CONSERVATION - RESTAURATION D’UNE JARRE FUNERAIRE ANTROPOMORPHE DE LA CIVILISATION CHANCAY DATEE ENTRE LE XIIIEME ET XVEME SIECLE (PEROU) Sujet technico-scientifique : Etude de l'efficacité et de l'innocuité de produits utilisés pour le nettoyage de la rouille sur la céramique poreuse Mots clés : Barrigón – China – Nevek® – Comblement au Primal™ WS24 – Retouche aux petits points – Rouille – EDTA pH 5
Léa BIZOUARN Spécialité Céramique - Promotion 2018
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Léa BIZOUARN
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
« L’objet ancien étant le produit d’une fabrication artisanale, sa restauration subit nécessairement les mêmes cheminements » A. France-Lanord, 1973, p.15
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Remerciements Je souhaite remercier toutes les personnes qui, de près ou de loin, ont été présentes tout au long de ce mémoire et qui m’ont apporté leurs conseils, leur aide et leur soutien. Je tiens à remercier dans un premier temps Monsieur David VERHULST et plus largement le musée d’Histoire Naturelle de Lille (MHN) pour m’avoir permis de travailler sur cette très belle œuvre et pour leur confiance. Je remercie les professeurs de l’Ecole de Condé pour la communication de leurs connaissances historiques, techniques, scientifiques et de leur savoir-faire pratique qui m’ont permis de réaliser ce projet de fin d’étude. Je tiens à remercier particulièrement mes tuteurs de mémoire pour leur suivi approfondi : -
Madame Cécile DE CHILLAZ, conservatrice-restauratrice et enseignante à l’Ecole de Condé, pour son soutien, son suivi sur le plan pratique et théorique de la restauration durant ses deux années de mastère.
-
Monsieur Philippe OLLIER, professeur d’Histoire de l’Art, pour son suivi et ses conseils sur le plan historique.
-
Monsieur Michel BOUCHARD, pour son suivi sur le plan scientifique ainsi que pour son aide dans l’analyse de spectrométrie de fluorescence X.
Dans le cadre des recherches historiques, je remercie particulièrement : -
Monsieur Pascal LACOMBE pour ses informations historiques et iconographiques et pour m’avoir présenté sa collection.
-
Monsieur Alejandro SOTTO, restaurateur au Musée d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou (MNAAHP), pour ses informations techniques sur les œuvres chancay.
Dans le cadre du sujet technico-scientifique, je remercie Monsieur Cyril ENTRESSANGLE, Ingénieur technico-commercial chez Konica-Minolta, pour m’avoir permis l’accès à un spectrocolorimètre. Je tiens également à remercier Madame Delphine BERGE et Madame Françoise TOULET, restauratrices du patrimoine, pour leur confiance, pour avoir partagé leurs connaissances. Merci à l’équipe du laboratoire de Conservation-Restauration de céramiques du MNAAHP, Monsieur Alejandro SOTTO et Monsieur Segundo Ruiz VISALOT, et plus largement merci à Magali et toute l’équipe du musée pour son accueil. Je remercie mes camarades de promotion, toutes spécialités confondues, avec un merci plus particulier à mes camarades et amies de la section Art du Feu, Pauline, Emilie et Jeanne, pour ces cinq années et pour le soutien mutuel que nous nous sommes apportées durant ces deux dernières années. Enfin j’adresse mes plus sincères remerciements à ma famille et mes amis, pour leur infaillible soutien, et plus particulièrement à ma maman Nathalie et mon compagnon Benjamin pour leur patience, leurs encouragements, leurs conseils et leurs nombreuses relectures. Léa BIZOUARN
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Fiche d’identification Présentation de l’objet
Face A
Face C
Face B
Face D
P HOTOGRAPHIES GENERALES DE LA CERAMIQUE FUNERAIRE APRES RESTAURATION
Renseignements relatifs à l’œuvre Céramique funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay Funéraire (offrandes) Pérou Civilisation chancay Entre le XIIIème et le XVème siècle
Dénomination Fonction Origine Auteur Datation
Statut Lieu de conservation
Musée d’Histoire Naturelle de Lille
N° d’inventaire Date d’entrée dans les collections
NNBA 6233 Avant 1963
Mode d’acquisition
Inconnu
Nature de l’œuvre Typologie
Jarre anthropomorphe à fond convexe* et panse ovoïde
Dimensions
Hauteur Diamètre maximal (panse) Diamètre encolure Epaisseur du tesson (Tesson n°1) Tesson n° 1 Tesson n° 2
46,5 cm 21 cm 14,4 cm 0,6 cm 6,4 x 3,8 cm 6,5 x 5,3 cm
Poids
Avant restauration Tesson n° 1 Tesson n° 2 Après restauration
2.755 kg 0.19 kg 0.234 kg 2,798 kg
Matériau
Terre cuite, engobe blanc et décors incisés ou peints en brun-rouge signifiant les caractéristiques d’un visage et d’un corps humain
Technique de fabrication
Base moulée, panse et col montés aux colombins, décors modelés à part ; Cuisson en atmosphère oxydante entre 900 et 1000° c
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Fiche technique Identification des parties de l’œuvre Protubérances du crâne Yeux Disques auriculaires
Col
Nez
Point d’inflexion
Bouche
Bras
Panse Mains
Fond convexe
Dimensions de l’œuvre
Tesson n°1
6,4 cm
14,4 cm 3,8 cm 46,5 cm
Tesson n°2 21 cm 6,5 cm
5,3 cm Léa BIZOUARN
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Résumé / Abstract Ce mémoire a pour objet l’étude historique et technologique ainsi que la conservationrestauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay datée entre le XIIIème et le XVème siècle (Pérou). Elle nous a été confiée par le Musée d’Histoire Naturelle de Lille. Grâce à l’étude technologique, formelle et iconographique, nous avons pu conclure, par comparaison avec des œuvres chancay, qu’elle appartenait à cette même civilisation. Il s’agit plus précisément d’un barrigón (ainsi nommé en raison de sa forme arrondie), du style china (en raison de ses yeux en amande), utilisé en contexte funéraire, en tant que récipient à offrandes pour une personne de la classe moyenne. Cette œuvre possédant une valeur historique et documentaire importante, avait perdu une partie de son intérêt esthétique en raison de l’encrassement conséquent qui recouvrait l’ensemble de la surface, mais également en raison de la lacune imposante et d’un comblement noir visuellement gênant. Par les traitements de conservation-restauration, l’œuvre a retrouvé une stabilité structurelle (consolidation et fixage de la surface), une unité formelle (collage, comblement) et esthétique (reproduction de la surface texturée et retouche des décors). L’étude technico-scientifique de ce mémoire a pour but de comprendre le phénomène de transfert de la corrosion métallique sur la terre cuite et de déterminer un produit de nettoyage permettant de retirer au maximum les résidus brun-rouge tout en respectant le plus possible la céramique. Par des analyses élémentaires au spectromètre de fluorescence X et des analyses colorimétriques, nous avons conclu que le complexant EDTA pH 5 permettait d’atténuer les résidus de rouille (sans pour autant les faire disparaitre), et semblait être le moins nocif des produits testés pour la céramique. The purpose of this brief is the historical and technological study aswell as the conservation and restoration of an anthropomorphic funeral urn from the Chancay civilisation (Peru, 12 - 15 century). It was given to us by the Lille Museum of Natural History. Using a technological, formal and iconographic examination, we have been able, by comparing with other pieces of Chancay art, to confirm that it belonged to this civilisation. It is more precisely a barrigón (named after its round shape), china style (because of the almond shaped eyes). It was used during funerals as a container for offerings for a middle class person. This artwork, with its very important historical and documentary value, had lost a big part of its aesthetic interest because of the fouling covering its surface, the important lack of material and the visible older restorations. With the conservation restoration treatments, the work has recovered its structural stability (reinforcement and fixing of the surface), its formal unit (bonding, filling), its aesthetic unit (replication of the textured surface and adjustments of the decors). The purpose of the technical and scientific study of this brief was to understand the transfer of metal corrosion to baked clay and to determine the cleaning agent necessary to efficiently remove the reddish/brown stains while respecting as much as possible the ceramic. An elementary analysis using an Xray fluorescence spectrometer and a colourimetric analysis showed that the EDTA pH5 complexing agent was effective in limiting the rust residues (without completly removing them). It is also the least noxious substance of all the tested products on ceramic. Léa BIZOUARN
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Sommaire Remerciements
---------------------------------------------------------------------------------------------
p. 4
Fiche d’identification
--------------------------------------------------------------------------------------------- p. 5
Fiche technique
--------------------------------------------------------------------------------------------- p. 6
Résumé / Abstract
--------------------------------------------------------------------------------------- ------ p. 7
Avant-propos
--------------------------------------------------------------------------------------------- p. 12
Introduction générale
---------------------------------------------------------------------------------------------
p. 13
PARTIE HISTORIQUE Introduction 1.
-------------------------------------------------------------------------------------------------------- p. 16
Analyse et identification de l’objet A. Analyse plastique
----------------------------------------------------------------------------------
a.
Matériaux et préparation de la pâte
b.
Fabrication
c.
Réalisation des décors
d.
Cuisson
p. 17
-------------------------------------------------------------
p. 17
----------------------------------------------------------------------------------
p. 18
------------------------------------------------------------------------ p. 21
----------------------------------------------------------------------------------- p. 22
B. Analyse iconographique
2.
------------------------------------------------------------------------ p. 17
------------------------------------------------------------------------ p. 25
a.
Description de la forme
------------------------------------------------------------------------ p. 25
b.
Etude du décor
------------------------------------------------------------------------ p. 27
Une œuvre chancay ?
----------------------------------------------------------------------------------
p. 28
-----------------------------------------------------------------------
p. 28
A. Le contexte de création
B. Attribution à la civilisation chancay ?
-------------------------------------------------------------
p. 31
a. Grâce à la forme
-----------------------------------------------------------------------
p. 31
b. Grâce au décor
-----------------------------------------------------------------------
p. 35
c. Authenticité de l’œuvre
-----------------------------------------------------------------------
p. 37
-----------------------------------------------------------------------
p. 38
C. Précision de la datation
D. Une œuvre pour quelle utilisation : une urne funéraire ? Conclusion
---------------------------------------
p. 39
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 45
* PARTIE CONSERVATION-RESTAURATION
Introduction
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 48
Constat d’Etat
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 49
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 50
1.
Etat de la surface A.
Les défauts de la surface
-----------------------------------------------------------------------
a.
Coulures et taches de décor brun-rouge
b.
Traces d’outils
--------------------------------------------------
p. 50
-----------------------------------------------------------------------
p. 51
-----------------------------------------------------------------------
p. 52
------------------------------------------------------------
p. 52
----------------------------------------------------------------------
p. 53
---------------------------------------------------------------------------------
p. 53
B. Les pertes de matière a.
Trésaillage et perte d’engobe
b.
Perte du décor brun-rouge
c.
Eclat de surface
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p. 50
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay C. Les traces blanches
---------------------------------------------------------------------------------
p. 54
D. Les dépôts
---------------------------------------------------------------------------------
p. 55
a.
Dépôt jaune, vert, blanc
-----------------------------------------------------------------------
p. 55
b.
Dépôt brun
---------------------------------------------------------------------------------
p. 55
c.
Couche brune
---------------------------------------------------------------------------------
p. 56
E. Empoussièrement, résidus et encrassement
2.
--------------------------------------------------
p. 57
-----------------------------------------------------------------------
p. 57
------------------------------------------------------------
p. 58
-----------------------------------------------------------------------
p. 59
----------------------------------------------------------------------------------
p. 59
A. Les défauts de la structure
-----------------------------------------------------------------------
p. 59
a.
Dissymétrie de l’œuvre
-----------------------------------------------------------------------
p. 59
b.
Creux au niveau de l’assemblage
a.
Empoussièrement
b.
Résidus à l’intérieur de l’œuvre
c.
Encrassement
Etat de la structure
------------------------------------------------------------- p. 60
B. Les cassures
----------------------------------------------------------------------------------
p. 60
C. Les fêlures
----------------------------------------------------------------------------------
p. 61
D. L’abrasion de certains volumes protubérants
--------------------------------------------------
p. 63
----------------------------------------------------------------------------------
p. 64
-----------------------------------------------------------------------
p. 64
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 64
E. Les manques 3.
Les anciennes interventions A. L’adhésif a.
Visibilité de l’adhésif
b.
------------------------------------------------------------
p. 64
Les ressauts
---------------------------------------------------------------------------------
p. 65
B. La matière noire
----------------------------------------------------------------------------------
p. 66
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 68
Diagnostic 1.
Altérations technologiques
-----------------------------------------------------------------------
A.
Mauvaise adhérence de l’engobe
------------------------------------------------------------- p. 68
B.
La finesse des parties en relief
-------------------------------------------------------------
p. 69
-------------------------------------------------------------
p. 69
--------------------------------------------------
p. 70
------------------------------------------------------------
p. 70
-----------------------------------------------------------------------
p. 73
------------------------------------------------------------
p. 74
--------------------------------------------------
p. 74
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 74
2.
Altérations liées à l’usage de la pièce
3.
Altérations liées à la conservation de l’œuvre A. Conséquences de l’enfouissement B. La sortie de fouille
4.
La conservation post-enfouissement A. Mauvaises conditions de conservation B. Chocs
5.
Les altérations dues aux anciennes restaurations
--------------------------------------------------
p. 75
A. Première restauration : le comblement noir
--------------------------------------------------
p. 75
------------------------------------------------------------
p. 76
B. Deuxième restauration : l’adhésif 6.
Conséquences sur l’œuvre et évaluation de risques A. Conséquences esthétiques
--------------------------------------------------
p. 77
-----------------------------------------------------------------------
p. 78
a.
Perte d’informations sur la couleur
b.
Rupture visuelle
------------------------------------------------------------
p. 78
-----------------------------------------------------------------------
p. 78
-----------------------------------------------------------------------
p. 79
----------------------------------------------------------------------------------
p. 82
----------------------------------------------------------------------------------
p. 82
B. Conséquences matérielles Proposition de traitement 1.
p. 68
Valeurs de l’œuvre
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay 2.
Objectifs de la conservation-restauration
-------------------------------------------------------------
p. 84
3.
Le devenir de l’œuvre
----------------------------------------------------------------------------------
p. 86
4.
Respect de la déontologie
----------------------------------------------------------------------------------
p. 86
5.
Choix global de conservation-restauration A. Le conditionnement de l’œuvre B. La dérestauration
-----------------------------------------------------------------------
p. 87
----------------------------------------------------------------------------------
p. 88
a.
Décollage des tessons
b.
Dégagement du comblement noir
C. Le nettoyage
------------------------------------------------------------- p. 87
-------------------------------------------------------------
p. 89
--------------------------------------------------
p. 89
----------------------------------------------------------------------------------
p. 90
a.
Nettoyage des résidus d’adhésif sur les tranches et la surface
b.
Atténuation de la couche brune dans la partie supérieure
c.
Nettoyage des dépôts
d.
Elimination de l’encrassement général
--------------------------------------------------
p. 91
e.
Atténuation des concrétions salines
--------------------------------------------------
p. 92
f.
Encrassement brun sur la base de la pièce
--------------------------------------------------
p. 92
---------------------------------------
p. 92
------------------------------------------------------------- p. 93
b.
Fixage de l’engobe pulvérulent
-------------------------------------------------------------
p. 93
E. Le comblement du col et de la panse
-------------------------------------------------------------
p. 93
a.
Comblement de la lacune et du col
--------------------------------------------------
p. 94
b.
Comblement de la lacune de la panse
--------------------------------------------------
p. 95
c.
Le cas des volumes manquants et abrasés
--------------------------------------------------
p. 95
Le collage des fragments du col et des comblements amovibles
-----------------------------
p. 96
----------------------------------------------------------------------------------
p. 96
H. La conservation des éléments associés à la céramique chancay I.
La proposition de soclage
p. 98
------------------------------------------------------------
p. 99
-----------------------------------------------------------------------
p. 99
-----------------------------------------------------------------------
p. 100
----------------------------------------------------------------------------------
p. 102
1. Le conditionnement de l’œuvre A. Choix des matériaux B. La mise en œuvre
----------------------------- p. 97
-----------------------------------------------------------------------
Les étapes de conservation-restauration
a.
Le coussin de travail
-----------------------------------------------------------------------
p. 102
b.
La boite de conservation
-----------------------------------------------------------------------
p. 103
c.
La boite de conservation temporaire des tessons désolidarisés
La dérestauration
-----------------------------------------------------------------------
B. Le retrait du comblement en résine Le nettoyage
----------------------------
----------------------------------------------------------------------------------
A. Décollement de tessons collés
p. 105 p. 106 p. 106
------------------------------------------------------------
p. 113
--------------------------------------------------------------------------------------------
p. 116
A. Elimination de l’encrassement général et atténuation de la couche brune dans la partie supérieure
p. 116
B. Atténuation des efflorescences et concrétions salines
p. 123
Le fixage et la consolidation A.
Le fixage de l’engobe fragile
--------------------------------------
-----------------------------------------------------------------------
p. 132
-----------------------------------------------------------------------
p. 132
B. La consolidation des fêlures traversantes 5.
p. 91
Consolidation des fêlures
G. La retouche
4.
-----------------------------
a.
F.
3.
p. 90
------------------------------------------------------------- p. 91
D. La consolidation des fêlures de de l’engobe pulvérulent
2.
------------------
--------------------------------------------------
p. 138
Les comblements des lacunes
-----------------------------------------------------------------------
p. 144
A. Le comblement du col
-----------------------------------------------------------------------
p. 145
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay B. Le comblement de la panse
-----------------------------------------------------------------------
p. 151
6.
Le collage des tessons
-----------------------------------------------------------------------
p. 154
7.
Le traitement de surface
-----------------------------------------------------------------------
p. 160
A. Le revêtement : imitation de l’engobe B. La reprise des décors
------------------------------------------------------------
p. 161
---------------------------------------------------------------------------------
p. 169
8.
La conservation de l’étiquette
-----------------------------------------------------------------------
p. 175
9.
Les préconisations de conservation
-----------------------------------------------------------------------
p. 176
Photographies de l’œuvre selon les étapes de restauration Conclusion
-------------------------------------------------
p. 180
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 181
PARTIE TECHNICO-SCIENTIFIQUE Introduction 1.
2.
-------------------------------------------------------------------------------------------
Présentation des matériaux
----------------------------------------------------------------------
p. 184
A. La céramique
---------------------------------------------------------------------------------
p. 184
B. La rouille
---------------------------------------------------------------------------------
p. 184
C. Les produits testés
---------------------------------------------------------------------------------
p. 186
a.
Choix du complexant
----------------------------------------------------------------------
p. 187
b.
Choix des acides
----------------------------------------------------------------------
p. 188
c.
Choix du gélifiant
----------------------------------------------------------------------
p. 191
Expérimentations
---------------------------------------------------------------------------------
p. 191
A. Les éprouvettes
---------------------------------------------------------------------------------
p. 191
B. Les tests
---------------------------------------------------------------------------------
p. 193
a.
Les pré-tests et détermination des paramètres
b.
La mise en œuvre
C. Les mesures
3.
--------------------------------------
p. 193
----------------------------------------------------------------------
p. 196
---------------------------------------------------------------------------------
p. 196
a.
La spectrocolorimétrie
b.
La spectrométrie de fluorescence X
Résultats et interprétations
------------------------------------------------------------
p. 198
-------------------------------------------------
p. 201
----------------------------------------------------------------------
p. 204
A. Mesure d’efficacité par spectrocolorimétrie
-------------------------------------------------
B. Mesure d’efficacité et d’innocuité par spectrométrie de fluorescence X
4.
p. 183
p. 204
-----------------
p. 205
-------------------------------------------------
p. 205
a.
Variation du taux de fer (Fe) en surface
b.
Variation du taux de calcium (Ca) en surface
--------------------------------------
p. 208
Bilan de l’étude
---------------------------------------------------------------------------------
p. 210
A. Choix du produit ?
---------------------------------------------------------------------------------
p. 210
B. Limites des analyses et critique du sujet
-------------------------------------------------
p. 212
Conclusion
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 214
Conclusion générale
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 215
Glossaire
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 217
Bibliographie
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 219
Table des illustrations
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 229
Table des annexes
-------------------------------------------------------------------------------------------
p. 232
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Avant-propos Passionnée par l’Histoire et le travail artisanal et artistique, c’est tout naturellement que mon intérêt s’est porté sur la science alliant ces différents aspects : l’archéologie. J’ai par la suite découvert le métier de conservateur-restaurateur au Service Archéologique du Département des Yvelines. J’y ai rencontré un métier de passion, un moyen des plus concrets pour participer à la pérennité des œuvres, à leur transmission aux générations futures. L’ensemble des aspects de cette profession m’a attirée : elle nécessite des connaissances variées dans différents domaines : Histoire et Histoire de l’art, sciences humaines, technologies de matériaux, chimie et physique, etc. Par ailleurs, l’aspect intellectuel (chercher à comprendre le travail de l’artiste ou de l’artisan, les techniques employées, leurs choix stylistiques, formels et iconographiques, trouver les informations historiques que l’objet transporte) allié au contact direct avec l’objet et le côté manuel du métier m’ont immédiatement attirée. J’ai donc intégré l’Ecole de Condé en 2013 dans la volonté de participer la conservation des biens culturels français et étrangers. Mon intérêt pour l’archéologie et l’ethnographie, m’a naturellement amenée à étudier la céramique et en particulier la terre cuite. Il s’agit d’un matériau présent sur l’ensemble des continents à travers les siècles et les cultures. Les céramiques sont donc des preuves concrètes des évolutions techniques et stylistiques des différentes civilisations. C’est la variété et la richesse technique et historique de ce matériau qui me passionne aujourd’hui. Le mémoire de fin d’études étant un premier pas dans la vie professionnelle grâce aux nombreux contacts qu’elle engendre, le choix de l’œuvre doit être en accord avec notre projet professionnel. Ayant pour volonté de travailler à la conservation-restauration d’objet archéologiques et ethnographiques, mon choix c’est donc tout naturellement tourné vers des collections ethnographiques, privées ou publiques. Après un premier contact avec Monsieur David VERHULST, chargé des collections ethnographiques au Musée d’Histoire Naturelle de Lille, nous avons pu sélectionner des œuvres (chinoise, mexicaine, péruvienne) nécessitant un travail de conservation-restauration. Mon choix s’est arrêté sur la jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay, en raison des intéressantes perspectives de recherches historiques et du travail de restauration qu’elle impliquait.
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Introduction générale L’intérêt pour l’Amérique et ses richesses débute dès la découverte du continent en 1492 par Christophe Colomb1. À partir de la fin du XIXème siècle, l’archéologie professionnelle apparait sur le territoire américain et les recherches commencent à être documentées. En 1843 en France, est créé le service de missions scientifiques et littéraires qui va programmer des expéditions scientifiques en Amérique entre 1875 et 1910 : plus de deux mille objets auraient ainsi été rapportés. En corrélation avec ces découvertes, le XIXème siècle est marqué par le début du collectionnisme : commerçants, diplomates et curieux, fascinés par ce Nouveau Monde, font le voyage dans le but de rapporter des objets en grande quantité. Certains, voulant participer à l’élargissement des connaissances sur ce nouveau territoire, réalisent des dons aux musées ; sinon les objets intègrent le marché de l’art. Après la deuxième Guerre Mondiale, l’archéologie devient plus scientifique ; les objets sont désormais considérés comme des témoignages, des sources d’information dans un contexte global, qu’il est nécessaire de préserver. Aujourd’hui, l’intérêt des professionnels et du public pour les œuvres ethnographiques*2 ne fait que croitre. La création en 2006 du Musée du Quai Branly (Jacques Chirac) et sa popularité en est un exemple concret. Par ailleurs, le musée d’Histoire Naturelle de Lille, l’institution propriétaire de l’œuvre étudiée, bien que destiné aux sciences naturelles dans un premier temps, possède un riche département ethnographique3 depuis 1990. L’œuvre étudiée identifiée comme « N° NNBA 6233 Vase China »4 est une céramique anthropomorphe attribuée à la civilisation chancay (XII-XVème siècle, Pérou). Elle apparait pour la première fois dans le recensement des objets en 19635. L’œuvre a donc intégré les collections avant cette date. Il s’agit, comme vu précédemment, d’une période de grand intérêt scientifique pour ses objets archéologiques et ethnographiques. En intégrant les collections du MHN de Lille, l’œuvre devient autant un objet d’étude scientifique qu’un support de pédagogie destiné au public. Il est donc du ressort des conservateurs-restaurateurs de faire perdurer cette œuvre dans le temps sous l’aspect qui la met le plus en valeur et qui correspond le mieux à son histoire. Connaitre l’œuvre et respecter cette dernière durant sa conservationrestauration est l’enjeu principal de ce dossier. L’objectif premier étant de lui rendre sa lisibilité sans lui redonner un aspect neuf. BAU Valérie : Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et d’Amiens, mémoire de maitrise université de Paris 1 la Sorbonne, Juin 1997 2 Les mots suivis d’un astérisque (*) sont définis dans le glossaire p. 217 3 La collection se compose d’environ 13 000 échantillon et est géré par un conservateur attitré à ce département. 4 Fiche d’inventaire de l’œuvre en Annexe 1 p. 234 5 Il existe très peu d’écrits quant à l’arrivée des biens en Europe et leur entrée dans les musées. Seuls les inventaires nous permettent de situer approximativement l’entrée de ces objets dans les collections. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 13 1
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La première partie de ce mémoire s’attelle à présenter l’histoire de l’œuvre. L’étude de sa typologie, de sa méthode de fabrication, des matériaux constitutifs et de ses décors, nous permettra de la remplacer dans son contexte historique, de préciser son utilisation et de la dater. Cette étude est primordiale pour comprendre l’œuvre qui nous a été confiée et ensuite envisager le travail à effectuer pour la mettre en valeur tout en respectant son histoire. La seconde partie est consacrée à la conservation et restauration de l’œuvre ; commençant par un constat d’état précis, un diagnostic, une proposition de traitement générale évaluant les valeurs de l’œuvre, les choix généraux de restauration en adéquation avec ses besoins ainsi que notre déontologie. Enfin, un rapport détaillé des interventions effectuées mettra en avant les traitements de conservation et de restauration permettant à la céramique de trouver son aspect optimal. Pour finir, une troisième partie est consacrée à la mise en œuvre d’une étude technicoscientifique dont l’objet est les effets (efficacité et innocuité) de produits utilisés dans le nettoyage de la rouille sur la céramique poreuse.
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Partie historique
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Introduction
Introduction
La pièce qui fait l’objet de notre étude est un récipient ovoïde anthropomorphe en terre cuite prêté par le Musée d’Histoire Naturelle de Lille. Elle nous a été confiée sous le nom d’« Urne funéraire China » de la civilisation chancay (Pérou, XII-XVème siècle). En effet, Valérie Bau lui a attribué cette fonction dans son « Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et d’Amiens » dans le cadre de son mémoire en 19916. En ce qui concerne sa provenance, l’œuvre possède une étiquette avec les inscriptions « Ancón, Côte centrale du Pérou » qui pourrait correspondre à son lieu de provenance. Cependant, ni la provenance ni les conditions d’arrivée au musée ne sont affirmables avec certitude. La civilisation chancay est une culture qui s’est développée entre le XIIème et le XVème siècle sur la côte centrale du Pérou. Il existe très peu d’informations sur cette civilisation. L’écriture comme nous la connaissons aujourd’hui n’existant pas dans cette culture, les seuls témoins sont les objets d’art tels que les céramiques, tissus, petites sculptures figuratives taillées dans le bois, etc. Les conclusions sur cette civilisation doivent donc être prises avec du recul : les attributions sont réalisées par comparaison et les datations restent hypothétiques. L’attribution de la pièce à la civilisation chancay est à vérifier et, si possible, la datation sera affinée par l’étude de la forme, de la méthode de fabrication, des décors ou encore des matériaux utilisés. De plus, une étude des rites et du matériel funéraires chancay pourrait nous éclairer sur l’utilité de la pièce : est-elle bien une urne funéraire ? ; a-t-elle été créée au moment de la mort du défunt ? ; lui est-elle personnellement attribuée et porte-elle ainsi ses traits caractéristiques ? Notre recherche va donc concerner deux axes : d’une part les renseignements que la pièce peut nous livrer d’elle-même (forme, fabrication, matériaux, décors) ; d’autre part l’étude de la civilisation chancay et ses rites funéraires, après avoir confirmé l’hypothèse d’appartenance, par l’étude de la pièce et des comparaisons. Nous allons donc, dans un premier temps, procéder à une analyse approfondie de l’œuvre : les matériaux, techniques de fabrication, iconographie. Nous verrons dans un deuxième temps s’il est possible, par comparaison, de rapprocher cette œuvre d’une production chancay et nous tenterons de la dater le plus précisément possible. Enfin dans une troisième partie, nous nous intéresserons à son utilité, le but de sa création.
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BAU V. : Op.cit. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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1. Analyse et identification de l’objet A. Analyse plastique a. Matériaux et préparation de la pâte L’argile L’œuvre est une terre cuite* réalisée à partir d’une argile chamottée*, comme nous pouvons le voir au grossissement microscopique. La couleur orangée de celle-ci nous indique qu’elle est également riche en fer. L’argile disponible sur le territoire péruvien est principalement de nature kaolinite* (Al2O3-2SiO2-H2O) mais est largement contaminée en raison des pluies et des vents7. L’argile utilisée par les céramistes précolombiens, trop riche en aluminium, ne pouvait pas être utilisée pure sans risque de craquèlement lors du séchage de la pièce8. C’est pourquoi, connaissant ce procédé, ils ajoutaient d’autres composants permettant d’augmenter la plasticité* naturelle de la pâte : les dégraissants* tels que du sable, du mica, des minerais ou des restes organiques, mais aussi des céramiques pillées ou des os d’animaux. Ainsi, les points blancs visibles (Fig. 1) dans la pâte étudiée correspondent certainement à des incrustations de silice broyée. Parfois, les argiles étaient naturellement chargées de ces dégraissants et les potiers n’avaient pas besoin de préparer l’argile. Des fondants tels que du carbone ou des sels pouvaient être également ajoutés à la pâte afin de diminuer la température de fusion alors trop élevée par rapport aux techniques de cuisson disponibles, mais aussi de lier et de fusionner les différents matériaux entre eux au moment de celle-ci. L’argile était prélevée et finement broyée puis les dégraissants et fondants réduits en poudre à l’aide d’une pierre étaient ajoutés pour obtenir les propriétés plastiques désirées. Enfin l’ensemble était dilué à l’eau pour obtenir des pains de terre. L’argile ainsi préparée pouvait être conservée quelques temps avant d’être utilisée afin d’augmenter sa plasticité et de réaliser des céramiques aux parois plus fines9. Le travail de cet argile assez peu plastique démontre une grande expérience et une maitrise de l’artisan pour parvenir à ce résultat.
Fig. 1 : Pâte nue à l’échelle 1 et en grossissement microscopique USB
Informations données lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou, notes de l’entretien en Annexe 2 p. 236 8 OCAMPO E. : « Technique de la céramique précolombienne », Trésors de la céramique précolombienne dans les collections Barbier-Mueller, Somogy, 2003 p.22 9 OCAMPO E. : Loc. cit. 7
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Les pigments En ce qui concerne les pigments utilisés pour les décors, nous observons un pigment blanc utilisé pour colorer l’œuvre entièrement ainsi qu’un pigment brun-rouge utilisé pour les décors. Les pigments utilisés sont tous naturels et facilement disponibles pour les potiers : ils peuvent être d’origine végétale, organique, animale ou minérale. L’engobe* blanc est fabriqué à partir d’oxyde d’aluminium et le pigment brun-rouge correspond à un oxyde de fer. Les variations visibles dans celui-ci proviennent des différences de cuisson.10 Les oxydes sont prélevés dans la nature et finement broyés. Ils sont ensuite mélangés à de l’argile de même nature que l’œuvre afin d’obtenir une « peinture » applicable.
Fig. 2 : Oxyde d’aluminium permettant de colorer l’engobe blanc
Fig. 3 : Oxyde de fer permettant d’obtenir les décors brun-rouge
b. Fabrication En ce qui concerne le statut de la céramique dans la culture chancay, les avis sont partagés. Certaines sources évoquent la présence d’artisans professionnels dans un lieu dédié uniquement à cette production11 12 ; cependant certains expliquent la simplicité de la céramique par le manque de spécialisation des potiers, en fait issus du peuple13. Selon ces derniers, toute la population était amenée à créer. La fabrication des différentes parties La pièce n’a pas été fabriquée en une fois. En effet, il est possible d’observer les lignes de coutures et les traces d’outils entre les différentes formes. De plus, les traces de fabrication
Informations données lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou, notes de l’entretien en Annexe 2 p. 236 11 Informations données par Pascal LACOMBE, spécialiste de la civilisation chancay. 12 VAN DALEN LUNA Pieter. « Arqueología tardía del valle Chancay-Huaral : identificando la nación Chancay », Investigaciones sociales, UNMSM-IIHS Lima Perú, 2012, Vol.16 N° 28 p. 271-283 13 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 18 10
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sont différentes en fonction des parties, nous indiquant une différence de méthode. Il était en effet fréquent, dans les cultures précolombiennes, de mêler différentes techniques dans une même pièce telle que la technique du colombin (Fig. 4) et celle du moule (Fig. 5). Le moulage et le modelage sont les deux seules techniques utilisées par les céramistes chancay.
Fig. 4 : Technique du montage aux colombins ??????
Fig. 5 : Moule bivalve Mochica
Grâce aux signes présents sur la pièce, nous pouvons définir que la pièce a été réalisée en quatre parties14 : •
Le col et la panse ont été fabriqués séparément. Les lignes régulières perceptibles sur la paroi intérieure et l’aspect très rond nous font penser à une pièce tournée, c’est-à-dire fabriquée sur un tour rotatif manuel. Cependant, selon E. OCAMPO, « les céramistes américains ne connaissaient pas le tour de potier. […] Cela ne les empêcha pas de réaliser des pièces parfaitement sphériques »15. Généralement une pièce montée au colombin16 est identifiable par les boudins visibles sur les parois intérieures, ce qui n’est pas le cas ici. Ce qui signifie que le potier a réalisé un travail très minutieux en prenant soin d’effacer les traces des colombins sur les deux faces17. Deux renfoncements ont été créés au milieu du col afin de réaliser les orbites. Deux retraits verticaux ont également été créés au niveau de la panse. Nous pouvons aussi observer un creux de la taille d’un doigt entre ces deux renfoncements verticaux. Fig. 6 : Renfoncements formels
En ce qui concerne le vocabulaire des parties de l’œuvre, se référer à la Fiche technique p. 6 OCAMPO E. : Op. cit., p. 21 16 La technique du montage au colombin consiste à assembler des boudins d’agile en couches successives. Les potiers commencent par la base de la pièce, puis celle-ci est montée doucement jusqu’au col. Les anneaux sont aplatis, puis lissés pour faire disparaitre les traces au fur et à mesure du montage, à l’intérieur et à l’extérieur. 17 17 L’assemblage des différentes parties ayant lieu dans un second temps, le potier avec aisément accès à l’intérieur de la panse et du col pour lisser la paroi. 14 15
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•
Le fond convexe aurait été moulé sur ou dans un récipient. La pâte est comprimée contre les parois du moule ; après son séchage, la pièce se détache d’ellemême18. Des traces de fabrication sont visibles sur la paroi extérieure.
•
Dans un troisième temps, des éléments ont été modelés séparément. C’est le cas des quatre protubérances du col, des deux disques
Fig. 7 : Protubérance au milieu du dos
auriculaires, du nez pointu, des bras, des yeux ainsi que de la protubérance au milieu du dos (Fig. 7). Derrière les disques auriculaires, l’artisan a positionné des renforts. Cette technique indique l’expérience du modeleur qui estime que ses éléments sont trop fragiles pour se maintenir seuls.
Fig. 8 : Renforts à l’arrière des disques auriculaires
L’assemblage Les différentes parties encore crues (col et panse, panse et fond, et les éléments
modelés)
sont
ensuite
assemblées entre elles à l’aide de barbotine* :
les
deux
tranches
à
assembler sont griffées pour obtenir une meilleure adhésion ; puis l’argile délayée est appliquée pour servir d’adhésif.
Les
deux
parties
sont
Museo Larco (Lima) Fig. 9 : Outils en os utilisés pour lisser la surface
juxtaposées et une pression est maintenue quelques instants. Des outils, dont il est possible de voir les traces19, ont été utilisés pour lier les deux parties. Pour assembler les éléments modelés, un tampon est positionné sur la paroi intérieure au moment de l’assemblage20. Cette technique permet d’éviter de créer des renfoncements non voulus, en particulier au niveau du col où la paroi est très fine. 18
OCAMPO E. : Op cit., p. 24 Voir le constat d’état p. 49 20 Informations données par J. PEIFFER, Docteur en Sciences des Céramiques, université de Nancy/La Sorbonne. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 20 19
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Pour des questions de praticité d’assemblage, la panse et le fond convexe ont dû être assemblés en
3
1
3
premier ( 1 ), puis la panse et le col ( 2 ). Pour
1 1 finir, les éléments modelés ont été ajoutés 1 ( 3 ). 1 1 1 Cet ordre d’assemblage permet d’avoir1 accès 1 1 1 1 facilement aux 1 coutures, par l’intérieur. 1 1 1 extérieures ont été lissées,1à l’aide Puis, les parois 1 1 1 1 d’un outil en 1 tissu 1 bois ou en os, du doigt, d’un 1
2
1
1
ou d’un tesson de céramique21, afin de faire 1 disparaitre toutes les traces d’outil. Selon E. Ocampo, les lignes d’union sont effacées mais peuvent rester visibles sur des pièces de qualité inférieure22. 1
1
Fig. 10 : Ordre d’assemblage
c. Réalisation des décors Le décor comprend les décors peints, les décors incisés et les ajouts d’éléments. •
Les décors peints sont composés de deux pigments différents, comme expliqué précédemment. Au vu de leur insolubilité lors des tests, ils ont certainement été posés sur la pièce encore crue (en cours de séchage) et ont donc été cuits à la même température que celle-ci. L’oxyde d’aluminium est utilisé pour réaliser un engobe de couleur crème, c’est-à-dire une argile délayée et colorée. L’engobe permet de cacher les imperfections de la pièce et de créer un fond homogène mettant en valeur les décors. La pièce est plongée dans le bain d’engobe afin qu’il s’applique sur toute la surface23. Il est encore visible sur la panse. En ce qui concerne les décors rouges, l’oxyde de fer est mélangé à de l’argile et de l’eau. Ils sont appliqués d’un seul trait net et précis (ce qui montre la maitrise du peintre) à l’aide d’un pinceau de laine ou de poils24.
Informations données lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou, notes de l’entretien en Annexe 2 p. 236 22 OCAMPO E. : Op.cit., p.24 23 OCAMPO E. : Loc.cit 24 Les décors très fins peuvent aussi être peint à l’aide d’un plume. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 21 21
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Le décor brun-rouge est ensuite poli à l’aide d’une pierre dure puis d’un morceau de tissu ou de cuir25. L’intensité de la couleur varie en fonction des endroits ; le décor est parfois plus rouge orangé que brun-rouge. Cela dépend de la quantité de peinture dont était chargé l’instrument au moment de l’application. •
Fig. 11 : Bouche incisée et peinte
Certaines lignes ont été incisées puis soulignées par la peinture brune. Sur l’argile encore humide, un outil pointu est passé pour créer une fine incision. C’est le cas de la bouche. La pointe peut être une épine de cactus, une pointe en os, une plume ou une écharde de bois par exemple26.
•
La technique du pastillage est aussi présente sur cette œuvre, comme elle a été décrite précédemment. Il s’agit « d’appliquer sur la pièce des morceaux de pâte en céramique déjà travaillés à la forme souhaitée »27. Tous les éléments en relief tels que les disques auriculaires, les bras et mains, le nez, etc. ont été ajoutés avec cette technique.
d. Cuisson Une fois tous les éléments de la pièce assemblés et les décors réalisés, celle-ci est laissée à sécher à l’abri du soleil afin d’éviter la création de fissures28. Elle est ensuite cuite lors d’une unique cuisson. Au vu de la porosité de la pâte nue et de la fragilité de l’engobe, il semble que l’œuvre ait été peu cuite. Selon E. OCAMPO, les céramiques précolombiennes étaient cuites entre 800 et 900° C. Selon A. SOTTO, le test de l’échelle de Mohs29 permet de fournir une idée de la température de cuisson de l’œuvre. Ainsi il affirme qu’une pâte obtenant 6 ou 7 était cuite à environ 900° C. Selon les tests effectués sur l’œuvre étudiée, la pâte est rayable au scalpel (dureté de 5)30. Nous pouvons alors nous imaginer qu’elle a été cuite à une température inférieure. Les céramistes précolombiens maitrisaient la cuisson en atmosphère oxydante* permettant de conserver les couleurs de l’engobe et des décors, mais aussi la cuisson en atmosphère réductrice* pour obtenir des pièces d’un noir parfait. Les paramètres de cuisson des céramiques
25
OCAMPO E. : Op. cit., p.27 OCAMPO E. : Ibid., p.25 27 OCAMPO E. : Loc.cit. 28 Informations données lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou, notes de l’entretien en Annexe 2 p. 236 29 Test de Mohs : test de la dureté de la matière en comparaison à des matériaux plus ou moins durs 30 Les résultats du test de Mohs sont présentés dans le récapitulatif des tests en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 22 26
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étaient en effet connus et maitrisés par les céramistes. L’œuvre étudiée a été cuite en atmosphère oxydante, c’est-à-dire avec une entrée d’air afin d’en conserver la bichromie. A l’époque préhispanique, les fours étaient éphémères, c’est-à-dire destinés à une unique cuisson31. Le foyer était placé dans un puits de trente à quarante centimètres de profondeur et de un à trois mètres de diamètre. Le fond pouvait être recouvert d’argile. Les pièces y étaient placées en fonction de leur taille et de leur finesse : les céramiques de même taille étaient cuites
Fig. 12 : Exemple de four
ensemble afin d’obtenir une température de cuisson uniforme32. La température dans les fours était en effet homogène et progressive ainsi que le refroidissement, afin d’éviter le choc thermique conduisant à la détérioration de la pièce. Selon OCAMPO et SOTTO33
34
, une couche de combustible (bois) était placée entre et au-
dessus des pièces. Des canalisations latérales étaient présentes afin d’apporter de l’oxygène durant la cuisson. Cependant, ce type de cuisson induit des traces, notamment des brûlures, sur les parois des céramiques puisque la combustion est en contact direct avec celles-ci. Or aucune trace de brûlure n’étant visible sur la pièce étudiée, il est probable que les flammes ne touchaient pas les parois de la céramique et que la cuisson était homogène. Cependant nous ne possédons pas d’autres informations plus précises quant à la forme exacte du four utilisé. Nous ne pouvons donc pas attribuer avec certitude une technique de cuisson à l’œuvre étudiée.
31
OCAMPO E. : Op.cit., p. 30 Si deux petites et une grande pièces sont cuites ensemble à 800° c, lorsque les petites céramiques arriveront à 800° c la grande pièce n’aura atteint que 450-500° c. Cuire les pièces de même taille ensemble permet d’obtenir une cuisson homogène. 33 OCAMPO E. : Op.cit., p.29-30 34 Informations données lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou, notes de l’entretien en Annexe 2 p. 236 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 23 32
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Schéma récapitulatif de la fabrication de la pièce
Fig. 13 : Etapes de fabrication de l’œuvre
Après l’étude des techniques de fabrication des céramiques chancay au travers de différentes sources, nous pouvons rapprocher l’œuvre de celles-ci. En effet, les techniques de modelage et moulage, de création du décor ou de cuisson chancay semblent correspondre à celles observables sur la pièce. Elle s’inscrit donc, au niveau de sa fabrication, dans la tradition chancay35.
Par ailleurs, l’œuvre possède de nombreux défauts de fabrication au niveau de la forme et du décor, présentés dans le constat d’état p. 49 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 24 35
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B. Analyse iconographique a. Description de la forme L’œuvre est de forme oblongue. Elle possède
Visage
une panse large, un col plus étroit et un fond convexe : il est impossible que l’œuvre se maintienne verticalement. La forme de l’œuvre peut être rapprochée de la définition de la jarre : « Récipient fermé, muni ou
Bras
non d’un col » et dont la profondeur est « comprise entre deux fois et trois fois le
Jambes
diamètre à l’ouverture »36. Le diamètre du col étant de 14 cm environ et la hauteur de 46 cm environ, la profondeur de l’œuvre correspond bien à environ trois fois la largeur de son ouverture.
Fig. 14 : Localisation des parties du personnage
La forme de l’œuvre est anthropomorphe. Elle correspond à un personnage assis, les bras et les jambes repliés contre le torse. Le col forme la tête du personnage. Elle comporte deux yeux positionnés dans des renfoncements correspondant aux orbites, un nez fin, pointu et très en avant, une bouche incisée. Plus près de la lèvre, on observe quatre protubérances, positionnées de manière symétrique (devant, derrière et sur les côtés). La panse correspond au corps du personnage : les volumes créés par les renfoncements verticaux forment les jambes, repliées sur le torse ; les bras ont été rajoutés en volume, eux aussi repliés sur le torse. Les pieds du personnage ne sont pas représentés sur l’œuvre. Le nombril au milieu de la panse est représenté par un renfoncement peu large. Les deux disques de chaque côté du visage du personnage (Fig. 16) ne figurent pas des oreilles comme nous pourrions le penser de prime abord. Il s’agit en fait de disques auriculaires, très présents dans la culture chancay. Ceux-ci mesurent environ 7 cm de diamètre et possèdent une tige à l’arrière. Celle-ci était insérée dans le lobe de la personne le portant, à la manière d’une boucle d’oreille. Ces disques auriculaires étaient réalisés en bois, très décorés, colorés et parfois garnis d’incrustations nacrées (Fig. 15). Leur usage était décoratif.
36
BALFET H., FAUVET-BERTHELOT M-F. et MONZON S. : Lexique et typologie des poteries, CNRS Editions, 2000, p. 19 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 25
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Collection privée de Pascal LACOMBE N° 575 ; diamètre : 7,3 cm Fig. 15 : Disques auriculaires chancay
Fig. 16 : Disques auriculaire de l’œuvre
Cette œuvre anthropomorphe peut être rapprochée de la position du défunt dans le paquet funéraire. En effet, les momies chancay découvertes sont en position assise, les genoux contre le torse et les bras repliés. Il n’est cependant pas avéré que les potiers chancay avaient pour but d’imiter cette position funéraire.
Tête
Bras repliés sur le torse
Genoux repliés
Momie chancay présentée au Musée archéologique de Lisbonne (Portugal) Fig. 17 : Correspondance entre la position d’une momie et l’œuvre étudiée
Le personnage comportait, à l’origine, des mains pointées vers l’avant qui portaient un petit vase (Fig. 18). En raison de l’encrassement et des sels présents sur les tranches, nous pouvons affirmer que celles-ci ont probablement été cassées avant enfouissement37. Se référer au diagnostic « Altérations liées à l’usage de la pièce » p. 69 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 37
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N° P424 ; H : 38,5
N° : P396 ; H : 38,2 Collection privée de Pascal LACOMBE Fig. 18 : Exemples de mains tenant un petit vase
N° P268 ; H : 39,3 cm
b. Etude du décor38 Le décor est très simple : il est constitué seulement de formes géométriques et monochromes, uniquement sur la face avant (Face A) de l’objet. Il est composé de six lignes horizontales au niveau de la panse, sur les jambes du personnage ; trois lignes verticales sur les bras ; les disques auriculaires sont décorés chacun d’une croix et de quatre points ; enfin une ligne horizontale fait le tour du col, juste en dessous des quatre protubérances. Quatre lignes épaisses et verticales relient cette ligne à la lèvre. Les quatre protubérances du col sont positionnées à l’intérieur de ces dernières lignes verticales mais ne sont pas peintes. Ce décor peint a deux buts : •
souligner les formes modelées telles que les traits horizontaux et verticaux qui accentuent la bouche et les yeux, donnant à ces derniers une forme en amande.
•
représenter les maquillages cérémoniels très présents dans la culture chancay. En effet pour les nombreuses cérémonies
ponctuant
la
vie
des
civilisations
précolombiennes, la population se pare de peintures faciales et corporelles. Ces peintures faciales sont aussi représentées sur d’autres types d’œuvres comme sur les visages des poupées chancay39. Fig. 19 : Décors peints
L’analyse formelle et décorative permet de comprendre et de connaitre l’œuvre dans son intégralité ainsi que le travail de l’artisan. Les informations recueillies lors de cette analyse seront croisées avec celles dont nous disposons sur la civilisation chancay et ses créations afin de confirmer ou d’infirmer l’appartenance à cette culture. 38
Détails des décors peints en Annexe 5 p. 244 Photographie de deux poupées chancay aux visages tatoués en Annexe 6 p. 245 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 39
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2. Une œuvre chancay ? L’œuvre nous a été confiée comme étant précolombienne40 et plus précisément d’une civilisation péruvienne nommée « Chancay ». De plus, elle possède une étiquette avec les inscriptions « Ancón, Pérou » qui pourrait correspondre au lieu de provenance de l’objet. Nous allons donc, dans cette partie, tenter de confirmer ou d’infirmer l’appartenance à cette culture et l’utilité de la pièce.
Fig. 20 : Etiquette accompagnant l’œuvre
A. Le contexte de création Le mot chancay est un mot du patois péruvien Aymara signifiant « tisser », une activité principale de cette civilisation. Ce mot désigne aujourd’hui à la fois la culture, la région considérée comme ayant accueilli cette culture, une ville et le fleuve qui y coule41. Le Pérou est un pays situé sur la côte pacifique de l’Amérique du Sud. La région Chancay s’est développée sur la côte centrale du Pérou, à 40 kilomètres au nord de Lima. Le territoire était très propice au développement de la civilisation grâce aux trois fleuves : le Huaura, le Chancay et le Chillon.
Fig. 21 : Région de Ancón
Ancón, la région indiquée sur l’étiquette, est un désert de sable qui fut riche en découvertes d’objets chancay : il s’agit en effet d’une nécropole chancay importante.
« Période de l’histoire de l’Amérique qui débute avec l’apparition de l’homme dans le Nouveau Monde et se termine lorsque les sociétés amérindiennes sont remplacées ou transformées par la civilisation européenne » (Dictionnaire Larousse, consulté le 09/07/17) 41 BODOLEC-DUROSELLE C. : Iconographie de la Culture Chancay : La tombe Chancay comme « Mesa », thèse EHESS, 2014, p. 10 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 28 40
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Ancón
Région de développement de la civilisation chancay
Fig. 22 : Localisation de la région Chancay
La période Chancay s’étend du XII au XVème siècle. Cependant il est difficile de donner des dates précises et certaines. En effet, les différentes datations de cette période varient selon les archéologues ayant découvert ou étudié la culture chancay. En raison du manque de moyens scientifiques pour dater les sites et les strates*, chacun a déterminé des périodes et des régions de développement différents. En 1958, John ROWE42 détermine une classification encore acceptée par les chercheurs et historiens : il définit les grandes périodes andines en fonction des évolutions stylistiques des céramiques retrouvées en contexte archéologique. Il présente alors trois grandes périodes nommées « Horizon » correspondant aux différents empires, séparées par des périodes de transition nommées « Intermédiaires »43. Il détermine alors que la culture chancay s’est développée sur la côte centrale entre 1100 et 1470, durant la période nommée « Intermédiaire récent ».
Fig. 23 : Chronologie de la côte centrale d’après John Rowe
42
John ROWE (1918-2004) était un archéologue américain ayant travaillé dans le sud du Pérou puis dans les Andes. Il est reconnu comme un des plus grands spécialistes de la civilisation chancay. (DUGUAY D. : Panorama de l’Archéologie au 20e siècle, Dictionnaire des Incas [En ligne], consulté le 13 Juin 2017, URL : http://daniel.duguay.free.fr/archeologie.htm) 43 Chronologie complète de John ROWE en Annexe 7 p. 246 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 29
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La culture chancay apparait donc au moment du déclin de l’Empire Wari 44 (ou Huari). Cette chute provoque une émancipation des cultures régionales : les cultures chancay (sur la côte centrale), Chimu et Lambayeque (sur la côte nord) prennent alors une grande importance. Malgré le développement de confédérations, la région chancay conservera son indépendance45, jusqu’en 1470 environ, où l’ensemble des sociétés indépendantes sont réunies pour former l’Empire Inca. La civilisation chancay n’a donc pas disparu totalement mais a continué à influencer la production artistique jusqu’à l’arrivée des espagnols. Les productions artistiques précolombiennes sont très riches et les céramiques en particulier sont très variées (Fig. 24). Le style artistique de chaque culture lui est propre, même s’il existe quelques similitudes entre les céramiques (typologie, décors, matériaux) de ces différentes civilisations en raison de leur contemporanéité, de leur proximité et de leur influence les unes sur les autres. Les céramiques contemporaines (Chimu-Lambayeque) à la civilisation chancay sont très différentes au niveau de la forme et du décor46, tout comme l’ensemble des production précolombiennes. Au vu des différences de couleur, de forme, de technique avec les autres civilisations, nous pouvons nous concentrer sur la civilisation chancay pour notre étude.
Fig. 24 : Aperçu des céramiques types produites au Pérou entre 1500 av JC et 1600 44
Le grand Empire Wari est présent sur tout le territoire péruvien entre 600 et 1000 environ. BODOLEC-DUROSELLE C. : Op.cit., p. 43 46 Elles sont toutes noires, brillantes et cuites en atmosphères oxydantes. La majorité sont des bouteilles à anse creuse supportant le goulot - appelée « asa estrivo » - ou deux goulots pointus symétriques. Exemples de céramiques Chimu-Lambayeque en Annexe 8 p. 247 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 30 45
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B. Attribution à la civilisation chancay a. Grâce à la forme Daniel LEVINE, américaniste, archéologue et historien des civilisations de l’Amérique préhispanique, caractérise les céramiques chancay : « Les formes les plus typiques sont illustrées par de grandes jarres ovoïdes quelquefois ornées d’une figure modelée, […] à l’aspect anthropomorphe représentant un personnage tenant généralement un gobelet dans les mains »47. La description que fait LEVINE des céramiques chancay types semble correspondre à l’œuvre étudiée. Par ailleurs, l’archéologue G. CORNEJO a effectué une typologie des céramiques chancay selon le matériel collecté dans les tombes des nécropoles chancay qu’il a étudié. Il existe selon lui neuf catégories de céramiques telles que les assiettes, les verres ou les jarres. Il présente également une typologie qu’il nomme cantaro dans laquelle un dessin ressemble à l’œuvre étudiée48. La forme la plus courante dans la céramique chancay est en effet le cantaro, aussi appelée jarre globulaire : il s’agit d’une céramique à col court et ouverture étroite, avec un fond plat ou ovoïde. Telle que l’œuvre étudiée, certains cantaros sont anthropomorphes. Ils figurent un personnage au gros ventre appelé barrigón49 50
par les premières personnes ayant
découverts ces œuvres. Ce nom est parfois encore utilisé pour désigner ce type de céramiques au Pérou51.
Fig. 25 : Typologie des céramiques chancay (selon G. CORNEJO, 1992, Fig. 2)
Après avoir déterminé que l’œuvre étudiée était un cantaro anthropomorphe aussi appelé barrigón, nous avons comparé l’œuvre étudiée avec d’autres œuvres attribuées à la civilisation chancay. Il existe en effet de nombreuses œuvres ayant un aspect similaire à celleci. LEVINE D. : Pérou millénaire : 3000 ans d’art préhispanique, La Cita, 2000, p. 129 BODOLEC-DUROSELLE C. : Op. cit., p. 105 (Fig. 66) 49 Barrigón est une expression signifiant « gros ventre, gros bidon » en espagnol. 50 ORTIZ ORTEGA Itzel Paulina : « Cultura Chancay », s.d., Universidad nacional autónomia de Mexico, [Document PDF], URL : http://arqueologiayetnohistoria2014.files.wordpress.com201506cultura-chancay.pdf 51 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 31 47 48
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
N° P52 ; H : 31,3 cm
N° P63 ; H : 40,4 cm
N° P104 ; H : 37 cm
Collection privée de Pascal LACOMBE Fig. 26 : Exemples de barrigónes chancay similaires à l’œuvre étudiée
Malgré des différences stylistiques telles que la taille des disques auriculaires, la longueur du buste, ces œuvres chancay sont très similaires à l’œuvre étudiée. Elles possèdent ainsi, comme la jarre étudiée, : -
une panse large et globulaire
-
un fond convexe qui ne leur permet pas un maintien vertical
-
des disques auriculaires de taille importante
-
des mains jointes sur le torse tenant un petit bol
-
un visage sur le col de l’œuvre
-
des jambes, genoux repliés sur le torse (peintes ou modelées)
-
des protubérances au niveau du col
Comparaison des couronnes Les protubérances au niveau du col sont positionnées plus ou moins hautes sur le col et sont plus ou moins nombreuses. Elles sont réalisées à l’aide de petites pastilles de terre modelées séparément et assemblées au col par la suite. L’ensemble de ces protubérances forme une couronne. Elles peuvent être très sophistiquées sur certaines, comprenant de nombreuses pastilles. Certaines couronnes, comme celle de l’œuvre étudiée sont beaucoup plus simples. Celle-ci n’est composée que de quatre protubérances placées symétriquement. La société chancay était très hiérarchisée52 : elle était composée d’une élite sociale (administration, politique), une classe moyenne (artisans et commerçants), une classe populaire 52
VAN DALEN LUNA Pieter. « Arqueología tardía del valle Chancay-Huaral : identificando la nación Chancay », Investigaciones sociales, UNMSM-IIHS Lima Perú, 2012, Vol.16 N° 28 p. 271-283 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 32
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(pêcheurs, agriculteurs, etc.). Le statut social se retrouvait aussi dans la construction de la tombe, le rite et le mobilier funéraires. Ainsi, le nombre de degré incisé (Fig. 27) sur les protubérances pourrait avoir un rapport avec le statut social de la personne à qui la céramique est dédiée : plus la couronne est sophistiquée, plus le défunt était important53. Ce qui signifierait que l’œuvre étudiée n’était pas destinée à une personne de très haute classe.
N° 268 ; H : 39,3 cm Collection privée de Pascal LACOMBE
Museo Chileno de Arte Precolombino
N° 104 ; H : 37 cm Collection privée de Pascal LACOMBE
Œuvre étudiée
Fig. 27 : Exemples de couronne
Ces couronnes caractérisent tous les cantaros anthropomorphes - barrigónes retrouvées en contexte funéraire. L’absence d’attributs masculins évidents et la présence de cette couronne ont donné le nom de reina à ce type d’objets funéraires54. Cependant le principe de royauté ayant été importé par les européens, il n’existait pas à l’époque chancay. Par conséquent, la couronne n’était pas destinée à représenter une reine mais simplement une façon de symboliser un rang social élevé55. Ce nom de reina n’est donc pas utilisé par les spécialistes au Pérou. Nous conserverons donc l’appellation de barrigón pour désigner l’œuvre étudiée. Comparaison des disques auriculaires Les disques auriculaires, comme expliqué précédemment, sont des bijoux représentés sur les barrigónes par des disques de taille plus ou moins imposante. En effet, ceux-ci peuvent
Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 54 Informations données par Pascal LACOMBE, spécialiste de la civilisation chancay. 55 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 33 53
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être grands comme sur l’œuvre étudiée ou plus petits, décorés ou non à l’aide de peinture, ajourés ou non. Ils représentent les bijoux d’oreilles portés par la population chancay.
N° P104 ; H : 37 cm
N° P62 ; H : 38 cm
N° P395 ; H : 38,5 cm Œuvre étudiée
Collection privée de Pascal LACOMBE
Fig. 28 : Comparaison des disques auriculaires de trois œuvres avec l’œuvre étudiée
Comparaison des membres Dans le cas de l’œuvre étudiée, les membres sont principalement représentés par des modelages. Des traits de peinture, perpendiculaires à ces modelages, permettent de les souligner. Ce n’est pas toujours le cas sur les autres œuvres étudiées. Les barrigónes possèdent souvent des membres représentés par des traits de couleur brun-rouge ou noir, mais parfois sans modelage de leur forme. Souvent de petits pieds sont représentés à l’extrémité des jambes ; ils sont pointés vers l’avant.
