Au 2 quai Ferdinand Favre
SÊquençage du mur d'archives
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Témoin de qui ? Témoin de quoi ?
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Témoin de qui ? Témoin de quoi ?
« Ici on habite. Mais de quoi s’agit-il au juste ? De murs en carton, d’un appartement de 60m2, d’une émission de télé-réalité ou d’un nouveau lieu public à Nantes ? Est-on dans un espace privé ou dans un espace public ? Est-on producteur ou usager ? » Au départ, un appartement-témoin c'est soit un appartement-modèle pour aider d'éventuels acheteurs à se décider s'ils vont acheter le même ou pas, soit, depuis l'ère Ikea, c'est aussi un appartement où on nous montre comment aménager des tas de trucs soi-disant en vue de faire pareil à la maison alors que personne n'y a habité vraiment avant. Du prêt-à-habiter qui fait qu'on s'habitue. Du prêt-à-loger qui s'accommode mal avec l'idée de modeler un lieu, « une chambre à soi », là où commence l'individualité d'une personne, sans laquelle aucune liberté sociale et civile n'est concevable. En s'attaquant à l'habitat, Ikea a fait un joli coup. Car si on voit le fait d'habiter comme la possibilité de déployer ses habitudes, de construire un quotidien, Ikea nous invite à déployer dans nos appartements des habitudes standard. Quoique, récemment, le roi du mobilier en kit s'est installé en Chine et il paraît que ce qui se passe dans les fameux appartements-témoins est plutôt marrant. Nombre de salariés s'y donnent rendezvous le midi pour déguster leur sandwich entre collègues sur les tables de cuisine, certains y font leur sieste quotidienne, d'autres bouquinent tranquillement dans les sofas sous l’œil un peu désarçonné des vendeurs. Parce que même si l'appartement-témoin n'est pas fait pour qu'on y reste, certains en ont décidé autrement.
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Témoin de qui ? Témoin de quoi ?
« Qu’importe : on est là, on bâti et on pense avec d’autres. » Même dans les espaces bien striés où tout est censé être prévu, des choses arrivent, par ci par là. Si on décide de détourner les usages pour lesquels il est censé être conçu, l'appartementtémoin devient alors un terrain de jeu et d'expérimentation pour des tas de propositions. Mais alors, témoin de qui ? Témoin de quoi ? De l'expérience de plusieurs collectifs qui s'y sont installés chacun une semaine pour y faire une « résidence », artistique, domestique aussi. Lieu de création donc, mais aussi lieu de vie, de passage, d'une circulation continue de visiteurs-passeurs. Lieu de croisement d'objets, de matières, de formes, de mots, d'idées, de joies. Un semblant d'ermitage, une sorte de laboratoire scientifique où faire des expériences. Une expérimentation à petite échelle, pour penser d'autres formes, d'habiter, chez soi et dans la ville, pour vivre ensemble. Comme un bon scientifique est un bon utopiste. « Pour les habitants les règles du jeu sont simples et manipulables : le sol et les murs sont les supports à l’imagination. Les cloisons et les intérieurs sont détachables. » Témoin et espace test qui permet de trouver à petite échelle les conditions d'application à une plus grande. Un lieu d'exploration, un lieu où poussent les intuitions. Un lieu entre deux lieux. On y a habite sans y dormir. Tout le monde peut y passer et le traverser. On a des murs mais bousculables. Il y a des seuils qui ne sont pas des portes, des fenêtres qui se déplacent. 4 /32 Discussions
Témoin de qui ? Témoin de quoi ?
« Ce n’est pas encore une habitation, elle le deviendra s’ils bousculent les murs et prennent le pouvoir. » C'est un lieu traversé par des rythmes, entre deux eaux, entre deux heures. C'est un (mi)lieu qui est instable, qui permet d'en changer. Les traits au sol se déplacent, se décalent. Un espace lisse, sans murs ni clôtures ou alors si, mais simplement pour mieux relier. Dans cet appartement, les habitants se distribuent dans l'espace, l'aménagent. Ils l'occupent, ils le tiennent, ils l'ouvrent, ils le montrent, ils le laissent : ils l'habitent alors peut-être un peu. Un espace pour penser. Pour relier l'activité créatrice aux pratiquants de l'ordinaire, pour laisser de l'espace et du temps aux pensées de se déployer. Pour ancrer la réflexion et l'art dans des lieux du quotidien, au plus près de nos activités de tous les jours, en étant certes suffisamment séparé pour être créateur mais en ne partant jamais bien loin. Un espace libre à l'invention du quotidien. Lucile Froitier
« Ce qui se passe chaque jour et qui revient chaque jour, le banal, le quotidien, l'évident, le commun, l'ordinaire, l'infra-ordinaire, le bruit de fond, l'habituel, comment en rendre compte, comment l'interroger, comment le décrire ? [...] Ce qui semble avoir cessé à jamais de nous étonner, ce qui semble tellement aller de soi que nous en avons oublié l'origine. » Georges PEREC, La vie mode d'emploi, 1978, L'infra-ordinaire, 1989.
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Pour Lefebvre, le droit à la ville était avant tout le droit à la « centralité urbaine » et à son mouvement, à être le spectateur et acteur de ce « théâtre spontané » fait de rassemblements, de rencontres et d’échanges. De ce droit, la classe ouvrière et, d’une manière plus générale, les couches populaires se voyaient de plus en plus privées au fur et à mesure de leur refoulement programmé vers des périphéries éloignées, où l’habitat, collectif ou individuel, désormais dissocié de la vie sociale qu’offrait jadis la ville, était réduit à une simple fonction instrumentale ignorant « l’habiter », c’est-à-dire les différentes manières d’occuper un lieu. […] Ce qu’il faut entendre par « droit à la ville » : d’une part, le « droit à la participation » et, de l’autre, le « droit à l’appropriation ». […] C’est sur ce dernier que la plupart des défenseurs du droit à la ville ont d’abord mis l’accent en réaction contre les projets, les politiques et les mesures visant à limiter voire à éliminer la présence physique et active du peuple dans certains espaces urbains. Ne serait-ce qu’en faisant disparaître les lieux propices à une telle présence. S’approprier un espace, c’est, bien sûr, y accéder, l’occuper et 6 /32 Discussions
en user. Mais c’est aussi, et peut-être surtout, comme le souhaitait Lefebvre, produire un espace urbain qui réponde aux besoins et aux désirs des habitants eux-mêmes. Parce que l’appropriation permet un usage « plein et entier » de l’espace urbain dans le cours de leur vie quotidienne, celui-ci doit être produit de manière à rendre possible cet usage. On aura compris que, aux yeux des représentants les plus radicaux de la pensée critique sur la ville contemporaine, la valeur d’usage de l’espace urbain doit être le premier élément à prendre en considération dans les décisions qui concernent sa production. […] En attendant, le « droit à la ville » demeure, dans la pratique, une exclusivité réservée aux classes possédantes et aux élites passées à leur service. […] Plus que jamais, notait le géographe marxiste David Harvey, « les droits de la propriété privée et du taux de profit priment sur tous les autres ». Page 9. Jean-Pierre Garnier, Une violence éminemment contemporaine. Essais sur la ville, la petite bourgeoisie intellectuelle et l'effacement des classes populaires. Éditions Contre-Feux, Agone, 2010.
