Nature(s) Fondation Vasarely 6 aout - 28 septembre 2012

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A PRO


AVANT OPOS 5


AVANT PR OPOS

SDFSSDFSLa Fondation Vasarely est heureuse d’accueillir Nature(s), exposition collective SDFSSDFSSDFSSDFS qui présente une sélection de travaux de six jeunes artistes traitant de la représentation de la nature dans leurs créations plastiques.SDFSSDFSDFSSDFSDFSSD FSDFSSDFSDFSSDFSDFSSDFSDFSSDF La nature a été de tout temps une source d’inspiration pour les artistes. Victor Vasarely, fait l’expérience de la « nature » lors d’un séjour à Belle-Isle-en-Mer. Il prend conscience qu’elle peut être traduite différemment pour n’en garder que l’essence de la forme et écrit : « Belle-Isle, été 1947. Les cailloux, les coquillages sur la plage, les remous, au large les brumes, le soleil, le ciel… dans les galets, dans les morceaux des bouteilles brisées, polis par le va et vient rythmé des vagues, je suis certain de reconnaître la géométrie interne de la nature… ». Les œuvres de la période Belle-Isle, mais également de Gordes (1947-1955), marquent le début d’une véritable démarche abstraite chez lui.

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AVANT PR OPOS

Plus tard, lorsqu’il décide de créer sa propre fondation, conçue comme une œuvre d’art totale intégrée dans le paysage, il choisit Aix-en-Provence et le site du Jas de Bouffan, cher à Cézanne. « L’art est une harmonie parallèle à la nature. » énonce d’ailleurs Cézanne, dont les recherches picturales font passer la représentation réaliste de la nature au second plan derrière la géométrisation de l’espace, marquant ainsi l’histoire de l’art à jamais. Aujourd’hui, la Fondation Vasarely souhaite renouer avec sa vocation première : allier patrimoine et création au sein d’un lieu d’échanges et de recherches, tourné vers l’avenir, les nouvelles technologies et les sciences. C’est dans ce contexte que prend forme l’exposition-installation Nature(s) qui regroupe des œuvres d’Akatre, de Pauline Thomas, de Donald Abad et de Djeff. En proposant des pistes d’hybridation de la nature et de l’art, notamment par le biais des nouvelles technologies, ces artistes nous questionnent sur la perception sensorielle, intellectuelle et esthétique du monde qui nous entoure.

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AVANT PROPOS

Installations in situ, dispositif réactif, vidéos, les œuvres réunies dans les salles d’exposition temporaire de la Fondation explorent la question de la représentation de la nature à travers divers cheminements artistiques. Si l’approche se veut contemplative chez les Akatre, ou techno-romantique pour Donald Abad dans une nature envisagée comme un compagnon de jeu, l’inquiétude écologique est présente dans l’installation interactive Black Widow de Djeff traitant de l’obsolescence programmée ou dans la vidéo Tsunami Gelatine de Pauline Thomas évoquant le thème de l’eau, sujets de préoccupation actuels. Le présent ouvrage se veut un prolongement de l’exposition. En allant à la rencontre des artistes exposés, il offre un éclairage complémentaire sur leur vision personnelle et sur leur approche sensible de la nature et de la question du paysage. Pierre Vasa rely, Président de la Fondation Aix-en-Provence, le 15 août 2

Vasarely 012

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AVANT PR OPOS

Installations in situ, dispositif réactif, vidéos, les œuvres réunies dans les salles d’exposition temporaire de la Fondation explorent la question de la représentation de la nature à travers divers cheminements artistiques. Si l’approche se veut contemplative chez les Akatre, ou techno-romantique pour Donald Abad dans une nature envisagée comme un compagnon de jeu, l’inquiétude écologique est présente dans l’installation interactive Black Widow de Djeff traitant de l’obsolescence programmée ou dans la vidéo Tsunami Gelatine de Pauline Thomas évoquant le thème de l’eau, sujets de préoccupation actuels. Le présent ouvrage se veut un prolongement de l’exposition. En allant à la rencontre des artistes exposés, il offre un éclairage complémentaire sur leur vision personnelle et sur leur approche sensible de la nature et de la question du paysage.

Pierre Vasarely, Président de la Fondation Vasarely Aix-en-Provence, le 6 août 2012

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NATUR ÉDI


RE ( S) ÉDITO 11


NATURE  (S)

nt deComment peut-on aujourd’hui rendre compte dans l’art de ce que Kenneth Clark dans son ouvrage L’art du nt ePaysage appelait le « sentiment de nature » ? C’est à cette problématique que l’exposition Nature(s) à nt dela Fondation Vasarely entend se confronter, en mettant en parallèle plusieurs approches sensibles à nt del’égard de cet objet appelé « nature ». Nature(s) au pluriel possible car l’expérience que nt dechaque artiste exposé fait de la nature lui est propre, que ce soit sur l’idée génératrice qui sous-tend le trant devail – le corps comme outil, l’oscillation entre rêverie fusionnelle et conscience de la séparation, l’expérience du temps, la réflexion sur l’espace1 –  que dans l’essence même du processus de création et t dt dt d les ment dediums utilisés. À l’instar du parcours physique proposé dans l’exposition, c’est à une déambulation nt dementale au cœur des propositions artistiques de Donald Abad, de Akatre, de Djeff et de Pauline nt deThomas qu’invite ce catalogue.

1 . Référence à la typologie utilisée par Colette Garraud dans son livre L’idée de nature dans l’art contemporain

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ÉDITO

nt deDonald Abad établit un contact personnel avec la nature, solitaire. Le corps devient outil, « centrale nt ded’écoute de sensations » pour citer l’historien Alain Corbin. Il est augmenté de toute une panoplie d’outils nt dede mesure, issus de technologies nomades détournées. Adoptant une attitude prométhéenne, l’artiste est nt deen quête d’un rapport de force avec la nature qui tourne sans cesse à son désavantage. Cependant il nt derefuse d’abandonner car cette utopie est pour lui nécessaire, vitale. nt deTandis que chez les Akatre s’ouvre un dialogue entre nature et artifice. C’est ici l’idée de nature qui nt deentre en jeu tant le geste artistique est fondé dans le concept d’un retour du produit manufacturé à sa forme nt denaturelle. Emerge alors un paysage construit, rythmique, qui se déploie dans l’espace d’exposition. La nt decomposition est néanmoins désordonnée, les éléments prolifèrent jusqu’à effleurer le plafond, comme nt depour rappeler que la nature a horreur du vide.

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NATURE (S)

Les œuvres de Djeff sont activées par le regard et les nt demouvements du spectateur, par la mise en fonctionnement du système perceptif. Dans le projet nt deTravelscope, elles l’invitent à redécouvrir le paysage traversé. La sublimation d’espaces intermédiaires, l’exnt depérience du temps ou encore l’introduction d’un bouleversement des repères visuels, font que le nt depaysage se transforme en une matière à rêves, réservoir d’émotions et de sensations. L’installation Black nt de Widow, quant à elle, oppose l’homme à une nature artificielle en qui sommeille un esprit sauvage, indompté. nt deDans Tsunami Gelatine, sorte de nature morte interactive, Pauline Thomas offre une expérience médint detative, aux références rousseauistes. La contemplation des vagues est propice à l’introspection. Dans nt dela cinquième promenade des Rêveries du promeneur solitaire, Rousseau, dont on célèbre en 2012 le nt detricentenaire de la naissance, écrit : « Quand le soir approchait je descendais des cimes de l’île et j’allais nt devolontiers m’asseoir au bord du lac sur la grève dans quelque asile caché ; là le bruit des vagues et l’agitant detion de l’eau fixant mes sens et chassant de mon âme toute autre agitation la plongeaient dans une rêverie délicieuse où la nuit me surprenait souvent sans que nt deje m’en fusse aperçu. Le flux et reflux de cette eau, son bruit continu mais renflé par intervalles frapnt depant sans relâche mon

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ÉDI TO

oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvements internes que la rêverie nt deéteignait en moi et suffisaient pour me faire sentir avec plaisir mon existence sans prendre la peine nt dede penser. De temps à autre naissait quelque faible et courte réflexion sur l’instabilité des choses de ce nt demonde dont la surface des eaux m’offrait l’image… » Inscrite dans la tradition romantique d’une nature miroir nt dede l’homme, l’œuvre contient en elle une critique sous-jacente puisque l’artiste y aborde la question du nt derespect de la nature. L’exposition Nature(s) dévoile une nature nt de multi-fant decettes tantôt compagnon de jeu, tantôt puissance inquiétante, lieu de réflexion ou espace d’expérimentant detions. Au-delà de la simple représentation, les artistes exposés partagent leurs visions personnelles d’une synthèse entre nature et culture qui explore la nt derelation Homme/Nature et interroge la perception du monde qui nous entoure. nt deCéline Bodin e t Djeff

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NATURE (S)

Céline Bodin nt Diplômée du Master II en Histoire nt et Gestion du Patrimoine Culturel de l’Université de Paris I Panthéonnt Sorbonne, Céline Bodin est nt actuellement directrice de la nt production artistique au sein nt nt du label et de la maison d’édition nt sometimeStudio à Paris, chargée nt de programmation pour le centre nt nt d’arts LIZIERES fondé par nt l’artiste Ramuntcho Matta et nt rédactrice pour divers médias nt culturels et d’art contemporain. nt nt Elle collabore régulièrement sur des événements artistiques, nt nt en relation notamment avec l’art nt nt numérique (festival Emergences à Paris, festival Ososphère nt nt nt à Strasbourg) et la création nt contemporaine.

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ÉDITO

Djeff nt Artiste visuel exposé en France et à l’étranger, Djeff a été nt nt nt commissaire d’exposition et nt nt coordinateur artistique sur plusieurs événements culturels et scientifiques, notamment Créer du sens à l’ère numérique pour H2ptm en 1999, Double Jeu pour nt ntt l’Académie Fratellini en 2004, Jouable 3 nnnnnnà l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris en 2004, l’atelier numérique pour nnnnnnnl’expérimentation Sciences Po/ Fondation Jean-Luc Lagardère de 2007 à 2010. Il a également été jury pour la bourse « créateur numérique » de la Fondation Lagardère. De 2008 à 2010, il est Directeur Artistique du Red Star Lab à Saint-Ouen. nnDirecteur artistique, puis Directeur de la Création de Sciences Po Paris de 2009 à 2012, Djeff dispense également des enseignements liés aux pratiques du numérique dans diverses formations.nn

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Notes

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IN SITU Nature(s) Ă la Fondation Vasarely

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IN SITU Nature(s) Ă la Fondation Vasarely

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Notes

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DON A


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Donald Abad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.donaldabad.com

SDFSSDFSDonald Abald explore dans son travailFSSDFS la dualité technologie/nature,SDFSSDFSSDFSSDFS S deux notions fortes englobant les concepts des nouvelles technologies nomades (GPS, autonomie, temps réel/temps SSSSSSSSdifféré, nouveaux territoiresSSSSSSSSSDFSSDFS SDFSSDFSSDFSSDFSde l’information et de la communication), mais également la performance (au sens artistique et sportif du terme) et le land-art. FSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSD FSSD FSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSC’est un artiste néo-romantique multimédia dans le sens où SSSSSS son exploration des nouveaux média et des technologies nomades n’est jamais le résultat présenté mais le moyen de créer SDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFS SDFSS de nouveaux scénarii à raconter sous forme de récits d’aventures vidéo. Ses expériences nourrissentFSSDFS une interrogation sur la place SDFSSDFSSDFSSDFSSDF SSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSSDFSFSSDFSFSSDFSFS SDFSFSSDFSFSSD FSde l’individu face à son environnement.

