujourd’hui des films sont écrits pour rendre hommage à ce travail de Tom Savini qui était si impressionnant, puis le voir se raffiner avec Rick Baker et Dick Smith, c’était se dire qu’on pouvait avoir de l’audace et de la théâtralité mais qu’on pouvait aussi ensuite porter attention à cet art. C’était très excitant, comme un bouillonnement artistique. C’était une période foisonnante, et j’avais l’âge pour l’apprécier.
Quand tu as commencé à travailler sur des films, avais-tu un mentor ? Oui. À une convention de films, j’ai rencontré un artiste d’effets spéciaux, Arnold Gargiulo. Il habitait à deux villes de chez moi et il m’a invité à visiter son studio. J’ai commencé à y travailler gratuitement, puis je me suis retrouvé sur des tournages et j’ai commencé à être payé. J’étais très jeune. J’avais seize ans et je me retrouvais sur des projets imminents.
Le premier long métrage de Gabe Bartalos, écorché Vif, a été édité en France en 2005 par le biais du magazine Mad Movies. Cela m’a amené à travailler sur mon premier film, Spookies ou Twisted Souls. Je connaissais les cinéastes mais Arnold a eu une dispute et a quitté le projet. Ma pensée initiale était de partir avec lui mais il m’a dit non, reste avec eux, ils t’apprécient. Il m’a donné sa bénédiction et du coup j’ai eu en charge de terminer les quelques monstres qu’il fallait construire. Le producteur et les réalisateurs ont vraiment apprécié que je reste car ils avaient besoin d’aide. C’était la première fois que je vivais sur les lieux du tournage, je créais des personnages et j’avais la possibilité de les voir sur un écran, ce qui est très important. Tu commences à voir à quoi ton travail ressemble sur la toile à laquelle il est destiné. Est-ce que je dois mettre plus de peinture ? Est-ce que je dois en enlever ? Et tu t’ajustes en fonction.
Quand tu travailles avec un cinéaste, il faut que tu t’adaptes à sa vision. Pour que cela fonctionne, faut-il que tu aies la même vision que lui ? Oui, c’est double car, sauf dans les cas de mes propres films, Écorché Vif et Saint Bernard, je suis un artiste commercial. Un client loue mes services. C’est du business et je me dois de remettre ce qu’il demande. Mais les clients plus futés viennent me voir car ils aiment mon style, mon énergie, ou ils ont vu quelque chose que j’ai fait qui leur a plu. Et ils arrivent à tirer le mieux de ce qui sort de moi normalement. Pour les films où il y a besoin de créer des choses ultra-réalistes, le défi est de mettre mon style en sourdine et de
“Tom Savini est sûrement ce qui a pu arriver de mieux dans l’histoire des effets spéciaux” servir le projet, ce qui est aussi très amusant à faire, je parle des répliques de corps ou de personnages. Quand je rencontre un réalisateur, j’aime d’abord leur parler, j’aime savoir comment ils s’habillent, comment ils se coupent les cheveux, quel genre de chaussures ils portent, ils me disent la musique qu’ils aiment, ce qu’ils font pour s’amuser et c’est à ça que les films doivent ressembler. Ce sont donc des choses subliminales que je branche dans ma tête pour dire par exemple, là il faut que ce soit plus sombre, je vais travailler sur une palette de noir et de gris et du bleu nuit. À un autre moment, je me dis que c’est un projet plus réaliste et terre à terre, du coup je vais travailler sur des verts et des marrons. Les réalisateurs après, se disent, hey c’est exactement ce que je cherchais mais c’est mon tact et ma capacité à comprendre ce qui peut servir le projet.
Tu as parlé de Tom Savini, et tu as travaillé avec lui dans les années 80 sur Massacre à la tronçonneuse 2. Comment s’est passée cette rencontre ? Tom est sûrement ce qui a pu arriver de mieux dans l’histoire des effets spéciaux. C’est une personnalité tellement forte, positive, jeune, il se fait aimer par tellement de gens. Ce n’est pas du tout l’image des hommes en blouse dans leur labo. Il était plus comme Rick Baker, jeune et facile d’accès. Ayant grandi à New York, Tom est aussi de la côte est et c’était une plus petite communauté. Nous nous connaissions tous. Quand Tom venait visiter New York, nous passions du temps ensemble. Il me donnait des conseils. C’était une bonne période où nous traînions ensemble.
À présent je vis à Los Angeles. Et à ce moment précis, je me trouvais à Houston, Texas, à travailler sur un film qui se nomme The Lamp ou The Outing. Tom à ce moment-là m’a appelé disant qu’ils faisaient Massacre à la tronçonneuse 2 et est-ce que je voudrais faire partie de l’équipe. Je lui ai demandé où il était, et il se trouvait à Austin. Je lui réponds que je suis à une heure de route et que j’ai fini dans trois jours. Il m’a dit, Ok t’as le job ! Étant fan des Vendredi 13 et aussi du premier Massacre à la tronçonneuse, c’était intéressant de me retrouver dans cette aventure avec Tom comme patron et Tobe à la réalisation.
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C’était merveilleux de les voir faire. J’étais dans les environs, ça a été ma chance, je n’ai pas eu à retourner à Los Angeles. Ce que j’ai appris, c’est que Tom est un incroyable superviseur. Très intelligent, il sait bien s’entourer, nous n’étions pas nombreux mais la main au travail et talentueux. Il savait utiliser nos spécialités et c’est ce qui fait que le travail était bien fait. Il arrive à écarter toutes les choses chiantes, la production et tout ça pour te laisser faire ton truc. © DR
En plus de Frank Henenlotter (Elmer le remue méninges, Frankenhooker…) ou Joe Dante (Gremlins 2) avec lesquels tu as travaillés, tu as aussi collaboré avec Stuart Gordon pour Aux portes de l’au-delà et Les Poupées. Comment cela s’est passé ? Je travaillais dans des studios qui se nommaient MMI Studios pour la compagnie qui s’occupait de tous les films Empire de Charlie Band. Charlie enchaînait les films comme à l’usine. John Buechler, le dirigeant, savait que je supervisais déjà des projets sur la côte est. Il a dit, nous avons une liste de films, celui-ci c’est Les Poupées réalisé par Stuart Gordon, et tu le fais. Aux portes de l’enfer se préparait au même moment. Il y avait aussi un film de David Schmoeller qui s’appelle Crawlspace avec Klaus Kinski. Un ami John Vulich a pris en charge celui-là et j’ai pris en charge Les Poupées. J’étais parti en Italie pour exécuter les effets et j’ai eu à faire directement à Gordon. Le boss lui est resté aux États-Unis. Avec Stuart nous nous sommes très bien entendus, on a travaillé intimement.
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À SAVOIR La collaboration entre Gabe Bartalos et Frank Henenlotter a commencé avec Elmer le remue-méninges (1987). Bartalos a même co-produit les deux derniers films du cinéaste newyorkais, Chasing Banksy et un portrait passionnant de l’artiste Mike Diana.
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Certains de tes effets spéciaux, sont des tours de force, es-tu plus fière de l’exécution de l’un d’eux ?
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Un an et demi plus tard, on a encore travaillé ensemble, il a fait une pièce de théâtre qui s’appelait Taste, sur l’histoire vraie d’un cannibale allemand. Il a coupé un gars, lui a arraché le pénis et l’a mangé. Cette pièce était vraiment cool.
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Ton style a pu être rapproché de certains peintres de la tradition grotesque, Bosch, Arcimboldo, tires-tu aussi de l’inspiration pour tes sculptures et tes effets spéciaux d’autre chose que du cinéma ? Je ne parlerais pas d’inspiration, mais à présent en vieillissant, je me penche sur les grands maîtres du monde de l’art. Cela m’excite de voir qu’il y a une ascendance. Bosch pour son sens de la narration, Francis Bacon et la gravité des choses qui tombent, les illustrations d’André Masson, et toutes ces comparaisons sont très excitantes car ce sont d’excellents dessinateurs. On s’aperçoit alors qu’il y a une parenté au fil des siècles. Ils travaillaient sur les mêmes mutations. Au début, ma vision était très insulaire, ce n’était que le cinéma et la pop, mais en regardant plus loin dans le passé, je me suis rendu compte qu’il y avait cette confrérie de folie qui avait traversé les siècles. Les surréalistes sont très excitants. Cela m’a rassuré, me dire que je n’étais pas fou. Parfois tu te sens vraiment aux marges. Même au sein des gars qui font les effets spéciaux qui sont considérés comme des dingues, tu fais des choses encore plus barrées. Puis quand tu vois et que tu lis de l’art classique comme André Masson, là je me suis dit c’est exactement ce que je pense.
Il restait sans dormir pendant plusieurs jours et regardait ce que son subconscient pouvait créer. Des fois quand tu as la fièvre et que tu rêves, au pire de la grippe, quand tu es à deux doigts de l’hallucination, tu pourrais juste vomir et mourir mais j’ai toujours essayé de me focaliser sur l’aspect créatif pour voir ce que mon cerveau imagine quand je suis dans cet état. Et il n’y a rien de nouveau, car d’autres le faisaient avant. Même Henry Moore, le sculpteur britannique, son travail des débuts dont tout le monde se souvient est parfait, ses portraits sont si exacts, il a appris le langage de l’illustration si bien, l’a métamorphosé jusqu’à produire à présent des formes floues. Ces formes ne fonctionneraient pas s’il n’y avait pas une base pour le faire, et sur un plan anatomique, il a poussé le langage et l’a tellement abrégé que cela communique. Je suis si content que David Lynch ait fait Une histoire vraie, il peut faire un film normal et merveilleux bien qu’il ait choisi un langage différent pour communiquer. S’il n’était pas un si bon cinéaste, les abstractions de son travail ne fonctionneraient pas si bien. C’est un bon exemple, faire un film normal et émotionnel bien qu’il soit plus à l’aise en allant vers l’abstraction. Quand je fais du design ou que je sculpte, il est important que l’anatomie fasse sens en premier. Tout doit être au bon endroit et ensuite je commence à bouger les choses. Je sais que les gens qui apprécient reconnaissent que cette connaissance de l’anatomie est présente mais que j’essaie d’aller plus loin. C’est important d’avoir ces fondements pour pouvoir les dépasser.
Un bon exemple se trouve dans Basket Case 2. Frank Henenlotter est venu me voir, il m’a dit les comités d’évaluation sont incontrôlables mais nous devons tuer ce reporter et ce doit être dans la lignée des films précédents avec les créatures surréalistes. Donc que fait-on ? Et si nous étirions son visage et que nous le traitions comme du plastique. J’ai pris une impression de l’actrice, j’ai mélangé de l’argile avec de la cire. J’ai pris plus d’argile et j’ai étiré son visage jusqu’au ridicule. Puis j’ai ajouté les dents, les gencives. C’était techniquement fidèle mais absurde et ridicule. La peau aurait dû se déchirer. Mais c’était parfait. C’est très bien filmé et c’est un moment fort. Comme il est dit dans cet hommage à Freaks, « à présent tu es un freak aussi », cela a rendu service au film et j’en suis très fier. Je n’aime pas sentir, quand je suis spectateur, que le film est hors contrôle, que le cinéaste ne connaît pas ses propres règles. Même dans El Topo et Santa Sangre de Jodorowsky, il y a des lois. Ce sont les moments les plus importants où il faut qu’il y ait de la discipline au sein du chaos.
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Tu as donc eu ce parcours hallucinant au contact de nombreux cinéastes, puis dans les années 2000, tu es passé derrière la caméra. Avec quel cinéaste as-tu appris le plus pour devenir à ton tour un réalisateur ? C’est intéressant car il y a une part en moi qui dira : vis dans une grotte, ne lis rien, ne t’intéresse à rien pour savoir qui tu es. Mais ce n’est pas réaliste et j’aime aussi consommer de l’art, j’aime les films. Donc pour moi ce qui importe c’est le filtre par où ça sort. La réponse courte serait que j’ai appris de tous. Pour Écorché Vif et Saint Bernard, mon nouveau film, tu pourrais presque dresser une liste. Il y a du Frank Henenlotter dedans, la sensibilité de Stuart Gordon, la bizarrerie de Matthew Barney, il y a du Leprechaun aussi dedans, et même du Jodorowsky et du Lynch, dans le style laissons le subconscient s’exprimer. Mais j’ai beaucoup appris sur le tournage du sixième Vendredi 13 où ils ont coupé des scènes d’effets spéciaux. Je trouvais ça bizarre, dans les films d’horreur on devrait célébrer les effets, donc au résultat il y a eu beaucoup d’argent de perdu et un travail que tu ne verras jamais. Que faire alors ? Je vais rendre les meurtres surréalistes. Quand les gens se cachent les yeux, je trouve ça dommage car ils ratent le travail effectué. Donc je voulais faire le contraire, qu’ils se rapprochent de l’écran en disant « Quoi ? ». C’est le travail que j’aime faire : que les gens aient envie de voir une seconde fois. C’est là que se font les distinctions individuelles sur ce que j’aime filmer. J’apprécie qu’on compare mon premier film à Massacre à la tronçonneuse mais c’était plus une blague. Il y a des tas de films qui reprennent ce format et pour moi c’est par manque d’imagination. Donc je commence par cette trame narrative, mais si quelqu’un est assez gentil pour être venu voir mon film, il va être récompensé parce qu’après je pars dans des directions très différentes. Comme si c’était un arbre et que je me mettais à apprécier les branches.
Il y a aussi une folie dans tes films ! Y trouves-tu une liberté que tu n’as jamais vraiment eue avec les autres metteurs en scène ? Oui, parfois tu trouves qu’ils ne vont pas assez loin, mais je comprends aussi qu’ils utilisent l’argent des studios et que les studios n’aiment pas trop la folie. Il faut dire aussi que l’imagination des réalisateurs est souvent bien moins cinglée que celle des artistes d’effets spéciaux. C’est un fait. Ils sont plus dans le langage du cinéma et de la
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narration. Je crois qu’ils ont aussi la responsabilité de ne pas devenir dingue. Cela m’a pris des années pour intégrer mon imagination dans le contexte d’un long-métrage où je pourrais explorer ma folie sans les contraintes d’un studio et le conservatisme que l’on peut y trouver.
Y a-t-il beaucoup de monstres que tu as dans la tête et que tu n’as jamais réalisés ? Des tonnes. Heureusement quand je dors ça s’arrête, mais je ne suis pas en manque ! Parfois une personne se tourne, mais mon esprit voit autre chose. Mon imagination est très active et tout m’inspire. J’ai beaucoup de dossiers sur des écorces d’arbres, des fissures dans le béton, les difformités, les configurations de nuages, les copeaux de bois sont très intéressants, en particulier maintenant que je fais des films, tout est une sculpture, les murs, les décors…
Et on n’en a pas encore parlé, mais dans les années 90, tu as commencé à travailler avec Matthew Barney sur ses fameux films d’avant-garde. Peux-tu revenir sur cette rencontre et ce travail ensemble ? Un ami, Keith Edmier, travaillait aussi dans les effets spéciaux dans les années 80 et il a décidé de quitter ce milieu, partir à New York et devenir artiste. Il s’est retrouvé là-bas et avait besoin de travailler. Il a rencontré Matthew Barney qui avait besoin de ce travail avec des prothèses. Keith s’est retrouvé dans un studio non équipé pour ça, dans le froid de la côte est en faisant ce qu’il avait décidé de ne plus faire, mais dans un endroit plus hostile. Puis il m’a parlé, je revenais à New York pour les vacances et il savait qu’avec Matthew on allait bien s’entendre. Il nous a présentés et on a vite commencé à travailler sur Drawing Restraint 7. Il était en centaure et son culturiste aussi. C’était pour la biennale du Whitney Museum. Ce fut très bien reçu et cela a marqué un tournant dans la trajectoire de Matthew. Il a été assez chic pour m’inviter encore pour son projet suivant Cremaster 4 et je ne savais pas encore que cela allait être le début d’un cycle. Dans les cinq films, quatre possèdent des effets de maquillage qu’il m’a demandé de faire. C’est amusant de travailler avec lui car il porte les maquillages. C’est son personnage qui dirige le film et ce fut une grande aventure car ses projets ont été diffusés dans le monde entier. Tous les deux ans, il m’appelait et ce que je fais pour lui n’est pas différent de ce que je fais
“L’imagination des réalisateurs est souvent bien moins cinglée que celle des artistes d’effets spéciaux” dans les films d’horreur, mais le contexte en revanche n’a rien à voir. C’était tourné en vidéo, dans des lieux excellents, avec une toute petite équipe, les budgets ont grandi, sa visibilité aussi, et il est devenu de plus en plus célèbre. De plus gros budgets, de plus grosses équipes. Quand on travaillait sur le dernier Cremaster 3, cela avait atteint une dimension épique, avec d’énormes volumes d’effets. Il aime ça, ça fait partie de son travail, ce fut un voyage de huit ou neuf ans absolument fabuleux. Puis nous avons continué à travailler sur De Lama Lamina, tourné au Brésil pendant le carnaval. Ensuite il a été invité à un défilé de mode à Copenhague sponsorisé par Vogue Magazine, et nous lui avons créé un personnage prothétique. Et puis récemment, il a fait l’épique River of Fundament, un film de six heures joué dans les opéras qui commence à tourner dans le monde entier, nous avons fait un personnage vraiment étrange et dérangeant pour ça. C’est une collaboration qui continue, il a une grande imagination et c’est si excitant de voir qu’il est devenu si important dans le monde de l’art contemporain. Il a réussi en montrant des choses qui n’avaient jamais été vues avant.
Rien n’était à vendre, c’était juste une célébration. Il y avait eu une exposition de Brian Eno juste avant, et comme tu l’as dit, cela ne se fait jamais de montrer des effets spéciaux comme de l’art. Pour moi ça l’a toujours été mais ce n’était pas quantifié comme tel. Le public était tellement enthousiaste. Des fans de cinéma amenaient leur famille, hey regardez je ne suis pas fou, c’est de l’art, il peut y avoir une tête coupée mais il y a aussi ce dragon ou regarde comme cette tête est bien faite, ce n’est pas que du caoutchouc. C’était comme donner le pouvoir aux fous.
Tu as dit que ces derniers temps tu aimais travailler le bronze. Y a-t-il des matériaux avec lesquels tu te sens bien ? © DR
Amener les prothèses et effets spéciaux de films hollywoodiens vers le monde de l’art, c’était très étrange, ça a pris du temps mais ça a marché.
Tu fais partie des rares artistes d’effets spéciaux qui ont été exposés dans des galeries. Je ne sais pas s’il y en a eu beaucoup d’autres d’ailleurs. Cela s’est présenté souvent ? Je l’ai juste fait quelques fois. Je trouve que c’est un excellent produit dérivé car entre les projets, je continue à dessiner et à sculpter. Ces derniers temps j’ai pas mal sculpté le bronze. Ce sont des choses personnelles, je n’ai pas de deadline, pas de directeur artistique, c’est juste mon imagination et certaines sont vraiment farfelues mais elles se suffisent à elles-mêmes en tant qu’œuvres d’art. En 2014 il y a eu une exposition à Long Beach, c’était une rétrospective très flatteuse, ça commençait par les travaux de sculptures et certains des réalisateurs (Frank Henenlotter, Matthew Barney) nous ont permis de montrer certaines des choses que nous avons faites ensemble. Ils étaient tous ravis de collaborer. Avec les autorisations, un catalogue superbe a été créé. Et des pièces qui avaient été faites spécifiquement pour ces films ont été montrées. Nous étions aussi en train de tourner Saint Bernard donc nous avions apporté certains décors, énormes et sculpturaux, et nous les avons installés dans le musée. Il y avait tout depuis Elmer le remue méninges et la série des Basket Case quand j’étais tout jeune jusqu’à mon dernier film, c’était très excitant.
Quand j’ai le temps, je prends normalement de l’argile, je fais une sculpture, je la moule. J’enlève la sculpture et dans ce moule va le caoutchouc. C’est ce que je peins, que ce soit des prothèses, des masques ou de l’animatronique. Vu que j’aime tant la sculpture, on part de l’argile, on moule et ensuite on verse du plâtre très dur à l’intérieur. Avec le plâtre sous les yeux, je recommence, je prends des outils dentaires, de l’acier bien dur et je commence à dessiner les lignes courbes et un nombre de détails. Cela me prend beaucoup de temps mais on ne peut pas le faire avec de la cire. Même les collègues sculpteurs sont hallucinés, ils ne comprennent pas comment je fais. Je leur explique, puis je remoule à nouveau, ce qui fait que la sculpture possède ce niveau de détails en plus. Il y en a deux que j’ai achevées et qui sont devenues des pièces personnelles. Il y en a d’autres que j’ai pu utiliser dans les films.
Peut-on parler de ton nouveau film ? Le nouveau film se nomme Saint Bernard, c’est sur un compositeur de musique qui entre dans une spirale de folie. Le compositeur est joué par Jay Dugre qui incarnait Brain dans Écorché vif. C’est un acteur formidable et cela lui a demandé de se consacrer à un tournage qui a pris deux ans. C’est un vrai pas en avant pour moi. On a tourné en pellicule, en Super 16 et en 35 mm. La construction des décors et les effets de créatures sont très ambitieux. Le mieux pour décrire le film serait de le comparer à un rêve étrange et dans ce rêve, tout te semble logique, mais quand tu te réveilles, tu ris d’avoir été aussi impliqué et les abstractions dans le rêve semblaient logiques. C’était l’atmosphère que je cherchais dans ce film. Le subconscient et les rêves m’ont toujours fasciné.
La meilleure façon d’explorer des idées surréalistes. J’en suis très content car j’ai pu arriver à produire ce que je voulais. C’est plus ambitieux qu’Écorché vif, j’avais plus d’argent et j’en ai tiré avantage. On a tourné à New York City, à Wall Street, ce ne fut pas simple. Des séquences ont été tournées à Paris. Il y a aussi des scènes sous l’eau et des décors élaborés qui ont pris huit mois à être construits. On s’est concentré sur les textures, les couleurs, les nuances, ce n’est pas un film avec des moments artistiques, c’est une grande toile artistique dans laquelle des moments de cinéma se produisent. Le tournage et le montage sont terminés. La musique est faite et le mixage du son s’est terminé en janvier. Nous cherchons une distribution et des endroits pour faire la première. Il y a eu deux projections, une projection test à San Sebastian et une autre dans un festival au Brésil. Les deux projections se sont très bien passées. C’est important de ressentir le film avec un public. Tu captes mieux le temps, les passages drôles et la vibration du public et cela peut t’amener à quelques changements minimaux. Enlever tel plan, bouger les choses, etc. Je serai très excité de partager ce film dans le monde.
Y a-t-il aussi quelque chose de religieux en lien avec le nom de Saint Bernard ? Il y a beaucoup de petits rappels religieux, certains évidents, d’autres moins, il trouve la tête d’un chien, un Saint Bernard, sur un bord de route, et il en fait un totem religieux.
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Il est dérouté par cette tête de chien géante et il la prend partout avec lui. Il rencontre métaphoriquement des anges gardiens, se retrouve dans des situations dignes de l’Enfer. C’est un personnage attachant mais on se rend vite compte que le monde n’est pas si fou. C’est ce qui se passe dans sa tête que l’on voit. Les personnages sont étranges, la réalité est vraiment déformée. Pour lui ce totem c’est comme un chapelet. Autour de lui, on trouve ces métaphores d’anges gardiens qui le protègent. J’ai travaillé avec Warwick Davis de Leprechaun et Écorché vif. Il y joue Othello, le gardien d’un amas de bois haut de plus de 970 mètres. Il vénère le bois et il peut arrêter le temps pour lui donner la possibilité de fuir. Et il y a un mentor musical. Il y a aussi des accusations directes de l’hypocrisie de l’église et d’autres références qui sont plus subliminales et qui soutiennent un cheminement de foi. Donc ce n’est pas que de la fantaisie lourde et des personnages en prothèses. Il y a ces décors abstraits très grands.
Il y a aussi une scène avec le vieux groupe punk anglais les Damned [il porte d’ailleurs un T-shirt des Stranglers] ! Quand les Damned m’ont dit, si tu viens à San Francisco, tu peux filmer tout ce que tu veux, c’était le pied ! J’ai filmé pendant quatre morceaux de la balance et j’ai fait des plans très rapprochés de tout, et pendant le concert du soir, ils m’ont fait une liste en me disant quels morceaux ils allaient jouer à quel moment. 100
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Donc là nous avions positionné les caméras, avec tout le public qui pète les plombs. Le rendu est dingue. Des amis cinéastes me disent, hey attends, comment as-tu pu faire des plans si rapprochés de Captain Sensible et des lèvres de Vanian, avais-tu des objectifs zoom comme ceux de la Nasa ? Mais non, ils m’avaient laissé filmer la balance à quatre heures de l’après-midi, et à minuit nous avons fait tourner les caméras, et nous avons monté le tout. Il y a pas mal de passages comme ça où les cinéastes vont se dire : Quoi ? Ils sont en France ? Il y a de grands sauts dans le film. On a fait une scène à Los Angeles avec un grand bus détruit et brûlé, et le compositeur saute par-dessus l’objectif et quand il atterrit, nous sommes sur les pavés et Notre Dame est sur la gauche, et il continue à courir. Là on se dit, hey qu’est-ce qu’il se passe, on est vraiment en France ? Il y a une séquence à la tour Eiffel. Nous avons construit un costume en bois et le bois commence à coller et s’incruster à l’acteur. Avec sa position en dessous de la tour Eiffel, c’est comme une sculpture, il se fond en elle. C’est très abstrait et c’est un bûcheron français qui le libère. Comme dans un dessin animé, il fait signe de la main pour dire au revoir.
C’est vrai qu’en musique tu as aussi travaillé avec David Byrne… J’aime la musique punk rock. J’ai fait une vidéo pour The Briggs, ils sont connus aux États-Unis mais je ne sais pas sur le plan international. Ils sont géniaux.
Ce sont eux qui m’ont contacté et j’étais si heureux. Ils contactaient des artistes réalisateurs pour qu’ils adaptent chacun une des chansons du nouvel album. Ils venaient de signer sur un gros label et j’ai dit bien sûr. Et la chanson que je voulais n’avait pas été prise. La production était énorme. On a amené des jets de pluie. Je n’ai fait que quelques vidéos musicales mais j’aime faire ça. J’ai fait aussi un documentaire sur un groupe punk The Street Dogs, le chanteur faisait partie de Dropkick Murphys. Ils sont super et quand ils ont signé sur Epitaph/Hellcat. Ils ont eu un budget et m’ont demandé si je voulais tourner ce documentaire sur eux. C’était comme un privilège. J’étais avec eux, je voyais la musique se développer, et je leur ai donné une capsule témoin à la fin de ce qu’ils avaient fait. La musique c’est toujours du plaisir.
