Témoins aujourd'hui 2011

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SOMMAIRE ngard ∆ 2 t im s ri pa

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7 e 1v hé ot

sa foi, c’ es t

Témoins aujourd’hui

tém oi

Comme un phare de lumière

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« La Bonne nouveLLe de JésusChrist, C’est qu’iL vient haBiter Le temps présent »

André Joly pasteur

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ans les niches De la cathéDrale De lausanne, des ouvriers ont mis le dernier coup de vis à la pose de cimaises et, depuis quelques jours, une trentaine de photographies se balancent sur les murs du lieu de culte et de culture. Depuis début janvier 2011, la cathédrale de lausanne est le premier lieu phare de l’eglise vaudoise. sans se sentir « envoyé dans la tempête », andré Joly, pasteur et désormais animateur de l’édifice, s’y sent comme un poisson dans l’eau. « Qu’est-ce qui vous touche ? » cette question, le Vaudois la pose volontiers au visiteur de passage. comme si toute spiritualité trouvait finalement sa source au fond de soi, de son ressenti. « ici, il n’y a pas de réalisations gratuites, lance-t-il. ceux qui ont façonné cet endroit étaient habités par un sens, une raison. Quelque chose qui les motivait, leur donnait envie de partager. » et l’homme de vous entraîner devant une statue où Jésus, bébé, serre la barbe de siméon de ses tout petits doigts. Partager la joie de l’evangile, c’est rendre Dieu bien présent dans les petits riens de l’existence.

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Dans ce « lieu de vie extraordinaire » qui reçoit grosso modo 420 000 visiteurs par an, andré Joly croise des gymnasiens, anime une méditation pour des pèlerins de compostelle, renseigne un groupe de femmes sur le sens du carême. et l’évangélisation ? « s’il s’agit de convaincre l’autre que j’ai raison, non. si c’est rendre présente la joie de l’evangile, alors oui. Vous savez, je crois qu’on m’a confié ce poste parce que je ne fais pas peur. J’aimerais que l’autre puisse trouver ou retrouver une relation apaisée avec Dieu. » ✱

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ire : philip pie ns

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igner, c’es mo ta té i

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« la Bonne nouvelle de Jésus-christ, c’est qu’il vient habiter le temps présent. Bon, je ne dis pas qu’il faut invoquer Dieu chaque fois qu’on se brosse les dents. Mais discerner autour de soi tous les signes d’une vie qui pourrait être belle. » c’est ce qu’il fait : un coup d’œil à la rose de la cathédrale, une merveille qu’il ne se lasse pas de contempler. « Dieu n’est représenté qu’une fois, au centre de la rosace. tout autour, les vingtquatre médaillons évoquent le temps qui passe, les saisons et leurs travaux. » ce qui fait nos jours, autrement dit.

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Des questions pour avancer

Jacques Küng

secrétaire général de DM-échange et mission

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aptisé à six mois, je ne garde aucun souvenir de ce geste. mais aujourd’hui encore, je peux en faire mémoire. Le témoignage de celles et ceux qui l’ont demandé pour moi m’a fait naître à la confiance : je me sais accueilli. Dans la paroisse où j’ai grandi, mon adolescence a été marquée par deux pasteurs très différents d’âge et d’options théologiques, mais habités tous deux d’une passion pour l’Evangile et la vie en Eglise. tiraillé entre ces deux témoins, je suis entré en Faculté de théologie avec la secrète envie de savoir si l’un des deux avait plus raison que l’autre. Là, je me suis heurté à des textes qui m’ont bousculé, comme cette parole de paul aux Corinthiens : « Les Juifs demandent des

miracles et les Grecs recherchent la sagesse ; mais nous, nous prêchons un messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens… » (1Co 1.22). Dès lors, cette question m’accompagne : Comment accepter que la marche vers l’unité de l’Eglise passe par une remise en question de mes convictions les plus fondamentales ? En cours d’études, j’ai accompli un stage dans une institution où vivent des personnes en situation de handicap mental. Découverte d’un lieu où la communication passe très peu par le langage verbal auquel mon parcours scolaire m’a habitué. Découverte de l’importance du regard, des gestes, des attitudes, et d’un rythme de vie bien éloigné des contraintes de rendement et de performance. Dès lors, une conviction s’inscrit au plus intime de moi : si l’Evangile vaut la peine d’être vécu, quelque chose peut en être partagé avec celles et ceux qui sont considérés comme les

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Comment résister aux pressions du monde

pour lutter contre l’oubli des promesses de

ambiant et tisser des réseaux de solidarité qui témoignent de la sainteté à laquelle nous sommes appelés ?

Dieu et de ses appels à la justice, il importe de faire mémoire et de transmettre : raconter de génération en génération de quelles manières Dieu appelle, envoie, rejoint, bouscule, relève celles et ceux qui cherchent à se détourner du chemin de vie qu’il propose ; partager les prières, les chants de louange ou les cris de détresse, les questions et les remises en question, les épreuves et les élans de celles et ceux qui ont été mis en chemin par l’appel du seigneur ; évoquer leurs peurs, ainsi que les paroles, récits et paraboles qui ont renouvelé leur confiance. Dès lors, cette question m’accompagne : Comment poursuivre ce travail de lecture, de mémoire, d’interprétation et d’actualisation qui nous relie au dynamisme de la tradition apostolique ?

mon parcours familial et professionnel m’a conduit à travailler sept ans au service de l’Eglise presbytérienne au Rwanda (19801986 et 1995-1996) : enseignement théologique et aumônerie universitaire. Depuis, je relis souvent le dernier chapitre de la lettre de paul aux chrétiens de Rome : une liste de noms. Des noms de femmes et d’hommes, des noms aux consonances juives, grecques ou latines, des noms de familles nobles et des noms réservés à des esclaves. Chacun de ces noms évoque pour paul un bout de vie partagée, une épreuve traversée ensemble, une communion dans la prière, des souvenirs de joies et projets portés à plusieurs. a ces noms d’autrefois, des noms d’aujourd’hui continuent à s’ajouter : compagnes et compagnons de foi dispersés aux quatre coins du monde, capables des plus belles solidarités et menacés des pires atrocités… Dès lors, cette question m’accompagne : Comment montrer que l’Eglise universelle se vit au quotidien dans des rencontres où se tissent et s’entretissent nos partages, découvertes, tensions, conflits, joies et projets ? Baptisé, devenu enseignant dans une école de théologie, puis pasteur en paroisse et maintenant secrétaire général de Dméchange et mission, je m’efforce à la cohérence entre mes convictions chrétiennes et mes choix personnels, familiaux, politiques ou économiques. attentif à ne pas imposer mes convictions, je ne veux pas pour autant les cacher. Et je me demande sans cesse

plus petits mais qui nous précèdent dans le Royaume des cieux. Dès lors, cette question

comment rendre compte de l’espérance qui est en moi. Ce cheminement est habité par

m’accompagne :

une lecture régulière des récits bibliques.

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3 ≠ Témoins aujourd’hui deuxième numéro

28 ≠ La jeunesse au coeur

5 ≠ Politique et tradition 6 ≠ Journalisme et spiritualité 7 ≠ Entre bistouri et clé de sol

Ces mots d’aujourd’hui me font revisiter ces mots d’autrefois qui ont traversé les siècles : Je crois l’Eglise une, sainte, universelle et apostolique. ✱

8 ≠ Partenaire avec Dieu

www.oikoumene.org/fr/documentation/ documents

10 ≠ Chanter son espoir 11 ≠ L’écologie par vocation

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gard ∆ 2 ti rin m o as

sa foi, c’e st r de p ne

26 ≠ Le goût des autres

4 ≠ La foi hospitalière

Ces quatre questions m’aident à avancer sur un chemin où je reçois aujourd’hui les recommandations récemment publiées par le Conseil œcuménique des Eglises, l’alliance évangélique mondiale et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. Fruit d’une collaboration de plusieurs années, ces recommandations encouragent les Eglises à réfléchir à leur témoignage dans un monde multireligieux .

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2 ≠ Debout les vivants !

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La théologie pour reconstruire

uand on se lance dans un projet comme celui d’une thèse, c’est toujours avec un but. » celui de brigitte rabarijaona, doctorante à l’université de Genève, est clair. son doctorat de théologienne en poche, d’ici deux ou trois ans, elle reprendra le chemin de son pays, madagascar, dans le but « d’y apporter quelque chose ». comprenez l’enseignement et la possibilité de diriger à son tour des étudiants en théologie dans leur travail de doctorat, chose pour l’heure impossible sur la Grande ile, où le cursus s’arrête au master.

Brigitte Rabarijaona pasteure malgache

a 36 ans, brigitte allie la douceur à la persévérance. de son enfance dans une famille très pauvre, elle évoque le soutien sans faille de son père, décidé à voir ses enfants « aller au moins jusqu’au bac ». « on l’a fait, tous les cinq. » et brigitte, fascinée depuis qu’elle est gosse par les femmes pasteures – « avec une certaine douceur, elles transmettent le message différemment des hommes » –, arrête ses études d’économie pour se lancer dans la théologie. elle devient pasteure de paroisse en brousse, avant de travailler à la traduction de la bible à la société biblique, puis de reprendre des études théologiques, d’abord au cameroun, puis à Genève.

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« Les Liens entre Les poLitiques et L’egLise m’interpeLLent »

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dans son travail de thèse sur le mémoire de néhémie, elle évoquera, entre autres, le rôle de néhémie dans la reconstruction de jérusalem. une reconstruction matérielle, mais aussi économique et sociale qui la touche et la ramène à madagascar. « les liens entre les politiques et l’eglise m’interpellent : comment cette dernière peut-elle jouer son rôle de témoin, mettre en garde ou dénoncer, quand elle est trop proche du pouvoir ? » ou comment les textes bibliques d’antan sont en mesure de toucher du doigt l’aujourd’hui. « la théologie que je fais ne doit pas rester simplement dans la sphère académique ; elle doit également s’appuyer sur la réalité de mon eglise et de mon pays. » une question brûlante d’actualité. ✱

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12 ≠ Comme un phare de lumière 14 ≠ Partager la vie de la rue

29 ≠ Avec les oubliés de la prospérité 30 ≠ Partir au Cameroun en famille 32 ≠ Remercier sans couper les cheveux en quatre 33 ≠ De la morale à l’espérance engagée 34 ≠ Fraternité et révolution en Egypte 36 ≠ Vers un prosélytisme de bon aloi

16 ≠ Réformés : se battre pour exister

38 ≠ Partager le message

18 ≠ De Lausanne à Savièse 19 ≠ Le choix de la confiance

42 ≠ Eglises : la résistance s’organise

20 ≠ Des questions pour avancer

44 ≠ En guise de conclusion

22 ≠ Chrétien dans un monde multireligieux

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24 ≠ La théologie pour reconstruire

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40 ≠ Etre témoin en quatre clés

Comment être témoin ? Des outils pour vous. Coupon contact


EDITO

Debout, les vivants !

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anser avec un panier plein sur la tête. Prestation artistique, certes, mais bien plus encore: geste de vie ! Un soir où elles avaient reçu des nouvelles inquiétantes de leurs familles et de leur pays, j’ai vu des femmes malgaches danser en portant un panier plein sur la tête. Elles ne dansaient pas pour oublier ce qui se passait dans leur pays, mais pour tonifier les muscles qui permettent de porter les fardeaux. Pour elles-mêmes, d’abord, pour leurs compagnons qui dansaient avec elles et pour les spectateurs dont je faisais partie, ces femmes participaient à la danse de la vie tout en continuant à porter leurs soucis. J’ai perçu alors la solidité de leur colonne vertébrale, fortifiée par des muscles exercés depuis l’enfance, fortifiée par des chants exprimant en Dieu leur confiance. En racontant cela à une amie mise à terre par des soucis trop lourds pour elle, j’ai vu cette amie se redresser : sans les avoir vues, elle se souviendra longtemps de ces femmes malgaches et de leur danse qui l’ont remise debout dans son existence. Raconter de tels gestes de vie lorsque nous en sommes témoins contribue à fortifier les muscles de notre espérance et à stimuler les nerfs de nos relations. Longtemps avant d’être mis par écrit et de devenir livres, les récits bibliques ont été racontés, dansés et chantés. La foi n’est pas en premier lieu doctrine. Elle est expérience : ¬ expérience d’une musique reçue dans le silence de l’existence : musique des Psaumes qui offrent des mots à ce qui se bouscule en nous ; ¬ expérience d’un courage reçu au creux de la souffrance : courage de l’homme de Nazareth capable d’inventer jusqu’au bout des gestes d’amour ; ¬ expérience d’un souffle reçu dans le tunnel de la désespérance : souffle reçu d’ailleurs pour donner de l’élan à notre existence. Entretissées avec ces expériences d’autrefois racontées dans la Bible, les expériences de témoins d’aujourd’hui racontées ici nous sont offertes comme une invitation à rester debout. Témoins d’une confiance reçue. Vivants par la grâce de Dieu et solidaires des humains sur la terre. ✱

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Jacques Küng secrétaire général de DM-échange et mission

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Témoins aujourd’hui, deuxième numéro ! Le bouquet de témoignages rassemblés par DMéchange et mission dans les Eglises protestantes de Suisse romande et d’ailleurs a suscité beaucoup d’intérêt lors de la première édition, parue en 2009. L’image dynamique et vivante de la mission portée par des hommes et des femmes engagés, ici en Suisse et dans le monde, a touché beaucoup de lecteurs, dont vous étiez peut-être. L’édition que vous tenez entre les mains paraît dans un contexte quelque peu morose pour les Eglises historiques et institutionnelles. Fréquentation et dons en baisse, démotivation des membres et des ministres parfois, flou dans l’identité et la communication… Les indices ne manquent pas, relevés par de récentes études sociologiques, pour confirmer que nombre d’Eglises ont de la peine à retrouver une dynamique d’espérance et d’engagement. Pourtant – et c’est l’objectif de Témoins aujourd’hui –, il existe de nombreux exemples de personnes qui s’engagent au nom de leur foi, avec beaucoup de dynamisme, d’idées et d’enthousiasme. Vous découvrirez la richesse de leurs témoignages au fil des pages. De leur côté, les Eglises ne restent pas sans réaction. Par exemple, plusieurs d’entre elles remettent à l’ordre du jour les questions de la mission et de l’évangélisation en Suisse. Nous souhaitons que ce Témoins aujourd’hui appuie cette réflexion, interpelle les Eglises sur leur mission et suscite des engagements aussi variés que dynamiques.