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

Diplômé et post-diplômé DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFSde l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, Donald Abad mène de front, depuis 2003, projets artistiques, résidences d’artistes (Pépinières européennes pour jeunes artistes DSDFS au Pays-Bas et en Espagne, Arcus Studio au Japon, Géographies DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS variables au Québec, Biennale de l’art contemporain à Rennes…) et enseignements à l’École supérieure d’art et de design d’Amiens, aux Ateliers du Carrousel du Louvre, à l’Académie Charpentier et à l’Université Paris 8.DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS Les créations de Donald Abad ont été présentées sous la forme de projections, performances et expositions en France (Gaîté Lyrique, Forum des images et Centre Pompidou SDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS DSDFS à Paris, festival ParkInProgress au domaine de Saint-Cloud, École Européenne Supérieure d’Art de Bretagne à Rennes, Centre culturel DSDFS DSDF DSDFS DSDFSaint- Exupéry à Reims, Gare Saint Sauveur pour Lille 3000 à Lille, Station Vastemonde à Saint Brieuc, et à l’étranger La Graineterie à Houilles…) (M:ST Festival N.5 à Calgary au Canada, Festival Nouveau Cinéma à Montréal au Québec…).

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DonaldFFFFF

ABAD

Cette série de vidéos s’articule autour de laSSDFSFS S DSSDFSFSSDSSDFSFSSDSSDFSFSSD (re)découverte du site de la Fondation Vasarely par Donald Abad SSDF Cette série de vidéos s’articule autour de la (re)découverte du site de la Fondation SSDFSFSSDSSDFSFSSDqui seVasarely réapproprie physiquement par Donald Abad qui se réapproprie physiquement et intimement l’espace avec ses avec propres ses outils propres outils de mesure et intimement l’espace de mesure et d’observation. Le titre de la série s’inspire du livre de Le Victor Vasarely, brutes,s’inspire du livre de et d’observation. titre de Notes la série compilation de pensées et de réflexions plastiques et philosophiques, sur plusieurs années. Victor Vasarely,recueillies Notes brutes, compilation de pensées et La première étape consiste en un repérage du site de réflexions plastiques et philosophiques, recueillies sur historique et de son territoire. plusieurs années.SSDFSFSSDSSDFSFSSDSSDFSFSSLa Fondation Vasarely est le chef d’œuvre Victor Vasarely, construit en 1976.en Le un Centre DLade première étape consiste repérage du site SSDFSF architectonique, destiné à accueillir son œuvre picturale et et théorique, constitué de seize historique de sonestterritoire.SSDFSFSSDSSDFSFSSalvéoles hexagonales accolées, dans l’esprit l’architecture organique des années DLade Fondation Vasarely est 70. le chef d’œuvre de Victor Chaque alvéole est recouverte d’une pyramide vitrée composée de 96 triangles en comme1976. autant de Le verrières Vasarely, construit Centre architectonique, zénithales permettant de diffuser un éclairage naturel dans les d’expositions. commepicturale et théorique, destiné à salles accueillir sonConçue œuvre une véritable sculpture lumino-cinétique, la façade en aluminium anodisé alternance l’unité est constitué de présente seizeenalvéoles hexagonales accolées, formelle cercle / carré. Un plan d’eau aménagé devant constructionde épouse ses formes géométriques que dansla l’esprit l’architecture organique des années 70. le reflet de l’eau démultiplie. Le bâtiment intègre en ses murs 42 œuvres monumentales du plasticien, Chaque alvéole est recouverte d’une pyramide vitréeS symboles de l’intégration de l’art dans l’architecture. SDFSFSSDSSDFSFSSDSSDFSFSSDSSDFSFSSDSS DFSFSSD composée de 96 triangles comme autant de verrières zénithales permettant de diffuser un éclairage naturel dans les salles d’expositions. Conçue comme une véritable sculpture lumino-cinétique, la façade en aluminium anodisé présente en alternance l’unité DSDSformelle cercle / carré. Un plan d’eau aménagé devant la construction épouse ses formes géométriques que le reflet de l’eau démultiplie. Le bâtiment intègre en ses murs 42 œuvres monumentales du plasticien, symboles de l’intégration de l’art dans l’architecture.DSDS

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Notes brutes Série de vidéos, captation in situ à la Fondation Vasarely lors d'une résidence artistique, 2012 www.donaldabad.com/vasarely-au-naturel

Dans un second temps, l’artiste définit dans cet espace ses propres limites physiques et mentales. Il déploie sa panoplie d’outils et arpente le territoire, profitant ou sollicitant Dans un second temps, l’artiste définit au fil de sa déambulation des limites rencontres /DF dans cet espace ses propres physiques et mentales. Il déploie interactions saavec son environnement.DFSFS panoplie d’outils et arpente le territoire, profitant ou sollicitant Ces explorations sont au fil de filmées sa déambulation des autant de pistes, rencontres / interactions avec de notes et de recherches, complétant un SFSson environnement. Ces explorations filmées sont autant de pistes, FDFSFScarnet d’observations, qui donnentF de notes et de recherches, complétant un carnet d’observations, sensible construite SFSFSFà voir qui une donnentsurface à voir une surface sensible construite dans la dynamique dans la dynamique regard et de la FFFFFFdu regard etdu de la perception. Fperception. FFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFF

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Notes

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Notes brutes Série de vidéos, captation in situ à la Fondation Vasarely

SDF SDF SDFSDF SDF SDFSDF SDF SDF www.donaldabad.com/vasarely-au-naturel

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DonaldFFFFF ABAD

«Le long d’un sentier de montagne, l’apparition de cairnsong d’un sentiong d’un sentiong d’un sentiong d’un sentiOn se pose pour regarder des pierres déplacées et F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFlà F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F se fige, de la même posées par l’homme. LeF temps SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F manière que cesF SDFSDF pierres ontF SDFSDF traversé des années sans SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFde F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F changer place. SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F F SDFSDFse F SDFSDF F SDFSDF Fet SDFSDF F SaufSDFSDF qu’elles rebellent fuient.»nnées sannnées SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF sannnées san F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F Dans sonF SDFSDF ouvrage intitulé Voyage géologique et MinéraSDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFen F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFle F géologue Emile Gueylogique Corse, 1820-1821, SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFétait F mard disait deFla Corse qu’elle « l’Elysée de la GéoSDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F SDFSDF F logie » du fait Fde sesF SDFSDF affleurements spectaculaires et de SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F sa géologie diversifiée et complexe constituée de roches SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDFnatures. F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F de différentes Donald Abad filme ces paysages SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F rocailleux, objets d’une contemplation immobile. SouSDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F F SDFSDF dain,SDFSDF desF SDFSDF pierres jaillissent en cascade mues par une F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F créant SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F force invisible, uneFtension entre immob SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF FDonald SDFSDF ilité et Fmouvement.ures. Abad filme ces payF SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F sages rocailleux, objets d’une contemplation immobile. SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F des SDFSDFpierres F SDFSDF F jaillissent SDFSDF F SDFSDFen F Soudain, cascade mues par une SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF créant F SDFSDF F SDFSDF F SDFSDF F entre immob force invisible, une tension

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Corsica ro cks Série de vidéos, 2009 www.donaldabad.com/corsica-rocks

« Le long d’un sentier de montagne, l’apparition de cairns1. On se pose pour regarder des pierres déplacées et posées là par l’homme. Le temps se fige, de la même manière que ces pierres ont traversé des années sans changer de « Le long d’un sentier de montagne, l’apparition de cairns . place. On se pose pour regarder des pierres déplacées et posées là par l’homme. Le temps se fige, de la même manière Sauf qu’elles se rebellent fuient.» que ces pierres ontet traversé des années sans changer de place. 1

Sauf qu’elles se rebellent et fuient. » Dans son ouvrage intitulé Voyage géologique et Minéralogique Dans son ouvrage intitulé Voyage et Minéraloen Corse, 1820-1821, le géologue géologique Emile Gueymard disait de la Corse qu’elle était « l’Elysée de la Géologie » gique en Corse, 1820-1821, le géologue Gueymard du fait de ses affleurements spectaculaires Emile et de sa géologie diversifiée et complexe constituée de roches de différentes disait de la Corse qu’elle était de la Géologie » natures. Donald Abad filme « l’Elysée ces paysages rocailleux, d’une contemplation immobile. Soudain, des pierres du fait de ses objets affleurements et de sa géojaillissent en cascade spectaculaires mues par une force invisible, créant une tension entre immobilité et mouvement. logie diversifiée et complexe constituée de roches de différentes natures. Donald Abad filme ces paysages rocailleux, objets d’une contemplation immobile. Soudain, des pierres jaillissent en cascade mues par une force invisible, créant une tension entre immobilité et mouvement.

. Amas de pierre servant à baliser les sentiers de marche en Europe de l’Ouest

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Donald Abad

Après la phase d'observation

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Diptyq ue de l'é che c

vient la phase d'action.

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Donald ABAD

Après la phase d’observation vient la phase d’action. L’artiste intervient alors dans le paysage. Deux vidéos performances sont exposées et mises en parallèle. Après la phase d’observation vient la phase d’action. L’artiste intervient alors dans le paysage. Deux vidéos performances sont exposées et mises en parallèle.

Flying Babel over Vasarely Fondation est une réactivation de Flying Babel deVasarely Donald Abad, performance Flying Babel over Fondation est une de Flying Babel de Donald Abad, originellementréactivation produite dans leproduite cadredansdule festival Parperformance originellement du festival ParkinProgress4 organisé par kinProgress4 cadre organisé les Pépinières Européennes les Pépinières par Européennes pour Jeunes Artistes au Domaine de Saint-Cloud. Dans cette vidéo, pour Jeunes Artistes depierres, Saint-Cloud. Dans Donald Abald au fait Domaine voler un amas de un cerf-volant augmenté numériquement. Cette forme cette vidéo, Donald Abald unfait voler amas de pierres, grossière symbolise cairn, volantun au dessus l’étendue d’eau devant la Fondation Vasarely. un cerf-volantde augmenté numériquement. Inquiétante, elle rode, flotte, explore, voire Cette forme erre autour de la structure, telle une bête grossière symbolise curieuse. un cairn, volant au dessus de l’étenI did not own the Roden Crater : Cette captation, due d’eau devant la Fondation Vasarely. Inquiétante, elle filmée dans le désert de l’Arizona, a pour toile de fond le Roden Crater, un cratère volcanique rode, flotte, explore, voire erre autour deprès la structure, acheté par l’artiste James Turrel et situé Flagstaff où il réside. James Turrel telle une bêtede a curieuse. découvert ce cratère en 1974 lors d’un survol de la région (l’artiste américain est aussi I did not own the Roden Crater : Cette captation, filmée pilote) et depuis, il transforme peu à peu le site en un gigantesque observatoire astronomique. dans le désertLede a pour toile but l’Arizona, de cet œil immense est d’offrir auxde fond le Roden visiteurs une vision différente du ciel et de Crater, un cratère volcanique acheté ses phénomènes – la lumière, le soleilpar et lesl’artiste James Abad, aux portes du domaine Turrel et situéétoiles. près Donald de Flagstaff oùauil moyen réside. James Turinterdit d’accès au public, tente de son cerf-volant une approche de cette œuvre rel a découvert ce cratère en 1974 lors d’un survol de la pharaonique par l’aéro-photographie. région (l’artiste américain est aussi pilote) et depuis, il transforme peu à peu le site en un gigantesque observatoire astronomique. Le but de cet œil immense est d’offrir aux visiteurs une vision différente du ciel et de ses phénomènes – la lumière, le soleil et les étoiles. Donald Abad, aux portes du domaine interdit d’accès au public, tente au moyen de son cerf-volant une approche de cette œuvre pharaonique par l’aéro-photographie.

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Diptyq ue de l'é che c Flying Babel over Vasarely Fondation I did not own the Roden Crater Vidéos - performances, Roden Crater, Arizona, 2010 / 2012 à la Fondation Vasarely www.donaldabad.com/Vasarely-au-naturel

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Entre tien Céline Bodin et Donald Abad

CB : Donald Abad, tu imagines des documentairesfictions dans la nature, comme « Entre Deux », vidéos-performances réalisées avec la complicité de Cyriac Allard, « L’affranchissement aventurier » ou encore « Géographies variables » avec Matthieu Tardif. Est-ce que pour toi la nature représente un décor, un cadre pour tes mises en scène, ou l’envisages-tu comme un compagnon de jeu ?

