Il pourra toujours dire que c’est pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman création au Festival d’Avignon IN 2018 production : Les Bancs Publics © Christophe Raynaud de Lage
extraits de presse 2017-2018 LES CS BAN LiCS PUB
SOMMAIRE Les Rencontres à l’échelle - 12e édition - novembre 2017
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Productions des Bancs Publics : Tram 83 — Julie Kretzschmar
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Pourama pourama — Gurshad Shaheman
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Il pourra toujours dire que c’est pour l’amour du prophète — Gurshad Shaheman
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Les Rencontres à l’échelle 2017 douzième édition
Pays : France Périodicité : Parution Irrégulière
Elle 09/2017
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Date : 01 SEPT 17 Page de l'article : p.4,6,8 Journaliste : NATHANIA C
Pa
MARSEILLE
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Pourquoi on aime Parce que I ancienne
manufacture de tabacs œuvre depu s 1992 a diffuser et prodi) redu spectacle I Onyest comme dans un village avec des rues des espaces varies (La Cartonnene les Plateaux la Tour Panorama pour les expos les studios J e t le vaste resto des Grandes Tables On adore le toit terrasse au coucher du soleil On reserve pour Les Rencontres a I échelle festival plu id seminaire
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porte par les Bancs Publ cs autour des thermes des migrât ans de la memoire de la langue et de Marseille Du 15 au 26 novembre 18 € 41 nas Job n Marseilles- Tel 0495049595 laffiche org
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Pourquoi on aime Pour le Vieux Port
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carnets de I ethnologue Philippe Geslm On reserve pour«Tableaud une execution » piece du dramaturge anglais Howard Baker mise en scene par Claudia Stav sky On y côtoie une peintre ven tenne du XVI siecle en bute au pouvoir politique Du 23 au 26 novembre 25 € 30 quai de Rive Neuve Marseille T Tel 0496178000 theatre-locnee com
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la provence 13/11/2017
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ventilo 15/11/2017
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la marseillaise 21/11/2017
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la marseillaise 25/11/2017
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la provence 30/11/2017
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mouvement 28/11/2017
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Transaction de Mithkal Alzgair, © Didier Nadeau.
Critiques Danse
Sans sépulture Aux Rencontres à l’échelle, Mithkal Alzghair, chorégraphe syrien réfugié en France, créait Transaction. Une oraison funèbre à ces corps laissés sans sépulture et en proie à l’instrumentalisation médiatique comme à la propagande politique. Par Claire Astier
Tournée vers le pourtour méditerranéen, l’équipe des Rencontres à l’échelle à Marseille, pratique depuis douze ans la géographie d’une production et d’une diffusion théâtrales dont les enjeux se sont déplacés : la professionnalisation d’une partie de la scène du Maghreb et du Moyen-Orient se construit en Europe en raison des conflits et situations d’oppression, de censure et de violences politiques subis par cette région. Réunir en un lieu physique des artistes provenant de pays tiers, pour certains réfugiés en Europe, se révèle parfois ardu et produit des situations étranges : l’impossibilité pour certains d’entrer en Europe pour participer à l’une des créations du festival tandis que la Commission Européenne cofinance une partie de ses programmes de coopération ! Ce cadre et ses contraintes fonctionnent comme le premier lieu du travail et de l’énonciation des idées et transforme aussi les formes de l’art. C’est ce qu’explique le chorégraphe Mithkal Alzghair qui s’est formé au sein d’e.x.e.r.c.e à Montpellier en septembre 2011, quelques mois après la révolution, prémices de la guerre en Syrie : « J’ai été obligé de rester ici. Ce n’était pas mon choix de finir mes études et de retourner en Syrie car j’avais envie d’aller partout et d’être libre. Mais c’est encore une autre situation de ne plus pouvoir retourner là-bas et d’avoir des nouveaux papiers : tu es maintenant réfugié et donc malgré toi tu te retrouves inclus dans cette situation politique. Et peut-être que tout ça a influencé mon travail. » Sa dernière pièce Transaction est née des premières images de la guerre dans les médias : l’urgence de la situation a imposé aux populations civiles de s’abstenir de toute ritualisation funèbre pour leurs morts, qui ainsi exposés sont devenus objets médiatiques et outils de propagande. « Cette exposition a transformé les corps en morceaux de viande. Et en même temps il y avait une nécessité aussi de montrer des images pour que le monde vienne et fasse quelque chose » commente le chorégraphe. De quelle manière ces corps pouvaient-ils être transposés sur scène et comment les évoquer ? Comment faire de la danse dans cette situation ? Transaction est l’espace de l’oraison funèbre, un temps à ce point dilaté qu’il fait perdre toute notion de durée ou de rythme dramaturgique. Les quatre interprètes sont liés par couple à un système de filins et de poulies raccordés dans les cintres, ce qui les engage dans des relations de dépendance liées au poids et contrepoids de leurs corps. En jouant sur les corps « morts » et ceux qui liés à eux les maintiennent en suspension, Mithkal Alzghair sculpte la posture du corps démembré, passif, rendu à sa nature même. Les danseurs apparaissent en flottaison, détourés et extraits d’un régime des images qui les a étourdis et noyés ou peut-être en vol dans le champ d’une explosion sans fin. Noma Omran, l’une des quatre interprètes qui est aussi chanteuse lyrique, a composé une partition vocale à partir d’une traduction arabe de l’Apocalypse de Jean. Son chant est soutenu par les incursions et chœurs des ses trois complices. Du souffle au son, la complainte repose sur les gémissements des corps : peur, souffrance, angoisse désespoir mais aussi jouissance et délivrance se succèdent et participent des signes structurants de la pièce. Allégorie des liens que nous