Aude RICHARD-Restauration de La Main, peint par Marian Kasperczyk en 1992

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ÉTUDE ET CONSERVATION -  RESTAURATION DE LA MAIN, PEINT PAR MARIAN KASPERCZYK EN 1992 Sujet technico-scientifique : Étude de l'effet d'un solvant siliconé sur des films de peinture acrylique en émulsion Mots clés : Art Contemporain – Artiste vivant – Perception – Acrylique – Auréole –Feuil érodé – Interventions raisonnées – Cyclométhicone® – Solvant siliconé

Aude RICHARD Spécialité Peinture de chevalet - Promotion 2017



ÉTUDE ET CONSERVATION - RESTAURATION DE LA MAIN (1992), PEINT PAR MARIAN KASPERCZYK

STUDY AND CONSERVATION OF THE HAND (1992), PAINTED BY MARIAN KASPERCZYK

Mémoire de fin d’études Soutenu par Aude Richard En vue de l’obtention du titre de Restaurateur- Conservateur du Patrimoine Spécialité peinture de chevalet Octobre 2017


Toute science commence comme philosophie et se termine en art. Will Durant


I

Remerciements Je tiens à remercier toutes les personnes ayant contribué à l’élaboration de ce mémoire. En premier lieu, Marian Kasperczyk pour sa gentillesse, sa patience et la confiance qu’il m’a accordée en me prêtant ce tableau. Merci à mes enseignants : Madame Szyc, Monsieur Nouaille, Monsieur Crinel, Madame Pasquet, Monsieur Ollier et Monsieur Da Cruz pour leurs conseils avisés et leur disponibilité pendant ces cinq années. Merci également à Monsieur Pepe pour l’encadrement de la partie technicoscientifique avec énergie et bonne humeur. Mes vifs remerciements vont aussi aux membres du jury pour l’intérêt porté à cette recherche en acceptant de l’étudier. Merci à Julie Bousquet, Rachel Barker, Bronwyn Ormsby et Benoît Janson pour leur aide et leurs commentaires avertis. Merci encore à la société Polymex pour leur gracieuse contribution. Je remercie également mes maîtres de stage : Michael Duffy, Anny Aviram, Agata Mendys, Julio del Hoyo et Gwendolyn Boevé-Jones pour leur partage de connaissances. Grâce à leur confiance, j’ai pu m’accomplir totalement dans mes missions. Merci au personnel administratif de l’école de Condé. Merci à mes camarades de promotion pour nos échanges passionnés et ces cinq années où nous avons, chacune, évolué grâce aux autres. Je tenais également à remercier mes parents, sans lesquels je n’aurais pu effectuer ces études. Merci à toutes les personnes qui m’ont conseillée et relue. Merci à A., équipier et soutien depuis toutes ces années.

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ii

Résumé Ce mémoire expose l’étude de La Main de Marian Kasperczyk. Œuvre contemporaine datant de 1992, elle mesure 120 cm par 60 cm et est réalisée avec de la peinture acrylique pour bâtiment et de la technique « Back to Front ». Cette œuvre a subi un dégât des eaux et présentait des altérations qui rendaient sa lisibilité compliquée. L’étude pluridisciplinaire de ce tableau constitue ainsi l’intégralité de cet écrit. Nous nous demandions comment traiter cette œuvre, avec un maximum de déontologie, quand le comportement et le vieillissement de ce nouveau liant sont inconnus. Il existe encore peu d’études ou de rapports sur la restauration des peintures acryliques. Ce sujet nous a amenée vers divers interviews de l’artiste, des échanges avec des professionnels internationaux et de nombreuses recherches. Le premier chapitre, l’analyse historique, permet de montrer que Marian Kasperczyk est un artiste qui s’inscrit pleinement dans son temps. Son art est composé de nombreuses influences tout en restant profondément personnel. L’œuvre se distingue par sa plastique si particulière et par sa sémantique à rapprocher avec les philosophes Maurice Merleau-Ponty et Michel Henri. Cette étude a donné l’entière compréhension esthétique de l’œuvre et de la volonté de l’artiste, ce qui s’avérait essentiel à l’élaboration des deux chapitres suivants. La deuxième partie est constituée de l’analyse approfondie de la matérialité et des altérations de l’œuvre. Elle rend possible la compréhension des matériaux utilisés par l’artiste, mais aussi de différencier les altérations d’origine aux autres pour permettre de comprendre leurs causes. Le troisième chapitre découle du précédent et donne lieu à l’établissement d’un cahier des charges, d’une proposition de traitement puis des opérations de conservation – restauration effectuées. Il rassemble les diverses problématiques de restauration inhérentes à l’œuvre. Les produits et méthodes possibles y sont discutés. Puis, des décisions sont prises et le traitement de l’œuvre débute. Ce dernier a permis de redonner à l’œuvre sa stabilité et sa lisibilité. La dernière partie est consacrée aux problèmes que présentent les peintures acryliques en émulsion à l’opération de nettoyage. L’étude technico-scientifique porte sur les impacts d’un solvant siliconé, le Cyclométhicone® D5, sur des films de ce type de peinture. Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


iii

Abstract This thesis set the study of the Hand by Marian Kasperczyk out. Contemporary artwork dating from 1992, it measures 120 x 60 cm and is created with acrylic build paint and the technique “Back to Front”. This work has been water-damaged and had degradation that made its legibility complicated. The multidisciplinary approach study of this painting constitutes the entirety of this work. We wondered how to deal with this artwork, with the utmost of ethics, when the behavior and the aging of this new binder is unknown. There are still a few studies or reports on the conservation of acrylic paintings. This subject conducted us to many artist’s interviews, exchanges with international professionals, and research. The first chapter, the historical analysis, displays that Marian Kasperczyk is an artist who is fully of its time. His art is made up of many influences while remaining deeply personal. The work is distinguishable by its distinctive plastic and its semantic that we can assimilate to Maurice Merleau-Ponty’s and Michel Henry’s philosophies. This study gave the works aesthetic and artist’s will. These were essential to the elaboration of the following chapters. The second part consists in an extensive analysis of the materiality and the alterations on the artwork. This makes it possible to comprehend the materials used by the artist but also to differentiate the original alterations compared to the other ones in order to understand their cause. The third part follows the previous one, which leads to establish the specification, a treatment proposal and the conservation-restoration operations that have been done. It reassembles the various problematics of restoration inherent to the painting. The possible products and methods used are debated here. Then, the decisions are taken, the treatment may start. The treatment permitted for the painting to gain back some stability and readability. To finish, the last part studies the problems that can occur with acrylic emulsion paint during the cleaning process. The technical scientific study will focus on the use of a silicone solvent, the Cyclomethicone® D5, on films of acrylic paint and the results will be reported.

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iv

Table des sigles et abréviations AFM : Microscope à Force Atomique (en anglais : Atomic Force Microscopy) AMD : Analyse Mécanique Dynamique COV : Composés organiques volatils CPV : Concentration pigmentaire volumique CPVC : Concentration pigmentaire volumique critique DSC : Calorimétrie Différentielle à Balayage (en anglais : Differential Scanning Calorimetry) EDTA : Éthylène Diamine Tétra-Acétique HEPA : High Efficiency Particulate Air INCI : Nomenclature Internationale des Ingrédients Cosmétiques (en anglais : International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) IRTF : Spectroscopie InfraRouge à Transformée de Fourier ATR : Réflectance Totale Atténuée (en anglais : Attenuated Total Reflectance) LANBOZ : Laboratoire d’analyses et de recherches non-destructives des objets du patrimoine (en polonais : Laboratorium Analiz i Nieniszczących Badań Obiektów Zabytkowych) MEB : Microscope Électronique à Balayage MFK : Medium for Consolidation PDMS : PolyDiMethylSiloxane PVF : Poly(Vinyl Formal) Py-GC-MS : Pyrolyse-Chromatographie en phase Gazeuse – Spectrométrie de Masse (en anglais : Pyrolysis – Gas Chromatography – Mass Spectrometry) S.T.A : Solution tamponnée ajustée UTM : Machine d’essais universelle (en anglais : Universal Testing Machine) VMS : MethylSiloxanes cycliques Volatils (en anglais : Volatile MethylSiloxane) Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


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Sommaire Remerciements ....................................................................................................................... i Résumé .................................................................................................................................. ii Abstract ................................................................................................................................. iii Table des sigles et abréviations ............................................................................................ iv Sommaire ............................................................................................................................... v Fiche d’identification ............................................................................................................ ix Avant-propos ........................................................................................................................ xi

Introduction générale ............................................................................................................. 1 ÉTUDE HISTORIQUE ................................................................................................................ 3 Introduction ........................................................................................................................... 4 Les processus de création d’une œuvre originale et inédite .......................................... 5

I.

I.1.

Histoire de La Main pas-à-pas ............................................................................ 5

I.2.

La Main révèle l’homme ..................................................................................... 6

II.

Étude des lignes de La Main ....................................................................................... 15 II.1.

Par une force plastique puissante et délicate naît la symbolique de La Main ... 15

II.2.

La Main, une des premières œuvres figuratives de Marian Kasperczyk .......... 24

III.

La Main, une œuvre inclassable mais apparentée à des courants philosophiques et

picturaux du vingtième siècle .............................................................................................. 25 III.1.

La perception au centre de l’œuvre ................................................................... 25

III.2.

Une œuvre aux influences artistiques multiples qui s’inscrit pleinement dans son

temps

29

Conclusion ........................................................................................................................... 36

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vi APPROCHE MATÉRIELLE ....................................................................................................... 37 Introduction ......................................................................................................................... 37 I.

Étude technique ........................................................................................................... 38 I.1.

Généralités ......................................................................................................... 38

I.2.

Étude stratigraphique......................................................................................... 39

I.3.

Le support textile............................................................................................... 40

I.4.

Le feuil .............................................................................................................. 44

I.5.

Le châssis .......................................................................................................... 51

I.6.

Mise sur châssis ................................................................................................. 54

II.

Examen des altérations ................................................................................................ 55 II.1.

Le support.......................................................................................................... 55

II.2.

Le feuil .............................................................................................................. 60

II.3.

Relevé des altérations de la face de l’œuvre ..................................................... 66

III.

Diagnostic ................................................................................................................. 68

III.1.

Origine et nature des altérations ........................................................................ 68

III.2.

Pronostic ............................................................................................................ 74

III.3.

Nécessité d’intervention .................................................................................... 76

Conclusion ........................................................................................................................... 77

CONSERVATION – RESTAURATION........................................................................................ 78 Introduction ......................................................................................................................... 78 I.

Cahier des charges ....................................................................................................... 79 I.1.

L’art contemporain : des problématiques nouvelles ......................................... 79

I.2.

Objectifs de la conservation – restauration ....................................................... 80

I.3.

Paramètres généraux ......................................................................................... 81

I.4.

Problématiques soulevées ................................................................................. 82

I.5.

Paramètres des interventions ............................................................................. 85 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


vii II.

Proposition de traitement ............................................................................................. 90 II.1.

Couche picturale ................................................................................................ 90

II.2.

Support ............................................................................................................ 105

III.

Opérations de conservation - restauration .............................................................. 108

III.1.

Mesures de conservation préventive ............................................................... 108

III.2.

Restauration de La Main ................................................................................. 116

Conclusion ......................................................................................................................... 133

ÉTUDE TECHNICO-SCIENTIFIQUE ......................................................................................... 134 Introduction ....................................................................................................................... 135 I.

Contexte ..................................................................................................................... 136 I.1.

Peinture acrylique en émulsion ....................................................................... 136

I.2.

Solvants siliconés ............................................................................................ 139

II.

Protocole expérimental .............................................................................................. 140 II.1.

Échantillon modèle .......................................................................................... 140

II.2.

Solvant d’immersion ....................................................................................... 143

II.3.

Déroulement de la procédure d’immersion ..................................................... 143

II.4.

Méthodes de mesure ........................................................................................ 143

III.

Résultats ................................................................................................................. 154

III.1.

Rétention du solvant ........................................................................................ 154

III.2.

Résidus et composés extractibles .................................................................... 155

III.3.

Changements physiques .................................................................................. 158

III.4.

Propriétés mécaniques ..................................................................................... 167

III.5.

Modifications morphologiques ....................................................................... 170

IV.

Discussion............................................................................................................... 174

Conclusion ......................................................................................................................... 176 Conclusion générale .......................................................................................................... 177 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


viii Glossaire ............................................................................................................................ 196 Table des illustrations ........................................................................................................ 202 Annexes ................................................................................................................................. 1

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Fiche d’identification Titre ou désignation de l’œuvre : « La Main » Date d’entrée en atelier : 08/09/2015 Photographies des faces avant intervention

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Renseignements relatifs à l’objet Auteur : Marian KASPERCZYK Date d’exécution : 1992 Dimensions : 120 x 60 x 2,5 cm Inscription(s) particulière(s) : Revers de la toile, partie inférieure : « KASPERCZYK 92 » État de conservation et présentation des altérations : Auréoles, perte de tension, déformations, décoloration, traces, encrassement de la surface (…). Fonction et nature de l’objet Description – représentation : Dos d’une main, doigts vers le bas Matériaux constitutifs : Toile mixte lin-coton, peinture pour bâtiments (styrène-acrylique) Technique : « Back to Front painting » (peinture sur l’envers de toile) Documentation Prêteur – propriétaire : Marian Kasperczyk Lieu de conservation : Atelier de l’artiste

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Avant-propos Désireuse de travailler sur une peinture contemporaine faite de peinture acrylique et s’inscrivant dans des recherches actuelles de conservation - restauration pour notre mémoire de fin d’études, nous avons cherché des organismes pouvant recevoir notre demande. Cependant, les œuvres réalisées à base de liants de synthèse sont souvent soit trop grandes, soit pas assez altérées. Nous avons décidé de rechercher la source de ces œuvres et de contacter directement les artistes. Un jour, nous nous sommes rendue sur le site de Marian Kasperczyk. Dès cet instant, nous avons eu un coup de cœur pour son art. Une fois contacté, l’artiste a répondu favorablement à notre demande et a suggéré une œuvre à restaurer. Nous avons été fascinée par sa technique de création et notre choix se porta rapidement sur cette œuvre. Nous nous sommes réjouie de pouvoir effectuer un travail innovant et dans l’actualité des recherches de conservation – restauration d’œuvres contemporaines.

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Introduction générale Cette étude s’inscrit dans le domaine de la conservation – restauration d’art contemporain. Elle se situe dans la continuité des recherches actuelles dans cette spécialité. Le travail réalisé fut le fruit d’une étroite collaboration avec l’artiste et avec des professionnels en France et à l’étranger, qu’ils soient restaurateurs ou scientifiques. Ces différents échanges nous permirent d’édifier l’axe majeur de ce mémoire : la conservation et la restauration de La Main de Marian Kasperczyk. En effet, comment traiter une œuvre contemporaine, le plus déontologiquement possible, quand le comportement et le vieillissement des matériaux intrinsèques sont inconnus ? L’objectif de cette recherche s’est appliqué à répondre à cette interrogation. Le tableau à traiter se dénomme La Main (1992) de Marian Kasperczyk ; il se compose de peinture acrylique pour bâtiment sur toile. La technique utilisée par l’artiste est originale et s’appelle le « Back to Front ». La conservation – restauration de ce type de tableau requiert toujours une grande réflexion dans les interventions où les gestes, matériaux et outils traditionnellement utilisés peuvent parfois être risqués pour l’œuvre. Qui plus est, la peinture acrylique en émulsion, majeur constituant de La Main, est un liant où le recul, dans notre métier, est faible. Ce type de peinture depuis les années cinquante et l’étude de leur traitement n’a réellement commencé que dans les années deux-mille. Afin de comprendre le comportement de l’œuvre et de ses matériaux depuis sa création, il est nécessaire de l’étudier au maximum. L’étude préalable s’avère importante : il faut comprendre l’œuvre en question pour ne pas la dénaturer avec une restauration abusive. C’est dans cette optique que l’étude historique a été réalisée. Elle constitue le premier chapitre de ce mémoire et se consacre d’abord aux processus de création. Cela permettra de faire connaissance avec l’artiste, sa technique et son style. L’analyse approfondie de l’œuvre sera ensuite réalisée. Puis, nous tenterons de la confronter à des courants de pensée et artistiques. La deuxième partie de notre recherche permettra de rapprocher ces informations aux renseignements matériels issus de l’objet avant d’établir un constat d’état et un diagnostic. Ces derniers occasionneront une troisième partie consistant en un cahier des charges, une proposition de traitement puis les opérations de conservation – restauration réalisées. Cela

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2 retracera les produits et méthodes s’offrant à nous puis les causes des choix pris pour le traitement de l’œuvre. Les opérations concernant la couche picturale telles que le nettoyage et la consolidation semblent délicates au vu du manque de connaissance quant aux interactions chimiques entre les matériaux de restauration et les couches picturales acryliques. Dans le dernier chapitre sera étudié plus profondément le problème du nettoyage des acryliques et plus particulièrement l’usage du solvant : le Cyclométhicone® D5. Cette recherche technico-scientifique se penchera sur les différents effets de ce solvant sur les films de peinture acrylique en émulsion.

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ÉTUDE HISTORIQUE

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CHAPITRE 1 ÉTUDE HISTORIQUE MARIAN KASPERCZYK, PLACE DE L’HOMME ET DE SON ŒUVRE DANS L’HISTOIRE PROCESSUS DE CRÉATION / ÉTUDE FORMELLE / RAPPROCHEMENT DE L’ŒUVRE À DES COURANTS

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ÉTUDE HISTORIQUE

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Introduction Travailler avec un artiste vivant sur lequel il y avait peu de sources écrites existantes était un défi à relever. Les œuvres de Marian Kasperczyk sont singulières de par leur technique et leur rendu si sensible et expressif. Cela nous a conduit à nous demander comment et à quels courants existants rapprocher La Main de Marian Kasperczyk. La pertinence de cette problématique s'est d'ailleurs confirmée au cours des travaux préparatoires de cette étude. Marian Kasperczyk est un artiste qui n'a que peu été étudié et qui, pourtant, mérite que l'on s'intéresse à lui et à son art. Ses œuvres hors du commun demandent une attention particulière pour en permettre une meilleure popularisation et compréhension. Cette recherche s'appuie sur les nombreux entretiens avec l'artiste, l’analyse des écrits des philosophes Maurice Merleau-Ponty et Michel Henry et les ouvrages d'histoire de l'art du vingtième et vingt et unième siècle. Nous déterminerons les courants de pensée philosophiques et historiques de l’œuvre et tenterons de répondre aux interrogations suivantes : quelle est cette technique si spéciale ? Quelles sont les caractéristiques intrinsèques de l’œuvre ? Par sa plastique spécifique, à quelle philosophie du visible et de l’invisible correspond-elle ? À quelles tendances plastiques la rapprocher ? Après une première partie consacrée à l’étude des processus de création de l’œuvre où nous identifierons La Main, nous présenterons l'artiste et son œuvre générale (I). L’étude approfondie de l’œuvre sera réalisée en présentant son iconographie, sa plastique et sa place dans l’œuvre globale de l’artiste (II). Enfin, nous verrons le rapprochement de La Main à un courant, qu’il soit philosophique ou artistique (III).

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ÉTUDE HISTORIQUE

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I. Les processus de création d’une œuvre originale et inédite Ce premier chapitre expose le parcours de l’œuvre de mémoire puis présente Marian Kasperczyk et son travail. Cela permettra la compréhension de l’évolution de l’artiste et la création du tableau traité.

I.1. Histoire de La Main pas-à-pas L’œuvre étudiée est une peinture nommée « La Main » de Marian Kasperczyk, prêtée par l’artiste lui-même. Elle date de 1992 et mesure cent-vingt centimètres de hauteur par soixante centimètres de largeur. Elle représente le dos d’une main gauche avec les doigts vers le bas. L’artiste a signé au revers de la toile par « KASPERCZYK 92 ». Cette peinture a été créée grâce à la technique « Back to Front », à l’aide de peintures pour bâtiments et d’une toile mixte lin-coton. Elle a été réalisée dans une usine désaffectée à Ivry1 et fait partie d’une série de six ou huit tableaux datant de 1991 - 1992 dont le sujet est la main. Ses peintures étant réalisées d’après des photographies, les mains de cette série appartiennent à différentes personnes et vont par paire (main droite – main gauche). Malheureusement, certains des tableaux ont été vendus seuls et le pendant de l’œuvre traitée a été cédé. La peinture prêtée est restée auprès de Marian Kasperczyk jusqu’à sa

Figure 1 : Marian Kasperczyk, La Main, 1992.

restauration actuelle.

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Ces informations proviennent des divers entretiens effectués avec Marian Kasperczyk, cf. annexe 1

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ÉTUDE HISTORIQUE

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I.2. La Main révèle l’homme2 I.1.1. Un peintre authentique Marian Władisław Kasperczyk est né à Oświęcim3 le 26 août 19564 de Cecylii Kasperczyk (né Kołodzej en 1922) et de Władisław Kasperczyk (né en 1932). Tous deux sont originaires d’Oświęcim ; le couple a quitté la ville du fait de l’occupation allemande durant la Seconde Guerre mondiale et revient s’installer dans leur maison après 19455. Marian Kasperczyk est le second enfant d’une fratrie de quatre : Wanda (née en 1955), Marian, Anna (née en 1962) et Magdalena (née en 1975). Pendant leur enfance, ils habitent Oświęcim au 80 rue Brzezinka.

Figure 2 : Photographie de Marian Kasperczyk pour l'Académie des Beaux-Arts.

Dès son plus jeune âge, Marian Kasperczyk présente des aptitudes au dessin ; ce qui lui vient de son père, dit-il6. Même si son travail n’avait rien d’artistique, ce dernier dessinait beaucoup à la maison. Cela conduit le jeune Kasperczyk à poursuivre ses études secondaires au lycée d’État des Beaux-Arts de Katowice où il choisit la spécialité métallurgie. Il en est diplômé le 25 mai 1976. Cette même année, il décide de suivre ses amis à l’Académie des Beaux-Arts de Katowice et choisit les arts graphiques, sa précédente spécialité n’étant pas enseignée à Katowice. Après trois ans dans cette ville, il poursuit son cursus à Cracovie de 1979 à 1981. Il obtient son diplôme d’art graphique avec mention très bien le 29 mai 19817. Ne pouvant poursuivre la spécialité métallurgie, les arts graphiques lui ont permis de continuer à travailler le métal avec la gravure.

2

Exposition sur Auguste Rodin au Musée Rodin à Paris du 7 février au 28 mai 2006. Pour les Polonais, Auschwitz est le nom donné par les Allemands au camp de concentration/extermination et non celui de la ville elle-même. http://www.lemonde.fr/europe/visuel/2015/01/27/a-oswiecim-on-voudrait-oublierauschwitz_4564101_3214.html Consulté le 05/11/2016. 4 Cf. Acte de naissance dans annexe 3 5 Celle-ci n’avait pas été rasée car occupée par les SS qui y vivaient. 6 Entretien avec l’artiste. 7 Cf. Diplômes dans annexe 4 3

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Figure 3 : Académie des Beaux-Arts de Cracovie entre 1960-1970

Après l’obtention de son diplôme, il part en vacances en France, à Paris, et décide d’y rester pour plusieurs raisons. Marian Kasperczyk cherche un pays libre, assez « anarchique et bordélique »8 comme la Pologne à cette époque. Il n’a jamais pensé partir vers des pays anglo-saxons hormis les États-Unis, et plus particulièrement New York, le nouveau centre de gravité de l’art de l’époque. Paris restait tout de même une valeur sûre. Les années quatre-vingt, en Pologne, sont marquées par des vagues de grève dans l’ensemble du pays9. Le syndicat indépendant appelé « Solidarność » est créé. Débute alors un bras de fer avec le Parti communiste au pouvoir. Les grèves se poursuivent et la situation économique s’aggrave. Marian Kasperczyk part avant la mise en place de l’état de guerre et les autres évènements marquant la Pologne10. L’assouplissement des conditions d’accès au titre de séjour (par Gaston Defferre, Premier ministre de François Mitterrand) facilite son aménagement en France. Il établit son premier atelier à Courbevoie puis dans les années 91-92, il occupe une usine désaffectée à Ivry. Il déménagera plusieurs fois avant d’acheter un ancien restaurant qu’il reconvertit en atelier et appartement dans le dix-huitième arrondissement où il vit

Citation de l’artiste http://www.normalesup.org/~dthiriet/Histoire/histoire10.html, http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Pologne_histoire/187063. Consultés le 05/11/2016 Les films « L’homme de fer » (1981) et « L’homme du peuple » (2013) d’Andrzej Wajda permettent aussi de comprendre la situation de la Pologne à cette époque. 10 En décembre 1981, l’état de guerre est déclaré et les opposants sont incarcérés. La levée de l’état de guerre se fera deux ans plus tard. Cependant, ce n’est qu’en 1989 que Solidarność obtient, du pouvoir communiste, l’organisation de premières élections partiellement libres. Enfin, en 1990, après l’effondrement général du régime communiste, un nouveau dirigeant, Lech Wałęsa, est élu en Pologne lors des premières élections présidentielles libres. 8 9

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encore actuellement. Marian Kasperczyk est exposé dès 1989 à Meaux. Quant à sa première exposition internationale, elle se situe à Cologne en Allemagne pour l’« Art Cologne »11 en 1991. Depuis cette époque, il est exposé dans différentes galeries de Pologne ou de France, à Paris et ses alentours. Actuellement, il est en contrat avec la Galerie du Roi Doré située près du Musée Picasso, dans le troisième arrondissement de Paris.

Figure 4 : Marian Kasperczyk à l'ART Cologne en 1991. Galerie Roi Doré, Marian Kasperczyk, Back to front painting / peinture périphérique, Éditions yot-art, 2015

Marian Kasperczyk apparaît réservé, distant et d’une certaine froideur. Cet aspect est vite oublié devant la passion qui anime l’artiste. L’art est son moteur et il peut effectuer des centaines de kilomètres sur sa moto pour aller voir une exposition. « Sa bécane » lui permet de voyager jusque dans les montagnes d’Espagne, son deuxième lieu de refuge et d’inspiration. C’est un homme humble et secret qui se considère comme un « artiste du dimanche ». D’une grande pudeur, il préfère parler d’art ou de moto plutôt que de sa sphère privée. Il reste un « loup solitaire », en dehors de l’agitation du monde qui nous entoure : il crée en silence. Matisse disait d’ailleurs à ce sujet : « Qui veut se donner à la peinture doit commencer par se faire couper la langue, parce que votre décision vous enlève le droit de vous exprimer autrement qu’avec vos pinceaux »12.

C’est-à-dire la foire d’art moderne et contemporain de Cologne MATISSE, Henry, Écrits et propos sur l’art, texte, notes et index établis par Dominique Fourcade, Hermann, Paris 1972, p.190 11 12

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I.1.2. À la recherche d’une technique picturale extraordinaire Marian Kasperczyk a pour projet, dès 1981, de trouver une technique qui lui soit propre. Pendant sept ans, il va effectuer de nombreuses recherches picturales dans ce sens. Tout commence avec des affiches collées sur carton puis peintes, mais ce n’est pas encore assez radical. L’artiste raconte avoir été inspiré par une représentation du ballet « Blue Lady » de Carolyn Carlson en 1984 au Théâtre de la Ville à Paris. La chorégraphe utilise divers « voiles » pour distinguer les différents espaces scéniques et obtenir une plus grande profondeur dans cette zone restreinte qu’est la scène. Marian Kasperczyk s’essaye alors à la recherche de la profondeur en peinture. C’est à cette époque

qu’il

expérimente

une

autre

technique : celle de peindre au rouleau à crépis. Il crée des monochromes blancs ayant une texture semblable à certains tableaux

Figure 5 : Marian Kasperczyk, Portrait, 1984, Collection de l’artiste

d’Yves Klein13. Cependant, cette technique ne lui semble toujours pas assez extrême. Il se remémore le travail de Georg Baselitz14 et plus particulièrement ses peintures inversées. Il décide, lui aussi, de peindre à « l’envers ». Mais, cet « envers » devient le recto de l’œuvre et « l’endroit », sa surface à peindre. C’est en 1988 qu’il conçoit ses premières œuvres avec cette technique, qu’il nomme « Back to Front »15. Il l’utilise d’abord en alternance avec d’autres, plus traditionnelles, puis s’y consacre entièrement. Le « Back to Front » peut sembler une technique sommaire. En effet, il s’agit de pousser des couches de peinture apposées sur une toile brute et de les faire traverser pour les dévoiler de l’autre côté : future face du tableau. Pour cela, il est nécessaire d’avoir une toile ayant un tissage qui permette de laisser passer la peinture fraîche. Cela requiert une force physique importante. La toile brute fusionne avec la peinture. On peut considérer qu’elle Par exemple, M 69, Monochrome blanc, 1958, Musée national d’Art moderne, Paris Artiste allemand né en 1938, il est connu pour ses peintures néo-expressionnistes. 15 Ou « Retour en avant » en français. 13 14

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revêt une place plus importante qu’un simple matériau constitutif. Son aspect et son vieillissement visible16 participent à la physionomie de l’œuvre tout comme la matière picturale. Grâce à cette technique, la couche colorée

ajoute

une

nouvelle

dimension physique : celle du temps, où la lumière est un facteur déterminant. Selon le type d’éclairage, artificiel ou naturel, l’heure de la journée et donc l’angle du rayon incident de l’éclairage, le tableau peut prendre des aspects complètement différents. La matière colorée évolue en dévoilant ou non le sujet. Sans cet élément indispensable à l’appréciation de l’œuvre, les quasi monochromes ne seraient qu’une étendue abstraite de matière et de texture colorée, semblables à ceux des peintres matiéristes17. La légèreté et la finesse du rendu sont en

Figure 6 : Gros plan sur la texture de "La Main"

contradiction totale avec l’activité physique, l’élaboration des différentes couches et la masse globale de peinture utilisée lors de la création. En somme, cette démarche permet de nouveaux effets de matière, de mélange de couleurs et, tout simplement, une nouvelle façon, pour le public, d’appréhender une œuvre picturale.

16

En effet, exposées à la lumière les parties laissant apparaître la toile jaunissent. Tendance de l'art pictural du XXe s. fondée sur l'accumulation et le travail d'une matière épaisse, constituée de peintures, pâtes, sables, tissus enduits, etc. (Ex : Fautrier, Dubuffet, Tàpies.) Source : Larousse. 17

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ÉTUDE HISTORIQUE

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I.1.3. Une œuvre évoluant au fil des expérimentations Marian Kasperczyk fait partie de ces artistes épris de liberté. Il se plaît à évoluer entre peinture figurative et non figurative. Depuis ses débuts avec le « Back to Front », il représente des motifs récurrents : portraits, mains, pieds, mots et motifs végétaux. Ses œuvres non figuratives sont celles nommées « paysage ». Pour l’artiste, ces deux versants sont toujours liés et ne forment en aucun cas deux entités distinctes. En 2013, Marian Kasperczyk commence à expérimenter le thème de la « peinture périphérique ». Ce sont de petits formats dont le centre est laissé exempt de peinture. Ils critiquent la société actuelle où le « centre » est maître, alors que

Figure 7 : Marian Kasperczyk, Peinture périphérique, 2014.

c’est aux « périphéries » que l’on prend les risques18. Par cela, l’artiste marque une opposition supplémentaire à la peinture de chevalet traditionnelle qui est ce « centre », à contrario du « Back to Front » qui est en bordure, mais tente et expérimente. Depuis 2016, il expérimente sur des petites toiles figuratives peintes en noir et où la force de pression est telle que cela perfore la toile. Parmi les œuvres réalisées dans les années quatre-vingt-dix, hormis les mains qui seront approfondies plus loin, deux de ces thèmes sont déjà présents : les paysages et les sujets figuratifs humains.

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Galerie Roi Doré, Marian Kasperczyk, Back to Front painting / peinture périphérique, Éditions yot-art, 2015, p. 86-87

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ÉTUDE HISTORIQUE I.2.1.1.