Bertrand Quartier responsable communication à DM-échange et mission

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La foi hospitalière

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ans son bureau sans fenêtre, on entre comme dans un moulin. Pas de plaque sur la porte, il suffit de heurter : Anani Kuadjovi reçoit à peu près tout le monde, du technicien à l’infirmière en passant par la cuisinière. Directeur d’hôpital « par accident », - il a commencé par la théologie, avant d’étudier le journalisme, puis la gestion hospitalière -, Anani Kuadjovi, 57 ans et une carrure de judoka, est à la tête de l’hôpital Bethesda, dans le village togolais d’Agou, depuis 2007. Quatre-vingt-cinq employés et un poste qu’il occupe d’abord avec le cœur. « Je veux que les quelque quatre mille patients qui fréquentent l’hôpital chaque année ressentent et voient le témoignage chrétien, quelle que soit leur origine ou leur appartenance religieuse », dit-il.

C’est que l’on n’est pas par hasard pasteur ET directeur d’établissement hospitalier. « Je vis ma présence ici comme un engagement de foi. » Avec ses hauts et ses bas : « Tous les soirs, je démissionne. Et chaque matin, je m’y remets  », lâche cet homme qui avoue parfois son découragement face à l’ampleur et au coût de la tâche. Face à la pauvreté de ses compatriotes qui va grandissant. « Quand un patient arrive en urgence, je ne réfléchis pas. Il faut faire vite, il y a une vie à sauver. Ensuite ? On est payé, ou pas : les finances de l’hôpital en souffrent, forcément. » Alors Anani Kuadjovi s’en va se ressourcer dans la prière en se souvenant de ces cas où « on a pu faire quelque chose ». Et de sa voix qui résonne comme un cours d’eau, il vous dit, simple humain, composer tout bonnement « avec la faiblesse de ses forces  ». ✱

i « Je vis ma présence ic un comme engagement de foi. »

4 Anani Kuadjovi

directeur de l’hôpital Bethesda, à Agou (Togo)

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Politique et tradition

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ressé et concis, Pierre Maudet ne tourne guère autour du pot, ni dans son rôle de maire de la Ville de Genève, ni dans son rapport à la foi. « La tradition calviniste est depuis longtemps très ancrée dans les milieux libéraux genevois auxquels j’appartiens. » Attaché comme le grand voisin français à ce que la dimension religieuse appartienne à la sphère privée (il est marié et père de trois enfants), le magistrat surdoué et ambitieux mène sa carrière comme ses études en droit ou son armée (où il est capitaine) : au pas de charge. Et réserve son doute existentiel à la dimension religieuse « dont elle ne saurait se passer ». Cela n’empêche pas ce

croyant de vivre ses convictions religieuses « comme un cheminement semé d’embûches, mais aussi de belles rencontres avec des pasteurs ou des prêtres ». Ce chemin-là ne passe pour autant jamais la porte de son bureau du Département de l’environnement urbain et de la sécurité, où il se dit fier d’avoir réformé le corps de police municipal. Tenté par la culture, ce stakhanoviste très communicant évoque son humanisme, quand on lui demande si ses convictions chrétiennes influencent la gestion de son dicastère. « En parlant d’humanisme face aux mendiants Roms, je pense à saint Paul et à l’épître aux Corinthiens. Eh oui ! » ✱

Pierre Maudet

Maire de la ville de Genève

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igner, c’est ai mo Té

Lire : Philippi en s 2v

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Jour nalisme et spiritualité Tristan Cerf journaliste

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u petit matin, on retrouve l’ancien rédacteur en chef du Matin Bleu, depuis peu responsable des projets multimédia de la Tribune de Genève, devant la cathédrale de Lausanne. A 7h30 et durant une demi-heure, les Compagnons de l’aube méditent et prient pour bien commencer la journée. « Je venais régulièrement durant ma période lausannoise, sourit Tristan Cerf. Depuis que je passe la semaine à Genève, je ne peux venir qu’une fois par semaine. » Lorsqu’il était à Zurich, correspondant pour Le Temps puis rédacteur en chef adjoint à Migros Magazine, ce journaliste de 37 ans fréquentait avec assiduité l’Eglise réformée de langue française. « Si les questions de sens m’ont toujours travaillé, j’avais pris un peu de distance avec la pratique durant mes études à Genève. Mon arrivée à Zurich a sonné comme une redécouverte. » Dans un milieu journalistique qui cultive une méfiance atavique à toute spiritualité autant qu’une ignorance crasse de ses fondements, Tristan Cerf aime provoquer et

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s’insurger contre une « méconnaissance du fait religieux qui confine

parfois à la stupidité. Je pense que quelques interrogations sur les bases de la spiritualité occidentale ne font pas plus de mal à un journaliste que de comprendre le rôle des combats de reines en Valais. » Tristan Cerf avoue une foi « pas très dogmatique » et en même temps appartenant à un autre champ que celui de la logique, évoquant à la fois un rocher au milieu d’eaux souvent mouvementées, ou plutôt d’un « chemin escarpé sur lequel il faut trouver mon équilibre ». Il se souvient du pasteur de son enfance, à Cortaillod, de son côté « un peu post hippie » et de sa grande ouverture qui le séduisaient. « Mon père était décédé, ma mère guère pratiquante. Mais je me suis fait baptiser à 16 ans. » Cultivant désormais davantage une lecture « à la fois spirituelle et intellectuelle » de la Bible que la fréquentation assidue du culte dominical, Tristan Cerf aime ces textes accessibles à tous et en même temps riches en surprises. Un peu à son image, quoi. ✱ ✱

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Entre bistouri et clé de sol Jacques-Etienne Rouge chirurgien

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e synopsis de sa vie, Jacques-Etienne Rouge l’aurait bien campé quelque part au Sud, en Afrique sans doute.  « Mon père, pasteur à la cathédrale de Lausanne, recevait souvent des missionnaires. » Gymnasien, il hésite un instant entre le bistouri et les touches du clavecin, sa passion. Puis il opte pour le premier sans lâcher les secondes : sa carrière le conduit d’abord à Yverdon, puis à Moutier, d’où il a pris sa retraite il y a peu. En parallèle, il va créer un chœur de musique ancienne et lancer de nombreuses animations musicales en lien avec des fêtes religieuses. Mais d’Afrique à long terme, il n’y a pas trace, car on ne choisit pas tout, comme il dit. « Il y a quarante ans, il nous semblait juste, à ma femme et à moi, de partir en mission. Mais notre premier fils est né avec une grave malformation. Nous savions que si nous vivions éloignés d’un hôpital, il ne pourrait pas bénéficier des soins médicaux nécessaires. » La mission a donc pris corps ici, en Suisse romande. Avec une même vocation et un pareil partage. Et Jacques-Etienne Rouge de citer Jésus disant à un homme qu’il avait guéri: «  Reste chez toi et témoigne! » « Je n’aurais pas travaillé autrement outre-mer, sauf

qu’il cela aurait été plus facile d’y afficher ma foi : ici, c’est compliqué, il y a des préjugés. » Lui a essayé d’être « un médecin empathique au service de ses patients, sans a priori et dans le respect de chacun ». Sans prosélytisme, mais sans cacher ce qui l’anime. Récemment, il a mené un audit auprès d’un hôpital togolais pour le compte de DM-échange et mission. A Moutier où il vit, la paroisse connaît ses idées d’animations musicales comme celles de la Semaine sainte. Elles se résument par un petit message, un texte biblique, de la musique et une volonté simple : redonner de la vie dans l’Eglise. « Luther disait que chanter, c’est prier deux fois. Je suis de son avis, même si je pense que Bach ou Luther se serviraient du rap s’ils étaient là aujourd’hui. » Lors des soirées biblico-musicales, certains personnes viennent systématiquement, chaque soir : émouvant ! « C’était éblouissant, s’emballe-t-il. Une explosion de joie ! » « La musique produit quelque chose en nous, qui nous échappe. Vous savez à quoi cela me fait penser ? A l’imposition des mains. » Ou comment le chirurgien salue la force de la musique et la puissance de la prière. ✱

« La musique produit quelque chose en nous, qui nous échappe » A c t e s

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e sa foi, c’est p rd e n

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Elisabeth Ruey-Ray politicienne à Nyon

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« Je crois à quelque chose comme à un plan de Dieu dans ma vie » A c t e s

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Partenaire ieu avec D « J

e reste PLR, malgré les événements. Et je ne quitte pas non plus mon Eglise, même si elle m’énerve souvent. Je préfère changer les choses de l’intérieur. » Elisabeth Ruey-Ray rayonne en ce mois de mai. Au printemps 2011, sa réélection, malgré son éviction de la liste du parti libéral-radical, a fait sourire le landerneau politique vaudois. C’est donc désormais sous l’étiquette de Nyon Renouveau que cette femme de tête et de convictions continue à diriger la police et la mobilité communales. Eh oui ! Elisabeth Ruey-Ray incarne la preuve que l’on peut être de droite et chrétienne engagée. Son père, le pasteur Maurice Ray, fut une figure du milieu réformé et évangélique dans toute la région. Tout comme son époux, Claude Ruey, qui a marqué la politique nyonnaise au Conseil d’Etat, puis au Conseil national. « C’est sûr, j’ai été la fille de mon père et la femme de mon mari », s’amuse-t-elle. Cette double identification ne lui pose guère de problèmes, habituée qu’elle est à ne pas s’en laisser compter et à faire entendre sa voix. « Je suis donc née entre deux pages de la Bible. Un peu trop peut-être, parce qu’à l’adolescence, j’ai tout envoyé balader. » Assez naturellement, celle qui travaille alors comme graphiste du côté de Cossonay renoue avec la foi. Elle rencontre Claude Ruey, « l’homme de ma vie », qu’elle épouse en 1977, avant de déménager sur les bords du Léman

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où il vient d’être élu député. « Me marier avec un homme politique m’a questionnée. En revanche, il était évident que je voulais vivre avec quelqu’un de croyant, avec qui partager un chemin de foi. » Deux enfants et plus de trente ans de vie commune plus tard, Elisabeth Ruey-Ray et son mari prennent le temps d’une ou deux retraites annuelles, par exemple à Grandchamp, et Mme la municipale, avec humour, ne cache pas cultiver une « foi de charbonnier ». « Je me sens partenaire avec Dieu. J’aime me mettre en face de Lui et lui demander de m’inspirer. Je crois à quelque chose comme à un plan de Dieu dans ma vie. » Coup de pouce de la transcendance, elle entre au Conseil communal plutôt qu’au Conseil de paroisse. « Ce dernier ne m’avait pas élue. Je suis entrée en politique, et la passion de la chose publique ne m’a plus quittée. » Entière et adepte de la vérité, Elisabeth Ruey-Ray n’a jamais fait mystère de sa foi, ce qui lui a valu, et lui vaut encore, quelques ricanements. « Je réponds volontiers aux questions que l’on me pose parfois à ce sujet. Comme à celles qui interrogent sur le mélange avec ma filiation libérale. Le libéralisme comme je l’entends en appelle à la responsabilité individuelle de l’homme pécheur, ainsi qu’à une vision humaniste de la société. » ✱

