Deadalus hiver 2018

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AUTOMNE 2018 - GRATUIT

#16

MINUIT KLINK CLOCK DIERICK JEANNE ADDED JULIAN MARLEY STÉPHANE BOUILLET PAUSES FESTOCHE CHRONIQUES ETC


DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

ed i t o Édito... ou tard, on allait bien finir par y arriver, n'est-ce pas ? Voici enfin notre Deadalus d'automne (un peu tendance hiver quand même), après une pause estivale qui n'en n'était pas vraiment une puisque la team Deadalus a couru les festivals pour des éditions hors-série. Ce numéro de rentrée (si si, il y a des rentrées qui traînent en longueur) est celui qui boucle la première année de "ré-existence" du Deadalus, d'où le joli (et délicieux) gâteau ci-contre et surtout, le très beau cadeau de Stéphane Bouillet qui nous a concocté une magnifique couverture. On le retrouve d'ailleurs un peu plus loin, en interview avec Seitoung. Le rythme a donc repris et avec lui, les ateliers mensuels animés par l'équipe à la Médiathèque : vous voulez en être et participer au contenu du fanzine ? Venez, vous êtes bienvenus ! Les dates des ateliers sont indiquées sur le site de la Nouvelle Vague (https://lanouvellevague.org/programme/). D'ici-là, on se croisera peut-être sur un concert ou une expo. Bisous ! (C.)

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Après une arrivée fracassante sur les devants de la scène, un EP acclamé de tous et surtout un public très curieux de découvrir leur univers mystérieux, Minuit sort son premier album Vertigo. Nous avons pu poser quelques questions au groupe avant la sortie officielle de cet album, histoire d’en savoir plus sur les coulisses du groupe et de ce disque ! Quelle ascension depuis 2013, avec votre 1 EP et le morceau Flash ! Comment expliquez vous cet engouement alors que la mode est au rap-électro ? C’est vrai qu’on a profité d’une certaine curiosité particulière autour du groupe avec l’EP. On a pas mal intrigué je crois et on a senti chez beaucoup de gens un désir de découvrir notre univers. Après ça, c’est vrai, on ne sait pas si on est typiquement "à la mode" ou dans "l’air du temps" mais si on écoute de près, le titre Flash a des côtés un peu électro et un style épuré qui rappelle la musique urbaine du moment.

CON CER T

Nous voilà à la Citrouille le samedi 27/10/2018, où se produit ce soir le quatuor originaire de Rouen. MNNQS (se prononce Mannequins) a l’occasion de nous présenter quelques extraits du nouvel EP intitulé Advertisement. S’inscrivant dans la grande tradition du post-punk et du shoegaze, l’univers proposé par MNNQS transmet des ondes de Television, Joy Division, The Fall et Sonic Youth. Les Rouennais ont réussi à emmener la foule sur leur terrain de jeu. Les têtes et les épaules remuent au pied de la scène. Le groupe maîtrise à la perfection le chant exaspéré et les riffs acérés. Lauréat du Prix Ricard Live Music 2018, MNNQS dégage une rage viscérale. Un bouquet de nerfs qui nous a offert une très belle prestation ! (Texte Manon - Photos Davskull)

Pourquoi avoir mis autant de temps à sortir le 1er album ? Tout est allé vite pour nous. L’EP a bien marché et on a vécu une tournée formidable pendant plus d’un an. Pour l’album il a fallu reprendre un peu ses esprits et redecendre de la belle aventure qu’on venait de vivre. On s’est retrouvés devant la fameuse "page blanche". Et maintenant ? Comment raconter la suite ?... Ça a été une très bonne expérience salvatrice et productive pour nous, mais certes assez chronophage. Pourquoi votre album s’appelle-t-il Vertigo ? Vertigo c’est avant tout le titre d’un des morceaux qui figurent dans l’album. Ça correspondait aussi à notre envie d’avoir un mot simple et percutant. Vertigo c’est le vertige, le lâcher-prise, se sentiment d’être sur le fil. Ça résume bien ce qu’évoque l’album ainsi que les circonstances dans lesquelles il a été fait. La pochette de l’album vous montre tous, pourquoi ? On est avant tout quatre individus qui composons et vivons cette expérience ensemble. Il nous semblait donc naturel de nous présenter tous. Et puis on dégage une certaine symbiose ensemble qu’on aime afficher et revendiquer. Comment l’album a-t-il été accueilli aux 2 premières dates de la tournée ? Difficile de se faire un avis concret après seulement 2 dates. Surtout que nos morceaux doivent encore vivre et faire leur

chemin en live. Ce qui est sûr, c’est qu’on a retrouvé cette connexion avec le public qui nous a manqué et l’envie de revivre les sensations de la scène. Le chant n’est qu’en français, c’est une réelle volonté de la part du groupe ? Ce choix s’est imposé à nous naturellement. Ça nous a permis de ne pas nous mettre de barrières et de profiter de toute la souplesse qu’une langue maternelle peut offrir. Le morceau Paris Tropical est franchement inspiré de l’été, de la débandade dans les rues, dans les bars, la météo parfois chaude et capricieuse, avez-vous mal vécu cette canicule ? Oui bien sûr ! Comme n’importe quelle personne qui la subit dans une grande ville. C’est finalement intéressant une canicule : on passe par pleins d’états physique ou mentaux différents ! Exil a été le premier morceau promo pour cet album, comment s’est fait ce choix ? Exil est un bon morceau d’introduction. Il y a un côté entraînant et assez fédérateur. C’était une bonne façon pour nous de présenter l’album. Quels sont vos coups de cœur du moment ? Steve Monite, Only You, Gorillaz, The Now Now, l’album live de Justice, Woman Worldwide, David Shaw, So It Goes... Quels sont vos objectifs pendant cette tournée ? Plus qu’un objectif, c’est avant tout l’occasion pour nous de faire vivre nos morceaux sur scène, de retrouver ce contact avec le public. Notre envie est de créer un spectacle complet, de vivre cette émotion et de la partager. C’est cet échange si particulier et différent à chaque concert qui nous rend impatients d’attaquer la tournée ! Des projets en plus de l’album ? On se concentre surtout pour l’instant sur la tournée mais on se projette déjà sur la suite. On a envie d’aller plus loin. on continue d’échanger entre nous pour faire grandir notre univers. On poursuit l’aventure, histoire à suivre...

ITW par Manon - Photos Davskull

JEUNES

Ont participé à ce n° : Mike S. (La Magic Box), Davskull, Philippe "Predator" Riesco, Cécile, Yo Lateigne, Manon, Seitoung pour Artoung, Cécile Poulain, Émilie Jenouvrier. Mise en page : Cécile Logo Deadalus réalisé par t.tone

Couv.: MERCI STÉPHANE BOUILLET !!

Tirage papier : 600 ex - Tirage PDF : 117 kilos Partenaire édition : La Grande Passerelle Dépôt légal à parution - ISSN 2608-1490 www.facebook.com/fanzinedeadalus Contact : deadalusfanzine@gmail.com

TALENTS

Un super-héros dans ma ville Quentin Heroguer, 24 ans, est le super-lauréat du Grand Prix Jeunes Talents 2018 du Quai des Bulles. Trois, c’est le nombre de jours qu’il lui a fallu pour mettre en bulles son histoire : un petit garçon n’ayant pas de super-pouvoirs mais devenant un super-héros. Créatif, Quentin espère que ce prix lui ouvrira les portes de la bande-dessinée tout comme la lauréate 2017, Alix Garin. "C’est la plus belle chose qui me soit arrivée. Le festival de Saint-Malo est le meilleur de France pour l’accueil, les rencontres et les échanges avec les professionnels" nous déclare-t-elle. Alix est revenue cette année pour réaliser une fresque en direct à la Grande Passerelle. Les super-pouvoirs du neuvième art reviendront en quai de Saint-Malo les 25, 26, 27 octobre 2019 ! Emilie Jenouvrier


