Foi 34 - Le Bon Vin de Cana

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Revue trimestrielle FOI N°34 - Septembre - Octobre - Novembre 2012 - 5€

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ité Revue éd


VIE Sommaire

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Editorial du Père Laurent FABRE Dossier

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Le bon vin de Cana

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Œcuménisme

14 • Pasteur A. Birmelé : Eclairage protestant sur la “présence réelle” 16 • Lecture du « Magnificat » par Martin Luther 18 • Prière

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Formation Chrétienne

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Jeunes

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Vie de la Communauté

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Jeune Talent

20 • Bible : En rentrée avec un personnage biblique 22 • Prière : Une icône pour prier en famille 24 • Témoignage : Maladie psychique et vie spirituelle

26 • Se loger à la rentrée ! 28 • Coloc pour Jésus - Témoignages

30 • Zaragoza... chronique d’un appel en Espagne 32 • Semaine “communautaire” paroissiale 34 • Nouvelles - Photos de Trévi et de Kinshasa

35 • Baptiste Plantin

La revue FOI (Fraternité Œcuménique Internationale) est publiée par la Communauté du Chemin Neuf-10 rue Henri IV-69287 Lyon cedex 02 Directeur de la publication : P. Laurent Fabre Directeur délégué : Jean-Charles Paté, Rédactrice en chef : Pascale Paté, Comité de rédaction : Franck Démaret, Blandine Lagrut, P. François Lestang, Véronique Pilet, Adam Strojny, Marion Tissot Création graphique : Annick Vermot (06 98 61 98 76), Crédit photos : Couv. : CCN / Dossier : CCN / Archives CIRIC / Fotolia : angelo.gi, Andres Rodriguez, kasiap, herreneck, Eisenhans, Chlorophylle, niakc10, Patrizia Tilly Abonnement : Marie-Thérèse Subtil, Nicole Zébrowski, Gestion-Administration : AME, Réalisation : Sandrine Laroche, Impression : IML - 69850, St Martin en Haut - Tirage sur papier issu de forêts gérées durablement, certifié PEFC, Dépôt légal : décembre 2010, CPPAP : 0310 G 83338, ISSN : 1770-5436

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Editorial

“L

e 1er octobre 1973, la Communauté du Chemin Neuf est née sur la colline de Fourvière au 49 Montée du Chemin Neuf entre la Cathédrale et l’Archevêché, pas loin du Théâtre Romain. Dans ces lieux marqués par le sang des martyrs (Saint Pothin et Sainte Blandine et beaucoup d’autres) ou par le souvenir de certains grands Saints et Pères de l’Eglise comme Saint Irénée, pas loin de la Passerelle Paul Couturier, prophète de la cause de l’Unité des chrétiens, une petite communauté nouvelle a vu le jour et a grandi, avec ses joies et ses peines, ses défaites et ses victoires.

Le Père Laurent FaBRE Fondateur et responsable de la Communauté du Chemin Neuf

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Chaque mois, une vidéo est réalisée, traduite et envoyée dans plus de 72 pays à travers le monde. Un réseau de prière est créé, c’est la Fraternité Œcuménique Internationale NET FOR GOD.

Après quarante ans, je ne sais pas si on a encore le droit de se dire « communauté nouvelle ». Par contre, il faut bien reconnaître que notre communauté vit toujours, à bien des égards, quelque chose de la nouveauté de ce troisième millénaire. Que cela soit au niveau de la mixité, de la communion des états de vie, au niveau de la place des femmes dans l’Eglise, de la responsabilité des laïcs et des couples ou de l’engagement œcuménique, notre communauté reste encore très « nouvelle et presqu’étrange » parmi les autres communautés d’Eglise, plus anciennes ou plus récentes. Bref il me semble que nous portons assez bien encore le nom de notre rue : Chemin Neuf. Parfois, en me réjouissant de tant de fruits apostoliques des Sessions Cana dans 40 pays ou des nombreuses missions auprès des jeunes, ou en m’attristant devant les nombreuses et graves épreuves concernant d’autres communautés nouvelles, je me demande comment il se fait que nous ayons été épargnés ou, en quelque sorte, protégés. Je pense parfois au témoignage de cette esclave Blandine, notre jeune voisine d’il y a 1835 ans, comme si le sang de nos martyrs de Lyon nous protégeait. En fait, l’autre et véritable adresse de notre communauté est 20, Montée du Gourguillon. Une explication du nom de cette autre montée est que le sang abondant des martyrs, « Gurges sanguinis », des premiers chrétiens, coulait du Théâtre Romain au bas de la colline. Jeune esclave, Blandine a été martyrisée à Lyon sous Marc-Aurèle en 177 avec une quarantaine d’autres chrétiens de Lyon et de Vienne parmi lesquels saint Pothin, évêque de Lyon, et bien d’autres. Leur martyr a été relaté par des témoins oculaires qui ont rédigé une « Lettre des Eglises de Lyon et de Vienne » adressée aux Eglises de Phrygie et d’Asie et retranscrite au IVème siècle par Eusèbe dans son Histoire ecclésiastique. Il s’agit ainsi d’événements d’une historicité sûre. Blandine fait preuve d’un courage extraordinaire qui conduit certains de ses compagnons qui avaient renié leur foi sous la torture à se rétracter et à souffrir en martyrs. Livrée aux bourreaux qui avouent n’avoir jamais vu femme souffrir si courageusement, elle se borne à répéter : “Je suis chrétienne ; il ne se fait point de mal parmi nous”. Je crois à la communion des saints. »

Père Laurent Fabre.

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Le

BON VIN

de CANA 6

VIVRE LE QUOTIDIEN

Kévin et Agnès Laï de Hong Kong

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PRIER ENSEMBLE

Alexander et Olga Chukanov

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SE RÉCONCILIER

Anna et William Mwesigye

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ÊTRE APPELÉS

Fabienne et Renaud Michaille

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dossier

« Heureux les couples qui découvrent dans la tendresse, dans le pardon de Dieu, qu’ils sont tous deux comme un pauvre devant un autre pauvre. » Père Laurent Fabre

Ce film vous emmène à Gainazzo, en Italie du Nord, pour découvrir la beauté de l’œuvre de Dieu dans les sessions “Cana”, une œuvre d’évangélisation pour les couples et les familles, animée par la Communauté du Chemin Neuf. En effet, c’est par trois sessions vécues en France dans les années 80, que la mission Cana prend corps et se propage à travers le monde, touchant des églises de toutes confessions chrétiennes. Aujourd’hui, Cana est répandu dans 40 pays des cinq continents ; des milliers de couples et familles ont vécu cette session et ont vu leur vie transformée par le Christ pauvre et humble. A Gainazzo, à l’occasion de la Journée mondiale des Familles, 65 couples responsables de Cana dans 34 pays, catholiques, anglicans, réformés, luthériens, évangéliques et orthodoxes, sont réunis pour vivre ensemble une nouvelle Pentecôte. Des témoignages bouleversants ! Ces couples ont découvert en accueillant la puissance du pardon de Dieu, la source de leur unité et de leur joie à être missionnaires. FOI • N°34 • Septembre - Octobre - Novembre 2012

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4ème Rencontre Internationale de CANA

Le bon vin de CANA

« Voici le témoignage de six couples ayant vécu une session Cana dans des pays aussi différents que la Chine, la Russie, la Lettonie, l’Ouganda, l’Italie et la France. Pourtant leur langage et leur expérience sont universels. « Ce qui est essentiel dans nos vies nous est commun. » La vie du couple, avec ses joies et ses difficultés, a besoin de replonger aux sources de l’Amour.

« Changer l’eau du quotidien en vin de noces » la télévision ou dormait. Parfois, je m’énervais contre lui. »

Kévin et Agnès Laï de Hong Kong, République populaire de Chine « Nous nous sommes rencontrés de façon miraculeuse. Mais après notre mariage, les dix premières années ont vraiment été très difficiles pour nous deux. » Agnès : « On vivait ensemble tous les jours, mais il y avait un vide entre nous. Kévin avait l’habitude de regarder la télévision. Cela lui prenait tout son temps de présence à la maison. Moi, je travaillais à l’extérieur, mon travail m’occupait beaucoup et j’étais aussi maman. Quand j’étais à la maison, les enfants jouaient seuls et mon mari regardait

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Kevin : « Nous aspirions à améliorer notre relation dans le mariage. Mais nous ne savions pas comment faire. Jusqu’à l’année dernière où j’ai vu une annonce pour la session Cana. Il était écrit : “C’est l’occasion pour Dieu le Créateur d’aider les couples à sortir de leur routine quotidienne et à changer l’eau de leur quotidien en un vin de noces”. Les mots eau et vin me frappèrent. C’était ce que nous vivions dans notre mariage : de l’eau. Parfois, il y avait des vagues, parfois c’était plus calme. Nous n’avions pas le temps de nous asseoir ensemble, de nous rencontrer en profondeur ou de communiquer. » NFG : C’est ainsi qu’après vingt ans de mariage, Agnès et Kevin vivent, avec d’autres couples, six jours de session Cana, en juillet 2011 à Hong Kong. A cette époque, Agnès est mère au


dossier

Repas de fête, Cana Hong Kong, Juillet 2011

foyer avec leurs deux enfants ; Kevin travaille à plein temps, au service du diocèse catholique de Hong Kong. Kevin : « Pendant cette semaine, j’ai vécu pour la première fois une expérience personnelle de l’Esprit Saint. » NFG : En effet, dès le deuxième jour de la session, l’exercice proposé est d’écrire une lettre à son conjoint. Chacun est invité à partager ce qui lui apporte le plus de bonheur dans son mariage. Kevin : « Donc, sans hésitations, j’ai écrit que ce qui m’apportait le plus de bonheur dans mon mariage, c’était d’avoir Agnès comme épouse qui prend soin de mes deux fils afin que je puisse consacrer le plus de temps possible à mon travail pour le diocèse, pour l’Eglise, ce qui est très significatif. Quand je lui ai donné ma lettre et que nous avons partagé, elle m’a dit : “Ton bonheur est exactement le lieu de ma souffrance depuis vingt ans de mariage”. A ce moment-là, je me suis

senti coupable de ne pas la connaître, sur ce point, depuis vingt ans. Ce que je pensais être le plus grand bonheur était exactement le lieu de sa souffrance. Pourquoi ? » NFG : Agnès et Kevin Laï sont aujourd’hui à Hong Kong membres de la mission Cana, une œuvre d’évangélisation pour les couples et familles, animée par la Communauté du Chemin Neuf depuis 1980, une communauté catholique dont la vocation est de prier et de travailler pour l’unité des chrétiens. En effet, c’est par trois sessions vécues en France dans les années 80, que la mission Cana prend corps et se propage à travers le monde, touchant des églises de toutes confessions chrétiennes.

Flyer de la session Cana qui a eu lieu à Hong Kong en Juillet 2011

Aujourd’hui, Cana est répandu dans 40 pays des cinq continents, des milliers de couples et familles ont vécu cette session, et ont vu leur vie transformée par le Christ. >>> suite p. 8

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Jihad et Claudine Nasr, Liban

Départ pour Milan

Milan 2012

Stephanie et Alan Richardson, Grande Bretragne

Laurent et Corinne Bohoussou, Côte d’Ivoire

Journée Mondiale de la famille Du 30 mai au 3 juin 2012, la ville de Milan a ouvert ses portes à des centaines de milliers de familles venues de 154 pays. C’est au parc de Bresso qu’elles se rassemblent autour de Benoît XVI, pape de l’Eglise catholique romaine.