12 Les paysages

Ce thème est celui par lequel Marian Kasperczyk a commencé, « par facilité » ditil19. Cela lui a permis, dans un premier temps, d’apprivoiser sa technique et de manifester ses sentiments, même si cela se fait toujours dans la retenue. Ces œuvres donnent l’occasion de se plonger dans la finesse de la matière qui évoque parfois celle de la dentelle. Leurs dimensions varient et la couleur peut être ou ne pas être utilisée. Pour un simple observateur, il est certainement difficile de voir un « paysage » dans le sens usuel, et il serait facile de caractériser l’artiste de « matiériste ». Un paysage n’est pas seulement la vue d’un site naturel, c’est aussi une « étendue spatiale, naturelle ou transformée par l’homme qui présente une certaine identité visuelle ou fonctionnelle »20. Cette définition correspond parfaitement aux tableaux de l’artiste. La toile devient l’étendue et, par l’ajout de peinture, Marian Kasperczyk la transforme en un tout uni où la main du maître est facilement identifiable. Par la conception intellectuelle de ce thème, il est possible de le rapprocher de l’art de Nicolas de Staël qui, en 1952, remplace progressivement le titre « Composition » pour celui de « Paysage ». L’une de ses déclarations montre bien cette dualité figuration-abstraction qui, pour lui, n’en est pas une : « Je n’oppose pas, déclare-t-il, la peinture abstraite à la peinture figurative, une peinture devrait être à la fois abstraite et figurative. Abstraite en tant que mur, figurative en tant que représentation d’un espace. »21

Figure 8 : Nicolas de Staël, Paysage méditerranéen, 1954, collection particulière. Figure 9 : Marian Kasperczyk, Paysage, 1990, collection particulière.

Entretien avec l’artiste. LAROUSSE, Définition : paysage, http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/paysage/58827. Consulté le 15/10/2016. 21 Centre Pompidou, Nicolas de Staël (1914-1955), 2003. http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-DESTAEL/ENS-destael.html#paysages. Consulté le 06/11/2016 19 20

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I.1.4. Les sujets figuratifs humains Marian Kasperczyk s’est très vite tourné vers la représentation de parties du corps humain : visage, mains et pieds essentiellement. L’artiste peint des personnes authentiques, le plus souvent ses amis, à partir de photographies précises de visage, mains ou pieds. Le corps humain, comme sujet de peinture, est fortement lié à l’art occidental22 ; au vingtième siècle, la représentation du corps est le plus souvent défigurée, morcelée… Pour Marian Kasperczyk, le corps est effectivement découpé en différentes parties. Les extrémités sont celles qui permettent d’identifier chaque individu dans une société. En effet, des mains abîmées peuvent être celles de travailleurs de force, des longues et fines celles de pianistes, les pieds fins et ravagés de danseuses ou larges et robustes de paysans. Les traits sont toujours estompés, l’image qui nous apparaît est quasi fantomatique tout en laissant le sujet pleinement reconnaissable. L’attrait particulier du visage nous montre l’intérêt qu’il porte à l’individu. Et même si la peinture a une portée générale, celle d’adoucir l’image du monde qui nous entoure, le portrait dévoile cette attention. Nous pouvons rapprocher les portraits de Marian Kasperczyk de ceux de Chuck Close23, qui peint, lui aussi, ses amis d’après photographies24. Tous deux mettent en valeur les traits permettant la reconnaissance de la personne. En outre, ils ont tous les deux la même pensée sur ce que représente un visage et qui peut être résumé par la phrase de Chuck Close : « Un visage est une carte routière de la vie de quelqu’un. Sans avoir besoin d’intensifier ou d’attirer l’attention dessus, il y a beaucoup de choses qui sont communiquées : qui est cette personne et quelles ont été ses expériences. »25

Centre Pompidou, Le corps dans l’œuvre, février 2006. http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-corps-oeuvre/ENS-corps-oeuvre.htm. Consulté le 17/10/2016. 23 Artiste américain né en 1940, connu pour ses portraits à très grande échelle. 24 GETTY Research, Close, Chuck. http://www.getty.edu/vow/ULANFullDisplay?find=&role=&nation=&prev_page=1&subjectid=500031023. Consulté le 17/10/2016. 25 “A face is a road map of someone's life. Without any need to amplify that or draw attention to it, there's a great deal that's communicated about who this person is and what their life experiences have been.” Brainy Quote, Chuck Close Quotes. http://www.brainyquote.com/quotes/authors/c/chuck_close.html. Consulté le 06/11/2016 22

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Figure 10 : Chuck Close, Elizabeth, 1989, Museum of Modern Art, New York, USA.

14

Figure 11 : Marian Kasperczyk, Portrait, 2006, Collection privée.

Cette première partie a permis de montrer que Marian Kasperczyk est un artiste curieux, inventif et persévérant. Ce défi de créer une technique qui lui est propre est réussi. Elle lui permet de s’exprimer comme il l’entend. Sa production contient des thématiques, comme le portrait, les paysages ou les mains, qui reviennent tout au long de sa carrière.

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II. Étude des lignes de La Main La première partie a soulevé de nombreux questionnements comme ceux de l’iconographie et du message transmis. Pour y répondre, ce deuxième chapitre est consacré à l’étude approfondie de l’analyse plastique et iconographique de l’œuvre de mémoire. Celle-ci sera ensuite comparée à l’ensemble des œuvres de l’artiste.

II.1. Par une force plastique puissante et délicate naît la symbolique de La Main L’unique sujet est une main gauche ; aucun environnement n’est présent. Le poignet, à l’extrémité supérieure, est le commencement puis le motif s’étend sur la quasi-totalité de l’espace pictural. La main est positionnée dos face à nous avec les doigts dirigés vers le bas. On peut considérer cette composition comme un « gros plan » vu « à hauteur d’œil », où la main est isolée, face à nous et le décor absent. L’œuvre est principalement construite sur une ligne de force verticale située au milieu du tableau. Elle procure une présence puissante au sujet, le stabilise et divise la composition en deux parties égales. Les doigts servent de subtiles lignes directrices et permettent à l’œil d’explorer une plus large surface. Ces derniers, situés dans la partie inférieure, constituent la masse la plus importante du tableau et fixent davantage la composition. Celle-ci est statique et propice à la contemplation. Figure 12 : Marian Kasperczyk, La Main, 1992, collection de l’artiste.

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La position de la main apparaît difficilement réalisable naturellement et, par l’emploi des couleurs et de la facture, donne un rendu non réaliste. Le tableau est peint d’après la photographie de l’un de ses amis. Malheureusement, Marian Kasperczyk n’archive aucune information comme les photos, les marques de peinture, etc. De ce fait, l’origine de La Main ne peut être exactement connue. Qui est cette personne ? Quel est son métier ? Quelles sont ses passions ? Sans cette photographie de référence, nous ne pouvons dire si les traits caractéristiques sont conservés dans la peinture. Pour le spectateur, la main peut appartenir à n’importe qui et, par le titre « la Main », l’artiste ne distingue aucune personne en particulier. Ainsi, même si Marian Kasperczyk porte une attention à l’humain, ici, ce n’est plus le sujet qui importe, mais le symbole renvoyé. Les mains possèdent des traits qui leur sont propres et qui leur confèrent une personnalité unique. En général, elles indiquent un métier ou travail. C’est un organe commun à l’être humain mais unique à chaque individu26. Leurs fonctions sont multiples et font référence à une multitude de symboles. Elles ne sont pas seulement « un organe corporel de préhension » 27, mais sont indéniablement liées à la pensée. Elles ont leur propre langage et, de ce fait, sont souvent évoquées en art28. C’est d’ailleurs la partie du corps humain qui détient le plus de significations29.30

Une main ne tient pas seulement au corps, elle exprime et continue une pensée qu’il faut saisir et rendre.31

De nos jours, elles sont avant tout le symbole de l’identification (empreinte digitale). On peut d’ailleurs les retrouver sous ce thème dans l’œuvre de Marcos Ramirez qui, en 1996, installe au sol des photographies de cent-quatre-vingt-sept paires de mains31 faisant office de portraits32. Elles sont cependant en action, contrairement à celles de Marian Kasperczyk.

26

PALLASMAA, J., La main qui pense, Actes Sud, Paris, 2013 HEIDEGGER, M., Qu’appelle-t-on penser ?, Presses Universitaires de France, Paris, 1959, p.90 28 Comme les mains de pitié des vierges du Moyen-âge (Nativité au Chancelier Rolin, 1486). 29 SCHWARZ-WINKLOFER, I., BIEDERMANN, H., Le livre des signes et symboles, Grancher, Paris, 1992 30 Honoré de BALZAC dans Le chef-d’œuvre inconnu, 1831. Cité dans MERLEAU-PONTY, Sens et NonSens, 1966 31 Titre original : 187 Pares de Manos 32 BULHOES, Maria Amelia. «Mémoires de la main.» Dans X, l'œuvre en procès : La Main en procès dans les arts plastiques, d’Éliane CHIRON, Publications de la Sorbonne, Paris, 2000, p. 183 27

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Figure 13 : Photographie de l’installation «187 Pares de Manos », Californie, 1996-1997

17

Figure 14 : Une photographie appartenant à l’installation « 187 Pares de Manos »

Pour les artistes, elles sont aussi souvent le symbole de la création car elles constituent l’instrument du travail. Néanmoins, tous ces symboles dépendent largement de la position de la main, car, avant toute chose, la main est un moyen d’expression où les gestes parlent souvent d’eux-mêmes33. Elles peuvent être des mains de propagande, de prière, de salutation, de caresse…34

Les mains sont pour moi comme le second visage de notre apparence. Le visage quant à lui est comme un paysage de l'esprit. Un paysage où l’on voit beaucoup. Les mains parlent, racontent, trahissent parfois. On peut reconnaître quelqu’un à travers ses mains.35

Dans notre cas, l’artiste parle d’une main évoquant l’optimisme et le travail35. Comme Rodin, Kasperczyk voit les mains comme un instrument privilégié, un outil sans lequel nous ne pourrions créer ; et comme lui, il consacre beaucoup de temps à travailler cette extrémité pour en exploiter la puissance expressive du membre seul36.

33

BUSSAGLI, M., Le corps : anatomie et symbole, Hazan, Paris, 2006, p.312 Suzanne LINKE dans H/and d’Anne de VANDIERE, 2004, p.200. 35 Entretien avec l’artiste. 36 MARRAUD, H., La main révèle l’homme, Musée Rodin, Paris, 2005, p.5 34

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ÉTUDE HISTORIQUE L’artiste

18

parle,

comme

inspiration,

d’Auguste Rodin, artiste qui a grandement étudié les mains et qui a exploité leur pouvoir d’expression à leur paroxysme. Par exemple, dans La Cathédrale, datant de 1908 (exposée au Musée Rodin à Paris), les mains semblent protectrices.

Rodin

a

utilisé

le

même

mouvement de main, pour l’une de ses études, avec La main suspendue à un support prise en photographie par Freuler. Cependant, cela n’était pas destiné à être une œuvre finale. C’est d’ailleurs bien Rodin qui libère ce sujet et fait reconnaître la main en tant qu’œuvre à part entière.

Figure 15 : D. Freuler, Main gauche de Bourgeois de Calais suspendue à un support, vers 1891, Musée Rodin, Paris

Dans notre cas, la position que Marian Kasperczyk a choisie est une main pendante, sans autre geste. Cette position représente généralement un état d’abandon ou un manque de vitalité37. Pour lui, celle-ci ne montre pas cela et essaye de dévoiler le symbole positif de la main sans geste qui changerait le discours. La technique et la palette utilisées permettent ce rendu immatériel, impalpable et fantomatique. Le sujet devient moins concret, plus adouci et invite à la méditation. Les mains ont toujours été représentées, mais c’est au XIXe siècle seulement qu’elles se libèrent du corps en tant que motif à part entière, principalement grâce à la sculpture et à la photographie38. Néanmoins, la peinture s’y consacre nettement moins.

L’artiste

Isia

Leviant39 a consacré une série aux mains. Il les débarrasse du corps et les rend autonomes. Comme pour La Main, le motif occupe tout Figure 16 : Isia Leviant, Sans titre,

PASQUINELLI, B., Le geste et l’expression, Hazan, Paris, 2006, p.97 BOLLOCH, J., La main, 5 Continents Éditions, Paris, 2007, p.9 39 Peintre franco-israélien, 1914 – 2006. 37 38

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⌀ 64 cm


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l’espace pictural, néanmoins Leviant leur donne des positions singulières40. L’œuvre de Marian Kasperczyk s’insère dans cette récente tradition iconographique tous arts confondus, mais insuffle un nouveau souffle dans le genre de la peinture. 41 C’est [la main] un paysage singulier avec ses monts, sa grande dépression centrale, ses étroites vallées fluviales, tantôt craquelées d’incidents, de chaînettes et d’entrelacs, tantôt pures et fines comme une écriture.42 Continuons avec l’étude plastique de l’œuvre. Elle est composée de peinture acrylique pour bâtiments et d’une toile mixte montée sur un châssis. Elle est peinte d’après photographie42 avec la technique du « Back to front ». Ses dimensions sont cent-vingt par soixante centimètres, ce qui est un format standard de châssis. Cependant, la couche picturale dépasse du champ habituel et est présente jusqu’au revers du châssis, où la toile est fixée. L’utilisation de ces matériaux a nettement été dirigée par le coût de production d’une œuvre. En effet, ses moyens étant limités et sa technique demandant un grand volume de peinture, l’artiste essaye d’obtenir des matériaux à un montant raisonnable. L’œuvre est non vernie, sa surface évolue entre matités et brillances. Quant à l’espace, le gros plan n’occasionne pas une utilisation de la perspective traditionnelle. Le modelé et le volume de la main sont accentués grâce à un système de valeurs, le passage du clair au sombre. D’une autre manière, l’œuvre joue sur la tridimensionnalité en s’insérant dans son espace environnant grâce à plusieurs éléments. D’une part, par celle de la profondeur : la couche picturale épaisse crée un sentiment de profondeur qui, cette fois-ci, n’est pas optique mais réellement physique. On peut d’ailleurs rapprocher cette recherche de celle de Nicolas de Staël qui disait que la profondeur est « la seule recherche sérieuse dans un tableau »43. D’autre part, par la non-fixation de la toile sur les tranches du châssis, Marian Kasperczyk conserve cette zone pour y exposer la couche picturale. Cela contribue à insérer l’œuvre dans l’espace d’exposition et dans la tridimensionnalité.

40

DELAVEAU,P., GIBSON, M., PASTOUREAU, M., Mains : peinture de Isia Leviant, La différence, Paris, 1997 41 FOCILLON, H., Éloge de la main, Éditions Marguerite Waknine, Paris, 2015, p .5-6 42 Très certainement de l’un de ses amis. 43 DE STAËL, N., cité par René de Solier, dans « Germaine Richier, de Staël, Bazaine, Chagall », Les Cahiers de la Pléiade, 9, Paris, 1950, p.18

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20

Une légère lumière, de nature inconnue, provient d’une source située hors du cadre et offre un léger clair-obscur. D’après les modelés de la main, la source lumineuse doit être située en hauteur et à la droite du sujet. Comme nous pouvons l’observer, la lumière interne n’est pas spécialement travaillée. Ce qui importe dans cette œuvre, c’est la lumière extérieure. En effet, la lumière extérieure fait partie intégrante de l’appréciation de la composition. Ici, elle n’aura pas seulement la fonction de rendre visible l’œuvre mais est désormais traitée comme un matériau à part entière : c’est elle qui va divulguer les formes. Selon la source lumineuse, son intensité et son angle de réflexion, la matière colorée évolue pour dévoiler ou non le sujet. En parcourant la salle d’exposition, tant le grain de la toile que la texture de la matière sont discernés ; l’œuvre se dévoilera ou non et s’associe pleinement à son espace d’exposition.

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Figure 17 : Photographies de « La Main » de Marian Kasperczyk avec différentes lumières

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Marian Kasperczyk ne fait aucun dessin préparatoire : il peint sur le vif d’après photographie. Le motif accompli à la peinture est précis. La matière picturale est opaque et épaisse. L’œuvre est composée d’espaces où la peinture a traversé en formant les empâtements et de régions où la toile est visible. Cette dépendance vide-plein permet d’apprécier tous les matériaux utilisés par le peintre et crée une relation captivante entre les différents reliefs et textures. La surface de peinture, à la texture plus ou moins lisse44, contraste avec la toile à contexture* lâche. Les empâtements peuvent être plus ou moins hauts et larges ; le sujet central est construit d’aires de matière larges et étendues tandis que les zones autour sont formées de fines gouttelettes. La pâte n’est pas travaillée comme chez d’autres peintres (comme Fautrier ou Soulages, par exemple), où l’objet employé crée une texture malaxée et pétrie à la surface. Ici, aucune trace d’instrument n’est visible, les empâtements sont seulement poussés par l’arrière. Néanmoins, comme avec ces peintres, nous faisons l’expérience de la matière, de la pâte.

Les matières comportent une certaine destinée ou, si l’on veut, une certaine vocation formelle. Elles ont une consistance, une couleur, un grain. Elles sont forme […] et, par là même, elles appellent, limitent ou développent la vie des formes de l’art. 46

L’artiste45utilise une palette pratiquement monochromatique : elle est composée seulement de variations de gris avec quelques touches de blanc. Nous pouvons rapprocher celle-ci des grisailles de la peinture traditionnelle où les artistes rendaient, comme Kasperczyk, les modelés et volumes. Grâce à sa technique, le mélange des couleurs se fait directement « dans le frais » et donne de nouveaux effets. La Main a été retouchée par l’artiste après sa création : non satisfait de son travail il modifie les nuances et des coups de pinceau s’ajoutent sur la couche picturale.

44

Les coups de pinceau étant invisibles, mais des cratères apparus lors du séchage sont présents. FOCILLON, H., cité dans Histoire matérielle et immatérielle de l’art moderne & contemporain par Florence Mèredieu, Larousse, 2008 45

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Marian Kasperczyk n’associe pas spécialement de signification à cette palette et dit qu’il utilise cela par facilité parce qu’il n’est « pas un grand coloriste »46. Il évoque tout de même le fait que cela adoucisse les traits. Il est vrai que grâce à cette méthode, la forme grisâtre qui surgit de son environnement blanchâtre (la toile) est plus ou moins évanescente.

Figure 18 : Détail des mélanges de couleurs, La Main, Marian Kasperczyk, 1992

Figure 19: Détail des coups de pinceau sur la couche picturale

Kandinsky disait d’ailleurs que le blanc est le « lieu du possible où tout peut naître, où tout va naître »47 et que le gris « manque totalement de vie »48. À l’opposé, Paul Klee voit dans le gris « la couleur la plus riche, celle qui fait parler toutes les autres »49. Ici, la modulation régulière entre ces deux teintes rythme le parcours visuel du tableau tout en étant calme et invitant, comme la composition, à la contemplation. On pourrait effectivement penser qu’avec cette absence de couleur le sujet deviendrait insignifiant et n’exprimerait rien. Cependant, la masse de la matière picturale rend l’œuvre plus physique, plus corporelle. On ne parle plus seulement de couleur, mais de matière colorée et celle-ci crée une véritable présence et pèse sur le spectateur.

Entretien avec l’artiste. HENRY, M., Voir l’invisible. Sur Kandinsky, Presses Universitaires de France, 3e édition, Paris, 2014, p. 226 48 KANDINSKY, V., Du Spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier, Éditions Denoël, Paris, 1989, p. 157 49 KLEE, P., Théorie de l’art moderne, Gallimard, Paris, 1998 46 47

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II.2. La Main, une des premières œuvres figuratives de Marian Kasperczyk Le tableau étudié fait partie de ses premières peintures figuratives. Il a d’ailleurs commencé ses œuvres représentant le corps humain par des mains. Marian Kasperczyk a commencé ce sujet en 1990-1991 avec trois autres tableaux, plus grands (environ deux mètres par deux mètres). Puis, il a débuté la série de six ou huit tableaux plus petits comprenant l’œuvre de mémoire. Dans cette série, ce sont trois ou quatre paires de mains qu’il a peintes. De ce fait, la Main étudiée possède un pendant qui a néanmoins été vendu. Depuis, Marian Kasperczyk n’a jamais cessé de peindre des mains. Sur le plan iconographique, ce tableau fait partie des premières mains réalisées. C’est un sujet nouveau qui s’offre à nous. Plastiquement, l’œuvre se situe dans la tradition de l’artiste. La technique, la matière picturale et les couleurs sont dans la lignée de ses précédentes peintures. La palette, composée de nuances de gris, reste dans la tradition plastique de l’artiste : seule une main a été réalisée en couleur et d’autres sont noires50. L’artiste revient toujours à cette palette qu’il affectionne tant. Néanmoins, le format est assez inhabituel. En effet, l’artiste varie rarement ses formats. Il en utilise deux principaux : le premier, un grand format, d’environ d’un mètre quatre-vingt par un mètre soixante et le deuxième, un petit format carré de cinquante centimètres de côté. À contrario, le format allongé de l’œuvre étudiée ici est d’abord dû au sujet allongé. La réduction de taille, par rapport aux grands formats, est liée au fait que Marian Kasperczyk peignait dans un squat à Ivry. Il pouvait être expulsé à tout moment et devait donc être en mesure de partir rapidement. La Main de Marian Kasperczyk utilise un thème artistique très apprécié en histoire de l’art mais peu utilisé, en tant que motif unique, en peinture. Grâce à la technique utilisée, l’œuvre possède une plastique hors du commun. En comparaison avec l’œuvre globale de l’artiste, le tableau étudié est une œuvre de jeunesse.

50

Entretien avec l’artiste.

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III. La Main, une œuvre inclassable mais apparentée à des courants philosophiques et picturaux du vingtième siècle La deuxième partie a permis de fournir une analyse complète de l’iconographie et de la plastique de La Main. Nous pouvons dorénavant nous intéresser au message transmis en essayant de l’inscrire dans un courant de pensée. Son analyse sémantique sera, dans un premier temps, effectuée. Nous pourrons ensuite tenter de rapprocher cette œuvre d’un courant artistique.

III.1.

La perception au centre de l’œuvre

Comme développé précédemment, c’est avec les jeux de lumière que le sujet est visible ou invisible. C’est donc le temps qui influence la matérialisation de son œuvre 51. À chaque seconde de la journée, un « nouveau » tableau peut être apprécié. L’œuvre a sa propre horloge interne qui dépend d’éléments extérieurs : son emplacement, l’heure, la météo. Ce sont eux qui permettront de ressentir le « frisson métaphysique »52 expliqué par Stanisław Ignacy Witkiewicz. Involontairement, Marian Kasperczyk nous renvoie aux recherches opposées de deux philosophes de la phénoménologie : celles de Maurice Merleau-Ponty et Michel Henry. Même si leurs conceptions esthétiques sont différentes, l’art de Marian Kasperczyk fait cohabiter les deux. Merleau-Ponty et Henry s’entendent sur le fait que l’art permet de voir l’invisible. Cependant, leur conception de « l’invisible » diffère. Nous étudierons, tout d’abord, les conceptions relatives à chacun des philosophes puis nous les comparerons à La Main de Marian Kasperczyk.

MERLEAU-PONTY, M., L’Œil et l’Esprit, Éditions Folio, Paris, p. 24 Le frisson métaphysique s’expose sur deux niveaux : lors de la création et à la « réception » de l’œuvre par le public. Le contexte de création est le moment le plus intense pour l’artiste car c’est la naissance de l’œuvre. Pendant celle-ci, il va fixer dans l’œuvre cette vive sensation. L’œuvre se fait ainsi miroir de son créateur et de son « sentiment métaphysique ». Le spectateur qui découvre la création reçoit le sentiment métaphysique et peut alors éprouver ce frisson métaphysique. CRUGTEN (van), A., S. I. Witkiewicz aux sources d'un théâtre nouveau, Éditions L’Âge d’Homme, 1971, p. 104-106 51 52

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Cette philosophie qui est à faire, c’est elle qui

L’art est ainsi dans son existence même la

anime le peintre, non pas quand il exprime

démonstration de la vie invisible dont nous

des opinions sur le monde, mais à l’instant

avons à reconnaître et à rétablir le droit

où sa vision se fait geste […] 54

imprescriptible. 55

5354

D’une part, pour Merleau-Ponty, c’est grâce à la perception que nous avons accès au

« monde invisible ». Celui-ci est caché, car il « est au-dessous [du monde sensible], ou dans sa profondeur, son épaisseur »55. L’invisible n’est pas le contraire du visible, mais seulement sa « contrepartie secrète »56. Pour peindre, l’artiste doit voir et c’est grâce à son œil qu’il « voit le monde et ce qui manque au monde pour être tableau, et ce qui manque au tableau pour être lui-même, […] et il voit, une fois fait, le tableau qui répond à tous ces manques, et il voit les tableaux des autres, les réponses autres à d'autres manques. »57 De ce fait, « le monde du peintre est un monde visible »58, car, pour peindre, il faut voir tous les éléments mis en jeu : la lumière, les ombres, les couleurs… ; des paramètres qui ne sont pas communément vus59. L’artiste est le seul apte à fournir ses gestes et ceux-là seront des révélations pour les autres, car leurs manques sont différents. L’artiste nous révèle l’invisible en peignant, car il rend visible au profane cet invisible. Cette vision amène un autre invisible : celui des « messages sensoriels discrets ». Et c’est en fournissant son corps que le peintre change le monde en peinture60. La toile agit comme miroir de l’esprit du peintre et, comme un miroir, l’invisible du corps du peintre (c’est-à-dire pour nous, les messages sensoriels discrets) peut investir sa peinture61.

MERLEAU-PONTY, M., L’Œil et l’Esprit, p. 36 HENRY, Op. Cit. p. 37 55 MERLEAU-PONTY, M., Le visible et Invisible, Éditions Gallimard, Paris, 1964, p. 273 56 Ibid. p. 265 57 MERLEAU-PONTY, M., L’Œil et l’Esprit,1985, p. 26 58 Ibid. p. 27 59 Ibid. p. 29 60 Ibid. p. 12 61 Ibid. p. 34 53 54

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Pour résumer, quand l’artiste peint, il voit. Cette vision lui permet d’être absent de son corps, « d’assister à la fission de [son] Être » et de partager le « corps mobile » du monde. Ce qu’il voit est la réunion « de tous les aspects de l’Être »62. Pour Merleau-Ponty, ce n’est pas la représentation du sujet, mais plutôt la perception, ou vision, de la peinture effectuée par « l’œil », ou plus exactement le « corps mobile », qui amène à voir l’invisible.63 Si nulle peinture n'achève la peinture, si même nulle œuvre ne s'achève absolument, chaque création change, altère, éclaire, approfondit, confirme, exalte, recrée ou crée d'avance toutes les autres. Si les créations ne sont pas un acquis, ce n'est pas seulement que, comme toutes choses, elles passent, c'est aussi qu'elles ont presque toute leur vie devant elles. 64

D’autre part, Henry prétend que « tout phénomène peut être vécu de deux façons : extérieurement et intérieurement »64. L’extérieur est la partie visible, c’est-à-dire comment les choses se révèlent à nous. L’intérieur est l’invisible, ou le pathos, il s’exprime par l’affectivité. La peinture, en général, appartient à ces deux phénomènes et les tableaux doivent être examinés de ces deux points de vue. Par leur matérialité : matière, formes, couleurs, etc., et par leur contenu : la vie, l’émotion. Le premier est le support du second et tous deux peuvent être visibles dans la peinture traditionnelle, ou invisibles avec l’abstraction65. En effet, dans un certain sens, la matérialité est invisible car elle est le support de la représentation et c’est bien cette dernière que nous observons et non le support matériel. Sur ce dernier point, Michel Henry est en accord avec Maurice Merleau-Ponty. Cependant, pour Henry, le contenu ou représentation de la peinture comprend l’émotion que l’art a pour but de transmettre66. « L’art est ainsi en son existence même la démonstration de la vie invisible […]. »67 Mais, paradoxalement, si la peinture est l’expression du contenu qui est invisible, en peignant l’artiste nous réintroduit dans le monde du visible.

62

MERLEAU-PONTY, M., Op. Cit., p. 86 Ibid. pp. 92-93 64 HENRY, M., Op. Cit, p. 15 65 Ibid. p. 24 66 Ibid. p. 37 67 Ibid. p. 39 63

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Dès lors, différents éléments permettent d’arriver à ces émotions, par exemple la couleur. Lorsqu’elle est employée de manière non figurative, elle est libérée « de la réalité extérieure » et devient « une forme picturale pure »68. Selon la théorie kandinskienne, « chaque couleur a sa tonalité affective propre » et l’unique manière de la ressentir est en « se confondant avec elle », pour devenir sensation. Henry rejoint une des opinions principales de Kandinsky : « c’est par la sensibilité seule que l’on parvient à atteindre le vrai dans l’art »69. 70 La peinture fait l’économie du langage. C’est ce que nous enseigne la peinture abstraite et c’est ce qui lui confère sa capacité d’expression. Si en effet la couleur ne se rapporte pas aux sentiments de notre âme par une relation externe mais trouve en eux son être véritable – ce qu’elle est en tant que sensation pure, en tant qu’expérience pure – alors elle n’a pas même à traduire, à la manière d’un moyen, ce contenu abstrait de notre vie invisible, elle coïncide avec celle-ci, elle est son pathos, sa souffrance, son ennui, sa déréliction ou sa joie. 71

Néanmoins, la couleur n’est pas la seule à susciter l’émotion ; la matière fait partie du pathos (ou l’invisible) car elle donne un caractère, une sonorité71 à la composition (formes, couleurs…). Et en effet, les propriétés (rayonnement, luminosité…) d’une couleur diffèrent en fonction de son support (toile, bois, métal…) et de son médium (huile, acrylique, pastel…). Quand il y a communication entre une œuvre et le public, elle est de l’ordre du sensible et ramène celui-ci à son aptitude à « sentir, souffrir et aimer »72. C’est d’ailleurs l’objectif de la peinture : augmenter notre capacité de voir, ressentir et accéder au pathos, ce dernier appartenant aux formes et couleurs. Lorsque nous regardons une œuvre d’art, nous ressentons et la vie s’expose. C’est pourquoi, quand le contenu est caché, la composition est « spirituelle », car elle permet à l’Être de penser. En définitive, ce qui se dégage de la représentation du tableau est l’intérieur, la vie invisible. Dans l’art abstrait, elle demande une communion avec l’œuvre pour être perçue.

68

HENRY, M., Op. Cit., p. 53 Ibid. p. 141 70 Ibid. p. 127 71 Ibid. p. 163 72 Ibid. p. 128 69

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Quant à la matérialité, une vision « profane » ne permet pas de la distinguer alors qu’elle se situe sous nos yeux. C’est ainsi que Marian Kasperczyk réunit inconsciemment ces deux philosophes dans sa peinture. D’une part, l’artiste fait référence à Merleau-Ponty en utilisant la matérialité (lumière, formes, couleurs) et en y ajoutant un élément extérieur essentiel : le temps. Ce dernier participe à la révélation de l’invisible. Avec une technique si physique, son corps mobile (l’invisible) investit totalement sa peinture. Par notre perception, nous pouvons voir l’invisible. D’autre part, la philosophie d’Henry, où grâce à la lumière, l’œuvre de Marian Kasperczyk, ou plutôt sa représentation, existe dans le visible et l’invisible. Les couleurs et la matière, comme analysées dans la partie II.1, participent à l’origine du pathos. Et la vie invisible, celle que nous transmet l’artiste, se dévoile à nous. En outre, lorsque le sujet disparaît, la matière se divulgue à notre vision tout en révélant davantage son pathos. Par cette ambivalence, notre perception est ambiguë et se compose de multiples sensations : suppositions et intuitions des manifestations de la représentation. Le tableau devient spirituel, nous obligeant à penser aux multiples métamorphoses qui ont lieu lorsque nous sommes absents.

III.2.