CB : Comment as-tu justement appréhendé la Fondation Vasarely et son territoire ?

DA : Je connaissais la Fondation Vasarely par l’intermédiaire de photos mais le le le le je n’y étais jamais venu, avant d’être invité en résidence à l’occasion de l’exposition Nature(s). Mes premiers jours ont été consacrés à l’observation, à la lecture de l’espace. Comment je le DA : Au fil du temps et de l’évolution ressentais et quels échos je percevais de ma pratique artistique, mon travail en moi, sensoriellement parlant. s’est radicalisé et je suis sorti J’ai patiemment écouté, observé, capté de l’espace de l’atelier, de la salle et filmé le lieu sous toutes ses coutures. d’exposition du musée et de la galerie Le toit-terrasse de la Fondation pour développer mes recherches sur est recouvert de plusieurs verrières, l’immatériel, l’éphémère et le sensible. ressemblant à des diamants taillés, Cette démarche m’a mené à investir protégées par des bâches tendues. l’espace naturel, non comme simple décor, Le vent s’engouffrant sous ces bâches mais comme partenaire de mes actions. les soulève et crée à l’intérieur Corsica rocks en est un exemple, puisque du musée un jeu d’ombres et de lumière je filme de manière frontale et directe qui fait écho aux œuvres optiques des paysages de rochers, tel un décor de Vasarely. La charpente en bois vit, figé pour l’éternité. Soudainement craque et grince, comme si le bâtiment une action invisible vient rompre respirait, animé d’une vie propre, cette immobilité, les roches sont prises presque en opposition avec son caractère de mouvement. Subitement ou subissant, figé de cathédrale abritant une collection on ne sait. Mues par une réelle volonté d’œuvres. Ces moments révélant une nature de nomadisme ou une forme de suicide. au contact d’une architecture humaine On voit souvent des pierres qui chutent, organique sont enregistrés par la caméra, comme si elles ne vivaient que des échecs. accentuant la « passagèreté » de cette interaction. CB : La nature est, selon Paul Ardenne, une « inépuisable matrice à images ». J’ai ensuite commencé à appliquer mes méthodes d’appréhension active DA : Oui et au-delà, j’investis de ce même espace avec mes propres la nature de manière presque charnelle : unités de mesures empiriques. Pour j’engage mon corps dans des actions cette phase d’exploration, je me suis physiques qui cherchent à tisser forgé des outils vidéo et GPS en un dialogue, à négocier avec les éléments. détournant certaines technologies La nature est mon atelier de prédilection. de leur usage premier. C’est le cas J’y élabore mes investigations, mises par exemple de la visite aléatoire en scènes et récits tout en étant attentif qu’effectue mon chat (aveugle) à l’évolution des cycles naturels, dans les espaces de la Fondation : à commencer par la trajectoire du soleil. il est équipé d’un système avec mode Lumière « première » qui donne un volume vidéo et puce GPS intégrée qui filme à la forme, mais qui est également ses trajets et les met en ligne sur nécessaire pour fixer une image sur la plateforme kinomap. L’image se fait pellicule. Je détourne les technologies alors excroissance du corps en mouvement, nomades pour mesurer l’expérience du corps mobile et regardant. vécue, en ne laissant aucune trace ou Mon aveugle de chat comme outil était empreinte dans le paysage. Cette approche comme un écho aux chauves-souris se veut sensible, délicate, éphémère… accidentellement emprisonnées dans la Fondation. Et d’ailleurs, si mon chat miaule beaucoup sur la vidéo, ce n’est pas tant par plaintes ou pleurs (je suis à quelques mètres de lui et lui signale régulièrement ma rassurante présence), mais c’est une forme

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Entre tien Céline Bodin et Donald Abad

de sonar qu’il emploie, c’est sa façon de tester l’espace. Sur une autre vidéo, on me voit, armé d’une perche avec une caméra avec objectif fish-eye fixée à son embout, qui essaie de dialoguer dans le sens de la hauteur avec les intégrations monumentales de Vasarely. A un autre moment, je marche sur l’étendue d’eau devant la Fondation Vasarely générant par cette action des troubles optiques.

d’eugénisme ou d’élitisme, n’aurait pas sa place dans le gotha des formes géométriques optiques. Du coup, elle reste au seuil de la porte, entre les alentours naturels du parc et les portes de la Fondation.

DA : Au fil du temps et de l’évolution de ma pratique le le le le artistique, mon travail s’est radicaliséCB :etTuje suis sorti de présentes également, à côté de la vidéo Flying Babel over Fondation,une vidéo l’espace de l’atelier, de la salle d’exposition duVasarely musée I did not own the Roden Crater que tu as tournée Etats-Unis, dans le désert et de la galerie pour développer mesaux recherches surde l’Arizona, à proximité de l’œuvre en cours de James Turrel : CB : En effet après avoir observé, tu te le Roden Crater.démarche Peux-tu nous expliquer l’immatériel, l’éphémère et le sensible. Cette confrontes à l’espace. La captation réveille le pourquoi as-tu décidé de placer ces deux œuvres de l’action, le corps en apparaissant à en miroir dans un « Diptyque de l’échec » ? m’aprésent mené à investir l’espace naturel, non comme simple l’image devient indissociable de l’œuvre et ce J’avais d’abord en tête des raisons n’est pasmais une simple image de tonpartenaire corps que tu décor, comme de mesDA : actions. Corsica esthétiques : je trouve que visuellement nous donnes à voir. Celui-ci est mis en action ces deux paysages dans l’effort… « De l’effort », titre d’une de tespuisque je l’association rocks en est un exemple, filme de de manière fonctionne bien. En premier plan apparaît installations, créée en 2002… une étenduetel d’eau, toile de fond frontale et directe des paysages de rochers, unendécor deux monuments, deux cathédrales de DA : Oui et c’est ce que je matérialise l’Art. Ensuite,invisible dans mes recherches, danspour Flying l’éternité. Babel (cerf-volant de forme figé Soudainement une action je travaille sur la dualité technologie /  hexagonale qui n’est pas sans évoquer nature.sont La Nature permet de cellerompre de la structure architecturale vient cette immobilité, les roches prises dese concentrer sur des cycles et rythmes essentiels, de la Fondation) en me mettant en scène un écho mes notions d’effort, dans un rapport Subitement de force avec l’élément mouvement. ou subissant,tel on ne àsait. Mues d’énergie (vitale), et de déplacements. naturel, l’air, le vent, dans un équilibre permetforme de retrouver dynamique. par une réelle volonté de nomadismeCela oumeune de un espace tangible, réel, vrai, « qui ne triche pas » et qui vient se placer au cœur même CB : Non sans c’est un tas suicide. Onhumour, voitpuisque souvent des pierres qui chutent, comme de projets liés au virtuel et de pierres que tu fais voler… l’abstraction. Or dans ces deux projets, si elles ne vivaient que des àleéchecs. dialogue n’arrive pas à s’opérer, DA : La forme d’un cairn est modélisée comme si je n’avais pas franchi toutes en 3D, de façon assez grossière. les étapes d’un rite de passage. Pour Le cairn sert à baliser les sentiers mon projet sur Roden Crater, je suis de marche, surtout lorsque le relief parti en vélo avec mes outils caméra, empêche une lecture aisée de la piste cerf-volant et GPS, à travers un paysage en montée. Originellement et de déserts, au fin fond de l’Arizona. de manière physique et logique, la base L’endroit est inaccessible au public et du tas de pierre repose sur le sol peu facilement localisable car c’est un et la pointe tend vers le ciel. domaine privé et James Turrel Ici, on assiste à un renversement a racheté les terres avoisinantes pour de perspective : le ciel est socle éviter tout projet de construction. et le sommet du cairn pointe vers le J’avais l’image du volcan en tête (les bas. De stalagmite,le cairn est devenu photographies données par Turrel sont stalactite. À la merci du vent et dirigé toujours sous le même angle), cela fait par un fil, il esquisse une sorte de duo des années que je mentalise cette forme chorégraphié avec son dresseur, qui me fascine, cette même obsession une chorégraphie de l’invisible. pour une forme naturelle que dans le Réalité virtuelle et réalité naturelle film « Rencontre du 3 s’interpénètrent. type » avec la Pour l’exposition Nature(s), je montre montagne comme référence commune à cette forme qui erre autour de la plusieurs individus. Je suis arrivé ème

Fondation, cet espace calculé, géométrique. Elle apparaît comme une espèce dégénérée, bien que réalisée avec des règles de perspective issues d’un logiciel, qui par une sorte

jusqu’à la grille d’entrée du domaine où se situe le cratère volcanique. Et là, devant moi, la barrière était ouverte, mais des panneaux « No trespassing » à l‘effet dissuasif

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Entre tien Céline Bodin et Donald Abad

m’ont ralenti dans mon élan, d’autant que je savais que les rondes de gardiens étaient fréquentes et qu’aux USA, on ne rigole pas avec la notion de propriété privée… Je suis donc resté aux portes du domaine, ce qui a été une source de frustration immense… Je me suis positionné ensuite en face du Roden Crater, séparé par le plan d’eau qui s’étend à ses pieds, et je me suis mis au rythme du lieu. Cet endroit est sacré pour les indiens Hopis. Un sentiment d’éternité domine dans ce paysage hors du temps où la végétation semble pétrifiée. Petit à petit, j’ai commencé à préparer mon dispositif de captation vidéo, une caméra espion fixée sur un cerf-volant, pour tenter en survolant l’eau d’approcher le cœur du Roder Crater. Cette tentative a été soldée par un échec… Je n’ai jamais réussi à faire fonctionner ce dispositif. Je suis resté au round d’observation, la question est de savoir : est-ce que j’y retournerais pour prendre ma revanche ?

CB : Deux processus non aboutis, deux rendezvous manqués, deux abandons déstabilisants, cette symbiose entre l’homme, l’artiste, et la nature n’est-elle finalement pas à tes yeux une utopie ?

le le le le DA : C’est en cela que j’ai placé ces deux vidéos côte à côte, en « diptyque de l’échec ». D’abord ce cairn volant, géométrique mais dégénéré, survole la Fondation, se rêve exposé à l’intérieur, mais restera bien aux portes. Ensuite mon personnage bloqué devant l’entrée du volcan par un panneau planté par l’homme. Dans ces deux situations, ma créature, mon avatar, mon personnage, bref, moi, Donald Abad, je me retrouve au seuil, et je n’accède, ni ne pénètre, en ces lieux. La tentative d’interaction se solde par un échec. Je ne dirais pas un dialogue, car en fait, je suis bien seul. Je pousse la forme, je cherche à la faire réagir, j’essaie de lancer, de taper, de la fracasser, bref, d’exister en face. Parce que quelle cohabitation peux-tu avoir avec ces rocs monolithiques ? Quelle place comme Homme, comme Artiste peux-tu avoir ? Dois-tu les traverser en silence ? Ton mouvement créera-t-il la vie ? Insufflera-t-il l’énergie du présent ? Face à ces structures tangibles, moi qui travaille l’immatériel et l’éphémère, je me suis posé la question de la cohabitation, même temporaire lors d’une exposition. Trois possibilités en découlent : compléter, s’opposer, ou négationner. Dans ces deux cas de projets, c’est un combat. C’était un premier round d’observation. Je vais continuer à m’entraîner, et le prochain sera celui de l’attaque.