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∆ Lire : 2 Co rin eux t ér

Chanter son espoir I

l y a un peu plus de deux ans, la vie de Sandra Roulet a basculé. Un soir d’hiver, Antoine, son mari, a eu un accident de kitesurf. « Quelques heures plus tard, je devais me préparer au pire, raconte-t-elle. Y aurait-il un miracle ? Ce que Dieu avait prévu, je n’en savais rien, sauf qu’il tenait nos vies entre ses mains. » Ce jour-là, Sandra a pensé à leur vie à tous les deux, à leurs trois enfants, en se disant : « Quoi ? Notre vie ensemble va-t-elle s’achever ainsi ? » Parmi les choses partagées, il y avait la musique. Une passion commune. « On chantait ensemble, il jouait de la guitare et du violoncelle, moi du piano. On avait envie de faire un disque, même si ce n’était pas un but en soi. » Quelque mois après le départ d’Antoine, décédé le lendemain de l’accident, Sandra a mis les bouchées doubles et travaillé sur son CD, « Garde l’espoir », sorti l’an dernier. « Il y avait un vide immense ; cela m’a permis de mettre mon énergie quelque part. » Et de donner un sens à « tout ça ». Parmi les textes du disque, certains sont signés de son mari, notamment « Deux mains pour demain » qui évoque le récit d’un homme malade de la lèpre qu’Antoine, ergothérapeute, avait soigné lors de son séjour en Guinée Conakry. On y entend aussi le timbre d’Antoine : « Il avait enregistré des voix quelques jours avant

l’accident ». Dans sa maison baignée de lumière, Sandra a repris le dessus. Si elle évoque les craintes de l’avenir comme la vive douleur de voir ses enfants souffrir de l’absence de leur papa, elle ne se lamente pas sur son sort. « J’ai reçu la grâce de pouvoir accepter. Non sans pleurs et tristesse, mais avec confiance et lâcher prise. J’ai accepté de n’être pas capable de revenir en arrière. Je ne veux pas mettre mon énergie à réécrire l’histoire. J’en ai trop besoin pour vivre le présent. » Voir la main de Dieu au jour le jour, c’est ainsi qu’elle vit au quotidien. Par la musique, Sandra proclame sa foi, son espérance, sa confiance. Pas besoin d’en dire beaucoup plus, « c’est un cadeau de pouvoir m’exprimer par ce biais. Je déverse mon âme, au moment où je chante, où je joue. Celui ou celle qui est en recherche trouvera une piste, mais la sienne. Chacun possède son propre cheminement. » ✱ Pour commander le CD « Garde l’espoir » : www.sandraroulet.ch

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Sandra Roulet responsable de la section Jura-Bernois de la Croix -Rouge

« J’ai reçu la grâce de pouvoir accepter »

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L’écologie par vocation

Steve Tanner responsable d’A Rocha (Suisse) et ingénieur en microtechnique

tour « Dieu est le centre au . » duquel tout s’articule

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ésirant servir dans la mission et la protection de l’environnement, Steve Tanner se rend en 2002 en Equateur, où il s’implique dans des projets environnementaux en faveur des populations démunies. Là-bas, il a compris que son rôle de témoin allait se jouer… en Suisse. « En Amérique latine, le christianisme est bien plus développé que dans notre société post-chrétienne. » Depuis son retour en 2005, son engagement prend une dimension particulière: il lance la branche suisse d’A Rocha, une organisation chrétienne pour la conservation de la nature, présente dans une vingtaine de pays, et active en Suisse entre autres dans le cadre de camps nature pour enfants. Rencontre. TA : L’écologie est-elle biblique ? ST : Oui. La Bible est pleine de références à la nature. Dans la Genèse, Dieu dit que tout ce qu’il a fait est bon, même avant de créer l’homme. Ce dernier reçoit de Dieu le mandat de cultiver et de garder le jardin. Prendre soin de la création, ou avoir un comportement écologique, fait donc partie de l’appel de Dieu, qui aime toute sa création et nous l’a confiée. La nature au service de l’homme, donc ? Pas seulement. Cultiver le jardin, c’est prendre dans la nature ce dont nous avons besoin. Mais « garder » le jardin dépasse nos intérêts. L’homme cesse d’être le centre de tout, et laisse cette place à Dieu.

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Cette attitude humble est nécessaire pour bien gérer les ressources et cultiver sans exploiter à outrance. Dans la Bible, la nature a une valeur intrinsèque, indépendamment de l’homme. Nous honorons Dieu lorsque nous respectons ses oeuvres. La nature nous conduit-elle à rencontrer Dieu? Oui. Dieu révèle sa grandeur au travers de ce qu’il a créé. Mais dans notre société moderne, l’écologie a pris une dimension morale et est devenue un nouveau salut par les oeuvres. C’est également devenu la préoccupation numéro 1 de nos concitoyens. Il est donc pertinent pour l’Eglise de les rejoindre en agissant concrètement dans le domaine, pour témoigner de l’amour de Dieu pour toute sa création, et annoncer le véritable salut. Des espèces qui disparaissent, des catastrophes écologiques : jamais tenté de baisser les bras ? Non, car je sais que Dieu est tout-puissant et qu’il continue d’agir dans sa création. De quel Dieu suis-je le témoin? Un Dieu de fatalité et de destruction, ou un Dieu de restauration et d’espoir? Quand je lis : « Aime ton prochain comme toi-même », je pense aussi à mon prochain dans le temps, mon successeur. Laisser une terre où il fait bon vivre me motive. J’essaie d’être cohérent dans mes actes et les considère comme une expression d’amour pour Dieu et les autres. ✱ www.arocha.org

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André Joly pasteur

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Comme un phare de lumière « La Bonne nouvelle de JésusChrist, c’est qu’Il vient habiter le temps présent »

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ans les niches de la cathédrale de Lausanne, des ouvriers ont mis le dernier coup de vis à la pose de cimaises et, depuis quelques jours, une trentaine de photographies se balancent sur les murs du lieu de culte et de culture. Depuis début janvier 2011, la cathédrale de Lausanne est le premier lieu phare de l’Eglise vaudoise. Sans se sentir « envoyé dans la tempête », André Joly, pasteur et désormais animateur de l’édifice, s’y sent comme un poisson dans l’eau. « Qu’est-ce qui vous touche ? » Cette question, le Vaudois la pose volontiers au visiteur de passage. Comme si toute spiritualité trouvait finalement sa source au fond de soi, de son ressenti. « Ici, il n’y a pas de réalisations gratuites, lance-t-il. Ceux qui ont façonné cet endroit étaient habités par un sens, une raison. Quelque chose qui les motivait, leur donnait envie de partager. » Et l’homme de vous entraîner devant une statue où Jésus, bébé, serre la barbe de Siméon de ses tout petits doigts. Partager la joie de l’Evangile, c’est rendre Dieu bien présent dans les petits riens de l’existence.

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« La Bonne nouvelle de Jésus-Christ, c’est qu’Il vient habiter le temps présent. Bon, je ne dis pas qu’il faut invoquer Dieu chaque fois qu’on se brosse les dents. Mais discerner autour de soi tous les signes d’une vie qui pourrait être belle. » C’est ce qu’il fait : un coup d’œil à la rose de la cathédrale, une merveille qu’il ne se lasse pas de contempler. « Dieu n’est représenté qu’une fois, au centre de la rosace. Tout autour, les vingtquatre médaillons évoquent le temps qui passe, les saisons et leurs travaux. » Ce qui fait nos jours, autrement dit. Dans ce « lieu de vie extraordinaire » qui reçoit grosso modo 420 000 visiteurs par an, André Joly croise des gymnasiens, anime une méditation pour des pèlerins de Compostelle, renseigne un groupe de femmes sur le sens du Carême. Et l’évangélisation ? « S’il s’agit de

convaincre l’autre que j’ai raison, non. Si c’est rendre présente la joie de l’Evangile, alors oui. Vous savez, je crois qu’on m’a confié ce poste parce que je ne fais pas peur. J’aimerais que l’autre puisse trouver ou retrouver une relation apaisée avec Dieu. » ✱

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Partager la vie de la rue 14

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l a été vendeur de guitares et électricien de chantier. Depuis septembre 2005, Christophe Reichenbach, pasteur formé à l’Institut Emmaüs, bat le pavé pour l’association Rue à Cœur, à deux pas du Yucca, à Bienne, et de son local d’injection pour personnes toxico-dépendantes. Devant la porte de son bureau, un mouchoir de poche au parquet clair et aux murs ornés d’icônes et de prières, les deals vont bon train. Christophe y est habitué, « tellement

Christophe Reichenbach pasteur

« je me sens comme un berger qui accompagne »

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que parfois ça me fait peur ». Mais bon, quand il voit « deux miss » chercher leurs veines devant son bureau, sa douleur est intacte. « Quand on connaît les tracés de vie de ces personneslà, on comprend que la drogue ait été un moyen de sortir de la souffrance. Tu ne peux pas les juger. Après vient l’addiction, et là, c’est autre chose : à un moment donné, on peut choisir de sortir de son statut de victime et lâcher le produit. » La zone, Christophe se demande parfois pourquoi il n’est pas tombé dedans : « Je me suis converti et suis passé à côté. Pourquoi moi et pas eux ? » C’est un peu pour cette raison qu’il aime les gens en marge. « Je vais dans la rue parce que je crois qu’il y a une possibilité de s’en sortir. J’aime imaginer Jésus qui attirait plein de gens en marge ; je pense qu’il peut le faire aujourd’hui encore. S’il n’est pas venu pour eux, il est venu pour qui ? » Il croit cela, Christophe, même si les « résultats » ne sautent pas aux yeux. « Plus je vais de l’avant, plus je me dis qu’il faudrait qu’il se produise du miraculeux. C’est vraiment difficile de s’en sortir quand tu as quinze ans de toxicomanie derrière toi et la prison qui va avec », souffle-t-il, JP, son petit chien crème (ça se prononce geepee, à l’anglaise) étalé à ses pieds. De lui, les tox et autres marginaux n’attendent « rien du tout », dit-il. « Si je ne vais pas à eux, ils ne viennent pas vers moi. » Alors il va, discute, offre un temps de prière ou de sainte Cène à Noël, partage une présence surtout. « Une présence d’Evangile. Ils me racontent ce qu’ils vivent, je leur dis que je prie pour eux. » Une fois par semaine, un repas mijoté par quelques-unes des trente bénévoles de l’association Rue à Cœur réunit une cinquantaine de personnes de la rue. De chouettes moments. « Je lis une courte prière de Taizé avant de manger. » Sourire. « Peut-être qu’il faudrait que je sois plus évangéliste, mais bon, je me sens comme un berger qui accompagne. Je ne manipule personne, j’aimerais juste que ces gens-là aient une meilleure vie, et je le leur dis ». ✱✱

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16 Jörg Stolz professeur de sociologie des religions à l’Université de Lausanne

« Les réformés devront se battre pour exister »

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es résultats de la dernière enquête suisse sur la foi religieuse sont clairs. De plus en plus de nos concitoyens s’éloignent de l’Eglise et mettent la religion à distance. Les personnes sans confession forment 25% de la population. Quel avenir pour les paroisses en Suisse ? Comment imaginer les années à venir ? Interview de Jörg Stolz, professeur de sociologie des religions à l’Université de Lausanne et responsable de cette enquête pour le compte du Fonds national suisse de la recherche scientifique. En juin dernier, il a co-écrit « L’avenir des réformés. Les Eglises face aux changements sociaux » (Ed. Labor et Fides) avec Edmée Ballif. TA : Ces dernières années, le nombre de personnes engagées dans la foi diminue. Le résultat de cette dernière recherche ne vous a pas surpris, j’imagine… Jörg Stolz : Non, mais nous avons pu mettre en lumière certaines raisons. L’une d’entre elles, c’est la forte concurrence que l’Eglise subit face à des institutions séculières. Les psychothérapeutes travaillent les questions de sens, l’industrie des loisirs propose une offre de divertissements immense ; nous vivons dans le confort, voire le réconfort, qu’apportent des systèmes de santé et de sécurité performants. N’y a-t-il pas également une bonne part d’individualisme ? La grande majorité des gens pensent que leur façon de concevoir la spiritualité – un peu de méditation ici, des prières là – est quelque chose de personnel. Comment les gens viennent-ils à la foi ou la quittent-ils ? On s’aperçoit que le plus souvent, les individus en sont restés au niveau de spiritualité acquis dans leur jeunesse ; par conséquent, les paroisses ont raison de miser sur les enfants. Sans compter qu’à travers eux, on peut toucher les parents. Avec le temps, les réformés vont-ils disparaître ? Ils seront de moins en moins nombreux, voilà ce que disent les statistiques démographiques se basant sur l’âge des personnes fréquentant les cultes. Les anticipations incluent le nombre de décès et de naissances, mais ce que l’on ignore, c’est combien de personnes rejoindront l’Eglise. En d’autres termes, quelle sera la capacité des réformés à attirer de nouveaux membres ?

