LIEUX PARALLÈLES :
LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 01 - Théorie et recherches
UN PROJET DE MATTÉO LECURU MASTER DESIGN GLOBAL, RECHERCHES ET INNOVATIONS Promotion 2014 - 2015
LIEUX PARALLÈLES : LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 01 - Théorie et recherches Projet de mémoire de fin d’études placé sous la direction de Gilles Lebars et Tiphaine Kazi-Tani. Écoles de Condé 2014 - 2015 Paris
Mes remerciements vont à :
TIPHAINE KAZI-TANI PASCALE SIVIERI JEAN-JACQUES LECURU CÉCILE BARANI GILLES LEBARS MARC BARANI CHRISTIAN BARANI
Sommaire
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SOMMAIRE Remerciements - p. 4 Sommaire p. 6
INTRODUCTION Enjeux et problématiques - p. 7 p. 10
L’IMAGE DE LA VILLE ET SES COMPOSANTES. L’homme et la ville - p. 12 L’espace convergent et l’espace divergent - p. 14 La limite et la continuité - p. 18 Le point de repère - p. 28 Du lieu à l’espace - p. 34 p. 37
LA MUTATION DE L’ESPACE PUBLIC La mobilité, une nouvelle réalité urbaine - p. 38 Un vide programmé - p. 52 Les lieux parallèles - p. 58 p. 61
LES MOYENS D’UNE RÉAPPROPRIATION CITADINE La mutation - p. 62 La temporalité - p. 68 p. 75
CONCLUSION Lieux parallèles : réserve de proximité, réserve d’immédiateté - p. 76 Bibliographie - p. 78 Expositions - p. 79 Iconographie - p. 80
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Introduction - Enjeux et problématiques
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
INTRODUCTION La ville instaurée par un discours urbanistique dominé par la circulation, définit une double production d’espace : d’un côté, il y a une surproduction de rues, de passerelles, de viaducs, définis comme des espaces propres et rationnels ; de l’autre, ces réseaux croisés, composés de fragments de trajectoires, forment des altérations d’espaces : ils définissent un contre-emplacement ou «non-lieu» : «Si un lieu peut se définir comme identitaire, relationnel et historique, un espace qui ne peut se définir ni comme identitaire ni comme relationnel ni comme historique définira un non-lieu». Cette dualité signe peu à peu l’éloignement de l’échelle intermédiaire entre l’individu et la mégastructure. En réduisant l’écart entre les mégalopoles, elle signe, peu à peu, la disparition de l’espace matériel, géographique et local. La rue est là, non comme un lieu de socialisation, de rassemblement de communauté ou de groupe, mais comme une addition d’individus aux faibles attaches locales qui se trouvent construits et interpellés par ce modèle spatial. Néanmoins il s’agira, dans cette recherche, de définir ces espaces comme une opportunité, le point du juste équilibre entre la ville, son infrastructure, et le local, le citadin : «le sens du lieu, la liberté du non-lieu».
Marc Augé «Non-Lieu, Introduction à une anthropologie de la surmodernité», Seuil, p. 100.
Marc Augé, «Pour une anthropologie des mondes contemporains», Aubier, p. 175.
ENJEUX ET PROBLÉMATIQUES Les délaissés, les rebus sont issus d’une surproduction fonctionnaliste de la ville, d’un développement et d’un étalement urbain. Ces espaces apparaissent aujourd’hui comme des lieux d’exclusions, de ruptures ou d’interdits. Insérés au sein même de nos villes, ils ne sont plus en adéquation avec le quartier qu’ils desservent. Pourtant, face aux mutations constantes de l’espace public, ils représentent la possibilité, pour le citadin, d’être investi spontanément et de tisser de nouveaux liens sociaux, économiques ou culturels.
DÉLAISSÉS, MAIS INDISSOCIABLES DE TISSU URBAIN, CES «ESPACES DISPONIBLES» PEUVENT-ILS OFFRIR L’OPPORTUNITÉ D’UNE RÉAPPROPRIATION CITADINE ? OU ENRICHIR ET APPORTER AU RÉSEAU PIÉTON, UNE NOUVELLE PERCEPTION, UNE NOUVELLE IDENTITÉ À LEUR QUARTIER ?
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L’IMAGE DE LA VILLE ET SES COMPOSANTES. L’homme et la ville L’espace convergent et l’espace divergent La limite et la continuité Le point de repère Du lieu à l’espace
L’image de la ville et ses composantes
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L’IMAGE DE LA VILLE ET SES COMPOSANTES. Cette première partie tente d’examiner différents composants de la ville, en étudiant leur perception, leur organisation mentale et physique. Notons d’abord une qualité visuelle particulière : une clarté apparente ou «lisibilité» du paysage urbain qui conditionne l’identité, l’organisation et la structure d’un espace caractérisé par ce que nomme Kevin Lynch "l’imagibilité" : «(…) pour un objet physique, la qualité grâce à laquelle il a de grandes chances de provoquer une forte image chez n’importe quel observateur. C’est cette forme, cette couleur ou cette disposition, qui facilitent la création d’images mentales de l’environnement vivement identifié, puissamment structurées et d’une grande utilité.»
Selon Marc Augé, «l’organisation de l’espace et la constitution de lieux sont, à l’intérieur d’un même groupe social, l’un des enjeux et l’une des modalités des pratiques collectives et individuelles.» Selon l’anthropologue, les collectivités, comme les individus, ont besoin simultanément de penser l’identité et la relation, et, pour ce faire, de symboliser dans l’espace les constituants de «l’identité partagée», de «l’identité particulière» et de «l’identité singulière». Ainsi, le traitement de l’espace passerait par les signes les plus visibles, les plus institués, et les plus reconnus, ils dessineraient simultanément le lieu, et le définiraient comme lieu commun.
Cette «image» suppose alors différents attributs, une identité singulière : comment le lieu, l’objet se distinguent-ils de leur environnement ? Elle prend aussi en compte la relation qu’entretient un lieu avec ses usagers et son environnement : quelles sont les propriétés et les qualités de cette relation ?
Kevin Lynch «L’image de la cité», Édition Dunod, p. 11.
Marc Augé «Non-Lieu, Introduction à une anthropologie de la surmodernité», Édition Seuil, p. 67.
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L’image de la ville et ses composantes - L’homme et la ville
L’HOMME ET LA VILLE «La volonté de voir la ville a précédé les moyens de la satisfaire. Les peintures médiévales ou renaissantes figuraient la cité vue en perspective par un oeil qui pourtant n’avait encore jamais existé. Elles inventaient à la fois le survol de la ville et le panorama qu’il rendait possible. Cette fiction muait déjà le spectateur médiéval en oeil céleste.» Les architectes de la renaissance apportent un changement considérable dans la manière de traiter l’espace public. Les places et les rues sont au centre de l’organisation de la vie urbaine. Leurs formations font apparaître des qualités d’espaces ouverts, aérés, la ville est structurée dans son entier.
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En effet, elle est historiquement le coeur de la ville, dont les enjeux d’origine étaient de favoriser la sociabilité. L’agora grecque, le forum romain, tous deux se définissent comme le théâtre de la démocratie, espace public ouvert à la prise de parole, à l’échange, au mélange. Un aspect quotidien et pratique y prime. Bien plus qu’un lieu de manifestation ou de fête, elle a un rôle essentiel dans l’organisation des perceptions et du mouvement pédestre : C’est un point central qui permet au piéton de s’orienter et de se repérer dans une ville.
L’homme, le citadin se présentent comme l’élément central de toutes les visions. Sa vue est intimement liée à la compréhension globale de l’architecture et de la ville, on assiste à une réelle «mise en scène» architecturale. La perspective est alors mise au point, à la fois en tant qu’outil d’édification, mais aussi comme outil de vision, elle se présente comme «l’outil interface» entre l’homme et son cadre de vie : un phénomène spatial et social organisé. Grâce à la perspective, les architectes ont oeuvré à la mise en accord de l’espace physique : le corps, la vue et de l’espace symbolique : la ville, ses rues, ses édifices. On s’aperçoit que la place publique joue un rôle fondamental, c’est un repère visuel et physique, un point de référence. Ce schéma révèle les organisations morphologiques du centre ancien de Florence. La composition du tissu urbain permet, lors des circulations pédestres, d’offrir des points de vue soigneusement calculés sur les bâtiments. Ainsi, ce système de scénographie symbolique intègre et rattache tous les monuments publics entre eux.
Michel de Certeau «L’invention du Quotidien, 1. Art de faire» Édition Folio essais, p. 140.
Point de vue Parcours
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L’image de la ville et ses composantes - L’espace de convergence et de divergence
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L’ESPACE DE CONVERGENCE ET DE DIVERGENCE Tel un amphithéâtre, La Piazza Del Campo, principale place publique en Toscane, propose une morphologie qui amène au regroupement et à l’observation. En effet, sa géométrie «convergente» est constituée par toutes les rues et l’orientation des architectures qui amènent à la pratiquer. Une fois en son centre, elle offre un point de vue à 360°, un espace «divergent», un lieu d’observation sur ce qui la forme, son décor : la ville. Son étendue permet au piéton de garder une visibilité sur les lieux plus reculés, les places avoisinantes, les églises et tous les éléments en hauteur offrant des points d’orientation, des repères. Cette composition de lieu de vie est alors comparable à un dispositif théâtral, une succession de lieux correctement mis en scène, permettant une clarté du tissu urbain, et optimise les points d’observations sur les édifices qui l’a composent.
La forme, l’inclinaison et les dimensions de la Place Del Campo à Sienne nous rappellent le théâtre antique. C’est une caractéristique intéressante, car le théâtre, de son étymologie «theatron», est d’abord le lieu ou l’on regarde. Il désigne à la fois l’assemblée réunie en ce lieu pour assister à un événement, et la nature même de son activité : «theatron», dérive du verbe «theaomai» qui signifie voir et contempler.
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L’image de la ville et ses composantes - L’espace de convergence et de divergence
«La Cité Idéale» Panneaux d’Urbino, Anonymes. Entre 1480 et 1490.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
«Le Palio de Sienne» («Palio delle Contrade»), Italie. Une course de chevaux se tient deux fois par an dans la ville de Sienne, sur la Piazza del Campo.
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L’image de la ville et ses composantes - La limite et la continuité
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LA LIMITE ET LA CONTINUITÉ En 1962, un archéologue anglais découvre en Anatolie une ville nommée Çatal Höyük, apparue 6500 ans avant Jésus-Christ. Elle a la particularité d’être constituée d’une multitude de petites maisons agglutinées les unes aux autres, sans aucune rue intermédiaire ni aucun passage, seules des cours divisent le tissu urbain. Les habitations étaient couronnées de toits en terrasse par lesquels les habitants se déplaçaient. Ils pénétraient dans les bâtiments par une ouverture à la verticale, grâce à des échelles en bois disposées contre les murs. Bien sûr, le contexte d’Asie Mineure à cette époque et Çatal Höyük n’est plus un site isolé, les villes sans rue sont généralement le fruit de la sédentarisation de peuplade nomade ou troglodytes qui, par souci de sécurité et selon leurs besoins de déplacements, ont fait surgir ces premières cités. Néanmoins, elles introduisent à cette notion de continuité, de connexion morphologique entre les bâtiments et questionnent sur les limites surfaciques agissantes ici comme coutures entre deux espaces. Car si cette ville est pensée pour être impénétrable depuis l’extérieur, ses circulations intérieures n’en sont pas moins optimisées pour faciliter tout contact entre les habitants.
Les circulations internes de la ville révèlent une grande fluidité des déplacements. C’est un maillage organique et naturel qui transforme une multitude de bâtiments en un ensemble cohérent et uni.
Plan en élévation Circulations internes de Çatal Höyük
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L’image de la ville et ses composantes - La limite et la continuité
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LES LIMITES Les limites sont des éléments linéaires, des frontières entre deux zones. Elles forment généralement une rupture : rivages, tranchés de voies ferrées, limites d’extensions, trottoirs ou murs. Cet élément peut intervenir comme référence latérale plutôt que d’axes ou de coordonnées. Elles peuvent prendre la forme d’une barrière, plus ou moins franchissable, qui isole ou séparent un lieu d’un autre. Ces éléments de limites sont prédominants dans l’espace urbain, ils jouent un rôle important dans l’organisation des lieux : ils portent en eux la fonction de fonder et d’articuler les espaces ; on parle alors de délimitation. Michel de Certeau évoque la délimitation comme une opération fondamentale sur les lieux, il y aurait lieu quand il y a délimitation : «{…} C’est la partition de l’espace qui le structure. Tout renvoie en effet à cette différenciation qui permet les jeux d’espaces. Depuis la distinction qui sépare de son extériorité un sujet jusqu’aux découpages localisant des objets, depuis l’habitat {…}, et dans le fonctionnement du réseau urbain comme en celui du paysage rural, il n’est pas de spécialité que n’organise la détermination de frontière.» Les limites perçues parfois négativement dans l’espace urbain - comme des interruptions circulatoires ou des barrières infranchissables - peuvent être tracées par les points de rencontre entre les appropriations progressives et les déplacements successifs des usagers. Elles font en effet, ressortir le signe d’une «distribution dynamique des biens et des fonctions possibles», pour constituer un réseau de différenciations, «une combinatoire d’espace». La limite serait alors une articulation, un élément nécessaire à l’espacement, l’espace du jeu, du rythme, la marque d’une transition.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. Arts de faire» Édition Folio essais, p. 181.
«DOGVILLE», LARS VON TRIER - 2003 Pour mettre en scène le film «Dogville», Lars Von Trier utilise un univers minimal, comparable à un dispositif théâtral. Seuls quelques murs et objets sont disposés sur scène, le reste du décor consiste en un tracé au sol, des contours de pièces, de maisons et de rues, tous orientées vers un extérieur plongé dans un noir infini. Fonctionnant dans le champ narratif d’un discours, on reconnait la fonction première de cette délimitation : d’un décor privé de tout contexte géographique, elle autorise et permet l’établissement des déplacements. On assiste ici à un basculement d’un lieu géographiquement indéfini, vers un espace mental et symbolique. Cette projection de frontière transforme ainsi un lieu en un quadrillage dynamique, un espace scénique apparait et constitue la forme physique de la narration.
Schémas issus du film «Dogville». Lars Von Trier 2003
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L’image de la ville et ses composantes - La limite et la continuité
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LA CONTINUITÉ Un élément continu peut amener à concevoir ou à renforcer des espaces de vie, pensée comme un principe architectural ou matérialisé au sol, une forme de continuité peut être source de symbiose entre habitants et habitat, quartier et activités de proximité. Une continuité urbaine peut être traduite sous la forme d’homogénéité. C’est à la fois rendre cohérent et unis des espaces fragmentés, générés par des voies de circulations, ou différentes zones hétérogènes, industrielles, résidentielles ou périurbaines. Telle était la réflexion des architectes britanniques, Alison Smithson et Peter Smithson, tout deux membres du groupe Team X au début des années 1950. Leur travail portait sur la possibilité de restaurer une forme de continuité urbaine définie par «l’espace de la communauté» : «De la campagne à la ville, de la banque à la maison, de l’école au pub, la cohésion sociale tient en l’aisance du mouvement. Ces espaces communs doivent favoriser la rencontre et la communication interpersonnelle, la communication dans une liberté optimale d’association à toutes les échelles». Les architectes partent à la recherche de «l’unité perdue» de la communauté humaine. Ainsi, leur projet de logement «Robin Hood Garden» construit en 1972 à l’est de Londres intègre cette volonté sociale d’intégrer un nouvel espace commun à l’intérieur d’une architecture, permettant de lier les appartements entre eux et faciliter la rencontre et l’interaction entre les habitants.