avons avec les présences toujours actives de ceux qui nous ont quittés, la mort s’étend et devient un espace transitoire et vaste, composée des équilibres et des dépendances entre les vivants et leurs défunts (lesquels maintiennent les autres en vie ?). Mithkal Alzghair continue d’entremêler dans l’épaisseur des gestes, différentes strates, un procédé que soutenait aussi avec brio Déplacements, sa précédente création. L’évocation narrative s’hybride d’un propos sur la danse, sa géographie et ses exercices, ce qui remet le corps dans ses problématiques nodales : se construire avec et face à. Néanmoins il semble que Transaction soit prise dans des contradictions qui font obstacles à la justesse de la pièce. Le manque de maîtrise de jeu et des techniques de voltige est problématique (mais il est peut-être lié à la jeunesse de la création), car les mouvements en vol si minimaux soient-ils ne supportent justement pas l’approximation. Enfin la tentative de mettre en espace la suspension du temps et de chercher ses moments d’équilibre s’accommode mal d’un format enjoint par la durée moyenne d’une pièce de théâtre. Composée de séquences de gestes et déplacements formant de boucles qui se répètent et évoluent, Transaction saurait mieux se frotter à un espace ouvert aux déambulations du public, à l’immersion, sans début, ni fin. C’est d’ailleurs l’ambition de Mithkal Alzghair qui reconnaît que la couleur de la pièce commence seulement à se trouver et qu’il faudra encore du travail pour parvenir à la maîtrise complète : « Je pense que ça c’est bien aussi quand tu vois l’objet lorsqu’il peut se développer. Parce qu’après la perfection, il y a la mort .» > Transaction de Mithkal Akzghair a été créé les 23 et 24 novembre aux Rencontres à l’échelle, Bancs publics, Marseille
TRAM 83 Cie l’orpheline est une épine dans le pied
KINSHASA
le potentiel 7 juin 2017
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LE FESTIVAL « ÇA SE PASSE À KIN » PRÉSENTE LE ROMAN «TRAM 83 »
Publié aux éditions de Métailié, le roman de Fiston Mwanza Mujila est une partition, les mots comme autant de notes, qui brassent théâtre et poésie, et pulsent au rythme d’une ville-pays, quelque part en Afrique centrale… Le roman sera présenté ce jeudi 8 juin à la Halle de la Gombe. Œuvre de l’écrivain Fiston Mwamba Mujila, le roman « Tram 83 » sera présenté, ce jeudi 8 juin à l’Institut français, à Gombe, à l’occasion du Festival « Ça se passe à Kin ». Plusieurs autres activités sont prévues à l’espace Bilembo (Complexe UTEX), au Centre Wallonie-Bruxelles, à la Halle de la Gombe, à la résidence de Kathryn… C’est le cas, entre autres, de l’«Histoire générale des murs » mise en scène d’Israël Tshipamba et une production du Tarmac des Auteurs et du Théâtre des Elfes. Publié aux éditions de Métailié, «Tram 83 » est une partition, les mots comme autant de notes, qui brassent théâtre et poésie, et pulsent au rythme d’une ville-pays, quelque part en Afrique centrale, où s’agglutine une faune fiévreuse, sans hier ni après-demain, avide de plaisirs et de fric faciles. « Tu ne couches pas, on te couche. Tu ne manges pas, on te mange. Tu ne bousilles pas, on te bousille. Ici le Nouveau Monde. Ici, chacun pour soi, la merde pour tous. Ici, la jungle».
Au centre du tableau, le « Tram 83 » donne le ton et le tempo. Un bar-bordel brûlant et sombre comme un chaudron de sorcière où macèrent désirs et cauchemars, échos de la misère, de la guerre et de la barbarie environnantes. Tout le monde s’y presse pour boire, baiser et oublier : « filles aux seins-grosses-tomates », « canetons » de moins de 16 ans, ou « femmes-sans-âge » de plus de 40, fonctionnaires « trimbalant de nombreux mois de non-paiement », étudiants grévistes, « creuseurs » des mines de diamant, « touristes à but lucratif » et autres affairistes, vendeurs d’organes, enfants-soldats, serveuses et aides-serveuses... Fiston Mwanza Mujila, poète et dramaturge, né à Lubumbashi en 1981, qui signe ici son premier roman, joue sur l’accumulation, multiplie les énumérations, donnant un effet de trop-plein, de débordement, de sauve-quipeut-la-vie. Il orchestre ainsi de manière éblouissante cette valse des corps au bord du précipice, opposant deux attitudes extrêmes, celle de Requiem, magouilleur et profiteur cynique, et celle de Lucien, apprenti écrivain idéaliste. Il met son geste en abyme en particulier à travers ce second personnage, qui rêve de sauver le monde par l’écriture, improvise un soir une lecture de son « théâtre-conte » et se retrouve le lendemain avec dix-sept points de suture. Belle ironie pour un roman qui réussit pourtant – et avec quelle énergie ! – une formidable démonstration de la puissance de la littérature. Bienvenu Ipan
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8eme art été 2017
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Theatre du blog 18 juillet 2017
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FESTIVAL D’AVIGNON — Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila, adaptation et mise en lecture de Julie Kretzschmar, dans le cadre de Ça va ça va le monde !, cycle de lectures organisé par Radio-France Internationale
chair fraîche et éditeur qui lui propose de le publier dans sa collection Train du bonheur, à condition qu’il réduise son texte à dix personnages, et qu’il évite de parler de la misère : « On en a assez de la misère dans la littérature africaine (…) »
« Au commencement était la pierre, et la pierre provoqua la possession, et la possession, la ruée… », ainsi l’auteur dénonce-t-il le système marchand qui s’est emparé de la planète, notamment de la villepays Lubumbashi. Depuis la gare du Nord à Paris, le texte nous entraîne au Congo, vers une autre ligne de chemin de fer construite, symbole de la colonisation, dans le sillage du voyage de l’explorateur Stanley.
Tirer une heure de lecture radiophonique de ce texte poétique et imagé, buissonnant de digressions était une gageure, qu’ont pourtant réussie la metteuse en scène et ses comédiens : Astrid Bayiha, Christophe Grégoire et Moanda Daddy Kamono, accompagnés des plages de musique bien dosées, composées et interprétées par Aurélien Arnoux. Nous les retrouverons dans une création plus ample, avec une plus nombreuse distribution, aux prochaines Francophonies de Limoges.