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Y a-t-il des trucs pour y parvenir ? L’Eglise réformée de Saint-Gall semble avoir une bonne stratégie. Elle a commencé par renouveler les cultes en sollicitant des paroissiens pour s’y engager. Elle a mis l’accent sur les jeunes et les familles avec enfants. Enfin, elle a rajeuni le Synode, pour qu’il ne soit pas composé que de retraités. Les réformés ont-ils commis des erreurs pour en arriver là ? Disons que la principale consiste à croire que l’Eglise existe juste comme ça, parce qu’elle est là, au milieu du village. Dans les temps qui viennent, les gens devront comprendre que, pour qu’elle existe, ils devront se battre pour leur Eglise, d’autant plus que les paroisses seront, ou sont déjà, confrontées à des problèmes financiers majeurs. Justement, pensez-vous que les pasteurs devraient facturer leurs services ? Non, je ne crois pas. L’Eglise n’a pas intérêt à ce que les gens calculent réellement ce que leur coûterait leur mariage ou la confirmation de leur fils. Personnellement, le futur étriqué de l’Eglise réformée vous attriste-t-il ? Je suis réformé et, personnellement, je préférerais qu’elle se porte mieux ! En tant que sociologue, je cherche à regarder la question de manière détachée et neutre. Du point de vue des Eglises, il me semble qu’il faudrait, plutôt que s’attrister, chercher des pistes. Et se questionner sur la mission de l’Eglise. Dans plusieurs cantons, on parle d’évangélisation et c’est, à mes yeux, une question importante. Pour exister, toute organisation doit faire en sorte que des membres la soutiennent, s’y investissent, recrutent de nouveaux adhérents. Qu’entend-on par évangélisation ? Chez les réformés, la réflexion en est pour l’heure au stade embryonnaire. Il y a des réticences et des ambivalences au sein de l’Eglise : certains ne veulent pas « faire comme » les évangéliques tout en ressentant un besoin de s’affirmer. . ✱

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Marie-Claude Comte assistante médicale

« Notre Dieu n’est pas dictateur ou juge, mais amour »

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De Lausanne à Savièse

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uand, à 24 ans, Marie-Claude s’est installée en Valais avec son mari, elle s’est sentie « un peu en mission ». Pas facile de s’intégrer dans un milieu quasi exclusivement catholique où chacun se connaît justement par le biais de l’Eglise. « Les cinq premières années, j’ai essayé de faire comme si je pouvais être d’ici, mais j’étais malheureuse à faire du forcing… » Plutôt que vivre à côté de ses baskets, Marie-Claude, Vaudoise et engagée dans la paroisse réformée de Sion, s’est affirmée. « J’ai compris qu’en gardant mes références, je vivais dans le respect de moi-même avec beaucoup de liberté. »

Elle non plus, mais elle a fait de son vécu un atout. « Sensibilisée à la question de l’intégration, je me suis ouverte à ceux qui débarquent et traversent les mêmes soucis que j’ai vécus moi-même. On se retrouve, on partage, je donne un coup de main aux mamans qui arrivent et vivent un certain rejet. » Dans la paroisse, les liens sont forts, familiaux, comme peuvent l’être ceux qui se tissent au sein d’une minorité. Et cela lui convient. « J’ai été élevée dans une culture d’ouverture aux autres. Notre Dieu n’est pas dictateur ou juge, mais amour. » Un esprit d’ouverture qui l’a conduite, assez naturellement, à gérer les projets Terre Nouvelle durant dix ans au sein de sa paroisse « pour que la mission ne passe pas après tout le reste ! » ✱

Depuis plus de vingt ans en Valais, Marie-Claude y vit bien, même si elle reconnaît que ses enfants, 16 et 18 ans, ne se sentent pas d’ici.

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Le choix de la confiance

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a vie de Florine Juvet ressemble davantage à un morceau d’improvisation qu’à une sonate à la partition savamment composée. Quand elle commence l’accordéon, à l’âge de 7 ans, c’est un peu par hasard. « Un jour, je voulais jouer de la trompette, le lendemain, c’était la harpe et le troisième jour, l’accordéon. » C’est ce jour-là que sa mère l’inscrit à un cours. Florine ne s’imaginait pas pour autant en faire son métier. A 13 ans, « dans une crise de qui suis-je ? », elle commence à mettre Dieu à l’épreuve pour « voir s’il existe ». Bingo ! « Il y avait un peu trop de clins “Dieu“ (œil), j’ai dû me rendre à l’évidence. » Du coup, elle décide de lui faire confiance à 100%, se voyant même bien missionnaire à Madagascar. « Ma mère tempérait mes ardeurs en me rappelant que je n’avais même pas de métier ! » Elle attend un appel… qui ne vient pas : « Quand je me mettais à l’écoute de Dieu, je n’entendais qu’une chose : “ Florine, je t’aime “. A l’époque, j’aurais aimé quelque chose de plus fulgurant ! » Plus tard, à 18 ans, l’adolescente est victime d’un grave accident de scooter. « Cela m’a pas mal secouée, raconte-t-elle. J’étais encore en vie, cela devait bien être pour quelque chose. Dieu aurait-il un plan pour ma vie ? ! Je me suis préparée pour les concours d’entrée au Conservatoire en priant qu’Il me guide selon ses plans.» A sa grande surprise, elle est admise au Conservatoire de Berne. Elle a trouvé sa voie : professeure d’accordéon. « En terminant ma formation, j’avais des heures d’enseignement dans six écoles de musique ! » Désormais, entre les groupes –elle joue dans sept formations ! –, les cours donnés dans trois cantons et les concerts à gauche et à droite, Florine est en piste tout le temps. Gare aux amalgames, elle n’est pas du genre accordéon « um pla pla » à la Yvette Horner, « je déteste ». Elle passe du baroque au tango, du rock celtique à la musique électronique toujours avec un bonheur intact ; « chaque fois, je me plonge totalement dans l’univers musical, comme si je ne savais jouer que cette musique-là ». Autour d’elle, le sourcil se soulève, incrédule, quand elle se dit femme de pasteur. « Ben oui, l’alliance entre une musicienne et un homme d’Eglise surprend ». Qu’importe, elle va son bonhomme de chemin : « Je ne joue dans aucun groupe chrétien, même si tout le monde sait que je le suis et connaît mes valeurs ». Dans la paroisse de son mari, Dimitri, Florine coache les catéchumènes qui se sont formés en groupe de musique. « C’est génial, à Pâques, il y a eu vingt-sept confirmations ! » Pas besoin d’aller à Madagascar pour être en mission, non ? ✱

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Florine Juvet musicienne

Pas besoin d’aller à Madagascar pour être en mission

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Jacques Küng

secrétaire général de DM-échange et mission

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aptisé à six mois, je ne garde aucun souvenir de ce geste. Mais aujourd’hui encore, je peux en faire mémoire. Le témoignage de celles et ceux qui l’ont demandé pour moi m’a fait naître à la confiance : je me sais accueilli. Dans la paroisse où j’ai grandi, mon adolescence a été marquée par deux pasteurs très différents d’âge et d’options théologiques, mais habités tous deux d’une passion pour l’Evangile et la vie en Eglise. Tiraillé entre ces deux témoins, je suis entré en Faculté de théologie avec la secrète envie de savoir si l’un des deux avait plus raison que l’autre. Là, je me suis heurté à des textes qui m’ont bousculé, comme cette parole de Paul aux Corinthiens : « Les Juifs demandent des

miracles et les Grecs recherchent la sagesse ; mais nous, nous prêchons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens… » (1Co 1.22). Dès lors, cette question m’accompagne : Comment accepter que la marche vers l’unité de l’Eglise passe par une remise en question de mes convictions les plus fondamentales ? En cours d’études, j’ai accompli un stage dans une institution où vivent des personnes en situation de handicap mental. Découverte d’un lieu où la communication passe très peu par le langage verbal auquel mon parcours scolaire m’a habitué. Découverte de l’importance du regard, des gestes, des attitudes, et d’un rythme de vie bien éloigné des contraintes de rendement et de performance. Dès lors, une conviction s’inscrit au plus intime de moi : si l’Evangile vaut la peine d’être vécu, quelque chose peut en être partagé avec celles et ceux qui sont considérés comme les plus petits mais qui nous précèdent dans le Royaume des cieux. Dès lors, cette question m’accompagne :

Comment résister aux pressions du monde ambiant et tisser des réseaux de solidarité qui témoignent de la sainteté à laquelle nous sommes appelés ? Mon parcours familial et professionnel m’a conduit à travailler sept ans au service de l’Eglise presbytérienne au Rwanda (19801986 et 1995-1996) : enseignement théologique et aumônerie universitaire. Depuis, je relis souvent le dernier chapitre de la lettre de Paul aux chrétiens de Rome : une liste de noms. Des noms de femmes et d’hommes, des noms aux consonances juives, grecques ou latines, des noms de familles nobles et des noms réservés à des esclaves. Chacun de ces noms évoque pour Paul un bout de vie partagée, une épreuve traversée ensemble, une communion dans la prière, des souvenirs de joies et projets portés à plusieurs. A ces noms d’autrefois, des noms d’aujourd’hui continuent à s’ajouter : compagnes et compagnons de foi dispersés aux quatre coins du monde, capables des plus belles solidarités et menacés des pires atrocités… Dès lors, cette question m’accompagne : Comment montrer que l’Eglise universelle se vit au quotidien dans des rencontres où se tissent et s’entretissent nos partages, découvertes, tensions, conflits, joies et projets ? Baptisé, devenu enseignant dans une école de théologie, puis pasteur en paroisse et maintenant secrétaire général de DMéchange et mission, je m’efforce à la cohérence entre mes convictions chrétiennes et mes choix personnels, familiaux, politiques ou économiques. Attentif à ne pas imposer mes convictions, je ne veux pas pour autant les cacher. Et je me demande sans cesse comment rendre compte de l’espérance qui est en moi. Ce cheminement est habité par une lecture régulière des récits bibliques. Pour

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lutter contre l’oubli des promesses de Dieu et de ses appels à la justice, il importe de faire mémoire et de transmettre : raconter de génération en génération de quelles manières Dieu appelle, envoie, rejoint, bouscule, relève celles et ceux qui cherchent à se détourner du chemin de vie qu’il propose ; partager les prières, les chants de louange ou les cris de détresse, les questions et les remises en question, les épreuves et les élans de celles et ceux qui ont été mis en chemin par l’appel du Seigneur ; évoquer leurs peurs, ainsi que les paroles, récits et paraboles qui ont renouvelé leur confiance. Dès lors, cette question m’accompagne : Comment poursuivre ce travail de lecture, de mémoire, d’interprétation et d’actualisation qui nous relie au dynamisme de la tradition apostolique ? Ces quatre questions m’aident à avancer sur un chemin où je reçois aujourd’hui les recommandations récemment publiées par le Conseil œcuménique des Eglises, l’Alliance évangélique mondiale et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. Fruit d’une collaboration de plusieurs années, ces recommandations encouragent les Eglises à réfléchir à leur témoignage dans un monde multireligieux . Ces mots d’aujourd’hui me font revisiter ces mots d’autrefois qui ont traversé les siècles : Je crois l’Eglise une, sainte, universelle et apostolique. ✱

www.oikoumene.org/fr/documentation/ documents

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Le témoignage chrétien dans un mon

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3.

Agir dans l'amour de Dieu. Les chrétiens croient que Dieu est la source de tout amour et, en conséquence, dans leur témoignage ils sont appelés à mener une vie marquée par l’amour et à aimer leur prochain comme eux-mêmes (cf. Mt 22,34-40 ; Jn 14,15).

Manifester les vertus chrétiennes. Les chrétiens sont appelés à se conduire avec intégrité, charité, compassion et humilité, et à surmonter toute forme d’arrogance, de condescendance et de dénigrement (cf. Ga 5,22).

2.

Accomplir des actes de service et de justice. Les chrétiens sont appelés à pratiquer la justice et aimer avec tendresse (cf. Mi 6,8). Ils sont en outre appelés à servir les autres et à reconnaître ainsi le Christ dans les plus petits de leurs frères et sœurs (cf. Mt 25,45). Les actes de service tels que l'éducation, les soins de santé, le secours et les actes de justice et de défense des causes font partie intégrante du témoignage rendu à l'Évangile. L'exploitation des situations de pauvreté et de nécessité n'a aucune place dans l’action chrétienne. Les chrétiens doivent dénoncer et s'abstenir d’offrir toutes formes d'artifices, y compris des incitations et des récompenses financières, dans leurs actes de service.

Imiter Jésus Christ. Dans tous les aspects de la vie, et particulièrement dans leur témoignage, les chrétiens sont appelés à suivre l'exemple et les enseignements de Jésus Christ, partageant son amour, rendant gloire et honneur à Dieu le Père dans la puissance de l’Esprit Saint (cf. Jn 20,21-23).

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5.

Faire preuve de discernement dans le ministère de guérison. En tant que partie intégrante de leur témoignage rendu à l'Évangile, les chrétiens exercent des ministères de guérison. Ils sont appelés à faire preuve de discernement lorsqu'ils accomplissent ces ministères, dans le respect absolu de la dignité humaine, s'assurant que la vulnérabilité des personnes et leur besoin de guérison ne sont pas exploités.

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6.

Rejeter la violence. Les chrétiens sont appelés à rejeter toutes les formes de violence, y compris psychologique ou sociale, et tout abus de pouvoir dans leur témoignage. Ils rejettent également la violence, la discrimination injuste ou la répression par n'importe quelle autorité religieuse ou laïque, notamment la violation ou la destruction des lieux de culte, des symboles sacrés ou des textes.


de multireligieux en 12 principes

7.

Respecter la liberté de religion et de croyance. La liberté religieuse, qui comprend le droit de professer publiquement, de pratiquer, de diffuser et de changer de religion, découle de la dignité même de la personne humaine, qui se fonde sur le fait que tous les êtres humains sont créés à l'image et la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1,26). Ainsi, tous les êtres humains sont égaux en droits et en responsabilités. Quand une religion, quelle qu’elle soit, est manipulée à des fins politiques, ou quand une religion est l’objet de persécutions, les chrétiens sont appelés à rendre un témoignage prophétique dénonçant ces actions.

8.