«Ease of Movement», CIAM 9, 1953, p. 76.
Chez les Smithson, la rue du quartier propose un nouveau réseau de relation entre les gens, favorise les déplacements entre les bâtiments et les services qu’elle dessert. Cette «union» entre espaces permet de reconsidérer l’accès aux lieux, mais aussi, par les biais d’évènements ou de programmes multiples, de fusionner et décloisonner des zones isolées. L’espace extérieur redevient une question architecturale, une véritable pièce à habiter à l’échelle urbaine. Ce n’est pas un vide opposé au plein du bâti, mais un objet conçu comme un outil de réidentification de l’homme avec son environnement.
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L’image de la ville et ses composantes - La limite et la continuité
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«L’expérience de la ville est influencée par des forces ambiantes et immatérielles, non pas seulement par le bâti, mais aussi par le ressenti. L’architecture de la ville n’est pas une simple collection de monuments statiques et formels, mais envisage également l’éphémère et l’indéterminé. Les flux ont notamment une place aussi importante que l’espace bâti.» Le cabinet d’architectes SANAA est fondé 1995 par Sejima et Nishizawa, deux architectes japonais. Ce projet reflète cette notion de continuité, qui amène à une fluidité des déplacements. Fixé sous la direction de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), Le Learning Center symbolise le nouveau centre de connaissance et a pour ambition de répondre à une multitude d’objectifs, lieu d’apprentissage, d’information, et de vie. On y trouve ainsi la bibliothèque de l’école, une librairie, la boutique de l’école, un restaurant haut de gamme, les locaux d’association étudiants, une cafétéria, des espaces de détente et des services administratifs. Polyfonctionnel, le bâtiment est divisé en quatre grandes zones pour y accueillir les différents programmes. Composé tel un paysage, le visiteur est invité à gravir des vallons, suivre et «glisser» le long de pentes. L’entrée du bâtiment est fondue dans une circulation multidirectionnelle, l’espace intérieur ne connaît pas de séparation interne, il s’étend sur un seul niveau, sans mur, sans démarcation physique, seules les ondulations du sol distinguent les zones. Le bâtiment dissout ainsi toute marque de frontière et de rupture entre les espaces.
Archigram «Plug-In City: Living City» 1963
SCHÉMAS TOPOGRAPHIQUES DU BÂTIMENT Le bâtiment de 120m par 160m est constitué d’un sol en béton armé formé de deux coques convexes irrégulières percées de quatorze trous en forme d’ellipse, les «patios». Constitué d’une charpente de bois et d’acier, le toit épouse la forme du sol et couvre le Learning Center d’un seul tenant. Grâce à cette tri-dimensionnalité de strates de circulations, le bâtiment unifie l’espace extérieur et l’espace intérieur, ainsi que les circulations et les transitions entre les programmes.
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SANAA «Rolex Learning Center» Lausanne - Suisse 2010
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L’image de la ville et ses composantes - Le point de repère
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LE POINT DE REPÈRE Les points de repère, l’outil permettant de s’orienter dans l’espace, de localiser quelque chose ou d’évaluer une distance, sont des références ponctuelles dans le tissu urbain. Ce sont des éléments matériels simples, dont l’échelle est variable dans de grandes proportions. Le point de repère permet d’identifier un seul élément au milieu de la ville. De plus, élément singulier qui détache le lieu du contexte, parfois même signe spécialisé, le point de repère devient unique et mémorable.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Les peuples amérindiens du Nord et Australien utilisaient une autre forme de point repère. Un grand poteau de bois portant des figures sculptées superposées : Le totem est l’emblème d’une tribu, il représente un être mythique (animal, végétal ou objet naturel) considéré comme «l’ancêtre éponyme d’un clan ainsi que son esprit protecteur et vénéré comme tel» . Il affirme l’appartenance à un groupe, porte son identité. Par la superposition de statuettes, le totem développe un langage symbolique, chaque statue signifie un mot, la succession de mot génère un message.
Cathédrale di Santa Maria del Fiore Palais Vecchio
Place de la République
L’architecture de la Renaissance s’appuyait sur des systèmes de point de repère pour guider le citadin dans la ville. Le Dôme de Florence en est un exemple; un point de repère lointain, visible de près ou de loin, de jour et de nuit. Il coïncide avec le centre religieux et le centre géographique, le campanile qui le complète permet de connaître la direction sous laquelle on le voit.
Par sa taille et sa correspondance de couleurs en écho avec son environnement proche, le totem forme à la fois un point de repère identifiable de près ou de loin et, par son langage, un signe interface entre habitats et habitants.
Définition CNRTL
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L’image de la ville et ses composantes - Le point de repère
Certains éléments urbains portent ainsi une valeur d’appartenance, de repère et de signal. Ils sont l’image d’une ville, d’un quartier et en façonnent son identité. À l’échelle d’une ville, l’exemple de la tour Eiffel est significatif. Bien plus qu’un signe symbolisant une avancée des techniques industrielles à l’aube de l’exposition universelle de 1889, elle est aujourd'hui un élément architectonique préfigurant à toutes organisations urbanistiques, par sa hauteur, elle se détache du contexte, et oriente le citadin dans son quotidien urbain. De plus, par son habitabilité, elle rejoint le principe d’espace convergeant et espace divergent : une fois en son sein, elle offre un point d’observation sur la ville et ses horizons.
Tissu urbain
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À l’échelle d’un quartier, un point de repère peu prendre une tout autre forme, ou se rattacher à un espace précis. Ce ne sont plus forcement des éléments hauts, mais ils conservent néanmoins une charge identitaire et distinguée. Les stations de métro de Hector Guimard correspondent à cette volonté de transformer un espace fonctionnel en «nouveau centre», en détournant et troublant l’image et la perception du lieu. En effet, dès 1902, ce nouveau mode de transport émerge, mais pénétrer sous terre suscite la méfiance et évoque le danger. L’architecte utilisera des formes issues d’un environnement naturel, à l’apogée du mouvement Art Nouveau, un langage architectural séduisant et évocateur, afin de contourner et modifier l’image et la sensation du lieu. Face à l’étendue de la ville, l’accès spécifique à ce mode de transport est perçu aujourd’hui comme élément identitaire et définit la centralité du quartier qu’il dessert. Les entrées de métro, plus qu’une architecture monofonctionnelle liée aux déplacements urbains, elles participent en tant qu’objet spatial et grâce au nom qu’il porte, à la hiérarchisation géographique et à la représentation mentale de son lieu d’implantation : «j’habite à Barbès».
Tissu urbain
Point de repère Visibilité
Point de repère, identité du quartier Déplacements convergents
L’image de la ville et ses composantes - Le point de repère
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
«Les architectes se sont laissés ensorceler par un seul élément du paysage italien : la piazza. Il est plus facile d'aimer son espace traditionnel, clos et enchevêtré, à l'échelle du piéton, que de savourer l'étalement spatial sur la route 66 ou à Los Angeles.» Lié aux transports accélérés en surface et à l’accumulation des messages commerciaux, Las Vegas présente une tout autre utilisation du point de repère. Gardant une morphologie totémique, un élément haut, identifiable et lisible, on assiste ici à la séparation de l’espace et de son signe. C'est une architecture de communication qui prévaut sur l’espace, elle est dite «antispatiale». Le bâtiment n'a plus d'importance, son enseigne est déconnectée de l’architecture et est disposée perpendiculairement à la route. Seuls le mot et son symbole apparaissent, au bénéfice de la persuasion commercial. L’accumulation des styles et des enseignes connectent une grande quantité d’éléments éloignés les uns des autres, vus rapidement par l’automobiliste, les contextes en deviennent fondamentalement modifiés.
Tissu urbain
Dédoublement symbolique et identitaire des bâtiments
Venturi, Scott Brown, Izenour «L’enseignement de Las Vegas», Édition Mardaga, 2008
Denise Scott Brown et Robert Venturi «Las Vegas Strip» 1965
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L’image de la ville et ses composantes - Du lieu à l’espace
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
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Tissu urbain
DU LIEU À L’ESPACE Cette étude des mécanismes spatiaux, des composantes fondamentales et de certains «codes urbains», amène à situer et différencier la notion de lieu, et la notion d’espace. Cette différenciation permet de considérer l’usager, le marcheur, non seulement en tant qu’observateur, mais en tant que praticien de l’espace publique. En effet, ces précédents exemples mettent en exergues trois caractères communs : ils ont pour chacun, des propriétés identitaires, ou relationnelles ou historiques. Les quartiers, les places publiques, la limite ou la découpe d’un territoire, constituent les formes élémentaires d’un espace social, ce sont des lieux qui correspondent pour chacun à un ensemble de possibilités, de prescriptions ou d’interdits dont leur contenu est à la fois spatial et social. Michel de Certeau, voit dans le lieu, l’ordre «selon lequel des éléments sont distribués dans des rapports de coexistence», il exclut que deux choses occupent la même place, chaque élément du lieu sont à côté des autres, le lieu est l’endroit ou la loi du «propre» y règne. Il définit le lieu comme une «configuration instantanée de positions», impossible donc, pour deux éléments, d’être à la même place. À la différence, l’espace, pour le sociologue, est un «lieu pratiqué», un «croisement de mobile» : «il y a espace dès qu’on prend en considération des vecteurs de direction, des quantités de vitesse et la variable de temps».{…} «l’espace serait au lieu ce que devient le mot quand il est parlé, c’est à dire quand il est saisi dans l’ambiguïté d’une affectation, muée en un terme relevant de multiples conventions, posées comme l’acte d’un présent, et modifiées par les transformations dues à des voisinages respectifs.» Relation, lien, connexion, contact, temporalité, situation, évènement, serait les opérations qui transforment le lieu en espace, des opérations qui l’active, qui l’amène à fonctionner : «est espace un lieu pratiqué».
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. Arts de faire» Édition Folio essais, p. 173.
Le lieu, est ici définie comme une composition de bâtiment. Chaque entité est distribuée dans un rapport de coexistence, il définit un territoire.
Identité
Délimitation
Circulations
Il y a espace quand on prend en compte les différents composants qui l’amènent à être pratiqué : son signe, son vecteur d’identité, sa délimitation ou sa libre circulation.
LA MUTATION DE L’ESPACE PUBLIC La mobilité, une nouvelle réalité urbaine Un vide programmé Les lieux parallèles
La mutation de l’espace public - La mobilité, une nouvelle réalité urbaine
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
LA MOBILITÉ, UNE NOUVELLE RÉALITÉ URBAINE. «La circulation est née. Elle est dissociée de «l’habitation». Il y a divorce entre les espaces privatifs destinés à l’habitation et les espaces communautaires d’accès d’un espace privatif à un autre, ou de traversée de l’assemblage de ces espaces.» À travers le monde et l’histoire, le dessin des villes se modifie et intègre dans son développement la nécessité de circuler. Non seulement à l’intérieur de celle-ci, mais aussi depuis l’extérieur. Il apparait le besoin de distinguer les espaces d’activités sédentaires, des lieux de passage configurés en rue : la ville s’organise afin de pouvoir à la fois y rester et y circuler. La rue est alors censée intégrer les lieux du vivre ensemble, du bouger ensemble et de la rencontre. La fonction de circulation modèle les villes, elle en redéfinit continuellement ses limites et son étendue, en lien étroit avec l’apparition et l’évolution de nouveau moyen de transport, de la découverte de la roue, à la domestication du cheval, jusqu’à l’arrivée des premières automobiles. La physionomie de la ville est alors façonnée essentiellement par le mouvement circulatoire : tramways, métros, trains, automobiles. Ainsi, la «ville fonctionnelle» apparait en 1941 sous le nom de Charte d’Athènes : une extension rationnelle des quartiers modernes, une séparation des zones résidentielles et des voies de circulation, pour une meilleure distribution des «fonctions» : la vie, le travail, les loisirs et les déplacements.
Construit à l'origine en 1603 en bois, le pont Nihonbashi devient l'année suivante le point de départ des «Cinq routes d'Edo» qui comprend notamment le Tôkaidô, la «route de l'Est» rejoignant Kyoto par le Mont Fuji. Ces routes étaient empruntées par les seigneurs féodaux et leurs délégations lorsqu'ils devaient se rendre à Edo (ancien nom de Tokyo) pour y séjourner en alternance. Au milieu du pont se trouve le «kilomètre zéro», à partir duquel sont calculées les distances kilométriques. Le pont est rendu célèbre par les estampes d’Andô Hiroshige, qui peint, à partir de 1830, une série de vue de la ville d’Edo. Le pont était le centre symbolique de l'archipel pendant la période d’Edo, jusqu’en 1867, de nombreux commerces s’y sont développés autour. Il est reconstruit en pierre en 1911 en s'inspirant du style Renaissance anglais selon les plans de l'architecte Tsumaki Yorinaka, il symbolise la modernité de l'ère Meiji. De nos jours, il est défiguré par une autoroute suspendue construite dans les années 1960.
Ce nouveau modèle de plan urbain suggère aux architectes et aux urbanistes des images et des projets qui invitent à dilater la dimension et l’échelle de l’espace urbain. Ces techniques de transport sont indissociables de leurs infrastructures, qui deviennent toujours plus visibles et massives. Elles se transforment dès lors en nouvelles centralités, en mégastructures ou en nouveaux monuments.
Claude Parent «Vivre à l’oblique» Editions Jean-Michel Place, 2004.
Andô Hiroshige «Nihonbashi Bridge in Snow» De la série «Famous Places in the Eastern Capital». Tokyo, 1840.
Pont Nihonbashi Tokyo, 2010
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Fritz Lang Extrait du film «Metropolis» 1927
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Centre de Dubai 2013
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La mutation de l’espace public - La mobilité, une nouvelle réalité urbaine
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Sous l’impulsion de l’exposition universelle de Paris en 1889, le Baron Haussmann a pour mission d’aérer, d’unifier et embellir la ville. Ses opérations, basées sur la régulation architecturale et automobile, permettraient de faciliter le mouvement des troupes militaires et de rendre impossibles les insurrections populaires. Il élargit les voies de circulations, permet au soleil de pénétrer au coeur des rues, mais intensifie et prolonge sur plus de 300 kilomètres le trafic routier. «Malgré les voies nouvelles ouvertes chaque jour à la circulation, Paris est de plus en plus encombré par la population croissante et par les voitures toujours plus nombreuses avec l’agrandissement de la capitale. Il y a des quartiers où les humains se heurtent, se gênent dans des espaces insuffisants à côté d’espaces perdus, inoccupés, sans nécessité plausible.» Inventeur du rond-point, de la concentration verticale des circulations et des boulevards à redans, l’architecte Eugène Hénard expose, au début du XXe siècle, ses visions d’une capitale transformée pour accueillir l’automobile et la vie moderne. Il met en place une hiérarchisation des voies et une stricte séparation des fonctions de circulations urbaines. Afin d’affirmer cette nécessité d’une circulation intensive au coeur de la ville, il met en place les boulevards à redans : une chaussée correctement alignée, une hauteur d’emmarchement uniforme et un recul imposé. Eugène Hénard, sous l’impulsion Hausmanienne, imaginera pour les nouveaux boulevards en possession d’une bande de terrain suffisamment large, après avoir tracé et ouvert la chaussée centrale, l’établissement d’un alignement parallèle et équidistant de part et d’autre de la chaussée : ces nouvelles plateformes délimitent les différentes chaussées praticables et limitent les zones constructibles.