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Avant de prendre nos quartiers
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Avant de prendre nos quartiers
Je lisais quelque part que même une chambre d'hôtel, qui n'est pourtant pas l'exemple le plus évident d'un lieu personnel, dévoile bien vite les traits de son hôte. Dans les polars, c'est drôlement utile d'ailleurs. Alors chez soi, c'est encore pire. Un peu comme si notre dedans se donnait à voir. À partir des objets présents, de ceux qui ne sont pas là surtout, de la lumière qu'on laisse poindre ou celle que l'on cantonne à dehors, de l'arrangement des bouquins sur l'étagère et de la vaisselle dans des endroits loufoques, de la manière dont l'espace s'empare des irréductibles d'une maison : un lit, une cuisine, un siège. Les lieuxcommuns se mettent à écrire une histoire. Ils deviennent support au déploiement des habitudes et nous permettent d'habiter. On va s'installer dans un lieu où différentes histoires se seront déjà déroulées, les locataires sont partis… sans partir. On va prendre nos quartiers à notre tour. D'ailleurs, j'ai pas bien réussi à me souvenir de ce que ça veut dire « prendre ses quartiers », on dirait l'armée !?
� Ça me rappelle deux anecdotes tout ça. Quand j’arrive chez quelqu’un, je finis toujours par jeter un coup d’œil à la bibliothèque. Un peu comme si je pensais « dis moi ce que tu lis je te dirai qui tu es ». Il y a quelque temps, donc, je m’en vais crécher chez des amis qui vivent en colocation. Mais pas une bête colocation de nécessité économique, nan. Plutôt une forme de vie collective, un peu un communisme à l’échelle de cinq, six personnes : ta bouffe c’est la mienne, on mange ensemble, tes 9 /32 Discussions
meubles sont les miens, t’as besoin d’un truc je t’aide, je m’occupe de tes potes si t’es pas là, etc. Et là… pas de bibliothèque. Deux pauvres livres qui se battent en duel sur une des tables basses. Intrigué — je sais je suis un peu livro-rigide sur les bords — je leur fait part de mon étonnement quant à l’absence de bouquins. Et ils me répondent que si si, ils en ont bien, mais chacun sa bibliothèque dans sa piaule. Quelques jours plus tard, avec ces même amis, on va en voir d’autres qui habitent dans une grande longère dans les terres. Là, pareil, bouffes partagées, potager collectif, grande salle commune et tutti quanti. Mais dans le salon : du papelard partout, l’espace divisé de cette grande salle était carrément défini par les meubles qui portaient les livres. Et sur chaque livre une petite gommette : les rouges c’était ceux de machin, les bleues ceux de bidule, etc. Là je me suis dis que, plus que le contenu réel des bibliothèques, c’était la place que les livres et leurs meubles occupaient dans l’espace de vie qui était évocateur du fonctionnement des personnes et notamment de leur rapport avec la connaissance, ou au moins avec le livre. Pour les premiers c’était de l’ordre de l’intime, du personnel, pour les seconds ça semblait plus dans le partage et dans l’invitation, dans une forme de collectivisation du texte. Sur un autre registre, quand tu parles des irréductibles d’une maison, je pense que tu t’es déjà fait la remarque aussi que, lorsque on est chez des jeunes gens, le meuble central c’est souvent le canapé, accompagné éventuellement d’une table basse.
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La table à manger et les chaises, c’est presque une option. Quelque chose me dit qu’on doit pouvoir dégager un constat de ces habitudes culturelles de l’ameublement. Je pense que les rapports sociaux sont aussi définis par ce genre de choses. Par exemple, une table c’est un média : quand on est assis autour on est tous au même niveau, tous unis par cet espace, mais en même temps on est séparés physiquement les uns des autres. Et puis une table ça invite aussi à se nourrir, on ne reste jamais autour d’une table sans un truc à boire ou à manger. À l’inverse, le salon et son mobilier — canapé, table basse et pouffes — sont moins unifiés, plus flottant. Il n’y a pas de lien physique entre les personnes, encore moins quand il y a une télé. Souvent il y a de la distance entre les gens et c’est inconfortable d’y manger. Pourtant on y est plus relâché, les corps sont moins contraints, plus mous. C’est un espace beaucoup moins défini et par conséquent plus libre. Bref, je ne sais pas s’il existe une sociologie de l’ameublement, mais je pense qu’il y a matière à y réfléchir. PS : ah et oui, prendre ses quartiers vient de l’expression militaire : c’est à dire s’installer dans un endroit pendant une période (l’été ou l’hiver).
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Oui, les rapports sociaux sont définis par la manière d'organiser l'espace, vraiment. Et on a tendance à souvent l'oublier, on ne pense pas toujours nos rapports avec les autres en terme de distance, de proximité, d'éloignement, de barrières, de dehors et de dedans. Et le visiteur dans tout cela ? Celui qui visite, qu'il débarque à l'improviste ou qu'il ait été convié, c'est toujours un peu un intrus, pas forcément dans le sens négatif mais dans le fait qu'il entre dans un univers tout codé, qui n'est pas celui du quartier, ni celui d'une institution, mais le chez-soi de quelqu'un d'autre. Certains codes sont enregistrés bien sûr, à cause des irréductibles. Il y a, même dans les lieux privés, tout un ensemble de lignes de convenances à respecter. Le visiteur doit savoir maintenir la « bonne » distance en fonction de la place laissée libre à l'improvisation par celui qui occupe les lieux. C'est pas vraiment révolutionnaire de rappeler cela mais j'ai l'impression que quand on transpose cela à l'appartement-témoin, ça permet de questionner les échanges qu'il peut y avoir entre les visiteurs de l'expo et les habitants de l'appartement. Quels codes préexistent dans un lieu d'exposition et comment on peut s'en emparer ? En jouer ? S'amuser à déplacer les murs, faire des trous dedans pour regarder ailleurs. Accueillir des visiteurs qui vont et viennent, mettre en forme une vie dite quotidienne devant des inconnus, donc une vie plus si quotidienne, pas vraiment secrète puisqu'exposée, pas si déterminée puisqu'inventée au quotidien. Qu'est ce donc que cette vie quotidienne là ?
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J'ai questionné un ami qui est hébergé chez quelqu'un depuis plus d'un an. Ça se passe bien mais il persiste à dire qu'il ne se sent pas chez lui. Je lui demande un peu intriguée, en faisant le même exercice en silence en même temps, qu'est-ce que ça veut dire « chez moi ». Parce que chez moi je peux sauter, je peux crier, je peux me regarder dans la glace et faire des grimaces, froncer les sourcils, vérifier l'expression « sourire jusqu'aux oreilles », pousser des cris d'animaux, rester des heures à regarder le mur, écouter 18 fois la même chanson. PS : quartiers d'hiver ? ça sonne chouette.