Une œuvre aux influences artistiques multiples qui s’inscrit

pleinement dans son temps Après avoir analysé en profondeur l’œuvre de Marian Kasperczyk, nous pouvons essayer de l’intégrer dans un courant artistique et de le rapprocher d’autres artistes. Depuis les années quatre-vingt-dix, il est bien difficile d’organiser l’art tant les expériences esthétiques sont différentes73. L’art contemporain est désormais basé sur l’individualité de l’artiste et non une école. Nous pouvons nous interroger s’il est bien possible d’intégrer une œuvre contemporaine dans un mouvement actuel. En effet, la création du nom d’un courant n’est-elle pas effectuée à posteriori, avec un recul nécessaire ? Toutefois, à défaut de critères esthétiques, il existe des paramètres autorisant l’évaluation d’une œuvre, par exemple, l’intention de l’artiste, les procédures et techniques employées et le traitement des matériaux. Plus qu’une esthétique commune, c’est maintenant une idée à

73

MICHAUD, Y., Critères esthétiques et jugement de goût, Éditions Jacqueline Chambon, Paris, 1999, p.54

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développer ou à laquelle s’opposer qui définit un courant. C’est d’une part dans les écrits, puis d’autre part dans les images que nous nous plongerons pour cette étude. Marian Kasperczyk est ouvert à toutes les influences. Mais il évoque, en ce qui le concerne, deux pensées particulières. D’une part, il raconte vouloir aller contre la figuration libre qui, à l’époque, était très médiatisée. L’art en France dans les années quatre-vingt est d’ailleurs dominé par ce mouvement, avec, comme représentants principaux, Robert Combas, Rémi Blanchard ou encore Hervé Di Rosa. Ces artistes s’inspirent des bandes dessinées, de la pub, du rock et du punk74 et représentent, le plus souvent, un monde artificiel avec une facture caractéristique : des lignes noires délimitant les objets et protagonistes ainsi que des couleurs violentes75. Après les analyses de La Main effectuées en II, et en le comparant aux tableaux de ces artistes, on peut voir qu’il est effectivement en totale opposition : des couleurs neutres, pas de ligne de contour et aucune relation à la culture populaire.

Figure 20 : Hervé Di Rosa, Le cauchemar de René, 1992.

Figure 21 : Robert Combas, Les amoureux des bancs publics, 1992.

D’autre part, comme énoncé au début de ce chapitre, Marian Kasperczyk a été influencé par Georg Baselitz. Peintre de la tendance « Die Neuen Wilden » (les Nouveaux Fauves), Baselitz est célèbre pour ses tableaux peints dans le sens inverse de lecture (tournés à 180 °). Nous pouvons nous demander si Kasperczyk se trouve dans la lignée de ces peintres néo-expressionnistes allemands. Ce courant, né dans les années soixante-dix-quatre-vingts, est caractérisé par une volonté de s’opposer à l’art minimal et conceptuel qui envahit la scène artistique de l’époque. Les artistes veulent effectuer un lien avec leur passé (historique ou 74

COLAS-ALDER, M-H et al., Groupes mouvements tendances de l'art contemporain depuis 1945..., École des Beaux-Arts, Paris, 2001, p.109 75 MILLET, C., L’art contemporain en France, Flammarion, Paris, 2015, p.226

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personnel) par des représentations souvent allégoriques. Les matériaux sont travaillés avec une puissante émotion, de manière gestuelle, en pâte épaisse et colorée76. Si nous comparons la pensée artistique de Marian Kasperczyk pour l’œuvre étudiée et celle des Nouveaux Fauves, il y a peu de points communs. Seuls le refus des conventions artistiques de leur époque et la proposition d’une nouvelle option de création artistique les rapprochent. Pour ce qui est de la plastique, nous pouvons tout de même noter des similarités avec Deux mains et un arbre de Baselitz : leurs peintures sont en couches épaisses, le réalisme et la perspective y sont effacés et les motifs occupent une grande partie de la surface de la toile. Toutefois, contrairement à Kasperczyk, Baselitz montre un intérêt particulier pour la couleur et ne donne aucun volume à son sujet.

Figure 20 : Georg Baselitz, Deux mains et un arbre, 1984, Galerie Michael Werner, Cologne and New York.

Figure 21 : Marian Kasperczyk, La Main, 1992, collection de l’artiste.

76

DEMPSEY, A., Styles, schools and movements, The Essential Encyclopaedic Guide to Modern Art, Thames & Hudson, New Edition, Londres, 2010, p.279

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Par l’utilisation d’une matière picturale épaisse, Kasperczyk se rapproche des préoccupations débutant dans les années cinquante avec les peintres de l’Informel. Il rejoint les écrits de référence de Michel Tapié dans « Un art autre » où il fait « table rase » des procédés et des effets obtenus de la peinture traditionnelle77. Marian Kasperczyk, de son côté, rompt aussi avec la tradition de la grande peinture en créant une technique originale et en vivant sa pratique « à l’extrême »78. La Main correspond parfaitement à la citation suivante de Tapié79 : Le problème majeur ne consiste pas à remplacer un thème figuratif par une absence de thème (abstrait ou non figuratif) mais bien à faire une œuvre avec ou sans thème devant laquelle [...], on s’aperçoit petit à petit que l’on perd pied, que l’on est appelé à entrer en extase ou en démence parce que l’un après l’autre, aucun des critères traditionnels n’est mis en cause, et que cependant une telle œuvre porte en elle une proposition d’aventure (quelque chose d’inconnu, imprévisible). Il ne peut plus être pour nous question d’œuvre qu’à ce prix.

L’œuvre de Kasperczyk concorde précisément avec cet « art autre » théorisé par Michel Tapié. L’Informel est plus un état d’âme qu’un courant. Il réunit plusieurs tendances : le tachisme, l’abstraction lyrique et le matiérisme80. La première met en exergue l’usage du geste et de la tache (Pierre Soulages, Henri Michaux). Dans la deuxième, c’est l’action physique qui importe sur peinture (Hans Hartung, Wols). Quant à la dernière, la matière picturale l’emporte sur le reste (Jean Fautrier, Antoni Tapiès). Dans ces tendances, l’artiste fait couramment usage d’une gestualité instinctive, d’une matière picturale claire où il joue avec la figuration et l’abstraction en utilisant des références tangibles (cf. titres des œuvres) mais où la figuration est souvent tacite81. La volonté de l’artiste de rompre avec l’art de son époque, l’utilisation d’une technique gestuelle originale, les nombreux effets de matière, l’expressivité de l’œuvre, la proposition de voir le monde d’une nouvelle manière (où le sujet figuratif n’est pas forcément visible) et toute la phénoménologie qui en découle permettent

77

TAPIE, M., Un Art Autre, fac-similé, Gabriel-Giraud et fils, Paris, 1952, sans pagination Ibid. 79 Ibid. 80 DEMPSEY, A., Op. Cit., p.184 81 COLAS-ALDER, M-.H et al., Op. Cit., p. 100 78

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de rapprocher La Main de l’Informel. Toutefois, il est nécessaire de rappeler que chez les peintres de l’Informel, le sujet est généralement peu perceptible à cause de la manière de peindre de l’artiste, car la forme est transcendée82. Nous avons besoin du titre de l’œuvre pour comprendre. Dans La Main, sous le bon éclairage, le sujet est totalement discernable sans la lecture d’un cartel*. C’est en ce sens que Kasperczyk se distingue de ces artistes. Dans Tête de partisan, Jean Fautrier manifeste une puissante expressivité grâce à la matière picturale épaisse qu’il travaille à son paroxysme. Comme dans La Main, le sujet paraît surgir de la matière, s’élevant de la surface plane du tableau et s’insérant dans notre espace. Les deux artistes essaient de faire passer, à travers la matière et la forme, des émotions du réel. On peut d’ailleurs citer Fautrier : « On ne fait jamais que réinventer ce qui est, restituer en nuances d'émotion la réalité qui s'est incorporée à la matière, à la forme, à la couleur, produits de l'instant, changé en ce qui ne change plus. »83 La composition est, elle aussi, un gros plan ne

Figure 22 : Jean Fautrier, Têtes de Partisan, 1957, Budapest, the Miriam and Ira D. Wallach Art Gallery

laissant place à aucun élément externe ou à une quelconque perspective. Quant à la palette, elle est réduite mais n’est en aucun cas celle de La Main. Comme dit précédemment, Tête de Partisan, se distingue de La Main par sa sublimation de la forme. La Main n’a certes pas un rendu final réaliste mais le dessin, une fois perçu, reste juste. L’œuvre étudiée s’inscrit davantage dans la figuration que celle de Fautrier. Penchons-nous maintenant sur des œuvres d’artistes inscrits, pour l’instant, dans aucun courant. La puissante présence de la matière nous conduit vers l’artiste Eugène Leroy et ses peintures en strates épaisses. Comportant toujours des titres porteurs de sens, ses œuvres montrent sa réflexion continue sur la représentation de la figure humaine. Dans son œuvre Portrait de 1962, on peut voir un homme aux contours flous dont il a façonné les 82

HEREDIA, M., Tapiès, Saura, Millanès : l'art informel en Espagne, Presses Universitaires de Vincennes, Paris, 2013, p.159 83 FAUTRIER, J., A chacun sa réalité, repris dans le Catalogue d'exposition Fautrier, 1898-1964, Paris, Musée d'Art moderne de la ville de Paris, Paris-musées, 1989.

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traits couche par couche tout en essayant de saisir la nature et les mystères humains84. La palette est aussi restreinte mais nettement moins que celle de La Main. Comme cette dernière, une lumière interne crée un clair-obscur, ici plus puissant. Par ailleurs, le sujet prend également l’ensemble de la surface picturale. Tout comme dans La Main, Leroy déjoue toute présence tangible et tâche de mettre en évidence le « caractère insaisissable et inconnu des choses »85. La figure demande également un certain temps d’adaptation pour un public non averti. Une fois celle-ci complètement intégrée, nous passons dans le domaine d’une quasi totale figuration.

Figure 23 : Eugène Leroy, Portrait, 1962, MUba, Tourcoing

Dès lors, quand nous concevons pleinement la forme dans La Main, nous nous inscrivons davantage dans une figuration se rapprochant de celles de Frank Auerbach86 et de ses peintures en couches épaisses. Par exemple, dans J.Y.M assis n°1, l’artiste crée un portrait dans lequel matière épaisse et support (par des entailles ou écorchures) se répondent. Comme dans La Main, un jeu entre les espaces vides et pleins font de la peinture une masse physique quasi sculpturale. Le sujet comme la matière sont égaux dans leur peinture. De même que

Galerie Nathalie Obadia, Eugène Leroy, peintures – fusains, 2015. http://www.cnap.fr/eugene-leroy-0. Consulté le 19/01/2017 85 Collectif, Eugène Leroy : exposition du centenaire, Hazan, Paris, 2010, p.46 86 Artiste anglais né en 1931, connu pour ses peintures expressionnistes caractérisées par une couche picturale très épaisse. 84

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dans La Main, la figure d’Auerbach essaie de s’élever pour sortir de la toile, mais sans y arriver87. Dans cette peinture, Auerbach utilise une palette limitée où la figure rose tranche avec le fond terne. Elle ne ressemble pas à celle de Kasperczyk. Il lui arrive souvent d’en utiliser une en camaïeu de gris comme dans Tête de J.Y.M n°2 de 1984-85. Comme dans La Main, l’espace est globalement occupé par le sujet et un clair-obscur est créé par une légère lumière interne à l’œuvre. L’expressivité de sa touche est, cependant, bien plus forte que celle utilisée par Marian Kasperczyk dans La Main.

Figure 25 : Frank Auerbach, J.Y.M assis n°1, Tate Modern, Londres

Figure 24 : Frank Auerbach, Tête de J.Y.M n°2, Tate Modern, Londres

Au terme de cette analyse, La Main de Marian Kasperczyk s’inscrit, dans un premier temps, dans les courants de pensée des philosophes Michel Henry et Maurice MerleauPonty. Par cela, il montre au spectateur que l’« être » du tableau se trouve à la fois dans le visible et l’invisible ; que les deux ont de l’intérêt et ont leur sensibilité propre. Dans un second temps, nous avons pu observer, avec l’étude de différents courants artistiques et artistes, que La Main de Marian Kasperczyk ne se situe dans aucun courant précis. L’œuvre s’inscrit dans une certaine continuité des recherches des peintres informels. Néanmoins, la force expressive du geste n’est pas visible. La Main fait référence aux recherches des années quatre-vingt-dix où l’artiste est en quête d’un nouveau « Moi »88, et par l’abondance des individualités, il nous est impossible de le réduire à une pensée artistique globale à laquelle nous sommes tant habitués en histoire de l’art.

BONHAM-CARTER, C., HODGE, D., Le grand livre de l’art contemporain : 200 artistes expliqués, Eyrolles, 2e édition, 2013, Paris, p.21 88 PARMESANI, L., L’art du XXe : mouvements, théories, écoles et tendances 1900-2000, Skira, Paris, 2006 87

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Conclusion Klee, dans son ouvrage théorique, récapitule ici notre perception de l’art de Marian Kasperczyk : « L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible »89. Peintre hors du commun, Kasperczyk déstabilise par la maîtrise parfaite du « Back to Front ». Influencé par de nombreux courants comme la figuration libre, le néo-expressionnisme ou encore le matiérisme, Kasperczyk nous dévoile un art très personnel, inconsciemment philosophique. Il se rapproche des conceptions philosophiques de Merleau-Ponty et Henry. Par ses qualités plastiques, La Main réunit ces philosophes et expose la pâte si typique de Marian Kasperczyk. Par cela, son art s’inscrit pleinement dans son époque. Et c’est par ses œuvres que sa nature profonde se dégage. Avoir eu la chance de rencontrer, travailler et partager du temps avec l’artiste nous a permis de comprendre davantage son œuvre, son histoire et le dévouement personnel et psychologique dont il fait preuve. Ce chapitre a enrichi incroyablement nos connaissances tant en histoire de l’art qu’en relations humaines. Discuter de son œuvre avec lui et étudier son parcours nous ont permis de comprendre en profondeur et d’aborder avec plus de sensibilité ce tableau d’étude. Depuis le début de ce travail, nous espérons démocratiser l’art de Marian Kasperczyk. Des catalogues d’exposition ont été envoyés à des galeries lors de nos stages à l’étranger. C’est notre contribution afin de faire connaître cet artiste timide et réservé à d’autres professionnels. Nous continuerons à suivre et à faire propager l’art de Marian Kasperczyk, car nous sommes convaincue de ce qu’il propose.

89

KLEE, P., Op. Cit., p. 34

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APPROCHE MATÉRIELLE

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CHAPITRE 2 APPROCHE MATÉRIELLE ÉTUDE TECHNOLOGIQUE / EXAMEN DES ALTÉRATIONS / DIAGNOSTIC

Introduction Après l’étude théorique sur l’histoire de La Main, nous nous intéresserons maintenant à son approche matérielle. À ce stade, l’œuvre confiée a perdu sa lisibilité et son sens ne peut être transmis. L’objectif de ce chapitre est de déterminer quelles altérations doivent être restaurées, certaines étant originelles. L’étude technique de l’œuvre sera réalisée. Elle permettra d’établir, par la suite, l’examen minutieux des altérations et d’en étudier leurs causes.

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APPROCHE MATÉRIELLE

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I. Étude technique Avant tout acte de restauration, un examen minutieux et attentif de l’œuvre est nécessaire et primordial pour sa bonne compréhension. Il peut être complété par des tests et analyses scientifiques.

I.1. Généralités La Main de Marian Kasperczyk a été d’abord observée à l’œil nu puis à l’aide d’un compte fil (grossissement x4), sous loupe binoculaire (grossissement x8), et au microscope USB de la marque Dino-Lite® (grossissement x40 - x400). Différentes lumières ont été utilisées (lumières naturelles et artificielles) et ce, de différentes manières (directe, transmise et rasante). Des examens sous lumière ultraviolette ont été effectués. De nombreuses photographies de l’œuvre ont été prises dans sa globalité et en détail. Elles permettent de présenter l’état de conservation du tableau à son arrivée et d’obtenir une meilleure image de certaines altérations. Pour corriger la dominante de couleur causée par la source de lumière utilisée, chaque photographie aura sa balance des blancs corrigée90. L’étude des matériaux est indispensable pour concevoir leurs évolutions intrinsèques et leur comportement face aux éléments extérieurs. En effet, les matériaux réagissent différemment à l’environnement selon leurs propriétés physiques, chimiques et mécaniques. Cela permettra, par la suite, une meilleure appréhension des altérations. Ce chapitre se déroulera dans l’ordre chronologique de création. Il débutera par l’examen de la toile puis du feuil* et terminera par celui du châssis et de son montage.

Cela sera effectué à l’aide d’une charte de gris : la photo sera prise une première fois avec la charte sur le sujet puis une seconde fois en conservant le même éclairage. La correction se fera sur l’ordinateur : les deux photos sont importées, nous cliquons sur la surface de la charte de gris neutre de la première photo avec l’outil sélecteur de balance des blancs. Nous obtenons un résultat avec les bonnes couleurs, il n’y a plus qu’à dupliquer les valeurs des balances de blancs sur la seconde photo. https://photo.nicolascroce.com/charte-gris-neutrecomment-lutiliser-ameliorer-ses-photos/ 90

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APPROCHE MATÉRIELLE

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I.2. Étude stratigraphique La

technique

de

l’artiste

étant

originale, la stratigraphie l’est tout autant. Marian Kasperczyk fixe d’abord la toile non préparée sur un bâti en aluminium puis il appose une première couche de peinture sur la toile. À l’aide de divers outils (brosses, balais…) il la fait traverser de l’autre côté aux endroits voulus, cette opération est répétée plusieurs fois avec différentes Figure 26 : Artiste apposant la peinture sur la toile

nuances de gris ou blanc. Par conséquent, la face de l’œuvre sera non pas la face où il aura travaillé la couche colorée mais celle où la peinture aura traversé et formé les empâtements. De ce fait, la peinture est présente sur l’ensemble de la stratigraphie : au revers de la toile, dans les mailles et sur le recto de l’œuvre. Aucun vernis, naturel ou synthétique, n’est appliqué après la réalisation de l’œuvre. Face travaillée pendant la création

Revers provisoire

Bâti de travail Toile

Face de l’œuvre où la peinture a

Brosse

traversé Peinture

Schéma 1 : Technique d'exécution de l'artiste

Couche colorée

Toile : présence de peinture entre les fils

Peinture Schéma 2 : Stratigraphique de l’œuvre

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APPROCHE MATÉRIELLE

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I.3. Le support textile Généralités Il s’agit du support textile* original, il présente une lisière* sur les côtés latéraux de l’œuvre sans aucune couture*. En mesurant le lé* de la toile, nous obtenons une valeur d’environ 81,5 cm. La toile ayant pu se détendre ou se rétracter, nous ne pouvons dire la taille exacte du rouleau d’origine. Nous pouvons cependant affirmer que ce n’est pas une largeur standard de toile à peindre. Il est possible que ce soit un tissu pour ameublement. L’artiste nous a raconté avoir parfois acheté ses toiles à IKEA et en Pologne91. Pour cette œuvre, il pense se l’être procurée en Pologne. La toile est très probablement d’origine industrielle. Au revers de la toile, la signature de Marian Kasperczyk est présente.

Figure 27 : Signature de l'artiste au dos de l'œuvre

Caractéristiques des fils Les fils ont une épaisseur très variable avec un diamètre de 0,6 mm en moyenne92. La toile comporte quelques nœuds. Nous pouvons penser qu’elle n’est pas d’une qualité optimale. La torsion des fils de trame93 est simple en Z avec un angle d’environ

65 °.

Cette

torsion

permet

d’améliorer la qualité du fil : plus celui-ci est tordu, plus il est résistant94. Dans notre cas, le fil est moyennement enroulé, sa résistance n’est donc pas maximale. L’embuvage* des

Figure 28 : Fils d'épaisseurs variables et défauts de fils sous loupe binoculaire

fils de sens trame est de 18,6%.

Voir interview de l’artiste en annexes 1-2. Les mesures ont été réalisées à l’aide d’un pied à coulisse sur l’ensemble des fils (chaîne et trame) présents sur 1cm² de toile. Les plus fins ayant une valeur de 0,2mm et les plus épais de 1mm. 93 L’examen sur les fils s’est fait seulement sur ceux qui s’effilochaient sur le sens trame. La toile comportant deux lisières, il nous était impossible de prélever un fil du sens chaîne sans défibrer la toile. 94 BROSSARD, I, Op. Cit. p. 151 91 92

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APPROCHE MATÉRIELLE

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D’après les tests et analyses effectués95, les fils* seraient composés de fibres* cellulosiques de deux types : coton et lin. Le tissu est de couleur blanc cassé, il est très probable que la toile ait subi un blanchissage*. Les fibres ont un aspect brillant, ce qui pourrait être dû au mercerisage*96.

Figure 29: Vue des fibres de toile sous grossissement x50

Composition et propriétés du textile Chaque fil du support textile est composé de fibres de lin et de coton (le pourcentage de chacun n’est pas connu). I.3.3.1.

Le lin

La fibre de lin est formée principalement de cellulose*, d’hémicellulose* et de lignine*97. Au microscope, elle apparaît comme un tube présentant des stries perpendiculaires à la longueur de la fibre. C’est une fibre solide et peu extensible. Elle absorbe moyennement l’humidité, sèche vite et n’est pas très réactive aux variations hygrométriques98.

Voir tests d’identification des matériaux constitutifs en annexe 5. « Par l’action de la soude caustique, la cellulose gonfle, se rétracte et la cuticule reprend une forme circulaire […] Le mercerisage donne un aspect brillant, donne de la solidité et augmente son aptitude à la teinture » BROSSARD, I, Technologie des textiles, Dunod, Paris, 1997, p. 280 97 PEREGO, F., Le dictionnaire des matériaux du peintre, Belin, Paris, 2005, p. 458 98 PEREGO, F., Idem, p. 458 95 96

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APPROCHE MATÉRIELLE I.3.3.2.

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Le coton

La fibre de coton est constituée majoritairement de cellulose (94% environ). Elle contient, en minorité, des protéines, pectines, cires et cendres99. Le coton apparaît sous forme de tube torsadé au microscope tandis que le coton mercerisé apparaît nettement moins enroulé et plus tubulaire. La fibre est élastique mais sa résistance mécanique est inférieure à celle du lin. Le coton sèche lentement et gonfle beaucoup sous l’action de l’eau. Il est très réactif aux variations hygrométriques. I.3.3.3.

Toile mixte

Au XXe, les toiles mixtes lin-coton sont utilisées à un taux de 11% par rapport aux toiles de lin (56%) ou de coton (33%)100. Les propriétés des fibres sont différentes, leur rassemblement pose des questions quant aux caractéristiques du support textile global. Le comportement d’un textile lin-coton se rapproche-t-il plus du lin ou du coton ? Malheureusement, aucune étude n’a été trouvée sur le sujet. D’après des tests à la goutte, il semblerait que la toile soit assez réactive à l’humidité. Au vu des déformations présentes sur l’œuvre, le textile paraît élastique et propice à la déformation. Le comportement de la toile semble donc davantage à celui du coton. Par ailleurs, les tissus peuvent subir de nombreux traitements : blanchiment, apprêts (mercerisage*…). Ils sont réalisés pour corriger ou modifier les propriétés du textile. Ce dernier étant un matériau poreux101, il offre, avec le tissage, de nombreuses microporosités. Ceci engendre plusieurs phénomènes : une fixation plus aisée de crasse et une imprégnation plus profonde lors de l’action de l’eau.

99

PEREGO, F., Idem, pp. 239-240 VANDERLIP CARBONNE, K., “A Study of French painting canvases”, JAIC 1980, Vol. 20, n°1, Article 1, pp. 3-20 101 MASSCHELEIN-KLEINER, L, Le Nettoyage des tapisseries : avantages et dangers, Centre National des Arts Plastiques, 1984, p. 41 100

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APPROCHE MATÉRIELLE

43

Tissage L’armure* est de type toile*102, son rapport est carrĂŠ et son dĂŠcochement de un. L’Êpaisseur de la toile est fine avec une moyenne de 0,6 mm103. Par la prĂŠsence des lisières, nous pouvons affirmer que le sens chaĂŽne se situe verticalement104. Il compte en moyenne 13 fils au cm². Le sens trame et horizontal en compte, en moyenne, 11 fils105 au cm². Des interstices de 0,26 mm ont pu ĂŞtre calculĂŠs106, l’Êpaisseur des fils est plus importante que l’ouverture entre ceux-ci. La contexture* est assez lâche et le tissage* est rĂŠgulier ; il semble donc mĂŠcanique.

Figure 30 : Vue d'un bord de toile non imprĂŠgnĂŠ de peinture au microscope USB (x250)

Figure 31 : Vue du revers de la toile imprĂŠgnĂŠ de peinture au microscope USB (x250)

102

ROCHE, Alain, Comportement mĂŠcanique des peintures sur toile : dĂŠgradation et prĂŠvention, Paris : CNRS Éditions, Paris, 2003, p.11 103 Moyenne rĂŠalisĂŠe sur dix mesures Ă l’aide d’un pied Ă coulisse 104 ROCHE, A, Op. Cit., p.11 105 “Le compte chaine est souvent plus ĂŠlevĂŠ que le compte trameâ€?. BENLTOUFA SOFIEN, Technologie de tissage gĂŠnie textile, http://benltoufa.6te.net/contenu/l_analyse_de_tissu.html. ConsultĂŠ le 10/09/15 106 đ?‘€đ?‘œđ?‘Śđ?‘’đ?‘›đ?‘›đ?‘’ đ?‘›đ?‘? đ?‘‘đ?‘’ đ?‘“đ?‘–đ?‘™đ?‘ Ă— ĂŠđ?‘?đ?‘Žđ?‘–đ?‘ đ?‘ đ?‘’đ?‘˘đ?‘&#x; = 12 Ă— 0,6 = 6,8đ?‘šđ?‘š đ?‘‚đ?‘˘đ?‘Łđ?‘’đ?‘&#x;đ?‘Ąđ?‘˘đ?‘&#x;đ?‘’ đ?‘’đ?‘›đ?‘Ąđ?‘&#x;đ?‘’ đ?‘™đ?‘’đ?‘ đ?‘“đ?‘–đ?‘™đ?‘ đ?‘ đ?‘˘đ?‘&#x; 1đ?‘?đ?‘š = 10đ?‘šđ?‘š − 6,8đ?‘šđ?‘š = 3,2đ?‘šđ?‘š đ?‘‚đ?‘˘đ?‘Łđ?‘’đ?‘&#x;đ?‘Ąđ?‘˘đ?‘&#x;đ?‘’ đ?‘’đ?‘›đ?‘Ąđ?‘&#x;đ?‘’ đ?‘?â„Žđ?‘Žđ?‘žđ?‘˘đ?‘’ đ?‘“đ?‘–đ?‘™ = 3,2 á 12 = 0,26đ?‘šđ?‘š

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APPROCHE MATÉRIELLE

44

I.4. Le feuil Le liant I.4.1.1.

Généralités :

La couche picturale est formée d’empâtements épais où les différentes nuances de gris se mélangent « dans le frais ». Après création, certaines zones ont été retouchées par Marian Kasperczyk. Des coups de pinceau sont alors visibles sur ces empâtements.

Figure 32 : Détail des coups de pinceau sur les empâtements

L’artiste nous dit avoir utilisé de la peinture acrylique pour bâtiments. À l’aide d’une analyse chimique107, il a été possible de déterminer les constituants de la peinture : le liant est de type styréno-acrylique. Le pH et la conductivité électrique* de la couche picturale108 ont été mesurés. Le pH est de 8,5 et la conductivité est comprise entre 68 et 430 μS/cm. Ils apportent plus de précisions pour le futur nettoyage.

107 108

Cf. analyses en annexes 6-7 Cf. mesures en annexe 8

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APPROCHE MATÉRIELLE

45

La facture* est très empâtée* et grâce à sa technique l’artiste obtient de nombreux empâtements.

Figure 33 : Détail de la facture

I.4.1.2.

Composition du liant :

L’émulsion acrylique styrénée est un mélange des polymères* acryliques (méthacrylate de méthyle, acrylate de butyle et acrylate de 2-éthylhexyle) et des polymères styréniques109 (styrène et méthyl-styrène) dispersés dans l’eau. Ils sont tous trouvés par analyse mais il semblerait que cela soit principalement un liant co-polymérique de styrène et d’acrylate de 2-éthylhexyle110. Cette dispersion est réalisée grâce à l’ajout de tensio-actifs* qui la stabilisent. La polymérisation*, quant à elle, est permise grâce à un initiateur*.

Figure 34 : Représentation des différents monomères présents dans le liant

La peinture utilisée par Kasperczyk n’est pas une peinture acrylique pure. L’ajout du styrène est réalisé par les industriels dans le but de rendre la peinture moins chère 111. Il a

109

Monomère vinylique Cf. analyses en annexes 6 – 7 111 LEARNER, T, Analysis of Modern Paints, Los Angeles, The Getty Conservation Institute, 2004, p. 16 110

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APPROCHE MATÉRIELLE

46

pour but d’épaissir le liant, ce qui permet de couvrir plus de surface avec moins de peinture. De nos jours, les peintures pour bâtiments à base des copolymères acrylique – acétate de vinyle sont les plus nombreuses112. I.4.1.3.

Additifs

Les peintures styrènes-acryliques, tout comme les peintures acryliques, requièrent de nombreux additifs*. Leur type et leur quantité varient selon le fabricant113. Ils sont ajoutés pendant la fabrication du polymère en émulsion ou de celle de la peinture. Les différents types114 sont : 

Initiateurs : pour débuter la polymérisation ;

Agents de transfert de chaîne : pour aider et contrôler le poids moléculaire pendant la polymérisation ;

Tensio-actifs : pour garder le polymère en suspension dans la peinture fraîche ;

Solutions tampons : pour maintenir un pH stable ;

Protecteurs colloïdaux : pour aider à la stabilisation stérique, c’est-à-dire aider à l’affinité des particules avec le solvant plutôt qu’entre elles ;

Agents de coalescence : pour aider à la formation du film ;

Agents mouillants et dispersants : pour prévenir les agglomérats de pigments et aider à leur stabilité ;

Agents anti-mousse : pour contrer la production de mousse des tensio-actifs ajoutés ;

Agents gel/dégel : pour prévenir la formation de cristaux de glace (dispersion sensible au gel tant que le film n’est pas sec) ;

Épaississants : pour obtenir la viscosité souhaitée ;

Conservateurs ou biocides : pour protéger le développement des microorganismes dans la peinture fraîche.

Il y a donc de nombreux composants dans une peinture acrylique. Ils déterminent les propriétés, les performances et la longévité de cette dernière115.

112

STANDEVEN, Harriet A. L., House Paints, 1900-1960, History and Use, Los Angeles : The Getty Conservation Institute, 2011, pp. 105-114 113 DORMAN, Nicholas, The cleaning of acrylic paint surface, Workshop 3, Conference review, CAPS 3, WAAC Newsletter, Vol 34, n°3, Septembre 2012 114 JABLONSKI, E, T. LEARNER, J. HAYES, M. GOLDEN, “Conservation concerns for acrylic emulsion paints”, Rev. Conserv., 2003 115 JABLONSKI, E, et al., Op. Cit.

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APPROCHE MATÉRIELLE I.4.1.4.

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Phénomène de coalescence

Le film d’acrylique est constitué de longues molécules qui vont former un film rigide par un processus de « coalescence ». Ce phénomène s’applique aux peintures en phase aqueuse dont le liant est une dispersion de polymères dans l’eau. Lorsque l’eau s’évapore, les particules de polymères se rapprochent. Ensuite, quand l’eau s’est totalement évaporée, les particules se déforment puis s’interpénètrent pour former un film continu116. Pour la formation du film, il faut deux paramètres : l’évaporation de l’eau et une température de filmification* convenable117 qui permettra la déformation et l’imbrication des particules.

a)

c)

Polymère dans l'eau

Déformation des particules

b)

Eau évaporée

d)

Diffusion du polymère

Schéma 1 : Coalescence d'un film d'acrylique

I.4.1.5.