Constitué de récits enchâssés et d’allers et retours entre Afrique et Europe, ce premier roman du dramaturge congolais, adapté ici pour la scène, brosse le portrait de la capitale minière, par le biais d’un lieu central symbolique, le Tram 83. À la fois boîte de nuit et bordel cosmopolite où déboulent « creuseurs » en mal de sexe, touristes occidentaux, étudiants ou hommes d’affaires de tous horizons. Là, Lucien, tout juste débarqué de l’arrière-pays pour échapper aux polices politiques, s’accroche à son stylo, au milieu du tumulte et se retrouve dans les bras d’une fille « aux seins-grosses-tomates ». « Je suis la reine de la nuit, dit-elle, et sans moi le tram est une succursale des rêves broyés. » Il y côtoie Requiem, son ex-pote, et Malingeau, amateur de
L’auteur, qui vit en Autriche, nous offre « un théâtreconte qui traite de ce pays dans une perspective historique » d’une grande complexité, avec un portrait onirique et réaliste d’une Afrique contemporaine bouillonnante de vie. « Pourquoi, reproche Requiem à Lucien, tu t’entêtes à rêver à un monde possible ? » C’est pourtant ce que fait Fiston Mwanza Mujila, avec ce voyage halluciné et drôle dans la langue et l’énergie de son pays réinventé. À lire, à entendre, ou à voir. Mireille Davidovici Tram 83 sera créé le 22 septembre aux Francophonies en Limousin, à Limoges.
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le figaro 15 septembre 2017
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l’humanité 18/09/2017
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Julie Kretzschmar : « Sur scène, je questionne la construction de mon imaginaire africain »
THEÂTRE. Entretien avec Julie Kretzschmar qui, avec son adaptation pour la scène de « Tram 83 » du Congolais Fiston Mwanza Mujila, offre un regard original et décalé sur cette Afrique tant « fantasmée ». Étudiants en grève permanente, mineurs interdits de creuser, jeunes et vieilles travailleuses du sexe, touristes décadents... Dans Tram 83 (Métailié, 2014), premier roman du Congolais Fiston Mwanza Mujila récompensé par de nombreux prix, la guerre qui fait rage dans l’arrièrepays s’exprime à travers un foisonnement de créatures sans horizon. Sans autre joie que le jazz, la bière et les plaisirs faciles qu’ils consomment dans le lieu hybride qui donne son titre au livre. Un cabaret-bordel qui, comme dans Jazz et vin de palme (1982) d’Emmanuel Dongala ou Verre cassé (2005) d’Alain Mabanckou, est un carrefour de récits baroques. Metteuse en scène installée à Marseille où elle dirige le festival Les Rencontres à l’échelle, Julie Kretzschmar s’empare de cette matière foisonnante dans son dernier spectacle créé lors des Francophonies en Limousin. Comme le roman, la pièce s’ouvre sur l’arrivée de Lucien (Charles Alain Kouadjo Ouitin) dans la Ville-Pays, où il est accueilli par un ancien ami au nom funeste : Requiem, alias le Négus (Daddy Kamono). Entre deux magouilles, ce personnage aux intentions douteuses le conduit au Tram 83, dont la clientèle hétéroclite est incarnée sur le plateau par Astrid Bayiha, Lorry Hardel, Christophe
Grégoire et Daddy Kamono. Accompagnés par le guitariste Aurélien Arnoux, ils portent l’écriture fragmentaire et musicale de Fiston Mwanza Mujila telle que l’a reçue Julie Kretzschmar. Non en un ballet orgiaque, comme on aurait pu l’imaginer, mais en une sobre succession de scènes teintées d’absurde. Cela sans éviter certains clichés liés à la représentation de l’Afrique, qui mettent en question la place de l’Occidental dans le continent. La nature et le rôle de son regard, forcément héritier d’une histoire encore douloureuse. La metteuse en scène s’est confiée au Point Afrique sur le cheminement emprunté pour la création de cette œuvre qui vaut le détour. Le Point Afrique : La mise en scène est pour vous une pratique intimement liée au voyage. Tram 83 est cependant votre premier projet lié à l’Afrique subsaharienne. Comment y êtes-vous arrivée ? Julie Kretzschmar : Lorsque je me suis installée à Marseille, j’ai commencé à beaucoup travailler en Algérie. Notamment avec le dramaturge Mustapha Benfodil, dont j’ai adapté le roman Archéologie d’un chaos (amoureux) (Al Dante, 2012) pour en donner des lectures à Marseille et en Algérie en 2010, avant de créer l’année suivante De mon hublot utérin je te salue humanité et te dis blablabla
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cie associée au théâtre des Salins à Martigues. J’ai ensuite travaillé avec Kamel Daoud, avec l’auteur comorien Alain Kamal
effet, du fait de la nécessité de l’invention et du questionnement de chaque mot, qui apporte une rare fraîcheur dans le champ littéraire francophone. J’apprécie aussi beaucoup le caractère très cinématographique du roman, composé d’une succession de scènes qui pourraient être celles d’un film. Le fait que l’auteur ait écrit son livre depuis l’Autriche a été important pour moi : cette distance partagée par rapport à l’Afrique m’a permis d’entrer en dialogue avec le texte et de faire vivre mon imaginaire à travers lui. Dans le roman, le récit à la troisième personne avance avec la démarche titubante des alcooliques auxquels il s’attache, parasité par de nombreuses voix qui donnent au récit une dimension chorale. Vous avez choisi de confier une grande partie de cette narration à Christophe Grégoire, le seul comédien blanc de votre distribution. Pourquoi ?
Martial et le conteur du même pays Salim Hatubou. Pour « Marseille-Provence 2013 – Capitale européenne de la culture », j’ai créé Kara » une épopée comorienne à partir d’un de ses textes – ou encore avec Jean-Luc Raharimanana. C’est avec ma lecture de Congo (Actes Sud, 2012) d’Éric Vuillard en 2013 que j’ai commencé à aborder l’Afrique subsaharienne. Français, l’auteur y relate le partage de l’Afrique par les puissances coloniales lors de la conférence de Berlin en 1885. Avec Tram 83, j’aborde le continent à partir d’un autre point de vue. D’une autre langue. Une langue très singulière, empreinte d’une oralité dont on a peu l’habitude sur les scènes françaises. Adapter Tram 83 est-il pour vous une manière de bouleverser le paysage théâtral ? Dans ma rencontre avec une écriture, j’aime être bousculée. L’œuvre de Fiston Mwanza Mujila m’a fait cet
Pour adapter l’hybride Tram 83, deux possibilités s’offraient à moi : transformer la narration à la troisième personne en dialogue, et donc procéder à un travail de réécriture, ou introduire un personnage de narrateur. La seconde option s’est dessinée d’elle-même, lors d’une résidence de recherche aux Récréatrales à Ouagadougou en 2016. Christophe, qui n’était jamais allé en Afrique, s’est progressivement chargé de la narration, tout en assumant le rôle de l’éditeur suisse Ferdinand Malingeau. Un vieil habitué du Tram 83, aussi alcoolique et dépravé que les protagonistes du cru, et douteux dans son rapport aux auteurs qu’il prétend publier. Il devenait ainsi un personnage caricatural portant de multiples figures de présences blanches en Afrique, aussi bien passées que présentes, et mettait en avant l’identité de l’équipe de création. Ce qui m’importe dans chacune de mes pièces ayant trait à d’autres cultures, surtout du Sud. Européens et blancs, nous ne pouvons pas représenter l’Afrique sans questionner notre imaginaire. La manière dont il a été construit, et dont nous pouvons le transformer. Sur scène, je questionne la construction de mon imaginaire africain. Anaïs Heluin
* Tram 83, du 10 au 12 janvier 2018 au Théâtre national La Criée à Marseille (13), les 21 et 22 mars au Théâtre de la Vignette à Montpellier (34), le 25 mars au Théâtre Jean Vilar à Vitry-sur-Seine (94), du 27 au 30 mars au Tarmac à Paris (75), en avril 2018 au Théâtre du Bois de l’Aune à Aix-en-Provence (13).