Benoît XVI , Samedi 2 juin 2012 à Milan : « Dans le rite du mariage, l’Eglise ne dit pas : “Es-tu amoureux ?”, mais “Veux-tu ?”, “Es-tu décidé ?”. Autrement dit, le fait d’être amoureux doit se transformer en “aimer vraiment”, entraînant ainsi la volonté et la raison dans un cheminement. Je pense souvent aux noces de Cana. Le premier vin est très bon : c’est le moment où l’on tombe amoureux. Mais cela ne dure pas jusqu’à la fin : il faut un deuxième vin ; que le premier vin fermente, grandisse et mûrisse, il faut un amour définitif qui devienne réellement un deuxième vin, plus beau, meilleur que le premier. Et c’est cela que nous devons chercher. »

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dossier « Notre cœur s’est ouvert ! » sais à Dieu en disant : “Seigneur, fais en sorte qu’il se comporte autrement avec moi”. » Alexander : « Et moi, je disais : “Seigneur, aide-moi à me calmer car ma femme me met en colère”. »

NFG : Alexander et Olga Chukanov sont responsables de la mission Cana à Moscou, en Russie. Olga : « Au début de notre relation, nous n’avions aucun problème, nous étions un couple harmonieux. Nos premiers problèmes sont apparus avec la naissance de notre premier enfant - c’était comme une crise. Il y avait des étincelles entre nous. C’était devenu si pénible d’être ensemble. Alexander : « Nous avions conscience que neuf couples sur dix divorcent parce qu’ils ne se supportent plus. Nous étions dans une situation similaire mais nous ne voulions pas divorcer. Mais, comment faire ? » NFG : C’est en voyant une affiche pour la session Cana dans leur Eglise orthodoxe Saints Côme et Damien à Moscou, qu’ils choisissent de prendre du temps ensemble, en couple. Ayant deux enfants, ils vivent la session Cana en février 2010.

Olga : « On a confessé ce qui était difficile à dire, puis notre cœur s’est ouvert. J’ai pu prier avec mes propres mots, c’était une prière qui venait du cœur. Pour la première fois, j’ai senti que Dieu est entré dans mon cœur, c’était une première rencontre avec Lui. J’ai senti mon cœur s’agrandir. Le jour où des démarches de réconciliation étaient proposées, nous avons déposé le poids de toutes ces tensions, ces petits reproches que nous avions l’un envers l’autre. On peut toujours continuer à les déposer et à les remettre à Dieu simplement.Tout cela s’est passé grâce au fait qu’on s’est senti profondément pardonnés. NFG : Le Père Laurent Fabre, Fondateur et responsable de la Communauté du Chemin Neuf, et trois couples de différentes confessions chrétiennes ont bâti dans la prière et la réflexion pendant une année la toute première session Cana (en 1980 aux Pothières, France).

P. Laurent Fabre : « S’il y a quelque chose qui est essentiel dans le monde, c’est l’amour. L’amour est ce qu’il y a de plus important. Quand vous serez partis, il restera quelque chose de vous si vous avez aimé. Le reste disparaîtra. C’est l’amour que vous aurez donné qui restera. Vous devez être des prophètes de l’amour conjugal, des prophètes de la famille. Et c’est capital pour notre monde. On a eu cette image au début des sessions Cana : celle d’une grande ville comme New York qui subit une panne d’électricité. Peu à peu, tous les foyers s’éteignent, il n’y avait plus de lumière. Eh bien, notre monde est en train de vivre une immense panne d’électricité ; les foyers s’éteignent, il n’y a plus de lumière, les couples se divisent et c’est une catastrophe ! Donc le trésor que nous portons, c’est cette lumière de la famille. Vous savez bien que dans la Genèse, se trouvent les paroles qui disent tout : “Homme et Femme Il les créa, à son image, Il les créa.” Vous êtes, si vous vous aimez, l’image de Dieu sur terre. Un homme et une femme qui s’aiment vraiment, c’est une image de Dieu sur terre. Alors, ça vaut la peine de se réconcilier pour retrouver la lumière. »

Alexander : « Des miracles se produisaient quotidiennement pendant la session. Un jour, on s’est assis l’un à côté de l’autre dans les bois, et on a prié Dieu ensemble. On lui a confié nos problèmes et on lui a dit ce qu’on espérait recevoir de Lui. » Olga : « On ne savait pas comment prier ensemble. Au début, je m’adres-

P. Laurent Fabre

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Le mystère du couple... Anna et William Mwesigye, Equipe Cana en Ouganda Anna : « Nous avons dix enfants aujourd’hui, qui ne sont pas nos propres enfants ; la plupart d’entre eux sont orphelins. Nous-mêmes n’avons pas pu avoir d’enfants, et cela est un grand déshonneur dans notre culture africaine. En Afrique, quand vous êtes mariés, la première chose qu’on veut voir c’est un enfant. Nos familles nous donnaient des conseils : ils ont même essayé de nous séparer. Cela a engendré beaucoup de tensions entre nous, vraiment beaucoup de tensions. William : « Beaucoup de tierces personnes parlaient à notre sujet. Du coup, nous vivions des “combats”. Anna me disait : “Peut-être que c’est toi qui as un problème”, avec des arrière-pensées. Mais à travers la session Cana, pendant le temps de dialogue ensemble, nous avons dû mettre “cartes sur table”, et nous nous sommes dit : “Ce mariage est pour nous deux, et non pas pour les membres de la famille”. Et on s’est tout pardonné. » Anna : « Au fur et à mesure de notre partage, nous avons été amenés à partager les blessures intérieures que nous avons eues à cause des frictions entre nous. Et nous avons pu nous pardonner l’un à l’autre. Grâce à

un dialogue continuel, nous sommes capables de tout nous dire et de lâcher prise. » Père Laurent Fabre : « Jésus a dit devant tous ses disciples : “Heureux les pauvres”. Eh bien, heureux les couples qui découvrent dans la tendresse, dans la miséricorde, qu’ils sont tous deux comme un pauvre devant un autre pauvre. Une session Cana bien vécue, c’est comme un pauvre qui découvre à quel point il aime et à quel point il a besoin de cet autre pauvre. C’est le mystère du couple. Le Christ, quand il est présent dans un couple, sauve le couple. C’est le Sauveur du couple ! S’il y a quelqu’un qui est maître dans l’amour, c’est le Christ. » Aldo et Elena Rabellino, d’Italie Responsables de la mission Cana International depuis 2004. Aldo : « La vie quotidienne, quelquefois c’est lourd. On a toujours la même chose à faire, on va au travail, on est à la maison… Donc on se dit : “Mais où est l’Amour de Dieu ? Où intervient-il ?” Mais l’Esprit Saint nous montre la vie du Christ. Et la vie du Christ, ce n’est pas simplement

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« Heureux les couples qui découvrent dans la tendresse, dans la miséricorde, qu’ils sont tous deux comme un pauvre devant un autre pauvre. » trois ans de vie publique, il y a dix fois plus, trente ans de vie cachée. Ce sont trente années de vie ordinaire. Et c’est là que l’Esprit Saint transforme l’ordinaire en extraordinaire. » Elena : « En effet, les chrétiens ont ce secret : ils savent vivre l’ordinaire et le remplir d’amour parce qu’ils l’ont appris du Christ. »

Photo à gauche : Aldo et Elena Rabellino et le P. Christophe Blin


dossier La réconciliation des Eglises P. Laurent Fabre : « C’est une grande chance pour nous de sentir que depuis le début de Cana, il y a cette dimension de réconciliation des Eglises. Et ensemble, nous cheminons pour travailler pour la famille. Entre parenthèses, dans le monde, donnez-moi une institution qui lutte vraiment pour la famille. En Afrique, en Asie, en Europe, partout dans le monde, l’Eglise est comme le rempart qui protège la famille. » Rinalds Grants, pasteur de l’Eglise luthérienne - Riga - Lettonie. « Ce que nous vivons particulièrement dans ce rassemblement, c’est de voir l’Eglise du Christ dans sa grandeur et sa diversité. En même temps, nous goûtons que nous sommes tous remplis d’un seul Esprit et que les choses les plus importantes dans notre vie sont les mêmes pour tous. Je suis touché ici par l’attitude respecteuse envers nos différences. Malheureusement encore et toujours le Corps du Christ est blessé dans ce monde, et ce sont des blessures douloureuses. Mais nous pouvons avoir un respect envers nos différences. J’ai l‘impression que si nous voulons nous mettre plus haut que les autres,

nous ne faisons qu’aggraver les blessures du Corps du Christ. Les lieux où nous pouvons nous réunir pour que les familles de différentes Eglises puissent être guéries et les lieux où nous prions pour nos différents pays tous ensemble sont des petits signes d’espérance qui nous disent que Dieu guérit ce corps. » Ieva Grants : « Pour moi, c’est une révélation : aucune confession ne peut mettre la main sur une personne de la Trinité. La Trinité est l’essentiel pour nous tous. C’est Elle qui nous unit. » John Baguma, Equipe Cana en Ouganda : « Voir que différentes confessions chrétiennes prient le Seigneur tous ensemble, dans l’unité, m’a surpris parce qu’en Ouganda, il y a une grande diversité d’églises, et de nombreux conflits entre elles. Je suis catholique et je travaille dans une institution qui est principalement anglicane. A Cana, nous prions pour l’unité des chrétiens. Je n’avais aucun espoir qu’un jour nous pourrions prier tous ensemble, comme ce que j’ai vu faire ici. Cela m’a énormément touché. Le chemin qui est à prendre pour moi maintenant est de faire le

Rinalds et Ieva Grants, Lettonie

John Baguma, Ouganda

premier pas : aller vers mes frères de manière plus compréhensive, prier davantage pour cette unité, afin que nous puissions avoir un moment de prière ensemble.

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Renaud et Fabienne Michaille et leurs filles, France

L’appel du couple Père Christophe Blin, de France Equipe internationale Cana : « A quoi suis-je appelé ? A quoi notre couple est-il appelé ? L’appel, c’est pour tous. Si Dieu vous a mis ensemble, homme et femme, c’est pour un projet. Alors, quel est votre appel comme couple ? Quelle est la terre spirituelle dans laquelle vous allez être plantés ? » NFG : Au début des années 2000, Fabienne et Renaud font personnellement la rencontre du Christ. Répondant à son appel, ils cheminent avec la Communauté du Chemin Neuf en étant au service d’une paroisse dans la région parisienne. C’est alors qu’en 2003, le patron de l’entreprise où travaille Renaud lui propose une promotion assez gratifiante, mais elle implique un déménagement pour la famille, qui à cette époque attend un troisième enfant.