Hector Horeau «Sécurité, Amélioration dans la circulation», 1866
Ce schéma, issu du projet de boulevard à redans de Eugène Hénard, synthétise la pensée et les travaux haussmanniens : homogénéité architecturale, régularité du tracé, élargissement des voies, distinction claire des circulations.
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La mutation de l’espace public - La mobilité, une nouvelle réalité urbaine
Construction du chemin de fer métropolitain municipal de Paris, Station de métro Concorde, rue de Rivoli, Paris, 1889.
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Harvey Wiley Corbett «La ville future» 1913
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Dans ce contexte d’étalement urbain, Le Corbusier propose «Le Plan Voisin», du nom du constructeur automobile qui finance le projet. La primauté est donnée à la voiture et aux nouvelles artères de circulations. Sur un quartier central de la rive droite parisienne, Le Corbusier applique les principes de sectorisation, de décongestion et d’accroissement de la densité, en aménageant l’ensemble selon une trame orthogonale. De la ville historique, seuls sont conservés quelques monuments désormais privés de tout contexte. «Nous avons toujours prétendu que les gratte-ciel, en principe, ne devaient pas être élevés en périphérie, mais, au contraire, en son centre. Cette étude a toutefois donné l’occasion d’aborder de très près divers problèmes urgents et de natures diverses : une distribution rationnelle de la circulation en un point capital de Paris. {…} La construction de gratte-ciel : leur structure, leur ensoleillement, leur esthétique. {…} L’amorce d’une ville verte. {…} Un problème d’esthétique monumentale.»
Le projet de Le Corbusier tient à la «table rase» avec la ville ancienne, et notamment de la rue. Le projet suppose la destruction de tout le centre de la rive droite, remplacé par des tours et traversé par des autoroutes reliant directement Paris aux grandes villes qui l’entourent.
On assiste à la répétition infinie d’un modèle urbain hiérarchisé et ordonné. Chacun des éléments, identités, mouvements urbains, relations, sont organisés dans un rapport qui exclu leur compatibilité.
Le Corbusier Revu «Urbanisme» Collection de l’Esprit Nouveau Paris, 1924.
Le Corbusier «Plan Voisin», Projet d’aménagement urbain pour Paris, 1925.
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Historiquement, ce bouleversement urbain se caractérise par deux phénomènes majeurs. Le premier est une dissolution des contours de la grande ville, qui se traduit par une prise de conscience de l’émergence d’une nouvelle échelle urbaine : celle de la très grande ville ou mégalopole. Le second phénomène est celui de l’emprise croissante des réseaux de circulation. Dans les années 1960, la mobilité et les réseaux émergent comme thème prédominant. Ils participent alors, non seulement en temps que outils de déplacement, mais comme une architecture opératrice : Les réseaux forment une structure à la fois architecturale et urbaine, ils sont à l’image d’une expansion modulaire, catatonique, sans centre, tel un système capable de représenter et anticiper les changements et les mutations d’une société. «Une architecture libératoire, correspondant à cette démocratie de masse, privée de dêmos et privée de cratos (de peuple et de pouvoir), sans centre et sans image. {…} une architecture qui regardait sans crainte la logique de l’industrialisme athée, dédramatisé, gris, où la production en série réalisait des décors urbains infinis.»
La ville future des utopistes est claire. Elle est structurée par les mailles du réseau. Les noeuds, c’est-à-dire la ville ancienne, sont obsolètes par apport aux nouvelles pratiques de déplacements, tandis que les mailles, l’infrastructure, conditionnent un développement généralisé. Dans son analyse du contexte de mégalopole, l’architecte Yona Friedman s’empare de cette double spécificité, la très grande ville et l’emprise croissante des réseaux : «La ville spatiale est le résultat d’un urbanisme indéterminé; autrement dit, elle n’a pas de plan à suivre, à l’exemption de celui de l’infrastructure (…). Les réseaux de distribution (transport) de notre monde sont actuellement continentaux (d’océan à océan). Les villes (ou régions) appartiennent, par apport à ces réseaux, à deux types principaux : elles sont assises sur les noeuds du réseau, ou bien elles sont dans les mailles du réseau. Le développement montre une tendance vers l’importance croissante du deuxième type : la Megalopolis, par exemple, sera une région urbaine très densément utilisée dans les mailles du réseau, parce que, nécessairement, tout transport technicisé imaginable favorise ce deuxième type.»
Andrea Brandzi «No-Stop City» Archizoom Associati
Yona Friedman «Ville Spatiale» 1956
Yona Friedman «L’architecture mobile» 1970, p. 128.
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En 1960, l’architecte japonais Kenzo Tange, propose une vision métaboliste d’un plan urbain pour la ville de Tokyo. Il envisage une série de villes satellites comme solution au boom démographique rapide qu’a connue Tokyo après la Seconde Guerre mondiale (passant de 3,5 millions en 1945 à 10 millions en 1960). Dans son projet, Kenzo Tange se confronte aux mouvements automobiles, introduits dans la vie urbaine, changeant la perception de l’espace. Il établit alors un nouvel ordre spatial, sous la forme d’une mégastructure linéaire basée sur un axe de réseau fixe, autour duquel gravitent des programmes transitoires. Ce plan d’extension détermine une nouvelle organisation dans laquelle le système urbain, le système de circulation et le système architecture sont organiquement unifiés. Il intervient comme réponse intermédiaire à la problématique d’une planification conjuguée entre bâtiments et infrastructure, du fixe et du mobile.
Louis Kahn a porté ses recherches sur la décongestion de la circulation et l’atténuation de la prolifération anarchique des terrains de stationnement, qui ont ravagé les villes américaines d’après-guerre. Ses études proposent, sous forme de plans conceptuels, une circulation soigneusement ordonnée et un nouveau modèle de trafic. L’architecte réorganise les rues selon une hiérarchisation fonctionnelle : telle une partition musicale «idiosyncrasique», qui relève du «tempérament propre» des choses («ídios»), mais aussi de leur mélange («krâsis»). Il écrit un système de notation abstrait, correspondant à différentes intensités de trafic : le mouvement des camions et des bus (ligne en pointillés), les circulations rapides des véhicules autour de la périphérie (les flèches), et les voitures en stationnement (spirales).
Kenzo Tange «A Plan For Tokyo» 1960.
Louis Kahn «Plan of proposed traffic-movement pattern», Philadelphie - 1952
Définition CNRTL
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La mutation de l’espace public - Un vide programmé
UN VIDE PROGRAMMÉ «Entre l’immobilité du dedans et celle du dehors, un quiproquo s’introduit, mince rasoir qui inverse leurs stabilités. Le chiasme est effectué par la vitre et par le rail. {…} ; la voie de fer qui, d’une ligne droite, coupe l’espace et transforme en vitesse de leur fuite les sereines identités du sol. La vitre est ce qui permet de voir et le rail, ce qui permet de traverser. Ce sont deux modes complémentaires de séparation. L’un crée la distance du spectateur : tu ne toucheras pas ; plus tu vois, moins tu tiens - dépossession de la main pour un plus grand parcours de l’oeil. L’autre trace, indéfiniment, l’injonction de passer ; c’en est l’ordre écrit, d’une seule ligne, mais sans fin : va, pars, ceci n’est pas ton pays, celui-là non plus - impératif du détachement qui oblige à payer une abstraite maitrise oculaire de l’espace en quittant tout lieu propre, en perdant pied.» L’étalement urbain, la ville diffuse, est marqué par la réalisation de nombreuses autoroutes urbaines, de viaducs et d’échangeurs qui s’insèrent dans la ville avec agressivité. Chaque mode de transport s’est développé avec sa propre logique, traçant le réseau nécessaire à sa propre circulation, voire en concurrence avec les autres. Ainsi, pour que tous les modes de transport puissent être pleinement efficaces sans se gêner mutuellement, on imagine que tous les réseaux qui irriguent la ville seront distribués par spécialités : les rues pour les piétons, séparées des voies pour bus, elles-mêmes séparées des voies pour automobilistes, qui évolueront en routes puis en autoroutes en pleine ville.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. Arts de faire» Folio essais, p. 166.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Cette nouvelle dynamique infra-structurelle vient perturber et fragmenter le tissu urbain.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
La «Cité Idéale» serait donc celle où l’on a optimisé chacune des fonctions urbaines : travailler, habiter, acheter, se distraire, se déplacer, dans des territoires appelés «zones» entre lesquelles on circulera, uniquement. Cette optimisation et ce fonctionnalisme prédominant renvoient à l’analyse de Michel de Certeau sur «la ville concept» : elle apparait dans l’instauration d’un urbanisme qui organise des opérations «spéculatives» et «classificatrices», elle émerge dans la production d’un espace «propre», c’est à dire un lieu issu d’une organisation rationnelle et qui «refoule» toutes les «pollutions» physiques qui l’a compromette : «D’une part, il y a une différenciation et redistribution des parties et fonctions de la ville, grâce à des inversions, déplacements, accumulations, etc. ; d’autre part, il y a rejet de ce qui n’est pas traitable et constitue donc les «déchets» d’une administration fonctionnaliste». L’espace public, le paysage urbain sont donc morcelés, fragmentés et optimisés. Leurs connexions ne sont plus morphologiques, mais techniques : un «tube spécialisé» appelé «transport», c’est-à-dire un moyen de se rendre d’une zone à l’autre, elle-même dénommée «destination». Cette extension progressive et indéfinie de la ville, ainsi que l’intention à la seule efficacité du vecteur de «temps» et du vecteur de «déplacement», a provoqué une dilatation des mécanismes spatiaux, et à une standardisation des codes urbains. Le subtil amalgame entre le lieu, son identité, son organisation et sa structure se retrouve dissous dans cet enchevêtrement.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1.Arts de faire» Édition folio essais, p. 144.
Ce mouvement parallèle organise un dédoublement des relations : en favorisant les liaisons des déplacements, il dissout les connexions, la rue, le quartier et génère une distance, un éloignement.
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La mutation de l’espace public - Les lieux parallèles
LES LIEUX PARALLÈLES Cette urbanisation a laissé derrière elle un tissu déchiré, elle a produit des lambeaux de territoire, les restes non consommés de sa production spatiale. Des surfaces délaissées, comme les stigmates de la suburbanisation ou de la surmodernisation. Ce sont les vides générés par les pleins d’activités, ou encore des espaces indéterminés, créés par une urbanisation sur-déterminée. «La ville n’est plus le théâtre collectif où «quelque chose» arrive, il n’y a plus de «quelque chose» collectif. La rue est devenue un résidu, un outil d’organisation, un simple segment de plan métropolitain continu, ou les restes du passé rencontrent les équipements du présent dans un face à fasse gêné.» Dans «La Ville Générique» Rem Koolhaas s’interroge sur la nature de l’architecture après l’architecture. Les «Junkspace» est ce qui reste une fois que la modernisation a accompli son oeuvre ou, plus précisément, ce qui coagule pendant que la modernisation suit son cours : sa retombée. «La grande originalité de la Ville générique est simplement d’abandonner ce qui ne marche pas, ce qui a survécu à son usage, de défoncer le bitume de l’idéalisme avec les marteaux-piqueurs du réalisme et d’accepter tout ce qui pousse à sa place. En ce sens, la Ville générique accueille à la fois le primordial et le futuriste et, en fait, seulement eux deux. La Ville générique est tout ce qui reste de ce qu’était la ville. La Ville générique est la post-ville préparée sur le site de l’ex-ville.»
Rem Koolhaas «Junkspace» p. 41.
Rem Koolhaas «Junkspace» p. 55.
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Ces vides d’espace urbain sont une réalité géographique, voire même géométrique. La forme urbaine à l’échelle de l’agglomération produit un tissu discontinu. À cette sectorisation progressive du territoire, s’ajoute un espacement croissant entre les objets et les gens, un vide sans qualité ni raison apparente. Ces emplacements ont, bien sûr, plusieurs origines précises, et tout d’abord les infrastructures routières. Elles sont à l’origine des fameux «délaissés de voiries», liées aux marges et au recul imposés par différentes normes, différentes règles urbanistiques et architecturales : vitesses tolérées, contraintes d’éloignement, alignements, coefficient d’occupation des sols, etc. Mais aussi, à plus grande échelle, ces vides constatés naissent de la sédimentation de plusieurs structures géométriquement différentes, liées à la distinction des moyens de transport : les voies ferrées et les voies rapides, tracées par de grands rayons de courbes s’inscrivent sur une trame urbaine souvent orthogonale. Cet écart entre la géométrie routière et la géographie urbaine, crée autant de vide que de bâti, il génère des rejets et des «déchets» d’espace. De ce fait, cet espacement organise un dédoublement discursif entre le lieu d’où il émerge, son origine, et le «non-lieu» qu’il produit : un lieu parallèle.
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Surface du métro aérien Chicago, États-Unis 2013
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Sous-face du métro aérien Paris, France 2015
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LES MOYENS D’UNE RÉAPPROPRIATION CITADINE La mutation La temporalité
Les moyens d’une réappriation citadine - La mutation
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LA MUTATION «Par un paradoxe qui n’est qu’apparent, le discours qui fait croire est celui qui prive de ce qu’il enjoint, ou qui jamais ne donne ce qu’il promet. Bien loin d’exprimer un vide, de décrire un manque, il le crée. Il fait place à du vide. Par là, il ouvre des jours ; il « permet » du jeu dans un système de lieux définis. Il « autorise » la production d’un espace de jeu dans un damier analytique et classificateur d’identités. Il rend habitable.» La réflexion d’architectes, de designers ou d’artistes porte volontiers sur ces «rejets», des résidus non-ordonnés que l’on observe dans des villes. Ils témoignent d’une sorte de liberté vis-à-vis du tissu dense et fortement réglementé des centres historiques. Leur formation émerge d’un contrôle, de la règle d’un planificateur. Ils génèrent des espaces lâches et malléables, l’occasion d’un renouvellement ou d’un parachèvement. Ils sont la possibilité d’aménager sans construire ou de rendre disponible à un usage sans pour autant l’équiper lourdement. Dans cette dernière partie, nous verrons au travers de références, les applications possibles dans ces espaces. Par «lieux parallèles», nous entendons plusieurs possibilités de réappropriations, tout d’abord par le détournement, c’est-à-dire la mutation des usages : comment transgresser l’habitabilité d’un espace ? Puis, au travers de la temporalité, nous étudierons la superposition des usages, qui, sous la forme d’événement, amène à penser l’espace comme réversible, un espace sensible au changement d’affectation.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. Arts de faire» Édition Folio essais, p. 159.