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theatre contemporain 20 septembre 2017
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ENTRETIEN ENTRE MARIE-AGNÈS SEVESTRE, DIRECTRICE DU FESTIVAL LES FRANCOPHONIES EN LIMOUSIN ET LA METTEURE EN SCÈNE JULIE KRETZSCHMAR, SEPTEMBRE 2017. Copiez et collez ce lien dans votre navigateur : http://www.theatre-video.net/video/Entretien-avec-Julie-Kretzschmar-pour-Tram-83-34e-Francophonies-en-Limousin?autostart
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RFI 29/09/2017
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«Tram 83», la Ville-Pays des rêves brisés de Fiston Mwanza Mujila Par Siegfried Forster
«Tram 83», création théâtrale du roman de Fiston Mwanza Mujila au Festival des francophonies en Limousin. Mise en scène: Julie Kretzschmar. © Christophe Péan
Quand des mots renaissent au théâtre. Tram 83, le premier roman de Fiston Mwanza Mujila, multi-primé et déjà traduit dans une demi-douzaine de langues, vient d’être créé sur scène au Festival des francophonies en Limousin. L’auteur congolais a confié son histoire à la metteure en scène Julie Kretzschmar pour en faire une histoire captivante rythmée par des mots, des danses et des musiques de cette Ville-Pays imaginée par Mujila. Un hommage à la démesure de sa ville natale, la capitale minière du Congo, Lubumbashi, transformé en conte universel. « Au commencement était la pierre. » Des lettres blanches sur fond rouge renvoient à la source de toutes les richesses, la mine de l’Espérance. Et la nuit, les creuseurs en manque d’amour et les maîtres des manœuvres malhonnêtes, mais aussi les étudiants et les bohémiens du quartier, se retrouvent au bar Tram 83, au cœur de la Ville-Pays. Est-ce que cela fait peur de mettre en scène une Ville-Pays ? La Ville-Pays, une langue mise en scène « Avant de mettre en scène une Ville-Pays, je mets en scène une langue, avance Julie Kretzschmar. Cette Ville-Pays n’existe qu’avec des mots, la poésie, une pensée, du geste littéraire. Et j’ai assez vite compris que c’était, en partie, une ville de l’ordre de l’intime pour Fiston, sa ville natale, Lubumbashi. Mais c’est aussi une ville imaginaire. Et cela ne me fait pas peur de plonger dans l’imaginaire. »
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RFI 29/09/2017
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Pour faire naître cet univers, Kretzschmar a simplement mis sur scène un mur en tôle ondulée. C’est tout. Rien d’autre. Pour imposer la force de l’unicité temporelle et géographique du théâtre. C’est de là qu’on va évoquer les différents endroits du roman. Un long mur presque aussi panoramique et cinématographique comme le roman. Il sert à la fois comme ligne de démarcation, écran de projection, chaussetrappe des magouilleurs et bar du beau monde et des prostituées. Et avec la merveilleuse figure d’une diva réduite à faire du bruitage, Kretzschmar a même réussi à garder une certaine nostalgie du roman. « Oui, je reconnais mes personnages dans cette adaptation de Tram 83 » Le Tram 83, ce maquis africain, est le rendez-vous incontournable dans la Ville-Pays dont on découvre très vite son côté succursale de rêves brisés. Fiston Mwanza Mujila a-t-il reconnu sur scène son texte, ses mots, sa Ville-Pays dans cette mise en scène très colorée et voluptueuse de Julie Kretzschmar ? « Il y a une certaine prise de liberté et prise de risques de la part de Julie, remarque l’auteur congolais, avant d’ajouter : Ce qui m’a plu, c’est cette ambiguïté entre d’une part de s’attacher au corps du texte et d’autre part cette liberté, poésie et extravagance. Oui, je reconnais mon texte et mes personnages dans cette adaptation. » L’histoire raconte le destin de deux hommes : Lucien est en cavale pour échapper à la police politique, mais il a gardé l’espoir que le geste littéraire a encore de la valeur dans un monde cassé. En revanche, Requiem a échangé ses illusions contre le confort et les profits en tant que profiteurs cyniques. Bien qu’ancré dans la réalité d’une Afrique fantasmée, il s’agit de personnages universels : « Cette histoire n’est pas propre au Congo. C’est la question de la littérature : un petit geste souterrain méprisé peut-il encore avoir une place ? Requiem est un personnage qui annonce le monde dans lequel on est en train de basculer. C’est quelqu’un qui était à l’université, qui était brillant, et qui a basculé dans le monde de l’argent qui domine le monde. Requiem dit lui-même qu’il a tout perdu. »
Tram 83, création théâtrale du roman de Fiston Mwanza Mujila au Festival des Francophonies en Limousin. Mise en scène : Julie Kretzschmar. © Christophe Péan
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RFI 29/09/2017
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« Les Congolais peuvent s’y reconnaître, mais aussi tout être humain » L’auteur Fiston Mwanzea Mujila souligne également l’université de son roman : « Le Tram 83 pourrait être aussi considéré comme un roman autrichien ou allemand. Je l’ai écrit quand je vivais en Allemagne et en Autriche. Je ne crois pas que ce soit seulement un roman congolais ou africain. C’est un roman tout court. C’est un roman qui interroge l’homme, l’humanité. Et à travers ces personnages, non seulement les Congolais peuvent se reconnaître, mais tout être humain. » Qu’est-ce qui se passe dans la tête d’un auteur quand les mots jadis difficilement couchés sur papier s’envolent soudainement pour renaître dans les bouches des comédiens ? Ou quand l’univers de la Ville-Pays laborieusement construit sur des pages et des pages devient tout d’un coup une réalité incarnée par des humains ? « À ce moment, j’ai le sentiment que le texte arrive à son final, à sa célébration. La célébration du texte passe par sa lecture, par sa mise en scène, par son adaptation. » « C’est impossible de porter cette langue