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lin ter vie w Rencontre avec Aurélien, guitariste, luthier et membre du duo sauvage et grunge Klink Clock, ce groupe parisien qui émerge, fait parler de lui et qui a sorti son 1er album, Accidents, le 12 octobre dernier. Après 3 EP et de solides références live (Rock en Seine, Solidays, premières parties d’Indochine, Trust...), ils sautent le pas et nous avons voulu en savoir plus sur ce nouvel album et le duo en lui même ! Comment décris-tu ton groupe ? Un duo Rock mixte, Jennie au chant et moi (Aurélien) à la guitare, on est tous les 2 devant sur scène, c’est vraiment quelque chose d’important pour nous car les batteurs sont souvent à l’arrière de la scène, nous voulions être mis en lumière tous les 2. Avant nous étions 4… Tu ne penses pas revenir à cette composition ? Non pas vraiment car nos compatriotes sont souvent en tournée, on n’a jamais réussi à caler des moments ensemble. Franck, notre ancien batteur est venu sur 1 ou 2 dates, c’était top de le revoir. Pour le moment nous restons sur notre noyau dur. Plus tard nous aimerions faire des concerts uniques, avec des musiciens qui viendraient se greffer, on verra ça en 2019 ! Quels sont les retours du nouvel album ? Nous n’avons que des bons retours ! On a fait des quizz-guitaristes pour promouvoir l’album, si ils ont accepté c’est parce qu’ils ont adoré ce que nous faisons. Les ventes se passent très bien, des magazines parlent de nous, tout se passe bien ! L’album est bien accueilli, on est super motivés ! Comment avez-vous travaillé sur cet album ? On avait écrit beaucoup de titres, nous n’en avons gardé que 11. C’est vrai qu’avec nos boîtes respectives (Fantôme pour Jennie, et Aura’guitare pour Aurélien) on se voit pas souvent avec Jennie, mais pour travailler ces morceaux on n’hésite pas à écrire nos idées, mettre sur un dictaphone, on n’a aucun souci pour s’organiser. Parfois on arrive qu’avec des textes, faut bosser la mélodie, ou alors l’inverse. Dans notre cas nous aimons nous couper du monde, on met les téléphones en mode avion, et là on peut bosser sans prise de tête extérieure, sans horloge... D’ailleurs c’est pour ça qu’on s’appelle Klink Clock, si tu arrives pas à perdre la notion du temps, te perdre en toi-même pour bosser et chercher ce qu’il y a à prendre, ça ne peut pas fonctionner. Comme une horloge déréglée, tant qu’on peut on adore travailler comme ça, on commence à travailler un morceau, on ne sait pas à quel heure ça va finir mais on s’en fiche ! Pourquoi Accidents ? Justement ça va avec notre façon de travailler, il se passe toujours quelque chose, on ne sait jamais comment et quand ça va arriver, comme par accident ça débarque. On essaye aussi de surprendre, sur certains morceaux il y a de l’orgue, du piano, des choses que l’on a pas l’habitude d’utiliser. Nous avons essayé le chant en français sur cet album, nous voulions pratiquer notre langue

maternelle et s’en amuser, tenter sans se forcer. On est content de nous sur 2/3 titres, nous en avions fait plus mais nous n’aimions pas le résultat. Le français est dur à chanter, assez haché. On va essayer suivant les retours d’en faire de plus en plus. Et surtout c’est plus plaisant pour un public français, il comprend tout de suite les paroles, le message. Pour nous c’est important de voir les réactions face aux paroles de nos chansons. Tu me parles de surprendre le public, que penses-tu de cette mode rap-électro, toi qui joues du rock ? Cette musique urbaine ne me choque pas personnellement, mais c’est vrai que le rock devient une musique de niche. Certains disent que tout a déjà été fait dans le rock, je ne suis pas d’accord du tout sur ce point de vue. Nous voulions nous surprendre nous-mêmes, tenter des choses. Vous avez testé en live certaines musiques du nouvel album ?? La moitié environ, ça permet d’écrémer, par exemple quand on a joué en live on s’est rendu compte que ça ne fonctionnait pas trop avec l’esprit, l’entité du nouvel album. On a préféré les retirer de l’album, mais les garder pour certains sets de live, en faire des exclus. Pourquoi du noir et du blanc sur l’album, sur vos costumes de scène… ? C’est notre essentiel, notre mood du moment, et comme on aime bien jouer sur les contrastes noir et blanc on a décidé d’y aller à fond ! On travaille avec Nicolas Demare sur nos clips, nos images en noir et blanc et on s’est dit que c’est ce que l’on aime, qui reflète ce que l’on est. Les contrastes sont des choses sur lesquelles nous aimons jouer : notre pochette, nos morceaux, les styles qu’il y a dans cet album... Le noir et blanc est plus fort que la couleur, c’est fin, précis, puissant : ça ne rend pas la même chose, comme en photo. Tout est dans le contraste ! Pour les costumes nous travaillons avec une marque Berlinoise, Fade Out, qui récupère du jean et fait de l’upcycling, c’était important pour nous de collaborer avec eux car ca rentre dans notre éthique et nos valeurs, on est très contents d’avoir ce partenariat pour la tournée. Comment s’est déroulée la tournée avec Trust ? Ça vous a permis de gagner en notoriété ? Je connais bien Nono de Trust car je suis son backliner. Nous avons joué avec eux au Transbordeur, notamment, nous avions fait la 1ère partie et à la fin de leur concert ils nous ont invités sur scène pour jouer un morceau avec eux, Demande à ton Père, Demande à ta Mère, Jennie au chant, moi guitare, c’était super cool. Une superbe expérience ! Il y a une bonne équipe, une bonne entente, l’album est super... C’était le pied de partir en tournée avec eux, par rapport à nos tournées précédentes où par exemple nous dormions dans des hôtels pourris, là on avait un super tour bus, et l’équipe de techniciens nous a bien accueillis, je pense que c’est du à mon ancienneté chez eux aussi ! C’est un peu une colonie de vacances et on voit pas ça sur toutes les tournées. Et, oui, nous avons surement gagné en notoriété, on avait un public différent, qui ne nous attendait pas, on était là pour chauffer la salle pour que Trust arrive sereinement ensuite. Leur public est très large, des enfants jusqu’à papi et mamie qui revivent leur jeunesse. J’adore voir les petites filles en admiration devant Jennie, qui la voient après le concert pour essayer de se mettre à la batterie, je trouve ça top ! À la fin de la tournée, nous n’avions plus de merch’ tellement les gens ont apprécié ! ITW par Manon - Photos Davskull

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OK CHORAL (Éponyme)

2018 - 9 titres - 32’24 Dixsonance / 33 Degrees / Universal Style : French Pop, Synth Rock Origine : Reims (51) Voilà plusieurs années que le groupe champenois se prépare à franchir le pas. Plusieurs singles maxis ou remix ont balisé leur chemin avec autant de tournées pour parfaire leur style. Et finalement, le voici, enfin, le grand format, le long player, en un mot : l’album. Le groupe nous fait plonger la tête la première dans ses compositions dynamiques au climat électronique qui voudrait bien s’affilier à des pointures telles que The Rapture et Soulwax, pour lesquels le groupe affiche une influence non dissimulée… L’école Belge de Deus ou de Ghinzu a, elle aussi, eu un impact sur la forme de leurs productions actuelles. Le maxi Vertige et sa ALT Version nous avaient déjà montré les capacités du groupe à jouer sur les nuances, à travailler la texture. Avec ce premier album éponyme, il confirme et affirme ce talent, avec des singles tels que Le Centre du Monde ou Le Fil, dont les mélodies aériennes viennent renforcer la retenue de la voix de son chanteur et l’impression d’une certaine mélancolie, à peine troublée par des rythmiques synthétiques, un peu vintage.Avec cet album, OK Choral nous envoie un signal fort sur ses ambitions avec un très beau démarrage. À confirmer sur scène !

LES TAMBOURS DU BRONX W.O.M.P. (Weapons of Mass Percussions) 2018 - 20 titres - 51’01 - At(h)ome Style : Musique industrielle - Métal Origine : Varennes-Vauzelles (58)

Leur première prestation devait être unique : depuis 28

ans, l’exception se rejoue chaque soir." Après le grandiloquent double album Corros sorti en 2015, Les Tambours du Bronx ressortent tonneaux et bidons, pour une nouvelle charge héroïque aux confins de l’indus et du métal : W.O.M.P. que l’on traduira par Armes De Percussions Massives ! De la musique industrielle au métal il n’y a qu’un pas que Les Tambours du Bronx franchissent avec force et fracas. Pour parvenir à ce résultat détonnant, le groupe a modifié la recette originale en intégrant dans sa horde des poids lourds de la scène Métal francaise : Franky Costanza (ex-Dagoba, Blazing War Machine) à la batterie, Stef Buriez (Loudblast), Arco Trauma (Sonic Area, Chrysalide) au clavier, et surtout la voix incontournable de Reuno Wangermez (Lofofora). Si vous ajoutez à cela deux membres des Tambours du Bronx passés à la guitare électrique et un autre à la basse, vous obtenez une nouvelle recette, avec un goût bien changé ! Un titre phare à découvrir en urgence : Requiem pour un Con (cover de Gainsbourg). L’exception se rejoue donc encore une fois en cette rentrée 2018. Et après plus de 30 ans de carrière, les sonneurs de barils parviennent à faire vibrer notre caisse de résonance émotionnelle, notre petit cœur, avec une force inégalée !