Œuvrer dans le respect mutuel et la solidarité. Les chrétiens sont appelés à s’engager à œuvrer avec tout individu dans un esprit de respect mutuel, afin de promouvoir ensemble la justice, la paix et l’intérêt commun. La coopération interreligieuse est un aspect essentiel d'un tel engagement.

9.

Respecter tous les individus. Les chrétiens reconnaissent que l'Évangile remet en question et enrichit les cultures. Même si l'Évangile remet en question certains aspects des cultures, les chrétiens sont appelés à respecter tout individu. Les chrétiens sont appelés également à discerner les éléments de leur propre culture contestés par l’Évangile.

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10.

Renoncer à tout témoignage faussé. Les chrétiens doivent s’exprimer avec sincérité et respect ; ils doivent écouter afin de mieux connaître et comprendre les croyances et les pratiques des autres ; ils sont encouragés à reconnaître et à apprécier ce qui est vrai et bon en l’autre. Tout commentaire ou approche critique doit avoir lieu dans un esprit de respect mutuel, en veillant à ne pas rendre un témoignage faussé des autres religions.

11.

Veiller au discernement personnel. Les chrétiens doivent reconnaître que tout changement de religion est un pas décisif qui doit être accompagné d’un temps suffisant pour y réfléchir et s’y préparer de manière ajustée, au moyen d’un processus qui garantisse la pleine liberté individuelle.

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12.

Consolider les relations interreligieuses. Les chrétiens doivent continuer à construire des relations de respect et de confiance avec les fidèles des autres religions, de manière à faciliter une plus grande intercompréhension, la réconciliation et la coopération dans l’objectif de l’intérêt commun. Extrait d’un document publié par le Conseil Œcuménique des Eglises, le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et l’Alliance Evangélique Mondiale. Juin 2011. www.oikoumene.org/fr/resources/ documents.html


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La théologie pour reconstruire 24

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uand on se lance dans un projet comme celui d’une thèse, c’est toujours avec un but. » Celui de Brigitte Rabarijaona, doctorante à l’Université de Genève, est clair. Son doctorat de théologienne en poche, d’ici deux ou trois ans, elle reprendra le chemin de son pays, Madagascar, dans le but « d’y apporter quelque chose ». Comprenez l’enseignement et la possibilité de diriger à son tour des étudiants en théologie dans leur travail de doctorat, chose pour l’heure impossible sur la Grande Ile, où le cursus s’arrête au master.

Brigitte Rabarijaona pasteure malgache

A 36 ans, Brigitte allie la douceur à la persévérance. De son enfance dans une famille très pauvre, elle évoque le soutien sans faille de son père, décidé à voir ses enfants « aller au moins jusqu’au bac ». « On l’a fait, tous les cinq. » Et Brigitte, fascinée depuis qu’elle est gosse par les femmes pasteures – « avec une certaine douceur, elles transmettent le message différemment des hommes » –, arrête ses études d’économie pour se lancer dans la théologie. Elle devient pasteure de paroisse en brousse, avant de travailler à la traduction de la Bible à la Société biblique, puis de reprendre des études théologiques, d’abord au Cameroun, puis à Genève. Dans son travail de thèse sur le Mémoire de Néhémie, elle évoquera, entre autres, le rôle de Néhémie dans la reconstruction de Jérusalem. Une reconstruction matérielle, mais aussi économique et sociale qui la touche et la ramène à Madagascar. « Les liens entre les politiques

« Les liens entre les politiques et l’Eglise m’interpellent »

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et l’Eglise m’interpellent : comment cette dernière peut-elle jouer son rôle de témoin, mettre en garde ou dénoncer, quand elle est trop proche du pouvoir ? » Ou comment les textes bibliques d’antan sont en mesure de toucher du doigt l’aujourd’hui. « La théologie que je fais ne doit pas rester simplement dans la sphère académique ; elle doit également s’appuyer sur la réalité de mon Eglise et de mon pays. » Une question brûlante d’actualité. ✱

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Lire : Philippien s2 -4 v1

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s e r t u a s e Le goût d Antoine Schlüchter pasteur, Villars-sur-Ollon

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« A vivre des choses ensemble, on s’apprivoise » A c t e s

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18 ans, Antoine Schlüchter rêvait d’ouvrir sa propre Eglise. Une communauté qui lui ressemblait, « c’était tout ou rien : un verset biblique en réponse à chaque question  », résume-t-il dans un sourire. Les ans ont passé, l’homme est devenu pasteur de l’Eglise évangélique réformée vaudoise. N’allez pas croire qu’il ne témoigne plus autant ! « La même foi m’anime. Le tout du Christ, je continue à le dire et à le vivre. Mais je suis beaucoup plus sensible au respect du cheminement de mon interlocuteur. Un cheminement qui peut être très différent du mien. »

Eglises de migrants, baptisé Mosaïc. Aussi, en 2008, lorsqu’il retrouve ses racines et s’installe en paroisse à Villars-sur-Ollon, est-il sollicité pour piloter le groupe de réflexion lancé par l’Eglise vaudoise autour de cette même thématique. « Le contexte est autre : en France, la communauté protestante compte des paroisses réformées, évangéliques, baptistes ou encore pentecôtistes. Dans le canton de Vaud, on ne peut faire qu’un bout du chemin, car la plupart des communautés de migrants sont de tendance évangélique. » Le défi n’en est pas moins présent. « Eston capable de se reconnaître de la même famille, alors que l’on fonctionne autrement ?  » Etre

Le respect de la différence ? Le concept lui va comme un gant. Sans doute une sensibilité à l’altérité née de son union à une femme malgache et des deux filles qu’ils ont adoptées. Exilé à Aix-en-Provence, où il occupe notamment un poste pastoral durant treize ans, Antoine Schlüchter a travaillé ensuite en France à un projet avec les

« Eglise ensemble » ne veut pas dire amener des personnes dans notre paroisse, mais plutôt se rencontrer, créer des opportunités de cultes, de conférences. A vivre des choses ensemble, on s’apprivoise. »

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Il y a quelques mois, le pasteur invitait un requérant d’asile congolais à venir témoigner

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de sa foi et de son parcours de défenseur des droits humains devant des catéchumènes. Beau partage. « Je n’attends pas que les choses portent du fruit, je continue, c’est tout. Je crois que l’espérance du Christ nous libère pour un service. » Alors il sème en confiance. Rencontre ici une famille en deuil, visite ailleurs un paroissien malade, écoute les uns en faisant son marché au village et partage avec d’autres lors d’un match de hockey. Une chose le turlupine, pourtant : que les porteurs de convictions se distancient de l’Eglise. Face à un protestantisme au dogme flou, lui propose une formation d’adultes, avec Guy Lasserre, autour de la confession de foi. « Un thème que l’Eglise a un peu

mis de côté et sur lequel elle revient. » Ou comment réfléchir à son histoire, à ses convictions, à ses expériences, et de quelles façons l’une influence les autres et vice-versa. ✱


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La jeunesse au cœur lée « Je suis une miracu et j’en témoigne ! »

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Nadine Geinoz animatrice jeunesse

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adine Geinoz reçoit chez elle, en Gruyère, en toute simplicité. A 32 ans, l’animatrice jeunesse cumule deux emplois, l’un à la paroisse de Bulle, l’autre au sein de l’Eglise évangélique réformée du canton de Fribourg, mais un seul credo : créer pour les jeunes des activités qui rassemblent et encourager ceux qui le désirent à démarrer avec Dieu sur un mode personnel. Nadine Geinoz n’a pas toujours dit cela. « Jusqu’au décès de ma

maman, voilà neuf ans, j’allais à l’église mais j’étais réticente. » La nuit où sa mère vit ses derniers instants, Nadine reçoit une vision : celle d’un homme vêtu de blanc, agenouillé et en pleurs. « J’ai entendu une phrase disant : « Tu vois, je pleure sur les souffrances de ta maman ». C’est à ce moment-là que « c’est devenu important, » comme elle dit. « Jusque-là, j’imaginais Dieu violent, irrespectueux, irresponsable. » D’un point de vue rationnel, son passé a laissé peu de place au bonheur sans nuage. Divorce de ses parents, violences, abus sexuels et tentatives de suicide ont jalonné une enfance difficile. Elle l’évoque aujourd’hui devant les jeunes qu’elle entoure. « Je suis consciente

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d’être un modèle. » Elle dit le pardon qui a pris le pas sur la haine, la paix succédant à la violence avec deux maîtres mots : cohérence et authenticité, « pas faciles à vivre sans l’aide de Dieu » glisse-t-elle. Vie privée et vie professionnelle, Nadine ne marque guère de frontières, sa vie même jouant les instruments de travail. « Je suis une miraculée et j’en témoigne ! » A Bulle, le groupe de jeunes animé par Nadine a démarré avec l’aide d’un collègue il y a trois ans. Il compte aujourd’hui une vingtaine de personnes, des garçons pour la plupart, de 12 à 18 ans. Au programme, rencontres autour de la foi, petites bouffes, sport, camps, soirées film et discussions. « Et de la confiance pour cheminer ensemble avec Dieu », souffle-t-elle. Ce que les jeunes attendent de Dieu ? Du concret. « Ils en ont assez des théories et veulent expérimenter la foi au quotidien. » Comment vivre les couacs scolaires ? Les relations aux parents ? Et les problèmes avec les copains ? Entre eux et à Nadine, c’est de cela qu’ils parlent. « Ils me demandent de prier pour eux, quand ils ne savent pas trop comment s’y prendre. » ✱

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Avec les oubliés de la prospérité

é « j’ai toujours évit de me mettre en avant »

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e temple des Pâquis bourdonne d’un joyeux capharnaüm. Françoise Bourquin passe d’une table jaune à une table bleue, du cours de français qui débute à une petite séance internet un peu plus loin. Ici, tout le monde connaît la frêle silhouette et le visage souriant encadré d’une éternelle frange. Depuis 2001, Françoise Bourquin y travaille dans le cadre d’une Mission Urbaine. Chaque jour, c’est une centaine de personnes vivant dans la précarité qui se rendent au temple des Pâquis, un lieu géré conjointement avec l’association Espace solidaire Pâquis, créé grâce à un appel aux habitants de ce quartier populaire. C’est d’abord bénévolement que Françoise Bourquin s’engage dans l’Eglise protestante. Dans les années septante, cette syndicaliste devient secrétaire au Ministère protestant dans l’Industrie, fondé par le pasteur Gérald Maret. «Nous nous posions les questions de la place de la foi dans la vie quotidienne, et notamment au travail, raconte-t-elle. La question aussi de la justice sociale, de la cohérence de nos engagements avec le message des Evangiles. » Plus tard, lorsque disparaît l’industrie, le ministère s’adapte et accompagne des vendeuses, des secrétaires, des salariés de l’administration. « Dans les années nonante, le chômage a marqué le début d’une période douloureuse. Les gens culpabilisaient et n’osaient pas parler de leur chômage. » Si le ministère se nomme aujourd’hui Evangile et Travail, sa mission n’a pas bougé d’un pouce. Se tenir aux côtés des « oubliés de la prospérité » et cheminer avec les femmes et les hommes qui n’ont pas de travail, « qui n’ont aucune place », précise la diacre. Chaque jour, elle est là pour aiguiller, conseiller, aider, dans une urgence sans cesse renouvelée. « Ma foi, ma force sont alimentées par les paraboles ; j’y trouve l’essentiel pour imaginer des solutions bien concrètes aux problèmes quotidiens, dit-elle. Je tente de vivre un témoignage fait d’actes et d’engagements. » Dans deux ans sonnera l’heure de la retraite, regardée avec sérénité. « Comme je suis très présente depuis longtemps, j’ai toujours évité de me mettre en avant, de trop personnaliser ce travail qui est d’abord celui d’une équipe. C’est pour cela que j’ai déjà transmis la clé du temple. » ✱

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Françoise Bourquin diacre aux Pâquis, Genève

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PARTIR AU CAMEROUN EN FAMILLE 30

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« Nous voulons donner nt du sens à notre engageme chrétien » Agnès et Patrick Thuégaz, Camille, Lucien et Gilles

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ans leur tête et dans leur coeur, tout était prêt. Restaient de multiples détails pratiques à régler sur une liste qui s’allongeait en même temps qu’elle diminuait. Le 18 juillet 2011, Agnès, Patrick et leurs trois enfants se sont envolés pour le Cameroun. Un mandat de deux ans pour le compte de DM-échange et mission emmène cette famille valaisanne à Bafoussam, où Patrick participe à la création d’un poste d’éducation à la citoyenneté. Educateur spécialisé en congé sabbatique, il se réjouit, mais appréhende un peu « de travailler dans un contexte où les droits et les devoirs sont

forcément vécus différemment ». Le couple, installé à Fully, caressait depuis des années le projet d’un grand départ. Pas un voyage ou un bout de tour du monde en touristes : « Nous voulons donner du sens à notre engagement chrétien, nous installer ailleurs, sans nous retrouver en simples consommateurs », explique Agnès. Très engagée dans une paroisse réformée du Valais francophone, elle y travaillait à mi-temps, jusqu’a son départ, tout en suivant des études de théologie à distance. Pour un jour, peutêtre, s’engager dans le pastorat. D’ici là, « me confronter à la manière dont les Camerounais vivent leur foi représente un joli défi ». Leur dossier était déposé à DM-échange et mission quand, il y a un peu plus d’une année, ils ont entendu parler de la création de ce poste.