Œuvre étudiée
N° P104 ; H : 37 cm Collection privée de Pascal LACOMBE
Fig. 29 : Comparaison des membres modelés et soulignés par la couleur
Cependant, l’œuvre étudiée ne possède pas de pieds ni de traces de leur détérioration : l’artisan n’a donc pas représenté de pieds sur cette œuvre. Cela peut être volontaire ou dû à une interruption dans la fabrication de l’œuvre. En ce qui concerne les mains, celles de l’œuvre étudiée ont disparu lors d’une casse. Après analyse et comparaison de la forme de l’œuvre étudiée avec des œuvres attribuées à la civilisation chancay, nous pouvons en conclure que celle-ci leur est très similaire. L’aspect général ainsi que les détails caractéristiques sont bien présents sur toutes ces céramiques. Nous pourrions donc rapprocher la pièce étudiée d’une céramique anthropomorphe chancay aussi nommée barrigón. Léa BIZOUARN
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
Promo 2018
34
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Cependant même si elles possèdent toutes le même aspect, nous avons vu qu’il existe des différences, notamment au niveau du décor. Par ailleurs, nous savons que les civilisations péruviennes contemporaines (Chimu, Lambayeque), se sont influencées les unes les autres. Nous allons donc tenter de confirmer l’attribution de la pièce à la civilisation chancay par l’étude du décor.
b. Grâce au décor La céramique Chancay est aujourd’hui principalement connue pour ses deux types de décor : tricolore ou « Noir sur Blanc ». Ce dernier type a été retrouvé en contexte funéraire par les archéologues qui, pensant qu’il s’agissait du seul type de céramique produit par la civilisation, les ont nommées « Céramiques Chancay »56. Or, différents styles ont été identifiés par la suite au fil des découvertes. Parmi les céramiques retrouvées par les archéologues, certaines sont recouvertes d’un engobe blanc (blanc crème, jaune pâle, beige et blanc verdâtre) à l’extérieur et parfois à l’intérieur et possèdent un décor brun noir pouvant aussi être marron foncé et brun-rougeâtre (Fig. 30)57. Ces céramiques bichromes sont appelées « Noir sur Blanc ». Les décors peuvent être figuratifs (anthropomorphes, zoomorphes) ou géométriques (champs horizontaux, bandes verticales ou obliques)58 ; ils peuvent être simplement composés de quelques traits parallèles ou plus complexes, recouvrant toute la pièce.
Statuette “Cuchimilco” Jarre ovoïde à goulot en The department of art and history, forme de tête appelée china College of fine art, The university of N° P505 ; H : 42,4 Texas at Austin Collection privée de Pascal LACOMBE Fig.30 : Les trois types de céramiques du style « Noir sur Blanc »
Jarre ovoïde à anses verticales Museo de Sitio de Ancon @ Naotoschi Ichiki
56
BODOLEC-DUROSELLE C. : Iconographie de la Culture Chancay : La tombe Chancay comme « Mesa », thèse EHESS, 2014, p. 103 57 BODOLEC-DUROSELLE C. : Ibid., p. 98 58 BODOLEC-DUROSELLE C. : Ibid., p. 108 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 35
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
La céramique étudiée possède, comme décrit précédemment, un décor géométrique simple de couleur brun-rouge posé sur un engobe blanc. Nous pouvons donc dire qu’elle appartient au style chancay dit « noir sur blanc ». Dans cette catégorie de céramiques, il existe une sous-catégorie concernant les jarres anthropomorphes à panse ovoïde et large goulot en forme de tête. Les yeux modelés de ces jarres sont soulignés et prolongés par des traits noirs ou bruns. Ces traits leur donnent une forme d’amande, d’où l’appellation de china. C’est le nom de china qui est utilisé par les spécialistes péruviens pour désigner ces œuvres59.
Collection privée de Pascal LACOMBE
Fig. 31 : Comparaison des yeux en amande des céramiques « china » avec l’œuvre étudiée
En comparant ces œuvres avec l’œuvre étudiée, nous pouvons voir qu’elle possède les mêmes traits colorés soulignant le regard. Bien que la prolongation des yeux en forme d’amande soit moins claire et moins décorative, elle est visible sur l’œil droit de la figure. Le décor sur l’œil gauche s’est peut-être amoindri avec le temps. L’identification qu’avait donné Valérie BAU60 nous semble donc correcte : l’œuvre peut être identifiée par son décor comme une pièce chancay et plus précisément du style china. L’œuvre est désormais identifiée par sa forme et son décor comme appartenant à la civilisation chancay. En comparaison à certaines œuvres similaires, la céramique étudiée possède une plus grande simplicité formelle et décorative ainsi qu’un apport de soin inférieur61. Ceci pourrait être expliqué par : -
un manque de temps : l’œuvre a pu être fabriquée rapidement pour une occasion inattendue.
Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 60 BAU Valérie : Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et d’Amiens, Mémoire de maitrise université de Paris1 la Sorbonne, Juin 1997, p 74 61 Les décors sont plus simples, des coulures sont visibles, elle ne possède pas de pied, la couronne n’est pas aussi sophistiquée que sur d’autres chinas, elle ne possède pas de collier, etc. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 36 59
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
-
un manque d’importance : l’œuvre pouvait être destinée à un défunt moins important que les œuvres vues dans les collections privées ou muséales qui mettent en avant les pièces jugées les plus belles.
-
une connaissance inférieure de l’artisan ayant effectué cette œuvre : nous avons vu que ces œuvres étaient peut-être réalisées par des membres de la population et non par des spécialistes. Cette œuvre a pu être effectuée par une personne moins expérimentée.
Cependant, sa simplicité formelle et décorative ne diminue absolument pas sa valeur esthétique ou historique ou son rapprochement de la culture chancay. Toutefois, connaissant le problème du développement des copies de céramiques archéologiques et en particulier précolombiennes, il est important de discuter de son authenticité.
c. Authenticité de l’œuvre Au XIXème siècle, l’intérêt des marchands et des particuliers européens pour les richesses se développe considérablement. Cependant l’accroissement des demandes sur le marché de l’art provoquent des effets néfastes : des sites ethnographiques sont pillés, un marché noir et les faux apparaissent. L’art précolombien devient effectivement une source importante pour les faussaires. Il est donc important d’étudier l’œuvre dans le but de déterminer s’il s’agit ou non d’un faux, c’est-à-dire d’une œuvre créée par une personne dans le but de tromper un tiers. Il est tout autant possible de trouver sur le marché du faux, des pièces de qualité esthétiquement attrayantes, ainsi que des œuvres plus simples. Ce sont en effet ces dernières, plus facile à réaliser, qui paraissent souvent les plus authentiques. Les faussaires font également attention à créer des défauts de fabrication ou des altérations pour leur ajouter une valeur historique. Les céramiques chancay étant, selon les spécialistes de cette civilisation, brutes et sans une très grande finition par rapport à d’autres civilisations temporellement proches, elles pourraient alors être copiées. Cependant nos études nous ont amené à écarter la théorie du faux : -
lors de l’étude de l’œuvre, nous cherchons à retracer son histoire et comprendre les étapes de ses dégradations. C’est lors du constat d’état et du diagnostic62, qu’il est possible de découvrir des incohérences dans les altérations et leur enchainement chronologique ; or aucune n’a été relevée pour cette œuvre.
-
selon les spécialistes rencontrés63, la céramique correspond totalement à une œuvre authentique de la production chancay.
Se référer au constat d’état p. 49 et au diagnostic p. 68 Authenticité validée par Pascal LACOMBE (spécialiste français de la civilisation chancay), Miriam Meléndez PASTOR (directrice du Musée municipal de Chancay), Alejandro SOTTO et Segundo Ruiz VISALOT (restaurateurs de céramiques au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou). Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 37 62 63
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Ainsi, la théorie du faux nous semble pouvoir être écartée. Cependant, seule une analyse scientifique telle qu’une datation par thermoluminescence* ou une analyse précise des matériaux pourraient lever définitivement le doute sur cette question. Par sa forme et son décor similaires, et selon de nombreux spécialistes, l’œuvre étudiée peut-être rattachée à une production chancay. Cependant, comme vu précédemment, cette culture s’est développée sur plus de trois siècles (1100-1470). Il nous faut donc tenter de préciser la date de création de celle-ci.
C. Précision de la datation Lors des premières découvertes archéologiques, les tombes étaient identifiées et datées grâce aux céramiques présentes. Max UHLE64 utilisait cette méthode de datation par le mobilier au début du XXème siècle. Cependant, après de nombreuses découvertes, les céramiques n’ont plus été jugées suffisantes pour obtenir une datation précise, et ce pour plusieurs raisons : -
certaines iconographies et méthodes de production ont voyagé à travers le temps.
-
les objets ne sont pas forcément retrouvés dans leur milieu d’enfouissement d’origine ; une mauvaise manipulation des fouilleurs ou un glissement de terrain a pu provoquer une erreur d’interprétation.
En prenant en compte ces nouvelles connaissances de l’archéologie, les scientifiques ont choisi de dater à l’aide de la structure de la tombe et de la disposition du mort65. Cependant, nous ne disposons pas d’informations concernant la provenance archéologique de l’œuvre. Nous ne pouvons donc pas nous appuyer sur cela pour préciser la datation. Plusieurs styles ont été identifiés dans la céramique « Noir sur Blanc » de la période chancay, correspondant à une évolution. Dans un premier temps (environ de 1100 à 1200), trois styles coexistaient : -
La céramique tricolore (Fig. 32) : un décor géométrique noir, blanc et rouge
-
La céramique portant un engobe blanc posé sur l’ensemble de l’œuvre et agrémenté d’un décor géométrique rouge cerné de noir (Fig. 33).
-
La céramique portant un engobe rouge posé sur l’ensemble de l’œuvre et agrémentée d’un décor blanc cerné de noir
Max UHLE (1856-1944) : Archéologue allemand considéré comme le père de l’archéologie péruvienne. Il a établi pour la première fois une chronologie des cultures péruviennes fondées sur la stratigraphie. 65 BODOLEC-DUROSELLE C. : Op.cit., p. 82 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 38 64
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Par la suite (environ 12000 à 1400), seul le décor « Noir et blanc » a subsisté66. Celuici comprenant deux couleurs seulement : le blanc en tant qu’engobe sur la totalité de l’œuvre et le rouge ou le noir en tant que décor. La céramique étudiée possède un décor simplement brun-rouge sur un engobe blanc. Elle entrerait donc dans cette deuxième catégorie et pourrait ainsi être associée à la deuxième évolution de la céramique chancay qui se serait développée à partir de 1200 jusqu’à 1400 environ67.
MNAAHP Fig. 32 : Céramique tricolore
MNAAHP Museo El Castillo, Colombia Fig. 33 : Céramiques de style « noir sur blanc »
Par cette analyse, nous avons donc rapproché l’œuvre étudiée au style chancay « Noir sur blanc ». Cependant, il nous est actuellement impossible de dater la création de l’œuvre étudiée de manière beaucoup plus approfondie. Selon Miriam Meléndez PASTOR, la datation attribuée à l’œuvre serait donc environ entre 1200 et 1470. L’étude stylistique de la pièce ne nous le permettant pas, seule une datation scientifique nous aiderait à être plus précis.
D. Une œuvre pour quelle utilisation : une urne funéraire ? Les œuvres attribuées à la civilisation chancay (céramique et textiles en particuliers) ont presque toutes été retrouvées en contexte funéraire. C’est « l’étude des offrandes funéraires et des enterrements découverts dans les vastes nécropoles de la région »68 qui permet de comprendre la culture chancay. Les céramiques chinas dont fait partie l’œuvre étudiée, ont exclusivement été retrouvées dans un contexte funéraire. Par l’étude des nécropoles, les archéologues ont pu déterminer la structure des tombes et du mobilier présent.
66
BODOLEC-DUROSELLE C. : Ibid., p. 103 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 68 LEVINE D. : Pérou millénaire : 3000 ans d’art préhispanique, La Cita, 2000, p. 129 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 39 67
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A la période de l’Intermédiaire Récent (1100-1470), période de développement de la civilisation chancay, la tombe était excavée sur plusieurs mètres et fermée par des poutres en bois, une natte de roseau et parfois une couche d’argile69. Le « paquet funéraire » (Fig. 34 et 35), nommé fardo, était composé du corps du défunt assis (genoux et bras repliés contre le torse) enroulé dans de nombreux tissus colorés70, le tout parfois surmonté Musée Larco (Lima) Fig. 34 : Paquet funéraire chancay
d’un masque. Il était placé le long du mur Ouest. Les céramiques étaient positionnées tout autour du paquet funéraire sur plusieurs étages (Fig. 36)71. Lors de son inventaire dans le cadre de sa thèse en 199272, Valérie
BAU
a
identifié
l’œuvre
comme
étant
potentiellement une « urne funéraire ». Cette hypothèse nous a servi de point de départ pour nos recherches sur l’utilité de l’œuvre. Une urne funéraire est définie comme un « vase servant à conserver les cendres des morts »73. L’œuvre était-elle utilisée en tant qu’urne ? Les œuvres chancay, et en particulier les chinas, participaient effectivement au culte des morts. Ces dernières ont été exclusivement retrouvées dans des contextes funéraires. Cependant nous savons que les défunts chancay n’étaient pas incinérés : comme expliqué
Musée du Quai Branly (Paris) Fig. 35 : Paquet funéraire chancay
précédemment, les défunts étaient « empaquetés » dans le fardo. Les céramiques chinas ne contenaient donc jamais de cendres du défunt : par conséquent, nous ne pouvons pas parler d’urne funéraire. L’œuvre pourra donc être désignée par sa forme, c’est-à-dire en tant que jarre funéraire.
69
BODOLEC-DUROSELLE C. : Op.cit., p. 96 Nous n’avons pas connaissance d’un embaumement* du corps à l’aide de solutions de conservatrice, avant la constitution du fardo. Le corps semblait seulement empaqueté dans de nombreux tissus. Le milieu sec, les températures relativement stables, le sol riche en salpêtre (nitrate de potassium) et les nombreux tissus protecteurs permettent la préservation naturelle des corps. 71 BODOLEC-DUROSELLE C. : Op.cit., p. 96 72 BAU Valérie : Op.cit., p 74 73 Dictionnaire Larousse : « Urne », [En ligne], URL : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/urne/80725, consulté le 07/04/17 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 40 70
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Une œuvre pour quelle utilisation ? La croyance des cultures andines était que l’Homme continuait de vivre après sa mort, qu’il existait une deuxième vie74. Les défunts étaient donc enveloppés de tissus en position fœtale afin de pouvoir renaitre dans leur vie future. Le fardo ainsi constitué était placé dans la tombe en compagnie d’objets leur permettant de vivre leur seconde vie après la mort : plus les objets étaient nombreux et la tombe chargée, mieux il vivrait par la suite75. Les personnes au rang social élevé étaient accompagnées de nombreuses céramiques et offrandes alors qu’une personne du peuple pouvait ne recevoir qu’une casserole76. L’œuvre étudiée
Fig. 36 : Structure funéraire selon Guerrero
aurait donc été réalisée pour une personne de
CORNEJO « Tumba La-VII/2 »
rang plutôt élevé : la classe moyenne ou l’élite sociale. En plus des biens matériels pouvant avoir un lien avec l’activité principale de la personne77, des offrandes étaient réalisées afin de permettre au défunt de vivre dans sa vie future. Celles-ci étaient placées dans les barrigónes qui accompagnaient le défunt : en raison de leur forme oblongue, elles
Musée municipal de Chancay (Pérou) Fig. 37 : Reconstitution d’une tombe chancay
étaient légèrement enfoncées dans le sol afin de tenir à la verticale78 (Fig. 38). Pour connaitre la nature de ces offrandes, nous avons observé les résidus à l’intérieur de l’œuvre étudiée : de la terre, du sable, de petits cailloux et des feuilles séchées ont ainsi été retrouvées79. Ces petites feuilles séchées sont recourbées, assez longues et 74
VAN DALEN LUNA Pieter : Arqueología tardía del valle Chancay-Huaral : identificando la nación Chancay, Investigaciones sociales, UNMSM-IIHS Lima Perú, 2012, Vol.16 N° 28 p. 271-283 75 BAQUEDANO E. : Les peuples du soleil, Gallimard, 1993, p. 34 76 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 77 Des outils de tisserands et de nombreux tissus étaient par exemple retrouvés dans les tombes de artisans textiles. 78 La trace de cette position légèrement enfoncée dans le sol est encore visible sur la céramique étudiée. Voir le constat d’état « Encrassement » p. 59 79 Voir le constat d’état « Résidus à l’intérieur de l’œuvre » p. 58 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 41
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possèdent de grandes et fines nervures dans le sens de la longueur. Selon LACOMBE, il pourrait s’agir de feuilles de maïs. Les offrandes pouvaient en effet être des feuilles, des épis et de l’alcool de maïs, des fèves, des cacahuètes, etc. dans le but d’accompagner le défunt dans l’au-delà80 81. Selon ce dernier, les chinas pouvaient également contenir de l’alcool de maïs en tant qu’offrande. Cependant un liquide versé et conservé dans une céramique
poreuse
aurait
laissé
des
taches
irréversibles et encore visibles aujourd’hui. Or nous n’avons observé aucune trace de cette sorte, ce qui nous permet de conclure que l’œuvre étudiée ne contenait pas de liquide. Il n’est cependant pas
Fig. 38 : Pièce légèrement enterrée pour être maintenue à la verticale
impossible que d’autres chinas aient contenu des liquides82. Par ailleurs, l’œuvre possédait à l’origine un petit vase de forme inconnu83. En raison de son absence sur la céramique étudiée et du manque d’informations dans la littérature, il nous est impossible de conclure sur sa fonction. Peut-être contentait-il de l’alcool de maïs en tant qu’offrande également. Cependant selon la directrice du Musée de Chancay84, ce petit vase était exclusivement décoratif.
Fig. 39 : Feuille (de maïs ?) retrouvée à l’intérieur de l’œuvre étudiée
Collection particulière de Pascal LACOMBE Fig. 40 : Modèle de petit vase qui pouvait contenir de l’alcool de maïs
Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 81 Les feuilles de maïs retrouvées en tant qu’offrandes est ici une hypothèse. Il pourrait également s’agir de résidus datant du stockage et du transport de l’œuvre, telles que des feuilles de calage. 82 Une étude d’un plus grande nombre de chinas permettrait de conclure plus précisément sur les types d’offrande réalisée en général (liquide, feuille, graines, etc.). 83 Ils peuvent prendre différentes formes selon les œuvres. Se référer aux exemples présentés en Fig. 18 p. 27 84 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 42 80
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Une représentation funéraire ? Les céramiques anthropomorphes chancay étaient, comme nous l’avons vu, placées en grand nombre dans les tombes des défunts. Bien que les visages des barrigones soient tous uniques et différents les uns des autres, ces céramiques n’étaient pas destinées à représenter une personne en particulier85. A l’inverse de la civilisation Chimu par exemple, la
Fig. 41 : Visage de l’œuvre anthropomorphe étudiée
céramique chancay ne prenait pas les traits du défunt. Il est possible que certaines céramiques anthropomorphes portent des attributs professionnels du défunt (appeau de chasse et animaux sur les épaules pour un chasseur par exemple) (Fig. 42) mais cela n’est pas avéré ; il pourrait aussi s’agir d’une représentation de la vie quotidienne, sans lien avec l’identité du défunt86. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une représentation funéraire, la couronne des chinas serait tout de même destinée à représenter un rang social. Comme expliqué précédemment, la seule présence de l’œuvre en contexte funéraire nous permet de l’associer à une personne de la classe moyenne ou de l’élite. Sa qualité plastique ainsi que sa couronne permettraient d’ajuster cette position sociale. Nous avons vu que la facture d’autres chinas pouvait être supérieure et que la couronne était relativement simple comparée à d’autre exemples87 (4 protubérances simples) : nous pouvons donc émettre l’hypothèse que la personne destinée à recevoir cette jarre funéraire ne possédait pas une place très élevée dans la hiérarchie sociale, c’est-à-dire la classe moyenne.
N°205 ; H : 42,4 cm Collection particulière de Pascal LACOMBE Fig. 42 : Céramique chancay anthropomorphe pouvant représenter une fonction professionnelle
Par ailleurs, une théorie encore étudiée aujourd’hui stipule que ces céramiques pourraient représenter Quilla la déesse de la fertilité88, puisqu’elles participent à la renaissance du
Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 86 Informations données lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretien en Annexe 3 p. 238 87 Se référer à la « Comparaison des couronnes » p. 33 88 Il s’agit de la Déesse de la Lune et de la fertilité dans la civilisation Inca. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 43 85
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défunt dans sa prochaine vie89. Cependant nous n’avons trouvé aucune source venant corroborer la présence de cette divinité dans la culture chancay.
L’œuvre étudiée est donc une céramique funéraire chancay utilisée pour réaliser des offrandes (probablement des feuilles de maïs dans ce cas) afin d’accompagner le défunt dans sa vie future. Les barrigonnes étaient seulement créés pour des individus de classe sociale importante (classe moyenne ou élite). Ce qui montre l’importance de l’œuvre étudiée et du défunt qu’elle accompagnait. Par ailleurs, sa simplicité stylistique ne nous laisse pas penser que la personne à laquelle elle était destinée avait un statut social extrêmement élevé. Cependant sans information archéologique sur le défunt et la tombe dans laquelle a été retrouvée l’œuvre, il nous est impossible d’identifier la personne à qui était destinée cette œuvre, ou d’affirmer une corrélation exacte entre la qualité de l’œuvre et l’importance du défunt.
89
Informations données par Pascal LACOMBE, spécialiste de la civilisation chancay, et confirmées par Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay, notes de l’entretiens en Annexe 3 p. 238 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 44
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Conclusion Au cours de notre étude, nous avons comparé la forme et les décors d’œuvres attribuées à la culture chancay avec l’œuvre étudiée. Nous avons déterminé qu’il s’agissait bien d’une œuvre de cette même civilisation. Elle est donc datable entre 1100 et 1470 et serait originaire du Pérou. Cette hypothèse d’origine, fondée sur l’étiquette de l’œuvre sur laquelle est inscrit « Ancón, Pérou » est confirmée par l’étude de la forme et du décor, Cependant, nous n’avons pas pu dater l’objet beaucoup plus précisément en raison du manque d’informations sur l’évolution de l’art céramique chancay : nous savons qu’elle appartient à la deuxième évolution stylistique de la céramique chancay (environ 1200-1470). L’œuvre étudiée comporte en effet de nombreuses similitudes formelles et décoratives avec les œuvres comparatives avérées par des spécialistes (archéologues, collectionneurs sur place, conservateurs) appartenant à la culture chancay. Nous avons alors pu identifier des dénominations adaptées à l’œuvre en fonction de la forme ou du décor. L’œuvre est donc un cantaro (ou jarre globulaire) et son décor appartient au style Noir sur Blanc et il s’agit même plus précisément d’une œuvre nommée china. Cette appartenance à la culture chancay a été authentifiée par de nombreux spécialistes rencontrés. Concernant la fonction, nous savons que cette œuvre anthropomorphe pouvant être rapprochée de la position du défunt dans le paquet funéraire, n’était pas destinée à conserver des cendres comme Valérie BAU90 l’indiquait dans sa thèse, mais plutôt à contenir des offrandes pour le défunt : le terme « urne funéraire » a donc été écarté, au profit de celui de jarre funéraire.
Fiche d’inventaire par Valérie BAU en Annexe 9 p. 248 (BAU Valérie : Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et d’Amiens, Mémoire de maitrise université de Paris1 la Sorbonne, Juin 1997, p. 74 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 45 90
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Partie conservationrestauration
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Introduction Cette partie est consacrée à la conservation et la restauration du barrigón. Elle fait suite aux études technique et historique de l’objet qui ont permis de mieux comprendre les étapes de sa « vie ». Selon la confédération européenne des organisations des conservateurs-restaurateurs, « le Conservateur-Restaurateur contribue à la compréhension des biens culturels dans le respect de leur signification esthétique et historique et de leur intégrité physique »91. Les œuvres et en particulier les produits de l’artisanat tels que les céramiques, sont en effet les témoins de cultures, de goûts particuliers, de modes de vie ou encore de systèmes sociaux : elles ont de nombreuses informations à nous délivrer. C’est le rôle du conservateur-restaurateur de les faire perdurer dans le temps afin que les historiens et chercheurs puissent les étudier et qu’elles profitent aux générations futures. Le travail du restaurateur demande donc des connaissances dans de nombreux domaines. Celui-ci doit en effet connaitre l’œuvre sur laquelle il travaille d’un point de vue historique, technique, scientifique. Ces connaissances lui permettront de comprendre l’œuvre et de la respecter lors des traitements de conservation-restauration. Cette dernière est ainsi l’aboutissement d’une longue réflexion sur les valeurs de la jarre Chancay, la détermination de son aspect final et le projet culturel qui lui est destiné par le musée, permettant de déterminer en amont ce qui doit être conservé ou non des traces d’ancienneté de l’œuvre. Par la suite, « le Conservateur-Restaurateur a pour mission l'examen diagnostique, les traitements de conservation et de restauration du bien culturel et la documentation de ces interventions »92. S’en suit en effet, l’étude scientifique des produits de restauration et des procédés techniques de conservation et de restauration adaptés à l’objet d’étude, à son état de conservation, à l’état final déterminé et au code de déontologie. Toutes ces réflexions sont présentées dans le chapitre suivant. Le constat d’état s’attellera à présenter l’ensemble des altérations présentes sur l’œuvre et le diagnostic lui faisant suite permettra de les classer selon les étapes de vie de l’œuvre. La proposition de traitement sera une réflexion théorique sur les différents choix de conservationrestauration en prenant en compte la volonté du conservateur du MHN de Lille, les particularités formelles et décoratives de l’œuvre ainsi que son passé historique. La description des étapes de conservation-restauration consistera, après une réflexion sur les matériaux et les techniques à employer, à décrire les procédés utilisés sur l’œuvre. Ceci permettra de conserver une trace écrite des traitements réalisés. Enfin, des préconisations de conservation décriront les conditions de stockage, de manipulation et de transport adéquats pour la bonne conservation de l’œuvre dans le futur.
91
Extrait du code éthique de la confédération européenne des organisations de conservateurs-restaurateurs (ECCO) de mars 2003 92 Ibid. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 48
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Constat d’état Le constat d’état est une « fiche de santé » de l’état physique de l’œuvre étudiée, à un moment donné. Il identifie, décrit et ordonne l’ensemble des observations réalisées sur la pièce avant sa restauration. Il permet d’une part de conserver une trace de l’état de l’objet avant toute intervention ; et d’autre part de comprendre, par une analyse approfondie, les besoins de l’œuvre. Le constat d’état suivant a été réalisé en décembre 2016, à l’Ecole de Condé. Il est quasiment impossible de dresser une liste exhaustive des altérations présentes sur l’œuvre, mais le but est de s’en rapprocher au maximum. Pour optimiser nos analyses, plusieurs moyens et matériels sont à notre disposition. Nos observations sont alors effectuées à différentes échelles à l’aide de : -
l’œil nu
-
un appareil photo Canon® et objectif EFS 18-55 mm objectif macro 0.25 m/0.8 ft
-
une caméra microscope USB CMOS Sensor, grossissement x1000
-
une lampe ultra-violet Waldmann DHLL 204 UM
-
une lumière rasante
Nous effectuerons aussi des tests afin d’identifier les matériaux et la fragilité de la pièce : le test de Mohs93, des tests de perméabilité, des tests de pulvérulence, de salinité ou encore de solubilité seront ainsi réalisés sur l’ensemble des matériaux94. Ces différentes méthodes d’observation et ces tests nous permettront d’obtenir une analyse précise et ainsi de mieux comprendre par la suite les besoins de l’œuvre. Les résultats seront analysés dans un deuxième temps, lors du diagnostic. Nous commencerons par observer la surface de la pièce, les défauts de fabrication et les matériaux exogènes tels que la poussière ou les dépôts ; puis nous observerons l’état de structure au travers des fêlures, cassures et manques ; enfin nous verrons les manifestations des différentes interventions qu’a déjà subi l’œuvre.
93
Test de Mohs : test de la dureté de la matière en comparaison à des matériaux plus ou moins durs L’ensemble des résultats de ces tests sont présentés dans le récapitulatif des tests en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 94
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Durant le constat d’état, les parties de l’œuvre seront identifiées de la manière suivante95 96 :
Face A
Face B
Face C
Face D
Fig. 43 : Présentation des faces de l’œuvre
1. Etat de la surface Cette catégorie rassemble toutes les altérations qui se trouvent à la surface de la pièce mais qui ne la traversent pas. Nous commencerons par observer les défauts de fabrication, puis nous verrons les altérations de la plus importante à la moins importante, soit les pertes de matière, les traces blanches, les dépôts et enfin l’encrassement et l’empoussièrement.
A. Les défauts de la surface Les défauts de la surface sont des « modifications de l’éclat, de la couleur, de l’homogénéité ou de la forme du tesson et/ou des couches de revêtement d’une pièce céramique pendant sa mise en œuvre »97.
a. Coulures et taches de décor brun-rouge Des gouttes, des coulures et des traces involontaires de pinceau sont visibles sur la surface de la céramique. Ainsi des gouttes et des coulures de décor brun-rouge sont visibles sous l’œil gauche, sous les traits verticaux au niveau des bras et sous les traits horizontaux au niveau de la panse (côté gauche) (Fig. 44). De plus, on peut voir des traces de pinceau sur la gauche de la panse, sous le comblement noir.
En ce qui concerne les dimensions et l’identification des parties, se référer à la Fiche technique p. 6 Photographies de l’œuvre (4 faces) avant restauration en Annexe 10 p. 249 97 BLONDEL N. : Céramique, vocabulaire technique, Monum Patrimoine Eds Du, 2014, p. 376 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 95 96
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Décor brun-rouge
Coulures et gouttes de décor Face A
Fig. 44 : Gouttes sous le décor de la panse
b. Traces d’outils Des traces nettes, irrégulières et imprimées dans la pâte sont remarquables à certains endroits de la pièce. Il s’agit sans doute d’outils utilisés lors de la fabrication de la pièce. Des traces légèrement profondes sont visibles à l’intérieur, au niveau du point de jonction entre le col et la panse (Fig. 45). A l’extérieur, nous pouvons observer des traits courbes parallèles sur le fond (2 x 1 cm) ; ainsi que de fins traits parallèles sous le disque auriculaire droit (Fig. 46).
Fig. 45 : Traces d’outil au niveau de la jointure intérieure
Face D Fig. 46 : Traces parallèles d’outil sous le disque auriculaire droit Léa BIZOUARN
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B. Les pertes de matières Les pertes de matière sont de petites pertes d’éléments du support sans incidence sur la lisibilité et l’intégrité de celui-ci.
a. Tressaillage et perte de l’engobe Selon N. BLONDEL, le tressaillage se présente comme « des fentes linéaires, franches et nettes, perpendiculaires à la couche de revêtement, formant un réseau dans la glaçure et délimitant des fragments attachés au tesson. Le tressaillage se produit lorsque la contraction de la couche de revêtement [au refroidissement] est plus grande que celle du tesson, [après la cuisson] »98. Cette définition est tout à fait applicable au cas de l’œuvre étudiée même s’il ne s’agit pas d’une glaçure mais de l’engobe blanc recouvrant la surface extérieure de la pièce. En effet, celui-ci tressaille par endroit et se délite. Il se détache en très petites écailles et laisse apparaitre la pâte orangée sous-jacente (Fig. 47). Ce phénomène est visible dans le creux déformé, sur la droite de la panse (Face C) ; sous le bras gauche, ainsi que dans le bas de la panse, sur la face C. Aux endroits où l’engobe ne se soulève pas, il y a tout de même un réseau de craquelures assez important (Fig. 48) tel que sous le bras gauche ou entre les mains de la pièce. Lors du test de pulvérulence99, nous avons pu observer un transfert de particule d’engobe sur le ruban adhésif. La surface est donc pulvérulente et très fragile.
Fig. 48 : Réseau de craquelure de l’engobe blanc
Fig. 47 : Perte de l’engobe blanc au niveau de la panse
98 99
Face A
BLONDEL N. : Op.cit., p. 386 Les explications des tests et les résultats sont regroupés en Annexe 4 p. 240
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b. Perte du décor brun-rouge Le décor brun-rouge est placé à certains endroits pour souligner les traits par-dessus l’engobe blanc. Nous pouvons observer deux types de pertes du décor : -
l’engobe se craquèle et se soulève (comme expliqué précédemment) ; le décor brunrouge placé par-dessus est perdu par la même occasion
-
le décor peut aussi se désolidariser seul. Nous pouvons alors apercevoir la couleur blanche de l’engobe encore présent en dessous.
Ces phénomènes sont visibles sur les traits horizontaux de la panse (Face A) ainsi que sur les disques auriculaires et sur le haut du col (Faces A et C).
1 cm Fig. 49 : Perte de décor brun-rouge sur le col (Face C)
Fig. 50 : Grossissement (x1000) d’une perte de décor au niveau de la panse
c. Eclat de surface Les éclats de surface sont des éléments de pâte très fins et petits, désolidarisés de la surface de l’œuvre. L’œuvre présente un éclat sur la protubérance du col de la Face C. Celui-ci mesure 1,5 cm de haut sur 1 cm de large.
Face C Fig. 51 : Eclat de surface sur la protubérance du col
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C. Les traces blanches On aperçoit, sur toute la surface de la pièce, deux types de traces blanches : des auréoles blanchâtres et un léger voile blanc. Les auréoles (Fig. 52) sont situées sur la partie haute de l’œuvre (col et début de la panse). Elles se dessinent très nettement au-dessus des bras (Face A). Les voiles blancs (Fig. 54) recouvrent une grande partie de l’œuvre mais sont particulièrement visibles sur la partie haute du dos de l’œuvre (Face C). Ces traces blanches recouvrent ainsi l’engobe blanc et les décors brun-rouge. Ils sont particulièrement remarquables sur ces derniers, les rendant mats et ternes. Ces taches blanches sont incrustées et non pulvérulentes. Les tests de salinité n’ont donné aucun résultat100. A la lumière UV101 nous pouvons apercevoir une légère fluorescence jaune-verte des auréoles blanches (Fig. 53).
Face A Fig. 52 : Auréoles blanchâtres au-dessus des bras en lumière naturelle
Fig. 53 : Auréoles blanchâtres au-dessus des bras en lumière UV
Fig. 54 : Voile blanchâtre sur la Face C
Les résultats des tests de salinité sont regroupés dans le « Récapitulatif des tests du constat d’état » en Annexe 4 p. 240. 101 La lumière ultra-violette a une longueur d’onde située entre 400 et 10 nm. Certaines substances ont la propriété d’émettre de la lumière visible après avoir absorbé une lumière à une certaine longueur d’onde (ultra-violets). Ce phénomène est nommé « fluorescence ». La couleur émise dépend de la nature de la molécule. (VALEUR B. : « Fluorescence : la couleur fluo », [En ligne], publié le 09/03/2018, URL : https://www.futurasciences.com/sciences/dossiers/physique-couleur-tous-eclats-1396/page/10/, consulté le 11/05/18) 100
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1 cm
1 cm Auréoles blanchâtres au-dessus des bras
Voile blanchâtre sur un décor brun-rouge
Fig. 55 : Aperçu des étendues salines au microscope (grossissement x 1000)
D. Les dépôts a. Dépôt jaune, vert et blanc Deux dépôts de ce type sont visibles sur la droite de la panse (Face D). Elles mesurent environ 1 x 0,5 cm et sont composées de trois couleurs. Le jaune est légèrement brillant comme les coulures de colle retrouvées ailleurs sur la pièce ; le vert est clair et mat, se rapprochant ainsi du vert-de-gris (couleur du cuivre oxydé) ; le blanc est vif et mat. L’eau déminéralisée permet de retirer l’ensemble du dépôt.
1 cm Fig. 56 : Dépôt vu au microscope (grossissement x 1000)
Face D
b. Dépôt brun Nous pouvons remarquer une petite tache ronde (1,2 x 1.3 cm) sur la base de la pièce. Elle est très fine et a la texture lisse, elle semble incrustée dans les pores de la pâte et donc difficilement détachable. Le dépôt se ramollit à l’eau déminéralisée.
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1,3 cm
Fig. 57 : Dépôt brun sur la base de la pièce
c. Couche brune Nous observons une fine couche brune au-dessus de l’engobe et du décor rouge. Celleci est principalement localisée sur la partie haute de la pièce, le col et le début de la panse. Les reliefs des bras sont particulièrement touchés (Fig. 59). Couche brune Décors rouges Engobe blanc Terre cuite Fig. 58 : Stratigraphie de l’œuvre
La délimitation entre la partie recouverte de cette couche brune et la partie vierge est très nette. Elle peut être mise en relation avec la localisation des auréoles blanches. En effet, ces deux altérations ont environ la même étendue et la même localisation. Nous trouvons aussi, à quelques endroits comme en dessous du bras gauche, des dépôts en relief du même aspect que cette couche brune (Fig. 60). Ces dépôts et cette couche se retirent très facilement à l’aide d’un scalpel et ce, sans abimer l’engobe en dessous. L’action est encore plus efficace lorsque le matériau exogène est humidifié au préalable102.
L’ensemble des tests de solubilité sont regroupés en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 102
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Fig. 59 : Couche brune sur la partie supérieure
Face A Localisation de la couche brune Fig. 60: Dépôts en relief de même aspect
E. Empoussièrement, résidus et encrassement a. Empoussièrement Un empoussièrement important est présent sur l’ensemble de la pièce. Cette poussière est en surface, mais aussi incrustée dans les pores de la pâte, sur toute la surface extérieure de la pièce et à l’intérieur du col (Fig. 62). Cette poussière, associée à de la terre, se matérialise aussi sous la forme de dépôts importants, derrière les anneaux des disques auriculaires, entre ceux-ci et leurs renforts ou encore dans les renfoncements de la panse (Fig. 63). Les fêlures ne présentent aucun encrassement tandis que les tranches du col le sont particulièrement. De plus, certaines tranches présentent deux parties à l’empoussièrement différent et avec une limite très nette : une surface empoussiérée grise et une surface propre de la couleur de la pâte. (Fig. 61).
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Fig. 61 : Limite nette d’empoussièrement d’une tranche visible du col
Fig. 62 : Empoussièrement de l’intérieur du col
Fig. 63 : Amas de poussière derrière les disques auriculaires et dans les creux de la panse
b. Résidus à l’intérieur de la jarre A l’intérieur de la pièce des résidus organiques et minéraux sont visibles : il s’agit de poussière, de terre, de feuilles séchées et de cailloux légers. Certains sont accrochés sur les parois internes de l’œuvre, tandis que certains résidus sont mobiles ; ils bougent lorsque l’on manipule la pièce.
5 cm Fig. 64 : Feuille séchée présente à l’intérieur de la jarre Léa BIZOUARN
Fig. 65 : Résidus à l’intérieur de l’œuvre
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c. Encrassement Un encrassement plus important est identifiable sur la base convexe de la pièce. Cette partie est plus sombre que le reste de l’œuvre. Les craquelures de l’engobe sont de ce fait plus encrassées à cet endroit.
Localisation de l’encrassement brun
Face A Fig. 66 : Encrassement général de la base et des craquelures de l’engobe
2. Etat de la structure Cette catégorie prend en compte les altérations qui affectent la matière en profondeur et la traversent ; c’est-àdire les fêlures, cassures, les manques ou encore les érosions de tessons et les éclats importants.
A. Les défauts de la structure Les défauts de la structure sont des « altérations technologiques »103 affectant la matière, la structure de l’œuvre. a. Dissymétrie* de l’œuvre Lorsque l’on observe l’œuvre avec la tête du personnage parfaitement droite, nous pouvons remarquer que le corps n’est pas dans le même alignement (Fig. 67). Celui-ci dérive légèrement sur la gauche. L’œuvre n’est donc pas symétrique104.
Fig. 67 : Déformation de l’œuvre
103
Terme couramment employé par les restaurateurs selon BLONDEL N. : Céramique : Vocabulaire technique, Monum Patrimoine Eds Du, 2014, p. 376 104 La dissymétrie notée ici est déterminée à partir de l’observation d’autres barrigónes chancay présentant une symétrie prononcée.
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b. Creux au niveau de l’assemblage Nous savons que la panse a été montée aux colombins, alors que le fond convexe a été moulé indépendamment. Ceux-ci ont ensuite été assemblés. La ligne d’assemblage de ces deux éléments est visible de l’extérieur de l’œuvre, en particulier au dos (Face C).
B. Les cassures Les cassures correspondent à la « rupture d’une pièce céramique en plusieurs fragments 105
»
. La pièce est donc à ce jour composée d’une partie principale, de six tessons de forme et
de taille très variables, assemblés par un adhésif. Les cassures sont toutes situées sur le haut de l’œuvre et en particulier sur le col (Fig. 68). Les lignes de cassure sont nettes et précises. Elles présentent cependant parfois quelques petits éclats n’altérant ni la structure de l’œuvre, ni sa lisibilité.
Fig. 68 : Cassures sur le col de la Face A et C
Face A
Face B
Face C
Face D
Lignes de cassures Fig. 69 : Localisation des cassures de l’œuvre
105
BLONDEL N.: Op.cit., p. 381 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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De plus, deux tessons (Fig. 70 et 71) nous ont été confiés par le musée. Le seul manque de la pièce se situant au niveau du col et de la lèvre, ces tessons doivent y trouver leur place. Ils sont de forme triangulaire et mesurent environ 6,5 centimètres de long sur 4,5 et 5,1 cm de largeur maximale.
6,5 cm
0,9 cm Tesson n°2
4,5 cm
5,1 cm
Fig. 70 : Tesson n°1
Fig. 71 : Tesson n°2
0,7 cm Tesson n°1
Fig. 72 : Epaisseur des tessons
Le tesson n°2 ne présente pas les mêmes caractéristiques que le tesson n°1 ou que N°2
l’œuvre. -
La surface possède un décor horizontal noir et non brun-rouge.
-
Le voile blanc est beaucoup plus intense.
-
La pâte, observable sur la tranche est plus
N°1
rosée et présente moins d’aspérité. -
L’épaisseur du tesson n°2 est plus importante (Fig. 72)
Fig. 73 : Prémontage des deux tessons
De plus, lors du prémontage, le tesson n°1 a trouvé une place au niveau du col alors qu’aucun positionnement ne correspond au tesson n°2 (Fig. 73). Les disques auriculaires, les mains, le nez et les quatre protubérances du col ont également été cassés.
C. Les fêlures Les fêlures sont des « ouvertures plus ou moins longues et étroites dans l’épaisseur de la paroi du tesson ou des couches de revêtements »106. 106
BLONDEL N. : Op. cit., p. 380 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Quatre fêlures sont visibles sur l’ensemble de la pièce. Elles sont propres, on peut voir qu’il n’y a pas d’encrassement ou de poussière dans les interstices. Leurs arêtes sont nettes, sans éclats. -
La fêlure n° 1 se situe sur l’avant de la pièce (Face A). Elle prolonge une cassure et mesure 22 cm. Le long de celle-ci, un petit fragment se soulève au niveau du nez (Fig. 74).
-
La fêlure n°2, située au milieu du dos de l’œuvre (Face C), mesure 16,9 cm. Elle prolonge une cassure du col, descend verticalement, longe la protubérance rectangulaire par la gauche puis se termine très finement quelques centimètres en dessous (Fig. 75).
-
La fêlure n°3 est placée perpendiculairement à la n°2, soit à l’horizontale sur la Face C. Elle part de celle-ci et mesure 4 cm (Fig. 75).
-
La fêlure n°4 prolonge très finement une cassure en dessous du disque auriculaire droit. Elle mesure 3,4 cm (Fig. 76).
22 cm 3,4 cm
16,9 cm 4 cm
Face C
Face A
Lignes de cassures
Fêlures Fig. 74 : Fêlures de la Face A
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Face D
Fig. 75 : Fêlures de la Face C
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Fig. 76 : Fêlures de la Face D
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D. L’abrasion de certains volumes protubérants Les « volumes protubérants » désignent les éléments modelés puis ajoutés ensuite à la pièce principale, soit les mains pointées vers l’avant, les disques auriculaires, le nez et les quatre protubérances du col.
Fig. 77 : Mains en volume absentes
Face A
Certaines de ces parties ont partiellement ou totalement disparu. La jarre anthropomorphe possédait en effet à l’origine deux mains en volume, pointées vers l’avant, prolongeant les bras encore présents. Celles-ci ont été cassées et ont aujourd’hui disparu (Fig. 77). Les disques auriculaires ont perdu de la même façon de leur volume aux extrémités (Fig. 78). Ces fractures (mains et disques auriculaires) ne sont plus nettes mais érodées. Les quatre protubérances sont abrasées à leur extrémité et celle de la Face A à presque totalement disparu (Fig. 79). Enfin la pointe du nez est manquante mais la cassure est plus nette et plus anguleuse que les précédentes (Fig. 80).
Fig. 78 : Disque auriculaire droit abrasé
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Fig. 79 : Protubérance du col érodée
Fig. 80 : Cassure du nez
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E. Les manques Un manque est « une perte d’élément du support sans incidence sur l’image » ou sa compréhension107. La manque de notre pièce se situe au niveau du col sur le côté gauche. Elle mesure 9 cm de large pour une hauteur maximale de 6 cm. Elle est en partie complétée par un des tessons indépendants (Tesson n°1) présentés précédemment (Fig. 70).
Fig. 81 : Localisation du manque
Face A
3. Les anciennes interventions Dans certains cas, la restauration peut être une source d’altération, par exemple par l’utilisation de matériaux non appropriés. Cette ancienne restauration ne correspond pas forcément aux restaurations considérées comme déontologiques aujourd’hui. La stabilité de l’œuvre dans le temps ou sa lisibilité peuvent être dégradées. Une restauration a été effectuée sur la pièce, nous ignorons cependant la date de cette intervention puisque celle-ci n’est référencée dans aucun document.
A. L’adhésif a. Visibilité de l’adhésif Les six tessons évoqués précédemment108 ont été assemblés lors d’une intervention de restauration antérieure. L’adhésif utilisé pour l’opération a débordé et même coulé sur les tessons. Il est brillant (Fig. 84) et légèrement jaune (Fig. 82) ; il est visible sur l’intérieur et l’extérieur, tout le long des cassures de la pièce. 107
BERGEON-LANGLE Ségolène, De l'usure au manque, de la réintégration au comblement, dans BUYLE Marjan (ed.), La problématique des lacunes en conservation-restauration, postprints des journées d'études internationales de l'APROA-BRK, Bruxelles, 2007, p. 7-9. 108 Se référer au constat d’état « Les cassures » p. 60 Léa BIZOUARN
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Les directions des coulures sont différentes, en fonction de l’emplacement du collage. Les coulures visibles à l’intérieur se dirigent majoritairement vers le dos de la pièce (Face C), alors que celles présentent à l’extérieure vont plutôt vers l’avant (Face A). Dans le creux du col par exemple, des taches d’adhésif sont également visibles, légèrement moins brillantes que les coulures mais plus larges (Fig. 85). A la lumière UV, les coulures ont une fluorescence jaune-verte ; cependant l’intensité varie selon leur emplacement (Fig. 83). Nous n’avons pas pu prélever un échantillon de cet adhésif afin de réaliser des tests de solubilité car celle-ci a pénétré dans les pores de la pâte. L’eau déminéralisée chaude permet de faire gonfler l’adhésif, alors que l’éthanol et l’acétone le dissolvent. Le tesson n°1, indépendant, ne présente pas de traces d’adhésif.
Fig. 82 : Coulure de l’adhésif en lumière naturelle
Fig. 83 : Coulure de l’adhésif en lumière UV
Fig. 84 : Coulure de l’adhésif vu au microscope USB
Fig. 85 : Taches d’adhésif dans le creux du col
b. Les ressauts Les ressauts sont des mauvais assemblages entre les tessons recollés. Ils sont moindres au niveau de la jonction du col mais forment des écarts importants allant jusqu’à un millimètre au niveau de la lèvre. Léa BIZOUARN
Fig. 86 : Exemple de ressaut présent sur l’œuvre Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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B. La matière noire Nous trouvons sur la gauche de la panse, sur le bras de l’œuvre, un amas noir de forme rectangulaire. Il mesure environ 4 cm par 5 cm (Fig. 87). Au toucher, le matériau semble résineux ; lors du test de Mohs109 nous avons pu voir qu’il se rayait à l’ongle. De plus il est cassant sous l’action du scalpel et possède des fissures. Il est imperméable à l’eau, il se ramollit dans l’éthanol et devient extrêmement cassant dans l’acétone. En dessous de cette matière noire, il est possible d’apercevoir une plaque plus rigide et dure, de forme rectangulaire également, qui pourrait s’apparenter à du métal110. La forme de la pièce nous empêche de voir correctement à quoi correspond cet amas à l’intérieur de la pièce. A l’aide d’une caméra, nous avons pu observer que la couleur du comblement et l’aspect de surface de la céramique étaient relativement identiques. Cependant au toucher, le comblement est beaucoup plus souple que la terre cuite (Fig. 86).
Fig. 87 : Extérieur du comblement noir
Fig. 88 : Intérieur du comblement noir
Localisation du comblement noir Face A
Lors du passage de l’œuvre à la lumière UV, nous observons que le matériau a une florescence orange, cependant assez peu vive et inégale (Fig. 89).
Fig. 89 : Comblement noir en lumière naturelle et lumière UV L’ensemble des tests de Mohs sont regroupés en Annexe 4 p. 240 La composition exacte est actuellement impossible à déterminer. Des conclusions plus exactes pourront être tirées au moment de la dérestauration et de leur étude. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 66 109 110
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Quelques résidus de ce matériau noir sont identifiables sur la panse (Fig.91).
Fig. 90 : Vue rapprochée du matériau noir
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Fig. 91 : Résidus du matériau sur le gauche de la panse
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Diagnostic Une altération est une « modification de l’éclat, de la couleur, de l’homogénéité ou de la forme du tesson et/ou des couches de revêtement d’une pièce en céramique. Elle se produit pendant son utilisation ou après son abandon, à l’air libre ou dans un milieu d’enfouissement (terre ou eau) »111. Le diagnostic est destiné à analyser ces altérations, préalablement décrites dans le constat d’état, expliquer leurs causes, pronostiquer leurs conséquences sur la conservation de l’œuvre. La fabrication de l’œuvre, bien qu’elle n’ait pas directement d’impact sur la conservation de celle-ci, a pu favoriser le développement d’altérations. On peut ensuite classifier les altérations en fonction des causes : l’usage de la pièce, ses différents lieux de conservation mais aussi les interventions humaines antérieures. Les hypothèses sur les causes de ces altérations sont nombreuses en raison du manque d’informations sur le lieu et la durée de l’enfouissement, l’époque de la sortie de terre de l’œuvre, les différents lieux et méthodes de conservation qui ont suivi jusqu’à son entrée au musée. Nous savons en effet que la pièce a dû être rapportée lors d’une des missions scientifiques organisées par le Ministère de l’Instruction Publique entre 1878 et 1912. Elle a ensuite intégré la collection du musée des Beaux-Arts et a été conservée dans les caves ; puis elle a rejoint la collection du Musée d’Histoire Naturelle en 1991 pour être conservée dans des réserves nonaccessibles aux visiteurs112. Les altérations et ces quelques informations nous permettrons d’émettre des hypothèses quant aux grandes lignes de l’histoire de l’œuvre.
1. Altérations technologiques Les altérations technologiques sont les altérations liées à la fabrication de la pièce. Celleci n’est pas la source directe des dommages sur l’œuvre mais elle les a favorisées. En effet la fabrication peut parfois accentuer les altérations.
A. Mauvaise adhérence de l’engobe L’engobe blanc a une très mauvaise adhérence avec la pâte. Ceci peut être dû à différents facteurs au moment de la fabrication113 : 111
BLONDEL N. : Céramique, vocabulaire technique, Monum Patrimoine Eds Du, 2014, p. 376 BAU Valérie : Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et Amiens, Mémoire de maitrise Université Paris I - La Sorbonne, 1997 113 BERDUCOU M. : La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p. 87 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 68 112
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-
une différence de composition entre l’engobe blanc et la pâte. L’agile utilisée pour l’engobe peut être légèrement différente de celle utilisée pour la pâte. Leur manque de compatibilité les empêche de fusionner correctement au moment de la cuisson.
-
le refroidissement post-cuisson peut être un peu brutal pour l’engobe posé très finement. L’écart de température aurait ainsi créé des microfissures au sein de celui-ci, puis son craquèlement.
-
la rétraction de la couche de revêtement est plus importante que celle du tesson au moment du refroidissement, créant ainsi un tressaillage.
Cependant la matière engobe-pâte est dans l’ensemble solide. Le matériau a en effet très bien résisté au temps et à l’enfouissement. Ceux-ci n’ont ainsi pas créé de dommages de la structure ; la pièce archéologique aurait pu être bien plus dégradée.
B. La finesse des parties en relief Certains éléments en relief ont été rajoutés après le façonnage de la pièce.114 En effet, le nez, les disques auriculaires, les mains ont été modelés très finement au préalable, puis ajoutés au reste de la pièce dans un deuxième temps. La finesse des modelages est une des sources de leur fragilité ; ils sont d’autant plus sensibles aux chocs et à l’usure. Leur positionnement très en relief par rapport au reste de la pièce les rendent aussi plus vulnérables.
2. Altérations liées à l’usage de la pièce L’œuvre était à l’origine une pièce à utilité funéraire : plusieurs céramiques du même type entouraient le paquet funéraire (défunt) placé au centre de la tombe. Les premières altérations sont probablement apparues au moment de son utilisation. •
L’œuvre a été posée directement en contact avec la terre de la tombe, à la verticale. Afin de la faire tenir dans cette position, elle a été enfoncée de quelques centimètres. Cette pratique explique l’encrassement prononcé sur la partie basse de la pièce. Il s’agit en effet de la partie la plus en contact, et pendant un temps prolongé, avec la terre : celleci s’est alors incrustée dans le matériau poreux.
•
La première casse, celle des mains, peut dater de cette époque. La pièce a pu en effet tomber ou se renverser de son installation dans la terre. La cassure est la plus érodée de toutes les cassures, des concrétions sont présentes sur les tranches et elles sont encrassées. Ces indices nous permettent de penser que les tranches des mains ont subi l’enfouissement et donc que celles-ci ont été perdues au moment de son utilisation.
114
Se référer à la Partie Historique « Fabrication » p. 18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Les quatre protubérances sur le col ainsi que les disques auriculaires ont pu subir une casse au moment de l’utilisation aussi. Leurs tranches présentent le même caractère abrasé ainsi qu’un encrassement et des traces blanchâtres. Leur finesse et le fait qu’ils soient très en relief par rapport au reste de la pièce, les ont rendus fragiles et sujets à la casse. •
Les résidus à l’intérieur de l’œuvre peuvent être aussi liés à son utilisation. Il s’agit de sable, de petits cailloux, éléments identifiables dans la vallée Chancay. De plus, nous avons observé de petites feuilles longues, fines et sèches. Les rituels funéraires étaient accompagnés d’offrandes de feuilles de maïs au défunt. Par comparaison avec des feuilles de maïs fraiches, nous pouvons supposer qu’il s’agit de ce type de feuilles à l’intérieur de l’œuvre.
Fig. 92 : Comparaison de la feuille de maïs trouvée dans l’œuvre avec une feuille fraiche
3. Altérations liées à la conservation de l’œuvre A. Conséquences de l’enfouissement L’œuvre est une pièce archéologique : il s’agit d’un vestige matériel d’une activité exercée par les hommes et retrouvée dans son contexte. L’œuvre est en effet restée sur son lieu d’utilisation jusqu’à sa découverte, subissant alors les effets du temps et de l’enfouissement. « L’eau circulant dans le milieu d’enfouissement est l’agent essentiel de la désagrégation et de l’altération chimique des matériaux poreux »115. •
L’enfouissement prolongé dans la tombe peut expliquer l’empoussièrement important, la couche brune sur toute la partie haute de la pièce. En effet, l’œuvre étant placée dans la tombe, la poussière, le sable et la terre l’ont côtoyée pendant une durée importante. L’humidité du lieu a dû permettre l’incrustation de ces saletés dans les pores de la pâte, créant ainsi des dépôts.
115
BERDUCOU Marie : Op.cit., p. 91 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Les amas derrière les disques auriculaires, mélange de terre, de sable et de poussière, datent aussi de l’enfouissement. En effet, les matériaux correspondent à ceux que l’on peut trouver dans le milieu d’enfouissement (la tombe). Il s’agit de dépôts qui ont été oubliés au moment du nettoyage post-fouille. Cependant, l’enfouissement devait être partiel. En effet la pièce, si elle avait été recouverte entièrement par la terre, aurait été plus encrassée et sur toute sa surface. La partie supérieure est très encrassée, ainsi que la base puisque la pièce était légèrement enfoncée dans la terre pour rester stable116. La partie entre ces deux surfaces encrassées (panse) présente un empoussièrement mais n’est pas encrassée au même point. Nous pouvons penser que cette partie était protégée par une autre pièce ou un tissu par exemple. De plus le poids de la terre sur les éléments fragiles (disques auriculaires, col) aurait sans doute causé plus de dommages. En effet ces éléments n’auraient peut-être pas supporté la pression exercée. •
La vallée Chancay est un milieu chaud et humide en raison du fleuve Chancay. L’eau circule de manière importante dans la terre et donc dans le milieu d’enfouissement de la céramique. Les sels minéraux sont apportés par l’eau et entrent dans le matériau perméable par capillarité*. Lors de son séchage, l’eau chargée en sels est transportée jusqu’à sa surface extérieure. Au fur et à mesure du séchage, la concentration en sels augmente jusqu’à ce qu’il ne reste plus assez d’eau pour qu’ils soient solubilisés : ils se cristallisent117. La cristallisation va s’uniformiser sur l’ensemble du matériau : les sels vont ainsi se répartir de façon plus ou moins homogène118. Les sels peuvent être des sels solubles, nommés efflorescences, ou totalement insolubles dans l’eau. « Après précipitation [ses sels insolubles] ne présentent plus qu’une très faible solubilité dans l’eau : ils forment des concrétions et des dépôts internes »119. Des études ont montré que les conditions environnementales et la nature du sel (sulfate de calcium, sulfate de sodium, etc.) avaient des influences sur la forme qu’ils prenaient : ainsi le sulfate de calcium prendra la forme d’efflorescences si la cristallisation se fait
116
Se référer à la Fig. 38 p. 42 BOURGUIGNON E. : Dessalement des matériaux poreux modèles par la méthode des compresses, thèse Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2009, p. 33 118 BOURGUIGNON E. : Ibid., p. 34 119 BERDUCOU Marie : Op.cit., p. 92 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 71 117
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à une humidité relative120 élevée ou de concrétions si elle a lieu à une humidité relative basse121. Sur l’œuvre les sels semblent prendre deux forment différentes : des voiles blancs sur la surface engobée et les décors, ainsi que des concrétions légèrement en relief sur les parois intérieures du col. Selon Marie BERDUCOU122, les sels insolubles sont des carbonates de calcium, sulfates de calcium (gypses) et silicates prenant la forme d’encroutements plus ou moins étendus et parfois de voiles blanchâtres uniformes : ce sont des concrétions. Cette description correspond à l’aspect des sels trouvés sur la pièce. De plus, les tests de salinité123 sur deux localisations et deux sels d’aspects différents ayant donné des résultats faibles, nous pouvons penser qu’il s’agit de sels peu solubles. En effet, la compresse imbibée d’eau aurait, dans le cas d’efflorescences solubles, permis de les solubiliser et de dessaler légèrement la zone traitée. Les concrétions sont peu solubles et par conséquent peu actives : ces sels ne vont pas évoluer, ni endommager l’œuvre plus qu’elle ne l’est actuellement dans des conditions de conservation stables. Lors du passage de la pièce aux UV, nous avons repéré une légère fluorescence verdâtre de ces traces blanches. En effet, certains types de sels comme le gypse (sulfates de calcium hydratés, CaSO4 2H2O) et l’uranophane (silicates) ont un aspect blanc en lumière naturelle et une fluorescence verdâtre124
125
. Cette hypothèse peut être
confirmée par nos tests d’identification des ions : la quantité d’ions sulfates était la plus importante de tous les ions testés126. Nous pouvons donc supposer que nous sommes en présence de l’un de ces deux minéraux. La présence de ses efflorescences sur certaines tranches (mains) nous permet de penser que celles-ci ont été cassées avant l’enfouissement et donc avant l’exposition à cette eau saline.
« L’humidité relative (HR) représente la quantité de vapeur d’eau contenue dans un volume d’air donné parrapport au maximum qu’il pourrait contenir à une température et à une pression données. L’H.R va de 0 à 100%. On dit que l’air est sec quand l’humidité relative est inférieure à 35%, l’air est moyennement humide entre 35 et 65% d’H.R et l’air est humide à plus de 65% d’H.R. » (C2RMF : « Vade-Mecom de la conservation préventive », juillet 2006, [Document PDF], URL : http://c2rmf.fr/sites/c2rmf.fr/files/vade_mecum_conservprev.pdf) 121 BOURGUIGNON E. : Op. cit., p. 45 122 BERDUCOU M. : Op.cit., p. 92 123 Se référer au protocole et résultats des tests de salinité en Annexe 4 p. 240 124 BARMARIN Gérard : Base de données des minéraux luminescents, [en ligne], consulté le 15/01/17, URL : http://fluomin.org/ 125 Fiches des deux minéraux issues de la base de données en Annexe 11 p. 251 126 Se référer aux tests d’identification des sels en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 72 120
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•
Nous avons vu que l’engobe blanc adhérait mal avec la pâte de l’œuvre et que ce problème venait de la fabrication. Ce défaut a considérablement fragilisé la pièce et favorisé les soulèvements. La mauvaise adhérence a en effet créé des microfissures qui, additionnée à l’effet de l’humidité présente dans le sol puis la manipulation de l’œuvre, ont provoqué sa pulvérulence. Les décors rouges placés sur l’engobe se soulèvent avec celui-ci. À certains endroits, ceux-ci se soulèvent sans arracher l’engobe de la pâte ; ils sont posés très finement et n’ont pas une excellente adhérence sur l’engobe. Par le même phénomène d’exposition à l’humidité et de manipulation, les décors rouges se sont écaillés.