Propriétés et résistance

Les peintures à base des copolymères styrène et méthacryliques ne bénéficient pas, à ce jour, d’études nombreuses de la part des conservateurs ou scientifiques de la conservation. Utilisées pour les bâtiments, les fabricants les disent très résistantes à l’eau118, c’est pourquoi ils les utilisent tant en intérieur qu’en extérieur. Il y a une première différence de propriétés entre un film à base de monomère acrylique ou à base de monomère méthacrylique. Ces derniers, en général, sont plus durs, moins souples et plus résistants chimiquement et aux conditions extérieures119. Ces résines

WOLBERS, R, “Peintures acryliques modernes : recherches fondées sur la pratique”, Stage INP sur le nettoyage et le vernissage des peintures acryliques, Juillet 2012, Powerpoint p. 14 117 Cette température est souvent 10°C de moins que la température de transition vitreuse. Cependant des agents de coalescences sont ajoutés pour baisser celle-ci et aider à la formation du film. 118 Riddhi Chemicals, Emulsion: styrene – acrylic copolymer. http://www.riddhichemical.com/acryliccopolymer.htm#JBS145_[_STYRENE__ACRYLIC_COPOLYMER_], Consulté le 21/01/2015 119 MANNARI, V., PATEL, C.J., Understanding Coating Raw Materials, Hanovre, Vincentz Network, European Coating Library, 2015, p. 84 116

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APPROCHE MATÉRIELLE

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restent perméables à l’humidité en absorbant, toutefois, moins d’eau que les acryliques pures mais en étant plus perméables à la vapeur d’eau120. Les peintures acryliques ont une bonne résistance aux acides et bases. Elles sont sensibles aux solvants organiques, gonflent et se solubilisent partiellement par les alcools, les cétones et les hydrocarbures aromatiques*121. Elles présentent néanmoins une bonne tenue aux solvants aliphatiques*. L’ajout du styrène modifie certainement ces propriétés. Quant à leur température de transition vitreuse, pour une dispersion utilisant les mêmes copolymères (styrène, acrylate de butyle et méthyl méthacrylate) mais à des pourcentages différents, elle peut varier de -5 °C à 40 °C122. Leur pH peut être ajusté entre 4 et 8123. Enfin, le monomère de styrène peut provoquer un jaunissement du film lorsqu’il est exposé aux rayons UV124. Pigments et charges Dans les peintures pour bâtiment, les pigments ont deux fonctions : esthétique (couleur, opacité, brillance) et protectrice (contre la corrosion, l’effet des UV)125. Ils peuvent modifier d’autres propriétés comme la rhéologie* de la peinture, la résistance aux moisissures et aux salissures. Tout aussi important que les pigments, les charges permettent de réduire les coûts des peintures, de réduire les composés organiques volatils* et de renforcer les propriétés d’application, optiques et mécaniques126. Le ratio du volume de pigments/charges sur le volume total du film de peinture sec est la concentration pigmentaire volumique* (CPV). Cette dernière, pour les revêtements acryliques mats, est comprise entre 40 et 85%127. La concentration pigmentaire volumique critique (CPVC) est la CPV à laquelle le liant est à peine suffisant pour mouiller les pigments et charges. Ainsi, au-dessus de la CPVC, la porosité du film augmente128.

SCHWARTZ, M., KOSSMANN, H., “Acrylic and acrylic/styrene copolymer dispersions”, European Coating Journal, Vincentz Verlag, Hanovre, n°134, Mars 1998 121 STANDEVEN, Harriet A. L., Op. Cit., p. 109 122 ALLEST (d’), J.F., DECLOITRE, Y., LARRAILLER, P., Liant pour une peinture aqueuse, Brevet n° EP0585156A1, 2 Mars 1994 123 ALLEST (d’), J.F., DECLOITRE, Y., Dispersions aqueuses de polymères styrène/acrylate carboxylés et leurs utilisations comme liant dans des compositions adhésives et de revêtement, EP0544569 A1, 2 juin 1993 124 STANDEVEN, Harriet A.L., Op. Cit., p. 105 125 MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p. 140 126 GYSAU, D., Fillers for paints, 2nd Revised Edition, Hanovre, Vincentz Network, European Coating Library, 2011, p. 141 127 MULLER, B., POTH, U., Coatings formulation, An international textbook, 2nd Revised Edition, Hanovre, Vincentz Network, European Coating Library, 2011, p.61 128 Ibid. p. 62 120

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APPROCHE MATÉRIELLE

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L’analyse précise des pigments n’a pas été réalisée, on ne peut précisément déterminer la nature de chacun. Des hypothèses les concernant peuvent tout de même être émises en se basant sur l’observation des couleurs et l’époque de création du tableau. L’artiste a utilisé une palette restreinte. Elle est composée de blanc et gris. La nuance et les contrastes ont été atténués par le voile de crasse, ce qui homogénéise encore plus la surface. On peut observer que la surface de la couche picturale est poreuse, peut-être que cela est la conséquence d’une concentration pigmentaire volumique critique dépassée. I.4.2.1.

Les pigments blancs

Le blanc de titane est composé principalement de dioxyde de titane. Il est largement employé dès 1940. C’est un pigment blanc très opacifiant qui est insoluble dans l’eau129 et qui possède une tenue excellente à la lumière130. Sous lumière ultraviolette, ce pigment donne une fluorescence violette131. L’œuvre observée à l’aide de cette lumière révèle cette fluorescence. Il s’agit très probablement, de ce pigment. Il existe trois formes de blanc de titane : rutile, anatase et brookite132. Il pourrait s’agir plus particulièrement de la forme rutile. En effet, cette dernière possède une structure plus dense et moins d’arêtes de liaison inter-cristalline133 ; cela se traduit par une forme plus stable. À contrario, si des extérieurs étaient peints avec la forme anatase, cela provoquerait une réaction photochimique et entraînerait le farinage

Figure 35 : Photographie de l'œuvre sous lumière ultraviolette

de la peinture. Ce phénomène est déclenché par l’eau et les rayonnements ultraviolets134.

129

PETIT, J, ROIRE, J, VALOT, H, Encyclopédie de la peinture : formuler, fabriquer, appliquer, Tome I, Paris : EREC, 1999, pp. 362-370 130 PEREGO, F, Op. Cit., pp.101-103 131 PHILIPPON, J, Les pigments, Institut français de restauration des œuvres d’art, Juillet 1986 132 Ce sont les trois formes cristallines du blanc de titane. Le brookite n’est pas commercialisé et est utilisé dans l’industrie de la peinture. MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p. 165 133 PETIT, J, ROIRE, J, VALOT, H, Op. Cit., pp. 362-370 134 ZORLL, U, Waterbased Acrylates for decorative coatings, Hannover, 2001

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APPROCHE MATÉRIELLE

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Toutefois, pour minimiser ce phénomène, les pigments sont additionnés, par exemple, de zinc, d’aluminium ou de calcium. La surface des particules peut être traitée par le dépôt de différents oxydes (silicium, aluminium, zinc…)135. La forme anatase ne présente aucun intérêt dans la mesure où la peinture employée est de la peinture pour bâtiments. Il est plus probable que le pigment soit rutile. Le blanc de titane possède de nombreuses propriétés idéales pour les peintures de bâtiments : il dispose d’une excellente résistance chimique et d’une haute stabilité thermique136. Il détient une bonne luminosité et un pouvoir couvrant important. C’est pour cela qu’il est très largement utilisé dans les peintures (solutions et dispersions) pour revêtement extérieur et intérieur. I.4.2.2.

Les pigments noirs

De nombreux pigments noirs existent mais certains ne sont plus créés ou ont été délaissés, car trop chers à produire. C’est le cas du noir d’ivoire, d’os et de vigne 137 ; ils ne seront pas retenus comme pigments ayant pu être utilisés. Même s’il n’existe principalement que trois types de noirs dans la peinture pour bâtiments138, il se peut que le pigment utilisé n’en fasse pas partie. En effet, Marian Kasperczyk, lorsqu’il utilise une autre couleur que le blanc, emploie des peintures pour artiste. Le noir de carbone et noir de fumée sont composés essentiellement de carbone. Ce sont des pigments maintenant généralement utilisés dans les liants aqueux139. Ils sont insolubles à l’eau, aux solvants organiques et résistent aux acides et bases140. Par ailleurs, ils peuvent être utilisés pour les extérieurs et sont peu coûteux. Actuellement, le noir de carbone est de loin le pigment noir le plus employé141. Le noir spinelle est « composé d’oxydes mixtes du groupe des spinelles* » 142. C’est un pigment utilisé dès la moitié du XXe siècle principalement dans les revêtements extérieurs et les matières plastiques.

135

MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p. 167 Ibid. p.159 137 PETIT, J, ROIRE, J, VALOT, H, Encyclopédie de la peinture : formuler, fabriquer, appliquer, Tome III, Paris : EREC, 1999, pp. 105-110 138 MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p. 169 139 PEREGO, F., Op. Cit., pp. 494-496 140 DE PRACONTAL, Patrice, Lumière, Matière et Pigments : principes et techniques des procédés picturaux, Gourcuff Gradenogo, Montreuil, 2008, pp. 342-441 141 PETIT, J, ROIRE, J, VALOT, H, Op. Cit., pp.105-110 142 PEREGO, F., Op. Cit., p. 501 136

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APPROCHE MATÉRIELLE I.4.2.3.

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Les charges

Les charges sont des pigments supplémentaires, sous forme de poudre blanche, qui sont souvent insolubles dans le liant, inertes chimiquement et peu coûteux. Leur principale fonction est d’occuper du volume dans le film de peinture. Ils servent à modifier des propriétés comme la rhéologie*, le contrôle de la brillance et le renforcement mécanique, à moindre coût143. Leur faible indice de réfraction n’aide pas dans l’opacité du film. Pourtant, grâce à elles, un espacement entre les réels pigments est créé, ce qui augmente la diffusion de la lumière et l’opacité. Ces charges sont également utilisées pour contrôler la concentration pigmentaire volumique. Celles qui sont généralement utilisées dans les peintures pour bâtiments peuvent être classées dans différents groupes : les carbonates, silices, sulfates et silicates144. Une analyse*145 a été effectuée et il semblerait que la charge soit un carbonate : la craie, CaCO3. C’est la charge la plus utilisée par l’industrie dans les revêtements. En effet, elle possède de nombreuses propriétés : une basse capacité d’absorption d’huile, un faible coût, une bonne résistance aux intempéries, etc.146.

I.5. Le châssis Marian Kasperczyk a tendu la toile peinte sur ce châssis, il est donc d’origine. Il l’aurait, selon lui, acheté chez Marin Beaux-Arts147. Il s’agit d’un châssis mesurant 120 x 60 cm, réalisé dans un bois tendre, léger et de couleur jaune-brun. Il possède des cernes assez masse mées ce qui montre une pousse plutôt rapide148. Ce châssis est probablement en bois de résineux. Marin Beaux-Arts utilise différents bois : l’épicéa, le spruce, le pin d’Oregon et le Hemlock149. L’observation des différents bois permet de dire que le châssis est en épicéa150.

143

MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p. 191 Ibid, p. 192 145 Cf. annexe 7 146 MANNARI, V., PATEL, C.J., Op. Cit., p.192 147 Entretien avec M. Kasperczyk 148 BENOIT, Y, Le guide des essences du bois : 74 essences, les choisir, les reconnaître, les utiliser, FCBA : Eyrolles, 2008 149 « Les bois choisis, épicéa 1er choix, spruce, pin d’Oregon, hemlock, dans un souci de qualité, font de nos châssis une référence en la matière. » Marin Beaux-Arts – Plaquette « Tarif châssis » 150 GIULIANO, J, Bois : essences et variétés, Ed. H. Vial, 1984 144

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APPROCHE MATÉRIELLE

52

Figure 36 : Détail du bois du châssis

Figure 37: Détail d’une planche en épicéa

Montants Le châssis est constitué de quatre montants* plus ou moins réguliers d’environ 5,7 cm ± 2 mm151 de largeur et de 2,5 cm d’épaisseur. Les montants présentent des cernes parallèles, ce qui pourrait révéler un débitage sur dosse ou sur plot152. Les montants latéraux mesurent 120 cm et la partie visible des montants supérieurs et inférieurs mesure 48 cm. Les bords extérieurs sont d’une épaisseur de 2,5 cm réduite par la création d’un chanfrein* de 0,8 cm. Le châssis paraît très soigné, il a sûrement été fabriqué par un spécialiste, ce que confirment les dires de l’artiste.

0,8 cm 2,5 cm

1,7 cm

Schéma 2 : Chanfrein de l'œuvre

151 152

Cette mesure varie selon les points d’un même montant. PEREGO, F., Op. Cit., p.130

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APPROCHE MATÉRIELLE I.5.1.1.

53

Assemblage

48 cm

L’assemblage est mobile et possède toutes ses clefs* (10). Il a été réalisé à tenon mortaise* : les angles sont creusés pour permettre aux clefs de s’insérer.153 Traverse Le

châssis

possède

une

traverse*

horizontale d’une longueur visible de 48 cm, d’une

120 cm

largeur de 5,9 cm d’une épaisseur d’1,5 cm. L’intérieur des montants mesure 1,7 cm. Il y a un retrait sur le châssis côté toile de 0,2 cm. La traverse est assemblée à tenon-mortaise.

Schéma 3 : Châssis vu de face

Inscriptions Le châssis comporte une inscription faite à l’aide d’un tampon au milieu du montant inférieur dans le sens inverse de lecture. Il y est inscrit « 120 x 60 » ce qui correspond à la taille du châssis.

Figure 38 : Vue de l'inscription sur le montant inférieur et sa localisation

153

PEREGO, F., Op. Cit., p. 180

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I.6. Mise sur châssis La mise sur châssis a été réalisée par l’artiste lui-même. Il a agrafé la toile sur la face du châssis. L’agrafage est plus ou moins régulier : l’espacement des agrafes dépend de la longueur des montants. Pour les montants supérieurs et inférieurs, il y a 10 agrafes espacées de 6,1 cm en moyenne154 et pour les montants latéraux, il y a 12 à 15 agrafes pour un espace moyen155 de 7,8 cm. Figure 39 : Détail de la mise sur châssis et sa localisation

Le tableau correspond bien à une œuvre contemporaine de par sa plastique et ses matériaux. Elle comporte une stratigraphie originale et est constituée de divers éléments : une toile mixte en lin et coton, une peinture non vernie à base d’un liant de type styrèneacrylique et des pigments et charges, le tout monté sur un châssis. La peinture et la toile présentent une sensibilité à l’humidité. Ces matériaux ont subi de nombreuses altérations qui vont maintenant être détaillées.

154 155

Sur les montants supérieurs et inférieurs : espacement entre 4,5 et 8,5 cm. Sur les montants latéraux : espacement entre 5 et 11,5 cm.

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II. Examen des altérations L’état de conservation de l’œuvre est globalement mauvais ; car même si l’œuvre est transportable, elle n’est pas présentable dans son état actuel. Les différentes manipulations et accidents ont provoqué diverses dégradations. Les variations d’humidité relative et de température ont amené des contraintes au sein de l’œuvre.

II.1. Le support Le châssis comme la toile ont subi une mauvaise conservation et un dégât des eaux qui a causé la majorité des altérations. Le châssis et les agrafes Le châssis est en bon état général. Il a cependant subi quelques légères altérations accidentelles et naturelles. Auréoles Des auréoles d’humidité sont concentrées sur le montant inférieur du châssis.

Figure 40 : Détail d’une auréole et sa localisation

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Oxydation des agrafes Les agrafes situées sur ce montant sont toutes oxydées et rouillées mais le maintien de la toile est toujours assuré.

Figure 41 : Détail d'une agrafe et sa localisation

Encrassement Un empoussièrement est visible, plus particulièrement sur la partie inférieure entre le montant et la toile. Cela laisse supposer un long stockage à la verticale.

Figure 42 : Détail de l'encrassement et sa localisation

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La toile La toile n’est pas dans un très bon état général. Elle est modérément encrassée et a subi un dégât des eaux provoquant les principales altérations. D’autres sont dues au vieillissement de l’œuvre et à sa mauvaise conservation. Encrassement La toile est empoussiérée dans son ensemble. D’épais agrégats de poussière sont visibles dans la partie basse, entre le châssis et la toile. Auréoles Le dégât des eaux a fait apparaître sur la toile une auréole de couleur marron clair. Elle est présente sur la face et le revers de la partie inférieure de l’œuvre. Face : Elle mesure entre environ 2 cm d’épaisseur et est présente sur toute la largeur de la toile, soit 60 cm sur la face visible et 9,5 et 12 cm sur les tranches et bords de tension ; soit en tout, 81,5 cm.

Figure 43 : Détail de l'auréole et sa localisation

Revers : Elle est située sous et légèrement au-dessus du montant inférieur du châssis. Tout comme pour la face, elle semble figurer sur toute la largeur de la toile, soit 81,5 cm.

Figure 44 : Détail de l'auréole et sa localisation

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Au microscope USB (grossissement x400), nous pouvons observer que toute la fibre de coton est colorée. L’auréole n’est pas superficielle.

Figure 45 : Détails de l'auréole vus au microscope USB : grossissements x30 et x400

Perte de tension La toile est distendue.

Déformations Plusieurs enfoncements sont présents : deux dans la partie supérieure156 de la peinture et un dans la partie inférieure. Ils font environ 1 cm de profondeur et sont très durs. En effet, la peinture étant présente dans et entre les fils, la toile s’est rigidifiée perdant sa souplesse originelle.

Figure 46 : Tableau vu sous lumière rasante 156

La première est à 34 cm du bord supérieur et à 20 cm du bord dextre. La seconde est à 40 cm du bord supérieur et à 20 cm du bord dextre. La troisième est à 37 cm du bord inférieur et à 9 cm du bord senestre.

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Percements On peut observer, sous lumière transmise, quelques percements c’est-à-dire l’écartement d’une maille de la toile157. Ils sont au nombre de dix sur zone d’environ 20 cm de long et 10 cm de large. Ils sont situés à environ 19 cm du bord supérieur et 28 cm du bord sénestre.

Figure 47 : Détail des quelques percements et leur localisation

Résidus de peinture Localisés dans divers endroits, une douzaine d’empâtements de peinture sont présents à l’arrière de l’œuvre. Certains font partie de l’œuvre, d’autres sont des résidus158.

Figure 48 : Détails de résidus et leur localisation

BERGEAUD, C, HULOT, J.F, ROCHE, A. La dégradation des peintures sur toile : méthode d’examen des altérations, Paris : École nationale du Patrimoine, 1997 158 Cf. annexe 9 pour leur localisation et taille. 157

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II.2. Le feuil159 L’état de conservation du feuil n’est pas bon, ses altérations sont essentiellement dues à des accidents. D’autres sont issues de la mise en œuvre ou du vieillissement du tableau. Craquelures de séchage Les empâtements les plus épais présentent des craquelures. Elles ont généralement un point de départ commun mais des directions diverses : du centre de l’empâtement vers l’extérieur.

Figure 49 : Détail d'une craquelure et sa localisation

Arrachement du feuil Certains empâtements ont comme été partiellement « arrachés ». Ils sont tous situés sur les bords de l’œuvre.

Figure 50 : Détail d’un arrachement de couche colorée et sa localisation

159

Nous entendons par « feuil » tout ce qui est composé de peinture.

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Cratères et « trous d’épingle 160 » Des « trous d’épingles » et cratères plus ou moins grands sont présents à divers endroits du feuil. D’après l’artiste, ils sont apparus dès le séchage de la peinture terminé.

Figure 51 : Détail des quelques cratères et trous d'épingle et leur localisation

Décoloration Sous l’auréole, la couche colorée s’est légèrement décolorée et s’est unifiée : elle a perdu les différentes nuances réalisées par les mélanges de peintures. Elle mesure entre 5 et 11 cm de large et 75 cm de long (tranches et bords de tension compris).

Figure 52 : Détail de la décoloration et sa localisation

De l’anglais “pinhole”. ENGEL, N.L., ZUMBÜHL, S., “An evaluation of selected retouching media for acrylic emulsion paint”, Journal of American Institute for Conservation, Vol. 54, n°4, 2015, pp. 224-237 160

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Micro-perforations De nombreuses micro-perforations sont apparues sur le feuil anciennement immergé lors du dégât des eaux.

Figure 53 : Détails de micro-perforations et leurs emplacements

© A. Richard Modification de la conductivité Des changements conséquentsetsont lors des mesures de conductivité161 : plus leurs apparus emplacements la mesure était prise dans la partie inférieure du tableau, plus la conductivité était importante. Pour les mesures effectuées, cela varie de 68 µS/cm à 430 µS/cm. Ce qui montre que la concentration des ions présents sur la surface de la couche picturale a augmenté dans la partie anciennement immergée. Traces diverses La couche colorée comporte diverses traces : des marques nettes et une zone plus étendue sur la face, le revers et les tranches de l’œuvre. Les marques nettes sont de couleur noire ressemblant à du graphite et sont au nombre de cinq. Elles correspondent fréquemment aux zones enfoncées. Quatre sont situées dans le quart supérieur dextre et une dans la partie inférieure sénestre de l’œuvre. Elles sont de formes et de tailles variant de 1 cm à 11 cm.

161

Cf. mesures en annexe 9

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Figure 54 : Détail d'une des traces et sa localisation

La zone de couleur marron semble être une marque de salissure. Elle mesure 11,5 sur 4,5 cm et est située dans la partie inférieure de la peinture : à 14,5 cm du bord inférieur et 29 cm du bord sénestre.

Figure 55 : Détail de la zone marron et sa vue sous microscope USB (x40) et sa localisation

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Des traces beiges et brillantes sont situées sur le recto, au centre. Elles sont dispersées sur une surface d’environ 20 x 7 cm. D’autres sont localisées sur le verso du tableau, sur le bord de tension sénestre : à 12 cm du bord supérieur et 1,5 cm de la tranche gauche, sur une zone mesurant 6 cm de long et 1,5 cm de large.

Figure 56 : Détail de traces beiges au microscope USB (x40)

De la peinture jaune est présente sur la tranche sénestre à 19,5 cm du bord inférieur contre le bord. Cette tâche mesure 0,5 cm par 0,7 cm.

Figure 57 : Détail de la marque peinte jaune et sa localisation

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Éraflures Des éraflures sont localisées sous les traces noires.

Figure 58 : Détail des éraflures et leur localisation

Encrassement La surface du tableau se trouve légèrement encrassée et donne un aspect plus grisâtre homogène.

Figure 59 : Détail de la couche picturale encrassée (grossissement x250) et sa localisation

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II.3. Relevé des altérations de la face de l’œuvre Relevé

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Légende

Cratères, « trous d’épingle » et microperforations Arrachement du feuil

Zone de percements

Enfoncements

Craquelures de séchage

Salissures

Traces noires

Auréole

Zone décolorée

L’examen des altérations a permis de relever de nombreuses dégradations. Les principales touchent autant la couche picturale que la toile. Elles sont essentiellement dues à la mise en œuvre (craquelures, cratères et trous d’épingles) et à une mauvaise conservation (auréole, enfoncements). L’œuvre a subi des contraintes d’origines diverses qu’il faut déterminer.

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III. Diagnostic Pour présenter un traitement en correspondance avec l’état de conservation de l’œuvre, il est essentiel de connaître les sources des altérations. Dans la continuité de l’examen des altérations, le diagnostic précise les causes et processus d’apparition des dégradations constatées. Pour ce faire, elles seront regroupées dans différentes parties hiérarchisées dans l’ordre présumé d’apparition de ces altérations.

III.1.

Origine et nature des altérations

Les causes liées à la mise en œuvre Les altérations initiales ont été provoquées par la mise en œuvre de l’artiste. Elles découlent toutes de sa technique si particulière. Les percements : altérations accidentelles d’origine mécanique Les percements sont sûrement liés à la mise en œuvre de l’artiste et non à des trous d’épingle ou de punaise. En effet, la pression effectuée par M. Kasperczyk pour pousser la peinture à travers les mailles de la toile doit être assez forte. Cela peut causer ce genre d’altération. Ces rares percements présentent peu de risque d’aggravation. L’arrachement du feuil : altérations accidentelles d’origine mécanique Quant à l’arrachement du feuil, l’artiste indique que cela se passe souvent lors de la création de l’œuvre : la toile montée sur le bâti est posée à plat sur le sol et lorsqu’il veut regarder la future face de son œuvre, il retourne et repose ensuite le bâti. Ce va-et-vient peut entraîner ces altérations. Elles sont d’origine et ne nécessitent pas de restauration.

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Les causes liées aux matériaux utilisés et à la mise en œuvre La peinture utilisée et la méthode de l’artiste ont favorisé l’apparition d’altérations. Celles-ci contribuent fortement au manque de stabilité mécanique de l’œuvre. Les craquelures de séchage : altérations accidentelles d’origine physicochimique Parmi les altérations directement liées à la mise en œuvre, on peut observer la présence de craquelures de séchage. Elles proviennent de la méthode de l’artiste et du liant utilisé : par l’application d’épaisseurs surabondantes de peinture, l’évaporation de l’eau en proportion variable selon la zone (épaisse ou fine) engendre ces craquelures162. Cratères et « trous d’épingle » : altérations accidentelles d’origine physico-chimique Sur cette peinture, les cratères et « trous d’épingle » ne sont pas spécialement disgracieux car la surface de l’œuvre n’est pas lisse. Cependant, ils interrompent l’homogénéité du film et affectent sa capacité à être nettoyé163. Ces altérations sont souvent dues à la constitution de la peinture : lors de la fabrication, de nombreux additifs ayant différents rôles sont mêlés aux principaux monomères164. Celui qui agit sur ces ruptures cohésives est l’agent anti-mousse : il permet l’éclatement des bulles d’air créées pendant la fabrication, le transport et l’application. Quant à la « mousse », elle est causée par les tensioactifs qui sont eux-mêmes essentiels à la composition. Si la peinture manque de cet agent, les bulles vont monter à la surface du film puis éclater et former des cratères et trous d’épingle165. Le feuil présente une porosité importante. Il a été étudié que lorsque les peintures acryliques sèchent à une température légèrement moindre que la température de transition vitreuse*, cela produit un film plus poreux. Si la température est vraiment plus basse, la couche picturale devient pulvérulente166. La Main ayant été créée dans un immeuble abandonné en hiver, il est fortement possible que la température ambiante était nettement inférieure à la température de transition vitreuse.

162

LOEW CRAFT, M, SOLZ, J, Commercial vinyl and acrylic fill materials, Journal of the American Institute for Conservation, Vol. 37, N° 1, Article 3, 1998, pp. 23-34 163 STANDEVEN, H, Op. Cit., p. 89 164 DORMAN, Nicholas, Op. Cit. 165 STANDEVEN, H, Op. Cit. p. 89 166 JABLONSKI, E., LEARNER, T., HAYES, J., GOLDEN, M., « Conservation Concerns for Acrylic Emulsion Paints: A Literature Review », Tate’s online research journal, 31/01/2012, p. 5

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Néanmoins, la technique de l’artiste peut aussi être responsable de ces altérations : en faisant subir à la peinture une forte pression, il peut provoquer une accumulation d’air dans celle-ci et aboutir aux mêmes conséquences. Les causes liées aux conditions de conservation La conservation de la Main s’est faite dans l’atelier de l’artiste où l’environnement n’est pas contrôlé. Il en résulte diverses dégradations. III.1.3.1.

Les sollicitations climatiques

L’œuvre a été soumise à des variations plus ou moins brusques de température et d’humidité relative lors de son stockage dans le local de l’artiste. Le tableau était entreposé à l’air libre entraînant des modifications. Encrassement

de

l’œuvre

:

altération

n aturelle

d’origine

environnementale L’environnement de toute pièce contient des polluants. Ces derniers sont capables de favoriser la dégradation des œuvres. Quant à la poussière, c’est un mélange de particules minérales et organiques. Si ces dernières sont constituées de pollens, micro-organismes et bactéries par exemple, elles sont actives et peuvent causer d’autres dégâts. Néanmoins, la majorité de ces particules sont composées d’argile, charbon ou carbone. Ils rendent la poussière abrasive et nuisent à l’œuvre non protégée167. Par ailleurs, ces particules absorbent l’humidité ambiante et la transmettent au support. Cela influe sur le vieillissement et l’oxydation des toiles et peut provoquer l’apparition de moisissures. La surface du feuil est moyennement encrassée ce qui se traduit par un voile grisâtre. Cependant, les peintures acryliques, contrairement aux peintures à l’huile, ont une sensibilité particulière à ces particules. Cela s’explique par la présence des tensio-actifs dans la composition de la peinture acrylique : après la formation du film, les tensio-actifs migrent à

Schéma 4 : Tensio-actifs migrant à la surface

Schéma 5 : Cristaux de tensio-actif à la surface et molécules restantes à l'intérieur du film.

167

Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, juillet 2006

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la surface et forment des cristaux. L’eau s’étant évaporée pour former le film, la partie hydrophile de la molécule cherche l’eau dans l’humidité de l’air. Sur la surface du film sec, le tensio-actif va attirer et retenir la saleté car il possède une force électrostatique plus grande que le film nu168. Le tensio-actif peut diminuer la température de transition vitreuse169 du film. De ce fait, les poussières se déposent directement sur le film et peuvent, si l’œuvre est conservée dans une atmosphère tempérée, s’incruster dans le film. Perte de tension de la toile : altération naturelle et accidentelle d’origine mécanique La perte de tension de la toile est liée au fait que celle-ci est un matériau hygroscopique. En présence d’humidité, elle va avoir tendance à se rétracter puis lors de son évaporation, à se détendre170. Ces variations dimensionnelles de la toile vont la contraindre et affecter son élasticité. À terme, elles peuvent provoquer des gondolements et l’apparition des marques du châssis sur la couche picturale 171. Dans notre cas, nous savons que le tableau a été conservé dans les différents ateliers de Marian Kasperczyk, où les conditions optimales de conservation (20-23°C et 50 à 60% d’humidité relative172) ne sont pas réunies. L’œuvre a sûrement été soumise à des variations hygrométriques assez importantes173. La toile mixte ayant subi le dégât des eaux, l’immersion puis le séchage des fibres ont sûrement dû altérer la tension d’origine. III.1.3.2.

Les causes liées aux manipulations

Déformations : altérations accidentelles d’origine mécanique Les enfoncements sont des déformations locales. Ils ont été provoqués par un choc effectué sur le tableau174. Ils font suite à une mauvaise conservation ou à un transport sans précaution de l’œuvre. De surcroît, les déformations ont pu être exacerbées par les contraintes entre les différentes parties de la toile : toile ayant de la peinture au revers mais

168

Care of acrylic paintings, Smithsonian Institution, http://www.si.edu/mci/english/learn_more/taking_care/acrylic_paintings.html Consulté le 21/10/2015 169 SMITH, G., “Aging Characteristics of a Contemporary Acrylic Emulsion Used in Artists’ Paints”, Modern Paints Uncovered, Los Angeles, The Getty Conservation Institute, 2007, pp. 236–246 170 ROCHE, A., Op. Cit., pp. 28-30 171 BERGEAUD, C, HULOT, J.F, ROCHE, A, Op. cit., pp. 35-54 172 Note de l’ICC, Conditions ambiantes recommandées pour les peintures, https://www.cciicc.gc.ca/resources-ressources/ccinotesicc/10-4-fra.aspx Consulté le 21/09/2015 173 Cf. Mesures d’hygrométrie de l’atelier en annexe 10 174 BERGEAUD, C, HULOT, J.F, ROCHE, A, Op. Cit., p.104

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pas sur la face, toile étant imprégnée complètement, nombreux empâtements de tailles diverses à l’avant ainsi que divers dépôts et projections plus ou moins épais à l’arrière. Traces : altérations accidentelles d’origine mécanique Les traces noires étant principalement sur les zones d’enfoncements, on peut supposer que l’objet, à l’origine de ces déformations, a laissé ces marques. Dans la zone marron, on peut observer que les traces sont situées sur les bosses et non dans les creux des empâtements. On peut supposer qu’un objet sale a été posé contre l’œuvre, créant l’altération. Quant aux taches beiges, leur aspect laisse penser à une projection de nature collagènique ou huileuse. Il pourrait s’agir d’une mauvaise manipulation ou d’une projection d’un quelconque liquide dont la nature est inconnue. Du fait de la sensibilité du feuil à une large gamme de solvants, aucun test ne peut être effectué. III.1.3.3.

