Cheval du Maroc N°9

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JUILLET - AOÛT 2018


rÉGIOn dE TIssA (prOvIncE dE TAOUnATE).c’est lors du Festival du cheval de Tissa que Yann Arthus-Bertrand a pris cette photo de Tbourida durant le tournage de son film Le Maroc vu du ciel. On comprend mieux pourquoi l'OnMT a exploité cette photo légendée avec une citation de delacroix au sujet du Maroc: «c’est un lieu fait pour les peintres... le beau y abonde'".

PHOTO © HOpE prOdUcTIOn - OnMT



«Au même titre que le football, le cheval est lové dans le coeur et les gênes des Marocains» HERVé RENARD

sKHIrAT (cLUB ÉqUEsTrE OUEd YKEM).Libéré du stress de la première fois, Hervé renard profite pleinement de sa monture sous le regrad amusé de Marcel rozier, transformé en professeur de luxe.

PHOTO JEHAd ABELLAH


PAR JÉRÔME LAMY,

( À RABAT)

hervé renard :

«J’ai appris à aimer le cheval au maroc»

HERVÉ RENARD A ÉTÉ SÉDUIT PAR L’AMOUR QUE LES MAROCAINS PORTENT AU CHEVAL ET À SON ÉLEVAGE. AVANT DE S’ENVOLER POUR LA COUPE DU MONDE, IL AVAIT VISITÉ LE CLUB ÉQUESTRE OUED YKEM, À SKHIRAT. S’IL S’ÉTAIT AUTORISÉ UNE BALADE À CHEVAL EN BORD DE MER POUR SON BAPTÊME SUR UN ÉQUIDÉ, IL EN AVAIT AUSSI PROFITÉ POUR PARTAGER AVEC KEBIR OUADDAR ET MARCEL ROZIER, DEUX LÉGENDES DE L’ÉQUITATION, LEURS EXPÉRIENCES COMMUNES DU PLUS HAUT NIVEAU.


Deux champions à la Une ! si c’est Hervé renard qui s’essaye au plaisir du cavalier aux côtés d’une légende de l’équitation, Marcel rozier, et si c’est Kebir Ouaddar qui tient un ballon de football entre les mains, qu’on se rassure, c’est bien le premier qui a guidé les Lions de l’Atlas lors du Mondial en russie et le second qui défendra les couleurs du royaume, aux Etats-Unis, lors des prochains Jeux Équestres Mondiaux (Tryon, 10 au 23 septembre 2018). En tout cas, les deux champions ont déjà eu l’honneur de la couverture de Clin d’Oeil. Ils sont en effet entrés dans l’histoire du sport marocain. si Hervé renard a permis au Maroc de retrouver l’ensorcelante saveur d’une participation en coupe du Monde après vingt ans d’absence, Kebir Ouaddar restera, pour l’éternité, le premier cavalier marocain qualifié pour les Jeux Olympiques (rio, 2016).

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Hervé Renard monte à cheval avant de gravir l’Everest en Russie !

quelques jours avant de vivre sa première coupe du monde en russie aux commandes des Lions de l’Atlas et de défier le portugal et l’Espagne, Hervé renard a réalisé son baptême à cheval. Il a bénéficié des conseils de Marcel rozier, qui est sans doute le meilleur entraîneur d’équitation de tous les temps., pour enfourcher correctement sa monture.



Quand la famille Ouaddar défie la famille Renard au baby-foot... chez les champions, on ne lâche jamais rien. ce ne sont pas Hervé renard et Kebir Ouaddar qui diront le contraire. ni ceux qui ont assisté à la partie acharnée de baby-foot qui a opposé Kebir Ouaddar et sa fille soukaina, grand espoir de l’équitation marocaine, à Hervé renard et sa fille candide, surfeuse de talent. pour ne froisser aucune susceptibilité, on dira seulement que les cavaliers sont partis au galop ! normal, ils jouaient à domicile, à skhirat, au club Equestre Oued Ykem.

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PHOTOS JEHAd ABELLAH

sKHIrAT (cLUB ÉqUEsTrE OUEd YKEM).Accompagné de sa fille candide, une cavalière confirmée, Hervé renard a vécu une belle première expérience à cheval avec Kebir Ouaddar et Marcel rozier. passionné d’olympisme, le sélectionneur des Lions de l’Atlas a beaucoup échangé avec le grand cavalier marocain qui a participé aux derniers JO de rio.

our être totalement honnête, il convient de préciser que nous ne lui avons pas dit toute la vérité. Nous lui avons seulement précisé que l’objet du reportage était une rencontre avec Kebir Ouaddar, le meilleur cavalier marocain de tous les temps, le premier à avoir forcé les portes de la qualification pour les Jeux Olympiques de Rio où il fut même le porte- drapeau de la délégation marocaine et avec Marcel Rozier, légende vivante de l’équitation, champion olympique à Montréal en 1976, considéré aujourd’hui comme l’un des meilleurs entraîneurs du globe. Nous nous sommes contentés d’afficher ce programme alléchant en omettant de préciser à Hervé Renard qu’un cheval avait été préparé à son attention, à quelques semaines du Mondial en Russie ! Rapidement démasqués, nous avons joué la corde du second degré sur le ton de l’humour. «Vous n’allez quand même pas me demander de monter à cheval» lance Hervé Renard. «Je ne l’ai jamais fait...» Il pose la question mais connaît la réponse. On connaît également nos classiques. On lui suggère que visiter le club Oued Ykem, cher à Noëlle et Kebir Ouaddar sans enfourcher un cheval, c’est comme fréquenter un restaurant étoilé sans mettre les pieds sous la table.


évènement

sKHIrAT (cLUB ÉqUEsTrE OUEd YKEM).Marcel rozier, entre Hervé renard et candide renard, a apprécié sa rencontre avec le sélectionneur du Maroc. «Je mesure les pièges qu’il a dû éviter pour en arriver là» dit-il. «Je me sens proche de lui. peut-être parce que nous sommes rhônalpins, moi originaire de l’Ain, lui de la savoie. dans notre région, on est droits, directs.» En arrière plan, derrière Marcel rozier, noëlle Ouaddar, la directrice du club équestre Oued Ykem, a eu la gentillesse d’organiser cette belle rencontre à cheval. PHOTO JEHAd ABELLAH

Sans trop se faire prier, Hervé Renard a écouté les conseils de Marcel Rozier. Il a mis les pieds dans les étriers et une main sur le pommeau de la selle. Il a basculé sa jambe musclée au-dessus de la croupe du cheval après avoir placé l'autre main sur le troussequin de la selle. Puis, il a lâché un sourire aussi franc qu’après une ouverture lumineuse de Hakim Ziyech ou un débordement flamboyant de Nordin Amrabat. Au plus grand étonnement de sa fille Candide, spectatrice et actrice. «Vous êtes très forts, quand même» a-t-elle plaisanté. «Je n’aurais jamais cru que mon père allait accepter de monter à cheval. La dernière fois qu’il a grimpé sur un animal, c’était sur un éléphant en Zambie. Le mastodonte s’est cabré. Mon père a changé de couleur entre le vert et le blanc. Il a vraiment eu la peur de sa vie....»