B. La sortie de fouille Il arrive parfois que les fouilles des sites archéologiques soient la source d’altérations pour les objets présents ; un manque de précaution au moment de la fouille (chocs d’outil), une mauvaise connaissance des besoins des objets à leur sortie, une mauvaise manipulation, un entassement des objets, un mauvais transport peuvent alors causer des altérations irréversibles. •
Nous pouvons penser qu’une deuxième casse de la pièce a eu lieu au moment de la sortie de fouille ou lors de sa conservation immédiate. Un choc sur la pièce, et en particulier sur la partie haute, a induit la casse du nez et du col en de nombreux tessons. En effet, nous parvenons à classer les cassures de la plus récente à la plus ancienne grâce à l’érosion des tranches : le nez et les cassures du col sont nettes et les tranches ne présentent pas de sels, ce qui nous permet de déterminer qu’elles ont eu lieu après l’enfouissement. L’eau et les frottements n’ont pas eu le temps d’altérer les tranches. Une tranche du col est particulièrement empoussiérée : nous pouvons donc penser que la casse a eu lieu après l’enfouissement mais avant sa conservation post-fouilles. Les nombreuses casses au niveau du col ne sont pas anormales : les nombreux ajouts des décors ont dû fragiliser le col en créant des tensions. La cassure qui suit le contour du col à l’horizontale confirme ce phénomène de fragilisation : le col est la plus fragile des parties.
•
Nous pouvons, par comparaison des tranches, comprendre que le manque a dû apparaitre au même moment. En effet, on peut penser que la casse du col en plusieurs tessons a eu lieu au moment de la sortie de fouille. Certains tessons ont alors disparu et seuls les six tessons visibles aujourd’hui ont subsisté.
•
La matière noire semble combler une lacune rectangulaire. Celle-ci a pu être créée par un choc très précis à cet endroit (partie peut-être déjà fragilisée par la finesse de la paroi), un coup d’outil de fouille, durant un transport, une mauvaise manipulation.
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4. La conservation post-enfouissement A. Mauvaises conditions de conservation •
L’empoussièrement général de la pièce est dû à sa conservation dans de mauvaises conditions, c’est-à-dire sans protection et dans un lieu empoussiéré. Les zones les plus empoussiérées, soit sur toute la Face A ainsi que sur l’intérieur du col, nous indiquent comment était conservée l’œuvre. De plus, une des tranches présente à la fois un empoussièrement important et un arrêt net, perpendiculairement à la tranche. L’orientation de cette limite de poussière et la localisation de l’empoussièrement sur le reste de la pièce peuvent nous faire penser que la pièce a été stockée sur le dos, avec le col peut être légèrement surélevé.
•
Le dépôt brun de forme ronde sur la base de la pièce ainsi que le dépôt jaune, vert et blanc sur la droite de la panse sont apparus post-enfouissement. Le dépôt brun, très fin, semble être de nature cireuse. Le deuxième dépôt est composé de trois matières différentes et de couleurs différentes ; il n’est cependant pas identifié. Ces matières ont pu se déposer sur la céramique au moment de sa conservation.
B. Chocs •
Les fêlures ont peut-être été créées par un ou plusieurs chocs. Déjà lors de la fabrication, la structure de la céramique pouvait être fragilisée pour différentes raisons telles qu’une sous-cuisson ou une mauvaise préparation de la pâte. De plus, celle-ci a pu être endommagée par l’eau circulant dans le milieu d’enfouissement. Un choc aurait donc facilement entrainé la fissuration de l’argile. Ceux-ci n’ont pourtant pas été consolidés au moment de la restauration.
•
Nous pouvons penser qu’une troisième casse a eu lieu durant la conservation de la pièce. En effet, certaines tranches sont très nettes et les tessons ne présentent pas de restauration. C’est le cas du tesson indépendant n°1. Nous pouvons donc penser qu’il a été cassé après la restauration par un nouveau choc. Cependant, le tesson a aussi pu être retrouvé et associé à la pièce une fois le collage des autres tessons effectués. Ceci expliquerait qu’il ne présente pas de traces d’adhésif et induirait qu’il ait été cassé au moment de la seconde casse, entre sa sortie de fouille et sa conservation en France.
•
L’éclat au niveau de la protubérance du col doit être dû à un choc. Une chute de la pièce a pu provoquer, en même temps que la casse du col, cet éclat. La pièce serait alors tombée sur le dos ; cette protubérance étant la partie la plus en relief de cette face, c’est cette partie qui est touchée en premier, provoquant l’éclat.
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•
Les différents chocs sur la pièce ont pu entrainer une légère déformation de la structure de la céramique et en particulier du col qui s’est ouvert. En effet, des tensions internes produites lors de la cuisson se sont relachées au moment de la casse, créant alors des ressauts127. Les tessons seront peut-être moins jointifs à cause de cela. Ces décalages peuvent donc ne pas être seulement dus à un collage mal ajusté. Cette hypothèse sera infirmée ou confirmée après la dérestauration, lors du prémontage. La fêlure n°1, sur la face A, possède un ressaut irréversible, sans doute pouvant être expliqué par ces déformations de la structure de la céramique.
5. Les altérations dues aux anciennes restaurations BLONDEL définit les altérations dues à des restaurations anciennes comme des « altérations du tesson ou des couches de revêtement d’une pièce céramique qui sont dues à d’anciennes restaurations et portent atteinte à son intégrité ; ou encore, altérations des matériaux de restauration qui se sont transformés en vieillissant »128. Les observations faites lors du constat d’état nous ont permis de déterminer que la pièce a subi plusieurs interventions. En effet l’étude de l’adhésif et des tranches nous laisse penser qu’il y a eu deux interventions espacées dans le temps.
A. Première restauration : le comblement noir La fissure entre la pâte et l’amas noir nous laisse penser qu’il s’agit du comblement d’une lacune. L’amas semble composé de trois matériaux différents : -
Une matière noire légèrement résineuse qui se ramollit à l’acétone et devient cassante sous le scalpel. A la lumière UV, le matériau a une fluorescence orange. Le bitume, dans la littérature scientifique, est très noir, dur, cassant129 et présente une fluorescence orange vif et est généralement sensible aux alcools130 ; ce qui pourrait rapprocher le matériau exogène de cette identification. Cependant la fluorescence de celui-ci n’est pas très vive. Un comblement à partir de bitume pur aurait une fluorescence plus vive. L’ajout d’une charge telle que la craie dans la résine pourrait diminuer l’intensité de la fluorescence.
« Brun-noir foncé et brillant en apparence, le bitume devient extrêmement cassant avec le temps. […] [Le bitume] peut de plus être considéré comme le premier matériau de comblement. 127
ACTON L. & SMITH N. : Practical Ceramic Conservation, The Crowood Ltd, 2003, p.60 BLONDEL N. : Céramique, vocabulaire technique, Monum Patrimoine Eds Du, 2014, p.392 129 BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p. 79 130 KOOB S. : « Obsolete fill materials found on ceramics », Journal of the American Institute for Conservation, Vol. 37 n°1, Avril 1998, p. 49-67 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 75 128
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Les résines fines de pin131 étaient communément utilisées pour réparer des céramiques sudaméricaines et amérindiennes »132. Selon S. KOOB, ce comblement aurait donc pu être réalisé au Pérou avant son importation en France. Ce type de comblement a perduré dans les régions d’Amérique du Sud, encore après le XIXe siècle. Or nous savons que les campagnes françaises de fouilles au Pérou ont principalement été commandées entre 1878 et 1912. La date du comblement pourrait alors correspondre. Celui-ci aurait été réalisé dans le temps entre sa sortie de terre et son arrivée en France. Cette hypothèse confirme que la lacune qu’il comble a été réalisée comme exprimé précédemment : la casse aurait eu lieu au moment de sa sortie de fouille, d’un transport ou de sa conservation au Pérou, et combler très peu de temps après. Cependant, il se peut aussi que ce comblement ait été réalisé en France, avec le même type de matériau qu’utilisé en Amérique du Sud, afin d’être fidèle aux origines de la pièce. -
Une plaque de métal, très dure et orangée. Elle pourrait servir de support afin d’appliquer ce matériau noir. Nous pourrons déterminer la nature exacte de ce matériau, seulement après l’élimination de la partie noire.
-
Un matériau différent peut être identifié sous la plaque de métal, à l’intérieur de la pièce. Il est visuellement identique à l’argile de la pièce mais est plus souple au toucher. La texture peut nous faire penser à du liège. Cependant, sa nature sera, elle aussi, déterminée une fois la dérestauration effectuée.
B. Deuxième restauration : l’adhésif •
L’adhésif qui a servi à assembler les différents tessons a été appliqué très liquide et en plusieurs étapes comme le montrent les différentes directions des coulures. Le sens de la goutte indique de quelle manière était positionnée la pièce au moment du collage. L’adhésif a été appliqué généreusement et n’a pas été nettoyé ensuite. Il est jaune, très brillant, soluble à l’acétone et l’éthanol et a une fluorescence jaune-vert.
131
Dans ce cas, le bitume désigne du goudron de pin (Paraná) totalement naturel. Le pin, très riche en résine, est carbonisé à l’abri de l’air. Par distillation, les résidus sont transformés en goudron végétal très efficace. Il est noir et visqueux et a la capacité d’adhérer à tout type de matériau sur lequel il est appliqué. 132 « Dark brown-black and shiny in appearance, bitumen becomes extremely brittle with age. […] [Bitumen] can therefore be considered as the first fill material. Thickened pin resins were commonly used to repair South American and Southwest Native American pottery » (KOOB Stephen, Art.cité., p. 49-67) Léa BIZOUARN
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Les adhésifs à base de nitrate de cellulose ont un aspect jaune, sont sensibles à l’acétone, et ont une fluorescence assez vive jaune ou jaune-verte133 134. Ces caractéristiques du nitrate de cellulose sont clairement identifiables sur l’adhésif présent sur l’œuvre. L’adhésif sur le visage de l’objet semble différent par son aspect. En effet il est moins brillant. Cependant, les tests de solubilité effectués à deux endroits différents (col et visage), nous ont donné les mêmes résultats. Les fluorescences sont aussi identiques. Nous pouvons donc en conclure qu’il s’agit d’un seul et même adhésif sur toute la pièce. La différence d’aspect peut être simplement due à une exposition différente à la lumière. La nature synthétique et le vieillissement de l’adhésif nous permettent d’en conclure que le collage est assez récent et a été réalisé entre 15 et 20 ans auparavant. Les matériaux et la date potentielle de restauration nous permettent de penser que cette restauration a eu lieu lors de l’importation de l’œuvre dans les collections françaises. Selon BERDUCOU135, les nitrates de cellulose sont très utilisés sur les chantiers archéologiques en raison de leur praticité : ils sont transparents à l’application, facile d’utilisation et elles sont disponibles prêts à l’emploi en tube. Les nombreuses coulures visibles peuvent ainsi être dues à collage fait rapidement, sans attention sur l’ordre de montage des tessons et l’installation de l’œuvre, et avec un adhésif trop liquide. •
Le collage a été effectué en laissant de nombreux ressauts entre les tessons. Nous pouvons voir des écarts allant jusqu’à un millimètre. Ils sont dû à un mauvais assemblage au moment du collage ou un manque de maintien des tessons durant le séchage (avec des rubans adhésifs par exemple) ; la forme se serait alors ouverte et l’adhésif aurait séché dans cette position. Cependant ces ressauts peuvent aussi être dus, comme expliqué précédemment, à une légère déformation irréversible de la structure au moment des différents chocs. Les fêlures présentent d’ailleurs des ressauts irréversibles.
6. Conséquences sur l’œuvre et évaluation des risques Parmi les altérations observées, certaines ont un impact simplement esthétique, empêchant une bonne lisibilité, mais d’autres ont des incidences plus importantes sur la structure même de l’œuvre. Celles-ci peuvent alors poser des problèmes dans le temps. Nous
133
NEL Petronella : « A preliminary investigation into the identification of adhesives on archaeological pottery », AICCM Bulletin Vol. 30, 2007, p. 27-37 134 National Park Service : « The Use of Ultraviolet induced visible Fluorescence in the examination of Museum object, Part II », Conserve O Gram n° 1/10 [Document PDF], December 2000, https://www.nps.gov/museum/publications/…/01-10.pdf 135 BERDUCOU M. : La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p. 103 Léa BIZOUARN
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allons donc évaluer ces risques afin de comprendre la nécessité d’intervention et d’envisager ensuite les traitements à apporter.
A. Conséquences esthétiques Il s’agit des conséquences des altérations impactant, sur la surface visible de l’œuvre, sa lisibilité et son aspect esthétique.
a. Perte d’informations sur la couleur L’empoussièrement et l’encrassement importants et généralisés sont des altérations visuelles. En effet, ceux-ci modifient considérablement la couleur d’origine du substrat. L’engobe blanc crème recouvrant la pièce à l’origine est devenu assez peu remarquable : il est majoritairement devenu brun en raison de ces couches d’encrassement (en particulier sur la partie haute et la base de la pièce). Ces altérations font perdre des informations importantes à la pièce. Dans le même sens, les concrétions salines forment des voiles blancs ou des auréoles blanches : la couleur d’origine de la pièce s’en voit altérée. En effet, ces sels recouvrent par exemple des décors brun-rouge : leur couleur est ternie, blanchie et transformée. Ces sels étant insolubles et donc inactifs, hormis l’aspect visuel, ils ne sont pas dangereux pour l’œuvre. La pulvérulence de l’engobe a pour conséquence son soulèvement et sa perte, ainsi que la perte de certains décors rouges par la même occasion. La pâte nue apparait donc en dessous, faisant perdre à l’œuvre une partie d’elle-même. La perte de l’engobe blanc signifie perdre l’intégrité de l’œuvre.
b. Rupture visuelle Le comblement noir est très imposant, il est impossible de ne pas le voir : le regard est directement attiré par cet amas noir qui dénote par rapport au reste de la pièce. Il pose donc un problème esthétique important. Les coulures jaunes de l’ancien adhésif sont également très visibles. Elles ne suivent pas forcement les cassures et passent au milieu du visage du personnage, gênant par leur couleur et leur brillance la lisibilité continue de l’œuvre. Par ailleurs, les ressauts créés par le collage non jointif sont très visibles et provoquent une gêne visuelle. La lacune au niveau du col provoque elle aussi une rupture au passage du regard, une perte de continuité. Elle est en effet assez imposante par rapport à la taille du col et donc très remarquable. Léa BIZOUARN
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B. Conséquences matérielles Il s’agit des conséquences sur la structure de l’œuvre et les risques matériels encourus par l’œuvre en cas d’inaction de conservation ou de restauration. Les quatre fêlures ne sont pas arrêtées ; elles peuvent donc, en cas de chocs ou de vibrations, se propager dans l’argile et finalement créer de nouvelles cassures. Les fêlures sont en effet arrêtées par les vides : dans notre cas elles fendront la pièce jusqu’à sa rupture. Il s’agit d’un risque important pour la pérennité de l’œuvre. L’engobe blanc est pulvérulent et menace de s’écailler. En cas de manipulation avec un manque de précaution ou des frottements, celui-ci se détacherait de la surface de manière définitive. En effet, l’engobe se délitant en de très fines écailles, il serait impossible de les réassembler et de les replacer sur l’œuvre. Il existe donc un risque important de perte de matière en cas de non traitement. Les coulures de l’adhésif, très visibles, nous font comprendre qu’il a été appliqué sur l’œuvre avec une viscosité* très faible. En plus des conséquences esthétiques, celui-ci est susceptible de créer des altérations matérielles avec le temps. En effet, il a pu pénétrer de manière irréversible dans la pâte poreuse de la céramique, provoquant alors des problèmes avec le temps : l’adhésif durci qui a pénétré sous l’engobe pourrait créer des soulèvements de celuici. Par ailleurs, même si le nitrate de cellulose est considéré comme réversible, les nitrates de cellulose peuvent devenir bruns et irréversibles avec le temps, en particulier quand ils sont soumis aux UV. L’adhésif ayant pénétré dans les pores serait alors impossible à retirer. Le comblement en résine noire, outre la gêne visuelle, pourrait être composé de matériaux pouvant, avec le temps, porter préjudice à l’œuvre s’ils ne lui sont pas adaptés. En effet, s’il s’agit d’une plaque de métal, celle-ci pourrait, à cause de l’humidité des différents lieux de conservation, avoir déposé de la corrosion sur la céramique poreuse. Celle-ci pourrait alors pénétrer irréversiblement dans la pâte. Nous n’avons pas non plus connaissance des effets dans le temps de cette résine sur la céramique. Les altérations actives et comportant actuellement ou prochainement des risques sur la pièce sont donc principalement : -
les fêlures pouvant se propager à tout moment.
-
l’engobe blanc pulvérulent susceptible, à chaque manipulation, de s’écailler et se détacher davantage.
-
l’adhésif (nitrate de cellulose) pouvant soulever l’engobe s’il a pénétré dans les pores de la pâte et devenir irréversible avec le temps.
-
le comblement noir composé de matériaux inconnus susceptibles d’altérer la céramique.
-
la perte des fragments
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Fig. 93 : Schéma récapitulatif du processus d’endommagement de l’œuvre
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Récapitulatif des conséquences des altérations
Enfouissement
Usage
Mauvaises conditions de conservation
conditions de conservation Sels insolubles Encrassement Empoussièrement
Fêlures Cassures Lacunes Abrasion des éléments en relief
Pulvérulence de l’engobe
Anciennes restaurations
Altérations esthétiques
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Altérations mécaniques
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Proposition de traitement 1. Valeurs de l’œuvre « L’axiologie ou théorie des valeurs est une notion issue de la philosophie et récemment appliquée à la conservation-restauration »136. Grace à l’évaluation de ces valeurs, Barbara APPELBAUM137 détermine en quoi l’œuvre est appréciée à différentes périodes de sa vie : sa création, son utilisation et sa place aujourd’hui dans l’art céramique. L’étude de ces valeurs138 nous permettra de mieux comprendre l’œuvre, son importance aujourd’hui et par la suite de déterminer les traitements à effectuer pour la conserver dans le temps. Valeur historique La valeur historique est la plus importante dans le cas de la jarre funéraire et ce pour plusieurs raisons : -
Elle est un témoin d’une civilisation aujourd’hui disparue. N’ayant aucune source écrite, les seuls sujets d’étude sont les œuvres retrouvées. De plus, l’œuvre étant une céramique funéraire, celle-ci renseigne sur l’art et les rites funéraires chancay, mais aussi sur leurs techniques de fabrication : elle a une valeur documentaire pour les chercheurs.
-
L’œuvre provient du Musée d’Histoire Naturelle de Lille ; elle est donc une œuvre de musée destinée à être exposée et à instruire le public. La collection ne contient qu’une seule jarre funéraire, ce qui lui donne une place plus importante encore. Nous pouvons alors ajouter à cette œuvre une valeur pédagogique : elle est destinée, lors d’une potentielle exposition, à instruire le spectateur sur cette civilisation si peu connue.
-
Les anciennes restaurations ont aussi une valeur historique. En effet il a été envisagé, lors du diagnostic, que le matériau de comblement en résine naturelle pouvait avoir été réalisé au Pérou à sa sortie de fouille. Celui-ci donnerait alors des informations sur les procédés de restauration archéologiques péruviens au XXe siècle. Il sera donc important de le conserver pour des recherches scientifiques annexes.
136
BOUYER Eve : « Quelques pistes de réflexion sur la restauration perceptible des vases céramiques antiques », CEROArt [En ligne], mis en ligne 17 Novembre 2010, le consulté le 20/03/17, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1618 137 APPELBAUM Barbara : Conservation treatment Methodology, Butterworth-Heinemann, 2007, p. 202 138 Tableau de valeurs selon le modèle de Barbara APPELBAUM en Annexe 12 p. 253 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 82
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-
La céramique Chancay provient d’une civilisation s’étant développée entre 1100 et 1470. Au cours des siècles qu’elle a traversés, elle a accumulé des traces du temps comme nous l’avons vu précédemment (abrasion des parties en relief). Nous parlons alors de valeur d’ancienneté : l’objet est apprécié pour son aspect ancien et les marques qui prouvent les siècles traversés.
Valeur de rareté Au Pérou, l’œuvre étudiée n’est pas rare : les populations détiennent personnellement des céramiques chancay. Celles-ci étaient en effet placées en nombre dans chaque tombe et de gigantesques sanctuaires ont déjà été trouvés aujourd’hui. Les musées péruviens possèdent des centaines de ces céramiques funéraires. Cependant, leur nombre est moins important en France : certains musées en possèdent, comme le musée des Jacobins (Toulouse) ainsi que des collectionneurs privés. Cette rareté s’explique simplement une loi péruvienne datant de 1822 et interdisant la sortie de biens archéologiques sans autorisation gouvernementale. Cependant, la création d’un département des Arts Premiers au Musée du Quai Branly montre que la science ethnographique et les civilisations étudiées prennent de l’importance auprès des conservateurs et du public. Valeur esthétique Les céramiques funéraires chancay n’ont pas été créées dans un but artistique ou esthétique, mais certaines sont tout de même plus travaillées et décoratives que la jarre étudiée. Celle-ci ne présente en effet aucune particularité remarquable ou particulièrement décorative : elle a été créée sans soucis du détail et n’est pas d’une qualité exceptionnelle par rapport à d’autres œuvres de la même civilisation139. Cependant nous pouvons affirmer qu’aujourd’hui, sa représentation humaine originale et ses décors en font un objet attrayant pour le public. Si elle n’a pas été créée dans un but décoratif et esthétique, nous pouvons dire que l’œuvre l’est devenue aujourd’hui. Valeur d’utilisation La première fonction de l’œuvre était funéraire. Elle a été utilisée pour faire des offrandes de feuilles de maïs140 à un défunt. Elle a eu cette fonction jusqu’à ce qu’elle soit déterrée lors de fouilles programmées. La pièce sortie de son contexte et vidée de ses offrandes
139
Se référer à la Partie historique « Attribution à la civilisation chancay ? » p. 31 Les feuilles de maïs et autres résidus trouvés à l’intérieur de l’œuvre possèdent à eux seuls une valeur documentaire. En effet ils permettent d’emmètre des hypothèses sur les offrandes effectuées, les lieux d’enfouissement, etc. Il sera important de les conserver en vue d’une potentielle étude scientifique future. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 83 140
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a, à ce moment, perdu son utilité. Elle est devenue un objet de curiosité et de recherches comme expliqué précédemment. Cependant, sa valeur d’utilisation n’est pas à négliger puisqu’il s’agit de sa fonction première et d’une grande partie de sa vie. Des traces de cette utilisation sont d’ailleurs visibles sur l’œuvre, comme nous l’avons vu lors du diagnostic. Cette valeur sera donc à prendre en compte au moment des choix de restauration. Si la valeur d’utilisation n’est plus une valeur actuelle, elle a toutefois été très importante dans la vie de l’œuvre. Cependant celle-ci a aujourd’hui plutôt une importance auprès du public et des chercheurs : les valeurs documentaires sur la civilisation chancay et pédagogiques priment. En effet, même si la civilisation chancay est une civilisation encore assez peu étudiée et méconnue du public, les formes originales de l’œuvre et son côté mystérieux attirent la curiosité. De plus, le rapprochement physique avec la figure précolombienne bien connue de Les aventures de Tintin - L’Oreille cassé (Hergé, 1937), procure à la céramique un caractère
familier.
Fig. 94 : Extrait de Les aventures de Tintin - L’Oreille cassé de HERGÉ (Casterman®)
2. Objectifs de la conservation-restauration « La restauration constitue le moment méthodologique de la reconnaissance de l’œuvre d’art dans sa constance physique et dans sa durabilité historique et esthétique en vue de sa transmission dans le futur »141. La conservation a pour but de prolonger la vie de l’œuvre en arrêtant ses dégradations, alors que la restauration correspond aux actions qui permettent de rétablir la lisibilité de l’œuvre et d’en comprendre les dimensions esthétiques et historiques. Nos objectifs principaux dans la Conservation-Restauration de la jarre funéraire seront donc : 141
BRANDI Cesare : Théorie de la restauration, (trad. de l'italien par Colette Déroche), Monum-Editions du patrimoine, s.d. [2001], p. 30 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 84
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-
arrêter les dégradations matérielles : empêcher les pertes de l’engobe se soulevant et éviter que les fêlures ne se propagent,
-
éliminer les éléments chimiques qui pourraient altérer l’œuvre : éviter que les matériaux des anciennes restaurations ne dégradent l’œuvre en vieillissant, en particulier l’adhésif ancien ayant pénétré dans les pores de la pâte,
-
rétablir une intégrité formelle pour permettre une meilleure lecture : atténuer la visibilité de la lacune au niveau du col, remonter les fragments correctement pour éviter les ressauts. APPELBAUM dans Conservation Treatment Methodology142, parle d’un Etat Idéal. Il
s’agit de l’état physique représentant le mieux les valeurs de l’objet. Il est déterminé en conciliant l’état actuel de l’œuvre, ses valeurs et son devenir. Nous en avons conclu que sa valeur principale actuelle était la valeur documentaire : elle est un témoin et une preuve du déroulement des rites funéraires chancay. Sa valeur d’utilisation contribue donc à son interet documentaire. L’Etat Idéal dont parle APPELBAUM pourrait être, pour cette œuvre, son état au cours de son utilisation. En théorie il faudrait donc supprimer toutes les traces de vie de l’objet apparues après son utilisation (enfouissement, stockage muséal …) Les actions de restauration en accord avec cet état seraient alors : -
supprimer les anciennes restaurations (collage et comblement),
-
retirer les voiles blanchâtres qui couvrent la pièce et altèrent les couleurs originales de l’œuvre. Ils sont apparus pendant l’enfouissement et dégradent l’aspect général de l’œuvre,
-
conserver les traces d’utilisation telles que l’encrassement sur la base de la pièce montrant comment celle-ci a été positionnée dans la tombe.
Cependant, il s’agit également d’une œuvre archéologique, nous ne pouvons donc pas nier qu’elle ait été enfouie plusieurs siècles avant sa découverte. Cette période d’enfouissement fait donc également partie de son histoire. Les traces d’enfouissement ne doivent donc pas être supprimées dans leur intégralité. -
Les traces blanches sont généralement retirées sur les œuvres archéologiques car elles nuisent à la lisibilité de l’œuvre sans apporter d’information historique.
-
Supprimer les traces d’enfouissement telles que l’encrassement sur la partie haute de la pièce serait légitime par rapport à l’aspect des autres œuvres chancay. En effet elles
142
APPELBAUM Barbara : Op. cit., p. 173 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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sont, dans l’ensemble, très bien conservées en raison de leur enfouissement dans le sable des tombes. -
Conserver les érosions sur les disques auriculaires, les mains ou encore le nez, est nécessaire car elles sont la preuve de l’enfouissement de la pièce et de son ancienneté.
3. Le devenir de l’œuvre Les choix de restauration doivent correspondre aux attentes du propriétaire, ou dans notre cas du conservateur du département ethnographique du Musée. Un dialogue est établi avec celui-ci afin qu’il valide continuellement les choix de traitements. L’œuvre est actuellement entreposée dans les réserves du Musée, mais pourrait, dans l’avenir, être présentée dans une salle d’exposition. Les choix de restauration devront donc correspondre, dans un premier temps, aux conditions de conservation des réserves, mais aussi à celles des salles d’exposition143. Les choix esthétiques de restauration (comblement et retouche) devront aussi être en accord avec les restaurations déjà effectuées sur les œuvres présentes dans le musée, afin de créer une harmonisation entre celles-ci. De plus, la restauration devra respecter les différentes étapes de la vie de l’œuvre telles que les différentes casses qu’elle a subies144 et ne pas les cacher aux yeux du public : les cassures et lacunes au niveau du col ou de la panse devront rester perceptibles. Mais l’œuvre doit aussi être agréable à regarder par le public : les voiles blanchâtres en gênent la lisibilité ; ils devront être retirés. Enfin, dans le cadre d’une potentielle exposition, un système de présentation pourra être proposé au musée. Le soclage devra mettre la pièce en valeur tout en assurant sa sécurité.
4. Respect de la déontologie Les choix de conservation et de restauration devront respecter certains principes de la déontologie : •
Les produits choisis seront respectueux de l’œuvre : ils seront réversibles, durables et stables dans le temps et respecteront le principe d’innocuité* c’est-à-dire qu’ils ne devront pas dégrader la matière.
143
Les réserves : lumière noire, humidité relative entre 45-50 %, température entre 18-20° C, contact par le conservateur uniquement. Les salles d’exposition : lumière entre 80 et 100 lux, humidité relative entre 45-50 %, température entre 18-20° C, vitrine fermée. 144 Se référer au Diagnostic p. 68 Léa BIZOUARN
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•
Les restaurations ont toujours une durée de vie limitée : les matériaux vieillissent et les choix de restauration varient avec le temps. Les traitements effectués devront donc tous être facilement réversibles dans le futur.
•
Les interventions et les produits devront être réfléchis et précisément documentés afin de choisir les plus adaptés à l’œuvre.
•
Nous devrons nous assurer que l’ensemble des produits choisis sont compatibles les uns avec les autres et qu’une intervention ne dégradera pas une intervention antérieure, ni pendant la restauration, ni dans le temps.
5. Choix global de conservation-restauration A. Le conditionnement de l’œuvre Dans le but de garantir la sécurité de la pièce, il est nécessaire, dans un premier temps, de penser une boite de conservation à moyen et long terme, ainsi qu’un coussin de travail permettant une manipulation sécurisée. Actuellement, en considérant l’état de l’œuvre et son conditionnement, les risques encourus par l’œuvre sont importants : -
Les risques du conditionnement actuel : l’œuvre est actuellement conservée dans une boite en carton de conservation, matériau stable. Cependant la sortie de la pièce se fait par un coté, ce qui rend son extraction périlleuse. Sa préhension se fait en effet par la partie la plus fragile, à savoir la tête de la jarre, ce qui augmente les risques. De plus, la boite a été pensée aux dimensions exactes de la pièce, ce qui la rend très étroite : la pièce frotte à chaque entrée et à chaque sortie sur les parois de la boite, créant une usure de surface importante. Enfin, une fenêtre transparente permet de voir
Fig. 95 : Ancienne boite de conditionnement de la pièce
la pièce sans ouvrir la boite : celle-ci est réalisée dans un film très fin ce qui ne protège pas la pièce en cas de choc sur cet endroit de la boite. -
Les risques de manipulation : la pièce, lors de son étude, va être manipulée de nombreuses fois tant pour un travail d’observation que pour celui de restauration. Les éléments saillants tels que le nez et les disques auriculaires sont des zones très fragiles et une pression trop importante à cet endroit pourrait leur porter préjudice.
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-
Les risque de stockage à l’atelier et au musée : à l’atelier de l’Ecole de Condé, l’œuvre sera stockée dans une étagère ouverte consacrée aux œuvres de mémoire. Certains chocs et vibrations sont à envisager lors de la préhension des œuvres de mémoire par les autres étudiants par exemple. Au musée, la pièce sera conservée dans les réserves de celui-ci avec d’autres pièces. Une manipulation de la pièce elle-même ainsi que celle d’autres pièces conservées sur la même étagère pourraient créer des vibrations.
-
Les risques liés au transport : la pièce va subir un transport après sa restauration afin de retourner au musée. Elle pourra subir lors de ce transport en voiture des chocs et vibrations. Le conditionnement de l’œuvre est un traitement de conservation à part entière puisqu’il
s’agit d’une action indirecte permettant de protéger l’œuvre de la faire perdurer. Les boites et le coussin de travail devront parfaitement s’adapter à l’œuvre, permettre sa manipulation lors des futurs traitements, la protéger sur le long terme, tout en respectant les principes déontologiques de durabilité et d’innocuité. Les traitements consisteront en la fabrication de : -
un coussin de travail assurant la stabilité de l’objet lors des traitements. La pièce y sera installée en permanence : elle sera restaurée sur celui-ci, mais ce coussin sera également placé dans la boite de conservation par la suite.
-
une boite de conservation sur le long terme
-
une boite de conservation temporaire pour les tessons désolidarisés lors de la dérestauration.
B. La dérestauration La dérestauration est l’élimination des restaurations réalisées antérieurement sur l’œuvre : il s’agit du décollage, du dégagement des comblements ou de l’élimination des retouches. Cependant la dérestauration suppose toujours des dégradations de l’œuvre, même infimes. Cette étape doit donc être réfléchie : dérestaurer la totalité n’est pas une obligation. Les dégradations visuelles et physiques sur l’œuvre sont-elles plus gênantes que les dégradations potentiellement provoquées par la dérestauration ? Les anciennes restaurations sont ici très visibles et inesthétiques. De plus, les matériaux utilisés (nitrate de cellulose, résine de pin) sont dangereux pour la conservation de l’œuvre : ils seront donc retirés. Léa BIZOUARN
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La dérestauration sera la première étape du traitement : le décollage puis le nettoyage des traces d’adhésif. En effet, le nettoyage ne pourrait pas être fait en premier, car l’encrassement sera surement différent entre la surface générale et les lignes protégées par l’adhésif. Le nettoyage des traces de colle va laisser des traces propres et le nettoyage qui suivra devra alors harmoniser l’ensemble. Un léger nettoyage pourra cependant être effectué préalablement : un dépoussiérage de la surface et le prélèvement des résidus et poussières présents à l’intérieur de l’œuvre. Celles-ci n’étant pas fixes, ce nettoyage évitera qu’elles se dispersent au moment des différentes manipulations.
a. Décollage des tessons Les anciennes restaurations peuvent entrainer de nouvelles altérations. En effet la colle à base de nitrate de cellulose a été appliquée très liquide et s’est infiltrée dans les pores de la céramique. Ce type d’adhésif devient cassant et irréversible en vieillissant et est susceptible, à terme, de créer des soulèvements au niveau de l’engobe. De plus, l’adhésif a jauni et peut aller jusqu’à devenir brun avec le temps145, ce qui est très inesthétique. Par ailleurs, les ressauts entre les tessons ajoutent une gêne visuelle. Pour toutes ces raisons, les tessons seront décollés et les traces d’adhésif le long des tranches seront retirées. Nous avons déterminé, lors de tests préalables, que l’acétone était efficace sur cet adhésif. Les documentations scientifiques ont confirmé ces résultats : les nitrates de cellulose sont sensibles à acétone ou l’acétate de pentyle selon V. OACKLEY et S. BUYS 146. Un décollage par vapeur d’acétone permettrait de ramollir l’adhésif sans le faire pénétrer plus en profondeur dans la pâte. La pièce devra être enveloppée entièrement et sécurisée dans cette enceinte pour ne pas s’abimer au moment du décollage. L’adhésif va perdre de son adhésivité, les tessons devront alors être soutenus pour ne pas risquer de chuter et de se briser pendant l’opération.
b. Dégagement du comblement noir Le comblement noir est composé d’une résine, d’une plaque de métal et d’un troisième matériau encore non-dentifié. Ce dernier est peut-être dangereux pour l’œuvre, ainsi que la plaque de métal qui, en atmosphère humide, pourrait provoquer l’incrustation de rouille dans les pores de la céramique de manière irréversible.
145 146
BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p. 80 BUYS S. et OAKLEY V. : Loc.cit.
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De plus, ce comblement nuit à l’esthétique de l’œuvre puisqu’il dénote considérablement du reste de l’œuvre : l’amas noir est très visible sur l’engobe couleur crème. Cependant, selon KOOB et comme nous l’avons vu lors du diagnostic, ce comblement pourrait avoir été réalisé au Pérou, à la sortie de fouille, à l’aide d’une résine naturelle de pin. Ce comblement fait partie intégrante de l’histoire de l’œuvre.
Il a une valeur
documentaire puisqu’il nous renseigne sur les techniques de restauration archéologiques péruviennes du XXème siècle. Nous devons donc déterminer si la valeur documentaire et historique de ce comblement prédominent sur le côté inesthétique, ainsi que son caractère potentiellement néfaste pour la matière de l’œuvre. Selon C. BRANDI, la conservation des ajouts historiquement importants, ne doivent pas pour autant porter atteinte à l’esthétique de l’œuvre ; dans certains cas, l’esthétisme prédomine le plan historique147. Dans notre cas, le manque de connaissances sur les matériaux constitutifs pouvant altérer la matière à terme ainsi que le côté très inesthétique et très visible de ce comblement, nous incitent à le retirer. Les tests préalables nous ont permis de déterminer que l’acétone ramollissait la résine noire et que l’action d’un scalpel permettait alors de la désolidariser du substrat. L’acétone ne solubilisant pas la matière – mais la ramollissant seulement – la pièce entière pourra être exposée aux vapeurs d’acétone pour le décollage des tessons, sans que cela ait d’influence sur le comblement.
C. Le nettoyage Le nettoyage a pour but de retirer l’empoussièrement, l’encrassement ainsi que les matériaux exogènes dans le but de retrouver la matière originale de l’œuvre. Le nettoyage sera réalisé avec des produits du plus neutre au plus invasif pour l’œuvre, en fonction des résultats obtenus. Les altérations seront traitées les unes à la suite des autres.
a. Nettoyage des résidus d’adhésif sur les tranches et la surface A la suite du décollage des tessons, les résidus d’adhésif sur la surface et sur les tranches devront être nettoyés. Ce nettoyage permettra de faire disparaitre les coulures d’adhésif très visibles le long des cassures et sur le visage, redonnant ainsi un aspect propre à l’œuvre. Quant au nettoyage des tranches, il est nécessaire au futur recollage des tessons afin de rétablir une bonne jointure.
147
BRANDI Cesare : Théorie de la restauration, (trad. de l'italien par Colette Déroche), Monum-Editions du patrimoine, s.d. [2001], p. 60 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 90
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Selon les tests, l’acétone permet de ramollir l’adhésif pour ensuite le retirer au scalpel. Une application en gel permettrait de laisser poser le produit plus longtemps mais aussi éviterait à l’adhésif de pénétrer plus encore dans les pores de la pâte, créant alors des taches irréversibles.
b. Atténuation de la couche brune dans la partie supérieure Une couche brune recouvre toute la surface haute de la pièce ; elle cache l’engobe blanc sous-jacent, caractéristique importante des « Noir sur Blanc » chancay. Cet engobe a un intérêt historique et documentaire puisqu’il nous renseigne sur les techniques de fabrication des céramique chancay. Laisser cet engobe caché revient à garder invisible une partie du travail du potier chancay. Un nettoyage de cette couche brune est donc envisagé pour retrouver l’engobe autant que possible, dans la mesure du respect de l’œuvre. Il a été déterminé qu’une humidification à l’eau permettait de ramollir légèrement la matière alors ensuite plus facile à retirer par l’action mécanique d’un scalpel.
c. Nettoyage des dépôts •
Un dépôt rond et brun est présent sur la base de la pièce. Il n’est pas très visible et n’est pas gênant visuellement, cependant il s’agit de la seule tache de ce type sur l’œuvre. De plus, nous ne savons pas à quoi elle correspond, mais nous pouvons déterminer qu’elle est relativement récente puisqu’elle se situe par-dessus l’encrassement brun de la base. Cette matière est peut-être néfaste pour la pièce ; ne connaissant pas sa composition, nous ne pouvons pas affirmer son innocuité. Par ailleurs, ce dépôt n’a pas d’intérêt documentaire ou historique ; nous avons donc opté pour le retirer. Les tests préalables ont permis de déterminer que l’action couplée de l’eau et du scalpel permettait de retirer ce dépôt.
•
Le dépôt jaune, vert et blanc sur la panse sera retiré pour les mêmes raisons que le dépôt précédent : non connaissance du matériau et de son innocuité et absence d’intérêt documentaire. Un coton roulé imbibé d’eau déminéralisée permet de retirer le dépôt.
Les dépôts étant au-dessus de la couche d’encrassement, il est nécessaire de les retirer avant de réaliser le nettoyage total de la panse.
d. Elimination de l’encrassement général La pièce est entièrement recouverte d’une couche de poussière-encrassement. Dans le but de retrouver une certaine uniformité sur toute la surface de la pièce, un nettoyage plus général sera réalisé. Il permettra d’harmoniser les couleurs de la partie haute de l’œuvre et la panse, aujourd’hui trop contrastées. Léa BIZOUARN
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L’application de compresses ou de gels est une manière d’obtenir un résultat homogène sur toute la surface puisque ceux-ci agiront de la même façon partout ; contrairement à une action mécanique qui risquerait de créer des irrégularités. Le nettoyage sera arrêté lorsqu’une homogénéité satisfaisante aura été retrouvée. Lors du nettoyage de la panse, il faudra faire attention aux zones à l’engobe craquelé et pulvérulent afin de ne pas l’altérer plus encore. Des tests de compatibilité entre cette altération et la technique de nettoyage devront être réalisés au préalable.
e. Atténuation des concrétions salines La pièce archéologique possède des sels gênant l’esthétique de l’objet : ils blanchissent légèrement la surface, en particulier sur la partie haute de la pièce et les décors brun-rougeâtre. S’il s’agit de concrétions insolubles, il est toutefois possible de réaliser un traitement léger pour atténuer ce phénomène de voiles blancs. Ne connaissant pas la composition exacte de ses concrétions, nous ne pouvons actuellement pas déterminer le type de produit permettant de les retirer : un complexant*, une base ou une solution acide pourront être envisagés. Des tests complémentaires devront donc être réalisés. Le produit déterminé sera appliqué par compresse : cette technique permettra de ne pas faire pénétrer les sels plus encore dans la pâte. La compresse les attirera et les retiendra, évitant de les redistribuer plus largement dans les pores.
f. Encrassement brun sur la base de la pièce Nous avons déterminé, lors du diagnostic, que cet encrassement correspondait à la zone ancrée dans le sol de la tombe du défunt afin que la pièce tienne à la verticale. Cette altération fait donc partie de l’histoire de l’œuvre, de son utilisation et du temps passé dans cette tombe : elle fait partie de la patine de l’œuvre. Selon BRANDI, la patine correspond aux altérations qui ne nuisent pas à lecture de l’œuvre et doivent donc être conservée comme témoin du temps sur objet148. Nous avons préalablement déterminé que l’Etat Idéal de notre œuvre était celui qu’elle avait au moment de son utilisation. Nous allons donc, dans la mesure du possible, conserver cette trace de son passage en milieu funéraire. Le nettoyage du dépôt brun149 sur la base de la pièce ne devra pas créer de propreté contrastée avec l’encrassement général de la base. S’il y a un risque, ce dépôt ne sera pas retiré.
148 149
BRANDI Cesare : Op. cit., p.19 Se référer à la proposition de traitement « Nettoyage des dépôts » p. 91
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D. La consolidation des fêlures et de l’engobe pulvérulent Deux types de consolidation sont à envisager : une consolidation de structure et un fixage. Ces deux opérations servent à éviter les dégradations supplémentaires sur la surface ou dans la structure.
a. Consolidation des fêlures Les altérations concernées par la consolidation sont les quatre fêlures importantes qui fragilisent considérablement la pièce. Sans intervention, celles-ci peuvent se prolonger au moindre choc et ainsi créer une ou plusieurs ruptures dans l’œuvre. Une consolidation de ces fêlures permettra d’éviter cette éventualité. Une infiltration d’une résine le long de ses fêlures les consolidera. Une infiltration par l’intérieur permettra d’éviter une visibilité de l’adhésif appliqué ainsi que l’assombrissement des bords des fêlures. L’accès aux fêlures par l’intérieur sera très facile dès que l’ensemble des tessons sera décollé : la consolidation devra dont être effectuée avant le collage. La fêlure sur le visage (n°1) présente un ressaut conséquent. Elle est localisée sur la face A, la face principale d’exposition. Un comblement de celle-ci est donc à envisager afin d’atténuer sa visibilité. Le comblement pourra s’arrêter à l’endroit où la fêlure devient très fine, au niveau des bras.
b. Fixage de l’engobe pulvérulent Le fixage a pour but de consolider en surface : il permettrait de rétablir l’adhérence de l’engobe avec la pâte au niveau de la panse. La manipulation de l’objet est actuellement difficile puisque la moindre pression à cet endroit risquerait de créer des pertes de matière. Un fixage permettrait de réduire les risques d’altération. Le produit de fixage ne sera appliqué que localement sur les parties altérées, c’est-à-dire dans les renfoncements des jambes. L’engobe simplement craquelé sur la panse ne sera pas consolidé puisqu’il n’est pas en danger. Le fixage sera réalisé après le nettoyage pour ne pas emprisonner les saletés de la surface.
E. Le comblement du col et de la panse « La restauration doit veiller au rétablissement de l’unité potentielle de l’œuvre »150. L’œuvre d’art possède en effet une unité qui s’opère dans la continuité de la forme. La lacune du col et celle de la panse comblée avec une résine noire sont actuellement des ruptures visuelles.
150
BRANDI Cesare : Op. cit. p. 32
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Selon E. BOUYER, la restauration d’une œuvre a trois objectifs151 : -
améliorer sa conservation en réalisant des comblements structurels, indispensables pour assurer le maintien de l’œuvre.
-
améliorer la compréhension de sa forme, de son décor, de sa fonction, etc.
-
améliorer son apparence dans un but esthétique.
Dans la mesure où nous avons toutes les informations pour reconstituer les différentes parties de l’œuvre (symétrie de la forme), les comblements pourront être réalisés sans risque de mauvaises interprétations. Cette étape permettra alors de : -
retrouver le profil de l’œuvre et de garder une continuité visuelle lors de sa lecture.
-
améliorer la cohésion de l’œuvre ; le col est en effet une partie fragile et d’autant plus affaibli actuellement par la lacune.
a. Comblement de la lacune du col Le comblement sera effectué avant le collage afin de réaliser des tessons amovibles152. Il s’agit de comblements détachés après leur séchage puis recollés tels les tessons de l’œuvre. Les tessons amovibles permettent une plus grande réversibilité. L’espace à combler étant assez important et la forme étant fermée, nous réaliserons deux tessons amovibles ; leur intégration en sera facilitée lors du collage. Les tessons seront assemblés lors d’un prémontage* et les deux tessons amovibles seront formés. Une fois ceux-ci secs, le tout sera démonté. Les deux tessons de comblement pourront être retravaillés. Ils seront ensuite assemblés lors du collage, en même temps que les autres tessons.
Fig. 96 : Schéma des comblements amovibles 151
BOUYER Eve : « Quelques pistes de réflexion sur la restauration perceptible des vases céramiques antiques », CEROArt [En ligne], mis en ligne 17 Novembre 2010, le consulté le 20/03/17, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1618 152 KOOB S. : « Detachable plaster restoration for archaeological ceramics », Congrès Recent Advances in the conservation and analysis of artifacts, 1987, p. 63-65 Léa BIZOUARN
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En ce qui concerne l’aspect du comblement, celui-ci devra être discernable par les professionnels mais aussi par le public. En effet l’histoire de l’œuvre et ses altérations ne doivent pas être dissimulés. Plusieurs choix s’offrent alors à nous dans le cadre d’un comblement perceptible, selon différents critères : -
le niveau du comblement : à niveau, avec un retrait sur toute la surface ou simplement cerné153 pour lui donner l’apparence d’un tesson,
-
la teinte : teinté à la couleur de la pâte ou un ton en dessous de celle-ci,
-
l’aspect de surface : lisse ou restituant l’aspect de surface de l’œuvre.
L’association de ces différentes techniques permettra de discerner le comblement sans qu’il ne contraste avec le reste de la pièce pour autant. Les choix sont désormais esthétiques. Nous opterons pour des tessons amovibles teintés un ton en dessous de la couleur de la pâte : cette couleur permettra d’atténuer le contraste entre l’œuvre et le comblement. Il sera mat et reprendra légèrement l’aspect de surface de la pièce afin de ne pas paraître « neuf ». En ce qui concerne la couleur du comblement, une teinte en dessous de celle de l’œuvre permettra de le discerner. La fêlure de la Face A sera comblée comme expliqué précédemment en raison du ressaut et de sa visibilité importante. Les lignes de cassures pourront, après collage, être comblées si elles sont trop visibles. Cette étape sera décidée lorsque le collage aura été réalisé.
b. Comblement de la lacune de la panse La lacune au niveau de la panse, une fois le comblement noir retiré, sera gênante puisqu’elle créera une rupture visuelle. Elle sera donc comblée aussi. La courbure entre le col et la panse limite actuellement la visibilité et le toucher de l’intérieur du comblement : la réalisation du comblement avant le collage, tessons désolidarisés, facilitera donc l’accès par l’intérieur et rendra ainsi l’intervention plus aisée. Les mêmes choix esthétiques que pour le comblement du col seront opérés sur la lacune de la panse.
c. Le cas des volumes manquants et abrasés En ce qui concerne les mains manquantes, le choix est de ne pas les reconstituer pour plusieurs raisons :
153
Cerne : « il s'agit comme pour le retrait d'une différence de niveau, mais qui se limite ici aux contours du comblement, appuyant la limite physique entre original et restauré » (BOUYER Eve : Art.cité, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1618) Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 95
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-
nous ne possédons pas les informations nécessaires à cette reconstitution. Les exemples des autres barrigónes de la civilisation chancay ne sont pas suffisants puisqu’elles sont toutes différentes les unes des autres.
-
leur casse appartient à l’histoire de l’œuvre. Les reconstituer consisterait à dissimuler une étape de la vie utilitaire de l’œuvre.
Les abrasions au niveau du nez, des disques auriculaires ou de la couronne ne seront pas non plus reconstituées car leurs érosions font parties de l’histoire et de la patine de l’œuvre. Il s’agit, dans le cas des mains manquantes et des abrasions, d’altérations ne nuisant pas à la lecture de l’œuvre et qui doivent donc être conservées en tant que témoin du temps sur l’objet.
F. Le collage des fragments du col et des comblements amovibles Le collage permet de maintenir des fragments entre eux et d’ainsi restituer une lisibilité de la forme. Seul le col de l’œuvre est concerné par cette étape. Afin de reconstituer la forme, les différents tessons actuellement collés, le tesson n°1 et les tessons amovibles créés lors du comblement, seront assemblés. Un prémontage sera réalisé afin de comprendre l’agencement des tessons : l’ordre de montage sera alors déterminé afin d’éviter les problèmes d’assemblage. La terre cuite ayant une porosité ouverte, un primaire sera préalablement posé sur les tranches afin de rendre le collage plus réversible et d’empêcher l’adhésif de pénétrer dans les tranches. Le choix de l’adhésif devra être adapté à la nature de la terre cuite, mais aussi aux conditions du lieu de conservation. Le collage s’effectuera par contact : la forme étant lourde et ronde, un collage par infiltration serait compliqué. De plus, avec cette technique, l’adhésif liquide s’infiltrerait en grande quantité dans la pâte, créant des auréoles et laissant des traces le long des cassures. Par ailleurs, les tessons semblent très jointifs, le collage par contact pourra se faire aisément. Si les tessons ne sont pas très jointifs et les lignes de cassures alors trop visibles, il peut être envisagé de les combler pour les atténuer.
G. La retouche La retouche permet de finaliser la restitution visuelle. Le but, dans le cas de cette œuvre archéologique, n’est pas de faire disparaitre la restauration : la retouche permettra de rendre une lisibilité continue à l’œuvre, de faire disparaitre la rupture visuelle, tout en étant discernable par le spectateur. La question de la retouche est compliquée à envisager actuellement puisque nous ne pouvons pas, pour le moment, nous rendre compte de la visibilité du futur comblement par rapport à
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l’œuvre. Celui-ci sera déjà teinté dans la masse afin de se rapprocher de la couleur de l’engobe (un ton en dessous). La décision de le retoucher sera donc prise une fois les tessons collés, au moment où nous aurons une meilleure interprétation critique. La restauration ne doit pas attirer plus le regard que l’œuvre elle-même. D’autant plus qu’il s’agit ici de la partie la plus intéressante et la plus regardée de l’œuvre. Dans le cas d’une retouche, le fond pourra être retravaillé pour ajuster la teinte. La ligne horizontale du décor brun-rouge pourra être reprise dans sa continuité afin d’atténuer la rupture visuelle. La couleur sera choisie avec un ton en dessous de la couleur d’origine afin que la retouche soit discernable. Nous avons les informations pour compléter le décor puisque celui-ci est géométrique et symétrique ; cependant il nous est
Fig. 97 : Propositions de retouche : comblement teinté et reprise du décor un ton en dessous
impossible de savoir s’il y avait des coulures de décor par exemple. La retouche sera donc une interprétation critique, la plus simple possible.
H. La conservation des éléments associés à la céramique chancay L’œuvre a été confiée avec une étiquette en papier présentant une inscription au crayon graphite : « Ancón. Côte centrale du Pérou ». Bien qu’elle n’apporte pas de précision de datation, elle permet de situer approximativement l’origine de l’œuvre dans l’espace. Il s’agit d’une source d’information importante qu’il est nécessaire de conserver avec la céramique. Elle est actuellement fixée à l’ancienne boite de conservation en carton. Il est donc envisagé de la décoller et de retirer les rubans adhésifs qui la recouvrent. Le conservateur avait pour volonté de replacer l’étiquette sur l’œuvre. Nous tenterons donc de trouver un emplacement. Comme nous l’avons vu précédemment, le comblement en résine noire sera retiré de l’œuvre pour la conservation de cette dernière. Cependant, ce comblement possède une valeur historique à lui
Fig. 98 : Etiquette associée à la céramique
seul puisqu’il est une trace du type restauration effectuée au Pérou au XIXème siècle. Il est également, tout comme les feuilles de maïs retrouvées à l’intérieur de la jarre, un indice sur Léa BIZOUARN
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l’origine de l’œuvre. Ils sont historiquement aussi importants que la céramique chancay ellemême. Il est donc nécessaire de conserver ces éléments, dans des matériaux durables, et de les remettre au conservateur avec l’œuvre.
I. La proposition de soclage Comme exprimé précédemment, l’œuvre pourrait être présentée au public. Nous devons donc, pour cette exposition, proposer au conservateur un moyen de présenter l’œuvre. Le système de soclage devra mettre l’œuvre en valeur en laissant visible le maximum de surface : il devra être le plus discret possible. Mais il devra aussi correspondre aux systèmes de présentation déjà installés dans les salles. En ce qui concerne le matériau, il devra respecter la
Soclage creux transparent
surface de l’œuvre, ne pas l’altérer et être chimiquement stable dans le temps. Il pourra par exemple s’agir par exemple : -
d’un socle creux dans lequel la base ovoïde sera stabilisée. Il pourra être transparent afin de cacher le moins de surface possible.
-
d’un socle montant le long du dos de l’œuvre ; deux pinces installées sur cette tige pourront maintenir l’œuvre à la verticale. Soclage le long du dos et pinces Fig. 99 : Propositions de soclage
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Les étapes de conservation-restauration Cette partie a pour but d’expliquer l’ensemble des étapes de conservation et de restauration effectuées sur l’œuvre. Le choix des matériaux sera dans un premier temps exprimé pour chaque étape en s’appuyant sur la littérature scientifique, les expériences des restaurateurs et des tests concrets adaptés à l’œuvre étudiée. Puis les traitements seront effectués et les résultats analysés. Avant toute intervention, la pièce a dû être sécurisée : les conditions de conservation lors du transport, du stockage en atelier et du travail de restauration ont été pensées. En ce qui concerne les traitements de restauration, ceux-ci commenceront par la dérestauration de l’adhésif et du comblement en résine noire, puis le nettoyage de l’œuvre, le fixage de l’engobe et la consolidation des fêlures, les comblements, le collage des tessons et enfin le traitement de surface.
1. Le conditionnement de l’œuvre Dans le but de garantir la sécurité de la pièce, il est nécessaire de penser une boite de conservation ainsi qu’un coussin de travail permettant une manipulation sécurisée. Ceux-ci doivent parfaitement s’adapter à l’œuvre, répondre à un cahier des charges et respecter les principes déontologiques de durabilité et d’innocuité. À partir de l’étude des risques réalisée lors de la proposition de traitements, nous avons dans un premier temps, établi un cahier des charges adapté aux besoins de l’œuvre. Nous verrons ensuite les matériaux préconisés dans la fabrication de boites de conditionnement et du coussin de travail. Enfin nous verrons la fabrication et le résultat de ce projet. Cahier des charges Le conditionnement de l’œuvre a pour but de réduire voire éliminer tous les risques cités précédemment. -
La boite devra protéger la pièce de tous chocs, vibrations ou frottements pouvant être provoqués lors de manipulations, rangement ou transport de la pièce.
-
La sortie de la boite devra se faire de manière à ne créer aucun danger pour la pièce, à l’inverse du conditionnement actuel.
-
Un coussin de manipulation sera envisagé afin de ne créer aucune pression sur les éléments saillants de la pièce. Celui-ci permettra aussi de retourner la pièce sans danger.
-
La pièce devra être placée à l’horizontale. Son instabilité, due à sa base arrondie et son caractère cylindrique, devra être compensée par un système de calage sur les côtés de la pièce.
-
L’ouverture de la boite devra se faire sur le dessus afin de faciliter la préhension de la
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céramique, mais elle ne devra pas être trop profonde pour limiter les risques. -
La boite de conservation à l’atelier, la boite de transport et celle de conservation à long terme répondant aux mêmes besoins, une seule boite sera envisagée.
-
Six tessons sont actuellement collés sur la pièce. Ceux-ci devront être dérestaurés et donc désolidarisés de la pièce. Une deuxième boite doit donc être envisagée temporairement jusqu’au nouveau collage de ceux-ci. Elle devra contenir les six tessons.
La pièce possède des zones très fragiles pour lesquelles il faudra avoir une précaution particulière : le nez, les mains et les disques auriculaires de la pièce sont des zones aux volumes protubérants qui pourrait céder sous une pression trop importante. Il est donc nécessaire d’y apporter une attention spécifique.
Nez pointu et fin
49 cm Fins disques auriculaires en relief
Mains pointées en avant
26 cm Fig. 100 : Zones de fragilité et dimensions de la pièce à respecter
A. Choix des matériaux Les matériaux de conservation sont choisis afin de répondre au cahier des charges émis précédemment, mais aussi aux critères de déontologie. « Le choix des matériaux doit satisfaire aux nécessités de la conservation : innocuité et durabilité »154. L’enveloppe externe Le matériau de la boite devait répondre à des critères très précis. -
Rigidité et solidité : la pièce étant lourde, celle-ci ne devra pas se déformer sous son poids. Elle devra aussi résister aux potentiels chocs et en protéger la pièce.
-
Transparence : certains matériaux de restauration vieillissent mal dans l’obscurité. Une boite transparente permet donc d’éviter ces effets indésirables.
154
-
Résistance aux solvants et imperméabilité à l’eau
-
Neutralité chimique
GUILLEMARD Denis, « Fabrication des boites de stockage pour les objets ethnographiques », RestaurationConservation des biens culturels : revue de ARAAFU, Paris, 1989, n° Décembre Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 100
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Le polypropylène155 (PP) transparent remplit l’ensemble de ces critères ; il est cependant électrostatique, inflammable, perméable à la vapeur d’eau et aux gaz et résiste mal aux UV. Malgré ses défauts, le polypropylène semblait le matériau le plus adéquat pour constituer la boite de conservation de l’œuvre puisqu’elle répond à l’ensemble de nos demandes. Les matériaux de calage Une matière amortissant les chocs et les vibrations est nécessaire. Il existe de nombreux matériaux avec des épaisseurs et des densités différentes. Seules les mousses polyéthylène (PE) sont chimiquement stables, ce qui est un critère incontournable. Elles sont en effet conseillées dans les manuels de conservation préventive pour leur conditionnement à long terme156. Elles sont imperméables à l’eau et très résistantes. Cependant elles présentent les mêmes inconvénients que le polypropylène choisi pour l’enveloppe externe, c’est-à-dire qu’elles sont électrostatiques, inflammables et perméables à la vapeur d’eau et aux gaz. Il existe deux types de mousse en polyéthylène : l’extrudée* nommée Ethafoam et l’expansée* appelée Plastazote dans le commerce. C’est une mousse blanche polyéthylène extrudée de densité moyenne157 qui sera choisie comme matériau de calage pour la céramique étudiée. Par sa grande solidité, sa découpe facile aux formes et dimensions souhaitées et son innocuité pour l’œuvre, cette mousse nous semblait idéale. L’épaisseur choisie est de 2,5 cm, ce qui nous paraissait suffisant pour amortir les vibrations potentielles produites sur la boite de conservation. Les épaisseurs peuvent être superposées
Fig. 101 : Plaque de mousse polyéthylène extrudée
pour augmenter l’absorption si nécessaire. Le film interface Les mousses polyéthylène sont relativement abrasives : elles ne peuvent donc pas être en contact avec la pièce sous peine de griffer la surface. Un papier interface est donc nécessaire pour la protéger des frottements. Les mousses en contact avec la céramique
Fig. 102 : Papier Tyvek®
doivent donc être recouvertes d’un papier Tyvek®158. Il s’agit d’un papier intissé polyéthylène indéchirable, doux et neutre servant alors de film interface entre le coussin et la pièce.