REDEYE DeSeRt EyEs

25 janvier 2019 - 10 titres - 34’16 Label : LaFolie Records Style : Folk, Americana Origine : Saint-Malo (35), Austin (USA) Trois années, presque quatre, se sont écoulées depuis la sortie de The Memory Layers, le précédent album de Redeye. Guillaume Fresneau, à la tête de ce projet, s'est exilé à Austin, au Texas, pour se plonger littéralement dans l'atmosphère aride de l'Americana, genre musical qui hante tout son être depuis des années. En ce début d'année 2019, il ajoute un nouveau chapitre à sa discographie : Desert Eyes. Dans cette ambiance Folk, tellement typique à ce qu'on imagine de l'Amérique profonde, Redeye nous entraîne une nouvelle fois dans les méandres de ses errances musicales à travers le Texas. Il nous prend d'ailleurs à contrepied dès la première complainte qui introduit l'album, Cold. Comme si on pouvait imaginer un seul instant que le froid puisse être un mot qui existe dans le vocabulaire texan, un territoire plus habitué à des fièvres estivales proches de la suffocation et de la déshydratation. Malgré tout, le single nous plonge la tête la première dans un climat moite et fiévreux, propice à

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mike se laisser aller au farniente dans un hamac aux couleurs multicolores. This Bridge May Ice in the Cold, un peu plus loin dans le disque, continuera à jeter le trouble, l'ambivalence entre les mots et la musique. Le second titre, Name to A Face, se veut plus festif dans son approche, avec des sonorités gaies, qu'on pourrait presque rapprocher d'une certaine scène electro actuelle, si Redeye ne leur préférait pas l’authenticité des instruments de musique traditionnels. Mais ne vous y trompez pas, c'est seulement pour mieux faire passer le message alarmant des images du clip qui l'accompagne, porté par un texte qu'on imagine aussi dramatique. La voix de Guillaume, une fois encore, joue un rôle prépondérant dans ce décor sonore mélancolique et hypnotique. Elle est chaude et rassurante, comme pour nous dire : "Le bateau coule, mais tout va bien se passer !". Mais alors, que se passe-t-il Under the Waterline ? À vous de le découvrir, en écoutant les 10 balades qui composent ce Desert Eyes, dont on aimerait parfois percer le secret de ses textes en anglais, pour mieux en appréhender la puissance et l'âme. Un album terriblement attachant qui vous caressera avec douceur et bienveillance.

OLD CALTONE Final Horror

2018 - 11 titres - 33’13 Roy Music Style : Electro, Mixtape - Origine : Bordeaux (33)

Si la pochette de ce nouveau projet de Jérôme Amandi (Talisco) n’a rien de très séduisant, les dix titres qui composent son album aux airs de mixtape ou de BO d’un film imaginaire sont déjà plus attirants. Prêt à faire bouger les plus gelés des dancefloor de la planète, Old Caltone (nom emprunté à l’univers de Dracula) nous plonge dans des musiques électro, parfois aériennes, parfois psychédéliques, aux styles 70’s / 80’s marqués, piochant pour son inspiration dans d’autres bandes (originales ou son) de films SF ou horreur… livrant alors des titres aussi évocateurs que The Creator, The Beast ou encore Two Devils. Bien que certains aimeraient y trouver des idées novatrices dans le fond comme dans la forme, on peut affirmer que Jérôme Amandi s’est fait plaisir ici, en allant piocher dans sa mémoire la bande-son qui l’a amené d’une façon ou d’une autre à être le compositeur qu’il est aujourd’hui. Et des artistes tels que Pink Floyd, Archive ou Moby, n’ont sans doute pas été absents lorsque les univers hypnotiques de Talisco ou Old Caltone ont été imaginés dans la tête de Jérôme. Ce Final Horror apporte quelques pièces supplémentaires à sa construction, dont quelques-unes ne sont pas dégueulasses…

MELLANOISESCAPE Heartbeat of the Death

2018 - 10 titres - 14’14 Ulysse Maison d’Artistes / Sony Music Style : Noise Pop Origine : Paris (75), Saint-Malo (35) Le violoniste Olivier Mellano a suivi des études de musicologie à Rennes qui l’ont mené à travailler avec une cinquantaine de formations, avant de se mettre à son propre service. Et, entre deux projets, No Land et Ici Là-bas (très récent projet qui réunissait Brendan Perry (Dead Can Dance) et le Bagad Cesson), le musicien relance le MellaNoisEscape pour un second opus. L’album est introduit par un titre aux allures de fresque épique (The Widest Scale), puissant, pompeux, rapidement intrigant et finalement entêtant. La tension qu’on ressent sur ce premier titre, incandescent, ne s’estompe pas au fur et mesure que se déroule l’album, les guitares sont tendues et prédominent, pendant que les percussions viennent donner ce qu’il faut d’urgence. La voix d’Olivier sur le Vitreous Circle a quelque chose d’intemporel, mélancolique, donnant une atmosphère générale, entre comptine, un opéra de quat’sous et une bande originale de John Barry, une impression entretenue par les claviers vintages aux sonorités de clavecin. Et puis chaque titre devient singulier, très sombre (Black Scintillas), parfois dérangeant (The Glint), ou à contrepied total avec la mélodie Pop de Expected World et ses rythmes Electro-Rock... Un album à écouter d’un bloc pour se laisser emporter.

LENNY KRAVITZ Raise Vibration

2018 - 12 titres - 64’32 Roxie Records / BMG France Style : Rock, Soul - Origine : New York (USA) 54 ans et 30 années à triturer dans tous les sens l’héritage

Rock des années 60 et 70, Lenny Kravitz arrive avec un 11e album studio qui se veut plus ouvert et donc plus éclectique que ses précédents opus. Introduit par un véritable hymne Rock, We Can Get It All Together, ce nouvel album entend bien "élever la vibration", la bonne vibration. On ne le sait pas forcément, puisqu’en concert, il sait s’entourer des meilleurs musiciens, mais Lenny Kravitz, en studio, est plutôt du genre à faire tout luimême. L’enregistrement de Raise Vibration n’échappe pas à la règle, le laissant passer du micro à la batterie, de la basse aux claviers, ne laissant que les parties de guitares à Craig Ross, son acolyte depuis la tournée Mama Said en 1991, c’est pas récent récent… Pour avoir un aperçu de son travail, quoi de mieux que le clip de son premier opus, Low, dans lequel on le voit sur fond noir, transpirant sur les fûts de sa batterie, en compagnie d’une autre batteuse, Jas Kayser. Notez au passage le retour de Jean-Baptiste Mondino, comme réalisateur de clip, avec style... Si le single se veut très ouvert, très racoleur même, il n’en est pas de même sur plusieurs des titres de cet album, à commencer par le titre qui l’introduit, We Can Get It All Together, qui a tout de l’hymne Rock, puissant, racé, au refrain tapageur et entêtant. Alors, voilà, onze albums au compteur, mais Lenny Kravitz avait encore quelque chose à partager avec nous, et notamment quelques bonnes vibrations...

DIERICK Die Hertz Zone 1

2014 - 9 titres (+1 ghost) - 42’18 Autoprod Style : Rock Expérimental, Post Rock Origine : Belgique, France Fils de musicien, le chanteur Dierick explore au travers de différents projets la musique sous plusieurs formes, allant du Rock au Punk, mais avec ce side project totalement solo, baptisé Die Hertz Zone 1, il nous ouvre en grand le champ de ses possibles infinis ! Album concept autour d’une musique sombre et habitée, il explore les sons jusqu’à habiller les silences. D’une guitare il fait un générateur d’images, car à chaque note qu’il fait sortir de ce bout de bois électrifié, il dégage une émotion, une putain d’émotion, qui vous colle au plafond ou fait entrer dans la plus profonde des mélancolies. À l’instar des 12 minutes que dure ce DHZ (part 1, 2 and 3), Dierick vous fait naviguer entre le Neil Young de Dead Man et le Bertrand Cantat de Nous n’avons fait que fuir. Les fans du chanteur de Noir Désir devraient d’ailleurs trouver, à plusieurs autres moments, quelques parentés entre les deux artistes dont la voix et les univers torturés se retrouvent bien des fois dans ce désert de notes, ces

territoires abandonnés et maudits qui parfois s’enflamment, sans crier gare (Western Weapons). Se servant de sa propre vie comme laboratoire, il analyse ses émotions et nous les livre, brutes, sans concession ni artifices. Les émotions à fleur de peau. Quoi de plus parlant que ce What About Me, aride et brut comme un single de Lou Reed ou de son Velvet Underground ! Si leste à nous livrer quelques unes de ses influences les plus flagrantes en début d’album, Dierick devient pudique, en bout de course, en camouflant derrière une dernière salve affective (63...) une ghost song, qu’il est allé chercher plus loin encore, dans l’histoire du Rock, un Love Me Tender, si personnel, si intime, et si loin du sirupeux tube des 50’s, qu’il nous fait penser à Alain Bashung quand il reprend Céline (Hugues Aufray) ou à Miossec quand il revisite Bashung (Osez Joséphine) ! Ça vous file des frissons partout ! Alors si vous ne connaissez pas encore cet ami des Garage Lopez, arrêtez-vous un instant à la station Dierick, et offrez-vous une tranche d’excentricité, une sorte de baroquerie sonique, avec Die Hertz Zone 1, dont on suppose (espère) déjà qu’il fera rapidement l’objet d’un volet numéro 2 ! (Dierick est en interview page suivante.)