ENTRETIEN : Maxime Lachaud
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COMBINAISON DE CONTES ET D’AMOURS VÉGÉTALES, LE GÉANT VERT TRÔNE À LA 3e PLACE SUR LE PODIUM DES PERSONNAGES PUBLICITAIRES LES PLUS CONNUS AU MONDE. TOUT ÇA POUR DES PETITS POIS. COMME QUOI : PLUS C’EST GROS, PLUS ÇA POUSSE.
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Article par :
On a toujours besoin de petits pois chez soi », disait un petit oiseau à la fin des années 60, au profit d’une campagne de communication collective. Plus énergétiques que la majorité des légumes verts (81 cal/100 g), riches en vitamine C (25 mg/100 g), et bénéfiques pour leur apport en sucres solubles, en lysine et en fibres, les petits pois constituent effectivement une base d’alimentation parfaite. Le slogan est tellement éclatant, se substitue si naturellement à la morale de La Fontaine « on a toujours besoin d’un plus petit que soi », au pied près, qu’on en oublie presque la formule originale. Et comme l’art du contre-pied est une constante en matière de publicité, quoi de plus efficace que le gigantesque pour parler du minuscule. L’Incroyable Hulk tirait-il sa couleur d’un régime alimentaire à base végétale ? Ou est-ce simplement par malice que notre esprit aime déduire des caractères en se basant sur des codes couleurs ? Vert de peur, vert de rage, vert comme l’espoir ou comme la putréfaction, la couleur symbolise un vaste éventail de valeurs plus ou moins contradictoires. Mais il est une contrée où les choses sont plus simples et moins équivoques : le Minnesota, terre du Géant Vert.
Visuels : ® General Mills
Derrière le personnage, une grosse compagnie déjà séculaire : la Minnesota Valley Canning Company, créée en 1903, à Le Sueur. Elle se destine essentiellement à la fabrication de légumes en conserve, qu’elle commercialise sur le marché américain dès le début du xxe siècle. En 1925, elle introduit dans sa gamme une espèce de petits pois plus grands que de coutume, auxquels elle donne le nom emphatique de « green giant great big tender peas ». Le positionnement commercial est de taille ; et pour allier le marketing à la communication des atouts intrinsèques de son produit, elle se dote trois ans plus tard d’une figure de style : The Green Giant. Le bien nommé Géant Vert apparaît donc en 1928 dans la publicité. À deux détails près : il n’était pas vert et ne ressemblait pas à proprement parler à un « géant » 01 . C’était plutôt une sorte d’ogre trapu aux cheveux hirsutes, qui n’était pas sans rappeler quelque caricature sortie des contes de Grimm, drapée dans un costume une pièce d’un style paléolithique, et dont les bras aux biceps tendus peinaient à soutenir la masse encombrante d’une énorme gousse de petits pois. Sans doute conscients qu’il lui manquait quelque chose d’édifiant vis-à-vis du produit qu’il devait symboliser, les communicants de la compagnie eurent l’initiative deux ans plus tard de marquer son physique d’une teinte plus à-propos, plus immédiate, qui deviendrait sa signature : le vert. Apparemment, l’innovation visuelle – aussi ambitieuse fût-elle – n’était pas tout à fait à la hauteur des desseins de l’entreprise et du succès attendu. Si la mascotte avait bel et bien été créée, elle ne parvenait pas en l’état à générer ce capital sympathie si cher au monde de la communication. La Minnesota Valley Canning Company s’offrit alors en 1935 les services de l’agence Erwin, Wasey & Co, et plus particulièrement de son publicitaire talentueux : Leo Burnett. Il redressa le géant, troqua son vêtement animal contre une parure de feuilles qui le rapprochait davantage de l’univers végétal dont il était issu et, surtout, lui donna le sourire 02 . Renommé The Jolly Green Giant, le personnage jovial et rassurant toucha en n sa cible, se trouva un public. En 1950, le Géant Vert était devenu tellement populaire aux États-Unis que la firme en fit sa figure emblématique, et changea de raison sociale au profit du nom de son icône en se rebaptisant The Green Giant Compagny. Pour gagner en notoriété, les publicitaires décidèrent alors de s’emparer du petit écran. Mais contre toute attente, les premiers pas du colosse à la télévision, en 1954, furent désastreux : incarné tour à tour par un homme peint en vert ou par une marionnette aux gestes saccadés, le résultat ne parvint qu’à générer au mieux un sentiment d’étrangeté ; au pire d’effroi… Histoire de renverser la tendance, les grands moyens furent déployés : on lui bâtit un décor où il puisse plastronner à sa mesure, paisible et bienfaisant, droit comme un « i », les mains sur les hanches, protecteur et vigilant, là, au milieu de la vallée ; et il reçut la parole, à travers la voix généreuse et grave d’Elmer « Len » Dresslar Jr., lançant sur les monts et les vaux du Minnesota de longs et profonds « Oh ! Oh ! Oh ! », à faire pâlir le Père Noël. Les téléspectateurs applaudirent enfin.
Kiblind N°47 - Découvrez plus d’articles sur : www.kiblind.com
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OH ! OH ! OH ! —
En 1960, Géant Vert traverse l’Atlantique et arrive en France, en devenant la première marque à commercialiser du maïs doux grâce à son unique boîte « L’Original ». À cette même époque, la société lance ses premiers légumes surgelés : le bon géant s’adapte et adopte une posture qui le protège du climat, tandis que sa garde-robe se voit embellie d’une longue écharpe rouge destinée à le mettre à l’abri des vents frais qui soufflent sur le marketing. Dans un autre contexte, on pourrait croire qu’il aurait été casté pour une campagne Oscillococcinum… Mais non. Quant à son attitude définitive, celle qui l’a rendu célèbre et iconique à nos jeunes années, elle a finalement été fixée en 1976, et n’a guère bougé depuis. 03 Certes, dans les années 70, jugeant peut-être que le Géant Vert devait finir par se sentir seul dans sa grande vallée, les responsables de la communication lui trouvèrent un compagnon (au nom certainement plus euphonique avec l’accent d’origine) : Sprout 04 . Ce petit personnage, jeune « pousse » littéralement ingénue, n’était en réalité pas seulement venu pour combler la solitude du grand, mais plutôt pour remplacer la voix off en apportant une touche didactique et renseigner le client sur le produit et les innovations de la marque – avec plus de trois mots cette fois. Au fil des décennies (bientôt neuf), et malgré des débuts légèrement tâtonnants, le Géant Vert s’est forgé une renommée exemplaire. L’illustre magazine américain Advertising Age le classe en 3e position parmi les icônes publicitaires les plus célèbres, après le cowboy Marlboro et Ronald McDonald. À défaut d’un oscar, ça valait bien une statue… La sienne mesure 55 pieds et trône sur un mont de Blue Earth, sa ville natale, depuis 1979. Texte : J. Tourette ATYPEEK MAG #02
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MODE AU VILLAGE DES CRéATEURS
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Bouchon de bouteille “Les jambes Vaudésir”
Bouchon de bouteille blanc Very chic Wine en silicone alimentaire pour bouteilles de vins et spiritueux. Made In France. 100 % hermétique, gage de sécurité, et de conservation du vin, s’adaptent à tous types de bouteilles. http://www.verychicwine.eu
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Toupie-Horloge de table
Des objets avec une histoire, élégants, singuliers, colorés, des objets au design épuré d’influence scandinave mais tellement frenchy par leur technicité, une conception éco-responsable, des matériaux naturels, du made in France, et c’est déjà pas mal. http://www.gones.fr
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Monture
Plug & See
Plug & See c’est une seule paire de verres avec une forme standardisée qui s’adapte sur une infinité de montures, de formes, de couleurs ou de matières différentes. Plug & See vous permet de changer de style à tout moment.
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http://plugandsee.fr
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Assiettes angle
Benjamin Rousse aime Jouer sur la géométrie de l’espace avec les assiettes angles il rompt avec l’archétype de l’assiette (ronde) tout en gardant le côté empilable. Plus l’angle est prononcé, plus il y a de la place pour mettre en valeur les plats. http://www.benjaminrousse.com
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Collection homme Amandine Leforestier
Lauréate de Talent de Mode 2013, Amandine Leforestier propose un vestiaire aux détails subtils conçu pour la vie quotidienne. Chaque pièce qui le compose est conçue pour que le corps qui les habite s’y sente bien. Un design minimal et élégant, des matières douces pour le confort, des formes oversizes pour l’allure et la liberté du mouvement, des coloris neutres choisis comme des intemporels. http://www.amandineleforestier.com
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Luminaire
Jack par Vendredis
Jack est une ligne de luminaires et mobilier imaginée par l’équipe des faiseurs (architectes, designer, menuisiers, ébénistes, artistes) de Vendredis, tous amoureux des matériaux nobles et produit bruts. Jack est un homme sérieux et rigoureux qui dégage une certaine sophistication. Son corps filiforme se meut lentement… souvent à l’étroit il tend à disparaître dans son environnement. Récemment nous l’avons rencontré avec sa chimère. http://www.vendredis.biz
Le Village des Créateurs - Découvrez le concept sur : www.villagedescreateurs.com
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ROVT Design Vincent Rousseau a commencé à détourner des objets en 2012 et crée ROVT en 2015. Attiré par les pièces et les techniques industrielles, il aime en révéler la beauté en les transposant dans un autre univers et leur attribuant une autre fonction. Ses pièces sont à découvrir dans son showroom lyonnais installé au Village des Créateurs, Passage Thiaffait. Décorateur, fabriquant, chercheur, designer, Vincent Rousseau propose une vision décalée des objets, de l’espace, et il s’attache à une certaine simplicité du produit et de la vie.
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ROVT est un projet, une signature, un signe d’appartenance, une marque transversale imaginée et créée par Vincent Rousseau. ROVT se présente en hybride : agence de design - studio de décoration - atelier de fabrication – laboratoire… ROVT est à la fois rien de tout ça et tout à la fois ! Créateur instinctif et spontané, il est passionné, d’artisanat, de techniques industrielles et de matières.
à savoir : ROVT vient de créer, pour un chalet à Tignes, un plan vasque en vélo sur la thématique Amsterdam, des luminaires-appliques dans des bombes de peinture, des réservoirs de chasse d’eau dans des bouteilles de gaz, dans un seau industriel en acier et dans une conduite d’aération !
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à la fois décalés mais toujours simples
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« ROVT est à l’image des évolutions de notre société qui parfois donnent naissance à des mutations génétiques : la nôtre est permanente, évolutive et critique ce qui nous permet de nous adapter, comprendre, influencer, orienter notre démarche. Et donc à l’image de la nature humaine faite de contradictions et d’ambivalences, ROVT crée des produits à la fois décalés / contemporains / extravagants et simples » explique Vincent Rousseau. À l’instar d’un pot à lait transformé en chasse d’eau et la lampe en conduit de cheminée ! Un accord est à venir avec un industriel dans le secteur du sport pour l’édition de luminaires inspirés d’un jeu ancré dans l’ADN de notre pays.
À SAVOIR
Retrouvez la collection ROVT en vente à Lyon au Village des Créateurs : 19 Rue René Leynaud, 69001 Lyon
PLUS D’INFOS
www.rovt-design.com
ROVT et l’upcycling l’alternative maline « Nous essayons de détourner le maximum d’éléments afin de ne pas avoir à refaire ce qui est déjà fait dans d’autres secteurs. Nous aimons et pratiquons autant que possible l’upcycling qui est une alternative à cette surconsommation de produits neufs. » Affaire à suivre !
Le Village des Créateurs - Découvrez le concept sur : www.villagedescreateurs.com
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TATTOOISME 3, ce n’est pas moins d’une centaine d’artistes présentés, de tous styles, de toutes générations, de tous horizons, avec chacun une histoire, leur histoire, à laquelle se mêle aussi la nôtre, comprenant notre évolution et notre propension à aimer ce que nous faisons… et inversement ! Dans ce volet, Tattooisme aborde et présente du tatouage pur, des travaux artistiques de plusieurs générations de tatoueurs, et, de ce fait, l’évolution du tatouage lui-même. Des découvertes, des talents émergents, de nouvelles directions et d’autres aspects plus traditionnels du tatouage d’aujourd’hui défilent dans les pages de ce nouvel ouvrage. Tattooisme va au-delà du simple objet collector : c’est l’envie et le besoin de créer, de s’exprimer et de s’affirmer qui priment, à travers les œuvres des artistes présentés dans chaque ouvrage, autant que dans la démarche des auteurs eux-mêmes, qui avancent dans un processus de création aux multiples têtes chercheuses. Ici nous vous proposons une sélection de l’ouvrage pour une pré-immersion au sein de ce nouvel opus de l’aventure Tattooisme ! Viva la Tattooisme Army ! Chris Coppola et Frédéric Claquin, Paris, avril 2015
— Fred Inhvader — INKVADER 7 Sète, France Fred est né à Paris, il vit et travaille dans le shop qu’il a monté, Inkvader 7… à Sète, dans le sud de la France. Seize années de métier avec lui, Fred pratique le built to last ! : « construit pour durer ! » C’est le style de tattoo qu’il défend, des pièces solides qui durent dans le temps, aux tracés et contours épais avec des couleurs bien rentrées, bien plantées. Alimenté par l’adrénaline du skate, qu’il pratique toujours avec ses deux garçons, comme par le skate art, imbibé de musique et de l’univers graphique qui en découle — le P-Funk de Funkadelic, le hardcore urgent de Negative Approach, la pop électrique et acidulée de Ween —, Fred se nourrit de ce qui l’a construit, il prend, utilise et redonne. Son style dominant est le tatouage japonais, car c’est celui qui s’adapte le mieux au corps, il laisse un grand nombre de possibilités tant graphiques que symboliques et permet quelques détournements. Pour autant il ne rejette pas certains autres genres, qui eux aussi ont la capacité de donner un meilleur rendu une fois porté. Plus réservé qu’exubérant, Fred s’exprime au travers de ses tattoos, de ses dessins et de ses peintures. Ses remerciements vont à Boris Inkvader et à ses deux fils : Elliot et Téo.
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— Fred Inhvader — INKVADER 7 Sète, France
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Article par :
TATTOOÏSME N°3 - Découvrez plus d’artistes sur : www.tattooisme.com
Article par :
Brice Baleydier : créateur de Arkaïc Skateboards
Aujourd’hui, nous vous présentons le travail de Brice Baleydier,
un shaper Lyonnais, expert en matériaux et procédés de fabrication. En 2010, il lance son projet de création d’un atelier de fabrication éco-responsable, lié au design, sports de glisse et à la com créative. 112
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INTERVIEW
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Article par :
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un atelier de fabrication éco-responsable, lié au design, sports de glisse Salut Brice, peux-tu nous présenter Arkaïc ? Brice : Arkaïc Concept est un projet qui est né début 2010. Le premier atelier « professionnel » de conception est arrivé en 2012 grâce à l’aide de pas mal de copains et depuis 1 an, l’entreprise et l’atelier ont élu domicile à Caluire. J’interviens de la conception d’un produit jusqu’à la production en passant par le prototypage, le tout en étant le plus éco-responsable possible.
© DR
Pourquoi t’es-tu mis à faire des planches de skate ? Brice : Par passion avant tout, mais l’idée de base, c’était de faire d’Arkaïc Concept un atelier multiglisse en faisant du cruiser bichonné, de la board de street et même des longboards. La motivation première a toujours été de montrer que l’on peut faire un skateboard Made In France, avec des matériaux locaux, bien fait et qui sera aussi résistant qu’un skateboard américain ou chinois à prix équivalent, via un système d’économie circulaire et de
circuit court. En second lieu, c’était de montrer que l’atelier est ouvert d’esprit et qu’il y a de la place pour des projets dans les sports de glisse et la création. Je fais beaucoup de prestations aussi. Notamment, l’usinage de noyaux de wakeskate, la fabrication de moules, de pièces pour le ski, la réparation de planches à voile et surfs, etc.… Et pas mal de référents viennent me chercher pour mes compétences artisanales, la dynamique et la discrétion de mon concept.
Et aujourd’hui, qu’est-ce qui t’inspire pour créer ? Brice : Mon inspiration vient de mon respect de la culture skate et de la board culture en général. C’est important pour moi de garder ses codes, ils sont moteurs. Et je les amène au local, en ironisant l’artisanat avec des visuels subtils et des noms de produits qui laissent passer mon message. En gros, je fais un produit de qualité et « made in France » mais qui ne se prend pas trop au sérieux : parce que le skate c’est fun quand même. Ce que je ne veux surtout pas, c’est rentrer dans la mode moustache / drapeau tricolor, skate / bobo, parce que c’est facile de se fondre dedans et de se faire cataloguer. Je considère être un acteur du milieu et je ne souhaite pas entrer dans la facilité marketing et les tendances de la mode.
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La motivation première a toujours été de montrer que l’on peut faire un skateboard Made In France… aussi résistant qu’un skateboard américain À SAVOIR
Arkaïc-Skateboard
L’atelier propose également une marque propre de skateboards artisanaux dénommée « ArkaïcSkateboard », 100% Made in ARTICLE & éco-conçus deFrance Jonathan Allirand via des essences de boix locaux dans une économie circulaire.
INTERVIEW
Est-ce que tu peux nous en dire plus sur ta démarche éco-responsable ? Brice : La construction éco-responsable est l’éthique du projet. Elle implique des règles sur la maîtrise de la matière première, des déchets, sur l’utilisation des matériaux polluants etc.… Toute la matière première des skateboards vient d’un rayon de 350 km. Le bois vient des Vosges, la colle vient d’Alsace et le verni vient de Saint-Étienne. Une conception locale avec des produits locaux pour un impact carbone minime. J’essaie aussi de mettre en place un recyclage efficace de mes chutes des planches cassés. Je vous en dirais bientôt plus !
C’est quoi ton dernier projet ? Brice : Mon dernier ou les derniers ! C’est assez divers car je propose pas mal de prestations à mes clients. En ce moment je développe un skateboard électrique dénommé UNIKBOARDS, une planche qui pourra atteindre 60 km/sur le plat. La première prod est en cours ! Sinon j’ai fabriqué les trophées du REDBULL BOWL RIPPER à Marseille et je me suis fait un plaisir d’aller les livrer sur place et apprécier le spectacle. J’ai aussi développé une longboard en collab avec l’association lyonnaise BOARDS OF MANGROOVE.
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“J’ai l’impression de faire rêver des marques qui me font rêver !”
J’ai vu que tu as un certificat éco-responsable !
Tu bosses pour Redbull, Globe, le Fise… comment est né le partenariat avec ces grandes marques ? Brice : C’est grâce au réseau et par des relations de confiance qui se sont installées que j’ai eu cette chance ! J’ai l’impression de faire rêver des marques qui me font rêver ! (rires) C’est hyper motivant de monter des projets comme ça. De plus, j’ai l’impression d’apporter une dimension humaine à ces marques qui adhère à la philosophie de l’atelier et font vivre la scène locale de plus en plus.
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Brice : En fait, il n’existe pas de certification pure et dure, mais oui je me suis fait auditer pour connaître mon impact et consolider ma démarche. Ça certifie que mes planches composites sont à 95 % éco-construites avec de la fibre de verre et des résines. Pas mal, non ? (rires)
Article par :
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“La distribution elle est comme le concept : en circuit court ! En fait, je gère et sélectionne les shops qui sont revendeurs. J’essaye de gérer au mieux entre l’atelier et la marque de skate pour équilibrer l’ensemble et garder la cohérence du projet”
Revenons à tes boards, niveau distribution, comment ça se passe ?
En fait je n’ai jamais qu’un seul projet. Là est peutêtre la force de l’activité ce qui me permet de changer constamment d’univers tout en gardant le plaisir comme ligne de conduite. Le plus dur est de suivre la cadence, tout en restant acteur milieu glisse mais j’espère être épaulé très prochainement. Pour Arkaïc SKATEBOARDS il y a pas mal de surprises qui arrivent…
Brice : La distribution elle est comme le concept : en circuit court ! En fait, je gère et sélectionne les shops qui sont revendeurs. J’essaye de gérer au mieux entre l’atelier et la marque de skate pour équilibrer l’ensemble et garder la cohérence du projet. Pas mal de shop sur Lyon, un peu dans le sud et dans le centre de la France comme le Big Skate and Ski, avec qui j’ai fait une collab ! Certains magasins me demandent, alors je vais les voir et j’avise, mais l’essentiel de mes ventes se font en direct au showroom, lors d’évènements et sur internet.
Tu dirais quoi à des mecs qui veulent se lancer, pas forcément dans la fabrication de skate, mais qui ont les couilles de faire un projet ? Brice : Force et honneur ! Et après pour ma part, c’est mon réseau qui m’a porté et motivé à faire ça ! Et là on peut dire que je suis au-dessus de mon rêve de gamin !
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Antoine Gary- Photographe
LA GALERIE ANTOINE, AMATEUR à NANTES Interview original
Bonjour et merci beaucoup à Atypeek de m’accueillir sur ces quelques pages. Mais GRAND MERCI surtout à toutes celles qui y sont présentes avec qui nous partageons chaque fois ensemble de beaux instants de rencontres, d’échanges, de rires et d’affection. Je vous embrasse fort. Je m’appelle Antoine, amateur sur Nantes. Pas d’autre ambition que de me et vous faire plaisir. Il en reste ces quelques images toutes simples et sans prétention. Juste des regards croisés, inattendus parfois, souvent improvisés, complices toujours, sans calcul aucun… Pardon à celles qui ne figurent pas ici. Une autre fois peut-être ? Antoine
L’ensemble de mon book sur http://www.antoine44nantes.book.fr/ Mon profil Facebook : https://www.facebook.com/www.antoine44nantes.book.fr Merci à Patrice Molle - 67 Poses - Nantes
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INTERVIEWDAV GUEDIN
Dans la cuisine DE
Dav Guedin
Article par :
la musique tantôt joyeusement désinvolte tantôt noire et triste comme du charbon. Ça et les manières étranges de pantin désarticulé du chanteur Robert Smith. Et puis toutes ces nanas aux cheveux ébouriffés c’était génial !
D ©DAV GUEDIN
A
comme Amour
Ben oui c’est important l’amour. Je veux pas avoir l’air d’une sorte de hippie à la noix, mais sans amour, on fait quoi ? J’ai eu la chance de grandir dans l’amour et j’ai bien vu auprès de mes amis ou des enfants avec qui j’ai travaillé les dégâts causés par le manque. Ça laisse des traces à vie. Alors vite de l’amour pour tout le monde bordel !
B
comme Bêtises
Aux Beaux-Arts, nous étions à Cambrai avec mon frère. D’où ce parallèle alambiqué. On en a fait des « bêtises » quand nous étions dans la même classe, et puis ils nous ont bien vite séparés. J’aime bien aussi ce mot, parfait euphémisme quand on parle de ses propres erreurs ou conneries. J’aurais aussi pu parler de Charles Burns et l’un de ses premiers personnages de BD, El Borbah, le détective Luchador que j’adore. Mais j’aurais peur de passer pour un groupie. Ah mince j’viens de le faire. Je l’ai tatoué sur ma main droite car c’est un allié de taille.
C
comme The Cure
Le groupe The Cure est le premier dont j’ai été fan. Premier concert de ma vie, j’avais 14 ans et mon frère 12, notre père nous avait accompagnés avec un sac rempli de sandwiches et de boissons. Je l’ai bien vite égaré dans la foule avec son sac pour bien en profiter. J’étais fasciné par
comme Le Dernier Cri
La maison d’édition de Marseille aux livres tordus et beaux. Quand j’en ai découvert l’univers, moi qui lisais plutôt la BD rock des années 80, ça a été un choc visuel. Putain, on a le droit de faire ça ! m’étais-je dit. J’ai rencontré Pakito Bolino, le boss du Dernier Cri, en 2002-2003 pour refaire leur site internet. Je lui avais envoyé un mail pour dire que « Franchement vos éditions c’est terrible mais votre site c’est de la merde. » Il m’avait pris au mot et m’avait défié d’en faire un mieux. Ça tombait bien j’étais webmaster ! Je me suis fait griller en le travaillant à mon taf du moment. On est devenus amis. Pour me payer, il m’a proposé d’imprimer un bouquin au départ. J’ai demandé à mon frère de participer. C’était symbolique pour moi. Faire un livre ensemble au Dernier Cri, mon rêve ! Et puis l’envie de faire des bouquins ne m’a plus quitté.
E
comme Enfant
J’ai un rapport fort avec l’enfance. La mienne déjà. J’ai des souvenirs extrêmement précis de plein de choses. L’enfance, je l’ai vécue comme quelque chose de magique où les choses ont une vraie importance. Quant à celle des autres, j’ai commencé à travailler avec des gosses comme animateur à 16 ans et je n’ai jamais complètement arrêté. J’ai un rapport super simple et super sain avec eux. Ils me déçoivent tellement moins que le reste de l’humanité aussi. Je crois également que c’était pour moi un moyen de rétablir la balance en protégeant les plus faibles et en les rendant sympathiques aux yeux des autres, parce qu’enfant je n’avais pas vraiment été une crème avec les autres gosses.
“Ben oui c’est important l’amour. Je veux pas avoir l’air d’une sorte de hippie à la noix, mais sans amour, on fait quoi ? J’ai eu la chance de grandir dans l’amour et j’ai bien vu auprès de mes amis ou des enfants avec qui j’ai travaillé les dégâts causés par le manque. Ça laisse des traces à vie. Alors vite de l’amour pour tout le monde bordel !” DAV GUEDIN
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INTERVIEWDAV GUEDIN
F
comme Frère
J’en ai qu’un, on m’a toujours dit de bien m’en occuper. Que c’était important dans la vie et patati et patata. Je crois que c’est aussi pour cette raison que lorsque l’on m’a proposé de faire un livre, j’ai naturellement pensé à inviter mon petit frère à se joindre. J’ai tellement l’esprit de clan que même lorsqu’on était aux Beaux-Arts, j’ai mis une gifle à un mec qui lui parlait mal. Alors que mon frère était plus grand et plus costaud que moi et ne nécessitait plus la protection de son grand frère.