155
Fiche de sécurité en du polypropylène Annexe 13 p. 254 GUILLEMARD D. et LAROQUE C. : Manuel de conservation préventive, Gestion et contrôle des collections, OCIM, 1999, p.47 157 Plaque mousse polyéthylène blanc – densité moyenne 22 kg/m3 50x40x2,5 cm, marque Raja ; Fiche de sécurité en Annexe 14 p. 257 158 Fiche de sécurité du Tyvek® en Annexe 15 p. 258 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 101 156
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B. La mise en œuvre a. Le coussin de travail Dans un premier temps, un coussin de travail a été créé pour faciliter l’observation de la pièce. En effet, le fait que la pièce soit de forme cylindrique créé un risque de chute supplémentaire. Le coussin présente donc un système de cales sur les côtés de la pièce pour éviter que celle-ci ne roule. De plus, un système de soutien au niveau du col fragilisé a été pensé : celui-ci soutient la tête afin de ne créer aucune pression sur le col et les éléments en volume tels que les disques Fig. 103 : Sachets installés sur la mousse pour stabiliser l’œuvre
auriculaires.
Les dimensions du coussin ont été pensées avec environ 5 cm de marge de chaque côté de la pièce, soit 57 cm de long pour 39 cm de large. Une plaque de mousse polyuréthane159 160
constitue la base du coussin pour amortir l’ensemble de la pièce, des sachets remplis de pulpe
de papier sont ensuite installés de façon stratégique pour soutenir au mieux la pièce, comme expliqué précédemment. Ceux-ci sont fixés à la mousse pour assurer leur fixité. L’ensemble est ensuite recouvert d’un papier Tyvek®. Le coussin de travail sera également le support constant de la pièce : celle-ci restera sur le coussin et c’est ce dernier qui sera installé et sorti de la boite. La pièce étant lourde et le coussin trop souple, ceux-ci seront positionnés sur deux plaques de polyéthylène. Des empreintes de mains sont taillées sur deux côtés opposés de ce troisième élément afin d’en faciliter la préhension lorsqu’il faudra les sortir de la boite de conservation. Enfin, par sécurité et afin de maintenir la pièce, deux sangles entourant la pièce sont installées. Pour faciliter la manipulation, elles sont assemblées à l’aide de scratch. La pièce est ainsi maintenue au coussin, sans pour autant que la manipulation soit complexifiée.
Plaques de mousse
Coussin agencé à la
polyéthylène rigidifiant l’ensemble
forme de la pièce
Fig. 104 : Coussin de travail à installer dans la boite de conservation La mousse polyuréthane a été choisie pour sa texture moelleuse. Cependant le matériau n’étant pas chimiquement stable dans le temps, il sera nécessaire de la remplacer par une mousse polyéthylène une fois la restauration terminée. 160 Fiche de sécurité du polyuréthane en Annexe 16 p. 259 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 102 159
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Fig. 105 : Doigts taillés dans la dernière plaque de mousse
Fig. 106 : Sangles en Tyvek® avec scratch permettant de maintenir la pièce
b. La boite de conservation En ce qui concerne la boite, les mesures devaient correspondre à celles de la pièce, du coussin de travail déjà créé et prendre en compte les mousses de calage de 2.5 cm d’épaisseur qui seront placées sur les quatre côtés de la boîte. Les mesures théoriques étaient donc les suivantes : -
Longueur : 57 cm ; correspondant à la longueur du coussin
-
Largeur : 39 cm ; correspondant à la largeur du coussin
-
Hauteur : 40 cm ; correspondant aux épaisseurs additionnées de la mousse servant de base solide, du coussin et de la pièce, ainsi que la prise en compte d’un espace vide audessus de la pièce afin que le couvercle ne la touche pas.
Le couvercle devra être pourvu de poignées clipsables pour éviter toute désolidarisation avec la boite et donc non-protection de la pièce. Cependant, au vu des dimensions importantes et atypiques de la pièce, aucune boite en polypropylène avec couvercle vendue dans le commerce ne correspondait. Celles-ci manquaient de longueur ou étaient trop profondes ce qui aurait posé problème au moment de la sortie de la pièce. La solution a donc été d’utiliser deux boites identiques, peu profondes, retournées l’une sur l’autre. La pièce est placée dans la première boite, sur la mousse et le coussin, dépassant alors en hauteur de quelques centimètres. La deuxième boite vient la recouvrir et la protéger.161 Pour maintenir la boite fermée, des trous sont percés sur les bords des boites et des vis à ailettes permettent de les assembler de manière solide. Des mousses de calage amovibles en polyéthylène sont positionnées autour de la pièce, sur les quatre côtés de la boite afin d’absorber les vibrations éventuelles lors du stockage et du transport. Les boites ont été choisies avec une longueur supérieure à la taille de la mousse et du coussin dans le but de faciliter la préhension de la mousse et donc la sortie de la pièce.
161
Les dimensions finales exactes de la boite sont : L : 68 cm ; l : 39 cm ; h : 31 cm. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Seconde boite protectrice en polypropylène
Coussin de travail
Mousse support en polyéthylène Fig. 107 : Schéma d’élaboration de la boite
Vue latérale la pièce dans la boite
Vue aérienne de la pièce dans la boite fermée, avec les mousses latérales Système d’accroche de la boite : des vis à ailettes Fig. 108 : Résultat final de la boite de conservation
Les deux tessons indépendants confiés avec la pièce sont installés dans des boites en polypropylène adaptées à leur taille. Pour amortir les quelques chocs possibles, celles-ci sont tapissées de papier film polyéthylène. Fig. 109 : Boites de conservation des deux tessons indépendants
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c. La boite de conservation temporaire des tessons désolidarisés Une fois la dérestauration de la pièce effectuée, six tessons seront désolidarisés. La grande partie restera conditionnées dans la boite décrite préalablement ; les matériaux de calage pourront être ajustés et ajoutés si nécessaire. Une
nouvelle
boite
en
polypropylène
transparente sera donc aménagée162 pour les tessons. Elle sera fermée par un couvercle afin de limiter l’empoussièrement des tessons. La
Fig. 110 : Boite de conservation temporaire des tessons désolidarisés
mousse polyéthylène extrudée sera découpée en creux aux dimensions des tessons, puis recouverte de film Tyvek®. Les tessons sont donc installés dans les creux leur correspondant. Une fois la nouvelle restauration effectuée, la pièce retrouvera sa place dans la boite de conservation créée précédemment. Celle-ci protègera la pièce durant le retour au musée, mais aussi dans les réserves de celui-ci. La boite de conservation a été pensée dans le but de la protéger au maximum des aléas extérieurs et en particulier des chocs, vibrations et frottements pouvant altérer d’avantage l’œuvre. La difficulté principale a été de trouver une boite adaptée à sa taille et à son poids : ceci a demandé de longues réflexions pour trouver une solution à la fois pratique d’utilisation et la protégeant de manière satisfaisante. Les boites et le coussin de conservation ont été pensés pour protéger la céramique à court et long terme, mais aussi durant le transport. Les matériaux sont déontologiques : durables et stables chimiquement. La boite et le coussin pourront donc être conservés lors du transport de la céramique jusqu’au musée et pourront servir de boite de conservation dans les réserves.
Avant de débuter la dérestauration, l’ensemble des résidus à l’intérieur de la jarre ont été retirés. Il s’agissait en effet de sable, terre séchée, petits cailloux ou encore feuilles séchées. Ces résidus non fixes auraient pu se disperser lors des différentes manipulations. Ils sont donc éliminés à l’aide d’un pinceau brosse et conservés dans un sachet hermétiquement fermé163.
162
Fig. 111 : Nettoyage des résidus à l’intérieur de l’œuvre
Les dimensions de la boite de conditionnement temporaire sont L : 40 cm ; l : 25 cm ; h : 20 cm. Les résidus, témoins du lieu de découverte de l’œuvre, seront remis au conservateur en raison de leur valeur historique. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 105 163
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2. La dérestauration Nous entendons par dérestauration le retrait de l’ensemble des anciennes restaurations nuisant ou pouvant nuire à l’œuvre dans le futur. L’ensemble des matériaux exogènes seront éliminés, ce qui comprend également le nettoyage de leurs résidus.
A. Décollement des tessons collés Les quatre tessons collés se situent au niveau du col de la jarre. L’usage du nitrate de cellulose au vieillissement critique (brunissement, irréversibilité, soulèvement possible), les coulures d’adhésif sur la surface, ainsi que les ressauts entre les tessons nous imposent de procéder à une dérestauration du collage.
a. Choix des matériaux Dans la littérature scientifique, la dérestauration des collages peut être effectuée à l’aide de vapeurs de solvant. En effet, une exposition prolongée de l’œuvre aux effluves
Fig. 112 : Tessons à décoller
de solvant dans un contenant hermétiquement fermé semble efficace164 165 166. Les vapeurs de solvant permettent un décollage en douceur et évitent que l'adhésif ne pénètre dans la pâte. L'acétone étant très volatile*, il est bien adapté à cette technique. De plus, grâce à la littérature scientifique et aux tests réalisés préalablement, nous avons déterminé que l'acétone était le solvant le plus efficace pour faire réagir l'ancien adhésif, le nitrate de cellulose167. Les décors n’étant pas sensibles à l’acétone, cette opération n’aura aucun danger pour ceux-ci. Le comblement noir est lui aussi sensible à l’acétone ; cependant, lors des tests, nous avons vu qu’il se ramollissait sous son action sans se dissoudre et que l’utilisation d’un scalpel était nécessaire pour le retirer. La vapeur d’acétone seule n’aura donc pas d’effet sur celui-ci mais seulement sur l’adhésif. Les tessons à décoller sont situés au niveau du col et principalement sur la face avant. Il est donc nécessaire de sécuriser l’œuvre pour ne pas risquer la chute des tessons durant l'opération. Le col sera donc soutenu par le dessous en étant posé sur son coussin de travail et les tessons du dessus seront soutenus par des mousses positionnées à l’intérieur du col.
164
BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p. 79 BERDUCOU M.: La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p. 103 166 KOOB S: « The removal of aged shellac adhesive from ceramics », Studies in Conservation, Volume 24 n°3, 1979, p. 134 167 Se référer aux tests préalables en Annexe 4 p. 240 165
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Cahier des charges des matériaux : Le sac :
Les soutiens des tessons :
•
Compatible avec la grande taille de l'œuvre
•
Résistante à l'acétone
•
Hermétique aux vapeurs
•
Dureté moyenne
•
Résistant à l'acétone
•
Transparent pour surveiller l'avancée de l'opération
OACKLEY et BUYS, BERDUCOU et KOOB recommandent le polyéthylène car il résiste totalement à l’acétone. Matériel
Matériau
- sac polyéthylène hermétique - soutien de l'œuvre : mousse polyéthylène
- Vapeur d’acétone168
- pots en verre Le sac en polyéthylène que nous avons trouvé a été testé afin de déterminer s’il résistait effectivement à l’acétone. Une goutte est posée sur le matériau et laissée quelques minutes. Le plastique ne réagissant pas, nous pourrons donc l’utiliser lors du traitement.
b. Mise en œuvre Protocole -
Installation de l’œuvre dans le sac en polyéthylène sur le coussin de travail afin de lui fournir un support pour le col.
-
Installation des mousses à l'intérieur du col pour soutenir les tessons à décoller et empêcher leur chute
-
Installation des pots ouverts remplis d'acétone dans le sac en polyéthylène.
-
Fermeture hermétique du sac : le sac est conçu pour être fermé hermétiquement avec un zip. Pour plus de sécurité, le bord de l'ouverture sera replié et fermé avec du ruban adhésif.
-
La vapeur d'acétone doit agir sur l'adhésif le temps nécessaire, jusqu'au décollage de la totalité des tessons. Selon S. KOOB, le temps nécessaire dépend de l’âge et de la qualité de l’adhésif. Cependant, selon lui, la plupart des adhésifs se dissolvent après une à quatre heures169.
-
Lorsque les tessons sont décollés, sortie des tessons du sac, laissés à l’air libre afin que les potentiels résidus d’acétone s’évaporent. L’œuvre pourra être placée sous la sorbonne* pour limiter la propagation des vapeurs dans l’air.
168 169
Fiche technique de l’acétone en Annexe 17 p. 267 KOOB S: « The removal …» Art.cité., p. 134
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L’œuvre est installée dans le sac en polyéthylène résistant à l’acétone, sur son coussin de travail. Des mousses en polyéthylène sont découpées et positionnées à l’intérieur du col. L’œuvre est installée dans le sac hermétiquement fermé avec deux petits pots en verre remplis d’acétone. Elle est laissée durant 22 heures. Les tessons ne sont pas tombés grâce aux cales en mousse. Sous une légère pression, un groupe de trois tessons ainsi qu’un petit tesson triangulaire se sont détachés
Fig. 113 : Œuvre dans le sac hermétique, des soutiens en mousse dans le col
très facilement. Le groupe de trois tessons est placé dans un plus petit sac hermétique avec deux pots d’acétone. Le tout est positionné dans un bac de lentilles. Cellesci s’adaptent parfaitement à la forme arrondie des tessons et les protègent de la chute. Après quatre heures, les tessons se sont désolidarisés les uns des autres. Le reste de l’œuvre et les tessons désolidarisés
Fig. 114 : Tessons se désolidarisant à la vapeur d’acétone
ont ensuite été placés sous la sorbonne afin de laisser l’acétone s’évaporer en limitant la prolifération des vapeurs.
c. Résultat La vapeur d’acétone a été très efficace sur l’ancien adhésif. Malgré un temps important
nécessaire
au
décollement,
l’ensemble des tessons se sont désolidarisés. Au vu du temps nécessaire, nous pouvons en conclure que l’adhésif était très solide. L’ensemble des résidus sur les tranches devra être éliminé afin de pouvoir recoller les tessons par la suite. De plus, les coulures d’adhésif présentes sur la surface des tessons devront elles aussi être nettoyées170. Afin de conserver les tessons désolidarisés lors de ce traitement, nous avons créé une seconde boite de conservation : il s’agit d’une
Fig. 115 : Œuvre après désolidarisation
Cette étape du traitement sera expliquée dans la partie suivante « Les résidus d’adhésif sur les tranches et la surface » p. 109 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 108 170
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boite temporaire avec une mousse comportant exactement les formes des tessons.171
d. Les résidus d’adhésif sur les tranches et la surface La jarre possède de nombreux résidus
d’adhésif
précédemment
sur
collées,
les ainsi
tranches que
des
coulures sur la surface. Leur nettoyage semble nécessaire pour plusieurs raisons : -
un souci d’esthétisme : les coulures sont visuellement importantes et gênantes,
-
le risque chimique que l’adhésif comporte172 : le nitrate de cellulose,
Fig. 116 : Adhésif sur les tranches après dérestauration
est un matériau dont le vieillissement pourrait altérer la céramique, -
les ressauts importants entre les tessons dus à la grande quantité de colle sèche sur les tranches.
Cependant, la dérestauration et le nettoyage des tranches sont toujours des opérations dangereuses pour la céramique et en particulier pour les terres cuites sous-cuites comme très probablement celle-ci. Ce traitement est déconseillé lorsque cela est possible. Comme expliqué précédemment la dérestauration est ici nécessaire. De nombreuses précautions devront être prises, notamment sur le degré de nettoyage : nous devrons trouver un équilibre entre nettoyage suffisant et dangerosité moindre pour la pièce. Choix des matériaux Selon BERDUCOU173, les résidus d’adhésif sur les tranches et les coulures sur la surface peuvent être retirés au scalpel avec un apport de solvant si nécessaire. Nous avons déterminé lors des tests que l’acétone était efficace sur l’adhésif nitrate de cellulose. Ce solvant peut être appliqué sous forme de compresse ou de gel, afin : -
d’éviter la pénétration du solvant et de l’adhésif dans les pores de la pâte,
-
de prolonger l’action du solvant et donc d’augmenter le temps de travail,
-
de réaliser une action localisée.
L’ajout d’éthanol174 à la préparation permettra de ralentir l’évaporation du solvant et donc de prolonger l’action. Les proportions de solvants seront 50% éthanol et 50% acétone.
171
Se référer à « la boite de conservation temporaire des tessons désolidarisés » p. 105 Se référer à la proposition de traitement « Décollage des tessons » p. 89 173 BERDUCOU M. : Op.cit., p. 103 174 Fiche de sécurité de l’éthanol en Annexe 18 p. 269 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 172
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Nous cherchons donc le matériau le plus adéquat pour créer le gel ou la compresse : Gélifiant/compresse
Description
Carboxyméthylcellulose
Sel sodique
(CMC)
Avantages
Inconvénient
Rétention élevée
Incompatible avec
Soluble dans l’eau
l’acétone ou l’éthanol
Réversible dans Gélifiant
l’eau
Peu efficace : 3-5% de
Hydroxypropylcellulose
Compatible avec les
solvant seulement
Klucel® G
solvants polaires résidus de fibres de coton s’accrochant sur Coton imbibé de solvant et
Coton
déposé sur la tranche
la pâte, ce qui peut Naturel
diminuer la jointure entre les tessons + résidus difficile à retirer action trop courte : ne
Cellulose imbibée de pulpe de papier
solvant et posée sur un
retient pas le solvant
Naturel
assez longtemps pour
papier isolant
être efficace
Amine Polyéthoxylate, aux propriétés tensioactives, Ethomeen®/ Carbopol
utilisée afin de neutraliser l’acide polyacrylique (Carbopol).
Peut laisser des retient le solvant,
résidus acides en
grande quantité de
surface, qui peuvent
solvant
être détruits grâce aux UV
Réaction acido-basique
Le gel constitué d’Ethomeen®175 et de Carbopol176 nous semble le plus compatible avec les solvants choisis et semble laisser le moins de résidus. L’Ethomeen® permet de renforcer l’action du solvant et doit être choisi en fonction de la polarité de ceux utilisés177. L’éthanol et l’acétone étant deux solvants polaires*, l’Ethomeen® C25 permettra de créer le gel. Matériau
Matériel
- Ethomeen® C25 - pot en verre
- Carbopol
- spatule
- éthanol - acétone
Fiche de sécurité de l’Ethomeen® en Annexe 19 p. 271 Fiche de sécurité du Carbopol en Annexe 20 p. 277 177 L’Ethomeen® C25 est utilisée pour les solvants polaires et le C12 est utilisé pour les solvants moins polaires. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 110 175 176
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Protocole de création du gel Dans un récipient sec, mélanger le Carbopol (1g) et l’Ethomeen® C25 (10g)
-
dans les proportions. Ecraser les grains à l’aide d’une spatule. -
Verser les solvants (100 ml : 50 ml de chaque)
-
Ajouter 2-3 gouttes d’eau
-
Mélanger pour obtenir un mélange homogène, jusqu’à épaississement.
Mise en œuvre Protocole -
Application du gel sur la tranche avec des résidus de nitrate de cellulose. Recouvrir d’un film plastique afin de prolonger l’action. Pose d’une heure sur les tranches et vingt-cinq minutes sur les taches de la
-
surface178 -
Elimination du gel à l’aide d’un bâton cotonné.
-
Elimination des résidus d’adhésif ainsi ramollis
-
Achever le nettoyage par une brosse imbibée de solvant.
Le gel est appliqué sur les tranches à l’aide d’une spatule. Celui-ci agit le temps indiqué dans le protocole. Le gel est largement retiré avec un batônnet de bois et les résidus d’adhésif sont ensuite retirés avec la pointe du scalpel ou une aiguille pour les petits interstices. L’enjeu est de retirer le maximum de résidus sans altérer la surface de la céramique. Pour cela la pointe du scalpel est utilisée très doucement, l’aiguille permet de réaliser un nettoyage plus précis et moins risqué, le pinceau brosse en poil de porc imbibé de solvant
permet
de
terminer
nettoyage en douceur.
le Fig. 117 : Pose du gel sur un tesson
Celui-ci est arrêté lorsque les tessons sont jointifs et sans ressauts, ou que les taches d’adhésif en surface ont totalement disparu. Résultats Les résidus sur les tranches, les taches et les coulures de nitrate de cellulose ont parfaitement été retirés grâce à l’action couplée du gel acétone-éthanol et du scalpel/brosse. Les Les temps ont été déterminés après des tests d’efficacité sur l’adhésif. L’adhésif des tranches se ramollit et devient retirable après 1 heure de pose ; les résidus sur la surface, plus fin, deviennent sensibles après vingt/vingtcinq minutes. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 111 178
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tessons sont jointifs et ne présentent pas de ressauts, ce qui signifie que la grande majorité des résidus a été retirée. Nous ne pouvons pas affirmer que l’ensemble de l’adhésif ancien a été retiré mais le nettoyage a été arrêté lorsque qu’il paraissait satisfaisant pour le futur collage.
Fig. 118 : Tranches avant et après nettoyage des résidus de nitrate de cellulose
Fig. 119 : Visage avant et après nettoyage des coulures de nitrate de cellulose
Le nettoyage des tranches est une opération à risque comme nous l’avons déjà évoqué. Nous ne pouvons affirmer qu’il n’y a une aucune perte de matière au niveau des tranches durant celui-ci. Cependant ces pertes sont négligeables puisque les tessons restent jointifs et stables. De plus, les actions mécaniques prolongées et accumulées provoquent des microfissures reliant les nombreux pores au sein de la pâte. Lorsque ces fissures ont relié tous les pores d’une même ligne, le tesson se rompt. C’est ce qui s’est passé sur le tesson triangulaire précédemment décollé. Malgré un soin important apporté aux tessons (actions mécaniques douces lors du nettoyage, positionnement sur un coussin), celui-ci s’est brisé en deux fragments. Nous n’observons aucune perte de matière au niveau de la nouvelle ligne de cassure et aucun ressaut. Une fois les tessons collés, la ligne de cassure ne se verra plus. Les conséquences de cette casse sont donc heureusement limitées. Fig. 120 : Tessons cassé lors du nettoyage Léa BIZOUARN
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Par ailleurs, après séchage, nous pouvons
apercevoir
des
voiles
blancs
recouvrant certaines tranches, que nous ne voyions pas auparavant. Il s’agit sans doute de sels solubles que le gel a solubilisé et fait remonter en surface. Ceux-ci pourront être nettoyés lors du nettoyage des sels contenus dans l’œuvre.
Fig. 121 : Tranche avec des voiles blancs après traitement
B. Le retrait du comblement en résine Le manque de connaissances sur la composition de ce comblement, et donc de l’effet des matériaux (en particulier la résine noire), nous incitent à le retirer. Nous voyons par ailleurs que les résidus de cette résine sur d’autres endroits de la pièce, semblent incrustés dans les pores de la céramique. Nous pouvons donc supposer que c’est d’autant plus le cas au niveau du comblement où la résine a été appliquée en grande quantité.
Fig. 122 : Comblement en résine avant dérestauration
a. Choix des matériaux Lors des tests ainsi que dans la littérature scientifique179, nous avons vu que l’acétone permettait un ramollissement de la résine et que l’action légère d’un scalpel permettait de retirer facilement le comblement noir. Une action couplée mécanique et chimique sera donc utilisée. Matériau
Matériel - Scalpel - Bâton cotonné
- Acétone
b. Mise en œuvre Protocole -
Passage d’un bâton cotonné imbibé d’acétone sur la résine noire pour la ramollir.
-
Action légère du scalpel afin de soulever la matière sur tout le tour du comblement dans le but de fragiliser les points d’accroche à la matière.
179
KOOB S. : « Obsolete fill materials found on ceramics », Journal of the American Institute for Conservation, Vol. 37 n°1, Avril 1998, p. 49-67 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 113
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Attention : Prendre garde à ne pas toucher la paroi de la céramique pour ne pas risquer de rayer la surface avec la pointe du scalpel. -
Elimination du matériau de comblement sous la résine et conservation de l’ensemble dans un pochon à zip.
L’opération est réalisée sur le coussin de travail afin que l’œuvre soit bien calée et ne bouge pas. Un bâton cotonné imbibé d’acétone est appliqué quelques secondes sur la résine. Afin que l’acétone ne s’évapore pas trop vite avant l’utilisation du scalpel, le coton est appliqué sur des zones de 2 cm² environ à chaque fois. Puis la pointe du scalpel permet de soulever doucement la surface de la résine. Elle est dégagée couche par couche et non pas profondément pour ne pas risquer de rayer la surface sous-jacente.
Fig. 123 : Comblement en cours de dérestauration
Sous la résine, un matériau solide en forme de plaque rectangulaire est visible. Il est donc détouré doucement jusqu’à ce qu’il se détache de la surface de lui-même, c’est-à-dire après vingt minutes environ.
c. Résultats Le retrait du comblement en résine a été relativement facile et rapide. Il s’est détaché de la surface de la céramique sans que ceci ne nécessite une pression importante. L’œuvre présente désormais une lacune de 3,6 x 2,5 cm. Les contours de celle-ci sont incrustés de la résine noire. Il s’agira de nettoyer ces résidus dans
Fig. 124 : Lacune visible après avoir retiré le comblement en résine
un second temps. En
se
désolidarisant,
le
comblement
recouvert de résine a arraché de la matière de l’engobe. Ces quelques arrachages de matière étaient inévitables, malgré toutes les précautions prises, en raison d’une part, de la fragilité de l’engobe déjà évoquée, et d’autre part de l’incrustation importante de la résine dans les pores de la céramique. Les pertes sont cependant
Fig. 125 : Comblement retiré et conservé à part
relativement infimes mais laissent apparaitre la terre cuite. Léa BIZOUARN
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Le comblement, finalement constitué de résine et d’un morceau de bois, a été retiré en raison de son impact potentiellement négatif sur la céramique mais a tout de même été conservé dans un petit sachet pour sa valeur historique. Il permettra de comprendre l’histoire des restaurations archéologiques péruviennes ou de faire de futures recherches scientifiques. Il sera conservé avec l’œuvre180.
d. Nettoyage des résidus Le même protocole est utilisé afin de nettoyer les résidus autour de la lacune : l’action couplée du scalpel et de l’acétone permettront de retirer la résine incrustée. Une compresse imbibée d’acétone passée sur la résine a donc permis de ramollir les résidus. Puis ils ont été retirés avec la pointe du scalpel. Les lunettes grossissantes (grossissement x 2,5) ont permis de les retirer au maximum et le plus précisément possible. L’action d’un bâton cotonné imbibé d’acétone a
Fig. 126 : Lacune aux contours nettoyés
finalisé le nettoyage. Les contours de la lacune ont ainsi été nettoyés du maximum de résidus noirs possible, sans pour autant parvenir à obtenir un résultat parfait. Comme nous pouvons le voir aux UV, malgré un nettoyage important, la résine reste très incrustée dans les pores de la pâte. Cependant, un nettoyage plus poussé endommagerait plus la pièce qu’elle ne la rendrait propre. Il a donc été arrêté lorsque l’aspect était satisfaisant à la lumière du jour, lorsqu’il n’attirait plus l’œil.
Fig. 127 : Lacune aux UV
La dérestauration de l’ancien adhésif était, comme nous l’avons vu lors du diagnostic, une réelle nécessité pour la bonne conservation de la céramique. Le retrait de l’ancien comblement avait deux objectifs : la préservation de la terre cuite dans un premier temps, en raison de la non connaissance de ce matériau ; mais il s’agissait également d’un but esthétique : celui-ci était très imposant par sa taille et sa couleur et entravait la bonne lisibilité de l’œuvre. Un comblement plus respectueux de l’aspect de la céramique évitera cette rupture visuelle que l’ancien comblement imposait. Cependant, celui-ci étant un témoin de l’histoire de la restauration péruvienne, il a été conservé et sera confié au conservateur. Le sachet contenant l’ancien comblement sera remis au conservateur en même temps que l’œuvre. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 180
115
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Nous savons que la dérestauration représente également un danger pour l’œuvre puisqu’elle peut créer des pertes de matière. Les opérations ont été menées avec beaucoup de précautions et de réflexions sur le niveau de nettoyage à apporter. Nous avons su arrêter les interventions à l’équilibre entre un aspect suffisamment nettoyé et le risque d’endommager l’œuvre. Le niveau de dérestauration nous semble ainsi suffisant pour continuer les traitements.
3. Le nettoyage « L’un des objectifs de la restauration en archéologie est bien de rendre lisibles les surfaces originelles, par des opérations de nettoyage »181. Le nettoyage est une partie importante dans le cas de l’œuvre étudiée. Nous avons vu que l’encrassement de celle-ci était très important. Il altère la lisibilité et une partie de son intérêt. Il s’agit d’une étape irréversible : un traitement trop important ne pourra pas être rectifié. Le degré de nettoyage devra donc être déterminé à l’avance et maitrisé durant les opérations. Il est important de savoir à quel moment il est satisfaisant et doit être arrêté afin de ne pas endommager l’œuvre mais aussi afin de conserver sa patine, le témoin de son ancienneté. Une œuvre trop nettoyée perdrait visuellement une partie de son histoire et de sa valeur d’ancienneté. Ainsi l’œuvre devra retrouver une lisibilité de l’engobe et des décors tout en conservant sa patine. Le
nettoyage
de
la
céramique
comprend
dans
un
premier
temps
son
désempoussiérement ainsi que le désencrassement des surfaces engobées, décorées ou intérieures. Le nettoyage de la surface induit également celui des taches repérées sur la panse182, l’atténuation des sels solubles et insolubles.
A. Elimination de l’encrassement général et atténuation de la couche brune dans la partie supérieure Le nettoyage de la surface de l’œuvre a deux objectifs principaux : -
retrouver la couleur d’origine de l’engobe (crème) typique de la céramique chancay et du style « Noir sur Blanc »183.
-
retrouver une homogénéité dans ses couleurs, entre la partie haute plus noire et la panse encrassée.
181
Fig. 128 : Concrétion brune sur la partie haute (visage-col)
DREUX-DAGUERRE M. : « La « restauration archéologique » existe-elle ? », ARRAFU, Cahier technique n°14, 2006, p.76 182 Se référer au constat d’état « Les dépôts » p. 55 183 Se référer à la partie historique « Attribution à la civilisation chancay, grâce au décor » p. 35 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 116
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Afin d’avoir une homogénéité dans le nettoyage et dans l’aspect final, nous avons décidé de traiter simultanément la partie empoussiérée et la partie haute encrassée (col et haut de la panse). En revanche, il a été convenu de conserver la partie basse dans son état actuel d’encrassement pour une raison historique : il s’agit des traces permettant de comprendre que l’œuvre était légèrement enfoncée dans le sol lorsqu’elle était dans la tombe du défunt en tant que récipient à offrandes184.
a. Choix des matériaux
Fig. 129 : Empoussièrementencrassement sur la panse
Nous avons vu dans les tests de solubilité185 que l’encrassement de la partie supérieure (visage-col) était sensible à l’eau ; et qu’un ramollissement à l’eau permettait un nettoyage facile au scalpel par la suite. Par ailleurs un simple bâton cotonné humidifié à l’eau permettait le nettoyage de la partie encrassée (panse). Cependant après des tests à plus grande échelle sur l’œuvre, il est apparu que sur certaines parties où l’engobe était fragile186
187
, l’abrasion du coton était trop forte. De très petites
particules restaient accrochées au coton après son passage : le coton endommageait l’engobe. Une alternative moins abrasive a donc été envisagée. Les compresses d’eau ne permettaient pas un retrait homogène et nous paraissait être un traitement trop long. De plus, un traitement chimique seul n’était pas suffisant : il devait être couplé avec une légère action mécanique. L’éponge Basotect®188 est une mousse de mélamine formaldéhyde, une résine thermodurcissable. « Le matériau se distingue par sa faible densité (< 10 g/l), ses propriétés nettoyantes, son excellente absorption phonique, ses propriétés anti-feu et sa résistance thermique ».189 Pour être utilisée et très efficace, l’éponge nécessite simplement une humidification à l’eau, sans ajout de solvant
Fig. 130 : Mélamineformaldéhyde
ou de détergeant. Son réseau aéré formé de filaments de Se référer à la Partie historique « Une œuvre pour quelle utilisation : une urne funéraire ? » p. 39 Se référer aux tests de solubilité en Annexe 4 p. 240 186 Se référer au Constat d’état « Trésaillage et perte d’engobe » p. 52 187 Le fixage de celui-ci étant prévu après le nettoyage afin de ne pas emprisonner la poussière par la même occasion. 188 Fiche de sécurité de la gomme Basotect® en Annexe 21 p. 383 189 BASF : « BASF propose une nouvelle version de sa mousse de mélamine Basotect®, conçue pour être utilisée sous forme d'éponge pour le nettoyage » [En ligne], URL : https://www.plasticsportal.net/wa/plasticsEU~fr_FR/portal/show/common/plasticsportal_news/2010/10_244, consulté le 22/01/2018 184 185
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mélamine durs et fins lui permet de créer une surface d’accroche avec l’extérieur : il agit comme un très fin papier abrasif. Les filaments pénètrent dans les porosités du substrat, où sont incrustées les saletés. L’éponge peut être utilisée sur des surfaces molles et sensibles (papiers, textiles, bois, etc.) comme sur des surfaces dures (céramiques, métaux, etc.) 190. Fig. 131 : Eponge Basotect®
De plus, elle est sans risque pour la santé : elle ne
comprend pas de substances nocives pouvant être absorbées par la peau, ce qui certifie la nom mise en danger du restaurateur lors de la mise en œuvre191. L’éponge Basotect® humidifiée à l’eau déminéralisée a donc été testée sur la surface encrassée et le résultat obtenu était très net : la surface était parfaitement nettoyée et la couleur crème originale de l’engobe retrouvée, sans endommager l’engobe écaillé. Cependant l’éponge produit des résidus physiques : les particules (de mélamine) se détachent au fur et à mesure du nettoyage et se déposent sur l’œuvre. Il est donc nécessaire de réaliser un nettoyage après l’opération. Une éponge poly(vinyl formal)192 (Fig. 132) au pouvoir absorbant très élevé permet de nettoyer ces résidus. Il s’agit d’une éponge aux pores plus petits que les cotons, très peu abrasive et pouvant rester humide très longtemps sans relâcher de surplus193. La quantité de solvant apportée aux œuvres peut ainsi être contrôlée en la chargeant plus ou moins. Elle permettra de rincer la surface à l’eau déminéralisée tout en éliminant les quelques résidus de mélamine, sans abimer l’engobe parfois fragile. Elle pourra cependant elle-même laisser quelques résidus194 qui, une fois la surface sèche, seront éliminés avec un pinceau doux.
Fig. 132 : Eponge poly(vinyl formal)
« L’éponge magique », [Document PDF], URL : www.mediachimie.org/sites/default/files/sk-fiche13.pdf BASF : Op. cit., URL : https://www.plasticsportal.net/wa/plasticsEU~fr_FR/portal/show/common/plasticsportal_news/2010/10_244 192 Eponge « synthétique super absorbante » de chez CTS 193 RICHARD Aude : Etude et Conservation-restauration de « La Main », peint par Marian KASPERCZYK en 1992, Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2017, p. 96 194 Résidus observés au microscope éléctronique à balayage : Juana SEGURA ESCOBAR : Sorbent and abrasive : critical assessment of the potential role of synthetic sponges in the conservation of wall painting, MA dissertation, Courtauld Institute of Art- University of London, 2010, p.82 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 118 190 191
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Matériau
Matériel - Scalpel - Bâton cotonné - Eponge Basotect® - Eponge poly(vinyl formal)
- Eau déminéralisée
b. Mise en œuvre Protocole -
Gommage de toute la surface encrassée avec l’éponge Basotect® humidifiée à l’eau déminéralisée (col et panse) Attention à laisser la surface encrassée sur la base (témoin de l’utilisation de l’œuvre par les chancay), sans que la limite soit trop nette Nettoyage à l’éponge poly(vinyl formal) humidifiée à l’eau déminéralisée.
-
L’éponge est essorée au maximum et passée délicatement sur la surface, dans un seul sens afin de ne pas créer d’arrachement de matière. -
Séchage de la surface à l’air ambiant
-
Elimination des possibles résidus d’éponge au pinceau à poils doux
Un premier nettoyage à l’aide de ces deux éponges est donc réalisé sur toute la surface de l’œuvre (excepté sur la base) et les tessons désolidarisés. Afin de n’oublier aucune zone, il est réalisé par partie : un premier rectangle de 10 sur 5 cm est nettoyé puis la zone est étendue vers le bas sur un rectangle de même dimension. Un nettoyage moins intense est effectué à la limite entre la panse et la base afin d’adoucir la
Fig.133 : Nettoyage par rectangle
jointure entre la partie nettoyée et la base encrassée. Sur cette zone, seule l’éponge poly(vinyl formal) est utilisée. Concernant l’encrassement de la partie haute (col et haut de la panse), le but premier était de l’atténuer pour uniformiser la totalité de la surface. Cependant, le nettoyage aux éponges n’est finalement pas suffisant : le dépôt est bien incrusté dans les pores. L’action mécanique du scalpel après humidification permet d’en retirer davantage, sans pour autant obtenir le résultat désiré. Continuer le nettoyage au scalpel seul demanderait une action mécanique trop importante pour la fragilité de l’engobe sous-jacent.
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Le dépôt se ramollissant à l’eau, il est donc décidé d’humidifier l’encrassement à l’aide d’une compresse ou d’un gel aqueux. Cette méthode permet de prolonger l’action de ramollissement tout en absorbant. De nombreux compresses et gels ont été testés (dans des zones dissimulées) dans le but de trouver une solution efficace sur le dépôt noir, tout en solubilisant le moins possible les sels solubles contenus dans la pièce195. - Compresse d’eau déminéralisée
10 minutes
- Eau chaude au bâton cotonné / à l’éponge Basotect® / à l’éponge Passage
poly(vinyl formal) - Gel Carbopol-Ethomeen® – eau
10 minutes
- Gel Laponite®RD196 à 5% dans l’eau
10 minutes
- Gel Laponite®RD à 10% dans l’eau
10 minutes
- Gel de Klucel G®197 (5%) et Tween 20198 à 1% dans l’eau
10 minutes
- Gel de Klucel G® (5%) et Tween 20 à 2% dans l’eau
10 minutes
- Gel AB57199
5 minutes
- EDTA200 à 5% (dans l’eau) sur de la pulpe de papier (1,3g pour 10g de 10 minutes
solution) - Hexamethaphosphate de sodium201 à 5% (dans l’eau) sur de la pulpe de
10 minutes
papier (1,3g pour 10g de solution) -
Gel de carboxyméthylcellulose (CMC) à 7% dans l’eau, avec quelques grains
d’acide citrique202 (environ 0,04 g) pour diminuer le pH de la solution à 5203
10 minutes
Seul le gel à base de CMC204, d’eau et de quelques grains d’acide citrique nous apparait comme efficace dans le nettoyage de la concrétion.
Les sels solubles ayant un pH d’environ 5,6, il est nécessaire que la solution ne soit pas basique afin de ne pas les dissoudre. Nous savons que quelle que soit la solution choisie un apport d’eau en dissolvera une partie et les fera remonter. Une solution acide permettra cependant de limiter cette dissolution. 196 Argile colloïdale constituée de silicates de sodium, magnésium et lithium ; mélangée à l’eau elle permet la formation d’un gel (CTS : « Laponite®RD », [En ligne], URL : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=2668, consulté le 10/05/18). Bien que son pH soit basique, nous l’avons testé en raison de son pouvoir absorbant important ; sachant que le pH pouvait être ajusté par la suite. 197 Hydroxypropylcellulose soluble dans l’eau, il est utilisé pour la fabrication de gel. 198 Tensio-actif dérivé de l’oxyde d’éthylène permettant de solubiliser deux phases non miscibles (pH neutre) 199 Formule de l’ICR de Rome (Institut supérieur de Conservation-Restauration) composé eau déminéralisée, bicarbonate d’ammonium, bicarbonate de soude, d’EDTA disodique, de tensio-actif à 10% et de carboxyméthylcellulose. 200 Se référer aux explications sur les effets de l’EDTA p. 126 201 Complexant de formule (NaPO3)6 202 Acide faible de formule C6H8O7 ; fiche de sécurité de l’acide citrique en Annexe 22 p. 287 203 ATLANTIS : « Fiche technique Laponite RD® », [Document PDF], www.atlantisfrance.com/fr/attachment.php?id_attachment=37 204 CMC de chez CTS ; fiche de sécurité de la CMC en Annexe 23 p. 291 195
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Il est donc décidé de l’utiliser en procédant à un nettoyage méticuleux à l’eau déminéralisée par la suite afin d’éliminer le maximum de résidus du gel. Il est important de ne pas laisser sécher les gels de CMC : en effet, une fois sec, ceux-ci sont très difficiles à retirer et laisseront beaucoup de résidus. Matériau
Matériel - Scalpel
- carboxyméthylcellulose
- Bâtonnet
- acide citrique
- Eponge poly(vinyl formal)
- eau déminéralisée
Un temps de pose de quinze minutes nous permet d’augmenter l’efficacité du gel par rapport à nos tests, sans pour autant être trop long pour ne pas que le gel sèche. Il sera ensuite retiré au bâtonnet. Le gel devrait avoir absorbé une partie des résidus bruns. Les plus incrustés auront été ramollis par le gel et pourront alors être retirés à l’aide du scalpel. Préparation du gel - Pour une solution de 100g : 7g de CMC dans 93g d’eau - Mélanger et écraser les grumeaux - Passer au tamis pour obtenir un gel bien lisse
- Ajouter quelques grains d’acide citrique afin d’obtenir une solution tampon (pH 5) Protocole -
Application du gel durant quize minutes
-
Elimination du gel au bâton de bois
-
Nettoyage des dépôts plus noir à l’aide du scalpel
-
Nettoyage de la surface au bâton cotonné imbibé d’eau déminéralisée puis à l’éponge poly(vinyl formal)
-
Séchage naturel de la surface Le gel est appliqué par zone sur toute la
surface haute de l’œuvre (col et haut de la panse), sur la pièce et sur les tessons désolidarisés. Le nettoyage doit être homogène pour ne pas obtenir des différences de teintes entre les tessons : ils sont donc positionnés les uns à côté des autres lors du nettoyage afin d’uniformiser l’ensemble. Fig. 134 : Nettoyage par zone au gel de CMC Léa BIZOUARN
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c. Résultats Le nettoyage à l’éponge Basotect® a été très efficace sur les parties simplement empoussiérées, tout en étant doux et respectueux de la céramique. Sur la majorité de la panse, il a permis de rendre à l’engobe sa couleur d’origine. Cependant ce nettoyage, bien qu’il ait tout de même permis de l’atténuer, ne s’est pas avéré suffisant pour éliminer complètement l’encrassement sur le col et la partie haute de la panse. Le nettoyage au gel de CMC, posé par zone pour ne pas en oublier a permis de terminer l’homogénéisation de la surface. Certaines zones ont malgré tout demandé plusieurs poses de gel et une action mécanique plus importante. Cependant, le nettoyage a été réalisé en privilégiant toujours la préservation de l’engobe. L’objectif du nettoyage a ainsi été atteint : l’engobe a retrouvé une couleur proche de celle d’origine et l’œuvre présente désormais un aspect homogène. L’encrassement du haut de la panse a été très largement atténué et les décors ont été mis en valeur par ce nettoyage. Ce traitement a cependant permis une atténuation de l’encrassement et non un retrait intégral : la pièce conserve sa patine, la marque du temps comme nous le souhaitions. De plus, nous avons conservé l’encrassement de la base (preuve de l’utilisation de l’œuvre), tout en créant un passage fluide et qui ne rompt pas la lecture entre la panse nettoyée et cette base encrassée. Le nettoyage très satisfaisant a tout de même présenté plus de difficultés et nécessité plus de matériaux, de techniques et de temps de travail que prévu. Le traitement des efflorescences salines sur le haut de la panse permettra peut-être de continuer l’atténuation. Si ceux-ci sont jugés encore trop visibles, le traitement au gel de CMC pourra être repris par la suite. Par ailleurs, le dépôt « jaune, vert, blanc » identifié lors du constat d’état a été retiré lors du passage de la gomme Basotect® ; plus aucune trace n’est visible. Le dépôt brun cireux sur la base n’a pas été retiré, sous peine de créer une zone propre sur celle-ci qui devait rester totalement encrassée. Il n’est pas visuellement gênant puisque situé en dessous.
Avant nettoyage
Après nettoyage Basotect® et éponge poly(vinyl formal)
Après nettoyage au gel de CMC
Fig. 135 : Nettoyage de la surface Léa BIZOUARN
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Fig. 136 : Œuvre avant et après nettoyage
B. Atténuation des efflorescences et concrétions salines Lors du diagnostic, nous avons identifié la présence de concrétions (sels insolubles) et de voiles blanchâtres (sels faiblement solubles selon les tests205) recouvrant la majorité de l’engobe et des décors. Ces sels peu ou pas solubles ne sont pas dangereux pour l’œuvre dans des conditions hygrométriques* stables. En effet, les sels une fois cristallisés ne changent pas de forme ni de taille s’ils ne sont pas sujets à une augmentation de l’hygrométrie : c’est une augmentation significative de l’humidité au sein de la céramique qui va causer un changement volumétrique irréversible des cristaux de sels solubles et ainsi créer des tensions au sein de la pâte206
207
.
Ainsi, des conditions de conservation stables (sans variations extrêmes de température et d’hygrométrie), comme c’est le cas dans des réserves muséales, ne sont pas des conditions causant le développement des cristaux dans la pâte. Par ailleurs, dans la littérature scientifique, il est possible de trouver des seuils maximums de concentration totale en sels ou par ion spécifique : la teneur en ions sulfates (la plus importante selon les tests réalisés), serait alors jugée insignifiante par SNETHLAGE mais causant des « dommages moyens » par ARENDT208. 205
Se référer aux tests de salinité en Annexe 4 p. 240 Seulement si l’humidité relative dépasse l’humidité relative d’équilibre du sel. 207 BOURGUIGNON E. : Dessalement des matériaux poreux modèles par la méthode des compresses, thèse Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2009, p. 42 208 BOURGUIGNON E. : Ibid., p. 50-51 D’après SNETHLAGE R. : Leitfaden Steinkonservierung: Planung von Untersuchungen und Massnahmen zur Erhaltung von Denkmälern aus Naturstein. 2nd ed. Stuttgart: Fraunhofer IRB Verlag., 2005 206
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Par conséquent, les quelques sels contenus dans la céramique étudiée pourraient être conservés ainsi sans endommager l’œuvre. En outre, nous savons que toute action de restauration apporte un danger pour l’œuvre par ses actions chimiques et mécaniques. Nous pouvons donc penser qu’un nettoyage de ses sels pourraient endommager l’œuvre plus que les sels eux-mêmes. Par
ailleurs,
après
le
nettoyage
de
l’empoussièrement et de l’encrassement, nous pouvons nous apercevoir que les voiles blanchâtres ont été majoritairement atténués. Ils se fondent dans la couleur crème de l’engobe et ne sont alors plus visuellement gênants. Cependant les décors brun-rouge sont toujours recouverts de voiles blancs importants, et le haut de la panse (au-dessus des bras et visage du personnage) présentent encore des zones blanches.
Fig. 137 : Décor encore recouvert d’un voile blanc après nettoyage de la surface
La lecture de l’œuvre n’est donc pas empêchée mais ceux-ci peuvent cependant en altérer l’esthétique. Il a donc été décidé d’éliminer les voiles blancs présents sur l’ensemble des décors afin de mettre en valeur ces derniers, comme l’engobe l’a été après le nettoyage de l’encrassement. Les voiles blancs encore présents dans le haut de la panse et le col seront atténués afin d’harmoniser les couleurs sur l’ensemble de l’œuvre.
a. Choix des matériaux Les concrétions visibles à l’intérieur du col non engobé pourront être atténuées par une légère action mécanique. Selon les tests, la pâte n’est pas rayable au scalpel et cette partie ne présente pas d’engobe fragile, l’action mécanique est donc possible. En ce qui concerne les sels solubles, l’action la plus commune est un dessalement par compresse. Elle permet d’extraire les sels ou au moins d’en réduire la quantité de manière contrôlée (temps de pose, résidus). a) Application de la compresse humide sur le matériau contaminé b) Pénétration de l’eau dans le substrat et dissolution des cristaux c) Transport des sels dissouts vers la compresse d) Compresse chargée en sels 209
Fig. 138 : Principe du fonctionnement de la compresse lors du dessalage
et ARENDT C. et SEELE J. : Feuchte und Salze in Gebäuden: Ursachen, Sanierung, Vorbeugung. LeinfeldenEchterdingen, Germany: Verlagsanstalt Alexander Koch, 2001 209 BOURGUIGNON E. : Op.cit., p. 53 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 124
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Cependant nous avons vu lors de nos tests que la compresse d’eau seule ne permettait pas un dessalement (la surface testée ne présente pas une partie dessalée après le test). Ceci peut être dû au fait que la majorité des sels ne sont pas solubles mais plutôt insolubles. Il est donc nécessaire d’ajouter un produit dans la solution. Dans le cas de nettoyage des sels à base de traitements chimiques, les acides organiques ou minéraux ou les complexants sont généralement utilisés.
Complexants
Type
Exemples Hexamétaphosphate de sodium (NaPO3)6 pH 4,6 à 10 % EDTA (C10H16N2O8) pH : 4,5-5 à 10 %210
Action
Efficace sur …
Se lient aux ions métalliques et forment des complexes solubles211 « Leur action dépend du PH* de la solution » : la solubilité d’un sel basique augmente en milieu acide et inversement212.
Ions métalliques 213 : calcium, magnésium, aluminium, fer, etc. 214
Forme
Inconvénient(s)
Bain ou - La pénétration doit être compresse contrôlée pour limiter les Parfois à résidus chaud
Acides
-
Acide minéral ou organique : chlorhydrique, nitrique, acétique, formique215
Agissent sur des composés peu solubles en créant des réactions acido-basiques
Carbonate de calcium
Bain ou application locale
réaction acidobasique peut aussi avoir lieu dans la pâte : peut aussi dissoudre le calcium du matériau - Demande une saturation en eau216 pour que le produit ne pénètre pas dans la pâte et dissolve des composants
N’ayant pas d’information certaine sur la composition et la solubilité des sels présents, il nous est impossible d’adapter le traitement et le choix du produit à ceux-ci. Notre seule source est le pH des sels (de 5,6)217, ce qui peut nous aider à établir une solution efficace. 210
CTS : « Hexaméthaphosphate de sodium », [En ligne], URL : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=463, consulté le 10/02/18 211 BERDUCOU M. : La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p. 101 212 SANTGERMA H. : Etude et restauration de quatre figurines phéniciennes, sujet TS : Recherche d’un protocole de nettoyage par des gels à base de complexants, Mémoire INP, 2005, p. 109 213 Ions formés à partir d’atomes classés dans la famille des métaux dans le tableau périodique des éléments comme l’aluminium, le baryum, le calcium, le cobalt, le cuivre, le sodium, le potassium, etc. (Schoolmouv, Ion métallique, [En ligne], URL : https://www.schoolmouv.fr/definitions/ion-metallique/definition, consulté le 06/02/2018) 214 CTS : « Hexaméthaphosphate de sodium », [En ligne], URL : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=463, consulté le 10/02/18 215 BERDUCOU M. : Op.cit., p. 101 216 COUSTILLERE Constance : Etude et Restauration d’une Œnochoé italiote à bec trilobé, Fin du IVe – début du IIIe siècle av JC, Mémoire de fin d’études Conservation-Restauration de céramiques, Ecole de Condé, 2015 p. 132 217 Se référer aux tests de salinité en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN
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Nous éliminons dans un premier temps les acides en raison de leur dangerosité pour les éléments constitutifs de l’œuvre (notamment le calcium). L’usage de complexants va permettre un nettoyage contrôlé puisque son efficacité dépend du pH de la solution. Il suffira de le paramétrer pour ajuster l’action. Le phénomène de complexation est une réaction entre un acide de Lewis (ion métallique) et une base de Lewis218 (complexant, neutre ou chargé négativement). Les ligands (ou complexants) vont se lier au cation métallique au centre par des liaisons covalentes*. Par ce phénomène, l’ion métallique est dissout. De manière générale, la formation d’un complexe à partir d’un métal M et de n ligands L s’écrit : Mt+ + nLu-⇆ [M(L)n]t-nu+ 219. Dans
la
documentation
scientifique220
221
222
,
l’EDTA223
(acide
éthylènediaminotétracétique ; C10H16N2O8) est très souvent mentionné dans les nettoyages de concrétions ou autres taches, dans la restauration de peinture murale ou d’objets archéologiques. Il existe sous différentes formes (sodique, disodique224, trisodique ou tétrasodique). Seul le pH varie en fonction de la forme225 (respectivement 4,5 ; 9,3 et 11,3). L’EDTA trisodique de pH 9,3 serait donc intéressant à utiliser mais en raison des difficultés à s’en procurer, le choix s’est porté sur l’EDTA disodique dans une solution tamponnée. La réaction entre le complexant EDTA disodique (noté H2Y2-) et les sels de la céramique est une réaction de complexation notée :
Ca2+ + H2Y2- → CaY2- + 2H+
226
.
La concentration Les concentrations d’EDTA généralement utilisées varient entre 5 et 15% dans l’eau227. Lors de tests préliminaires, nous avons pu confirmer cette concentration : le gel réalisé à 5% d’EDTA a été très efficace sur les sels contenus dans l’œuvre étudiée. Nous allons donc utiliser un EDTA disodique à 5%.
Acide de Lewis : « Ion ou molécule disposant d’une orbitale vacante » ; base de Lewis : « Ion ou molécule qui peut donner un doublet électronique » (Chimix : Acide et base : Transfert de proton, [En ligne], http://www.chimix.com/pages/eau.htm#ex4, consulté le 07/02/2018) 219 TANGOUR Bahoueddine : Les complexes, [Document PDF], https://tangour.files.wordpress.com/2016/04/lescomplexes.pdf 220 SANTGERMA H. : Op.cit., p. 108 221 BERDUCOU Marie : Op.cit., p.101 222 JOURDAIN-TRELUYER V. : « L’acide ethylène-diamine-tetra-acétique (EDTA) et ses sels sodiques », IFROA, p. 11 à 13 223 Fiche de sécurité de l’EDTA disodique en Annexe 24 p. 296 224 Aussi nommé bisodique 225 JOURDAIN-TRELUYER V. : Art.cité, p.11 à 13 226 PERIN J.F. : Complexométrie et dosages titrimétriques des cations métalliques, [Document PDF], fdanieau.free.fr/cours/bts/A1/biochimie/TP/Complexometrie.pdf, p. 1 227 SANTGERMA H : Op.cit., p. 116 218
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Le gélifiant Il est nécessaire d’augmenter la viscosité de la solution afin de limiter la pénétration de l’EDTA dans la pâte et d’empêcher l’action sur les éléments de celle-ci. Les compresses et les gels permettent de réaliser un nettoyage contrôlé en paramétrant le temps de pose, la quantité appliquée, la concentration du produit. Pour le cas de l’œuvre étudiée, nous cherchions un produit ayant un grand pouvoir de rétention, une facilité de nettoyage et laissant peu de résidus. Nous avons éliminé les gélifiants acides puisque nous cherchons à obtenir une solution légèrement basique. La pulpe de papier et le dérivé de l’Agar Agar nommé Nevek®228
229
ont ainsi été testés puisqu’ils répondaient aux
critères énoncés précédemment. Ce dernier a déjà été utilisé dans « l’extraction de sels sur surfaces de pierre, mosaïques objets archéologiques et peintures murales » et qu’il est possible dans ce cas d’« intensifier l’efficacité en ajoutant des agents complexant comme l’EDTA ou le citrate d’ammonium »230. Un test a préalablement été effectué sur une partie dissimulée du décor afin de vérifier que celui-ci n’y était pas sensible : il ne réagit pas, le produit peut être utilisé.
EDTA à 5% dans Nevek®
attenue légèrement
EDTA à 5% dans l’eau + pulpe de papier (2g pour 5g de solution)
attenue légèrement
Nevek® ®
Pulpe de papier
Les résultats obtenus après dix minutes de pose sont relativement faibles : les voiles blancs sont légèrement attenués mais le résultat n’est pas satisfaisant. L’opération demanderait un trop grand nombre de passages pour être acceptable. Le pH de la solution Nous savons que l’efficacité des complexants dépend du pH de la solution utilisée par rapport au pH des sels à dissoudre. Ainsi une solution au pH basique sera plus efficace sur des sels au pH acide. Nous savons également que le pH des sels contenus dans la céramique est de 5,6 environ. Une solution plutôt basique serait donc plus efficace. Par ailleurs, l’EDTA étant un acide faible, plus le pH de la solution est basique, plus son efficacité sera importante. Polysaccaride Agar-Agar en dispersion aqueuse associé à 10% éthanol pour éviter les moisissures. Il s’agit d’un gel dit thermoréversible, utilisable sans préparation ou associé à un solvant organique. Il a un pouvoir adhérent faible permettant de l’utiliser sur des surfaces sensibles, mais une grande capacité d’absorption. 229 Fiche de sécurité du Nevek® (CTS) en Annexe 25 p. 300 230 CTS : « Nouveaux produits – Le futur du nettoyage se nomme Nevek», [En ligne], 18/05/16, http://www.ctseurope.com/fr/dettaglio-news.php?id=362, consulté le 06/02/2018 228
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Considérant le pH des sels à nettoyer et l’efficacité maximum de l’EDTA, placer le pH de la solution entre 7 et 8 permettrait d’avoir un bon rapport efficacité-innocuité231 232pour l’objet. L’EDTA disodique a un pH de 4,5 environ. Une fois les 5% du complexant mélangés au Nevek®, la solution totale est d’environ 6. Dans le but d’obtenir une solution au pH bien défini, nommée « solution tampon », il est possible de le rectifier ainsi : -
Réduire le pH des solutions en ajoutant de l’acide citrique ou acide lactique
-
Augmenter le pH des solutions en ajoutant de « l’ammonium, de l’hydroxyde de sodium, silicate de sodium, amines primaires ou secondaires, DMEA, AMP95, DMAMP80 »233
Nous allons donc ajouter quelques particules de carbonate d’ammonium234 ((NH4)2CO3) afin d’obtenir une solution au pH 7-8. Celle-ci pourra être testée avec un pH-mètre puis ajustée si besoin. Le carbonate d’ammonium est également connu pour son action solubilisante sur le sulfate de calcium, ce qui est également un avantage dans le cas de notre traitement235. Solution tampon à pH 7,5 : EDTA à 5% dans l’eau + pulpe de papier (2g pour 5g de solution) Solution tampon à pH 7,5 : EDTA à 5% dans Nevek®
attenue convenablement
résultat très satisfaisant
Nevek® ®
Pulpe de papier
Nous pouvons voir qu’après dix minutes de pose, que ce soit avec la pulpe de papier ou avec le Nevek®, l’efficacité de la solution est augmentée lorsque le pH est ajusté à 7,5. La solution composée de Nevek® – 5% d’EDTA est très efficace sur les voiles blancs des décors et le résultat obtenu est très satisfaisant. Plusieurs passages seront peut-être nécessaires sur certaines parties pour homogénéiser l’ensemble. Pour retirer ou atténuer (en fonction des zones) les sels solubles de l’œuvre, nous allons donc utiliser un gel Nevek®-EDTA à 5% avec un pH ajusté à 7,5 environ à l’aide de
Un pH trop acide risquerait de solubiliser également des éléments de la pâte (calcium)alors qu’un pH trop basique pourrait faire réagir des molécules organiques. 232 JOURDAIN-TRELUYER V. : « L’EDTA et ses sels sodiques, quelques précisions », Conservationrestauration des Biens culturels, Décembre 1991, p.60 233 ATLANTIS : « Fiche technique Laponite RD® », [Document PDF], www.atlantisfrance.com/fr/attachment.php?id_attachment=37 234 Carbonate d’ammonium de chez CTS ; fiche de sécurité en Annexe 26 p. 304 235 CTS : « Ammonium carbonate », [En ligne], URL : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=2649, consulté le 10/03/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 128 231
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carbonate d’ammonium. Les temps de pose et le nombre de passages seront ajustés en fonction du besoin de la zone. Un temps de dix minutes maximum permet un nettoyage efficace sur les décors et ne laisse pas au gel le temps de sécher. Matériau
Matériel - Scalpel - Bâton de bambou - Eponge poly(vinyl formal) - pinceau
- EDTA bisodique - Carbonate d’ammonium - Nevek®
b. Mise en œuvre Protocole - Mélange des 5% d’EDTA dans le Nevek®. Ajustement du pH du gel au carbonate d’ammonium. Test avec des bandelettes ou un pH-mètre jusqu’à obtention d’un pH 7,5 - Application du gel sur la surface durant dix minutes - Retrait du gel au bâton de bambou - Nettoyage des résidus à l’éponge poly(vinyl formal) imbibée d’eau déminéralisée - Passage d’un pinceau une fois la surface sèche - Réitération de l’action si le résultat n’est pas assez satisfaisant Le gel est donc appliqué sur l’ensemble des décors (pièce et tessons désolidarisés) durant dix minutes. La solution est très efficace sur les sels mais nettoie également les restes d’encrassement que le gel de CMC n’avait pas retirés. Une fine couche de gel posée dix minutes permet un nettoyage satisfaisant des sels solubles. Plusieurs passages sont effectués sur certaines zones plus résistantes.