Les causes liées au dégât des eaux

Le dégât des eaux constitue l’élément le plus important de dégradation de l’œuvre. Il est responsable de la modification de la structure interne de l’œuvre. D’après l’artiste, il provenait des canalisations du voisin de l’étage supérieur. Auréoles : altération accidentelle d’origine environnementale Parmi les altérations liées au dégât des eaux, la plus visible est l’auréole marron clair présente des deux côtés de la toile. Une auréole est « une ligne brune se formant à l’interface sec/humide lors d’une migration par capillarité d’eau liquide ou d’humidité »175. Les auréoles sont des phénomènes très complexes et de nombreuses études ont montré des manifestations comme la migration de composés acides qui oxydent la cellulose176. La pureté de l’eau migrant dans un substrat joue un rôle et peut aggraver les phénomènes d’oxydation. Dans notre cas, l’accident provenait de l’étage supérieur, l’eau n’était pas pure. La toile a gonflé et les saletés qui étaient présentes dans la partie inondée ont été relâchées. L’ensemble des fibres a été imbibé par ces impuretés.

JEONG, M.-J., DUPONT, A.-L., DE LA RIE, R., “Degradation of cellulose at the wet-dry interface II. Study of oxidation reactions and effect of antioxydants”, Carbohydrate Polymers, n°101, 2013, p.671 176 Pour plus d’informations sur le sujet, nous invitons le lecteur à lire le mémoire de Sophie Barbisan, INP, 2016. 175

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Micro-perforations : altération accidentelle d’origine physico -chimique Pour que l’effet de l’eau soit significatif, l’immersion doit durer environ vingt minutes177, temps qu’il faut à l’eau pour pénétrer complètement le film d’acrylique. Cela résulte par l’extraction des additifs solubles à l’eau présents dans le feuil et par l’apparition de micropores178. La Main a été immergée dans l’eau assez de temps pour provoquer ces micro-perforations. Celles-ci affectent les propriétés mécaniques du film et pourraient, si l’œuvre est soumise à des contraintes physiques, entraîner des craquelures aux endroits de ces dégradations. Décoloration du feuil : altération accidentelle d’origine environnementale La décoloration du feuil fait suite à l’immersion de la peinture dans l’eau 179. Même si cette décoloration est légère, le dégât des eaux a probablement créé d’autres dégâts invisibles mais bien présents. Les peintures styréno-acryliques comportent un polymère acrylique. Il est possible qu’elles présentent une sensibilité à l’eau. Il est probable que le feuil, en contact prolongé avec l’eau, a tendance à gonfler, entraînant alors une fragilisation mécanique du film. L’eau peut avoir supprimé les tensio-actifs et émulsifiants hydrosolubles du film. Modification de la conductivité de la couche colorée : altération accidentelle d’origine chimique La force ionique* est l’un des principaux facteurs influençant l'activité des ions en solution aqueuse. Le film d’acrylique n’est pas parfait : il n’est pas imperméable. Par conséquent, si l’on met de l’eau, les forces osmotiques sont mises en jeu180. Si on place une goutte de la solution aqueuse à la surface du film microporeux, la concentration relative des sels solubles181 présents à l’intérieur du film de peinture voudra être en équilibre avec le soluté ionique de la solution aqueuse. Par exemple, si de l’eau déminéralisée est placée, la

177

DOMENECH-CARBO, M.T. et al, Multitechnique Approach to Evaluate Cleaning Treatments for Acrylic and Polyvinyl Acetate Paints, Smithsonian Contributions to Museum Conservation 178 Ce phénomène pourrait être comparé à l’érosion chimique des roches. 179 Note de l’ICC, Comment prendre soin des peintures, le 04/01/2002. http://www.cci-icc.gc.ca/resourcesressources/objectscollectionsobjets/paintings-tableaux/421-fra.aspx. Consulté le 16/09/2015. 180 La pression osmotique est une force déterminée par une différence de concentration entre deux solutions situées de part et d'autre d'une membrane semi-perméable. 181 STRAVOURDIS, C, DOHERTY, T, The Modular Cleaning Program in Practice: Application to Acrylic Paintings, New Insights into the Cleaning of Paintings Proceedings, “ The Cleaning 2010 International Conference Universidad Politécnica de Valencia and Museum Conservation Institute”, Smithsonian Institution Scholarly Press, pp 139-146

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force ionique est plus élevée à l’intérieur du film. Cela provoquera la diffusion de l’espèce ionique dans l’eau et une lixiviation*182 de la matière du film de peinture. Dans notre cas, l’immersion de la toile dans l’eau a provoqué des remontées capillaires qui ont elles-mêmes favorisé une diffusion des ions dans la peinture. La force ionique était moins élevée dans la couche picturale que dans l’eau.

III.2.

Pronostic

Le diagnostic a permis de comprendre les causes des altérations actuelles. Quant au pronostic, il permet d’étudier les risques futurs d’altérations probables sans l’intervention d’une restauration. Les dégradations peuvent progresser et détériorer l’œuvre de façon définitive. Il est nécessaire de considérer et d’assimiler ces mutations dans le cas où des mesures de conservation - restauration ne seraient pas prises et si les conditions de conservation de l’objet n’étaient pas surveillées. Évolution des altérations en cas de non-traitement Concernant le vieillissement des matériaux, il y a encore peu de recul au niveau de la peinture l’acrylique. Il est difficile d’étudier les possibilités de son évolution. Néanmoins, les altérations ayant été étudiées et comprises, il est possible d’émettre des hypothèses quant à leur transformation dans le temps. Dans le vieillissement des peintures acryliques, il a deux facteurs à prendre en compte : le liant et les pigments183. Avec le temps, ces peintures montrent une légère décoloration184 et un jaunissement185. Néanmoins, les pigments, et plus particulièrement pour l’œuvre de mémoire, le blanc de titane, ont un effet stabilisant sur le liant du fait qu’ils absorbent les rayons ultraviolets. Par ailleurs, l’encrassement général de la toile peut produire une accélération du processus de vieillissement et d’oxydation de celle-ci. En effet, les particules de poussière ont la capacité d’absorber l’humidité ambiante et de créer un microclimat à l’interface toile-

182

Extraction des produits solubles par un solvant. IZZO, F.C, et al., “A preliminary study of the composition of commercial oil, acrylic and vinyl paints and their behaviour after accelerated ageing conditions”, Conservation science in cultural heritage, Vol. 14, 2014 184 HAMM, J, et al., “The Discoloration of Acrylic Dispersion Media”, Saving the Twentieth Century: The Conservation of Modern Materials, Canadian Conservation Institute, Ottawa, 1993, pp. 381–392 185 WHITMORE, P, COLALUCA, V, “The Natural and Accelerated Aging of an Acrylic Artists’ Medium”, Studies in Conservation, n° 40, 1995, pp. 51–64 183

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poussière. Ce phénomène entraîne la diffusion de l’humidité à la toile, et par la même occasion, une résistance mécanique amoindrie186 de la toile. La toile imprégnée de peinture est assez lourde ; elle a perdu sa tension originale. Cet état pourrait amener, à terme, des marques du châssis sur la face de l’œuvre. Il est possible que la plupart des altérations évoluent de manière significative avec le temps. De nouvelles dégradations pourraient apparaître. Évolution des altérations liées aux conditions de conservation L’œuvre est constituée de zones très hétérogènes : des zones de toile vierge, de toile imprégnée de peinture et d’empâtements plus ou moins hauts. Tout cela est disséminé sur l’ensemble de la stratigraphie. Par conséquent, des conditions de conservation non stabilisées engendrent des contraintes au sein de la toile peinte. Chaque type de zone réagit mécaniquement différemment à l’environnement et à ses variations. À terme, cela pourrait altérer l’adhésion des strates entre elles. Par ailleurs, dans un environnement non stabilisé, la peinture acrylique réagit de diverses manières. Si la température dépasse la température de transition vitreuse, le film se ramollit et sa surface devient collante187. Par ailleurs, des additifs hydrophiles sont présents dans le film188, comme les tensio-actifs. Ces deux facteurs permettent à la poussière et aux saletés de s’incruster plus facilement dans le film. La toile mixte semble présenter une certaine sensibilité à l’humidité. En revanche, la majeure partie de la toile étudiée est imbibée de peinture. Elle est présente dans l’ensemble des fibres et, comme un encollage le ferait, modifie le comportement de la toile face à l’humidité. C’est pourquoi il est important d’effectuer des contrôles de température et d’humidité relative189 et de trouver des solutions pour stabiliser ces paramètres si nécessaire.

Du fait que l’humidité joue sur l’élasticité de la toile. LAMB, C, ‘Acrylics: New Material, New Problems’, The Conservation of Modern Paintings: Introductory Notes on Papers to be Presented, United Kingdom Institute for Conservation et Tate Gallery, Londres, 1982, pp.4-6 188 PERRY, R, ‘Problems of Dirt Accumulation and its Removal From Unvarnished Paintings: A Practical Review’, Dirt and Pictures Separated, United Kingdom Institute for Conservation et Tate Gallery, Londres, 1990, pp.3-6 189 Un thermomètre-hygromètre va être installé dans l’atelier de M. Kasperczyk pour étudier ces variations et agir si besoin. 186 187

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III.3.

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Nécessité d’intervention

Grâce à son analyse approfondie (ses matériaux constitutifs, ses altérations et leurs causes), l’état général de l’œuvre a été déterminé précisément. Visiblement, le tableau a subi des changements depuis sa création. Sa stabilité et son unité potentielle190 sont principalement dégradées à cause d’une mauvaise conservation. Dans l’état actuel, l’œuvre ne peut être exposée et vendue. Les altérations sont très visibles et ne permettent pas d’apprécier cette œuvre dans sa globalité. De même, les sensations éprouvées s’en trouvent amoindries. Le public ou le possible acheteur est dans l’incapacité d’admirer, de ressentir ce tableau qui nécessite une unité esthétique parfaite pour créer l’émotion. En effet, lorsqu’elle est éclairée, il est facile de remarquer les enfoncements qui créent une rupture dans la planéité de l’œuvre et l’auréole de couleur marron. L’œil de l’observateur est malheureusement attiré par ces zones dégradées. Restaurer l’œuvre permettra une réelle appréciation de celle-ci. Cela lui assurera sa stabilité et durabilité. La fragilisation de certaines parties de l’œuvre nécessite une restauration structurelle. Quant au trouble visuel que provoquent les enfoncements, les marques et l’auréole, il requiert une restauration esthétique.

190

« L’instance historique et esthétique ». BRANDI, C, Théorie de la restauration, Allia : Paris, 2011

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Conclusion La Main de Marian Kasperczyk est constituée d’une stratigraphie originale. Son étude technique a permis de donner des renseignements sur ses matériaux et sur leur comportement. La couche picturale acrylique est sensible aux solvants organiques et plus particulièrement aux solvants polaires comme l’eau ou les hydrocarbures aromatiques. Le support textile mixte est sensible et réactif à l’humidité. Cette œuvre a été dégradée par des altérations de différentes catégories : mécaniques, chimiques, physico-chimiques et environnementales. Les causes de ces détériorations sont accidentelles et naturelles. Ces dernières sont liées à la mise en œuvre de l’artiste, aux matériaux utilisés par l’artiste ou aux conditions de conservation. Les plus graves ont été provoquées par le dégât des eaux. Celles qui altèrent le plus l’œuvre sont l’auréole, la perte de tension et les micro-perforations. Quant aux éventuelles dégradations futures, elles sont à prendre en compte du fait de leur instabilité. Il en est de même pour les conditions de conservation qui doivent être contrôlées pour éviter de plus amples dégâts. L’œuvre ne nécessite pas des mesures urgentes et immédiates de restauration. En revanche, elle n’est pas complètement stable et risque de se dégrader davantage à long terme. Elle n’est pas présentable en l’état. Ces informations permettront de réaliser un cahier des charges et une proposition de traitement adaptés à cette étude préliminaire.

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CHAPITRE 3 CONSERVATION – RESTAURATION CAHIER DES CHARGES / PROPOSITION DE TRAITEMENT / OPÉRATIONS DE CONSERVATION RESTAURATION

Introduction La Main de Marian Kasperczyk est constituée majoritairement de peinture acrylique pour bâtiment. Ce type de matériau engendre des comportements particuliers qui amènent de nombreuses recherches par les scientifiques et restaurateurs. Cependant, elles sont loin d’être terminées et, peu à peu, la littérature à ce sujet est étoffée. Grâce à l’étude précédente, un cahier des charges et une proposition de traitement vont être établis. Leur objectif est de réaliser des opérations adaptées à l’œuvre dans le respect de la déontologie. Ils permettent d’assurer la conservation future de l’objet et d’émettre des propositions de conservation préventive.

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CONSERVATION - RESTAURATION

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I. Cahier des charges Le cahier des charges réunit l’ensemble des conditions liées au projet de restauration, du « décrochage » de l’œuvre jusqu’au projet de conservation-restauration. Il vise à maintenir l’œuvre stable dans le lieu de conservation ultérieur. Il définit de manière globale les méthodes et produits qui pourront être utilisés afin d’améliorer l’état de l’œuvre. Il dépend de nombreux facteurs, comme des possibles requêtes du propriétaire et artiste, des matériaux constitutifs de l’œuvre et du futur lieu de conservation. En premier lieu, nous étudierons les problématiques qu’amène la restauration d’art contemporain. Ensuite, les objectifs de conservation et restauration seront spécifiés et les paramètres généraux des matériaux seront caractérisés. Puis, les problématiques et partis pris des interventions futures seront explicités.

I.1. L’art contemporain : des problématiques nouvelles L’art contemporain soulève de nouvelles questions de conservation et de restauration, principalement à cause des nouveaux matériaux utilisés dans la création (nouveaux polymères de synthèse) et avec les nombreuses utilisations de différents matériaux périssables. D’une part, les connaissances sur le vieillissement de ces matériaux modernes sont beaucoup moins étendues que celles des peintures traditionnelles. Cela représente un premier écueil à leur conservation et restauration. D’autre part, les matériaux utilisés en art contemporain se dégradent souvent plus rapidement que ceux des œuvres traditionnelles à l’huile. Des bases solides dans la connaissance des matériaux et dans les techniques artistiques sont nécessaires pour réaliser des opérations compatibles191. Il faut privilégier l’axe de la documentation et de la conservation préventive afin d’éviter une altération qui ne pourrait être restaurée sans endommager l’œuvre192. En outre, il existe une législation spécifique lorsque l’auteur de l’œuvre est en vie. Tout d’abord, le droit moral, et plus particulièrement le droit au respect, s’applique. Celuici permet à l’artiste de « s’opposer à toute modification susceptible de dénaturer son

191

CHIANTORE, O., RAVA, A., Conserving Contemporary Art, The Getty Conservation Institute, Los Angeles, 2012, p. 37 192 APPELBAUM, B, Conservation Treatment Methodology, CreateSpace Independent Publishing Platform, 2010, pp. 270-287

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œuvre »193. Cela donne des responsabilités supplémentaires aux conservateurs-restaurateurs. Ces derniers peuvent se rendre responsables d’une modification de l’ouvrage, même si, en général, ces opérations légitimes ne portent pas atteinte au droit moral. Dans tous les cas, l’artiste peut invoquer ce droit s’il refuse une modification. Cependant, lors des opérations de restauration, il n’est pas obligatoire de demander l’avis de l’artiste. C’est seulement si ce dernier est informé qu’il peut exercer ou non ce droit. La restauration d’œuvres contemporaines nécessite parfois un dialogue et une proximité entre le restaurateur et l’artiste. Cette discussion est souvent indispensable pour une meilleure appréhension de l’œuvre. Si l’artiste émet un avis de restauration, il doit obligatoirement être respecté étant donné que cette parole fait partie du droit moral194. En définitive, « la conservation de l’art moderne et contemporain n’est possible que si ont été rassemblées toutes les informations sur les matériaux et les techniques utilisées par les artistes, et sur la signification que ces artistes leur ont accordés »195. Lors des différents entretiens, Marian Kasperczyk souhaite que la restauration ne ramène pas l’œuvre à son état original, mais plutôt à celui précédant les différentes altérations accidentelles ayant pu survenir. Les traitements ne devront pas altérer les différentes zones de brillance de l’œuvre et, s’il y a la nécessité d’effectuer des retouches, cela devra être fait de manière illusionniste.

I.2. Objectifs de la conservation – restauration Avant de s’interroger sur les traitements de restauration et de voir s’ils sont réversibles et peu interventionnistes, il est essentiel d’établir l’objectif à atteindre avec ce traitement. Pour cela, nous nous réfèrerons au modèle de Caple196 qui propose trois buts : l’investigation, la révélation et la préservation. Le but préalable à toute conservation et restauration est l’investigation : il s’agit de l’analyse de l’œuvre dans le but de découvrir des informations à son propos. Cette opération a déjà été réalisée dans les chapitres précédents.

193

Code de la propriété intellectuelle, Article L. 121-1, http://www.culture.gouv.fr/culture/infospratiques/droits/droitsconferes.htm 194 Formation à l’Institut National du Patrimoine, « L’entretien avec les artistes, un outil pour la conservation et la restauration de l’art contemporain », 09/12/2015 195 BALLESTREM, A, « Modern Art, Who cares ? », Extrait colloque Amsterdam de 1997, Technè n°8, 1998, p.5 196 MUNOS VINAS, S., Contemporary theory of conservation, Routledge, Londres, 2011, pp. 173-176

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Le premier but dans la conservation et restauration de l’œuvre est l’exposition de celle-ci dans sa forme originale, voulue par l’artiste. Ce qui ne veut pas dire l’état après création de l’œuvre mais un état, dans le passé, avant qu’il n’y ait la nécessité d’intervenir. Cela permet à l’observateur d’avoir une « impression visuelle » de la forme originale. Ce but est la révélation. L’objectif principal du traitement est de rendre à l’œuvre sa stabilité, son unité structurelle et esthétique. Pour y parvenir, différents traitements doivent être effectués. D’une part, il est nécessaire de rééquilibrer les forces au sein de la stratigraphie pour que l’œuvre retrouve sa planéité en résorbant les déformations et en retrouvant la tension d’origine. D’autre part, il est essentiel de consolider la couche picturale. En effet, celle-ci présente une cohésion faible. Il est nécessaire de supprimer l’auréole, les différentes traces et d’effectuer un décrassage pour rendre à l’œuvre son unité esthétique. Au terme de ce but, il y a la préservation. Ce dernier objectif, que l’on peut rapprocher de la conservation préventive, est la préservation de l’objet pour qu’il ne subisse pas de dégradations futures.

I.3. Paramètres généraux Il est primordial d’établir un choix des produits à utiliser : ils doivent être compatibles avec les matériaux constitutifs de l’œuvre et ne pas lui nuire197. La manière dont il faut employer ces produits doit également être définie précisément afin d’appliquer le traitement adapté : par exemple, l’eau peut être utilisée sous forme liquide, gazeuse (nébulisée), en gel ou même en microémulsion*. Pour tout traitement, la température est à prendre en compte. La peinture acrylique étant un matériau thermoplastique*, sa souplesse varie en fonction de la température. Sa température de transition vitreuse est due à chacun des composants de la peinture198 (polymères, additifs, solvants). Elle est souvent basse, légèrement supérieure à la température ambiante d’une pièce (25°C)199. De ce fait, il faut éviter tout apport de chaleur trop important ou sur une durée trop longue.

197

Confédération Européenne des Organisations de Conservateurs-Restaurateurs (ECCO), La profession de conservateur-restaurateur, code d’éthique et formation, Article 9, p. 3 198 MANNARI, V., PATEL, C. J., Understanding Raw Materials, Vincentz Network, Hanovre, 2015, p.85 199 JABLONSKI, E., LEARNER, T., HAYES, J., GOLDEN, M., Op cit.

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L’efficacité du produit peut être prise en compte200. Cela se manifeste par le temps de la procédure mais surtout la durée de l’effet dans la stratigraphie. La notion de réversibilité est importante, surtout sur le long terme, sachant que la réversibilité totale d’un traitement est inatteignable201. Nous parlerons alors davantage d’« amovibilité »202 ou de « retraitabilité »203. Le premier terme exprime le fait qu’un matériau puisse affecter l’œuvre avec laquelle il est en contact (cette réaction ne disparaissant pas avec la suppression dudit matériau). Le second signifie que lorsqu’un traitement est effectué, il ne rend pas impossible la réalisation d’autres futurs traitements204.

I.4. Problématiques soulevées Par sa nature, La Main de Marian Kasperczyk présente différentes problématiques. Des altérations d’origine Certaines altérations découlent de la mise en œuvre ; de ce fait, leur forme ne doit pas être changée205 : elles doivent rester visibles afin de montrer les étapes de création. Ainsi, les craquelures prématurées, l’arrachement du feuil, les percements, les cratères et la marque de peinture jaune ne seront pas restaurés esthétiquement. Une œuvre non vernie La surface de l’œuvre est non vernie. Cet aspect produit une problématique esthétique car c’est la volonté de l’artiste qui est remise en jeu si la surface change de brillance ou est vernie. Toute intervention sur la surface ne devra pas apporter un surplus brillant pour respecter son intégrité esthétique206. Une peinture perméable Le feuil de la peinture est poreux et perméable207. Certains matériaux, comme ceux de la consolidation ou retouche, amèneront une quantité inévitable de produit à l’intérieur de la couche picturale. Cette dose apportée sera irréversible. La stabilité des produits devra

200

APPELBAUM, B, Op. Cit, p. 359 tant donné que retourner à l’état original est chimiquement impossible 202 CHARTERIS, L, “Reversibility – myth and mid-use”, Reversibility Does it Exist?, London : British Museum, 1999, pp. 141 - 145 203 APPELBAUM, B, “Criteria for treatment: reversibility”, Journal of the American Institute for Conservation, Vol. 26 n°2, 1987, pp.65 - 73 204 MUNOS-VINAS, S, Op. Cit., p.187 205 CHIANTORE, O., RAVA, A., Op. Cit. p. 39 206 Confédération Européenne des Organisations de Conservateurs-Restaurateurs (ECCO), La profession de conservateur-restaurateur, code d’éthique et formation, p.2 207 JABLONSKI, E, T. LEARNER, J. HAYES, M. GOLDEN, Op. Cit. 201 É

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être la meilleure et plus longue possible. Ces derniers ne devront pas interagir chimiquement avec le feuil. Ils n’auront pas forcément la même nature étant donné que même si les molécules sont les mêmes, leurs proportion et âge ne sont pas identiques. Tout cela occasionnera un vieillissement malencontreusement non identique, mais le plus stable possible et moins nocif pour l’œuvre. Une consolidation indispensable ? Les altérations liées à la mise en œuvre et aux matériaux soulèvent une problématique. Il est possible que les bulles d’air remontées à la surface aient créé des réseaux vides comme le seraient des galeries creusées par des fourmis. De ce fait, l’intérieur de la couche picturale serait hétérogène. Il y a deux possibilités : la première est que le feuil ne présente pas une fragilité accrue : « une meule de gruyère français208 reste solide et inébranlable ». La seconde éventualité est évidemment le contraire de la précédente. La couche picturale est instable et par conséquent, toute pression trop élevée engendre un affaissement de celle-ci. Dès lors, un dilemme intervient : est-il nécessaire de consolider l’ensemble de l’œuvre ? Pour répondre à cette problématique, il indispensable d’aborder plusieurs points pour ensuite confronter les « pour » et les « contre » de l’intervention. Premièrement, si un matériau quelconque est inséré pour combler ces vides, cela pourrait provoquer des dommages supplémentaires et rompre l’équilibre existant. En effet, même si le matériau est de nature semblable et comporte les mêmes molécules que la couche picturale, la proportion du mélange et le stade de vieillissement ne seront pas semblables à celui du feuil. De ce fait, le matériau inséré risquerait de perturber cet équilibre et de fragiliser l’ensemble étant donné leurs comportements différents. Néanmoins, les cratères et plus particulièrement leurs parois sont très fragiles : il suffit d’une pression sur elles pour qu’elles s’effondrent. Dans certains cratères, il est possible de voir des morceaux de couche picturale. Il est essentiel de consolider ces parois. Paroi du cratère Cratère Couche picturale Toile Schéma 6 : Cratère de couche picturale

208

Contrairement à son homonyme suisse qui ne présente pas de trous.

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Mais, ces cratères sont présents sur l’ensemble de la surface. Dans ce cas, n’est-il pas risqué de consolider localement à de nombreux endroits plutôt que de consolider l’ensemble de la couche picturale ? Lors des tests de décrassage, il a été observé que certains empâtements (sans cratère ou micro-perforation à la surface) étaient altérables et pouvaient s’effondrer sous la seule pression du bâtonnet ouaté. Une consolidation générale semble la solution à envisager. D’autant que l’œuvre retournera dans l’atelier de l’artiste ; cet environnement induit des déplacements d’œuvres fréquents et des rangements plus ou moins précaires. En somme, la consolidation générale de l’œuvre apparaît adaptée et nécessaire. Il reste maintenant à établir les paramètres de cette intervention. Une couche picturale érodée Les micro-perforations qui se sont formées lors du dégât des eaux soulèvent deux interrogations : est-il nécessaire de les consolider ? Faut-il les réintégrer ? Pour la première, nous avons répondu dans la partie précédente. Il est possible que lors de la remise en tension de la toile sur un bâti ou sur son châssis, elles évoluent. Par conséquent, une tension douce sera à privilégier. Pour la seconde, les cavités de ces altérations créent de l’ombre et engendrent un obscurcissement de la couche picturale. Il est nécessaire de rétablir l’intégrité structurelle et esthétique par la réalisation de mastics et la retouche. Pour garder une image homogène avec le reste du feuil, seules certaines de ces altérations seront réintégrées. Une œuvre tridimensionnelle Lorsqu’il peint, Marian Kasperczyk travaille sur un bâti puis, plus tard, il monte son œuvre sur un châssis. Cela peut être fait plusieurs années après. L’œuvre de mémoire a été montée sur un châssis de taille inférieure. La couche picturale est alors pliée. Cela entraîne une tridimensionnalité élargie (en plus de tous les empâtements déjà présents) de l’œuvre dans son espace. Ainsi, la couche picturale est présente jusqu’à l’arrière du châssis, où la toile est agrafée. Certaines agrafes ont été fixées dans la couche picturale. De ce fait, le cache des tranches (par un bordage* par exemple) de l’œuvre n’est pas concevable et toute intervention exigeant le dégrafage et démontage de l’œuvre de son châssis devra être analysée attentivement. Des compromis devront être faits quant à ces traitements. Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


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Un démontage nécessaire ? La restauration du support peut se faire selon deux propositions : le démontage ou non de la toile de son châssis. La première solution serait de supprimer les agrafes au risque d’endommager la couche picturale présente autour. Cela permettrait de remplacer ces agrafes rouillées et d’atténuer les traces de rouille. La seconde solution serait de ne pas les supprimer pour éviter toute altération supplémentaire. Néanmoins, la rouille subsisterait.

Figure 60 : Détail d'une agrafe logée dans la couche picturale

L’atelier de Marian Kasperczyk n’a pas une hygrométrie stable, la rouille peut continuer à se développer avec la présence des agrafes actuelles. Il est nécessaire de les changer pour éviter toute oxydation supplémentaire de la toile. La suppression des agrafes est nécessaire, la première option est choisie.

I.5. Paramètres des interventions Les solvants Les solvants peuvent être utilisés à différentes étapes des traitements (décrassage, refixage, consolidation et/ou retouche) et sous différentes formes (liquide, gazeux, gel, microémulsion). Ils ont pour objectif de dissoudre d’autres éléments (comme la crasse sur la couche picturale ou un adhésif de consolidation). Il est essentiel que ces solvants soient compatibles avec les matériaux intrinsèques du tableau. Les peintures acryliques en émulsion sont sensibles aux solvants organiques209. Leur polarité joue un grand rôle dans la détérioration du film d’acrylique. De ce fait, la gamme de solvants du conservateur-restaurateur s’avère limitée. Les solutions aqueuses sont dangereuses pour le film d’acrylique : elles provoquent le gonflement du film. Ce phénomène est principalement provoqué par la solubilisation des 209

JABLONSKI, E, T. LEARNER, J. HAYES, M. GOLDEN, Op. Cit.

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additifs hydrophiles210 présents dans le film. Pour atténuer cette réaction, il est possible de modifier certains paramètres de l’eau : le pH* et surtout sa conductivité. Le pH doit être inférieur à 7211 et la conductivité supérieure à 6 mS/cm212. Cet effet peut être atténué si l’eau est utilisée en gel, par microémulsion ou nébulisation. Néanmoins, il faut spécifier que cela est valable pour des peintures acryliques pures qui ont un pH relativement neutre. La couche picturale de notre œuvre a un pH de 8, ce qui modifie ses propriétés de nettoyage. Quant aux solvants aliphatiques, ils ne provoquent pas de gonflement du film. En revanche s’ils ne sont pas assez volatils, ils entraînent un effet plastifiant213. Ils sont souvent insuffisants pour effectuer un nettoyage correct. Pour conclure, et dans l’idéal, les solvants doivent avoir une faible polarité, une toxicité restreinte pour le restaurateur et une volatilité ni trop haute pour que le produit ait un effet suffisant, ni trop basse pour qu’il n’y ait pas de rétention214. Bien sûr, cette réactivité dépend de nombreux facteurs : du type de solvant utilisé et de la marque de peinture, de l’âge de la couche picturale, de l’épaisseur du film, des pigments, des matériaux extractibles, etc.215 Prise en charge de l’œuvre de mémoire Lors de la prise en charge, le tableau devra être transporté à l’aide d’une caisse prévue à cet effet. Sa fabrication nécessitera une réalisation dans un matériau solide, résistant avec un élément absorbant les chocs. Le tout devant être aux dimensions de l’œuvre. Ce qui sera en contact avec le tableau devra être neutre chimiquement pour éviter toute réaction. Lors du transport automobile, cette caisse devra être placée de manière à minimiser les secousses. Elle servira également certainement à la conservation de l’œuvre, en stabilisant davantage le climat des locaux de restauration. De ce fait, avant tout examen ou traitement de l’œuvre, il sera nécessaire de vérifier l’hygrométrie des différentes salles. Cela permettra de choisir celle se rapprochant le plus de la boîte pour minimiser les variations subies par le tableau.