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« Nous nous étions déjà rendus en Afrique australe, en Guinée, en Casamance, au Mali. Comme notre fille aînée, Camille, est en situation de handicap, il fallait seulement que ce soit un pays francophone. » Educateur de jeunes en institution, Patrick comptait finir l’année scolaire: le timing était donc parfait. « Je suis d’origine catholique, et mon lien avec l’Eglise est plus distant que celui d’Agnès, explique-t-il en toute franchise. Mais nous partageons la même volonté de donner du sens à notre action, de mettre l’humain au centre de nos choix. » Tous deux se sentent portés par leur paroisse qui s’est enthousiasmée pour leur projet. « Un groupe de jeunes viendra sûrement au Cameroun pendant notre séjour, et nous donnerons des nouvelles régulièrement. Nous nous sentons vraiment dans une logique d’échange. » De plus, l’écho de leur départ s’est propagé jusqu’à l’école de leurs enfants et dans les colonnes du journal local. Ce départ est aussi pour eux l’occasion de partager sur la notion même de l’engagement missionnaire, et ce qu’il peut représenter aujourd’hui. Prêts à se laisser surprendre, ils restent modestes dans leurs attentes. « J’espère que nous trouverons notre place et pourrons apporter quelque chose », sourit Patrick. « Que chacun d’entre nous puisse s’épanouir », renchérit Agnès, avant d’ajouter : « Et que nous revenions en bonne santé ! » ✱

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Remercier sans couper les cheveux en quatre

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a vie, elle la voyait en Afrique, quelque part entre la Côte d’Ivoire où elle a grandi et le Togo d’où sa famille est originaire. De nationalité française, Adjovi Prince, coiffeuse, s’est installée à Renens par concours de circonstances. Maman de trois enfants, cette jeune femme dynamique y a ouvert un salon de coiffure. En parallèle, elle s’occupe des actions Terre Nouvelle dans la paroisse évangélique réformée de Chavannes-près-Renens, « ma deuxième famille ; c’est là que j’ai été baptisée ». Vos origines vous ont-elles conduite naturellement vers Terre Nouvelle ? Peut-être ! J’étais assez sceptique, quand on m’a demandé de faire partie du Conseil de paroisse : je ne voyais pas ce que je pourrais y faire. Quand tous les dicastères ont été attribués, il ne restait que moi et le domaine Solidarité élargie. On s’est trouvés mutuellement.

Adjovi Prince coiffeuse et responsable Terre Nouvelle

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Que faites-vous pratiquement ? Mon but consiste à réunir de l’argent pour financer des projets sans que cela coûte à la paroisse. J’ai organisé par exemple un repas togolais. Mais je reçois tant de demandes de soutien d’associations régionales qu’il est impossible de répondre à chacune par l’affirmative, ce qui me rend triste. Quel genre de témoin êtes-vous ? Un témoin reconnaissant. Chaque matin, je remercie Dieu d’être en vie, de respirer, de marcher. En Afrique, comme beaucoup de chrétiens, je remercie Dieu dans tous les événements de la vie. En Europe, c’est un peu différent. Cela passe moins bien, alors je le formule autrement : je dis que je suis reconnaissante.

je « Dieu est bon, et ut rends grâce to le temps ! » A c t e s

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Vous évoquez la foi avec vos clientes ? Je parle de Dieu à qui veut l’entendre, oui ! Je chante des chants de louange à la maison tout en travaillant. Quand on me dit que Dieu est injuste ? Qu’il permet la faim et la guerre ? Je mets cela sur le compte de l’ignorance. Dieu est bon, et je rends grâce tout le temps ! ✱

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Etre chrétien aujourd’hui

De la morale à l’espérance engagée Pierre-Yves Brandt professeur de psychologie de la religion aux universités de Genève et Lausanne.

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ux pasteurs ou diacres qui s’interrogent sur leur rôle à l’égard de la population en général, je dis souvent que, ce que les gens attendent d’eux en les rencontrant, c’est d’avoir en face d’eux « un homme de Dieu » ou une « femme de Dieu ». Et cela n’est pas réservé aux professionnels de l’Eglise mais concerne en fait toute rencontre avec des croyants. Qu’ont-ils à dire par rapport aux questions ultimes de la vie ? D’un représentant de l’Eglise, les gens n’attendent pas d’abord d’excellentes compétences d’animation, de gestion, de soutien social et psychologique ou d’enseignement. Dans nos sociétés modernes, les autorités politiques mettent à disposition de tous, tout spécialement par le biais de l’école, des institutions sociales et des médias, ce qui est nécessaire en matière de services d’aide et d’information. Ce qui ne veut pas dire que les professionnels de l’Eglise peuvent se contenter d’être incompétents dans ces domaines. Mais ce qui est attendu d’eux ne relève pas d’abord de ces compétences. Ce que l’on attend avant tout d’un ministre de l’Eglise, et plus largement de tout fidèle, ce sont le sens qu’il donne à la vie et aux questions existentielles, et son témoignage d’espérance devant la maladie et la mort, par exemple. Un pasteur qui n’ose pas affronter ces questions pour soi-même et les fuit dans l’activisme sera vite repéré comme n’apportant qu’un faible secours face à des problématiques qui semblent tout spécialement de son ressort. Dans nos sociétés pluralistes, où l’Eglise n’a plus la tâche de formuler une vision du monde commune à tous, son rôle n’est plus d’interpréter les événements et de répondre aux interrogations nouvelles sous formes de directives à suivre par l’ensemble de la population : le temps où il s’agissait de prescrire à tous est révolu. Libérée du rôle de conscience morale collective que lui confiait le pouvoir politique, l’Eglise peut en retrouver un plus proche de celui qu’elle jouait à ses origines, c’est-à-dire être prête en tous temps et de différentes manières à rendre compte de son espérance. Néanmoins, il ne s’agit pas là de prosélytisme ; en effet, rendre compte d’une espérance signifie tout d’abord ne pas esquiver l’interpellation suivante, qui concerne chaque croyant : suis-je prêt à rendre compte de mon espérance, si l’on m’interroge quant à mes convictions sur l’avenir, mes choix politiques ou économiques ? Mais rendre

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compte d’une espérance ne se résume pas à être prêt à répondre au moment où je suis questionné ; cela veut aussi dire être prêt à poser des questions aux décideurs, aux responsables politiques, aux chefs d’entreprise, etc., dans la droite ligne de la tradition prophétique présente dans la Bible. Au nom de leur foi, les croyants peuvent être appelés à dénoncer des injustices, inviter leurs concitoyens à se demander comment l’on traite certaines minorités, parler de l’avenir de la paysannerie en Suisse, de l’impact de certains choix sur l’environnement, pour ne prendre que ces exemples. De manière spécifique, la foi chrétienne s’appuie sur un Dieu qui est relation, relation d’amour. La confession de foi en un Dieu trinitaire parle d’une communion en Dieu lui-même, communion qui se traduit dans la vie communautaire, proposée comme modèle pour la vie ensemble au sein de l’Eglise. Cet aspect fondamental de la foi chrétienne vient questionner toute velléité d’individualisme en rappelant que, dans le projet de Dieu, personne ne se suffit à soi-même et toute vie est une vie reçue. Le témoignage chrétien, dans le monde d’aujourd’hui, ne peut manquer de rappeler que nous sommes invités à trouver comment vivre ensemble et rendre la terre habitable. ✱

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n o ti lu o v é r t e é it n r te a Fr en Egypte ion

et miss Daniel Konan pasteur et envoyé DM-échange

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« La présence du a Seigneur ne noust » jamais fait défau

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st-ce que tout va bien ? », « Votre vie n’estelle pas en danger ? », « As-tu des nouvelles de ta famille en Côte d’Ivoire ? » Notre situation durant les premiers mois de 2011 a inquiété pas mal de gens à travers le monde, alors que l’Egypte et mon pays, la Côte d’Ivoire, traversaient des moments difficiles. Cette période a été bouleversante, tragique et pénible. C’était comme si le ciel nous tombait sur la tête. Nous sommes restés enfermés pendant des jours ; à certains moments, nous avons craint le pire : le bruit courait que les étrangers étaient devenus la cible potentielle de certains individus. Les échauffourées dans les rues derrière notre immeuble au centre-ville, non loin de la fameuse place Tahrir, nous ont servi notre dose de fumée de bombes lacrymogènes. Nous vivions barricadés : le jour contre ces fumées « piquantes », et la nuit, contre les éventuels cambrioleurs. De Côte d’Ivoire, les nouvelles n’étaient pas du tout réjouissantes. Des innocents étaient massacrés pour leur appartenance ethnique, idéologique ou religieuse. De certains proches et amis, point de nouvelles jusqu’à ce jour, leur téléphone s’étant tu. Mais en ces temps difficiles, ma famille et moi nous sommes sentis fortifiés. La présence du Seigneur ne nous a jamais fait défaut. Des gens qui ne nous connaissaient pas priaient pour nous chaque jour et demandaient de nos nouvelles, ainsi que celles des membres de la paroisse du Caire et d’Alexandrie. Ces messages touchaient les fidèles, ce lien fort témoignant de notre amour fraternel en Jésus. Un fait m’a marqué pendant la crise : depuis le 25 janvier, nous avions dû annuler toutes les activités de l’Eglise ; dimanche 13 février 2011, deux jours après la chute du régime du président Moubarak, nous nous sommes

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retrouvés à un culte de relance des activités. C’était comme si cela faisait un an que nous ne nous étions pas vus ! L’atmosphère était conviviale, nous étions très heureux de nous retrouver et d’avoir enfin des nouvelles les uns des autres. L’Eglise évangélique du Caire et l’Eglise protestante d’Alexandrie sont deux communautés riches de leurs diversités culturelles et confessionnelles. C’est toujours avec fierté que je rappelle à qui veut l’entendre que l’expérience que nous vivons ici est unique. Nous sommes de passage dans ce pays, comme nous le sommes d’ailleurs sur cette terre. Pendant que nous sommes ici, nous devons donner le meilleur de nous-mêmes pour la gloire du Seigneur, le chef de l’Eglise. Et semer une petite graine d’amour et de fraternité (envers nos frères et sœurs dans la foi comme envers les autres), signe visible du royaume de Dieu. Une vie de partage et de soutien réciproque permet de tisser des liens forts de fraternité en Christ et constitue un ciment d’affermissement, dans l’épreuve comme dans les bons moments. Tous ces facteurs représentent pour moi et les miens une source d’encouragement à aller de l’avant dans notre mission. Dans les temps difficiles, nous nous souvenons des paroles d’exhortation de notre Seigneur Jésus-Christ et de celles de nos devanciers dans le ministère : « Le Seigneur ne nous promet pas une traversée facile,

mais il nous assure une arrivée à bon port ». D’origine ivoirienne, DANIEL KONAN est envoyé par DM-échange et mission en Egypte. Il est pasteur de l’Eglise évangélique du Caire et de l’Eglise protestante d’Alexandrie. Marié à Sara et père de quatre enfants, il est également aumônier à l’Université Senghor et auprès de prisonniers. ✱

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Félix Moser professeur de théologie à l’Université de Neuchâtel

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e m s i t y l é s o r p Vers un i o l a n o b e d A c t e s

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e terme prosélytisme fait assurément partie des mots « épouvantails » ; il effraie. A l’origine pourtant sa définition était moins négative : un prosélyte désignait simplement quelqu’un qui intégrait une communauté religieuse locale. Ce n’est que vers le milieu du XIXe siècle que le mot prend une connota-

tion polémique et dépréciative1 . Aujourd’hui ,cette coloration négative est restée. Non sans de bonne raison, le prosélytisme est associé à l’insistance extrême, à la propagande éhontée, voire à une dangereuse manipulation religieuse. Dans sa version chrétienne, le prosélytisme est condamnable lorsque, dans sa démarche, la fin justifie les moyens. Il est des méthodes de propagande, des formes de séduction, et même des menaces voilées qui sont incompatibles avec une vraie annonce de l’Evangile. Cette manière de vouloir convaincre à tout prix, parfois même de façon agressive, est alors, à juste titre, qualifiée de prosélytisme de mauvais aloi. L’intimidation, sous quelque forme qu’elle soit, fait très mauvais ménage avec la bonne nouvelle de la libération de la peur et de la haine proposée par le Christ. A l’inverse, il existe un prosélytisme de bon aloi2 . Il faut entendre par là une manière intelligente et respectueuse de partager ses idéaux, ses valeurs et sa croyance. Il est possible d’« attester » de sa foi et ainsi de mettre en œuvre une transmission bien comprise. Dans ce contexte, il est bon de rappeler que l’annonce de la bonne nouvelle par les chrétiens est appelée à être véhiculée par les moyens modernes de communication. Ce qui importe, c’est le bon usage de ces moyens qui viseront à proposer une véritable rencontre, basée sur une relation vivante. De fait, le prosélytisme se situe à la croisée de deux libertés : la liberté de conscience et celle de partager ses convictions. La liberté de conscience est fortement ancrée dans nos mentalités modernes et contemporaines. Par moments, elle peut prendre une forme caricaturale. Affirmer, par exemple, que rien ni personne ne peut nous troubler est une illusion ; car chacun de nous est influencé par les milliers de messages qu’il entend et voit tous les jours. De même, prendre la parole ou projeter une image signifie aussi avoir une certaine autorité sur autrui. On ne peut pas ne pas influencer ! De plus, cette liberté de conscience est couplée, dans nos sociétés, avec le sentiment très vif d’avoir droit à sa sphère privée. La croyance et la religion en font partie.