En revanche, point de frayeur à Skhirat. Que du bonheur ! Entre la plage de Val d'Or et de Rose Marie, l’expérience fut d’autant plus réussie que Marcel Rozier n’a jamais été avare de conseils techniques pour assurer une sécurité totale au sélectionneur des Lions de Atlas et que Noëlle Ouaddar avait mis les petits plats dans les grands pour préparer de magnifiques chevaux arabebarbes. C’est justement l’admiration d’Hervé Renard pour la race barbe, telle qu’il l’avait confiée dans nos colonnes (Clin d’Oeil # 48) qui nous a motivés à organiser cette matinée initiatique. «Le cheval barbe est majestueux» confie celui qui a guidé les Lions de l’Atlas sur le chemin de la Coupe du monde en Russie. «J’aimerais en posséder un. Pas pour le monter mais pour le plaisir de l’élever, de le regarder galoper en liberté.»

Les rêves sont parfois confrontés à la réalité. «Malheureusement, je n’ai pas la place» dit-il. «Il vaut mieux que je dise ça car j’avais promis à ma fille de lui offrir un cheval pour ses dix-huit ans... Elle ne manque pas de me le rappeler régulièrement! C’est dommage car regarder un cheval m’apaise. En tout cas, au Maroc, plus qu’ailleurs, j’ai appris à aimer le cheval. Au même titre que le football, le cheval est lové dans le coeur et les gênes des Marocains. » Hervé Renard a aussi de très jolis souvenirs de l’hippodrome d’Aix-les-Bains. «C’est là que ma maman m’accompagnait pour pratiquer le sport alors que j’étais enfant» dit-il. «Les souvenirs d’enfance sont éternels. J’ai découvert la joie des activités physiques au milieu des chevaux.»

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évènement «Lors des Jeux, la cérémonie d’ouverture est capitale» précise le coach de Kebir Ouaddar. «C’est une erreur de ne pas y participer. Elle permet de rencontrer les autres athlètes, les stars comme les anonymes, de sentir l’ambiance et de mesurer la portée planétaire du moment. Et ce sont ces instants là qui restent gravés et autorisent le dépassement de soi. Après, l’enjeu, c’est de retrouver la concentration, de s’enfermer dans sa bulle, de se couper du monde et surtout des proches.» Hervé Renard ne dit pas le contraire. Il acquiesce. «Priver un athlète de ses proches lui permet de comprendre pourquoi il fait tous ces sacrifices» précise l’entraîneur français. «Ensuite, il faut trouver l’équilibre entre la valorisation de l’évènement à sa juste valeur et la dédramatisation. Car, la confiance est évidemment indispensable pour se dépasser et se révéler dans les grandes occasions. C’est dans les grands matches que naissent les grands joueurs. Cela doit être la même chose en équitation». Marcel Rozier opine du chef: «Kebir Ouaddar est un grand cavalier car il ne déçoit jamais dans les grands concours» dit Marcel. «Il ne tremble pas. Il se sublime.» Sur la même longueur d’ondes au niveau de la préparation d’une compétition, Marcel Rozier et Hervé Renard cultivent aussi leurs petites superstitions. C’est le chiffre 36 pour l’homme de cheval. «C’était le numéro de notre box lors de la victoire de Kebir Ouaddar au Trophée Hermès, en 2016, deux jours avant que je souffle mes 80 bougies...» Outre sa chemise blanche fétiche, « Depuis qu’Hervé Renard est à la tête de lions de l’atlas, Hervé Renard a aussi son chiffre magique. Il s’agit du 6... Il a aussi ses j’ai recommencé à suivre nos matches. Il faut quand manies, surtout dans le bus avant même avouer qu’avant sa nomination, on n’était pas trop les matches. Placé à la première place aux côtés de son fidèle adjoint à la fête... et Ça peut me rendre malade de suivre Patrice Beaumelle, il appelle cerune déFaite de notre sélection ! » tains proches sur des applications de discussions live. On ne jurera pas Kebir ouaddar que ces expériences en Afrique ont ajouté à la symbolique de ces grigris. Mais, on jugera de leurs effets à l’aune de son palmarès. Naturellement, une complicité assez immédiate est née entre Hervé Renard et Marcel Rozier. «Je ne connaissais pas Hervé Renard avant cette rencontre» précise ce dernier. «J’ai aimé le personnage. Je mesure les pièges qu’il a dû éviter pour en arriver là. Au fond, je me sens proche de lui. Peut-être parce que nous sommes Rhônalpins, moi originaire de l’Ain, lui de la Savoie. Dans notre région, on est droits, directs. On a du caractère. On regarde les gens droit dans les yeux. Et on dit sKHIrAT ce qu’on pense. Ça plaît ou ça ne plaît (cLUB ÉqUEsTrE OUEd YKEM).pas...» Belle complicité entre Kebir Ouaddar, A l’évidence, c’est le chemin vers le Hervé renard et sa fille candide. PHOTO JEHAd ABELLAH succès. u

Après le temps des chevaux, des défis familiaux au baby-foot, des biscuits marocains et du délicieux thé à la menthe, forcément le football et sa fameuse Coupe du Monde - que les Marocains regardaient à la télé depuis 20 ans - se sont invités à table. Normal, Kebir Ouaddar est un vrai passionné de football. Puncheur sur un cheval, le cavalier cher à sa Majesté le Roi Mohammed VI serait difficile à museler sur un terrain de football. «Je m’imagine davantage dans le rôle d’un attaquant, d’un dribbleur que dans celui d’un arrière latéral ou d’un gardien de but» a confié le champion de saut d’obstacles. Kebir Ouaddar est aussi grand supporter des Lions de l’Atlas. Il cite spontanément Mohamed Timoumi, Mustapha Hadji, Merry Krimau... Il n’a pas manqué de féliciter chaleureusement Hervé Renard. «Depuis qu’Hervé Renard est à la tête de l’équipe nationale, j’ai recommencé à suivre nos matches et à prendre du plaisir» confie-t-il. «Je suis un gagneur et un mauvais perdant. Ça peut me rendre malade de suivre une défaite de notre sélection. Il faut quand même avouer qu’avant la nomination d’Hervé Renard, on n’était pas trop à la fête. Et comme je ne suis pas maso, je zappais régulièrement les matches. Pourtant les joueurs étaient presque les mêmes hier qu’aujourd’hui... On se rend compte de l’importance d’avoir un super coach. C’est aussi vrai en équitation. C’est pourquoi je voue un respect éternel et une reconnaissance totale en Marcel Rozier.»