sans le corps » Sur scène, la musique et la danse – de la conga en passant par le topolo et le merenge jusqu’au coupé-décalé - jouent un rôle primordial. Ils racontent l’histoire de la musique au Congo, confie Julie Kretzschmar : « La musique prend en charge l’humour du livre. » Et les mouvements des corps traversent les histoires musicales : « C’est impossible de porter cette langue sans le corps qui est emporté par la langue. » Une mise en scène très rythmée, sans perturber l’auteur de la pièce qui y voit plutôt une ressemblance avec son concept d’un pont entre la langue et le corps : « Moi, j’avais envie de ressortir le corps par la langue, d’exposer le corps par la langue. Ce sont des personnages qui sont bavards, qui ont à dire et à cracher le monde, à expurger les démons en eux. Mais Tram 83 est un essai de variation. Le thème de la variation est beaucoup utilisé dans le domaine musical, particulièrement dans le jazz. Tram 83 est une variation sur l’existence humaine, une comédie humaine. J’essaie de jouer avec l’existence, le monde, la vie, une réalité, la réalité de la mine. »
La metteure en scène Julie Kretzschmar au Festival des Francophonies en Limousin. © Christophe Péan
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
les inrocks janvier 2016
production les bancs publics
Les meilleurs spectacles 2015 selon la rédaction par Hervé Pons 1. Het Hamiltoncomplex mise en scène Lies Pauwels 2. Des arbres à abattre mise en scène Krystian Lupa 3. Richard III mise en scène Thomas Ostermeier 4. Antoine et Cléopâtre mise en scène Tiago Rodrigues 5. Pourama Pourama mise en scène Gurshad Shaheman Epopée intime, épique, initiatique et familiale du Franco-Iranien, qui démêle et retisse les liens entre petite et grande histoire.
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
production les bancs publics
les lettres franรงaises mai 2016
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
production les bancs publics
théâtre(s) été 2017
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
Relikto
6/10/2017
production les bancs publics
ENTRER DANS L’HISTOIRE DE GURSHAD SHAHEMAN
C’est à une longue traversée dans le temps et dans l’espace qu’invite Gurshad Shaheman dans Pourama Pourama. C’est aussi drôle que bouleversant. A voir encore vendredi 6 et samedi 7 octobre au CDN de Normandie Rouen. Le spectacle se termine avec un des plus beaux airs d’opéra, Casta Diva issu de Norma, une partition de Vincenzo Bellini. Et Norma, c’est une histoire de passion amoureuse et aussi de non-dits. Comme celle de Gurshad Shaheman. Avec cette musique, le comédien, artiste associé au CDN de Normandie Rouen, fait un résumé de sa vie et boucle les premiers chapitres. De la passion amoureuse, l’histoire de Gurshad Shaheman en est traversée. Le comédien se souvient de ses amants. Ceux avec qui il partageait un amour sincère. Et ceux avec qui les rapports étaient tarifés. Des non-dits, il y en a plus encore. Dans la famille de ce garçon né en Iran, certaines choses ne se nomment pas. D’autres sont cachées. Tout cela marque profondément autant l’esprit que le corps d’un adolescent en quête d’identité. Dans Pourama Pourama, interprété vendredi 6 et samedi 7 octobre au théâtre des DeuxRives à Rouen, Gurshad Shaheman raconte sa vie. En trois actes. Comme une tragédie. C’est un récit très intime raconté d’une voix profonde. Tout au long de cette pièce, entre théâtre et performance, le comédien invité à entrer dans cette histoire bouleversante, empreinte d’un humour très fin. Lui qui a manqué d’affection de la part d’un père très froid demande au public de venir près de lui et de le toucher sur l’air de Touch Me de Samantha Fox, titre de la première partie. Sinon, « à défaut de contact physique, cette performance s’arrêtera dans une minute ». Acte II : Taste me est consacré à la figure de la mère. Là, les spectateurs partagent un repas iranien cuisiné par Gurshad Shaheman. Enfin, dans Trade Me, voilà le performeur dans un espace aux cloisons translucides, telle une chambre, un endroit idéal pour se confier. Il se souvient de cette vie au rythme effréné pendant laquelle le sexe n’était pas seulement synonyme de plaisir. Pourama Pourama est une expérience théâtrale. On est vite emmené dans ce voyage sans concession, happé par une langue captivante et une performance étonnante.
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
production les bancs publics
les inrocks
septembre 2016
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
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les inrocks
septembre 2016
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
la grande parade 24/11/2016
production les bancs publics
Gurshad Shaheman : un inoubliable voyage sensoriel aux racines de l’intime Écrit par Julie Cadilhac le lundi 24 octobre 2016
Nous sommes à la croisée du théâtre et de la performance. Le triptyque “Touch Me”, “Taste Me”, “Trade Me”, fruit de plusieurs années d’écriture et de recherche, s’est joué d’abord par morceaux. Quatre heures trente de spectacle s’annoncent. Appréhension. Pourtant, lorsque la lumière se rallume à la fin, comme lorsque l’on prend congé d’une belle rencontre, on serait bien resté davantage en compagnie du captivant Gurshad Shaheman qui nous regarde dans les yeux! Sa voix le précède. Empreinte de sensualité et de légèreté grave. Touch Me. Gurshad Shaheman évoque la figure paternelle, empêtrée dans des représentations masculines archaïques et une pudeur telle qu’elle désoriente et blesse l’enfant qui témoigne et l’adulte qui se souvient: “ Des lèvres qui n’embrassent rien d’autre que du vide.” Ce manque de masculin sera une quête perpétuelle. La suite des volets confirme cette analyse psychanalytique, même si elle n’est qu’une lecture à laquelle on ne peut pas seulement réduire ce passionnant travail introspectif et artistique.