Il y à plus d’un siècle, le Cheong Gye Cheon a été appelé «Gaecheon» ou «courant ouvert». C’est un cours d’eau traversant la ville de Séoul de Est en Ouest et qui desservait et alimentait en eau les quartiers de la ville. Pendant les années 1950, l’urbanisation massive et le développement industriel ont pollué le ruisseau, il a donc été recouvert par une route surélevée à 10 voies, répondant à la demande croissante du trafic routier dans le centre-ville. Dans les années 1980, un groupe universitaire et écologiste a développé un plan directeur visant à la démolition de l’infrastructure, car l’impact de cette autoroute sur la santé et l’insalubrité se fait ressentir. En 2003, l’autoroute est complètement démolie. Deux ans plus tard, une promenade le long du cours d’eau s’ouvre au public. Sur plus de 6 kilomètres, un parc linéaire parcourt la ville et participe à la réduction du trafic routier.
Autoroute urbaine recouvrant le «Cheong Gye Cheon» Séoul, Corée du Sud 1976
Restauration de la rivère «Cheong Gye Cheon», 2005
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Ouvert en 1934, la High Line est une voie de chemin de fer suspendue entre la 20e Avenue et la rivière Hudson, à Manhattan. Elle permettait aux trains de marchandises de desservir les premiers étages des entrepôts. Réhabilitée par les architectes James Corner Field Opération et l’agence d’architecture Diller Scofidio + Renfo, la High Line est aujourd’hui une promenade publique qui a su garder trace de son histoire. Sous le slogan «keep it simple, keep it wild, keep it quiet, keep it slow», les voies ferrées ont été conservées, offrant des points de vue où l’on observe la ville le temps d’une promenade, à travers la végétation, le bois et l’acier continuent de révéler à visage découvert l’identité du lieu. Cette volonté de mettre en valeur des vestiges du début du siècle dernier s’est manifestée dans d’autres villes américaines : Chicago, où l’on cherche à convertir la voie ferrée du Canadian-Pacific, la «Bloomingdales Trail» et à Philadelphie avec le «Reading Viaduc», une voie aérienne construite en 1890.
Déambuler, flâner, marcher, ces infrastructures accueillent, par leur spécificité géographique et géométrique, de nouvelles possibilités de réappropriation citadine. Souvent insérées de façon brutale dans le coeur urbain, elles offrent ainsi un espace parallèle, une parenthèse urbaine, un nouveau rythme de marche et de découverte, telle une dérive qui pousse à une nouvelle forme de mouvement : le «slow déplacement». Par ailleurs, le projet de la High-Line s’inscrit dans la lignée de la Coulée Vert à Paris, anciennement Promenade Plantée. Elle occupe l’emplacement de la ligne de chemin de fer qui reliait la place de la Bastille à La Varenne-Saint-Maur de 1853 à 1969. Longue de 4,5 kilomètres, libre de toute circulation ferroviaire, elle intègre dans sa structure le moyen d’une découverte unique de la ville.
La High-Line, chemin de fer commercial New-York, États-Unis Vers 1930
La High-Line, promenade urbaine Architecture : James Corner Field Opération, Diller Scofidio + Renfo Paysage : Piet Oudolf New-York, États-Unis 2009-2011
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Norrebro, au nord de Copenhague, est la rencontre de différents quartiers multiéthiques, longtemps considérés comme «zones à problèmes». En 2012, l’agence d’architecture Bjarke Ingels Group (BIG) et Topotek-1 se sont appuyés sur ce constat pour restructurer toute la zone. Utilisant la diversité culturelle du lieu, le mobilier, la signalétique, ou les airs de jeux s’appuient sur un langage de forme et de couleur provenant de plus de 60 nationalités différentes. «Plutôt que de perpétuer une image pétrifiée d’un Copenhague homogène, «Superkilen» propose une collection surréaliste d’une diversité urbaine globale, qui reflète en réalité la vraie nature du voisinage local.»
«Superkilen» Bjarke Ingels Group (BIG) - Topotek-1 Copenhague, Danemark 2012
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LA TEMPORALITÉ La ville est-elle le lieu de la rencontre spontanée et festive ? Souvent, des espaces sont régulièrement investis par toute forme d’activité : une partie de foot s’organise, l’esplanade d’un bâtiment devient l’estrade du spectacle, des chaises investissent Broadway le temps d’un été. Signe d’un changement, ses appropriations spontanées tendent à renouveler l’usage et l’image du lieu. Micro-interventions ou tactique urbaine, ces projets transforment des lieux délaissés en espaces temporaires, une sorte «d’alter-dynamique urbaine». «Paris Plage» démontre les enjeux d’un projet éphémère : révéler de nouveaux usages en créant un espace public réversible en plein cœur d’une grande ville. Pendant un mois, «Paris Plage» offre une nouvelle pratique du lieu, et redonne une identité à une environnent délaissé. Tous les éléments emblématiques de la plage se retrouvent dans un coeur urbain. En décloisonnant les espaces de bords de Seine, les multiples activités réorganisent une continuité piétonne, installent une relation entre la ville et les rives.
«Paris Plage» Agence de scénographie «Nez Haut», Paris, 2002.
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Telle une architecture de l’urgence, le «Spacebuster» s’insère dans toutes les typologies de lieu, active un espace délaissé ou propose une «cellule protectrice» pendant un évènement. Cet espace mobile est conçu pour explorer de nouvelle possibilité d’interaction entre le lieu de son implantation, les citadins et l’activité qu’il renferme. Il permet ainsi des connexions entre espace social et espace urbain, dans une utilisation collective et temporaire.
Le «Cineroleum» est un projet du collectif londonien «Assemble Studio», un collectif regroupant designers, architectes et artistes. En 2010, ils entreprennent la réutilisation et le détournement de plus de 4000 stations essence abandonnées au coeur de Londres afin de les transformer en cinéma urbain. Sièges rétractables, large enseigne en néon et un rideau réfléchissant occupent et définissent dans cette espace résiduel un lieu parallèle. «Cineroleum», c’est la rencontre entre le cinéma et le pétrole (cinema and petroleum). La structure est positionnée sur l’une des routes à sens unique les plus empruntées du Royaume-Uni, offrant aux spectateurs un double spectacle : à la fin de chaque représentation, les rideaux se lèvent, l’espace privatisé redevient public, et met fin à la suspension consentie de l’incrédulité.
«Spacebuster» Raumlaborberlin 2006
«Cineroleum» Assemble Studio Londres, Royaume-Uni, 2010
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Dans la même optique que «Cineroleum», le collectif «Assemble studio» continue sa recherche au travers de structures satellitaires permettant d’accueillir des films et des scènes urbaines. «The Folly For Flyover» démontre le potentiel «d’une crypte d’autoroute» de devenir un nouvel espace public. Pendant neuf semaines, ce non-lieu négligé a été transformé en un espace d'accueil pour les résidents locaux et les visiteurs. «The Folly For A Flyover» investi le site en réimaginant son passé, se présentant comme un immeuble piégé sous l’autoroute dont la structure archétypale émerge du trafic routier. Organisé pour un vaste programme de cinéma, de performance et de jeu, en collaboration avec le «Created Festival» de Londres, la Barbican Art Gallery et de nombreuses organisations locales, l’installation propose un café, des ateliers, des événements et des excursions en bateau pour explorer les cours d'eau environnants.
Né en 2010 de la rencontre d’étudiants en architecture, le «Collectif Etc» développe des méthodes et des outils, réinventés à chaque projet, pour laisser une marge de manoeuvre à l’expression créative des passants, leur donnant la possibilité de passer du rôle de spectateur à celui d’acteur. Le collectif questionne les méthodes actuelles de fabrique de la ville, en tetant de donner au citadin un rôle moteur. Depuis 2011, le collectif mène le projet «Le Détour de France» et part à la rencontre de différents acteurs afin de participer avec eux à la fabrique citoyenne de la ville et chercher une évolution possible au métier d’architecte. «Place au Changement», se voulait être une étape préliminaire dans le processus de création d’un bâtiment. L’idée était de dessiner au sol un plan fictif des futurs logements et de les représenter en coupe au mur. Cet ensemble permet de se projeter dans le volume virtuel du futur immeuble, tout en générant un nouvel espace public.
«Folly for a flyover» Assemble Studio Londres, Royaume-Uni, 2011
«Place au changement» Collectif Etc Saint-Étienne, France, 2011
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CONCLUSION Lieux parallèles : réserve de proximité, réserve d’immédiateté
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Conclusion
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CONCLUSION Aujourd’hui, le besoin de plus en plus important dédié au déplacement centre l’espace public dans les espaces de circulations. Cette organisation fonctionnaliste, privilégiant le progrès, c’est-à-dire les vecteurs temps et déplacement, fait oublier la condition primordiale de «possibilité» dans l’environnement urbain. Cette logique de la construction, apparue au 16e siècle dans les villes italiennes, offre une clarté, une lisibilité à la ville. Elle engendre un espace discursif et pratique à partir de point de concentration, de convergence. Néanmoins, ces écritures fabricatrices devenues universelles refusent la pertinence des lieux qu’elles ne créent pas, ou qu’elles produisent indirectement : des déchets d’espaces, indissociables du tissu urbain, devenus fragments, comme les échappés d’un ensemble cohérent et uni. Ces fragments échappés du «tout» deviennent l’impensé des tracés urbanistiques, voire politiques. «Déchets» ou «non-lieux», ils représentent aujourd’hui un mouvement contradictoire qui peut compenser ou se combiner hors de ce pouvoir «panoptique» et classificateur. Michel Foucault fait l’analyse de ces structures de pouvoir : tel des «instrumentalités mineurs, capables par la seule organisation de détails, de transformer une multiplicité humaine en société disciplinaire et de gérer, différencier, classer, hiérarchiser toutes les déviances {…}». Ces «machineries mineures» puisent leur efficacité des procédures qu’elles organisent et des espaces qu’elles distribuent pour en faire un «opérateur».
LIEUX PARALLÈLES : RÉSERVES DE PROXIMITÉ, RÉSERVES D’IMMÉDIATETÉ Les lieux parallèles héritent et s’appuient sur ce contexte, cette urbanisation successive, ces opérations programmées et contrôlées. Ils analysent les pratiques ordinaires, identitaires et relationnelles : «microbiennes, singulière et plurielle», qu’un système urbanistique devrait gérer ou supprimer, pour suivre ou pour poursuivre (renforcer ou parachever) leur «pullulement». Par leurs emplacements stratégiques, les lieux parallèles se définissent comme des réserves de proximité et d’immédiateté : ils sont en relation directe avec leur quartier et offrent, dans une ville de plus en plus encombrée, une réponse immédiate aux mutations urbaines et aux besoins d’espaces de vie citadine. Cette analyse aurait pu s’inscrire au travers de la pensée de Michel Foucault, pour renforcer cette notion de «localité». Dans «Des Espaces Autres», le philosophe établit le concept «d’Hétérotopie», un espace concret abritant l’imaginaire. Des lieux qui sont dessinés par l’institution d’une société, par ce même pouvoir classificateur, mais qui définissent un contre-emplacement, un «lieu autre». Ce «lieu» offre la possibilité de juxtaposer en un seul «emplacement» plusieurs espaces eux-mêmes incompatibles, où l’emplacement réel et organisé est ainsi contesté et inversé. «L’Hétérotopie», tout comme le «lieu parallèle», serait une utilisation multiforme et résistante de ce pouvoir, qui échappe à la discipline urbanistique sans être pour autant hors du champ d’où elle s’exerce, une sorte «d’utopie réalisée».
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Bibliographie et expositions
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BIBLIOGRAPHIE
par ordre alphabétique
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Iconographie
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ICONOGRAPHIE p. 18 D’après la couverture de «L’Invention de la Ville Moderne» de Philippe Cardinali, Les Essais, Éditions de la Différence. 1. Tableaux anonymes, «La Cité Idéale», vers 1490. 2. École de Piero della Francesca, «Cité idéale avec temple circulaire», vers 1470. 3. Anonyme, «Perspective architecturale», fin du XVe siècle. p.19 La place Del Campo, Sienne, Italie. 1. Image satellite Landsat, Google Earth. 2. Le Palio de Sienne, vue aérienne : http://comenius2010fra.canalblog.com/albums/ghivizzano__italy/photos/77850256-70.html 3. Le palio de Sienne : http://www.vacanzainchianti.it/francais/florence-sienne-pise.php p. 28 - 29 SANAA, Cabinet d’architecture, «Rolex Learning Center», Lausanne, Suisse, 2010 : Vue intérieure : http://www.e-architect.co.uk/switzerland/rolex-learning-center Vue extérieure : http://static.panoramio.com/photos/large/90441395.jpg p. 35 Denise Scott Brown et Robert Venturi, «Las Vegas Strip», 1965. Image issue du livre «L’enseignement de Las Vegas» : http://www.mascontext.com/issues/13-ownership-spring-12/invention-and-tradition/ p. 41 1. Andô Hiroshige, «Nihonbashi Bridge in Snow», De la série «Famous Places in the Eastern Capital», Tokyo, Japon, 1840 : http://ukiyo-e.org/image/mfa/sc137224 2. Pont Nihonbashi, Tokyo, Japon, 2010 : http://www.yokohama-magazine.fr/2011/11/100eme-anniversaire-de-la.html p. 42 Fritz Lang, «Metropolis», 1927. Image extraite du film. p. 43 Centre de Dubai, 2013. Photographie de Dedma Xopka : http://dedmaxopka.livejournal.com/68119.html#cutid1 p. 46 Construction du chemin de fer métropolitain municipal de Paris, station de métro Concorde, rue de Rivoli, Paris, 1889. Charles Maindron, bibliothèque de l’Hotel de Ville, Fond Roger-Viollet. p. 47 Harvey Wiley Corbett «La ville future, une solution hardie du problème de circulation», 1913. Magasine «L’illustration» n°3676 du 9 août 1913, p. 124. p. 49 Le Corbusier, «Plan Voisin», croquis, 1925 : http://meriadeck.free.fr/Meriadeck/Urbanisme_sur_dalle-Les_origines.html p. 51 Yona Friedman, «Ville Spatiale», 1956 : http://hbt-lako.blogspot.fr/2014/11/yona-friedman-ville-spatiale.html
p. 52 Kenzo Tange, «A Plan For Tokyo Bay», 1960 : 1.https://dprbcn.wordpress.com/2010/05/10/floating-cities-reloaded/ 2. http://www.utopiaforgot.com/aplanfortokyo/ p. 53 Louis Kahn, «Plan of proposed traffic-movement pattern», Philadelphie, 1952 : https://parcsandrec4.wordpress.com/2013/06/10/louis-kahn_-jpg/ p. 60 Surface du métro aérien, Chicago, États-Unis, 2013 : Photographie personnelle. p. 61 Sous-face du métro aérien , Paris, France, 2015 : Photographie personnelle. p. 65 1. Autoroute urbaine recouvrant le «Cheong Gye Cheon», Séoul, Corée du Sud, 1976 : https://territoire.wordpress.com/2012/05/24/mort-annoncee-des-autoroutes-urbaines/ 2. Restauration de la rivère «Cheong Gye Cheon», 2005 : http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Korea-Seoul-Cheonggyecheon-2008-01.jpg p. 67 1. La High-Line, chemin de fer commercial, New-York, États-Unis, vers 1930 : https://www.flickr.com/groups/1433488@N25/ 2. La High-Line, promenade urbaine, James Corner Field Opération, Diller Scofidio + Renfo, Piet Oudolf. New-York, ÉtatsUnis, 2009-2011 : http://www.landezine.com/index.php/2014/01/high-line-section-2-by-james-cornerfield-operations/high_line-section_2-james_corner_field_operations-piet_oudolf-06/ p. 68 - 69 «Superkilen», Bjarke Ingels Group (BIG) - Topotek-1, Copenhague, Danemark, 2012 : https://projets-architecte-urbanisme.fr/superliken-copenhague-big-espace-public-utopie-insolite/ p. 71 «Paris Plage», Agence de scénographie «Nez Haut», Paris, 2002 : https://studiosparis.wordpress.com/2012/08/08/go-to-the-sea-stay-in-the-city/ p. 72 «Spacebuster», Raumlaborberlin, 2006 : http://raumlabor.net/spacebuster/
p. 73 «Cineroleum», Assemble Studio, Londres, Royaume-Uni, 2010 : http://assemblestudio.co.uk/?page_id=2 p. 74 «Folly for a flyover», Assemble Studio, Londres, Royaume-Uni, 2011 : http://assemblestudio.co.uk/?page_id=5 p. 75 «Place au changement», Collectif Etc, Saint-Étienne, France, 2011 : http://www.collectifetc.com/realisation/place-au-changement-opus-2/
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LIEUX PARALLÈLES :
LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 02 - Théorie et applications
UN PROJET DE MATTÉO LECURU MASTER DESIGN GLOBAL, RECHERCHES ET INNOVATIONS Promotion 2014 - 2015
LIEUX PARALLÈLES : LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 02 - Théorie et applications Projet de mémoire de fin d’études placé sous la direction de Gilles Lebars et Tiphaine Kazi-Tani. Écoles de Condé 2014 - 2015 Paris
Mes remerciements vont à :
TIPHAINE KAZI-TANI GILLES LEBARS PASCALE SIVIERI JEAN-JACQUES LECURU CÉCILE BARANI
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Sommaire
SOMMAIRE introduction - p. 6 p. 9
PARCOURS PARALLÈLES Surface et continuité - p. 12 Lumière et continuité - p. 16 Espace et continuité - p. 18 Réseau et continuité - p. 28 p. 35
IDENTITÉ ET IMAGIBILITÉ Délimitations et frontières - p. 38 Délimitations et imagibilités - p. 46 p. 57
TACTIQUES COMPENSATOIRES Serre urbaine - p. 60 Ville Parallèle - p. 63 p.75
CONCLUSION Intention de finalisation - p. 78 Partenaires - p. 80 Bibliographie - p. 82 Iconographie - p. 83
Introduction
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
INTRODUCTION Au travers de différents outils spatiaux, ces recherches tentent de définir un «lieu parallèle» : Dans un premier temps, par l’exploration de la continuité, qu’elle soit surfacique, liée à une écriture topographique, ou morphologique, une connexion spatiale continue. Cet outil pose la question du sens d’un mouvement, ou de l’intuition d’un cheminement : Comment se fait la couture entre les espaces et les trajets ? Y a-t-il une interface qui transforme un lieu en espace praticable ? Comment passer de l’un à l’autre, selon les situations quotidiennes : marcher, s’arrêter, se rencontrer, observer ? Une fois injecté dans un espace défini comme linéaire et relatif, sans référence, cet élément constituerait le moyen d’une expression transitoire, d’une réunification discrète et d’une cohérence physique en opposition au langage urbain, comme un nouveau réseau de relation propice à toutes appropriations. Puis, toujours dans cet environnement urbain théorique dénué de tout contexte, la création d’un espace circonscrit et défini par des éléments d’identités, de délimitations ou d’articulations met en exergue des dispositifs d’interactions entre usagers et espaces sociaux. Un lieu parallèle n’existerait qu’en relation avec une limite, un dehors, ou un élément contrastant sa propre présence. Si un ordre spatial organise un ensemble de possibilités, ou d’interdits, le praticien, l’usager peut actualiser certaines d’entre elles, «il les fait être autant que paraître». Ainsi, se met en place le vecteur «d’imagibilité» : en traversant ou en habitant un espace, le citadin outrepasse les limites que fixait à son utilisation la détermination de l’objet, et transforme en autre chose chaque signifiant spatial.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. art de faire» Folio essais, p. 149.