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CB : Esquive face à Vasarely, échec devant le Roden Crater… Tu conjugues à la fois la figure de l’artiste-aventurier, explorateur, et celle d’un personnage sisyphéen…

DA : Au fil deducestemps de l’évolution de ma pratique le le leÀ le DA : l’image tours de et Babel que je construis et qui finissent par artistique, s’est radicalisé et je suis sorti de s’effondrer… mon Mais autravail moins je tente, et je prends le risque de tomber. l’espace de l’atelier, de la salle d’exposition du musée Je suis souvent seul pour développer mes idées scénaristiques ou artistiques, etdansdeun la galerie pour développer mes recherches sur perpétuel recommencement du passage à l’action. Je dois prendre l’immatériel, l’éphémère en compte les paramètres naturels :et le sensible. Cette démarche cycle des saisons, le vent, les m’ale mené à investir l’espace naturel, non comme simple ombres, la lumière, mais aussi mon énergie, mon endurance, ma force, décor, comme partenaire de mes actions. Corsica et doncmais ma volonté… C’est presque une épreuve d’endurance, rocks unce exemple, puisque je filme de manière je n’aien sur est moi que que je peux porter au maximum, mon projet ira frontale etque directe paysages de rochers, tel un décor aussi loin là où je des pourrais aller. Il faut sans cesse s’entraîner, mais figé Soudainement une action invisible toutpour se jouel’éternité. beaucoup au mental. C’est aussi pour toutes ces raisons que je vient rompre cette immobilité, les roches sont prises de travaille essentiellement seul, je ne peux, ni ne veux, imposer cela mouvement. Subitement ou subissant, on ne sait. Mues à personne d’autre. Déjà, je dois le vivre et le ressentir pour moi, dans par réelle volonté de nomadisme ou une forme de son une contexte naturel, pour pouvoir enfin le raconter, et il n’est pas rare suicide. On voit souvent des pierres qui chutent, comme que le projet se modifie en cours de tournage. elles ne que vivaient que des échecs. Il n’est passirare non plus je recommence un grand nombre de prises car je ne sais jamais vraiment comment je filme, et il faut avouer que mes machines et outils tombent souvent en panne au mauvais moment. Ou au bon moment, peut-être. Réaliser des actions type « retour à la Nature », équipé de moyens technologiques, peut sembler absurde car voué dès le départ à l’échec. C’est justement les causes et les moyens de ces échecs, tout autant que l’espoir de la démarche initiale, qui m’intéressent.

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Donald Abad, repliant son cerf-volant face au Roden Crater. Témoignage caméra : « C’est le genre de projet où tu crois que, où tu es un peu dans un mode paranoïaque, où t’es un peu persécuté par les autres, et tu as vraiment l’impression que chaque élément est un obstacle entre toi et le but que tu vas atteindre, c’est-à-dire que t’as vraiment le sentiment d’être poursuivi, persécuté, et que chaque personne que tu vas rencontrer, chaque défi, chaque danger, chaque... même chaque maison qui apparaît, chaque mec qui passe avec sa voiture mais qui n’a peut-être rien à voir avec l’histoire, tu penses que, il est un potentiel obstacle ou danger dans ta conquête de –Euh…-, dans ta conquête de l’interdit, finalement. Parce que tu sais très bien que ce que tu fais, c’est complètement illégal. Donc tu es un peu sur une sorte de qui-vive, de qui-vive en permanence. Tu es constamment en mode réflexe, en mode instinctif, et tu perçois vraiment chaque stimulus, chaque chose qui bouge, chaque élément comme ça, tu peux le percevoir comme un danger, comme un obstacle. Et je dis pas que tu es presque prêt

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à les éliminer, en tout cas t’es prêt à les sauter, t’es prêt à les contourner, et je pense que si vraiment tu vas loin, très loin, tu peux vraiment te retrouver à devenir très mauvais, très méchant, ouais. Je dirais pas jusqu’à tuer, mais euh, tu peux vouer une certaine haine en fait. Tu peux aller jusqu’à haïr le moindre élément qui se met entre toi et ton but. Tu peux vraiment haïr très fort. C’est-à-dire que le mec qui n’a rien demandé, qui est peut-être là, comme les gars que j’ai croisé là, les mecs sont là juste pour bosser, ils font leur travail, ils ont rien à voir, rien à faire avec cette histoire. Ils comprennent même pas quelle est ton histoire personnelle, c’est-à-dire que je pense qu’ils ne l’envisagent même pas. Et toi, t’as tellement poursuivi ce but là depuis tellement longtemps, que je pense que tu n’acceptes aucun délai, aucun retard, et aucun contretemps dans ta course. Parce que tu sais que c’est une course, tu sais que tu n’as pas toute la vie, tu sais que c’est maintenant. Tu sais que c’est maintenant que tu le veux. Et c’est pas après, c’est pas... c’est maintenant. T’es vraiment dans un mode de chasse, où il y a que ton instinct qui parle.


Entre tien Céline Bodin et Donald Abad

Et t’as beau être préparé, t’as beau être super préparé, je pense que plus tu es préparé, plus tu peux imaginer des potentiels scénarios, des potentielles esquives. Mais je crois que plus tu approches du but à atteindre... Moi je pense qu’il faut, on a beaucoup de choses à apprendre des explorateurs, ou des mecs qui sont comme ça super entraînés. Parce que moi je sais que plus je suis prêt du but, plus je ne tolère aucun incident en fait. Je suis prêt à le, je suis prêt à devenir assez mauvais en fait. Je tolère de moins en moins, parce que je sais combien ça m’a coûté, et que, et j’ai pas envie de me sacrifier pour rien. Y’en a marre des compromis. Il y a un moment où t’en a marre des compromis. Et tu ne tolères plus. T’as plus aucune tolérance. T’es vraiment... t’as un but, t’as un objectif, et t’es prêt à tout pour l’avoir. Et en l’occurrence, j’étais pas prêt à tout pour l’avoir. Donc je l’ai pas eu. »

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Donald ABAD

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Diptyq ue de l'é che c I did not own the Roden Crater Vidéos - performances, Roden Crater, Arizona, 2010 / 2012 à la Fondation Vasarely www.donaldabad.com/Vasarely-au-naturel

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Akatre Atelier de création fondé en 2007 à Paris. www.akatre.com

nDAkatre est un atelier artistique formé de 3 personnes : nDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonaValentin Abad, Julien Dhivert et Sébastien RiveronnDonanDonanDonaayant l’envie d’expérimenter et de jouer avec les différents chemins graphiques. nDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDonanDona Le collectif se défend d’avoir une approche presque traditionnelle dans leur réponse graphique : nanDonanDonanDonananDonanDonanDonale dessin des lettres dans leurs créations typographiques ou la mise en place d’installations servent le plus souvent de matière plastique pour leurs photographies. nanDonanDonanDonaAkatre souhaite créer toutes les formes qui seront mises en place afin d’avoir une réponse personnelle dans un projet artistique ou de commande.nanDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDona Concevoir, chercher et développer des conceptsnanDonanDonanDona identitaires complets pournanDonanDonanDona des institutions culturelles, nanDonanDonanDona pour la conception d’ouvrages artistiques ou pour la presse sont leur activité première, créant de véritables univers ne manquant pas d’humour ou de malice. Le groupe aime se remettre en question nanDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonapour chaque projet, afin de favoriser dans leur démarche une recherche expérimentale voire nanDo-

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

nanDonanDonananDonanDonanDonainattendue, pour une proposition différente répondant toujours au mieux à une demande initiale. Il n’envisage le travail qu’en profondeur sur des projets dans leur globalité, de la conception à la réalisation. nanDonanDonanDona L’atelier porte une attention rigoureuse dans tous ses travaux, sur la composition et la création typographique. Diplômés tous trois nanDonanDonanDonad’une école de communication visuelle en 2006, nanDonanDonanaValentin Abad, Julien Dhivert et Sébastien Riveron commencent par faire leurs armes dans différents studios de graphisme culturel (Philippe Apeloig, Ruedi Baur, Aer, Michel Bouvet…).nanDonanDonanDona En 2007, ils se rassemblent sous la forme d’un collectif, Akatre, et naDonanDonasont accueillis en résidence de création jusqu’en 2012 par Mains d’œuvres,nanDonanDonanDona lieu de création et de diffusion, de recherche et d’expériences, installé dans l’ancien Centre social et sportif des Usines Valeo, un bâtiment de 4000 m2 aux abords du Marché aux Puces de Saint-Ouen.onanDonanDonaEn 2007, ils remportent également l’appel d’offres pour la prise en charge de l’identité visuelle de cette structure. nanDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonananDonanDonanDonanan-

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DonDonald Aad Atelier créatif fondé en 2007 à Paris. www.akatre.com

Akatre met son savoir-faire pluridisciplinaire (graphisme, typo, photo, vidéo, objets…) au service de commanditaires institutionnels (Catalogue de l’exposition Histoire(s) de voir à la Fondation Cartier en 2012, identité graphique de la biennale « Saint-Ouen, Traversée d’arts » en 2012, du TU de Nantes en 2011 et 2012…), de clients dans le secteur de la presse (Libération, Usbek et Rica, Tsugi magazine…) et de la mode (Issey Miyake, Galerie des Galeries) mais aussi développe ses propres projets notamment vidéo et photo (Vjing en 2011 pour ParaOne et Tacteel à la Gaîté Lyrique). Leurs travaux graphiques ont été exposés lors d’expositions collectives (Festival international de l’affiche et du graphisme de Chaumont en 2010 et 2012, Paper Jam 2 en 2012, Galerie Wanted à Paris en 2010…). Une exposition personnelle, intitulée « Atroa », leur a été consacrée d’octobre à décembre 2011 à l’Espace 1789 à Saint-Ouen. consacrée d’octobre à décembre 2011 à l’Espace 1789 à Saint-Ouen. consacrée d’octobre à d

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

Akatre met son savoir-faire pluridisciplinaire (graphisme, typo, photo, vidéo, objets…) au service de commanditaires institutionnels (Catalogue de l’exposition Histoire(s) de voir à la Fondation Cartier en 2012, identité graphique de la biennale « Saint-Ouen, Traversée d’arts » en 2012, du TU de Nantes en 2011 et 2012…), de clients dans le secteur de la presse (Libération, Usbek et Rica, Tsugi magazine…) et de la mode (Issey Miyake, Galerie des Galeries) DonanDDonanDmais aussi développe ses propres projets notamment vidéo et photo (Vjing en 2011 pour ParaOne et Tacteel à la Gaîté Lyrique). Leurs travaux graphiques ont été exposés lors d’expositions collectives (Festival international de l’affiche et du graphisme de Chaumont en 2010 et 2012, Paper Jam 2 en 2012, Galerie Wanted à Paris en 2010…). Une exposition personnelle, intitulée « Atroa », leur a été consacrée d’octobre à décembre 2011 à l’Espace 1789 à Saint-Ouen.

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Akatre Atelier créatif fondé en 2007 à Paris. www.akatre.com

Akatre réalise pour Nature(s) une installation aux confins de la sculpture monumentale et de la micro architecture, composée de tréteaux en bois accumulés et démultipliés dans l’espace. réalise pour Nature(s) une installation est aux La fonction originelleAkatre de ces objets manufacturés confins de la sculpture monumentale et de la micro architecture, composée de tréteaux bois accumulésune détournée dans un geste duchampien leur enconférant et démultipliés dans l’espace. valeur symbolique. EnLa observant de près cette strucfonction originelle de ces objets manufacturés est détournée dans un geste leur endroits conférant ture, la carapace semble se fissurer àduchampien certains une valeur symbolique. En observant de près cette structure, la carapace semble senature fissurer à certains comme si le bois voulait révéler sa vraie sauvage endroits comme si le bois voulait révéler sa vraie natureillusoire sauvage et faire vernis illusoire et faire tomber le vernis de tomber son le traitement par de son traitement par l’homme. L’esprit de la forêt se fait alorsse entendre  la natureentendre revient coloniser l’homme. L’esprit de la forêt fait: alors : la cet univers éphémère à la fois familier et étrange dans une en scène très épurée. nature revient coloniser cetmiseunivers éphémère à la fois De ces une objetsmise usinés assemblés en unetrès composition familier et étrange dans en scène épurée. rythmée et dynamique émerge une forme suffisamment unifiée pour produire une matière sensible, un décor-paysage à mi-chemin entre le naturel et l’artificiel propice à la rêverie et à la réflexion.