“Les effusions de sentiments lui sont insupportables. Je le vois qui arpente la place. A la perspective de l’étreinte imminente, son corps se crispe. (...) Son corps a parlé pour lui, malgré lui.” Une voix off (qui n’est autre que celle du comédien) nous propulse naturellement à Téhéran. Si Gurshad est physiquement présent sur le plateau, il n’existe pour l’instant que dans les mots du souvenir et le contact que lui offrent les spectateurs. L’évocation de ce père qui “supervise des chantiers à la frontière irakienne” s’opère en parallèle de la mise en place des réalités politiques et militaires de l’Iran.
“La guerre est une donnée parmi d’autres. (...) Tant qu’elle ronronne, on vaque à nos occupations.”
“L’Iran avant la Révolution m’apparaît comme un paradis perdu.(...) Je ne comprends pas pourquoi mes parents ont tant oeuvré à abolir cette fête.” Taste Me se focalise sur la figure maternelle, aux rêves brisés par la contraction d’un mariage à l’âge de dix-huit ans et l’Histoire de son pays natal soumis à un régime totalitaire et islamiste radical. Gurshad cuisine tandis que la voix off poursuit son récit autobiographique. Tandis que les papilles se délectent des saveurs du plat préparé, on entend le quotidien d’un enfant bercé par des musiques orientales et françaises, l’on découvre les transgressions à la loi opérées dans l’intimité des maisons et s’invitent de nouveaux personnages dans la poursuite d’une adolescence moins préservée...jusqu’à l’anecdote finale avec Jean-Louis, en guise de dessert, qui dérange nos estomacs.
“Pour ma mère, les humiliations d’ici-bas sont bien plus importantes que les menaces de l’au-delà.” Trade Me. L’on se concentre maintenant davantage sur le produit des deux identités précédemment décrites. Qu’est Gurshad au sortir de l’adolescence? Une somme complexe de désirs contraires, d’ambitions peu définies et contrariées. Dans ce volet, on perçoit d’abord la teneur tragique de la fatalité : nous sommes le résultat contingent d’un vécu sur lequel nous n’avons eu, nous n’avons et nous n’aurons jamais de prise. De ce bagage affectif, culturel, historique, social et familial, nous tirons un moi aussi multiple que balotté. Celui de Gurshad, déraciné et s’opposant plus ou moins consciemment à la figure du père, se noie dans les amours tarifiés, se renie dans une passivité décisionnelle et s’efface dans des étreintes d’amants éphémères. Les mots savamment choisis évitent le vulgaire et le sordide, ne font percevoir qu’un cri étouffé. Conclusion et aboutissement d’une époque. Le chemin à parcourir ne fait que commencer, l’individu poursuit sa construction...La fin annonce une rédemp
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
la grande parade 24/11/2016
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tion, une sublimation, une transcendance. Que l’on constate puisqu’on est au centre d’un dispositif artistique. Plutôt que d’utiliser “le rituel des larmes”, l’individu a choisi d’autres armes pour se protéger de l’absurdité et des douleurs de l’existence.
“Je ne suis que la coupe dans laquelle tu ne bois que le nectar de la faute.” Si le premier volet se vit pour le spectateur avec une bienveillance complice et attentive face à un performer qui partage avec lui ses photographies et ses anecdotes du passé, déjà l’on perçoit la réelle volonté de cette géniale mise en scène de nous impliquer...pour mieux nous embarquer, titiller au plus haut notre empathie, secouer nos représentations et nos clichés, nous faire glisser progressivement dans le rôle d’un spectateur-acteur qui touche Gurshad pour réactiver ses souvenirs, qui se laisse séduire par sa démarche chaloupée, ses moues séductrices et son regard de braise et qui aura envie de traverser le rideau de perles... Oui, Gurshad Shaheman n’est pas qu’un écrivain talentueux, aux mots aussi poignants que percutants, aux im-
ages au pouvoir voyageur et à la capacité de faire renaître des mondes disparus. C’est également un interprète au charisme troublant. Lorsqu’il est vêtu d’une robe de femme pour cuisiner et servir le repas, sa sensualité enveloppante et espiègle déstabilise. Sa capacité à toucher le public est impressionnante : chaque spectateur volontaire - ou désigné par le hasard - devient malgré lui un élément sensible dans cette quête de lui-même. Cette pièce en trois actes est à applaudir également pour ses divers dispositifs : les accompagnements sonores choisis, flirtant souvent avec l’intimité feutrée d’une lumière tamisée, sont particulièrement pertinents . La scénographie s’adapte à la perfection à l’ambiance désirée. Dans “Trade me”, ce carré-alcôve, pans de tissus que caressent des rideaux de perles roses, assorti de lumières savantes, suffit à exacerber les sens ; le fait de deviner ce qui se trame, en transparence, crée le trouble chez le spectateur qui, tétanisé à l’idée d’être désigné au début du processus, souhaiterait vivement y entrer ensuite. Brillante métaphore technique qui crée la frustration et rappelle sans doute à quel point la vie est loin d’être limpide. “Pourama, Pourama” est le récit d’un être déraciné et en proie à de multiples culpabilités qui ont tissé une toile dans laquelle le prisonnier n’oppose pas de résistance. Au fur et à mesure des volets, Gurshad nous fait réaliser l’importance de la sensorialité et du charnel dans notre construction personnelle...Nous sommes faits des caresses de nos parents, de nos amants, des plats que nous mangeons, des frissons qui nous parcourent et lui qui a ressenti la fragilité de l’existence au coeur de la menace de la guerre exprime peut-être avec plus de vécu et donc d’acuité cette urgence de vivre malgré tout. De sentir et de ressentir. Au gré donc de multiples expériences sensorielles partagées ( toucher, manger, écouter, boire), cette pièce nous invite à la fois avec douceur et sans tabou à un voyage autobiographique où l’on est placé au centre du dispositif. Une autopsie à coeur ouvert où l’émotion de l’Histoire se vit au travers de la lucarne d’une destinée individuelle. Un témoignage à la portée stomacale simple comme le refrain d’une chanson de Samantha Fox, de François Feldman ou de Patricia Kaas. On concluera par une phrase de l’auteur-interprète : “Il y a des visages qu’on n’oublie pas”. Celui de Gurshad en fera partie désormais.