Enfin, pour se rapprocher progressivement d’un contexte urbain réaliste sans pour autant plonger dans la contrainte d’un ordre et d’un «état» bâti fonctionnalisé, un lieu parallèle tente de mettre en place une tactique compensatoire. Il équilibre un «manque», et génère un parallélisme : un espace autarcique qui n’est plus en résonance avec le bâti, mais qui joue et s’appuie sur des évènements structurels, architectoniques, pour en faire des occasions ou des prétextes d’usages. Imaginaires, voire utopiques, ces propositions formelles et conceptuelles tentent de synthétiser et mettre en scène les recherches théoriques accumulées. Elles questionneront le statut de l’espace public, non au sein d’une place, d’un jardin, d’un trottoir ou tous éléments capables de «s’autosuffirent», mais bien au sein d’un espace délaissé, appauvri, sans qualité ni raison relationnelles et identitaires.
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PARCOURS PARALLÈLES Surface et continuité Lumière et continuité Espace et continuité Réseau et continuité
Parcours parallèles
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PARCOURS PARALLÈLES La richesse du dialogue entre le lieu pratiqué et le promeneur peut venir d’un principe visuel, d’une clarté directionnelle, d’éléments continus qui unifient ou contrastes l’image et la perception du lieu. Ces notions offriraient des possibilités simultanées d’attitudes spatiales variées : en repos ici, en attente de…, en mouvement vers…, selon différentes modalités sensorielles et à plusieurs échelles spatiales. Un parcours parallèle tente de proposer une relation matérielle ou immatérielle, intuitive ou signifié, entre la structure formelle d’un lieu, linéarité, surfaces planes, homogénéité et des stratégies de déambulations invitantes à le pratiquer. Ainsi, un parcours parallèle cherche à établir des mouvements, des circulations dans le but d’offrir une multiplicité d’intentions motrices potentielles dans un jeu entrelacé de possibilité ou de contraintes.
Par l’utilisation de strates superposées en béton, l’architecte recompose la topographie d’un paysage naturel et vallonné. Ainsi, il délimite, organise la végétation et guide le visiteur sur une surface fluide et homogène.
«Dans les espaces brutalement éclairés par une raison étrangère, les noms propres creusent des réserves de significations cachées et familières. Ils «font sens» ; autrement dit, ils impulsent des mouvements, à la façon de vocations et d’appels qui tournent ou détournent l’itinéraire en lui donnant des sens (ou directions) jusque-là imprévisible.» Ce langage a pour but d’implanter un espace relatif. Bien que déterminer, ces formes de délimitations, de parcours ou de mobiliers admettent toutes les nuances et exercent une articulation conjonctive : ces écritures prennent forme dans une manipulation d’éléments de base d’un ordre bâti : un trottoir, un terre-plein, mais définissent un écart face à ce système urbanistique. Elles joignent, articulent ou marquent une trajectoire qui pousse au parcours parallèle, un cheminement qui n’est plus en résonance avec l’ordre bâti.
Michel de Certeau «L’invention du quotidien, 1. art de faire» Folio essais, p. 156.
Ce programme concerne l’aménagement d’un quartier isolé au nord de Copenhague. Les architectes définissent trois typologies d’espace de vie étendues sur plus de 1,5km. Par la distinctition colorimétrique du sol, les différents lieux et programmes se distinguent. Une uniformité surfacique ponctuée par des marquages au sol, des vallonnements, dessine et induit des usages et des circulations.
Gaëlle Villedary a développé le «tapis rouge», une installation de tapis d’herbe pour le village français de Jaujac. Traçant des avenues piétonnes dans le centre-ville, son travail a pour intention de relier les habitants du village à la vallée environnante. Jouant de cette ambiguïté entre une ligne, une délimitation, une frontière ou un chemin, l’artiste permet aux citadins d’investir et de s’approprier librement cette nouvelle surface.
Kengo Kuma «Naturescape», Milan, Italie 2003
Gaëlle Villedary «Tapis Rouge» Jaujac, France 2011
Bjarke Ingels Group (BIG), Topotek-1 «Superkillen» Copenhague, Danemark 2012
Parcours parallèles - Surface et continuité
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Un cheminement sinueux apparaît par l’utilisation d’une lumière directionnelle.
SURFACE ET CONTINUITÉ La décomposition d’une surface permet de générer un nouveau signe d’articulations et de continuités. Ce tracé dessine et renforce les circulations, tel un guide matérialisé au sol, il marque un passage ou constitue un lien en renforçant les trajectoires. Par le soulèvement d’une ligne, de nouvelles possibilités d’usages apparaissent. Ces formes d’assises, en continuité du mouvement linéaire, ponctuent la surface pratiquée. L’utilisation d’une lumière directionnelle isole une trajectoire de déplacement, le mouvement circulatoire devient concentré et sinueux.
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Parcours parallèles - Surface et continuité
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
De jour, l’empreinte monumentale au sol symbolise une centralité piétonnière et relationnelle.
Sans perturber les circulations existantes, cette empreinte organique au sol établit une nouvelle dynamique de surface. L’espace se métamorphose en un cercle concentrique. La lumière renforce le point de convergence et symbolise une graduation cheminatoire.
La nuit, la forme organique évolue en un langage lumineux.
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Parcours parallèles - La lumière et la continuité
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LA LUMIÈRE ET LA CONTINUITÉ La lumière permet de créer un cheminement immatériel, elle indique, guide et inscrit dans l’environnement un parcours dynamique et sensible. De nuit, ce terre-plein central est converti en un chemin lisible et naturel. Aux croisements de ce réseau, la lumière s’intensifie et met en évidence des points de rassemblement.
Esquisse du dispositif lumineux.
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Parcours parallèles - Espace et continuité
Circulations inférieures
Circulations supérieures
ESPACE ET CONTINUITÉ Le dédoublement des zones de déplacement permet d’envisager plusieurs surfaces distinctes de déambulation et d’habitabilité. Tout en maintenant une connexion entre une strate inférieure et supérieure, ce langage formel multiplie les couches programmatiques publiques et d’espaces urbains, et dissout toute rupture entre l’espace et sa surface praticable.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Superposition des couches inférieures et supérieures
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Parcours parallèles - Espace et continuité
Voirie
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Terre-plein
Trottoir
Ces recherches définissent différentes possibilités d’interactions entre un mouvement continu et une activité spécifique. Les circulations se combinent et s’entremêlent dans un jeu de passerelle.
Traduction en maquettes d’un espace et de sa transition.
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Parcours parallèles - Espace et continuité
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
À L’échelle d’un mobilier, les courbes épousent les postures naturelles du corps.
Ce tissu modèle un nouvel environnement circulatoire. Telle une propagation d’onde continue et évolutive, ces courbes oscillent entre un système de mobilier et une architecture. Cette formation en vallonnement amène à des déplacements souples et naturels : au creux d’une vague ou en haut d’une colline, ce principe spatial propose différentes possibilités d’usages.
L’ondulation se transforme progressivement, et permet de nouvelles circulations perpendiculaires.
L’amplitude des formes détermine des usages sans interrompre les continuités surfaciques.
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Parcours parallèles - Espace et continuité
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
15 10 5m
in u stes
Ondulations courtes et dynamiques : zone d’assises.
Ce nouveau rythme surfacique, comme représentatif d’une pulsation, peut être adapté sur un terre-plein, ou a une bande urbaine linéaire. Ainsi, grâce à cette ondulation progressive et irrégulière, il dessinerait et symboliserait simultanément le centre d’un quartier : une ondulation courte et dynamique qui définit des zones d’assises, puis, selon les déplacements, se transformerait en surfaces amples, métamorphosant les usages à l’intérieur et à l’extérieur de l’espace.
Ondulations amples et légères : surface sportive, marche libre.
Ondulations fortes : skatepark et programmes multiples sous les vallons.
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Parcours parallèles - Espace et continuité
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Les passerelles connectent l’espace linéaire. Les circulations sont fluides et continues. Une percée dans la strate permet de conserver une transition naturelle de déplacement.
Ici est imaginé un terrain de sport, il est totalement intégré à l’ensemble surfacique, ce qui permet de multiplier les interactions entre joueurs, spectateurs, et surfaces de circulations.
Répétition des différentes surfaces programmatiques et surfaciques.
Une variante en skatepark permet de créer une nouvelle dynamique de continuité pédestre. Une passerelle surplombe le terrain, ce qui optimise les points d’observations sans perturber la zone de skate.
Croquis de détail d’un terrain de sport.
Croquis de détail d’un skatepark.
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Parcours parallèles - Réseau et continuité
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RÉSEAU ET CONTINUITÉ Un réseau parallèle tente de mettre en place une coordination entre un cheminement et un établissement : un réseau qui forme un rapport entre un indicateur de circulation, tels une cartographie, et l’acte de fonder, de fixer une position. Ce réseau permet une relation entre un itinéraire, une indication de lieu à l’échelle d’un quartier et un mobilier qui a comme fonction de stabiliser et ponctuer cette chaine dans un ordre local. Issu d’un langage de circulation automobile, ces noeuds autoroutiers proposent différentes postures d’assises et guident, annoncent, telle une signalétique, les itinéraires possibles.
Barcelone - Espagne
Istanbul - Turquie
Las Vegas - États-Unis
Birmingham - Royaume-Uni
Parcours parallèles - Réseau et continuité
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Mobilier
Signalétique au sol
Possibilité de circuler
Possibilité d’assises
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Parcours parallèles - Réseau et continuité
L’espace central, un terre-plein isolé généré par les voies de circulations automobiles, se transforme en pièce principale dans un maillage de relation pédestre. La signalétique, un tracé jaune rappelant les marques éphémères d’une modification de voirie, permet de lier le mobilier giratoire, telle une répartition de molécules liées entre elles afin de fabriquer un nouveau réseau de déplacement et de cartographie.
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IDENTITÉ ET IMAGIBILITÉ Délimitations et frontières Délimitations et imagibilités
Identité et imagibilité
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IDENTITÉ ET IMAGIBILITÉ Renforcer l’imagibilité d’un lieu consiste à faciliter son identification et sa structuration visuelles. Les éléments dégagés dans la première partie des recherches théoriques, les limites, les points de repère sont des outils de construction servant à fabriquer, à l’échelle d’un espace, des structures fermes et différentiées. Néanmoins, les recherches suivantes tentent d’impulser, dans un processus formel, des usages à la fois spécifiques et flexibles. Il s’agit de générer un langage visuel et malléable. En effet, la création de l’image d’un espace dépend de la perception de l’observateur sur l’espace observé, mais aussi de la façon dont l’usager interprète et organise ce qu’il peut voir ou toucher. Ces conduites organisatrices permettent différentes actions spatialisante, oscillant toujours entre l’échelle d’un mobilier urbain, jusqu’à une forme architecturale. Elles offrent un pouvoir distributif : de composition, de déstructuration ; et identitaire : elles délimitent, articulent et différencies un espace avec un autre.
La «Storefront» est une galerie au coeur de New York dédiée à l’innovation architecturale et artistique. Sa façade se transforme selon le degré d’ouverture de ses 12 plaques pivotantes et joue de cette ambiguïté entre espaces intérieurs et extérieurs, privés et publics. Une fois en position ouverte, la façade se dissout et l’espace intérieur de la galerie se développe sur le trottoir. Ce dispositif, né en 1993 d’une collaboration entre l’artiste Vito Acconci et l’architecte Steven Holl, était initialement prévu pour être temporaire, mais n’a depuis jamais été remplacé. Il participe à la porosité du lieu et lui confère sa propre identité.