Fig. 139 : Gel Nevek®-EDTA posé sur les décors
Les voiles blancs imposants sur le col, le haut de la panse et les bras du personnage sont également nettoyés. Le temps de pose est abaissé à quatre minutes afin de simplement les atténuer sans créer de délimitation nette. L’action est également réitérée sur certaines zones pour approfondir le nettoyage. Des poses très ciblées permettent un nettoyage localisé afin d’éliminer les petites taches. Les tranches des tessons sur lesquelles les résidus de nitrate de cellulose ont été retirés ont vu un léger voile blanc apparaitre après séchage. Le traitement de dérestauration a dû faire remonter en surface les sels contenus dans la pâte. Ceux-ci sont traités de la même façon : le gel est posé dix minutes pour plus d’efficacité. L’opération est réitérée deux fois sur certaines tranches. Léa BIZOUARN
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Par ailleurs, les sels insolubles, formant de petits points blancs en relief (concrétions) sur la paroi intérieure du col, sont atténués par l’action légère du scalpel. Les poussières sont ensuite éliminées à l’aide d’un pinceau doux.
c. Résultats Les traitements Nevek®-EDTA sur les efflorescences et concrétions salines ont été très efficaces. Ils ont permis de retrouver une uniformité dans l’aspect de l’œuvre : les voiles blancs ont été atténués sur les parties les plus atteintes (col et haut de la panse) afin d’obtenir un aspect similaire à la panse. Sur certaines zones, plusieurs poses ont été nécessaires afin d’obtenir un résultat uniforme. Le choix a été d’arrêter le traitement, malgré la présence de légères efflorescences : la panse en présentant également, l’aspect de l’œuvre est homogène. Par ailleurs, dans le cas d’une céramique archéologique, il n’est pas nécessaire mais plutôt intéressant pour son aspect historique, de conserver certaines efflorescences. Il s’agit d’une trace visible de son enfouissement, une « patine archéologique ». L’objectif de ce nettoyage était de retrouver la vivacité de la couleur des décors et d’atténuer les voiles importants et les dernières concrétions du haut de la panse, et celui-ci a été rempli.
Fig. 140 : Face A avant et après dessalement
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Fig. 141 : Disque auriculaire avant et après dessalement
Fig. 142 : Disque auriculaire avant et après dessalement
Le nettoyage de la pièce était une étape importante et primordiale pour permettre sa lecture. L’engobe et les décors ont retrouvé un aspect plus proche de celui d’origine : l’engobe est redevenu couleur crème et les décors ont retrouvé leur éclat et leur intérêt. L’œuvre conserve tout de même quelques efflorescences et un léger encrassement marquant les quelques siècles qu’elle a ainsi passés en contexte funéraire. La patine est une preuve de son ancienneté et de son utilisation qu’il est important
de
conserver
dans
un
but
pédagogique. Le degré et l’intensité des traitements ont tous été contrôlés afin de continuer à observer ces traces après nettoyage. Léa BIZOUARN
Fig. 143 : Nouvelle fêlure visible après nettoyage Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018
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Celui-ci nous a par ailleurs permis de découvrit de nouvelles altérations : -
Une fêlure traversante de trois centimètres partant du col, sur un tesson désolidarisé
-
L’engobe présente également des fragilités sur le col. La zone de fixage prévue devra être étendue.
En plus de permettre la mise à jour du constat d’état, il était nécessaire que le nettoyage de la pièce soit terminé afin de pouvoir réaliser le fixage de la couche picturale sans fixer l’encrassement en même temps. Nous pouvons désormais passer au prochain traitement.
4. Le fixage et la consolidation Le fixage et la consolidation sont des actions permettant de rétablir la cohésion de l’œuvre, de manière superficielle pour la première et structurelle pour la seconde. Ces actions, dans le cas de l’œuvre étudiée, sont nécessaires au vu de la fragilité de l’engobe et des nombreuses fêlures qu’elle présente. En effet, comme expliqué précédemment, la manipulation de l’œuvre pourrait créer des pertes de l’engobe pulvérulent et quelques chocs ou vibrations pouvant être perçus comme insignifiants sur le moment pourraient provoquer la propagation des fêlures et la casse de l’œuvre. Dans un premier temps, le fixage de la surface permettra de sécuriser l’engobe ; puis la consolidation des fêlures stabilisera la structure de l’œuvre. Elle pourra ainsi être manipulée en toute sécurité.
A. Le fixage de l’engobe fragile L’engobe est par endroit craquelé, soulevé, pulvérulent et même parti. Pour sa préservation, il doit être consolidé. Il s’agit d’un traitement de prévention plutôt que d’un réel sauvetage de celui-ci puisqu’il ne soulève pas au passage délicat d’une éponge ou de la main236. Cependant une prise forte lors d’une manipulation pourrait l’endommager. Le fixage a pour but de consolider de manière superficielle ; il permet de rétablir l’adhérence et la cohésion de l’engobe en vue d’une manipulation sans danger pour celui-ci. Un produit de consolidation sera donc appliqué localement, sur les parties altérées (creux de la panse, décors et quelques endroits sur le col). L’engobe simplement craquelé ne sera pas consolidé puisqu’il n’est pas en danger.
a. Choix des matériaux Cahier des charges -
Faible adhésion
-
Respect de l’aspect de surface : matité proche de la terre cuite et de l’engobe et pas d’assombrissement
-
Pas de taches ou d’auréoles
236
Selon nos tests préalables, ils se soulèvent au scalpel. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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-
La réversibilité d’un traitement est toujours souhaitée en restauration. Cependant dans le cadre d’une consolidation, le produit a pour but de pénétrer dans l’engobe pour lui redonner cohésion. La notion de réversibilité est donc très partielle. Nous chercherons tout de même un adhésif pouvant se désimprégner de la surface au maximum.
-
Stable chimiquement : le traitement étant très peu réversible, il est d’autant plus nécessaire que ce traitement soit le plus stable dans le temps possible. Nous chercherons donc un produit qui ne vieillisse pas (jaunissement).
-
Faible toxicité
-
Solubilité différente de la consolidation et du collage (éthanol)
Choix des adhésifs Nous avons réalisé des tests sur des adhésifs qui, dans la littérature, étaient identifiés comme mats ou légèrement satinés et ne modifiant pas ou très peu la couleur d’origine. Type
Description
Concentration testée
Brillance
Couleur
Vieillissement237
- Soluble et réversible dans l’eau Polysaccharid e issu de
Funori®238
l’algue rouge Gloiopeltis furcata La Junfunori résulte de la purification de la Funori®.
- pH neutre - Transparente - Souvent utilisée pour
Bonne
consolidation surfaces mates, - Non toxique,
- Viscosité augmente avec le temps de chauffage239,
Pas de 2% dans l’eau
Très mat
résistance
modification
optique et
242
adhésive243 (à 0,3 %)
- « utilisé pour les doublages de papiers, fixations et dorures »240 et les fixages de pigments au Japon241
237
Résultats issus de la littérature scientifique Fiche technique de la Funori® de chez Kremer en Annexe 27 p. 306 239 RUBIELLA F. : Etude et conservation-restauration de deux lécythes attiques à fond blanc du Ve siècle avant JC, Mémoire de fin d’étude INP, 2011, p. 97 240 DAUCHEZ A-C. :« Approche comparative des colles d’algues Funori et Jun Funori », CeroArt [En ligne], publié en Août 2012, URL : http://ceroart.revues.org/2865, consulté le 15/03/18 241 HORIE V. : Materials for conservation : organic consolidants, adhesives and coatings, ed. Elsevier Ldt (2nd edition), 2010, p. 107 242 BRUNETTI S. et MONOD S. : « Le JunFunori ou l’approche occidentale d’un adhésif venu d’Orient », Entrevue avec O. MASSON, restaurateur privé suisse, Support Tracé, n°3, 2003, p. 63-66 243 GEIGER T. & MICHEL F. : « Studies on the polysaccharide JunFunori used to consolidate matt paint », Studies in Conservation 50, 2005, p. 193-204, p. 194 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 133 238
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay Adhésif
-
protéinique,
au-dessus de 60° c
fabriqué à
-
partir du
Esturgeon244
Ne doit pas être chauffée Soluble et réversible dans eau
collagène des
-
pH neutre
vessies
-
Transparent après séchage
natatoires* des esturgeons -
Stabilité dans le temps et
1% dans l’eau
246
Très
Très peu de
légèrement
modification
satiné
de la couleur
Légèremen
Modifie
t satiné
teinte à 2%
à la lumière245
Bonne résistance optique et adhésive247
Faible viscosité et donc bonne pénétration
400
MHPC
Culminal
-
Coût élevé
Ether de
2% dans l’eau
cellulose
Aquazol 200248
Utilisé en tant qu’adhésif et
Satiné ou
consolidant, thermostable
brillant en
jusqu’à 380° C, Tg* à 70° C,
Poly(2-éthyl-
non toxique, bonne force
2-oxazoline)
d’adhésion pénétration
fonction 5% dans l’eau
3
résistance
modification optique, perte d’adhésivité
249
on
matériaux crayeux ou poreux.
2
des
Pas de
concentrati
suffisante, utilisé sur des
1
Bonne
4
1
Funori®
2
Esturgeon
3
Culminal MHPC 400
4
Aquazol 200
Fig. 144 : Comparaison de brillance entre les différents consolidants
Nous retenons les adhésifs qui ne modifient ni la brillance, ni la couleur de l’échantillon selon nos tests mais aussi selon la littérature scientifique, c’est-à-dire la Funori® et l’esturgeon. Selon A-C. DAUCHEZ250, la purification de la Funori®, dont résulte la
Fiche de sécurité de la colle d’esturgeon Salianski de Atlantis en Annexe 28 p. 311 DARD-TERNISSIEN Claire : Etude et restauration d’un Avalokitesvara tibétain en bois polychrome appartenant au musée national des Arts asiatiques-Guimet Paris, Mémoire de fin d’étude INP, 2003, p.87 246 BRUNETTI S. et MONOD S. : Art.cité., p. 63-66 247 GEIGER T. & MICHEL F. : Art.cité., p. 193-204, p. 194 248 RUIZ P. : « L’Aquazol et ses applications », Conservation Restauration des Biens Culturels (crcb) n°31, 2013, p. 35-42 249 SAUTOIS A. : « La retouche des peintures acryliques en émulsion non vernies : Aquazol 200. Etude des capacités physiques, chimiques et optiques d’un liant », CeroArt [en ligne], mise en ligne le 19 juin 2012, URL : http://ceroart.revues.org/2708, consulté le 12 Juin 2017 250 DAUCHEZ A-C. : Art.cité., URL : http://ceroart.revues.org/2865 244 245
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JunFunori®, lui ferait perdre sa stabilité chimique dans le temps. Cela provient selon F. MICHEL251 de la nouvelle recette de 2006 durant laquelle la JunFunori® ne serait pas blanchie comme avant cette date. Les études utilisant un produit datant d’avant 2006 pouvaient conclure à une bonne stabilité chimique dans le temps, alors que ce ne serait plus le cas aujourd’hui. La Funori® est donc à privilégier. Le mélange Funori® et esturgeon (sucre/protéine) a déjà été réalisé sur les « peintures mates, les objets ethnographiques, les papiers peints en tontisse, les peintures murales »252, des peintures sur papiers253 et a déjà donné de bons résultats optiques sur des polychromies mates sur des terres cuites
254 255
. Le mélange donne un résultat efficace et mat en combinant leurs
propriétés. Avantages Funori®
Esturgeon
Matité conservée -
Souple
-
Pouvoir adhésif supérieur
-
Matité et couleurs conservées
Mélange
-
Non toxiques
Funori®-
-
Stable chimiquement257
esturgeon -
Réversible
-
Efficace
Inconvénients Pouvoir collant inférieur256 Légèrement satiné
Peut
favoriser
le
développement
de
microorganismes dans des
conditions
conservation contrôlées
de non
(cependant
les réserves du musée, lieu de conservation, le sont)
Le mélange Funori® et esturgeon, selon nos tests et la littérature scientifique, nous semble parfaitement correspondre au cahier des charges élaboré pour cette étape de fixage. Choix des concentrations En raison de l’apport de brillance de la colle d’esturgeon, il est préférable que celle-ci soit en quantité assez faible258. Cependant même si elle n’est pas en quantité inférieure à la 251
MICHEL F. : « Funori and JunFunori® : Two related consolidants with surprising properties », CCI Symposium : Adhesives and consolidants for conservation, research and application, Ottawa, 2011, p.1 252 BRUNETTI S. et MONOD S. : Art.cité., p. 63-66 253 MILEWSKA S. : « Restauration de dix miniatures indiennes du XVIIIe siècle », Papiers n°9, Octobre 2015, p. 5-8 254 SCHENCK M. : Etude et conservation-restauration d’un Dolium en terre cuite datant du Ier siècle et provenant du site gallo-romain d’Oedenburg (Alsace), Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016, p. 144-146 255 MINOT O. : Etude et conservation-restauration d’une figurine en terre cuite zoomorphe provenant de Grèce, Mémoire de fin d’étude, 2016, p.121-123 256 SMITH M. : « Funori Overview of a 300 years old consolidant », JAIC vol 44, 2005, p. 117-126 257 Leur aspect ne varie pas lors d’une exposition prolongée aux UV ou aux variations de températures et d’humidité. (GEIGER T. & MICHEL F. : Art.cité., p. 193-204, p. 202) 258 RUBIELLA F. : Op.cit., p. 126 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 135
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Funori®, le très faible dosage de la colle d’esturgeon n’apportera pas de brillance. En effet, les consolidations sont généralement faites avec des concentrations entre 1 et 3% selon le produit. O. MASSON, restaurateur papier, réalise les deux solutions séparément à 1% chacune ; puis il mélange une part d’esturgeon avec une ou deux parts de Funori® en fonction de ses besoins259. Les résultats obtenus par O. MINOT et M. SCHENCK sur leurs œuvres mates semblent tout à fait satisfaisants au niveau de la brillance et de la couleur : elles ont utilisé toutes deux le mélange 2% esturgeon-1% Funori® dans l’eau déminéralisée. Ce mélange nous semble donc aussi adapté à notre œuvre par son rendu visuel, mais aussi par son adhérence. Les 2% d’esturgeon permettront d’améliorer le pouvoir collant alors que la Funori® permettra de conserver la matité. Un test sur une partie discrète de l’œuvre a permis de confirmer l’absence de changement optique et la compatibilité avec l’œuvre. Selon nos tests préalables, une deuxième couche du mélange apporte un assombrissement de la surface, le fixage devra donc être réalisé en une seule épaisseur. C’est aussi pour cette raison qu’une plus grande proportion d’esturgeon sera utilisée afin d’augmenter le pouvoir collant de la solution. Il s’agit d’un fixage préventif et non curatif, ce qui signifie que l’engobe et les décors ne partent pas à moins d’une manipulation excessive aux endroits fragilisés. Une seule couche devrait donc suffire à renforcer la cohésion de cet engobe avec la pâte. Choix de la mise en œuvre Une application au pinceau fournit, selon nos tests et les tests de F. RUBIELLA260, un bon rendu visuel (les traces de pinceau ne sont pas visibles en raison de la faible concentration et donc de la faible viscosité du produit). De plus, l’engobe est sensible au soulèvement (ongle et scalpel)261 mais une action délicate au pinceau synthétique à poils doux n’engendrera pas de perte. Matériau
Matériel - pots en verre - tamis - bain-marie - pinceau
- Funori® - Esturgeon - Eau déminéralisée
259
BRUNETTI S. et MONOD S. : Art.cité., p. 63-66 RUBIELLA F. : Op.cit., p. 127 261 Se référer au Test de Mohs en Annexe 4 p. 240 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 260
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Fig. 145 : Esturgeon avant préparation
Fig. 146 : Funori® avant préparation
Fig. 147 : Tamis formé à partir de compresses superposées
b. Mise en œuvre Préparation du mélange262 : colle d’esturgeon à 2% et Funori® à 1% pour 97% d’eau -
-
Préparation de chaque solution séparément : Emietter la quantité de produit dans un récipient rempli de l’eau (pour 10g de solution, 0,2 g d’esturgeon dans 9,8 g d’eau ; 0,1 g de Funori® dans 9,9g d’eau) Laisser gonfler 24 heures au frigo Chauffer au bain marie pour une fluidification du produit, fermer le couvercle pour éviter l’évaporation Passer au tamis fin pour obtenir une texture parfaite Mélange d’une part d’esturgeon à une part de Funori®
Protocole - Application au pinceau brosse à poils doux synthétiques sur les surfaces déterminées (engobe pulvérulent) - séchage pendant 24h
La solution de fixage est appliquée localement, sur les parties où l’engobe était écaillé ou déjà soulevé. Le pinceau brosse à poils doux est donc délicatement passé sur la majorité des décors brun-rouge (tessons désolidarisés et pièce principale), le creux de la panse à l’engobe soulevé. Une seule couche de fixage est ainsi posée. Après une dizaine de minutes, l’aspect
Fig. 148 : Application localisée de la solution de fixage
humide diminue déjà et laisse une surface mate et sans changement de couleur. La pièce est par la suite mise à sécher à l’air libre durant 24 heures pour une évacuation totale de l’eau de la solution.
262
Le mélange se conserve au frais, environ trois jours. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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c. Résultats L’application au pinceau doux synthétique a été très facile et efficace : aucune perte de matière n’a été remarquée durant l’application. Il n’a pas non plus laissé de traces après séchage. Le séchage de la solution a été visuellement plus rapide que 24 heures. Le résultat est mat et sans changement de couleur. L’aspect de l’œuvre n’a pas été modifié par le traitement et l’application localisée n’est pas du tout remarquable après séchage. Après le séchage complet, un test de pulvérulence est réalisé à différents endroits consolidés afin de vérifier que le traitement a été efficace. Lors des tests au moment du constat d’état, nous avions posé un ruban adhésif sur la surface pulvérulente et aperçu un transfert de petites particules d’engobe, c’est pourquoi un traitement était nécessaire. Le test de pulvérulence après fixage, sur l’ensemble des zones testées, n’a révélé aucun transfert : le fixage a donc été efficace. La manipulation de l’œuvre n’est donc désormais plus un danger pour l’engobe.
Fig. 149 : Avant, pendant et après fixage de l’engobe fragile
Méthode de dérestauration Les résines étant aqueuses, le traitement est très facilement réversible à l’eau. Des compresses ou un gel à base d’eau permettra de solubiliser et d’absorber la résine.
B. La consolidation des fêlures traversantes L’œuvre possède cinq fêlures importantes sur le col et la panse. Elles sont pour la plupart très ouvertes et fragilisent considérablement l’œuvre. Celles-ci pourraient en effet se propager dans l’œuvre et provoquer sa rupture. Afin d’éliminer ce risque lors de manipulations, il est obligatoire d’en faire la consolidation, c’est-à-dire de redonner une cohésion à la matière. Une infiltration d’adhésif sur toute la longueur des fêlures permettra, par capillarité, de remplir les vides au sein de la matière et d’ainsi lier les particules entre elles. Léa BIZOUARN
Fig. 150 : Fêlure n°1 (Face A)
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a. Choix des matériaux Cahier des charges de l’adhésif -
Non toxique pour le restaurateur
-
Réversibilité : utilisation d’un adhésif thermoplastique
-
Stabilité chimique : le traitement est, en pratique, quasiment irréversible puisque la résine s’infiltre dans les pores de la céramique. Il est donc important que celle-ci soit le plus stable possible dans le temps.
-
Respect de l’aspect de surface : pas de changement de couleur, matité
-
Résistance mécanique inférieure à celle de la terre cuite pour ne pas arracher de la matière.
-
Compatibilité avec les autres traitements : la solubilité du produit doit être différente du produit utilisé pour le fixage de l’engobe (Funori® et Esturgeon). Si un des deux traitements doit être dérestauré pour une raison quelconque, le second traitement pourra ainsi rester en place. Le produit choisi ne doit donc pas être sensible à l’eau.
-
Tg* compatible avec les conditions de conservation des réserves et les vitrines d’exposition (spots) du musée : supérieure à 40°c Les résines utilisées régulièrement sur les terres cuites archéologiques sont les résines
acryliques* (Paraloïd® B72 et B44 principalement) ou vinyliques*. Les colles cellulosiques sont encore utilisées mais controversées par leur instabilité dans le temps comme nous l’avons vu dans le diagnostic. Cette possibilité est donc écartée. En ce qui concerne les résines vinyliques, elles sont pour la majorité solubles dans l’eau, ce qui n’est pas compatible avec les traitements déjà effectués (fixage soluble à l’eau). Seule la Mowital® B 60 HH, se préparant dans l’éthanol, peut donc être envisagée. Résine
Type
Avantages
Paraloïd® B72
-
(Copolymère de méthacrylate d’éthyle (70%) et d’acrylate de méthyle (30%))263
Inconvénients
Résines acryliques
264
-
pH neutre
-
Bonne résistance au vieillissement
Tg de PB 72 un peu faible (40° C), ce qui peut
265
provoquer un ramollissement de la résine
-
Transparente
MAIS peut être contré par
-
Incolore
un ajout de PB 44 (Tg : 60° C)267
ou
263
DOWN J. : Adhesive Compendium for Conservation, Canadian Conservation Institute, 2015, p.85 GENIN S. : Etude comparative des Paraloïd B72 et B44, purs ou en mélanges, adaptés au collage de la porcelaine et du verre, Mémoire de fin d’étude La Cambre, 2015, p.26 265 DOWN J. : Op.cit., p.85 267 Le PB44 est souvent mélangée à d’autres résines du même type pour l’adapter aux propriétés demandées selon CHAPMAN S. & MASON D. : « Literature review : The use of Paraloïd B72 as a surface consolid stained glass », JAIC Vol. 42 N°2 article 11, 2003, p.381-392 264
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-
Soluble dans de nombreux solvants -
PB 44 moins souple
(Copolymère de
(acétone, xylène, toluène, acétate
plus ou moins brillant en
méthacrylate de
d’ethyle, etc. )
Paraloïd® B44
-
266
méthyle et
fonction des concentrations
-
Insoluble à l’eau
-
Transparente et incolore268
-
Tg : 65° C269
-
Bonne résistance au
que très peu confirmée
vieillissement270
dans la littérature
d’acrylate de méthyle)
Mowital® B60HH (Butyrale de Polyvinyle)
Résine vinylique
-
271
La force du collage n’est
-
Réversible
scientifique et pourrait ne
-
Mat272 273
pas être adaptée au poids
-
Non sensible à l’eau
de l’œuvre 275.
-
Bonne résistance au cisaillement 274
La résine Mowital® remplit toutes les caractéristiques nécessaires pour la consolidation de l’œuvre. Le fait que le produit soit mat ou sinon moins brillant que le Paraloïd® au séchage est un aspect très intéressant dans ce cas. En effet l’œuvre étant mate et certaines fêlures ouvertes, la brillance du Paraloïd® pourrait être un défaut important. La Mowital® est utilisée dans des restaurations
Mowital® B60 HH
Paraloïd® B72
pour de nombreux matériaux différents tels que le tissu, le stuc ou la céramique, en raison de sa réversibilité, de sa maniabilité et de sa fluidité ainsi que de ses caractéristiques chimiques276 277.
Fig. 151 : Différence de brillance entre la Mowital® B60 HH et le Paraloïd® B72 à 10%
266
BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p. 192 Fiche de sécurité du Mowital B60HH de chez CTS en Annexe 29 p. 312 269 Kuraray : « Mowital® technical data sheet », [Document PDF], Septembre 2013 [En ligne], URL : http://www.kuraray.co.jp/products/plastic/pdf/mowital_sheet01_jp.pdf 270 Tests de vieillissement accéléré sous UV, réalisés par Gilbert Delcroix. LAUREAU, D., Étude et restauration d’une « Vierge à l’Enfant », fragment d’une « Éducation de la Vierge », mémoire de fin d’études, Tours, École supérieure des beaux-arts - cycle conservation-restauration des œuvres sculptées, 2003, p. 105 271 DOWN J. : Op.cit., p.80 272 COURTIADE L. : « Restauration de Sapho ou Le Chant de Raoul Verlet », CeROArt [En ligne], mise en ligne le 19 juin 2012, URL : http://ceroart.revues.org/2596, consulté le 21 juin 2017 273 OIRY M. : « Le trône de Grâce : Etude et la restauration d’une trinité lorraine du XVe siècle », CeROArt [En ligne], URL : http://ceroart.revues.org/1748, consulté le 21 juin 2017 274 THULEAU-MEDHIPOUR V. : Etude et restauration de deux œuvres en terre cuite : un masque féminin du XVIe siècle et une maquette du XIXe siècle, Mémoire de fin d’étude Ecole Régionale des Beaux-Arts de Tours, 1995, p. 128 275 SCHENCK M.: Op.cit., p. 123 276 ANGELI B. et VACCARI M. : « Crocifissione : Scuola tedesca, prima metà del XVI secolo Mantova, Palazzo Ducale », OPD Restauro, 1995, p. 193-198 277 LANDI S. : The textile Conservator’s Manual, Second Edition, Butterworth-Heinemann, 1992 268
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Selon V. LAMARCHE, la Mowital® B60 HH contient moins d’alcool polyvinylique que d’autres produits de la gamme, ce qui limite donc la sensibilité aux effets néfastes de l’humidité278. Choix du solvant L’adhésif Mowital® se prépare généralement dans les alcools et donc souvent dans l’éthanol279. Un temps de prise long est obligatoire pour cette opération puisqu’il est nécessaire que l’adhésif ait le temps de pénétrer dans la fissure pour la consolider convenablement. Par ailleurs, dans le cas de la jarre, la consolidation ne peut se faire que par l’intérieur afin de limiter le risque de taches sur la surface extérieure. Il est donc d’autant plus important que l’adhésif ait le temps de pénétrer parfaitement. Selon V. THULEAU-MEDHIPOUR, un mélange éthanol-autre solvant (70 : 30), tel que l’acétate d’éthyle, permet de rallonger le temps de prise, d’obtenir une évaporation plus lente280 et d’ainsi limiter les bulles dans le film adhésif. Nous avons alors testé les temps de séchage en fonction du solvant afin de convenir de la préparation la plus adéquat pour l’infiltration281 : -
80% éthanol
séchage en dix minutes
-
80% éthanol-acétate d’éthyle (50 : 50)
séchage en dix minutes
-
80% éthanol-acétate d’éthyle (70 : 30)
séchage en dix minutes
Nous n’observons pas d’allongement du temps de séchage et donc du temps de travail avec l’ajout d’acétate d’éthyle. Par ailleurs, celui-ci s’évaporant lentement, il est possible que la résine retienne des solvants lors de son séchage et que la Tg en soit ainsi plus faible et l’adhésif trop souple282. L’utilisation de l’éthanol seul donnant un temps suffisant pour la consolidation des fêlures (dix minutes), notre choix se portera sur le mélange Mowital® B60HH-éthanol. Choix de la concentration La viscosité de l’adhésif est un paramètre important dans le cas d’une infiltration. En effet, il doit parfaitement pénétrer dans la fêlure tout en ayant une infiltration limitée dans la pâte afin de ne pas créer de taches. L’adhésif doit également pouvoir être applicable à l’aide LAMARCHE V. : Etude et restauration d’une vierge à l’enfant dites Madone au Candélabres, bas-relief en stuc polychrome d’après Antonio Rossellino, Mémoire de fin d’étude Ecole régionale des Beaux-Arts de Tours, 1997, p. 51 279 Kuraray : « Mowital® technical data sheet », [Document PDF], Septembre 2013 [En ligne], URL : http://www.kuraray.co.jp/products/plastic/pdf/mowital_sheet01_jp.pdf 280 THULEAU-MEDHIPOUR V. : Op.cit., p. 131 281 Test réalisé à l’aide d’un chronomètre, arrêté lorsque, au toucher, l’adhésif était jugé comme ne pouvant plus être modifié. 282 GENIN S. : Op.cit., p.59 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 141 278
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d’une seringue à insuline. Celle-ci a été choisie pour sa finesse, afin de pouvoir consolider les fêlures les plus étroites, mais aussi de pouvoir introduire l’adhésif assez profondément dans les fêlures plus larges. Il était important de choisir le solvant dans un premier temps puisque celui-ci a une influence sur la viscosité finale de la solution. Nous avons donc réalisé des tests de viscosité afin de choisir la concentration adéquate à la consolidation des fêlures à la seringue. -
test à 20% => l’application est impossible à la seringue, adhésif trop visqueux pour une bonne pénétration
-
test à 10% => l’application est possible à la seringue, viscosité adéquate de l’adhésif, possibilité de faire une ligne fine ; la goutte coule quelques secondes, l’adhésif pourra donc pénétrer.
-
test à 5 % => concentration trop faible pour une adhérence optimale
Fig. 152 : Ligne d’adhésif Mowital® B60 HH à 10% faite à la seringue
L’adhésif choisi pour la consolidation des fêlures par infiltration est donc un Mowital® B60HH à 10% dans l’éthanol. Matériau
Matériel - seringue à insuline
- Mowital® B60 HH à 10%
- bâton cotonné
- éthanol
b. Mise en œuvre Préparation de la solution Préparation de la Mowital® B60 HH à 10% dans l’éthanol (pour 10g de solution : 1g d’adhésif pour 9g d’éthanol) -
Peser la quantité de poudre de Mowital® B60 HH nécessaire
-
Peser la quantité d’éthanol
-
Ajouter le solvant à la poudre
-
Mélanger jusqu’à obtention d’une solution homogène
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Protocole -
Application de l’adhésif le long des fêlures à l’aide d’une seringue (1,2 mm), d’une seule face (intérieure), jusqu’à saturation.
-
Nettoyage des potentiels débordements d’adhésif à l’aide d’un bâton cotonné imbibé d’éthanol.
-
Le séchage total du Mowital® est de 24 heures283.
-
L’infiltration pourra être renouvelée si la première consolidation est jugée insuffisante.
L’infiltration a donc dans un premier temps été réalisée par l’intérieur afin
de
limiter
la
visibilité
de
l’assombrissement des lignes de fêlures. Cependant, l’épaisseur des tessons étant importante, l’adhésif ne pénètre pas assez profondément pour consolider l’ensemble. Il a donc été nécessaire de réaliser une infiltration à partir de l’extérieur également.
Fig. 153 : Infiltration de la résine à la seringue dans la fêlure de la Face C (extérieur)
La fêlure n°2 (Face C) présentait un écart important après la dérestauration : les tessons anciennement collés permettaient de tenir la fêlure. Lors de la dérestauration, celle-ci s’est écartée puisqu’elle n’était plus maintenue. L’adhésif a été infiltré à l’aide la seringue, puis par une légère pression, l’écart a pu être resserré. La fêlure a dans un premier temps été maintenue à la main puis à l’aide de rubans adhésifs (préalablement testés sur la surface) le temps du séchage complet de l’adhésif. Cette technique a permis de réduire l’ouverture de la fêlure et ainsi probablement les ressauts lors de l’assemblage des tessons. Les résidus d’adhésif le long des fêlures ont été minimes. Elles sont nettoyées à l’aide d’un bâton cotonné imbibé d’éthanol.
c. Résultats Il est difficile de quantifier les résultats d’une consolidation et d’en vérifier l’efficacité. L’œuvre devra toujours être manipulée avec précaution. Nous pouvons tout de même affirmer que le traitement a été utile puisqu’il a permis, par l’infiltration de l’adhésif, de lier les deux tessons entre eux, mais aussi de diminuer la largeur de la fêlure n°2. Aucune tache, aucune coulure, aucune brillance n’est apparue autour des lignes consolidées : le traitement est invisible. 283
THULEAU-MEDHIPOUR V. : Op.cit., p. 145
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Fig. 154 : Aspect de la fêlure n°2 lors du constat d’état et après infiltration
Méthode de dérestauration C’est d’un traitement difficilement réversible puisqu’il s’agit d’une infiltration dans un espace très restreint. L’adhésif choisi est donc très stable dans le temps. Dans le cas d’une dérestauration nécessaire, des compresses d’éthanol pourraient être posées le long des lignes de fêlures afin de solubiliser l’adhésif.
5. Le comblement des lacunes L’œuvre comporte plusieurs parties manquantes. Après l’assemblage des tessons désolidarisés, elle présente tout de même une lacune importante sur la face A au niveau du col. De plus, après dérestauration, elle présente une lacune ovale au niveau du bras du personnage. Le comblement des lacunes du col et de la panse aurait alors des fonctions : -
structurelles : il permettrait de renforcer la structure de l’œuvre et d’améliorer sa
conservation - esthétiques et pédagogiques : celui-ci permettra d’améliorer la lisibilité de l’œuvre et sa compréhension puisque comme l’exprime BRANDI, « une lacune, en ce qui concerne l’œuvre d’art, est une interruption dans le tissu figuratif »284. Ces lacunes accrochent le regard et altèrent l’appréciation visuelle de l’œuvre. BRANDI Cesare : Théorie de la restauration, (trad. de l’italien par Colette Déroche), Monum-Editions du patrimoine, s.d. [2001], p. 42 284
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A. Le comblement du col La lacune du col sera comblée par des tessons amovibles car cette technique présente plusieurs avantages : -
elle est plus réversible
-
elle donne un aspect de tesson au comblement, dans la continuité des tessons le comblement sera plus solide :
-
Fig. 155 : Lacune du col
selon KOOB, le plâtre à mauvaise adhérence seul285. Le comblement sera donc détaché puis recollé comme un tesson de l’œuvre. Pour faciliter le remontage, le comblement sera réalisé en deux tessons.
a. Choix des matériaux Cahier des charges -
Non toxique pour le restaurateur
-
Aspect
de
Tesson n°1 assemblé
surface
correspondant à la terre cuite : Comblement amovible n°1
mat, opaque, coloré tel que l’engobe crème, surface non
Comblement amovible n°2
lisse -
Chimiquement stable dans le temps (température, UV) Fig. 156 : Comblement amovible du col
-
Réversible
-
Solidité de la structure et dureté de la surface équivalente
-
Possibilité d’être teinté dans la masse sans perdre ses propriétés
-
Résistance mécanique en accord avec l’œuvre
-
Matériau convenant à la fabrication de tessons amovibles (tenu lors du décollement et compatibilité avec l’adhésif choisi (Mowital B60 HH)
Choix du produit Le plâtre ou le plâtre cellulosique sont très souvent utilisés dans le comblement des terres cuites archéologiques286. Des recherches plus récentes sur les mélanges liant-charge ont démontré que ce mélange pouvait être une solution intéressante également puisqu’il permettait 285
KOOB S. : « Detachable plaster restoration for archaeological ceramics », Recent Advances in the conservation and analysis of artifacts, 1987, p. 63-65 286 BERDUCOU Marie : La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p. 115 BUYS S. et OAKLEY V. : Op.cit., p.198 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 145
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d’ajuster les propriétés optiques par rapport à l’œuvre (matité, opacité, teinte). Cependant, selon nos tests préliminaires, un mélange liant-charge a tendance à fissurer s’il est posé en trop grande épaisseur. Nous ne pouvons donc adapter cette technique à l’œuvre. Il est alors décidé de réaliser une structure dans un matériau solide et stable et de poser en fine couche un liant-charge par-dessus afin d’imiter l’aspect de surface287. Matériau
Polyfilla® enduit intérieur288 Plâtre cellulosique - sulfate de calcium - ether de cellulose - agents retardateurs
Plâtre de Paris Sulfate de calcium semihydraté provenant de la calcination du gypse
Avantages - possibilité de teinter dans la masse - contient de l’éther de cellulose qui allonge le temps d’application par rapport au plâtre - pas de migrations de sels solubles en cas de variation de HR - travail facile avant et après séchage, évite les accidentelles abrasions lors des opérations de finition de la surface 289 - possibilité de faire des tessons amovibles - pH neutre (7,6 en pâte290) - faible retrait - facilement réversible par apport d’humidité ou de solvants et par une action mécanique, plus réversible que le plâtre
- dureté et porosité proche du matériau céramique292 - coefficient d’expansion thermique proche de la céramique293 - cinq-dix minutes de travail - surface lisse - pH : 7,5 - 8294
Inconvénients - risque d’empoussièrement de la céramique lors du ponçage. Ce qui ne pose pas de problème dans le cas de tessons amovibles puisqu’ils seront poncés en dehors de l’œuvre. - dureté plus grande que les céramiques fragiles291 - moins résistant que le plâtre
- contient des sels solubles pouvant migrer dans la pâte - création de poussières lors du poncage, difficiles à éliminer - « peut être considéré comme trop rigide par rapport aux sollicitations provoquées par l’assemblage céramique/plâtre »295 - plus difficilement réversible, l’apport d’eau peut faire migrer des sels solubles dans les pores de la céramique - mauvaise résistance au variations hygrométriques et thermiques - retrait
Il existe bien entendu d’autres possibilités intéressantes pour former une structure (tel que le Moltofill®), mais qui, en raison des difficultés à s’en procurer, n’ont pas pu être testées. 287
Se référer à la partie « Traitement de surface » p. 160 BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p. 198 289 CAVARI Fernanda : « Conservazione e restauro della ceramica archeologica », Introduzione allo studio della cerámica in archeologia, Siena 2007, p.63-84, p.74 290 ROUCHET Frédéric : Rapport d’étude et de traitement d’une sculpture en terre cuite : L’ange à la guirlande du Musée du Louvre, Mémoire de fin d’étude ENP-IFROA section sculpture, 1998, p. 146 291 BEUKEN A., BUSSIENNE G. et DRIESMANS D. : « Les acryliques en dispersion aqueuse chargées avec des microballons de verre pour le comblement de terres cuites à basse température », ARAAFU Cahier technique N°18, p.32-37, p.33 292 KOOB S. : « Detachable plaster …» Art.cité., p. 63-65 293 CAVARI Fernanda : Art.cité., p.63-84, p.74 294 BEUKEN A. : Etude critique et expérimentales sur les matériaux de comblement pour les terres archéologiques à basse température, Bruxelles, ENSAV La Cambre, Juin 2008, p. 10 295 BEUKEN A. : Ibid., p. 11 288
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Le Polyfilla® intérieur296 nous semble donc intéressant pour le comblement des lacunes. Il répond en effet à l’ensemble du cahier des charges. Le Polyfilla®, qui se présente sous la forme d’une poudre blanche, est préparé dans les conditions recommandées par le fournisseur, c’est-à-dire une part d’eau pour deux parts de Polyfilla®. Nous savons en effet, par des tests préliminaires, qu’ajouter plus d’eau que la recommandation fragilise grandement le matériau une fois sec. La concentration de pigments La structure en Polyfilla® sera légèrement teintée afin de se rapprocher de la couleur de la pâte. La teinte ne devra pas forcement être exacte car elle sera recouverte d’une couche de revêtement par la suite. Selon nos tests297, une concentration de pigments allant jusqu’à 10% ne semble pas porter atteinte à la Fragment original
solidité du plâtre. Les pigments ocre rouge et ocre jaune298
dans
différentes
Mowital® B60 HH à 10%
proportions sont testés afin de trouver la teinte se rapprochant le plus de celle de la pâte. Cependant,
la
concentration
maximum de 10% de pigment ne
Paraloïd® B72 à 10% 60 - 40 50-50 40 - 60 Proportions ocre rouge - ocre jaune Fig. 157 : Choix de teinte du comblement par rapport à celle de la pâte
semble pas suffisant pour atteindre la teinte de la pâte. Nous avons donc appliqué un primaire (Paraloïd® B72 à 10% et Mowital B60 HH à 10%) sur le matériau afin de saturer légèrement la couleur299. La teinte obtenue après application du primaire Mowital® B60 HH sur le mélange 60 ocre rouge – 40 ocre jaune est satisfaisante ; c’est donc celle que nous choisirons pour le comblement. La concentration de PVA (Acétate de Polyvinyle) Selon KOOB300, modifier le plâtre en ajoutant des retardateurs de séchage par exemple, ou le teinter, aurait pour conséquence de l’affaiblir. Le Polyfilla® (plâtre modifié) est en effet moins résistant qu’un plâtre. Il est possible de le renforcer en ajoutant un adhésif vinylique301 302
296
dans l’eau de gâchage*.
Fiche de sécurité du Polyfilla® en Annexe 30 p. 316 Se référer aux tests de concentration de pigments et de PVA en Annexe 31 p. 322 298 Pigments Laverdure & fils 299 Nous avons vérifié que malgré le primaire et donc l’obstruction de certains pores du plâtre, le revêtement de surface prévu adhérerait correctement sur le Polyfilla®. Celui-ci ne porte en effet pas atteinte à cette adhérence. 300 KOOB S. : « Detachable plaster …» Art.cité., p. 63-65 301 BUYS S. et OAKLEY V. : Op.cit., p. 198 302 BERDUCOU M. : Op.cit., p.469 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 147 297
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Cependant selon nos tests, l’ajout de plâtre ne semble pas fragiliser le matériau : la force nécessaire à la rupture de celui-ci est stable malgré l’ajout d’additif. Suivant ces observations et le fait que le comblement ne supportera pas le poids de l’œuvre (puisqu’il se situe au niveau du col), il ne semble pas nécessaire d’ajouter d’adhésif pour le renforcer. Matériau
Matériel -
Cire dentaire Film plastique Parafilm® Pinceau siliconé Ruban adhésif Tesa®303 Bol à plâtre Spatule souple Scalpel Pinceau
-
Polyfilla® intérieur Eau déminéralisée
-
Pigments ocre jaune et ocre rouge Laverdure & fils
-
Mowital® B60HH
Rendre le comblement amovible Afin de retirer aisément le comblement pour le rendre amovible, il est nécessaire de placer un intermédiaire entre les tranches et le plâtre, pour que celui ne pénètre pas dans les pores. Selon KOOB, un primaire PB72 à 10% sert d’intermédiaire et permet de boucher les pores de la pâte. S’il s’agit d’une céramique très poreuse, il est possible de faire jusqu’à 3 couches304. Cependant, la pose d’un film plastique Parafilm®305 permettra de faciliter le retrait du comblement afin de le rendre amovible. Il est posé sur la tranche et parfaitement appliqué dans les rugosités de la pâte afin d’en prendre parfaitement l’empreinte. Une fois le comblement retiré, le film se détachera simplement : la tranche sous-jacente sera propre et pourra accueillir le collage du tesson.
303
Ruban adhésif préalablement testé sur la surface, inoffensif ; fiche technique du Tesa® en Annexe 32 p. 323 KOOB S. : « Detachable plaster …» Art.cité., p. 63-65 305 Fiche de sécurité du film plastique Parafilm® en Annexe 33 p. 324 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 148 304
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1 : Pose du Parafilm® sur les bords de la lacune
2 : Pose de la cire dentaire en tant que support du comblement
3 : Application de la structure en Polyfilla®
4 : Retrait de la structure du comblement et du Parafilm®
5 : Travail du Polyfilla® et collage à la Mowital® B60HH Fig. 158 : Etapes de création des comblements amovibles
Le comblement sera effectué en deux tessons afin de faciliter le collage de ceux-ci par la suite. Un comblement en un seul tesson poserait des problèmes de dépouilles et contre-dépouilles de la forme, créant des blocages lors de l’assemblage.
2
1
Fig. 159 : Prémontage de l’œuvre
Fig. 160 : Choix de positionnement des tessons amovibles
b. Mise en œuvre Protocole préparation du mastic de comblement -
Peser la quantité de Polyfilla® nécessaire
-
Ajouter 10% de pigments à la poudre (60% ocre rouge + 40% ocre jaune)306
-
Ajouter l’eau de gâchage (une part d’eau pour deux part de poudre)
-
Mélanger de façon à obtenir une pâte
Pour 10 g de Polyfilla® nous ajoutons 1 g de pigment, soit 0,6 g d’ocre rouge et 0,4 g d’ocre jaune. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 306
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Protocole -
Assemblage des tessons à l’aide d’un ruban adhésif Tesa
-
Application précise du Parafilm® sur les tranches en contact avec le futur comblement. Prendre une empreinte parfaite de la rugosité des tranches à l’aide d’un pinceau siliconé.
-
Prise de la forme du col avec une plaque de cire à l’intérieur et la reporter au niveau de la zone à combler ; la fixer solidement avec un ruban adhésif
-
Préparation du mélange Polyfilla®- 10% de pigments telle qu’énoncée ci-dessus
-
Application de la pâte obtenue sur le support en cire, avec un léger retrait (pas au niveau de la surface) dans la partie 1
-
Prise du plâtre durant vingt/trente minutes et travail au scalpel
-
Après séchage complet (24 heures), pose d’un Parafilm® sur la tranche du comblement 1
-
Pose du Polyfilla® sur le support en cire, avec un léger retrait (pas au niveau de la surface) dans la partie 2
-
Prise du plâtre durant vingt/trente minutes
-
Démontage des tessons et des tessons amovibles
-
Retrait du Parafilm®
-
Travail des comblements en Polyfilla® en dehors de la pièce pour ne pas créer de poussière de plâtre (retrait d’un millimètre des deux côtés du comblement
-
Application d’un primaire Mowital® B60HH à 10% sur la surface poncée pour ajuster la couleur Les tessons sont solidement assemblés à l’aide de ruban adhésif. Ils ne doivent pas
bouger, sous peine de créer un tesson avec une forme erronée et donc impossible à assembler par la suite. Le Parafilm® est ensuite appliqué sur toutes les tranches de la lacune à l’aide du pinceau siliconé. Il est important que celui-ci soit parfaitement plaqué sur la rugosité des tranches pour que le comblement soit précis et se positionne bien dans le tesson lors du collage. Le contour des lacunes est protégé par du ruban adhésif afin de ne pas tacher la surface lors de l’application du mastic.
Fig. 161 : Parafilm® appliqué sur les tranches Léa BIZOUARN
Fig. 162 : Création du tesson n°1
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Les deux tessons sont fabriqués l’un à la suite de l’autre, sans démonter l’œuvre afin de conserver la même forme. Le premier tesson est fabriqué, travaillé à la spatule souple et scalpel avant séchage complet. Il est ensuite retiré et laissé à sécher en dehors de l’œuvre. Après 24 heures, il est replacé sur l’œuvre et le Parafilm® est appliqué sur la nouvelle tranche créée pour pouvoir réaliser le
Fig. 163 : Travail des tessons amovibles
second tesson, de la même façon. Après le séchage complet des tessons, ils sont repositionnés sur l’œuvre prémontée préalablement protégée de plastique ; ils sont alors travaillés plus précisément à l’aide de rifloirs et de papier de verre en faisant attention à ne pas abimer la terre cuite. Un retrait d’un millimètre environ est créé des deux côtés des tessons. Une fois la forme satisfaisante, une couche de Mowital® B60 HH à 10% est appliqué sur toute la surface des tessons.
c. Résultats La réalisation des tessons s’est déroulée sans encombre. L’empreinte réalisée à la cire dentaire a permis de créer des tessons ayant une forme appropriée. Les tessons ont été travaillés avec précision très facilement grâce à la plasticité du matériau employé. La couleur obtenue après application du primaire, correspond à la teinte de la pâte nue. Ce comblement a permis au col de retrouver son intégrité et une continuité visuelle. Afin de continuer dans cet objectif, un revêtement sera par la suite appliqué afin de reproduire l’engobe, et les décors pourront également être repris.
Fig. 164 : Tessons amovibles
B. Le comblement de la panse Après dérestauration, la lacune de la panse est de taille importante (3,6 x 2,5 cm) et est très visible. Elle sera comblée afin de réduire sa visibilité. Ce comblement devra être effectué avant le collage des tessons du col, afin d’y accéder par l’intérieur avec plus de facilité. Fig. 165 : Lacune de la panse Léa BIZOUARN
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a. Choix des matériaux Le cahier des charges étant le même que celui du comblement du col et dans un souci d’homogénéité des traitements, le même matériau sera utilisé (Polyfilla® teinté avec 10% de pigments et ajusté avec un primaire de Mowital B60 HH). Matériau
Matériel - Cire dentaire
-
Polyfilla® intérieur
- Bol à plâtre
-
Eau déminéralisée
- Spatule souple
-
Pigments ocre jaune et ocre rouge Laverdure & fils
- Ruban adhésif Tesa - Pinceau
-
Mowital® B60 HH 10 %
b. Mise en œuvre La forme et la localisation de la lacune ainsi que l’orientation des cassures ne permettant pas de réaliser un comblement détachable, les tranches de la pièce devront être entièrement protégées par un primaire avant l’application du plâtre cellulosique. Celui-ci permettra de rendre le comblement réversible. Un primaire de Mowital® B60HH à 10 % dans l’éthanol sera préalablement posé sur les tranches afin d’empêcher l’absorption de l’eau du plâtre et d’isoler le plâtre des tranches pour bloquer les potentiels sels solubles. Une plaque de cire sera positionnée à l’intérieur de l’œuvre et le mastic sera posé par l’extérieur. La courbe du bras sera reproduite. Protocole - Pose d’un primaire Mowital® B60 HH à 10% sur les tranches - Séchage durant 24 heures - Pose de la plaque de cire par l’intérieur - Pose de ruban adhésif le long des bords de cassure afin de les protéger - Préparation et application du mastic Polyfilla® teinté
- Travail du plâtre - Application d’un primaire Mowital® B60 HH à 10% pour ajuster la couleur Le Polyfilla® teinté, mélangé dans les proportions recommandées par le fournisseur, se présente sous la forme d’une pâte. Elle est appliquée, à niveau, dans la lacune à l’aide d’une spatule métallique souple. Une fois le plâtre commençant à prendre, un retrait d’un millimètre est effectué à l’aide d’un scalpel tout en suivant la courbe du bras. Le plâtre étant encore humide, il ne laisse pas de poussière sur la surface.
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Après 1 heure, la plaque de cire est retirée. Le comblement sera laissé à sécher durant 24 heures. La bulle importante a été comblée par la suite avec le même mastic. Le comblement est poncé afin d’ajuster la forme ; la surface poreuse est alors protégée de plastique afin d’empêcher la poussière
de
plâtre
de
s’y
A l’application
Création d’un retrait
Fig. 166 : Comblement de la lacune de la panse
introduire.
c. Résultats La lacune de la panse est désormais comblée dans un matériau respectueux de la céramique, à l’inverse de l’ancien comblement. La panse a ainsi retrouvé une continuité visuelle. Le traitement de la surface (revêtement, reprise des décors) permettra d’augmenter cet aspect.
Fig. 167 : Comblement de la lacune de la panse
Bien que la lacune soit un témoin de l’histoire de l’œuvre puisqu’un « contexte d’enfouissement, […], un événement du passé s’expriment à travers cette carence »307, la lacune a également un impact visuel plus ou moins important selon les pièces. Dans le cas de l’œuvre étudiée, les lacunes provoquaient une rupture visuelle non négligeable qu’il était nécessaire d’atténuer afin d’apprécier l’œuvre dans son ensemble. 307
ALAMI-VIGUIE Sara, « Comblement et mise en teinte en conservation-restauration appliqués aux objets issus des fouilles archéologiques de la MAFKF : réflexion et application », Le carnet de la MAFKF. Recherches archéologiques franco-koweïtiennes de l’île de Faïlaka (Koweït) [En ligne], mis en ligne le 15 juillet 2015, URL : http://mafkf.hypotheses.org/1170, consulté le 24/03/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 153
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Cette première étape de comblement remplit le rôle structurel de celui-ci. Le traitement de surface qui suit sera principalement esthétique. Cependant, les lacunes étant également une source d’information historique308, elles ne doivent pas être dissimulées au public. C’est cet équilibre entre esthétisme et histoire que nous tâcherons de trouver lors de la réalisation du traitement de surface. Méthode de dérestauration Le matériau a été posé sur directement sur l’œuvre, avec un intermédiaire entre les deux (Mowital B60 HH à 10%). Celui-ci permet de bloquer la pénétration du plâtre dans les pores de la pâte et donc de le rendre plus réversible. Il sera alors possible de ramollir le matériau de comblement à l’eau puis, par action mécanique, de l’éliminer. Le primaire aura protégé la pâte.
6. Le collage des tessons L’œuvre comprend actuellement six tessons indépendants ainsi que les deux tessons amovibles créés préalablement, tous situés au niveau du col. Ceux-ci doivent être réintégrés à la forme principale afin de restituer la lisibilité intégrale de l’œuvre, mais également de rétablir sa solidité. En effet, un seul quart du col est
Fig. 168 : Œuvre avant collage
actuellement présent sur la pièce, ce qui créé de nombreuses tensions au sein de la céramique et la fragilise en particulier lors des manipulations. Ce traitement comprend donc le collage du tesson n°1, des cinq tessons désolidarisés lors de la dérestauration et des deux tessons amovibles. Le collage sera réalisé par contact en raison de la forme ronde et lourde et de la porosité de la pâte qui n’est pas compatible avec un collage par infiltration d’adhésif.
Fig. 169 : Les huit tessons à assembler 308
Les lacunes ont été identifiées comme apparues au moment de la fouille et sont donc les témoins de l’enfouissement de la pièce et de sa découverte en archéologie. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 154
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a. Choix des matériaux Cahier des charges -
Compatibilité avec la terre cuite : l’adhésif doit être compatible avec la porosité de la pâte (viscosité), il doit également avoir un pouvoir adhésif inférieur au pouvoir cohésif de la terre cuite afin de ne pas créer d’arrachement de matière
-
Tg compatible avec les conditions de conservation des réserves et les vitrines d’exposition (spots) du musée : supérieure à 40°c
-
Stable chimiquement : nous souhaitons que la restauration soit conservée le plus longtemps possible et toujours dans le respect de l’œuvre ; nous cherchons donc un adhésif stable dans le temps mais aussi aux UV de la lumière.
-
Réversibilité : utilisation d’un adhésif thermoplastique
-
Non toxique pour le restaurateur
-
Compatibilité avec les autres traitements : la solubilité du produit doit être différente du produit utilisé pour le fixage de l’engobe (Funori® et Esturgeon). Si un des deux traitements doit être dérestauré pour une raison quelconque, le second traitement pourra ainsi rester en place. Le produit choisi ne doit donc pas être sensible à l’eau.
-
Compatible avec le collage par contact
-
Respect de l’aspect de surface : matité
Choix de l’adhésif Comme expliqué précédemment309, les adhésifs traditionnellement utilisés dans le collage de terres cuites archéologiques et répondant à nos critères sont le Paraloïd® (B72 ou B44) ou la Mowital® B60 HH. Le cahier des charges de ce traitement est relativement identique à celui de la consolidation des fêlures. Il est important, au niveau des produits utilisés, de rester cohérent dans l’ensemble d’une restauration. Par ailleurs, utiliser un produit identique à la consolidation des fêlures permettra, en cas de dérestauration future, d’utiliser une seule méthode pour les deux traitements. Le choix de la Mowital® B60 HH semble également compatible pour ce traitement. Celle-ci est non soluble dans l’eau mais soluble dans les alcools donc réversible et peu sensible à l’humidité. Elle a une Tg élevée (65° C) ce qui est un point positif pour les conditions de conservation et d’exposition future. Son principal intérêt dans notre cas, par rapport au Paraloïd®, est que cette résine est mate. Les fêlures et les tessons possédant des écarts à certains endroits, les tranches sont parfois légèrement visibles. Un adhésif brillant comme le Paraloïd® aura donc tendance à se voir, ce qui, sur la surface mate de la terre cuite, ressortira fortement. La matité de la Mowital® est donc une caractéristique qui terminera notre choix. 309
Se référer à la partie « Consolidation des fêlures traversantes » p. 138 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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De plus, la résine étant thermoplastique, il est possible, après séchage, de légèrement chauffer les tranches de l’œuvre afin de ramollir l’adhésif et de rectifier si besoin le positionnement de certains tessons. Cependant selon J. DOWN, l’apport de chaleur sur les PVB les rend moins solubles et donc moins réversibles310. Notre but sera donc de réaliser le collage sans avoir à remodifier les positions des tessons par la suite. Cependant, cet adhésif est parfois controversé en raison de sa force de collage qui ne serait pas adaptée aux pièces lourdes. Cependant dans notre cas, la partie à coller se situe au niveau du col, partie qui ne supporte pas l’ensemble du poids de l’œuvre. Cette partie n’est pas non plus celle par laquelle l’œuvre est saisie lors d’un déplacement ou d’une présentation ; elle est plutôt portée par la panse qui est plus solide. La résistance à la rupture n’a pas besoin d’être exceptionnelle dans notre cas : ce petit inconvénient de l’adhésif Mowital® n’est donc pas éliminatoire ici et pourra par ailleurs être amélioré par le primaire. Pour tous les avantages qu’elle comporte, notre choix se portera donc l’adhésif vinylique Mowital® B60HH. Choix du solvant Le choix de l’adhésif est aussi important car il va déterminer le temps de prise et la viscosité de l’adhésif. L’adhésif Mowital® se présente sous forme d’une poudre blanche qui se dissout dans les alcools. Elle est ainsi habituellement préparée dans l’éthanol ou l’acétone. Dissoudre la Mowital® dans l’éthanol permet d’éliminer la formation de bulles grâce à son évaporation lente. Nous avions déterminé, lors de tests pour la consolidation des fêlures 311, que l’ajout d’acétate d’éthyle ne permettait pas d’allonger le temps de séchage, que l’éthanol confère un temps de travail suffisant pour un collage (dix minutes à 80% de solvant) et qu’utiliser de l’acétate d’éthyle pourrait affaiblir la Tg. Notre choix se porte donc sur la solution Mowital® B60HH-éthanol. Choix de la concentration Dans le cas d’un collage, la Mowital B60 HH est en général préparée entre 20 et 30% selon la viscosité souhaitée. L’adhésif doit parfaitement mouiller la surface des tranches sans pour autant être trop liquide pour ne pas pénétrer en profondeur dans les pores de la pâte.
310
DOWN J. : Adhesive Compendium for Conservation, Canadian Conservation Institute, 2015, p.80 Se référer à la partie « Consolidation des fêlures traversantes » p. 138 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 311
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V. THULEAU-MEDHIPOUR312 utilise un butyral de polyvinyle à 20% pour coller des tessons de terre cuite ; tout comme Marianne SCHENCK313 qui, pour ses tests technico-scientifiques, utilise un Mowital B60 HH dilué à 20% qu’elle juge avoir la viscosité adéquate au collage de terres cuites. Ce choix nous semble aussi correspondre pour le collage de l’œuvre étudiée. Après avoir réalisé un test de viscosité, la Mowital® B60HH à 20% dans l’éthanol nous semble avoir une viscosité parfaite pour assembler les tessons ainsi qu’une mouillabilité* adéquate. Le primaire314 Un primaire* sera posé sur les tranches des tessons indépendants et des tessons amovibles afin de consolider les premiers, de rendre imperméables les seconds, d’augmenter la réversibilité et d’uniformiser la surface des tranches afin d’augmenter l’adhérence. De plus, selon certaines sources, la Mowital® manquerait de résistance à la rupture. En effet, Marianne SCHENCK, lors de son étude sur la recherche d’un primaire renforçant le collage à la Mowital®, affirme que sur la terre cuite la force nécessaire à la rupture d’un collage à la Mowital® B60 HH sans primaire est de seulement 7,0 N315. Selon elle, un primaire de Mowital® à 2% permettrait de tripler la résistance du joint de colle, et un primaire de Paraloïd® B44 à 10% de la doubler. Ceux-ci permettent d’augmenter la résistance du collage tout en ayant une viscosité adaptée à l’application et en ne faisant pas une épaisseur trop importante pouvant créer un ressaut après le collage. En s’appuyant sur cette étude, adaptée à notre œuvre, nous choisirons un primaire de Mowital® B60 HH à 2% qui permet de renforcer le collage, tout en créant un film de protection fin sur les tranches. De plus, les tessons et les tranches étant fragiles, il n’est pas nécessaire que le joint de collage soit trop résistant. En effet, nous cherchons toujours qu’en cas de nouvelle rupture, le joint de colle cède avant le tesson : la force cohésive de la terre cuite doit toujours être supérieure à la force adhésive de la colle. Le primaire sera réalisé dans l’éthanol comme l’adhésif afin d’éviter une évaporation trop rapide et donc un changement de concentration. Il sera posé au pinceau pour recouvrir toute la surface des tranches.
312
THULEAU-MEDHIPOUR V. : Etude et restauration de deux œuvres en terre cuite : un masque féminin du XVIe siècle et une maquette du XIXe siècle, Mémoire de fin d’étude Ecole Régionale des Beaux-Arts de Tours, 1995, p. 128 313 SCHENCK M. : Etude et Conservation-Restauration d’un dolium en terre cuite datant du Ier siècle et provenant du site gallo-romain d’Oedenburg (Alsace), « Recherche d’un primaire d’adhésion permettant d’améliorer le collage au Mowital® B60 HH sur les terres cuites de grand volume », Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016, p. 176-208 314 SCHENCK M. : Loc.cit. 315 Lors de l’application de l’adhésif, le primaire est réactivé et son pouvoir collant est associé à celui du nouvel adhésif, renforçant ainsi le collage. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 157
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Matériau
Matériel - Agitateur thermique - Pinceau doux - Bâtonnet de bambou - Ruban adhésif Tesa®
- Mowital® B60HH - Ethanol
- Verrerie
b. Mise en œuvre Préparation de l’adhésif (20%) et du primaire (2%) - Peser la quantité de poudre de Mowital® B60 HH nécessaire316 - Peser la quantité d’éthanol - Ajouter le solvant à la poudre - Mélanger doucement à l’aide d’un agitateur thermique pour un mélange constant Protocole -
Prémontage de l’œuvre à l’aide d’un ruban adhésif respectueux de la terre cuite afin de déterminer l’ordre de montage le plus adapté à la forme des tessons.
-
Application du primaire sur les tranches à l’aide d’un pinceau souple en poil de soie. Le primaire devra sécher 24 heures avant de continuer le traitement.
-
Application de l’adhésif à l’aide d’un bâton de bambou au centre de la tranche et tout le long de celle-ci.
-
Assemblage des tessons selon l’ordre de montage déterminé et application d’une pression quelques secondes.
-
Nettoyage les résidus d’adhésif qui auraient débordé le long des tranches à l’aide d’un bâton cotonné légèrement imbibé d’éthanol.