ALAIN CHAMFORT Le Désordre des Choses

2018 - 10 titres - 37’25 [Pias] Style : Chanson, Pop - Origine : Eaubonne (95) Par Philippe Riesco On ne vous présente plus Alain Chamfort, l’homme aux nombreux tubes, de Manureva à La Fièvre dans le Sang. Et pourtant, son nouvel album, sorti en mars 2018, pourrait bien en surprendre encore quelques-uns. Dans ce quinzième album couronnant 50 ans de carrière, Alain Chamfort, chanteur à l’élégance éternelle, nous balade du début jusqu’à la fin. L’ouverture de celui-ci, avec Les Microsillons, au texte attachant d’un sexagénaire, son nouveau tube, Tout est Pop, ou encore Linoléum, en fin de disque, nous balancent entre douceur, mélancolie, pop et électro dans l’univers Chamfort du XXIe siècle. La preuve qu’Alain Chamfort n’est pas une toile imperméable, les rencontres de sa carrière montrent encore une délicatesse des compositions, la manière de les interpréter. Splendeur et renaissance. Une sensibilité, un regard sur le temps qui passe, sur le chaos, le désordre du monde, des choses, mais la beauté résistera toujours… TOUT EST POP ! TOUTES LES SUPER CHRONIQUES ET REPORTS DE CONCERT DE MIKE SONT SUR LAMAGICBOX.COM


DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

UN COUP DE ROUGE AVEC dierick Peut-être étiez-vous dans le public du festival Saint-Malo Rock City à la Nouvelle Vague, en mai dernier. Si oui, vous avez peut-être été marqués, comme beaucoup, par le set d'un combo créé pour l'occasion : Garage Lopez + Dierick-DHZ. Quand on aime le punk, on connaît (et on aime !) Garage Lopez. Mais Dierick-DHZ... Dierick ? DHZ ? Philippe Riesco ne connaissait ni l'un ni les autres et s'est retrouvé complètement cueilli par l'audace de la set-list (Elvis, Cochran, Stray Cats, ZZ Top, Bowie...), la maîtrise des ré-arrangements et l'interprétation, l'énergie aussi bien dégagée que dépensée par le groupe... et puis, pour clore le set, ce petit moment de pureté absolue quand Dierick se retrouve seul sur scène avec une merveille de Parlor pour interpréter l'une de ses compositions. Scotché, le Philippe. Et donc très enthousiaste à l'idée de le rencontrer plus longuement pour l'écouter parler de sa musique. Le rendez-vous est fixé un samedi de novembre. Pas de chance, c'est le jour des blocages routiers et Dierick, au guidon de sa Cross Bones noire, risquait fort d'être freiné par les gilets jaunes, rouges de colère. Oui c'est joli et c'est de lui, qui a tout de suite vu l'analogie avec les couleurs de sa mère patrie, la Belgique. Les deux interlocuteurs se retrouvent avec plaisir, s'installent, avalent une gorgée de rouge puis Philippe chausse ses lunettes sur le générique des Dossiers de l'Écran (véridique), signal incontestable que les choses sérieuses commencent. NB : Il n'a jamais été question d'une interview calibrée en préparant cet entretien, mais plutôt d'une conversation à bâtons rompus entre deux artistes aux sensibilités communes. L'avantage est que cela permet d'aborder des thèmes aussi différents que le process de création ou la préparation traditionnelle du steack de cheval. L'inconvénient, c'est de se retrouver avec quatre pages de texte pour deux pages dans le fanzine et là... la frustration est grande de devoir couper quand rien ne mérite de l'être. On a dû toutefois s'y contraindre ; l'entretien est retranscrit ici dans une forme re-rédigée avec quelques coupes franches [signalées entre crochets], mais la version longue est disponible chez notre ami Mike (lamagicbox.com). On y va ? C'est parti.

Tu te présentes un peu, par rapport à ton nom de scène, tout ça ? Pourquoi Dierick ? Oui... l’inspecteur ? (Ah, Philippe est en forme.) Ben ouais... haha, non. Dierick, c’est une manière de revendiquer mon nom - c’est mon vrai nom - mais dans le sens atavisme. C’est vraiment la filiation par rapport à mon père, mon grand-père, tout ce que ça véhicule, on va en reparler, il y a un projet d’album qui est en cours... je voulais supprimer le prénom, je trouve qu'il fait moins partie de l’héritage que le nom... tu vois ? Je suis d’accord avec ça, moi... Voilà... il y a un bagage dans le nom qu’il n’y a pas dans le prénom. À une époque je m’appelais Gadjë, une période de ma vie où j’ai fait un peu de variété. Il y a eu des noms de scène : Gérald Dierick, mon vrai nom mais avec le prénom, ce qui m’affiliait directement à un réseau de chanteurs francophones / varièt’ française / EMI. Et après, Gadjë, pour échapper justement à mon vrai nom et donner une couleur. A posteriori j’ai trouvé presque superficiel d’ajouter quelque chose qui n’était pas l’expression du fond de ma pensée. C’était dans le registre de l’emballage et presque contractuel... Donc voilà, je suis revenu à quelque chose d’authentique et qui véhicule un bagage : Dierick. Et par rapport à Die Hertz Zone aussi, qui est un projet qui se veut "à long terme", polymorphe, qui va toucher le théâtre, la danse, l’écriture, plein de choses... Oui, parce que tu n’es pas que dans la musique... Non, j’ai écrit aussi une pièce de théâtre, c’est ma 3ème, sur laquelle on rentre en travail de lumière, de mise en scène dans les prochaines semaines. Elle s’appelle Desacradanza, c’est un geste de désacralisation dans le vecteur de la danse. Avant j’ai fait une adaptation des Carnets du sous-sol, de Dostoïevski,... Oui, j’écris un petit peu aussi, oui... Moi je t’ai découvert avec Garage Lopez, ça m’a... touché vachement, moi... (Dierick : merci ! ) Déjà, bon, je ne connaissais pas les Garage Lopez et puis on s’est vus dans les loges, j’ai trouvé qu’il y avait une ambiance extraordinaire... et puis tu m’as fait cette reprise de David Bowie (NLDR : Heroes. Philippe est un grand fan de Bowie), que j’ai adorée et que d’autres ont adorée, et je me suis dit, il est gonflé quand même de reprendre une chanson pareille, parce que c’est très casse-gueule, c’est vraiment la chanson-type où t’es sûr de te péter le nez à un moment donné... J’ai hésité fortement à y aller parce que c’est un monument. Je suis grand fan de Bowie aussi, et de ce morceau, et comme je suis un peu perfectionniste je me suis dit, j’y vais, j’y vais pas... Et en fait, dans l’euphorie de ce festival, du partage avec les Lopez... on avait cette scène à faire ensemble et je voulais qu’on la partage avec ce morceau aussi, le porter avec la fraîcheur que véhiculent les Lopez, le punk-rock des années 80 qu’on a traversé... À ce moment-là on se posait pas toutes ces questions ! Trois accords, crac-boum et on y allait, dans n’importe quelles circonstances, et prendre le risque sur un morceau comme celui-là, comme Kraftwerk aussi (NLDR : Radioactivity)... il ne fallait pas trop le peaufiner, au contraire. Il y a plein de gens qui sont restés scotchés... En plus, vous l’avez sorti tranquilles, c’est

la bande de potes qui débarque, qui branche son jack et en avant Guingamp ! Il y avait une belle relation aussi avec le public. Et le côté décalé-déconnant des Lopez, toi avec ton niveau, le mélange de ça, ça fait un truc, pouf ! (Dans ce "pouf !", Philippe exprime un sentiment d’éblouissement mêlé d’admiration et de surprise captivées puis, comme encore sonné, boit un coup de rouge et roule une clope.) C’est un vrai coup de coeur, les Lopez... J’ai croisé leur chemin sans les rencontrer vraiment il y a plus de 2 décennies, je tournais sous le nom de Leather and Wood, un power trio country rock... et le nom des Lopez ça évoquait pour moi toute cette époque des Ramones, UK Subs, les Pistols bien sûr... Et j’ai recroisé leur chemin par hasard en Bretagne et je leur ai proposé de partager cette magnifique proposition qu’on m’a faite de jouer pour Saint-Malo Rock City et voilà... C’était en même temps l’idée de rejouer, parce que j’ai eu une période où j’ai été un peu absent du rapport avec le public... J’ai adoré l’émotion que ça a véhiculé, la fraîcheur et la manière dont le public l’a reçue. On a senti, ça, que ça marchait bien mais c’était sans filet, on a eu 4, 5 répétitions avec les Lopez, pas plus, pour se mettre d’accord sur le répertoire qui devait être présenté à Saint-Malo... [Dierick explique ici, à la demande de Philippe, les raisons de son "absence du rapport avec le public".] D’accord... Alors j’ai écouté Die Hertz Zone et... j’étais un peu perdu au départ, je te dis franchement. Mais en fait j’adore ça quand l’artiste me met une calotte d’entrée et là j’ai pensé, pfou, là il y a encore des choses à dire, et je trouve que musicalement, c’est pfou... (Un peu comme dans "Pouf !", Philippe manifeste dans "Pfou" son admiration mais surtout son ébahissement incrédule devant tant de talent, puis roule une clope.) C’est un voyage, cet album Die Hertz Zone, c’est autobiographique et je voulais un instantané. Quand on pense à instantané, quand on fait le parallèle, on pense à quelque chose de court, or c’est une tranche de vie aussi. J’ai fait un instantané des choses qui ont compté, qui m’ont construit. Donc ça commence par cette époque où, avec deux accords, tu communiquais quelque chose... On (avec son groupe punk Les Daltons, à Bruxelles) en connaissait trois, on gueulait dans un micro... on répétait dans un endroit où des types s’entraînaient à l’aviron et il y avait des placards en métal et à chaque accord de guitare, les 200 portes de placard faisaient "vrrrrrrrrrr" ! (les deux sont bidonnés) Après j’ai voulu changer d’univers, apprendre la guitare. J’ai toujours été sensibilisé par ces petites notes de travers, ces blue notes qu’on trouve dans le bluegrass, et je suis parti à Nashville en 1980 avec ma guitare sur le dos, j’avais 17 ans. Je me suis incrusté dans les bars et j’ai essayé de choper ces petits accords-là. Après est venu le slide, par Ry Cooder, bien avant Ben Harper - même si j’ai fait la première partie d’une tournée de Ben Harper - mais Ry Cooder a été un véritable électrochoc. Pour moi Cooder c’est ça, comme Soulages en peinture : la manière de jouer des silences, pouvoir matérialiser du silence, et ça il le fait très bien. Et quand tu fais le grand écart entre les 3 accords d’un groupe punk à 180 BPM et 12 mesures de silence à la fin d’un morceau de Ry Cooder qu’on écoute jusqu’au bout... c’est ce grand écart-là que j’ai voulu exprimer dans cet album Die Hertz Zone. [Une remarque de Philippe amène alors Dierick à