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Renaud Michaille, Equipe Cana France : « Découvrir l’amour de Dieu, c’est une chose ; lui remettre toutes les parties de ma vie, je n’étais pas prêt à franchir ce pas. Il y a une part de ma vie que je n’étais pas prêt à remettre au Seigneur. J’étais vraiment très fier que mon patron m’ait proposé cette promotion. Quand j’ai annoncé ce qui pour moi était une grande nouvelle, j’ai été accueilli avec beaucoup de distance et de silence. »

« L’appel, c’est pour tous. Si Dieu vous a mis ensemble, homme et femme, c’est pour un projet. »

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Fabienne : « Pour moi, ce n’était pas du tout envisageable, parce qu’on avait commencé ce cheminement communautaire. J’avais donc envie de rester dans un lieu où il y avait la Communauté. Et en plus, j’aimais évangéliser. Ce n’était donc pas envisageable pour moi. » Renaud : « Il faut dire que c’était le vendredi soir et il fallait que je donne une réponse à mon patron lundi matin. » Fabienne : « Et qu’est-ce qu’il t’a dit ton patron ? » Renaud : « Il m’a dit : “Si vous n’acceptez pas, vous êtes ‘condamné’ dans mon entreprise. Donc c’est vrai que ça mettait un peu la pression ! Fabienne m’a tout de suite dit qu’il fallait remettre au Seigneur cette décision qui engageait toute notre famille et pas seulement moi. »


dossier NFG : C’est alors que Fabienne et Renaud se retirent pour prier mais chacun de leur côté, dans des lieux séparés. Renaud : « J’ai laissé Fabienne partir devant, parce que j’avais du mal à me dire que la réponse que j’allais donner le lundi matin, j’allais la recevoir en allant prier avec des frères et en ouvrant ma bible. J’avais beaucoup de résistances. » Fabienne : « De mon côté, j’ai prié avec la Bible et je suis tombée sur un verset du psaume 137 : “Comment chanterions-nous les cantiques du Seigneur sur une terre étrangère ?” Et devinez le verset que Renaud a reçu au même moment ? » Renaud : « Le même ! “Comment chanterions-nous les cantiques du Seigneur sur une terre étrangère ?” » Fabienne : « C’est incroyable. Donc pour moi, c’était très clair. Le Seigneur nous disait : “La terre où je vous appelle, c’est la terre de la Communauté.” Et chanter les cantiques du Seigneur, pour moi c’était vraiment l’annoncer.

Donc partir sur une terre étrangère, c’était ne plus pouvoir chanter les merveilles de Dieu. Selon moi, le Seigneur nous disait : “Non, il faut refuser cette proposition”. »

« Au fond, le secret de l’amour, c’est donner sa vie pour celui qu’on aime. » Renaud : « J’ai essayé de faire une interprétation toute personnelle de ce texte en me disant qu’il y aurait peutêtre une porte de sortie favorable pour moi, mais manifestement, cela n’a pas marché !... J’ai senti malgré tout qu’il y avait une grande paix dans notre couple. Le Seigneur a dû travailler très profondément en moi pour me faire aussi comprendre qu’il y avait un enjeu qui dépassait ma simple carrière professionnelle : un enjeu de couple, un enjeu familial, et aussi un enjeu de proximité avec Lui. » Père Laurent Fabre : « Au fond, le secret de l’amour, c’est donner sa vie pour celui qu’on aime. Voilà ce que tous les couples ont besoin de réapprendre sans cesse : l’amour, c’est donner sa vie. Et quand moi, en tant que prêtre, il m’arrive de célébretr un mariage, je suis très ému quand j’entends cette phrase magnifique : “Je me donne à toi pour toujours”.

L’Evangile de Cana Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était. Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples. Or, il n’y avait plus de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont plus de vin. » Jésus lui dit : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore arrivée. » Sa mère dit aux servants : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » Or il y avait six jarres de pierre, destinées aux purifications des Juifs, et contenant chacune deux ou trois mesures. Jésus leur dit : « Remplissez d’eau ces jarres. » Ils les remplirent jusqu’au bord. Il leur dit : « Puisez maintenant et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent. Lorsque le maître du repas eut goûté l’eau changée en vin - et il ne savait pas d’où il venait, tandis que les servants le savaient, eux qui avaient puisé l’eau - le maître du repas appelle le marié et lui dit : « Tout homme sert d’abord le bon vin, et, quand les gens sont ivres, le moins bon. Toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à présent ! » Tel fut le premier des signes de Jésus, il l’accomplit à Cana de Galilée et il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui.

Jean 2, 1-11

Je me dis : “Au fond, si c’est vrai ce qu’ils disent le jour de leur mariage, s’ils le vivent vraiment, heureux sont les enfants dont les parents ont fait une alliance définitive, radicale, non pas grâce à leur force, mais grâce à la présence du Christ au milieu d’eux”. »

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œcumén

VIE

œ

œcuménisme

Eclairage protestant

La “présence réelle” Lors du Colloque sur « Le Repas du Seigneur » à Bose en Italie en mai 2012, le pasteur luthérien André Birmelé est intervenu sur « Le sens et non-sens de l’expression ‘présence réelle’ ». Quelle est la foi eucharistique des Eglises marquées par la Réforme ? Finalement, croient-ils à la présence réelle ? La refusentils en s’opposant à sa compréhension physiciste ? Nous remercions l’auteur de pouvoir reprendre un extrait de sa conférence.

André BIRMELE

Doyen honoraire de la Faculté Protestante, Université de Strasbourg, Foi et Constitution, COE.

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Sainte Cène - Pentecôte 2009 à Tigery

« La présence du Christ lors de la célébration de la Cène est soulignée par toutes les Eglises marquées par la Réforme. Affirmer la présence réelle signifie que les croyants communiant au pain et au vin de la cène ont, dans ce repas, part au corps et au sang du Christ qui les met au bénéfice du salut. Cette affirmation doit être distinguée de tout malentendu physiciste qui identifierait directement l’hostie au corps et le vin au sang du Christ. Ces Eglises insistent sur le fait que la présence réelle est à comprendre dans un sens plus large et concerne l’ensemble de la célébration. Cette compréhension plus large de la présence eucharistique du Christ n’entraîne pas la relativisation, et certainement pas la négation du lien étroit de cette présence aux éléments. Elle permet au contraire de la préciser dans un cadre plus serein qui n’est plus prison-

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« Ces Eglises insistent sur le fait que la présence réelle est à comprendre dans un sens plus large et concerne l’ensemble de la célébration. » nier des vieux débats passionnés ayant marqué les relations entre les traditions réformatrices. Christ lui-même se donne avec le pain et le vin. La participation même à ce repas est inscription dans la communion avec Dieu et dans la communion des croyants. Dans et par cette célébration Christ advient aujourd’hui au milieu des siens. C’est là le sens étymologique de la notion de consubstantiation, un terme que les réformateurs n’utilisaient pas


nismeœcuménisme

œcuménisme

œcuménisme

mais qui sera ultérieurement courant dans les Eglises de la Réforme. Luther et son ami Melanchthon utilisaient l’image du fer incandescent. On ne saurait séparer le fer du feu et pourtant les deux demeurent deux réalités. Cette image a souvent été utilisée par les Pères de l’Eglise qui l’appliquaient cependant en premier lieu à l’union en Jésus-Christ du divin et de l’humain. Se référant aux Pères orientaux, les Eglises orthodoxes ont toujours repris cette image pour exprimer à la fois l’union du divin et de l’humain en Christ et la présence du Christ dans les éléments de la Cène, les deux unions relevant d’une même intention théologique. La mise en avant d’une compréhension plus large de la présence réelle permit, après de longues années de dialogues, de parvenir à un accord fondamental qu’illustrent les termes de la Concorde de Leuenberg (CL) qui établit en 1973 la communion entre les luthériens et les réformés en Europe* : Dans la Cène, Jésus-Christ, le ressuscité, s’offre lui-même, en son corps et en son sang donnés pour tous, par la promesse de sa parole avec le pain et le vin. Il nous accorde ainsi le pardon des péchés et nous libère pour une vie nouvelle dans la foi. Il renouvelle notre assurance d’être membres de son corps. Il nous fortifie pour le service des humains. Nous ne saurions dissocier la communion avec Jésus-Christ en son corps et en son sang de l’acte de manger et de boire. Toute considération du mode de présence du Christ dans la Cène qui serait détachée de cet acte risque d’obscurcir le sens de la Cène. (CL 15 et CL 19) Cette conviction commune ne réduit pas la présence réelle à une présence simplement symbolique. Le Christ crucifié et ressuscité se donne effectivement avec les éléments et fait ainsi participer les croyants à son règne. Cette présence n’est pas le fruit de la foi ou de la subjectivité du récipiendaire mais l’accomplissement de la promesse de la Parole du Christ. Il se donne avec les éléments à tous les participants, aux croyants de la recevoir dans la foi en vue de leur salut.

Sainte Cène - Sablonceaux 2010

Pour signifier leur compréhension de la présence réelle du Christ dans la célébration de ce repas, les Eglises marquées par la Réforme insistent aujourd’hui davantage sur l’anamnèse et l’épiclèse. Tout comme la prédication de la parole, la cène est anamnèse, mémorial de la mort du Christ à la lumière de la foi du matin de Pâques. Ce mémorial est étroitement lié à la demande de la pré-

« Nous ne saurions dissocier la communion avec Jésus-Christ en son corps et en son sang de l’acte de manger et de boire. » Concorde de Leuenberg, 19 sence du Christ par l’Esprit Saint qui accomplit, ici et maintenant, la promesse donnée dans les paroles d’institution. Anamnèse et épiclèse sont à la fois expressions de la présence du Christ et actions de grâce de la communauté célébrante qui loue Dieu pour son œuvre salvatrice et pour ce repas qui est, en ce temps, signe du royaume de Dieu à venir. Cette insistance sur l’anamnèse délocalise la question de la présence réelle du Christ des seuls éléments que sont le pain et le vin. L’anamnèse rend réellement présent ce dont on fait mémoire. L’histoire passée, celle du Christ, devient notre histoire. Les croyants sont invités à participer à une réalité dont ils ne disposent pas, qui leur est extérieure et qui précède leur foi. Cette réalité est la mort et la résurrection du Christ au profit de tous. Il faut ajouter que, ce faisant, les Eglises luthériennes et réfor-

mées se démarquent aujourd’hui nettement de l’option de Zwingli pour lequel les sacrements étaient des moments de confirmation de la foi, Christ se donnant aux siens par la seule parole proclamée. Cette option demeure très présente dans les milieux des Eglises dites libres (mouvance baptiste, pentecôtiste ou mennonite) avec lesquelles le dialogue sur cette question demeure délicat. » Vers la fin de sa conférence, en se référant aux fruits des dialogues œcuméniques et de l’évolution au sein de chacune des familles ecclésiales (catholicisme compris), André Birmelé formule trois conclusions : « - le débat du XVIème siècle fut dominé par des schèmes de pensée qui ont été faussement absolutisés et érigés en barrières infranchissables. L’évolution théologique de toutes les Eglises permet aujourd’hui une certaine distance vis-à-vis de ce débat. - les essais d’explication mis en avant au XVIème siècle ne voulaient finalement servir qu’une seule cause : affirmer le mystère de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie, un souci commun à tous. - l’affirmation de la présence réelle n’est pas à centrer sur le mode de la présence mais sur la finalité de cette dernière : le don du Christ aux siens en son sang et son corps dans le pain et le vin par la puissance de l’Esprit Saint. » v * La Concorde de Leuenberg est reproduites dans : Accords et dialogues œcuméniques bilatéraux, multilatéraux, français, européens et internationaux. Ed. par A. Birmelé et J. Terme, Lyon, Olivétan, 2007 (CD ROM).