G
comme Guedin
Pseudo choisi il y a quelques années déjà. Comme ça sonne comme un vrai nom on m’a déjà fait des chèques à cet ordre. Mais c’est juste un sobriquet à la con, assez facile à assumer en vernissage quand on a un verre dans le nez. À l’époque ce mot m’amusait beaucoup, je le servais un peu à toutes les sauces. Aujourd’hui encore je ne le regrette pas. Dernièrement j’ai fait un atelier bande dessinée en prison à Bois-d’Arcy (à BD comme on dit là-bas) et j’étais mort de rire quand j’arrivais et que les détenus gueulaient « wesh Guedin ! » dans les corridors.
H
comme H
Substance dont je continue à abuser depuis bien des années avec toujours la même passion. Je pense aussi à « Hitler » car j’ai lu il y a un ou deux ans un très bon livre à mon sens, La Part de l’autre d’Éric-Emmanuel Schmitt. Je ne raffole pas de l’auteur, mais il a écrit ce récit où il met en parallèle la « vraie » vie d’Hitler et celle fantasmée du petit Adolf s’il avait été pris aux Beaux-Arts au début du xxe siècle. C’est passionnant, le mec a mis les mains dans le caca volontairement et ce qui en ressort est une réflexion sur l’être humain et ses choix en fonction de son parcours. Je pense également à « Handicap » car je suis très fier d’avoir fait une BD sur le thème, Colo Bray-Dunes
1999, avec Craoman. Un sujet dont on parle trop peu à mon goût. On avait d’ailleurs essayé de me décourager à ce moment-là. Mais nous avons tenu et je me rends bien compte que cette BD a marqué pas mal d’esprits. Beaucoup de retours de lecteurs travaillant ou ayant travaillé dans ce secteur et qui ont vu le livre comme un reportage/hommage au personnel encadrant et aux personnes handicapées.
I
comme Internet
Une aubaine pour les fanzineux de tous poils. On est arrivés au bon moment. On pouvait communiquer et diffuser à travers le monde à moindres frais. Directement du producteur aux consommateurs ! C’est très excitant d’envoyer des zines/comics de l’autre côté de la planète (surtout grâce au tarif « livres et brochures » de la Poste). C’est beaucoup de travail la diffusion, il faut avoir un côté « vendeur », mais pour quelqu’un comme moi qui ai vendu La Mouise du professeur Choron dans la rue, c’est une partie de plaisir.
J
“J’ai tellement l’esprit de clan que même lorsqu’on était aux Beaux-Arts, j’ai mis une gifle à un mec qui lui parlait mal.” DAV GUEDIN
comme Jojo Jojo
C’est mon père, il comprend pas grand-chose à ce que l’on fait et il est assez admiratif pourtant de l’énergie que l’on déploie pour ça. Deux fois il a marqué de l’intérêt pour notre travail : quand on a fait Mémoires de bâtards au Dernier Cri, car il y avait plein d’histoires le concernant et où il s’en prenait plein la tête. Il y a notamment appris que je crachais volontiers dans son café quand il m’en demandait avec autorité pendant mon adolescence. La deuxième fois quand il a identifié au premier abord notre BD pastiche Des Aventures pour les vrais bonhommes comme des « men’s adventures », le genre de BD qu’il lisait quand il était gamin. Ça voulait dire que c’était réussi ! « Jojo » aussi comme « ah oui c’est pas jojo ! » et toutes ces expressions désuètes et un peu ploucs qui me font bidonner. « Ça coûte bonbon », « tu vas pas nous en chier une pendule ! »…
À SAVOIR Fred Druart est l’illustrateur de plus de 10 bandes dessinées, dont Groupe Tel-Aviv, La Métaphore du Papillon, Le chien de minuit...
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http://fredtoshy.wixsite. com/illustration
Article par :
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Article par :
nelle, elle m’a donné l’amour des gosses. Elle m’a aussi donné l’amour des livres et pas n’importe lesquels ! Grâce à elle j’ai lu Les Ritals de Cavanna, j’avais à peine 12 ans. Et plein d’autres. Elle aimerait bien que je me trouve un petit personnage de BD comme Titeuf et que je m’assure une place au soleil. Mais je crois qu’elle a enfin compris que c’est pas mon truc. ©DAV GUEDIN
K
comme KKK
Notre premier livre édité était un détournement des codes de la triste organisation. Brothers Caca Klan que ça s’appelait. On avait repris toute l’imagerie folklorique du groupe en la présentant comme une secte dans laquelle il fallait se retenir de déféquer pendant un an. Tous les gags s’articulaient autour de ce postulat. Je vous laisse imaginer la suite.
L
comme Lucifer
J’ai longtemps été fasciné par tout ce qui avait rapport au diable. Non par réelle croyance ou adhésion, plus par rejet de ce qui était censé être le bien et par attrait pour la représentation du mal. J’ai eu la chance de passer au Prado de Madrid il y a peu où j’ai pu voir le triptyque Le jardin des délices (1490-1510) de Jheronimus Bosch, avec le paradis, le péché et l’enfer. Je me suis dit putain mais qu’est-ce qu’on a fait de mieux depuis ! La trilogie de Damien, La Malédiction, a un peu vieilli mais le charme opère toujours ! Quand ils ont sorti le jeu vidéo Lucius où l’on incarne le personnage du diable sous les traits de l’enfant recueilli, je n’ai pas boudé mon plaisir.
M
comme Maman
Ben oui, j’ai parlé de papa, alors pas de jaloux. Ma mère est une muse, ma mère est géniale. Institutrice de mater-
N
comme NTM
Je n’ai pas écouté de rap avant l’âge de 20 ans, moi j’étais un punk et pis c’est tout. Les petits zoulous des campagnes étaient bien relous avec nous, ce qui nous rendait encore plus fermés à leur musique. Et puis j’ai commencé à bosser de plus en plus avec des gamins de Seine-Saint-Denis et là ça a fait BOAAAH ! J’ai été happé par le truc ! J’ai même un temps renié mes anciennes amours. Maintenant j’écoute un gros mix de choses très différentes et ça me va bien.
O
comme Origines
J’ai longtemps cru être d’origine juive parce qu’on m’avait dit que notre vrai nom l’était. Avec le prénom de David pardessus le marché, je me suis rapidement identifié comme tel. Ça expliquait pourquoi je ne ressemblais pas au type « normand » (puisque nous venons de Normandie). Alors je me suis documenté, je me suis rapproché de personnes issues de cette communauté. Et puis il s’est avéré que pas du tout. Et j’ai complètement lâché l’affaire. Comme quoi on est quand même vachement formaté par nos origines ou ce qu’elles sont censées être. Il est arrivé à deux reprises que des propriétaires juifs me prennent pour un des leurs et que cela m’avantage pour avoir accès à la location d’un boui-boui et je me suis bien gardé de les contredire.
P
“Notre premier livre édité était un détournement des codes de la triste organisation. Brothers Caca Klan que ça s’appelait. On avait repris toute l’imagerie folklorique du groupe en la présentant comme une secte dans laquelle il fallait se retenir de déféquer pendant un an. Tous les gags s’articulaient autour de ce postulat. Je vous laisse imaginer la suite. ” DAV GUEDIN
comme Prison
J’en parlais tout à l’heure. J’ai réalisé il y a quelque temps que c’est une épée de Damoclès au fil bien ténu qui se balATYPEEK MAG #02
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“À force de faire des livres où je parle de sperme, de caca et autres friandises, on pense que j’ai une fascination pour le sale et le graveleux alors qu’en fait je suis quelqu’un de très propre et ordonné.” DAV GUEDIN
À SAVOIR Fred Druart est l’illustrateur de plus de 10 bandes dessinées, dont Groupe Tel-Aviv, La Métaphore du Papillon, Le chien de minuit...
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ance au-dessus de nos têtes (à part pour l’oligarchie). J’y ai échappé. Et pour l’avoir fréquentée en tant qu’intervenant, je suis bien content d’en être resté à l’écart. Le concept est inepte. Les conditions sont inhumaines bien souvent. Ça n’apprend pas grand-chose. Beaucoup sont là pour pas grand-chose. Il y règne pourtant une solidarité qui fait plaisir à voir.
Q
comme
Qu’est-ce qu’on attend pour foutre le feu ?
Chanson de NTM qui résonne encore et toujours dans ma tête. Quand on voit l’absurdité et la vacuité du discours politique d’aujourd’hui, les manigances et manipulations dont nous sommes victimes, on se demande bien ce qu’on attend. J’en peux plus d’entendre des gens m’expliquer pourquoi il faut voter comme ci ou comme ça pour ne pas avoir le PIRE au pouvoir. L’usage de ce dernier mot déjà me fait honte. Pouvoir ? Mais la personne qu’on élit devrait être « au service de », pas au pouvoir. Tout est à refaire.
R
comme Rage
Je pense à ces magnifiques dessins de Pierre Déom, cet instituteur/illustrateur/ rédacteur du journal La Hulotte qui nous contait les Ardennes. Je me souviens très bien de cet article sur la rage et ce qu’il fallait faire si on la contractait. Ce mec avait réussi le cocktail parfait de presse spécialisée sur la nature avec juste ce qu’il fallait d’humour pour nous donner envie de dévorer chaque magazine. La rage au sens non médical, je l’ai eue longtemps et toujours un peu. Pour aller au bout d’un projet conséquent comme une BD « longue », par exemple, ça demande beaucoup d’énergie et de patience. Moi c’est la rage qui m’a fait avancer.
S
comme Saletés
À force de faire des livres où je parle de sperme, de caca et autres friandises, on pense que j’ai une fascination pour le sale et le graveleux alors qu’en fait je suis quelqu’un de très propre et ordonné. Sans cela je pense que ça m’amuserait moins de jouer avec ces matières. Ce serait moins transgressif pour moi. Donc voilà, pas de conclusions hâtives s’il vous plaît.
T
comme Tatouage
Je ne peux le nier, je suis assez fan de tatouage. Quand j’en veux plus j’en veux encore. Même si l’engouement pour ce dernier depuis un certain temps a pris beaucoup trop d’ampleur, habiller sa peau avec des dessins qui nous plaisent, ressentir la chaleur de l’aiguille et communier avec le tatoueur reste un sacré kiff. D’ailleurs, je me suis interdit de le pratiquer depuis des années et je commence à changer d’avis. Il est pas dit qu’en 2017 je ne me mette pas à piquer des gens de temps en temps !
U
comme Uni
Ou la chanson de Sham 69 « If the kids are united… They will never be divided ». Ado, Je voyais le punk et la Oi ! comme les musiques qui rassemblaient les gens comme moi pendant des concerts sauvages pour former une grande famille. On était jeunes et fous, on allait tout péter. On a fait ce qu’on pouvait et on continue, chacun avec ses armes, mais l’esprit du clan est resté intact chez moi. J’ai connu des désillusions bien sûr mais je conserve l’essence du truc.
V
comme Vandalisme
Pendant mes études, j’ai passé beaucoup de temps à traîner tard le soir dans la rue et notre petit jeu était de se réapproprier le paysage urbain. On faisait pas vraiment de graffitis mais on redécorait des sculptures pompeuses avec tout ce qu’on trouvait. On ajoutait du volume et de la fantaisie là où il en manquait. Le mieux c’était quand on croisait d’autres vagabonds nocturnes qui nous parlaient de nos exploits sans savoir que nous en étions les initiateurs. Jouissif !
W
comme Whisky
Mon alcool préféré quand il est mélangé avec du Coca. Je sais, ça fait très parigot de boîte de nuit mais en vérité c’est la boisson dont on se délectait aux réunions du soir des colonies de vacances. Pour moi c’est associé au plaisir, à la détente et à la connerie. Après chaque réunion ça partait en sucette : les coinssos ne l’étaient plus et on pouvait enfin se lâcher pendant que les mômes dormaient. Le whisky-Coca c’est magique !
Article par :
©DAV GUEDIN
X
comme X
Le sexe est un moteur dans la vie. Eros et Thanatos constituent les pulsions essentielles de l’homme. C’est bien connu. Le sexe est à lui seul une passion pour moi. Je parlais de l’amour au tout début de cet abécédaire, mais l’amour sans sexe mwen pas comprendre. Chacun le pratique à sa façon, avec plus ou moins de réussite. Mais nom di diou, y a quand même rien de mieux qu’un orgasme partagé. Les mots deviennent inutiles, les pensées parasites s’envolent et on se sent bien vivants. En plus, c’est bon pour la santé !
Y
comme Yoyo
Mon meilleur ami. Tout le monde s’en fout. Il apparaît à plusieurs reprises dans Confessions d’un puceau. Dans une vie, on n’a pas tant d’amis que ça. Je veux dire de vrais amis. Lui, c’est le seul dont je ne peux douter. Même si aujourd’hui il est banquier et qu’on n’est pas toujours d’accord sur des tas de sujets, la base est là. Je serai jamais un clochard car le gars me laissera pas à la rue même s’il est
marié et avec des enfants, il y aura toujours une place chez lui pour moi et inversement. La preuve, c’est déjà arrivé. Je souhaite à tout le monde un pote comme ça. Quelqu’un pour qui le mot amitié n’est pas vain, comme moi ! J’aurais aussi pu parler du Yéti car gamin j’étais passionné par tous ces prétendus monstres contemporains, j’ingurgitais tout ce qu’il était possible sur la bête du Gévaudan… Une fois, on était en camping en Écosse avec mes parents, on avait vu sur le lac du Loch Ness ; avec mon refré, on a passé la nuit à deviner le monstre dans tous les recoins de l’étendue d’eau jusque sur les bords. C’était super !
Z
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comme Zombie
Passionné du concept de survie en milieu infesté de zombies depuis belle lurette, je me suis réjoui de cette nouvelle vague de films, séries et jeux vidéo, même si par moments c’était un peu too much et répétitif. Je peux vous dire que j’en ai bouffé de la viande pourrie. Je joue encore en ligne à un jeu sorti en 2007, Left 4 dead. Si vous y croisez par hasard un « davguedin », il y a de fortes chances que ce soit moi.
Aaarg ! N°7 - Découvrez plus d’articles sur : www.aaarg.net
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Photo 1 :
Route entre le lac Khövsgöl et la ville de Mörön Photo 2 :
Chèvres et moutons : il y en a plus de 50 millions en Mongolie, alors qu’il n’y a que 3 millions d’habitants Photo 3 :
Des vaches et une yourte (appelée « ger »), habitation traditionnelle des familles nomades de Mongolie Photo 4 :
Un mois de mars enneigé (-10 °C en moyenne en journée) Région de Khövsgöl, au nord de la Mongolie, début mars. par Alice Féray- Photographe
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Le Geek C’est Chic
© DR
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Valentin Blanchot - Journaliste
LE CAHIER D E S G E E K S AV I S É S Marques & consommateurs :
les rituels à l’ère du digital Article I Siècle Digital
Valentin Blanchot, Journaliste
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DIGITAL / Analyses
Marques & consommateurs :
les rituels à l’ère du digital Rédaction : Siècle digital Rédacteur : Valentin Blanchot
INFOS : https://siecledigital.fr/
Depuis la découverte des traces laissées par les premiers Hommes sur la Terre nous savons que nous sommes une espèce ritualisée. Peu importe l’ère traversée ou la société analysée, l’amour, la mort, la vie, ou d’autres moments clés sont ritualisés. Le rituel apporte un confort (sous toutes ses formes) à l’Homme et intervient dans une situation à laquelle il prête beaucoup d’importance. Notre société a considérablement changé depuis une centaine d’années. Elle s’est transformée en séparant la religion et le gouvernement, en créant des marques, ou encore en se connectant avec le reste du monde grâce aux nouvelles technologies. Cette transformation a changé notre façon de vivre les rituels jusqu’à permettre au numérique d’en créer plus aisément pour une cible plus vaste.
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Des rituels passés aux rituels contemporains Les rituels tels que nous aurions pu les connaître jadis étaient d’abord poussés par des croyances. Pour les sociétés d’Histoire chrétienne, la naissance est accompagnée par le baptême, l’amour célébré à travers le mariage, la mort par les funérailles. Chacun de ces rituels doit se faire dans un contexte bien précis et en respectant un ordre bien précis. S’ils sont encore bien présents de nos jours, nous ne croyons plus de la même manière. Notre vision des pouvoirs qui nous régissent a changé, et aussi notre façon de vivre ces rituels. À présent, il existe plusieurs façons de célébrer ces évènements clés. Si ces schémas étaient si importants à cette époque, c’est que la religion faisait partie intégrante
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Article par :
de la vie de tous les jours. Elle régissait les vies de la naissance jusqu’à la mort. À présent, ce sont les marques qui remplacent les religions dans les sociétés modernes. Du levé au couché, de la naissance jusqu’à la mort, elles nous accompagnent. La balance du pouvoir se serait-elle alors inversée en faveur du consommateur ? C’est ce que nous nous surprenons à croire. Pourtant c’est bien notre façon de consommer une marque qui crée le(s) rituel(s). Certains sont personnels, d’autres sont populaires et traversent les frontières pour créer des marques emblématiques. La manière ritualisée de manger un Oreo est un très bon exemple. On en vient à dire que c’est la manière de manger le cookie qui importe, impliquant d’une certaine façon que c’est le cookie en lui-même qui a de l’importance. Tout ça ne fera qu’élever la valeur perçue et susciter le désir chez le consommateur. De la même manière, les « connaisseurs » de bières ajouteront une tranche de citron dans leur Corona et apprécieront déguster la mousse justement dosée de leur Guinness. Sans ces petits paramètres, on peut juger l’expérience de consommation ratée. Enfin, nous connaissons tous la technique de faire un volcan de purée et mettre du jus à l’intérieur. Ce mimétisme sera propulsé par Mousline et sa fameuse chanson. Le cinéma, la télévision et les publicités ont popularisé les rituels liés aux marques avant l’apparition des communications numériques. Si vous n’avez jamais mangé d’Oreo, ou bu de Corona, vous savez néanmoins comment faire. Vous avez aussi en tête une façon bien précise d’aller chez Starbucks où vous pouvez lire ou travailler après avoir récupéré votre latte-caramel avec votre prénom écrit dessus. Plus largement, vous êtes capables d’associer certaines marques à certains évènements.
Si le monde physique sait exporter simplement les rituels, c’est parce qu’ils sont d’abord culturels avant d’être communautaires. À l’inverse, le monde numérique a su créer des rituels de marque, mais ceux-ci sont nés des communautés puis sont devenus mainstream.
Naissances des rituels de marque à l’ère du digital De la même façon que la culture des marques depuis une centaine d’années a contribué à transformer notre manière de vivre les rituels. Internet apporte lui aussi son lot de changement. Comme dit plus haut, les rituels issus du monde physique ont été créés par la masse, sans liens communautaires. Internet depuis sa création a d’ailleurs facilité la création de communautés en effaçant les frontières. Aujourd’hui chacun d’entre nous appartient à plusieurs communautés. Blogueurs, geeks, runners, gamers, foodies, etc. Chaque personnalité est entremêlée d’une affinité plus ou moins forte avec des communautés et les marques qui y sont liées. À présent nous sommes beaucoup de consommateurs identifiables dans une seule et même personne. Ce(s) consommateur(s) que nous sommes a des lieux très divers pour échanger : les réseaux sociaux. Facebook, Twitter, LinkedIn et même 9GAG ont permis de façonner des cultures propres à un persona.
Dans ce sens, les échanges intercommunautaires ont permis de mettre en exergue des expériences communes dans la consommation de marques, et par conséquent de créer des rituels. Si cet aspect théorique peut paraître vague ou peut-être bullshit, voici des exemples de rituels de marques nés des communautés sur Internet.
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DIGITAL/ANALYSE/CRéativité/Technologie
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May The Force Be With You. Ou plutôt devrait-on dire « May 4th Be With You » pour célébrer la saga culte pendant le printemps. Si l’histoire autour des origines de cette journée reste floue, la première véritable journée de commémoration a été organisée en 2011. L’expression a été empruntée à une célèbre phrase de 1979 félicitant Margaret Thatcher pour son élection en tant que Premier Ministre du Royaume-Uni : « May the Fourth be with you, Maggie. Congratulation ». La culture geek omniprésente sur Internet en 2011 aura permis à cette journée de devenir célèbre et de s’exporter. Aujourd’hui, nombreux sont les marques ou les médias à contribuer à cette journée avec chacun son clin d’œil à la série Star Wars.
Taco Bell et sa digestion
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Le Star Wars Day
Si cette chaîne de fastfood est devenue si populaire aux États-Unis, c’est avant tout ‘grâce’ à la digestion de ses clients. Les médias sociaux ont participé à populariser cet aspect de la fréquentation de Taco Bell. Nombreuses sont les personnes qui partagent ou illustrent leurs expériences après leur passage dans un des restaurants. Si vous n’avez pas passé le stade anal, je vous invite à faire de plus amples recherches par vous-même.
Article par :
“Une soirée Netflix & Chill représente à présent un binge watching impliquant relation sexuelle.” « Netflix and chill »
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Alors que Netflix est né en 2009 aux États-Unis, les premières expressions liées à « Netflix & Chill » naissent dans la foulée. À la base utilisée dans une phrase et non comme expression, elle s’est popularisée pour symboliser une certaine façon de consommer le service. Une soirée Netflix & Chill représente à présent un binge watching impliquant relation sexuelle.
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On vous dit tout, on ne vous dit rien
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Laurent Courau - Journaliste
LE CAHIER RESPONSABLE RÉMI SUSSAN
LES UTOPIES POST-HUMAINES Interview I La Spirale
Propos de Laurent Coureau
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INTERVIEWAUTEUR
RÉMI SUSSAN LES UTOPIES POST-HUMAINES
Article par :
LE SAVIEZ-VOUS Mutations / Underground / Gonzo / Cyberpunk / Nomadisme / Freaks / Finance / Chaos / Activisme / Robots / Prospective / Résistance / Fantastique
PLUS D’INFOS
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©DR - Rémi Sussan
UNE INTERVIEW DE LA SPIRALE
© DR - Timothy Leary
Journaliste spécialisé dans les nouvelles technologies de l’information, Remi Sussan a écrit pour Science & Vie High Tech, Computer Arts, Info PC et Technikart. Il s’est également illustré dans La Spirale avec une interview d’Alexander Bard et un Manuel de survie à l’usage de l’étudiant des religions du futur qui resteront dans les annales de ce site. La Spirale l’a retrouvé à l’occasion de la sortie des Utopies PostHumaines, un voyage initiatique dans les tréfonds de la contre-culture, de la cyberculture et de ce qu’il convient aujourd’hui de nommer la culture du chaos. Vraie réussite et futur ouvrage de référence, Remi Sussan signe un essai qui mérite de figurer en bonne place dans vos bibliothèques et lui vaut de
réapparaître en position d’interviewé dans l’eZine des Mutants Digitaux pour un entretien où il est question de l’influence des marges culturelles, de rock psychédélique, de transformation de l’espèce et du « couch potatoe » comme modèle de système posthumain ! Quand je vous disais que nous nageons en pleine dévolution… Les lecteurs assidus de La Spirale se souviennent de ton excellent Manuel de survie à l’usage de l’étudiant des religions du futur. On te retrouve aujourd’hui avec un nouveau livre, Les Utopies Post-Humaines, publié chez Omniscience. Quel fut le point de départ de ce projet ? Une discussion avec mon éditeur. Il s’avérait qu’il n’existait pas en français (ni même réellement en anglais, quand on y réfléchit) d’ouvrage introductif à ce mouvement à la fois contre-culturel et futuriste. On trouve parfois des allusions dans certains livres à la cyberculture, et il y a même eu quelques traductions, comme les premiers volumes d’Illuminatus, mais sans mise en perspective du
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un voyage initiatique dans les tréfonds de la contre-culture, de la cyberculture et de ce qu’il convient aujourd’hui de nommer la culture du chaos. Propos recueillis par Laurent Courau. Copyrights : La Spirale.org Un eZine pour les Mutants Digitaux !
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contexte, sans vision globale du phénomène, ces morceaux de connaissances apparaissaient souvent comme incompréhensibles, ou sans intérêt. Comme j’étais passionné par ces mouvements depuis les années 1970, retracer leur évolution m’a paru un défi intéressant à relever.
Je n’étais pas le seul à le penser, puisque tout le rock psychédélique que j’écoutais alors était truffé de références au voyage spatial (8 Miles High des Byrds ou cet excellent album du Jefferson Starship, Blows Against the Empire - et je ne parle pas de Pink Floyd, je déteste les Floyds).
Comment en es-tu venu à t’intéresser à tous ces mouvements de pensée parallèles et alternatifs ?
Je suis tombé sur l’une des rares expositions de la théorie des 8 circuits de Leary en français, je ne sais plus où. La chose était tellement nouvelle, tellement bizarre ; le vocabulaire utilisé était si étranger à ce que j’avais lu jusqu’ici que ça m’a immédiatement fasciné. C’était d’autant plus étonnant que j’avais lu la politique de l’extase du même auteur, et que ça ne m’avait guère emballé.
Ça dure depuis longtemps, puisque j’ai commencé à investiguer cette « contre-culture futuriste » à la fin des années 1970, en gros lorsque Timothy Leary sortait sa théorie des huit circuits, que Wilson et Shea écrivaient Illuminatus, etc. Ok, mais comment en es-tu venu à t’intéresser a cette « contre-culture futuriste » ? Était-ce au travers de la littérature fantastique ou de science-fiction, du rock psychédélique, des premières expérimentations proto-robotiques de Kraftwerk ? Quelles furent les causes des premiers émois contre-culturels du jeune Remi Sussan ? J’ai toujours adoré la science-fiction. Dans les années 70, j’étais plutôt dans les philosophies orientales, le Grateful Dead, et tutti quanti. On opposait beaucoup, à l’époque, les cosmonautes au crâne ras, et les hippies chevelus. Pour moi, ils étaient les deux faces d’une même entreprise enthousiaste d’exploration des espaces internes et externes.