-
Positionnement des rubans adhésifs (préalablement testés) à cheval sur les deux tessons afin de perpétuer la pression. Les rubans sont coupés au scalpel sur une plaque de faïence, à la taille désirée.
-
Le collage devra sécher 24 heures à température ambiante. Les rubans adhésifs seront retirés à la suite de ce délai317. L’ensemble des tranches (tessons, pièce principale, tessons amovibles) est préalable-
ment recouvert du primaire à l’aide d’un pinceau souple. Les tessons sont laissés à sécher plusieurs heures. Ils sont ensuite assemblés selon l’ordre de montage (Fig. 168) prédéterminé. Celui-ci permet d’assembler les tessons en prévoyant à l’avance les difficultés liées aux angles, aux dépouilles et contre-dépouilles des tessons. Pour 10 g d’adhésif à 20 % : 2 g de Mowital® B60HH et 8 g d’éthanol Pour 10 g de primaire à 2% : 0.2 g de Moxital® B60HH et 9,8 g d’éthanol 317 THULEAU-MEDHIPOUR V. : Op. cit., p. 145 316
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L’ensemble est ainsi assemblé et la pression est maintenue par des rubans adhésifs
2 1
Tesa® durant 24 heures. En raison de la fêlure n°1 présentant un écart important, un ressaut est apparu entre
8
e
le tesson assemblé en 4 position et celui
6
7
assemblé en 6e position. Un serre-joint a
5 4
été placé sur les deux tessons afin de les
3
placer au même niveau. Après la polymérisation complète de l’adhésif, plus aucun ressaut n’était visible.
Fig. 170 : Plan d’assemblage des tessons
Fig. 171 : Application de l’adhésif sur la tranche préalablement recouverte d’un primaire
Fig. 172 : Tessons après collage
c. Résultats Le collage de l’œuvre s’est bien déroulé : les tessons ne présentent pas de
4
ressauts sur la Face A (face la plus 6
importante de l’œuvre), seul un léger ressaut est repérable au toucher dans le creux col-panse de la Face C. Il est dû aux différentes fêlures et déformations issues de la casse de l’œuvre. Cependant il est tout de même très peu visible et, lorsque que les
Fig. 173 : Ressaut disparu après polymérisation
fêlures et les lignes de cassures seront comblées, celui-ci n’apparaitra plus du tout. L’adhésif était un choix intéressant car il ne présente en effet aucune trace visible dans les lignes de cassures ou le long des lignes de cassures (nettoyées après traitement). Léa BIZOUARN
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Le collage de l’œuvre a permis de lui redonner une solidité et une stabilité qu’elle avait perdu lors de sa casse. Il contribue également à renforcer les fêlures. Par ailleurs l’œuvre a retrouvé une lisibilité complète, sa forme d’origine et son intérêt formel. Le traitement de surface, qui peut désormais être réalisé, terminera de lui redonner sa lisibilité et son intérêt décoratif.
Face B
Face A
Face C
Face D
Fig. 174 : Vue d’ensemble après collage
Méthode de dérestauration L’adhésif utilisé (Butyral de polyvinyle Mowital® B60 HH) est un adhésif réversible dans l’éthanol. Des vapeurs d’éthanol permettront de décoller la pièce en douceur. Des gels ou compresses d’éthanol sur les tranches permettront d’éliminer les résidus d’adhésif.
7. Le traitement de surface Le traitement de surface a une fonction esthétique, le rôle structurel étant rempli par les comblement en Polyfilla®. Le traitement de surface est le processus final de la restauration. Il est un des aspects les plus importants de celle-ci puisqu’il détermine en grande partie l’aspect esthétique final de l’œuvre. Nous cherchons une technique, un matériau permettant de fondre le comblement dans l’ensemble de l’œuvre, sans empiéter sur la surface d’origine et sans dissimuler la présence d’une lacune. Le traitement de surface comprend donc la restitution de l’aspect de surface de l’œuvre (couleur, rugosité, matité de l’engobe) et la reprise des décors brun-rouge dans un deuxième temps. La retouche terminera de redonner tout son intérêt esthétique à l’œuvre.
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A. Le revêtement : imitation de l’engobe Le revêtement de surface a pour but de recouvrir les comblements amovibles et le comblement de la panse, dans un matériau dont la texture et la couleur se rapprochent de celles de l’engobe. Le comblement du col est en effet très important dans l’aspect final de l’œuvre puisqu’il se situe sur la partie la plus intéressante esthétiquement et celle qui sera la plus observée. Sa couleur et son aspect de surface sont donc des enjeux importants de la restauration du col. Il nous semble intéressant de teinter le revêtement dans la masse et d’obtenir une teinte en dessous de celle de l’engobe. Il est nécessaire d’être juste dans la coloration de celui-ci puisque, pour plus de facilité, nous ne souhaitons pas y apporter de retouche colorée ensuite. Par ailleurs la texture du revêtement devra elle aussi être proche de celle de l’engobe. En effet la texture d’une surface participe à la réflexion de la lumière et donc à son rendu plus ou moins brillant. « Une surface lisse va réfléchir la lumière dans une direction bien déterminée grâce aux lois de Snell - Descartes, tandis qu'une surface rugueuse va la disperser dans plusieurs directions »318.
Surface lisse : rayons en sens unique
Surface rugueuse : rayons divergents
Fig. 175 : Différences de réflexion* de la lumière en fonction de la surface
Un écart dans la brillance rendra le comblement très visible et attirera l’œil. Il est donc important que sa rugosité se rapproche de celle de l’œuvre. Nous chercherons donc un matériau possédant une rugosité proche de celle de l’œuvre et pouvant être teinté dans la masse de façon précise.
a. Choix des matériaux Cahier des charges -
Non toxique pour le restaurateur
-
Aspect de surface proche de celui de l’engobe (matité, couleur, rugosité, opacité)
-
Possibilité d’être teinté dans la masse sans perdre ses propriétés
-
Adhérence sur le Polyfilla®
DOMURADO V. : Etude et modélisation de la réflectance de la surface d’objets réels, mémoire de fin d’étude option traitement des images, [En ligne], URL : http://domurado.pagesperso-orange.fr/Memoire/#part2, consulté le 30/03/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 161 318
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Chimiquement stable et en particulier un bon vieillissement aux UV : le matériau étant
-
placé sur l’extérieur de l’œuvre, il va subir les UV de la lumière du jour et des lumières d’exposition ; il est donc important que celui-ci ait la meilleure résistance aux UV possible. -
Réversible
-
Dureté de Mohs inférieure à celle de l’engobe : les matériaux utilisés doivent toujours être moins solide, moins dur ou moins fort que la pièce.
Choix des produits Nous avons vu lors du comblement que, dans le cas de pièces archéologiques, des mélanges liant-charge étaient envisageables et même très intéressants par la grande variété de choix optique possible. En raison de l’épaisseur des tessons de l’œuvre étudiée, nous avions écarté cette possibilité pour réaliser un comblement entier. La structure en Polyfilla® permet donc de réduire cette épaisseur et de donner une structure solide au comblement. Il nous est désormais possible de terminer le comblement avec ce mélange liant-charge. Choisir le liant puis les charges permet de sélectionner et d’adapter les propriétés optiques à l’œuvre restaurée319 : la brillance, l’opacité, la couleur, la texture, la densité, la force d’adhérence, sont ainsi des propriétés qu’il est possible de déterminer. La nature et les propriétés du mastic dépendent beaucoup du liant utilisé. Selon V. BECHOUX320, en additionnant différents liants aux microbilles de verre creuses, il est possible d’obtenir trois mastics de natures différentes : -
un mastic rigide à partir de résines thermodurcissables telles que l’Epoxy 302-1.
-
un mastic flexible à partir de résines thermoplastiques telles que le Paraloïd® B72
-
un mastic léger à partir de résines acryliques en dispersion dans l’eau telles que le Primal™ WS24
Sélection du liant Les liants acryliques en solution ou en dispersion sont adaptés aux œuvres en terre cuite. Par ailleurs, ils présentent les avantages d’être souples, non toxiques et peu coûteuses. Celui-ci va faire varier l’adhérence au substrat, la brillance, la dureté, la facilité de travail (application, ponçage). Nous avons donc sélectionné quatre liants acryliques, cités dans la littérature scientifique comme souvent utilisés, afin d’en comparer les propriétés.
319
ROUCHET Frédéric : Rapport d’étude et de traitement d’une sculpture en terre cuite : L’ange à la guirlande du Musée du Louvre, Mémoire de fin d’étude ENP-IFROA section sculpture, 1998, p. 135 320 BECHOUX V. : Utilisation des mousses et des pâtes syntactiques pour combler les lacunes des poteries archéologiques, CeROArt [En ligne], mis en ligne le 09 octobre 2008, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/657, consulté le 13 février 2018, consulté le 28/03/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 162
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay Avantages
Inconvénients
Paraloïd® B44 Copolymère de méthacrylate de méthyle et d’acrylate de méthyle
Elastique, Tg > 40° C, facilement réversible, bon vieillissement, peut devenir opaque et mat une fois chargé
Grande tendance à faire des bulles en fonction du solvant (surtout acétone)
Primal™ WS24321 Copolymère acrylate d’éthyle, méthacrylate de méthyle et méthacrylate d’éthyle Dispersion colloïdale322
Plutôt élastique, facile d’utilisation (préparé en solution aqueuse), réversible, bonne adhérence, séchage en 48-72h à 40%, coefficient de dilatation proche de celui de la terre cuite (évite les fissures dans la TC en cas de variations HR)323
Tg 46° C324, jaunit légèrement au vieillissement, devient plus cassant quand il est chargé325
Aquazol® 500 Polymère thermoplastique constitué de poly(2-ethyl2-oxazoline)
Bonne adhérence, pas de changement de couleur au vieillissement
retrait important (moins que le 50 ou 200), 5-6 jours à 40%, poisse légèrement
Mowital® B60HH Polymère de vinylbutyrale (PVB)
Uniformité de traitement avec le collage, moins brillant que le Paraloïd® Compatible avec le collage (Mowital® B60 HH)
Retrait possible lors de l’évaporation des solvants326
Nous souhaitons obtenir une pâte facile à appliquer et à travailler (texture chantilly épaisse327). Des tests préliminaires nous ont permis de déterminer des proportions pour chaque liant : -
Paraloïd® B44 à 40% dans éthanol-acétone328 (40-60) : 70 % liant – 30 % charge
-
Primal™ WS24 : 2,5 parts pour 1 part charge
-
Mowital® B60HH 20 % dans éthanol : 70 % liant – 30 % charge
-
Mowital® B60HH 20 % dans eau : 70 % liant – 30 % charge
-
Aquazol® 500 50% dans l’eau329 : 50 % liant – 50 % charge
Afin de comparer les propriétés des liants, nous utiliserons la même charge pour ce premier test. Une comparaison des charges sera effectuée après la sélection du liant. Nous choisissons une charge opaque, mate et ayant un retrait assez faible. Les microbilles de verres pleines sont reconnues pour le comblement de terres cuites archéologiques. Elles donnent un aspect mat, rugueux et translucide. Nous y associons la poudre de marbre pour augmenter la dureté et l’opacité du mélange.
RUIZ P. : « L’Aquazol et ses applications », Conservation Restauration des Biens culturels (crbc) n°31, 2013 Solution liquide contenant des particules en suspension de l’ordre du nanomètre. (10 -9) 323 BEUKEN A., BUSSIENNE G. et DRIESMANS D. : « Les acryliques en dispersion aqueuse chargées avec des microballons de verre pour le comblement de terres cuites à basse température », ARAAFU Cahier technique N°18, p.32-37, p.33 324 BEUKEN A. : Etude critique et expérimentales sur les matériaux de comblement pour les terres archéologiques à basse température, Bruxelles, Mémoire de fin d’étude ENSAV La Cambre, Juin 2008, p. 16 325 BEUKEN A., BUSSIENNE G. et DRIESMANS D. : Op.cit., p.33 326 BUYS S. et OAKLEY V. : The Conservation and Restauration of Ceramics, Routledge, 1996, p.191 327 BEUKEN A., BUSSIENNE G. et DRIESMANS D. : Op.cit., p.35 328 Le Paraloïd® B72 testé dans l’acétone-éthanol afin de limiter l’apparition de bulles. 329 L’Aquazol est réalisé dans l’eau pour plus grande facilité d’application. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 163 321 322
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Les mélanges seront posés sur des échantillons de Polyfilla® teinté afin de voir leur transparence ainsi que leur adhérence au matériau. Les poser sur toute la surface permettra de voir leur retrait au séchage. Le mélange sera posé tel quel sur la moitié de l’échantillon et sur l’autre moitié sera posé le mélange teinté avec un pigment afin de voir s’il est possible de le teinter dans la masse.
Charges
Liants
microbilles de verre pleines + poudre de marbre (50 ; 50)
Part liantcharge pour obtenir une pâte
Bulles
Couleur/ matité /opacité
Aspect au toucher
Travail
Paraloïd® B44 40% (40-60 éthanolacétone)
30 - 70
Non
Satiné/ opaque
Rugueux
Primal™ WS24
40 - 60
Non
Mat /opaque
Rugueux
Aquazol® 50% eau
50 - 50
Oui
Brillant / translucide
Légèrement rugueux et poisseux
50 - 50
Quelquesunes
Légèrement translucide / légèrement brillant
Légèrement rugueux
Mowital® B60 HH 20% dans éthanol Mowital® B60 HH 20% dans eau
50 - 50
Application facile, poncage moyen (changement de couleurs important) Application et poncage faciles Application facile, difficulté de poncage Application facile, difficulté de poncage
N’adhère pas à la surface
Le Primal™ WS 24330 est sélectionné pour sa matité, son opacité et sa rugosité, l’absence de bulles ainsi que sa facilité de ponçage. Il nous semble être le liant le plus approprié pour le revêtement de l’œuvre étudiée. De plus, sa réversibilité à l’eau lui confère un avantage supplémentaire. En y associant différentes charges, nous pourrons adapter ses propriétés optiques. Sélection des charges Après avoir sélectionné le liant, nous allons comparer différentes charges afin de sélectionner l’aspect le plus proche de celui de l’œuvre. Nous cherchons donc une charge rendant le mélange opaque, mat, légèrement rugueux, relativement fin et ne présentant pas de retrait. Nous allons alors tester quatre charges différentes seules ou en mélange, citées dans la littérature scientifique, conseillées par des restaurateurs ou présélectionnées par notre expérience personnelle : -
silice331 : texture légèrement rugueuse, opaque
-
poudre de marbre332 (< 32 µ) : opaque, densité élevée
Primal™ WS 24 vendu par Kremer, fiche de sécurité en Annexe 34 p. 326 Silice C400 broyée vendue par Ceradel 332 Carbonate de calcium micronisé aussi nommé blanc de meudon. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 330 331
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-
onyx synthétique333 : densité élevée, opaque
-
microbilles de verre pleines334 (50-70 µ) : rugueux335, translucide, plus durs que les microsphères creuses, aspect gris
La charge microbilles de verres pleines 50-70 µ est une intéressante pour sa texture légèrement rugueuse mais ne peut être utilisée seule dans notre cas en raison de son côté poussiéreux au toucher et de son aspect translucide et légèrement grisé. Elle est donc mélangée aux autres charges afin d’augmenter la rugosité de celles-ci. Charge Poudre de marbre (< 32 µ) – microbilles de verre pleine (50-70 µ) 50-50 Poudre de marbre (< 32 µ) – microbilles de verre pleine (50-70 µ) 70-30 Poudre de marbre (< 32 µ) – microbilles de verre pleine (50-70 µ) 30-70
Couleur/matité /opacité
Aspect au toucher
- Mat Rugueux - Opaque Similaire à l’œuvre - Petits points de après ponçage différentes couleurs - Mat - Opaque - Quelques bulles - Petits points de différentes couleurs - Satiné - Opaque - Petits points de différentes couleurs
Onyx synthétique
- Mat - Opaque - Uniforme
Onyx synthétique microbilles de verre pleine (50-70 µ) 50-50
- Mat - Opaque - Uniforme
Rugueux, plus grossier
- Légèrement rugueux, plus fin après ponçage - Plus poussiéreux Assez lisse
Travail
- Application facile - Ponçage facile
- Application facile - Poncage facile
- Application facile - Poncage facile
- Application facile - Plus difficile au ponçage
Légèrement rugueux - Application facile Similaire à l’œuvre - Ponçage facile après ponçage
Silice
- Mat - Opaque - Petits points blancs
Très rugueux Similaire à l’œuvre après ponçage
Silice – microbilles de verre pleine (50-70 µ) 50-50
- Mat - Opaque - Petits points blancs
Rugueux Similaire à l’œuvre après ponçage
Silice – microbilles de verre pleine (50-70 µ) 70-30
- Mat - Opaque - Trop aéré (petites bulles) - Petits points blancs
Rugueux Similaire à l’œuvre après ponçage
Vieillissement336 (2 semaines)
- Application facile - Ponçage moyen - éclaircit beaucoup au ponçage (blanchit) - Application facile - Ponçage facile - éclaircit beaucoup au ponçage (blanchit)
Léger jaunissement provenant du Primal™ WS24 mais peu visible sur les comblements teintés
- Application facile - Ponçage facile - éclaircit beaucoup au ponçage (blanchit)
Hydroxyde d’aluminium vendu par Tiranti Oxydes de silicium transformés en microbilles, vendues par CTS 335 HELAS Corinne : Le comblement dans le biscuit de porcelaine, approche et étude comparative de matériaux de comblements adaptés, mémoire de fin d’études, Ecole supérieure des arts visuels de la Cambre, 2015, p.61 336 Mise en vieillissement dans une chambre de vieillissement accéléré : les échantillons sont soumis durant deux semaines aux UVB, principaux responsables de la photo-oxydation*. Ceux-ci sont produits par le néon Reptisum® 15.0 T8 produisant 15% d’UVB. Photographies avant et après vieillissement en Annexe 35 p. 331 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 165 333 334
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Le mélange poudre de marbre337 (< 32 µ) – microbilles de verre pleines (50-70 µ) (30-70) est sélectionné pour sa texture légèrement rugueuse, son aspect (matité, opacité) proche de celui de la terre cuite, ainsi que par les irrégularités intéressantes dans la couleur (petits points blancs et ocres). Afin de nous assurer que le mastic créé avait une dureté inférieure à celle de l’engobe, nous avons réalisé un test de dureté à l’aide de l’échelle de Mohs. Il s’est avéré facilement rayable au scalpel, ce qui correspond à une dureté de 4. La dureté de l’engobe étant de 5 sur l’échelle de Mohs338, celle du mastic est donc bien inférieure. Le mastic Primal™ WS 24 – poudre de marbre (< 32 µ) – microbilles de verre pleines339 (50-70 µ) (proportions 30-70) sera donc utilisé pour réaliser le revêtement au niveau des comblements. Nous devons désormais trouver la couleur correspondant à celle de l’engobe. Celui-ci n’ayant pas une teinte homogène, les variations de couleurs dans le mélange lui permettront de s’adapter aux différentes teintes. Une légère retouche, aux petits points par exemple, pourra être faite par la suite si la teinte doit être ajustée à certains endroits. Après des tests préalables à différentes concentrations, le mélange sera teinté à l’aide de pigments Laverdure & Fils d’ocre jaune afin de rendre la couleur crème et de terre d’ombre naturelle afin de légèrement « salir » la couleur. En ce qui concerne le revêtement à l’intérieur du col, des pigments ocre jaune et ocre rouge seront utilisés. Les teintes devront être un demi-ton en dessous de celle de l’œuvre afin que le comblement soit discernable tout en se fondant dans l’ensemble de l’œuvre. La partie la plus travaillée et donc la plus observée de l’œuvre étant le visage, il nous semble en effet qu’un comblement avec un ton en dessous du ton d’origine attirerait trop l’œil. Un demi-ton nous apparait donc comme étant un bon compromis entre discrétion et visibilité. Matériel
Matériau
- spatule souple
- poudre de marbre (< 32 µ)
- ruban adhésif Tesa
- microbilles de verre pleine 50-70 µ
- pinceau doux
- Primal™ WS 24
- rifloirs
- pigments ocre rouge, ocrer jaune, terre
- papier de verre
d’ombre naturelle Laverdure & fils
- récipient en verre
- eau déminéralisée
b. Mise en œuvre Après avoir protégé les contours des lacunes, le mastic est appliqué à niveau à la spatule souple en métal pour plus de facilité d’application. Le premier revêtement est réalisé sur le 337
Poudre de marbre de chez CTS ; fiche de sécurité en Annexe 36 p. 332 Se référer au récapitulatif des tests du constat d’état en Annexe 4 p. 240 339 Microbilles de verre pleines de chez CTS, en Annexe 37 p. 334 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 338
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comblement de la panse, puis sur le comblement extérieur du col, l’intérieur du col, et enfin les lignes extérieures de fêlures et de cassures. La pose à la spatule donne un aspect grossier qu’il est nécessaire de poncer, après séchage complet, pour ajuster la forme et adapter la texture à celle de l’œuvre. Pour cela, des rifloirs sont utilisés dans un premier temps puis un papier de verre grains 120, déterminé d’après nos tests préliminaires comme donnant une rugosité satisfaisante. Les poussières de mastics sont éliminées à l’aide d’un pinceau doux. Au ponçage, le comblement prend un aspect blanchi, qui est contré par le passage d’un coton imbibé d’eau déminéralisée. Il retrouve ainsi sa teinte de pose.
Fig. 176 : Dégrossissement de revêtement au rifloir
c. Résultats Après la pose du revêtement en mastic teinté, nous obtenons un rendu uni pour l’œil. Celui-ci permet d’estimer l’œuvre dans son ensemble sans que le regard soit attiré par la lacune. Elle est cependant discernable par une teinte légèrement différente. Le public peut ainsi facilement repérer les zones restaurées. Nous avons donc obtenu le résultat déterminé préalablement. L’ensemble des lignes de cassures et fêlures extérieures ont finalement été comblées dans un souci d’esthétisme général, mais également parce que cela permet de consolidation de la forme. Les lignes intérieures sont laissées visibles car elles ne sont pas inesthétiques et présentent un aspect de l’histoire de l’œuvre. Il s’agit d’une pièce esthétiquement importante, ce qui nous a poussé à combler les lignes extérieures, mais pour laquelle l’histoire prédomine ; c’est pour cela que les lignes intérieures peuvent rester visibles. En cas d’exposition surélevée (au niveau du regard), elles ne seront pas visibles, et en cas d’exposition basse, n’étant pas extrêmement importantes, elles ne seront pas gênantes. Par ailleurs, laisser les lignes de cassures telles quelles à l’intérieur permet de donner une information sur la fragilité de l’œuvre au manipulateur ne la connaissant pas.
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Fig. 177 : Vues du comblement du col après traitement de surface
Fig. 178 : Comblement des lignes de cassures
Fig. 179 : Comblement de la panse après traitement de surface
Méthode de dérestauration Le Primal™ WS24 est une résine en dispersion colloïdale dans l’eau ; mais elle devient insensible à ce solvant une fois polymérisée. L’acétone permettra un ramollissement ; le retrait par action mécanique sera ainsi facilité.
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B. La reprise des décors Les lacunes du col et de la panse ont été comblées dans une texture et une teinte proches de celles de l’œuvre. La teinte du traitement de surface a en effet une teinte un demi-ton en dessous de la teinte de la surface de l’œuvre. Dans un souci esthétique et pédagogique, nous allons reprendre les décors brun-rouge. La finalité d’une retouche est « de réinsérer l’œuvre à sa vrai place esthétique (cacher les lacunes) et sa vraie place historique (laisser les usures, facteurs d’authenticité de l’œuvre) »340. C’est en effet par cette deuxième réintégration chromatique que l’œuvre retrouvera son potentiel esthétique. Cependant, comme pour le traitement de surface, l’objectif n’est pas de faire disparaitre la lacune qui fait partie de son histoire. En effet, l’œuvre a autant un intérêt esthétique par son aspect anthropomorphe et décoratif, qu’une importance historique. Il est donc nécessaire de concilier ces deux aspects. La réflexion portera donc en amont sur les techniques permettant de rendre la reprise des décors discernable par le public, respectueuse pour l’œuvre sans attirer l’œil lors de sa lecture341. C’est le principe d’une retouche muséale : dans ce cas la retouche doit être discernable à moins de quinze centimètres de l’œuvre, tout en étant invisible à deux mètres de distance342. Malgré le fait que nous possédons des informations sur les décors de l’œuvre, il est impossible de les connaitre dans l’exactitude. Nous sommes cependant en mesure de réaliser une interprétation critique du travail de l’artiste343. Il est en effet possible de déterminer le mouvement du pinceau en analysant le décor tracé par l’artisan. Nous tenterons ensuite de la reproduire.
Fig. 180 : Interprétation possible des décors PAIN Sylvia : « Restauration et Couleur, Constat d’état : approche d’une définition », ARAAFU Cahier technique n°15, 2007 341 Choix réalisés lors des discussions avec David VERULHST, conservateur en charge de l’œuvre étudiée. 342 GARACHON Isabelle : « Visibilité de la restauration, lisibilité de l’œuvre », 5e colloque international de l’ARAAFU, Paris, 13-15 juin 2002, p. 131-137, p. 133 BRANDI Cesare : Théorie de la restauration, (trad. de l’italien par Colette Déroche), Monum-Editions du patrimoine, s.d. [2001], p.41 343 PHILIPPOT Paul : « Le problème de l’intégration des lacunes dans la restauration des peintures », Pénétrer l’art, restaurer l’œuvre, Groeninghe, 1990, p.415 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 169 340
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a. Choix des matériaux Il nous est nécessaire de déterminer l’aspect final désiré (discernable ou « illusionniste »344) et donc la technique avant de choir les matériaux à utiliser. En effet, chaque rendu possible nécessite des matériaux spécifiques. Choix de la technique Nous cherchons donc un moyen de rendre la retouche discernable lorsque l’observateur se trouve près de l’objet mais invisible à plus d’un mètre. Le traitement de surface reprenant l’engobe a également été pensé dans cette optique : il possède une texture proche tout en étant différente, ainsi qu’une demi-teinte en dessous de l’engobe. La technique des petits points nous semble donc intéressante pour répondre à notre besoin. Il s’agit d’une technique de retouche issue de celle du trattegio mise au point en 1945-1950 par l’Institut Central de Restauration (ICR). Elle permet, à distance, par la juxtaposition de lignes verticales colorées, d’intégrer la lacune dans la surface originale345.
Fig. 181 : Technique du trattegio
La technique des petits points consiste, dans la même idée, à la « juxtaposition de petits points de couleurs différentes donnant à la retouche une profondeur et une vibration »346. L’œil va ainsi combler les lacunes en faisant une synthèse colorée (à la manière des impressionnistes), tout en pouvant discerner, de près, l’original du retouché par la facture employée. Par ailleurs, nous pouvons voir que l’abrasion des décors brun-rouge a provoqué l’apparition de points blancs correspondant à l’engobe sous-jacent. La technique des petits points permettra de conserver la
Fig. 182 : Pichet restauré avec la technique des petits points
visibilité du traitement de surface en dessous.
Une restauration est dite illusionniste lorsqu’elle est invisible, au plus proche de l’aspect de surface, de la brillance et de la couleur de l’œuvre. 345 GRENDA Magdalena : « Tratteggio retouch and its derivatives as an image reintegration solution in the process of restoration », CeROArt [En ligne], mise en ligne le 18 novembre 2010, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1700, consulté le 21 mars 2018. 346 Restaur’Arte : La restauration de tableau, [En ligne], URL : https://restaurarte.fr/peinture-tableau/, consulté le 20/03/18 344
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La différence de teinte permet souvent de créer la distinction avec la pièce originale (un ton en dessous). Cependant, comme nous l’avons vu dans la première partie du traitement de surface, le comblement du col est situé dans la zone principale de l’œuvre. Une différence de teinte, même d’un ton, attire le regard et gêne la lisibilité du reste du visage. Nous avons donc choisi de reproduire la teinte des décors brun-rouge, et de créer la distinction restaurationoriginale seulement par la technique employée. Par ailleurs, le demi-ton de différence au niveau du traitement de surface permettra de déterminer les zones restaurées. La technique de retouche aux petits points nécessite une grande précision d’exécution : la taille des points, l’espacement, la répartition des couleurs doivent être très rigoureuses afin d’obtenir un rendu homogène. Cahier des charges des matériaux -
non toxique pour le restaurateur
-
respectueux de l’aspect de surface de l’œuvre : mat ou légèrement satiné
-
facilement réversible
-
opacité
-
stable dans le temps (UV, température, humidité)
-
adhérence avec le substrat (Primal™ WS 24 chargé)
-
compatible avec la technique des petits points
Choix du médium de retouche En restauration de terres cuites, les peintures aquarelles sont souvent utilisées pour leur aspect mat après séchage, leur stabilité dans le temps et leur grande réversibilité. Cependant elles ne sont pas compatibles avec la technique des petits points déterminée précédemment. En effet, l’aquarelle se réactive à chaque apport d’eau, ce qui fonderait les points les uns dans les autres à chaque nouveau point posé, perdant alors l’aspect « petits points » de la technique. Il faudrait alors qu’aucun point ne se touche, ce qui n’est pas le principe de celle-ci. D’autre part, les médiums* acryliques chargés de pigments sont également très souvent utilisées pour la retouche. Elles peuvent être faites maison à l’aide d’un liant acrylique. Les mediums disponibles ont des propriétés très variées permettant d’ajuster le film de peinture final aux besoins (brillance, translucidité, épaisseur). Mais elles sont également disponibles de manière préparées dans le commerce, comme par exemple les tubes acryliques de marque Golden. Il s’agit d’un mélange de pigments, d’une résine acrylique servant de liant et d’eau pour diluer. Elle présente de nombreux avantages tels que : -
la simplicité d’emploi : en tubes prêts à l’emploi
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-
la grande variété des teintes et des couleurs (80 couleurs)347 et leur mélange facile
-
le retardateur de séchage de la gamme Open qui permet un temps de travail suffisant (cinq à dix fois supérieur aux acryliques classiques)348
-
la finesse
-
son utilisation régulière en restauration
-
la réversibilité à l’éthanol et l’acétone (aussi bon après vieillissement)349
-
la non toxicité
-
son très bon vieillissement à la lumière350
Après des tests sur la céramique, nous pouvons voir qu’elles permettent de réaliser la technique souhaitée : leur texture permet une mise en œuvre facile, elles adhèrent très bien au substrat, elles possèdent un pouvoir couvrant satisfaisant et elles ont un aspect mat ou légèrement satiné au séchage ce qui correspond aux décors de l’œuvre. Ce dernier aspect est important puisque « les différences de brillance, même minimes, créent inévitablement des différences de clarté »351 et peuvent alors rendre la retouche trop visible. Par l’ensemble de ces critères et des résultats aux tests préalables, les acryliques fines Golden Open352 nous semblent être un matériau adéquat pour la retouche des décors. Les teintes utilisées seront principalement des terres (terre de sienne naturelle, terre de sienne brûlée, terre d’ombre brûlée). Matériel
Matériau
- pinceaux à retoucher martre kolinsky353 (½, 0)
- acryliques Golden Open
- Godets
- eau déminéralisée
b. Mise en œuvre Afin d’isoler le comblement de la retouche, nous avons posé un vernis de protection très fin. Il permet de légèrement combler les pores du matériau afin que les acryliques ne pénètrent
347
Le Géant des Beaux-Arts : Acrylique Golden Open, [En ligne], URL : https://www.geant-beauxarts.fr/acrylique-golden-open.html, consulté le 24/03/18 348 Ibid. 349 DEHAUT Elodie : « L’Enlèvement d’Hélène : restauration d’une majolique d’Urbino », CeROArt [En ligne], mis en ligne le 09 mai 2013, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3105, consulté le 27/03/18 350 Une étude d’E. DEHAUT sur les acryliques Golden® démontre le bon vieillissement de ceux-ci aux UV (seul le jaune de cadmium moyen imitation Golden® bleuit) (DEHAUT Elodie : Art.cité, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3105) 351 BOUYER Eve : « Quelques pistes de réflexion sur la restauration perceptible des vases céramiques antiques », CEROArt [En ligne], mis en ligne 17 Novembre 2010, URL : http ://journals.openedition.org/ceroart/1618, consulté le 20/03/17 352 Fiche de sécurité des acryliques Golden Open en Annexe 38 p. 336 353 Les poils de ces pinceaux proviennent de la queue du vison de Sibérie. Ils permettent d’obtenir un pinceau très fin, souple et qui conserve sa forme à long terme. Léa BIZOUARN
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pas trop profondément et ne fusent pas. Après des tests préalables nous avons appliqué un Mowital® B60 HH à 2% afin qu’il soit fin, ne change ni la couleur ni la matité du comblement. Après avoir visuellement déterminé la zone à retoucher, des petits points sont appliqués. Nous commençons par la teinte la plus claire, puis les valeurs sont montées jusqu’à obtention de la teinte souhaitée : un demi-ton en dessous de la teinte des décors. La couleur des décors variant en fonction de l’emplacement, la nuance est adaptée à la zone retouchée.
Fig. 183 : Etapes de retouche (valeurs montées en plusieurs passages)
Après la reprises des décors brun-rouge, la couleur du comblement teinté paraissait trop clair à certains endroits. Nous avons alors choisi de « salir » la couleur, c’est-à-dire de légèrement la brunir afin qu’elle se fonde plus dans le reste de l’œuvre. L’œuvre possède encore des taches d’encrassement très incrustés que nous avions choisi de conserver lors du nettoyage354, nous avons tenté de les reproduire sur les comblements. En ce qui concerne le comblement de la panse, la retouche fut plus délicate. En effet, celui-ci possède une auréole jaunâtre irréversible provenant de l’ancien comblement en résine noire355. Le comblement a été teinté dans la masse de la couleur de l’engobe, et non de la couleur de cette tache : après retouche, celui-ci dénotait donc de façon importante par rapport à ses contours. Nous avons alors décidé de jaunir et de « salir » légèrement le comblement afin de faire disparaitre les limites nettes, de fondre le comblement dans l’ensemble de l’œuvre et qu’il n’attire plus l’œil.
Se référer à la partie « Elimination de l’encrassement général et atténuation de la couche brune dans la partie supérieure » p. 116 355 Se référer à la partie « Le retrait du comblement en résine » p. 113 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 173 354
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Avant retouche
Reprise des décors aux petits points
Reprise de la couleur du comblement Fig. 184 : Retouche du comblement de la panse
c. Résultats A la suite de la retouche, nous obtenons un décor uniforme : à un mètre de distance la retouche aux petits points se fond dans l’ensemble de l’œuvre et l’œil n’est plus attitré par les manques de couleur. A vingt centimètres, les petits points sont visibles et les zones retouchées sont parfaitement identifiables. Le résultat est homogène, l’œuvre a retrouvé une lisibilité générale et le spectateur peut désormais observer la céramique sans que son œil ne soit attiré sur les comblements.
Fig. 185 : Détails des lignes de cassures retouchées Léa BIZOUARN
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Fig. 186 : Détails de la retouche du col
Méthode de dérestauration Le retrait de la retouche est très facile à l’éthanol ou à l’acétone : un coton imbibé délicatement frotté sur la surface permettra de retirer la retouche sans dérestaurer le traitement au Primal™ WS 24.
8. La conservation de l’étiquette L’œuvre possède une étiquette 2,2 x 1,6 cm. Elle présente une écriture réalisée au crayon graphite : « Ancón. Côte centrale du Pérou ». Elle était attachée à l’ancienne boite de conservation à l’aide de deux rubans adhésifs récents posés perpendiculairement l’un à l’autre. La volonté du conservateur était de retirer l’étiquette de la boite et de la conserver à part, ou si possible, de la replacer sur l’œuvre.
Fig. 187 : Etiquette accrochée à l’ancienne boite
A l’aide de la chaleur d’un sèche-cheveux356, nous avons délicatement décollé le ruban adhésif de la boite en carton de conservation. L’étiquette est désormais désolidarisée de la boite mais est toujours recouverte des deux rubans adhésifs. Afin de dissoudre la colle de ceux-ci, nous avons réalisé un cataplasme de pulpe de papier imbibée d’eau- éthanol (50-50), sur le revers de l’étiquette durant cinq minutes. Les solvants doivent pénétrer dans le papier et dissoudre l’adhésif. L’opération a été renouvelée trois fois, sans que les rubans adhésifs ne se détachent. L’opération étant peu efficace et l’encre utilisée commençant à perdre de son intensité, celle-ci est arrêtée.
356
Les étapes de conservation-restauration de cette étiquette ont été réalisées en collaboration avec les étudiants (Promo 2018) de la section Arts Graphiques de l’Ecole de Condé. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 175
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L’opération a tout de même permis de ramollir l’adhésif du ruban adhésif supérieur. Il a pu être décollé délicatement. Le deuxième étant posé directement sur le papier de l’étiquette, tenter de le retirer provoquerait l’arrachement du papier et la perte des informations écrites. Nous avons donc décidé de le laisser. Il est seulement découpé précisément à la forme de l’étiquette.
Fig. 188 : Etiquette recto-verso après dérestauration
Pour
des
questions
conservation357,
esthétiques
l’étiquette
et
n’est
de pas
repositionnée sur l’œuvre. Elle est donc conservée dans une pochette fabriquée en papier Mylar®358 de 100 µm. Il s’agit d’un film polyester possédant une remarquable chimiques
résistance (solvants,
aux
contraintes
acides),
mécaniques
(déchirement, étirement) et thermiques
359
Fig. 189 : Etiquette dans la pochette Mylar®
(jusqu’à 230° C)360. Il ne contient aucun additif ou colorant pouvant se détériorer : il est chimiquement stable. Ce matériau permettra de protéger l’étiquette durablement.
9. Les préconisations de conservation « Par conservation préventive, on entend l'ensemble des actions directes ou indirectes menées en faveur des collections qui ont pour but de prévenir les dégradations et de prolonger la durée de vie »361 des œuvres. Celle-ci comprend le contrôle de l’environnement, les préconisations de manipulation, d’exposition et de transport. Ces conseils doivent être adaptés à chaque œuvre, en fonction de ses matériaux constitutifs et des restaurations effectuées.
Aucun emplacement discret, non nuisible à la lecture de l’œuvre et à la bonne conservation de l’étiquette n’a pu être déterminé. 358 Fiche de sécurité du Mylar® en Annexe 39 p. 341 359 MARTEYN Anne : « Les films polyesters transparents : nature, sélection et usages en conservation », Actualités de la conservation n° 7, avril-septembre 1998, [En ligne], URL : http://multimedia.bnf.fr/actus_conservation/cn_act_num07_art2.htm, consulté le 12/04/18 360 Professional Plastics : Mylar® polyester film, [En ligne], URL : https://www.professionalplastics.com/fr/MYLARFILM.html, consulté le 12/04/18 361 BNF : « Conservation : fiches pratiques », [En ligne], URL : http://www.bnf.fr/fr/professionnels/conservation_fiches_pratiques.html, consulté le 03/05/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 176 357
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A. Température et humidité La céramique cuite n’est pas un matériau hygroscopique, c’est-à-dire qu’il sensible aux variations de température ou d’hygrométrie, à conditions bien sûr qu’elles ne soient pas extrêmes (feu ou inondation). Il est tout de même nécessaire de contrôler l’environnement pour une conservation optimale dans le temps de l’œuvre et de sa restauration. Ainsi les matériaux utilisés lors des traitements, bien que choisis pour leur stabilité, sont parfois sensibles à certaines conditions. Ainsi l’adhésif Mowital® B60HH ne doit, par exemple, pas être exposé à une température supérieure à 60°C362. Une température comprise entre 18 et 23°C et une humidité relative comprise entre 47% et 53% seraient idéales pour une majorité d’objets et ceci avec des variations de l’humidité relative ne dépassant pas ±2% par jour363. Les réserves ethnographiques du MHN de Lille sont contrôlées et stables : la température est entre 18-20°C et l’humidité relative est de 45-50 %, ce qui correspond aux conditions optimales de conservation pour la céramique.
B. Exposition à la lumière L’œuvre en elle-même n’est pas réellement sensible à la lumière : il est ainsi recommandé, pour les matériaux non-sensibles tels que la céramique ou la pierre, une lumière dotée d’une puissance de 300 lux364 avec un maximum de 75 Watts/lumen de lumière ultraviolette365. Selon le conservateur, les conditions d’éclairage au MHN de Lille ne dépassent pas 80-100 lux. En ce qui concerne la peinture acrylique, elle n’est pas sensible à la lumière du jour et aux UV. Cependant, après plusieurs années, le noir complet peut légèrement obscurcir les teintes. La boite de conservation transparente permettra de laisser passer la lumière des réserves afin de prévenir ce phénomène.
C. Manipulation La manipulation de l’œuvre doit se faire à deux mains, en prenant soin de saisir l’œuvre par la panse et non par le col. En effet, bien que le collage du col soit solide, il est important dene pas créer de tension sur cette zone. Par ailleurs, il est nécessaire de prendre garde aux frottements lors de la manipulation.
362
CTS : « Mowital B60HH », [En ligne], URL : https://www.ctseurope.com/fr/scheda-prodotto.php?id=2432, consulté le 05/02/18 363 C2RMF : Ibidem 364 « Unité d'éclairement lumineux correspondant à l'éclairement provoqué par un flux lumineux uniformément réparti sur une surface dans la proportion de un lumen par mètre carré » (CNRTL : « Lux », [En ligne], URL : http://www.cnrtl.fr/definition/lux, consulté le 03/05/18) 365 Ontario ministry of Tourism, culture and sport : « Standards for community museums in Ontario », [En ligne], URL : http://www.mtc.gov.on.ca/en/museums/museums_standards.shtml#4; consulté le 03/05/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 177
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Il est préconisé de porter des gants lors de la manipulation de l’œuvre afin de limiter l’apport de graisse, de sels ou d’acides de la peau. Les gants en latex ou en coton permettront une bonne adhérence sur la surface.
D. Soclage Le soclage est un outil de conservation préventive en situation d’exposition : il permet de protéger l’œuvre de manière indirect en assurant sa stabilité dans la vitrine de présentation. Il permet également, par sa discrétion, de mettre l’objet en
Fig. 190 : Manipulation correcte de l’œuvre
valeur. Dans le cas de la céramique chancay étudiée, le principal objectif est de présenter l’œuvre à la verticale en ne dissimulant pas sa base encrassée, témoin de son positionnement en contexte funéraire. Comme expliqué dans la proposition de traitement, nous avons deux possibilités de présentation. Un socle creux transparent est très souvent utilisé dans les musée péruviens pour présenter les œuvres chancay à fond ovoïde. Il s’agit d’une plaque de plexiglass366 thermoformée. Il présente les avantages d’être un matériau totalement transparent, léger, et insensible aux UV. Il permet de présenter l’œuvre de façon discrète en mettant la base en valeur ; cependant pour assurer sa stabilité, le socle devrait être plutôt large (à l’inverse du
Museo municipal de Chancay Fig. 191 : Œuvre chancay sur un socle transparent
socle présenté en Fig. 191), ce qui la dissimulerait. Un socle en métal présente une base de soutien sur laquelle l’œuvre est posée, une tige en métal et des pattes à deux niveaux soutiennent l’arrière (Fig. 190). Il est généralement réalisé en acier, totalement sur mesure. Il s’adapte ainsi parfaitement à l’œuvre pour lui assurer une grande stabilité, mais également aux contraintes d’exposition (positionnement dans la vitrine, etc.). Il présente donc les avantages d’être discret tout en jouant un véritable rôle de conservation pour l’œuvre en assurant sa stabilité. Cependant le fait qu’il soit totalement sur
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Polyméthacrylate de méthyle (PMMA) Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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mesure induit le désavantage d’être très coûteux puisque réalisé seulement par des professionnels. Dans le cas de ces deux possibilités de soclage, il sera très important de porter une attention particulière aux parties en contact avec la céramique. En effet, un soclage mal
Pattes ajustées, en métal recouvert de mousses protectrices
adapté ou possédant de mauvaises protections peut également être un danger pour l’œuvre : il pourrait rayer sa surface. Les parties du socle en contact avec la céramique, et en particulier les
Socle creux en bois, métal ou plexiglass
arêtes, doivent donc toutes être recouvertes d’un matériau respectueux de la surface céramique, tel que des petites mousses discrètes. Une fine mousse en polyéthylène ou polyuréthane (même si elle n’est pas utilisable
Fig. 192 : Socle en métal envisagé pour l’œuvre
sur le long terme) apporteraient la souplesse et la douceur nécessaire au repos de la pièce sur le socle.
E. Transport Une boite de stockage a été effectuée à l’arrivée de l’œuvre à l’école : celle-ci est prévue pour le stockage de l’œuvre à long terme dans les réserves du musée mais également pour les éventuels transports. L’œuvre est actuellement positionnée dans la boite sur un coussin et maintenue par deux sangles. Cependant elle n’est pas suffisamment callée pour supporter un transport : la boite actuelle doit donc être adaptée. Du papier de soie non teinté sera positionné autour de la céramique pour que celle-ci ne bouge pas lors des mouvements durant le transport. Les mousses en polyéthylène, déjà positionnées sous l’œuvre et sur les parois de la boite, amortiront les potentiels chocs et les vibrations.
F. Nettoyage En cas de dépoussiérage nécessaire, nous préconisons l’utilisation d’un pinceau doux propre et sec. L’utilisation d’eau ou de tout autre solvant est totalement déconseillée car elle pourrait altérer les restaurations effectuées.
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traitement de surface367
Avant restauration
Après dérestauration et nettoyage
Après comblement et collage
Photographies finales après
Photographies de l’œuvre selon les étapes de restauration
Photographies de l’œuvre (quatre faces) après restauration en Annexe 40 p. 342 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 367
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Conclusion L’observation méticuleuse de l’œuvre nous a, dans un premier temps, permis de comprendre l’objet : les choix formels, techniques, esthétiques, iconographiques de l’artisan ; mais également de dresser l’état actuel de la jarre et d’interpréter les étapes de sa « vie » avant son arrivée à l’atelier. Cette étude approfondie de l’objet lui-même permet de comprendre son histoire, de considérer tous les intérêts et les valeurs de l’objet qu’ils soient esthétiques, historiques, documentaires, pédagogiques, etc., et par la suite d’envisager la conservation-restauration de manière intellectuelle. Celle-ci a, lors de la proposition de traitement, été pensée selon l’ensemble des principes déontologiques régissant la profession : durabilité, innocuité, réversibilité ; mais également dans l’optique de respecter l’Etat Idéal de l’œuvre, à savoir son aspect lors de son utilisation en tant que récipient à offrandes. Après une longue phase de dérestauration et de nettoyage qui a permis à la jarre de retrouver son aspect esthétique d’origine, sa structure matérielle a été protégée par une consolidation des fêlures et un fixage partiel de la surface fragile. Le collage et le comblement amovible ont rendu à l’œuvre sa continuité formelle, alors que le traitement texturé de la surface comblé et la retouche lui ont rendu une lisibilité esthétique. Toutes ces étapes de conservation-restauration ainsi que les matériaux utilisés ont été documentés et réalisés en accord avec le conservateur de l’objet, mais également en prenant en compte ses futures conditions hygrométriques de conservation. Après un long travail de documentation, de recherche, de réflexion, qu’il a été difficile de condenser dans ce mémoire, nous pouvons aujourd’hui affirmer que la jarre a retrouvé sa stabilité matérielle, ainsi que l’intérêt esthétique et formel que lui avait octroyé l’artisan à sa création, son aspect typique de la céramique chancay. La boite de conservation conçue pour être spécialement ajustée à l’œuvre et des conditions de conservation adaptées assureront sa pérennité. Enfin, cette étude et la conservation-restauration de la jarre chancay nous ont permis de mettre en pratique les cinq années d’études, tout en nous rappelant la patience, la réflexion et la documentation nécessaires à la conservation-restauration des biens culturels.
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Partie technico-scientifique Etude de l’efficacité et l’innocuité de produits utilisés pour le nettoyage de la rouille sur la céramique poreuse
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Introduction La restauration est une discipline à la fois pratique et théorique qui demande comme nous l’avons vu précédemment une réflexion historique, déontologique mais également scientifique dans le choix des produits, leurs réactions avec les éléments constitutifs de l’œuvre, etc. Le restaurateur se doit d’avoir cette réflexion scientifique dans le but d’être certain des traitements qu’il réalise et de leur innocuité pour l’œuvre. Par ailleurs, les études scientifiques, telles que celle qui suit, tentent de faire avancer la restauration : nous essayons, par une démarche scientifique, de répondre à des questions, de trouver des solutions à des problèmes rencontrés par les restaurateurs et qui ont jusqu’alors trouvé peu de réponses dans la littérature scientifique. Le sujet de cette étude scientifique est venu lors du constat d’état de l’œuvre : elle possédait un comblement en résine noire sous lequel on pouvait voir un autre matériau sans pouvoir l’identifier. Il a d’abord été déterminé comme étant une plaque de métal, ce qui aurait engendré des problèmes de rouille autour de ce comblement. La rouille n’est pas seulement un problème lié au métal, la corrosion métallique peut également altérer les céramiques : un objet poreux tel que la céramique au contact d’un objet métallique oxydé par l’humidité et l’oxygène, peut au bout d’un certain temps, absorber la rouille (la rouille pénètre dans les pores ouverts). De la même façon, un objet restauré avec des agrafes, comme c’était souvent le cas aux XIXème et XXème siècles, peut aussi être endommagé par celle-ci. Les agrafes s’oxydent forcement avec le temps et la rouille pénètre dans la céramique. La corrosion métallique sur céramique n’est donc pas un cas rare dans la restauration. Cette étude s’attèle, dans un premier temps, à comprendre le phénomène de corrosion du fer et de son incrustation dans le matériau poreux céramique ; puis, dans un second temps, à trouver une solution pour en nettoyer les résidus. Nous savons que les produits utilisés en restauration pour retirer la rouille, ont aussi des effets sur la composition de la céramique et en particulier sur le calcium. Nous avons donc travaillé sur les produits permettant de retirer la rouille sur la terre cuite sans endommager sa composition. Les analyses de spectrométrie de fluorescence X (SFX) et de spectrocolorimètrie permettront d’évaluer à la fois l’efficacité des produits utilisés dans le nettoyage de la rouille sur la céramique, mais également la perte des éléments chimiques constitutifs de la céramique dissouts par les produits testés. Nous tenterons de trouver le produit ayant le meilleur rapport efficacité/moindres effets négatifs.
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1. Présentation des matériaux A. La céramique Le terme céramique désigne l’état de la matière argileuse quand elle est cuite, quelles que soit sa forme, son revêtement, sa technique de cuisson ou de fabrication368. Dans le cas de notre étude, nous nous intéresserons plus particulièrement à la céramique poreuse nommée « terre cuite » : il s’agit d’une argile ferrugineuse*, cuite entre 800 et 1000° C, non émaillée et présentant donc une porosité* ouverte. Il s’agit du type de céramique souvent retrouvé en milieu archéologique puisque produit en grande quantité en tant que céramique utilitaire (conservation, préparation, service d’aliments et de liquides). Par ailleurs il arrive souvent dans la vie courante que des objets en métal soient en contact avec des objets en céramique. Dans un contexte archéologique, les objets et les matériaux sont très souvent retrouvés mélangés voire en contact. Le milieu archéologique est en général très propice à l’oxydation de ces métaux en raison du taux d’humidité élevé dans les sols et de la présence d’oxygène, les deux facteurs nécessaires à la naissance de la corrosion. La rouille se formant sur les objets en fer, en contact ou à proximité d’un matériau poreux, peut s’insérer dans les pores de celui-ci. « Dans certains cas, les mécanismes de corrosion mettent en jeu des zones distantes de plusieurs centimètres (voire plusieurs dizaines de centimètres) »369. La rouille étant solide, et augmentant de volume avec le temps, elle pourrait créer des soulèvements irréversibles au sein de la céramique.
B. La rouille La rouille est le nom donné à la corrosion du fer, métal à « faible affinité pour l’oxygène »370. Celle-ci est créée par les réactions chimiques* et électrochimiques* entre le métal et son milieu. Selon BERDUCOU371, « la corrosion est l'ensemble des processus physicochimiques qui s'établissent entre le métal et le milieu à partir de la surface du métal, et qui provoquent le retour du métal à un état minéral […]. La corrosion est un phénomène spontané et irréversible ». L’hydroxyde ferrique (la rouille) se présente sous la forme d’une poudre plus ou moins compacte de couleur brun-orangé. De nombreux facteurs entrent en jeu lors de la création de la corrosion : -
la nature du milieu (pH, température, humidité)
ANNA (d’) André et al. : « Techniques et méthodes d’étude », La céramique : la poterie du Néolithique aux Temps modernes, Editions errance, 2014, p.7 369 BERTHOLON R. : La limite de la surface d’origine des objets métalliques archéologiques, caractérisation, localisation et approche des mécanismes de conservation, thèse, Sciences de l’Homme et Société, Université Panthéon-Sorbonne, 2000, p. 226 370 ORLOWSKI P. : Comment vaincre la corrosion métallique, Eyrolles, 1973, p.18 371 BERDUCOU M. : La Conservation en archéologie, Masson, 1990, p 171 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 184 368
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-
la nature du métal
-
les condition d’emploi (protection, état de surface)
-
l’influence du temps (entretien, vieillissement)
La rouille est obtenue par la réaction lente d’oxydoréduction* entre le fer (ou alliage du fer), l’oxygène et l’eau. « Dans un milieu où l'air est propre et sec, la rouille se forme lentement. En revanche, elle se forme plus rapidement lorsque l'air est humide, et encore plus rapidement si la surface de métal est couverte d'une mince pellicule d'eau »372. Il existe deux phénomènes de création de la corrosion métallique : •
par « voie humide »373 : il s’agit d’une réaction électrochimique. Un déplacement d’électrons au sein de la masse électrique provoque la dissolution du fer en ions ferreux et la libération de deux électrons. Fe → Fe++ + 2e-
•
par « voie sèche »374 : il s’agit d’un réaction chimique entre le métal et son milieu. La corrosion se forme alors en trois étapes : -
la formation d’hydroxyde de fer II (ou hydroxyde ferreux) provenant de la réaction d’oxydo-réduction entre le dioxygène de l’air et de l’eau. Cette forme est de couleur vert à vert-noir. Fe + 2OH− → Fe(OH)2 + 2e−
-
la mutation des ions fer II (ferreux) en surface en ions fer III (ferrique) sous le dioxygène de l’air. Ils sont de couleur brun-orangé. 4Fe(OH)2 + 2H2O + O2 → 4Fe(OH)3
-
la transformation de l’hydroxyde de fer III solide en oxyde de fer III hydraté 2Fe(OH)3 → Fe2O3 + 3H2O
La couche d’oxyde métallique ainsi créée peut être imperméable et servir de protection ou être poreuse, auquel cas la réaction d’oxydation continue de plus en plus profondément375. Il est donc en général nécessaire d’arrêter la corrosion, de la rendre inactive : c’est ce qu’on appelle la passivation. Le but principal de notre étude sera d’éliminer les taches brun-orangé produites par les oxydes ferriques. Nous ne pourrons pas déterminer scientifiquement l’inactivité de la corrosion mais nous savons que certains produits testés ont des propriétés de passivation du métal.
372
Gouvernement du Canada : Le soin et le nettoyage du fer - Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 9/6, [En ligne], URL : https://www.canada.ca/fr/institut-conservation/services/publications-conservationpreservation/notes-institut-canadien-conservation/soin-fer.html, consulté le 28/03/18 373 ORLOWSKI P. : Op.cit., p.18 374 ORLOWSKI P. : Ibid., p.41-42 375 ORLOWSKI P. : Ibid., p.18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 185
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C. Les produits testés Dans le cas du nettoyage de concrétions telles que la rouille, l’action mécanique peut être utilisée : les dépôts sont ôtés par l’action du scalpel, cependant les taches seront toujours présentes. Il est parfois nécessaire, pour l’esthétique de l’objet, de nettoyer la surface et de les éliminer. Il existe alors des méthodes chimiques ou électrochimiques. -
La méthode électrochimique est utilisée en conservation-restauration dans le cas d’objets en métal, possédant un noyau et une couche de corrosion importante376. Il s’agit de nettoyer la rouille par électrolyse377 : l’objet à nettoyer (cathode) et un autre métal (acier inoxydable par exemple, anode) sont placés dans des solutions liquides conductrices. Lorsque le montage est alimenté par un courant électrique, l’anode attire les ions négatifs et la cathode les ions positifs. Les ions métalliques de la corrosion sont alors réduits. Selon certaines sources, il est cependant nécessaire de rincer les échantillons à l’acide une fois le traitement effectué afin de les neutraliser378.
-
La méthode chimique est également très utilisée dans le nettoyage de la corrosion. BERDUCOU propose ainsi l’utilisation d’acides (réaction acido-basique) ou de complexants (réaction de complexation). Selon elle, ces derniers se lient aux ions métalliques (calcium, fer, aluminium, magnésium) et forment des complexes solubles379. Le traitement par électrolyse n’étant pas adapté à la céramique, notre étude s’est portée
sur les traitements chimiques et ces deux réactions. Selon la littérature scientifique, les deux possèdent des avantages et des inconvénients qu’il est nécessaire de comprendre afin de le choisir la solution la plus adaptée. Avantages
Inconvénients - Efficacité faible - Selon quelques sources, les complexants se
Les complexants
Présentent une innocuité minimum
lient seulement aux ions en solution ce qui n’est pas le cas des ions ferreux et ferriques de la rouille380 - Peuvent s’avérer dangereux pour la
Les acides
Très efficaces
céramique et ses composants - Peuvent être nocif pour l’homme
Nous allons tenter de vérifier et de quantifier les effets positifs ou négatifs de ces deux techniques. 376
VITALI V. et al. : Un manuel de conservation des artefacts, Conservation de sauvetage au musée Carthage, 1995, p.43-44 377 Militaria Collector : Le nettoyage des métaux par électrolyse, [En ligne], URL : http://militaria.collector.free.fr/Restauration/Restauration.htm, consulté le 19/04/18 378 VITALI V. et al. : Op.cit., p.45 379 BERDUCOU Marie : Op.cit., p. 101 380 Informations communiquées par Claude PEPE, Professeur Emérite de l’Université Pierre et Marie Curie Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 186
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Il existe très peu d’informations, d’études scientifiques, ou d’études de cas sur le nettoyage de la rouille sur céramique poreuse, ce qui nous a obligé à étoffer nos recherches. Afin d’obtenir un large panel des produits utilisés en restauration, nous avons utilisé la littérature scientifique concernant la restauration de métal, de céramique, de tissu, de pierre, etc. La littérature présente très peu d’études concernant l’utilisation contrôlée et respectueuse d’acides dans le cas de nettoyage de tache de rouille. Ceux-ci sont en effet déconseillés puisqu’ils sont susceptibles de dissoudre des éléments de la pâte (Fe)381. Cependant, la plupart de ces traitements sont réalisés en bains d’acides. Il s’agit de méthodes dangereuses à la fois pour le restaurateur et pour les céramiques. Notre étude s’intéressera donc à observer l’efficacité et l’innocuité382 d’acides utilisés dans des conditions plus respectueuses, en comparaison à celles de complexants.
a. Choix du complexant Le phénomène de complexation est une réaction entre un acide de Lewis (ion métallique) et une base de Lewis383 (complexant, neutre ou chargé négativement). Les ligands (ou complexants) vont se lier au cation métallique au centre par des liaisons covalentes*. Par ce phénomène, l’ion métallique est dissout. De manière générale, la formation d’un complexe à partir d’un métal M et de n ligands L s’écrit : Mt+ + nLu-⇆ [M(L)n]t-nu+
384
.
L’EDTA385 (Acide éthylènediaminetétracétique : C10H16N2O8) est un acide faible et complexant de cations métalliques. Il existe sous différentes formes (sodique, disodique386, trisodique ou tétrasodique). Cependant la forme sous laquelle il est utilisé n’a pas d’influence sur l’efficacité du produit ; seul le pH varie en fonction de la forme387 388.
Fig. 193 : Schéma d’association entre l’EDTA et les ions ferriques
Etude au microscope prouvant la dissolution du fer constitutif sur des céramiques traitées à l’acide oxalique et l’acide chlorhydrique, réalisée par Olive et Pearson (PEARSON Colin : « Conservation of ceramics, glass and stone », Conservation of Marine Archaelogical Objects, Butterworths, 1987, p.254) 382 Nous savons que le principe d’innocuité, signifiant totalement inoffensif, est impossible à obtenir dans le cas de produits testés : tous auront un effet sur les composants élémentaires de la céramique. Nous cherchons le produit le moins toxique possible pour la céramique. 383 Acide de Lewis : « Ion ou molécule disposant d’une orbitale vacante » ; base de Lewis : « Ion ou molécule qui peut donner un doublet électronique » (Chimix : Acide et base : Transfert de proton, [En ligne], http://www.chimix.com/pages/eau.htm#ex4, consulté le 07/02/2018) 384 TANGOUR Bahoueddine : Les complexes, [Document PDF], https://tangour.files.wordpress.com/2016/04/lescomplexes.pdf 385 Fiche de sécurité de l’EDTA disodique en Annexe 24 p. 296 386 Aussi nommé bisodique 387 pH en fonction de la forme : disodique 4,5 ; trisodique 3,3 ; tétrasodique 11,3. 388 JOURDAIN-TRELUYER V. : « L’acide ethylène-diamine-tetra-acétique (EDTA) et ses sels sodiques », IFROA, p. 11 à 13 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 187 381
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La réaction entre le complexant EDTA disodique (noté H2Y2-) et les ions ferriques est une réaction de complexation notée : [Fe(H2O)6]3+(aq) + EDTA4− (aq) → [Fe(EDTA)]− (aq) + 6H2O (l) 389
.