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Lecture du « Magnificat » par Martin Luther

Dans le « Magnificat » Marie chante le Salut Quel était le regard de Martin Luther sur Marie ? Pourquoi la « bienheureuse mère de Dieu » reste un sujet difficile dans les débats théologiques et les partages dans la foi que nous pouvons avoir entre chrétiens de différentes Eglises ? Anne-Cathy Graber reprend le commentaire de Martin Luther sur le Magnificat de Marie pour nous aider à reconnaitre les enjeux de la « question mariale », notamment le point fondamental du salut.

Anne-Cathy GRABER,

CCN, Membre du Groupe des Dombes, Pasteur itinérant, Eglise Evangélique Mennonite.

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Le commentaire de Martin Luther sur le Magnificat (1520-1521), rédigé dans une des périodes les plus tourmentées de sa vie, est destiné au jeune neveu du prince Frédéric le Sage, appelé à devenir son successeur. Dans sa dédicace, Luther expose la grandeur et les risques de l’exercice de l’autorité. Il dénonce la démesure comme la plus grande menace du cœur humain. Elle a en effet pour conséquence d’engendrer une fausse sécurité conduisant à l’oubli de Dieu et au mépris des subordonnés, ce qui produit une déshumanisation en transformant celui qui gouverne en animal. C’est la raison pour laquelle il propose à la méditation du prince le Magnificat : « Je ne connais rien dans toute l’Ecriture, qui soit aussi utile à cet effet que ce saint cantique de la bienheureuse mère de Dieu.1 » Le thème central du commentaire est l’opposition entre l’œuvre de Dieu et l’œuvre de l’être humain. L’un (l’humain) ne fait que regarder vers le haut, tandis que l’Autre (Dieu) n’a pas peur de regarder vers le bas, vers ce dont on se détourne : ils sont en complète opposition (« à contresens » répète Luther) Le Réformateur ne cesse de rappeler que l’accueil du salut et des biens est l’enjeu fondamental de la vie du croyant. C’est donc à partir de ce point névralgique que Marie est qualifiée d’exemple, parfaite destinataire de l’œuvre de Dieu, parce qu’elle ne s’attribue rien à elle-même mais désigne Dieu,

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« Marie se dépouille elle-même et rapporte tout uniquement à Dieu dont elle a tout reçu. Elle n’a pas été davantage qu’un gîte joyeux. » par la foi, comme seule origine du don : « [Marie] se dépouille elle-même et rapporte tout uniquement à Dieu dont elle a tout reçu. […] Elle n’a pas été davantage qu’un gîte joyeux et une hôtesse disponible pour un tel visiteur 2 » ou encore, donnant la parole à Marie : « Je suis seulement l’atelier dans lequel il travaille ; mais je n’ai pas contribué à l’œuvre ; c’est pourquoi, personne ne doit non plus me louer ou me donner l’honneur de ce que je suis devenue mère de Dieu3. »


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L’acte de réception des biens est considéré comme l’enjeu fondamental de la vie du croyant car c’est là que se dévoilent de manière particulière le péché (l’orgueil, l’appropriation, l’amour de soi) ou la résistance au péché (la reconnaissance du Donateur par la louange). Il y a certes une passivité du recevoir soulignée constamment par Luther, mais une passivité qui est créatrice, notamment par la louange. Face à la grandeur du don (celui d’être « Mère de Dieu »), la réponse de Marie par la louange est si ajustée à Dieu que Luther y voit un miracle aussi important que l’Incarnation elle-même ! C’est là que se situe la pureté de Marie : elle agit comme si elle ne voyait pas la grandeur et l’honneur qui lui sont conférés.

devant Dieu et loin au-dessous de Dieu ; là, il la dépouillera et contemplera son néant (comme elle dit)4. » Comprenons bien ce que Luther veut dire. Pour lui, renoncer à contempler une personne particulière indépendamment de l’action de Dieu en elle, est alors la possibilité pour le croyant de vraiment croire que cette œuvre de Dieu est réalisable aussi en lui-même.

Pour Luther, honorer Marie n’est envisageable que sous la forme d’une reconnaissance de la relation personnelle établie entre Dieu et elle, ce qui a pour conséquence l’impossibilité de la considérer autrement que face à Dieu (coram Deo), dans la position type du croyant : « Ainsi, quiconque veut l’honorer droitement, doit renoncer à la placer seule devant ses yeux, mais il doit la placer

L’enjeu, pour Luther, est qu’à aucun moment l’on ne transfère sur Marie ce qui appartient à Christ. Son souci est que l’on ne confonde pas l’action de Marie avec celle de Dieu, ce qui l’amènera à dire : « Car autant on attribue de mérite et de dignité à Marie, autant on lèse la grâce divine et on diminue la vérité du Magnificat 5 » ou encore « Marie ne donne rien ; Dieu seul donne 6. »

L’enjeu, pour Luther, est qu’à aucun moment l’on ne transfère sur Marie ce qui appartient à Christ.

A ce stade de la lecture, le lecteur catholique pourrait sursauter et s’interroger. Luther ne limite-t-il pas indûment les effets du salut dans l’homme ? Le salut par grâce transforme-t-il vraiment l’être humain au point de susciter coopération et médiation ? C’est alors que l’on comprend combien ces thèmes sont à clarifier entre nos différentes familles ecclésiales ! Mais il nous faut faire un bond dans le temps et passer du XVIème au XXème siècle pour entendre la question du Cardinal Walter Kasper qui résume bien ce que nous avons à clarifier entre nos églises : « l’Eglise (mais on peut entendre aussi « Marie ») est-elle sanctifiée de manière à devenir elle-même sujet sanctifiant ? » C’est aussi une invitation pour le lecteur à relire la Déclaration Commune sur la Justification entre l’Eglise catholique romaine et la Fédération Luthérienne Mondiale (1999). Ainsi constate-t-on combien la « question mariale » n’est pas un thème marginal ou périphérique de l’histoire du salut. Réfléchir sur Marie ne consiste pas à parler d’elle exclusivement ! Ce que résume le cardinal Ratzinger écrivant en 1981 : « La mariologie ne peut jamais être simplement mariologique, mais se tient dans la totalité de l’ensemble fondamental formé par le Christ et l’Eglise ; elle est l’expression la plus concrète de cet ensemble7. » Il nous faut laisser la « question mariale » exercer une fonction transversale qui interpelle, affecte et déplace les articulations entre les différents champs de la théologie (ecclésiologie-sotériologie, anthropologie-christologie,…). v 1 - LUTHER Martin, Commentaire du Magnificat, Genève-Paris, Labor et Fides-Nouvelle Cité, trad. A. Greiner, 2ème édition, 1983, p. 28 2 - Ibid., p. 54-55 3 - Ibid., p. 100 4 - Ibid., p. 86 5 - Ibid., p. 85-86 6 - Ibid., p. 97 7 - Cardinal RATZINGER, Marie, première Eglise, Paris, Apostolat des éditions, 1981, p. 32

Icône de la visitation, Centre Marie de Nazareth

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Le maître du repas dit au marié : « Tout homme sert d’abord le bon vin et quand les gens sont ivres, le moins bon. Toi, tu as gardé le meilleur jusqu’à maintenant ! » Jean 2, 10

Dieu de la vie Dieu de la vie, Tu renouvelles ce matin Ton souffle sur terre, Nous te louons, Et qu’aujourd’hui ta création Renaisse par le Saint Esprit. Dieu du salut, Tu renouvelles ce matin Pour nous ta tendresse, Nous te louons, Si notre cœur est humilié Tu es plus grand que notre cœur. Dieu de l’amour, Tu renouvelles ce matin En nous ton alliance. Nous te louons, Rends-nous fidèles à te servir A mettre nos pas dans les tiens. CD Chants d’assemblée n°11

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Bible : Evangile de Jean

En rentrée avec un personnage biblique Après l’été, une nouvelle année scolaire s’ouvre... Même si l’on n’est plus scolarisé, c’est pour beaucoup un rythme qui reprend après la période des vacances et avec bien des réalités qui nous rattrapent. Alors, pour aborder ce fameux mois de septembre, je vous propose de regarder, d’accueillir, de découvrir un personnage du Nouveau Testament qui surgit dans le premier chapitre de l’Evangile de Jean.

Corinne Charriau, ccn

Pasteur de l’Église réformée de France.

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Oh, il n’est pas le plus connu des disciples ! Peu de choses ont été écrites à son sujet dans la Bible ! Il n’est pas la figure du disciple qui est la plus mise en avant ! Ce n’est pas à lui que l’on pense en premier !... Alors prenez d’autant plus le temps de lire ces quelques versets du début de l’Evangile de Jean en vous laissant attirer par ce personnage secondaire : André, même si plein de choses se bousculent et se télescopent en période de rentrée dans votre tête et votre cœur : 35- Le lendemain, Jean était de nouveau là, avec deux de ses disciples. 36Quand il vit Jésus passer, il dit : « Voici l’Agneau de Dieu ! » 37- Les deux disciples de Jean entendirent ces paroles, et ils suivirent Jésus. 38- Jésus se retourna, il vit qu’ils le suivaient et leur demanda : « Que cherchez-vous ? » Ils lui dirent : « Où demeures-tu, Rabbi ? » — Ce mot signifie « Maître ». — 39- Il leur répondit : « Venez, et vous verrez. » Ils allèrent donc et virent où il demeurait, et ils passèrent le reste de ce jour avec lui. Il était alors environ quatre heures de l’après-midi. 40- L’un des deux qui avaient entendu les paroles de Jean et avaient suivi Jésus, était André, le frère de Simon Pierre. 41- La première personne que rencontra André fut son frère Simon ; il lui dit : « Nous avons trouvé le Messie. » — Ce mot signifie « Christ ». — 42- Et il conduisit Simon auprès de Jésus. (Jean 1, 35-42 Version Segond révisée)

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Intéressante cette figure d’André dans ce passage de l’Évangile de Jean ! En effet, arrêtons-nous simplement à ce qu’il fait et ce qu’il dit. André entend Jean et il suit Jésus. Après avoir été disciple de Jean, André devient disciple de Jésus. Que se passe-t-il alors ? Là, André va trouver son propre frère Simon et lui dit qu’il a « trouvé le Messie ». Il se met en route. Notez au passage que nous n’avons aucune réaction verbale de Pierre qui nous est transmise ! Pas de réaction de Pierre mise en récit mais un « André » qui amène son frère à Jésus ! Une courte phrase, seulement quelques mots pour rendre compte d’un moment clef : « Et il conduisit Simon auprès de Jésus. » Nous aussi, c’est avec cette figure d’André que nous pouvons nous mettre en route. Pour cela, je proposerais deux mots :

André, un disciple de l’Audace C’est une belle figure du disciple que celle d’André ! Il a été voir où Jésus demeurait et, en fin de compte, il est resté demeurer auprès de Lui. Et c’est cet André-là qui parvient à dire « Nous avons trouvé le Messie », et qui du coup, amène un autre que lui-même auprès de Jésus. J’aime à penser que la figure d’André est comme une figure de l’audace. En effet, hier comme aujourd’hui, ce n’est pas si facile que cela de témoigner de cette rencontre de Dieu, de cette ren-


ion chrétienne ion chrétienne formation contre de Jésus le Christ, surtout auprès des siens, dans sa famille, auprès de certains amis ou de ses collègues. Alors je trouve André assez audacieux.