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Forcément, Kebir Ouaddar a vibré devant sa télé au rythme des sorties des coéquipiers de Mehdi Benatia. «La Coupe du Monde? C’est déjà juste exceptionnel d’avoir participé et bousculé l’Espagne ou le Portugal» a confié Kebir. «Je n’ai rien raté. Je n’aime pas regarder les matches seul. J’ai suivi les Lions de l’Atlas soit avec la famille Rozier à Bois-le-Roi, soit avec des amis au Maroc. Franchement, ce n’était que du bonheur. Notre seule présence en Russie, c’est déjà une victoire.» Si Hervé Renard a apprécié les compliments d’un personnage aussi pudique que Kebir Ouaddar et loué sa bienveillance de champion, il affiche néanmoins sa déception. «Kebir veut sécher nos larmes mais l’objectif, c’était de se qualifier pour les 1/8e de finale» dit le sorcier blanc. «J’ai raté ma mission. On a tous manqué d’expérience, moi en premier, notamment lors du match face à l'Iran. Le manque d’expérience des joueurs s’explique notamment par un temps d’abstinence de vingt ans sans mondial. Malgré le regret de passer si près de l’exploit, malgré les erreurs d’arbitrage, on sort la tête haute. On doit être fier de ces joueurs et du public fantastique, l’un des meilleurs du Mondial.» La prise de conscience de la dimension historique de l’événement est une des clefs des plus grands exploits. C’est en tout cas la conviction de Marcel Rozier, à la lumière de sa participation à de nombreuses olympiades comme cavalier ou entraîneur.


trophée maroc équestre 1

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le cheval en fête

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PAR JÉRÔME LAMY, (À RABAT)

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ire que le Trophée Maroc Équestre est un événement incontournable dans l’univers équestre en particulier mais aussi dans le monde sportif marocain en général est un euphémisme. Année après année, la soirée de gala met la barre toujours plus haute au niveau de la qualité et de la convivialité. Le mérite en revient à un homme, Badr Fakir (5 et 6), Président de Maroc Équestre, dont il convient de saluer l’engagement et le dévouement pour la promotion de l’équitation. Peu de disciplines sportives sont capables d’organiser une grande fête annuelle pour mettre en lumière les champions, les espoirs, les bénévoles ou les partenaires. Organisée dans le cadre somptueux du Sofitel Jardin des Roses, à Rabat, la 14e édition a réuni les figures emblématiques du monde sportif, artistique et culturel. Surtout, elle a coïncidé avec la célébration du 60e anniversaire de la création de la Fédération Royale Marocaine des Sports Équestres.

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«Cette manifestation de convivialité a été marquée par le soutien sans faille du Président de la FRMSE, Chérif Moulay Abdellah Alaoui, dont l’accompagnement demeure une foi qui a animé ce gala à l’instar des éditions précédentes» a confié Badr Fakir, le créateur d’un événement qui a rendu hommage à Floresco, premier cheval marocain de l’histoire à avoir participé aux Jeux Olympiques de Londres. C’était en 2012, avec le talentueux cavalier Yassine Rahmouni dans la discipline de dressage. C’est Fayçal Laaraïchi, Président du Comité national olympique marocain, qui a honoré le champion (4). Toujours dans la discipline du dressage, l'humoriste Eko a félicité la championne du Maroc, Jenny Guerraoui (2).

Si l’ancien capitaine du XV de France, Abdelatif Benazzi a posé avec le champion de judo Mohammed Elasri (3) pour un duo d’hommes forts, il a également remis un prix à ierry Clin (1), l’adjoint de Marcel Delestre à la tête des sélections nationales de sauts d’obstacles. Othman Taoui et Badr Khiati (8), récompensés par Omar Skalli, le Directeur Général de la SOREC, représentaient fièrement l'Etrier de Casablanca, vainqueur de la Semaine du cheval. A noter que la star Kebir Ouaddar (7), entouré à sa table de son épouse Noëlle, Mohammed Elasri, Khaled Assem, directeur de Horse Times magazine, Simo Bar et Jérôme Lamy, directeur de Clin d’œil magazine, a une nouvelle fois illuminé la soirée par sa simplicité non feinte. u

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Ahmed tarik avait le choix entre la voix et la vie. Il a choisi la vie. il a décidé de vivre avec les chevaux. Deux ans après sa grave opération, il a lancé sa propre écurie de courses. et a d’abord appris à parler aux chevaux avec les yeux, avant de causer aux hommes par le ventre.

MArrAKEcH (HIppOdrOME).Installé sur un banc qui domine l’hippodrome de Marrakech, Ahmed Tarik fait un rêve: l’avènement des courses en nocturne à Marrakech. «c’est une chance incontestable d’attirer un nouveau public vers les courses» s’enflamme Ahmed.

PHOTO ABdOU MOKHTArI


PAR JÉRÔME LAMY, (À MARRAKECH)

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«parler aux chevaux a été une thérapie » PHOTOS ABdOU MOKHTArI

MArrAKEcH (dOMAInE TArIK).Ahmed Tarik aux côtés du légendaire pur-sang arabe Mantiki (24 ans) qui a offert tant de succès à son père, Mustapha Tarik.

HOSPITALISÉ EN 2013, PRIVÉ DE LA VOIE SUITE À UNE GRAVE MALADIE, AHMED TARIK A MONTÉ UNE ÉCURIE DE COURSES, DEUX ANS PLUS TARD POUR SOURIRE À NOUVEAU À LA VIE. A MARRAKECH, LOIN DE LA CONCURRENCE, IL CULTIVE SA DIFFÉRENCE. IL HONORE AUSSI LE SOUVENIR DE SON PAPA MUSTAPHA, GRAND SERVITEUR DU ROYAUME ET FIGURE EMBLÉMATIQUE DES COURSES DANS LES ANNÉES SOIXANTE-DIX. ET SURTOUT, CET HOMME RAFFINÉ MISE SUR LE FUTUR RAYONNEMENT INTERNATIONAL DE L’HIPPODROME DE MARRAKECH.


courses: portrait ahmed tarik

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es uns à Bir Jdid ou Bouznika, les autres à Khemisset ou Rabat et Ahmed Tarik, seul à Marrakech: voilà une photographie instantanée de la carte des propriétaires de chevaux de courses marocaines qui colle à la réalité. Celle de Ahmed Tarik ne doit rien au hasard. S’il cultive sa différence dans la Ville Ocre, c’est parce que son papa, Mustapha, grand serviteur du Royaume, a été un gouverneur de Marrakech très respecté entre 1974 et 1986, une longévité de 12 ans qui constitue un record inégalé pour pareille fonction. Parler de Mustapha Tarik, ce n’est pas seulement évoquer sa carrière administrative, son passage remarqué au Ministère de l’intérieur où il géra les affaires sahariennes ou sa distinction comme Officier de la légion d’honneur décernée par l’ancien Président de la République Française Valéry Giscard d'Estaing, en 1981, pour ses actes de bravoure lors du tremblement de terre d’Agadir, en 1960, c’est aussi se plonger dans le monde des courses marocaines des années 1970.