Ton livre est sous-titré « contre-culture, cyberculture et culture du chaos ». Peux-tu revenir pour les lecteurs de La Spirale qui n’auraient pas suivi sur les liens qui unissent la contre-culture à la cyberculture et nous expliquer ce que tu entends par « culture du chaos » ? Les liens qui unissent la contre-culture et la cyberculture sont multiples : tout d’abord, une bonne part des idées des années 60 venaient de conceptions très scientifiques, comme la cybernétique, la physique quantique… Ce n’est que plus tard que la contre-culture est devenue plus « passéiste ». De fait, bon nombre des acteurs de la cyberculture des années 90 étaient présents à l’époque du mouvement hippie. Tout le monde connaît le passé hippie de Steve Jobs, mais sa participation n’a en fait été qu’anecdotique. Bien plus important a été le rôle joué par Timothy Leary, Stewart Brand ou John Perry Barlow. La « culture du chaos » est, selon moi, la dernière incarnation de cette « contre-culture technologique ». Elle part du principe que le monde est beaucoup plus complexe, plus aléatoire, plus imprévisible qu’on ne l’a jamais imaginé. Cela implique un nouveau type d’individu, beaucoup plus « léger », c’est-à-dire débarrassé de bon nombre de certitudes et de présupposés, susceptible d’évaluer rapidement les modèles du monde et d’en changer. Quel a été selon toi l’impact de la contre-culture des 60’s et des 70’s sur la culture de masse occidentale ?
© DR - Grant Morrisson
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“Je suis tombé sur l’une des rares expositions de la théorie des 8 circuits de Leary en français, je ne sais plus où. La chose était tellement nouvelle, telle ment bizarre ; le vocabulaire utilisé était si étranger à ce que j’avais lu jusqu’ici que ça m’a immédiatement fasciné” Je pense qu’il est énorme, et bon nombre de nostalgiques ronchons ne cessent de s’en plaindre (quoiqu’ils préfèrent critiquer la « pensée 68 », alors que Mai 68 ne fut qu’une version locale d’un vaste mouvement international). Tout, dans notre habillement, nos distractions, notre sexualité, a été marqué par cette époque. En gros, tout ce qui concerne la sphère privée. Maintenant, les grosses institutions, l’armée, l’état, l’entreprise, l’école, comme toutes les organisations reposant sur les réflexes archaïques de dominance
©DR - Alan Moore
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et de soumission, ont évolué beaucoup moins vite. Malgré le réactionnarisme ambiant (qui touche tant la gauche que la droite), je reste convaincu que l’influence du mouvement des années 1960 va persister. Penses-tu comme Richard Metzger et Douglas Rushkoff que la contre-culture n’existe plus parce qu’elle a gagné ? N’aurait-elle pas au contraire perdu la bataille en se faisant définitivement assimiler par le système ? L’ambiguïté, la fin du manichéisme, me paraît être une caractéristique fondamentale de la complexité. Rushkoff et Metzger ont raison, à mon avis. Ce faisant, ils rétablissent la vieille notion « d’avant gard » qui avait été un peu vite discréditée. Quel autre but pour l’underground que devenir un jour « mainstream », même si cela a pour corollaire une certaine déformation, la perte d’une certaine pureté ? Le but n’est-il pas de changer les choses, au lieu de rester dans un splendide isolement ? Alan Watts disait que le zen pénétrerait en occident en infusant, lentement, comme le thé. C’est pareil pour les thèses de la contre-culture. Elles influencent doucement, discrètement, en devenant de plus en plus acceptables, souvent par l’intermédiaire de médias très populaires (rock, bande dessinée, etc.) qui passent inaperçus des gardiens du Temple de la Culture. Elles se propagent à l’aide de « média virus », dirait Rushkoff. Le rêve du Grand soir dans lequel toutes les valeurs se trouvent brusquement transformées me paraît largement dépassé. Les choses évoluent lentement, subtilement, et c’est tout aussi bien comme ça. Les technologies de contrôle et de surveillance n’ont jamais été aussi élaborées qu’elles le sont actuellement. Peut-on réellement dire que nous sommes entrés dans l’ère du chaos ? Ne s’agit-il pas d’une énième tentative de manipulation, comme le dénoncent certains théoriciens de la conspiration ? Je crois que l’intérêt de la complexité et de l’imprévisibilité qu’elle génère est qu’elle n’est pas dépendante d’une idéologie. Dans un monde complexe, toute action aura des conséquences inattendues. Il y a un dicton discordien que j’aime bien : « imposition de l’ordre = escalade du chaos ». Chaque tentative de surveillance,
de manipulation crée des failles, des désordres nouveaux. Je ne serais pas surpris qu’une transparence absolue débouche sur un chaos total. Les marges contemporaines regorgent aujourd’hui d’individus qui se définissent comme post-humains, transhumains, mutants ou vampires (pour ne citer que ces quatre exemples). Quelles sont à ton avis les causes de ces nouvelles quêtes identitaires ? On dit souvent que la mondialisation, notre époque moderne, tend à uniformiser les comportements et les individus. L’existence de ces identités variées nous montre que la chose est bien plus complexe que cela. C’est vrai que l’uniformisation a lieu sur un certain plan, on consomme tous à peu près la même chose, nous possédons tous une vision globale du monde, basée sur la science (et c’est vrai aussi de ceux qui s’obstinent à nier la valeur de cette dernière), du moins en occident. Mais à un niveau supérieur, en « surcouche », nous élaborons de nouvelles cultures, « virtuelles », ce qui relance le processus de différenciation. Au-delà de la « contre-culture », de la « cyberculture », l’« autoculture » sera peut-être la grande affaire du prochain siècle. L’individu va chercher à se redéfinir lui-même, à se recréer. À terme, il possédera sa propre religion, sa propre éthique, sa propre tradition culinaire… On assiste depuis les années 50 et 60 à un grand retour de l’ésotérisme, de la magie et des spiritualités non conventionnelles. À quoi attribues-tu ce regain d’intérêt pour les pratiques et les disciplines occultes ? En fait, la situation est plus compliquée que cela, chaque époque a connu son regain, qui à chaque fois a surpris le grand public car ses manifestations étaient toujours nouvelles, ce qui empêchait de constater qu’on se trouvait, en fait, face à une continuité. Regarde le xviiie siècle, celui des lumières et de la raison triomphante : c’est celui du comte Cagliostro, des baquets de Mesmer, des opérations magiques de Jacques Cazotte et Martinez de Pasqually ; sans parler des illuminés de Bavière, dont on a jamais su au juste si la lumière qui les éclairait était celle de la divinité ou celle de la raison. Le xixe siècle, celui du rationalisme ?
C’est aussi celui d’Eliphas Levi, du spiritisme, de la Golden Dawn ou de la société théosophique. Le fait est que l’ésotérisme a toujours joué un rôle considérable dans les mentalités occidentales, mais celui-ci a toujours été discret, occulte justement ! En revanche, il y a quelque chose de nouveau aujourd’hui : une frange de l’occultisme a effectué un renversement épistémologique complet et ça c’est intéressant. Les nouveaux occultistes, ceux issus de la chaos magick, les discordiens, etc. reconnaissent et revendiquent le caractère fictionnel, fantaisiste de leurs idées et de leur pratique. Du coup, l’occultisme devient le terrain d’expérimentation de l’imagination la plus bridée. Toute l’histoire de l’ésotérisme est truffée de faux et usage de faux, de canulars, de mensonges. Pour exemple le Corpus Hermeticum, les manifestes rose-croix, les messages des « mahatmas », les manuscrits falsifiés à l’origine de la Golden Dawn… Sans parler de Carlos Castaneda ! Mais jusqu’ici cela restait le sale petit secret de la famille, dénoncé par les sceptiques mais pudiquement ignoré par les « adeptes ». Aujourd’hui, les nouveaux magiciens revendiquent ouvertement leur recours à la fiction ; ils nient l’existence d’une « philosophia perennis », dogme fondamental de leurs prédécesseurs et affirment leur modernité, voir leur complet mépris de l’histoire. La magie devient, selon les mots d’Alan Moore : « Le trafic entre ce qui est et ce qui n’est pas. » On invoque Cthulhu, Bugs Bunny, Mr ATYPEEK MAG #02
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Spock ou les divinités d’un jeu vidéo comme Morrowind. Le magicien contemporain, ne croit plus, il affecte de croire, il expérimente sur la croyance. Naturellement, le bon vieil occultisme continue sa route, avec le new age (la énième réincarnation de la théosophie) ou le traditionalisme réactionnaire d’un Guénon ou d’un Evola, très prisé en France. Ce n’est pourtant pas là, à mon avis, que les choses les plus intéressantes se passent. Parmi les différents courants de pensée cités dans ce livre, lesquels te semblent véritablement porteurs des germes d’une nouvelle forme d’humanité ? Les mouvements présentés dans le bouquin sont surtout des « monstres prometteurs », des mutations intéressantes qui annoncent les changements à venir, sans pour autant en faire partie. En revanche, je pense que ces groupements sont riches d’enseignements parce qu’ils élaborent, chacun à leur manière, les principes fondamentaux qui gouverneront les cultures de demain, et peut-être les nouvelles formes d’humanité. Chacune de ces tendances a apporté une nouvelle pierre au moulin. Les psychédélistes, les hippies nous ont fait comprendre que la perception de la réalité dépend avant tout de la structure de notre cerveau. Les adeptes de la cyberculture nous ont montré de leur côté que l’altération de cette dernière pouvait être obtenue par la création de nouvelles interfaces, par le contrôle de l’écran, comme dirait Leary. Les transhumanistes, eux, nous apprennent à penser l’intelligence sur le long terme, à travers une multitude de formes possibles, loin de tout chauvinisme anthropomorphique ou même biologique. Quant aux magiciens chaotiques, ils expriment très bien la nécessité, dans un monde hypercomplexe, de recourir à l’absurde, à l’imaginaire, à l’aléatoire pour briser les certitudes trop bien établies. Toutes ces idées sont intéressantes, appelées pour moi à un véritable avenir. Maintenant les courants qui les portent ont aussi leurs limites et une bonne part de naïveté.
Franchement, je doute que les drogues psychédéliques nous fassent réellement pénétrer dans d’autres dimensions, nous mettent en contact avec des elfes, etc. Nous savons que le Web n’a pas suffi à changer le monde, qu’il y a une vie au-delà de l’écran. La croyance des transhumanistes en la cryonie, en des concepts comme la Singularité, les décrédibilise fortement. Et personne, j’en suis sûr, n’a jamais fait tomber la pluie en se concentrant sur un « sigil »… Les médias et les intellectuels branchés reviennent régulièrement sur cette idée de post-humanité. Et pourtant, qu’est-ce qui nous différencie fondamentalement des générations qui nous ont précédées ? En quoi l’être humain de ce début de vingt-et-unième siècle est-il vraiment différent et plus évolué que nos précurseurs des siècles passés ? Je pense qu’il y a plusieurs facteurs. Tout d’abord, pour la première fois l’homme est « plus grand que la terre » : nous comprenons enfin que notre planète est un « vaisseau spatial », comme disait Fuller. Cette découverte peut nous convertir à un écologisme extrême, passéiste, ou au contraire nous pousser à quitter cette enclave pour envahir l’univers. Dans les deux cas, le résultat est le même : la terre est devenue, petite, limitée, fragile : sa survie, son destin, dépend de nous et de nous seuls. Ensuite, il y a le problème de la mort. Pour la première fois notre compréhension de la biologie nous permet de la considérer comme un problème d’ingénierie qui peut être résolu avec de l’astuce et de l’huile de coude. Cela ne signifie pas que l’immortalité soit pour demain, ou même qu’elle sera jamais possible. Mais nous entrons dans le temps où elle peut être envisagée. Ce changement de perspective est fondamental et transforme intégralement notre réflexion sur la condition humaine. Enfin, il y a cette « accélération accélérante ». Jusqu’ici, des générations entières vivaient sans connaître le « choc du futur », le changement radical de leur mode de vie et de leur conception du monde. Aujourd’hui, notre génération a connu plusieurs de ces « chocs » et nos enfants en subiront plus encore.
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“Les gens me voient comme un geek, un technophile, mais honnêtement, je me suis davantage intéressé à l’aspect humain de l’équation, plus qu’à la technologie” Héraclite le remarquait bien sûr déjà, on ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve, mais aujourd’hui, il s’agirait plutôt d’un torrent tumultueux ! Nous vivons dans un environnement infiniment plus liquide, plus instable que ne l’ont connu les époques précédentes. En quoi cela changerait-il notre condition humaine pour en faire une condition post-humaine ? On ne peut que reconnaître l’existence de cette “accélération accélérante” dont tu parles, mais jusque-là, il ne s’agit que de nouvelles conditions sociétales et environnementales auxquelles nous devons nous adapter, pas de changements profonds dans ce qui constitue l’humain… L’immense majorité de nos contemporains me semblent toujours aussi motivés par leur cupidité, leur ego ou un besoin irrépressible de se reproduire. L’une des idées lancées par Marshall McLuhan -à laquelle je souscris complètement- est que ce sont précisément les conditions environnementales, la culture matérielle et technologique qui déterminent pour une bonne part
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Aujourd’hui, le pouvoir se mesure d’une manière bien différente, par la façon dont on impose ses « memes », ses idées… Quant à l’ego, de nombreux penseurs - dont McLuhan, encore lui - pensent que sa perception et sa structure diffèrent largement selon les civilisations.
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la structure de notre système nerveux. Maintenant, comme je le dis dans l’intro, la notion de “posthumain” peut être mise en question, tant que le mot humain n’est pas défini. Une chose est sûre, certaines caractéristiques de ce qu’on considère comme la “condition humaine” se trouvent abolies par cette accélération accélérante, notamment la stabilité de nos perceptions et de notre identité elle-même.
Certains considèrent que la fusion progressive de l’homme et de la machine suffit à faire de nous des cyborgs. Pourtant, suffit-il de greffer un pacemaker à une grand-mère et un grand-père pour en faire des post-humains, lesquels resteront potentiellement scotchés dix heures par jour devant le Juste Prix et les retransmissions quotidiennes en direct du château de la Starac’ ?
Un autre point sur lequel je voudrais insister, c’est que cette notion de « posthumanité » n’est en rien une position morale. Il ne s’agit pas de rêver à des surhommes, ou à des saints. Simplement de mettre l’accent sur le caractère profondément fluide de notre constitution. Prends la « cupidité », par exemple. La cupidité qui pousse à avoir plus de femmes, de terres, de bétail, est-elle du même ordre que la cupidité qui nous fait désirer un ensemble symbolique de signes extérieurs de richesse et de position sociale ?
Mais voila un système parfaitement posthumain ! Et plus encore à cause de la télé que grâce au pacemaker ! Le « couch potatoe » est sans aucun doute un nouveau type d’être humain. Même sa physiologie est certainement différente de celle du chasseur-cueilleur du paléolithique. De surcroît, je suis convaincu que la télévision a apporté plus de modifications positives dans notre comportement qu’on veut l’admettre. Je suis personnellement très indulgent pour des phénomènes comme la Starac’. J’attends la preuve que les générations qui ont vécu sans télé ni reality shows étaient plus lucides, plus savantes, plus démocrates, plus pacifiques que les nôtres. Un simple coup d’œil à un livre d’histoire suffit à montrer que ce n’est pas le cas. Et si la Starac’ est le prix à payer pour l’Internet, la mécanique quantique, la liberté d’expression, la musique de Jon Hassel ou l’égalité entre hommes et femmes, moi je dis : « Hourra pour Jenifer ! »
La première est l’expression d’un simple désir de gratification animale. La seconde en est une version hautement abstraite, et parfois franchement mathématique. Elles ont une racine commune, c’est sûr. Peut-on réduire totalement l’une à l’autre ?
Puisque nous en sommes à parler de post-humanité, où trouve-t-on les origines de ce concept de transformation de l’espèce ? L’introduction de ton livre mentionne à juste titre le surhomme communiste rêvé par les Soviétiques et son pendant aryen chez les Nazis…
Le remplacement des gènes par les « memes » en est un autre exemple. Dans le temps, un homme pouvait mesurer son succès par le nombre de ses descendants.
L’idée d’une transcendance de l’humain est très ancienne. Henri Michaux définissait l’hindouisme comme la plus prométhéenne des religions, et il est certain que le vers du
Rig Veda : « Nous avons bu le soma, nous sommes devenus des dieux » est l’une des premières, sinon la première proclamation posthumaine de l’histoire. Sinon, je pense que le mouvement alchimique (en Chine comme en occident) réunit tous les éléments d’une philosophie du dépassement de l’humain par des voies technologiques, sans oublier leur rêve d’immortalité physique. Dans des temps plus récents, j’aimerais citer Olaf Stapledon, que je n’ai malheureusement pas eu la place de traiter comme il le méritait dans mon livre. Quant aux nazis ou aux communistes, ils ont développé des versions pathologiques de l’idée, et la possibilité de telles déviances doit rester dans les mémoires comme un avertissement. Mais on ne saurait, comme le font certains, limiter la description d’un concept à sa pathologie. Finalement, quitte à agiter les vieux démons et raviver le fantôme de Terminator, la seule vraie forme de post-humanité ne serait-elle pas à chercher du côté de l’intelligence artificielle, dans des créations humaines qui pourraient être appelée à nous remplacer ? Franchement, je ne le crois pas. Pas parce que je pense l’intelligence artificielle impossible, pas du tout. Mais il me semble évident que depuis la conférence de Dartmouth en 1956, qui vit la naissance du domaine, nous n’avons pas tellement avancé.
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Apparemment, nous n’avons pas encore bien compris la nature de l’intelligence. Ensuite même si nous créons une intelligence artificielle (et cela viendra), il faudrait que ses besoins la fasse entrer en compétition avec nous, qu’elle lutte pour la maîtrise de notre niche écologique. Pourquoi serait-ce le cas ? Elle n’a pas besoin de nourriture, d’espace vital, ni même d’eau ou d’oxygène. Au pire, je crois que cette intelligence supérieure s’en irait dans l’espace et nous foutrait la paix. Ce qui est excitant dans l’IA ? C’est peut-être justement que nous allons développer des intelligences Totalement Autres. De véritables aliens, vivant dans un milieu étranger, peut-être entièrement digital, avec des besoins, une structure mentale complètement différents… La taille de l’univers et la vitesse de la lumière étant ce qu’elles sont, il ne sera peut-être jamais possible de discuter avec de véritables extraterrestres. Alors la perspective de pouvoir communiquer avec des entités “faites maison”, voire aller jusqu’à développer avec elles une relation symbiotique, me paraît une perspective tout à fait excitante, beaucoup plus intéressante à envisager que les spéculations ultrapessimistes sur notre obsolescence finale, ou naïvement optimistes sur l’IA-papa noël, chantée par certains extropiens… Comme tout observateur qui se respecte, tu évites de livrer des pronostics en conclusion de ton livre. J’apprécierais pourtant que tu te livres, pour conclure cette interview, à un petit exercice de prospective en nous parlant des évolutions technologiques, sociales et culturelles que tu pressens pour les vingt ou trente années qui vont suivre… C’est effectivement très difficile ! On ne peut s’empêcher, lorsqu’on se livre à ce genre d’exercice, de penser à la prédiction des experts qui affirmaient qu’une dizaine d’ordinateurs (de la puissance d’une petite calculette d’aujourd’hui) suffirait à couvrir la surface des États-Unis… Tout d’abord, je ne crois pas en une « fin de l’histoire », optimiste ou pessimiste. Certains extropiens pensent que nous nous dirigeons vers la « singularité », un moment au cours duquel l’accélération accélérante du progrès technologique nous précipitera brutalement dans
“Imagine pouvoir redéfinir complètement ta personnalité par un cocktail de drogues… ©DR
un ailleurs posthumain, sur lequel nous ne pouvons pas dire grand-chose. Je n’y crois guère. Pour moi, l’histoire va continuer, mais il va falloir s’habituer à cet environnement extrêmement fluctuant. Il est probable que notre capacité d’action sur le cerveau va aller en en s’accroissant. Évidemment, cela fait un peu peur, on pense tout de suite à Big Brother et aux applications du neuromarketing, mais cela peut aussi impliquer un pouvoir accru de l’individu. Il y aura certainement des conflits dans ce domaine. Jusqu’ici, les « drogues » ont toujours eu une action très globale, peu contrôlable ; parfois, leur véritable effet reste incertain, comme les fameuses « smart drugs ». Mais on devrait bientôt réduire cette imprécision. À ces solutions chimiques, on peut ajouter la connexion directe entre le cerveau et la machine, ainsi qu’une réalité virtuelle très sophistiquée. Imagine pouvoir redéfinir complètement ta personnalité par un cocktail de drogues… tu vivras ensuite ta nouvelle identité dans un environnement ad hoc, peut-être totalement différent de notre milieu terrestre. Évidemment, dans ces conditions, la définition du moi, déjà fortement mise à mal ces derniers temps par les médias électroniques, devrait devenir plus floue, encore plus imprécise. Non seulement nous serons en mesure de nous autocréer, mais nous pouvons aussi chercher à devenir légion, à adopter des personnalités multiples. Dans son fascinant livre Aristoï, l’écrivain de science-fiction Walter Jon Williams imagine que les humains du futur seront capables de vivre en contact avec des « personnalités artificielles », en fait des portions de notre propre conscience possédant une certaine autonomie et amplifiées par des banques de données et des algorithmes d’intelligence artificielle implantés dans le cerveau.
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C’est une vision de la dissolution de notre identité encore plus fascinante que celle offerte par un moi perpétuellement changeant. C’est aussi l’aboutissement des pratiques des magiciens du chaos, qui fabriquent des « esprits familiers », des « serviteurs », à partir de leur propre inconscient. Ceux qu’ils font aujourd’hui au niveau de la métaphore, du jeu, pourrait devenir bien plus réel. Peut-être que les aliens de demain existeront, non pas sous la forme de purs programmes informatiques, mais comme des hybrides reposant pour une bonne part sur les ressources de notre cerveau. Dans tous les cas, je ne sais pas si on parlera de « post-humanité », au cas où de telles choses se produisaient, mais notre conception de la psychologie, de la société, de la culture risque de s’en trouver profondément altérée.
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Sur le plus beau trône du monde, on n’est jamais assis que sur son cul. Citation de Montaigne - Essais (1580)
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Flore Cherry - Journaliste
LE CAHIER SEXY COMmE UNE COUILLE DANS LE POTAGE Chronique I Union
Flore Cherry, Journaliste
SCHLAASSS : La Bédé BD I Mika Pusse
http://www.schlaasss.fr
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LA RUBRIQUE sexualité de FLORE CHERRY
COMmE UNE
COUILLE
DANS LE POTAGE JOURNALISTE : FLORE CHERRY ILLUSTRATION : ALAIN R. WEB : www.union.fr
Vous avez dit « couille » ?
Flore Cherry, journaliste pour le magazine Union et passionnée de sexualité, décrypte pour vous ce qui a fait l’actualité insolite des trois derniers mois. Et c’est au cinéma qu’elle s’attaque en ce début d’année. Qui remporte la palme d’or des films les plus barrés de fin 2016 ? Quelles œuvres du septième art ont osé parler de sexe de façon décomplexé, crue et dérangeante ? Elle vous livre sa sélection pour une séance de rattrapage 2017…
Mademoiselle ; Corée, beauté et perversité La scène traumatisante de l’inceste dans « Old Boy » reste encore fraîche dans nos mémoires, mais Park Chan-Wook, le réalisateur terrible et décomplexé de l’entrejambe coréen, n’hésite pas à nous resservir une plâtrée de transgressions avec « Mademoiselle », une ode à la lecture érotique, au sexe entre femmes et aux manipulations de pouvoir en tout genre. Les décors sont magnifiques, les personnages troublants, et
©The Jokers / Bac Films
l’histoire, tortueuse, à l’instar de ses précédents films. Si l’on peut soupçonner une certaine pudeur durant les 30 premières minutes, pas d’inquiétude, Park Chan-Wook vous aura retourné l’estomac avant le générique de fin. Spoil : Oui, il y a une scène avec une pieuvre géante.
Rocco, un documentaire poignant ! Le monument de l’histoire de la pornographie a enfin son documentaire dédié. À travers des images d’une réalisation de grande qualité, on découvre un Rocco Siffredi confronté à ses tourments, à sa vie de famille, à ses hontes, à ses fantasmes. Un homme complexe et bouleversant. Les scènes de sexe sont filmées de façon naturelle, sans penser à l’excitation du spectateur : pour une fois, ce n’est pas le propos. La découverte du milieu du porno est fidèle à ce que l’on peut en connaître : des rabatteurs libidineux, des actrices qui rêvent de starification et des moments complices de franches camaraderies. Ici, pas de place au jugement moral. Seule la « mise à nu » de l’homme derrière la légende compte… et quelle mise à nu !
Article par :
À SAVOIR © Sony Pictures Releasing GmbH
Sausage Party, un film HOT (dog)
Depuis 1972, le magazine pionnier Union est un moyen d’expression libre sur le sexe, l’érotisme et les relations amoureuses.
PLUS D’INFOS www.union.fr
Depuis les attaques des partisans de la « Manif pour Tous » pour atteinte aux bonnes mœurs, Sausage Party a fait couler beaucoup d’encre dans les médias.
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“Ici, pas de place au jugement moral. Seule la « mise à nu » de l’homme derrière la légende compte… et quelle mise à nu ! ”
Mis sur le banc des accusés en raison d’une législation jugée « trop faible » (seulement interdit aux moins de 12 ans, alors qu’il est « rated R » aux USA – à comprendre interdit aux mineurs de 17 ans non accompagnés d’un adulte), le film présente bien des scènes de sexes qui rappellent les heures de gloire du porno, notamment celle d’une partouze géante à base de chips croustillantes, de cookies libidineux et de tranches de pain de mie moelleuses. Bref, pas du tout adapté pour les enfants, bien que la saucisse géante sur l’affiche ait des faux airs d’un personnage attachant sorti d’un Toys Story. Rien à voir avec l’univers enchanté de Pixar. Vraiment.