Quels sont les mots avec lesquels nous témoignons de notre foi dans le Christ, dans celui qui ouvre à la vie pour toujours auprès de Dieu ?

Cette parole est dite à un autre, qu’elle circule et se communique. Qu’en est-il pour nous au sujet du « dire de sa foi » ?

André est un relais pour amener un autre, ici son frère, auprès de Jésus. Qu’en est-il pour chacun de nous ? Amener à Jésus aujourd’hui, que cela peut-il signifier ? Ce pourrait être rendre compte à un autre que soi-même de cette place irréductible que Dieu offre à chacun et chacune près de Lui, par le Christ.

D’ailleurs, il trouve même le Messie avant Pierre, lui que l’on a l’habitude de voir au premier plan, souvent « porteparole » du groupe des disciples… Oui, cette figure du disciple n’est donc pas sans relief dans cet épisode.

André, un disciple du Relais Il est un relais qui témoigne en disant « Nous avons trouvé le Messie ». Nous pouvons entendre dans ce pluriel, dans ce « nous », une trace de la foi de l’église primitive bien sûr ; mais je voudrais retenir que cette parole est dite à un autre, qu’elle circule et se communique. Qu’en est-il pour chacun de nous au sujet du « dire de sa foi » ?

Ainsi, dans ce temps de la rentrée, avec cette figure d’André, je vous invite à être des disciples de l’audace et du relais par le témoignage de votre foi, dans votre vie quotidienne. Bien sûr, il s’agit d’abord pour nous-mêmes d’accueillir au plus intime de notre être, le Christ vivant, Parole de Dieu. Car c’est de là, ainsi renouvelés et avec d’autres, dans un « nous » dans lequel nous sommes insérés, que nous serons porteurs de Bonne Nouvelle et que nous confesserons avec d’autres « Nous avons trouvé le Messie » ! Ici ce sont les mots d’André pour dire sa foi... n’hésitez pas à trouver les vôtres ! v

Biographie 5 septembre 1832 : Naissance d’Alcide Lataste à Cadillac (Gironde). Le jeune homme travaille comme contrôleur des impôts à Privas, Pau et Nérac et participe aux Conférences de Vincent de Paul. 4 novembre 1857 : il entre au noviciat dominicain de Flavigny 1860 : expèrience mystique à St Maximin, à l’occasion du transfert des reliques de Ste Marie-Madeleine . Se former à l’i.t.d. 8 février 1863 : il est ordonné prêtre et résidedeauThéologie couventdes de Dombes Bordeaux. L’Institut a été septembre 1864 : envoyé prêfondé en 2001 par lail est communauté du Chemin Neuf. Il propose, en partenariat cher une retraite aux détenues de la avec prisonlade Faculté Cadillac. de Théologie de l’Université Catholique de Lyon (UCLy) été 1865 : il est en nommé Père-maître une formation Ecriture Sainte, théologie, accord de a des frèresphilosophie. étudiants auUncouvent également Flavigny. été signé avec la Faculté de Théologie Protestante de l’Université de mars 1866 : il publie une brochure Strasbourg (UdS). Les réhabilitées. Les cours sont avec donnés l’Abbaye 14 août 1866 : l’aideà de Mère Notre-Dame des Dombes à proximité Henri-Dominique, il fonde la maison de Lyon et de Bourg-en-Bresse. Confié à Montferrand àde laBéthanie communauté du Chemin (Doubs). Neuf, ce haut lieu 1868 : de prière d’œcuménisme Carême il estetatteint de pneupermet aux participants d’allier l’étude, monie et meurt le 10 mars 1869 la prière et la vie fraternelle. Week-ends proposés au 1er trimestre : Philosophie. « Du dialogue à la dialectique : (re)découvrir avec Platon ce que c’est que penser. » 20-21 0ctobre, Jean-Noël Dumont, professeur de philosophie, Collège Supérieur, Lyon . Histoire. « Les relations Eglise-Etat en France et en Angleterre à partir du XIXème siècle. 17-18 Novembre, Tim Watson, Professeur d’Histoire de l’Eglise. Exégèse. « Le chapitre 1er de l’évangile de Luc : commencements d’une “heureuse annonce” ». 15-16 Décembre, Anne Pénicaud, Faculté de Théologie UCLy Renseignements et inscriptions : Tél : +33 (0)4 74 98 33 67 itd@chemin-neuf.org en ligne : www.chemin-neuf.fr

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Vie spirituelle : la prière en famille

Une icône

pour prier en Famille Prier en famille est toujours un challenge, qui nécessite quelques supports. Stéphane Ancel, responsable avec son épouse des sessions « Cana Famille », commente cette icône écrite par Kaspar et Ruta Poïkans et encourage à prier avec elle. Il donne ainsi des pistes essentielles pour la vie spirituelle de la famille.

Stéphane ANCEL, ccn

Marié et père de famille.

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Nous pouvons admirer en famille cette icône composée de neuf images et de personnes de l’Ancien, du Nouveau Testament et de saints, signes de la présence de Dieu dans nos vies. C’est comme un vitrail avec plein de couleurs, mais aussi comme une « bande dessinée » avec des histoires que nous avons lues ou écoutées. L’icône captive notre attention et nous aide à faire silence. En priant avec toutes ces familles représentées, et en contemplant les évènements qui les traversent, nous pouvons prendre conscience de notre vocation à devenir une « petite église domestique ». Et de plus, nous entrons dans la joie de la communion avec toutes les familles qui nous ont précédés.

Notre regard peut se concentrer sur une des images. En bas de l’icône, l’histoire de la réconciliation entre Joseph et ses frères : cette image nous rappelle qu’il faut chercher avec persévérance l’amour et la vérité au sein de la famille et vivre du pardon entre époux, entre parents et enfants, entre frères et sœurs : c’est le ciment de notre famille.

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C’est aussi un appel, car se réconcilier en famille n’est jamais simple. En effet, nous avons pu vivre le pardon avec d’autres personnes extérieures à notre famille, mais qu’en est-il chez nous et entre nous ? Le pardon, c’est l’expérience fondamentale de l’Amour de Dieu qui permet notre unité et fait de nous une famille chrétienne vivante et rayonnante. On le voit avec les visages radieux des personnages. Dieu peut nous conduire dans nos désirs et nos démarches de pardon, comme il a été présent avec Joseph et ses frères. Au centre, la Sainte Famille, avec Jésus accompagné par Marie et Joseph dans ses premiers pas. C’est le mystère caché de Nazareth : la vie de famille toute simple, qui se déroule au fil des jours. Au premier regard, on voit Marie et Joseph tenir chacun une main de Jésus. Mais après coup, on s’aperçoit aussi que Jésus semble guider et « faire avancer » ses parents, comme au moment de leurs retrouvailles au Temple, parmi les docteurs de la Loi. On peut imaginer la qualité des relations entre chaque membre de cette Famille : Marie et Joseph habités par Dieu et Jésus, Dieu lui-même. Jésus a été enfant et a pu grandir en sagesse chaque jour, à Nazareth dans cette famille. On se rend compte que la vie de famille, Dieu la connaît très bien. Il nous est vraiment proche.


ion chrétienne ion chrétienne formation dant ce temps de prière. Nous pouvons confier à Dieu chacun de nos enfants, et aussi nous offrir à Dieu dans notre rôle de parents. A droite, nous pouvons regarder comment Dieu est en relation avec tout homme, petit et grand. Ces images nous rappellent que chaque enfant, chacun de nos enfants est en relation directe avec Dieu et que cela ne passe pas forcément par nous. Dieu appelle Samuel, Jésus sauve la fille de Jaïre, l’Esprit Saint inspire à Tarcisius un courage immense jusqu’au martyre pour sauver le pain consacré, corps de Jésus.

Cette icône est aussi un appel à la contemplation du quotidien : se réjouir d’être ensemble et rendre grâce pour tout ce qui se prépare en secret dans notre famille.

dans notre famille, et ce qui est dit dans la Bible et écrit sur cette icône. Nous pouvons L’inviter dans notre maison, dans tout ce que nous allons vivre, pour la semaine ou l’année prochaine.

En haut, les trois visiteurs d’Abraham et Sarah, signes dans l’Ancien Testament de la Sainte Trinité et de sa fécondité au cœur de nos familles, de nos limites aussi... Au cœur de la famille, nous pouvons accueillir Dieu dans sa plénitude et son mystère : c’est un appel profond, depuis des générations et pour toujours.

A gauche, nous pouvons regarder trois scènes d’offrande. Des parents qui présentent leur enfant à Dieu et cela à travers les âges : Anne et Joachim, Marie et Joseph et les époux Martin, parents de Sainte Thérèse de l’enfant Jésus.

Abram et Sarai, la première famille à qui Dieu a été révélé, ont su quitter leur terre et accueillir l’inattendu. Nous pouvons rendre grâce pour le projet d’alliance de Dieu vis-à-vis de la famille. Nous pouvons faire le lien entre certains évènements que nous avons vécus, comme un pardon ou une guérison

Les trois images en haut de l’icône sont une représentation de la communion des Saints. On voit toutes ces auréoles briller, comme un rappel de notre vocation à la Sainteté. Nous pouvons prier avec des Saints qui se sont engagés particulièrement vis-à-vis des familles, comme Elisabeth de la Trinité. Elle a cherché à témoigner de la vie trinitaire en écrivant des lettres à ses proches, sœurs et mères de famille. Jean Paul II est aussi représenté : il a eu un engagement profond auprès des couples et des familles en tant que jeune prêtre et tout au long de son pontificat (cf. la théologie du corps qu’il a développée particulièrement dans l’encyclique Familiaris Consortio).

Nous tous parents, sommes invités à être saints, à prendre la place de parents confiants vis-à-vis de Dieu, Père de toute créature. Nous pouvons rendre grâce pour chacun de nos enfants, qui nous ont été confiés, rendre grâce pour leurs talents, leurs caractères, quelque chose qu’ils nous ont montré d’eux-même et qui nous a touchés et même le leur dire pen-

« On se rend compte que la vie de famille, Dieu la connaît très bien. Il nous est vraiment proche (...) Nous pouvons L’inviter dans notre maison, dans tout ce que nous allons vivre, pour la semaine ou l’année prochaine. »

Enfin, Sainte Thérèse de Lisieux et ses parents représentent une famille sainte du siècle dernier plus proche de nous. Nous pouvons être touchés par la spiritualité de la « petite voie ». C’est une invitation à réciter le « Notre Père » en famille, qui par ce « notre » fait de nous tous, parents et enfants, les enfants d’un même Père. v

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Témoignage : Maladie psychique et vie spirituelle

« Au creux du vertige...

une Présence ! » Du 14 au 16 juin s’est déroulé à Montagnieu le colloque Siloé sur le thème « Maladie psychique et vie spirituelle ». Psychiatre, psychothérapeute, philosophe, prêtre exorciste, aumônier en hôpitaux psychiatriques, directeur de structures d’accueil et artthérapeute, les intervenants nous ont partagé leurs convictions au service de l’homme et de tout l’homme. 230 participants de tous horizons ont vécu un très bon temps de communion et d’échanges, autour de ce thème délicat d’une juste articulation entre vie psychique et vie spirituelle dans le domaine de la psychiatrie.

