Bulletin d’information des CLI de la Manche Hors série - Décembre 2013
L’industrie nucléaire et le risque de cancers dans le département de la Manche
I ntroduction Le Nord-Cotentin concentre quatre sites nucléaires de nature et de risques potentiels très différents : la Centrale de Flamanville (où un troisième réacteur est en construction, l’EPR), l’Établissement AREVA de La Hague dont la fonction est de traiter les combustibles nucléaires usés pour séparer les déchets ultimes des matières valorisables et les conditionner, le Centre de stockage de la Manche dédié au stockage des déchets radioactifs de faible et moyenne activité (fermé en 1994 et en phase de surveillance depuis 2003) et l’Arsenal de Cherbourg, spécialisé dans la construction et la maintenance des sous-marins nucléaires. Suite à la polémique déclenchée par des publications scientifiques posant l’hypothèse d’un agrégat de leucémies de l’enfant en lien avec la proximité de l’usine de retraitement des combustibles usés1, deux missions d’expertise pluridisciplinaire pour l’étude radioécologique et pour la partie épidémiologique initiées par les ministères de l’environnement et de la santé ont été mises en œuvre par le Groupe Radioécologie Nord-Cotentin (GRNC) avec l’appui de l’IPSN2, et par l’unité de recherche INSERM U2923 en collaboration avec le registre général des cancers de la Manche. Après reconstitution des expositions, à partir des concentrations de radioactivité dans l’environnement et détermination des modes de vie, le GRNC a estimé la dose à la moelle osseuse et en a déduit le risque de leucémies radio-induit dans une population fictive de moins de 25 ans vivant dans le canton de Beaumont-Hague entre 1978 et 1996. Le nombre total de cas attribuables à l’ensemble des sources d’exposition aux rayonnements ionisants est de 0,84 cas dont 0,62 cas imputables aux sources naturelles, 0,20 cas aux pratiques médicales, 0,012 cas à l’accident de Tchernobyl et aux essais militaires atmosphériques, et 0,002 cas aux rejets des installations nucléaires locales. Ce nombre de cas théoriquement attribuable aux installations nucléaires locales est 1 000 fois plus faible que les deux cas en excès à expliquer (écart entre les 4 cas réellement observés et les 2 cas attendus dans cette population). Le GRNC concluait alors que l’incidence élevée de leucémies observée chez les jeunes, vivant à proximité de l’usine AREVA-La Hague ne pouvait pas être attribuée à la dose de rayonnement liée aux installations nucléaires locales4.
Sommaire ■ Missions des registres des cancers couvrant la population de la Manche
p. 2
■ La gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire p. 5 ■ Les indicateurs de base de la surveillance épidémiologique des cancers p. 6 ■ Comparaison de l’incidence des cancers dans la Manche et en France p. 8 ■ Cartographie de l’incidence des cancers dans la Manche (période 1999-2010) p. 8
1. Pobel D, Viel JF. Br Med J. (1997) 314: 101-106. Statistics in medicine (1995) 14 : 2459-2472. 2. IPSN : Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire, ancienne appellation de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN). 3. INSERM : Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale. 4. Estimation des niveaux d’exposition aux rayonnements ionisants et des risques de leucémies associés de populations du Nord-Cotentin – GRNC, IPSN, (1999). Fontenay-aux-Roses, France. Laurier D, Rommens C et al. Revue d’Épidémiologie et de Santé Publique (2000) 48 : 2S24-2S36 Laurier D, Rommens C et al. Revue d’Épidémiologie et de Santé Publique (2000) 48 : 2S24-2S36
Cet article est un document de synthèse d’une publication scientifique beaucoup plus détaillée que le lecteur intéressé pourra trouver sur le site des CLI de la Manche.