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La culture fait-elle l’homme ? (ou la femme)
©Mael Le Braz
Janv./Fé v./Mars 20 1 7
Maxime Lachaud - Journaliste
LE CAHIER CULTUREL Les DIX meilleurs films sur la vie politiquE américaine Rubrique Cinéma et DVD Jérôme Tranchant, Journaliste
Les mystères du K inversé :
POTEMKINE Interview
Maxime Lachaud, Journaliste avec Nils Bouaziz
séléctions POTEMKINE Par Maxime Lachaud et Jérôme Tranchant
LE LIVRE DU MOIS George Berger : L’histoire de Crass
LOLITA
Vladimir Nabokov Article I geminway.com
La scène indépendante en images Galerie Photos
Hazam, Journaliste / Photographe
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Les films que vous avez peut-être raté, mais que vous devriez voir…
Les DIX meilleurs films sur la vie politique américaine
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JOURNALISTE : JÉROME TRANCHANT BLOG : www.facebook.com/jerome.cineradical
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Au moment où Donald Trump sidère le monde entier en remportant la présidentielle 2016, comment le cinéma américain regardet-il la politique ? Réponse en 10 films. Le cinéma et la politique américains, c’est une vieille histoire presque consanguine. D’abord parce que le cinéma, même s’il l’est moins maintenant, a toujours été considéré comme un puissant outil de propagande par tous les gouvernements possibles. Ainsi, même si la politique n’est pas leur sujet apparent, beaucoup de films américains ont porté dans le monde entier une image et une idée de l’american way of life et de ses valeurs fondatrices, et cela que leurs auteurs ou producteurs soient d’obédience républicaine ou de tendance démocrate. Ensuite, parce que parmi cette vaste production, nombreux sont les films frontalement politiques, soit parce qu’ils expriment une vision politique, soit parce qu’ils observent le fonctionnement du système politique américain. au Sénat,
Monsieur Smith
de Frank Capra (1939) Sans doute la “mère” des films politiques américains, le premier des grands classiques hollywoodiens marquants qui a scruté les arcanes de Washington. On y suit le parcours d’un monsieur Toutlemonde, honnête citoyen idéaliste qui devient sénateur et se heurte aux manœuvres des politiciens roués et aux intérêts cyniques des lobbys financiers. Le discours-fleuve final de James Stewart/Mr Smith est un morceau de bravoure. Si la vision de Capra peut aujourd’hui sembler naïve, il a ici touché une corde qui est plus ultrasensible que jamais en 2016, celle du fossé (réel ou ressenti) entre les citoyens ordinaires et les politiciens professionnels.
La Cible parfaite,
de Jacques Tourneur (1958)
Un film méconnu de Tourneur pourtant aussi beau et passionnant que La Féline ou Vaudou. Sur une intrigue de polar et avec un budget de série B, Tourneur évoque le rôle des instituts de sondages, leurs relations parfois consanguines avec les milieux politiques, la possibilité d’enquêtes d’opinion truquées visant à influencer les électeurs, le poids des lobbys. Là encore, les questions soulevées par ce film n’ont pas pris une ride quand on voit que tous les sondages se sont plantés sur l’issue du duel Trump-Clinton. Tourneur allie une critique du système politique américain à la beauté sèche caractéristique de son style.
Le président veut nommer un nouveau secrétaire d’État aux affaires étrangères, mais l’homme qu’il choisit ne bénéficie que d’une courte majorité au Sénat et a aussi quelques adversaires dans son propre camp, dont un rival qui l’accuse de sympathies communistes. Radiographie précise et complexe du fonctionnement de la politique américaine, des rapports entre le législatif et l’exécutif, des rivalités personnelles et des intrigues de couloir, le tout porté par la mise en scène au scalpel de Preminger. Un chef-d’œuvre qui n’a pas pris une ride.
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L’Homme qui tua Liberty Valance,
Les Hommes du président,
de John Ford (1962)
Chef-d’œuvre sur ce qu’on appelle aujourd’hui le storytelling médiatique ou politique et méditation sur l’usage de la violence dans la société américaine. Un sénateur, homme de loi en col blanc, non violent, tue un dangereux hors-la-loi. En fait, il s’est arrangé avec un pistolero local qui est le vrai tireur mais qui reste dans l’ombre, le sénateur bénéficiant de toute la lumière de cet épisode et de ces profits politiques. À la fin du film, un journal raconte cette histoire faussée du sénateur qui tua Liberty Valance et le rédac’chef lance la célèbre réplique : “quand la légende est plus belle que la réalité, il faut imprimer la légende
Bob Roberts,
de Tim Robbins (1992)
Encore un modèle de fiction de gauche dont le fond sérieux est rehaussé d’une dimension satirique. Le candidat imaginé par Robbins, Bob Roberts, est un chanteur, totalement inexpérimenté en politique, qui recherche avant tout la gloire, qui rejette l’esprit de la contreculture des années soixante et toutes ses avancées réelles et prône les vieilles valeurs réactionnaires… ça vous rappelle quelqu’un ? En fait, Robbins était inspiré par Reagan mais son portrait humoristique à charge pourrait parfaitement s’appliquer à Trump.
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d’Alan J. Pakula (1976) On réduit souvent Ford à cette réplique, croyant à tort qu’il l’endossait. Or, c’est oublier que tout le film s’attache minutieusement à montrer la véritable histoire, ses dessous, la construction de sa fausse légende. À bien regarder ce film, Il est clair que Ford critique la conception de ce journaliste qui consiste à préférer les beaux mensonges à la vérité des faits, et qu’il se montre sceptique voire mélancolique sur le fait que la démocratie soit construite aussi avec des mythes et légendes. Que dirait-il aujourd’hui, alors que l’élection Trump prouve jusqu’à la nausée qu’une bonne part des citoyens préfèrent croire aux mensonges qui leur plaisent qu’aux faits avérés qui leur déplaisent.
L’un des classiques de la fiction de gauche à l’américaine, qui retrace l’enquête de Carl Bernstein et Bob Woodward, les deux journalistes du Washington Post qui ont révélé l’affaire du Watergate, ces écoutes téléphoniques secrètes mises en place par le président Nixon pour espionner les Démocrates. Nixon fut contraint à la démission, événement unique dans l’histoire américaine. Extrêmement bien documenté, ce film explore les relations entre la presse et le pouvoir sous un angle positif : celui où les médias jouent le contre-pouvoir aux moyens d’enquêtes minutieusement travaillées et vérifiées plutôt que de servir la propagande officielle.
Malcolm X,
de Spike Lee (1992)
Ce biopic présente les qualités et défauts d’un biopic classique : documentation fouillée, histoire incarnée en fiction, ambition impossible de résumer une vie en quelques heures, regard a posteriori prétendant se conjuguer au présent des faits… S’il ne laisse pas un souvenir impérissable comme œuvre de cinéma, Malcolm X est néanmoins important et nécessaire parce qu’il a fait mieux connaître à un large public la personnalité et le parcours politique d’une figure fondamentale de l’histoire américaine et de l’émergence de la conscience noire.
On le sait, Malcolm X était un leader radical par rapport à un Martin Luther King plus favorable au dialogue et au compromis. Malcolm X défendait l’usage légitime de la violence alors que Luther King était non violent. Bien qu’il ait choisi de filmer Malcolm X, Spike Lee termine sur une double citation des deux hommes, laissant le spectateur trancher sur quelle est la meilleure voie vers l’émancipation des Noirs américains. Spike Lee en général et ce film en particulier ont joué leur rôle dans ce long chemin de conquête de droits, de liberté et d’égalité qui est loin d’être achevé mais qui a quand même abouti aux deux mandats de Barack Obama.
JOURNALISTE : JÉROME TRANCHANT BLOG : www.facebook.com/jerome.cineradical
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Primary colors,
de Mike Nichols (1998)
Inspiré par la première campagne de Bill Clinton, ce film de vétéran s’intéresse au marathon qui conduit un candidat de sa 1re déclaration jusqu’à l’élection, des primaires jusqu’à l’épreuve que constitue une campagne électorale dans un pays aussi vaste. Le candidat fictif joué par Travolta doit faire face à des accusations d’adultère. Primary colors décrit bien un aspect fondamental de la politique américaine, montre l’importance de l’argent, du marketing, et de la vie privée et tout ce qui éloigne la politique de la substantifique moelle politique pour la rapprocher du spectacle. Le film lui-même est enjoué et plaisant alors que son sujet pouvait a priori sembler austère.
Moi, député,
de Jay Roach (2012)
La politique américaine est aussi passée par le filtre de la comédie la plus loufoque, par le tamis du stand-up de l’humour SNL, avec ici des zèbres aussi drôles que Will Ferrell et Zack Galifianakis, même si ce film n’est pas leur sommet. Derrière l’humour, il y a la satire d’une campagne politique où les adversaires s’insultent, s’envoient des boules puantes, se diffament, bref sont prêts à tous les coups bas pour se faire élire. Depuis la campagne Trump/Clinton, on se dit que ce film n’est pas une satire mais un documentaire.
Bowling for Columbine,
de Michael Moore (2002) Quand on parle de cinéma américain politique ou évoquant la politique, difficile de ne pas mentionner Michael Moore et son cinéma qui mélange documentaire, agit-prop, humour à la Saturday Night Live et pathos. On aurait pu choisir aussi bien Roger and me ou Fahrenheit 9/11, mais celui-ci nous a semblé le plus fouillé et le plus convaincant. À partir de la tuerie au lycée de Columbine (qui a aussi inspiré Elephant de Gus Van Sant), Moore s’interroge sur un des grands marqueurs politiques de la société américaine, le droit de chaque citoyen de détenir des armes à feu. Obama a tenté de limiter ce droit mais s’est
heurté à un congrès à majorité républicaine ainsi qu’au lobby des armes. De son côté, Trump a déclaré que le port d’arme et l’autodéfense étaient des prescriptions de dieu. Côté législation, rien n’a donc changé et les tueries de masse continuent de rythmer le quotidien américain. Artistiquement, Bowling… ne boxe évidemment pas dans la même catégorie qu’Elephant, mais ce film a engagé un combat politique qui, hélas, est plus que jamais d’actualité.
Tempête à Washington
d’Otto Preminger (1962) Le président veut nommer un nouveau secrétaire d’État aux affaires étrangères, mais l’homme qu’il choisit ne bénéficie que d’une courte majorité au Sénat et a aussi quelques adversaires dans son propre camp, dont un rival qui l’accuse de sympathies communistes. Radiographie précise et complexe du fonctionnement de la politique américaine, des rapports entre le législatif et l’exécutif, et des intrigues de couloir, le tout porté par la mise en scène au scalpel de Preminger. Un chef-d’œuvre qui n’a pas pris une ride.
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DOSSIER
POTEMKINE Les mystères du K inversé ENTRETIEN : Maxime Lachaud avec Nils Bouaziz
INFOS : www.potemkine.fr
Il y a onze ans, un nouveau magasin voyait le jour au 30 rue Beaurepaire dans le x e arrondissement de Paris : Potemkine. Un nom aux consonances russes et révolutionnaires, un K inversé bien rouge lui-même rappelant l’esthétique constructiviste, un mot simple aussi qui faisait écho, pour tous les amateurs de musiques expérimentales que nous étions, au catalogue de vente par correspondance Metamkine. Ouvrir un magasin indépendant de ventes de DVD était un pari un peu risqué en cette époque où le téléchargement commençait à aller bon train. Et pourtant le succès a été au rendez-vous, ce qui a amené Potemkine à se lancer dans l’édition DVD - et devenir un des labels les plus recommandables du genre - puis la distribution et à présent la production, tout en cherchant à garder l’esprit défricheur et exigeant qui a fait leur marque de fabrique. À l’initiative de cette aventure folle se cache un personnage attachant : Nils Bouaziz. Ayant grandi dans une campagne isolée, il se découvre dès sa jeune adolescence une passion pour le cinéma. Grâce au home cinéma parental, il enchaîne les visionnages et se fait sa culture par le biais du DVD. Puis il faut bien le dire, au bled on s’ennuie ferme et c’est compliqué de trouver des gens dans le même délire. Avec trois têtes de plus que tout le monde, et un regard perçant et rêveur, Nils rentre dans des univers parallèles en découvrant les classiques de Hitchcock, Kubrick, Lynch ou Tarkovski.
Arrivé à Paris au tournant des années 2000, il se lance d’abord dans l’aventure du label electro Tiger Sushi avec son frère Joakim, mais encouragé par son père et motivé par le manque qu’il ressent quant à son amour du support DVD, il ouvre les portes de sa propre boutique indépendante en janvier 2006. Aujourd’hui, certains des artistes qui ont compté le plus pour lui - Herzog, Lynch, Tarkovski… - se retrouvent dans le catalogue, avec des éditions coffrets qui ont fait date. Comme un rêve de gosse devenu réalité. De quand date ta passion du cinéma ? Nils Bouaziz : Elle est venue en partie du DVD. J’ai ouvert la boutique Potemkine en 2006 et avant, j’habitais en Province, du moins pas très loin de Paris mais assez éloigné pour qu’il n’y ait pas de cinémas. C’est au moment où a émergé le DVD que j’ai commencé à être passionné de cinéma. C’était un support magique et ça le reste.
Le premier film qui t’a marqué ? Le premier qui m’a fait comprendre que le cinéma c’était du cinéma c’est Kubrick avec 2001, l’Odyssée de l’espace. Il m’a amené dans une zone que je n’avais pas connue avant, sur le plan artistique, émotionnel.
Et cette envie de créer une boutique de DVD, elle est née d’où ? Il y avait les VHS avant mais le DVD a apporté une qualité nouvelle. étrangement et d’ailleurs toujours, il n’existait pas de boutiques indépendantes, comme il y a des disquaires, des libraires, du moins en vente de DVD il n’y avait rien. Je me suis alors dit qu’il y avait une place pour ça, surtout à Paris qui est la ville la plus cinéphile au monde. À l’époque, le DVD était déjà en place depuis quelque temps sur le marché et c’était un peu la chute. Certains pensaient que la période de gloire était terminée et faire une boutique de DVD aujourd’hui, ça n’avait pas d’intérêt. C’était il y a dix ans et on est toujours là.
Nils Bouaziz
Nils Bouaziz ©Maxime Lachaud
“Le premier qui m’a fait comprendre que le cinéma c’était du cinéma c’est Kubrick avec 2001, l’Odyssée de l’espace. Il m’a amené dans une zone que je n’avais pas connue avant, sur le plan artistique, émotionnel”
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À SAVOIR
© Les Innocents (1961) de Jack Clayton
UNE AVENTURE éDITORIALE Tu étais très jeune à ce moment-là, tout juste 25 ans, pour te lancer dans un projet pareil. Faut être jeune et fou pour le faire. Si tu réfléchis à tout, tu comprends pourquoi il n’y en a pas beaucoup qui se sont lancés là-dedans. Faut vouloir communiquer sa passion au-delà de tout.
Dès la création du magasin, il y a eu l’envie d’éditer des DVDs ? En fait, je le voyais beaucoup plus tard, c’est vraiment la rencontre d’un associé, qui est arrivé et reparti depuis, qui a vraiment monté ça avec moi. C’était important que j’ai quelqu’un qui ait cette capacité-là aussi et qui ait le temps de le faire car la boutique me prenait quand même beaucoup de temps. Puis une deuxième personne m’a rejoint après et on a monté la partie édition.
Le nom de Potemkine est lié à une passion pour le cinéma russe ? C’est un hasard mais ça va être de plus en plus difficile à prouver, entre tous les Russes que l’on publie et l’identité qu’on a liée à ce nom. Au moment où
Chez Potemkine pour les mois de mai-juin un coffret Carl T. Dreyer (incluant ses cinq films les plus connus ainsi que de nombreux suppléments), une sortie DVD/Blu-ray du chef-d’œuvre de l’expressionnisme Le Cabinet du Dr Caligari (comprenant la fameuse BO composée par In the Nursery) et l’édition sur un même DVD des films Une sale histoire et Le jardin des délices de Jean Eustache (avec en bonus un entretien avec Gaspard Noé).
j’ai trouvé ce nom, c’était purement un hasard. J’essayais de trouver des noms liés au cinéma et celui-ci est arrivé. La sonorité et la beauté du mot m’ont plu, plus que la référence au film. Je trouvais que ça marchait, ça se retenait bien, c’était joli. Puis en même temps j’ai trouvé ce logo avec le nom. Je ne suis pas un grand fou de ce film. C’est trop théorique pour moi. Et le russe c’est venu un peu par hasard aussi. Le premier DVD qu’on a édité c’est surtout par rapport à une demande à la boutique. Un client m’avait commandé ce film dont je n’avais jamais entendu parler. Je me suis jeté sur les imports pour arriver à le trouver. J’en ai pris un pour lui et un pour moi. Je voulais voir ce que c’était et je me suis pris une grosse claque sur ce Requiem pour un massacre d’Elem Klimov. C’est le premier DVD qu’on a édité deux ans après l’ouverture de la boutique.
Et cette sortie a été un vrai succès. Oui, mais ça se comprend. Quand on voit le film, il y a quelque chose d’ultime, d’indépassable sur ce sujet-là. Je ne vais pas refaire l’histoire de sa sortie en salles, mais cela a été très compliqué, le film a été mis dans une niche. Il n’a jamais vraiment existé, même en vidéo après. Du coup, c’était la première fois qu’on rendait accessible ce film à un grand public et pas un public de niches. Effectivement cela a fait un petit bruit dans le milieu.
“Parce qu’on s’appelle Potemkine, on nous a souvent proposé des films russes. C’est venu presque par défaut, du moins naturellement” Une des lignes directrices de Potemkine, c’est cette passion pour le cinéma russe, autant des auteurs classiques que des moins connus mais dont les œuvres étaient à chaque fois difficilement accessibles. D’où est né cet intérêt ? Ce n’est pas une passion que j’ai depuis longtemps. C’est venu un peu par rapport à la boutique. Parce qu’on s’appelle Potemkine, on nous a souvent proposé des films russes. C’est venu presque par défaut, du moins naturellement. Du coup, la découverte est venue avec, je ne connaissais pas Tchoukhrai, je ne connaissais pas Panfilov, je ne connaissais que certains films de Kalatozov, je connaissais par contre Tarkovski et je ne connaissais pas Requiem Pour un massacre. Je me suis surtout reconnu dans ce cinéma car c’est avant tout formaliste, un cinéma qui utilise les moyens du cinéma, l’image, le son, le montage plus que des moyens littéraires, pour raconter une histoire. Cela m’a toujours beaucoup touché. Parmi les favoris, il y a Mikhail Kalatozov. Je l’avais redécouvert quand Soy Cuba était ressorti en salles, en vidéo, etc. Je crois que c’était Martin Scorcese qui l’avait redécouvert d‘abord, ensuite il y a eu une ressortie mondiale. C’est un film produit par les Russes à Cuba pour la propagande communiste. Kalatozov avec son chef opérateur Ouroussevski a réussi à créer une œuvre formelle absolument démente où chaque seconde est une expérimentation artistique et créative qui va bien au-delà du propos propagandiste qui
finalement est assez anecdotique dans le film tellement ce dernier est d’une beauté qui dépasse ça. Après il y a un film qui a eu la Palme d’Or, Quand passent les cigognes, qui pour le coup est plus proche du dernier coffret qu’on a édité : Gregori Tchoukrai. Il est un peu moins connu que Kalatozov, pourtant il a fait le film La ballade du soldat qui est assez proche de Quand passent les cigognes, film réalisé à cette époque très florissante du cinéma russe qui est l’époque du dégel, l’après-Staline où enfin on a commencé de parler de l’humain, de l’individu après une longue période où c’était le peuple et ses grandes actions héroïques qui étaient mises en avant, notamment liées à la guerre. Il y a eu toute une relecture de la guerre par le biais de ces films-là. C’est assez passionnant. Il y a notamment le remake d’un film des années 20 à la gloire de la grande Russie et de l’armée russe qu’il a réussi à transformer en étant très proche de l’histoire initiale mais en changeant quelques détails pour remettre l’individu au milieu du grand mouvement du peuple communiste. La ballade du soldat avait fait quand même deux millions d’entrées à l’époque en France, donc c’est un film qui a eu un certain succès ! On a aussi fait l’intégrale Andrei Tarkovski qui était la génération d’après et qui a pris le pendant qui me plaît le plus dans le cinéma russe, c’est le pendant poétique qu’il a amené à une apogée mystique que peu d’artistes ont réussi à atteindre, même aucun autre selon moi. Il y a aussi Elem Klimov, qu’on aime beaucoup, le réalisateur de Requiem pour un massacre, dont on va éditer prochainement plusieurs de ses films, pour la plupart inédits en France, et aussi des films de sa femme, qui était une grande cinéaste, Larisa Shepitko, dont on vient d’éditer trois films, y compris un film qu’elle a fait avec son mari qui est une merveille et qui se nomme Les adieux à Matiora. Donc nous continuons notre exploration du cinéma russe où il y a tant de choses à découvrir.
Si tu devais présenter la maison d’édition sur dix ans maintenant, quelles seraient les sorties fortes ? Les coups de cœur personnels ? Un qui me tient particulièrement à cœur, notamment parce qu’on l’a mal vendu, c’est Mind Game. C’est un manga mais qui ne brasse pas que le style du dessin manga
qu’on connaît, japonisant avec les grands yeux, mais qui brasse tous les styles d’animation différents en faisant un hommage direct et assumé au surréalisme. C’est un film sur lequel j’ai eu un gros coup de cœur, j’ai voulu l’éditer tout de suite mais malheureusement cela n’intéresse pas beaucoup les gens. J’en suis quand même très fier. Dans les choses plus importantes, il y a le coffret Jacques Rozier, bon qui n’est pas très connu non plus. C’est un cinéaste Nouvelle Vague, mais il est plus dans la Nouvelle Vague que les plus officiels comme Truffaut ou Godard, car il a mis au cœur de ses films le sens de la liberté et de l’invention du cinéma directement dans la rue plus que les deux précités. C’était très difficile à sortir dû à sa personnalité compliquée, donc on est les premiers à le publier en vidéo après de longues années d’attente. C’était aussi une grande fierté. En plus récent, un autre français, très différent, mais au moins aussi important si ce n’est bien plus : Jean Epstein, cinéaste de l’avant-garde française des années 10-20-30, assez oublié car rien n’était sorti en DVD sauf quelques éditions confidentielles, alors que c’est un des artistes français et même mondiaux les plus important de cette époque. Il a inventé un nombre de choses incalculables dans le cinéma.
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À SAVOIR Le 31 mai Potemkine sortira en salles les versions de Eraserhead et Twin Peaks : Fire Walk With Me de David Lynch, restaurées par le réalisateur lui-même. L’édition DVD-Blu-Ray paraîtra, quant à elle, à la rentrée. Ajoutez à cela une nouvelle autobiographie/livre de souvenirs, la troisième saison de la série Twin Peaks, ainsi qu’une ressortie restaurée de Mulholland Drive le 17 mai, 2017 sera définitivement une année sous le signe de Lynch.
Il arrive vraiment à faire ressentir ces moments d’errance de l’esprit par le cinéma. Quelqu’un qui arrive aussi de manière virtuose à recréer le mental, ce qui se passe dans la psyché humaine, c’est Nicolas Roeg, qui par un art du montage totalement unique, ne tombe pas dans le récit classique.
NE VOUS RETOURNEZ PAS (1973) de Nicolas Roeg
Il a inspiré beaucoup de gens, jusqu’à dernièrement un cinéaste fort connu de notre époque qui s’appelle Bruno Dumont, qui a d’ailleurs fait un certain nombre de bonus pour cette édition et qui se reconnaît dans une certaine filiation par rapport à ce travail. Puis notre chouchou de ces derniers temps : Werner Herzog, qu’on ne présente plus. Cinéaste aussi important dans la fiction que dans le documentaire pour la bonne raison qu’il ne fait pas de différence entre ces deux types de cinéma. Cela peut symboliser tout ce qu’on aime dans le cinéma : la liberté, l’invention, l’imaginaire et la création avant tout. Je pourrais en citer pas mal d’autres, comme Tarkovski qui a été très important et on prépare de belles choses avec lui. Un autre moment assez important dans notre histoire d’éditeur, c’est quand on a pu récupérer les nouveaux films de Lars Von Trier. On va faire d’ailleurs le prochain qui n’est pas prêt d’être fini car c’est un tournage qui va se faire en deux temps donc c’est pour au moins 2019, au mieux. On a donc publié Melancholia il y a quelques années, puis Nymphomaniac dans sa version non censurée bien sûr, un peu plus tard.
©DR
C’est aussi un des cinéastes que j’admire le plus dans ceux qui sont en activité aujourd’hui, je suis donc très heureux de l’accompagner au moins en vidéo en tout cas. On pourrait aussi parler de Requiem pour un massacre que j’ai cité avant. Mais c’est déjà une petite sélection variée.
Une autre des lignes éditoriales que l’on peut ressortir, ce sont ces films liés aux avant-gardes ou aux expérimentations, des films qui travaillent autant la forme et le fond, et que j’appelle des films-trips, on pourrait y inclure Herzog, Roeg, Anger et tant de cinéastes que vous avez sortis. Est-ce que pour toi le cinéma c’est justement comme un trip, le film comme une entrée dans un monde parallèle ?
Par exemple, j’ai découvert récemment Enquête sur une passion. J’aimais beaucoup ses autres films mais je ne connaissais pas celui-là.
Je ne sais pas si c’est le terme exact, mais c’est juste ce que je recherche comme émotion et comme expérience dans le cinéma, vivre un moment d’espace-temps impressionnant à tous points de vue. Pour aller plus loin dans ce que tu dis, je ne recherche que des films-trips dans ce que j’aime. Même les Russes que j’ai cités avant en font partie, même s’ils ne sont pas identifiables par rapport à ce qu’on pourrait connaître comme évident en termes de films-trips. Les films de Kalatozov sont des films-trips. Le Miroir de Tarkovski est un des plus grands films-trips de l’histoire du cinéma. C’est un film qui parle des souvenirs d’un enfant, en trouvant les moyens artistiques d’être dans la mémoire, dans la nostalgie, la mélancolie et le rêve, en arrivant à créer cette situation-là qu’on ne peut vivre dans le quotidien mais juste quand on dort, quand on est malheureux…
C’est une enquête policière sur la mort d’une jeune femme jouée par Theresa Russell, et c’est tout en flashbacks sur l’histoire d’amour qu’elle a vécue avec le personnage joué par Garfunkel. La façon dont il travaille cela n’est jamais dans la représentation d’une histoire. On est dans toute la fantasmagorie des personnages liés à cette histoire, leurs perceptions de cet événement et pas l’événement lui-même. C’est là-dessus qu’on dépasse le témoignage ou le reportage. Mais Mind Game par exemple est un sacré film-trip ! Dans les récents films-trips – même s’il y en a peu -, Évolution de Lucile Hadzihalilovic peut être mis en parallèle avec Le Miroir ou Enquête sur une passion. On est dans un univers mental et non naturel.
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C’est là qu’il faut savoir s’abandonner, s’abandonner à soimême, s’abandonner à l’autre, ce qui n’est pas toujours évident pour tout le monde.