� C’est marrant ça résonne assez bien avec ce que nous ont dit des médiatrices de l’exposition : des visiteurs n’osaient pas rentrer dans l’appartement-témoin parce que des gens y travaillaient ! C’est curieux comment un espace est finalement défini par l’usage qu’on en fait. De manière un peu capilo-tractée je dirai que ça nous ramène à la distinction que fait Proudhon1 entre la « possession » et la « propriété ». La première est définie par l’usage, un peu comme un démon possède un individu : il est dedans, il le fait agir et vivre. Alors que la seconde est plus un droit autoritaire et de type « voies impénétrables » : j’en fais ce que je veux et ça te regarde pas. Si je veux démolir ou vendre ma maison ça me regarde, si je veux la laisser inhabitée pendant 50 ans « j’en ai le droit », même si toi, tu dors dehors. Plus juridiquement, la notion de 11 /32 Discussions
propriété en droit français tient dans trois principes : l’usus et le fructus (utiliser la terre d’un côté et jouir de ses fruits de l’autre, pour faire simple) et l’abusus (la possibilité de détruire, vendre, aliéner la terre, toujours pour faire très simple). En schématisant, la possession c’est essentiellement l’usus et le fructus, alors que la propriété privée tourne surtout autour de l’abusus au détriment du caractère collectif de l’usage. Pour illustrer, on pourrait dire que le mec qui décide de mettre du mercure dans ses terres pour faire une expérience, dans le régime de propriété il en a potentiellement le droit même si ça pollue le ruisseau d’en bas et détruit les parcelles en aval. Par contre, dans un régime de possession, les autres individus pourraient réclamer de ne pas être soumis aux abus individuels : l’usus et le fructus comme droits personnels, l’abusus comme responsabilité collective. Pour en revenir à ton pote, je pense qu’on est là dans un statut qui est entre deux. Parce que même celui qui l’héberge ne doit pas s’autoriser à forniquer bruyamment ! Il est « chez lui », sans l’être tout à fait. Finalement ni l’un, ni l’autre ne possède complètement ce lieu parce qu’il devient un lieu d’existence collective avec une place très limitée à l’intimité.
1. Pierre-Joseph Proudhon, Qu’est-ce que la propriété ?, 1840
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En fait, posséder un lieu c’est aussi ça : savoir qu’à cet endroit on peut échapper au regard d’autrui, à tout jugement moral tant que nos actes ne portes pas préjudice à la collectivité. Finalement c’est peut-être ça la moindre des choses : avoir la possibilité d’être dans l’intimité pour pouvoir posséder. PS : Quartiers d’été aussi ! D’ailleurs c’est le nom de festivals urbains à l’origine destinés aux habitants pauvres des quartiers populaires qui ne peuvent pas partir en vacances.
� Il y a un film qui questionne un peu cela : Locataires2. C'est l'histoire d'un jeune homme qui pose des publicités sur les poignées de porte des maisons. Il repasse trois jours après pour voir si on les a prises et si elles sont toujours là. Si oui, il s'installe pour quelques jours dans l'appartement. Il occupe le lieu, il l'habite pendant que ses propriétaires sont absents, mais sans laisser de traces. Il ne détruit rien, ne dérobe pas le moindre objet. Il laisse chaque chose à sa place, fait voyager les ustensiles pour les faire revenir au même endroit. Rien n'a changé dans la maison. Par contre, il prend
2. Kim-ki Duk, Locataires, 2004
chaque fois une photo, souvent à côté de photographies déjà existantes des locataires officiels. Un peu comme pour s'inventer une vie, en se créant des souvenirs. Rien n'a changé donc, et pourtant, il y a vécu, et avec lui, dans ses gestes, il emporte la maison. Ce film laisse une impression trouble, et c'est cela qui interpelle. Justement, on pourrait dire que cet étonnant locataire, mystérieux, silencieux, incompréhensible parfois, gracieux dans sa manière d'évoluer dans des espaces qu'il ne connaît pas et qui ne sont pas à lui, on pourrait dire qu'il en prend possession. Comme un démon possède un individu : il le fait agir et vivre comme tu dis. Il fait vivre ses espaces d'emprunt, un temps, pour les rendre comme s'ils avaient dormi pendant que leurs propriétaires étaient en vacances. Et l'on ne s'insurge pas face à cette violation de la propriété car justement, ce n'est pas l'intimité qui est violée. Pas de violence d'ailleurs, juste une infinie (et perturbante) douceur. Il franchit la porte, il entre en mouvement. « Le seuil se présente comme une attente. C'est le lieu du commencement. Ce qui correspond avec la signification du limen qui en latin veut dire, à la fois, le seuil d'une porte et le début d'un processus. »3 Là aussi, le Locataire ne fait que passer. Où sont nos seuils dans l'appartement-témoin ? Comment prendre possession du lieu ? Une fois installés, quel sera le mouvement, notre mouvement ?
3. Thierry Paquot, Un philosophe en ville, Essais, Infolio, 2011
PS : C’est pas dans la ville d'Orange qu’ils vont faire ça…
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Mmh, c’est quand même curieux l’histoire de ce film. L’idée qu’un individu ne vive que par les traces d’existence des autres est quand même déroutant. Si le Locataire, semble faire corps avec le lieu où il est, comme un bernard l’ermite qui se trouve dans la coquille d’un autre, pour autant je me demande si habiter ce n’est pas aussi agir sur ce même lieu. Sinon j’aurais tendance à dire qu’on « évolue dans », non ? Si on prend l’idée du squat je dirais qu’il y a ceux qui habitent et ceux qui occupent. Les premiers laissent des traces de leur existence (déplacement et changement de mobilier, marques sur les murs, bricolage, etc.) et s’approprient le lieu alors que les seconds empruntent un lieu qu’ils ne souhaitent pas devenir le leur, même temporairement. Pour le coup, dans l’appartement-témoin, il ne s’agit pas d’y vivre mais bien d'y habiter, dans le sens où on agit sur lui et pas seulement dans lui. C’est peut-être pour ça que les cabanes de la Zad à Notre-Dame-des-Landes sont si impressionnantes : elles transpirent le désir de faire, d’agir, de tordre le lieu à ses convictions les plus fortes. Pourquoi confier à d’autres le soin de dessiner pour nous ce qui peut être le prolongement de notre corps ? PS : Orange-outan.