De ces objets usinés assemblés en une composition rythmée et dynamique émerge une forme suffisamment unifiée pour produire une matière sensible, un décor-paysage à mi-chemin entre le naturel et l’artificiel propice à la rêverie et à la réflexion.

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X10 0 Cette installation in situ a été créée spécialement à l’occasion de l’exposition Nature(s) à la Fondation Vasarely du 6 août au 28 septembre 2012

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X10 0 Cette installation in situ a été créée spécialement à l’occasion de l’exposition Nature(s) à la Fondation Vasarely du 6 août au 28 septembre 2012

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DonDonald Aad Atelier créatif fondé en 2007 à Paris. www.akatre.com

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X10 0 Cette installation in situ a été créée spécialement à l’occasion de l’exposition Nature(s) à la Fondation Vasarely du 13 août au 28 septembre 2012

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Entre tien Céline Bodin et Akatre

CB : Les Akatre, avec cette œuvre présentée à la Fondation Vasarely, vous sortez du cadre habituel de vos travaux de designers graphiques (typo, photo, vidéo…) pour investir la troisième dimension et proposer une création plastique personnelle. Est-ce que vous pouvez-nous parler de cette expérience ?

CB : L’espace d’exposition temporaire à la Fondation qui vous a été proposé est une très grande salle hexagonale entièrement vide. Comment vous êtes-vous confrontés à ce white cube ?

le le le le A : Occuper l’espace a été un défi majeur, comment résoudre cette problématique ? Et faire face aux contraintes matérielles… A : Notre champ d’action se situe depuis Ce contexte qui pourrait paraître nos débuts au croisement de l’art et asservissant et réducteur nous a apporté du design. La recherche et l’exploration paradoxalement une grande liberté. des formes sont au cœur de notre Le choix d’utiliser des tréteaux en pratique. Dans cette idée, notre lieu bois s’est rapidement imposé à nous. de travail est à la fois un bureau, Ils nous ont permis de construire un studio photo mais aussi un espace une micro-architecture éphémère où l’on teste et confronte nos idées, qui prolifère et envahit l’espace. nos expérimentations sur la matière, Les formes sont ainsi démultipliées, un atelier où l’on travaille mises en l’accumulation de matériaux dans scènes et associations plastiques. l’espace crée une surface vibrante, Tout un plateau est d’ailleurs réservé rythmée… à cet aspect laboratoire de création. Notre approche et notre sensibilité font CB : Un peu comme les installations invasives que nous sommes amenés régulièrement des Frères Chapuisat… à collaborer avec des institutions culturelles et artistiques. Nous avons A : À cette différence que le public eu l’opportunité de débuter notre carrière ne peut pas expérimenter l’œuvre, il par une résidence de longue durée à est placé dans une posture contemplative. Mains d’œuvres, lieu qui favorise Il découvre l’œuvre qu’il appréhende l’interdisciplinarité et la rencontre dans un premier temps comme une entre artistes de différentes disciplines : construction humaine, une sorte musique, théâtre, danse, arts visuels. d’échafaudage. Nous voulions jouer avec Cette expérience a largement contribué ce décalage par rapport à un objet de à façonner notre regard. chantier manufacturé, un matériau simple détourné de son premier usage pour être En 2011, nous avons été invités en réinvesti dans le champ de l’art. Cette résidence par myProvence Festival, démarche est inscrite au cœur de notre événement dédié aux nouveaux talents pratique et de nos travaux : trouver un de l’image. À cette occasion, nous avons usage performatif à des matériaux qui découvert le lieu de la Fondation peuplent notre vie de tous les jours en Vasarely et nous avons été tout de suite les sortant de la sphère de l’utile pour fascinés et charmés par ce chef d’œuvre les mettre en scène. Si nous avons architectonique du père de l’«  op-art  », commencé par expérimenter sur des Victor Vasarely, qui a d’ailleurs débuté maquettes dans notre atelier, l’assemblage sa carrière comme graphiste. s’est réalisé in situ. Petit à petit, l’installation a pris forme de manière Pour revenir à l’installation, elle organique, le processus de construction porte notre empreinte de designers qui fait partie de l’œuvre a été graphiques en ce sens que la disposition développé de façon empirique en résonnance et la forme géométrique des tréteaux avec le lieu. qui la composent lui confèrent une dimension typographique, comme si des caractères prenaient corps dans l’espace. On retrouve aussi notre goût pour le « fait-main » : en manipulant le bois dans cette structure monumentale, on opère un changement d’échelle et nous avons dû pour le coup repenser notre gestuelle afin de construire dans l’espace.

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Entre tien Céline Bodin et Akatre

CB : En espagnol, « obra » signifie d’ailleurs à la fois « œuvre » et « chantier »…

A : Oui, et à y regarder de près, dele cette mise en page jaillit DA : Aumatière fil du temps et de l’évolution de ma pratique le le le à certains endroits la vie. En partant du matériau comme de départ, artistique, monpoint travail s’est radicalisé et je suis sorti de nous avons voulu raconter une histoire. En simulantde des l’atelier, altérations de la salle d’exposition du musée l’espace biologiques par petites touches, dans esprit épuré, nous souhaitions etun de latrès galerie pour développer mes recherches sur mettre en scène l’histoire d’un produit manufacturé qui retourne à l’état naturel. l’immatériel, l’éphémère et le sensible. Cette démarche Cette installation éphémère artificielle des réminiscences naturelles, m’aavec mené à investir l’espace naturel, non comme simple à mi-chemin entre la forêt et la construction évoque partenaire la puissance décor, maishumaine, comme de mes actions. Corsica d’une nature indomptée qui reprend ses droits.en est un exemple, puisque je filme de manière rocks CB : Une œuvre in situ pose lades question de la frontale et directe paysages de rochers, tel un décor relation avec le lieu dans lequel elle est exposée. pour Est-ce que vous pouvez nous Soudainement parler de figé l’éternité. une action invisible votre rapport avec l’œuvre de Victor Vasarely ? vient rompre cette immobilité, les roches sont prises de A : Nous admirons profondément le travail de Victor Vasarely, mouvement. Subitement ou subissant, on ne sait. Mues et notamment ses expériences visuelles. Ses une recherches dans volonté le graphisme de sur nomadisme ou une forme de par réelle la perspective et les jeux d’ombre et de lumière ont ouvert un champ des pierres qui chutent, comme suicide. On voit souvent illimité aux créateurs qui l’ont suivi. Cet héritagesi pictural encore ellesperdure ne vivaient que des échecs. aujourd’hui. La composition que nous avons voulu rythmer en multipliant les éléments structurels et en jouant sur des effets de perspective produit sur l’entendement l’idée de mouvement, idée au cœur de l’art cinétique. De même en assemblant les formes géométriques, autrement dit les tréteaux entre eux, nous avons cherché à jouer de l’opposition entre ombre et lumière. Lors d’expérimentations que nous avons réalisés in situ, nous nous sommes mis dans la position du spectateur et avons veillé ainsi à ce que l’installation puisse se mouvoir dans son œil au cours de son déplacement dans l’espace. Ce décor donne l’illusion d’être habité par la vie. Silencieux mais mouvant, il suggère la présence d’une nature conceptualisée.

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X10 0 Cette installation in situ a été créée spécialement à l’occasion de l’exposition Nature(s) à la Fondation Vasarely du 6 août au 28 septembre 2012

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DJEFF Né en 1975, Vit et travaille à Paris. www.djeff.net

Après des études en communication, sse (Libésse (Lib Djeff se spécialise en hypermédia (Université Paris 8 et en arts numériques (Post diplôme à l’Atelier de (Libésse (Libésse Recherches Interactives de l’ENSAD). Il a été lauréat de la bourse « Créateur Numérique » (Libéss (Libésseede la Fondation Hachette en 2000 pour le roman policier interactif et génératif « Trajectoires ». Djeff est le fondateur du studio (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse d’Entertainment digital « Dekalko ». (LibésseDe 2001 à 2009, il enseigne les nouveaux médias au département « Culture et communication » (Libésse (Libéssede l’Université Paris 8. En 2009, il devient Directeur artistique, puis en 2012 (Libésse (Libésse (LibésseDirecteur de la création, de Sciences Po Paris. Son travail aime interroger la perception et utilise notre environnement comme terrain de jeu. Ses créations s’orientent selon 3 axes : le game play, la mobilité et les traces. (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libés Djeff se définit comme un artiste concevant des dispositifs relationnels qui décomposent les comportements (Libésse humains, en gardent les traces et questionnent (Libésse (Libésse (Libésse (Li (Libéssebéssel’empreinte technologique de nos sociétés sur notre environnement. En détournant des objets simples de leur usage (Libésseindustriel premier, il nous invite à réfléchir (Libéssesur le conditionnement de notre regard et de notre (Libésseappréhension du monde par la technologie.

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

(Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (LibésseSes installations et vidéos sont régulièrement exposées en France (Libésse (Libésse (Libésse (festival Emergences à Paris en 2006 et 2007, (Libésse (LibéssePocket Film festival et Web Flash festival au Centre Pompidou en 2006 et 2008, festival Mal au pixel à Saint-Ouen en 2009, (Libésse (Libésse Nuit Blanche à Paris et Amiens en 2010, (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (LibésseGamerz Fondation Vasarely et festival Seconde Nature à Aix-en-Provence en 2010, (Libésse (Libéssefestival Ososphère à Strasbourg, Play It Yourself et Hors Piste au Centre Pompidou en 2011, (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésseexposition Et op ! au Musée en Herbe et festival Parizone@dream à la Gaîté Lyrique à Paris en 2012…) (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésseet à l’étranger (festival du nouveau cinéma à Montréal en 2006, (Libésse (Libésse (LibésseMusée de la communication à Berne en 2007, (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (LibésseeArts festival à Shanghai et A-M-B-E-R festival à Istanbul en 2008, exposition Crossing the line à la FI : AF Gallery de New York et Laboral Ficxixon festival à Gijon en 2009, (Libésse (Libésse (Libésse Computerspiele Museum de Berlin en 2012…). (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse (Libésse

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DJEFF Né en 1975, Vit et travaille à Paris. www.djeff.net

L’installation Black widow évoque l’idée d’un piège(L(L(L technologique. La structure composée d’un tissage (L(L (L(L(L(L de fils laineux en réseau fixé en un point central L’installation Black widow évoque l’idée piège technologique. La structure composée fait d’un référence à l’architecture géométrique très régulière d’un tissage de fils laineux en réseau fixé en un point central fait référence à l’architecture (L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L géométrique très régulière des toiles tubulaires des araignées sédentaires. Quatre néons ont (L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L( été placés sur chaque bord formant le cadre de la toile et au centre de cette composition en L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(Ldes toiles (L(L(L entonnoir, une ampoule émettant de la lumière noire trônedes telle araignées une araignée postée à l’affut tubulaires sédentaires. Quatre néons dans son système de capture. Le dispositif est réactif  : l’éclairage par bord formant(L(L(L(L(L(L(L été placés sur chaque (L(Lont détecteur de présence s’active au contact du public. La lumièrela d’abord (L(L(L(L(L(L(Lde toileblafarde et au centre de cette(L(L(L(L(L(L s’intensifie peu à peu et vient révéler, par la fluorescence, tissage de fils blancs composition en le (L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L qui se métamorphose en un piège de séduction à l’optiqueune hypnotique. Après un émettant certain laps entonnoir, ampoule de la lumière noire de temps, la lumière s’éteint d’elle-même et ne se réactive que du fait d’un mouvement. une araignée postée à l’affut trône telle(L(L(L(L(L(L(L(L Environnement artificiel à la durée de vie widow ouvre réflexion sur(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L danslimitée, son Black système deunecapture. l’obsolescence programmée, symbole des dérives de la société de surconsommation. Le dispositif est réactif: l’éclairage par détecteur L(L(L(L( de présence s’active au contact du public. La lumière d’abord blafarde s’intensifie peu à peu et vient révéler, par la fluorescence, le tissage de fils blancs L(L(L(L(L(L( qui se métamorphose en un piège de séduction à l’optique hypnotique.L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L( Après un certain laps de temps, la lumière s’éteint L(L( d’elle-même et ne se réactive que du fait d’un mouvement. Environnement artificiel à la durée de vie limitée, Black widow ouvre une réflexion sur l’obsolescence programmée, symbole des dérives de la société de surconsommation.L(L (L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L( L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(L(