Il demeure vrai que l’acte de foi se déchiffre comme un acte individuel. Personne ne peut croire pour autrui. Néanmoins, la limitation stricte de la religion à la sphère privée est artificielle et fausse : artificielle, parce que, par le biais des médias, notamment télévisuels, la sphère privée, voire la vie intime, est portée massivement à la connaissance de tous ; fausse, du fait que la vie religieuse se déroule également, pour une bonne part, dans la vie publique. Participer ensemble à un rituel de mariage ou de deuil, exprimer ses convictions, que ce soit dans le domaine éthique ou dans la domaine religieux, dire quelles sont nos raisons de croire et d’espérer, voilà autant de paroles qui ouvrent sur la sphère publique et sur le témoignage au meilleur sens du terme. Ainsi, la liberté de partager ses convictions fait partie de toute vie sociale. Cependant, l’épouvantail du prosélytisme de mauvais aloi effarouche aussi les croyants, et en particulier les réformés, dont le signataire de ces lignes fait partie : les protestants préfèrent s’abstenir de dire leur foi plutôt que de tomber dans un témoignage caricatural. Ils veulent toutefois poser un regard réaliste sur la société et le rôle qu’ils ont à y jouer. Or, à ce titre, nous ne pouvons rester indifférents à l’image que les sociologues de la religion nous renvoient.  Même s’ils ne disent pas tout de notre réalité ecclésiale, les chiffres sont révélateurs. La lecture des dernières statistiques nous oblige à repenser la question de l’annonce de l’Evangile et de la socialisation religieuse. Le nombre de personnes déclarant faire partie d’une Eglise réformée est en régression constante, et la fréquentation des églises, qui n’est qu’un indicateur parmi d’autres de la religiosité des fidèles, dévoile un déclin impressionnant. Par exemple, l’ouvrage « La nouvelle Suisse reli-

gieuse » mentionne que la fréquentation hebdomadaire des femmes réformées à l’église « est passée d’environ 25% dans les années 1960 à quelque 3% actuellement »3. Il est difficile d’exprimer sa foi dans la société qui est la nôtre. Mais penser un prosélytisme de bon aloi renvoie finalement à la condition de témoins à laquelle nous sommes appelés, témoins d’une réalité qui dépasse les mots, témoins d’une vie qui excède l’existence forcément imparfaite de ceux et celles qui cherchent à la communiquer. Le succès du film « Des hommes et des dieux », de Xavier Beauvois montre bien que nos contemporains restent fascinés par l’attestation d’une foi incarnée. ✱

Voir Vincente FORTIER, « Le prosélytisme au regard du droit : une liberté sous contrôle », in Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires. http://cerri.revues.org/144

1

2 Philippe Greiner dans une thèse de doctorat soutenue conjointement à l’Université de Paris XI et à l’Institut catholique de Paris, en 2005, distingue entre « prosélytisme de bon aloi et prosélytisme de mauvais aloi ». Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Proselytisme

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3 Martin BAUMANN et Jörg STOLZ (dir.), La nouvelle Suisse religieuse. Risques et chances de sa diversité, trad. Antoine Panchaud, Genève, Labor et Fidès, coll. Religions et modernités, p. 66.

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lus petites, plus pauvres, plus vieilles : ces conclusions des travaux du sociologue des religions Jörg Stolz1 concernant l’avenir des Eglises réformées de Suisse ont traversé nos Eglises comme une tornade et provoquent une salutaire prise de conscience. L’avenir des Eglises en Suisse et en Europe s’annonce plutôt sombre. La désaffection actuelle risque de se poursuivre et même de s’accélérer, avec comme corollaire une diminution des ressources ; il y aura moins de personnes engagées dans les Eglises et moins d’argent. De plus, le vieillissement de la population ne s’arrête pas aux portes des églises, et la relève ne suit pas au même rythme ; dans vingt ans, la moyenne d’âge des fidèles sera vraisemblablement plus élevée qu’aujourd’hui. Dans la toute récente étude du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS 58), les chercheurs se penchent

sur le profil des 64% des personnes interrogées qui disent s’être distancées des Eglises. « Ces distants ne croient pas en rien. Ils disposent de représentations religieuses et spirituelles, mais ces dernières ne jouent pas un rôle important dans leur vie… La plupart sont membres de l’Eglise catholique ou protestante, mais leur appartenance confessionnelle ne leur apparaît pas importante », précise le rapport.

blent pas offrir un terrain favorable au message dont les Eglises sont porteuses. La société est individualiste et nous parlons de vie communautaire ; face aux valeurs hédonistes d’aujourd’hui, nous prônons l’engagement, la fidélité, le décentrement de soi ; là où tout va de plus en plus vite, nous offrons des lieux de silence et de prière ; dans un monde qui valorise la performance,nous parlons d’un Dieu qui accueille sans condition.

Ces différents travaux mettent des mots et des chiffres sur la situation actuelle des Eglises en Suisse et elles lèvent des bouts de voile sur leur évolution future. Même si les Eglises n’ont pas d’emprise sur les grandes tendances qui régissent l’évolution de la société, leur avenir n’est pas une fatalité. Se regarder comme dans un miroir est l’occasion de s’interroger et de réagir. Les tendances majeures qui marquent l’évolution de la société actuelle ne sem-

Peut-être bien que nous, Eglises réformées, sommes vieillissantes. Cependant, nous voulons rester « jeunes » et capables de nous remettre en question, parce que nous croyons que le message dont nous sommes les témoins en vaut la peine. De surcroît, le partager avec ceux qui nous entourent est notre mission.

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Ensemble avec ses vingt-six Eglises membres représentant 2,3 millions de protestants, la Fédération des Eglises

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ssion ? Kristin Rossier vice-présidente de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS), fait le point.

protestantes de Suisse (FEPS) veut « réagir » selon trois axes: D être plus clairs sur ce que nous croyons et renforcer l’identité de nos Eglises ; cela implique de reformuler pour aujourd’hui les fondements de la foi protestante et de trouver des mots, simples – mais pas simplistes – pour communiquer au-delà du public habituel des Eglises. Le projet visant à réintroduire dans nos Eglises un texte de référence – une ou plusieurs confessions de foi – va dans le même sens. Pour les Eglises, il s’agit de mieux cibler leurs offres en fonction des divers besoins des différents groupes de personnes, tout en restant fidèles à la vocation de proclamer l’Evangile par la parole et les actes ; D se rapprocher pour coopérer, s’alléger et faire face ensemble aux défis de l’avenir. Actuellement, le protestantisme suisse

est très morcelé, et il y a un potentiel de synergies à développer. Le processus visant à réviser la Constitution de la FEPS, initié tout récemment, va permettre de repenser les relations entre les Eglises membres, la répartition des tâches et des compétences et les collaborations possibles entre les Eglises cantonales et le niveau suisse. Il sera l’occasion de définir à nouveau la manière dont nous voulons être Eglises ensemble. Sans uniformiser, mais en partageant les richesses et en développant la créativité ; D renforcer le culte. Les cultes hebdomadaires et les cultes spéciaux pour des occasions sortant de l’ordinaire restent notre activité-phare ! C’est lors des cultes dominicaux que la communauté ecclésiale devient visible. Les cultes, notamment les cultes de fêtes ou les services célébrés lors des évènements marquants de la vie, sont le lieu privilégié de la proclamation de l’Evangile, l’occasion de « faire les présentations » et de mettre les gens en relation

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avec Dieu. Les efforts des Eglises vont dans le sens de la diversification des cultes en fonction des circonstances et de l’innovation, tout en renforçant le profil réformé. Il s’agit d’encourager la qualité, de développer la formation à la prédication, d’augmenter les compétences liturgiques, de trouver un langage à la fois compréhensible et beau, qui fasse droit à ce message au fond « indicible » dont nous sommes les témoins. Ce que les Eglises proposent face aux défis du XXIe siècle, c’est d’en faire une occasion de renouveau ! D’en faire une nouvelle occasion de communion et de témoignage. Changer et s’adapter est notre manière protestante de rester fidèles au message dont nous sommes les porteurs, ce message qui, lui, ne change pas. ✱

3 L’avenir des Réformés, Jörg Stolz et Edmée Baillif, Genève. 2011 Die Zukunft der Reformierten, Jörg Stolz und Edmée Baillif, Zürich. 2010.

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Christ nous donne la force de vivrenos responsabili tés de chaque jour.

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uel est le rôle du croyant dans le témoignage ? Un jour quelqu’un a demandé à Mère Teresa ce qu’il fallait faire pour changer le monde. Elle lui a répondu : « Rentre chez toi et aime ta fa-

mille » ! Le témoignage commence avec les siens, dans les relations courtes que nous vivons dans nos familles et nos communautés. C’est là où le Seigneur nous attend. Dans l’Evangile de Jean, en particulier, Jésus insiste sur l’amour réciproque, qu’il considère comme la plus grande force de témoignage : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres, que tous connaîtront que vous êtes mes disciples ». Tout commence donc là où je suis. Et chacun reçoit des dons pour mettre en pratique la responsabilité de témoigner. En approfondissant encore, je dirais que tout commence avec ma réponse à l’appel du Christ. Estce que je l’ai intégré ? Lui suis-je fidèle ? Est-ce que je cherche la volonté de Dieu ? Est-ce que je demande et offre le pardon ? On le voit : témoigner du Christ, ce n’est pas seulement parler de lui, annoncer le mystère pascal, mais avant tout le vivre. D’abord vivre, et parler ensuite. Le monde n’écoute pas les maîtres à penser, mais les témoins d’une vie concrète, où l’on peut percevoir quelque chose de la saveur du style de vie de Jésus, dont l’Evangile nous dit que « partout où il passait,

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Être

témoin

en quatre clés responsable du serHoeggers l’Eg Martin éni lise évangélique dan e sm vice oecum réformée vaudoise.

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il faisait du bien ». Quel rôle peut ou devrait avoir l’Eglise dans son témoignage ? Avant tout revenir aux « quatre traits » de l’Eglise apostolique dans le livre des Actes des apôtres (2,42).


L’enseignement des apôtres. L’Evangile unissait les premiers chrétiens : le témoignage à l’enseignement, la vie, la mort et la résurrection de Jésus. Il s’agit donc d’en revenir à la parole de Dieu, qui est une puissance de Dieu pour le salut. La communion fraternelle. Voilà le deuxième trait de la première Eglise. Ou, si l’on veut utiliser un autre terme, qui se révèle parfois délicat dans son usage, « l’unité ». Une communion fraternelle d’esprit et de cœur, qui se manifeste dans une solidarité : le partage des biens personnels avec les frères et sœurs dans le besoin. La fraction du pain. Dieu, qui est communion en lui-même (dans l’amour qui unit le Père au Fils), se donne à nous, afin que nous vivions dans le partage et la solidarité. D’où l’urgence de chercher une réconciliation entre les chrétiens. Tant que nous ne pourrons pas nous retrouver ensemble autour de la même table, notre témoignage souffrira d’une nuance d’inachèvement. Les prières. Les premiers chrétiens étaient de grands priants. C’était d’ailleurs pendant qu’ils priaient, à la Pentecôte, que l’Esprit saint s’était manifesté. La prière donne la force de discerner la volonté du Christ et pour réaliser la mission qu’il nous confie. Dans la prière, le Christ est présent aujourd’hui, vient au secours des persécutés et leur donne le courage de persévérer. Plus modestement, il nous insuffle la force de vivre nos responsabilités de chaque jour. Comment peut-on répondre à l’individualisme ? Réponse difficile… Je suis tellement pris dans le style de vie individualiste de notre société occidentale que je me demande parfois s’il est possible de m’en dépêtrer. « Une panthère peut-elle changer de

pelage ? » (Jérémie 13, 23). Un Occidental peut-il ne pas être individualiste ? Quand je rencontre des chrétiens d’autres pays, d’Afrique surtout, je réalise combien ma culture a mis en avant l’analyse et le jugement critique. Et les moyens modernes de communication nous conduisent souvent davantage au repli qu’à la rencontre. Comment être témoin, dans un monde individualiste, d’un Evangile bâtisseur de relations ? Pour moi, c’est une attention à renouveler à chaque instant. Si Dieu s’est fait homme, ma relation avec lui passe aussi à travers mon prochain. Je ne peux pas rencontrer Son visage, si je dévisage mon frère. C’est un triangle où tout se tient : Dieu, le prochain et moi. Si je suis assez vigilant pour vivre les relations entre les trois