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Si on arrête là notre jeu d’aller-retour on pourrait peut-être y trouver en creux ce qui compose « l’habiter » : - d’abord, il y a l’idée d’être dedans, à l’intérieur du lieu. S'ancrer / S'abriter / Des deux pieds. - ensuite, on évoque l’importance d’agir dans ce lieu. Aménager / Construire / Inventer. - et, c’est parce qu’il est important d’agir dans ce lieu que l’intimité est primordiale, elle libère l’être du regard de l’autre. Jouer / Rêver / Se cacher. - enfin, nous croyons que c’est en agissant sur le lieu qu’on touche à la dernière composante de « l’habiter », par là il devient une extension de l’être, une projection de nos désirs. Habiter / « de la cave au grenier »4 / Vivre. PS : Ivan Illich avait défini l'habiter comme une manière d' « articuler sa biographie dans le paysage »5, de déterminer ses conditions d'existence. Il opposait le pouvoir d'habiter au simple fait de se loger, qui reviendrait à « exiger un certain nombre de mètres carrés dans l'espace construit ». Habiter au sens d'expérimenter, en construisant, activement. Jil Daniel & Lucile Froitier 4. Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, 1957 5. Ivan Illich « L’art d’habiter », Dans le miroir du passé. Conférences et discours, 1994
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Le territoire où se déploient et se répètent de jour en jour les gestes élémentaires des « arts de faire », c’est d’abord l’espace domestique, ce logis dans lequel on brûle de « se retirer », parce que, là, « on aura la paix ». On « rentre chez soi », en ce lieu propre qui, par définition ne saurait être le lieu d’autrui. […] Ce territoire privé, il faut le protéger des regards indiscrets, car chacun sait que le moindre logement dévoile la personnalité de son occupant. Même une chambre d’hôtel anonyme en dit long sur son hôte de passage au bout de quelques heures. Un lieu habité par la même personne pendant une certaine durée en dessine un portrait ressemblant, à partir des objets (présents ou absents) et des usages qu’ils supposent. Le jeu des exclusions et des préférences, l’arrangement du mobilier, le choix des matériaux, la gamme des formes 14 /32 Discussions
et des couleurs, les sources de lumière, le reflet d’un miroir, un livre ouvert, un journal qui traîne, une raquette, des cendriers, l’ordre et le désordre, le visible et l’invisible, l’harmonie et les discordances, l’austérité ou l’élégance, le soin ou la négligence, le règne de la convention, des touches d’exotisme, et plus encore la manière d’organiser l’espace disponible, si exigu soit-il et d’y distribuer les différentes fonctions journalières, tout compose déjà un « récit de vie » avant que le maître de céans n’ait prononcé le moindre mot.
Page 205. Michel de Certeau, Luce Giard, Pierre Mayol L'invention du quotidien. Tome 2. habiter, cuisiner. Folio Essais, 1980. 15 /32 Discussions
Amaranthe
Amaranthe* — C’est là. — Là quoi ? — Bah le terrain. Tu sais, je t’en ai parlé : celui qui appartient à tout le monde. — Oui eh bien ? — Ben c’est beau, nan ? Cet espace vide là, à moitié en jachère. Pseudo terrain vague, inhabité mais vivant. — Inusité tu veux dire. Parce que s’il est vivant il est habité. — Ouais c’est ça, inusité.
— Là tu vois, c’était ici que tous les voisins de mes grands-parents parquaient leurs bêtes. C’était pas tous des paysans mais chaque famille avait sa vache ou son cochon quand même. — Et maintenant ? — Bah ’y a rien que de l’herbe tu vois bien. — Oui mais ça appartient à qui maintenant ? — À tout le monde j’t’ai dis. — Comment ça à tout le monde ? — C’est comme une co-propriété quoi. Si t’habites entre le pont et la grande maison jaune, en gros, bah t’es co-proprio, et si tu te fais la malle pour bosser en ville, bah c’est plus à toi. Normal t’es plus dans le coin, donc t’en a plus l’utilité. — Pas faux. Mais c’est un peu à l’abandon quand même. 16 /32 Discussions
Amaranthe
— Ouaip, les gens du coin ont laissé ça en vrac. La moitié d’entre eux doit pas savoir que ça leur appartient un peu : ils ont pas de cochon en même temps, donc ils y pensent pas. Ils se réveilleront si la mairie veut racheter le terrain pour faire une route ou une connerie du genre : elle va devoir demander à tout le monde et donc y’aura des pépètes en jeu.
— Franchement, ça te fait pas mal au cœur ? — De quoi ? — Bah de voir ce terrain laissé comme ça parce que les gens s’en foutent ? — Si
— Tu te souviens de l’étudiant Suisse qui vivait près de chez nous ? Eh ben il m’a raconté un truc qui s’est passé à Lausanne il y a quelques années. J’ai plus tous les tenants et les aboutissants en tête mais c’était assez édifiant. En gros, il y a un collectif de squatteurs qui s’est mis à construire une baraque en paille dans un parc public de la ville.
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— Comme ça ? Devant les gens ? — Ouaip, ils ont même fait du chantier un chantier participatif. L’idée c’était d’un côté de parler de la construction écolo, et de l’autre de poser dans la rue la question du logement. — C’est-à-dire ? — D’abord, je crois qu’il y a un gros problème de logement à Lausanne, et ce collectif pense que c’est dégueulasse de laisser cette question au marché de l’immobilier et à ses gestionnaires. C’est trop important pour que ces mecs là s’en occupent. — Ah ouais, du genre : c’est aux habitants de se réapproprier leur logement… — C’est ça, enfin, leur habitat plutôt. Parce qu’ils posent la différence entre se loger et habiter. Pour eux se loger, c’est avoir un toit, alors qu’habiter c’est avoir une vie sous ce toit. Enfin dans les grandes lignes. — Ok je vois. Donc du coup ils l’ont habité cette maison ? — Je crois que c’était l’objectif mais il faudrait vérifier. Enfin, oui ils l’ont habité, dans le sens où ils y étaient tous les jours pour la construction, la discussion avec les passants tout ça. Maintenant, est-ce que c’était un lieu dans lequel ils vivaient, avec l’intimité que ça induit, je sais pas. D’autant qu’ils ont mis vachement de temps à la construire. Enfin, non, ils ont mis longtemps à préparer la construction, mais après ça a été vite : À vingt-trente, ça traîne pas ! — Héhé ouais. En même temps ils ont pas dû avoir trop le choix non ? T’as plutôt intérêt à être rapide si tu construis illégalement dans l’espace public !
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— Vrai. Mais du coup le long temps de préparation ça leur a permis de commencer à parler en amont. De récupérer des matériaux. Et au final, ça leur a coûté beaucoup moins cher. — Tu m’étonnes. Et aujourd’hui, c’est devenu quoi ? Ça tient, ou ils ont été expulsés ? — Ça s’est vite terminé. Six mois plus tard, la maison a été incendiée. — Incendiée ? Carrément ! Eh bah ils y vont pas de main morte les gonzes ! Ils savent qui c’est ? — Aucune idée. Je crois pas non. Quelqu’un que ça gênait sans doute : un mec de l’immobilier, un habitant réactionnaire, ou un mécontent du même acabit. — Je vois le genre. — Il faut dire que ça proposait quand même des options plutôt radicales : on sort du système marchand pour le logement, on s’écarte des spécialistes de l’urbanisme, on fait des choix dans le sens de l’écologie radicale, on se réapproprie l’espace public pour en faire un espace commun. — Privé tu veux dire, si les mecs vivaient dedans c’est un peu une privatisation d’un terrain qui appartient à tous. — Mouais, je crois que c’est un peu plus complexe que ça, mais je connais pas assez bien la situation pour être sûre. En même temps est-ce qu’on peut vraiment dire que l’espace public c’est un espace qui appartient à tous ? C’est surtout un espace qui appartient à l’État ou aux institutions, non ? — Dans l’absolu non. — Dans l’absolu, ok, mais dans les faits ? Et puis un espace public et un espace commun c’est pas la même chose. C’est un peu comme ton champ là. Il appartient à tous mais pas à l’institution si j’ai bien compris ce que tu m’as dis. — C’est ça.