Pasquale Bourgeois

Participante au Colloque Siloé.

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« Je n’ai guère de souvenir de ma petite enfance. La mort de mon père dans ma huitième année, a tout effacé. A ce moment- là, je perds tous mes repères. Ma mère doit travailler pour élever ses huit enfants. J’entre dans un isolement que vient accentuer terriblement plusieurs décès violents de mes “très proches” sur une très courte période. A cette même période, je subis des viols répétés accompagnés de paroles extrêmement avilissantes. Je désirais déjà être “blanche” pour être toute au Seigneur. Ma première communion avait été – et demeure – un des plus beaux jours de ma vie : de petites noces ! Ce jour-là, je désirais donner toute ma vie, toute mon âme, tout mon corps au Seigneur. Dans les deuils et les viols je me murais dans le silence, je perdais toute trace de moi-même, psychologiquement coupée du plus essentiel, du plus intime de moimême, de mon désir. J’entrais alors dans un fonctionnement de survie, dans une souffrance mentale de plus en plus infernale, mais silencieuse. Seul mon fonctionnement boulimique apparaissait à l’extérieur et était l’objet d’une consultation médicale. Mais, à cette époque, on ne parlait pas psychologie. Ce qui devait être une aide m’entraînerait dès les jours suivants dans un fonctionnement de plus en plus caché, pervers, et des somatisations d’une violence toujours plus grande.

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Mais au creux de ce vertige, il y avait une Présence ! Celle qui était là dès ma naissance. Celle de ma première communion. Celle en qui, pour qui mon désir ne meurt pas. Cette Présence nourrie par l’Eucharistie, par la Parole de Dieu inlassablement lue et relue dans la Bible, et par une vie de dialogue avec « Lui ». J’ai l’impression d’être née dans ce dialogue. Je n’imaginais pas qu’il puisse y avoir un domaine de la vie, du plus matériel au plus immatériel, qui ne soit vécu en dialogue avec Dieu... Que ce soit de la lumière ou des ténèbres, du bien ou du mal, de l’apaisement ou de la souffrance, et jusqu’en mes hurlements intérieurs, Sa Parole était là, vivante, agissante. Je pense aujourd’hui au possédé de l’évangile de Marc que les siens ont essayé vainement de lier avec des chaînes pour le contenir… Et je me dis que le Seigneur avec sa Parole m’a liée à Lui bien plus puissamment qu’avec des chaînes ! Il m’a tenue, retenue, ramenée continuellement au port de sa Présence, de son désir de ma vie.

« Que ce soit de l’apaisement ou de la souffrance, et jusqu’en mes hurlements intérieurs, Sa Parole était là, vivante, agissante. »


ion chrétienne ion chrétienne formation Il y a des paroles qui sont venues continuellement habiter mes angoisses, mes blessures : “au-delà”, “malgré tout”, “l’espérance au-delà du désespoir”… Ainsi la parole d’Ezéchiel 36, 26 : « Alors, JE vous prendrai… JE vous ramènerai… JE répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés (...) JE vous donnerai un cœur nouveau, JE mettrai en vous un esprit nouveau J’ôterai de votre corps le cœur de pierre, et JE vous donnerai un cœur de chair. JE mettrai mon esprit en vous, et JE ferai que vous suiviez mes ordonnances, et que vous observiez et pratiquiez mes lois ». J’ai toujours été totalement impressionnée par ce « faire » de Dieu ! Coupée de moi-même, coupée des autres, j’étais de plus en plus dans l’incapacité même de vivre et je me dirigeais vers un délabrement intérieur total. Mais tout ce qui m’était impossible, LUI me le promettait ! Et l’Evangile ! Et Jésus, le Christ ! Venu sauver ce qui est perdu, allant chercher la brebis égarée, fixant son regard à l’intime du plus secret dans le silence de chacun ! Jésus ! Qui ouvre le regard, qui rend la parole, qui fait la vérité. Jésus ! Mieux encore !!! Jésus qui descend aux enfers ! Et ce cri dernier de l’Apocalypse « Viens, Seigneur Jésus ! » Je suis une histoire biblique. La Bible me révèle mon histoire dans sa réalité la plus entière. J’avais 27 ans lorsque j’ai fait une première tentative de suicide. Elle sera suivie de beaucoup d’autres. J’étais arrivée à un tel état de souffrance et d’épuisement que je n’en pouvais plus. J’ai vécu cinq années en hospitalisation psychiatrique. Traitements médicaux, électrochocs, isolement... Il n’était plus question que de « me maintenir en vie autant que possible ». Je pensais que j’étais « folle ». Mais qu’est-ce que la folie ? Je me condamnais moi-même. Mais Dieu était là, au-delà, malgré tout ! Je n’avais plus de mémoire, plus de mobilité, plus de vie sociale, affective…Et pourtant, pourtant ! D’autres étaient là. Ceux-là que j’appelle des « envoyés ». Jean-Claude Sagne, que j’avais connu

aux premiers temps du Renouveau, priait à mon chevet dans mes nuits de coma. Ma mère, à qui j’avais demandé de prier ensemble, car je ne savais plus. Nous disions les vêpres, nous nous attachions à la liturgie du jour. Et ces priants rencontrés dans les égarements de mon histoire. Tous ont été la voix de ce dialogue qui ne trouvait plus de mots en moi. La communion des saints ! Par-dessus tout, j’ai reçu la grâce de n’être jamais séparée de la communion.

Mandala peint par Pasquale Bourgeois

J’ai commencé à guérir par la parole. Dans mon premier coma, j’ai parlé, ce qui a fait bouger la pierre de mon silence ! Lorsque ma mère et un médecin psychiatre m’emmenèrent auprès d’une psychanalyste en disant : “Si vous pouvez la garder en vie entre deux hospitalisations”. Cette femme m’a accueillie non pas premièrement comme malade, mais comme être humain ! Elle m’a tendu la main. Réellement ! Elle m’a appelée par mon nom ! Je ne savais plus ce que c’était ! La route a été longue, difficile… J’ai d’abord fait tout un travail thérapeutique. Chaque outil m’a permis de faire un pas de plus, de me connaître, de me reconnaître. J’ai repris des activités artistiques, créatives. Celles-ci avaient déjà beaucoup de place dans ma vie. Mon premier acte autonome de guérison a été de faire… cuire un œuf ! Je ne savais plus rien faire et aussi je n’osais plus. Chaque geste de la vie courante représentait un effort immense, un risque ! Il s’avérait difficile de quitter les repères de la souffrance, d’un mode de survie, seul garant d’une mémoire oubliée. Recontacter une identité désirante et désirée est presque rendu insuppor-

table. Et je ne sais ce qu’il serait advenu de moi si je n’avais été intimement, essentiellement informée du désir de Dieu pour moi et de mon désir pour Lui. Puis j’ai fait un rapide passage en réinsertion professionnelle et la vie a repris sa quête. Depuis une quinzaine d’années je vis « normalement ». Que peut bien vouloir dire ce mot ? Socialisée, autonome, capable d’adaptation ! Plus aucune relation à la médecine psychiatrique, plus de médication en rapport. J’ai approfondi, par contre, tout ce qui pouvait nourrir la connaissance de moimême, de l’être humain, mais aussi ma vie spirituelle, vers l’écoute de la Parole de Dieu qui fonde mon être. Je ne suis pas indemne de mon histoire, des traumatismes vécus. Les conséquences sont là, dans ma vie d’aujourd’hui même si elle est délivrée de ses blessures. Ce parcours est devenu une richesse en ce qu’il s’est fait enseignant. Aujourd’hui, je reçois une grande joie d’en rendre grâce. “Oui, Viens Seigneur Jésus !” » v

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Se loger à la re Chez eux, chez moi ... ou entre nous ?

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ntrée Un désir bien légitime : « Etre chez soi » « Etre chez soi » : vivre dans un lieu qui nous soit propre et qui, d’une manière ou d’une autre, nous permette d’être nous-mêmes. Et ce n’est pas d’abord une question de mètres carrés ou d’ameublement, l’étudiant le sait bien. Ce n’est pas tant l’espace qui importe – l’appartement familial ou la mansarde du 5ème étage - mais la manière dont on va l’investir, les règles qu’on choisira de suivre, le « style de vie ». Pour celui qui poursuit des études, la question du logement concerne toutes les dimensions de l’existence : elle touche le rapport aux parents mais aussi la manière de se situer face aux conditions fixées par le monde pour « bien vivre ». Elle modifie les relations à travers la possibilité d’inviter ou d’accueillir. Bref, il ne s’agit pas seulement d’avoir un toit sur la tête et un lit pour dormir ! L’habitat est chargé de signification car il est l’espace de transition entre l’extériorité d’un monde - toujours trop vaste, et l’intimité de l’âme. La chambre : l’oratoire et le laboratoire Dans la maison familiale ou le foyer d’étudiant, il est un autre seuil, plus décisif encore, celui de la chambre. Virginia Woolf réclamait « une chambre à soi », c’est-à-dire une terre réservée, consacrée à la croissance de ce qui se passe à l’intérieur, dans l’invisible du cœur. A condition de garantir un minimum de solitude, la chambre est par excellence le lieu de l’étude, l’espace de la rêverie, de la création, de la prière. On dira qu’elle est à mi-chemin entre l’oratoire et le laboratoire. Le laboratoire parce que dans l’étude (labor en latin), c’est toute la person-

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nalité qui se découvre et s’affermit : les goûts, les talents, les faiblesses, les peurs. Dans l’intimité de la chambre, la gamme des désirs et des rêves qui travaillent souterrainement la vie se laisse enfin discerner. Les autres ne font plus écran, je peux enfin être en silence et, peut-être commencer à me comprendre. L’oratoire, parce que la chambre est la métaphore du cœur. En elle, le rapport à Dieu se construit : « Pour toi quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, et prie ton Père qui est là dans le secret. » Matthieu 6,6

nagères ? Comment gérer les dépenses communes ? Organiser une fête, mais jusqu’à quelle heure ? Il est conseillé de réserver une soirée dans la semaine où les « colocs » se retrouvent autour d’un repas. Outre le côté convivial on pourra, le cas échéant, « faire le point ».

L‘indépendance assagie de réalisme

Un dernier remède anti-naïveté, même si la formule peut sembler devenir habituelle, la colocation avec son copain/sa copine est d’abord un danger pour la relation elle-même : les choses précieuses requièrent un minimum de soin et d’attention, là encore, certaines étapes sont nécessaires.