Ce complexant est régulièrement cité dans le nettoyage des taches de rouille sur différents matériaux tels que le textile ou la céramique390. « Il permet de concilier un niveau de nettoyage très satisfaisant avec une attaque extrêmement réduite de la surface métallique ». Plus la solution est diluée, moins le complexe est stable. Pour une efficacité maximum, il serait nécessaire d’utiliser une grande quantité d’EDTA (concentration élevée). Cependant, en restauration, il est nécessaire de contrôler la solution et ses effets. Il est donc préconisé d’utiliser les complexants dans une concentration entre 5 et 10%391 dans un gel (0.1 Mol : 37.2 g EDTA disodique dans 1 L d’eau)392. Dans le cas d’une complexation, le pH de la solution est très important quant à l’efficacité de la réaction. Selon FJ. WEICHER393, le pH optimal dans la complexation de l’ion Fe II est de 5 et celui de l’ion Fe III est de 1. Cette solution est reconnue comme fonctionnant dans le nettoyage des taches de rouille sur la céramique, tout en étant respectueux de celle-ci. Dans un but de comparaison, nous allons donc utiliser cette solution de complexation lors de notre étude.
b. Choix des acides Un acide est un corps (liquide ou solide) capable de libérer des ions hydrogène (H+) et dont le pH est inférieur à 7. Ceux-ci forment une réaction acido-basique avec les ions ferriques. Elle résulte du transfert de protons H+ entre l’acide d’un couple acido-basique et la base d’un autre couple acido-basique (Fig. 192), notés AH (acide) / A- (base). Fig. 194 : Schéma de la réaction acidobasique entre l’acide chlorhydrique et le fer
La réaction complète s’écrira : acide 1 + base 2 = base 1 + acide 2. Ainsi la réaction entre l’acide chlorhydrique et le fer, serait la suivante : 2 H+ + Fe→ H2 + Fe2+.
389
RSC : « Synthesis of iron (III) EDTA complex, Na[Fe(EDTA)].3H 2O », [Document PDF], URL : http://www.rsc.org/learn-chemistry/resource/download/res00000903/cmp00001155/pdf 390 URBAN F. et ROBCIS D. : EDTA et métal, Bulletin AFROA, 1998, p. 3 391 PEARSON C. : Art.cité., p.255 392 JOURDAIN-TRELUYER V. : « L’EDTA et ses sels sodiques, quelques précisions », ConservationRestauration de Biens Culturels, Décembre 1991, p.61 393 WEICHER FJ. : The analytical use of ethylenediamine tretraacetic acid, Princeton, XVIII, 1958 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 188
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De manière générale, les acides sont proscrits en raison de leurs effets négatifs comme nous l’avons expliqué précédemment. Nous avons cependant pu identifier des acides utilisés en restauration sur différents matériaux dans le nettoyage de rouille ou de taches. Forme
Avantages
Inconvénients
acide éthanedioïque
Acide oxalique394
Formule brute : C2H2O4 Diacide carboxylique -
principal composant des antirouille sur tissu
Forme anhydre obtenue par chauffage du dihydrate à 100°C Poudre soluble dans l’eau et l’éthanol Polyphénol de la famille des tanins Formule brute : C76H52O46
Acide tannique
-
utilisé dans le nettoyage d’
-
être nettoyé au coton par
objets en fer -
la suite. Nous ne pouvons
soluble dans l’eau et l’acé-
donc pas l’utiliser car le
tone -
noircit la surface, doit
noir risque de s’incruster
utilisé pour la passivation du
dans les pores de la céra-
fer
mique.
Poudre soluble dans l’eau Acide faible* acide 3-carboxy-3-
Acide citrique
hydroxypentanedioïque Formule brute : C6H8O7
-
non toxique
acide faible et complexant
-
dissout le calcaire et la rouille
soluble dans l’eau
-
issu du citron ou des groseilles
-
cité dans des études de restauration d’objets archéologiques
-
ne
convient
pas
sur
l’émail -
ne pas mettre en contact avec un nettoyage à base de chlore ou soude
: entre 3 et 10 %395 Poudre soluble dans l’eau
394
Encyclopaedia Universalis : « Oxalique acide ou acide éthanedioïque », [En ligne], URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/oxalique-acide-ethanedioique/,consulté le 14/03/18 395 RODGERS Bradley A. : The Archaeologist's Manual for Conservation: A Guide to Non-Toxic, Minimal intervention artifacts stabilization, springer sciences & business, 2007, p. 45 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 189
Acide
chlorhydrique
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay Formule brute : HCl
-
de l’acier pour enlever les
-
Liquide
-
Acide fort*
séchage
identifiable dans de nombreux produits ménagers
-
transforme l’oxyde de fer en
-
merce, peu accessible aux
tion) -
disponible à différente concentration 75, 80 ou 85 %
-
Densité : 1,7
personnes privés) -
d'acide phosphorique réagissent
rouille -
avec
plusieurs
métaux, avec dégagement
principal composant des an-
d'hydrogène, un gaz in-
tirouilles commerciaux
Acide sulfurique
Acide fort
- Les solutions aqueuses
ports dans le nettoyage de la
pH : 1,5 pour une solution à 0.33 %
efficace sur d’autres sup-
Difficulté à s’en procurer (pas vendu dans le com-
phosphate de fer (passiva-
Formule brute : H3PO4
Forme liquide à 85 % en poids
continue à faire effet même après rinçage et
tache de rouille
Acide orthophosphorique
Acide phosphorique
souvent utilisé dans l’industrie
flammable et explosif396.
Formule brute : H2SO4
-
continue à accélérer la corrosion397
Après avoir étudié les différents acides, leurs effets décrits dans la littérature scientifiques et leurs intérêts pour le sujet, nous en avons sélectionné trois : -
l’acide oxalique398, utilisé comme nettoyeur de rouille sur d’autres supports, souvent présent dans les ateliers de restauration et souvent cité dans la littérature scientifique399.
-
l’acide citrique400, cité dans la littérature scientifique comme efficace, ayant des effets négligeables sur la céramique401.
-
l’acide phosphorique402, principal composant des produits antirouilles vendus dans le commerce
396
INRS : Acide phosphorique Fiche toxicologique n°37, [En ligne], URL : http://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_37, consulté le 05/02/18 397 UHLIG H.H. : Corrosion et protection, Dunod, 1970, p. 146 398 Fiche de sécurité de l’acide oxalique en Annexe 41 p. 344 399 RODGERS Bradley A. : Op.cit., p. 45 COSTAIN Charles, HNATIUK Kathie, SHUTE Joan : « L’enlèvement de la rouille sur des objets céramique », conférence annuelle IIC-CG, Parcs Canada, Ottawa, 1981, p. 3 CARRE D., DESROCHES JP. et GODDIO F. : Le San Diego, un trésor sous la mer, RMN 1994, p.372 400 Fiche de sécurité de l’acide citrique en Annexe 22 p. 287 401 RODGERS Bradley A. : Op.cit., p. 45 STAMBOLOV T. : The corrosion and conservation of metallic antiquities and works of art, CL Publication, 1985 402 Fiche de sécurité de l’acide phosphorique en Annexe 42 p. 348 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 190
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c. Choix du gélifiant Afin de limiter la pénétration des produits en profondeur dans la pâte, nous avons choisi d’appliquer les produits sous forme de gel. La Klucel®G403 (hydroxypropylcellulose) est alors utilisée pour rendre les produits plus visqueux. Elle se présente sous la forme d’une poudre blanche à mélanger aux solvants organiques polaires, les « résines naturelles, les amidons, les émulsions acryliques et vinyliques »404. Nous ajoutons 10 % (en poids) de Klucel®G à la solution d’acide ou d’EDTA : nous obtenons ainsi un gel visqueux retenant le produit et lui permettant de pénétrer modérément dans la céramique.
2. Expérimentations A. Les éprouvettes* Notre étude porte sur la pénétration de la rouille et des produits de nettoyage dans la terre cuite. En imaginant cette étude, le type de céramique visé était la terre cuite principalement archéologique, c’est-à-dire cuite entre 800 et 900° ; mais aussi la terre nue de la faïence en contact avec des agrafes de restauration. Se procurer des échantillons identiques et cuits à basse température est difficile. Les échantillons sont donc des carreaux en faïence dont nous n’utiliserons que la surface non émaillée. Leur production industrielle nous assure des écarts de composition négligeables. Dans le cas de notre étude, la température de cuisson est importante puisqu’elle détermine la porosité des échantillons. Les échantillons sont donc en terre, cuits à 1000° C. Ils mesurent 5 cm sur 7 cm et comprennent deux carrés test de 2 cm² chacun. Le premier restera vierge et servira d’échantillon témoin* ; le deuxième est destiné à l’ensemble des tests. Chaque échantillon a été nettoyé à l’eau et poncé afin d’uniformiser les surfaces. Le but de notre étude étant de trouver un moyen de nettoyer la rouille, il était donc nécessaire d’obtenir des échantillons oxydés sur cette deuxième partie. Afin d’avoir des échantillons les plus identiques possibles, il nous était impossible de trouver des céramiques déjà oxydées. Nous avons donc dû créer la rouille.
403
Fig. 195 : Echantillon à la sortie du processus de création
Fiche de sécurité de la Klucel®G de chez CTS en Annexe 43 p. 352 CTS : Klucel®G, [En ligne], URL : http://www.ctseurope.com/fr/scheda-prodotto.php?id=139, consulté le 19/04/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 191 404
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Pour cela, des morceaux de métal de la taille des carrés sur les échantillons ont été découpés dans des lames de cutter. Ceux-ci ont préalablement été oxydés à l’humidité extérieure. Ils sont ensuite placés sur le carré à faire rouiller. Afin d’accélérer le processus d’oxydation, les échantillons devaient se trouver dans l’eau. Cependant la moitié de l’échantillon devant rester vierge de rouille, l’ensemble ne pouvait pas être plongé dans l’eau. Un système de maintien au-dessus d’un bac rempli d’eau a donc été inventé afin de maintenir les échantillons une moitié hors de l’eau, une moitié dans l’eau. Nous savons que la formation de rouille est plus importante en présence de sels solubles dans l’eau ou l’air405
406
; cependant les sels solubles forment
également des efflorescences très blanches en surface qui pourraient nuire aux analyses prévues par la suite (colorimétrie). L’eau utilisée est donc une eau du
Fig. 196 : Processus de création de échantillons
robinet non traitée. Les éprouvettes sont installés de cette façon durant quatre mois afin d’optimiser les résultats. Ils sont ensuite sortis du bac et mis à sécher durant 48 heures. Les échantillons sont composés de deux parties (deux carrés de 2 cm²). Le premier carré est vierge, il
Zone oxydée (B)
correspond à un échantillon de terre cuite d'origine, non oxydé. Le deuxième carré a été immergé dans l'eau durant quatre mois avec un morceau de métal oxydé posé dessus ; il représente une terre cuite en contact
Zone Vierge (A)
avec un objet oxydé dans un milieu humide durant une certaine période. L'échantillon de terre cuite à la porosité ouverte a absorbé la rouille de cet objet407. Cependant la rouille ne s’est pas déposée et ne s’est pas incrusté de la même façon sur tous les échantillons :
Fig. 197 : Echantillon avec un carré oxydé et un carré vierge
ceux-ci ne sont donc pas homogènes. Par soucis d’homogénéité, lors de la formation des cinq séries d’éprouvettes (composées de dix échantillons par série), nous avons donc tenté de répartir les éprouvettes très corrodées L’air marin est en effet propice au développement de la rouille, les objets métalliques s’oxydent beaucoup plus rapidement dans ces régions. 406 Gouvernement du Canada : Loc.cit. 407 Cependant, les éprouvettes sont réalisés dans de la faïence, c’est-à-dire que l’argile est cuite à une température supérieure à une terre cuite. La porosité est donc réduite : la rouille pénètrerait davantage dans une terre cuite que dans la pâte étudiée. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 192 405
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et les moins corrodées dans l’ensemble des séries. L’hétérogénéité des échantillons n’est pas un problème puisque les résultats des tests s’établiront sur les moyennes : d’après la première analyse de spectrométrie de fluorescence X, la quantité de fer moyenne est relativement homogène entre les séries408. Par ailleurs, les comparaisons seront faites autant entre les séries, que sur la variation des chiffres au sein de ces séries.
B. Les tests a. Les pré-tests et détermination des paramètres Les pré-tests permettent de vérifier concrètement si les tests envisagés et les éprouvettes créées sont valides et d’ajuster les paramètres de tests. Les produits testés Nous savons que les ions ferriques sont complexés par un EDTA au pH 5 et que les ions ferreux le sont avec un pH 1409. Nous avions choisi de tester le complexant en deux solutions différentes. L’EDTA bisodique est la forme présentant le pH le plus bas du sel sodique, c’està-dire entre 4 et 5. Nous l’avons donc utilisé sous cette forme pour obtenir un EDTA à pH 5. Pour réduire le pH d’une solution, il est possible d’ajouter de l’acide citrique, de l’acide lactique410 ou de l’acide chlorhydrique411. Malgré l’ajout de ces différents acides, le pH n’a pu être abaissé à moins de 2,8. La solution d’EDTA au pH 1 n’a donc pas pu être envisagée pour nos tests. Afin de remplacer cette solution, nous avons choisi d’utiliser un produit prêt à l’emploi vendu dans le commerce en tant que « nettoyeur de rouille ». Ces produits sont généralement constitués d’acides et plus précisément d’acide phosphorique. De plus, ils sont plus facilement disponibles dans le commerce412. Il est donc intéressant de tester ces produits antirouille, car s’ils s’avèrent efficaces, ils seront très faciles d’accès pour les conservateurs-restaurateurs. Nous avons donc testé deux formules différentes : Produits
Avantages -
« Frameto Traitement anti-rouille » de la marque Rubson®
-
Inconvénients
possibilité de l’associer à la -
aspect noir : même dilué il
Klucel G pour créer un gel
laisse une pellicule noire après
« une résine en dispersion
nettoyage
aqueuse contenant des élé-
l’analyse de colorimétrie
ments neutralisant la rouille. il -
pH : 5,5-7,5
pouvant
gêner
Se référer au tableau de l’analyse de spectrométrie à fluorescence X « les taux de fer en surface » en Annexe 45 p. 358 409 JOURDAIN-TRELUYER V. : « L’EDTA et ses sels sodiques, quelques précisions », ConservationRestauration de Biens Culturels, Décembre 1991, p.61 410 Fiche technique de la Laponite Atlantis France 411 Information communiquée par Marguerite SZYC, conservatrice-restauratrice de tableaux. 412 Se procurer de l’acide phosphorique est très compliqué. Cet acide fort n’est pas vendu librement dans le commerce. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 193 408
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
traite la rouille par conversion chimique de l’oxyde de fer » -
composition : 1,2-benzisothiazole-3(2H)-one :
0.005<
0.05 % / mélange d’isothiazolinone : 0.0001 < 0.0015 % / tanins : 1< 5% « Décap’rouille Super dérouillant » de la marque Comus413
contient de l’acide phosphorique
-
incolore
-
pH inférieur ou égal à 1
-
possibilité de l’associer à la
Klucel®G pour créer un gel Nous avons choisi d’utiliser l’antirouille de la marque Comus414 pour nos tests en raison de son aspect incolore. Il est utilisé non dilué. Concentration En ce qui concerne les concentrations, nous choisissons de réaliser la même pour l’ensemble des produits afin de les comparer sur la même variable. Nous savons qu’ils n’ont pas les mêmes effets et donc les mêmes besoins de concentration, cependant nous souhaitons comparer l’efficacité des solutions dans les mêmes conditions. Faire varier les concentrations créerait de nouvelles variables et ne nous permettrait pas réellement de les comparer. Selon la littérature scientifique et l’expérience des restaurateurs consultés, nous savons que les acides et l’EDTA sont généralement utilisés entre 3 et 10 %415. Nous avons choisi de réaliser des solutions avec une concentration de 5% en masse permettant d’associer efficacité et effets néfastes négligeables. -
Les solutions d’EDTA, d’acide oxalique, d’acide citrique sont réalisées à partir de produits purs présentés sous la forme d’une poudre. Nous partageons donc la solution entre 5 % de poudre et 95% d’eau. Ainsi pour 2g de solution, nous associons 0,1 g d’acide en poudre et 9,9 g d’eau déminéralisée.
Fiche technique du « Décap’rouille Super dérouillant » de la marque Comus. Fiche de sécurité de l’antirouille Comus en Annexe 44 p. 254 415 PEARSON C. : « Conservation of ceramics, glass and stone », Conservation of Marine Archaelogical Objects, Butterworths, 1987, p. 255 413
414
COSTAIN C., HNATIUK K., SHUTE J. : Art.cité. CARRE D., DESROCHES JP. et GODDIO F. : Op.cit,. p.372 STAMBOLOV T. : Op.cit. RODGERS Bradley A. : The Archaeologist's Manual for Conservation: A Guide to Non-Toxic, Minimal intervention artifacts stabilization, springer sciences & business, 2007, p. 45 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 194
Conservation-Restauration dâ&#x20AC;&#x2122;une jarre funĂŠraire anthropomorphe de la civilisation chancay
-
Lâ&#x20AC;&#x2122;acide phosphorique se prĂŠsente sous la forme liquide Ă 85 % : il contient 85% dâ&#x20AC;&#x2122;acide pur et 15% dâ&#x20AC;&#x2122;eau.
Nous cherchons Ă obtenir une solution Ă 5% : masse molaire H3PO4 : 98,0 g/mol masse volumique de la solution Ă 5 % : Mv5% = 5% (1700) = 85,0 g/L C final â&#x2020;&#x2019; Masse molaire de la solution 5% : M5% : 85,0 / 98,0 = 0,867 mol/L C initial â&#x2020;&#x2019; Masse molaire de la solution Ă 85% : M85% : 1700,0 / 98,0 = 17,347 mol/L CiVi = CfVf donc Vi =
đ??śđ?&#x2018;&#x201C;Ă&#x2014;đ?&#x2018;&#x2030;đ?&#x2018;&#x201C; đ??śđ?&#x2018;&#x2013;
= (0,867 x 0.02) / 17,347 = 0,999 ml
Pour prĂŠparer 20 ml dâ&#x20AC;&#x2122;une solution Ă 5%, nous prĂŠlevons donc 1 ml de la solution dâ&#x20AC;&#x2122;acide phosphorique Ă 85% et nous ajoutons 19 ml dâ&#x20AC;&#x2122;eau dĂŠminĂŠralisĂŠe. Le gĂŠlifiant KlucelÂŽG (10% en masse416) est ensuite ajoutĂŠ dans les solutions diluĂŠes et dans lâ&#x20AC;&#x2122;antirouille Comus pur. Les pH des solutions finales sont : acide oxalique pH 1, acide citrique pH 2, acide phosphorique pH 1, antirouille Comus pH 0-1, EDTA pH 5 QuantitĂŠ appliquĂŠe Il est important dâ&#x20AC;&#x2122;appliquer la mĂŞme quantitĂŠ de gel afin de limiter les variables dans lâ&#x20AC;&#x2122;efficacitĂŠ des produits. Une quantitĂŠ appliquĂŠe infĂŠrieure Ă une autre aurait certainement un effet moindre sur la corrosion. Après quelques prĂŠ-tests, nous dĂŠterminons que 0,5 g de gel suffit Ă recouvrir la surface de tests (2 cm²) avec une ĂŠpaisseur convenable. Afin de gĂŠrer facilement la quantitĂŠ Ă appliquer, nous pèserons le tesson. Nous appliquerons ensuite du gel sur le carrĂŠ traitĂŠ jusquâ&#x20AC;&#x2122;Ă obtention du bon poids. La spatule est ensuite nettoyĂŠe pour ne pas apporter de gel supplĂŠmentaire et celui-ci est
Fig. 198 : QuantitĂŠ de gel pesĂŠe
ĂŠtalĂŠ de façon homogène sur le carrĂŠ. Temps de pose Il est important, pour des questions de rĂŠpĂŠtabilitĂŠ des opĂŠrations, de dĂŠterminer un temps de pose identique pour chaque solution. Nous devons donc trouver une durĂŠe qui corresponde Ă tous les produits testĂŠs, câ&#x20AC;&#x2122;est-Ă -dire un temps pour lequel lâ&#x20AC;&#x2122;efficacitĂŠ est environ ĂŠquivalente.
416
Nous calculons 10% du poids de la solution et ajoutons ce poids en KlucelÂŽ G. LĂŠa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spĂŠcialitĂŠ cĂŠramique
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Nos pré-tests ont permis de déterminer qu’un temps de pose de quize minutes permet de retirer les taches légèrement incrustées mais laisse tout de même des résidus. Un temps de pose de trente minutes, bien qu’il permette d’atténuer d’avantage les taches, ne permet pas non plus de les éliminer complètement. Cependant, trente minutes nous semblent être un temps de pose très important pour la céramique. La majorité des produits testés étant en effet des acides, il n’est pas recommandé de réaliser un temps de pose trop important. Plus le produit est posé, plus il est susceptible de dissoudre les composants de la pâte. Nous décidons donc de laisser les gels posés durant vingt minutes afin d’augmenter légèrement les effets en limitant les effets néfastes.
b. La mise en œuvre Les cinq séries sont ainsi partagées entre les produits déterminés préalablement : Série 1 : acide oxalique
Série 4 : Antirouille Comus
Série 2 : acide citrique
Série 5 : EDTA pH5
Série 3 : acide phosphorique Protocole -
Application de 0,5 g de gel sur le carré de 2 cm²
-
Pose durant vingt minutes
-
Retrait du gel avec un pinceau siliconé (1 passage)
-
Passage d’une brosse en poils de porc imbibée d’eau pour rincer une première fois Rinçage au coton imbibé d’eau (en changeant de coton) jusqu’à ce que celui-ci
-
ne se colore plus -
Séchage de l’éprouvette à l’air libre
Il est nécessaire de rincer l’éprouvette abondement afin de : -
faire disparaitre toutes les traces de traitement chimique417 et de l’arrêter
-
faire partir les éléments solubilisés (Fe et Ca) pour faire les mesures
C. Les mesures La première analyse est visuelle. Nous ne pouvons pas donner de conclusions scientifiques par ce procédé mais les premières observations peuvent nous donner une tendance dans les résultats. Par ailleurs, il est intéressant de les comparer aux résultats obtenus par la suite lors des analyses précises.
417
PEARSON C. : Art.cité., p.256 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Visuellement, une partie de la rouille semble avoir été nettoyée : les traitements paraissent relativement efficaces dans l’ensemble. Cependant nous pouvons voir que le nettoyage n’a été total pour aucune des séries. Des marques rouge-orangé sont encore visibles sur les carrés traités, correspondant à la forme des pièces de métal préalablement posées.
Fig. 199 : Observation avant/après pose des gels
Fig. 200 : Observation avant/après pose des gels (Série acide oxalique échantillon 1)
La rouille produite par la pièce métallique s’est incrustée plus en profondeur au niveau de ses bords qu’en son centre. Ce phénomène
peut
être
expliqué
par
les
différences d’oxygénation entre les deux parties. Si « une goutte d’eau salée [est posée] à la surface horizontale d’une tôle de fer parfaitement propre, au bout d’un certain temps
Fig. 201 : Action électrochimique d’une goutte d’eau salée sur un métal ferrifère
on constate la formation d’hydroxyde de fer à la périphérie de la goutte d’eau qui est aérée et forme une cathode*, alors que le centre non aéré est devenu anode* »418 (Fig. 199). La corrosion métallique a donc été plus intense sur les bords des pièces métalliques et s’est donc incrustée plus en profondeur à ces endroits.
418
ORLOWSKI Pierre : Comment vaincre la corrosion métallique, Eyrolles, 1973, p.31 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018
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Les échantillons ne sont donc pas homogènes, ni avant ni après nettoyage. Les analyses qui seront faites ne le seront donc pas non plus. En effet, une prise de mesure au centre de l’échantillon peut correspondre à une zone parfaitement nettoyée sur une éprouvette et à une zone de rouille encore incrustée sur l’échantillon suivant. Bien que les analyses des chiffres soient faites à partir des moyennes des séries, nous devrons être prudents quant aux interprétations des résultats. Les tests consistent en deux mesures : une mesure de la composition élémentaire de l’échantillon par spectrométrie de fluorescence X et une analyse de l’aspect de l’échantillon à l’aide d’une mesure colorimétrique. Les tests seront faits en trois temps : •
Mesure des échantillons vierges pour servir de témoin Nous allons mesurer la composition et la couleur des échantillons. Notre objectif sera que les échantillons après le nettoyage de la rouille soient le plus proche possible des échantillons témoins, que ce soit au niveau de leur aspect (mesure de colorimétrie) ou de leur composition élémentaire (mesure de SFX).
•
Mesure des échantillons après création de la rouille Nous allons comparer l’aspect et la composition des échantillons vierges avec les échantillons oxydés pour voir ce que celle-ci a apporté.
•
Mesure des échantillons après le nettoyage Nous allons ensuite comparer les résultats obtenus sur les échantillons oxydés avec ceux sur les échantillons nettoyés pour voir ce que les produits ont apporté ou dissout (Fe, Ca …) au niveau de la composition et leur efficacité visuelle. Le but est que la composition et l’aspect soient au plus proche des résultats des échantillons vierges.
a. La spectrocolorimétrie En raison d’un trop grand nombre de nuances existantes, il est impossible de toutes les nommer. Il a donc été nécessaire de créer une science, des moyens pour mesurer l’ensemble de ces teintes, des repères universels. La spectrocolorimétrie est la science permettant « la détermination […] des caractéristiques chromatiques de radiations spectrales (Piéron 1973) »419. La colorimétrie permet de mesurer les nuances colorées perçues par l’œil humain, selon différents paramètres (teinte, saturation, clarté, etc.)420.
419
Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales : « Spectroclorimétrie », [En ligne], URL : http://www.cnrtl.fr/definition/spectrocolorim%C3%A9trie, consulté le 30/11/17, 420 LEFLOCH Ronan : Présentation de la spectrocolorimètrie : principe, référentiels couleurs, fonctionnement du spectrocolorimètre, [En ligne], URL : http://chimie.sup.pagesperso-orange.fr/spectrocolorimetrie.htm, consulté le 26/03/2018 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 198
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Principe sur la couleur Les spectres Le spectre de la lumière visible est la figure obtenue par la décomposition de la lumière. Il permet d’observer l’ensemble des radiations émises par une source lumineuse. La lumière blanche est dite polychromatique puisque son spectre se compose de plusieurs radiations ayant des longueurs d’onde* comprises entre 400 et 800 nanomètres.
Fig. 202 : Spectre de la lumière blanche
La couleur perçue d’un objet est la perception de l’œil en fonction des différentes longueurs d’onde de la lumière blanche absorbées ou réfléchies par l’objet. L’objet recevant la lumière, par la nature et la structure de ses pigments, va absorber ou réfléchir les ondes du spectre coloré. Une page de papier n’absorbant aucune onde apparait blanche, alors qu’une encre noire absorbe tout le spectre. La source lumineuse est ainsi très importante dans la perception des couleurs. Ainsi la perception d’une nuance dépend toujours de nombreux critères : -
la source lumineuse et son intensité nommée illuminant
-
l’angle d’éclairage et d’observation
-
l’œil de l’observateur et la perception de l’observateur
Les référentiels Il existe plusieurs référentiels pour mesurer et représenter une couleur, tels que les référentiels RVB, XYZ, L*a*b*, L*C*h*. -
RVB : système mesurant la quantité de trois couleurs (rouge, vert, bleu) dans une nuance. Il permet de différencier plus de 16 millions de couleurs, ce qui est inférieur à la perception humaine.
-
XYZ : système issu du système RVB, plus conforme à la vision humaine. La notion de luminance (intensité lumineuse) est introduite.
-
L*a*b* (nommé aussi CIELAB) Ce dernier système, créé en 1976 par le Commission Internationale de l’Eclairage (CIE)
est le référentiel utilisé aujourd’hui en raison du nombre important de nuances très proches de la perception humaine. Ce système permet de décrire la couleur sur un repère orthonormé en trois axes. « L’axe des abscisses décrit l’évolution de la teinte de vert (-a*) à rouge (+a*) ; l’axe Léa BIZOUARN
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des ordonnées décrit l’évolution de la teinte de bleu (-b*) à jaune (+b*) »421 ; l’axe L* représente la clarté de la teinte.
Fig. 203 : Repère L*a*b*
La différence entre deux teintes est notée Da*, Db* et DL*. L’écart colorimétrique entre deux nuances est noté : DE* = (DL*² + Da*² + Db*²)1/2. Le spectrocolorimètre Le spectrophotomètre est un appareil de mesure permettant la comparaison de l'impression chromatique de deux plages dont la brillance est maintenue égale. L’appareil utilisé dans le cadre de cette étude est le « Spectrophotomètre portable CM-2300d » de chez KONICA MINOLTA422. Principe423 Le spectrocolorimètre est composé d’une source
Fig. 204 : Spectrophotomètre utilisé dans le cadre de l’étude
lumineuse positionnée à l’entrée d’une sphère. Celle-ci permet d’envoyer la lumière sur l’échantillon dans un flux constant et pluridirectionnel. La mesure est ainsi prise en éliminant les zones d’ombre et sans prendre en compte les irrégularités de surface. Les mesures sont toutes prises selon les mêmes paramètres : l’appareil est calibré pour correspondre au mieux à la perception de l’œil humain sous une lumière blanche. L’illuminant choisi (la source lumineuse) est D65, ce qui correspond à une lumière du jour. L’ouverture de l’objectif, c’est-à-dire le champ de vision de l’appareil (aussi nommé observateur) est paramétré sur 10 degrés, ce qui 421
LEFLOCH Ronan : Présentation de la spectrocolorimètrie : principe, référentiels couleurs, fonctionnement du spectrocolorimètre, [En ligne], URL : http://chimie.sup.pagesperso-orange.fr/spectrocolorimetrie.htm, consulté le 26/03/2018 422 KONICA MINOLTA : « Spectrophotomètres portables CM-2300d », [En ligne], URL : https://www.konicaminolta.eu/fr/instruments-de-mesure/produits/couleur/spectrophotometres-portables/cm2600d-cm-2500d/description.html, consulté le 11/04/18 423 LEFLOCH Ronan : Présentation de la spectrocolorimètrie : principe, référentiels couleurs, fonctionnement du spectrocolorimètre, [En ligne], URL : http://chimie.sup.pagesperso-orange.fr/spectrocolorimetrie.htm, consulté le 26/03/2018 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 200
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correspond à un œil humain. Avant le début des mesures, l’appareil est calibré : il mesure un blanc et un noir afin de prendre les repères colorimétriques. Avantages de la technique -
Il s’agit d’une analyse non destructive.
-
L’appareil permet une très grande précision dans la nuance. En effet, il distingue les écarts de longueur d’onde à 10 nm424 près. Il s’agit d’une caractéristique importante dans le cadre de notre étude puisque les différences de teinte pourraient être très proches les unes des autres. En effet la rouille de couleur brun-rouge est posée sur des éprouvettes de couleur orangée.
-
Le diamètre d’ouverture de l’appareil est de 8 mm, ce qui permet de réaliser une moyenne colorimétrique de la zone analysée. Les échantillons n’étant pas homogènes, réaliser une moyenne sur 8 mm de diamètre permettra d’être plus juste dans l’analyse que de réaliser une mesure sur un point très précis mais moins représentatif de l’ensemble de la zone. Protocole -
Positionnement de la cible du spectrocolorimètre au centre du carré de l’éprouvette. Un périscope placé sur le dessus de l’appareil permet de visualiser le bon positionnement de l’ouverture sur l’éprouvette.
-
Prise de mesure automatique
-
Enregistrement des données L*a*b*
b. La spectrométrie de fluorescence X La spectrométrie est une technique d’analyse élémentaire, c’est-à-dire qu’elle permet d’identifier les éléments chimiques présents dans une matière. Cette analyse peut être utilisée sur les minéraux, les métaux, les huiles, l’eau, les polymères, etc., excepté sur les matériaux organiques. Il s’agit d’une analyse qualitative (identification des éléments) et semiquantitative425. En effet, elle ne détermine pas la quantité exacte de chacun mais il est possible d’observer les variations de composition en pourcentage426. Le spectromètre à fluorescence X utilisé est l’ « Analyseur FX portable Niton™ XL 3t » de ThermoFisher Scientific™427.
424
KONICA MINOLTA : « Spectrophotomètres portables CM-2300d », [En ligne], URL : https://www.konicaminolta.eu/fr/instruments-de-mesure/produits/couleur/spectrophotometres-portables/cm2600d-cm-2500d/description.html, consulté le 11/04/18 425 L’analyse sera plus ou moins précise en fonction des conditions expérimentales, de la matrice étudiée et de l’état de surface des échantillons. 426 CARAA : « Techniques élémentaires », [En ligne], URL : https://www.caraa.fr/techniques-elementaires/, consulté le 01/05/2018 427 ThermoFicher Scientific : « Analyseur FX portable Niton™ XL3t », [En ligne], URL : http://www.thermofisher.com/order/catalog/product/10131166, consulté le 13/04/18 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 201
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Fig. 205 : Spectromètre à fluorescence X utilisé lors de cette analyse
Principe Le spectromètre à fluorescence X soumet les échantillons à un faisceau de rayons X428. Ceux-ci, sous l’effet des rayons X, entrent en résonnance ; c’est-à-dire qu’ils émettent à leur tour des rayons X : c’est la fluorescence. Un spectre en énergie des rayons fluorescents est déterminé : il représente le nombre de photons en fonction de leur énergie. Chaque photon est la signature d’un élément présent dans l’échantillon. Il existe deux techniques d’analyse : la dispersion en longueur d’onde qui consiste à séparer les photons avant de les compter, et la dispersion en énergie (Energy Dispersive Spectroscopy), technique utilisée pour cette analyse. Les photons, en pénétrant dans le détecteur, engendrent des pertes d’électrons dans celui-ci permettant alors le passage d’un courant électrique : c’est une impulsion électrique. Plus le photon a de l’énergie, plus il créé des pertes d’électrons et plus les impulsions vont être fortes. En séparant les impulsions selon leur hauteur, il est possible de compter les photons selon leur énergie429. Les pics visibles (Fig. 206) représentent les différents éléments alors que leur hauteur représente les impulsions en cps/seconde. Le logiciel associé permet de réaliser une quantification relative (en pourcentage) des éléments chimiques comprises dans l’échantillon.
Ondes électromagnétiques dont la longueur d’onde est comprise entre 0,001 et 100 nm, soit entre les rayons gamma et les ultra-violets. 429 ACADEMIC : Analyse Dispersive en Energie, [En ligne], URL : http://fracademic.com/dic.nsf/frwiki/96879, consulté le 01/05/2018 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 202 428
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay Echantillon vierge (A) Echantillon corrodé (B) Echantillon nettoyé (C)
Fig. 206 : Spectre en énergie (Série 1, échantillon 1) Avantages de la technique -
L’analyse est réalisée sur une sur-
Limites de la technique -
environ 10-20 microns de profondeur. Cependant la
face de 8 mm de diamètre. Les
corrosion et les gels de produits auront très certaine-
échantillons n’étant pas homogènes, réaliser une moyenne sur 8 mm de diamètre permettra d’être plus juste dans l’analyse que de réaliser une mesure sur un point très précis moins représentatif de l’ensemble de la zone. -
La technique est non invasive.
L’appareil analyse les éléments de l’éprouvette sur
ment pénétré plus en profondeur. -
Les résultats obtenus sont relatifs et non absolus. En effet, l’analyse ne détecte pas les éléments très légers comme le sodium ou le magnésium. Cependant, ces éléments sont présents en grande quantité dans la pâte céramique. Les résultats obtenus dans la quantification du Fe et du Ca seront donc légèrement faussés puisque nous ne pouvons prendre en compte les teneurs en Na, Mg, etc. non détectables.
Protocole -
Pose de l’échantillon sur la cible (une caméra permet de correctement positionner l’échantillon).
-
Prise de mesure automatique durant 60 secondes.
-
Détermination des compositions élémentaires.
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3. Résultats et interprétations430 A. Mesure d’efficacité par spectrocolorimétrie L’écart colorimétrique est calculé selon DE* = (DL*² + Da*² + Db*²)1/2 avec DL*, Da* et Db*les différences entre deux teintes. DE* C-A correspond à la différence de teinte entre les échantillons avant corrosion (A) et après nettoyage (C). Notre objectif était de retrouver la teinte d’origine après nettoyage. Nous cherchons alors à obtenir le plus petit chiffre possible signifiant la plus petite différence possible entre un échantillon vierge (A) et un échantillon nettoyé (C). Un résultat de 0 signifierait donc que le nettoyage a permis de retrouver la teinte avant corrosion, la teinte d’origine de l’échantillon. DE* C-B correspond à la différence de teinte entre les échantillons après corrosion (B) et après nettoyage (C). Notre objectif était de trouver le produit nettoyant le plus efficace. Nous cherchons donc à obtenir le chiffre le plus élevé possible, c’est-à-dire la plus grande différence entre avant et après nettoyage. Un chiffre de 0 signifierait dans ce cas, une inefficacité totale de la technique puisque les échantillons ne présenteraient aucune différence colorimétrique après nettoyage. Ecarts colorimétriques entre les échantillons vierges (A), oxydés (B) et nettoyés (C)431 432.
430
Séries
DE* A-C
DE* B-C
Acide oxalique
7,96 (±0,08)
23,09 (±0,08)
Erreur relative433
2,19 %
0,56 %
Acide citrique
14,3 (±0,08)
11,74 (±0,08)
Erreur relative
1,26 %
3,13%
Acide phosphorique
15,27 (±0,08)
12,36 (±0,08)
Erreur relative
1,32 %
3,33 %
Antirouille Comus
13,7 (±0,08)
8,85 (±0,08)
Erreur relative
0,29 %
2,62 %
EDTA pH 5
2,88 (±0,08)
17,23 (±0,08)
Erreur relative
12,88 %
1,08 %
Les tableaux inclus dans le texte présentent les moyennes des différentes analyses pour chaque série. Les tableaux complets, les erreurs et incertitudes, ainsi que les calculs détaillés sont présentés en Annexe 45 p. 258 431 Tableaux complets des données colorimétrique en Annexe 45 p. 258 432 Les données colorimétriques sont des points dans un espaces tridimensionnel, ils n’ont donc pas d’unité. 433 Les erreurs relatives ont été calculées à partir de : (Ecart-type à 95% / Moyenne) x 100. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 204
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COMPARAISON DE L'ECART COLORIMÉTRIQUE 23,09
17,23 14,3
15,27 13,7 11,74
12,36 8,85
7,96
2,88
DE* A-C
acide oxalique
-
acide citrique
DE* B-C
acide phosphorique
Antirouille Comus
EDTA pH5
Nous pouvons voir que le DE* A-C le plus faible est obtenu pour l’EDTA. Ainsi c’est ce complexant qui obtient le meilleur résultat : selon ces données, ne semblent les échantillons de cette série ont retrouvé, après nettoyage, un aspect colorimétrique proche de celui d’origine. L’acide oxalique a également permis d’obtenir un bon résultat. L’acide citrique, l’acide phosphorique et l’antirouille Comus, semblent les moins efficaces, puisque qu’ils ne semblent pas permettre de retrouver un aspect colorimétrique proche de celui des échantillons vierges.
-
Le DE* C-B le plus élevé est atteint par l’acide oxalique, suivi par l’EDTA. Ces deux solutions ont été les plus efficaces : elles ont obtenu la plus grande différence entre les échantillons corrodés et les échantillons nettoyés.
Les deux résultats se recoupant, nous pouvons affirmer que, selon l’analyse colorimétrique, les produits qui se sont avérés les plus efficaces sont le complexant EDTA et l’acide oxalique. Les autres solutions donnent des résultats peu concluants. Les analyses de SFX nous permettront peut-être d’affiner les résultats.
B. Mesure d’efficacité et d’innocuité par spectrométrie de fluorescence X a. Variation du taux de fer (Fe) en surface Moyennes de la quantité relative de fer dans les échantillons vierges (A), oxydés (B) et nettoyés (C), exprimées en pourcentage (%)434.
434
Tableaux complets en Annexe 45 p. 358 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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ΔFe : CFe – AFe ΔFe2 : BFe – CFe
Séries
Moyenne AFe
Moyenne BFe
Moyenne CFe
Acide oxalique
3,46 (±0,03)
11,57 (±0,09)
4,9 (±0,05)
1,4 (±0,08)
5,64 (±0,14)
Erreur relative
1,54 %
1,26 %
1,86 %
26,35 %
7,21 %
Acide citrique
3,73 (±0,03)
8,44 (±0,06)
5,66 (±0,05)
1,99 (±0,08)
2,80 (±0,11)
Erreur relative
0,82 %
1,05 %
1,66 %
15,08 %
12,66 %
3,69 (±0,03)
10,68 (±0,07)
6,61 (±0,05)
3,12 (±0,08)
3,84 (±0,12)
0,69 %
1,01 %
1,38 %
8,29 %
10,07 %
3,72 (±0,04)
8,83 (±0,06)
4,36 (±0,04)
0,66 (±0,08)
4,39 (±0,10)
Erreur relative
0,64 %
1,004 %
0,79 %
32,43 %
4,51 %
EDTA pH 5
3,65 (±0,03)
8,95 (±0,07)
5,75 (±0,05)
2,14 (±0,08)
3,01(±0,12)
Erreur relative
0,58 %
0,99 %
0,59 %
4,31 %
11,5 %
Acide phosphorique Erreur relative Antirouille Comus
VARIATION DU TAUX DE FER EN SURFACE oxydés (B) Echantillons rouillés
Echantillons nettoyés (C)
%
Echantillons vierges (A)
11,57 10,68 8,95
8,83
8,44 6,61
5,75
5,66 4,9 3,73
3,46
ACIDDE OXALIQUE
ACIDE CITRIQUE
3,69
ACIDE PHOSPHORIQUE
3,72
4,36
ANTIROUILLE COMUS
3,65
EDTA PH 5
Nous observons une augmentation importante de la quantité de fer après la corrosion des échantillons. Celle-ci est naturelle puisque des ions ferriques se sont déposés sur la surface et dans la porosité de la pâte. Nous pouvons également observer une diminution de la quantité de fer après nettoyage ce qui confirme le fonctionnement des traitements. Aucun de ceux-ci ne semble pourtant avoir permis de retrouver la même quantité de fer qu’avant corrosion : les traitements n’ont pas permis un nettoyage complet. Nous chercherons donc à savoir lequel a cependant été le plus efficace.
Léa BIZOUARN
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ΔFe : CFe – AFe correspond à la différence de quantité de fer entre les échantillons avant corrosion (A) et après nettoyage (C). Notre objectif était de retrouver la quantité d’origine après nettoyage. Nous cherchons alors à obtenir le plus petit chiffre possible signifiant la plus petite différence possible entre un échantillon vierge (A) et un échantillon nettoyé (C). Un résultat de 0 signifierait donc que le nettoyage a permis de retirer toute la rouille et de retrouver la quantité de Fer avant corrosion. Un chiffre négatif signifierait que la quantité de fer après nettoyage est inférieure à la quantité avant rouille : la solution aurait éliminé plus que le fer de la rouille (c’est-à-dire le fer de la pâte). ΔFe2 : BFe – CFe correspond à la différence de quantité de fer entre les échantillons après corrosion (B) et après nettoyage (C). Notre objectif était de trouver le produit nettoyant le plus efficace. Nous cherchons donc à obtenir le chiffre le plus élevé possible, c’est-à-dire la plus grande différence entre avant et après nettoyage. Un chiffre de 0 signifierait dans ce cas, une inefficacité totale de la technique puisque les échantillons ne présenteraient aucune différence après nettoyage.
%
COMPARAISON DES ECARTS DU TAUX DE FER EN SURFACE 5,64 4,39 3,84 3,12
3,01
2,8 2,14
1,99 1,4 0,66
ΔFE : CFE – AFE
acide oxalique
acide citrique
ΔFE2 : BFE – CFE
acide phosphorique
Antirouille Comus
EDTA pH 5
Nous observons que le ΔFe : CFe – AFe le plus faible est obtenu par l’antirouille Comus. Avec ce produit, la différence entre les échantillons vierges et les échantillons nettoyés est très faible en ce qui concerne la quantité de fer. L’acide oxalique obtient également des résultats assez faibles et donc intéressants. C’est l’acide phosphorique qui semble le moins efficace sur la dissolution des ions ferriques. Aucune solution n’obtient un résultat négatif, ce qui signifie qu’aucune n’a dissout plus de fer que ceux de la rouille. En revanche, nous ne pouvons voir que tous les éléments ferriques dissouts appartiennent seulement à la corrosion métallique. Il nous est impossible de quantifier la proportion de fer de la pâte qui a été dissoute. Léa BIZOUARN
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Nous pouvons voir que le ΔFe2 : BFe – CFe le plus élevé est atteint par l’acide oxalique. Il est donc le produit ayant obtenu la plus grande différence entre avant et après nettoyage. Il a solubilisé le plus d’ions ferriques : il est le plus efficace des produits testés. L’antirouille Comus obtient également un résultat intéressant. L’acide oxalique et l’antirouille Comus435 semblent les plus efficace face à la dissolution et l’élimination des ions ferriques de la rouille. Il nous est cependant impossible d’affirmer que, l’un comme l’autre, ils n’aient pas dissout des éléments ferriques de la pâte plutôt que ceux de la rouille. L’acide phosphorique et l’acide citrique et l’EDTA ne semblent pas efficaces.
b. Variation du taux de calcium (Ca) en surface Nous savons que les acides et les complexants réalisent également des interactions avec les composants de la céramique, et peuvent dissoudre le calcium de celle-ci. Nous cherchons à voir quel est le produit le plus inoffensif pour les composants de la céramique et en particulier pour le calcium. Moyennes de la quantité relative de calcium dans les échantillons vierges (A), oxydés (B) et nettoyés (C), exprimées en pourcentage (%)436. Séries
Moyenne ACa
Moyenne BCa
Moyenne CCa
ΔCa : ACa – CCa
Acide oxalique
11,11 (±0,35)
4,8 (±0,2)
8,08 (±0,1)
3,07 (±0,45)
Erreur relative
1,5 %
2,92 %
1,66 %
19,06 %
Acide citrique
9,53 (±0,11)
5,36 (±0,11)
6,52 (±0,10)
3,08 (±0,21)
Erreur relative
1,19 %
1,89 %
0,71 %
10,22 %
9,50 (±0,11)
4,55 (±0,10)
5,51 (±0,09)
4,06 (±0,20)
0,94 %
2,47 %
1,14 %
6,94 %
9,53 (±0,11)
5,89 (±0,10)
6,62 (±0,09)
3,00 (±0,20)
Erreur relative
1,15 %
1,64 %
0,49 %
13,22 %
EDTA pH 5
9,57 (±0,10)
5,58 (±0,10)
6,86 (±0,10)
2,78 (±0,20)
Erreur relative
0,66 %
1,45 %
0,26 %
7,53 %
Acide phosphorique Erreur relative Antirouille Comus
L’antirouille Comus, principalement constitué d’acide phosphorique, obtient de meilleur résultat que ce dernier sur le nettoyage des taches d’oxydation. Ceci pourrait s’expliquer par les autres composants du produit, interagissant également sur la corrosion, par une pénétration différente de la solution dans la céramique ou par une meilleure répartition du produit dans le gel, etc. Il serait nécessaire d’approfondir les analyses afin de conjecturer sur les différences d’efficacité de ces deux solutions. 436 Tableau complet en Annexe 45 p. 358 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 208 435
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
%
VARIATION DU TAUX DE CALCIUM EN SURFACE oxydés (B) Echantillons rouillés
Echantillons vierges (A)
Echantillons nettoyés (C)
11,11 9,53
9,57
9,53
9,5
8,08
5,51
5,36
4,8
6,86
6,62
6,52
5,89
5,58
ANTIROUILLE COMUS
EDTA PH 5
4,55
ACIDE OXALIQUE
ACIDE CITRIQUE
ACIDE PHOSPHORIQUE
Nous observons une nette diminution du taux de calcium en surface lorsque les échantillons sont oxydés. Or la quantité de Ca présente n’a certainement pas diminué puisqu’aucun traitement n’a encore eu lieu. Ceci est dû à l’analyse elle-même : tout d’abord il s’agit d’une mesure en surface, ce qui rend la prise de mesure incomplète ; par ailleurs elle est relative. Ainsi lorsque le taux de fer dans l’échantillon augmente, elle masque une partie des autres composants tels que le calcium. Pour quantifier l’innocuité des produits, nous nous intéresserons à la différence entre le taux de calcium dans les échantillons vierges et celui dans les échantillons nettoyés. Une faible différence indiquerait une diminution moindre de la quantité de calcium. Le produit aura été peu néfaste pour la structure même des échantillons.
%
COMPARAISON DES ECARTS DU TAUX DE CALCIUM 4,06
3,07
3,08 3
2,78
ΔCA : ACA – CCA
Acide oxalique
Léa BIZOUARN
acide citrique
acide phosphorique
Antirouille Comus
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EDTA pH 5
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Nous pouvons voir que les résultats obtenus sont relativement proches. Ils sont assez peu élevés mais n’étant pas de 0, nous pouvons affirmer que tous les produits testés ont eu un impact sur le calcium de la pâte. Une partie de celui-ci a été dissoute et éliminée dans tous les cas. Malgré tout, il apparait nettement que c’est l’acide phosphorique qui a le plus d’effets sur le calcium. Le plus petit résultat de ΔCa : ACa – CCa est obtenu par l’EDTA : de tous les produits testés, c’est lui qui dissout le moins le calcium. Nous pouvons donc dire que, bien qu’ils aient tous un effet négatif sur le calcium et la structure de la céramique en général, c’est l’EDTA le moins nocif. Cependant, il est nécessaire d’être prudent quant aux résultats obtenus pour la dissolution du calcium. La quantification SFX prend en compte les éléments de la pâte mais également de la corrosion. Ce dernier peut donc interférer avec la quantification en masse du calcium restant. Sur un total élémentaire de 100%, si le SFX détecte 3% de fer de corrosion, ce sera autant de calcium constitutif non détecté. Le taux de calcium pourrait alors être inchangé et les 3-4 % de variation soient dûs à une absorption des rayons par le fer restant en surface.
Nous connaissons désormais les produits les plus visuellement efficaces, les plus chimiquement efficaces et (avec une vigilance sur les résultats) les moins chimiquement nocifs. En croisant ces informations, nous pourrons peut-être conclure sur les produits les plus intéressant dans le nettoyage de la rouille sur la terre cuite.
4. Bilan de l’étude A. Choix d’un produit ? Efficacité des produits testés Nous avons, dans un premier temps, cherché à obtenir la plus grande différence visuelle entre les échantillons oxydés et les échantillons nettoyés. Un nettoyage théoriquement parfait consistait à retrouver la teinte d’origine. Cependant, par l’observation visuelle (à l’œil nu) et par l’analyse de colorimétrie, nous en avons conclu qu’aucun des produits n’a été 100% efficace : aucun n’a permis un nettoyage complet. Des résidus, plus ou moins importants selon les séries, sont encore présents. Il s’agit des zones où la corrosion métallique s’est incrustée plus en profondeur et où le produit n’a pas été suffisant pour l’éliminer 437. Cependant, selon l’analyse de colorimétrie, l’EDTA et l’acide oxalique semblent apporter les meilleurs résultats visuels. Nous avons ensuite tenté de confirmer ces résultats par une analyse de spectrométrie de fluorescence X. Celle-ci permettant une analyse élémentaire, nous pouvions observer des variations de fer dans les échantillons. Notre objectif était que les produits puissent dissoudre Se référer sur à l’explication sur l’incrustation de la corrosion p. 197 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique 437
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les ions ferriques de la corrosion. Ainsi l’antirouille Comus et l’acide oxalique semblent les plus efficaces : ceux sont eux qui ont le plus solubilisé et éliminé de fer. Il nous est cependant impossible par cette technique scientifique de différencier les ions ferriques de la corrosion du fer contenu dans la pâte à l’origine. En prenant en compte que visuellement toutes les traces de rouille n’ont pas été nettoyées, nous pouvons penser qu’une part du fer dissout est celui de la structure de l’échantillon et non celui de la corrosion. Selon l’analyse visuelle, colorimétrique et élémentaire, l’acide oxalique apparait donc comme étant un produit efficace. L’antirouille Comus obtient le résultat le plus prometteur lors de l’analyse de SFX, mais celui-ci peut s’expliquer par une dissolution importante du fer de la céramique. Il a pu dissoudre une petite quantité d’ions ferriques de la corrosion et une grande partie du fer constitutif. Il est principalement constitué de l’acide phosphorique, or celui-ci ne semble pas efficace, ni sur le plan colorimétrique, ni sur le plan élémentaire. Il nous faut donc rester vigilant quant à l’efficacité de l’antirouille Comus sur les ions ferriques de la corrosion. Innocuité des produits testés Dans le but de déterminer le moins nocif des produits testés, nous avons tenté de quantifier la présence de calcium de la pâte et son évolution. Des cinq produits testés, l’EDTA semble être le moins dangereux pour la structure de la céramique438. Selon l’analyse de SFX, il serait le produit à avoir le moins solubilisé de calcium constitutif. Cependant, l’analyse étant de surface et les ions ferriques de la corrosion n’ayant pas été éliminés en totalité, ceux-ci peuvent obstruer la quantification de calcium restant. Il nous est donc impossible, par cette technique, de quantifier l’exacte part de calcium solubilisée par les produits testés. Conclusion sur un choix de produit(s) ? Nous pouvons tout d’abord éliminer l’acide phosphorique de nos choix finaux. Comme nous l’avons vu lors de nos tests, il s’agit d’un produit nocif pour la céramique. Son effet sur la structure argileuse est également mentionné dans la littérature439. Nous l’avions sélectionné pour son effet sur la rouille sur d’autres matériaux et son action passivante. Cependant celui-ci s’avère trop dangereux pour la céramique et, par ailleurs, assez peu efficace. L’antirouille Comus, principalement composé d’acide phosphorique, obtient de bons résultats quant à la dissolution du Fer. Ceux-ci ne correspondant pas aux résultats de l’acide phosphorique, et les données colorimétriques n’allant pas non plus dans le bon sens, nous 438
Cette conclusion est également présentée dans la littérature scientifique tel que PEARSON C. : « Conservation of ceramics, glass and stone », Conservation of Marine Archaelogical Objects, Butterworths, 1987 et URBAN F. et ROBCIS D. : EDTA et métal, Bulletin AFROA, 1998, p. 3 439 COSTAIN C., HNATIUK K., SHUTE J. : « L’enlèvement de la rouille sur des objets céramique », conférence annuelle IIC-CG, Parcs Canada, Ottawa, 1981 Léa BIZOUARN
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choisissons de prendre les résultats avec vigilance et de ne pas le conseiller dans le traitement de la céramique. En effet, sa bonne performance peut simplement être due à une dissolution du fer constitutif de la céramique, comme expliqué précédemment. Le complexant EDTA à pH 5 semble obtenir de bons résultats : il permet un bon équilibre entre efficacité et innocuité. Selon l’analyse de SFX de la variation du calcium, il semble également être le moins invasif pour la céramique. Lors de l’observation visuelle et l’analyse colorimétrique, le complexant semble le plus efficace, même s’il ne permet un nettoyage parfait. En effet, l’analyse de SFX de la variation du fer ne le fait pas apparaitre comme le plus efficace. Mais celle-ci ne différencie pas la solubilisation des ions ferriques et du fer constitutif : le complexant peut simplement être plus respectueux de la céramique que les autres produits testés, plus corrosifs. Le complexant nous semble donc être un bon compromis entre respect de la céramique et nettoyage de la rouille. L’acide oxalique semble, selon les résultats d’analyse colorimétrique et de SFX, plus efficace que l’EDTA pH 5. La littérature scientifique évoque une meilleure efficacité de l’acide oxalique par rapport à d’autres acides ou complexants : nous avons effectivement vérifié cette information lors de nos analyses. Cependant, il semble également plus offensif pour la structure céramique, ce qui nous fait émettre des réserves quant à son utilisation. L’EDTA permet d’obtenir des résultats pratiquement similaires tout en ayant une innocuité supérieure.
Malgré le fait que l’EDTA pH 5 nous semble, selon les tests effectués, être le meilleur des produits testés, il n’est pas parfaitement efficace. En effet, nous devrions plus parler d’atténuation que de nettoyage en raison du rendu final imparfait : des traces plus ou moins importantes subsistent sur les échantillons. Par ailleurs, tout produit a un impact négatif sur la céramique : s’il est efficace sur les ions ferriques de la corrosion, il dissoudra également du fer du matériau constitutif. Nous devons donc rester vigilant quant aux résultats obtenus et à l’utilisation de ces produits dans des conditions de restaurations réelles.
B. Limites des analyses et critique du sujet -
Les échantillons sont donc hétérogènes : la corrosion ne s’est pas déposée et incrustée de la même façon sur les cinquante éprouvettes. Une prise de mesure au milieu de l’échantillon (carré de 2 cm²) peut alors se trouver sur une ligne de corrosion très incrusté sur l’échantillon 1 et sur une zone parfaitement nettoyée sur l’échantillon 2. Nous avons tenté de régler le problème et de réduire l’écart-type par deux procédés : la répartition des échantillons pour former des séries similaires ; l’élimination des deux extrêmes de chaque série (il s’agit de mesures-erreurs ne correspondant pas à l’ensemble
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de la série). Les écarts-types à 95 % et les erreurs relatives des échantillons sont ainsi assez faibles (inférieures à 3 %). Il est difficile de réaliser des échantillons oxydés uniformes puisque la corrosion apparait de manière aléatoire. Des échantillons plus homogènes permettraient de réduire les écarts-types et les erreurs mais ne seraient alors plus représentatifs des échantillons trouvables en condition archéologique par exemple. -
Les éprouvettes sont en faïence non émaillée, un matériau cuit à une plus haute température que la terre cuite, et donc moins poreuse. La corrosion pénétrerait sans doute plus encore dans une terre cuite à plus faible température : elle serait donc encore plus difficilement nettoyable que sur une faïence.
-
Les produits testés sont tous à 5% dans l’eau et possèdent tous un pH de 1, excepté l’EDTA qui a un pH 5. Or nous savons que les acides et les complexants ne provoquent pas les mêmes altérations en fonction du pH et de la concentration440. Plus le produit est acide et concentré, plus il agit. Cependant nous devions choisir des paramètres identiques pour l’ensemble des produits. Pour être plus précis dans les résultats, il faudrait faire varier les temps de pose, les concentrations et les pH pour qu’ils soient adaptés aux produits.
-
Les résultats de l’analyse de SFX sont à considérer avec prudence. En effet, les mesures sont relatives et non absolues. Ainsi certains éléments légers de la céramique ne sont pas détectés ou quantifié par le SFX. Par ailleurs, les éléments ferriques résiduels en surface interfèrent très vraisemblablement avec la mesure réelle de Ca dans la pâte. Enfin, cette analyse ne permet pas de différencier le fer structurel des ions ferriques de la corrosion. Comparer précisément la quantité dissoute de l’un et de l’autre par les produits aurait été très instructif. Il nous est en effet aujourd’hui impossible d’affirmer que, l’un comme l’autre, ils n’aient pas dissout des éléments ferriques de la pâte plutôt que ceux de la rouille. Ainsi certains produits semblent efficaces lors de l’analyse de SFX mais très peu lors de l’analyse colorimétrique. Nous pouvons donc en penser que le fer dissout n’est pas seulement celui de la corrosion.
MERLIN Christine : Le nettoyage de la rouille sur des faïence agrafées au XIX sicècle, Mémoire de fin d’étude INP, 1984 Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 213 440
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Conclusion Nous avons consacré de cette étude à la corrosion métallique, à ses effets si elle se trouve en contact avec un matériau poreux tel que la céramique et à un moyen de nettoyer les traces visibles d’oxydation. L’objectif de notre étude était de déterminer un produit compatible avec la céramique qui permettrait de retirer les taches de rouille visibles en surface sur la terre cuite. Dans un premier temps, cette étude nous a permis de mieux comprendre le phénomène de formation de la corrosion du fer et de son incrustation dans la terre cuite. Nous avons pu voir que certaines incrustations étaient irréversibles, déjà après quatre mois d’imprégnation. Nous avons, dans un deuxième temps, tenté de trouver un produit répondant aux critères paradoxaux d’efficacité et d’innocuité : nous cherchions une solution capable de dissoudre les ions ferriques de la corrosion alors incrustés dans les pores de la céramique ; mais également respectueux des éléments chimiques appartenant à la structure de la terre cuite. Afin de quantifier l’efficacité visuelle des produits testés, nous avons utilisé un spectrocolorimètre, ainsi qu’un spectromètre à fluorescence X dans le but de quantifier de manière élémentaire, la solubilisation du fer de la corrosion (mesure de l’efficacité) et du calcium de la pâte (mesure de l’innocuité). Le complexant EDTA pH 5, l’antirouille Comus (à base d’acide phosphorique) et les acides oxalique, citrique, phosphorique ont été testés sous la forme de gel. Les résultats ont démontré que le produit possédant le rapport « efficacité sur les ions ferriques/innocuité sur la structure élémentaire » était le complexant EDTA pH 5. Cependant aucun des cinq produits testés n’a permis un nettoyage optimal comme nous l’espérions : des traces de corrosion brun-rouge sont encore largement visibles sur la surface des échantillons. Par ailleurs, il nous est impossible de conclure, par les techniques d’analyses utilisées, sur les quantités d’éléments structurels dissouts (Ca, Mg, Fe, etc.). Il serait donc intéressant, pour la continuité du sujet, de trouver une analyse scientifique nous permettant de différencier la dissolution du fer de la corrosion et du fer de la pâte, ainsi que la quantification exacte de la dissolution, entre-autre, du calcium.