Steven Holl et Vito Acconci «Storefront for art and architecture» New York, États-Unis, 1993.
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Identité et imagibilité - Délimitations et frontières
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DÉLIMITATIONS ET FRONTIÈRES «Dans le récit, la frontière fonctionne comme tiers. Elle est un «entre-deux», — un «espace entre-deux», Zwischenraum, dit un merveilleux et ironique poème de Morgenstern sur la «clôture» (Zaun), qui rime avec «espace» (Raum) et «voir à travers» (hindurchzuschaun).» Ces parois, à l’image d’une frontière infranchissable, tentent d’établir des interactions permettant de la traverser. Par l’utilisation d’articulations, la délimitation de l’espace est mise en mouvement. Elles dessinent plusieurs typologies de frontières et de déplacement possibles, dans un jeu de composition et de décomposition.
Décomposition d’une frontière infranchissable. Par son articulation, cette limite devient malléable et forme, dans un jeu de structuration et de déstructuration, différents espaces de déplacements ou d’habitabilités.
Michel de Certeau, «L’Invention du quotidien, 1. Art de faire», Folio essai, p. 187.
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Identité et imagibilité - Délimitations et frontières
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Les parois forment une rupture visuelle et physique. Elles cloisonnent et délimitent un espace.
Un mur pivote et offre la possibilité de traversée. La frontière se transforme alors en un jeu mouvant de franchissements et d’assises.
La frontière est totalement porose, les assises sont en face à face, de nouvelles interactions sociales émergent.
Recherche de scénarii de compositions, au travers la mise en mouvement d’une frontière infranchissable
Ce principe d’articulation traduit en mobilier permet des interactions mouvantes entre usagers, des jeux de cadrages, d’ouvertures et de cloisonnements de l’espace.
Identité et imagibilité - Délimitations et frontières
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Toujours grâce à un système d’articulations, ce jeu géométrique propose des formations d’espace flexibles. La composition organisée et concentrée mute en formation aléatoire et occupe un plus large périmètre.
Par la décomposition d’une forme géométrique, l’articulation de modules permet de dynamiser une surface plane. Dans un rapport de plein et de vide, l’espace social se dissout ou se recompose.
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Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
DÉLIMITATIONS ET IMAGIBILITÉS Les recherches théoriques ont permis d’identifier la notion de limite comme une opération fondamentale à la détermination, l’articulation et la différenciation d’un espace avec un autre. La création d’une frontière, qu’elle soit franchissable ou infranchissable, donne naissance à l’organisation d’une spatialité. La délimitation offre une assise : elle découpe un territoire et génère une représentation physique d’un espace. Elle permet ainsi un jeu d’interaction et d’entre-deux. Tel un seuil, une limite, elle est capable de métamorphoser un lieu en une distribution dynamique et polyvalente de mouvements : en marquant une rupture, elle symbolise le passage du vide vers le plein, d’un lieu vers un espace établi et circonscrit.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
La conception de la Maison du Peuple repose sur une dissociation complète entre la façade et la structure porteuse principales. Ce parti constructif, reconnu comme l’une des premières réalisations en mur-rideau, permet au bâtiment de réunir des fonctions totalement différentes au sein d’un même espace. Grâce à la mise au point de dispositifs coulissants, plancher amovible et toit ouvrant, l’architecture devient polyfonctionnelle et accueille plusieurs programmes : des locaux administratifs, des salles de réunions et des bureaux. Au rez-de-chaussée, un grand espace libre est destiné au marché couvert. L’étage supérieur permet l’organisation flexible d’un espace pour accueillir des réunions, des expositions, des spectacles ou encore s’ouvrir sur le rez-de-chaussée.
«La Maison du Peuple», Eugène Beaudouin, Marcel Lods, architectes, Jean Prouvé, architecte et ingénieur structure, Clichy, France, 1939
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Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Au travers l’utilisation et la réinterprétation d’un langage urbain, plusieurs formes de délimitations émergent : une treille, issue d’un langage de tissu urbain, permet de structurer visuellement un espace. Tel un guide spatial, cette trame offre des possibilités d’accroches, elle quadrille et donne une hauteur limite à l’espace. Puis, par une délimitation au sol, un plan libre issue de l’agora grecque et du temple romain qui désignent symboliquement des lieux de rassemblements, de communications et d’échanges, un périmètre apparait un offre la marque d’un espace social.
New York, États-Unis, Centre urbain - Plan hippodamien
Italie - Temple Romain
Synthétisation et superposition des deux trames. Elles composent un espace circonscrit, délimité, mais perméable, sans frontière physique.
Paris - France Centre urbain - Plan radioconcentrique
Grèce - Agora
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Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
Superposition des trames urbaine et sociale, une double dynamique apparait entre la délimitation de surface et le quadrillage dans l’espace.
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Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
Les trames sont ici imaginées en superposition d’une grille existante, un parking.
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Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
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Parois textiles Parois textiles
Ces différentes compositions montrent les possibilités de cloisonnements. Elles permettent de fermer l’espace, mais aussi une inversion entre intérieur et extérieur.
Par l’utilisation de parois modulable, les configurations de l’espace changent, et permettent différentes typologies : un espace clos, protégé, ou une délimitation progressive, ouverte vers l’extérieur.
Étude comparative des mouvements possibles.
Étude des mouvements, des répartitions et des distributions possibles au sein de cette délimitation.
Identité et imagibilité - Délimitations et imagibilités
Scénarii d’appropriations. Inutilisée, la structure porteuse ressemble à un vestige architectural, elle ne perturbe pas les usages existants dans le lieu. Une fois activé par l’utilisation de parois textile, l’espace social apparait.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Ce schéma envisage l’accumulation des treilles et des trames. Un bâtiment se compose et se transforme perpétuellement selon les usages.
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tactiques compensatoires Serre urbaine Ville Parallèle
Tactiques compensatoires
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
TACTIQUES COMPENSATOIRES La force d’un lieu parallèle réside dans son vecteur de proximité et d’immédiateté. Tel un espace disponible instantanément, à l’échelle d’un quartier, il peut organiser des tactiques compensatoires, vouées à l’échange social ou culturel entre citadins. Les viaducs de métros aériens sont des exemples significatifs de lieux parallèles. Dû à leur utilisation monofonctionnelle vouée au déplacement intra-urbain, ils forment, par leur structure apparente, de grandes percées territoriales au coeur du tissu urbain. De ce fait, ils organisent un dédoublement discursif, c’est-à-dire un contreemplacement rationnel et logique, entre le lieu d’où ils émergent et le «non-lieu» qu’ils produisent. Bien qu’elles soient relatives aux possibilités offertes, ces propositions conceptuelles, comme des tactiques traversières, n’obéissent pas à la loi du lieu. Elles se reposent sur un champ conformé par sa structure préexistante, afin d’introduire des façons d’en tirer parti et constituer ainsi un second langage imbriqué dans le premier. Elles créent du jeu par une stratification de fonctionnement différent et interférent. Et instaurent de la pluralité dans un entre-deux, d’où elles extraient des effets imprévus. Le viaduc de métro aérien et son contre-emplacement émettent une réserve de disponibilité. Tel un espace autarcique, qu’il s’agira ici de renforcer, ils sont capables de former un «lieu à la demande», un espace propre ou transitoire, jouant des capacités structurelles et architectoniques de son environnement.
«Parallele District in Berlin» Archizoom 1969
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Viaduc du métro Station A
Station B
10 min
Station A
Station B
Viaduc du métro Serre : canal principal de circulation pédestre.
Serre Station de métro
Viaduc du métro aérien, Proche de la station Sèvre - Lecourbe, Paris.
40 min
Tactiques compensatoires - Serre urbaine et Ville Parallèle
SERRES URBAINES «Les consommateurs produisent quelque chose qui a la figure des «lignes d’erre». Ils tracent des «trajectoires indéterminées», apparemment insensées parce qu’elles ne sont pas cohérentes avec l’espace bâti, écrit et préfabriqué où elles se déplacent. Ce sont phrases imprévisibles dans un lieu ordonné par les techniques organisatrices de systèmes. {…} Ces «traverses» demeurent hétérogènes aux systèmes où elles s’infiltrent et où elles dessinent les ruses d’intérêts et de désir différents. Elles circulent, vont et viennent, débordent et dérivent dans un relief imposé, mouvances écumeuses d’une mer s’insinuant parmi les rochers et les dédales d’un ordre bâti». Dans un premier temps, la création d’un espace autarcique, au travers de la propagation de la nature contrastant cet environnement minéral et géométrique, permet d’envisager un couloir de circulation pédestre détaché de son propre contexte. L’intérêt ici n’est pas dans l’espace «solide» qui organise cet isolement, mais dans le mouvement autre, utilisant les éléments du terrain. En effet, ce langage offrirait une dilatation des déplacements, un parcours sinueux qui fait perdre pied à toutes les images négatives du lieu. Considérant la structure du viaduc comme une forme architecturale non aboutie, ces «tubes» de déplacements compensent le vide en générant une rupture visuelle et physique. Pensées comme impénétrables, uniquement aux abords des stations de métro, qui forment des espaces «naturels» de convergences, cette serre s’impose comme un nouveau canal principal de circulation pédestre.
Michel de Certeau, «L’Invention du quotidien, 1. Art de faire», Folio essai, p. 57
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
VILLE PARALLÈLE Dans le même contexte, la Ville Parallèle propose de nouveaux espaces de circulations, de rencontres et d’activités. Au travers de modules programmatiques suspendus sous le viaduc, cette ville offre un microsystème autarcique, une nouvelle forme d’espace de vie. Envisagée au cours d’un projet intensif, ayant pour but de stimuler et aplatir toutes les recherches théoriques, cette écriture composée d’unités thématiques permet d’envisager une pluralité d’espaces d’habitabilité, répétables et interchangeables à l’infini. Ce «tissu urbain parallèle» génère un lieu-rupture, pensé comme infranchissable et impénétrable, tels une parenthèse urbaine, un espace à la demande ou des cellules de réservations, dans lesquelles le citadin se retrouve immergé et isolé. Afin d’accentuer cette démarche et ce positionnement autarcique, voire paradoxal, la Ville Parallèle n’est accessible que par le biais de «capsules» de déplacement. Des cellules de voyage qui outrepassent les limites de circulations automobiles et piétonnes. Elles jouent le rôle d’interface entre la ville et ce contre-emplacement, générant à elles seules un nouveau réseau aérien. Néanmoins, cette Ville Parallèle est le signe d’une forme d’habitabilité, un nouveau tissu urbain qui reconstruit un réseau de relation entre citadins et environnement.
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Tactiques compensatoires - Ville Parallèle
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
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Végétation
Plan
Circulation centrale
Métro aérien
Élévation Les modules programmatiques sont fixés sous le tablier du viaduc.
Unité végétale Ce module propose d’immerger le citadin dans un univers végétal, telle une serre urbaine, l’unité réutilise la forme standard du conteneur, malléable, il permet l’emboitement et la répétition.
Assises formées par des courbes de niveau. Revêtement tissu. Façade amovible, permet de voir ou de masquer l’extérieur. L’utilisation du rideau offre un jeu de cadrage et de point de vue. Plan
Circulation
Élévation
Unité «Agora» Véritable optimisation ou reconstitution d’un espace public, l’unité «Agora» propose une nouvelle centralité à la ville parallèle. Les dimensions standards du conteneur ainsi que la circulation centrale sont conservées.
Circulation
Plan
Détail mobilier rangé
Unité d’activités Cette espace favorise différentes formes d’activités : le travail, l’échange, le calme. Grâce au mobilier flexible, l’espace se métamorphose selon l’usage.
Le mobilier est pensé comme flexible. Par simple manipulation, des tables et des assises «s’extrudent» du sol, offrant de nouveaux usages à l’unité.
Détail mobilier sorti
Tactiques compensatoires - Ville Parallèle
Unité végétale
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Unité «Agora»
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Unité activités
Plan
Plan Pile
Viaduc
Élévation
Répétition d’un module. Par la répétition, la thématique s’allonge et forme un parcours linéaire et continu. Le cheminement en caillebotis maintient les modules connectés.
Plan Élévation La collection programmatique.
Élévation
Composition programmatique. Ajout de l’unité «Agora», c’est le seul module qui permet un contact visuel avec l’extérieur.
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Tactiques compensatoires - Ville Parallèle
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La cellule de voyage
En circulation, la capsule est fermée, sécurisée.
Les capsules de déplacement sont pensées pour voyager le long du viaduc. Elles permettent à l’utilisateur de rejoindre un module thématique depuis une plateforme d’embarquement.
Le réseau aérien est fixé le long du viaduc.
La maison se «plug» à l’unité choisie.
Une fois accostée, la «micromaison» se déploie, l’usager peut profiter de cette cellule comme un abri individuel, et de l’unité végétale comme environnement.
Observatoire urbain Cellules de voyage Plateforme d’embarquement
Plan
Élévation
Station d’embarquement Issu de la forme archétypale d’un totem, cette station d’embarquement est un repère visuel et physique dans le tissu urbain, ce «signe du lieu» permet l’accès aux cellules de voyage et annonce la présence de la Ville Parallèle à proximité.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
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Tactiques compensatoires - Ville Parallèle
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
VILLE PARALLÈLE Plan général
Ville Parallèle
Viaduc Réseau aérien pour cellules de voyage
Totem Station
Voirie
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Tactiques compensatoires - Ville Parallèle
VILLE PARALLÈLE Élévation générale
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CONCLUSION Intention de finalisation Partenaires
Conclusion
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CONCLUSION «La ville : derrière l’usage générique de ce nom se profile toujours plus ou moins et qu’on le veuille ou non le fantôme d’un idéal perdu, sans doute imaginaire, mais que tout geste de fondation tend à relancer». Face à ces recherches plastiques, trois outils propices à une réappropriation citadine émergent : Le mouvement, traduit sous la forme d’une continuité morphologique ou topographique, comme une combinaison d’espaces hétérogènes, ou une syntaxe déterminant des programmes ou séries de pratiques par lesquelles on s’approprie l’espace. Puis, par des éléments qui façonnent l’identité ou l’imagibilité. Ils ont permis de mettre en place des processus spatiaux propres à une dynamique sociale qui composent ou recomposent quelques éléments d’un espace familier, relationnel, c’est-à-dire un espace stable et localisé. Enfin, par la tactique, un «style d’action» ou une «manière de faire», qui intervient comme un champ qui régule, tel un système, mais qui obéit à d’autres règles en constituant un second niveau de lecture et d’habitabilité imbriqué dans le premier.
C’est par cette possibilité qu’il offre d’encaver de riches silences, de solennels vides, qu’un lieu parallèle permet des issues, des moyens de sortir et de rentrer, et donc des espaces d’habitabilités. Cette force de centralité, en tant qu’espaces de proximité et d’immédiateté, provient de la logique fonctionnaliste qui l’a fait émergé, de ce qui l’attire et le rejette dans l’interminable extension urbaine. À travers l’histoire, il a développé cette capacité de résistance et produit finalement, une forme de retournement, «un déracinement de ses origines» capable, par l’articulation de ses lacunes, de produire des pratiques inventrices d’espaces.