Le temps des études coïncide aussi avec une réorganisation du rythme de vie. Pour ceux qui restent à la maison, il s’agit de s’entendre avec les parents sur la présence lors des repas, le rythme des sorties, la participation aux tâches de la maison. Ceux qui quittent le foyer familial devront ajuster la fréquence des retours à la maison. Un conseil aux étudiants : attention à l’effet « hôtellerie d’appoint » où vous passez comme un courant d’air, juste pour faire une lessive, en prenant à peine le temps d’un repas en famille… De l’indépendance oui, mais assagie de réalisme ! Habiter entre nous : Coloc’ ou foyer ? Et maintenant, comment faire le bon choix ? Evidemment, les possibilités financières des parents sont un élément déterminant. Il faut cependant éviter d’en faire le critère ultime : sous couvert d’économie, on risque de se rendre la vie impossible (par exemple : habiter en colocation avec de parfaits inconnus sous prétexte que le loyer est divisé d’autant, ou encore, loger à quatre dans un T3 en pensant que le dernier arrivé pourra bien dormir dans le salon !) La colocation est un style d’habitation de plus en plus répandu, mais au-delà des représentations idéalisées (qui n’a jamais rêvé d’habiter dans le loft de la série « Friends » ?)... Le partage d’un appartement suppose de fixer quelques règles. Quelle répartition des tâches mé-

« Qui n’a jamais rêvé d’habiter dans le loft de la série “Friends” ? »

Autre option « groupée » : la « Coloc’ pour Dieu ». Mis en contact par l’intermédiaire d’une aumônerie ou d’une paroisse, les étudiants choisissent d’avoir ensemble des temps de prière, de partage ou même de mission. Enfin, les foyers d’étudiants permettent une transition en douceur. Ils ont l’avantage d’offrir un certain nombre de services qui aident à s’investir pleinement dans les études. En mettant l’accent sur la fraternité et la vie commune (temps de discussion, de fête, de formation) l’horizon des habitants s’élargit : en rentrant le soir, on rencontre des gens qui viennent d’autres pays et font d’autres études, au fil des mois se tisse un réseau d’amitié et de fraternité qui durera plusieurs années. v

Sr Blandine LAGRUT, philosophe

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Coup de PROJECTEUR Rue de Pressensé…ma coloc avec Jésus ! 7 jeunes, 19 à 27 ans, qui ne se connaissaient pas, ont choisi la colocation. Ils ont réduit leur loyer, mais aussi leur stock de nourriture et leur bruit entre 22h. et 6h. malgré les fringales nocturnes. En échange, ils ont gagné une vie en communauté avec partage des tâches ménagères et service à la paroisse. Après des heures de discussion, ils ont pu fixer un moment chaque semaine pour dialoguer tous ensemble avec leur 8ème colocataire : Jésus, qui vit, entre autres, dans le salon.

Alice, 24 ans

«

Michal, tchèque, en thèse, 27 ans. « Pourquoi choisir cette colocation ? J’étais en logement étudiant, l’an dernier. Ici, on est nombreux, tous différents, mais on prie ensemble. Même si on ne se comprend pas toujours, le principal c’est d’apprendre à s’aimer en toute circonstance. » Michal, Sophie et Fantine

4 filles et une coloc’

En démarrant cette année en colocation, je pensais bien que ce serait chouette, mais j’ai été surprise au-delà de ce que j’imaginais. Nous avions décidé toutes les quatre, non seulement d’habiter ensemble, mais aussi de vivre quelque chose de fraternel, pour nous sentir bien chez nous. Au début de l’année, nous avons parlé ce dont nous avions envie pour cette coloc’. Pour en faire un lieu un peu familial et fraternel : faire les courses de nourriture en commun, à tour de rôle. Pour éviter de se poser trop de questions sur le ménage : faire des tours chaque semaine. Pour que ce soit un lieu accueillant : inviter largement nos amis à manger, à dormir, avoir des matelas et des duvets supplémentaires, et faire de temps en temps la fête chez nous. Et puis décider, malgré nos vies d’étudiantes bien remplies, de ne pas simplement se croiser à l’appartement, mais de prendre le temps de se voir : nous avons décidé de nous réserver un soir par semaine, pour dîner ensemble, nous raconter nos journées, et de temps en temps, partager

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Où sont mes yaourts ?

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sur notre vie intérieure et spirituelle (sur le modèle des fraternités que trois d’entre nous avaient connues avec la Communauté du Chemin Neuf), et prier ensemble. Toutes chrétiennes et désireuses d’avancer dans la foi, trois catholiques et une protestante évangélique, nous avions des richesses à échanger.

Bien sûr, une fois ces bases posées, tout n’a pas été si facile ! Nous avions toutes des caractères si différents ! Je me disais souvent que même en le faisant exprès, il aurait été difficile de choisir quatre filles aussi différentes que nous. Certaines choses plus ou moins concrètes dans la vie de notre coloc’ n’avaient pas du tout la même importance pour chacune d’entre nous, et il a été bon de pouvoir nous le dire. Certaines d’entre nous se connaissaient à peine au début de l’année, et il a parfois fallu du temps pour s’apprécier... mais quelle joie immense alors, au sein de cette coloc’, de se sentir aimée, et capable d’aimer en retour ! Et quelles belles amitiés cela a donné ! Je crois à présent que nous avons beaucoup appris les unes des autres, et que le Seigneur nous façonnait dans le secret. La prière nous enracinait, parfois seule, parfois par deux, le matin ou le soir, parfois toutes les quatre. Il reste encore sans doute des tas de fruits à cueillir de cette année si riche !

»


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Diego... Une année en foyer d’étudiants Cette année au Foyer Henri Planchat (Puteaux, 92), je me suis senti chez moi. Au début j’ai décidé de venir au foyer parce que je ne voulais plus être seul. Je voulais expérimenter autre chose que de faire ma « petite vie » dans un appartement. Au foyer, j’ai rencontré des gens qui comptent beaucoup pour moi aujourd’hui. Quand je rentrais de cours, il y avait toujours quelqu’un avec qui parler, partager, demander de l’aide quand j’en avais besoin. J’ai vraiment pu découvrir une vraie fraternité. Le temps des repas était une opportunité pour partager avec des gens différents.

Par rapport aux études, j’ai trouvé que j’avais presque tout pour réussir : la salle de travail, internet et la tranquilité dans ma chambre, et ce qui m’a beaucoup aidé aussi c’était le soutien et la motivation de chacun. Les frères et sœurs de la Communauté étaient toujours là pour me conseiller et m’accompagner dans ma vie spirituelle. J’ai pu apprendre, grâce aux weekends et retraites proposés, à connaître encore mieux le Seigneur. ça a été une année où j’ai vécu une fraternité riche en partage avec mes amis du foyer. Les week-ends, on faisait toujours la cuisine, moment très important de partage et vie sociale. Je me rappelle d’une anecdote : un jour, avec mes nouveaux amis, c’était la première fois qu’on faisait la cuisine ensemble, débutants bien sûr. On était en train de parler et rigoler, et sans nous en rendre compte, le poulet a brûlé ! Finalement, on a passé un bon moment ensemble et on a bien mangé quand même. Je ne regrette à aucun moment la vie que j’ai pu découvrir au foyer. Maintenant je garde contact avec mes amis, je trouve qu’on a formé une vraie famille ensemble et je rends grâce au Seigneur. Diego, étudiant en cinématographie, originaire de Bolivie

jeunes 18-30 ANS

14-18 ANS

• FOYERS ETUDIANTS : pour étudiants de 18 à 25 ans - à Paris, Lyon, Chambéry, ClermontFerrand, Grenoble, Lille, Nancy, Nantes, Reims et à l’étranger. Des lieux de vie qui mettent l’accent sur le cadre de travail, la vie fraternelle et la formation chrétienne. • WEEK-END « Le Père cherche des adorateurs » : 13-14 oct. à Tigery (91) Un week-end de prière et de retrouvailles ! Après un été riche en expériences et découvertes... prendre le temps de rendre grâce et remettre le Christ au centre de l’année qui commence. • WEEK-END VIE AFFECTIVE : 17-18 nov. à Tigery (91) et 24-25 nov. à l’Abbaye d’Hautecombe (73) « Du flirt au mariage… » : je t’aime ! T’es sûr de ton coup ? (aussi à Angers le 20-21 oct. « Les défis d’un cœur pur ! » : parcours d’approfondissement sur la « pureté », pour ceux qui ont déjà vécu le week-end. • RETRAITE JÉRICHO : « Lève-toi, il t’appelle ! » : 27 déc. – 1er janv. A Tigery et à l’Abbaye de Hautecombe. 5 jours de prière, de partage et de fête pour découvrir l’amour de Dieu pour nous. Mieux connaître le Seigneur, apprendre à prier avec la Parole de Dieu, partager avec d’autres jeunes… et fêter ensemble la nouvelle année ! • De nombreuses autres propositions sur le site internet : Messe des jeunes, Soirées de louange, Fraternités Jeunes Professionels, Groupe « appel », etc. jeunes.chemin-neuf.fr Contact : 01 47 74 93 73 ou 06 30 14 06 96 jeunes.france@chemin-neuf.org

• WEEK-END MUSIQUE - 14-18 ans : 27-28 oct. à Tigery (91) Pour tous ceux qui veulent apprendre à jouer et chanter le répertoire des 14-18 ! Ateliers possibles : chant, musique, danse .... • TOUSSAINT 2012 « Bonheur en construction » 29 oct. - 2 nov. à Tigery (91). 4 jours pour cogiter ensemble : y a-t-il un mode d’emploi pour être heureux ? Le bonheur a-t-il quelque chose à voir avec Dieu ? Topos, partages, prière, détente et fête !

• TALENTS à DÉVELOPPER ! 14-15 ans : 13-14 oct. à Lyon, 20-21 oct. à Paris - 14-18 ans : 20-21 oct. région Ouest, 24-25 nov. à Nice, 17-18 nov. région Est, 17-18 nov. en Bretagne. Comment reconnaître mes talents ? Comment les faire fructifier ? Un week-end pour mieux me connaître et découvrir ceux qui m’entourent, Pour découvrir ce que Dieu a mis en moi. • DEVIENS CE QUE TU ES ! 16-18 ans : 24-25 nov. à Lyon, 8-9 déc. à Paris. Devenir ce que je suis profondément, c’est d’abord me mettre à l’écoute de moi-même et décider, orienter ma vie : choisir d’accepter que je suis enfant de Dieu. • Secrétariat 14-18 ans : 04 78 15 07 98 ou 06 61 61 02 72 14-18ans@chemin-neuf.org Inscriptions en ligne sur : SITE : chemin-neuf.org/14-18ans

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VIE

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Zaragoza... Témoignage : Chronique d’un appel en Espagne Août 2011 Sablonceaux. Désir de disponibilité

Signes et paroles de confirmation.

À Sablonceaux, le Père Laurent Fabre propose à ceux qui le souhaitent de s’avancer pour exprimer leur disponibilité au service de la Communauté et de l’Eglise. Véro et moi nous approchons en ayant tout particulièrement le désir d’une fondation en Espagne après les JMJ de Madrid.

Le « oui » de notre famille commence à se dessiner, d’autres membres de la Communauté visitent les lieux et un assentiment général prend forme malgré aussi l’expression de doutes. Pour notre famille, des signes concrets encourageants apparaissent : nos trois enfants obtiennent une place au lycée français malgré la forte demande. En Mai, Daniel obtient un congé formation rémunéré. Nous découvrons aussi avec surprise que St Paul a lui même songé à venir en Espagne : Rm 15, 23-28. C’est un encouragement pour nous.

16 Août 2011. Chartreuse de Grenoble. Une proposition incroyable. Quasiment à ce même moment, le Supérieur général des Chartreux, au cours d’une conversation amicale avec des membres de la Communauté évoque la possibilité d’un don à la Communauté d’une Chartreuse en Espagne. Laurent Fabre et le conseil se saisissent de la proposition et entrent en discernement. Octobre 2011. Chartreuse de Zaragoza. Le doute et la foi. En famille avec le Père Fabre et d’autres frères, nous venons visiter les lieux. L’accueil des trois Chartreux présents est très touchant... mais il fait froid, il fait gris et les couloirs sont sans fin, sans parler du coût nécessaire pour réhabiliter les lieux. Toutefois, nous ressentons tous un impérieux appel à la foi, comme Abraham et tous les grands croyants qui répondirent « oui » en acceptant que leur raison et leur propre projet soient soumis à plus grand qu’eux.