raconter l'origine de sa passion infinie pour la danse alors qu'il était encore "un petit keupon avec une crinière sur la tête", puis la discussion revient sur l'album Die Hertz Zone.] Parle-moi de tes inspirations sur cet album. Il y a ta vie, mais d’autres sujets aussi ? Ma vie, oui, et... En fait, le titre Die Hertz Zone c’est : Die dans le sens directif, ça, tu montres du doigt, donc il y a déjà une volonté d’être radical. Hertz, le coeur et la fréquence, quelque chose qui vient du passé, qui existe aujourd’hui et qui existera demain, donc un geste de transmission, quelque chose qu’on ne peut pas attraper. Et Zone dans le sens territoire, on sait qu'on ne le changera pas mais à notre âge, on sait qu’on peut naviguer entre les balises, éviter les pièges, les "péages" comme disait Bashung. [Dierick développe alors l'aspect autobiographique de l'album.] Pour les inspirations musicales, on entend à la fois du Johnny Rotten, il y a du Ry Cooder aussi, et puis du Johnny Cash, qui est un peu le bonhomme qui m’a donné envie de jouer de la guitare. Tu travailles avec une équipe ou toujours tout seul ? La rencontre avec les Lopez m’a redonné envie de travailler avec des gens. En même temps, je suis assez directif dans la vie (rire et sourcils circonflexes pour dire "eh, on se refait pas") et dans les projets musicaux aussi. J’ai une idée assez précise du son que je cherche, de la trame sur laquelle va se poser le texte, c’est difficile à partager... Je laisse la porte ouverte à des idées, des pulsions, au talent, à l’expertise des autres, mais une fois que les choses sont arrêtées. Je dis pas "une fois" parce que je suis Belge hein, c’est trop facile... (Philippe approuve, les deux rigolent, on ne les arrête plus.) Sur les albums précédents, j’arrivais en studio avec de vrais musiciens beaucoup plus talentueux que je ne le suis : Augustin Foly, Xavier Tribolet, Les Yeux Noirs qui ont fait les violons, B.J. Scott qui a fait les choeurs... ils auraient tout le loisir d’être présents et interrogés dès le début de la création d’un projet d’album. Or je suis arrivé avec des maquettes déjà bien établies, donc c’est leur métier, leur son, leur personnalité qui ont coloré et apporté une valeur ajoutée à chaque projet mais j’étais assez - voire trop - directif à ce moment-là. Là, dans l’album que je prépare en ce moment - pour l’été prochain j’espère-, je suis plus dans une approche de partage. Tu travaillerais dessus avec les Lopez ? Alors, on a eu cette discussion très récemment. J’aime beaucoup, beaucoup leur énergie et elle colle parfaitement au projet. Et en plus de l’aspect musicien, il y a l’aspect populaire qui me plaît chez eux : ce sont des ouvriers, des prolétaires et ils le revendiquent. Et comme cet album va parler de mes grand-parents qui étaient mineurs, les Lopez ont vraiment une légitimité à m’accompagner sur ce type de projet, ils en ont envie par l’aspect social du projet. Or, musicalement ce sont des punks et à un punk, tu lui dis pas "fais un break là" ou "joue moins vite" ! (Dierick s’esclaffe, il sait de quoi il parle : le punk de ses 17 ans est toujours à l’intérieur.) On l’a vu ici, je leur disais "tel morceau on le joue à tel tempo" et ils ont joué trop vite parce qu’ils sont comme ça, donc je sais pas dans quelle mesure je vais pouvoir les "brider" ! (il est hilare) Donc, je ne ferme pas la porte à d’autres collaborations sur ce projet mais j’ai envie de les impliquer sur certains morceaux. [Philippe s'intéresse ensuite à ce que pense Dierick de la scène musicale actuelle, puis reprend avec une "question qui tue".] Dis-moi une chose que tu ne supportes pas ? Oh y’en a plein... Oui mais LA chose insupportable, sans concession. (Longue réflexion de Dierick, dont l’hésitation se trouve décuplée quand Philippe précise que sa question est "générale" et non-pas orientée musique.) L’intrusion, je déteste l’intrusion. Je n’aime pas ce "viol" des choses de la vie, en particulier de l’administration qui, sans savoir si je suis ou pas dans une période d’écriture, de création, de remise en question, vient te polluer avec un recommandé... [De l'intrusion administrative on passe à celle des réseaux sociaux, puis à la nécessité d'isolement, propice aux mécanismes créatifs.] [...] Il faut pouvoir se ressourcer quand tu choisis. C’est favorable à l’écriture aussi, parce que quand tu n’as vu personne depuis longtemps, à un moment la page blanche se remplit. On a une matière en nous, c’est comme quelqu’un qui fait un régime ! Si tu arrêtes de donner à manger à ton corps, il va aller chercher les ressources là où il y en a, dans les bourrelets, là, tu vois... eh bien je pense que la créativité c’est pareil. À un moment, quand tu ne te "nourris" plus, tu sais pas par quel chemin, ça ressort. Tu rattaches une image à un mot, à un début de phrase, un morceau de musique et