— Eh bah un espace public ça n’appartient pas à tous, ça appartient à la municipalité. « Tous » il peut toujours se rhabiller s’il a besoin de cet espace là pour quelque chose qui leur plaît pas. — C’est pas faux. — C’est d’ailleurs ce qui a dû effrayer dans cette histoire. Tout d’un coup les gestionnaires se rendent compte que certains de leurs administrés veulent faire sans eux. — En même temps, t’imagines le bordel si tout le monde se décide à construire n’importe où, n’importe comment ? — Ouais, il faut le reconnaître, mais il y a peut-être d’autres solutions collectives à trouver. En tout cas, cette maison là elle a permis de poser plein de choses sur la table.
— Tu crois, que ça marcherait un truc de ce genre là chez nous ? — En ville ? Je sais pas. Ici peut-être plus. En tout cas il y a déjà un tissu social qui ne dit pas son nom. Rien que ton champ, je suis sûre que si on se mettait à y faire quelque chose ça interpellerait les voisins. — Tu crois ? — Tiens, demain, on va voir le voisin, le vieux qu’habite la toute petite maison. On lui demande une binette et on creuse un sillon de là à là. — Et tu vas en faire quoi de ton sillon ? — Aucune idée, mais je mets ma main à couper qu’il viendra nous voir.
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Amaranthe
— Ah ouais : « Alors les filles, on jardine ? Mais c’est pour planter quoi c’t’affaire ? » — Héhé, et là on sort une connerie du genre « C’est pour mettre des haricots. » — « Des haricots ? À cette saison ? Ah dam ça va pas fonctionner votre bitrak. Mettez plutôt des poireaux, c’est la lune. » — « Ah bon ? mais on n’en a pas ! » — Voilà, c’est ça. Et là tu vas le voir aller chez le gars qui habite à gauche à tous les coups. Tu sais celui qui est au chomdu. — C’est le gars qui vit chez sa mère et s’occupe d’un potager c’est ça ? — C’est ça. Et le vieux qui lui demande : « ’Y a les gamines en vacances qui voudraient semer des poireaux dans le petit pré. T’aurais pas quelques graines pour qu'elles s’amusent. » — On pourrait aller le voir directement alors ? — Mais non, tu vas pas lui ôter le plaisir de nous aider ! — Héhé, t’as raison.
— Bon par contre il faudra que quelqu’un s’occupe de nos poireaux quand on sera de retour en ville. — Ouaip mais pour ça il faudra qu’on leur paye un verre à tous une fois les semis faits. On aura bien mérité ça. — Bonne idée, j’irai prendre du rouge dans la cave de mon père, il dira pas non si on les invite. Et avec un peu de chance Bob et Margareth les anglais se joindront à nous parce qu’ils auront entendu du bruit. Ils ratent jamais une occasion de boire un coup ces deux-là. — Et là on leur explique que les semis qu’on fait dans le pré ça doit servir à un gros repas pour tout le monde. 19 /32 Discussions
— Tiens c’est pas bête. Tu sais, je regardais le prix des poules pour me marrer l’autre jour. En fait, c’est pas très cher. On pourrait même revenir avec aux prochaines vacances. — Héhé, t’emballes pas non plus. Tu vas pas leur lourder de la volaille sur les bras s’ils en veulent pas. Mais rien n’empêche d’en parler. — Mmh, c’est juste. — Bon c’est pas l’heure du repas là ? Si on est en retard ton père va encore râler. — Vrai, on y go. N’empêche, ce serait quand même cool.
* L'amaranthe est une plante annuelle pionnière des friches et des terrains vagues, capable grâce à ses graines de s'emparer d'un sol vierge et de s'y établir, de l'ameublir, puis de préparer au bout de quelques années l'arrivée de nouvelles espèces vivaces.
Le couloir de la cuisine était clair, vitré des deux côtés, et un soleil brillait de chaque côté car Colin aimait la lumière. Il y avait des robinets de laiton soigneusement astiqués un peu partout. Les jeux des soleils sur les robinets produisaient des effets féeriques. Les souris de la cuisine aimaient danser au son des chocs des rayons de soleil sur les robinets, et couraient après les petites boules que formaient les rayons en achevant de se pulvériser sur le sol comme des jets de mercure jaune. […] — Je ne sais pas ce qu’il y a, dit Chick, est-ce que c’était comme ici avant ? — Non, avoua Colin. Ça change partout. Je ne peux rien y faire. C’est comme la lèpre. C’est depuis que je n’ai plus de doublezons. […] — Viens voir le couloir de la cuisine, dit Colin. — Je te suis, dit Chick. À travers les vitres, de chaque côté, on distinguait un soleil terne, blafard, 20 /32 Discussions
semé de grandes taches noires, un peu plus lumineux en son centre. Quelques maigres faisceaux de rayons réussissaient à pénétrer dans le couloir mais au contact des carreaux de céramique, autrefois, si brillant, ils se fluidifiaient et ruisselaient en longues traces humides. Une odeur de cave émanait des murs. La souris grise à moustaches noires, dans un coin, s’était fait un nid surélevé, elle ne pouvait plus jouer sur le sol avec les rayons d’or comme avant. [...] — Ça ne chauffe pas, les radiateurs ? demanda Chick en remontant son col de veste. — Si, dit Colin, ça chauffe toute la journée, mais il n’y a rien à faire. C’est ici que ça a commencé. — C’est la barbe, dit Chick. Il faudrait faire venir l’architecte. — Il est venu, dit Colin. Et depuis, il est malade. L’escalier diminuait brusquement de largeur à l’étage de Colin et Isis pouvait 21 /32 Discussions
toucher à la fois la rampe et la paroi froide sans écarter les bras. Le tapis n’était plus qu’un léger duvet qui couvrait à peine le bois. Elle atteignit le palier, haleta un peu et sonna. […] — Tu as mal ? demanda Isis. — Oui, dit Chloé mais pas beaucoup. La chambre a changé, tu vois. — Je l’aime mieux comme ça, dit Isis. C’était trop grand avant. — Comment sont les autres chambres ? dit Chloé. — Oh, bien, dit Isis évasivement. Elle se rappelait encore la sensation du parquet froid comme un marécage. — Ça m’est égal que ça change, dit Chloé, du moment qu’il fait chaud et que ça reste confortable. — Sûr ! dit Isis. C’est plus gentil, un petit appartement. […] Le jour était bleu dans la chambre et presque vert aux angles. Il n’y avait 22 /32 Discussions
pas encore trace d’humidité et le tapis restait assez haut, mais une des quatre fenêtres carrées se fermait presque complètement. Isis entendit le bruit humide des pas de Colin dans l’entrée. […] On ne pouvait plus entrer dans la salle à manger, le plafond rejoignait presque le plancher auquel il était réuni par des projections mi-végétales mi-minérales, qui se développaient dans l’obscurité humide. La porte du couloir ne s’ouvrait plus, seul subsistait un étroit passage menant de l’entrée à la chambre de Chloé.