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Février 2012. Suisse Monastère de Bethanien. Véronique, d’origine espagnole, est rapidement conquise. Pour Daniel, l’adhésion est plus lente. Lors d’une retraite, une phrase du Père Lacordaire le rejoint : « Je vais où Dieu me mène, incertain de moi, mais sûr de Lui. » Juillet, Août 2012. Nous laissons Lyon, nos relations, nos amis, les Maristes, notre maison et arrivons dans cet énorme chantier à ciel ouvert, où défilent un grand nombre de personnes : membres de la Communauté, de la Communion, amis, gens de bonne volonté, ouvriers espagnols de tous les corps de bâtiment, voisins, personnalités civiles et ecclésiales locales. Au milieu de tous ces travaux, le Seigneur lui aussi travaille les cœurs avec force et

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précision et des guérisons se font dans le secret, des orientations de vie prennent forme. Nous bénéficions de la prière multiséculaire des pères et frères chartreux qui nous ont précédés et de la grâce de cette nouvelle fondation. Août 2012. Le temps favorable. Il y a une certaine urgence pour que chaque ermitage conçu pour un Chartreux soit définitivement adapté à une famille de 3 ou 4 enfants. Mais cette urgence nous semble s’inscrire dans une continuité et un temps long de maturation. En effet, depuis ses origines, la Communauté s’est particulièrement penchée sur la vocation des familles. Nous avons le sentiment de cueillir aujourd’hui cette expérience de 40 ans. C’est maintenant le temps favorable... Daniel et Véronique Bossard


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Hélène Guilbaud Ils seront ici sous peu : 25 couples et familles et deux personnes seules suivront la formation. Ils viennent de Pologne, Portugal, La Réunion, Belgique, Italie, Brésil, Côte d’Ivoire, France. Le temps se fait court mais la confiance règne. On se concentre sur la préparation des cellules en fonction de la date d’arrivée de chacun. Quelle expérience unique que ce début à la « Cartuja de Aula Dei » (Monastère « Maison de Dieu ») ! Il en aura passé des frères en sept mois ! Nous en aurons vécu des merveilles de la Providence ! Sentir cette solidarité des uns et des autres, c’est inoubliable. Ouvriers d’entreprise au milieu d’ouvriers bénévoles de partout, de langues différentes, tous orientés vers le même but, c’est une petite Pentecôte quotidienne. Laurent disait sentir la joie actuelle des Chartreux de nous voir travailler dans leurs cellules. Et nous bénéficions de leur aide de différentes façons. C’est surprenant d’entendre l’histoire de l’appel de chacun des frères à venir aider ici. Nous avons vite compris que ce lieu est un lieu sacré.

Répondant à une question demandant quel péché nous guette comme communauté ici, le Père Macario disait en riant que le plus grave, c’est le manquement au silence. C’est bien évident avec les pelleteuses, les ponceuses, les pistolets à peinture ! Mais même quand tous les instruments se seront tus, la Chartreuse ne sera jamais plus la même et c’est bien normal. Nous avons quelque chose à entendre de cette interpellation. Pourquoi sommes-nous mis ici ? Le silence, la solitude, la contemplation, la soif de Dieu sont des mots clés pour notre temps… Les Jeunes du Chemin Neuf ont conclu leur semaine en disant : « À l’arrivée, nous avons eu une cellule à travailler et finalement c’est la cellule qui nous a tous eus ! » Une parole à méditer !

Légende photos :

p. 32 : L’église pendant la semaine de travaux en Communauté p. 33 : de haut en bas. La bibliothèque (salle d’enseignement du cycle A) ; un des couloirs du cloître ; vue de l’extérieur ; deux équipes à l’œuvre dans les cellules !

« Bienvenidos a Cartuja Aula Dei ! »

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Temps d’échanges

Semaine « communautaire » paroissiale

Partager la fraternité dans les paroisses En confiant des paroisses à la communauté du Chemin Neuf, les évêques et responsables de l’Eglise catholique, lui demandent aussi d’y partager les charismes qu’elle a reçus. Une conviction s’impose : le trésor de la communauté, c’est la fraternité ! Aujourd’hui, nous sommes invités à « élargir l’espace de notre tente » avec les paroissiens les plus proches, ceux avec lesquels nous partageons la mission.

Sr Corinne Vergnais, Mgr Philippe Ballot et le P. Laurent Fabre

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C’est ainsi que sur invitation écrite du P. Laurent Fabre, plusieurs paroissiens d’une quinzaine de paroisses de France, d’Allemagne et du Brésil nous ont rejoints pour vivre une semaine “communautaire” de discernement à l’Abbaye des Dombes. Des grandes, moyennes, et petites


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tentes ordonnées comme en village, avec pour centre une petite grotte, ont comme ouvert un nouvel espace dans cette Abbaye. Cette magnifique transformation n’est d’ailleurs pas limitée au campement !!! Désirer chercher et trouver comment l’Esprit nous conduit a permis à chacun, frères et sœurs de la communauté et invités, de se rendre disponible. Cela nous a conduits en quelques jours, comme Abraham, à emprunter un « chemin neuf », sans savoir où nous allions, sans connaître exactement la direction, preuve que nous étions dans la bonne direction, comme disait Origène au sujet d’Abraham. La reprise de l’enseignement Œuvre de Dieu, Œuvre pour Dieu* du P.Laurent Fabre a donné une base solide à nos réflexions. Après des réactions diverses sur le nom à donner à ces fraternités, une conviction s’est imposée. C’est ainsi que les « Fraternités Missionnaires Paroissiales du Chemin Neuf » se sont précisées. A partir des dix points d’engagement des Constitutions de la Communauté, nous avons vu petit à petit, au fil de ces jours, se dévoiler les contours de ces fraternités paroissiales.

Une priorité pour les membres des fraternités : la formation, associant la vie spirituelle, la lecture de la Parole et tous ces ingrédients nécessaires à la mission... Jésus a pris du temps pour ses disciples, trois ans de fraternité intensive. Nos paroisses sont des lieux idéaux pour nous mettre à cette école. Le dernier soir, la majorité des invités et les curés des paroisses représentées se sont engagés dans cette aventure, devant les frères du Conseil de la Communauté et l’Archevêque de Chambéry qui fut très présent pendant toute cette semaine. La fête qui prolongeait ce temps, au rythme du tam-tam, a permis d’expérimenter notre dixième point d’engagement, avec beaucoup de joie : la Fête ! Petit commencement qui nous dispose à rester dociles, pour être au rendezvous et de plus en plus « connectés » à ce que l’Esprit Saint dit à nos églises. Comme le dit souvent le P. Fabre, « L’Esprit est à la mesure des problèmes de notre temps ». v Corinne Vergnais, Paroisse St Denys de la Chapelle, Paris Un enseignement fondamental de la communauté du Chemin Neuf. « Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les bâtisseurs. » *

Merci, Claire !

Claire Certain nous a quittés mercredi 25 juillet ; elle repose en paix. Au-delà de tout ce qu’elle nous a donné d’elle-même, avec un tempérament fort et convaincu,

Au-delà de sa qualité d’écoute et de son attention qui que nous soyons, Au-delà de sa foi tenace et incarnée, elle n’a fait que compter sur la main de Dieu pour elle, sa famille, ses amis et ses frères de communauté.

Suite à quatre années d’une maladie acceptée sans résignation et accompagnée par Pierre fidèlement avec une âme qui a dit OUI à la vie de Dieu en elle,

Claire, dans sa faiblesse, Lui a permis de se rendre présent et de porter Son fruit : « Des années qui ont donné sens à une maladie absurde », ont dit ses fils le jour de l’enterrement...

Et nous serions nombreux à témoigner de ce qui s’est produit dans nos vies par le chemin et la présence de Claire.

A-Dieu et Merci.

Véronique Pilet

« Je vais t’ aider mon Dieu à ne pas t’éteindre en moi »

Etty Hillesum

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Vie de la Communauté Photos... Trevi et Kinshasa

Engagements à vie et ordinations

Coup de cœur de la rédaction !

« La couleur des sentiments » De Kathryn Stockett

à TrEvi : de gauche à droite : Gionata Fausone, Bénédicte et Antoine Contamin, Etienne de Beaucorps, Pascale de Beaucorps et les futurs ordonnés : Adonis Bizomenya (Villeurbanne, Paroisse Ste Madeleine), Federico Bertacchini (Paris, foyer de Puteaux).

Certes déjà paru depuis deux ans, ce livre est passionnant, drôle et émouvant. Il ouvre le regard et le cœur. On y suit, fasciné, les péripéties de trois femmes que tout oppose et qui vont vivre une formidable amitié et bousculer les lois raciales. L’action se passe en Alabama et dans les années 1960... tout cela n’est pas si loin de chez nous ! Partie d’un petit coin des Etats-Unis, cette histoire a une portée universelle. A lire, à faire passer, à offrir... Pour les anglophones, la version originale The Help est savoureuse ! Vous pouvez retrouver tous les protagonistes de cette histoire dans le film La couleur des sentiments sorti en DVD.

CD11...

L’indispensable pour la rentrée !

à KINSHASA : de haut en bas, Alain Tsiomo (Paroisse de L’Isle d’Abeau, France), Gildas Bobongaud (à Lyon, Henri IV), Jean-Pierre Godding (Kinshasa), Matthieu Wansi (Kinshasa), Benoit et Denise Lokila (Kinshasa)

album photos

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Pour retrouver les chants de l’été, pour « bouster » vos messes paroissiales, d’aumônerie ou communautaire, mais surtout pour accueillir en ce début d’année le souffle de la Résurrection. Avec, entre autres : la « messe de Compostelle », « Marche avec nous », « Les cieux racontent », etc. Commander le CD : tél : 04 78 37 45 99

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Talents

Jeune talent BAPTISTE PLANTIN « Je m’appelle Baptiste Plantin, j’ai 19 ans et je suis passionné de photo, de cirque mais avant tout de dessin ! J’ai choisi de faire des études dans le domaine des arts visuels. Je suis en formation d’infographie afin d’entrer dans une école de cinéma d’animation. Étant de nature plutôt silencieux, je trouve dans le dessin une nouvelle façon de m’exprimer. Ce que j’aime avant tout, c’est laisser libre-cours à mon imagination pour faire voyager les gens à travers les mondes que je crée. J’aime quand la frontière du réel et de l’imaginaire disparaît peu à peu pour laisser place à la magie du dessin. L’année dernière, aux JMJ de Madrid, j’ai pu expérimenter l’évangélisation par la peinture et j’ai pu continuer cela cet été au festival d’Hautecombe. C’est une expérience qui me tient beaucoup à cœur. Toucher les autres, essayer d’ouvrir leur imagination, leur cœur à la présence de Dieu ; ce qui serait impossible sans le sens artistique de l’Esprit Saint ! »

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Tirage sur papier issu de forêts gérées durablement, certifié PEFC


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