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Black wido w Installation réactive, Création in situ lors d’une résidence à la Fondation Vasarely, 2012

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Black wido w Installation réactive, Création in situ lors d’une résidence à la Fondation Vasarely, 2012

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« Travelscope » est un Kaléidoscope d’images obtenues lors du tournage d’une série de vidéos, Don Don Don Don« Travelscope  Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don » est un Kaléidoscope d’images lors du Don tournageDon d’une Don série deDon vidéos, Donobtenues Don Don Don Don Don Don Don simplement dupliquées au montage, et dont la de Don vue linéaire traduit Don Don Don Don Don Don Donprise Don Dond’origine Don Don une sensation finale de mobilité. L’œuvre a été 2012 lors de l’exposition op !, Don Don Don Don Don Donexposée DonenDon Don Don DonEt Don dédiée à l’art cinétique, organisée en parallèle l’exposition vous a Don à l’œil,Don Don Dsimplement Donde Don Don Vasarely Don Don au Musée en Herbe à Paris. dupliquées au montage, et dont la prise de vue linéaire Les paysages sont filmés au rythme du voyage, selon différents moyens de locomotion (train, d’origine traduit une sensation finale de mobilité. Don avion, ferry) impliquant chacun une manière d’appréhender le territoire, Donspécifique Don DonL’œuvre a été intimement exposée en 2012 lors Don liée au temps. montage des séquences filmées en DonLe Donde l’exposition Etkaléidoscope op ! , dédiée à l’art cinétique, sollicite l’imagination visuelle du spectateur en réfractant réalité. organisée enlaparallèle de l’exposition Vasarely vous Don Une bande sonore, que l’on découvre par un système d’écoute au casque, Dona à l’œil, au accompagne Muséeces enpaysages Herbe à Paris. graphiques en mouvement. Les paysages sont filmés au rythme du voyage, Don Don Don selon différents moyens de locomotion (train, avion, ferry) impliquant chacun une manière spécifique Don Don Dond’appréhender le territoire, intimement liée Don Donau temps. Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Le montage des séquences filmées en kaléidoscope Don Don Don Don Don Donsollicite l’imagination visuelle du spectateur en réfractant la réalité. Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Une bande sonore, que l’on découvre par un système d’écoute au casque, accompagne ces paysages Don Don graphiques en mouvement.

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Travelscope SĂŠrie de vidĂŠos, 2006-2012

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« Thick distance» est une installation sous forme Don Don de diptyque réalisée avec deux téléphones Don Don portables, présentée dans un cadre PhotoFrame. Elle a « Thick distance » est une installation sous forme de diptyquelors réalisée deux téléphones été présentée deavec l’édition 2006 du festival Pocket portables, présentée dans un cadre PhotoFrame. présentéePompidou, lors de l’éditionévénement 2006 filmsElleaua été Centre dédié à la création du festival Pocket films au Centre Pompidou, événement dédié à la création vidéo vidéo sur téléphone mobile. Don Don Don Don Don Don sur téléphone mobile. Don Don Don La captation consiste à positionner les téléphones l’autre à l’arrière d’un objet Donà l’avant Don et Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don en mouvement. Ainsi l’épaisseur de l’objet est rendue visible et permet de le La captation consiste à confronter positionner les téléphones Don spectateur au rapport établi par le dispositif visionnage. DondeDon Don Don Don Don Don Don Don Donà l’avant Pour l’exposition Nature(s), Djeff a choisi de présenter quatre captations et l’autre à l’arrière d’unliées objet en mouvement. Don Don à des paysages aquatiques naturels et artificiels, sur différents moyens de locomotion. Donréalisées Don Don Don DonAinsi l’épaisseur de l’objet est Don Don Don Don Don Don Don rendue visible Don Don Don Don et permet de confronter le spectateur Don Don Donau rapport établi par le dispositif de visionnage. Don Pour l’exposition Nature(s), Djeff a choisi de Don Donprésenter quatre captations liées à des paysages Don Don Donaquatiques naturels et artificiels, réalisées sur différents moyens de locomotion. Don Don Don

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Thick distance SĂŠrie de vidĂŠos, 2006

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CB : Pour l’exposition Nature(s), tu as pensé une installation in situ Black Widow, la Veuve noire, personnifiée par une lampe à lumière de Wood1 placée au centre d’un dispositif réactif à la présence humaine. Cette installation me fait penser à une autre de tes œuvres, Breeze reflection, installation poétique et sensible, composée d’un tressage de ventilateurs d’ordinateur augmentés de capteurs sensibles et de LED, qui réagit aux flux d’air engendrés par le mouvement des spectateurs. Breeze reflection a d’ailleurs été présentée en 2009 à la Fondation Vasarely et en 2012 au Musée en Herbe à Paris dans des expositions présentant des sélections de travaux en lien avec l’art cinétique.

CB : Dans Black Widow, cette lampe centrale, placée au cœur de sa toile, s’allume et s’éteint au contact des visiteurs. Cette lampe n’est pas sans évoquer l’ampoule centenaire de la caserne des pompiers de Livermore en Californie, ampoule électrique de 4 watts qui brillerait depuis 1901, devenue un symbole pour les dénonciateurs de l’obsolescence programmée. Peux-tu nous expliquer comment tu as abordé ce thème dans ce travail ?

le le le le D : Avec Breeze reflection, je cherche à mettre en évidence que tout geste, toute présence, provoquent une modification de l’environnement et de son état originel. Dans Black Widow, je vais plus loin dans mon engagement puisque D : Les parallèles sont en effet nombreux. je traite d’un thème qui fait débat, Ce sont deux installations que l’on celui de l’obsolescence programmée. pourrait qualifier de « low-tech », en ce À l’origine de cette idée se trouvait sens que la matière première est faite le cartel des fabricants d’ampoules de matériaux pauvres - des ventilateurs, les plus connus qui s’étaient regroupés des fils de laine - que leur assemblage pour sciemment limiter la durabilité est artisanal, à la manière d’un jeu de des lampes, tentative qui se solda par mécano ou par une opération de tissage un demi-échec puisque si cette entente nécessitant plusieurs heures de labeur, entre industriels fut dénoncée et que l’ensemble est associé à des lors d’un procès, la pratique ne fut technologies simples détournées de leur pas abandonnée. Limiter la durée de usage premier. Ces installations vie d’un produit permet de satisfaire réagissent à la présence humaine par l’idéologie de la croissance économique. des systèmes de détecteurs de présence, En tant que produits de consommation, l’interaction étant plus poussée dans les lampes et néons que j’utilise dans Breeze reflection. mon installation ont une durée de vie Elles sont conçues comme des œuvres limitée, exprimée en heures. J’accentue lumineuses tridimensionnelles aux cette idée dans l’esprit du spectateur propriétés cinétiques. Elles sollicitent en introduisant cette mise en route visuellement le spectateur qui par par détection de mouvement, qui le son déplacement, son rapprochement ou confronte de manière directe à l’objet. son éloignement de l’œuvre, perçoit des Travailler avec la lumière noire me vibrations optiques, construites par la paraissait intéressant car cette mise en mouvement dans Breeze reflection lumière UV n’est pas visible par l’œil ou par un effet d’illusions strictement humain. Elle doit être mise au contact visuelles, seulement inscrites sur la de matières synthétiques réactives, surface de la rétine, dans Black Widow. pour être révélée. Nature humaine Dans cette dernière, j’ai placé un banc contre Nature artificielle, créée de de manière frontale positionné face à la la main de l’Homme mais qui en même lampe au fond du tissage. Le spectateur temps le provoque. qui s’assoit face à l’œuvre en a une Cette lampe, une fois qu’elle est trop vision aplatie, la perspective étant chaude, ne s’allume plus. C’est une cassée par un effet d’illusion optique. fonction imposée par l’homme, elle C’est en se rapprochant et en se déplaçant désobéit à la demande et là, nous autour du dispositif qu’il en perçoit faisons face à un paradoxe : une lampe la profondeur. faite pour éclairer, n’éclaire finalement pas… Elle nous impose un rythme de temps ralenti, où l’on patiente le temps qu’elle refroidisse… dans l’obscurité… C’est ce qui m’intéressait dans la nature même de ces lampes, qui demandent aussi un temps de mise en régime.

1 . Lumière noire dite de Wood du nom de son inventeur Robert William Wood

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Le fait que l’éclairage s’opère de manière discontinue fatigue la durée de vie de l’ampoule et des néons. En effet, contrairement aux idées reçues, la durée de vie de ces produits diminue fortement avec la fréquence des cycles (allumage/extinction). C’est donc un second paradoxe que je matérialise ici : est-ce qu’il faut économiser l’énergie ou bien laisser allumer plus longtemps pour ne pas fatiguer les objets ?

CB : La seconde œuvre que tu présentes est intitulée Travelscope. Il s’agit d’une sélection de 5 vidéos issues de cette série, qui rend compte de l’essence cinématique du voyage. Comment se sont déroulés ces tournages ?

DA : Au fil du temps et de l’évolution de ma pratique le le le le ce projet artistique, mon travail s’est radicaliséD : etJ’aijecommencé suis sorti dede « travelscope » il y a six ans. L’idée est de filmer du mes déplacements, l’espace de l’atelier, de la salle d’exposition musée lorsque je me rends sur un lieu où je vais mon travail, sur avec ce que j’ai et de la galerie pour développer mesexposer recherches dans la poche (téléphone portable, appareil photo numérique). Dans ces CB : Et c’est dans unl’éphémère piège technologique, un l’immatériel, et le sensible. Cette démarche cinq vidéos, les paysages en mouvement miroir aux alouettes, que l’on se laisse enfermer, sont filmés à bord de différents moyens fabricant des séduisants au départ m’aen mené à objets investir l’espace naturel, non comme simple de locomotion. Le travelscope #1 est mais qui se révèlent rapidement obsolètes et captation d’unCorsica voyage réalisé néfastesmais pour l’environnement… décor, comme partenaire de mesla actions. en train pour me rendre à Marseille. paysagede urbain défile rapidement, D : Oui,en parce que cette toile d’araignée, rocks est un exemple, puisque je Le filme manière et j’ai conservé le son brut de qui évoque à la fois une forme naturelle l’enregistrement. second travelscope et une forme géométrique des vasarélienne, frontale et directe paysages de rochers, tel unLe décor est un voyage en avion, direction Berlin. nous attire par une sorte de parade Cette fois-ci, invisible ce paysage céleste d’apparat et finit par nous figé pourlumineuse l’éternité. Soudainement une action est accompagné, comme les travelscopes piéger… à notre propre jeu ! suivants, de musique classique Dans rompre Black widow, cette cette nature artificielle vient immobilité, les roches sont prises de que j’écoute quand je voyage. Le travelscope #3 que nous avons créée nous fixe et nous eston la captation d’un départ en Ferry jauge de manière Subitement inquiétante, un peuou subissant, mouvement. ne sait. Mues du port d’Ajaccio où paysages industriel à la manière de HAL 9000, l’ordinateur naturel dotéune d’intelligence par réelle artificielle volontégérant de nomadismeet ou unes’entremêlent. forme dePour le travelscope #4, j’ai filmé le décollage le vaisseau spatial Discovery One dans de mon avion pour comme Shanghai : ce que je l’OdysséeOn de l’espace de Kubrick. des pierres qui suicide. voit souvent chutent, trouvais intéressant dans cette vision, Petit à petit, la lumière s’intensifie la vitesse, qui lors de et apparaît si cette structure elles ne filaire vivaient que des c’est échecs. l’accélération, produit un défilement fluorescente qui happe notre œil, très rapide des éléments du paysage. l’hypnotise, et l’emmène sur le terrain Puis lors de la phase de décollage, de l’illusion afin de faire prendre un phénomène de résistance à l’air conscience à celui qui la regarde provoque un ralentissement complet. que sa nature même n’est qu’illusion. Une fois la phase d’envol achevée, La lumière s’interrompt d’elle-même, le coup d’œil dans le hublot permet car finalement nous avons perdu le de saisir une nature entièrement contrôle sur notre création. Et cette domestiquée, géométrique, où aucun surenchère dans la production d’objets espace libre n’est visible. Enfin, manufacturés à durée de vie limitée, le travelscope #5 a été tourné qui par exemple recrée une lumière lors d’un déplacement en train vers artificielle au détriment de la lumière Aix-en-Provence pour ma première naturelle, amène une prolifération exposition à la Fondation Vasarely. de déchets qui a des conséquences C’est l’hiver, et le paysage est sous néfastes sur le milieu naturel. la neige, ce qui est plutôt rare dans le sud. La vitesse est complètement ralentie, et cette vision est complètement différente de celle du voyage en train pour Marseille, beaucoup plus rythmée. La prise de vue pour tous ces petits films s’effectue de manière latérale.