Des films-trips dont tu n’es jamais revenu ? Le premier qui m’a fait cet effet-là, et c’est peut-être un cliché car tout le monde le cite, c’est 2001 l’odyssée de l’espace. il est souvent considéré comme le film-trip le plus officiel, mais je l’ai vraiment vécu comme ça. Déjà, je l’ai vu très jeune, je n’en avais pas entendu parler, je n’avais rien lu dessus. Je me souviens que la seule chose que j’avais entendue sur ce film c’était que c’était ennuyeux. À l’âge où je l’ai vu, c’était plus un film ennuyeux qu’un film trip. Les films-trips arrivent quand on a plutôt 18/20 ans, et plus tôt c’est considéré comme des films chiants. Mais je l’avais vécu comme un film-trip à 14 ans et du coup à cet âge-là le trip est fort et il reste bien dans la tête. Ce fut le premier, mais Le miroir reste un des moments les plus forts de mon expérience de spectateur. Après, il y a évidemment plein de films que je n’ai pas édités qui sont des films-trips : Apocalypse Now par exemple. Un film que j’ai revu récemment qui est un vrai film-trip c’est Un homme qui dort de Georges Pérec et Bernard Queysanne. C’est l’histoire d’un jeune homme dans les années 70 qui se renferme sur lui-même jusqu’à sombrer dans une espèce d’abysse de dépression et tout cela est traité par les moyens du cinéma et pas par les moyens normaux du récit. Ce sont le montage, la mise en scène et la photographie qui font ressortir ça. C’est le genre de film qui, si vous n’êtes pas déprimé, ça vous rend totalement déprimé.
Cœur de verre de Herzog est un bon film-trip aussi évidemment, Herzog ! Cœur de verre est un sacré film-trip, que j’ai découvert en éditant les coffrets, je ne l’avais pas vu à l’époque. Mais il m’a sacrément secoué effectivement. Le premier film-trip que j’ai vu d’Herzog, très jeune aussi, c’était Aguirre. Encore une fois, ce n’est pas immédiatement identifié filmtrip, mais Vertigo de Hitchcock m’a fait cet effet-là. On rentre dans un espace-temps où on est dans tout sauf la réalité. Et quand on arrive à être pénétré par ça, cela peut nous amener très loin. Un autre film-trip assez costaud c’est Suspiria d’Argento.
Parmi les films-trips qui m’ont vraiment impressionné il y a aussi Alexsei German, avec Il est difficile d’être un dieu, qui rejoint ma passion pour le cinéma russe et les films- trips, et qui est totalement extraordinaire. Cela n’aurait pu être fait que par des Russes, c’est pour ça que je les aime tant : ils ont cette folie formaliste, ils sont capables de déplacer des montagnes artistiques pour faire leurs films. Après, il y en a un autre, aussi fascinant, et si j’y pense, c’est parce que j’ai vu récemment une de ses installations pour le festival d’automne, c’est Apichatpong Weerasethakul qui a fait deux des films les plus tripants de ces dernières années, c’est Oncle Boonmee et Cemetary of Splendour. Des films magnifiques très proches des rêveries visuelles. C’est important de souligner quand il se passe quelque chose d’important aujourd’hui, et heureusement qu’il y en a encore qui nous font rêver.
Il y a eu pas mal de cinéastes français plutôt hors normes publiés par Potemkine. C’est un cinéma souvent associé à beaucoup de clichés mais vous allez défendre des auteurs plus inclassables. Quel est votre rapport à ce cinéma ? En fait, je m’en fous un peu du cinéma français. Les nationalités ou les genres, je m’en moque. Pour moi, il y a deux pays de cinéma, le pays du bon film et le pays du mauvais film. effectivement, le cinéma français aujourd’hui ne me plaît pas toujours. mais je ne me suis pas dit il faut que je défende un certain cinéma parce qu’il y en a un autre qui ne me plaît pas. C’est naturellement que je le défends. Il vient à moi. Il y a quelque chose d’assez organique là-dedans. F.J. Ossang, on l’a côtoyé parce qu’il est notamment proche d’Agnès B. avec qui on coédite notre DVD, et ça s’est fait naturellement. Je ne suis pas allé le chercher et il n’est pas venu nous chercher. On s’est parlé, on s’est croisé et cela s’est fait. Même chose avec Lucile Hadzihalilovic, on a des amis en commun et on s’est croisé quelques fois. évidemment, j’aime son cinéma mais pas en tant que cinéma français différent de ce que je n’aime pas d’habitude, c’est juste que j’ai envie de défendre ce qu’elle fait. J’en oublie même que c’est français. Elle pourrait être belge. Donc il n’y a pas une façon de penser le cinéma français, mais plus une façon de penser le cinéma globalement. Effectivement, publier Jean Epstein, qui faisait un cinéma qui est totalement à l’opposé de ce qui est arrivé après guerre et qui s’est tellement installé qu’on a du mal à s’en sortir, même dans les années 2000.
“Tarkovski qui a été très important et dont on va ressortir les films en versions restaurées” Du coup, tant qu’à faire, j’aimerais bien qu’on aille un peu plus loin et qu’on ressorte ce cinéma pour faire des choses plus inspirées d’Epstein que de Marcel Carné ou de François Truffaut.
Cela me fait rebondir sur le cinéma documentaire que vous défendez, qui s’éloigne totalement des formats habituels avec des interviews en têtes parlantes et des archives, mais on se rapproche des films-trips ou de documentaires à la limite de l’expérimentation C’est ça. Je pense qu’on est dans un espace où la question de quel est le format de ce qu’on va filmer ne se pose plus vraiment, notamment sur Dead Slow Ahead qui pourrait être un film expérimental, un film d’art vidéo, une fiction sur un bateau en fin de civilisation ou tout simplement un documentaire sur un cargo industriel. Dans tous ces films, il y a la volonté de filmer un sujet avec une certaine vision. Après cela ressemble à tel type de cinéma qu’on reconnaît ou tel autre mais à l’origine cela échappe à tout ça.
On parlait de Herzog, mais il fait ça depuis les années 70, Jean Epstein a flirté avec aussi. Ses derniers films en Bretagne sont à la lisière du documentaire. Et je n’en ai pas parlé dans les éditions qui me tenaient à cœur mais Häxan me tient très à cœur ! C’est un film suédois de 1922. Aujourd’hui on appellerait cela un docu-fiction. Bien sûr, à cette époque, le terme n’existait absolument pas, et Christensen ne s’est pas posé la question de faire un documentaire ou une fiction. Il s’est dit qu’il voulait traiter d’un sujet, la sorcellerie, qui était déjà étudié plus ou moins sérieusement par plein d’écrits, mais il y voyait quelque chose d’absurde et d’irréel, pas du tout scientifique, donc il a pris le parti de commencer d’abord par le documentaire et ensuite d’aller vers la fiction, d’expliquer tout ce qu’il y avait d’ancré dans notre histoire, notre civilisation, des faits réels et la fantasmagorie, qui ne pouvait être traitée que par la fiction. Dès les années 20, des artistes avaient la liberté de se dire, on ne choisit pas, on se balade entre les deux sans avoir de limites, de frontières. Cela m’a toujours plu. Il y a un film que j’aimerais bien éditer, dont le titre en dit déjà long, c’est Gambling, Gods and LSD. Le titre lui-même nous fait comprendre le trip. C’est un film de la fin des années 90 qui se veut un portrait de notre monde occidental avec des prismes très variés, de pop culture, de mysticisme, embrassant tout cela dans un kaléidoscope de quatre heures. On ne sait jamais où on est vraiment et si ce qu’on raconte est vrai. Effectivement ce sont ces genres de documentaires qui m’intéressent et qui se rapprochent des fictions qui m’intéressent. Le même genre d’images animées.
Vous vous êtes souvent focalisés sur des cinéastes reconnus mais dont les œuvres étaient difficiles d’accès C’est ça. Je me suis construit avec les grandes références et c’est ce qui reste pour moi le plus fort. Effectivement, je suis parti vers ceux qui m’ont le plus marqué dans ma vie : Herzog, Epstein, que j’ai découvert sur le tard mais qui était aussi une grande révélation, Tarkovski… Ce sont ces filmslà qui restent et qu’on veut pérenniser avec les éditions.
Assez vite sont venues les idées de coffrets Oui, tous ceux que j’ai cités ce sont des coffrets, soit une filmographie complète ou au moins l’essentiel d’un auteur. Avec Rohmer, on a vraiment fait une intégrale, c’est de loin notre projet le plus ambitieux.
Il y avait 26 films tous sur les deux formats, Blu-ray et DVD, ensemble dans un même objet, c’était un sacré truc. Mais on aime faire ce genre de projets.
En parallèle avec cet historique, es-tu conscient de l’identité Potemkine et de l’image véhiculée ? Est-ce un bébé que tu as laissé grandir et sur lequel tu as du mal à garder une maîtrise ? La différence avec un bébé, c’est que les choix du bébé ce sont les miens. Quand on fait un bébé, il y a un moment où on le laisse grandir par lui-même et on ne le maîtrise plus. Je maîtrise encore pas mal de choses à Potemkine. Est-ce que je suis content de tout, je ne sais pas, mais le fait d’évoluer comme ça, assez vite, on ne fait pas forcément tout ce qu’on veut, et il y a plein de contraintes liées à notre époque et au marché, qui fait qu’on ne ferait pas l’idéal de ce qu’on devrait faire. Mais dans l’ensemble j’ai l’impression d’être assez maître de ce que je fais.
Les autres éditeurs dont tu te sentirais proche ? Aucun ! (rires) Wild Side et Carlotta étaient en France des exemples que j’avais envie de suivre. J’ai l’impression qu’aujourd’hui ils font beaucoup de grands classiques et après ils font beaucoup de contemporains, ce qui limite en termes de choix éditorial. Dans les défricheurs, comme on fait nous, Tamasa fait des choses vraiment pas mal, et Blaq Out aussi qui sont assez actifs en ce moment, mais ils font aussi pas mal de contemporains, ce que l’on fait de moins en moins car ce n’est pas ce qui m’intéresse le plus en vidéo. En sortant de la France, il y a les Anglais de chez Criterion ou Arrow par exemple.
Il y a cinq ans, vous vous êtes lancés dans la distribution. Pour accompagner la fin annoncée du DVD, c’est aussi l’idée d’avoir tous droits pour vraiment travailler un film ou un auteur sur toute la chaîne, de la salle au DVD en passant par la boutique, en faisant des événements. C’est déjà pour mieux maîtriser le côté événementiel car sortir un DVD aujourd’hui c’est dur d’en faire parler alors que quand on ressort un film en salle, même pour les classiques, en sortant une vidéo derrière, cela aide vraiment le film. C’est ce qu’on a fait avec Herzog et son film Les Ascensions, accompagné de La Soufrière et Gasherbrum et c’est vrai que cela avait bien aidé la sortie vidéo.
“Je ne recherche que des films-trips dans ce que j’aime” C’est donc être présent sur l’ensemble de la diffusion des films, une continuation logique d’ayant droit. Sur la distribution, contrairement à l’édition, on est face au cinéma qui se fait aujourd’hui avec beaucoup de distributeurs. Des gros films disponibles par an, il n’y en a pas tant que cela. Malheureusement on n’a pas l’équivalent des chefsd’œuvre qu’on peut faire en édition. Il faut trouver un équilibre entre des films qu’on aime bien et qui vont faire des entrées et des films qu’on veut défendre parce qu’ils vont avoir plus de mal à faire des entrées mais qui méritent souvent plus que beaucoup d’autres d’être vus en salle. Je pense à Dead Slow Ahead qui est une expérience qui ne peut se vivre qu’en salle. Le film reste bien sur une télé mais cela enlève la moitié de l’expérience. Et Évolution ne serait peut-être même pas sorti ou très confidentiellement en France si on ne s’en était pas occupé. Effectivement, quand il trouve son public, le film est reconnu, mais c’est tellement difficile tant ces films peuvent être abordés comme expérimentaux, non narratifs, « non compréhensibles par le public », ce qui fait que certains exploitants sont très frileux à prendre ce genre de films.
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“Pour moi l’essentiel avec le cinéma et l’art en général, c’est de créer de la mémoire et du souvenir”
©DR - Paris pied nus (2016) d’Abel et Gordon
Il y a cela dit un film qu’on a sorti qui est pile poil entre quelque chose d’artistique et de plus grand public, c’est Paris pieds nus de Dominique Abel et Fiona Gordon, les Belges qui avaient fait L’Iceberg, Rumba, La Fée, et qui sont assez proches d’un cinéma que j’aime beaucoup c’est celui de tati et de Buster Keaton. En même temps, ils ont un potentiel populaire, de comédie assez important.
©DR - LE MIROIR (1975) de Tarkovski
Est-ce qu’on peut être désenchanté aussi quand on découvre tout l’envers de la chaîne de distribution d’un film ? C’est un sujet compliqué, il y a beaucoup de films. On pourrait se dire que les gens ne sont pas curieux, mais je me mets aussi à la place des exploitants par exemple. Des fois ce serait bien qu’ils fassent un petit effort, qu’ils essaient, mais ils n’essaient même pas. Tout le monde a besoin de manger, la vie c’est difficile donc ils préfèrent remplir leurs salles avant de remplir leurs esprits. Heureusement il y a pas mal de salles qui jouent le jeu et des gens qui mettent leur passion avant tout. Mais je n’ai pas déchanté, car je savais déjà un peu comment cela se passait. Je m’en doutais et on m’en avait parlé. Mais la distribution est quelque chose d’assez impitoyable. Et il y a tellement peu de temps pour gagner, c’est-à-dire que le film puisse trouver ses spectateurs, ça, c’est le vrai défi et c’est jamais gagné d’avance.
Penser les films en tant qu’objets de commerce, estce que cela aussi peut ternir la passion du cinéma ? À partir du moment où on fait la chose bien, cela ne ternit pas la passion, ça l’élève. Faire un beau DVD ce n’est pas créer un objet commercial autour d’un film, c’est trouver le moyen de l’amener vers son potentiel spectateur le mieux possible, parce qu’on a besoin d’accès matériel à une œuvre. Pourquoi on aime bien aller au cinéma, c’est parce qu’il y a une salle avec un grand écran, des fauteuils confortables, ce n’est pas juste des yeux et un film. C’est pareil pour chez soi, voir des films sur un disque dur, c’est assez déprimant à la longue et surtout cela ne crée pas quelque chose qui est pour moi essentiel avec le cinéma et l’art en général, c’est de créer de la mémoire et du souvenir. On y a accès par l’œuvre mais qu’on peut travailler grâce à l’objet et grâce à différents petits apparats de souvenirs liés à des œuvres. Le livre arrive à faire cela car c’est un objet et qu’on a des bibliothèques chez nous, mais avec la musique ou le cinéma, c’est le DVD ou le disque, et c’est important d’avoir ce rapport aux choses, pour maintenir son propre éveil face à sa propre mémoire. Sinon, on oublie les choses.
Exerces-tu parfois une censure sur tes goûts ? Des films que tu aimes mais que tu t’interdis à publier car trop hors normes ? Je pourrais citer Tenemos la carne. C’est le premier longmétrage d’un jeune mexicain, c’est un film qui va très loin, avec beaucoup d’exigence et de qualités artistiques.
Mais il y a un certain stade de liberté artistique où je sais qu’on ne va même pas essayer de le défendre car ce serait perdre du temps et de l’énergie pour rien, même si j’aimerais que le film soit un peu vu. Mais à part trois salles de fous furieux qui vont le programmer, on sait que ce film sera rejeté par la plupart de l’exploitation. Une déception que je pourrais avoir, c’est ce film-là. Après, il y en a régulièrement. Je fais quatre ou cinq festivals par an, il a eu au moins un ou deux films par festivals où je me dis là il y a quelque chose de super dedans mais on sait qu’on va droit dans le mur si on s’en occupait.
Le fait d’avoir la boutique crée un lien direct avec les spectateurs, et vous vous êtes lancés dans un projet où ce sont les spectateurs (sélectionnés) qui choisissent un film qui sera distribué en salles, Scope100. On a souvent des retours de spectateurs qui, on le sait, attendent des films comme Evolution ou Dead Slow Ahead, et grâce - ou malheureusement - aux réseaux sociaux, on a des commentaires de gens qui sont malheureux de ne pas voir les films qu’on distribue.
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Je leur dis d’aller voir les salles dans les villes où ils habitent et d’arriver à les convaincre de prendre les films. Une fois que le film est sorti et que les gens sont déçus, c’est difficile d’arriver à ce genre de possibilités. Mais quelque part Scope100 c’est faire cela en amont. C’est un projet européen. Il y a un distributeur qui a été sélectionné sur dix pays européens et c’est média, un organisme qui finance le cinéma européen, qui a débloqué une aide afin que nous puissions développer une communauté, trouver une centaine de personnes dans toute la France à qui on va montrer une dizaine de films et qui va en choisir un qu’on va distribuer quelque temps après. C’est mettre le spectateur au cœur de ce travail de distribution et de mise en visibilité d’un film, pour créer une émulsion entre nos bureaux à Paris et les villes à travers la France qui vont participer à ça, en espérant qu’ils vont aussi travailler leurs réseaux personnels pour motiver les gens à aller voir le film, car ils auront aussi été acteurs du choix et pas juste à attendre l’information qu’un film arrive hypothétiquement dans leur ville. Cela permet aussi de travailler notre image par rapport à des gens qui comprennent notre démarche.
La boutique elle-même a changé, elle a intégré la musique notamment Oui, il n’y en avait pas avant. Le fait d’agrandir et de récupérer un tiers d’espace, cela nous a permis de faire un café, on vend aussi des affiches car on nous en demandait très souvent et aussi des vinyles de bandes originales de films, un peu de nouvelles mais surtout des ressorties d’anciennes, car il y a un marché très vivant là-dessus depuis quelques années. Cela marche plutôt bien, et on est content d’avoir diversifié un peu.
Je crois qu’il y a le projet de travailler aussi sur des DVDs et musique de films. D’ailleurs certaines éditions étaient accompagnées de CDs audio comme le Magick Lantern Cycle de Kenneth Anger, Artemis cœur d’artichaut d’Hubert Viel ou les Rencontres d’après minuit de Yann Gonzalez C’est vrai qu’en termes d’édition, cela nous tente bien de sortir aussi des musiques de films autant que des vidéos. Puis, dans mon parcours, j’ai d’abord travaillé dans un label, Tiger Sushi, que j’ai monté avec mon frère et qui existe toujours. J’ai été un peu DJ et j’ai pas mal touché les instruments donc c’est aussi ma première passion, et d’y revenir un peu, ça me fait du bien.
Sur un plan humain, avec les nombreuses rencontres à la boutique, quels seraient les réalisateurs qui humainement t’ont le plus impressionné ?
©DR
Le réalisateur qui m’a le plus impressionné, de sagesse et d’intelligence, - on avait commencé à travailler sur un projet d’édition d’un superbe coffret mais ça ne s’est pas fait et il y a eu des éditions assez nulles de ce cinéaste -, c’est Alain Cavalier.
“Avec Rohmer, on a vraiment fait une intégrale, c’est de loin notre projet le plus ambitieux” Un réalisateur que j’aime beaucoup, et c’est un des humains les plus magnifiques que j’ai pu rencontrer. Beaucoup plus particulier mais tout aussi impressionnant, c’est Werner Herzog, qu’on a fait venir il y a deux ans avec une rencontre à la cinémathèque. Je n’ai pas trop la culture du fan envers les artistes que j’aime bien, mais là je me sentais tout petit et tout timide en face d’un monstre comme ça. À la boutique on a quand même fait venir Hans syberberg, réalisateur de films monstres sur l’histoire de l’Allemagne, il m’a assez impressionné aussi, Pierre etaix qui était un être magnifique et qu’on a eu la chance de faire venir. Il y a eu plein de belles rencontres, depardon j’aime beaucoup le personnage aussi.
Aujourd’hui, Potemkine se lance dans une nouvelle aventure: la production Ce n’est pas directement de la production, c’est plus qu’on accompagne le développement d’un film, en partie financièrement, et le premier pour lequel on a fait ça, c’est le film Salt and Fire, la dernière fiction de Werner Herzog.
©DR - LA PEAU DE BAX (2015) d’Alex Van Warmerdam
Nous sommes très fiers. Nous sommes aussi allés chercher Arte pour qu’ils nous accompagnent dans cette aventure. un thriller écologique étonnant !
Ce travail d’éditeur indépendant, de défricheur, le vois-tu également comme un engagement presque politique ? Il y a plus de la résistance et affirmer des convictions que de la politique. Pour moi, la politique ce serait d’agir sur le grand nombre, d’avoir une vraie influence sur son peuple. Et je suis loin d’avoir une influence sur le peuple français. S’il y avait juste plus de gens qui défendent leurs convictions et qui résistent à plein de facilités, et si on était nombreux, cela deviendrait de la politique, mais là chacun dans nos coins, c’est plus de la résistance qui pourrait devenir de la politique si les gens l’accompagnent et le suivent. Mais ce n’est pas moi directement qui agis là-dessus, je donne un signal et ceux qui m’aiment me suivent.
Peux-tu parler des derniers projets ? Je suis très fier d’annoncer que l’année 2017 sera l’année Lynch car on va accompagner à notre façon la troisième saison de Twin Peaks, qui va être quelque chose d’assez démentiel. On est très heureux d’avoir acquis récemment la version restaurée de Twin Peaks, le film Fire walk with me, qu’on va ressortir au printemps.
Plus ou moins au moment de la série. Mais avant cela on a sorti un magnifique documentaire le 15 février qui s’appelle The Art Life qui est plus centré sur son enfance, son adolescence et sa partie artiste plastique qui est finalement ce qu’il préfère faire dans la vie, et pour laquelle il se destinait – le cinéma est un peu un accident chez lui – et tout à l’heure on parlait des documentaires qui ne sont pas des têtes parlantes avec archives, là on n’est vraiment pas là-dedans, c’est ce qui nous a plu. Et le film se termine par un récit magnifique du tournage d’Eraserhead, c’est le moment où le récit s’arrête, et on a aussi la chance d’avoir Eraserhead en ressortie dans notre catalogue, en copie restaurée. On va donc redécouvrir le mieux possible ce magnifique film qui est un sacré film-trip n’est-ce pas ? Comment ai-je pu oublier parmi les films-trips les films de David Lynch qui sont tous des films-trips ! Parmi mes deux films-trips préférés, il y a le premier et le dernier David Lynch, Eraserhead et Inland Empire. Autre gros événement. En 2017 on va ressortir les tant attendues versions restaurées de tous les films de Tarkovski. Même si j’ai édité l’intégrale, je ne suis pas totalement fier de toutes les copies qu’il y a dedans, et là il y a eu un gros travail dessus, une vraie redécouverte de son cinéma. J’ai pu voir un bout de la copie de Solaris et de Stalker, c’est hallucinant, ce n’est quasiment plus les mêmes films. Mais il y aura d’autres belles surprises.
Comment vois-tu l’avenir de Potemkine ? L’objet ne disparaîtra jamais, cela va se transformer peut-être vers autre chose. Il y aura moins de choses de faites mais mieux faites.
POTEMKINE 30 rue Beaurepaire dans le 10e est ouverte tous les jours (lu 11h-19h / ma à sa 11h-20h / di 14h30 - 19h) Tél. 01 40 18 01 81
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séléctions POTEMKINE PAR JÉROME TRANCHANT et MAXIME LACHAUD
Afin d’offrir un panorama de la diversité des éditions Potemkine, nous avons choisi de nous arrêter sur certains titres distribués ou sortis en DVD durant cette fructueuse décennie d’activisme. Entre obscurités et films cultes, cette sélection internationale dresse une géographie disparate mais au bout du compte assez représentative d’un travail hors normes que Nils Bouaziz, Noémie Moreau, Nicolas Giuliani (à l’origine de la Collection Documentaire) et la joyeuse équipe mènent avec passion
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séléctions POTEMKINE
Date de sortie : 18 sept. 2007 (2h22) De : Elem Kilmov Avec : Aleksey Kravchenko, Olga Mironova, Liubomiras Laucevicius Genre : Guerre Nationalité : Russe
REQUIEM POUR UN MASSACRE (1985) d’Elem Klimov
plus de 600 villages qui ont été brûlés, décimant des régions entières. Klimov avait coécrit le scénario avec Ales Adamovich qui avait combattu alors qu’il était encore adolescent. Cet aspect autobiographique est rendu par ce qui fait la force du film : adopter le point de vue d’un adolescent face aux horreurs de la guerre. Magistralement interprété par Alexei Kravchenko, Florya passe du statut de gamin à celui de vieillard en quelques jours, les transformations de son visage filmé en gros plans sont elles-mêmes bouleversantes. Autour de lui, les visions macabres et apocalyptiques s’enchaînent. Tout n’est que charnier, corps amoncelés. La caméra serre le personnage, nous sommes avec lui, nous sommes lui. Ceux qui lui parlent sont eux-mêmes souvent face caméra, nous impliquant directement dans cet univers cauchemardesque.
Il s’agit du premier DVD sorti par Potemkine, celui par lequel tout a commencé. Considéré quasiment unanimement comme le plus grand film sur la guerre jamais réalisé, Requiem pour un massacre connut un grand succès au box-office lors de sa sortie au milieu des années 80. Pourtant, le long-métrage était devenu très difficile à se procurer, juste disponible sur une vieille VHS ou visible dans les cinémathèques.
Nous sommes emportés physiquement dans ce partage de l’Enfer qu’est la guerre jusqu’à une apogée finale où Klimov utilise les images d’archives afin de nous terrasser de par leur pouvoir inéluctable. Nous voyons ce que le personnage voit, nous entendons ce qu’il entend. Ce mélange de réalisme et d’un univers mental presque irréel, lié à la folie qui entoure les êtres, est tellement maîtrisé que le réalisateur ne tournera plus jamais après cette œuvre, comme s’il avait tout dit.