DILLON, C, LAGALANTE, A, WOLBERS, R, “Acrylic emulsion paint films: The effect of solution pH, conductivity, and ionic strength on film swelling and surfactant removal”, Studies in Conservation, Volume 59, N° 1, 2014, pp.52-62 STAVROUDIS, C, DOHERTY, T, Op. Cit., pp.139-145. 211 The Cleaning of Acrylic Paint Surfaces 3 London workshop, WAAC Newsletter, Vol. 34, N°3, septembre 2012 212 DILLON, C, LAGALANTE, A, WOLBERS, R, Op. Cit. 213 DOMENECH-CARBO, M.T, et al. Op. Cit. 214 Ce paramètre reste à nuancer car la rétention dépend aussi de l’interaction surface/solvant (polarité). 215 WOLBERS, R, Peintures acryliques modernes : recherches fondées sur la pratique, Powerpoint, Stage INP sur le nettoyage et le vernissage des peintures acryliques, Juillet 2012, p.18 210

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Cette caisse formera une barrière de protection contre la poussière, les agents biologiques, les rayons ultraviolets et d’éventuels accidents. Le décrassage Il est nécessaire de souligner que pour tout traitement de nettoyage, le film de tensioactif216 ayant migré à la surface de l’œuvre sera partiellement ou totalement supprimé. Même s’il est un matériau original, peut nuire à l’œuvre physiquement et esthétiquement. Il n’est pas un élément voulu par l’artiste étant donné qu’il modifie la plastique de l’œuvre après la création de celle-ci. Cependant, toute suppression aura comme conséquence de continuer le processus de migration des tensio-actifs encore présents à l’intérieur du film. Cela a pour résultat un film plus dur et potentiellement plus cassant217. Néanmoins, cette suppression peut être amoindrie218 par l’utilisation d’hydrocarbures aliphatiques comme solvant de décrassage. Il est possible que ce film de tensio-actif à la surface ne soit plus présent. En effet, le vieillissement de l’œuvre et son exposition aux rayons UV peuvent entraîner la suppression naturelle de ce film. Les adhésifs de consolidation Le consolidant a pour but de rendre la cohésion à la couche picturale. Il n’y a guère de recul sur le faible nombre d’œuvres traitées (sur 208 traitements en sept ans au Tate Modern à Londres, seulement une seule œuvre était une peinture acrylique219) et peu d’études portant sur la consolidation des acryliques : ces dernières étant assez souples, il y a peu de cas montrant la nécessité de cette intervention. Dans le cadre du traitement, l’adhésif retenu sera synthétique. Étant donné qu’il pénétrera au sein même de l’œuvre, il ne sera pas réversible. Il est préférable qu’il soit de nature similaire au feuil220 et ne doit pas empêcher la possibilité de traitements futurs. Le consolidant doit répondre à plusieurs critères : un bon vieillissement, une compatibilité avec la couche picturale, une viscosité faible permettant une bonne pénétration mais assez haute pour ne pas diminuer le pouvoir de consolidation Il doit former un film cohésif et doit rester S’il est présent à la surface, car il a été montré que ce film pouvait disparaitre par l’action de la lumière ou de chaleur. DIGNEY-PEER, S, “The migration of surfactants in acrylic emulsion paint films”, Modern Art, New Museums: Contributions to the 2004 IIC Congress, Bilbao, 2004, pp.202-207 217 MURRAY, A., et al. “The Condition and Cleaning of Acrylic Emulsion Paintings”, Materials Research Society Fall Meeting, Materials Issues in Art and Archaeology VI, Boston, 2001, n°4, p.1-8. 218 L’action physique du bâtonnet ouaté supprimant tout de même une partie. 219 SMITHEN, P, “A History of the treatments of acrylic paintings”, Modern Paints Uncovered, The Getty Conservation Institute, Los Angeles, 2007, pp.165-176 220 CHIANTORE, O., RAVA, A., Op. Cit. p. 80 216

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souple. Le vieillissement ne sera pas identique puisque le consolidant sera nettement plus récent que la couche picturale. Mais les molécules seront similaires et le film d’adhésif aura un comportement semblable à la stratigraphie. Il ne doit pas apporter de modifications optiques. Il doit donc être incolore, transparent et mat. La réintégration picturale La réintégration picturale permet le rétablissement de la continuité esthétique de la surface de la peinture. Il est nécessaire de rétablir l’unité visuelle de l’œuvre.

Figure 61 : Détail des micro-perforations et leur localisation

I.5.5.1.

Mastics

Les micro-perforations et lacunes présentes dans la partie inférieure seront réintégrées, tout comme celles localisées dans la zone centrale supérieure. Un mastic sera appliqué pour retrouver une surface cohérente avec l’ensemble de l’œuvre. Ses critères essentiels sont l’élasticité : ils doivent supporter les déformations et suivre le support sans craqueler, l’adhérence et la stabilité : ils ne doivent pas libérer d’éléments dommageables pour les matériaux constitutifs et ne pas s’altérer visuellement221. La facilité de mise en œuvre est appréciée. De nombreux mastics sont à notre disposition : le mastic traditionnel à la colle de peau, à la cire, le Modostuc®222, avec des adhésifs synthétiques, etc. Notre choix se portera entre des mastics ayant un caractère hydrophile. En effet, les variations d’hygrométrie étant importantes chez l’artiste, il est nécessaire que le mastic y réponde, MROZIELSKI, A., Comportement d’un mastic face aux variations climatiques, Mémoire de fin d’études, Conservation – restauration peinture sur chevalet, École de Condé, 2009, pp.53- 74 222 Mastic à base d’eau, d’épaississant cellulosique, d’une résine vinylique en émulsion, de plastifiant, carbonate de calcium et sulfate de calcium. Rapport analytique de l’ICC, cité dans KESSLER, 1997, annexe 17 221

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comme le feuil. Cela permettra une réversibilité aisée puisque c’est encore l’eau qui est le plus communément utilisée en restauration de peintures acryliques actuellement. I.5.5.2.

Réintégration colorée

La retouche de peinture acrylique est encore très peu étudiée223. Il est souvent difficile de faire correspondre les qualités de surface de la retouche à celle du feuil. De plus, il est parfois risqué de ne pas altérer la couche picturale originale pendant l’application ou la suppression de la retouche224. Le liant de retouche devra être de même brillance que l’œuvre, maniable, mais surtout compatible avec le substrat, réversible et pouvant être supprimé facilement dans des solvants compatibles avec la couche picturale. Il doit être stable à long terme pour retarder le besoin d’un nouveau traitement. L’atelier de Marian Kasperczyk comporte des variations hygrométriques assez importantes. Il faut un produit stable à l’humidité et souple pour suivre le mastic sous-jacent. Ce dernier sera d’ailleurs isolé avec une résine insoluble dans l’eau. Un liant de retouche aqueux n’est alors pas concevable. La peinture acrylique étant particulièrement sensible aux solvants aromatiques, le solvant du liant de retouche devra être un hydrocarbure aliphatique. La retouche se fera sur les mastics et de manière illusionniste. Néanmoins, dans la partie basse, des empâtements ont l’air d’avoir disparu et d’autres se sont affaissés. Aucun mastic ne sera réalisé car la hauteur des empâtements n’est pas connue et nécessiterait de couvrir la peinture originale avec le mastic. Si une retouche est indispensable, elle sera directement appliquée sur le feuil. Conservation préventive L’œuvre retournera, après restauration, dans l’atelier de l’artiste. Pendant six mois, des mesures seront effectuées grâce à un thermo-hygromètre225. Cette étude permettra d’analyser le futur lieu de conservation et de modifier certains éléments si nécessaire. Il est bien sûr impossible de tout contrôler. Les mesures visant à maitriser l’environnement permettent de ralentir d’éventuelles détériorations mais ne préviennent pas des accidents. La constitution des différents éléments à prendre en compte lors de la conservation – restauration a permis d’aborder les souhaits du propriétaire et artiste, les problématiques SMITHEN, P., “A history of the Treatment of Acrylic Painting”, Modern Paints Uncovered, The Getty Conservation Institute, Los Angeles, 2007, pp. 165-176 224 SIMS, S., CROSS, M., SMITHEN, P., “Retouching media for acrylic paintings”, Mixing and matching: approaches to retouching painting, Archetype Publications, Londres, 2010, pp.163-179 225 Cf. annexe 10 223

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liées à l’œuvre, mais également de définir les objectifs essentiels de traitement et les paramètres techniques. Il est dorénavant primordial d’établir une proposition de traitement permettant de préciser le choix de produits et les méthodes à utiliser.

II. Proposition de traitement La proposition de traitement permet de déterminer les choix précis de produits et la manière de les employer. Ce chapitre présentera pour chaque intervention l’étude et les tests effectués permettant d’arriver au produit qui sera utilisé.

II.1. Couche picturale Décrassage La poussière étant abrasive, il est indispensable d’effectuer un dépoussiérage préalable au décrassage pour limiter les risques. Le décrassage consiste à supprimer de la surface de l’œuvre tout dépôt atmosphérique (par exemple, poussière, crasse, suie). Ces matériaux étrangers peuvent être abrasifs, acides, hygroscopiques, ou dégradants226. Ce traitement permet d’améliorer la lisibilité et l’appréciation de l’œuvre. Pour réaliser ce traitement, différentes actions sont possibles : mécanique, avec l’aide de gommes et/ou brosses variées, et physico-chimique, avec diverses solutions et de bâtonnets ouatés. Pour ce qui est de l’œuvre de mémoire, aucun décrassage à sec ne sera testé en raison des empâtements nombreux, de la fragilité du feuil à l’abrasion et à la pression. Le traitement sera choisi en fonction de l’examen de l’œuvre, du diagnostic et du cahier des charges. Le décrassage se limitera aux éléments altérant l’œuvre, toute substance originale ou avec valeur historique sera préservée. II.1.1.1.

Produits encrassants

La poussière, présente sur une couche picturale, est variable : elle dépend principalement de l’environnement de conservation de l’œuvre : extérieur comme intérieur. Elle est composée de particules contenant de nombreux éléments (poils, pollens, charbon, argile227…). Comme dit précédemment, les films de peinture à base d’émulsion acrylique augmentent le risque de dépôt de cette poussière, principalement à cause de la migration des 226

Département de la conservation préventive du C2RMF, Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, Paris, juillet, 2006 227 Vade-mecum de la conservation préventive, Op. Cit.

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tensio-actifs à la surface de ce film. La poussière modifie la saturation des couleurs et la brillance de l’ensemble de la couche picturale228. De plus, elle est abrasive229 et sur une peinture acrylique non vernie, elle peut, à terme, s’intégrer dans la couche colorée sans aucune possibilité de la supprimer. Il est nécessaire de l’éliminer avant l’arrivée de ce stade. C’est la rétention de cette poussière qui forme l’encrassement de la couche picturale. Cette rétention est fonction de divers paramètres : la taille des particules de poussière et les différents types de forces mises en jeu (forces physiques, forces de Coulomb, forces ioniques et liaisons faibles : liaisons hydrogènes, dipolaires, force de London et Van der Waals)230. II.1.1.2.

Nettoyage des acryliques

De nombreuses études ont été réalisées sur le nettoyage des acryliques, mais aucune sur les peintures à base d’acrylique et de styrène. Les écrits existants sur ce thème précisent qu’aucun produit totalement satisfaisant n’a encore été trouvé. Ils montrent que les solutions aqueuses risquent de supprimer le tensio-actif de la surface de la peinture et peuvent provoquer le gonflement du film231. D’autres révèlent la possibilité de suppression des pigments (principalement les pigments organiques) et le gonflement du film par les solvants organiques et les solutions aqueuses232. Les hydrocarbures aliphatiques suppriment vraisemblablement moins de tensio-actif et ont un effet moindre sur les propriétés physiques du film. Par contre, les films contenant des pigments organiques peuvent parfois montrer une suppression de ces pigments avec l’utilisation de solvants non polaires233. L’efficacité du nettoyage par un hydrocarbure aliphatique est moindre par rapport à celui effectué avec une solution aqueuse234. Enfin, il est possible de réduire les effets de gonflement que

228

BEUGNOT, X., « Étude bibliographique sur la poussière et ses effets sur les peintures : étude de quelques procédés de nettoyage aqueux », Mémoire de fin d’étude, Institut National du Patrimoine, 1991 229 Vade-mecum de la conservation préventive, Op. Cit. 230 WOLBERS, R., Le nettoyage des surfaces peintes, Eyrolles, Institut National du Patrimoine, 2013, p. 69 231 DOMENECH-CARBO, M.T. et al, Multitechnique Approach to Evaluate Cleaning Treatments for Acrylic and Polyvinyl Acetate Paints, Smithsonian Contributions to Museum Conservation, 2012 232 ORMSBY, B., SMITHEN, P., HOOGLAND, F., LEARNER, T., et MILIANI, C., “A scientific investigation into the surface cleaning of acrylic emulsion paintings”, Preprints ICOM Committee for Conservation triennial meeting, New Delhi, septembre 2008, Vol. II, pp. 857-865 233 ORMSBY, B., LEARNER, T., FOSTER, G., DRUZIK, J., et SCHILING, M. “Wet Cleaning Acrylic Emulsion Paint Films: An Evaluation of Physical, Chemical and Optical Changes,” Modern Paints Uncovered, Los Angeles: Getty Conservation Institute, 2007, pp. 189-200 234 KEEFE, M., ORMSBY, B., PHENIX, A., et al., “Art and Industry: Novel Approaches to the Evaluation and Development of Cleaning Systems for Artists’ Acrylic Latex Paints”, Coatingstech, Septembre 2011

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provoquent les solutions aqueuses en contrôlant leur pH (< 7) et surtout leur conductivité (≥6000 µS/cm)235. II.1.1.3.

Produits tests

Pour réaliser le décrassage de la couche picturale, différents solvants vont être utilisés. En premier lieu, les hydrocarbures aliphatiques seront étudiés pour déterminer le meilleur solvant à utiliser. Puis, les solutions tampons ajustées seront analysées. II.1.1.3.1.

Hydrocarbures aliphatiques

Les hydrocarbures aliphatiques sont des composés constitués d’une chaîne carbonée (carbone et hydrogène) linéaire ou ramifiée, saturée ou insaturée236. Les classes les plus connues sont les alcanes, alcènes et alcynes237 Pour sélectionner l’hydrocarbure aliphatique le plus cohérent pour le traitement de décrassage, nous allons étudier divers solvants. Les différents critères d’étude porteront sur la pénétration et l’évaporation238 du solvant. De ceux-ci découlent, pour le premier, l’étude de la tension superficielle et de la viscosité. Pour le second, l’étude de la pression de vapeur saturante* et de la chaleur latente* : -

si la tension superficielle augmente, la mouillabilité, et donc la pénétration, augmente

-

si la viscosité diminue, la pénétration augmente

-

si la pression saturante augmente, l’évaporation augmente

-

si la chaleur latente diminue, l’évaporation augmente Pour chaque paramètre, les valeurs seront classées par ordre croissant. Pour éviter

une pénétration trop forte, les valeurs de la tension superficielle devront être dans la première moitié et celle de la viscosité dans la deuxième. Pour la pression saturante et la chaleur latente, nous voulons que l’évaporation ne soit ni trop rapide (pour permettre une mise en œuvre du décrassage facile), ni trop lente (pour que le solvant ne reste pas à l’intérieur du film trop longtemps). Les valeurs choisies se situeront dans le milieu de cet ordre.

DILLON, C., LAGALANTE, A., WOLBERS, R., “Acrylic emulsion paint films The effect of solution pH, conductivity, and ionic strength on film swelling and surfactant removal”, Studies in Conservation, Volume 59, Number 1, 2014, pp. 52-62 236 MANUILA, A. et al., Dictionnaire français de médecine et de biologie, Paris, Masson, Tome 1, 1971 237 GRAM, D.J., HAMMOND, G.S., Chimie organique, Paris, Gauthier-Villars, 1963, p. 698 238 MASSCHELEIN-KLEINER, L., Les solvants, Cours de conservation 2, Institut royal du Patrimoine artistique, Bruxelles, 1981, p. 112 235

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CONSERVATION - RESTAURATION

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Tableau 1 : Quelques hydrocarbures aliphatiques selon différents paramètres

Cyclohexane

24,65

2 1 3 5 6 7 4 9 8 1 0

0,894

2 1 3 4 5 8 7 9 6 1 0

240

(kPa) 56,9 79,3 22,7 16,5 4,8 1,5 5,4 0,135 34,3 10,3

Chaleur latente de vaporisation 241

Ordre

15,49 14,44 16,88 18,43 19,65 21,62 18,33 23,37 21,88

0,224 0,214 0,286 0,326 0,387 0,515 0,504 0,838 0,413

Pression de vapeur saturante

Ordre

Pentane Isopentane Isohexane242 n-Hexane Heptane n-Octane Isooctane243 n-Décane Cyclopentane

Viscosité (mPa.s)

Volatilité

Ordre

Tension superficielle (mN/m)239

Solvant

Ordre

Pénétration

9 10 7 6 3 2 4 1 8

(kJ/mol) 26,43 24,85 29,89 31,56 36, 57 41,49 35,14 51,42 28,52

2 1 4 5 8 9 7 10 3

5

33,01

6

Le tableau permet d’observer que trois solvants (l’isohexane, l’hexane et le cyclohexane) présentent des valeurs souhaitées sur trois des quatre paramètres étudiés, alors qu’un quatrième solvant (l’isooctane) remplit les quatre critères de choix. Il semble le plus approprié pour le nettoyage des couches picturales. Quant au cyclopentane et au cyclohexane, ce sont bien des hydrocarbures aliphatiques mais ils ne sont pas linéaires, ils sont cycliques. La présence de ce cycle induit des changements de réaction entre le solvant et le feuil pigmenté. En effet, le cycle peut entraîner la captation des ions métalliques présents dans les pigments244. Cela occasionnerait une perte pigmentaire visible sur le coton lors du décrassage245. Ces solvants ne seront pas utilisés lors du décrassage. Au terme de cette analyse, l’isooctane sera l’hydrocarbure aliphatique testé pour le décrassage de la couche picturale.

239

Les valeurs proviennent du site : http://www.surface-tension.de/ Consulté le 08/11/2015 À 20°C 241 Les données ont pour une pression de référence de 101,325 kPa et à une température de 25°C. 242 2-methylpentane 243 2,2,4 trimethylpentane 244 Aucune publication n’a été trouvée sur ce sujet. Cependant, cette affirmation est confirmée par M. Da Cruz (scientifique et professeur) et Dr. Ormsby (scientifique au Tate Modern de Londres). 245 Un test a confirmé ces dires : le passage d’un bâtonnet ouaté imbibé de cyclohexane sur une couche picturale acrylique pigmentée (blanc de titane) a permis de présenter ce phénomène. 240

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CONSERVATION - RESTAURATION II.1.1.3.2.

94 Solution tampon ajustée

Une solution tampon est une solution où le pH est stable même par l’ajout postérieur d’une petite quantité d’une base, d’un acide ou par dilution246. Pour leur réalisation, l’emploi d’un acide fort ou faible avec une base faible ou forte est permis. Quant à la solution tampon ajustée, en plus d’un pH déterminé, elle est ajustée à une conductivité constante. Chris Stavroudis propose différentes recettes pour ces solutions247. Celle qui sera testée est à base d’eau déminéralisée, d’acide acétique et d’hydroxyde d’ammonium. Pour ce faire, il faut ajouter l’acide acétique (un acide faible) dans de l’eau déminéralisée puis l’ammoniaque (base faible) dans l’eau. L’ammoniaque va réagir avec l’acide acétique pour produire des sels solubles et volatils248. Des études249 montrent que le décrassage fonctionne mieux avec un pH inférieur à 6, cela, bien entendu, pour des couches picturales acryliques pures (pH quasi neutre). Dans notre cas, pH de la couche picturale : pH 7,9 – 8. Nous ne descendrons pas en dessous de plus de deux points de pH. Pour un premier test à la solution tampon ajustée, la solution aura un pH de 6,5 : pas trop éloigné du pH de la couche picturale et du pH fonctionnant le mieux selon les études. Si cette solution montre une efficacité plus grande que l’hydrocarbure aliphatique, d’autres pH seront testés. Ces solutions tampons ajustées ne nécessitent pas de rinçage ultérieur car tous les solvants utilisés sont volatils et ne laissent pas de résidus sur la couche picturale250. II.1.1.4.

Tests de décrassage

L’œuvre de mémoire comporte de nombreux cratères, ce qui induit des parois fines et fragiles. Dès lors, un décrassage à sec mécanique à l’aide de diverses gommes ne sera pas testé. Le moyen privilégié pour ce traitement sera physico-chimique. Pour choisir la solution la plus adaptée, des tests vont être réalisés. Ils sont effectués en roulant un bâtonnet ouaté imprégné de la solution sur la surface de l’œuvre.

246

WOLBERS, R., Le nettoyage des surfaces peintes, Eyrolles, Institut National du Patrimoine, 2013, p.28 STAVROUDIS, C., MCP Recipes, Technical Note : Cleaning of Acrylic Painted Surfaces, The Getty Conservation Institute, 2013 248 KEYNAN, D., HUGUES, A., Testing the Waters: New Technical Applications for the Cleaning of Acrylic Paint Films and Paper Supports, The Book and Paper Group Annual 32, 2013 249 The Cleaning of Acrylic Paint Surfaces 3 London workshop, WAAC Newsletter, Vol. 34, N°3, septembre 2012 DILLON, C, LAGALANTE, A, WOLBERS, R, “Acrylic emulsion paint films: The effect of solution pH, conductivity, and ionic strength on film swelling and surfactant removal”, Studies in Conservation, Volume 59, N° 1, 2014, pp.52-62 250 STAVROUDIS, C., “pH Adjusted Water Recipes, Technical note”, Cleaning of Acrylic Painted Surfaces Washington DC, 30 avril – 3 mai 2013, The Getty Conservation Institute, 2013 247

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CONSERVATION - RESTAURATION

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Étant donné que l’œuvre est composée d’un gris quasi uniforme, les tests seront effectués sur trois zones où les salissures sont de types différents : une première zone sans taches mais légèrement encrassée, une deuxième correspondant à celle des taches marron251 et une troisième sur les marques nettes de couleur noire. Tableau 2 : Étude de l’action de produits décrassant sur les différentes couleurs de l’œuvre

Localisation

Couche picturale légèrement encrassée

Tests

Coton-Tige

Isooctane

Action

++

S.T.A.252 : pH 6,5 6000µS/cm

++

Isooctane

++

Tâches marron

Marques noires

251 252

S.T.A. : pH 6,5 6000µS/cm

++

Isooctane

++

S.T.A. : pH 6,5 6000µS/cm

-

Observation Coton gris. L’aspect de la surface reste mat Coton gris. L’aspect de la surface reste mat. Coton marron L’aspect de la surface reste mat. Il n’y a pas besoin de faire beaucoup de passages. Coton gris. L’aspect de la surface reste mat. Nécessité de repasser plusieurs fois. Coton gris. L’aspect de la surface reste mat. Coton n’est pratiquement pas gris

III. Examens des altérations, B. le feuil, Traces diverses Solution tampon ajustée

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Résultats Le résultat semble satisfaisant Le résultat semble satisfaisant

Le résultat semble satisfaisant

Le résultat semble satisfaisant mais nécessite plus de frottements Le résultat semble satisfaisant Le résultat n’est pas satisfaisant


CONSERVATION - RESTAURATION II.1.1.5.

96

Conclusion des tests

L’isooctane fonctionne aussi bien que l’eau ajustée pour chaque zone de salissures. Ce solvant permet la réduction de la suppression de tensio-actif à la surface du film. Il est également moins dangereux pour la couche picturale. Il apparaît approprié comme matériau de décrassage. Toutefois, il faudra faire preuve d’une grande précaution sur les zones fragiles comme sur les parois des cratères. Après cette opération, un temps d’attente est prévu afin de laisser s’évaporer correctement le solvant du feuil. Pour le décrassage général, l’éponge polyvinyl-formal (PVF)253 sera utilisée. Celles-ci ont des pores plus petits que les cotons. Elles absorbent plus et, une fois pressées pour enlever l’excès de solvant, elles restent humides sans relâcher de surplus. Le nettoyage se fait alors plus délicatement. Elles sont peu abrasives et n’engendrent que peu254 ou pas255 de résidus. Suppression des auréoles II.1.2.1.

Méthode n°1 : pose d’un gel solide

La première solution est l’utilisation d’un hydrogel, c’est-à-dire un gel physique256 ayant pour solvant l’eau. Actuellement, trois types de gels rigides sont utilisés en conservation : la gomme gellane, l’agar-agar et l’agarose. L’utilisation d’un gel rigide est très facile car sa taille et sa forme sont modulables à l’infini. Il suffit de l’appliquer sur l’œuvre ou à travers un papier fin et poreux. Les molécules d’eau seront ainsi libérées lentement et de manière homogène dans le substrat pour dissoudre les composés de dégradation solubles. Ensuite, ils sont réabsorbés par capillarité et pression osmotique257. Ce type de gel ne pose pas de problème de changements de surface de l’œuvre puisqu’il y est seulement déposé, contrairement à son application à chaud et liquide, puis retiré une fois gélifié258. Une des problématiques soulevées par ce traitement est la création

Cf. annexe 11 pour les principales caractéristiques physiques. Pour plus d’informations nous conseillons la lecture du mémoire de Juana Segura Escobar. 254 Quelques résidus semblent rester en observation au microscope électronique à balayage. Sous lumière UV aucun n’est détecté. Ils sont supprimés après passage d’un pinceau doux sur la surface peinte. Juana SEGURA ESCOBAR, Sorbent and abrasive : critical assessment of the potential role of synthetic sponges in the conservation of wall painting, MA dissertation, Courtauld Institute if Art – University of London, 2010, p.82 255 SCHORBACH, S., “Reinigungsschwämme in der Restaurierung—Vergleichende Untersuchung zu Material, Wirkung und Rückständen”, Zeitschrift für Kunttechnologie und Kunservierung, N°1, 2009, pp. 4154 256 La connexion entre les chaines macromoléculaires est alors réversible (liaisons faibles) contrairement aux gels chimiques ou le nœud de réticulation est permanent (liaisons covalentes ou ioniques). 257 BARBISAN, S., Mise au point d’une méthode de nettoyage locale des auréoles à l’aide de gels rigides, Mémoire du Diplôme de Restaurateur : Paris : Institut National du Patrimoine, 2016, p. 132 258 GOREL, F., « Assessment of agar gel loaded with micro-emulsion for the cleaning of porous surfaces », CeROArt, 2010. http://ceroart.revues.org/1827 Consulté le 08 janvier 2016. 253

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CONSERVATION - RESTAURATION

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d’auréole supplémentaire autour du gel. Pour diminuer la quantité de molécules d’eau relâchée par le gel, il suffit d’augmenter la concentration de ce dernier. Un gel à entre 4 et 5% semble parfaitement convenir à cet effet259. La gomme gellane, l’agar-agar et l’agarose sont tous les trois des polysaccharides260 ayant diverses propriétés. La gomme gellane est transparente et a très bien été étudiée261 mais pose quelques problèmes : des ions calcium doivent être ajoutés lors de la préparation pour permettre la gélification, ce qui augmente nettement le prix de revient du gel. Ajuster sa conductivité et son pH s’avère plus compliqué et, une fois gélifié, il s’avère peu souple. L’agar-agar est un mélange d’agarose et d’agaropectine (70%-30%). Ce dernier soulève des questions quant à ses effets dans le temps. En effet, l’agaropectine est une molécule acide. Plusieurs études262 ne montrent pas la présence de résidus après nettoyage au gel d’agar. Les avantages de l’agar-agar sont qu’il est transparent, très peu cher, souple et qu’il a une conductivité ajustable. Quant au gel d’agarose, il est transparent, non ionique et peut être utilisé dans une gamme de pH très large (4,5 à 10)263. Différents degrés de pureté sont disponibles. Très coûteux264, ce gel très rigide épouse peu les formes et relâche une quantité d’eau plus importante. Au terme de cette analyse de matériaux, notre choix se porterait davantage sur l’agaragar ou l’agarose. Le prix de ce dernier étant incontestablement trop élevé, il est écarté.

259

SULLIVAN, M., BRODGON-GRANTHA, S., TAIRA, K., New Approaches to Cleaning Works of Art on Paper and Photographs, Winterthur/University of Delaware Program in Art Conservation, 2014 260 « Sucre complexe composé de plusieurs molécules de sucres simples » comme l’amidon, la cellulose ou les pectines. Définition du Larousse Médical. 261 DELATTRE, C., Étude comparative et critique de techniques de nettoyage aqueux du papier : immersion, gels rigides (agar et gellane) et parapint, Mémoire du Diplôme de Restaurateur : Paris : Institut National du Patrimoine, 2015 IANNUCCELLI, S. et SOTGIU, S., “Wet treatments of works of art on paper with rigid gellan gels”, The Book & Paper Group Annual, n°29, 2010, pp. 25-39, IANNUCCELLI, S. et SOTGIU, S., “La pulitura a umida di opere d’arte su carta con gel rigidi di Gellano: presupposti teorici, metodologio applicativa e verifica analitica”, Quaderni, Saonara, Il prato, 2012 262 LEE SCOTT, C., “The use of agar as a solvent gel in objects conservation”, Objects Specialty Group Postprints, Vol. 19, 2012, pp. 71-83 CREMONESI, P., “Rigid Gels and Enzyme Cleaning”, New Insights into the Cleaning of Paintings Proceedings, The Cleaning 2010 International Conference Universidad Politécnica de Valencia and Museum Conservation Institute, Smithsonian Institution Scholarly Press, pp 179-184 263 WARDA, J. et al., “Analysis of Three Gel Poultice in Paper Conservation”, The Book & Paper Group Annual, n°24, 2005, p. 71 264 La préparation la plus pure d’agarose revient à environ 780€ pour 100 grammes.

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CONSERVATION - RESTAURATION II.1.2.2.

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Méthode n°2 : Suppression de l’auréole par nébulisation

Une autre technique utilisée en restauration papier pour supprimer les auréoles est l’emploi de la combinaison nébuliseur – table aspirante265. Pour faire cette opération, il suffit de placer un buvard sous l’œuvre et de diriger l’embout du nébuliseur vers la zone à traiter. Nous pourrions utiliser de l’eau ajustée, même si l’effet de l’eau est négligeable lorsqu’il est nébulisé. Cependant, notre couche picturale est très épaisse et il pourrait s’avérer compliqué d’évacuer toute l’auréole vers le buvard. La zone d’action est beaucoup moins précise que le gel rigide. Cependant, cela apporterait moins d’humidité que ce dernier. Bilan des méthodes envisagées La première solution semble plus adéquate pour supprimer les auréoles présentes sur la couche picturale. L’agar-agar sera mélangé d’abord à de l’eau pour être solubilisé puis la solution sera complétée par de l’eau ajustée pour contrôler au mieux la conductivité et le pH. La concentration du gel sera de 5% permettant un apport d’eau moindre. Il pourrait être envisageable de commencer par cette méthode puis de terminer par la seconde pour supprimer toute trace d’auréole éventuellement présente. Consolidation de la couche picturale Deux choix de restauration sont possibles : la mise à plat ou non des bords de tension. En effet, le démontage de l’œuvre, ou plutôt la suppression des agrafes, est obligatoire car ces dernières sont presque toutes oxydées. Ces deux méthodes prennent origine dans la décision de réaliser ou non une consolidation générale par nébulisation. Nous avons jusqu’à présent tenté d’éviter au maximum une utilisation de solutions aqueuses sous forme liquide : un solvant aliphatique pour le décrassage et un gel rigide ne diffusant que très peu d’eau dans la couche picturale. La nébulisation pourrait amener à une consolidation du feuil sans l’effet négatif de la phase liquide de l’eau. En effet, la solution une fois nébulisée est sous forme de gouttelette de vapeur de la taille du nanomètre266. Cependant, cette technique nécessite le montage de l’œuvre sur un bâti et la mise à plat des bords de tension peints.

WEIDNER, M.K., “Treatment of Water Sensitive and Friable Media Using Suction and Ultrasonic Mist”, The American Institute for Conservation, 1993 266 MICHALSKY, S., DIGNARD, C., « Ultrasonic misting. Part 1, Experiments on appearance change and improvement in bonding», JAIC, 1997, Volume 36, Number 2, Article 2, p. 2 265

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CONSERVATION - RESTAURATION

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Nous verrons les avantages et inconvénients de cette méthode en la comparant à la consolidation, par la face, au pinceau. II.1.3.1.