Parallèlement à ces recherches plastiques, la contextualisation sommaire d’un environnement urbain a permis d’appuyer et de conforter les recherches théoriques. En effet, l’étude de différents éléments qui façonnent le paysage de la ville a décelé les disjonctions qui séparent un espace urbain d’un espace délaissé. Ce dernier ne révèle pas ou ne conserve aucune charge identitaire, relationnelle ou historique. C’est en ça que l’anthropologue Marc Augé les nomme «non-lieux». De cette perte, de ce manque, comme «le fantôme d’un idéal perdu» proviennent l’opportunité et la puissance du lieu parallèle : il puise sa force du vide qui le crée.
Jean-Christophe Bailly, «La phrase urbaine», Seuil, p. 11
Michel de Certeau, «L’Invention du quotidien, 1. Art de faire», Folio essai, p. 160
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Intention de finalisation
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
INTENTION DE FINALISATION Au coeur du 13e arrondissement de Paris se trouve la plus longue ligne de métro aérien. Par sa structure apparente, elle trace un vide monumental dans le paysage urbain. La particularité de ce contexte architectural est qu’il offre un espace, un espacement linéaire et constant, structuré par une géométrie métallique s’inscrivant dans le langage architectural de Gustave Eiffel ou des grandes gares ferroviaires. Hormis leur histoire, les viaducs du métro aérien forment de grandes percées territoriales. Ils génèrent un terre-plein central, isolés, déconnecter du reste de la ville. Par le passage fréquent du métro, ils sont source de nuisances sonores, et forment un espace rupture, qui n’est pas en adéquation avec le quartier qu’il dessert. Délaissé, mais indissociable du flux constant des voyageurs, entre déplacements et vie de quartier, cet espace représente l’opportunité d’une réappropriation citadine, et peut porter le potentiel relationnel du contexte choisi afin de répondre à un besoin immédiat d’espace d’activité.
Viaduc du métro aérien, Entre la station Glacière et Corvisart, Paris.
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Partenaires
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
PARTENAIRES Institut d’aménagement et d’urbanisme en Iles-de-France. L’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la Région parisienne (IAURP) a été créé le 4 mai 1960. Il devient, en 1976, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Île-de-France (IAURIF). De l’échelon local à l’échelon des grandes métropoles, L’IAU Îlede-France intervient dans de nombreux domaines, comme l’aménagement de territoire, urbain et rural, la mobilité et le transport, les équipements et services à la population, la cohésion sociale. Le programme d’études s’inscrit dans une volonté de travailler dans une logique plus forte de synergie, de transversalité et de partenariat afin de se donner les moyens d’anticiper les évolutions urbaines et leurs effets pour répondre à des questionnements et des besoins nouveaux dans une Île-de-France et un monde en constante évolution.
RATP, Régie autonome des transports parisiens. Transportant chaque jour près de 10 millions de voyageurs, la RATP, entreprise de transport public, favorise le lien social entre et dans tous les territoires qu’elle dessert. C’est ainsi qu’elle se retrouve au carrefour des échanges entre les citadins et les utilisateurs de leur service. La création d’une Fondation d’entreprise RATP en 1995 a permis d’aller à la rencontre des acteurs associatifs de terrain, témoins fidèles de l’évolution des comportements, des attentes et des mutations urbaines. En 2007, à l’occasion de la définition de ses nouvelles orientations, l’entreprise RATP décide d’orienter sa politique de mécénat vers la promotion du respect dans la ville pour permettre aux citadins de mieux vivre ensemble. Elle soutient et finance des projets de différentes envergures ancrées dans les quartiers de la politique de la ville. Les projets de la fondation sont franciliens, voire internationaux.
«AAA», Atelier d’Architecture Autogérée L’atelier d’architecture autogérée est une plate-forme collective d’exploration, d’action et recherche autour des mutations urbaines et des pratiques culturelles, sociales et politiques émergentes de la ville contemporaine. «AAA» agit par des «tactiques urbaines», en favorisant la participation des habitants à l’autogestion des espaces urbains délaissés, en relativisant les contradictions et contournant les stéréotypes par des projets nomades et réversibles, en initiant des pratiques interstitielles qui explorent les potentialités des villes contemporaines (populations, mobilités, temporalités).
PEPRAV, Plate-forme Européenne de Pratiques et Recherche Alternatives de la Ville. Le projet PEPRAV est développé à partir d’un partenariat initial entre «AAA» (Paris), «Recyclart» (Bruxelles), l’Université de Sheffield (UK) et «Metrozones» (Berlin). Le projet accompagne le travail de terrain situé à l’intérieur d’un nombre de dynamiques urbaines hétérogènes (dynamiques issues des nouvelles populations présentes en Europe, des cultures urbaines émergentes récentes, usages interstitiels, des phénomènes culturels et sociaux locaux, formes collectives d’appropriation de l’espace urbain, etc.) et, à la fois, un travail de réflexion théorique pour développer des nouveaux outils de compréhension et d’analyse adaptés à ces mutations. PEPRAV part de l’hypothèse que les interstices représentent ce qui résiste encore, du moins provisoirement, aux tendances homogénéisantes et régularisantes de la métropole. «Ils sont en quelque sorte la réserve de disponibilité d’une ville. À cause de leur statut provisoire et incertain, ils permettent une fabrication urbaine à travers des processus ouverts, collaboratifs, réactifs et transversaux.»
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Bibliographie et iconographie
BIBLIOGRAPHIE
par ordre alphabétique
Agier Michel «Anthropologie de la ville» Puf, 2015. Augé Marc «Non-lieux, pour une anthropologie à une surmodernité» La Librairie du XXIe siècle, Seuil, 1992. De Certeau Michel «L’invention du quotidien, 1. Art de faire» Folio Essais, Edition Gallimard, 1990. Ferguson Francesca «Make shift city» Édition Herausgeber, Jovis Verlag Gmbh, 2014. Rouillard Dominique «Superarchitecture, le futur de l’architecture 1950-1970» Édition de la Villette, Paris, 2004.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
ICONOGRAPHIE p. 9 1. Kengo Kuma, «Naturescape», Milan, Italie - 2003. http://kkaa.co.jp/works/pavilion/naturescape/ 2. Gaëlle Villedary, «Tapis Rouge», Jaujac, France - 2011. http://www.journal-du-design.fr/art/le-tapis-rouge-par-gaelle-villedary-22521/ 3. Bjarke Ingels Group (BIG), Topotek-1, «Superkillen», Copenhague, Danemark - 2012. http://www.big.dk/#projects
p. 35 Steven Holl et Vito Acconci, «Storefront for art and architecture», New York, États-Unis - 1993. http://storefrontnews.org/
p. 39 Eugène Beaudouin, Marcel Lods, architectes, Jean Prouvé, architecte et ingénieur structure, «La Maison du Peuple», Clichy, France - 1939. Images issue du livre «Prouvé», Nils Peter, édition Taschen, 2012.
p. 57 Archizoom , «Parallele District in Berlin» - 1969. Image issue du livre «No-Stop City», Archizoom Associati, Andrea Branzi, édition HYX, 2006.
p. 58 Viaduc du métro aérien, proche de la station Sèvre - Lecourbe - Paris, 2015. Photographie personnelle.
p. 77 Viaduc du métro aérien, entre la station Glacière et Corvisart - Paris, 2015. Photographie personnelle.
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LIEUX PARALLÈLES :
LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 03 - Quartier Parallèle
UN PROJET DE MATTÉO LECURU MASTER DESIGN GLOBAL, RECHERCHES ET INNOVATIONS Promotion 2014 - 2015
LIEUX PARALLÈLES : LA RÉAPPROPRIATION CITADINE DES ESPACES URBAINS DÉLAISSÉS. 03 - Quartier Parallèle Projet de fin d’études placé sous la direction de Gilles Lebars et Tiphaine Kazi-Tani. Écoles de Condé 2014 - 2015 Paris
Mes remerciements vont à :
TIPHAINE KAZI-TANI PASCALE SIVIERI JEAN-JACQUES LECURU GILLES LEBARS CÉCILE BARANI SCARLETT HOSTEIN
4
p. 7
ENVIRONNMENT DU PROJET Les viaducs du métro aérien - p. 8 Étude du viaduc - p. 10 Un lieu parallèle - p. 16 Programme spatial et thématique - p. 20 p. 23
RECHERCHES La continuité - p. 24 La limite - p. 32 p. 37
QUARTIER PARALLÈLE Le marché - p. 38 Le square - p. 52 Le sport - p. 64 p.77
COLLECTION PROGRAMMATIQUE Compositions et programmation - p. 78 Partenaires - p. 90
6
ENVIRONNEMENT DU PROJET Les viaducs du métro aérien Étude du viaduc Un lieu parallèle Programme spatial et thématique
Environnement du projet - Le viaduc du métro parisien
ENVIRONNEMENT DU PROJET
LES VIADUCS DU MÉTRO PARISIEN Les métros parisiens ont été essentiellement construits entre 1902 et 1909. À certains endroits de la capital, la voie des airs s’impose. Par moment les sols offrent un profil géologique incompatible avec la percée d’un tunnel : ancienne carrière de gypse, dénivelé important, tunnel sous la Seine difficile. La ligne 6 au Sud et la ligne 2 au nord, forment une boucle située pour l'essentiel à l'emplacement de l'ancien mur des Fermiers généraux, une enceinte construite entre 1784 et 1790 pour percevoir des impôts sur les marchandises entrant dans la ville. Il fut détruit en 1860. L’aménagement extérieur du métro, les stations, les structures et l’ornementation sont imaginés par les architectes Louis Biette et Jean Camille Formigé, auteurs des grandes Serres d’Auteuil. Ils utiliseront plusieurs matériaux de construction : la brique, la pierre taillée et un assemblage métalliques, de l’acier pour le tablier et de la fonte pour les piliers. Ainsi, l’infrastructure s’inscrit dans le langage architectural de Gustave Eiffel et des grandes gares ferroviaires, elle est classée au patrimoine architectural de la ville de Paris.
Les Travaux du Métro aérien Boulevard de la Gare Vers 1905 - Paris
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
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Vers Bobigny Pablo Picasso Porte Dauphine Charles de Gaulle - Étoile
Place de la Nation
Place d’Italie
Le projet se situe dans le 13e arrondissement, et concerne le viaduc aérien de la ligne 6 entre les stations de métro Glacière et Corvisart. La longueur totale de la ligne 6 est de 13,6 kilomètres, dont 6,1 km en aérien, découpé en quatre tronçons. Cela fait de la ligne 6 la plus aérienne des lignes du métro de Paris avec 45 % de son parcours à l’extérieur et treize stations à l’air libre sur un total de vingt-huit. Cette ligne est la sixième ligne la plus fréquentée du réseau parisien.
Métro aérien Métro souterrain Localisation du projet
Environnement du projet - Étude du viaduc
ÉTUDE DU VIADUC
Le marché de Barbès - Rochechouart Entre les stations Barbès - Rochechouart et La Chapelle Paris
Brocante Entre les stations Glacière et Corvisart Paris
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
SOUS LES VIADUCS DE PARIS
Terrain de pétanque À proximité du métro Porte d’Italie.
Petit skatepark À proximité du métro Bercy.
Terrain de basket-ball À proximité du métro La Chapelle.
Terrain de basket-ball À proximité du métro Jaurès.
SOUS LES VIADUCS DANS LE MONDE
Skatepark «Burnside Skatepark», Portland USA.
Viaduc de métro végétalisé Gironna, Espagne.
Bar / restaurant «Burgermeister», Berlin.
11
Environnement du projet - Étude du viaduc
12
M
B’
M
3
C
B
1 2 A’
C’
A
404 404 22 68 68
125 125
Plans cadastres Unité : M Échelles variables
187 187
N
Terre-plein
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
13
Circulations automobiles
Bâtiments
Circulations piétonnes
Station de métro
Plans schématiques Circulations existantes
N
Environnement du projet - Étude du viaduc
14
La topographie du site forme une cuvette.
AA’
Ce dénivelé offre un point de vue lointain entre les deux stations de métro.
1
Les stations de métro apparaissent comme des «espaces convergents». Néanmoins, les espaces interstitiels entre les stations ne profitent pas de ce flux de déplacement.
2
Station de métro
Espace interstitiel
BB’
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
15
Tablier
Pile
Lumière
Élévation type d’une section de viaduc. 3 Bâtiments
CC’
La structure du viaduc forme une barrière visuelle.
Depuis le soubassement, le terre-plein offre un recul pour l’observation.
Éclairages sous le viaduc
Éclairages latéraux Éclairage type d’une section de viaduc.
Environnement du projet - Un lieu parallèle
UN LIEU PARALLÈLE Hormis leur histoire, les viaducs du métro aérien forment de grandes percées territoriales. Ils génèrent un terre-plein central, isolé, déconnecté du reste de la ville. Par le passage fréquent du métro, ils sont source de nuisances sonores, et forment un espace monumental et linéaire, en rupture avec le quartier qu’il dessert. Délaissé, mais indissociable du flux constant des voyageurs, entre déplacements et vie de quartier, cet espace représente l’opportunité d’une réappropriation citadine, et peut répondre à une demande d’espace d’activité. Dans cet arrondissement, plus de 20% de la population y est étudiante, la station de métro Corvisart dessert 6 écoles, collèges, lycées et écoles supérieures. On y trouve aussi un marché sur les trottoirs latéraux, et quelques équipements sportifs logés sous le viaduc. De plus, depuis plusieurs années, la mairie du 13e arrondissement abrite le plus grand chantier de la capitale: «Paris Rive Gauche». Ce projet s’étend sur 130 hectares, entre la gare d’Austerlitz et la limite communale de la ville d’Ivry. C’est la plus grande opération d’urbanisme menée dans la capitale depuis les travaux haussmanniens. Autour de son bâtiment phare, la Bibliothèque nationale de France François Mitterrand et le nouveau pôle universitaire de Paris émergent de nouveaux quartiers rassemblant tous les équipements utiles à la vie quotidienne. Progressivement, des logements, bureaux et activités, commerces, services, écoles, équipements publics et culturels y voient le jour et organisent peu à peu tout ce qui fait d’une ville un lieu pour vivre.