A cette époque, si quelques éleveurs français essayent de tirer leur épingle du jeu, ce sont le Haras Royal Les Sablons et l’écurie Tarik qui affichent une domination sans contradiction sur les courses du Royaume. «Mon père a remporté tous les Grands Prix» confirme Ahmed Tarik sans masquer une pointe d’admiration. Quelques années plus tard, Ismaïl Nassif s’invitera au bal et sur les podiums. L’actuel Président de la société des courses hippiques de Casablanca complètera, avec plein de réussites, ce joli tableau à trois mains. Ismaïl Nassif? C’est la référence d’Ahmed Tarik. Pas seulement pour la nostalgie de son amitié avec son père. «Ismaïl Nassif est le grand sage des courses marocaines» précise-t-il. «Il va aux courses d’une manière noble, malheureusement très rare aujourd’hui. C’est un gentleman. Il fait preuve d’élégance, de sportivité. En fait, il aborde les courses comme un amusement, une passion, pour satisfaire son amour des chevaux et non pour rentabiliser un investissement. Et ça fait toute la différence. C’est un exemple pour tous les autres éleveurs.»

S’il se montre autant laudateur à l’endroit d’Ismaïl Nassif, c’est que Ahmed Tarik épouse totalement sa manière d’envisager les courses. Il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette entre les deux hommes. A eux la passion, aux autres la pression. «Le stress, c’est pour mon frère Driss» glisse Ahmed dans un sourire. En effet, il convient de préciser que c’est Driss, son frère, Président de l’Association des chevaux anglo-arabes au Maroc, qui a repris le damier jaune et noir de l’écurie familiale désormais nommée Belfakir. «Depuis le décès de mon père, ma maman Zoubida fait un blocage et se tient éloignée du monde des courses» confie Ahmed qui a retrouvé le chemin des écuries après une longue maladie qui a failli l’emporter. Il a subi une laryngectomie (ablation totale du larynx) en septembre 2013. Il avait le choix entre la voix et la vie. Il a choisi la vie. Surtout, Ahmed a décidé de vivre avec les chevaux. Deux ans, presque jour pour jour après son opération, il lance son écurie à la casaque verte et aux épaulettes blanches. Il l’installe à Marrakech, route de l’Ourika (km 10), au sein d’une maison d’hôtes éponyme. Il a perdu quarante kilos avant l’opération. Aujourd’hui, il en a repris vingt. Il a retrouvé la parole. Il a d’abord appris à parler aux chevaux avec les yeux avant de causer avec les hommes par le ventre. «Parler aux chevaux a été ma meilleure thérapie» dit-il. Pour parler avec l'oesophage, il faut avaler de l'air et le sortir pour émettre des sons comme un ventriloque. «Et j’ai progressé ensuite syllabe après syllabe» dit Ahmed qui parle surtout si joliment avec les yeux dont la pureté du regard rappelle celui d’un enfant ébahi par le monde.

MArrAKEcH (dOMAInE TArIK ET HIppOdrOME).Apaisé dans sa Maison d’hôtes qui offre une vue imprenable sur l’Atlas, Ahmed Tarik donne ses consignes à ses deux lads jockeys rida et salah.

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courses: portrait ahmed tarik «je me suis lancé un grand défi : prouver qu’il est possible d’élever des pur-sang anglais et des anglo-arabes, à Marrakech. Personne ne l’a fait...» La tumeur est un lointain souvenir. «Le cheval m’a sauvé la vie» dit-il pudiquement. «Après l’opération, j’ai perdu ma voix. Du coup, professionnellement, je ne pouvais plus assumer les mêmes responsabilités» poursuit celui qui fut le plus jeune directeur de banque au Maroc, en 1993, au sein du réseau Wafa Bank et qui dirigea une grande société de bois. Ahmed profite de chaque instant. «Je voulais construire une écurie à taille humaine, guidé par la passion et le bonheur de participer, être là au milieu des éleveurs et propriétaires» assure-til. «Même si je ne gagne pas, au moins j’assiste aux courses. C’est ça le plus important.» Aujourd’hui, Ahmed Tarik a trouvé sa voie, à Marrakech, dans la promotion immobilière et dans le secteur du tourisme où le Domaine Tarik, qui s’étend sur 20 hectares, route de l’Ourika, entre les orangers, les oliviers, les écuries et les neuf suites (de 25 à 70 m2), commence à se tailler une jolie réputation. Mais c’est dans le monde des courses qu’il puise sa respiration de bonheur à l’image d’un merveilleux doublé réalisé dans un Groupe B réservé aux pur-sang arabes avec la victoire de Danakil et la seconde place de Chahine.

Il se souviendra toute sa vie du mois de juin 2017, de la folie douce qui l’a envahie. «J’ai gagné des courses à Khemisset et à Casablanca mais c’est cette victoire dans cette course très relevée dont je suis le plus fier» confie Ahmed. «C’était un quinté. Personne ne l’a eu ! Nous nous sommes réveillés à 4 heures du matin. Nous sommes arrivés à l’'hippodrome Rabat Souissi vers 10 heures. La course était programmée à 13 heures. Malgré la fatigue des chevaux, Danakil et Chahine sont partis comme des flèches et ont raflé les deux premières places. C’était comme dans un rêve éveillé. J’avais du mal à croire que ce moment était réel. Dans le jargon des courses, on appelle ça un pénalty.» Voilà pourquoi le cheval a été la meilleure rédemption pour Ahmed Tarik. Loin de ses démons de jeunesse et sa vie de jet-setteur. Surtout, ce jour-là, à Rabat, Mehdi, son fils aîné, qui suit de brillantes études, en Suisse, à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) était présent. «J’ai lu beaucoup de joie dans le regard de mon fils» avoue Ahmed. «C’est un peu les mêmes sentiments qui m’emportaient quand j’accompagnais mon père sur les champs de courses.»

C’est aussi le fil d’une histoire familiale qui se noue. Le papa Mustapha Tariq fut orphelin à l’âge de sept ans. C’est son grand-père Bouchaïb, éleveur de la région d’El Jadida, qui lui a inoculé la passion du cheval. Et aujourd’hui, ce sont les frères Ahmed et Driss qui perpétuent la tradition familiale. «L’élevage, c’est dans les gênes» confirme Ahmed dont l’écurie, située au km10 route de l’Ourika, compte une quarantaine de montures entre les chevaux d’élevage et les chevaux de courses. «Mes premiers poulains anglo-arabes commenceront à courir en janvier 2019. Ce sera un moment fort dans ma carrière. Et je viserai le podium. C’est un rêve. Dans le monde des courses, il faut avoir du temps. En fait, je me suis lancé un grand défi : prouver qu’il est possible d’élever des pur-sang anglais et des anglo-arabes, à Marrakech. Personne ne l’a fait.»