Extraits. Boris Vian, L'Écume des jours, 1946
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« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
« La moindre des choses » VS « Le minimum vital » 24 /32 « La moindre des choses » VS « Le minimum vital ».
« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
Hervé et Pasco sont deux amis congolais qui m'apprennent à parler leur langue, le lingala. La dernière fois, j'ai cherché à savoir comment on disait bonne nuit pour pouvoir leur souhaiter quand je les quitterai la semaine suivante. Le soir venu, je sors avec eux de la structure sociale dans laquelle ils sont hébergés. Ils me raccompagnent et comme il se fait tard, je leur lance mon « Olala bien » (qui signifie donc « Bonne nuit »). Ils ne sont pas surpris, ils répondent simplement : « En fait, on dit plutôt « Bon sommeil » dans cette situation, parce qu'une bonne nuit au 115, ça n'arrive pas ». Habiter quelque part, c'est pouvoir déployer des habitudes, c'est faire « comme chez soi ». Or, il est certains lieux que l'on définit pourtant bien comme des logements mais où cela paraît plus compliqué. Il existe par exemple des structures sociales comme les Centres d'hébergement d'urgence où tout est strictement organisé et pensé pour que l'on ne se permette de déployer aucune habitude. On dira que ces centres ne sont censés que répondre à l'urgence, qu'ils ne sont pas fait pour que l'on s'y installe ni que l'on s'y sente chez soi. Oui en effet, ça se voit. Pas de paillasson « Welcome » à l'horizon. Mais Hervé et Pasco y sont respectivement depuis 9 et 6 mois, alors, ça mérite qu'on s'y attarde un petit peu.
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Beaucoup seront d'avis que c'est certes mieux que rien, qu'« entre ça et dormir sous un pont, vraiment y a pas photo... ». Peut-être, bien sûr oui, mon propos n'est pas de dénoncer les CHU et tous les travailleurs sociaux qui y font sans nul doute un boulot formidable. L'idée n'est pas de dévaluer les « maraudes » et tout ce travail extrêmement difficile et salutaire de faire des tournées dans la ville la nuit pour proposer un toit à ceux qui risquent de mourir de froid. Je suis bien consciente de l'objection légitime, celle qui revient toujours et à juste titre, qui concerne la pauvreté des moyens et la nécessité de choisir dans l'urgence. Bien sûr que c'est important, et heureusement que des structures pour se mettres à l'abri sont mises en place (si ce n'est qu'elles ferment toutes au mois de mars même si le printemps n'a pas encore pointé le bout de son nez… ).
« La moindre des choses » VS « Le minimum vital ».
« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
Mais puisque l'on réfléchit ici sur l'habiter et la manière d'inventer notre quotidien, peut être peut-on, par le biais de la reconnaissance du droit culturel, apporter un autre éclairage pour aborder la question. Le droit culturel, qu'est ce que c'est ? On pourrait le définir par le droit pour une personne, seule ou en groupe, de choisir et d'exprimer son identité et d'accéder aux références culturelles, comme à autant de ressources culturelles nécessaires à son processus d'identification. Et cela pour montrer que les réponses à l'urgence ne sont pas incompatibles avec d'autres droits fondamentaux et qu'il ne s'agit pas de dénoncer un système, mais plutôt de changer d'approche et de regard, de revaloriser le droit culturel pour qu'il ne soit pas la cerise sur le gâteau de la pyramide des besoins de Maslow. Celle-ci classifie en effet les besoins humains en les hiérarchisant avec à la base les besoins primaires dits fondamentaux et au sommet de la pyramide, sur la partie la plus étroite, posés en équilibre précaire, les droits culturels. 1. Joseph Wresinski, Culture et grande pauvreté, 2004
L'idée, c'est de montrer que « l'action culturelle est effectivement primordiale. Elle permet de poser la question de l'exclusion humaine d'une manière plus radicale encore que ne le fait le droit au logement, au travail, aux ressources ou à la santé. On pourrait penser que l'accès à d'autres droits devient inéluctable lorsque le droit à la culture est reconnu».1
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« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
Pourquoi parler de ces droits ? Parce que lorsque l'on réfléchit à la question de l'habiter et à la manière que l'on a de vivre notre quotidien, se dessine en creux la question du respect accordé aux droits culturels. Et si, le respect de ces droits était la première condition du développement des personnes et de leurs liens sociaux ? Et si toute violence commençait par une violation des droits culturels ? Dans les structures type 115, aucun de ces droits n'est reconnu et la vie quotidienne est rythmée autour d'obligations administratives organisées par les règles de vie. On se lève à 7 heures, pas parce qu'on a fini de rêver mais parce que c'est comme cela, on boit le café, on pointe, on va se laver, on sort jusqu'à 18 h 30 pour revenir pointer, on fait la queue pour avoir son repas, on mange, on pointe, et on va « sommeiller ». On dort dans des boxs non fermés, sur le box figure un numéro, c'est celui qui nous définira pendant tout le séjour ici. C'est le « minimum vital », le « strict minimum » oui, mais ça n'est pas « la moindre des choses ». Pour mieux saisir la différence on peut prendre l'exemple de l'opposition entre le besoin de s'alimenter qui correspond à un besoin organique de manger pour assurer ses fonctions vitales, et un droit qui lutterait pour une relation digne qui permet à chacun de nourrir et de se nourrir. Il s'agit de penser le culturel comme des savoirs et des saveurs. Des savoir-être, des savoir-vivre pour toucher les êtres et pour être touché. Ce serait faire des liens libres avec les choses, se nouer au monde concret.
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« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
Une approche culturelle de l'habiter, ça ne voudrait pas dire s'attacher à un milieu dans lequel on est, ni accumuler un trésor, mais plutôt serait se situer dans une sorte d'ouverture au monde pour se construire, les autres avec. De manière plus large, l'oubli de la dimension culturelle des droits de l'homme (celui de se loger ou de se nourrir) reste un des facteurs le plus prégnant dans la persistance de la pauvreté. Ikea propose maintenant des maisons en kit pour les réfugiés climatiques, formidable ! Mais le renforcement des capacités des personnes ne se fera que par l'exercice des droits culturels, par le respect des savoir-être et des savoir-faire, des valeurs et des identités, des langues et du quotidien. En terme immédiat, certaines violations (comme l'absence de logement) nécessitent un traitement plus urgent, mais cela ne veut pas dire qu'elles soient moins grave si elles persistent. Faire naître ce qu'on appellera « la moindre des choses » permet de ne pas laisser s'installer la pauvreté dans la durée. On n'habite pas au 115, à l'hôtel, dans des foyers de jeunes travailleurs, dans des chambres de 7 mètres ², chez les marchands de sommeil, on y loge, on y reste. Le droit au logement, d'accord. À condition d'avoir le droit d'y habiter. Deleuze, quand il parle du nomade, parle de réciprocité par rapport au lieu. Le nomade habite les lieux et les fait lui-même croître. Il y a une idée de construction : « Le nomade est fait par le désert et fait le désert ». Il est important de pouvoir notifier notre action sur les lieux. Que nos manières de vivre aient une chambre d'écho, de répercussion, de vibrations des vies et existences qui les traversent. 28 /32 « La moindre des choses » VS « Le minimum vital ».