Méthode n°1 : la nébulisation

Cette méthode consiste au démontage de l’œuvre de son châssis, à la mise à plat des bords de tension, au collage de bandes de tension, à la nébulisation d’un adhésif et au remontage de l’œuvre avec un nouveau pliage des bords. L’avantage principal de cette méthode est l’utilisation d’un mélange aqueux d’adhésif sans l’effet de l’eau sur la couche picturale. Cette méthode, utilisée en atmosphère saturée, provoque une brillance moindre267. Ce traitement possède quelques inconvénients. Il existe peu d’informations sur la nébulisation utilisée en consolidation : il est certain qu’il y a une différence entre la concentration d’adhésif dans la cuve du nébuliseur et celle arrivant à la surface de l’œuvre, mais cela n’a pas été démontré et calculé scientifiquement. Nous ne savons pas si la multiplication des passages (n) à une concentration x amène à une concentration finale nx (par exemple : 2 passages à 0,5% donnent une concentration finale de 1%). Le temps de nébulisation amène-t-il, lui, à des changements au niveau de la consolidation de l’œuvre ? Deuxièmement, lors de la consolidation de l’œuvre par nébulisation, la table aspirante entraîne l’adhésif sur l’ensemble du tableau : zones textiles seules comme empâtements. La toile n’a cependant pas la nécessité de cet adhésif. Il faut souligner que cette restauration est extrêmement interventionniste. En effet, nous devrons ajouter à l’œuvre des bandes de tension lors de son montage sur bâti. Mais surtout, lors du démontage et du remontage de la peinture, la couche picturale présente sur les bords de tension sera mise à plat puis repliée. Cela entraîne des opérations sensibles et dangereuses pour la couche picturale268. II.1.3.2.

Méthode n°2 : au pinceau

Avec cette méthode, la consolidation serait effectuée au pinceau. L’adhésif est appliqué sur chacun des empâtements mais pas sur les zones de toile. Cela n’engendrera aucun déséquilibre mécanique puisque celui-ci est déjà présent entre les zones peintes et les

HANSEN, E.F, LOWINGER, R., SADOFF, E., “Consolidation of porous paint in a vapor-saturated atmosphere”, Journal of American Institute for Conservation, Vol. 32, n°1, 1993, pp. 1-14 268 Les bords ont été pliés pour la première fois deux ans après la création de l’œuvre. Lors de sa mise à plat, cela entraînerait une parfaite remise en place de la couche picturale. Mais celle-ci reste fragile et lors du repliage, avec l’effet du consolidant, il est moins sûr que cela en soit en de même. 267

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CONSERVATION - RESTAURATION

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zones de toile. Cette dernière étant très réactive, elle ne subira aucun changement pendant la consolidation. Le principal avantage de cette méthode est que tous les traitements visant à restaurer l’œuvre sont possibles. Les autres avantages de la méthode n°2 sont évidemment les désavantages appartenant la méthode n°1. Le seul inconvénient de la méthode n°2 est qu’il est nécessaire de consolider le feuil à l’aide d’un mélange aqueux en phase liquide directement sur l’œuvre.

Tableau 3 : Résumé des principales opérations liées à la consolidation

Opérations Mise à plat des bords Ajout de bandes de tension Utilisation d’une solution aqueuse directement sur la couche picturale Nouveau pliage des bords de tension Remise en tension

Méthode Nébulisation Oui Oui

Pinceau Non Non

Non

Oui

Oui Oui

Non Oui

Tableau 4 : Principaux avantages et inconvénients de chaque méthode

Démontage avec mise à plat des bords Pour Contre Pas de solution aqueuse directement Mise à plat des appliquée sur la bords de tension surface Ajout de bandes de tension Nouveau pliage des bords de tension Consolidant emporté dans les zones de toile Peu d’informations sur la nébulisation

Démontage sans mise à plat des bords Pour Contre Solution aqueuse directement Pas de mise à plat appliquée sur la surface Pas d’ajout de bandes de tension Pas de nouveau pliage des bords Consolidant apporté seulement sur les empâtements

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CONSERVATION - RESTAURATION

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La nébulisation semble avoir plus d’inconvénients que d’avantages par rapport à la consolidation au pinceau. Elle implique plus d’interventions et la possibilité d’engendrer des traumatismes physiques sur l’œuvre. Nous avons voulu voir si la nébulisation était tout de même possible. Un nébuliseur à ultrasons a été créé et des tests ont été effectués sur une « œuvre-test » prêtée par l’artiste pour l’occasion et datant de la même époque269. Les résultats ne sont pas convaincants : une poudre blanche se dépose sur les zones de toile pour différentes concentrations et différents adhésifs. Cela est certainement dû au fait que la toile est plus poreuse, laisse mieux passer l’aspiration, et que l’adhésif est davantage aspiré sur ces zones. Quant à la poudre blanche, elle pourrait être due au fait que l’adhésif nébulisé dans la cloche atteint la surface de l’œuvre déjà sèche et ne forme alors pas un film. De plus, le feuil ne semblait pas réellement consolidé. La consolidation au pinceau sera le traitement réalisé. Son inconvénient est l’application d’une solution aqueuse directement sur le feuil. Les interventions autour restent moindres et sont moins traumatisantes. Une intervention localisée sur chaque empâtement consolidera l’ensemble de la couche picturale. L’adhésif ne sera pas appliqué sur les zones de toile. Le déséquilibre toile – empâtement étant déjà présent, l’ajout de consolidant sur le feuil ne changera pas celui-ci. II.1.3.3.

Choix du consolidant

Nous choisissons un adhésif synthétique de nature similaire à la couche picturale de l’œuvre. De nombreux matériaux sont à notre disposition : Medium for consolidation® (MFK) 4176 de Lascaux®, Acril® 33, Acril® ME parmi les plus utilisés. Nous les comparerons pour déterminer lequel utiliser.

269

Cf. annexes 12 - 13

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CONSERVATION - RESTAURATION

102

Tableau 5 : Principales caractéristiques des différents consolidants

Composition

MFK® 4176 Solution d’esters d’acrylate, de méthacrylate et de styrène

Acril® 33

Acril® ME

Copolymère acrylique

Poly (butyl méthacrylate)270

Description

Liquide blanc laiteux

Matière sèche Viscosité à 20°C pH Température de transition vitreuse

25% 1-5 mPa.s 8,5

Liquide blanc laiteux 45-47% 2500-5000 mPa.s 9-10

Inconnue

6-8°C

Liquide blanc laiteux 41% <500 mPa.s 6-7 18°C

Le MFK® 4176 semble concorder parfaitement au niveau de la composition avec l’œuvre de mémoire. Cependant, la présence de styrène nous paraît trop risquée : en dépit des quelques articles montrant le bon vieillissement du produit271, tout produit basé sur le styrène est connu pour jaunir272. L’application de ce consolidant directement sur une couche picturale très claire ne sera pas testée. La composition exacte de l’Acril® 33 n’est pas connue. Son vieillissement est cependant mauvais car perceptible à l’œil nu273. Nous ne l’utiliserons donc pas. L’Acril® ME présente un bon vieillissement, sans jaunissement274. Ce produit est une microémulsion, les molécules qu’il contient sont de la taille du nanomètre. Cela permet une meilleure pénétration dans la couche picturale. Dilué et en application directe, il ne modifie pas les propriétés de la surface (matités, brillances…). Néanmoins, lors de son vieillissement il réticule et devient alors moins réversible. La consolidation n’est pas un traitement que l’on peut supprimer à posteriori, cela n’est pas un critère valable ici. Ce consolidant n’empêche pas d’autres opérations par la suite, la retraitabilité est possible. Nous utiliserons l’Acril® ME comme consolidant.

CAMAITI, M., BORGIOLI, L., ROSI, L., “Photostability of innovative formulations for artworks restoration”, La Chimica & l’industria, Novembre 2011, pp. 100-105 271 LARDET, G., « Comparaison du Plexisol® P550 et du Medium de Consolidation® 4176 », CeROArt, 2014, URL : http://ceroart.revues.org/3986 Consulté le 08 janvier 2017 272 STANDEVEN, Harriet A.L., Op. Cit., p. 105 273 LLAMAS, R., RAMOS-SAN PEDRO, D., “Colorimetric evaluation of three adhesives used in the consolidation of contemporary matte paint after artificial ageing”, Conservar Património, n° 20, 2014, pp. 11 – 21 274 CAMAITI, M., BORGIOLI, L., ROSI, L., Op. cit. 270

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CONSERVATION - RESTAURATION

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Mastic Nous choisirons parmi trois mastics communément utilisés : le mastic traditionnel, le Modostuc® et le mastic à l’Aquazol®275. Le Modostuc® serait celui qui réagirait le moins bien276 aux variations climatiques et montre un nombre important de craquelures. Quant aux mastics à la colle de peau, ils se montrent plus souples que le Modostuc® mais beaucoup moins que les mastics à l’Aquazol®277. Ils possèdent cependant un léger avantage au niveau de la stabilité aux variations hygrométriques. Il semblerait possible de pallier cela en isolant le mastic à l’Aquazol®278. Le vieillissement de ce dernier a été étudié et cette résine est stable279. Étant donné le support en lin-coton et la souplesse connue de la peinture acrylique, nous optons pour le mastic à l’Aquazol®. Il faut maintenant choisir lequel utiliser car il en existe quatre : Aquazol® 5, 50, 200 et 500. Les deux derniers sont les plus utilisés pour réaliser des mastics. Différentes concentrations sont décrites : Tableau 6 : Comparaison de l'Aquazol 200 et 500 pour la fabrication de mastics

Concentrations utilisées Sources Aquazol 200

Aquazol 500

25% dans l’eau + 67-75% de

20% dans l’eau + 60-67% de

MURRAY, et al. Poster

charges

charges

s.d.

10% dans l’eau + charges

10% dans l’eau + charges

ARSLANOGLU, 2003

Les différences entre l’Aquazol® 200 et 500 sont au niveau de la masse moléculaire. Pour une même concentration, l’Aquazol® 500 a une viscosité plus importante que le 200. Pour que le mastic ne s’infiltre pas dans la couche picturale et reste en surface, l’Aquazol® 500 sera utilisé. Des tests pratiques280 ont été réalisés pour les différencier. Ils ont montré FRIEND, S., “Aquazol: One Conservator’s Empirical Evaluations”, WAAC Newsletter, vol. 18, n°2, mai 1996 Anonyme, “Two Aquazol ‘Gesso’ Recipes”, WAAC Newsletter, vol. 18, n°2, mai 1996 276 MROZIELSKI, A., Op. Cit. 277 LE BERRE ALBERTINI, S., La souplesse des mastics, Mémoire de fin d’étude, ENSAV La Cambre, 2016, p.78 ARSLANOGLU, J., “Evaluation of the use of Aquazol as an adhesive in painting conservation”, WAAC Newsletter, vol. 25, n°2, mai 2003 278 ARSANOGLU, J., « Aquazol as Used in Conservation Practice », WAAC Newsletter, vol. 26, n°1, janvier 2004 279 WOLBERS, R., McGINN M., DUERBECK, D., “Poly(2-Ethyl-2-Oxazoline): A New Conservation Consolidant,”, Painted Wood: History and Conservation, V. Dorge and F.C. Hault, Los Angeles: Getty Conservation Institute, 1994, pp. 514-517 280 Cf. annexe 14 275

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que l’Aquazol® 500 à 10% avec 67% de carbonate de calcium semble le plus adéquat pour l’œuvre à restaurer. Pour une meilleure stabilité face aux variations hygrométriques, les mastics seront isolés avec une résine insoluble dans l’eau. Réintégration colorée La résine soluble dans les solvants aliphatiques largement utilisée en restauration est le Regalrez® 1094. L’Aquazol® n’est pas soluble dans les solvants non polaires, la retouche est donc possible. Le Regalrez® 1094 est un vernis à faible masse moléculaire, ces petites molécules permettent un film sec, lisse et régulier281. Après vieillissement, il reste stable et soluble dans son solvant d’origine. Cependant, cette résine est assez friable et pour la rendre plus souple, il faut ajouter du Kraton® G 1650282 auquel il est nécessaire d’adjoindre du Tinuvin® 292283 à 2% de la masse sèche284 pour parfaire la stabilité du vernis aux rayons ultraviolets. La couche picturale étant plutôt mate et le Regalrez® 1094 étant un vernis plutôt brillant, il sera peut-être nécessaire d’ajouter au liant des agents matifiants. Les plus utilisés sont la fumée de silice, la cire, la silice micronisée ou encore les microbilles de verre. La première est un matériau très difficile à obtenir. La cire rend le film plus électrostatique mais plus réversible, plus souple et moins hygroscopique285. Les deux derniers peuvent poser des problèmes d’abrasion lors de leur retrait. Le Kraton® permet aussi de réduire la brillance du film286. Il est ajouté jusqu’à 10% du poids de la résine287. Lors de nos tests, nous avons déterminé que la solution de Regalrez ® 1094 à 10% dans du white-spirit avec l’ajout de 10% de Kraton® G 1650 et de 2% de Tinuvin® 292 possède un aspect de surface similaire à celle du feuil de l’œuvre. La palette utilisée sera limitée au blanc de titane, noir d’ivoire et l’ajout d’orange de cadmium pour réchauffer le gris si besoin.

281

WHITTEN, J., « Regalrez 1094 : Properties and Uses », WAAC Newsletter, n°1, janvier 1995, pp.11-12 RIE (de la), E.R., « Polymer Additives for Synthetic Low-Molecular-Weight Varnishes », Preprints of the 10th Triennal Meeting of the ICOM Committee for Conservation, International Council of Museums, Washington DC, 1993, pp. 566-573 283 RIE (de la), E.R., MCGLINCHEY, C., « New synthetic resins for picture varnishes », Cleaning, Retouching and Coatings, J.S. Mills et P. Smith, International Institute for the conservation of Historic and Artistic Works,, 1990, pp. 168-173 284 GOLTZ (von der), M. et al., “Varnishing as part of the conservation treatment of easel paintings”, Conservation of Easel Paintings, Routledge, Oxon, 2012, p. 642 285 Ibid. 286 GOLTZ (von der), M. et al., Op. Cit., p. 643 287 Ibid, p. 644 282

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II.2. Support Suppression des agrafes Le démontage de l’œuvre s’avère délicat, il est nécessaire de retirer les agrafes logées dans la couche picturale (plus ou moins fragile). Les empâtements présents aux alentours de ces agrafes empêchent l’utilisation traditionnelle de l’ôte -agrafe. En effet, par la pression obligatoire sur la surface de l’œuvre lors de la suppression de l’agrafe, l’empâtement est détruit. De ce fait, une technique différente va être réalisée : l’agrafe sera scindée en son milieu à l’aide d’une pince coupante, puis chaque morceau sera relevé délicatement à la verticale pour être retiré sans dommages pour la couche picturale. Décrassage du revers Le revers de l’œuvre est aussi une surface peinte et non vernie. La toile est tout de même visible et la peinture a davantage un rôle d’encollage que d’une couche picturale. Après un dépoussiérage, un décrassage plus profond sera exécuté avec une gomme ou une éponge. D’après une étude288, des résidus chimiques ont été trouvés sur les échantillons traités avec des gommes PVC, le Groomstick® et Absorene® et les gommes en poudre. Les matériaux laissant le moins de particules sont les éponges à démaquiller, le chiffon microfibres et les éponges vulcanisées. Ces deux derniers ne laissent pas de résidus chimiques, mais l’éponge vulcanisée peut rendre la surface légèrement plus brillante. Le chiffon microfibre ne permet pas un décrassage profond. L’éponge à maquillage offre des compositions différentes selon chaque fabricant ; des résidus chimiques peuvent alors être déposés. Le test à l’éponge vulcanisée n’a pas montré de brillances particulières. Elle sera utilisée pour le décrassage.

288

DAUDIN-SCHOTTE, M., et al., « Dry Cleaning Approches for Unvarnished Paint Surfaces », dans Proceedings from of the Cleaning 2010 Conference, Valencia, 26-28 May 2010,Smithsonian Institute, janvier 2013, pp. 209-219

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Suppression des taches de rouille Le support toile présente des traces de rouille au niveau des agrafes. Elles doivent être enlevées car la rouille pourrait davantage oxyder le textile. Pour cela, il est possible d’utiliser des solutions à base d’acides (formique, citrique ou oxalique)289 mais la cellulose est sensible aux acides. Ces derniers peuvent provoquer une hydrolyse et rendre, à terme, la fibre friable290. La combinaison du sel bisodique d’Éthylène Diamine Tétra-Acétique (EDTA), l’agent chélatant, et du dithionite de sodium est utilisée en restauration papier et semble fonctionner correctement. Cependant, le dithionite de sodium est classé dans les substances hasardeuses car très inflammable et pouvant produire des combustions spontanées. Une étude a été réalisée quant à son remplacement par le métabisulfite de sodium291 et les résultats sont satisfaisants. Le métabisulfite de sodium sert à réduire les ions ferriques (III) en ions ferreux (II) qui sont solubles à l’eau. Pour parfaire le mélange, le sel bisodique d’EDTA est ajouté dans la solution car il permet d’isoler les ions fer II et optimise le rinçage292. Il est vrai que le métabisulfite de sodium pourrait être utilisé seul, mais lors du rinçage, la suppression totale des ions fer II n’est pas certaine et ces derniers peuvent se réoxyder en ions fer III par la suite et former de nouvelles marques293. Les concentrations qui fonctionnent dans l’article sont celles de 5 et 10% (massevolume) dans l’eau avec une masse égale des deux solides294. Il ne faut surtout pas aller à une concentration supérieure à 10% au risque de changements chimiques et physiques de la solution. D’après nos tests, l’EDTA seul et le mélange à base de métabisulfite de sodium ne fonctionnent malheureusement pas. D’autres tests ont été effectués avec des solutions d’acide formique et citrique à 5% avec un léger résultat. La solution à base d’acide oxalique à 5% a montré des résultats satisfaisants. Cette solution sera utilisée avec précaution et les fibres seront abondamment rincées pour ne pas les endommager.

289

FLURY-LEMBERG, M., Textile Conservation and Research, Abbegg Stiftung, Bern, 1988 LANDI, S., Textile Conservator’s Manual, 2e edition, Butterworth Heinemann, Oxford, 1992, p.22 291 IRWIN, S., “A Comparison of the Use of Sodium Metabisulfite and Sodium Dithionite for Removing Rust Stains from Paper”, The Book and Paper Group Annual, vol. 30, 2011, pp. 37-46 292 IRWIN, S Op. Cit, , pp. 37-46 293 American Institute for Conservation, Book and Paper Group, 9e edition, American Institute for Conservation Book and Paper Group. Washington, D.C., AIC. Chapitre 13, 1992, p. 22 294 IRWIN, S., Op. Cit. 290

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Remise du support dans le plan Les déformations seront supprimées après la consolidation à l’aide d’une action combinée comprenant une légère chaleur et humidité. Mise en tension de l’œuvre L’œuvre doit être retendue. Cependant, les bords sont peints, les plis d’origine doivent être gardés pour la remise en tension. L’ouverture des angles du châssis va permettre de rétablir une tension correcte. Taper les clefs induirait de nombreuses vibrations dans la toile. Le système actuel sera remplacé par l’ajout de tendeurs métalliques. Ce dispositif se visse sur le châssis d’origine et permet d’ouvrir les angles en tournant un écrou, ce qui n’émet aucune vibration. Réduction des variations de tension Un châssis à tension autorégulé aurait été une bonne alternative pour réduire les variations de tension au sein de l’œuvre. Son prix295 et le fait que le châssis original soit en condition optimale nous ont détournée de cette option. Pour réduire les variations de tension, l’ajout d’un dos protecteur est envisageable. Il a été étudié296 que les plaques en polycarbonate amortissent les variations d’humidité relative entre 90 et 95%. L’air emprisonné entre la toile et la plaque servirait de zone « tampon » où l’humidité relative est stabilisée. Les variations de tension seraient amorties tout en évitant des chocs mécaniques et en protégeant de la poussière. Malheureusement, le climat de l’atelier est beaucoup trop humide et les dos protecteurs pour les peintures conservées dans des lieux non contrôlés ou tropicaux ne sont pas conseillés297. Cette proposition de traitement a permis d’établir, tant pour la couche picturale que pour le support, les méthodes et matériaux qui seront utilisés pour la restauration de La Main. Chacun d’eux a été réfléchi dans un souci de déontologie et de respect maximum de l’œuvre. Dès lors, les opérations de conservation – restauration peuvent être débutées.

595€ TTC hors livraison. Cf. devis en annexe 15 ROCHE, A., La Conservation des peintures modernes et contemporaines, CNRS, Paris, 2016, pp.176-183 297 LEVENSON, R., “Re: Backing boards and mold” [e-mail], 28 août 2006 295 296

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III. Opérations de conservation - restauration Des mesures de conservation préventives doivent être réalisées. Elles concerneront l’atelier de Marian Kasperczyk, les préconisations de conservation et de manipulation et le transport de l’œuvre. Les principes de déontologies seront respectés au maximum pendant la restauration. Ils respecteront les principes de retraitabilité voire de réversibilité, de stabilité, d’innocuité et de lisibilité. Les traitements seront le moins interventionnistes possible.

III.1.

Mesures de conservation préventive

La conservation préventive est préférable à la restauration d’une œuvre. Un bilan des mesures de conservation préventive réalisable sera proposé. Celles-ci visent à réduire ou empêcher de prochaines dégradations dans l’atelier de Marian Kasperczyk. Contrairement à un musée, il est bien évident que des travaux de l’atelier sont irréalisables. L’appartementatelier d’artiste doit le rester, mais quelques mesures simples peuvent être prises.

Figure 62 : Une vue d’une partie de la pièce principale où sont exposées et rangées les œuvres

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Bâtiment Les locaux de Marian Kasperczyk sont : un rez-de-chaussée (plusieurs pièces) et une cave. Cette dernière sert d’atelier, on l’atteint par un escalier provenant de la pièce principale qui donne sur la porte d’entrée. C’est dans cette pièce que toutes les œuvres de l’artiste sont entreposées. Aucun signe apparent de faille structurelle n’est visible, et le problème des canalisations du voisin supérieur n’est plus d’actualité. III.1.1.1.

Climat

Le climat comprend la température et l’hygrométrie. La conservation d’œuvres passe avant tout par le contrôle de ces deux paramètres298. Des relevés de climat ont été réalisés pendant plusieurs mois299. Après observation des courbes, on peut voir que la température et l’hygrométrie varient grandement : 11°C à 24,5°C et 46% à 75% d’humidité relative pour les extrêmes. Les variations pendant une journée sont faibles300 mais bien visibles pendant un mois.

Figure 63 : Courbe des variations de température (en rouge) et d'hygrométrie (en bleu).

Au vu des courbes, il est essentiel de stabiliser le climat. Les peintures acryliques ont un comportement important face aux températures : vers 30°C, le film devient poisseux et sous 10°C, le feuil est cassant301. Les écarts de températures peuvent être réduits par 298

Département de la conservation préventive du C2RMF, Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, Paris, juillet, 2006, p.10 299 Avec KlimaLogg Pro 300 Cf. Courbe en annexe 10 301 Département de la conservation préventive du C2RMF, Op. Cit., p.11

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l’augmentation du chauffage en hiver et/ou une ventilation l’été302. L’idéal muséal serait, bien sûr, une température entre 18°C et 22°C ±2°C, mais cela est très difficile pour l’atelier. L’humidité relative devrait se situer entre 40 % et 65 %, au maximum303 avec des variations journalières de 5%304 (ce dernier point étant déjà pratiquement bon).

Figure 64 : Courbe des variations de température (en rouge) et d'hygrométrie (en bleu) pendant le mois de mars

Les températures fluctuent beaucoup et sont nettement moindre aux standards de conservation. Il serait nécessaire d’augmenter puis stabiliser la température. Un déshumidificateur permettrait d’assurer une humidité relative moindre. Pour la température, le DéLonghi® TRRS0920CB conviendrait parfaitement. C’est un radiateur à bain d’huile avec thermostat et il est conçu pour une surface de 60m². Il coûte 80 € 305. Pour l’humidité relative, le produit Protoumat® TTK120E semble adapté à cet effet. Il élimine l’humidité de l’air et permet de maintenir un taux d’humidité relative optimal. Il est conçu pour une surface entre 95 et 238m² et coûte 405 €306.

L’installation d’un système de climatisation ou l’isolation de l’atelier étant des opérations trop importantes. Car à plus de 70% il y a un risque de développement de moisissures. 304 Département de la conservation préventive du C2RMF, Op. Cit. p.12 305 DELONGHI TRRS0920CB Radiateur bain d'huile http://www.cdiscount.com/maison/chauffage/delonghitrrs0920cb-radiateur-bain-d-huile/f-1174616-deltrrs0920cb.html#mpos=19|cd 306 Déshumidificateur pour espaces de tailles moyennes TTK120E TROTEC. http://www.usinenouvelle.com/expo/deshumidificateur-pour-espaces-de-taill-p36724823.html 302 303

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CONSERVATION - RESTAURATION III.1.1.2.

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Lumière

La lumière peut provenir de deux sources : naturelle et artificielle. Rappelons que les peintures acryliques ne sont pas vraiment sensibles aux rayons ultraviolets, les pigments servant, le plus souvent, de stabilisateur307. Leur conservation dans le noir, par contre, tend à un jaunissement du film308. La majorité des fenêtres est équipée de rideaux métalliques, le plus souvent baissés, occultant la lumière. Toutes sont en verre opaque et structuré, les rayons ultraviolets ne peuvent donc pas atteindre les œuvres. Quant à la lumière artificielle, des spots « lumière du jour » sont fixés sur des rails au plafond. Ils sont éloignés des œuvres et semblent assez éloignés pour ne pas dégager sur l’œuvre une chaleur trop importante. Le rayonnement ultraviolet des lampes n’est pas connu, mais aucun filtre n’est présent. Il ne faut pas oublier que ce sont des éclairages d’habitation et non de musée, une réduction des lux n’est alors pas envisageable. Rien ne semble à envisager pour ce paramètre, les mesures existantes conviennent amplement. III.1.1.3.

Polluants et poussières

L’air intérieur est constitué de polluant gazeux (dioxyde de souffre, composés organiques volatils, ozone, acides) émanant de multiples sources (combustibles, essence, colles et parfois même, des matériaux des œuvres)309. La poussière est une part importante des particules de l’air. Elle est composée de particules minérales et organiques (carbone, ciment, micro-organismes, etc.). La pièce principale ne contient pas seulement les tableaux. Des motos y sont également entreposées. Marian Kasperczyk les répare et les gare ici car il n’y a pas de garage. Elles ne peuvent être mises ailleurs et, de ce fait, les composés organiques volatils (COV) font malheureusement partie de l’environnement. La pièce où sont gardées les œuvres donne

307

JABLONSKI et al. Op. Cit. pp. 6-7 Ibid. 309 Département de la conservation préventive du C2RMF, Op. Cit., p. 15 308

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sur la porte d’entrée, cela laisse une voie d’entrée pour tous les types de poussière310. La poussière est corrosive311, il est important de la limiter. Filtrer l’air par un système de renouvellement d’air serait une opération envisageable mais coûteuse. Les purificateurs d’air fonctionnent avec différents filtres pour retenir la pollution312. L’ajout d’un filtre HEPA permet de retenir de très petites particules (spores de moisissures, virus et bactéries). Les appareils les plus efficaces ont un filtre à charbon actif pour capter les composés organiques volatils (COV) et les gaz d’échappement. Le purificateur Rowenta® PU6020FO semble parfait pour cela : il filtre 99,95% des particules filtrées, les polluants chimiques, biologiques et physiques, les grosses particules comme les fines. Il pourrait amener à une diminution des particules physiques se déposant sur les œuvres. Il est efficace sur une surface de 80m² et coûte 350 €313. Il est vrai que le total des trois instruments peut sembler cher (835€), mais au vu du nombre d’œuvres dans l’atelier, cela en vaut la peine. Toutefois, pour réduire les coûts, les machines semblant le plus nécessaire sont celles régulant le climat. Le déshumidificateur possédant un filtre, il pourra minimiser certaines particules. Préconisations de conservation et de manipulation des œuvres Les œuvres sont rangées avec ou sans châssis. Lorsqu’elles sont montées, elles sont rangées dans des casiers prévus à cet effet. Il faudra seulement éviter d’appuyer l’épaisse couche picturale, au risque de l’endommager. Quand les toiles sont libres, les grandes sont fixées aux murs et les plus petites sont sur des cintres. Le rangement de son atelier peut sembler chaotique au premier abord, mais finalement, on s’aperçoit qu’il y a un certain ordre. Il faudra veiller à ne pas laisser des œuvres près de zones « de vie » au risque de les dégrader. Cela reste difficile, l’atelier étant une habitation et non une réserve. La conservation des œuvres sur châssis à plat (couche picturale vers le haut) est à proscrire pour que le poids de la peinture n’affaisse pas la toile.

310

Département de la conservation préventive du C2RMF, « Contaminants minéraux et organiques », juillet 2006, p. 16 311 DIGNARD, C., MASON, J., « Le soin des objets de musées », La conservation préventive dans les musées, manuel d'accompagnement, Montréal, Université du Québec à Montréal, 1995, pp. 153-163 312 Purificateurair.fr, Guide d’achat et FAQ, 2015. http://purificateurair.fr/guide.htm. Consulté le 08/03/2017 313 Rowenta, Rowenta PU6020. http://qualite-air.rowenta.fr/product/pu6020/. Consulté le 08/03/2017

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Figure 65 : Petites peintures sur les cintres. Atelier de Marian Kasperczyk.

Pour éviter l’accumulation de poussière et l’abrasion de la couche picturale, il serait préférable de dépoussiérer de temps un temps avec un pinceau doux. Pendant la manipulation, l’empreinte du doigt peut, à elle seule, faire des dommages sur l’œuvre314. Il sera préférable de porter des gants ou de poser ses mains en dehors de la couche picturale, sur les montants ou la traverse. Transport de l’œuvre dans les locaux de restauration L’œuvre est constituée d’une grande quantité de peinture. La masse totale pèse sur le châssis et s’il y a vibrations, les risques sont plus élevés. Les mouvements de l’œuvre doivent être limités. III.1.3.1.

Risques

Lors du transport, plusieurs risques sont mis en jeu, pour La Main. Le changement de température et d’humidité relative peut modifier la couche picturale315 de diverses manières. Des températures plus basses vont rendre le film plus cassant et si elles sont plus hautes, il sera plus souple, parfois même poisseux, ce qui augmente les probabilités de capter la poussière. Les variations d’humidité relative, et surtout son augmentation, peuvent changer le comportement de la toile et affecter le feuil. III.1.3.2.

Préconisations de transport

L’œuvre doit être transportée dans les conditions les plus stables possible. Le conditionnement doit éviter au maximum les vibrations. Une caisse de transport doit être 314

EPSTEIN, N., Caring for fine art paintings. http://www.artuner.com/insight/caring-for-fine-art-paintings/. Consulté le 08/03/2017. 315 Département de la conservation préventive du C2RMF, Op. Cit., p.11

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créée. Celle-ci sera constituée de trois épaisseurs316 : une première couche protégeant la surface de l’œuvre avec un tissu chimiquement neutre : le Tyvek®. La deuxième couche servira à atténuer les vibrations et les variations de températures et d’hygrométrie. Elle sera réalisée en mousse polyéthylène Plastazote®, matériau chimiquement neutre et résistant à de nombreux solvants317. La troisième couche, en bois, consistera en un emballage rigide pouvant résister aux chocs et facilitant les manipulations. La mousse intérieure sera aux dimensions exactes de la peinture pour la stabiliser à son maximum. Deux petites plaques de mousse seront glissées sous la toile, entre les montants et la traverse , pour réduire davantage les mouvements de toile. Pour limiter les variations de température et d’hygrométrie de l’atelier de restauration, l’œuvre sera conservée dans cette boîte.

Couvercle contre-plaqué

Mousse Tyvek®

Corps Mousse

Schéma 7 : Boîte de transport

LP ART, Emballage, Le Guide du transport d’œuvres d’art et d’expositions, p.1 ATLANTIS, Plaques de Mousse Plastazote®, http://www.atlantis-france.com/fr/emballage/350-plaquesde-mousse-plastazote.html. Consulté le 13/08/201. 316 317

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La caisse mesure 70,5 par 130 cm et 15 cm de profondeur. Une couche de mousse est présente au-dessus, sous l’œuvre et sur les bords pour éviter tout mouvement du tableau. Le Tyvek® recouvre toutes les parties de la mousse. Une ouverture est créée, dans une mousse latérale, pour une meilleure manipulation du tableau.

Des mesures de conservation préventives se seraient avérées nécessaires afin de minimiser toute dégradation future. Malheureusement, La Main a subi des accidents et doit être restaurée.