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MArrAKEcH (HIppOdrOME).«pour l’instant, le monde des courses à Marrakech est une terre inconnue mais le potentiel saute aux yeux» dit Ahmed Tarik qui suit l’entraînement de son écurie depuis la grande passerelle réservée aux commissaires.

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Feu Mustapha Tarik, ici avec Gérard rivases, l’ancien jockey star du Haras royal les sablons et ci-dessous avec Jean-pierre Laforest, le regretté directeur du Haras royal les sablons, était un grand visionnaire. Il avait imaginé dès le début des années 1980, que l’hippodrome de Marrakech pourrait devenir un incroyable centre d’entraînement international pour les écuries européennes. Aujourd’hui, c’est son fils Ahmed qui reprend le flambeau de ce combat.

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Exception dans le monde des courses, Ahmed Tarik cultive sa différence. Mais l’inauguration de l’hippodrome de Marrakech lors de la 8e édition de la Conférence Internationale des Courses de pur-sang arabes, au printemps 2017, a changé son quotidien et l’autorise à espérer passer du rêve à la réalité. «Avant, j’entraînais mes chevaux dans mon domaine sur une piste labourée» précise Ahmed. «Désormais, quatre fois par semaine, les chevaux vont courir à l’hippodrome. Ils bénéficient aussi d’une meilleure récupération. Quand les courses avaient lieu à Settat, les écuries d’El Jadida étaient avantagées. Ce n’est plus le cas, et nous sommes souvent aux places d’honneur, à Marrakech.» Il faut savoir que l’histoire de l’hippodrome de Marrakech est aussi intiment liée à celle de son papa... Feu Mustapha, grand visionnaire, avait très vite imaginé, dès le début des années 1980, que l’hippodrome de Marrakech pourrait devenir un incroyable centre d’entraînement international pour les écuries européennes. Aujourd’hui, c’est son fils Ahmed qui reprend le flambeau de ce combat. «En hiver, il fait si froid en Europe, que les chevaux peuvent difficilement sortir s’entraîner» dit Ahmed. «On possède toutes les infrastructures pour accueillir des écuries internationales. Non seulement, il faut saluer la qualité de l’hippodrome de Marrakech et le travail d’Achraf son directeur qui entretient parfaitement ce joyau. Mais, il convient aussi de noter les infrastructures hôtelières exceptionnelles de notre capitale touristique. En fait, il faudrait seulement créer des logements pour les lads et les entraineurs.» Ahmed Tarik ne manque pas d’idées. Et croit à la théorie du ruissellement. «La venue d’écuries européennes donnerait envie à nos jeunes éleveurs marrakchis de se lancer dans le monde des courses» lance Ahmed. «Les écuries locales viennent de découvrir les courses codifiées depuis 2016. C’est normal qu’elles soient assez loin des autres. Il est évident que les écuries étrangères laisseraient au Maroc des chevaux toute l’année pour participer à nos courses. Ce qui relèverait le niveau de l’hippodrome de Marrakech. En fait, l’idée c’est de donner à Marrakech un monde des courses digne de la réputation mondiale de la ville ocre.»


courses: portrait ahmed tarik Ahmed Tarik mise sur un homme, Omar Skalli, le directeur général de la Société royale d'encouragement du cheval (SOREC). «Depuis sa nomination à la direction de la SOREC, Omar Skalli a été l’homme providence des courses marocaines» affirme Ahmed Tarik. «Il a fait souffler un vent de modernité sur les courses qui ressemble à une révolution. Et cet élan a porté toute la filière équine vers le haut. Toute l’énergie que Omar Skalli a donnée à l’hippodrome de Casablanca-Anfa, je ne doute pas qu’il la donnera à celui de Marrakech. C’est une question de temps, pas d’idées. Les idées? Il les a. Il ne m’a pas attendu. D’autant qu’il est entouré d’une équipe jeune, dynamique et compétente. Pour l’instant, le monde des courses à Marrakech est une terre inconnue mais le potentiel saute aux yeux.» Ahmed Tarik a une autre marotte dont il fait également un combat militant: les courses en nocturne à Marrakech. «C’est une chance incontestable d’attirer un nouveau public vers les courses» s’enflamme Ahmed.

«Il faudrait construire une grande tribune capable d’accueillir 1000 spectateurs et avoir une politique ambitieuse de restauration. Nous pourrions même imaginer programmer trois courses par semaine. Et adapter une stratégie politique marketing ambitieuse à l’attention de la clientèle des hôtels de luxe et des grands restaurants de Marrakech.» Le propriétaire de l’écurie Tarik a également une solution au problème de la pénurie de poulinières de pur-sang anglais à Marrakech. «Il faut organiser des grandes ventes aux enchères très modernes et tendances» lance Ahmed. «Et bien sûr, il faudrait mettre à disposition des étalons au haras de Marrakech afin que les éleveurs puissent saillir sur place et ne soient pas obligés de se déplacer à Bouznika ou El Jadida.»

Autant d’ambitions pourraient pousser Ahmed Tarik à briguer la présidence de la société hippique des courses de Marrakech. Il n’en est rien. «Je ne veux plus de conflits» coupe-t-il. «Le cheval doit rester quelque chose de joyeux dans ma vie. Je veux bien être force de propositions, participer à des discussions mais cette responsabilité ne m’intéresse pas. Déjà, il y a un problème alors que le président n’est pas nommé car l’ancien bureau n’est pas destitué...» Toujours convalescent, Ahmed a d’autres envies. Profiter de sa maman Zoubida qu’il visite régulièrement à Casablanca, accompagner le plus longtemps possible ses enfants, sa fille, Zineb, étudiante au Lycée Victor Hugo et son fils, Mehdi, futur ingénieur en environnement. Cultiver sa différence, à Marrakech, loin de son handicap et de la concurrence des grandes écuries marocaines. Et placer Marrakech sur la carte des grandes destinations de courses. u

«l’idée c’est de donner à Marrakech un monde des courses digne de la réputation mondiale de la ville ocre.»

MArrAKEcH (dOMAInE TArIK).née en 2015, l’écurie Tarik a déjà connu une belle réussite. Ahmed Tariq pose avec quelques trophées à l’entrée de sa Maison d’hôtes, le domaine Tarik dont la décoration est naturellement inspirée du monde du cheval.

PHOTO ABdOU MOKHTArI

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tbourida: trophée hassan ii

rABAT (dAr Es sALAM).Entre la sauvegarde de la tradition d'une culture ancestrale et la modernisation d'un art dont l'organisation professionnelle le rapproche d'un sport de haut niveau, la FrMsE a mis les petits plats dans les grands pour que le Trophée Hassan II de Tbourida soit couronné par un authentique succès.