“Cela me prendra des années de prendre le contrôle de mon corps.”
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
inferno 27/10/2016
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« POURAMA, POURAMA » : GURSHAD SHAHEMAN, UN IRANIEN HORS-FRONTIERES AU FESTIVAL DES ARTS DE BORDEAUX Publié par infernolaredaction le 27 octobre 2016
Dire que « Pourama Pourama » est un choc serait affadir la nature même de « l’expérience » vécue. Double expérience que celle proposée à La Manufacture dans le cadre du Festival des Arts de Bordeaux. Celle vécue par celui qui, quatre heures et demie durant, remet en jeu l’itinéraire de son enfance iranienne gâtée par les circonstances historiques jusqu’à son exil tourmenté en France, sans rien taire de l’intime mêlé à la grande Histoire. Mais aussi celle vécue par le spectateur – la dénomination est ici inappropriée – entièrement happé et qui est invité à entrer physiquement et mentalement dans l’histoire autofictionnelle de Gurshad Shaheman dont la voix profonde, mise en relief par un micro amplificateur d’émotions, fait effet de philtre envoûtant. En trois actes – comme dans la tragédie – le performeur au charme troublant (en jean et T-shirt ou en petite robe noire, bas résilles et escarpins) nous convie à le suivre jusqu’au bout de la nuit des archives livrées par sa mémoire. Une expérience en live de cette recherche du temps perdu qui ne peut laisser sur la rive. D’abord Touch me (Acte I), au titre évocateur, se présente comme la recherche de souvenirs épars, « supportés » par quelques photos émergeant progressivement des ténèbres de la mémoire où elles s’étaient lovées. Plongé d’abord dans un noir total, on entend ce petit garçon devenu depuis adulte nous confier : « Je remonte les années… Je suis enfermé dans mon corps d’enfant, celui de la honte, celui qu’il faut faire taire… J’ai quatre ans. Mon père est parti sur la frontière irakienne. Je vis avec la guerre. Je me vois au pied de la machine à coudre de ma mère. Je suis une poupée pour mes cou-
sines. Pénuries de nourriture, alertes qui nous précipitent dans les abris, coupures d’eau. Mais moi je ne souffre pas de cela, ma vie est heureuse dans ce gynécée ». Puis, de sa voix chaude, il égrène les moments heureux de sa prime enfance, où sa jeune mère de vingt-trois ans, cheveux sans foulard, l’emmenait dans sa voiture sur les hauteurs de Téhéran, là où « les gardiens de la révolution ne montaient pas si haut ». Et puis, sa voix se trouble. Son père ingénieur revient du front. Les rires se taisent, le silence les remplace ; les légos de construction effacent la machine à coudre ; les disques « légers » de sa mère, relégués au placard, laissent place aux vinyles de moustachus à barbe affectionnés par le père. L’Iran d’avant la révolution lui apparaît alors comme un paradis perdu… Pause sur images sonores. Sur le refrain des chants révolutionnaires, nous sommes invités à boire un verre… Puis le récit reprend. La mémoire se fait plus
haletante, plus chaotique mêlant plusieurs périodes. Se détache celle où son père l’emmène avec lui sur le front… Sa mère lui manque. Son père lui interdit les pleurs. Nuit de cauchemar dans les containers sans lumière. Soleil harassant des après-midis. Obus qui traversent le ciel dans un sifflement strident. Et ce père qui le confie inconsidérément au gardien… L’interdit le plus lourd pèse sur la nudité. Aucun moment de tendresse, ne serait-ce qu’un simple contact entre les peaux du père et du fils. Touch me, en lettres géantes, apparaît, accompagné du commentaire « A défaut de contact physique, cette performance s’arrête dans une minute ». Tour à tour, l’un d’entre nous répondra à cette invitation de « toucher » le performeur, comme si ce contact corporel (le bras, le pied, la tête…) était le baume qui réparait ce qui avait fait défaut à l’enfance.
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
inferno 27/10/2016
production les bancs publics
Le récit reprend… Raclées données par son père à l’adolescence, ce corps qu’il faut contraindre et surtout ne pas montrer. « Ma pisse, ma merde, mes larmes, n’ont pas le droit de couler… Rien ne doit sortir par le haut du corps, comme rien ne doit entrer par le bas… Grosse inflammation « à six heures »… Je fais fonctionner mon corps dans les deux sens. Je suis libre… ». Projection de mots chargés d’une intensité émotionnelle à fleur de peau, projection de photos de l’enfant tenant une mitraillette et de l’adolescent au corps gracile. Eclats brisés de mémoire vive.
maintenant dans l’espace des représentations de la Manufacture, la salle où sont donnés habituellement les spectacles. Mais là le dispositif n’est pas frontal, ce n’est en effet pas de « spectacle » dont il s’agit mais d’une expérience d’une autre nature qui se poursuit. Répartis autour de l’espace central occupé par une « pièce » dont les cloisons, en partie translucides, sont constituées de tentures orientales jouant avec le montré-caché, nous avons vue sur cette backroom dans laquelle le performeur va collectionner les rencontres masculines. Maelstrom de désirs à fleur de peau…
Taste me (Acte II). Nous nous sommes maintenant transportés dans le grand hall de cette ancienne Manufacture de Chaussures transformé pour l’occasion en salle à manger. Assis par petits groupes derrière des tables basses, nous sommes conviés à goûter une spécialité iranienne préparée devant nous par Gurshad, et arrosé de vins servis par lui. Dans une petite robe noire seyante et chaussé d’escarpins (la tenue de sa mère à qui est dédié ce repas), tout en nous informant des rituels culinaires de son pays, il nous parle de la figure centrale de cette mère, contrainte à abandonner ses ambitions universitaires du fait de la nouvelle constitution iranienne basée sur la charia. Il nous confie son attachement à elle et sa méprise à lui sur le sens des paroles d’une chanson de Patricia Kaas qui passait en boucle (les hommes qui passent… pour un mois, pour un an), entendues comme « pourama, pourama » (titre donné au spectacle). Cette mère qu’il affectionnait tant – et la réciproque était tout aussi vraie – qu’il en épousa les désirs jusqu’à se laisser, lui, troublé par la beauté d’un steward auquel elle n’était pas insensible. Par la suite – il a à peine quatorze ans – il tombera amoureux de Jean-Louis, l’amant de sa mère au sexe amputé, qui l’initiera au plaisir des caresses.