« La moindre des choses » VS « Le minimum vital »
De la même manière, à plus grande échelle dans la ville, il s'agit de ne plus se penser comme résident mais comme habitant. Aller à l'encontre de certaines politiques de la ville qui tendent à ne permettre que des fonctionnalités rigoureusement prévues. Certains auteurs parlent d'une primauté du social sur l'urbain, pour dire que les habitants font autant la ville que les murs, car ils y développent des mentalités, des conceptions de vie, des états d'esprit et de solidarité qui se renforcent selon la forme de la ville. Les lieux ne sont pas des réceptacles passifs pour accueillir des hommes. Les bâtiments ne sont pas des machines-à-loger. L'essentiel est de laisser ouverte la possibilité de transformation pour que l'architecture et l'urbanisme fassent sens par « les mouvements qui les traversent, les transitions qu'ils facilitent, les en-cours qui les rythment ». 2 Lucile Froitier Ces réflexions sont inspirées de plusieurs grands « chantiers ». D'abord de l'expérience de la clinique de la Borde, établissement psychiatrique fondé en 1953 dans un château en ruines par le docteur Jean Oury et son équipe, où un projet de théâtre est mis en place chaque année, filmé par Nicolas Philibert en 1996 dans le film La moindre des choses. Ensuite du travail mené par l'association « Culture pour tous », qui encourage et promeut la reconnaissance et le respect de ce que l'on appelle les droits culturels. 2. Chris Younes, Thierry Paquot, Philosophie de l’environnement et des milieux urbains, 2010
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Dans ma maison vous viendrez D’ailleurs ce n’est pas ma maison Je ne sais pas à qui elle est Je suis entré comme ça un jour Il n’y avait personne Seulement des piments rouges accrochés au mur blanc Je suis resté longtemps dans cette maison Personne n’est venu Mais tous les jours et tous les jours Je vous ai attendu Je ne faisais rien C’est-à-dire rien de sérieux Quelque fois le matin Je poussais des cris d'animaux Je gueulais comme un âne De toute mes forces Et cela me faisait plaisir Et puis je jouais avec mes pieds C’est très intelligent les pieds Ils vous emmènent très loin Quand vous voulez aller très loin Et puis quand vous ne voulez pas sortir Ils restent là ils vous tiennent compagnie Et quand il y a de la musique ils dansent On ne peut pas danser sans eux Il faut être bête comme l’homme l’est souvent Pour dire des choses aussi bêtes Que bête comme ses pied gai comme un pinson Le pinson n’est pas gai Il est seulement gai quand il est gai Et triste quand il est triste ou ni gai ni triste Est-ce qu’on sait ce que c’est un pinson D’ailleurs il ne s’appelle pas réellement comme ça 30 /32 Discussions
C’est l’homme qui a appelé cet oiseau comme ça Pinson pinson pinson pinson Comme c’est curieux les noms Martin Hugo Victor de son prénom Bonaparte Napoléon de son prénom Pourquoi comme ça et pas comme ça Un troupeau de Bonapartes passe dans le désert L’empereur s’appelle Dromadaire Il a un cheval caisse et des tiroirs de course Au loin galope un homme qui n’a que trois prénoms Il s’appelle Tim-Tam-Tom et n’a pas de grand nom Un peu plus loin encore il y a n’importe quoi Et puis qu’est-ce que ça peut faire tout ça Dans ma maison tu viendras Je pense à autre chose mais je ne pense qu’à ça Et quand tu seras entrée dans ma maison Tu enlèveras tous tes vêtements Et tu resteras immobile nue debout avec ta bouche rouge Comme les piments rouges pendus sur le mur blanc Et puis tu te coucheras et je me coucherais près de toi Voilà Dans ma maison qui n’est pas ma maison tu viendras.
Jacques Prévert « Dans ma maison », Paroles, 1946. 31 /32 Discussions
Titre
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Dates
1 /16 Les rĂŠsidents
24.09 --> 29.09
Collectif Etc —
Collectif d'architectes
En quelques jours, nous avons pris possession de notre espace dans le Lieu Unique. Nous avons commencé à y construire un appartement, d’une soixantaine de mètres carrés, dans lequel nous allons passer la fin de la semaine. Puis ce sera à d’autres d’y prendre place.
Après avoir monté les murs et fait les branchements électriques, nous avons pu commencer à emménager dans l’appartement. Pour l’occasion, nous avons réalisé une ligne de mobilier avec les matériaux de l’installation. On commence à se sentir chez nous. 2 /16 Les résidents
01.10 --> 06.10
Ecos + Flexible —
Association Ecos Collectif d'architectes Flexible
Stationnement du Velosynth créé par Luc Kerléo dans le cadre d'ALOTOF (A Laboratory On The Open Field), coopération et recherches artistiques initiées par ECOS.
Atelier sérigraphie « Le déjeuner sur l'herbe » proposé par Antonin+Margaux dans le cadre d'une création partagée avec les habitants de Nantes sud et ECOS. 3 /16 Les résidents
08.10 --> 13.10
J’aime beaucoup ce que vous faites —
Atelier de création graphique
La base Prises de repères, inventaire, états des lieux et premier café. On s’est installé dans l’appartement témoin. Notre projet en arrivant : habiter ce lieu dans le lieu. Sur la base de nos observations, d’activités domestiques simples et des différentes rencontres avec nos invités, nous avons questionné et modifié notre intérieur. Dans notre nouvel espace de travail temporaire, à la fois lieu de rencontre, d’exposition et de médiation, on s’est laissé prendre au jeu, comme à la maison. 4 /16 Les résidents
08.10 --> 13.10
L’émulsion Imprégnés par le contexte de l’exposition voisine, nous avons proposé des dispositifs incitant les visiteurs à éprouver à leur tour l’appartement-témoin. Avec pour but de se poser, d’échanger, et d’expérimenter ensemble, nous avons conçu et collé du papier-peint, organisé une surprise party sucrée, fabriqué et testé un nouvel outil numérique, recueilli un bichon, et édité un livret à dessiner. Le papier-peint Kroll La trame de construction de Lucien Kroll, réduite à l’échelle d’une largeur de scotch d’électricien, est tapissée sur le mur du fond de l’appartement témoin. Chacun peut, en apposant du scotch sur la trame, éprouver les volumes, tracer des murs et réaliser le plan d’une construction. Rapidement, les formes se multiplient et s’incrémentent. Les gauffres Vendredi, nous avons préparé des gauffres et invité nos voisins à les manger. Au choix : confiture, Nutella, sucre glace, chantilly et vermicelles. 5 /16 Les résidents
Une fenêtre en plus, une manette de Wii, une led infrarouge, 4 soudures et une cale en bois rendent un mur de l’appartement interactif. Une fenêtre numérique est projetée, les visiteurs peuvent l’ouvrir et la fermer. On fait défiler le paysage, on se projette, et on s’arrête sur l’environnement que l’on préfère. Objets Comment améliorer le confort de la maquette dans la maquette ? Des objets contre-collés à échelle 1 viennent agrémenter l’intérieur (cheminée, chaussures, plantes…) et l’extérieur (tondeuse, parabole, nain de jardin…) de l’appartement-témoin. Manipulables et ludiques, ils sont propices à de nouveaux scénarios. Ouvertures En extrayant des portes et fenêtres d’une planche d’ouvertures proposées par Lucien Kroll, et en les plaçant dans l’espace de la page, nous proposons aux visiteurs d’imaginer le contexte, d’inventer le point de vue et de dessiner les murs.