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sommets de ce triangle, je tiens sans doute un antidote à l’individualisme. Pour surmonter cet individualisme, nous avons besoin d’une conception large de l’Eglise. Avant tout, l’Eglise est communion, communauté mystique autour du Dieu trinitaire. Elle ne peut être définie uniquement de manière juridique et institutionnelle. « Dieu est un Dieu relationnel : il est communion de vie entre le Père, le Fils et le Saint-Esprit. C’est donc dans les relations personnelles qu’on peut le découvrir. C’est dire l’importance des petites communautés de chrétiens, des groupes qui offrent des lieux sécurisés de parole où l’essentiel de la foi et de la vie puisse être dit », dit le document « Vivre et transmettre ensemble l’Evangile »1. Affirmer ses convictions, est-ce faire preuve de prosélytisme ? Oui, si j’affronte les autres dans la logique de : « Tu as tort et j’ai raison ». Non, si je partage mes convictions dans une relation d’amitié, de respect et de dialogue. Méditer sur la vie de Jésus me donne une clé : il a en effet été une personne de dialogue. Il n’était pas un philosophe de salon, mais il marchait sur les routes et se laissait aborder. Il s’intéressait aux personnes, les écoutait, leur posait des questions, n’excluait personne, acceptait de changer d’avis. Parfois, il interpellait les gens et parlait avec une grande conviction de sa vie intérieure et de son dialogue permanent avec celui qu’il appelait Abba (père). Témoigner, c’est aussi partager son expérience spirituelle : après avoir écouté l’autre en lui donnant un grand espace, il s’agit de proposer ce que notre foi dit sur tel sujet, sans rien imposer, sans un soupçon de prosélytisme, uniquement par loyauté envers Dieu et envers nousmêmes et sincérité envers notre prochain. ✱

1 Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud. 2007, p. 16. http://www.ceccv.ch/images/pdf/evangelisation.pdf

Retrouvez le blog de Martin Hoegger sur http://martinhoegger.blog.24heures.ch/ et http://dialogueoecumenique.eerv.ch/

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uelle est la mission de l’Eglise ? Dans la première édition de Témoins aujourd’hui, nous avions publié des extraits des Constitutions des Eglises réformées romandes. On y lisait ainsi certaines tâches comme « annoncer le salut, briser les barrières injustes et être un lieu de réconciliation », « pourvoir à l’instruction et à l’éducation chrétienne des enfants et adolescents », « prendre position en faveur des plus pauvres » ou encore « s’associer au nom de Jésus Christ à toute œuvre d’entraide qui se fonde sur l’amour du prochain ». Vaste programme, non ? Dans les quelques rencontres qui suivent, vous découvrirez des personnes qui travaillent pour l’Eglise. Et aussi pour les autres. Animation jeunesse, oecuménisme, projets Terre Nouvelle : ils mettent leurs talents et leur réseau au service de leurs prochains. Mais comment les Eglises vivent-elles les chambardements actuels, baisse de fréquentation et autre chute libre des dons ? Comment imaginent-elles leur futur, concrètement ? On a tâté le terrain à Neuchâtel et Vaud.


Neuchâtel L’art de rebondir Avez-vous vu passer l’affiche du « pasteur robot » ? Pas bête, cette campagne de recherche de fonds a eu le chic pour rappeler que les visites en EMS, baptême du petit dernier et enterrement de grandmaman ont un coût. Dans une situation économique « tendue », comme la qualifie Gabriel Bader, président du Conseil synodal, l’Eglise réformée évangélique du canton de Neuchâtel (EREN) a eu la mauvaise surprise de se voir lâchée par l’entreprise Philipp Morris, en octobre 2010, avec effets rétroactifs. Résultat : le manque à gagner sur des budgets déjà alloués à été énorme. Cela n’empêche pas Gabriel Bader de rester positif. « On a des comptes équilibrés depuis quatre ans, symbole de l’engagement des paroissiens, vu que l’Etat ne nous finance pas. Et vous savez, une Eglise réduite, plus centralisée, c’est aussi passionnant. On peut faire des choses fantastiques avec une Eglise plus petite ! On le sentiment qu’il faut qu’on abandonne le modèle d’une paroisse par village et penser à des cultes aux couleurs plus distinctes : culte famille, culte social, etc. Il y a aujourd’hui d’autres formes de communautés. » Parmi celles-ci, les « jeunes », qui ont le vent en poupe.

Imaginez plutôt. Dans la paroisse du Joran (qui regroupe cinq communes dans les environs de Cortaillod), quelque quarante catéchumènes vivent une formation donnée en partie par une soixantaine d’ex-catéchumènes entre 16 et 25 ans. Les modules se vivent sous forme de menu avec, à choix, pour un an de caté : deux entrées, deux plats principaux et deux desserts auxquels s’ajoutent deux week-ends et un camp, obligatoires. On y trouve « La crèche se rebelle » (Noël), « La Bible ou la capote » (relations amoureuses), « Jésus est mort, vive Jésus » (Pâques). « Ce plat-là se vit lors d’une nuit blanche, raconte Sandra Conne, 35 ans, animatrice. On visionne deux films en relation avec la Résurrection et on partage autour de ce thème. » Partager, discuter, chercher des réponses : le moteur des rencontres, c’est le plaisir d’être ensemble. « On

part des préoccupations des jeunes pour trouver, ensuite, ce qu’en dit la Bible. » Si les activités jeunesse « boument », elles gravitent en parallèle à la vie des paroisses. « C’est tout à fait normal que des jeunes de cet âge n’aient pas envie d’aller au culte, dit Sandra Conne. L’envie vient après. » Et Sandra d’évoquer les célébrations auxquelles se joignent, effectivement, des jeunes un peu plus âgés impliqués dans la musique ou l’animation. « Plus de la

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moitié des catéchumènes en fin de caté s’inscrivent pour la formation de moniteurs de camp et de caté et rejoignent le groupe des animateurs pour accompagner les plus jeunes. Ils disent que le caté, c’est génial. C’est un sacré témoignage, non ?  » Vaud Du côté de l’Evangile Evangélisation quand tu nous tiens ! Restructuration. Voilà l’un des mots-clé des rapports de l’Eglise évangélique réformée vaudoise (EERV) ces derniers temps. Si le terme a mauvaise presse, comme le relève la présidente du Conseil synodal, c’est parce qu’il va de pair avec « économies à réaliser, suppression de postes… » Mais comme le remarque Esther Gaillard, se restructurer, c’est aussi « se re-

mettre en question, ou plutôt se laisser questionner par le monde et tenter de répondre aux nouveaux défis ». Outre la création de lieux-phares (comme la cathédrale de Lausanne, voir page 12), l’EERV a prévu de travailler sur le thème, délicat pour beaucoup, de l’évangélisation. C’est également le sujet sur lequel a choisi de réfléchir le mouvement Catalyse, composé de laïcs et de ministres. Depuis cinq ans, Catalyse alimente une réflexion poussée sur le rôle et la

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mission de l’Eglise, se définissant comme « un mouvement pour l’Eglise ». Une partie de son travail se retrouve en filigrane dans le Programme de législature 2009-2014 du Conseil synodal en exercice. Si elle n’aime pas parler « d’influence », Sylvie Arnaud, 40 ans, membre de Catalyse, présidente du Conseil régional du Nord vaudois et membre du Synode de l’EERV, préfère dire que Catalyse est « partie prenante » de l’Eglise. Explications. Quelles sont les motivations des membres de Catalyse ? L’envie de faire des choses dans l’Eglise, plutôt que critiquer ce qui s’y fait. Au départ, on a parfois été considéré comme un groupe d’opposition. Dans les faits, nous sommes des gens tournés vers l’action, loyaux à l'institution, même si nous n'avons pas toujours été d’accord avec les décisions des organes synodaux, il est vrai. Quel est le thème sur lequel vous travaillez en ce moment ? L’évangélisation. Un thème que le Synode comptait aborder en 2012-2013. On s’est dit qu’on allait défricher le terrain. On a organisé quatre soirées sur ce


En guise de conclusion thème foisonnant, en réalisant à quel point il y a autant d’avis sur l’évangélisation que de personnes ! C’est un sujet délicat, tabou, face auquel les interlocuteurs ont tendance à se bloquer. C'est une question de positionnement face à la vérité : dire ce dont on est convaincu, en témoigner, cela passe. Etre convaincu de détenir LA vérité, cela pose problème.

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De quelle façon parlezvous d’évangélisation ? En explorant des pistes multiples avec de nombreux intervenants. Nous avons défini quatre champs d’action : la politique, l’espace public, la culture et l’économie. Notre prochaine soirée, le 7 septembre 2011, se déroulera par exemple sous forme de débat réunissant la politicienne Ada Marra, l’éditorialiste Jacques Poget et le cinéaste Lionel Baier. L’évangélisation seraitelle désormais moins taboue ? Ah ! le sujet reste difficile car on est des Vaudois pudiques… Mais évangéliser ne signifie pas uniquement haranguer les foules. La chose commence par soi-même : laisser l’Evangile m’éclairer et animer mes actions. Essayer de l’incarner. Oui, je peux dire que l'Evangile donne à ma vie sa cohérence ! Pour consulter les documents réalisés par l’équipe de Catalyse, allez sur

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ucune recette ou marche à suivre pour être « témoin aujourd’hui ». Mais la rencontre avec des femmes et des hommes traversés par le souffle de l’Esprit. Des témoins qui savent discerner les signes de la présence de Dieu au cœur de leurs histoires de vie. Des tranches d’existence pleine de sens, nourries d’espérance et donnant envie d’y croire aussi. Témoigner de sa vie, c’est s’exposer. C’est dévoiler ses valeurs, ses motivations, ses doutes, ses rêves, ses déceptions, ses joies. C’est prendre le risque d’être jugé ou incompris. Afficher son identité chrétienne aujourd’hui demande du courage. Et ils l’ont eu. Pour partager ce qui les fait vibrer, vivre et continuer à espérer. Merci à eux ! Maillons d’une chaîne infinie, ils nous relient aux premiers témoins de l’Evangile et nous poussent hors de nos limites. Du Cameroun à Malleray, en passant par le Valais, Madagascar, Lausanne, Genève… ils nous entraînent dans les méandres de leurs choix de vies avec leurs circonstances et de leurs questionnements. Tantôt brise légère ou vent impétueux, l’Esprit anime chaque récit de ce recueil. Porteur de vie, il ne se laisse pas enfermer dans un système : vent de liberté, il invite à la confiance. Car témoigner, c’est lâcher prise. Oser être vrai et accepter que je ne suis pas tout. « Paul a planté. Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui fait pousser ». 1 Corinthiens 3.6. Anne-Christine Horton animatrice Terre Nouvelle Eglises réformées Berne-Jura-Soleure

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Les textes et témoignages du document que vous avez entre les mains vous donnent-ils envie d’aller plus loin ? En réponse à ce « comment », il y a bien sûr de multiples moyens que vous pourrez mettre en oeuvre dans les paroisses locales ou encore auprès des Eglises cantonales, notamment grâce au réseau Terre Nouvelle, et directement auprès de DM-échange et mission qui vous propose

DM-échange et mission vous propose 4 affiches - de format A3 - à placer dans votre paroisse, chez vous ou dans un lieu de rencontre. Elles engagent à poser ou se poser des questions sur la foi et l’Evangile.

trois possibilités de témoigner

S’engager et se ❶ former sur le terrain les Témoignsez uns le auTres

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Vous avez trois atouts ? ✱ un métier ✱ une conviction ✱ l’amour du prochain

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A lire : Philippiens 2 v 1-4 M

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Découverte et sensibilisation 4. séjour individuel (2 à 4 mois) 5. voyages et visites de groupes

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Mandats professionnels 1. long terme ( 2 ans et plus ) 2. moyen terme ( 6 à 12 mois ) 3. service civil en Suisse ou à l’étranger ( 6 à 13 mois )

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Pour commander et recevoir gratuitement des affiches, des sets de table et des signets, détachez le coupon contact en dernière page Ou contactez Valérie Maeder à DM-échange et mission, 021 643 73 99 ou animation@dmr.ch

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1. Votre don de temps : être bénévole avec DM-échange et mission. Votre métier, votre passion, votre amour du prochain sont des outils utiles pour DM-échange et mission et pour ceux que vous allez rencontrer. ∆ C’est un don qui construit ! 2. Votre don financier : même modeste, un don financier aide DM-échange et mission à poursuivre sa mission et à encourager le témoignage de l’Evangile. ∆ C’est un don qui fait une différence  !

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DM-échange et mission est financé principalement par des dons privés. Il reçoit aussi des contributions des Eglises protestantes de Suisse, de Pain pour le prochain ou d’ organismes publics.

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3. Votre don de foi : en priant pour DM-échange et mission et ceux que nous aidons. ∆ Nous croyons à la force de la prière

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A lire : Philippiens 2 v 1-4

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Témoins aujourd’hui 2011:

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Vous connaissez des gens étonnants, de ceux dont la foi transporte les montagnes ou presque ? Si vous avez envie de voir leur portrait dans notre prochain Témoins aujourd’hui,

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Témoignez les uns les autres r le monde - un peu, beaucoup nge cha t fon s elle qu’ dit se on t Il y a des personnes don naissez ? Si oui, et que vous avez con en s Vou nt. age our enc é nit ma et dont la foi et l’hu nnées! de nous donner leur nom et coordo rci me , loin s plu tre naî con re fai envie de les de participer à notre prochain Nous nous assurerons de leur envie re coup de pouce ! Témoins aujourd’hui. Merci pour vot

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