Entre tien Céline Bodin et Djeff

CB : Le déplacement plus ou moins rapide entraîne une nouvelle appréhension de la profondeur de champ, la vitesse crée un étagement hiérarchisé du paysage…

CB : Quel est le montage que tu réalises ensuite à partir de ces vidéos ?

D: Je les duplique et réalise une sorte de pliage par quatre au montage. le leD :leOui,le En « dépliant » on obtient une forme et c’est ce que l’on retrouve kaléidoscopique, les images sont dans l’esthétique des jeux vidéos, un recomposées et l’on assiste à une perte autre axe de recherche dans mon travail de repères visuels. Le paysage enneigé artistique. Dans des jeux comme Sonic apparaît tel une composition abstraite, sur megadrive 1991 ou Ghost’n Goblin de une partition de musique où les lignes Capcom, la sensation de vitesse, tout horizontales matérialisent la portée comme l’introduction de la perspective, et les arbres les notes. sont procurées par un étagement de On pourrait penser à un test de Rorschach, décors sur plusieurs niveaux qui défilent laissé à la libre interprétation à différentes vitesses : le décor du fond de celui qui le regarde. Placée dans défile lentement, celui situé à moyenne la posture contemplative du voyageur, distance un peu plus rapidement et celui le spectateur est face à des au premier plan rapidement. environnements dont le caractère mouvant, accentué par ce montage CB : Ce « paysage-nature » que tu filmes est spécifique, provoque en lui des sensations capturé par la fenêtre du moyen de transport physiques et émotionnelles. Son utilisé, qui encadre et délimite le champ de vision. imagination visuelle est sollicitée Ce qui rappelle la veduta dans la peinture de la par ces paysages au fort potentiel Renaissance italienne, fenêtre placée à l’intérieur graphique. de la scène d’un tableau ouvrant la perspective sur un paysage naturel ou urbain. D : Mais ramené ici au premier plan… Je ne me mets pas en scène dans ces captations, je suis hors-champ, pour laisser le spectateur entrer dans la peau du voyageur. Il entre en contact plus direct avec ces paysages qui défilent. Chaque moyen de locomotion conditionne la vue du paysage, dans le travelscope #2, la vue est complètement restreinte, on ne voit de ce voyage qu’un bout d’aile par le hublot. Le changement de saison influe également sur le caractère du paysage qui apparaît différemment, c’est le cas d’Aix-en Provence sous la neige. J’aime aussi l’idée qu’en filmant par la fenêtre, la boîte capture ce qui est dans la boîte, comme un jeu de poupées russes…

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Entre tien Céline Bodin et Djeff

CB : Et pour Thick Distance, le procédé est différent ?

CB : La cadence est donc imposée par le moyen de transport, qui lui façonne le paysage…

D : Oui, et l’effet recherché est lui D : Les moyens de locomotion influent aussi différent. La captation estet réalisée particulièrement sur la prise de vue : DA : Au fil du temps de l’évolution de ma pratique le le le le de nouveau à partir de différents pour le déplacement en jet-ski, moyens de locomotion. Dans la première vitesse très rapide artistique, mon travail s’est radicaliséla et je suis sortiprovoque de une vidéo, deux téléphones ont été fixés vision plus ou moins nette du paysage à l’avant et d’unede péniche aquatique, tandis que le kayak plus l’espace deà l’arrière l’atelier, la salle d’exposition du musée naviguant sur la Seine, dans la seconde lent, assujetti aux mouvements du milieu l’avant etgalerie à l’arrière d’un jet-ski donne à voir des effets etàévoluant de lasur pour développer mesaquatique, recherches sur un lac, dans la troisième d’interstice plus important. à l’avant et à l’arrière d’un kayaket le sensible. Cette démarche l’immatériel, l’éphémère des mers aux abords de l’Ile d’Or à CB : Travelscope comme Thick distance sont des de Saint-Raphaël et dans la œuvres de passage, de simple transit. Est-ce que cette m’al’est mené à investir l’espace naturel, non comme dernière, les téléphones portables ont esthétique du passage occupe une place imporété fixés à l’avant et à l’arrière du dans tes recherches ? décor, mais comme partenaire de mestanteactions. Corsica harnais d’un kite-surfeur. Le paysage filmé apparaît comme moins en moins puisque je D : Cela rejoint en effet mes recherches rocks en est unde exemple, filme de manière stable, la captation étant conditionnée sur la trajectoire et la mobilité, au moyenet de transport. en ce sens je davantage d’une frontale directe des paysages de rochers, telparlerais un décor Les téléphones portables filment esthétique du déplacement. J’utilise les de manière et offreSoudainement un angle technologies dans mon processus figé pour frontale l’éternité. une actionnomades invisible de vision que l’on ne peut naturellement de transmission sensible du paysage. avoir, restitué par le montage Les potentialités d’expression vient rompre cette immobilité, les roches sont prises de artistiques des vidéos en diptyque. Les vidéos du regard porté sur le paysage sont proposent ainsi Subitement un regard dans dans Travelscope mouvement. ou subissant,démultipliées on ne sait. Mues tandis le rétroviseur en confrontant deux que le sentiment de durée est éprouvé vues, deuxréelle visions différentes, par une volonté de nomadismedans ouThick unedistance. forme de ce qui permet également d’expérimenter la dimension de la traversée. suicide. Ontemporelle voit souvent des pierres qui chutent, comme Dans la captation réalisée à bord de la péniche, lessi ponts servent points de que des échecs. elles nedevivaient repères : la vitesse de défilement est plus facilement lisible car l’espace est rythmé.


PA THO


AULINE OMAS 83


Pauline Th omas Née en 1981, Vit et travaille entre Paris, Londres et les États-Unis. www.paulinealapage.com

Développant une pratique axée sur la photographie et la conception de dispositifs multimédias interactifs, DonDonalDonDonalDonDonalDonDonalDonDonalDonDolPauline Thomas aime à se définir avant tout comme une artiste qui conçoit des expériences esthétiques et émotionnelles faisant appel à la sensibilité du spectateur. DonDonalDonDonalDonDonalDonDonalDonDonal Son travail privilégie plusieurs thématiques : DonDona la vanité, la fragilité de la vie et la fuite du temps qui passe, DonDona l’environnement naturel, le mouvement, la carte et la direction,DonDona DonDona la réflexion sur la nature humaine à travers des recherches sur les notions d’identité et de genre. DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDo Diplômée en photographie à Paris 8, Pauline Thomas DonDona a obtenu avec mention une Maîtrise en Conception-Réalisation multimédia aux Gobelins DonDona DonDona et un post-diplôme avec mention DonDona à l’Ecole Nationale des Arts Décoratifs DonDona en recherche interactive. Elle a été l’assistante DonDona DonDona DonDona de Michel Jaffrennou, pionnier de l’art vidéo en France. DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDo Son travail photographique et multimédia a été exposé en France (Salon Jeune Création en 2006, exposition Photo d’hôtel, photo d’auteur au Théâtre de l’Odéon

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

en 2009, Gorgeous à la Galerie Image et Portraits en 2010…) et à l’étranger (exposition Expanding the place au Centre de Culture Contemporaine de Valence en 2007, Play lors du festival PISAF à Séoul en 2009, The time is now à la Scatola Gallery de Londres, Contrasts à la SohoPhoto Gallery de New York, French Art meeting à la Fine Arts Academy de Kiev en 2011, Factory Art à Berlin et ExhibitA à Sydney en 2012…). DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona En 2011, Pauline Thomas a reçu la médaille d’or au PX3, Prix de la photographie à Paris, le 3ème prix de la 22ème édition de l’ « Annual international juried exhibition » décerné par Elisabeth Sussman, conservatrice et commissaire d’exposition au Whitney Museum, et une mention honorable dans la catégorie « Femmes photographes professionnelles », décernée par Ruth Fremson, reporter photo récompensée du Prix Pulitzer pour le photojournalisme. DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona La série photographique Gorgeous : in the neck of time, rassemblant des portraits de cous photographiés en contre-plongée, a été primée à six reprises et exposée à Paris, Vence, Londres, Sydney, New York, Kiev et Berlin. DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona DonDona Don85


Pauline Th omas Née en 1981, Vit et travaille entre Paris, Londres et les Etats-Unis. www.paulinealapage.Né

« Tsunami gelatine » est une œuvre interactive créée Don Don Donen réaction au tsunami qui a frappé Don Don« Tsunami Don Don Don Don Don Don Donl’Indonésie en 2004. gelatine » est une œuvre interactive créée en réaction tsunami dont qui a frappé L’instabilité de aul’eau, l’image est capturée dans Don l’Indonésie en 2004. de l’eau, dont l’image est capturée DonL’instabilité une vidéo, laisse entrevoir les terribles inondations dans une vidéo, laisse entrevoir les terribles inondations qui vont mener l’élément sa propre qui vont mener l’élément à àsa propre perte. Don Don perte. Dans cette installation, l’élément est la cage de l’écran hors de danger, Donmaintenu Don dans Don Don Don etDon Don Dans cette installation, à la manière des espèces en voie d’extinction que l’on peut en captivité dans dans les la zoos. l’élément estvoir maintenu cage de l’écran et hors Le spectateur est amené à mettre en mouvement mer etDon ainsi reproduire ses courants naturels Donla Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don par ses caresses et des clics sur une interface Il active ainsi Don un mouvement Dontactile. Don Don Don Donchaotique Don Don Don Don Don Don animé d’une profonde exaspération. Privée sa profondeur ses manière courants naturels, Donde de danger,et àde la des espèces en voie Don l’amplitude du mouvement est brutalement stoppée. Le titre « gélatine renvoie au mouvement que captivité dans les zoos. d’extinction que »l’on peut voir en font les desserts de Jelly anglaise quand on les secoue. Le spectateur est amené à mettre en mouvement Don Une série de tirages photographiques représentant agitée en cadrage serré Donune lamermer etphotographiée ainsi reproduire ses courants naturels et plans rapprochés accompagne le dispositif multimédia. Donpar ses caresses et des clics sur une interface Don L’œuvre a été exposée lors des expositions collectives Expanding the place Centre tactile. Il active ainsi unaumouvement chaotique Don de Culture Contemporaine de Valence, Château cartes à la galerieprofonde Garcia Laporte exaspération. en 2007 Donde animé d’une Privée Don et Play au festival PISAF à Séoul en 2009. Don de sa profondeur et de ses courants naturels, Don Donl’amplitude du mouvement est brutalement stoppée. Le titre « gélatine » renvoie au mouvement que font Don Don les desserts de Jelly anglaise quand on les secoue. Une série de tirages photographiques représentant Don Don une mer agitée photographiée en cadrage serré Don Don Don Don Don Don Don Don Don Don Donet plans rapprochés accompagne le dispositif multimédia. Don L’œuvre a été exposée lors des expositions Don Don collectives Expanding the place au Centre de Culture Don Don Contemporaine de Valence, Château de cartes à la galerie Garcia Laporte en 2007 et Play au festival PISAF à Séoul en 2009. Don Don Don Don Don Don 86


Tsunami gelatine Installation interactive + sĂŠrie photographique, 2005 http://cargocollective.com/paulinealapage/tsunami-gelatine-2004-2011

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Pauline Th omas NĂŠe en 1981, Vit et travaille entre Paris, Londres et les Etats-Unis. www.paulinealapage.com


Tsunami gelatine Installation interactive + série photographique, 2005 http://cargocollective.com/paulinealapag Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF e/tsunami-ge


Pauline Th omas NĂŠe en 1981, Vit et travaille entre Paris, Londres et les Etats-Unis. www.paulinealapage.com

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Tsunami gelatine Installation interactive + sĂŠrie photographique, 2005

http://cargocollective.com/paulinealapage/tsunami-gelatine-2004-2011

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Entre tien Céline Bodin et Pauline Thomas

CB : À propos de la genèse de l’œuvre, qu’est ce qui t’as poussé à prendre pour thème le tsunami de 2004, plus violent séisme survenu dans le monde après celui du Chili en 1960, provoquant des raz de marées dévastateurs dans une partie de l’Océan Indien ?