La tbourida au service de l’amélioration du cheval Barbe

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a stratégie nationale de la filière équine, dévoilée en 2011, a révolutionné l’univers de la Tbourida. Selon les directives d’Aziz Akhannouch, Ministre de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement rural et des Eaux et forêts, l’organisation des épreuves de Tbourida doit répondre à un double objectif. L’ambition première est de pérenniser un art ancestral, gravé dans l’ADN du Royaume, qui sonne comme une signature de la culture marocaine

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Et dans un deuxième temps, il apparaît clairement que le développement de la Tbourida doit servir la promotion de l'utilisation traditionnelle et moderne du cheval barbe et arabe-barbe, races de prédilection de la Tbourida. Non seulement, la race barbe, qui fait la fierté du pays, a été sauvée par la politique offensive de la filière équine en général et de la SOREC en particulier. Mais aussi, la Tbourida a permis l’amélioration de la qualité de cette race grâce aux soins et aux entraînements. u

Aziz Akhannouch porte depuis 2011 la stratégie de la filière équine.


tbourida: trophée hassan ii

PAR JÉRÔME LAMY, (À RABAT)

la tbourida dans le coeur du royaume

LE TROPHÉE HASSAN II DES ARTS ÉQUESTRES TRADITIONNELS «TBOURIDA», ORGANISÉ DANS LE CADRE MAGNIFIQUE DE DAR ES SALAM, A RENCONTRÉ UN SUCCÈS POPULAIRE QUI NE SE DÉMENT PAS ANNÉE APRÈS ANNÉE. UNE BELLE MANIÈRE DE CÉLÉBRER LES SOIXANTE ANS DE LA FÉDÉRATION ROYALE MAROCAINE DES SPORTS ÉQUESTRES ET DE POURSUIVRE LES EFFORTS DE LA FILIÈRE ÉQUINE DANS LA PROMOTION DU CHEVAL BARBE, RACE DE PRÉDILECTION DE LA TBOURIDA.

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n une phrase comme en cent, Driss Jabri résume les enjeux de la Tbourida pour les prochaines années. «Nous devons moderniser la Tbourida sans qu’elle perde son âme» a récemment confié dans ces colonnes ce juge fédéral de référence. Il a dû être rassuré par le succès magnifique du 19e Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels, organisé du 7 au 13 mai à Dar Es Salam , sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Inscrite dans les gènes des Marocains, qui l’associent à la noblesse et à l’honneur, aux cérémonies et aux fêtes, la Tbourida rayonne de mille feux dans chaque région du Maroc, de Guelmim à Oujda. Là où les sorbas passent, passe le bonheur. A la question de savoir si la Tbourida était un art avant d’être un sport ou un sport avant d’être un art, les responsables de la Fédération Royale Marocaine des Sports Équestres (FRMSE) ont répondu en créant le Trophée Hassan II qui magnifie l’art et le sport.

le Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels «tbourida» met en lumière l’art et le sport. Et magnifie les traditions régionales du nord au Sud du Royaume, de oujda à guelmim, comme Al Khiyatya, Annasiriya, Acharkaouia, AL Hiyanya, AL Gharbaouia.

Et met en lumière les traditions régionales du nord au sud du Royaume comme Al Khiyatya, Annasiriya, Acharkaouia, AL Hiyanya, AL Gharbaouia. L’an dernier, le Trophée Hassan II avait humé le vent du Grand Sud pour la première fois. Si Guelmim avait été le théâtre de la première étape des concours interrégionaux afin de mettre en lumière ce premier rendez-vous historique dans les régions du Sud, la capitale du sud-ouest a abrité cette année la dernière étape des concours interrégionaux (14-15 avril), comme un baisser de rideau en fanfare. Histoire de souligner la volonté des régions du Sud à promouvoir la filière équine en général et la Tbourida en particulier. Pas moins de 12 sorbas représenteront les régions de GuelmimOued Noun, Laayoune-Saguia al Hamra et Ed Dakhla-Oued ed Dahab. La société Royale d’Encouragement du Cheval (SOREC), organisatrice de l’événement en collaboration avec la FRMSE, s’est mobilisée pour la valorisation d’une tradition culturelle ancestrale à travers une organisation professionnelle de qualité. Il faut savoir que plus de 20 villes ont accueilli les étapes régionales des concours de Tbourida dont les premières escarmouches ont eu lieu à Youssoufia et Khenifra au début du mois de février. A noter que pas moins de 301 sorbas, représentant toutes les régions du Royaume, se sont affrontées.

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tbourida: trophée hassan ii le Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels «tbourida» met en lumière l’art et le sport. Et magnifie les traditions régionales. Les sorbas ont été notées selon la performance de leurs exhibitions. Après leur premier passage, les troupes ont reçu une première note sur 25. Les juges apprécient le départ, la condition physique des chevaux, le harnachement et l’habillement des sorbas. Ensuite, chaque sorba vide son «Baroud » en trois salves. Il s’agit là d’évaluer la cohérence du mouvement, la coordination entre les cavaliers et bien sûr, le tir. Que ce soit, lors du premier passage, la Hadda, au trot pour afficher ses plus beaux atours au niveau des chevaux, du harnachement, de la tenue vestimentaire ou lors du second passage, la Talqa, au galop pour dévoiler un alignement idoine, le maniement des fusils avec en apothéose le tir synchronisé, la Sorba du Moqadem Maher Elbachir (province de Settat) a séduit le jury en coiffant la troupe voisine de Toufiq Nassiri (Settat) alors que la troisième place a été décrochée par la troupe du moqaddem Mhamed Zouaoui (province de Khouribga).

Il convient de saluer l’exploit de l’Association Guelmim Oued Noun (région de GuelmimOued Noun, province de Guelmim) qui a réussi à glisser sa troupe parmi les sept sorbas qualifiées pour la finale emblématique. Pour une seconde participation seulement au Trophée Hassan II, c’est un coup de maître. Les jeunes étaient aussi de la fête à Dar Es Salam. Sous les yeux de Cherif Moulay Abdellah, Président de la FRMSE, Aziz Akhannouch, Ministre de l'Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement rural et des Eaux et forêts et de Rachid Talbi Alami, Ministre de la Jeunesse et des sports, SAR le Prince Moulay Rachid a aussi remis les médailles d’or aux cavaliers de la sorba du moqaddem Anass Farid (province de Youssoufia), qui a remporté le titre des jeunes ainsi que les médailles d’argent et de bronze respectivement aux troupes d’Amine Oueld Chouata (province de Marrakech-Menara) et de Driss Belhaj (province de Khémisset).