La moindre chose que l’on puisse dire, c’est que c’est le genre de film choc qui marque durablement tous ceux qui le regardent. Se déroulant en 1943, pendant l’occupation des troupes allemandes en Biélorussie, il aborde le thème du génocide dans le pays, avec
La survie, la peur, les larmes, Requiem pour un massacre, de par sa noirceur, en deviendrait presque un film d’horreur, ce qu’il finit par être quelque part. On se souvient par exemple de l’œil ensanglanté filmé en gros plan de la vache agonisante, ou le corps brûlé
d’un vieillard autour duquel le village s’est rassemblé ou encore cette population enfermée dans une grange pour être exterminée. La perte d’innocence passe par ces visions insoutenables, étouffantes. L’utilisation de drones vibrants et d’une musique alternant oppression, collage de bandes-son de la guerre (discours d’Hitler, hymne allemand) et airs classiques (Mozart, Wagner…) font aussi du film un trip halluciné, baigné dans un épais brouillard insondable. Cet aspect d’étrangeté peut être une forme de résistance face à un réel insupportable mais aussi les premiers pas vers la folie qui guette ces enfants, perdus au milieu des bombes et des macchabées, aussi bien enfouis dans la terre ou pendant des arbres. Klimov, lui-même hanté par le décès de sa compagne Larisa Shepitko suite à un accident de voiture, veut donner à ressentir la guerre non seulement au public mais aussi à ses acteurs afin de tirer des performances possédées. Il a donc fait porter à ses comédiens non professionnels de vrais costumes de guerre et a tourné les scènes dans l’ordre chronologique pendant près de neuf mois. Le projet lui-même a mis huit ans à voir le jour, tant la dimension naturaliste faisait peur, d’autant plus que le film prend le parti de mettre un visage sur le Mal, le titre original était d’ailleurs « Kill Hitler ». Aujourd’hui, Requiem pour un massacre mérite d’être vu et revu, malgré sa dimension traumatique, car jamais on n’aura filmé aussi bien et sur un simple visage le processus déshumanisant de la guerre. (ML) ATYPEEK MAG #02
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Date de sortie : 21 avril 2009 (1h42) De : Sang-soo Im Avec : Suk-kyu Han, Yun-shik Baek, Jae-ho Sang Genre : Comédie Nationalité : Corée du Sud
THE PRESIDENT’S LAST BANG (2005) d’Im Sang-soo La « Maison Bleue » de Séoul est en effervescence. En ce 26 octobre 1979, le président s’est annoncé, vieux tyran solitaire qui vient de plus en plus souvent y noyer sa mélancolie. Cela fait seize ans que Park Chung-hee règne sur la Corée du Sud. On lui a tué sa femme, cinq ans plus tôt, lors de la fête nationale. Depuis, ses conseillers privés sont devenus ses pourvoyeurs en alcool et en filles. Ils sont trois, ce soir-là, à le contempler, vautré sur les seins d’une call-girl, se pâmant devant le charme mélancolique de romances japonaises. À l’écouter, aussi, pérorer sur son libéralisme (« J’ai toléré un parti d’opposition, moi ! ») et sur la démocratie (« Combien de pays l’appliquent-ils réellement ? »). Yang, le servile, bat des mains à chaque phrase. Cha, le chef de la sécurité, nouveau favori, cherche
à plaire encore plus. Seul Kim, le chef de la CIA locale, ami fidèle presque en disgrâce, joue double jeu. C’est qu’il a décidé, ce soir, avec des complices, de tuer Park Chung-hee. Im Sang-soo (remarqué, l’an dernier, avec Une femme coréenne) n’idéalise personne. « On sent tous mauvais », dit l’un des personnages, et on doit prendre cette réplique au propre comme au figuré. Les conjurés qu’il nous montre sont des courtisans repentis. Et leurs motivations sont troubles, opaques, dissimulées sous leurs actes, qui seuls intéressent le réalisateur. Son film ressemble au travail d’un flic qui s’intéresserait aux détails - qui était là ? qui a fait quoi ? - pour mieux avoir une vision globale des faits. Dès les premières minutes, un travelling latéral fait défiler les pièces d’une prison où l’on pratique la torture au nom du président. Avant et après la tuerie, des mouvements de caméra similaires - le dernier, en plongée pour accentuer le propos - semblent faire
Date de sortie : 5 février 2013 (1h45) De : Bobcat Goldthwait Avec : Joel Murray, Tara Lynne Barr Genre : Comédie Nationalité : Américaine
GOD BLESS AMERICA (2011) de Bobcat Goldthwait Privé de sommeil par le vacarme de ses voisins, viré de son open-space à la suite d’une plainte douteuse de harcèlement, Frank apprend dans la foulée qu’il va mourir d’une tumeur au cerveau. Avant de se suicider, ce vieux garçon aigri et misanthrope décide 188
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le point. Résumer les événements. À la manière des chapitres d’un livre ou des titres d’un journal. Cette rigueur, qui n’exclut paradoxalement ni émotion ni lyrisme, faiblit dans la dernière demi-heure, lorsque le ridicule s’impose. On sourit, bien sûr, devant ce responsable de la sécurité refoulé de son ministère par ses propres troupes. Ou de cet imbécile couvrant d’une casquette pudique l’intimité du cadavre présidentiel. Mais la dérision insolente qui plane sur le film est si forte que la farce, curieusement, l’affaiblit un instant. Le film a soulevé des remous à Séoul, notamment auprès de la fille de Park Chunghee. Moins, semble-t-il, parce que son père était dépeint comme un dictateur que parce qu’il avait la faiblesse d’aimer les chansons japonaises et les jeunes filles en fleur. L’honneur familial des tyrans est, parfois, aussi bizarre que les motivations de ceux qui les tuent. (JT)
de partir en croisade contre la bêtise et la vulgarité de ses concitoyens, lobotomisés par la télé, selon lui, et d’assassiner toutes les personnes qui le méritent, toujours selon lui. Qui n’a jamais rêvé d’étriper ainsi le type qui répond à son portable dans une salle de cinéma ou l’intégralité du casting de ces émissions de télé-réalité débiles qui polluent nos écrans ? Humour très noir, donc, pas loin de Borat, pour cette charge au bazooka contre la dégénérescence des médias et du public. Le réalisateur, Bobcat Goldthwait, est spécialiste de la provoc et des sujets scabreux. Dans Juste une fois (2007), il était question d’un inavouable désir zoophile ; dans World’s Greatest Dad (2009), Robin Williams maquillait en suicide la mort accidentelle de son fils (par strangulation auto-érotique) pour lancer sa carrière d’écrivain raté... Ici, la satire tourne au jeu de massacre quand Frank s’adjoint les services d’une adolescente qui partage sa fureur nihiliste. Le couple de justiciers, pris dans une spirale de violence, évoque alors l’équipée sauvage de Tueurs-nés, d’Oliver Stone, en moins speed et en plus amusant. (JT)
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Date de sortie : 4 octobre 2011 De : Alan Clarke Avec : Gary Oldman, Tim Roth, Ray Winstone Genre : Drames sociaux Nationalité : Britannique
COFFRET ALAN CLARKE (2011) Inclus Scum (1979) - Made in Britain (1982) The Firm (1989) - Elephant (1989)
Réalisateur qui a essentiellement travaillé pour la télévision et la BBC, Alan Clarke a produit une œuvre d’un réalisme social glaçant et d’une violence oppressante, comme en témoignent les quatre films rassemblés dans ce coffret, sans aucun doute les plus forts, les plus noirs et les plus controversés qu’il ait faits. Entre les maisons de correction de Scum, les skinheads de l’ère thatchérienne dans Made in Britain, les hooligans terrifiants de The Firm ou les meurtres insensés d’Elephant, le panorama qui nous est offert fait froid dans le dos et Clarke retrouve l’esprit des jeunes gens en colère des années 50 mais revisité par l’ère punk et No Future. Une des caractéristiques de son cinéma se trouve dans son utilisation de la Steadicam, qu’il systématise à partir de Made in
Date de sortie : 2 octobre 2012 (1h52) De : Robert Altamn Avec : Elliott Gould, Nina Van Pallandt, Sterling Hayden Genre : Comédie Nationalité : Américaine
LE PRIVÉ (1973) de Robert Altman Aucun rapport avec le Philip Marlowe incarné successivement par Dick Powell, Robert Montgomery, James Garner, Robert Mitchum. Et popularisé par Humphrey Bogart dans Le Grand Sommeil : chapeau, trench-coat et œil désabusé sur les magouilles des hommes. Robert Altman fait du héros de Raymond
Britain. Nous suivons les personnages au plus près dans des marches énergiques et étourdissantes. Cet aspect dérangeant atteint une apogée avec Elephant, qui cumule 18 meurtres en 30 minutes. Quasiment aucun dialogue, pas de musique, juste des personnes qui avancent jusqu’à un but, celui de donner la mort, et qui repartent. Les lieux sont ordinaires, déserts, mais présentés comme étranges. Rien ne distingue d’ailleurs les victimes des bourreaux. La caméra, elle, reste dix secondes sur les corps au sol, ce qui est beaucoup trop long, trop insupportable. Ces tueries perpétuelles apparaissent comme banales, et donnent littéralement le vertige. Chaque œuvre de Clarke nous amène à penser cette surenchère et cet engrenage de violence. N’y a-t-il d’ailleurs rien de plus angoissant que ce final de The Firm où les hommes rêvent d’une société nationale de hooligans ? Le cinéma de Clarke ne nous épargne rien (les viols et suicides de Scum) et quand une séquence est hors champ (la scène de vengeance et de mutilation de The Firm), on imagine des horreurs plus grandes encore. En tout cas, ses films-choc font réagir vu que Scum contribuera à la fermeture des borstals, ces centres de détention pour mineurs. Clarke décède malheureusement d’un cancer du poumon en 1990 alors qu’il a atteint un sommet dans son style minimaliste et brut, avec toujours des performances d’acteurs hallucinantes. Gus Van Sant ou Harmony Korine sauront tirer de bonnes leçons de son cinéma. Dans un style plus léger, Potemkine a aussi édité séparément Rita, Sue and Bob too, où il est question essentiellement de sexe sous un mode plus comique bien que le caractère déprimant de l’Angleterre des années 80 soit toujours bien présent. (ML)
Chandler un idéaliste narquois à qui Elliott Gould prête sa silhouette dégingandée et sa fausse désinvolture. En ces années 70, Marlowe vit dans un studio entre ciel et terre, face à des voisines adeptes de l’orgasme tantrique, et s’occupe essentiellement de son chat. Un chat à qui on ne la fait pas : Marlowe a beau lui faire croire, sur le coup de trois heures du mat, qu’il vient de lui acheter ses croquettes préférées (en fait, il a transféré dans une boîte de luxe une nourriture plutôt cheap), le chat, snob, les dédaigne… Marlowe ne peut rouler son chat, mais lui, il se fait rouler dans la farine par son pote Terry, accusé du meurtre de sa femme. La police le soupçonne, une femme l’engage pour retrouver son mari, écrivain alcoolique, un mafieux lui demande 350 000 dollars… Avec une nonchalance qui dissimule des mouvements de caméra somptueux, Altman tourne un film noir dans la lumière blanche de la Californie. L’humour permanent se mêle à des bouffées de violence surprenantes : le mafieux défigure, exactement comme Lee Marvin ébouillantait Gloria Grahame dans Règlement de comptes de Fritz Lang. La réussite est totale. (JT)
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Une sélection de Nils Bouaziz REQUIEM POUR UN MASSACRE « Un film découvert grâce à la boutique car un client russe me l’avait commandé. Une de mes plus grosses claques au cinéma. C’est un film dont on ne peut sortir indemne. On n’est pas la même personne après l’avoir vu. Il symbolise aussi le début des éditions DVD. » NE VOUS RETOURNEZ PAS « Un art du morcellement dans le récit par le montage jamais vu auparavant. Comme dans Le Miroir, on est dans une irréalité, une construction mentale rarement vue ailleurs. C’est aussi un des films qui m’a le plus glacé le sang. Une lente descente dans les abîmes et dans l’angoisse. » MELANCHOLIA « Un titre qu’on nous a proposé sur scénario pour un droit vidéo. C’est un des cinéastes contemporains en activité que j’aime au-delà de tout. Une des œuvres les plus fortes qu’il a faites, un film de transition qui parle de la dépression et qui est très proche de Tarkovski formellement. Le début d’une aventure que j’espère longue avec Von Trier. »
séléctions POTEMKINE
Date de sortie : 3 mai 2011 (1h31) De : Benjamin Christensen Avec : Benjamin Christensen, Elisabeth Christensen, Maren Pedersen Genre : Docu-fiction Nationalité : Danemark / Suède
HÄXAN, LA SORCELLERIE À TRAVERS LES ÂGES (1922) de Benjamin Christensen Film culte s’il en est, précurseur du docu-horreur, du cinéma Mondo et même de la nunsploitation des années 60 et 70, Häxan reste une œuvre fascinante et inclassable, à mi-chemin entre documentaire, fiction et film d’animation. Baignant dans une imagerie gothique et grotesque, parfois même scatologique, cette superproduction scandinave a enthousiasmé les surréalistes et outré les censeurs - notamment aux États-Unis. Ayant assemblé une grande documentation sur le sujet de la sorcellerie entre 1919 et 1921, Christensen aurait pu proposer une thèse filmée, s’appuyant sur des gravures, illustrations et autres archives de l’époque médiévale, mais il se lance vite dans des reconstitutions d’une beauté saisissante où on a
Date de sortie : 3 juillet 2015 De : Kenneth Anger Avec : Bobby Beausoleil, Donald Cammell, Marianne Faithfull, Kenneth Anger Genre : Expérimental Nationalité : Américaine
THE MAGICK LANTERN CYCLE de Kenneth Anger - Coffret (2015) Inclus Fireworks (1947), Puce Moment (1949), Rabbit’s Moon (1950), Eaux d’artifice (1953), Inauguration of the Pleasure Dome (1954), Scorpio Rising (1964), Kustom Kar Kommandos (1965), Invocation of my Demon Brother (1969), Lucifer Rising (1966-1981).
Grand nom du cinéma underground américain, Kenneth Anger est surtout connu pour ses films 190
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l’impression de voir des fresques fantastiques de l’époque obscurantiste prendre vie sur l’écran. Des tortures de l’Inquisition aux traitements tout aussi inhumains que la psychiatrie, sorte de nouvelle religion en ce début de XXe siècle, livre aux femmes hystériques, cette saga anticléricale mêle provocations, humour, noirceur et érotisme avec une totale liberté de ton. Le décalage entre la volonté académique et le caractère halluciné des parties fictionnelles, qui tentent de matérialiser sur l’écran les différentes superstitions et légendes d’une époque révolue, en fait un document avant-gardiste qui séduira par la suite aussi bien l’écrivain William S. Burroughs qui
en assurera la narration dans une adaptation des années 60 (qui figure parmi les trois versions présentes sur le double DVD) ou la formation expérimentale française Art Zoyd qui en assurera la bande-son. Les images restent en tête, de ces gardiens des portes de l’Enfer aux têtes de porc jusqu’à ces femmes qui embrassent le cul du Diable. Avec une maîtrise éclatante des ombres et lumières, Christensen invente le genre folk horror tout en alignant des tableaux extravagants où l’imaginaire tient le premier rôle. Qu’importe si la thèse développée est simpliste - surtout à la fin -, son désir de faire un cinéma nouveau, décomplexé, en fait un film incontournable. (ML)
rassemblés sous le titre « The Magick Lantern Cycle » qui bénéficient ici d’une édition magnifique, incluant un livre rassemblant photos, storyboards, textes d’Olivier Assayas, un DVD entier de bonus et un CD audio avec la musique de Bobby Beausoleil pour Lucifer Rising, faisant le pont entre deux des grandes passions de Potemkine, le cinéma et la musique. Entre chamanisme et culture pop, occultisme et imagerie gay, Anger a eu une influence considérable sur le Nouvel Hollywood et l’univers du clip vidéo.
Pleasure Dome et Lucifer Rising. Souvent baroques, ses films passionnent quand ils en appellent aux surimpressions et aux collages. Dans Scorpio Rising, un fétichisme homo-érotique des motos et du cuir se mêle à une imagerie religieuse, nazie et des airs pop des années 50. Ces juxtapositions créent une poésie des sens, où la musique joue un rôle primordial.
Il a à peine vingt ans quand il tourne Fireworks et se voit immédiatement associé à d’autres grands noms de l’avant-garde, comme Gregory Markopoulos, qui n’hésitent pas à traiter ouvertement d’homosexualité à une époque où celle-ci est encore une pratique interdite dans le pays. Stan Brakhage ou encore Jean Cocteau seront impressionnés par ce premier film en noir et blanc, et Anger s’aventurera par la suite dans des domaines de plus en plus mystiques, marqués par la pensée d’Aleister Crowley et les figures de dieux païens que l’on retrouvera dans Inauguration of the
Après son immersion dans le monde des bikers, Anger explorera la culture hippie et le psychédélisme, ses BO se faisant de plus en plus hallucinées (les manipulations crispantes du Moog par Mick Jagger dans Invocation of my Demon Brother) jusqu’à son magnum opus, le fameux Lucifer Rising, qui mettra dix ans à être achevé, dans lequel on retrouve des personnalités comme le cinéaste Donald Cammell ou la chanteuse Marianne Faithful. Bien plus qu’un témoignage sur une époque lointaine et révolue, le cinéma d’Anger se rapproche vraiment d’un rituel magique sans autre équivalent dans l’histoire du septième art. (ML)
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Date de sortie : 2 novembre 2016 De : Roy Andersson Avec : Nils Westblom, Holger Andersson, Lars Nordh Genre : Comédies noires Nationalité : Suédois
COFFRET ROY ANDERSSON (2016)
Inclus A Swedish Love Story (1969), Chansons du 2e étage (2000), Nous, les vivants (2007), Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence (2014)
Si l’œuvre de Roy Andersson reste associée à un humour absurde et des tragicomédies poétiques, son parcours est tout de même assez singulier. En effet, entre 1975 et 2000, le réalisateur suédois ne réalisera que deux courts métrages (Quelque chose est arrivé, Monde de gloire), se consacrant entièrement au monde de la publicité dans lequel il est particulièrement créatif. C’est véritablement avec Chansons du 2e étage, prix du jury à Cannes en 2000, que le public français commencera à s’intéresser à ce cinéaste sans pareil. Le film aligne les tableaux et les plans séquences, avec une esthétique épurée, froide, décolorée, où tous les personnages possèdent des teints blafards et cadavériques. Ces saynètes du quotidien mêlent humour noir, surréalisme et une certaine forme de théâtralité figée dans
Date de sortie : 4 novembre 2014 (1h33) De : Werner Herzog Avec : Klaus Kinski, Ruy Guerra, Helena Rojo Genre : Aventure Nationalité : Allemand
AGUIRRE, LA COLÈRE DE DIEU (1972) de Werner Herzog En 1560, une expédition espagnole quitte les hauts plateaux péruviens pour s’enfoncer dans la forêt amazonienne à la recherche du mythique Eldorado. L’entreprise est démente mais Aguirre, commandant en second, refuse de renoncer. Il renverse son chef et
des décors totalement construits en studio. Le Village Voice parlera d’un Bergman version slapstick, d’autres évoquent Beckett, mais c’est surtout aux figurines de l’espagnol Isaac Cordal que l’on pense, avec ses sculptures miniatures d’hommes grisâtres qui semblent porter le poids d’une aliénation. Un détenu est mené à la chaise électrique. Un singe est torturé alors qu’une femme juste à côté s’inquiète d’un parent au téléphone. L’humain y est saisi par tout un tas d’angoisses. Dans Nous, les vivants, une femme pleurniche sans cesse, alors que dans Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence, des clowns tristes et dépressifs tentent de vendre des farces et attrapes pour apporter un peu de bonne humeur aux gens. Certaines scènes sont de purs bijoux d’hilarité, comme ce cours de flamenco où l’enseignante ne peut réfréner son désir, cette vieille sur son lit de mort qui ne veut lâcher son sac plein de bijoux ou cette serveuse qui ne sait que faire de la commande d’un client qui vient de faire un arrêt cardiaque. Dans ces fragments polyphoniques, il y a presque quelque chose d’orchestral ou de l’ordre de la comédie musicale. Les personnages témoignent tous de notre caractère éphémère, minuscules dans ces décors avec une grande profondeur de champ. Le burlesque et le cocasse se teintent de spleen. Dans ces bars, ces rues, ces appartements, ils sont ensemble mais toujours définitivement seuls, tellement accablés et zombifiés qu’ils en deviennent drôles, tétanisés par la vie comme cet homme pétrifié dans un muséum d’histoire naturelle, et dont l’image forte et superbe sert de couverture au DVD d’Un pigeon. Ah la vie, quelle blague ! (ML)
prend la tête du groupe. Dès lors, ses hommes devront le suivre, quoi qu’il en coûte, jusqu’au tréfonds de sa folie. Dès la scène d’ouverture — la procession des conquérants, minuscules silhouettes sur les flancs d’une montagne gigantesque surgissant des brumes —, Herzog donne aux paysages une place écrasante. Dans ce décor grandiose, il arbitre non sans cruauté le combat inégal entre les hommes et la nature. De naufrages en attaques d’Indiens, ce chef-d’œuvre au lyrisme cru a toutes les apparences d’un film d’aventures. Il est bien plus que cela : une charge inspirée contre la furie d’un monde gangrené par la volonté de puissance et le rêve de pureté qui en découle. Poème hypnotique, épopée tragique, Aguirre est aussi, comme Fitzcarraldo, tourné dix ans plus tard, le portrait saisissant d’un explorateur mégalomane et illuminé. Vampirisé par son personnage, Klaus Kinski fascine jusqu’à la fameuse scène finale. Les yeux exorbités, le corps défait, l’acteur erre parmi les singes et les cadavres. Pathétique souverain régnant sur son « radeau de la Méduse », il est possédé, corps et âme habité par « la colère de Dieu ». (JT)
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Une sélection de Nils Bouaziz LES INNOCENTS « Un retour à ma première époque cinéphile. Un de mes films de chevet. Une œuvre parfaite, aussi forte que La Nuit du chasseur. »
EVOLUTION « Des films qu’on a distribués en France, c’est celui dont je suis le plus fier. Ce genre de films qui me font décoller la rétine. Aussi une œuvre importante pour le cinéma français qui méritait une belle édition en diptyque avec Innocence. »
LE TEMPESTAIRE « Je ne connaissais que la Chute de la Maison Usher sur lequel mon frère Joakim avait fait la musique. Depuis ce ciné-mix il y a une quinzaine d’années, j’ai voulu l’éditer, et ça a pris… dix ans ! Une longue phase de recherche et la révélation d’un grand génie en travaillant sur l’édition elle-même. J’ai été très impressionné par son passage au parlant avec ce film quasi expérimental. Un des plus grands avant-gardistes du cinéma mondial. »
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Date de sortie : 7 mars 2017 (1h14) De : Mauro Herce Genre : Documentaire Nationalité : Espagnole
DEAD SLOW AHEAD (2016) de Mauro Herce Dès les premiers plans, on pense à La mélodie du monde (1929) de Walter Ruttmann ou même au Koyaanisqatsi (1982) de Godfrey Reggio : une symphonie visuelle aux allures de film-monde. Sons et images se mêlent pour un résultat qui s’apparente à un véritable album de musique ambient, avec cette capacité à nous faire perdre les notions d’espace et de temps. Au bout du compte, si Brian Eno faisait du cinéma, cela ressemblerait peut-être à ce Dead Slow Ahead dont le titre lui même évoque une lenteur hypnotique. En effet, ce documentaire est une sorte de poème visuel postindustriel subjugué par ce monstre mécanique qu’est le cargo Fair Lady, prouesse architecturale dans laquelle les hommes errent comme des présences spectrales, eux mêmes semblant si insignifiants face à cet engin colossal perdu au milieu d’une immensité encore plus
Ressortie en salles dans une version restaurée par David Lynch : le 31 mai 2017
Date de sortie : rentrée 2017 (1h29) De : David Lynch Avec : Jack Nance, Charlotte Stewart Genre : Horreur, Expérimental Nationalité : Américaine
ERASERHEAD (1977) de David Lynch - version restaurée D’ores et déjà annoncé comme un des grands événements cinématographiques de l’année 2017, la ressortie en salles par Potemkine de la version restaurée d’Eraserhead est un vrai cadeau - prévue pour le printemps et en double programme avec le 192
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terrassante. Pourtant, certains plans pourraient être issus de pas mal de films vus ces dernières années ( The Forgotten Space (2010) d’Allan Sekula et Noël Burch, Leviathan (2012) de Lucien Castaing-Taylor et Véréna Paravel, Exotica, Erotica, etc. (2015) d’Evangelia Kranioti ) et le périple en cargo n’est pas si original que cela, c’est bien le travail sur la matière sonore et le regard porté sur l’environnement qui fait de ce long de Mauro Herce une expérience unique. Tout comme l’équipage, nous voguons dans une forme d’inconscience, simples rouages dont chaque action semble si anodine, car qui sommes nous face à l’immensité du monde, ces cieux insondables et cet océan infini ? Les conversations téléphoniques d’une grande banalité entre les hommes et leurs familles qui les attendent relèvent là aussi d’un absurde tragique et appuient une forme d’insignifiance de
notre passage sur terre. Nous sommes tous déjà des fantômes dans cet univers, et le terme “dead” (les morts) du titre peut être pris au sens littéral. Herce a parlé lui même d’une expérience terminale : “filmer le dernier navire de l’espèce humaine”. Alors, malgré la froideur des plans, l’émotion pointe dans ce décor qui pourrait être aussi bien futuriste qu’obsolète. L’équipage philippin devient une humanité en errance, ombres mouvantes et aliénées. Qu’est-ce qui les a menés à avoir ce genre de vie ? Nous ne le saurons jamais. Ils semblent aller vers un naufrage dans ces espaces qu’ils traversent mais qu’ils ne peuvent pas habiter. Condamnés comme nous le sommes tous, leurs portraits font déjà d’eux des défunts. Dead Slow Ahead nous laisse face à la force métaphysique du silence et du vide, en l’orchestrant jusqu’à créer sa symphonie de l’indicible. (ML)
documentaire sur David Lynch, The Art Life, dès le 15 février. Œuvre mythique qui a longtemps tourné dans le milieu des Midnight Movies, ce premier - et meilleur - film de David Lynch était aussi le préféré de Stanley Kubrick. Et pour cause, il reste d’une beauté formelle presque indépassable. Parfois associé au genre body horror, pièce maîtresse de la culture post-punk, industrielle et cold wave de la fin des années 1970, l’influence de ce poème visuel a été phénoménale. De Combat Shock à Tetsuo, on en trouve des traces partout, sans parler du morceau composé par Peter Ivers, « In Heaven », qui a été repris des dizaines et des dizaines de fois. Commencé en 1971, le tournage s’étalera sur six années. Inspiré par l’environnement industriel de la ville de Philadelphie, Eraserhead répond surtout à la logique onirique, ou plutôt cauchemardesque. Un homme aux cheveux électriques doit s’occuper de sa progéniture monstrueuse dans un décor déprimant. Surréalisme, symbolisme sexuel et horrifique et sound design immersif, le film peut se prêter à
toutes formes d’interprétations. Certains y virent une matérialisation des angoisses de la paternité. D’autres y ont perçu le parcours d’un homme introverti qui se confronte à son inconscient pour ne plus être un personnage passif. Lynch livre assez de clés narratives pour donner à son métrage une force émotionnelle unique. Les effets spéciaux (les rumeurs continuent d’aller bon train sur l’origine du bébé), la complexité de la bande-son (une symphonie dark ambient/industrielle superbe), les personnages comme issus d’un freakshow (ah la dame du radiateur, et ces vieux airs d’orgue réverbérés évoquant un croisement entre le Freaks de Tod Browing et le Carnival of Souls de Herk Harvey…) et les délires sexuels hallucinés (la séquence chez les beaux-parents, les spermatozoïdes écrasés…) se teintent d’une mélancolie toujours plus grande face à ce personnage aliéné qui échappe au monde par le rêve. C’est profondément triste et tellement magistral qu’aucune des œuvres suivantes du maître de l’étrange n’atteindra cette excellence. (ML)
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Date de sortie : 11 janvier 2017 (1h18) De : Harmony Korine Avec : Brian Kotzur, Rachel Korine, Harmony Korine, Travis Nicholson Genre : Expérimental Nationalité : Américaine
TRASH HUMPERS (2009) de Harmony Korine Trash Humpers est avant tout un essai esthétique. Alors attention, ici le réalisateur n’est pas en quête du beau, mais au contraire d’une poésie qui naît de l’abject, de l’obscène, de la vulgarité. Le Marquis de Sade disait lui-même : « La beauté est la chose simple, la laideur est la chose extraordinaire » dans ses 120 Journées de Sodome. Hé bien, les bacchanales prennent ici une dimension d’horreur sociale bien typée redneck. Le sexe se fait toujours en solitaire : fellation de branches, masturbations avec des légumes et viols de poubelles encore et encore. Entre les blagues racistes et homophobes, l’histoire d’un gars qui se fait rouler dessus par un tracteur, les tenues aux couleurs du drapeau confédéré et les accents bien marqués, pas de doutes, on est dans le Sud profond. Portant des masques qui évoquent à s’y méprendre le grand-père du premier Massacre à la tronçonneuse, les personnages de Korine s’inscrivent non seulement dans une tradition du monstrueux typique du Southern Gothic mais aussi dans une histoire de l’art aux États-Unis. Ils rappellent les photographies de Ralph Eugene Meatyard et Diane Arbus, les installations d’Edward Kienholz ou les travaux vidéo de Paul McCarthy. Les masques perturbent de par le caractère indéfinissable des personnes qui les portent. Le masque a donc valeur de miroir quant à cette autre Amérique que Korine cherche à dépeindre dans ses films. Du coup, ces êtres sont réduits à des besoins élémentaires : manger, déféquer, rire, pisser. Ils participent aussi à l’atmosphère d’inquiétante étrangeté du film, car monstrueux ils le sont à plusieurs niveaux. Obsessionnels, sadiques, ils n’hésitent pas à humilier l’autre, comme ces pseudo frères siamois reliés par un collant sur la tête qui font un spectacle de marionnette inspiré de Chang et Eng Bunker. Pas très cool. Trash Humpers suit donc ce gang de vieillards malfrats pervers et stupides, qui ne pensent qu’à mettre le boxon comme de jeunes enfants ingérables. Le cinéma de Korine est définitivement punk et c’est là sa force, il s’affranchit de toutes les règles du politiquement
correct. Du coup, le choix de tourner en VHS donne une force particulière à ce film. Le son brut, l’image granuleuse, presque abstraite, les couleurs fades, tout contribue à créer une certaine angoisse, une hypnose, sans parler des rires crispants d’Hervé, le personnage que Korine incarne. C’est cet aspect qui nous renvoie à une de ses influences principales : le Werner Herzog de Les nains aussi ont commencé petits. Même sens du grotesque et de la répétition, jusqu’à provoquer le malaise pur et simple. (ML))
Date de sortie en salles : 15 février 2017
Date de sortie : à paraître (1h30) De : Jon Nguyen, Rick Barnes, Olivia Neergaard-Holm Avec : David Lynch Genre : Documentaire Nationalité : Américaine
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Une sélection de Nils Bouaziz LE MIROIR « La réduction du cinéma de Tarkovski à son essence même. Le mental, la mémoire, la psyché prennent le pas sur le récit pour atteindre la magie pure. Jusqu’à ce qu’il finisse le montage, Tarkovski ne savait pas lui-même ce qu’il faisait. Un film qui échappe à tous les codes du cinéma et même à son réalisateur ! Je suis ébloui à chaque vision du film. »
DAVID LYNCH, THE ART LIFE (2016) de Jon Nguyen, Rick Barnes & Olivia Neergaard-Holm Parcours dans l’enfance et les années de formation de David Lynch, The Art Life nous dévoile l’âme d’un peintre qui s’est retrouvé dans le cinéma un peu par hasard. Porté par la poésie des souvenirs racontés, le documentaire explore l’apprentissage d’une vision du monde qui donnera naissance à un des plus grands génies du 7e art. Bien plus qu’un simple portrait d’artiste, le film questionne tout ce qui nous rend humain : la passion, les accidents de parcours, les désenchantements, les rencontres qui élèvent l’esprit, les images qui hantent et l’essence même du vivant. En juxtaposant la parole révélatrice de moments signifiants selon l’artiste, les images d’archives bon enfant (photographiques ou filmées) et les tableaux, parfois très sombres et torturés, se crée un niveau de lecture complexe. La grande force des réalisateurs a été de capter ce Lynch secret, pudique et terriblement touchant (le plan final vous fera couler une larme), celui-là même qui stoppe un récit en plein milieu car il sent qu’il est allé trop loin dans les révélations. Se terminant sur le tournage d’Eraserhead, on ne peut que mieux comprendre pourquoi Lynch reste tant attaché à ce premier film étonnamment autobiographique qui ne fait que raconter le cheminement d’un homme qui pénètre le monde des rêves afin d’échapper à un réel qui le sclérose, ce qu’a fait David Lynch en choisissant la vie d’artiste. L’aboutissement d’une époque retranscrite avec sensibilité dans ce documentaire poignant. (ML)
MIND GAME « J’ai toujours aimé l’animation, mais ce film va beaucoup plus loin que le manga classique. C’est presque un hommage à toute la créativité de ce cinéma depuis qu’il existe. Un film qui mérite plus de reconnaissance. »
ADIEU PHILIPPINE « Rozier faisait tout ce que j’avais envie d’aimer dans la Nouvelle Vague. Un cinéma libre, buissonnier, qui part dans la rue à l’aventure, Rozier le représente bien plus que tous les autres. Le cinéma de l’inconscience, de la fraîcheur, presque de la naïveté.»