CB : Nous l’avons dit, l’élément aquatique est au centre de ton installation, mis en scène dans le contexte d’une catastrophe naturelle. Est-ce une façon de réfléchir à la représentation d’éléments naturels qui échappent à l’emprise de l’homme ?

le le le le PT : L’eau symbolise le mouvement et la vie mais elle constitue aussi toujours PT : « Tsunami gelatine » est une pièce un danger pour l’homme, particulièrement que j’ai créée en 2005, j’ai donc désarmé face aux grands phénomènes effectivement choisi un sujet d’actualité hydrologiques. C’est ce paradoxe que récente : le Tsunami de 2004, survenu au j’ai voulu mettre en évidence, tout en large de l’Ile indonésienne de Sumatra. opérant un basculement de perspective. Cet événement m’a poussé à aborder dans En poussant à son paroxysme la pensée ce travail la thématique de l’eau, occidentale construite sur le concept l’eau changeante, seule parmi les quatre de maîtrise et de contrôle, j’ai voulu éléments à se mettre au pluriel. dans cette œuvre proposer une projection : Bachelard, dans son essai L’eau et les l’eau représentée ici est inquiétante, rêves (1942), rend compte des symboles elle essaie de se défendre, mais elle contradictoires associés à l’élément n’est plus dangereuse car l’homme a aquatique : l’eau bienfaisante, source fini par l’asservir même si le contrôle de vie, a pour antithèse l’eau mortelle qu’il prétend exercer sur elle reste des déluges et noyades. Cette lecture imprécis. La vague est ici personnifiée, m’a beaucoup influencée. elle questionne l’être humain : comment a t-il pu détruire petit à petit Parler d’un sujet d’actualité me donnait et mettre en danger son propre élément aussi prétexte à opérer une transposition vital ? de l’événement dans le futur. Quelle sera notre relation à l’eau, élément qui conditionne notre existence et celle CB : Défi du XXI siècle, l’eau fait débat, la de tous les êtres vivants, dans le futur, gestion de cette ressource étant devenue vitale. quand cette ressource sera quasiment Est-ce une idée que tu as voulu soulever épuisée parce que nous n’aurons pas su dans cette œuvre ? la respecter ? PT : L’eau joue, dans le développement de la vie humaine, animale ou végétale et dans l’évolution des sociétés, un rôle irremplaçable. Or nous puisons de manière inconsidérée et irrespectueuse dans nos ressources, considérant que c’est un capital inépuisable. Je souhaitais montrer dans cette œuvre que nous mettons en danger notre élément vital, constituant principal de notre organisme et de notre nourriture. L’image des vagues, de la mer agitée, projetée dans la vidéo et photographiée, n’est pas une image naturelle, elle est traitée afin d’avoir un rendu monochrome. Le cadrage et l’accentuation de la nervure de la matière accentue le mouvement de force de l’eau, tandis que le traitement colorimétrique donne une impression d’oxydation, comme si l’environnement ème

représenté présentait un état de dégénérescence avancé. L’eau est emprisonnée dans une cage de verre, l’écran, tel un objet collectionné, muséifié. Or c’est une aberration de vouloir conserver ce que l’on a voulu détruire.

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DonDonald Aad Céline Bodin et Djeff

CB : Le titre de l’installation « Tsunami gelatine » évoque deux notions : celle de tsunami, (du japonais 津 tsu, port, et 波 nami, vague, donc littéralement « vague portuaire »), onde provoquée par un rapide mouvement d’un grand volume d’eau (océan ou mer), en général dû à un séisme, une éruption volcanique explosive ou un glissement de terrain de grande ampleur et celle de gélatine, substance solide translucide, extraite d’os d’animaux, qui lorsqu’on la remue a un mouvement flou et instable.

CB : L’utilisation de la vidéo permet de traduire la sensation de mouvement, créant un sentiment de présence. Le spectateur est ainsi mis en contact avec une nature catastrophique qui l’effraie mais aussi le fascine. Est-ce ce côté voyeur, constitutif de la nature humaine, que tu as voulu mettre en évidence ?

DA : Au fil du temps et de l’évolution de ma pratique le le le le artistique, mon travail s’est radicalisé et je suis sorti de PT: Non, ce que d’abord voulu l’espace de l’atelier, de la salle d’exposition duj’ai musée représenter ce sont les forces en Plus que desur voyeurisme, et de la galerie pour développer mesprésence. recherches je préfèrerais parler de fascination. La mer est porteuse de fantasmes, toute Pourquoi avoir choisil’éphémère de rapprocher ces deux l’immatériel, et le sensible. Cette démarche beauté cache un danger. C’est ce qui termes ? sous-tend le roman simple d’Herman Melville m’aPT :mené à investir l’espace naturel, non comme Moby Dick : dans la confrontation avec Ce que j’ai voulu suggérer, à travers l’homme Corsica ne cesse d’interroger ce titre, c’est comme l’idée d’unepartenaire force décor, mais de mesl’océan, actions. son rapport à l’infini et à la mort. contrainte. C’est une force violente, puissante contenue dans puisque je filme de manière rocks enmais estelleunestexemple, un récipient, la cage de verre de CB : Le spectateur s’approche de l’œuvre l’écran.et Son directe mouvement devient flou, et interagit avec quelle forme prend frontale des paysages de rochers, telelle,un décor ce qui provoque chez le spectateur cette interaction ? Quel est le sentiment qui une pour incompréhension perceptive qui le s’en dégage ? figé l’éternité. Soudainement une action invisible déroute. Finalement cette force de la nature n’est pluscette qu’une illusion, tant PT : La sont relationprises se fait par vient rompre immobilité, les roches dele toucher, elle a été asservie par l’homme… le spectateur caresse l’interface comme animal. écran le met à distance, mouvement. Subitement ou subissant,un on neUnsait. Mues car la vague est en captivité emprisonnée bocal.forme L’écran montre par une réelle volonté de nomadismedans ouunune de également qu’il ne s’agit pas de vraie eau mais bienchutent, d’une image car l’eau n’est plus, suicide. On voit souvent des pierres qui comme nous avons épuisé les ressources. vague représentée est personnifiée, si elles ne vivaient que des La échecs. on peut ici penser à la vague d’Hokusaï. L’homme essaie de récréer le contact avec son image par la caresse pour rétablir un lien tout en douceur. Mais la relation a été trahie, l’eau reste à l’état sauvage se comportant tel un lion en cage. Les photographies exposées, à l’aspect légèrement suranné, sont là également pour témoigner de ce qui fut et n’est plus par la faute de l’homme.


Entre tien Céline Bodin et Pauline Thomas

CB : Peux-tu nous parler de ton expérience en tant qu’artiste face à la nature ? Du regard que tu portes sur ce que tu es en train de filmer ? Comment s’est déroulée la captation vidéo ?

CB : Est-ce la première fois que tu abordais la représentation de la nature dans ton travail artistique ?

PT : Non, la nature est un sujet que je le lePT :lePour le traite régulièrement dans mes projets, ce projet, j’ai d’abord c’est également le compagnon de mes effectué une recherche préliminaire sur réflexions et pensées. Je suis originaire l’état de la mer, la cambrure des vagues de l’Oise et j’ai grandi à proximité du que je voulais filmer. J’ai choisi de parc Jean-Jacques Rousseau à Ermenonville partir à la Réunion, où j’ai parcouru la où j’ai souvent été me ressourcer. route des Tamarins pour me rendre sur la Un de mes tous premiers projets côte près de la commune de l’Etang Salé. photographiques s’intitule d’ailleurs C’est à cet endroit que j’ai Rêveries. Le mode d’observation de la découvert l’image d’une mer agitée telle nature y est contemplatif et réflexif. que je voulais la capturer. Je me suis Mon travail sur l’identité passe par sentie hyper connectée en observant la l’espace, l’environnement qui nous nature à travers l’œil de la caméra. Le entoure. La quête de soi-même cadrage serré sur le sujet, les vagues, se prolonge dans celle de l’espace, l’isolant de son contexte, une plage de dans lequel on ne peut pas tout englober, l’Ile de la Réunion, m’a permis de faire on finit donc pas opérer à un retour sur abstraction de tout ce qui m’entourait soi. Ma vision de la nature est romantique : et de rentrer pleinement, de m’immerger le spectacle de la nature ramène d’abord dans l’élément aquatique. à l’homme lui-même, par un effet de miroir. J’aimerais citer ici une source d’inspiration qui m’a accompagné à la manière d’un paysage sonore : La Mer, composition pour orchestre de Debussy, dont la première édition présentait d’ailleurs une reproduction de l’œuvre célèbre, citée précédemment, du peintre japonais Hokusaï, Le Creux de la vague au large de Kanagawa.

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DonDonald Aad Né en 1978, Vit et travaille à Paris. www.doSDF SDF SDF

DA : Au fil du temps et de l’évolution de ma pratique le le le le artistique, mon travail s’est radicalisé et je suis sorti de l’espace de l’atelier, de la salle d’exposition du musée et de la galerie pour développer mes recherches sur l’immatériel, l’éphémère et le sensible. Cette démarche m’a mené à investir l’espace naturel, non comme simple décor, mais comme partenaire de mes actions. Corsica rocks en est un exemple, puisque je filme de manière frontale et directe des paysages de rochers, tel un décor figé pour l’éternité. Soudainement une action invisible vient rompre cette immobilité, les roches sont prises de mouvement. Subitement ou subissant, on ne sait. Mues par une réelle volonté de nomadisme ou une forme de suicide. On voit souvent des pierres qui chutent, comme si elles ne vivaient que des échecs.


O URS

Nature(s) Exposition collective Fondation Vasarely Sur une proposition de Céline Bodin et Djeff Artistes Donald Abad Akatre Djeff Pauline Thomas Remerciements Pierre Vasarely, Luc Delpech, Daniel Berlioz, Quentin Destieu, Sylvain Huguet, Virginie Revel, Gaëtan Trovato, Pauline Betrancourt, l’équipe de la Fondation Vasarely, le chat. Partenaires Fondation Vasarely Marker Management Consulting M2F Création

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O URS

Catalogue Cet ouvrage a été édité à l’occasion de l’exposition collective Nature(s) à la Fondation Vasarely 6 août - 28 septembre 2012 1 avenue Marcel Pagnol
 - 13090 Aix-en-Provence www.fondationvasarely.fr Textes Céline Bodin, Djeff Design Akatre Typographie de texte courant Relevant et Consolas Typographie de titrage La Montagne (création Akatre) Tirage 100 exemplaires, Édition limitée Impression septembre 2012 Crédits photographiques Donald Abad, Akatre, Djeff, Pauline Thomas

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