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Sous-face du métro aérien de nuit À proximité de la station La Chapelle Paris
Environnement du projet - Programme spatial et thématique
18
M
M
Activités existantes N
Circulations principales Circulations secondaires M Station de métro
Jardin - Square Sport Marché
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
19
M
M
Répartition des activités N
Circulations principales Circulations secondaires M Station de métro
Square Sport Marché
Environnement du projet - Programme spatial et thématique
PROGRAMME SPATIAL ET THÉMATIQUE Un lieu parallèle est le juste équilibre entre un espace fonctionnel, ici un viaduc, et son contre-emplacement ou «non-lieu» : un terre-plein monumental et linéaire. En fragmentant visuellement et physiquement le quartier, cette architecture de déplacement dissout les activités propres à une vie citadine et entretient une forme d’autarcie, un espacement parallèle qui tend à s’autosuffire en se déconnectant des trottoirs et des architectures alentour. Par son envergure, sa localisation et cet isolement, ce lieu ouvert et couvert permet d’envisager un regroupement d’activités. Telle une halle piétonne qui centralise et réorganise les pratiques individuelles, collectives et sociales transformant le lieu en un espace de proximité, et d’immédiateté. Situé sur l’ancienne muraille de Paris, il symboliserait à la fois un nouveau seuil, une nouvelle porte, mais aussi un lieu propre, perceptible et praticable. Le projet, s’inscrivant entre deux stations de métro, permet d’envisager le prolongement spatial et pédestre de celle-ci. Transformant ainsi cet espace monofonctionnel - voué au déplacement métropolitain en un espace multiforme et multi-usage.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Schéma opératoire Dans un premier temps, la continuité est pensée à la fois comme la forme réparatrice de la topographie existante. Mais aussi, comme un socle, un réceptacle sur lequel se modèle un nouvel environnement propice à toutes formes d’activités, d’appropriations, d’observations et de circulations. Puis, par la mise en scène de limites, des frontières visuelles et physiques qui sont traduites sous la forme de «supports thématiques», permettent de générer un cloisonnement intégral du lieu, et accentuer cette typologie «d’espace autarcique» et autonome, détaché de son propre contexte. Néanmoins, cette image d’un lieu infranchissable et impénétrable tente de conserver un statut poreux et perméable. Articulés et manipulables, le citadin peut actualiser certains de ces supports et ainsi transformer en autre chose l’ordre contraignant du lieu. Cette mutation constante de l’état bâti à l’état malléable permet de jouer et de préserver la perméabilité architecturale du site. En délimitant ou en fragmentant l’espace, les limites articulées modifient les perceptions, les transparences et les circulations. D’une halle piétonne linéaire et centralisée, le lieu mute en un labyrinthe d’activités. Ainsi, en proposant un jeu de combinaisons, elles renouvellent les possibilités d’appropriations et transforment dès lors une forme systématique et régulatrice, en un véritable «lieu à la demande».
21
RECHERCHES La continuité La limite
«Playground Models» Isamu Noguchi 1939
«Rålis Skatepark» Stockholm
Recherches - La continuité
26
Point haut d’observation
Point bas d’observations
Circulation automobile Topographie du site Strate de circulation pédestre
Croquis de recherche Coupe longitudinale type
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
27
La création d’une strate permet d’optimiser les points d’observations, de rencontres et de franchissements.
La continuité pédestre par une strate de circulation.
Recherches - La continuité
28
La strate se segmente pour rythmer le parcours.
Point d’assises et d’observations
Casquette Parois
Sol intérieur thématique
Sol / strate
Détails et coupe transversale type
Rampe douce Sol / strate Limite terre-plein
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Viaduc
Parois
Strate
Rupture route
Croquis de recherche, strate et parois Coupe longitudinale type
29
Maquette de recherche Strate et casquette
32
Le Corbusier «Tour d’ombres» Chandigarh, Inde 1950 - 1965
Superstudio «Continuous Monument» 1969
Recherches - La limite
34
Pile A Limite terre-plein
Circulations actuelles. Elles sont définies par les limites du terre-plein.
A’
Viaduc
B Fermeture / cloisonnement. Un espace est délimité, mais perturbe les circulations.
B’
La circulation devient uniquement centrale et linéaire.
C
Fragmentation de l’espace. Chaque cloison devient orientable.
C’ 10
10
10
10
D L’espace s’ouvre, les circulations se mélangent et transforment la régularité architecturale en espace en constante mutation.
D’ Plan type d’une section de viaduc Unité : M
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
35
AA’
BB’
CC’
DD’
Interprétation en volume
Coupe transversale type Étude des perceptions
QUARTIER PARALLÈLE Le marché Le square Le sport
Quartier parallèle - Le marché
38
LE MARCHÉ Châssis métallique
Axe / Pivot
Paroi
Côté maraichers Assise strapontin
Auvent
Côté étal
Étal
Répétition des parois. Elles dessinent un couloir fermé et couvert, propice au marché.
Une fois le marché terminé, le citadin peut pivoter le mobilier, et ainsi ouvrir l’espace.
Mobilier marché Dessins de recherche des parois - mobiliers.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
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Halle centrale Accès maraichers Pile
Strate
Les parois sont fermées, c’est une halle piétonne linéaire.
Une fois ouverte, la frontière fragmente et dissout l’espace.
Casquette
Cette flexibilité permet de générer de nouvelles typologies d’espaces.
Section marché Recherche des différentes typologies d’espaces.
Circulations principales Circulations secondaires
Quartier parallèle - Le marché
Section marché Maquette de principe des rotations.
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Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Vue intérieure du marché Maquette de principe.
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Quartier parallèle - Le marché
Formation parallèle pour le marché.
Formation aléatoire, espace public, assises.
Vues en plan section marché Les différentes typologies d’espaces.
42
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Élévations longitudinales
43
Quartier parallèle - Le marché
Formation à 90°, des micro-espaces se composent.
Formation à 180°, une halle centrale reprend forme.
Vues en plan section marché Les différentes typologies d’espaces.
44
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Élévations longitudinales
45
Quartier parallèle - Le marché
Mobilier marché Maquettes de principes
46
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
47
41,3 20,7 Strate
B
5
Pile
M
Pile
M
41,3 20,7 Strate
B
5
Pile
Pile
41,3 20,7 Strate
Casquette
Pile
A
B
B
5 Rotation 180°
Pile
A
Rotation 180°
Casquette
A
Casquette
A
B
A
Viaduc
Casquette
Pile
Rotation 180° B
A
Viaduc
Casquette
Strate Viaduc
3,5
Casquette
Pile
5,1
Coupe AA 15,8 8,8 Strate
Viaduc
Mobilier marché
3,4
8,6
Pile 15,8 8,8
5,1
Casquette Viaduc 3,4 Strate Pile Casquette Viaduc
5,1
3,4 Strate Pile
Section marché ECH : 1/500 Unité : M
8,6
Coupe BB
8,6
15,8 8,8
N
Casquette
5,1
1,4
Mobilier marché
Strate
Strate
3,5
2 1,4
5,1
Mobilier Pile marché
3,5
2
1,4
5,1
2
Plan
Quartier parallèle - Le marché
48
Axe de rotation Structure auvent Côté étale Structure auvent Côté assises Toile polyester Panneau en polycarbonate alvéolaire
Étal
Vue explosée
Châssis métallique
360°
Auvent Côté assises
Auvent Côté étale
Assises Strapontins Étal
Mobilier Marché Principe de flexibilités
Verrouillage par clé
Assises Strapontins
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Plan technique Unité : CM ECH : 1/200
Mobilier Marché Élévation type Principe d’ouverture
49
Quartier parallèle - Le square
52
LE SQUARE
Tôle métallique
Banc
Mobilier square Dessins de recherche des parois - mobiliers.
Percement
Le percement offre une ouverture visuelle et un cadrage sur l’extérieur.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Pile du viaduc
Module Square Recherche des différentes rotations possibles.
Section square
Circulations principales Circulations secondaires
53
Quartier parallèle - Le square
Section square Maquette de principe des rotations.
54
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
55
Quartier parallèle - Le square
Formation parallèle
Formation square, l’espace linéaire se transforme en patios carrés.
Vues en plan section square Les différentes possibilités d’espaces.
56
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Élévations longitudinales
57
Quartier parallèle - Le square
Mobilier square Maquettes de principes
58
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés 23
D
23 Pile
59
10
Strate
10
5
5
M
M
23
D
23 Pile
10
Strate
10
Strate Casquette
10
Rotation 45°
Casquette
Rotation 45°
CasquetteCasquette
5 C
7,5
Pile
Viaduc 45° Rotation
Mobilier square 2,5
D
C
5
7,5
2,5
D
C
5
2,5
D
C
5
23
D
23 Pile
10
7,5
C Mobilier marché C
2
Plan
7,6
Casquette
2
Niv ±0
Pile
Viaduc
Casquette
Mobilier square
Pile
Viaduc
Mobilier square
7,6
2
Strate
Strate
Coupe CC Strate Viaduc Pile Casquette 7,6
Mobilier square Viaduc Strate Pile Casquette Viaduc
5,0
2,8
Pile Casquette Strate Mobilier Sectionsquare square
ECH : 1/500 Unité : Strate M
7,6
Coupe DD Mobilier square
N
5,0
5,0
2,8
2,8
7,6
Niv ±0
7,6
Niv ±0
Mobilier marché
Mobilier marché
Quartier parallèle - Le square
Panneau polycarbonate
60
Axe rotation
Châssis métallique Panneau polycarbonate
Toile polyester
Toile polyester Banc en bois Auvent Châssis en bois 90° Vue explosée
Auvent
Grand banc Gazon synthétique
Dossier et petit banc
Mobilier square Principe de flexibilité
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
500
740
500
61
200
Élévations Unité : CM ECH : 1/200
Mobilier square Élévation type Principe d’ouverture
Quartier parallèle - Le sport
64
LE SPORT
Pile du viaduc
Les parois sont en position linéaire. Elles forment 4 petits terrains de sport.
Une fois ouvertes, un grand terrain central apparaît.
Panier de basket Cage de foot Panier de basket
Châssis
Mobilier sport Dessins de recherche des parois - mobiliers.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Rideau
65
Petit terrain Foot et basket
Pile
Grand terrain polyvalent
Petit terrain Foot et basket
Typologie petit terrain
Typologie grand terrain
Section sport
Circulations principales Circulations secondaires
Quartier parallèle - Le sport
66
Section sport Maquette de principe des rotations.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
67
Quartier parallèle - Le sport
Formation parallèle : petits terrains de sport.
Formation perpendiculaire : l’ouverture des parois offre une plus grande surface d’activité.
Section sport Vue en plan
68
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
Section sport Élévation longitudinale
69
Quartier parallèle - Le sport
70
Mobilier sport Maquettes de principes
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés 20
10
Casquette
M
10
Casquette
Pile
20 Casquette
Pile F
Strate
E
Rotation 45°
Strate
E
Rotation 45°
Strate
Plan Casquette
Viaduc
10 Mobilier sport
E Mobilier sport
Mobilier sport
Pile
Viaduc
Pile
Viaduc
Pile
7,6
2
Casquette
Casquette Strate
Mobilier sport
2
Niv ±0
Strate
Mobilier sport
7,6
Coupe EE
Niv ±0 Viaduc Strate
Mobilier sport Pile
Viaduc
Casquette
Pile
7,6 Niv ±0
Casquette 7,6
Strate 9,8
Viaduc Strate
Niv ±0
Coupe FF
Pile
9,8
N
Casquette 7,6
Section sport ECH : 1/500 Unité : M
M
19,1
F
19,2
19,1
F
20
F
19,2
F
Pile
Rotation 45°
19,1
F
19,2
71
Niv ±0
Strate 9,8
E
E
Quartier parallèle - Le sport
72
Châssis
Panneau polycarbonate alvéolaire Panier de basket
Panneau noir mat
Filet
Cage de foot 90°
Mobilier sport Principe de fonctionnalité
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
73
Élévations Unité : CM ECH : 1/200
Panneau d’expression libre
Mobilier sport Élévation cotée
76
COLLECTION PROGRAMMATIQUE Compositions et programmations
Collection programmatique - compositions et programmations
COMPOSITIONS ET PROGRAMMATIONS
13
7
22
18
8
18
Compositions thématiques Position parallèle Horaire
Rotation Rotation verrouillée mécanique
78
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
13
22
8
79
18
22
18
Compositions thématiques Position perpendiculaire Horaire
Rotation Rotation Rotation verrouillée déverrouillée mécanique
Rotation manuelle
Collection programmatique - compositions et programmations
M
80
3
4
Vue aérienne Répartition des activités
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
81
2
1
M
M Station de métro
Marché
Square
Sport
Local technique
Point d’observation
Repère des vues
Quartier parallèle - compositions et programmations
22
1
13
82
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
83
Quartier parallèle - compositions et programmations
2
8
18
84
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
85
Quartier parallèle - compositions et programmations
22
3
18
86
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
87
Quartier parallèle - compositions et programmations
1 22
4
88
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
89
Partenaires
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PARTENAIRES Institut d’aménagement et d’urbanisme en Iles-de-France. L’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la Région parisienne (IAURP) a été créé le 4 mai 1960. Il devient, en 1976, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Île-de-France (IAURIF). De l’échelon local à l’échelon des grandes métropoles, L’IAU Îlede-France intervient dans de nombreux domaines, comme l’aménagement de territoire, urbain et rural, la mobilité et le transport, les équipements et services à la population, la cohésion sociale. Le programme d’études s’inscrit dans une volonté de travailler dans une logique plus forte de synergie, de transversalité et de partenariat afin de se donner les moyens d’anticiper les évolutions urbaines et leurs effets pour répondre à des questionnements et des besoins nouveaux dans une Île-de-France et un monde en constante évolution.
RATP, Régie autonome des transports parisiens. Transportant chaque jour près de 10 millions de voyageurs, la RATP, entreprise de transport public, favorise le lien social entre et dans tous les territoires qu’elle dessert. C’est ainsi qu’elle se retrouve au carrefour des échanges entre les citadins et les utilisateurs de leur service. La création d’une Fondation d’entreprise RATP en 1995 a permis d’aller à la rencontre des acteurs associatifs de terrain, témoins fidèles de l’évolution des comportements, des attentes et des mutations urbaines. En 2007, à l’occasion de la définition de ses nouvelles orientations, l’entreprise RATP décide d’orienter sa politique de mécénat vers la promotion du respect dans la ville pour permettre aux citadins de mieux vivre ensemble. Elle soutient et finance des projets de différentes envergures ancrées dans les quartiers de la politique de la ville. Les projets de la fondation sont franciliens, voire internationaux.
Lieux Parallèles - La réappropriation citadine des espaces urbains délaissés
«AAA», Atelier d’Architecture Autogérée L’atelier d’architecture autogérée est une plate-forme collective d’exploration, d’action et recherche autour des mutations urbaines et des pratiques culturelles, sociales et politiques émergentes de la ville contemporaine. «AAA» agit par des «tactiques urbaines», en favorisant la participation des habitants à l’autogestion des espaces urbains délaissés, en relativisant les contradictions et contournant les stéréotypes par des projets nomades et réversibles, en initiant des pratiques interstitielles qui explorent les potentialités des villes contemporaines (populations, mobilités, temporalités).
PEPRAV, Plate-forme Européenne de Pratiques et Recherche Alternatives de la Ville. Le projet PEPRAV est développé à partir d’un partenariat initial entre «AAA» (Paris), «Recyclart» (Bruxelles), l’Université de Sheffield (UK) et «Metrozones» (Berlin). Le projet accompagne le travail de terrain situé à l’intérieur d’un nombre de dynamiques urbaines hétérogènes (dynamiques issues des nouvelles populations présentes en Europe, des cultures urbaines émergentes récentes, usages interstitiels, des phénomènes culturels et sociaux locaux, formes collectives d’appropriation de l’espace urbain, etc.) et, à la fois, un travail de réflexion théorique pour développer des nouveaux outils de compréhension et d’analyse adaptés à ces mutations. PEPRAV part de l’hypothèse que les interstices représentent ce qui résiste encore, du moins provisoirement, aux tendances homogénéisantes et régularisantes de la métropole. «Ils sont en quelque sorte la réserve de disponibilité d’une ville. À cause de leur statut provisoire et incertain, ils permettent une fabrication urbaine à travers des processus ouverts, collaboratifs, réactifs et transversaux.»
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