c’est comme ça que tu construis ton truc. (Si la discussion continue quelques minutes sur le thème de la nourriture, c'est plus une nourriture comestible que spirituelle qui les occupe - il se fait tard et le gruyère poivré, ça va bien 5 minutes -, et l’on apprend que Dierick a récemment savouré en Belgique un bon steak de cheval préparé dans les règles de l’art ("T’as 3 gousses d’ail pour un steack, avec une pomme de terre en chemise et une bonne Gueuze"). Une transition parfaite pour évoquer le thème de son prochain album.) Les mineurs, justement, en mangeaient une fois par semaine... C'était lui, le père, le mineur, celui qui descendait dans le trou, qui avait droit à son steack et il le partageait pour un quart, un tiers, avec ses enfants autour de la table... L’idée de cet album, c’est vraiment de retrouver l’univers "usine", machines, sidérurgie, charbon, châssis à molette, des terrils, des fosses, pour qu’on soit vraiment dans ce truc monolithique et avoir des choses simples à percevoir. On a la machine d’un côté, qui va illustrer le monde noir du chardon, des mines, le Borinage - la région frontalière entre Valenciennes, Mons, où il y avait les mines et un peu plus loin, vers Charleroi, les sidérurgies -, donc un son très très dur, très radical, rien à voir avec le premier Die Hertz Zone. On va éviter l’intro-couplet-refrain-couplet-refrain-break-solo etc, ça va être des monolithes, d’où l’idée aussi des Lopez... Et, en relief là-dessus, de la porcelaine. La porcelaine c’est quoi, c’est le moment où le mineur, qui est censé avoir le premier accès au bain quotidien quand il rentre de la mine, eh bien pour faire plaisir à sa femme, il va lui dire "tu peux le prendre avant moi, sinon l’eau elle va être juste dégueulasse pour toi", ça ce sont des petits moments de porcelaine... Ou le pain au sucre que les mineurs avaient pour descendre : c’est du pain dans lequel tu fais des trous avec tes doigts pour mettre du sucre qui fond à la cuisson, et c’était leur deux petites minutes de bonheur à 700 mètres de fond. Et tous ces petits moments-là, je vais les exprimer avec du slide en son clair, donc il y aura ce relief entre les grosses machines monolithiques et des petits moments délicats comme ça, pour faire ce parallèle. Et je vais l’enregistrer en Belgique, ça doit être enregistré là-bas, bien sûr. (Philippe reste tellement songeur qu'il en oublie clope et coup de rouge...) Il y a de belles images là... Je vois les lampes des mineurs, les casques... Oui, moi c’est par les images que je construis le son... Quand j'enregistrais l’album Gadjë, Les Yeux Noirs (NLDR : groupe de musique yiddish et tzigane créé par les frères Slabiak, violonistes) viennent faire les violons sur 3-4 titres, et ils me demandent si j’ai les partitions qu'ils devront jouer. Et je leur dis "non non, moi je préfère te parler avec des images", et pour un des morceaux j’ai évoqué Chaplin, je voulais que ça sonne Chaplin, un peu noir et blanc, un peu triste, un côté un peu gauche qui évoque la compassion... et quand tu dis ces mots-là et que tu parles de ces images, ça va transpirer quand le mec va jouer sa partie de violon. Donc la référence aux images, au cinéma, c’est super important... Et le choix des mots aussi. Tu vois, tu me demandais tout à l’heure ce qui me gênait dans la nouvelle génération, c’est ça : le choix des mots. Même si ça chante bien, tu sens que ça a été une plume facile, "oh c’est bien on a une rime", poum... Et t’as pas comme chez Bashung, Thiéfaine, ou Noir Désir, ou Jad Wio... t’as pas ce second, ce troisième sens, cette lecture, ce côté un peu littéraire, où tu te casses un peu le cul pour trouver le mot juste et ça, ça me manque. Je roule beaucoup en voiture, j’écoute plein de radios et parfois t’as des rimes, tu te dis non, ils ont pas osé quand même... (De "l’écriture facile" à la composition facile il n’y a qu’un pas, franchi par un Philippe agacé du manque de créativité de certains groupes très renommés qui continuent de sortir de nouveaux albums confortables, bien trop semblables au(x) précédent(s).) C’est un vrai sujet ça... On évoquait Bowie et Bowie, à chaque projet, à chaque album il se remettait en question, il se mettait en risque à chaque fois... et pour moi c’est l’une des composantes de la création. Tu vois, imaginons - toutes proportions gardées et orgueil sorti de ce propos -, par rapport à Die Hertz Zone on pourrait se dire "voilà, il a un parti pris, on sent l’essence de son parcours de guitariste et le côté un peu autobiographique du texte", et je pourrais me dire tiens, c’est pas mal, je vais rester dans ce créneau. Or le prochain album, tant musicalement que dans les textes, il va être radicalement différent, donc tu n’as pas le temps de t’ancrer dans un hypothétique public que tu peux considérer comme des prospects. Forcément elle se sent, l’authenticité, parce que tu mets tes tripes sur la table, tu te réinventes... ce qui exclut d’office la notion de retour sur investissement, d’attente d’un succès, d’une reconnaissance. Tu t’en fous, tu es là pour - comme on le disait tout à l’heure - sortir des pulsions... J’ai fait de la soudure sur métal, du théâtre, de la danse, de la musique... Voilà, c'est selon la pulsion, et la matière qu’elle va adopter. L'entretien se poursuit sur cette capitalisation de la nostalgie, ces groupes qui cachetonnent au détriment de la création, ces artistes dont l'amertume de ne savoir se renouveler rend pathétique la "reformation exceptionnelle" du groupe qui les a rendus célèbres... puis il s'achève sur la sympathie de Nono (Trust) que Philippe a rencontré pusieurs fois et avec lequel Dierick a souvent échangé à l'époque où il vendait des guitares - et sur l'élégance émouvante du dernier album d'Alain Chamfort. L'élégance et l'émotion étaient aussi très présentes lors ce long entretien avec Dierick. Et puis une franchise aussi désarmante et percutante qu'assumée (le punk de ses 17 ans), qui constraste avec cette poésie qu'il parvient à déceler (et exprimer) dans absolument tout ce qui peut entrer dans son champ de vision ou de pensée. C'est peut-être là, dans le contraste, que réside une part de la richesse de la personnalité artistique de Dierick. Une richesse qui nourrit l'impatience non dissimulée de notre interviewer à écouter le prochain album de l'auteur... occupé pour l'instant à observer Philippe ranger ses petites affaires. Et là on a très envie de lui dire : "Toi là-bas qui ne fais rien, retourne donc travailler sur ton disque !" Interview : Philippe Riesco - Photos : Philippe Riesco, Dierick. - Rédaction : C L'intégralité de l'interview est sur lamagicbox.com


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DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

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FLOR DEL FANGO (Pont du Rock)

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KYO (Pont du Rock)

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SHINING (Motocultor)

JAIN (Vieilles Charrues)

MARQUIS DE SADE (Vieilles Charrues)

THÉRAPIE TAXI (Vieilles Charrues)

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de Francochaine, ils ont sorti un nouvel album il y a un an et demi environ, il s’appelle Blonde, la production est réduite au minimum, et il y a beaucoup de chant. Ça ma donné envie de chanter. Du chant c’est beaucoup d’imitation, et cette voix m’y a poussé.

Comment explique l’engouement qu’il y a envers ta musique depuis quelques années ? Hum j’en sais rien moi ! J’aimerais que l’on me réponde ! Ce n’est pas quelque chose que je perçois moi-même, c’est une chose que l’on voit de l’extérieur, quand tu es le sujet, tu ne vois pas les choses de la même manière, je fais des choses et je m’en rends compte après, quand je vois que j’ai plein de concerts à venir, que les salles sont pleines à craquer… C’est du concret et ça me fait plaisir, ça me touche immensément. Je l’explique pas, mais je peux te dire ce que cela me fait : ça me bouleverse, j’ai de la chance de faire ce que j’aime dans la vie, de le partager, de pouvoir en vivre, être avec le public, je me sens privilégiée.

Une question que beaucoup de personnes se posent : travailles-tu ton androgynie ? ("Ils sont chiants non ?") Comment travailles-tu ton image face à la scène ? ("Oui un peu chiants", rires). Je dis toujours que je m’habille de la manière la plus neutre, en noir, afin que le public ignore le regard et s’intéresse plus à ce qu’il écoute. C’est vrai que la façon dont je me présente physiquement c’est pas le centre de mon travail, c’est la musique. Je me sens vite déguisée, j’essaye de me correspondre, d’être la plus sobre possible, concentrée sur ma musique uniquement.

Tu passes facilement d’un genre noir à blanc dans tes derniers albums, est-ce un écho à ta vie ? Ta musique est-elle une sorte de thérapie pour toi ? Le mot thérapie est un grand mot, mais la pratique musicale et artistique sont une façon de transformer le sensible, qui est le mien. On regarde le monde, on l’interprète, comme une lecture du monde, soit on transforme un souci. Je pense qu’il y a plusieurs phases dans une pratique artistique, moi pour le moment je suis dans l’expression de moi-même, comme des photos, très intime, mon expression de moi-même. Quand j’aurai passé ce chapitre de cette vie artistique, je pourrai passer à la vision du monde. C’est comme si j’étais à l’adolescence de ma vie artistique, malgré mon grand âge ! (rires)

Quels sont tes inspirations pour cet album ? J’ai surtout voulu chanter plus sur ce disque-ci, et c’est aussi venu du fait d’avoir une frustration sur la 1ère tournée. Je me suis inspirée du dernier album PUNISH YOURSELF (Motocultor)

LHE URE

Tu n’étais pas revenue depuis 3 ans, lors de ton passage en 1ère partie de Mlle K, contente de revenir en Bretagne ? Oui la Bretagne c’est toujours bien j’adore ! Le public est très agréable et on mange bien !

Comment as-tu composé ce nouvel album ? Je l’ai écrit pendant les creux et la fin de la première tournée. À la fin je n’étais plus la même, il est radicalement différent des autres. C’est encore une autre photo de moi-même.

CRUACHAN (Motocultor)

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Tu as un gros bagage musical : tu as une formation de violoncelliste, de chant lyrique et tout ça au conservatoires de Paris et Londres, est ce que tout cela t’aide finalement vu le style musical que tu pratiques ? J’aurais pu rien faire de tout cela c’est vrai ! Je n’étais pas une bonne élève particulièrement, j’ai ce CV-là mais c’est tout. Ca m’a apporté du travail : la musique est très hiérarchisée en France donc j’ai eu du travail, et ça m’a permis de vivre de la musique pendant pas mal d’années. C’est en travaillant que j’ai vraiment appris. Mais cela m’a permis de savoir comment travailler. Ça fait longtemps que je fais de la musique mais j’en apprends tout le temps, et ça m’a aidé à être familière à ce monde. Tu penses tourner à l’étranger ? On va essayer, cela demande beaucoup d’investissement et d’argent, surtout de la part du label, ce ne sera pas facile mais c’est l’un de mes objectifs. Ce soir tu joues devants des Bretons (*), pas trop le trac ? Nan je suis super heureuse !! Y’a quelque chose entre les Bretons et moi, je les adore ! Ici il y a de la nostalgie, je me sens bien ici. Je suis comme chez moi, plus présente à moi-même. ITW et photos Davskull. (*) NDLR : Jeanne Added jouait le 28 septembre à La Nouvelle Vague de Saint-Malo dans le cadre de la première édition du festival Baisers Volés.


DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

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DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

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Julian Marley est un artiste de reggae, cela va de soit me direz-vous, le sang de Bob Marley grand chantre du reggae s’il en fallait, coule dans ses veines, alors qu’il revient avec un nouvel album qui sortira en octobre, j’ai profité de sa venue au No Logo Bzh Festival pour le rencontrer. Multi-instrumentiste, des claviers, à la guitare, en passant par la batterie et la basse, Julian Marley écrit et compose dès son plus jeune âge, et si certains pensent que c’est par facilité, parce qu’il est le fils de, qu’il fait ce métier, ils se trompent : "Je fais de la musique pour les gens, j’aime transmettre de l’amour à travers la musique tout simplement". Outre ses propres projets artistiques, il collabore avec d’autres artistes via la maison de disques qu’il a créée avec ses frères, Stephen et Ziggy, Ghetto Youths Crew. En 1996, il sortait son premier album, et à la fin de cette année, en octobre il sortira son 4ème disque. Il prend son temps pour écrire et composer entre

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chaque album, parce qu’il espère sans doute ne pas passer à côté de sa vie, il profite de chaque instant, et aime aller à la rencontre des gens, comme le disait Bob Marley : "L’argent n’achète pas la vie". Dans son processus artistique et créatif, Julian Marley évoque avec admiration et bienveillance tous les artistes qui lui insufflent cette envie, et cette émotion dans leur musique : "Il y a des millions d’artistes qui m’inspirent, Stevie Wonder, Marvin Gaye, Peter Tosh, John Legend, John Holt, Dennis Brown, et tant d’autres… En fait j’aime écouter toutes sortes de musique, du classique, du folk, du rock, du jazz, ce que j’aime c’est que la musique me transmette une émotion." Que ce soit via d’autres artistes ou grâce à l’environnement qui l’entoure, Julian Marley ne cherche pas l’inspiration à tout prix. L’inspiration le trouve, dans l’instant, quand il le faut… "Il n’y a pas d’endroit en particulier qui m’inspire, chaque recoin de la terre peut être source d’inspiration, via la terre, la nature, le vent, la mystique naturelle, mais je suis aussi inspiré grâce à Dieu".

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Nous avons rencontré le groupe Dead Bones Bunny avant leur passage sur la scène du Motocultor qui avait lieu à Saint Nolff les 17, 18 et 19 août et nous en avons profité pour poser quelques questions à ce groupe de rockab-métal !! 1/ Qu’est-ce que ça vous fait de me rencontrer ? Et bien ça fait grandement plaisir d’avoir des gens du journalisme qui s’intéressent à notre projet en tant qu’artistes ! 2/ Comment vous vous êtes dit "Tiens, si on mélangeait du rockab et du métal" ? Alors pour t’expliquer tout simplement, moi je suis anglaise, je suis née en 1975, j’ai fait un parcours de danseuse et batteuse dans le rockabilly, cela a bercé toute ma vie, je suis une grande fan de ce style, après je suis arrivée à Paris fin 2017 et je t’avoue que j’étais complètement perdue parce que plus du tout la même ambiance au niveau musical, ça a été une phase un peu plus compliquée pour moi, jusqu’à ce que je découvre l’univers métal me retrouvant un soir à éponger ma peine de lapin mort esseulé et j’ai rencontré Gabriel, qui m’a expliqué que lui était du milieu du métal mais jouait de la contrebasse, du coup je me suis dit qu’il y avait une carte à jouer et qu’on allait tenter un truc et on a mélangé les styles, il m’a présenté d’autres amis à lui issus du rockabilly ou du métal et tous ensemble ils se sont mis à composer des choses qui arrivaient vraiment à mêler les deux genres. 3/ Quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris que vous jouiez au Motocultor ? Ça été la consécration d’un rêve ! (rire) Je t’avoue que de voir notre projet si récent mais pourtant avec des gens si motivés pouvaient nous propulser si rapidement sur la Dave Mustage du Motocultor. On est ravis, stressés mais méga heureux ! 4/ Qu’attendez-vous du festival ? Et bien surtout avant toute chose, de prendre du plaisir, de faire découvrir notre son à beaucoup de gens je pense, parce que vu que l’on est extrêmement récents ils ne nous connaissent pas, du coup on va essayer de faire un petit peu la promotion de notre musique par des affiches, en se déplaçant vers les gens pendant ce week-end, en espérant que du coup ça les intrigue, leur donne envie de nous découvrir, leur donner du plaisir à leurs petites oreilles !

La femme, et ce qu’elle représente, est également source d’inspiration, "Dans la société, selon moi la femme doit être considérée comme une reine. Par exemple on dit la terre nourricière, elle est notre mère, elle nous nourrit et nous porte, la femme a ce rôle d’être notre mère à tous, il faut la respecter pour cela et bien plus encore." Les expériences de la vie forgent également le caractère et le personnage de Julian Marley, et transcendent son écriture : "Ma vie privée c’est de l’expérience, et je peux être avec des milliers de gens, et ne pas expérimenter la même chose qu’eux. Nous vivons les expériences différemment selon qui nous sommes. Si je devais donner une citation qui représente l’état d’esprit de ma musique ce serait, la musique pour tous, parce que mon message est pour tout le monde, peu importe ce que l’on fait, qui l’on est, la musique c’est un message d’amour, cela aide à surmonter le stress, à se créer un réseau, peu importe ce dont on souhaite parler, la musique nous libère, et libère nos sentiments." Cette proximité, ce lien avec la réalité, et cette envie de partage transpirent lors

des lives, en concert on ressent une forme de communion entre Julian Marley, son groupe, et son public, il décrit cette relation ainsi : "J’ai une connexion spirituelle avec mon public, nous sommes très proches. Il y a une forme de vibration entre nous, parce que de toute façon la musique est une vibration." Avec cette notion de partage et de vibration, on peut ajouter la bonne humeur, car les chansons de Julian Marley sont assez souvent positives, avec un joli message : "La première chanson que j’ai écrit se nommait Uprising, c’est devenu le nom de mon groupe, c’est une chanson positive, qui remonte le moral… Et c’est vrai que je ne l’ai pas joué depuis un long moment…" Et s’il devait ajouter quelque chose à cette discussion ce serait : "Mon nouvel album As I Am (NLDR : Tel que je suis) sort en octobre, et je reviendrai pour donner une série de concerts en France à cette occasion très bientôt !"

5/ Quels sont les projets ? On a notre album qui va sortir à la fin de l’année, donc c’est un album enregistré, mixé et produit par nous même, surtout par notre guitariste, et du coup nous allons avoir des clips qui vont sortir un peu avant et nous avons quelques dates qui commencent à se profiler vers la fin de l’année en Île-de-France et à Bordeaux !

Cécile Poulain - www.lesmusichroniques.com

Yo Lateigne pour Deadalus - Photos Davskull

Voilà, cinq questions c’est rapide, mais j’espère que tu n’hésiteras pas à aller découvrir ce groupe si particulier mais tellement bon !


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DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

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(et il a dormi à la Nouvelle Vague pendant 2 mois pour voir d’autres concerts)

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DEADALUS FANZINE INTRAMUROS #16 AUTOMNE 2018

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TROISIEME

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Le troisième œil, dans l’ésotérisme, est l’œil de la connaissance, situé au 6e chakra (hindouisme et bouddhisme), un point de focalisation pour la méditation (taoïsme et pratiques méditatives). Son ouverture apporterait perceptions nouvelles et extra-sensorielles… Le troisième œil est un caractère commun des personnages de Stéphane Bouillet, son auto-représentation notamment, qui, planté au milieu du front, n’hésite pas à se transformer en bouche et discuter voire contester les choix/visions du personnage. L’univers graphique de Stéphane Bouillet se pose quelque part dans un lointain Orient, entre Soleil Levant et confins du Triangle de Corail. Ancien vétérinaire, il a plaqué ce métier pour s’adonner pleinement à l’illustration et à la bande-dessinée, "lassé de passer ses journées à castrer des chats de ville". Il puise son inspiration de ses voyages au Japon, aux Philippines, en Indonésie, à Bornéo, et se met en scène dans un perzine expérimental, BETA, dont il a déjà publié 8 numéros en un an (format A5, 48 à 60 pages, tirage de 120 exemplaires numérotés à la main). Odyssée existentielle, quête personnelle où émerge un syncrétisme philosophique inspiré du folklore japonais (les yokais du monde invisible, notamment), le récit ne manque pas d’autodérision et marque par sa franchise, ses considérations paradoxales ("Quand on veut protéger la vie sauvage, doit-on céder à la tentation de nager au plus près des requins-baleines ?"). Graphiquement, le travail en contraste noir et blanc évoque Charles Burns et les personnages surréalistes de Daniel Clowes auxquels les masques du théâtre Nô apportent une touche à la fois grotesque et effrayante. Mais le N&B n’est pas exclusif, chaque nouvelle ayant son propre style graphique (Filipino est davantage en lavis) apportant une ambiance propre à l’histoire. La règle de ce fanzine est qu’il n’y en a pas, ou du moins qu’elles peuvent évoluer au cours du récit affirmant la dimension laboratoire d’expérimentation revendiquée dans le premier numéro de ce projet éditorial. En attendant un possible 9e numéro de BETA, Stéphane Bouillet prépare actuellement une BD sur Bornéo. Rencontre avec l’auteur à l’occasion du festival Quai des Bulles de Saint-Malo. EDDY DE PRETTO (Baisers Volés)

CATASTROPHE (Baisers Volés)

Tu présentes BETA comme un laboratoire graphique…

Je considère le fanzine comme une prépublication en attendant une publication définitive, donc chaque dessin est un laboratoire qui me permet d’expérimenter, de mettre à plats des erreurs ou des limites techniques et de les corriger. Par exemple, représenter les énergies ou l’invisible nécessite cette phase d’expérimentation avant de trouver le bon mode d’expression. Le fanzine BETA est une première phase d’autopublication qui permet cela. La base scénaristique est en partie autobiographique et j’y transmets mes visions, mes fantasmes, ma captation de l’invisible.