On l’a compris, la Tbourida vit une seconde jeunesse et passionne un public toujours plus nombreux et plus connaisseur. Outre le Trophée Hassan II, elle compte désormais un autre événement emblématique depuis l'inauguration en 2016, du premier Grand Prix Mohammed VI, célébré par un immense succès populaire, à El Jadida, lors du Salon du Cheval. Un enthousiasme et un retentissement confirmés en octobre dernier lors du dixième anniversaire du Salon du Cheval. On imagine, non sans peine, l’ampleur que ne manquera pas de prendre cet événement lors d’une troisième édition programmée dans le cadre du prochain Salon d’El Jadida qui se déroulera du 16 au 21 Octobre 2018. Il va également sans dire - mais c’est mieux en le disant - que le 20e anniversaire du Trophée Hassan II sera un évènement majeur du calendrier 2019 de la filière équine. Vivement le printemps prochain. u

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rABAT (dAr Es sALAM).- La présence de sAr le prince Moulay rachid, entouré par cherif Moulay Abdellah, président de la Fédération royale Marocaine des sports Équestres et par Aziz Akhannouch,Ministre de l'Agriculture, de la pêche Maritime, du développement rural et des Eaux et forêts, a donné une dimension supplémentaire aux finales de la 19e édition du Trophée Hassan II de Tbourida.

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sous le sabot

Courses

UNE FUTURE reine est née dans l’Oise, à Chantilly. En lever de rideau du mythique Prix de Diane, Zineb Briouil s’est adjugée Les Longines Future Racing Stars, un trophée international des jeunes jockeys et apprentis réservé aux chevaux de 4 ans et au-dessus. Pour sa première monte en France, celle qui a suivi la première promotion de formation des jockeys à l’Institut National du Cheval Prince Héritier Moulay El Hassan, sous les ordres de David Bouland, a réussi un coup de maître en s’imposant sur Beaupréau (Mr Sidney).

Vainqueur surprise - sa cote était de 26/1 -, la jeune femme de 20 ans a guidé Beaupréau qui a répondu par une accélération décisive à 200m de l’arrivée pour arracher la victoire d’une tête devant First Company (Elusive City) monté par l’Australien Michael Poy. Vraie star de l’été, Zineb a enchaîné avec une victoire au Grand Prix de Son Altesse Royale le Prince Héritier Moulay El Hassan sur l’hippodrome de Casablanca-Anfa . Pour la première fois dans l’histoire, un Grand Prix a été remporté par une femme marocaine.

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Zineb Briouil, star de l’été ! A cette occasion, Zineb Briouil a monté avec bonheur Lislounja (Jalis), pour le compte du Haras Royal les Sablons. Pour donner toute sa valeur à ce succès majuscule, il convient de préciser que Zineb a devancé l’incontournable Famous Mark (Mr Sidney) monté par le célèbre Abderrahim Faddoul (Jalobey Racing). Pour le bonheur de M’Barek Briouil, son père entraîneur, qui oeuvre depuis son enfance pour la famille Lyazidi. u

En lever de rideau du prix de diane, Zineb Briouil a remporté Les Longines Future racing stars (gauche) avant de devenir la première femme marocaine à remporter un Grand-prix, celui de sAr le prince Héritier Moulay El Hassan (droite).

Karimine, sacré de Hollywood à Madrid... BELLE PLANTE, montée par Yohann Bourgois, a réalisé une belle victoire en héritant du succès sur tapis vert dans le Premio Comunidad de Madrid, une épreuve réservée aux femelles de 3 ans. La chute collective provoquée par la jument Nieves, justement distancée après la manoeuvre dangereuse opérée par son jockey José Luis Borrego, a permis à M’hammed Karimine et son jockey Yohann Bourgois d’hériter du succès. Un beau tir groupé des Oranges fluo du maire de Bouznika, puisque Eudoxia a raflé une belle troisième place. Par ailleurs, M’hammed Karimine a remporté le titre de la Meilleure Pouliche dans l’édition 2018 de Sheikha Fatima Bint Moubarak Darley Awards dédiée aux pur-sang arabes, dont la cérémonie de remise des prix s’est déroulée au mythique Dolby eater d’Hollywood, à Los Angeles ! u

Marcel Rozier se livre ! MARCEL ROZiER a décidé d’écrire son autobiographie. Médaillé d'or aux JO de Montréal (1976) et d’argent aux JO de Mexico (1968), le Français est considéré comme un des meilleurs entraîneurs de sauts d’obstacles, au monde. S’il a dirigé l’Équipe de France, il veille, depuis six ans, sur la carrière de Kebir Ouaddar qu’il a guidé avec succès sur le chemin des Jeux Équestres Mondiaux (Caen, 2014) et des Jeux Olympiques (Rio, 2016). il a créé le magnifique Espace Marcel Rozier, à Bois-le-Roi (Seine-et-Marne) où les stars s’adonnent à l’équitation dans des conditions rêvées. Proche de Sa Majesté le Roi Mohammed Vi dont il s’occupe des chevaux de sauts d’obstacles, avec la passion qui l’anime, Marcel Rozier est un grand ami du Royaume. Dire qu’il voue une profond respect à la famille royale est un euphémisme. Le Maroc, qui a tenu une grande place dans sa vie, tiendra forcément une place de choix dans l’histoire de son existence dont il a confié la rédaction à Jérôme Lamy, directeur de Clin d’oeil Magazine. u

PHOTO JEssIcA rOdrIGUEs

M’hammed Karimine

Marcel rozier


le sahara, paradis du tourisme équestre

LE RAID ÉQUESTRE GALLOPS OF MOROCCO, À TRAVERS LE DÉSERT DE MERZOUGA, A ÉTÉ UN FORMIDABLE VECTEUR DE COMMUNICATION POUR LE CHEVAL BARBE ET POUR LE TOURISME ÉQUESTRE, APPELÉ À DEVENIR UNE VRAIE SIGNATURE DU TOURISME AU MAROC. PAR JÉRÔME LAMY

PHOTOS dr // GALLOps OF MOrOccO


tourisme équestre ErFOUd.«découvrir le sahara sur le dos d’un cheval marocain est un moment magique qui offre beaucoup d’espoir pour le développement du tourisme équestre» précise Omar Benazzou, directeur des Haras nationaux de la sOrEc, heureux d’avoir contribué à une grande opération de promotion de la race barbe. Marie-cécile Tardieu-Girault (ci-dessous), épouse de l'ambassadeur de France au Maroc, a également participé au raid au sein d’une des deux équipes engagées par la sOrEc.