Léa BIZOUARN
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Conclusion générale Ce mémoire a été l’occasion de nous intéresser à une œuvre dans sa globalité, de l’étudier sous tous ses aspects (iconographique, formel, utilitaire, technique, scientifique, etc.) Les trois enjeux principaux de ce mémoire consistaient à : -
confirmer l’appartenance de cette œuvre à la civilisation chancay et déterminer son rôle dans cette société précolombienne.
-
redonner une stabilité structurelle et une présence esthétique semblables à celles qu’elle avait lors de son utilisation funéraire.
-
comprendre la phénomène de corrosion et son incrustation dans la terre cuite et trouver un moyen d’en nettoyer les traces brun-rouge. Nous avons, par l’étude technique, formelle et stylistique, replacé l’œuvre dans son
contexte historique et utilitaire. Cette céramique archéologique est un barrigón chancay du style china, utilisée en tant que récipient à offrandes pour accompagner le défunt dans sa vie future. Ce travail de recherche a été extrêmement intéressant mais parfois difficile à mener en raison du peu de sources écrites existantes, nous amenant alors à nous rapprocher de sources orales. Nous avons rencontré des spécialistes de la civilisation chancay en France mais également au Pérou, en nous rendant dans la région d’Ancón (région de développement de la civilisation). La partie conservation-restauration a été une longue suite de réflexions autour de l’objet, de ses conditions de conservation à court et long terme, de son état pré-restauration et de l’état post-restauration désiré, des produits et des traitements adaptés, etc. L’œuvre a ainsi retrouvé sa valeur esthétique en retrouvant ses couleurs typiques (décors brunrouge sur fond crème) et son unité formelle et structurelle. Les étapes de comblement et de retouche ont été portées par une réflexion supplémentaire autour du degré de visibilité de la restauration : elles s’installent finalement dans une unité visuelle avec la pièce, tout en étant discernables par une observation plus approfondie. La restauration met ainsi l’œuvre en valeur sans tromper le spectateur sur les parties originales et les parties restaurées. Ce travail pratique nous a rappelé à quel point la documentation et la réflexion du restaurateur étaient nécessaires afin de comprendre les effets et le rendu des traitements sur les œuvres. Dans la prolongation de cette réflexion scientifique, nous avons tenté de trouver une solution à un phénomène connu en restauration : les taches métalliques incrustées dans la céramique. L’étude de la corrosion métallique, de sa formation et de son incrustation sur la céramique nous a permis de mieux comprendre le problème avant de le traiter.
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Bien que cette étude ne nous ait pas permis de trouver une solution idéale au nettoyage des taches de rouille sur la céramique, un produit est ressorti lors des résultats : l’EDTA pH 5 semble le plus efficace et le moins nocif des produits testés. Il serait cependant intéressant d’aller plus loin en réalisant d’autres analyses plus précises quant à la dissolution des éléments structurels de la céramique. Cette étude nous a permis de donner accès à une meilleure compréhension du phénomène de corrosion métallique et de ses problématiques de restauration, tout en nous rappelant la précision scientifique également nécessaire en restauration. Ce travail de mémoire a été un travail très complet qui nous a permis de mettre en pratique nos cinq années d’études, à la fois sur le plan historique, scientifique et pratique. La patience, la minutie et les compétences diverses nécessaires, ont confirmé notre attrait pour ce métier. Par ailleurs, notre volonté de participer à la conservation-restauration de biens culturels archéologiques et ethnographiques restent également inchangée. Par les nouvelles connaissances théoriques et pratiques acquises et les nombreuses rencontres, ce travail a été extrêmement enrichissant tant sur le plan professionnel que personnel.
Léa BIZOUARN
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Glossaire La source des définitions, si elle n’est pas personnelle, est indiquée à la suite de l’explication. Acide/base faible : acide/base ne réagissant pas entièrement avec l’eau. Acide/base fort(e) : acide/base réagissant entièrement avec l’eau. Acrylique : « Se dit d’une fibre synthétique obtenue par polymérisation ». (Dictionnaire Larousse) Anode : Electrode où a lieu la réaction d’oxydation. Barbotine : Argile délayée. Capillarité : Faculté que possède un corps d’absorber ou de retenir dans ses pores non clos, appelés capillaires, un liquide non dissolvant, mais mouillant. (Grande Encyclopédie Larousse) Cathode : Electrode où a lieu la réaction de réduction. Chamotte : Argile cuite et broyée servant de dégraissant dans la pâte. Complexant : Agent susceptible de se lier au ions métalliques (calcium, magnésium, aluminium, fer) pour former des complexes solubles. Convexe : Qui présente un relief arrondi. Cuisson en atmosphère oxydante : Cuisson avec apport d’oxygène. Cuisson en atmosphère réductrice : Cuisson sans apport d’oxygène. Dégraissant : Matériau ajouté à l’argile afin d’en modifier les propriétés physique (résistance au feu, imperméabilité, plasticité, etc.). Dissymétrie : Altération d’une symétrie (différent de assymétrie : absence totale et volontaire de symétrie). Embaumement : Traiter un cadavre par des substances destinées à le conserver. (Dictionnaire Larousse) Engobe : argile délayée et colorée recouvrant la céramique afin d’en cacher les aspérités et de la préparer au décor. Eprouvette : Echantillon prélevé dans un lot et destiné à être soumis à des essais prévus. Ethnographie : « Etude descriptive des groupes humains déterminé (techniques matérielles, organisation sociale, croyances religieuses, mode de transmission des instruments de travail, d'exploitation du sol, structures de la parenté) ». (Dictionnaire Larousse) Ferrugineuse : Qui contient de l’oxyde de fer. Gâchage : Action de préparation du plâtre qui consiste à verser du plâtre sur l’eau jusqu’à niveau. Hygrométrie : « Etude de la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’air ». (Dictionnaire Larousse) Innocuité : « Caractère de ce qui n'est pas toxique, nocif ». (Dictionnaire Larousse) Kaolinite : Silicate d’aluminium hydraté (Al2Si2O5(OH)4), composant principal du Kaolin. Liaison covalente : Liaison dans laquelle deux atomes partagent deux électrons célibataires. Longueur d’onde : Grandeur physique caractérisant une radiation. Elle se note λ et s’exprime en nanomètre (nm). Médium : Préparation à base de résine utilisée pour modifier la consistance d’une peinture ou en tant que liant de pigments. Léa BIZOUARN
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Mouillabilité : Etalement de l’adhésif sur le substrat. pH (potentiel hydrogène) : outil permettant d’évaluer l’acidité d’une solution en fonction de la concentration en ions hydrogène (H+). Photo-oxydation : Oxydation provoquée par le rayonnement lumineux. Plasticité : Malléabilité, capacité d’une matière à prendre la forme désirée. Polarité : Répartition des charges négatives et positives dans un dipôle. La polarité d’une substance est due à la différence d’électronégativité entre les éléments chimiques qui la composent et leur répartition dans l’espace. Plus la répartition est asymétrique, plus la substance sera polaire (contraire : apolaire). Polyéthylène expansé : « Se dit de certaines matières plastiques possédant une structure cellulaire ». (Dictionnaire Larousse) Polyéthylène extrudé : fabriqué par extrusion, « procédé de mise en forme des matières plastiques, qui consiste à pousser la matière à fluidifier à travers une filière ». (Dictionnaire Larousse) Polymère : Se dit d’une molécule de masse moléculaire élevée, composée de l’enchainement de monomères. Prémontage : Assemblage à blanc et temporaire des tessons, à l’aide de rubans adhésifs. Primaire : Film d’adhésif à faible viscosité appliqué sur les tranches de terres cuites afin d’en limiter la porosité. Réaction acido-basique : Réaction se caractérisant par le transfert d’un proton H+ d’un acide vers une base. Réaction chimique : Processus au cours duquel nous observons la transformation de certaines espèces chimiques. Réaction d’oxydoréduction (ou redox) : réaction chimique au cours de laquelle se produit un échange d’électrons. L’espèce chimique captant les électrons est appelée « oxydant », celle qui les cède « réducteur ». Réaction électrochimique : Phénomène observé lors du transfert de charge composé d’un ou plusieurs électrons. Sorbonne : Hotte de laboratoire permettant l’extraction des vapeurs toxiques des produits utilisés lors de manipulations. Strate : « Couche de terrain sédimentaire différente des dépôts inférieur et supérieur ». (Dictionnaire Larousse) Témoin : Repère, référence. Terre cuite : Matériau céramique obtenu après cuisson d’une argile. Tg (Température de transition vitreuse) : Température à laquelle à un solide devient visqueux. Thermoluminescence : Mesure de l’activité radioactive d’un objet afin de réaliser une datation absolue. Vessie natatoire : Double organe rempli de gaz permettant au poisson de contrôler sa flottabilité. Vinylique : « Se dit des composés refermant le groupe vinyle » (Dictionnaire Larousse) Viscosité : Résistance à l’écoulement. Volatile : Qui peut passer à l’état de gaz, de vapeur. (CNRTL)
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Mémoires •
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Léa BIZOUARN
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Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
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BRUNETTI S. et MONOD S. : « Le JunFunori ou l’approche occidentale d’un adhésif venu d’Orient », Entrevue avec O. MASSON, restaurateur privé suisse, Support Tracé, n°3, 2003, p. 63-66
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Articles en ligne •
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VERBEECK-BOUTIN M. : « De l’axiologie », CeROArt [en ligne], mis en ligne le 29 octobre 2009. URL : http://ceroart.revues.org/index1298.html.ID
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•
BEUKEN A. : Etude critique et expérimentales sur les matériaux de comblement pour les terres archéologiques à basse température, Bruxelles, ENSAV La Cambre, Juin 2008
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•
BOURGUIGNON E. : Dessalement des matériaux poreux modèles par la méthode des compresses, thèse Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2009
•
BRESSON J. : Etude et Restauration d’une coupe à yeux Attique datée de la fin du Vie siècle avant JC, Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016
•
COUSTILLERE C. : Etude et Restauration d’une Œnochoé italiote à bec trilobé, Fin du Ive – début du IIIe siècle av JC, Mémoire de fin d’études Conservation-Restauration de céramiques, Ecole de Condé, 2015
•
DARD-TERNISSIEN C. : Etude et restauration d’un Avalokitesvara tibétain en bois polychrome appartenant au musée national des Arts asiatiques-Guimet Paris, Mémoire de fin d’étude INP, 2003
•
GENIN S. : Etude comparative des Paraloïd B72 et B44, purs ou en mélanges, adaptés au collage de la porcelaine et du verre, Mémoire de fin d’étude La Cambre, 2015
•
HELAS C. : Le comblement dans le biscuit de porcelaine, approche et étude comparative de matériaux de comblements adaptés, mémoire de fin d’études, Ecole supérieure des arts visuels de la Cambre, 2015
•
HEUKESSHOVEN H. : Les lacunes dans les objets d’art décoratifs en faïence et en porcelaine, réflexion méthodologique en vue de leur réintégration, Ecole nationale supérieure des arts visuels de la Cambre, 2009
•
LAMARCHE V. : Etude et restauration d’une vierge à l’enfant dites Madone au Candélabres, bas-relief en stuc polychrome d’après Antonio Rossellino, Mémoire de fin d’étude Ecole régionale des Beaux-Arts de Tours, 1997
•
LAUREAU D. : Étude et restauration d’une Vierge à l’Enfant, fragment d’une Éducation de la Vierge, mémoire de fin d’études, Tours, École supérieure des beaux-arts - cycle conservationrestauration des œuvres sculptées, 2003
•
LOBET E. : Aquazol : évaluation en vue du fixage d’une couche picturale, mémoire de diplôme, Bruxelles, Ecole nationale supérieure des Arts Visuels de La Cambre, 2012
•
LUTTRINGER L. : Etude d’une vase à bulbe d’oignon et décor géométrique (620-650 avant JC), Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016
•
MINOT O. : Etude et conservation-restauration d’une figurine en terre cuite zoomorphe provenant de Grèce, Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016
•
MONTSERRAT L. P. : Investigación y análisis de las masillas de relleno para la reintegración de lagunas cerámicas arqueológicas, Universidad Politecnica de Valencia, 2007
•
RICHARD A. : Etude et Conservation-restauration de « La Main », peint par Marian KASPERCZYK en 1992, Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2017
•
ROUCHET F. : Rapport d’étude et de traitement d’une sculpture en terre cuite : L’ange à la guirlande du Musée du Louvre, Mémoire de fin d’étude ENP-IFROA section sculpture, 1998
•
ROUDET Ludovic : L’intervention minimale en conservation-restauration des Biens Culturels : Exploration d’une notion, Mémoire de fin d’études Université Paris I PanthéonSorbonne, 2007
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•
RUARD G. : Restauration-Dérestauration en peinture murale : un problème entre histoire et actualité, Mémoire de fin d’étude UFR Sciences Humaines, 2007, 190 pages
•
RUBIELLA F. : Etude et conservation-restauration de deux lécythes attiques à fond blanc du Ve siècle avant JC, Mémoire de fin d’étude INP, 2011
•
SANTGERMA H : Etude et restauration de quatre figurines phéniciennes, sujet TS : Recherche d’un protocole de nettoyage par des gels à base de complexants, Mémoire de fin d’étude INP, 2005
•
SCHENCK M. : Etude et Conservation-Restauration d’un dolium en terre cuite datant du Ier siècle et provenant du site gallo-romain d’Oedenburg (Alsace), Mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, 2016
•
SEGURA ESCOBAR J. : Sorbent and abrasive : critical assessment of the potential role of synthetic sponges in the conservation of wall painting, MA dissertation, Courtauld Institute of Art- University of London, 2010
•
THULEAU-MEDHIPOUR V. : Etude et restauration de deux œuvres en terre cuite : un masque féminin du XVIe siècle et une maquette du XIXe siècle, Mémoire de fin d’études Ecole Régionale des Beaux-Arts de Tours, 1995
•
WALTER N. : Les matériaux de comblement utilisés pour la restauration de céramiques, Mémoire de fin d’études Ecole supérieure d’art appliqué section Conservation-Restauration filière Archéologie ethnographie, Aout 1999
Sites internet •
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http://www.chimix.com/pages/eau.htm#ex4, consulté le 07/02/2018 •
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https://www.ctseurope.com/fr/scheda-
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Léa BIZOUARN
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•
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DOMURADO V. : Etude et modélisation de la réflectance de la surface d’objets réels, mémoire
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Tables des illustrations Les Fig. non référencées sont des photographies ou des schémas personnels. Les appellations « a, b, c » identifient les différentes images présentées sous le même numéro de figure. Fig. 4 p. 19
Fig. 12 p. 23 Fig. 15 p. 26
OCAMPO E. : « Technique de la céramique précolombienne », Trésors de la céramique précolombienne dans les collections Barbier-Mueller, Somogy, 2003, p.22 DONNAN C. : Ceramics of Ancient Peru, Fowler Museum Of Cultural History, University Of California, 1992, p. 17 (fig. 11) blog.eracultura.com © Pascal Lacombe
Fig. 18 p. 27 Fig. 22 p. 29
© Pascal Lacombe D’après PETIT PALAIS (Paris) : Pérou : l’art de Chavin aux Incas,
Fig. 5 p. 19
catalogue d’exposition Petit Palais, Paris Musée, 2006, p. ?? Fig. 24 p. 30
Schéma personnel composé de (de gauche à droite et de haut en bas) :
Fig. 25 p. 31
o
Cupisnique : © Museo Larco
o
Vicus : © Museo Roemer Pelizaeus, Hildesheim
o
Moche : © MNAAHP
o
Chimu-Lambayeque : © Metropolitan Museum of Art
o
Chavin : © MNAAHP
o
Recuay : Museo Larco - © Léa Bizouarn
o
Chancay : Museo Larco - © Léa Bizouarn
o
Paracas : © MNAAHP
o
Nasca : Museo Larco - © Léa Bizouarn
o
Wari : Museo Larco - © Léa Bizouarn
o
Inca : Museo Larco - © Léa Bizouarn
BODOLEC-DUROSELLE C. : Iconographie de la Culture Chancay : La tombe Chancay comme « Mesa », thèse EHESS, 2014, p. 105
Fig. 26 p. 32
© Pascal Lacombe
Fig. 27 (a, b, c) p. 33
© Pascal Lacombe
Fig. 28 (a, b, c) p. 34 Fig. 29 (b) p. 34 Fig. 30 p. 35
© Pascal Lacombe © Pascal Lacombe a : Jarre ovoïde … : © Naotoschi Ichiki b : Statuette … : The department of art and history, College of fine art, The university of Texas at Austin c : Jarre ovoïde à goulot … : © Pascal Lacombe © Pascal Lacombe - Photographie personnelle © MNAAHP a : © MNAAHP b : © Museo el Castillo © Musée du Quai Branly, © Patrick Gries, Bruno Descoings
Fig. 31 (a, b, c) p. 36 Fig. 32 p. 39 Fig. 33 p. 39 Fig. 35 p. 40 Léa BIZOUARN
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Fig. 36 p. 41 Fig. 40 p. 42 Fig. 42 p. 43 Fig. 92 (b) p. 70 Fig. 94 p. 84
CORNEJO G., 1992 (Fig. 13) © Pascal Lacombe © Pascal Lacombe © Gilbert Bault (https://www.lebulletin.com) HERGÉ : Les aventures de Tintin - L’Oreille cassé, Casterman®, 1966, planche 62 Fig. 101 p. 101 https://www.raja.fr/calage-protection/plaque-profile-et-manchon/plaques-de-calage/plaques-mousse-polyethylene-densite-moyenne_PDT01317.html Fig. 102 p. 101 https://allegro.pl/material-tyvek-43-g-m2-152-cm-bialy-latawce-sz-ni7208657215.html#thumb/2 Fig. 130 p. 117 http://es-visiontimes.com/septiembre-este-mes-en-la-historiachina/septiembre-3/ Fig. 138 p. 124 BOURGUIGNON E. : Dessalement des matériaux poreux modèles par la méthode des compresses, thèse Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2009, p. 53 Fig. 175 p. 161 https://www.researchgate.net/figure/Deux-types-de-reflexions-reflexion-speculaire-gauche-et-reflexion-diffuse-droite_fig9_278618211 Fig. 181 p. 170 © Magdalena Grenda : http://journals.openedition.org/ceroart/docannexe/image/1700/img-9.jpg Fig. 182 p. 170 © Atelier Vignier-Dupin : http://www.atelierdupin.fr/references/2-uncategorised Partie technico-scientifique https://www.flickr.com/photos/saimo_mx70/2831533141/in/photos(c) p. 182 tream/ Fig. 193 p. 187
RSC : « Synthesis of iron (III) EDTA complex, Na[Fe(EDTA)].3H2O », [Document PDF], URL : http://www.rsc.org/learn-chemistry/resource/download/res00000903/cmp00001155/pdf
Fig.194 p. 188
http://pccollege.fr/troisieme-2/chimie-3eme/chapitre-v-la-reaction-entre-lacide-chlorhydrique-et-le-fer/
Fig. 201 p. 197
ORLOWSKI P. : Comment vaincre la corrosion métallique, Eyrolles, 1973, p. 31 (Fig. 8)
Fig. 202 p. 199
https://www.kartable.fr/ressources/physique-chimie/cours/les-sourcesde-lumiere-coloree/20496
Fig. 203 p. 200
KONICA-MINOLTA : Analyse des couleurs, parlons clair : de l’appréciation visuelle de la couleur à sa mesure précise, [Document PDF], https://fr.wikipedia.org/wiki/L*a*b*_CIE_1976#%C3%89cart_de_co uleur
Fig. 206 p. 203
Spectre fourni par Michel Bouchard (Caraa)
Fig. 207 p. 240
http://www.beton-academy.com/comment-diagnostiquer-la-durete-dubeton/
Fig. 211 p. 245 Léa BIZOUARN
Photographie de Pascal Lacombe Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
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Fig. 212 p. 246
PETIT PALAIS (Paris) : Pérou : l’art de Chavin aux Incas, catalogue d’exposition Petit Palais, Paris Musée, 2006, p. 219
Fig. 215 p. 248
BAU V. : Inventaire et étude des collections américaines des musées de Lille et d’Amiens, mémoire de maitrise université de Paris1 la Sorbonne, Juin 1997, p. 74
Fig. 216 p. 249
BARMARIN Gérard : http://www.fluomin.org/fr/fiche.php?id=164&name=GYPSE
Fig. 217 p. 250
Léa BIZOUARN
BARMARIN Gérard : http://www.fluomin.org/fr/fiche
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Tables des annexes Annexe 1 : Fiche d’inventaire de l’œuvre
------------------------------------------------------ p. 234
Annexe 2 : Notes sur la fabrication des céramiques précolombiennes, prises lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO
--------------------------------------------------------------- p. 236
Annexe 3 : Notes sur les céramiques chancay, prises lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR
------------------------------------------------------------------------ p. 238
Annexe 4 : Récapitulatif des tests du constat d’état
-------------------------------------------- p. 240
Annexe 5 : Détails des décors peints de l’œuvre
-------------------------------------------- p. 244
Annexe 6 : Exemple de poupées chancay tatouées
-------------------------------------------- p. 245
Annexe 7 : Chronologie selon John ROWE
------------------------------------------------------ p. 246
Annexe 8 : Exemples de céramique Chimu-Lambayeque
----------------------------------- p. 247
Annexe 9 : Fiche d’inventaire de l’œuvre « N° NNBA 6233 Vase China » par Valérie BAU
--------------------------------------------------------------------------------- p. 248
Annexe 10 : Photographies de l’œuvre (quatre faces) avant restauration Annexe 11 : Fiches de fluorescence du gypse et de l’uranophane
------- p. 249
-------------------------- p. 251
Annexe 12 : Tableau de valeurs selon Barbara APPELBAUM, appliqué à l’œuvre ------- p. 253 Annexe 13 : Fiche de sécurité du polypropylène
--------------------------------------------- p. 254
Annexe 14 : Fiche de sécurité des mousses en polyéthylène ----------------------------------- p. 257 Annexe 15 : Fiche de sécurité du Tyvek®
------------------------------------------------------ p. 258
Annexe 16 : Fiche de sécurité des mousses en polyuréthane ----------------------------------- p. 259 Annexe 17 : Fiche de sécurité de l’acétone
------------------------------------------------------ p. 267
Annexe 18 : Fiche de sécurité de l’éthanol
------------------------------------------------------ p. 269
Annexe 19 : Fiche de sécurité de l’Ethomeen® C25 -------------------------------------------- p. 271 Annexe 20 : Fiche de sécurité du Carbopol
------------------------------------------------------ p. 277
Annexe 21 : Fiche de sécurité de l’éponge Basotect® -------------------------------------------- p. 283 Annexe 22 : Fiche de sécurité de l’acide citrique
-------------------------------------------- p. 287
Annexe 23 : Fiche de sécurité de la carboxyméthylcellulose ---------------------------------- p. 291 Annexe 24 : Fiche de sécurité de l’EDTA disodique -------------------------------------------- p. 296 Annexe 25 : Fiche de sécurité du Nevek®
------------------------------------------------------ p. 300
Annexe 26 : Fiche de sécurité du carbonate d’ammonium
----------------------------------- p. 304
Annexe 27 : Fiche de sécurité de la Funori® ------------------------------------------------------ p. 306 Annexe 28 : Fiche de sécurité de la colle d’esturgeon
----------------------------------- p. 311
Annexe 29 : Fiche de sécurité de la Mowital® B60HH
----------------------------------- p. 312
Annexe 30 : Fiche de sécurité du Polyfilla® ------------------------------------------------------- p. 316 Annexe 31 : Tests de concentration de pigments et de PVA ----------------------------------- p. 322 Annexe 32 : Fiche de sécurité du ruban adhésif Tesa®
----------------------------------- p. 323
Annexe 33 : Fiche de sécurité du Parafilm® ------------------------------------------------------ p. 324 Léa BIZOUARN
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Annexe 34 : Fiche de sécurité du Primal™ WS24
-------------------------------------------- p. 326
Annexe 35 : Photographies avant et après vieillissement accéléré des mastics de revêtement p. 331 Annexe 36 : Fiche de sécurité de la poudre de marbre
----------------------------------- p. 332
Annexe 37 : Fiche de sécurité des microbilles de verre pleines Annexe 38 : Fiche de sécurité des acryliques Golden Open Annexe 49 : Fiche de sécurité Mylar®
------------------------- p. 334
----------------------------------- p. 336
------------------------------------------------------ p. 341
Annexe 40 : Photographies de l’œuvre (quatre faces) après restauration Annexe 41 : Fiche de sécurité de l’acide oxalique
-------------------------------------------- p. 344
Annexe 42 : Fiche de sécurité de l’acide phosphorique Annexe 43 : Fiche de sécurité de la Klucel®G Annexe 44 : Fiche de sécurité de l’antirouille Comus Annexe 45 : Tableaux complets des données
Léa BIZOUARN
----------------- p. 342
----------------------------------- p. 348
-------------------------------------------- p. 352 ----------------------------------- p. 354 -------------------------------------------- p. 358
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Annexe 1 : Fiche d’inventaire de l’œuvre
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Annexe 2 : Notes sur la fabrication des céramiques précolombiennes, prises lors de l’entretien avec Alejandro SOTTO, restaurateur céramique au Musée National d’Anthropologie, d’Archéologie et d’Histoire du Pérou. Les notes ont été dactylographiées pour une meilleure lisibilité. Fabrication - à partir d’une argile provenant de différents lieux en raison de leurs différentes propriétés (plasticités, couleur, porosité) - ajout d’éléments pour augmenter la résistance à la température ou diminuer le degré de rétraction au séchage Séchage des céramiques à l’abri du soleil pour éviter la création de fissures Décoration des céramiques une fois sèches « La céramique se définit comme l’expression ou le témoignage de la création humaine, ayant une valeur technique, scientifique et qui représente l’histoire sociale, comment vivaient les peuples ». A l’époque préhispanique, il existait une grande diversité des argiles, des formes et des décors utilisés. - Argile chancay : Al2O3 – 2SiO2 – H2O La kaolinite provient de la décomposition géologique du feldspath et du granit. Le territoire péruvien contient des roches kaolinites mais elles sont contaminées par les pluies et les vents. Les roches sont donc plus souvent illitiques ou montmorillonite. Elles sont mélangées pour former des argiles assez fines. - Fondants : carbone, sels, etc. afin d’abaisser la température de fusion et de permettre une bonne cohésion entre les différents éléments. Ils permettent de maitriser la densité de la céramique. - Antiplastiques : quartz, silice, mica Préparation de l’argile -
l’argile est broyée avec une pierre elle est mélangée pour obtenir les propriétés désirées de l’eau est ajoutée afin d’obtenir un pain de terre
Technique de fabrication - modelage : technique appliquée aux petites récipients. Elle demande une argile très plastique - colombins : technique appliquée aux gros objets - moulage Léa BIZOUARN
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Lissage de la surface afin d’éliminer les imperfections : ils utilisent différents outils (maïs, tesson de céramique, tissus) + polissage pour obtenir des surfaces brillantes (céramiques Nasca) ➔ ils ne l’utilisent pas forcement sur toute la pièce ➔ ils font varier les intensités de brillance en fonction des parties plus ou moins importantes ➔ ils utilisent des pierres Création de l’engobe = argile + oxydes naturels réduits en poudre (rouge : fer ; blanc : kaolin) permet de cacher les imperfections de toute la surface permet de créer un fond pour que les dessins contrastent Décors ils peuvent être en négatif, en positif, incisés, excisés, estampés, incrustés, etc. Cuisson -
température minimum : 350° C. cuisson à l’air libre avec une circulation de l’air ils recouvrent les pièces d’une couche de combustibles (bois) + dans tous les espaces libres (entre les céramiques)
cuisson des œuvres en fonction de leur taille et de leur finesse pour une cuisson uniforme les grandes pièces nécessitent une température supérieure aux petites pièces donc si nous mettons une grande œuvre avec deux petites à 800° C, lorsque les petites seraient à cette température, la grande serait encore à 450-500° C. - époque préhispanique : four éphémère pour une seule cuisson - 2 type de four : - four en atmosphère oxydante ou ouvert (1 entrée d’air) => permet de conserver la couleur de l’argile et des oxydes - four en atmosphère réductrice ou fermé (absence d’oxygène) => la terre devient noire/grise : pièce monochrome (Exemple : céramiques Chimu) -
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Annexe 3 : Notes sur les céramiques chancay, prises lors de l’entretien avec Miriam Meléndez PASTOR, directrice du Musée municipal Chancay Les notes ont été dactylographiées pour une meilleure lisibilité. La civilisation chancay s’est développée entre 1100 et 1400 ap. JC. Les civilisations Chimu et Inca l’ont conquise peu à peu. La céramique chancay est une céramique brute avec peu de finition. Elle pourrait posséder une marque en tant que signature (hypothèse). La tombe du défunt était composée du paquet funéraire nommé Fardo (défunt empaqueté dans des tissus) et de nombreuses richesses (bijoux, céramiques, attributs professionnels). Le défunt est installé dans une position fœtale, afin de renaitre dans une autre vie. La quantité de richesse dans la tombe et la profondeur de celle-ci (de 1 à 4 m) dépend de l’importance du défunt. Certaines tombes ne possédaient qu’une casserole. Des cuchimilcos sont installés en couple (un masculin et un féminin) afin de protéger la tombe des pillages et des esprits malveillants. Fabrication -
la technique du tournage n’existait pas ; seulement modelage ou montage aux colombins
-
cuisson oxydante aux alentours de 800° C
-
fabrication par le peuple : beaucoup de potiers (ils n’accordaient pas une importance particulière aux artisans)
Iconographie -
le terme Reina employé ici pour désigner les céramiques funéraires chancay en France, n’existe pas au Pérou. Elles sont en revanche nommées china en raison de leurs yeux en amande ; ou barrigón « personnage au gros ventre ».
-
ces céramiques pourraient avoir un rapport iconographique avec la déesse de la fertilité Quilla. Il s’agit d’une théorie encore non vérifiée.
-
certaines portent des attributs : cela pourrait s’expliquer par l’importance des défunts (non vérifié).
-
elles portent toutes un vaso dans les mains. Le terme kero est Inca donc post-chancay, nous ne pouvons pas l’utiliser.
-
la couronne (protubérances sur le crâne) pourrait représenter le rang social du défunt (hypothèse). Le nombre de degrés sur la couronne indiquerait le statut social.
-
les décors sur le visage représentent des peintures faciales cérémonielles.
-
ces céramiques ne représentent pas le défunt. En revanche, c’est peut-être le cas des cuchimilcos.
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Utilité -
pas de chicha (alcool de maïs) dans la céramique ou dans le vaso. Seulement des feuilles de maïs dans le corps
-
utilisée en tant que récipient à offrandes
-
tous les défunts possédaient une tombe personnelle ou familiale. Tous les défunts étaient enterrés avec des attributs personnels (en rapport avec leur profession par exemple), des richesses (bijoux) et des céramiques plus ou moins de qualité, en fonction de leur rang.
-
les offrandes étaient réservées aux personnes importantes de la société hiérarchisée. Le peuple n’en recevait pas.
Datation -
2 périodes chancay : « tricolore » dans un premier temps puis « noir sur blanc » seulement
-
période « noir sur blanc » environ entre 1200-1400 ap. JC.
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Récapitulatif des tests du constat d’état
Annexe 4 : Test de Mohs
Ce test a été inventé par le minéralogiste Mohs en 1812 afin de mesurer la dureté des minéraux. Il nous permet de connaitre la dureté de la matière en comparaison à des matériaux plus ou moins durs ; et d’ainsi attribuer un niveau de dureté de 1 à 10. Il permet de comprendre la fragilité de la pièce et de réfléchir au danger de l’usage du scalpel sur les différentes surfaces.
Fig. 207 : Echelle de Mohs
Matière
Sensibilité
Niveau de dureté
Pâte nue
Rayable au scalpel
5
Engobe blanc
Rayable au scalpel
5
Décors altéré
Se soulève à l’ongle
Comblement
Rayable à l’ongle, cassant au scalpel
1
Adhésif
Rayable au scalpel
5
Traces blanches
Rayable à l’ongle
1
Tests de pulvérulence Ce test permet de vérifier la résistance d’une surface aux frottements ou l’adhérence des couches superficielles. Il est réalisé à l’aide d’un morceau de ruban adhésif Tesa® sur une surface peu visible. Il est placé sur la partie à tester : la quantité de matière transférée sur le collant indique le degré de pulvérulence de la matière. Matière
Pulvérulence
Pâte nue (sous la panse)
Aucune
Engobe blanc
Pulvérulent (petits résidus sur le ruban adhésif)
Adhésif
Aucune
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Illustrations
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Comblement
Résidus noirs transférés
Poussière à l’intérieur du col
Pulvérulent (petits résidus sur le ruban adhésif)
Tests de perméabilité Ce test permet de vérifier la perméabilité des différentes surfaces et ainsi d’envisager ou non l’utilisation de traitements liquides. Une goutte d’eau est posée sur la surface et la rapidité d’absorption de celle-ci est chronométrée. Pour un résultat parfait, la goutte ne devra pas laisser de trace après absorption. Le temps indiqué correspond à la disparition totale de la goutte. Matière
Temps d’absorption
Trace
Pâte nue
10’
Aucune
Pâte engobée
1’12
Aucune
14’
Aucune
Imperméable
Aucune
Décor brun-rouge (Disque auriculaire gauche) Comblement
0 minutes
2 minutes
4 minutes
14 minutes
Fig. 208 : Test de perméabilité sur le décor brun-rouge
Tests de salinité Le degré de salinité est la proportion de matières salines contenues dans le substrat. Nous chercherons donc à déterminer cette proportion. Le test est réalisé à deux endroits différents : sur la pâte nue du fond convexe et les sels visibles sur le col (Face C). 0,15g de pulpe de papier (200 µ) imbibés d’eau déminéralisée sont placés sur un morceau de papier japon, lui-même posé sur la pièce. Après 24 heures, le tout est retiré et la pulpe de papier est immergé dans 40 ml d’eau déminéralisée. La conductivité de la compresse est mesurée à l’aide d’un conductimètre441 442 afin de quantifier la salinité. 441
Conductimètre : Appareil servant à mesurer la conductivité électrique. (Dictionnaire Larousse) Conductimètre de la marque TDS&EC meter ayant une précision de 0,01 ppm ± 0,5 % Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 442
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Localisation
Conductivité
Compresse pure
0 ppm
Pâte engobée sur le fond
40 ppm (mg/L)
Col (Face C)
42 ppm (mg/L)
Aspect après test
Pose de la compresse
Face C Fig. 209 : Test de salinité sur les traces blanches du col
Des tests d’identification des sels ont également été effectués. Des languettes permettant d’identifier les ions sulfate (SO42-), nitrate (NO3-), nitrite (NO2-) et chloride (Cl-) sont plongées une seconde dans les 40 ml de solution. Grâce à leur variation de couleurs, il est possible d’identifier certains types de sels. Cependant les résultats peuvent être faussés par des ions interférant lors du test. De plus, ils ne sont pas précis, il s’agit d’une fourchette quantifiant approximativement les ions présents. Ions
Quantité déterminée
Interférences
SO42-
< 200 mg/L
CN-, S2-
NO3-
10 < x < 25 mg/L
/
+/- 0 mg/L
/
+/- 0 mg/L
/
NO2 Cl
-
-
Par ailleurs, le pH-mètre443 indique une solution avec un pH de 5,6. Les sels solubles sont donc plutôt acides. Tests de solubilité Nous avons testé la solubilité des différents matériaux présents sur l’œuvre à l’aide des trois solvants les plus utilisés en restauration (eau déminéralisée, éthanol et acétone). Ce test nous permet d’envisager ou d’éliminer un traitement chimique sur la pièce, mais permet aussi parfois d’identifier avec plus d’exactitude la composition de ces matériaux.
443
pH-mètre : Appareil permettant la mesure électrométrique du pH (Dictionnaire Larousse) Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018
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L’ensemble de ces tests aux solvants a été réalisé sans action mécanique (coton roulé) ; puis le ramollissement de la matière est testé à l’aide d’une pointe de scalpel ; cette méthode évite la potentielle pénétration des solvants dans le substrat. Ø : aucune réaction Solvant Eau
Matériau
déminéralisée
Ethanol
Acétone
aromatique (White
Remarques
de l’œuvre
Matériaux
Spirit) Décor brunrouge Engobe blanc
Ø
Ø
Ø
Ø
Coton roulé
Ø
Ø
Ø
Ø
Coton roulé
Ø
Coton roulé
Eau déminéralisée Adhésif
chaude : gonflement et
Se ramollit et se dissout
Se ramollit et se dissout
blanchiment Comblement noir
Cassant Imperméable
sous le
Prélèvement Se ramollit
Se dissout
scalpel
d’un échantillon
Matériaux exogènes
Le blanc et le vert Dépôt j aune, vert et blanc
disparaissent, des dépôts
Coton roulé
bruns sont transférés sur le coton La matière se
Dépôt brun
ramollit et se
sur la base
retire
Coton roulé
facilement au scalpel ensuite Encrassement
Transferts
brun sur la
importants sur
base
le coton
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Transferts
Peu de
sur le coton
transferts
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Coton roulé
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Annexe 5 : Détails des décors peints de l’œuvre (Fig. 210)
Lignes horizontales et verticales formant une couronne
Yeux en amande
Bouche
Jambes décorées de traits horizontaux Léa BIZOUARN
Disque auriculaire décoré
Bras décorés de traits verticaux
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Annexe 6 : Exemple de poupées chancay au visage tatoué
H : 33,8 cm H : 35, 9 cm Collection privée de pascal LACOMBE Fig. 211 : Poupées chancay
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Annexe 7 : Chronologie selon John ROWE
Fig. 212 : Chronologie selon John ROWE
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Annexe 8 : Exemples de céramique Chimu-Lambayeque
MNAAHP Fig. 213 : Céramique à anse creuse supportant le goulot « asa estrivo »
MNAAHP Fig. 214 : Céramique à double goulot, pointu symétrique
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Annexe 9 : Fiche d’inventaire de l’œuvre étudiée « N° NNBA 6233 Vase China » par Valérie BAU
Fig. 215 : Fiche d’inventaire de l’œuvre par Valérie BAU
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Face A
Face B
Annexe 10 : Photographies de l’œuvre (quatre face) avant restauration
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Face C
Face D
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Annexe 11 : Fiches de fluorescence du gypse et de l’uranophane
Fig. 216 : Fluorescence du gypse
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Fig. 217 : Fluorescence de l’uranophane
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Annexe 12 : Tableau de valeurs selon Barbara APPELBAUM, appliqué à l’œuvre
Période Valeurs Artistique Esthétique Historique Utilisation Documentaire Pédagogique Ancienneté Nouveauté Sentimental Monétaire Associative Commémorative Rareté
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Création
+++
Utilisation
Fouille
Stockage
++ ++
++ ++
+++
+++
++
++
Aujourd’hui (Musée) + ++ ++
+++
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+++ ++ +++
+
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Annexe 13 : Fiche de sécurité du polypropylène
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Annexe 14 : Fiche de sécurité des mousses en polyéthylène
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Annexe 15 : Fiche de sécurité du Tyvek®
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Annexe 16 : Fiche de sécurité des mousses en polyuréthane
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Annexe 17 : Fiche de sécurité de l’acétone
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Annexe 18 : Fiche de sécurité de l’éthanol
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Annexe 19 : Fiche de sécurité de l’Ethomeen® C25
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Annexe 20 : Fiche de sécurité du Carbopol
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Annexe 21 : Fiche de sécurité de l’éponge Basotect®
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Annexe 22 : Fiche de sécurité de l’acide citrique
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Annexe 23 : Fiche de sécurité de la carboxyméthylcellulose
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Annexe 24 : Fiche de sécurité de l’EDTA disodique
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Annexe 25 : Fiche de sécurité du Nevek®
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Annexe 26 : Fiche de sécurité du carbonate d’ammonium
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Annexe 27 : Fiche de sécurité de la Funori®
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Annexe 28 : Fiche de sécurité de la colle d’esturgeon
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Annexe 29 : Fiche de sécurité de la Mowital® B60HH
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Annexe 30 : Fiche de sécurité du Polyfilla®
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Annexe 31 : Tests de concentration de pigments et de PVA Le Polyfilla®, qui se présente sous la forme d’une poudre blanche, est préparé dans les conditions recommandées par le fournisseur, c’est-à-dire une part d’eau pour deux parts de Polyfilla®. Nous savons en effet, par des tests préliminaires, qu’ajouter plus d’eau que la recommandation fragilise grandement le matériau une fois sec. Les pourcentages de pigments déterminés sont ajoutés à la quantité de plâtre. Les pourcentages de PVA444 sont quant à eux ajoutés à l’eau de gâchage445. Pigment / PVA
0%
5%
10%
0%
11 kg
-
-
5%
15,5 kg
14,5 kg
11,5 kg
7%
11 kg
12 kg
12 kg
10%
12,5 kg
10 kg
12,5 kg
Variation de résistance en fonction de l'ajout de pigment et de PVA 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 0%
5% 0%
5%
10% 7%
10%
Lorsqu’on ajoute du PVA dans le mélange, la ligne de cassure est beaucoup moins nette (certains tessons sont également broyés). L’ajout de PVA fonce légèrement la couleur. L’augmentation de la quantité de pigments (au moins jusqu’à 10%) ne semble pas fragiliser la structure du plâtre cellulosique. Par ailleurs, l’ajout de PVA dans le mélange ne présente pas d’augmentation significative de la résistance du plâtre.
444
PVA : Eva Art Nous ajoutons 5% de pigments par rapport à la quantité de Polyfilla®. Ainsi pour 10g de plâtre, nous ajoutons 0,05 g de pigments. Léa BIZOUARN Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique Promo 2018 322 445
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Annexe 32 : Fiche de sécurité du ruban adhésif Tesa®
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Annexe 33 : Fiche de sécurité du Parafilm®
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Annexe 34 : Fiche de sécurité du Primal™ WS24
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Annexe 35 : Photographies avant et après vieillissement accéléré des mastics de revêtement
Fig. 215 : Avant vieillissement
Fig. 216 : Après deux semaines de vieillissement
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Annexe 36 : Fiche de sécurité de la poudre de marbre
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Annexe 37 : Fiche de sécurité des microbilles de verre pleines
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Annexe 38 : Fiche de sécurité des acryliques Golden Open
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Annexe 39 : Fiche de sécurité Mylar®
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Face A
Face B
Annexe 40 : Photographie de l’œuvre (quatre faces) après restauration
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Face C
Face D
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Annexe 41 : Fiche de sécurité de l’acide oxalique
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Annexe 42 : Fiche de sécurité de l’acide phosphorique
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Annexe 43 : Fiche de sécurité de la Klucel®
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Annexe 44 : Fiche de sécurité de l’antirouille Comus
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Conservation-Restauration dâ&#x20AC;&#x2122;une jarre funĂŠraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Annexe 45 : Tableaux complets des donnĂŠes Calculs effectuĂŠs pour les incertitudes et erreurs Moyenne :
Ecart-type :
Ecart-type Ă la moyenne Ă 95 % :
đ?&#x2018;&#x161;đ?&#x2018;&#x153;đ?&#x2018;Śđ?&#x2018;&#x2019;đ?&#x2018;&#x203A;đ?&#x2018;&#x203A;đ?&#x2018;&#x2019;
Erreur relative : Ecartâ&#x2C6;&#x2019;type Ă la moyenne Ă 95 % â&#x2C6;&#x2014; 100
Tableaux complets des donnĂŠes obtenus par lâ&#x20AC;&#x2122;analyse de spectrocolorimĂŠtrie Les donnĂŠes en rouge sont la plus petite et la plus grande des valeurs. Elles nâ&#x20AC;&#x2122;ont pas ĂŠtĂŠ prises en compte pour un soucis dâ&#x20AC;&#x2122;homogĂŠnĂŠitĂŠ des rĂŠsultats. Lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcart colorimĂŠtrique est calculĂŠ selon DE* = (DL*² + Da*² + Db*²)1/2 avec DL*, Da* et Db*les diffĂŠrences entre deux teintes. SĂŠrie 1 : Acide oxalique A 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue Ă la moyenne Ecart-type Ecart-type Ă la moyenne Ă 95 % E. relative (%) LĂŠa BIZOUARN
B
C
DE* A-C
DE* B-C
L* 57,02 55,98 62,13 57,89 64,24 55,74 62,49 61,47 58,23 63,46 59,8
a* 11,25 10,85 9,51 7,98 8,58 12,18 7,06 9,42 10,53 9,11 9,539
b* 21,41 22,7 19,41 17,88 18,33 22,61 15,87 19,65 19,78 19,97 19,88
L* 33,96 46,48 31,44 37,6 37,74 32,52 32,93 35,9 50 40,76 37,24
a* 17,91 17,93 17,92 17,91 17,91 17,89 17,89 17,91 17,91 17,91 17,91
b* 23,64 29,42 20,25 29,75 24,45 20,92 18,3 24,65 37,33 26,21 24,91
L* 61,18 61,11 60,13 41,54 61,46 61,31 58,83 60,1 57,88 63,24 60,25
a* 15,25 15,26 15,27 15,27 15,28 15,25 15,23 15,23 15,24 15,25 15,25
b* 23,13 23,39 24,88 19,21 22,79 21,82 24,35 23,66 26,29 20,8 23,1
6,022 6,8 8,191 17,95 8,515 6,409 12,33 7,191 8,043 6,2 7,96
27,35 16,05 29,18 11,56 23,92 28,92 26,73 24,37 13,82 23,27 23,09
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,08
0,08
2,907 1,357 1,535 4,653 0,008 3,484 1,302 0,014 1,318 1,961
4,244
0,034 0,101 0,055 0,088 3E-04 0,099 0,015 6E-04
0,174
0,13
0,057 1,055 0,275 0,237 0,002 0,397 0,025 0,004 0,175 2,188
0,563
Conservation-Restauration du Patrimoine, spĂŠcialitĂŠ cĂŠramique
0,04
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Série 2 : Acide citrique A 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
B
C
DE* A-C
DE* B-C
L* 63,72 64,19 61,56 64,58 58,39 61,66 62,91 62,03 65,86 59,9 62,57
a* 7,84 7,82 9,56 7,67 11,05 9,41 8,8 10,09 8,27 10,31 8,994
b* 18,96 19,33 19,37 18,37 22,28 19,96 19,85 20,67 18,15 20,23 19,59
L* 42,93 35,23 36,14 35,82 47,64 45,99 43,38 55,02 39,5 46,58 42,25
a* 17,81 17,8 17,97 18,05 17,91 18,08 17,85 17,74 17,91 17,89 17,9
b* 30,95 23,97 22,16 20,81 28,87 34,42 28,48 36,38 28,47 29,88 28,4
L* 52,58 59,93 52,06 46,96 55,87 59,24 51,87 55,32 51,76 52,52 53,9
a* 14,77 15,08 15,17 15,23 15,18 15,65 15,39 15,23 15,13 15,14 15,19
b* 29,62 25,36 30,64 24,88 29,66 25,72 28,25 30,29 31,65 31,22 28,85
16,9 10,35 15,77 20,25 8,824 8,83 15,36 12,81 20,69 14,09 14,3
10,2 24,89 18,25 12,19 8,707 16,04 8,842 6,594 12,97 6,681 11,74
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,08
0,08
1,575 1,005 0,735 4,626 0,083 3,849 2,677 0,094 2,219 3,649 6,104 0,018 0,079 0,027 0,077 0,003 0,096 0,035 0,004 0,054
0,18
0,368
0,028 0,879 0,135 0,183 0,018 0,337 0,065 0,029 0,189 1,263 3,134
Série 3 : acide phosphorique A L* a* 64,36 8,52 60,94 9,75 61,37 9,26 61,9 7,87 61,54 9,25 61,67 8,02 64,24 8,92 63,19 8,78 58,35 10,9 64,2 8,55 62,4 8,881
B b* 20,14 19,42 20,6 17,56 18,31 18,91 19,89 17,61 22,64 18,23 19,14
L* 46,45 36,06 36,94 45,8 29,01 40,2 35,32 43,57 43,51 45,95 40,13
a* 17,92 17,89 16,08 17,21 19,46 16,21 20,41 18,91 16,06 18,07 17,72
C b* 34,93 26,17 24,42 30,05 21,53 27,11 27,15 33,21 28,06 30,49 28,33
L* 55,54 57,89 42,22 53,57 49,43 58,68 36,12 45,95 45,43 53,61 50,46
a* 12,91 11,66 14,24 14,51 15,76 10,47 18,32 16,96 16,21 15,02 14,66
b* 28,96 24,41 21,99 29,45 29,74 22,06 18,82 20,75 25,57 27,56 25,09
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la 0,04 0,04 0,04 0,04 0,04 0,04 0,04 0,04 0,04 moyenne Ecart-type 1,332 0,538 1,048 5,851 1,187 2,786 7,053 1,744 3,347 Ecart-type à la moyenne 0,015 0,043 0,039 0,103 0,047 0,07 0,099 0,084 0,094 à 95 % E. relative 0,024 0,483 0,202 0,257 0,267 0,245 0,196 0,574 0,376 (%) Léa BIZOUARN
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
DE* A-C
DE* B-C
13,22 6,152 19,84 15,96 17,88 4,986 29,67 19,34 14,27 15,53 15,27
11,97 22,77 6,097 8,248 22,32 20 8,625 12,83 3,148 8,75 12,36
0,08
0,08
4,36
7,181
0,202 0,411 1,322 3,326
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Série 4 : Antirouille Comus DE* A-C
DE* B-C
L* a* b* L* a* b* L* a* b* 62,47 9,3 19,98 49,11 16,31 29,58 54,92 14,35 30,61 60,87 10,03 21,83 46,52 17,03 29,52 51,62 15,91 29,98 61,2 10,28 22,34 43,02 16,62 29,68 53,18 15,5 31,13 62,55 9,26 21,12 47,85 16,66 30,96 56,48 13,47 31,39 60,91 9,06 20,02 45,03 18,1 31,42 50,59 14,12 26,52 65 7,88 17,55 47,32 17,23 30,86 49,73 15,21 30,71 63,53 9,51 20,78 28,93 16,35 17,35 55,43 14,08 30,72 61,41 7,72 18,68 44,8 17,01 28,93 55,09 13,56 30,47 56,17 11,2 20,51 43,88 17,1 31,47 54,94 14,14 29,27 59,62 10,16 20,7 44,18 17,71 35,31 52,2 15,94 32,24 61,57 9,55 20,45 45,48 16,96 30,3 53,5 14,61 30,54
13,98 13,66 12,99 12,65 13,2 21,45 13,61 14,6 9,322 14,89 13,7
6,218 5,242 10,32 9,211 8,412 3,148 29,77 10,96 11,66 8,768 8,849
0,04
0,04
0,08
0,08
1,225 0,964 0,931 2,022 0,421 0,983 1,857 0,824 0,662
0,77
2,908
0,014 0,071 0,032 0,031 0,018 0,023 0,025
A 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
0,04
B
0,04
0,04
0,04
C
0,04
0,04
0,04
0,04
0,015
0,04
0,232
0,023 0,747 0,157 0,069 0,103 0,076 0,046 0,273
0,05
0,29
2,626
DE* A-C
DE* B-C
Série 5 : EDTA pH 5 A 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%) Léa BIZOUARN
B
C
L* 57,27 61,34 60,78 62,74 58,93 60,1 59,97 59,93 60,49 61,92 60,43
a* 11,75 9,4 10,1 8,83 9,59 9,64 10,55 9,9 10,24 9,99 9,926
b* 23,61 20,5 21,7 18,55 20,73 20,8 23,22 22,71 21,47 21,78 21,61
L* 41,9 50,25 51,17 53,09 36,95 46,14 39,57 41,77 49,64 42,29 45,34
a* 15,49 16,09 17,86 15,56 15,79 16,23 15,18 15,68 15,6 17,5 16,04
b* 27,03 31,05 33,43 36,18 25,5 30,17 21,58 26,88 31,21 29,68 29,37
L* 58,37 55,81 58,64 63,19 62,39 58,35 60,59 60,07 57,13 60,34 59,49
a* 10,38 12,28 11,95 9,29 8,97 11,15 10,93 10,42 10,98 11,11 10,78
b* 23,37 25,39 25,98 19,44 19,59 23,58 23,01 22,97 22,97 24,39 23,23
1,773 7,924 5,13 1,098 3,695 3,615 0,757 0,598 3,753 3,25 2,884
17,63 8,801 12,09 20,53 26,99 14,78 21,49 19,44 12,06 19,87 17,24
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,04
0,08
0,08
0,925 0,377 0,965 4,542 0,781 2,675
1,67
0,773 1,792 1,515 4,525
0,011 0,027 0,032 0,071 0,034 0,064
0,02
0,051 0,055 0,372 0,186
0,018
0,27
0,146 0,156 0,215 0,219 0,033 0,471 0,235 12,88 1,077
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
Promo 2018
360
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Tableaux complets des données obtenus par l’analyse de spectrométrie de fluorescence X Les données en rouge sont la plus petite et la plus grande des valeurs. Elles n’ont pas été prises en compte pour un soucis d’homogénéité des résultats. Série 1 : acide oxalique
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
A 3,33 3,07 3,66 3,77 3,09 3,1 3,47 3,81 3,56 3,67 3,46
B 24,06 7,57 10,59 13,45 9,22 12,46 13,38 14,63 6,86 11,22 11,57
Fe C 3,81 5,13 4,4 5,62 5,03 5,9 4,01 4,44 4,82 11,43 4,92
Ca
0,03
0,09
0,05
0,08
0,14
0,35
0,2
0,1
0,45
0,26
2,38
0,64
0,81
3,24
2,62
0,96
1,54
2,54
0,053
0,15
0,091
0,39
0,41
0,17
0,14
0,13
0,58
1,54
1,26
1,86
26,35
7,21
1,5
2,92
1,66
19,06
A 3,77 3,95 3,42 3,80 3,57 3,86 3,86 3,70 3,88 3,22 3,73
B 8,23 10,38 12,63 9,57 8,37 7,66 8,14 7,48 7,50 6,81 8,44
Fe C 6,52 4,54 6,12 7,46 5,09 4,29 6,29 4,76 5,94 5,99 5,66
C-A 2,75 0,59 2,70 3,65 1,52 0,42 2,44 1,05 2,06 2,77 1,99
B-C 1,71 5,84 6,51 2,12 3,28 3,37 1,85 2,72 1,56 0,82 2,80
A 8,62 8,09 11,60 7,89 10,92 8,93 8,63 11,44 8,22 14,79 9,53
B 5,39 4,53 3,86 4,98 5,40 5,62 5,44 6,64 5,55 7,84 5,36
C 6,03 7,54 6,10 5,92 6,98 7,08 6,21 6,97 6,27 6,55 6,52
A-C 2,59 0,55 5,50 1,96 3,94 1,85 2,42 4,47 1,95 8,24 3,08
0,03
0,06
0,05
0,08
0,11
0,11
0,10
0,10
0,21
0,16
1,053
0,75
0,84
1,41
1,526
0,77
0,43
1,38
C-A 0,48 2,05 0,74 1,85 1,94 2,8 0,54 0,63 1,26 7,76 1,48
B-C 20,25 2,45 6,19 7,83 4,49 2,56 9,37 10,19 2,04 -0,21 5,64
A 11,7 14,71 8,91 8,48 15,21 15,42 11,17 8,47 9,59 9,11 11,11
B 3,32 5,81 5,36 5,75 5,58 3,21 3,99 4,71 6,62 3,97 4,81
C 9,01 8,71 8,51 10,22 8,69 4,31 8,49 8,37 8,54 4 8,08
A-C 2,69 6,01 0,39 -1,75 6,52 11,11 2,68 0,1 1,05 5,11 3,07
Série 2 : acide citrique
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Léa BIZOUARN
Ca
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
Promo 2018
361
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
0,03
0,088
0,09
0,3
0,36
0,113
0,11
0,05
0,32
0,82
1,05
1,66
15,1
12,7
1,19
1,89
0,71
10,2
Série 3 : acide phosphorique
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
A 3,92 3,55 3,72 3,76 3,10 3,89 3,69 3,62 3,49 3,81 3,69
B 9,54 11,82 14,24 10,78 10,24 14,41 9,20 10,80 7,96 8,81 10,68
Fe C 5,22 7,15 6,23 5,96 7,16 4,84 7,74 8,32 6,12 7,28 6,61
Ca
0,03
0,07
0,05
0,08
0,12
0,11
0,10
0,09
0,20
0,132
1,627
0,85
1,14
2,104
1,198
0,721
0,491
1,619
0,025
0,108
0,091
0,259
0,387
0,089
0,112
0,063
0,282
0,687
1,009
1,376
8,294
10,07
0,939
2,465
1,141
6,945
C-A 1,31 3,60 2,51 2,21 4,06 0,95 4,05 4,70 2,63 3,47 3,12
B-C 4,32 4,67 8,01 4,81 3,08 9,57 1,46 2,49 1,84 1,53 3,84
A 8,02 10,25 9,01 8,20 16,16 7,78 11,27 10,09 10,55 8,62 9,50
B 5,53 3,93 3,45 4,11 4,68 3,40 5,05 4,32 6,41 5,31 4,55
C 6,39 5,16 5,79 5,71 5,20 6,69 4,91 4,62 5,79 5,17 5,51
A-C 1,63 5,10 3,22 2,48 10,96 1,09 6,36 5,48 4,76 3,45 4,06
Série 4 : Antirouille Comus
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Léa BIZOUARN
A 3,53 3,76 3,80 3,87 3,63 3,74 3,87 3,83 3,33 3,57 3,72
B 6,56 8,12 8,20 8,60 9,72 7,83 13,71 7,76 9,53 10,89 8,83
Fe C 4,07 4,77 4,51 4,32 4,04 4,56 3,99 4,42 4,61 4,33 4,36
Ca
0,04
0,06
0,04
0,08
0,10
0,11
0,10
0,09
0,20
0,125
1,107
0,214
0,201
1,228
1,478
0,805
0,306
1,682
C-A 0,54 1,00 0,72 0,45 0,41 0,83 0,12 0,60 1,28 0,76 0,66
B-C 2,49 3,36 3,69 4,28 5,68 3,27 9,72 3,34 4,92 6,56 4,39
A 8,99 10,86 9,00 8,91 9,88 8,40 8,15 7,81 13,91 12,39 9,53
B 6,57 5,76 6,67 6,11 6,72 5,81 4,67 7,19 4,79 4,12 5,89
C 6,31 6,01 6,25 6,94 7,19 6,78 6,90 6,76 6,80 6,21 6,62
A-C 2,68 4,85 2,75 1,97 2,69 1,62 1,26 1,06 7,11 6,18 3,00
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
Promo 2018
362
Conservation-Restauration d’une jarre funéraire anthropomorphe de la civilisation chancay
Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
0,024
0,089
0,035
0,215
0,198
0,11
0,097
0,033
0,397
0,642
1,004
0,796
32,43
4,513
1,151
1,643
0,494
13,23
A 3,32 3,69 3,54 3,68 3,86 3,48 3,79 3,74 3,72 3,59 3,65
B 7,81 10,32 6,16 8,99 8,98 8,04 15,25 10,48 7,44 9,53 8,95
Fe C 5,62 6,05 5,28 5,21 7,23 5,75 5,63 5,60 6,09 5,99 5,75
C-A 2,30 2,36 1,74 1,53 3,36 2,27 1,84 1,86 2,37 2,41 2,14
B-C 2,20 4,27 0,89 3,78 1,75 2,29 9,62 4,88 1,35 3,53 3,01
A 11,29 8,83 10,22 9,16 8,77 13,26 9,01 8,78 9,32 9,98 9,57
B 5,77 5,24 7,66 5,27 5,03 6,67 4,30 5,08 6,42 5,19 5,58
C 6,88 7,13 7,17 7,08 6,13 6,72 6,85 6,86 6,72 6,64 6,86
A-C 4,41 1,71 3,05 2,08 2,65 6,54 2,16 1,92 2,61 3,34 2,78
0,03
0,07
0,05
0,08
0,12
0,10
0,10
0,10
0,20
0,109
1,131
0,279
0,28
1,469
0,867
0,638
0,174
0,82
0,021
0,089
0,034
0,092
0,346
0,064
0,081
0,018
0,209
Série 5 : EDTA pH 5
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne Incertitude absolue à la moyenne Ecart-type Ecart-type à la moyenne à 95 % E. relative (%)
Léa BIZOUARN
0,575
0,999
0,597
Ca
4,307
11,5
0,669
Conservation-Restauration du Patrimoine, spécialité céramique
1,448
0,261
Promo 2018
7,53
363