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DOSSIER
[2007-2017] Éditions DVD et Blu-ray
Potemkine
Pour terminer ce périple dans l’histoire de Potemkine, nous avons listé l’ensemble des sorties DVD et Blu-ray de ces dix années fructueuses afin que tous les amateurs de la maison d’édition puissent compléter leur collection. 001 Elem Klimov
Requiem pour un massacre 002 Alexandre Sokourov Mère et fils 003 Barry Purves His Intimate Lives 004 Nicolas Roeg Walkabout 005 Jacques Rozier Adieu Philippine 006 Jacques Rozier Maine Océan 007 Marcel Camus Orfeu Negro 008 Jacques Rozier Coffret 009 Alison Chernick Matthew Barney : No Restraint 010 Werner Herzog Herzog / Kinski Cobra Verde et Ennemis intimes 011 Im Sang-Soo The President’s Last Bang 012 Vincent Gérard & Cédric Laty By the Ways : A Journey with William Eggleston 013 Maxime Giffard & Félix Tissier West Coast Theory
014 Kevin Fitzgerald 015 016 017 018
Freestyle : The Art of Rhyme Perry Henzell The Harder They Come Nikita Mikhalkov Coffret Volumes 1 & 2 Masaaki Yuasa Mind Game Ariane Michel Les Hommes
019 Vincent Gallo
The Brown Bunny
020 Nina Paley
Sita chante le blues
021 Hirokazu Kore-Eda
After Life
022 Hirokazu Kore-Eda
Maborosi
023 Lisandro Alonso
Coffret
024 Yang Ik-June
Breathless
025 Nikita Mikhalkov
Les Yeux noirs
026 Coffret Nikita Mikhalkov
Années 1970-1980
027 Theodoros Angelopoulos
Le Voyage des comédiens
028 Theodoros Angelopoulos
Coffret 7 films
029 Collectif
10 ans de Labo
030 10 ans de courts métrages
au festival Silhouette
031 F.J. Ossang
Coffret
032 Benjamin Christensen
Häxan
033 Andreï Tarkovski
L’Intégrale
034 Dennis Hopper
Out of the Blue (Garçonne)
041 Andreï Tarkovski 042 043 044 045
Stalker Andreï Tarkovski Le Miroir Andreï Tarkovski L’Enfance d’Ivan Jeff Nichols Shotgun Stories Richard Oswald Cagliostro
035 Alan Clarke
036
037
038
039
040
Scum Alan Clarke Made in Britain Alan Clarke The Firm & Elephant Alan Clarke Coffret Andreï Tarkovski Andreï Roublev Andreï Tarkovski Solaris
046 Lars Von Trier
Melancholia
La Mouette
048 Malgoska Szumowska
Elles
049 Andreï Kouchalovsky
Sibériade
050 F.J. Ossang
Dharma Guns
051 Guillaume Brac
Un monde sans femmes
052 Nicolas Roeg
Eureka
053 Akira Kurosawa
Dersou Ouzalou
054 Robert Altman
Le Privé
055 Jonas Mekas
Reminiscences of a Journey to Lithuania 056 Jonas Mekas Walden 057 Jonas Mekas The Brig 058 Jonas Mekas Short Film Works 059 Jonas Mekas Lost Lost Lost 060 Jonas Mekas As I was moving ahead
047 Youli Karassik
061 Jonas Mekas Coffret 062 Léos Carax Holy Motors 063 Laurent Chollet Cinéphiles de notre temps 064 Michelangelo Frammartino Le Quattro Volte 065 Bobcat Goldthwait God Bless America 066 Alex Ross Perry The Color Wheel ATYPEEK MAG #02
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DOSSIER 067 Naomi Kawase
Genpin 068 Vitali Kanevsky Nous les enfants du XXe siècle 069 Paul Newman De l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites
070 Victor Kossakovski
Tishe !
071 Victor Kossakovski
Belovy 072 Victor Kossakovski Vivan las Antipodas 073 Jafar Panahi Ceci n’est pas un film 074 Pierre Perrault La Bête lumineuse 075 Eric Rohmer Contes des quatre saisons 076 Eric Rohmer Comédies et proverbes 077 Eric Rohmer Six contes moraux 078 Eric Rohmer L’Intégrale 079 Spiros Stathoulopoulos Meteora 080 Les films autobiographiques de Dominique Cabrera 081 Edgar Reitz Heimat : Chronique d’un rêve – L’exode 082 Yann Gonzalez Les Rencontres d’après minuit 083 Hubert Viel Artémis cœur d’artichaut 084 Lars Von Trier Nymphomaniac Vol. 1
085 Jean Epstein
Poèmes bretons
086 Jean Epstein
Première vague
087 Jean Epstein
Coffret
088 Jia Zhangke
A Touch of Sin
089 Lars Von Trier
Nymphomaniac Vol. 2
090 Eric Rohmer
Ma nuit chez Maud
091 Shirley Clarke
The Connection & Portrait of Jason 092 Arnaud Des Pallières Poussières d’Amérique 093 Kelly Reichardt Night Moves 094 Gleb Panfilov / Inna Tchourikova Coffret 095 Michael Tully Ping Pong Summer 096 Mikhaïl Kalatozov Coffret 097 Werner Herzog Aguirre, la colère de Dieu 098 Werner Herzog Coffret Vol. 1 099 Jake Paltrow Young Ones 100 Lars Von Trier Nymphomaniac 101 Lars Von Trier Nymphomaniac Director’s Cut 102 Dieudo Hamadi Examen d’État 103 Alan Clarke Rita, Sue & Bob too
104 Tony Gatlif
Geronimo
105 Blaise Harrison
Armand15 ans l’été + L’Harmonie 106 Werner Herzog Coffret Vol. 2 107 Ossama Mohammed Eau argentée 108 Alex Ross Perry Listen Up Philip 109 Werner Herzog Les Ascensions
110 Kenneth Anger
The Magick Lantern Cycle 111 Asaf Korman Chelli 112 Agnès Troublé Je m’appelle hmmm 113 Bent Hamer 1001 grammes 114 Werner Herzog Coffret Vol. 3 115 Werner Herzog Fitzcarraldo 116 Nicolas Roeg Enquête sur une passion 117 Nicolas Roeg Ne vous retournez pas 118 Nicolas Roeg Coffret 119 Rabah Ameur-Zaïmeche Wesh wesh, qu’est-ce qui se passe? 120 Rabah Ameur-Zaïmeche Histoire de Judas 121 Alex Ross Perry Queen of Earth 122 Edgar Reitz Heimat 1, une chronique allemande
123 Sylvain George
Newsreels expérimentaux 124 Joaquim Pinto Le Chant d’une île 125 Sylvain George Des figures de guerre 1 126 Alex Van Warmerdam La Peau de Bax 127 Nicolas Roeg L’Homme qui venait d’ailleurs 128 Jack Clayton Les Innocents 129 Hubert Viel Les Filles au Moyen Âge 130 Lucile Hadzihalilovic Evolution 131 Lucile Hadzihalilovic Coffret Evolution Innocence 132 Roy Andersson Nous, les vivants 133 Roy Andersson Chansons du deuxième étage 134 Roy Andersson A Swedish Love Story
135 Roy Andersson Coffret 136 Grigori Tchoukhraï Coffret 137 Harmony Korine Trash Humpers 138 Krzysztof Kieslowski Le Décalogue 139 Mauro Herce Dead Slow Ahead 140 Collectif Les Scotcheuses 141 Franco Piavoli Il Planeta Azzurro & Nostos : Il Ritorno 142 Franco Piavoli Voci nel Tempo & Primo Soffio di Vento 143 Larissa Chepitko Elem Klimov Coffret 144 Werner Herzog Salt & Fire 145 Jean Eustache Une Sale Histoire
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CHRONIQUELITTéraire
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Comme on l’entendrait de nos jours dans une célèbre émission culturelle : « la Voix sait combien il est difficile pour un réalisateur d’adapter au cinéma un grand classique de la littérature. Et la Voix sait aussi combien il est difficile
ensuite pour le public de départager les deux œuvres. Kubrick a transposé au cinéma Lolita, le roman sulfureux, érotique (et pédophile ?) de Vladimir Nabokov. A-t-il honoré ou trahi l’esprit du livre ? C’est l’heure de la révélation ».
GIW
journal étudiant Gémiens
Vladimir Nabokov
LOLITA
Dans les années 60, Stanley Kubrick se lance dans l’adaptation du roman Lolita de Vladimir Nabokov au cinéma. Il est conscient qu’il devra habilement manier la caméra s’il ne veut pas qu’en ressorte un mauvais film, mi-malsain mi-érotique…
©DR
LOLITA c’est une histoire d’amour et de sexe entre un beau-père et une gamine. Lolita, douze ans, jolie, aguicheuse, insolente. Une « nymphette » comme l’appelle son amant, entre la Nymphe et la nymphomane, libre au lecteur de choisir son camp. Vous allez me dire : « QUOI ? Comment peut-on lire cinq cents pages (pour certains, la question s’arrête ici…) qui traitent d’inceste et de pédophilie ? ». C’est ici que commence notre comparaison. LOLITA c’est un récit interne. En passant par le Google traduction de la littérature, cela signifie que le récit est narré du point de vue de Humbert Humbert, le beau-père amoureux, et c’est notamment sur cette intériorité que repose la force du roman : plongé au cœur des tourmentes de l’amant, le lecteur prend de plein fouet la violence des sentiments du personnage pour sa belle-fille. Des sentiments passionnés, des sentiments purs, car à aucun moment dans le livre on ne décèle chez le héros une once de pensée ou de plaisir pédophile, mais aussi un
profond sentiment de culpabilité. Le roman se veut être, sous la plume de Nabokov, la longue confession d’un amant qui se blâme, déchiré entre sa passion pour une enfant et son dégoût envers lui-même. Si on ne peut aller jusqu’à dire que leur amour devient acceptable, ou même compréhensible, on ne peut nier que le lecteur soit touché par cette histoire. Cette intériorité, et particulièrement ce mélange omniprésent d’amour, de culpabilité et d’obsession, est ce qui manque principalement au film de Kubrick. Le réalisateur ne parvient pas en effet à retranscrire le déchirement interne du héros. Aussi, l’amour qui lie le beau-père à la jeune fille est moins visible, moins tangible, moins bouleversant, ce qui rend leur relation beaucoup plus dérangeante. On ne peut néanmoins ôter à Kubrick la grande subtilité dont il a su faire preuve, en préférant un cinéma de suggestion (au moment des scènes sexuelles par exemple) à un cinéma d’exposition, faisant ainsi honneur à l’écriture elle aussi suggestive de l’auteur.
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LOLITA c’est un récit interne comme je le disais. Aussi, Lolita est comme transcendée, non seulement par cette passion tellement adulte (que l’on peine donc à envisager sous l’angle d’une relation adulte-adolescent), mais aussi et surtout par le regard que porte sur elle le narrateur : elle est objet de désir, un fantasme, l’idéal inaccessible de la femme fatale (il suffit de lire la description qu’Humbert donne de ses jambes pour frôler la crise de jalousie). Nabokov parvient ainsi à faire oublier à son lecteur que la fille du récit est une enfant : si son langage, ses attitudes, la description de son corps évoquent sa jeunesse, elle apparaît comme trop désirée et désirable pour être imaginée comme une petite-fille. Cette transcendance ne s’opère pas dans le film de Kubrick, en dépit de quelques rares gros-plans qui substituent habilement la femme à l’enfant. C’est à la fois par-là que le film pèche, et par-là qu’il trouve sa force : le spectateur ne peut plus échapper à la réalité, Lolita a douze ans, elle porte un appareil dentaire, de petites tresses ATYPEEK MAG #02
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sur le côté et s’habille en écolière. La présence de l’actrice à l’écran empêche l’oubli confortable de son âge que permet la lecture et rend aux scènes d’amour tout leur caractère choquant. En bref, ce qu’il faut retenir : selon moi, le film de Kubrick, quoique respectueux de la trame du roman et du style épuré et subtil de l’auteur, a le mérite de mettre en valeur des aspects de l’histoire parfois secondaires ou simplement esquissés dans le livre. Kubrick, en mettant des images sur les mots, illustre davantage le caractère scandaleux de cette relation amoureuse, là où le roman oscille perpétuellement entre
son côté malsain et son étrange beauté. C’est véritablement la confrontation entre le roman et son adaptation cinématographique qui permet de prendre pleinement conscience de ces deux aspects et de se forger une opinion nuancée des personnages. Au final, on ne sait qui ou quoi condamner. L’écrivain comme le cinéaste font le choix de la neutralité et n’apportent donc aucun jugement moral sur la nature de cette histoire : est-ce une histoire d’amour malheureuse, choquante mais belle ; est-ce un récit trash de pédophilie ? Doit-on condamner le narrateur ou le prendre en pitié ? Lolita est-elle coupable ou
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victime ? La fin du livre comme la fin du film est ce qui traduit pour moi le mieux l’ambiguïté de cette histoire d’amour. [ATTENTION SPOILER] : la mort tragique des deux personnages est-elle une punition ou au contraire la réunion des deux amants par la mort, comme ce fut le cas pour Roméo et Juliette ? Traduit-elle l’incapacité de l’auteur lui-même à rendre son verdict ? Dommage, vous ne le saurez jamais car ceci n’est pas le sujet de mon article. Lisez, visionnez, tranchez. À bientôt pour en débattre.
GIW
journal étudiant Gémiens
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PAR HAZAM
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La scène indépendante en images
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Droite : Welldone Dumboyz
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Droite : Lunatic Toys https://www.facebook.com/LunaticToys-150945381599950/
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L’ÉQUIPE ATYPEEK MAG
MÉDIAS PART
ATYPEE LéA vINCE Rubriqueuse vidéo pour Atypeek Mag à mes heures perdues du mardi soir. je suis là pour faire vous faire découvrir mes vidéos coups de cœur du moment.
Maxime Lachaud Journaliste, essayiste, programmateur, auteur de plusieurs ouvrages, dont deux grosses anthologies sur le cinéma de redneck et sur les mondo movies, Maxime Lachaud se passionne pour les cultures sombres et délicieusement subversives. On peut notamment écouter ses méfaits depuis une quinzaine d’années dans l’émission radio Douche Froide.
Jonathan Allirand Un surdosage d’artistes barrés, un excès d’albums audacieux, voilà ce que je souhaite partager au sein de mes chroniques et interviews dans les pages décalées de l’Atypeek Mag.
JÉRÔME TRANCHANT Autodidacte passionné de cinéma j’ai plaisir à partager mes coups de cœur et chroniques.
Olivier Cheravola Co rédacteur en chef de SURL le jour, DJ et MC la nuit. L’homme au curriculum vite fait. Sujet, verbe et compliment. La biture avec une plume. Lyon.
AAARG !
LA SPIRALE
AAARG ! Mensuel : magazine de bande dessinée & de culture(s) populaire(s) disponible en kiosque ou chez votre libraire préféré.e !
Mutations / Underground / Gonzo / Cyberpunk / Nomadisme / Freaks / Finance / Chaos / Activisme / Robots / Prospective / Résistance / Fantastique
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FLORE CHERRY Journaliste, blogueuse et organisatrice d’événements dans le milieu de l’érotisme, Flore Cherry est une jeune fille qui parle de sexe sans complexe (et avec une pincée d’humour, pour que ça glisse mieux...)
HAZAM Je suis petit, moche, gros, vieux et con mais je ne me prends pas pour de la merde. Et éventuellement j’écris des chroniques de disques et je prends des photos.
Robin Ono Collecteur de fonds, à NewRetroWave Écrivain, à Metal Obs’ Magazine. Contributor/Writer, à Two Guys Metal reviews. Études : Sound Engineering/ Music Production à ESRA
Silence AND Sound Webzine dédié aux musiques actuelles.
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Dig It! Dig It ! est embringué dans le Garage Punk au sens très large, ça se lit et ça s’écoute !!!
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ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO Léa Vince - Juan Marcos Aubert - Jonathan Allirand - Roland Torres - Maxime Lachaud - Hazam - Fisto (Olivier Cheravola) - Oli - CF Aleksandr Lézy - Antoine Gary - Pierrick Starsky - Valentin Blanchot - Arnaud Verchère - Robin Ono - Laurent Coureau - Alain R. Flore Cherry - Mika Pusse - Jérôme Tranchant - Ira Benfatto… et les journalistes des médias partenaires. Contact : cf@atypeekmusic.fr
AL’TARBA © DR
JOURNALISTES &
PARTENAI
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TENAIRES
EK MAG Siècle Digital
SCORE A/V
KIBLIND
STAR WAX
SURL
Siècle Digital est déjà un média de référence pour les professionnels du numérique. Siècle Digital a vocation d’être un des référents du domaine.
Du rock, du hard, du pas hard du tout, de l’indé, de l’electronica, du classique même et des bollocks (surtout). En clair : un zine digital qu’il est bien.
Une zone en chantier, convoquant l’art d’aujourd’hui pour comprendre ce qu’il sera demain et provoquant l’émulation par le mélange et le partage.
Star Wax, le magazine Français N°1 gratuit pour les DJs, Diggers, Beatmakers et amateurs de musique. Depuis 2006.
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Média online sur la culture hip-hop aspire à proposer une expérience complète, collective et excitante autour de la culture hip-hop avec une exigence et une curiosité inédites en France.
XSILENCE
GIW
chromatique
XSilence est un site sur le rock indé, ou rock indépendant, et plus précisément, un webzine communautaire sur le rock indépendant.
Le Gem In Way est édité par les membres de l’association Xpression, l’association de journalisme et de littérature de Grenoble École de Management. Chaque mois, ce sont 500 exemplaires d’une cinquantaine de pages qui sont distribués.
Webzine des musiques progressives, complexes, innovantes et inclassables.
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Le VDC, fédère une communauté de créatifs qui échangent, partagent et coconstruisent des projets. Cette synergie favorise les passerelles entre la mode et le design.
EXIT MUSIK
Chroniques de sorties récentes et d’albums marquants, Live Reports, News, Interviews, Photos, Playlists...
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Indie Rock Mag
UNION
W-FENEC
CITIZEN JAZZ
Indie rock, pop, folk, noise, drone, ambient, électronica, IDM, hip-hop, metal, jazz... toutes les bonnes musiques sont sur IRM.
Le plus ancien des magazines de charme. Au programme : le courrier des lecteurs, bonnes adresses, rubriques conseil, ...
Mag digital indépendant pop rock metal indus branché sur courant alternatif.
Premier magazine de jazz en ligne : Le jazz a sa tribune. Un sommaire complet entretiens, articles, chroniques de disques, photo reportages, et playlist reflétant l’actualité du jazz en France.
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IRES
LE VILLAGE DES Créateurs
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Magazine trimestriel collaboratif réalisé à l’initiative d’Atypeek Music
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ATYPEEK MAG TRIMESTRIEL COLLABORATIF D’ACTUALITÉS GÉNÉRALES
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Janv. Fév. Mar. 2017
PROCHAIN NUMéro 30 JUIN 2017 www.atypeek.fr Rejoignez-nous sur notre www.facebook.com/ Atypeek
REMERCIEMENTS Léa Vince - Juan Marcos Aubert - Jonathan Allirand - Roland Torres - Maxime Lachaud - Hazam - Fisto (Olivier Cheravola) - Oli - CF - Aleksandr Lézy - Antoine Gary - Pierrick Starsky - Valentin Blanchot - Arnaud Verchère - Robin Ono - Laurent Coureau - Alain R. - Flore Cherry - Mika Pusse - Jérôme Tranchant - Ira Benfatto… et les journalistes des médias partenaires. Contact : cf@atypeekmusic.fr
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