Xavier, pour lequel il abandonne les bras d’une fille, Xavier et les affres de la jalousie. Pierre, l’homme aux voitures de luxe. Le deuil d’un grand amour, celui de Xavier, l’annonce d’un départ… Et puis, à Cannes où il vient d’être reçu au concours d’art dramatique, la rencontre d’Hassan, le choc… Jusque-là les frontières de son intimité étaient préservées : le français était la langue de la drogue et des clients tarifés, l’iranien celle de son enfance. Tout s’effondrait d’un coup, le passé remontait à la surface comme le surgissement dans sa vie présente de quelque chose pouvant s’apparenter à la violence du retour du refoulé… Les plaies du torse de ce jeune soldat iranien tué qu’il faut laver avant de l’ensevelir… Les amants défilent, leurs voix solitaires résonnent dans sa nuit… Les insanités d’usage… Tout s’entremêle.
Trade me (Acte III). Autre déplacement exigé par le commerce de soi. On est
Et puis Julien, le RG amoureux… Hassan à nouveau… Hassan et les immenses yeux verts de sa femme qui l’ont reconnu lui, Gurshad, comme « sa rivale » dans la villa luxueuse des hauteurs de Cannes où il a été convié par son amant… Une villa payée avec les pétrodollars et les diamants cousus dans les manteaux de la première diaspora ayant fui le régime du Chah… Raffinement de la cuisine iranienne, parfums capiteux et violence des sentiments… Et puis Sébastien, qui a honte de sa nudité d’infirme… Son téléphone est devenu un outil d’asservissement… Le
chantage à nouveau d’Hassan, sa brutalité physique et morale… Un petit monsieur timide, comme une marionnette de bois flotté, sa bouche contre la sienne, le goût d’une écorce morte… Six années plus tard, l’appel d’Hassan pour dire combien la chair fraîche est bon marché en Iran où il est retourné après son divorce… Une autre rencontre… Ses démons semblent s’être endormis… La déesse veille sur son sommeil. Nous participons totalement à cette épopée effrénée où le sexe est tout à la fois objet de plaisir et d’asservissement. En effet chacun ayant reçu un numéro aux portes de la salle, se voit invité à rejoindre le performeur dans sa backroom pour peu que son numéro s’affiche. Au début on retient son souffle, espérant ne pas être désigné par le sort, très vite on souhaite ardemment l’inverse… Des jokers sont accordés pour pouvoir, même sans numéro gagnant, tenter l’expérience. Ces trois actes successifs constituent une expérience unique qui immerge dans les strates et plis secrets d’un homme-artiste-écrivain-performeur hors norme qui conjugue l’exigence d’un travail théâtral pensé dans ses moindres détails (rien n’est laissé au hasard, les lumières, les sons, la scénographie de Mathieu LorryDupuy qui abolit les limites entre l’acteur et les spectateurs) à celle d’une langue d’une pureté envoûtante. Happé par ce voyage sans concession au pays d’une enfance iranienne marquée par la guerre, l’amour d’une mère, la froideur d’un père, voyage suivi d’une installation en France où les amours tarifés dans la backroom sont partagés sans tabou, chacun est pénétré par l’authenticité de cette expérience vécue aux confins de l’intime et de l’universel. Un moment d’exception à la rencontre d’une vérité sans fard. Yves Kafka
crédits photos : Anne-Sophie Popon
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Pourama pourama Gurshad Shaheman
i/o gazette 25/05/2017
production les bancs publics
« (...) au bouleversant Pourama Pourama de Gurshad Shaheman — véritable coup de cœur de ce festival — une performance autobiographique de 4h30 où le public est invité à entendre, toucher, boire, manger, sentir, pour une communion au plus près de l’intime d’un acteur iranien que la France a adopté et que le théâtre a sauvé de ses démons. Parfaitement sublime. » Youssef Ghali, à propos du festival Passages, Metz, mai 2017.
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Zibeline 10/02/2018
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La Friche ajoute un point d’interrogation au thème de MP2018, Quel amour ?
L’amour en Friche • 14 février 2018 au 18 février 2018 •
La Friche décline le thème de MP2018 sur tous les tons, mais avec un point d’interrogation. Quel amour ? va-t-on se demander en débats, concerts, expositions et spectacles. Cela commencera comme ailleurs avec le bal des enfants, mais le premier week-end surtout sera trépidant, avec un concert d’ouverture le 16 février disco avec Corine, puis house et électro avec Mad Ray, Lil’ Louis, Terence Parker et Jack Ollins ; suivi le 17 par la création de Manu Théron et du saxophoniste Edmond Hosdikian, A-mor, dont on avait eu un aperçu généreux et passionnant lors des journées d’ouverture du Module du GMEM ; puis la Nuit éprouvée de d’Agata prendra le relais jusqu’au matin, en particulier au Gyptis avec la projection de White Nose. Alphabetville, Lieux Fictifs et Les Bancs publics proposeront une friche plus philosophique, avec une table ronde et un spectacle autour de Michel Foucault, la lecture par Liliane Giraudon de sa pièce L’amour est plus froid que le lac, Spectrographies, un film d’art qui arpente les « non-lieux inhabités ». Les enfants pourront questionner aussi l’amour grâce à la Cie Skappa programmée par le Massalia (voir pages suivantes), et la jeunesse contemplera son image grâce à l’expo collective Jeunes-générations, rassemblant les œuvres sur l’adolescence de 15 photographes lauréats de la commande du CNAP (Centre National des Arts Plastiques, jusqu’au 3 juin). 11 comédiens emmenés par François Cervantes liront des textes sur l’amour « incandescents et stupéfiants », et c’est Stéphane Belmondo qui clôturera le week-end le 18, un concert gratuit proposé par Marseille jazz des 5 continents.
Il pourra toujours dire que c’est Les inrocks pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 21/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Les inrocks pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 21/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Le Monde pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 13/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Le Monde pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 13/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Le Figaro pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 13/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Le Figaro pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 13/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Mouvement pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 26/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Politis pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 26/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est sceneweb pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 12/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Inferno Magazine pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 14/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est Inferno Magazine pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 14/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est La Croix pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 18/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est La Croix pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 18/07/2018 production les bancs publics
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Il pourra toujours dire que c’est TV5Monde pour l’amour du prophète Gurshad Shaheman 31/07/2018 production les bancs publics
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