15.10 --> 20.10
Collectif Mit —
Collectif d'architectes Est-ce qu'elle a élu ici son domicile ? On construit, on hésite, on recommence, on défait,on se dispute, on se rencontre, on transforme, on laisse tomber, on respire, on recommence, on pousse les murs, on blague, on s’énerve, on réfléchit, on fait du bruit, on sort au soleil, on se tait, on rêve de fenêtres, on vole à travers le plafond… On est nous, on est là. On se demande si on peut habiter là, on va essayer. Est-ce qu’elle sera là ? Nous, on sera là.
6 /16 Les résidents
15.10 --> 20.10
Nous, on est invités à habiter, on vient on sera flous et légers on vient habiter sans se poser trop de questions avec notre quotidien. On emménage à notre image et rien n’est certain. Est-ce une habitation ?
7 /16 Les résidents
22.10 --> 27.10
Fertile —
Collectif d'architectes Réunion avec le collectif des Idéelles sur le projet de réaménagement du parc de la Roche, workshop avec les marchands de sable, amélioration de notre site internet, discussions autour de la maquette du caillou, etc. Finalement, nous étions « chez nous » pendant une semaine, l’appartement était le local que l’on n’a jamais eu.
D’ordinaire, notre terrain de jeu c’est la friche, avec toutes ses plantes à ciel ouvert, la grande échelle, l’espace public, la rue et le voisinage… Naturellement, nous avons investis l’espace extérieur de l’appartement avec la création d’une terrasse et un espace récréatif. La terrasse initialement prévue en pavés de carton n’a pas fonctionnée… Nous avons donc créé la piscine à cubes qui fut une belle réussite. 8 /16 Les résidents
29.10 --> 03.11
Bureau Cosmique —
Collectif d'architectes Appartement témoin au Lieu Unique. Occuper-l'appartement-témoinau-Lieu-Unique-pour-mettre-àl'épreuve-l'incrémentalisme, était la formule sous-entendue à celle de bienvenue : « Faites-comme-chezvous ! ». Seulement le format de cette expérience (l'exposition) en faisait une occasion déjà figée dans une fiction spectaculaire, entre exposant et EXPOSÉ. Cette configuration faisait de nous des instruments de l'architecture, arrachant légitimité à l'action en la montrant du doigt. Ainsi, prisonniers volontaires, nous n'étions plus que les artefacts d'une virtualité exacerbée. Par désespoir mais non sans courage, certains d'entre nous ont tenté pour SUR-vivre à cette expérience, de laisser la trace littérale de leur existence. Mais pour faire face à cette fatalité, nous devions TENIR une réponse forte. Créer le catharsis dans l'espoir de retrouver la sincérité d'une BANALITÉ.
9 /16 Les résidents
29.10 --> 03.11
Et cela s'est fait en déconstruisant le spectaculaire par le spectaculaire. C'est là où se situe le travail du metteur en scène Benoit Gasnier avec qui nous nous sommes associés : effacer les distances avec le spectateur en le faisant devenir partie prenante de l'instant. Nous avons donc par cette mise en abîme lancé des impulsions : nous (ensemble) avons préparé à manger pour la crémaillère, nous avons fait l'anniversaire d'un enfant imaginaire, nous avons formalisé l'intimité d'une mise en bière, nous avons sorti un mât de cocagne et son jambon pour le bal musette, et nous avons fait trace par le vide en organisant le dernier jour une vente aux enchères des objets et meubles de l'appartement. Toutes ces dynamiques ont recréé des comportements du domaine de l'ordinaire et c'était beau.
Cécile Auregan.
10 /16 Les résidents
05.11 --> 10.11
Atelier d'Eugène —
Étudiants en DSAA Design Nantes
Durant 6 jours, les étudiants du LADE se sont plongés dans l'avant-jeu du Cluedo en recréant l'univers de 6 personnages. La règle était simple : un personnage, une pièce, un objet.
Les visiteurs ont été invités à participer à l'élaboration de chaque espace au côté des personnages. La curiosité et la suspicion étaient au coeur de ce jeu de rôle grandeur nature. 11 /16 Les résidents
12.11 --> 17.11
Raum + Reich+ Fichtre + Dérive —
Collectif d'architectes Concert L'Œillère en concert au salon.
Anniversaire Le grand Goûter : cotillons, bonbons et pêche à la ligne. 12 /16 Les résidents
19.11 --> 24.11
Fil+Égrainage —
Collectif d'architectes Vue sur le jardin de la Krollocation depuis la cuisine : révéler le jardin et trouver une intériorité en instaurant un nouveau rapport à l'extérieur.
Traitements de façade : la trame révélée, réinterprétée, détournée… Une épaisseur donnée, pour une façade pleine de personnalité(s) ! 13 /16 Les résidents
26.11 --> 01.12
Le Fabricatoire —
Atelier de graphisme
En construction
14 /16 Les rĂŠsidents
24.09 --> 01.12
15 /16 Les rĂŠsidents
Dates
28 /16 Les rĂŠsidents
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SÊquençage du mur d'archives
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Ce livre a été réalisé par le Fabricatoire
dans l'exposition Simone & Lucien Kroll Merci au collectif Etc, Simone et Lucien Kroll ainsi qu'à l'ensemble de l'équipe du lieu unique.
Une Architecture habitée
Sur une invitation de Patrick Bouchain assisté d'Édith Hallauer
Nantes automne 2013
avec
Collectif Etc, Ecos + Flexibles, J’aime beaucoup ce que vous faites, Collectif Mit, Fertile, Bureau Cosmique, Atelier d’Eugène, Raum + Reich + Fichtre + Dérive, Fil + égrainage, Le Fabricatoire.