Comment s’organise la production ? Tu dessines in situ, lors de tes voyages ou a posteriori ?

Je suis revenu du Japon avec des crayonnés et des encrés, uniquement du crayonné de Bornéo. À mon retour, j’avais environ 300 pages de crayonnés qui ont servi de base pour la publication de BETA. Au fur et à mesure que j’encrais j’ai pu publier des numéros, 8 en un an. La publication permet aussi de voir comment se travaille un livre, les marges, les bords perdus, etc. J’ai travaillé sur des formes différents, A4, B4, et la mise à échelle finale va influer sur l’épaisseur des traits. La publication aide à mieux comprendre ces contraintes.

HOA QUEEN (Transmusicales)

HOA QUEEN (Transmusicales)

Tu évoques régulièrement cette idée de l’impermanence des choses. N’est-ce pas paradoxal de publier alors, de rendre permanents et figés tes récits/visions ? Le choix d’une publication sous forme de fanzine est-elle une sorte de dépassement de ce paradoxe, le fanzine étant par nature une publication éphémère ?

La notion d’impermanence me vient de ma période bouddhiste. Le fanzine est pour moi une étape, un passage entre le non-publié et être publié par des éditeurs professionnels. L’édition et sa régularité dans le cadre de BETA est aussi une carotte pour avancer, se bouger le cul. On sait que dans la BD la notion de série est importante : produire un volume par an en général, 2 voire 3 ou 4 pour les mangakas qui ont cette obligation pour conserver leur lectorat. Le fanzine fait 48 pages, ce qui permet de glisser 2 histoires de 24 pages, c’est un bon format. J’ai poussé jusqu’à 60 pages pour certains numéros, mais suis revenu à 48 qui est un format équilibré pour moi, une vitesse de croisière. L’impermanence c’est l’instabilité permanente des choses, l’agitation des molécules. Et la publication est un moment où l’on fige le moment, on passe du mental à l’action. Le fanzine est idéal pour ça.

PUTS MARIE (Nouvelle Vague)

ALAIN CHAMFORT (Nouvelle Vague)

D’une histoire à l’autre, tes styles graphiques évoluent. Est-ce un choix réfléchi ou c’était conjoncturel ?

Au Japon, la peinture zen bouddhiste m’a fortement inspiré pour certains chapitres. Du dessin au stylo pinceau avec des niveaux de gris. Pour d’autres j’ai utilisé les plumes G et maru de mangakas. Chaque style va évoquer des univers différents. Je suis un caméléon, en fait : je découvre un maître, Charles Burns par exemple, j’étudie son style, je le digère et il devient une partie de mon style. Je suis une éponge et puis ensuite ça ressort avec ma propre patte.

D’un point de vue plus philosophique, tes récits sont traversés par ce tourment de l’homme occidental écolo-conscient par rapport aux voyages et à l’interaction avec la faune sauvage : faut-il continuer à voyager et découvrir le monde ?

Ikigai, en Japonais signifie "raison d’être". Pourquoi tu te lèves le matin. C’est un schéma où figure ta vocation, ta passion, ta profession et ta mission, ce qui te rend confortable, te satisfait, te fait douter, etc. Au croisement de toutes ces sphères, il y a l’ikigai. Le mien c’est protéger la nature à travers mon moyen d’expression qu’est la bande dessinée, les histoires dessinées. J’en racontais déjà avec la photo. Être vétérinaire, c’est pareil, je guérissais des animaux sauvages, puis des animaux des villes… Aujourd’hui je suis très inspiré par le shamanisme et la façon dont les religions occidentales ont tout fait pour détruire ces cultures ancestrales qui, pourtant, semblaient exister partout sur la planète.

MOHA LA SQUALE (Nouvelle Vague)

COLUMBINE (Nouvelle Vague)

Interview Seitoung pour Artoung.com (et pour Deadalus aussi, du coup)


#FANSDEDEADALUS:

LE S CH RO NI QU ES DE

man o n KUZH J’fais pas chanter (les gens) Feat. Wyll

Ce titre paru au mois d’octobre 2018, nous vient tout droit du collectif Malouin KUZH, tiré de l’EP X.PLICITE, et tire ses sonorités du rap/électro/pop. Ce premier titre dénonce toutes ces musiques trop commerciales. À ce jour, beaucoup de groupes s’investissent pour faire de la vraie musique, de la musique en live non pré-enregistrée, de belles paroles qui ont du sens, veulent faire passer un message ou encore dénoncer les dures réalités de la vie. Nous avons ici un manifeste de toutes les bonnes choses en musique. Le clip est tout aussi loufoque que ses paroles ! Fait maison dans un lavomatique au Karcher, à l’abri de bus, dans un cinéma... il dénonce lui aussi tout ces clips surfaits bourrés d’argent sale. Le rythme colle à la peau, on a envie d’écouter en boucle ce morceau et les futurs titres de l’EP ! Deux artistes libres et talentueux qu’il faut encourager. Mon passage préféré : "En Anglais ou en Spanish Ça passe toujours beaucoup mieux Ça te sort de la rime riche Avec des textes bien neuneus".

DEAD BONES BUNNY (Motocultor)

ALDEBERT (Bobital)

LA GAPETTE (Bobital) VANUPIÉ fan de la descendance Deadalus (Bobital)

FRAH SHAKA fan de DEADALUS et réciproquement (Bobital)

DEADALUS fan de Deadalus (Bobital)

WYLL La Reine et son Roi Entre rap et sonorités reggae roots, de la musique brute sans de son électro, WYLL sort vraiment de l’ordinaire ! Des mélodies à la guitare sèche accompagnée de percussions rythment le rap roots de cet artiste SIN ROSS aux paroles réconfortantes. L’EP (8 titres, sorti en 2018) parle de vie quotidienne, d’optimisme, de peur, de guerre ou croisade contre soi-même et la société. La Reine et son Roi qui donne donc son titre à l’EP est une belle mise en abîme de l’ensemble de ce CD : profiter de la vie, en prendre soin. Un chant enjoué, un rythme dynamique, des paroles qui accrochent l’oreille, on l’écouterait en boucle, à prescrire en cas de cou de mou ! Copier-coller est notamment une belle réalité d’une société de consommation, très intéressant et horrifiant à la fois de se rendre compte que nous sommes des pantins. Quelqu’un de bien nous parle de nos doutes, de notre personnalité changeante, les erreurs que l’on fait et qui nous fait grandir, une belle leçon de vie sur notre confiance en soi et notre maturité. Ma guerre est plus sombre que tous les autres morceaux présent sur l’EP. En effet WYLL nous dit de ne rien ignorer de la réalité, de réfléchir, d’aller plus loin que les beaux discours que l’on nous donne. Se faire sa propre guerre pour avoir sa paix. Boycotter les grandes firmes, les politiciens trop beaux pour être vrais. Mais y a t-il une solution viable pour ne plus être effrayé de tous ces grands ? Démon est un chant de type slam. Ce morceau est sombre lui aussi, presque déprimant, type lamentation mais avec une demande d’être aidé, de se laver de ses démons et ses idées noires sur sa vie. La même chose est un goût nostalgique aux insouciances de l’enfance, l’adolescence. Adulte on se sent mal, on râle, on se sent bien, on ne sait pas quoi faire, on fait la même chose tout le temps ! WYLL veut nous réveiller de ce quotidien qui nous ronge de l’intérieur, ne pas refaire les mêmes erreurs, trouver de belles solutions viables et inventives pour sortir de ce train train quotidien ! Un peu d’espoir sombre donc ! Madame France c’est un peu les clichés démontés de notre pays : "La France est belle mais elle ne voit pas sa chance, ceux qu’il y a sous son aile et qui la défendent..." un titre évocateur au patriotisme, aux belles valeurs auxquelles nous tenons tant mais que pourtant, nous n’appliquons pas. Te laisse pas tomber conclut l’EP avec cet optimisme omniprésent. Il encourage à vivre ses rêves, à parler et vivre librement malgré les embûches qui se dressent sur notre chemin de vie. Les différents chants utilisés dans cet EP montrent que l’artiste en a dans le ventre et sait manier les styles ! Aux chœurs, il y a Karine Moni qui apporte de la légèreté dans les tonalités du chanteur. On aime ce subtil équilibre très recherché. L’artiste vogue entre la colère, l’indignation, la déprime, mais garde foi en la vie. WYLL aborde ces thèmes avec une musique légère mais aux paroles lourdes de sens. On sent son propre vécu, ses craintes, ses questions mais aussi ses solutions : l’éternel optimisme qu’un jour tout ira mieux ! Un artiste engagé pour le bien être de tous et de la planète. N’hésitez-pas à laisser vos oreilles trainer sur cet EP !

(Bobital)

TAGADA JONES (Motocultor)

PROGRAMMAT I O N la citroui l l e

saint

bri e u c


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