L’

émission phare de TF1 50 minutes inside, consacrée au nouveau visage du Maroc et diffusée le 7 avril dernier, est devenue virale sur les réseaux sociaux. Bien sûr, une majorité du reportage a porté son phare cathodique sur le phénomène Dakhla. Mais le raid équestre Gallops of Morocco, qui a réuni 110 cavaliers internationaux dans le Sahara, a également été mis en lumière. Mariage d’un authentique raid d’endurance à cheval, d’une passionnante course sportive, d’une expérience humaine unique et d’une incroyable découverte touristique dans un sublime cadre naturel aux portes du Sahara, Gallops of Morocco a été un formidable outil de communication pour le tourisme équestre marocain et pour la race du cheval barbe. Dans une ambiance lunaire et poussiéreuse, les Gallops of Morocco 2018 se sont achevés le 4 mars dernier, après six étapes de 25 à 30 kilomètres, avec la victoire de l'équipe française des Ch'tis, anciens participants de la première édition, organisée à Oman en 2014. Autour de Erfoud, dans la région du Drâa-Tafilalet, les cavaliers ont réalisé une boucle de 200 km à travers les hautes dunes de sable doré de Merzouga, véritables portes du désert. MarieCécile Tardieu-Girault, épouse de l'ambassadeur de France au Maroc, a participé au raid au sein d’une des deux équipes engagées par la Société Royale d’Encouragement au Cheval (SOREC). Elle a affiché ses talents de cavalière et ses capacités de résistance à l’effort. «Repousser ses limites et ses craintes est un beau défi intime à relever» confie Marie-Cécile Tardieu-Girault. «Monter des chevaux inconnus est un des charmes de l’expérience. Découvrir la nature et nouer une relation nouvelle avec l’animal est un double plaisir.» Cette aventure exceptionnelle n’aurait pas été possible sans l’engaMarie-cécile gement fort de la SOREC. «Ce raid Tardieu-Girault était une belle opportunité de promouvoir la valeur de la race barbe et arabe-barbe» avoue Omar Benazzou, directeur des Haras nationaux de la SOREC et valeureux participant à ce joli raid. «Nous l’avons saisie. Le barbe est un cheval endurant, robuste et docile avec un grand cœur qui peut faire de longues distances. Découvrir le Sahara sur le dos d’un cheval marocain est un moment magique qui offre beaucoup d’espoir pour le développement du tourisme équestre.» u

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carte postale: sur la route de tryon (etats-unis)

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Quickly peut créer la surprise...

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RECUEILLIS, PAR JÉRÔME LAMY

ous sommes heureux de souhaiter la bienvenue à la maison à Dino W, ancienne monture de Bertram Allen, ce cavalier irlandais, 5e du classement mondial en 2015, réputé pour son étonnante précocité. Et nous remercions sincèrement Sa Majesté le Roi Mohammed VI pour cette acquisition et pour la confiance dont il nous témoigne toujours. Dino W est un hongre gris âgé de 10 ans, sur lequel nous fondons de gros espoirs. Lors de nos premières sorties à Béthune, Bourg-en-Bresse et Lons-le-Saunier, nous avons ressenti de bonnes sensations comme dans un nouveau couple qui vient de se rencontrer. Acheter des jeunes chevaux demande trop de temps de préparation. Et ce temps, nous ne l’avons plus. Acheter des chevaux âgés de six, sept ou huit ans, c’est parfait. Aujourd’hui, une de nos priorités, c’est de reconstruire une nouvelle écurie afin d’autoriser les chevaux à souffler et nous permettre de toujours participer aux meilleures épreuves. Outre le nouveau Dino W, nous misons sur Vilkano de Fetan (9 ans) et Istanbull (9 ans). Saphir du Talus, qui est un cheval de très grande qualité, ne correspondait malheureusement pas à notre manière de monter. Il est désormais appelé à relever d’autres défis auprès d’un autre cavalier marocain. Nous lui souhaitons bonne chance. Bien sûr, quand on parle de notre écurie, il ne faut surtout pas oublier Quickly. La thalassothérapie, en Normandie, a été très longue. Nous avons douté. Nous y avons cru sans y croire vraiment. Nous maudissions son fameux kyste au boulet. Quand nous allions le visiter, nous étions rassurés. Nous nous mettions à espérer. Nous sentions qu’il avait bon œil, un œil de compétiteur... Nous sentions qu’il se languissait de retrouver nos écuries. Nous pensions que le mal allait vite se résorber et que la thalassothérapie suffirait à le maintenir en condition. Nous avions tort. Quickly est rentré une première fois à Bois-le-Roi. Mais il n’était pas encore totalement en pleine disposition de ses moyens.

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PHOTO ABdOU MOKHTArI

Cheval du Maroc a décidé de mettre ses pas dans ceux de Kebir Ouaddar et de son entraîneur, Marcel Rozier. Jusqu’aux Jeux Equestres Mondiaux de Tryon aux Etats-Unis ( 10 au 23 septembre 2018 ), le couple vedette des sports équestres marocains vous fait partager le quotidien de leur fabuleux cheval Quickly de Kreisker, leurs joies, leurs doutes, leurs espoirs, leurs rêves. Confidences exclusives...

Notre vétérinaire a décidé de le renvoyer en thalasso pour quelques mois. Il aurait pu aussi rester au paddock. Mais c’était la bonne décision. Quand Quickly est rentré à la maison une seconde fois, nous avons été définitivement rassurés. En Normandie, il a musclé son dos dans l’eau douce. Il a également trottiné sur tapis roulant. Nous l’avons remis progressivement au travail. Au début, il a bossé 45 minutes sur le plat, puis une heure toujours sur le plat. Et aujourd’hui, il galope comme à ses plus beaux jours ! Nous avons commencé à mettre des petites barres au sol et des croix. Il a retrouvé le plaisir et l’envie. Il faut quand même préciser que Quickly est un cheval unique, hors du commun. Il n’a pas été élu meilleur cheval au monde par accident. Il n’y a pas deux chevaux comme lui. Ce cheval est un génie. Il est très doué, très souple, très intelligent. Du coup, il a besoin de beaucoup moins de temps qu’un autre cheval pour être à nouveau compétitif au plus haut niveau. C’es un régal de le travailler. Il faut le respecter, le cajoler, lui donner ses repas à heures précises. Il faut simplement s’en faire un ami. En plus, pendant quatre ans, nous l’avons parfaitement géré. Désormais, nous devons travailler sa résonance au sol. On ne peut pas passer de la thalassothérapie aux épreuves de Grand Prix. Il faut le remettre en activité progressivement pour travailler son souffle. Il réalise des balades au galop en forêt très prometteuses. Son retour peut aller très vite. Dans moins d’un mois, il devrait sauter à nouveau des barres. Vous n’imaginez pas le plaisir que nous allons tous ressentir à ce moment-là. En fait, c’est Quickly qui dit stop ou encore lors des entraînements. C’est son œil qui parle. Il faut juste savoir le lire. Ça ne s’invente pas. Ça ne se programme pas. Le cavalier est le meilleur vétérinaire. Il commencera pas sauter des barres à 1m35 puis 1m50. Il possède un mental et une technique exceptionnels. Le plus important, c’est sa condition physique. S’il est opérationnel pour les Jeux Mondiaux, Quickly peut créer une énorme surprise. u



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