Figure 66 : Caisse de transport

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III.2.

116

Restauration de La Main

Les traitements de restauration vont maintenant être décrits de manière chronologique. Décrassage de la couche picturale Pour enlever la poussière superficielle, une brosse douce en poils de chèvre a d’abord été passée sur l’ensemble de la surface de l’œuvre. D’après les tests de décrassage, nous avons effectué cette opération avec de l’isooctane et des éponges PVF. Ces éponges devenant dures à l’air libre, elles ont au préalable été plongées dans de l’eau déminéralisée puis ont été essorées dans un récipient puis sur un buvard. Ensuite, elles sont imbibées de solvant et l’excédent est, encore une fois, enlevé à l’aide d’un buvard.

Figure 67: État des éponges après décrassage de l’œuvre

Les morceaux d’éponge sont maniés à l’aide d’une pince brucelles*. Ce travail s’effectue sous lunettes grossissantes où chaque empâtement est nettoyé l’un après l’autre. Comme repères, des petits Post-it® sont posés sur les bords de l’œuvre et sont déplacés au fur et à mesure. Quant aux taches beiges dispersées, elles n’ont pu être supprimées grâce à l’isooctane ou à l’eau ajustée. Elles sont retirées délicatement à l’aide d’un scalpel. Leur nature n’a pas pu être déterminée. Les résidus obtenus lors du grattage étaient trop petits pour mener à un test empirique dans un solvant et nous ne pouvions rien observer.

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Observations Après décrassage, nous observons que l’aspect mat du tableau s’est transformé en une surface avec des zones brillantes et mates. Un voile grisâtre et les marques noires ont été supprimés. Cela est bien visible sur les éponges et de près, localement. Il est cependant plus difficile de voir un réel avant-après sur l’œuvre globale. Les couleurs apparaissent, tout de même, plus hétérogènes et les mélanges de gris sont plus sensibles. Les tâches beiges ne gênent plus l’œil et les nuances de la couche picturale sont de nouveau visibles.

Figure 68 : Avant suppression des taches

Figure 69 : Après suppression des taches

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Suppression des auréoles Afin de supprimer ces auréoles jaunes qui altèrent la lisibilité de l’œuvre, nous avons utilisé des gels rigides d’agar-agar à 5% dans de l’eau ajustée (pH 6,5 et conductivité 6000 µS/cm). La méthode utilisée nous a été montrée lors d’un déplacement au Courtauld Institute (Londres) : un buvard est placé sous l’œuvre, un gel d’agar est disposé sur la zone souhaitée puis un buvard et un léger poids sont posés sur le gel. Une cale est, bien sûr, installée sous la zone travaillée. Poids Gel d’agar

Buvards

Œuvre Cale Schéma 8: Méthode de traitement des auréoles

Le processus est long, il faut parfois laisser le gel plusieurs heures pour absorber tous les produits contenus dans l’auréole. Le buvard est changé toutes les dix minutes afin d’absorber plus vite le surplus d’humidité. Le revers et les bords ont été traités après démontage de l’œuvre de son châssis.

Figure 70 : Avant suppression des auréoles.

Figure 71 : Après suppression des auréoles.

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Le châssis étant une surface plane et moins poreuse que la toile, le gel rigide posé seul sur le montant a permis de supprimer l’auréole.

Figure 73 : Gel d’agar avant/après traitement du châssis. Figure 72 : Test du gel d'agar sur l'auréole du châssis.

Observations Les auréoles, sur le châssis comme sur la toile, ont été nettement atténuées. La surface de l’œuvre ne comporte plus cette interruption nette et le regard peut de nouveau évoluer sur l’ensemble de la peinture. Consolidation Une solution d’Acril® ME à 5% est appliquée sur la face, sur chaque zone de couche picturale, à l’aide d’un pinceau fin. Un buvard est gardé de côté pendant toute l’opération pour absorber de possibles excès de consolidant. Comme pour le décrassage, des repères sont mis sur l’œuvre pour ne pas passer plusieurs fois au même endroit. Observations Après séchage, aucun changement chromatique ou de brillance n’est constaté. Les parois des cratères semblent dorénavant plus résistantes.

Figure 74 : Opération de consolidation

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Reprise de la planéité Les déformations ont été remises dans le plan à l’aide d’une technique apprise auprès de Rachel Barker318. Elle consiste à redonner la planéité à l’œuvre en massant de manière circulaire la déformation au revers. La peinture acrylique ayant une température de transition vitreuse assez basse, la chaleur de la main et sa légère pression vont doucement remettre dans le plan la déformation. L’œuvre est à la verticale et nous pouvons contrôler le bon déroulement de l’opération sur la face comme au revers. Il faut entre cinq et dix minutes pour chacune des déformations. Il a tout de même fallu finir le traitement par un buvard légèrement humidifié, à l’aide d’un spray, et un léger poids pour finir d’éliminer complètement les enfoncements. Cette opération s’est déroulée sur une mousse pour ne pas écraser les empâtements.

Figure 75 : Deuxième étape de la reprise des déformations.

Observations L’œuvre a retrouvé sa planéité d’origine, aucune déformation ne subsiste. Les empâtements n’ont pas été altérés pendant l’opération. Pour terminer les opérations de support, il ne reste plus qu’à retendre la toile, ce qui permettra d’apprécier réellement la disparition des enfoncements.

318

Conservatrice-restauratrice au Tate Modern de Londres.

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Dépose de l’œuvre La suppression des agrafes s’effectue en les scindant en deux avec une petite pince coupante puis en relavant chacun des côtés avant de les retirer à l’aide d’une pince demironde droite.

Figure 76 : Agrafe scindée

Figure 77 : Bords de l'agrafe relevés

Figure 78 : Agrafe supprimée

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Le revers de l’œuvre a ensuite été dépoussiéré avec une brosse douce (poil de chèvre) et une aspiration douce. Puis il a été nettoyé avec une éponge vulcanisée. Le reste des auréoles qui était caché par le montant du châssis a été atténué par un nouveau traitement aux gels d’agar-agar. Observations La couche picturale n’a pas été endommagée pendant la suppression des agrafes. Une fois le châssis enlevé, un nombre important de résidus durs et de poussières ont pu être supprimés. Le nettoyage du revers a permis d’enlever le voile grisâtre dû à la crasse.

Atténuation des marques de rouille Les traces de rouille les plus importantes ont d’abord été grattées délicatement au scalpel. Puis nous avons appliqué au pinceau la solution d’acide oxalique à 5% sur la toile. Elle fût ensuite enserrée par une pince à dessin, entre deux buvards pendant dix minutes. Ensuite, de l’eau déminéralisée est a été appliquée et d’autres buvards ont été posés. Toutes les cinq minutes cette opération a été effectuée jusqu’à atténuation de la tache. Figure 79 : Zone pendant traitement

Figure 80 : Bord de tension inférieur - avant traitement

Figure 81 : Bord de tension inférieur - après traitement

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Observations Ces marques de rouille n’ont pas pu être complètement supprimées. Néanmoins, le textile ne pourra plus être oxydé par celles-ci. Deux zones sont partiellement lacunaires à cause de fibres détruites par la rouille. Celles-ci ne présentent pas de couche picturale à leurs environs. Elles furent doublées par des petits rectangles de non-tissé polyester moyen (30 g/m²) préalablement enduit de Plextol® B500 épaissi au xylène, puis collé grâce à une spatule chauffante à 70°C. Montage Avant de remonter l’œuvre sur son châssis, nous avons procédé à quelques modifications de ce dernier. Nous avons enlevé les clefs et fixé les tendeurs métalliques dans ses angles. Pour ne pas qu’ils

s’oxydent,

nous

les

avons

préalablement imperméabilisés avec du Paraloïd® B44319 à 10%. Figure 82 : Tendeur métallique fixé

Le tableau a ensuite été remonté sur son châssis. Pour pallier l’environnement plutôt humide du studio de l’artiste, des agrafes en acier inoxydable ont été utilisées. Elles sont fixées sur la toile aux mêmes emplacements qu’avant démontage. Cependant, elles sont légèrement plus courtes que celles utilisées par l’artiste et ne concordent donc pas exactement. Le montage a été effectué à la main, en croix 320. Ensuite, les angles furent ouverts, petit à petit et de manière symétrique. Le pliage des angles a été légèrement revu et des faux-plis ont été réalisés sur les bords de toile pour un rendu « propre ». Une clef permettant de serrer ou desserrer les écrous a été fixée à l’aide d’un fil en nylon dans l’angle inférieur droit.

319

Réalisé selon la méthode Koob. RAMAKERS H « Paraloïd B-44 : studio tests for the reconstruction of a tang dynasty model of a horse » Recent advances in glass, stained glass, and ceramic conservation, ICOM CC, 2013, pp. 61-68 320 ROCHE, Alain, Comportement mécanique des peintures sur toile, Paris, CNRS Éditions, 2003, p.20

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Figure 85 : Montage d'origine

Figure 84 : Après remontage

Figure 86 : Revers de l'œuvre - avant restauration

Figure 83 : Revers de l'œuvre - après restauration

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Observations Le tableau ne fait plus de « poches » et a retrouvé une tension correcte. La tension voulue n’est pas la tension maximale que l’on peut obtenir. En effet, une tension trop importante peut être plus dommageable pour l’œuvre. Elle doit être la plus minimale et maintenir seulement la planéité de l’œuvre321.

Figure 87 : Œuvre vue sous lumière rasante. Avant la reprise de planéité

321

Figure 88 : Œuvre vue sous lumière rasante. Après reprise du support

CHIANTORE, O., RAVA, A., Op. Cit. p.110-111

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Réalisation des mastics Une fois les opérations de support réalisées et la couche picturale suffisamment stabilisée, le masticage des lacunes a pu commencer. Un mastic à l’Aquazol® à 10% dans de l’eau déminéralisée est préparé. La charge utilisée est du carbonate de calcium du fournisseur Marin Beaux-Arts. Une fois l’adhésif et la charge mélangés, le mélange est broyé pour ne pas créer d’agrégats en séchant 322. Le mastic est appliqué avec un pinceau fin et l’opération est réalisée avec l’aide des lunettes grossissantes.

Figure 89 : Mastic à l'Aquazol® pendant broyage

Lorsque les lacunes sont profondes ou lorsque les empâtements sont hauts, de multiples fines applications sont réalisées jusqu’à la hauteur désirée. Après séchage complet, les mastics sont ragréés à l’aide d’une fine lame de scalpel. Une structuration est parfois réalisée pour redonner certaines irrégularités de la couche picturale. Tous les cratères ne sont évidemment pas restaurés. Seules les altérations liées au dégât des eaux (partie inférieure et zone centrale du tableau) le sont. Observations Les lacunes qui obscurcissaient la vision sont dorénavant comblées et ne constituent plus un « moment d’arrêt » pendant la lecture de l’œuvre. L’unité structurelle est ainsi rétablie. Dans l’ensemble, la couleur des mastics donne une très bonne transition avec la couche picturale, mais de plus près, elles sont trop jaunes et doivent être réintégrées pour un meilleur passage.

322

LE BERRE ALBERTINI, A., Op. Cit, p.55

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Figure 92 : Zone centrale - avant masticage

Figure 93 : Partie inférieure sénestre - avant masticage

127

Figure 91 : Zone centrale - après masticage

Figure 90 : Partie inférieure sénestre - après masticage

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Réintégration colorée Avant de procéder à la réintégration colorée, les mastics sont isolés avec du vernis Regalrez® 1094 à 20% dans du white-spirit323. Cette opération est effectuée avec des pigments broyés dans le même vernis mais à 10%. Le diluant utilisé reste le white-spirit. Il permet de travailler au pinceau pendant suffisamment de temps. La réintégration colorée se limite, bien sûr, aux surfaces mastiquées et n’est pas débordante. Observations La réintégration colorée illusionniste permet une appréciation totale de l’œuvre où plus rien ne nuit à la lisibilité. La Main peut être de nouveau ressentie comme l’artiste l’a conçue.

Figure 94 : Détail avec mastics, sans réintégration colorée

Figure 95 : Détail avec réintégration colorée

323

Avec 2% de Tinuvin 292 et 10% de Kraton G1650 (pourcentages exprimés selon la masse sèche de la résine). GOLTZ (von der), M. et al., Op. cit., p. 644

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Figure 96 : Face avant restauration

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Figure 97: Revers avant restauration

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Figure 98 : Face après restauration

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Figure 99 : Revers après restauration

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Conclusion Grâce au cahier des charges et à la proposition de traitement, les opérations de conservation et restauration ont été réalisées. Elles avaient pour but de traiter les altérations, de les stabiliser et de prévenir celles à venir. L’étude préalable à la restauration fut complexe de par la nouveauté des matériaux constitutifs de l’œuvre et le peu de connaissance quant à leur traitement. Les opérations ont mené à de nombreux questionnements. Elles ont dû être pleinement réfléchies et faire l’objet de nombreuses recherches pour mener à bien la pratique. Cela fut d’autant plus enrichissant. La restauration de la couche picturale a permis d’obtenir une meilleure solidité et stabilité grâce à la consolidation. Les opérations de décrassage et de réintégration ont rendu sa lisibilité à l’œuvre. Quant aux traitements de support, ils ont redonné au tableau sa planéité par la reprise des déformations et la remise en tension. Comme pour les interventions de couche picturale, la suppression de l’auréole améliore énormément la lisibilité de la peinture. Enfin, l’atténuation de la rouille a permis de ralentir tout effet supplémentaire d’oxydation de la toile. Cette conservation – restauration a été effectuée dans un souci de respect des règles déontologiques afin de transmettre, au mieux, cette œuvre aux générations futures. Une fois la restauration de La Main terminée, Marian Kasperczyk est venu l’observer. Il fût très content de voir son œuvre dans un état nettement plus satisfaisant que deux ans auparavant.

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CHAPITRE 4 ÉTUDE TECHNICO-SCIENTIFIQUE ÉTUDE DE L’EFFET D’UN SOLVANT SILICONÉ SUR DES FILMS DE PEINTURE ACRYLIQUE EN ÉMULSION CONTEXTE / PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL / RÉSULTATS / DISCUSSION

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Introduction Depuis les années 1950, les peintures acryliques en émulsion sont largement utilisées par les artistes. Ces peintures montrent un séchage rapide, sont faciles à manipuler et ont une grande résistance aux UV324. En dépit de leurs excellentes propriétés mécaniques, elles subissent des altérations au cours du temps. De ce fait, la restauration de ces œuvres soulève de nouvelles problématiques. La difficulté majeure est l’impossibilité d’appliquer les traitements utilisés pour les peintures à l’huile sur les acryliques en émulsion. L’opération la plus usuelle, comme le décrassage, s’avère, dès lors, très compliquée. Ces dernières années, le nombre de recherches sur l’analyse chimique de ces peintures et sur l’effet des différents traitements de décrassage a nettement augmenté. Elles ont permis de mettre en évidence la sensibilité des peintures acryliques aux solvants organiques et plus particulièrement polaires325. Néanmoins, les solvants non polaires ont une efficacité moindre sur le décrassage, d’autres formulations ont donc été émises. En 2003, Richard Wolbers a introduit l’usage de solvants siliconés en restauration d’arts graphiques et de peintures avec, entre autres, les microémulsions. Ces dernières sont des dispersions stables de deux liquides immiscibles, stabilisées par un ou plusieurs tensioactifs. La taille des gouttelettes est inférieure à 100 nm 326. Actuellement, les plus utilisées sont constituées d’eau, d’un solvant siliconé et d’un ou plusieurs tensioactifs. Elles permettent d’avoir l’action de l’eau sans son effet néfaste sur les couches picturales, où le solvant siliconé sert de barrière. L’utilisation de ces solvants est nouvelle pour les conservateurs-restaurateurs. Les méthodes sont diffusées, en France, principalement par Richard Wolbers, Chris Stavroudis et les quelques sessions de formation à l’Institut national du patrimoine.

LEARNER, T., “Modern Paints: Uncovering the Choices”, Modern Paints uncovered, Los Angeles: Getty Conservation Institute, 2007, pp. 3-16 325 ZUMBÜHL, S. et al., “Solvent action on Dispersion Paint Systems and the Influence on the MorphologyChanges and Destruction of the Latex Microstructure”, Modern Paints uncovered, Los Angeles: Getty Conservation Institute, 2007, pp. 257-270 326 WOLBERS, R., Macroemulsions / Microemulsions, Powerpoint, Université du Delaware 324

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Pour l’instant, un seul mémoire de fin d’études327 porte sur l’effet des microémulsions sur les films de peinture acrylique en émulsion. Il est nécessaire d’effectuer davantage d’études pour comprendre au mieux l’interaction entre le solvant et la couche picturale. Cela confirme la pertinence de cette recherche. Le solvant siliconé pur est aussi utilisé pour minimiser les possibles dégradations du film de peinture. Cette étude a le but d’étudier plusieurs types de films de peintures avant et après immersion dans un solvant siliconé. Elle a pour objectif de donner une meilleure compréhension de l’effet de ce type de solvant, comme les changements physico-chimiques, mécaniques et morphologiques. Grâce aux résultats obtenus, il sera montré le risque ou non de l’utilisation de ces solvants.

I. Contexte I.1. Peinture acrylique en émulsion Généralités Les peintures acryliques en émulsion voient leur développement en 1953 par Rhom & Haas pour la peinture de bâtiments avec la marque Rhoplex AC33328. Un an plus tard, la marque Liquitex® sort la première émulsion acrylique pour artiste. Ces marques bénéficient d’une grande popularité du fait de leur utilisation sans solvants toxiques et leur séchage rapide. Ces peintures sont créées par l’agitation d’un mélange de deux phases initiales : le monomère acrylique hydrophobe avec l’eau comme diluant329. L’émulsion330 est maintenue par l’ajout de tensioactifs. De nombreux additifs, présentés ci-dessous, sont ajoutés pour pallier divers problèmes. Leurs types et quantités varient selon le fabricant. 

Initiateurs : débutent la polymérisation ;

Agents de transfert de chaîne : aident et contrôlent le masse moléculaire pendant la polymérisation ;

327

BLANCHET, J., New methods for the cleaning of acrylic emulsion paintings with w/o microemulsions : research about their impact on the paint layer, Mémoire de fin d’études, Haute école des arts de Berne, Département conservation – restauration, 2015 328 CROOK, J., LEARNER, T., The Impact of Modern Paints, Londres : Tate Gallery Publishing Ltd, 2000, p. 27 329 REVILLON, A., « Polymérisation et caractérisation », Manuel de peintures et vernis, des concepts à l'application : Volume 1, Constituants des peintures et vernis, Paris, Éditions Hermann, 2005, pp. 16-19 330 Le terme dispersion s’avérerait plus approprié car c’est bien le mélange d’un solide et d’un liquide, mais le mot émulsion se trouve largement employé par l’industrie de la peinture.

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Tensioactifs : gardent le polymère en suspension dans la peinture fraîche ;

Solutions tampons : maintiennent un pH stable ;

Protecteurs colloïdaux : aident à la stabilisation stérique c’est-à-dire à l’affinité des particules avec le solvant plutôt qu’entre elles ;

Agents de coalescence : aident à la formation du film ;

Agents mouillants et dispersants : préviennent les agglomérats de pigments et aider à leur stabilité ;

Agents anti-mousse : contrent la production de mousse des tensioactifs ajoutés ;

Agents gel/dégel : préviennent la formation de cristaux de glace (dispersion sensible au gel tant que le film n’est pas sec) ;

Épaississants : pour obtenir la viscosité souhaitée ;

Conservateurs ou biocides : protègent du développement des microorganismes dans la peinture fraîche.

La peinture acrylique est thermoplastique* et possède une haute masse moléculaire331. Différents types de polymères peuvent être mis dans la formulation : les acrylates* ou méthacrylates*. Il est possible d’effectuer des peintures comprenant plusieurs polymères. Ces derniers peuvent être acryliques, mais aussi styréniques ou vinyliques. La propriété des peintures va dépendre des monomères, mais aussi des additifs mis en formulation. Le film d’acrylique est constitué de longues molécules qui vont former un film rigide par un processus de « coalescence »332. Lorsque l’eau s’évapore, les particules de polymères se rapprochent. Ensuite, quand l’eau s’est totalement évaporée, les particules se déforment puis s’interpénètrent pour former un film continu333. Pour la formation du film, deux paramètres sont nécessaires : l’évaporation de l’eau et une température de filmification * convenable334 qui permettra la déformation et l’imbrication des particules.

331

GIRARD, J., « Peintures vinyliques et acryliques », Manuel de peintures et vernis, des concepts à l'application : Volume 1, Constituants des peintures et vernis, Paris, Éditions Hermann, 2005 332 ZUMBÜHL et al. Op. cit. 333 WOLBERS, R, “Peintures acryliques modernes : recherches fondées sur la pratique”, Stage INP sur le nettoyage et le vernissage des peintures acryliques, Juillet 2012, Powerpoint p. 14 334 Cette température est souvent 10°C de moins que la température de transition vitreuse. Cependant, des agents de coalescences sont ajoutés pour baisser celle-ci et aider à la formation du film.

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Problèmes de nettoyage Les premiers tableaux composés de peinture acrylique en émulsion datent d’une cinquantaine d’années. Néanmoins, le souci de leur conservation n’est réellement étudié que depuis une dizaine d’années. Certaines institutions mettent en place des projets qui se consacrent exclusivement à cette étude, comme le Tate Modern à Londres ou le Getty Institute à Los Angeles. Le décrassage de ces œuvres est la principale problématique pour deux raisons. D’une part, les films acryliques en émulsion sont sensibles à la plupart des solvants utilisés usuellement en conservation et d’autre part, le nettoyage est l’opération la plus courante en restauration. Les peintures acryliques captent davantage la poussière à cause de leur température de transition vitreuse (Tg) basse, située aux alentours de la température ambiante. Quand la température ambiante est supérieure à la Tg, le film devient plus souple et collant. De plus, la plupart des films voient une migration du tensioactif vers la surface, ce qui augmente la captation de la poussière335. Les écrits existants sur ce thème précisent qu’aucun produit totalement satisfaisant n’a encore été trouvé. Ils montrent que les solutions aqueuses risquent de supprimer le tensioactif de la surface de la peinture et peuvent provoquer le gonflement du film336. D’autres révèlent une possibilité de suppression de certains pigments (principalement les pigments organiques) et le gonflement du film par les solvants organiques et les solutions aqueuses337. Les hydrocarbures aliphatiques suppriment vraisemblablement moins de tensioactif et ont un effet moindre sur les propriétés physiques du film. Cependant, les films contenant des pigments organiques peuvent montrer une hausse de leur suppression avec l’utilisation de solvants non polaires338. L’efficacité du nettoyage par un hydrocarbure aliphatique est inférieure à celui effectué avec une solution aqueuse339. Le gonflement du

335

DOMENECH-CARBO, M.T. et al, Multitechnique Approach to Evaluate Cleaning Treatments for Acrylic and Polyvinyl Acetate Paints, Smithsonian Contributions to Museum Conservation, 2012 336 Idem 337 ORMSBY, B., SMITHEN, P., HOOGLAND, F., LEARNER, T., et MILIANI, C., “A scientific investigation into the surface cleaning of acrylic emulsion paintings”, Preprints ICOM Committee for Conservation triennial meeting, New Delhi, Septembre 2008, Vol. II, pp. 857-865 338 ORMSBY, B., LEARNER, T., FOSTER, G., DRUZIK, J., et SCHILING, M. “Wet Cleaning Acrylic Emulsion Paint Films: An Evaluation of Physical, Chemical and Optical Changes,” Modern Paints Uncovered, Los Angeles: Getty Conservation Institute, 2007, pp. 189-200 339 KEEFE, M., ORMSBY, B., PHENIX, A., et al., “Art and Industry: Novel Approaches to the Evaluation and Development of Cleaning Systems for Artists’ Acrylic Latex Paints”, Coatingstech, septembre 2011

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film va dépendre du type de peinture : polymère et additifs. Il semblerait que les peintures à base d’un polymère purement acrylique soient plus sensibles à ces effets340. Les peintures acryliques sont donc sensibles aux solvants organiques qui provoquent des gonflements. Seuls des solvants non polaires (hydrocarbures aliphatiques) et solvants très polaires (eau, formamide) montrent une interaction modérée avec le film341.

I.2. Solvants siliconés Le nom « silicone » est donné pour les composés ayant la formule brute R2SiO342. Mais ils sont en fait de la famille des siloxanes. Dans les solvants, deux sortes sont disponibles : -

Chaîne polymérique linéaire : les polydimethylsiloxanes (PDMS)

-

Chaîne

polymérique

cyclique :

les

cyclosiloxanes

dénommés

aussi

methylsiloxanes cycliques volatils (VMS). Leur chaîne principale est composée des liaisons entre les atomes de silice et d'oxygène. Des groupes hydrocarbonés (CHn) sont liés aux atomes de silice. La chaîne principale, inorganique, offre une grande flexibilité du polymère et donc un état liquide sur une large gamme de températures343. Quant aux groupes méthyles, ils baissent l’énergie de surface et donc diminuent la tension superficielle et augmentent la mouillabilité. Ces solvants possèdent une très basse polarité344.

Figure 100 : Exemples de chaînes polymériques de différents solvants siliconés

Ils n’ont été que récemment introduits en conservation – restauration. Ils peuvent être utilisés purs, comme film protecteur hydrophobe pour des couches picturales sensibles à ATTANASIO, F., Lösemittelempfidlichkeit von Dispersionsfarbsystemen, Mémoire de fin d’études, Haute école des arts de Berne, Département conservation – restauration, 2005, p. 34 341 KAMPASAKALI, E., et al., “The Effects of Surface Cleaning on Acrylic Emulsion Paintings: A preliminary investigation”. Studies in Conservation, n°56, 2011, pp. 216-230 342 DowCorning, Silicones in Industrial Applications, p. 2 343 Ibid. 344 FONTANILLE, M., GNANOU, Y., Chimie et physico-chimie des polymères, Paris, Dunod, 2010, p.538 340

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l’eau345 ou ajoutés comme l’un des constituants d’une microémulsion346. Plusieurs sont utilisés : l’hexamethyldisiloxane, linéaire à évaporation rapide et deux cycliques : l’octamethylcyclotetrasiloxane et le décaméthylpentacyclosiloxane347. Tous deux sont rassemblés sous le nom INCI348 « Cyclométhicone », respectivement D4 et D5. Leur utilisation reste toutefois assez limitée, leur développement s’effectuant principalement aux États-Unis. L’objectif de cette étude est d’analyser si ces solvants siliconés ont un impact sur les films de peinture acrylique en émulsion. Si les résultats sont positifs, il serait peut-être nécessaire d’effectuer de plus amples recherches avant de les utiliser de manière sûre en conservation - restauration. Si l’absence d’interaction est observée, d’autres recherches seront à réaliser, mais leur utilisation peut être préconisée.

II. Protocole expérimental II.1. Échantillon modèle Sélection Deux types de peintures en émulsion du commerce ont été choisis. Les marques Liquitex® et Lefranc & Bourgeois® ont été sélectionnées pour leur large utilisation en France. La première est une peinture acrylique blanche (blanc de titane349) et la seconde est un liant acrylique non pigmenté. Cela permettra d’observer si l’action du solvant est différente avec la présence de pigment dans la formulation. Malheureusement, leur composition exacte n’est pas connue. Il faudrait effectuer une analyse par pyrolyse couplée à la spectrométrie de masse pour déterminer quels types de polymères sont dans la formulation.

Comme le cyclododécane, plus connus par les conservateurs – restaurateurs. BLANCHET, J., Op. Cit., 347 STAVROUDIS, C., More from CAPS3 : Surfactant, silicone-based solvents, and microemulsions, Newsletter (Western Association for Art Conservation) n°34, 2012, p.25 348 Sigle pour : International Nomenclature of Cosmetic Ingredients. C'est la nomenclature officielle, établie au niveau européen, qui répertorie tous les ingrédients autorisés dans les cosmétiques. http://www.observatoiredescosmetiques.com/pro/actualite/lexique-cosmetique/inci-38 349 Pigment stable chimiquement et physiquement. PEREGO, F, Le dictionnaire des matériaux du peintre, Belin, Paris, 2005, pp.101-103 345 346

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Préparation Les deux peintures furent utilisées telles quelles sans l’ajout de diluant. Chacune d’elles avait une consistance propre : le liant est plus épais que la peinture blanche. Pour préparer les échantillons de manière répétable, des rectangles de 4 x 6 cm sont découpés dans une plaque d’Astralon® d’une épaisseur 0,5 mm350. Un film de Melinex® est tendu sur une surface lisse et homogène. La face siliconée est placée de telle sorte à être en contact avec les échantillons pour éviter l’adhérence des films au Melinex®. Le moule obtenu est collé à l’aide de colle en spray repositionnable et consolidée avec du ruban adhésif. L’application de la peinture est effectuée grâce à une spatule souple. La matrice en Astralon® est ensuite délicatement retirée pour ne pas abîmer les échantillons en cours de séchage (Figure 103).

Figure 101 : Échantillons « liant » en cours de séchage

Les films de peinture subissent, après séchage complet, un certain retrait. L’épaisseur moyenne du film « liant » (2,5.10-2 ± 0,1.10-2 mm) est semblable au film « blanc » (2,4.10-2 ± 0,1.10-2 mm). Leur moyenne précise est notée dans les données d’expérimentation. Le film de liant semble plus rigide comparé au film de peinture blanche.

350

Cf. protocole dans le mémoire : NAIX, J.F., Étude des propriétés optiques et mécaniques du Plextol® B500 selon son application en une ou plusieurs couches, Mémoire de fin d’études, École de Condé, conservation – restauration, 2014, p. 155

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Le séchage complet des échantillons a environ duré une quinzaine de jours dans un environnement à ± 21°C et 45-55% d’humidité relative. Par la suite, les échantillons ont passé 1080 heures dans une chambre de vieillissement (UVa) créée pour l’occasion 351. Elle est composée de planches en medium tapissé par du Mylar® « diamond » qui permet une réflexion plus grande et homogène de la lumière352 qu’une surface de type miroir. L’éclairage est assuré par quatre néons UVa 368nm placés par paires sur les parois inférieures et supérieures.

Figure 102 : Chambre de vieillissement ouverte avec les échantillons

. WHITMORE, P.M. et COLLUCA, V.G., “The Natural and Accelerated Aging of an Acrylic Artists' Medium”, Studies in Conservation, Vol. 40, n°1, pp. 51-64, 1995 352 http://www.lesjardinsencascade.com/filets-reflection-tentes/bache-blanche-mylar 351

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II.2. Solvant d’immersion Le solvant siliconé utilisé est le Cyclométhicone® D5. Le D4 est davantage utilisé par les restaurateurs, mais son interdiction en Europe, à la période des tests, n’a pas permis son utilisation. Le Cyclométhicone® D5 ou decamethylpentacyclosiloxane utilisé provient de chez Kremer® et est pur à 99%. Tableau 7 : Principales propriétés données par Kremer®

Apparence

Liquide transparent

Densité (25 °C)

0,95

Viscosité (25 °C)

4.0 mm2/s

Indice de réfraction (25 °C)

1,397

Tension de surface (25 °C)

18,0 mN/m

Point d’éclair

77 °C

Point de congélation

- 50 °C

Point d’ébullition

205 °C

Figure 103 : Cyclométhicone® D5

II.3. Déroulement de la procédure d’immersion Pour l’étape d’immersion, chaque échantillon est disposé dans une boîte de Pétri où 5 mL de Cyclométhicone® D5 est ajouté. Le temps d’immersion est de quatre-vingt-dix minutes353. Le film est ensuite retiré du liquide, l’excès de solvant est absorbé par du papier absorbant et le film est soit directement analysé, soit mis à sécher. Les tests sont réalisés à différents temps de séchage : avant immersion, après absorption de l’excédent de solvant (que nous nommerons « après immersion »), 3 heures, 24 heures et une semaine après immersion.

II.4. Méthodes de mesure Les différentes mesures vont permettre de déterminer un certain nombre de paramètres : le solvant reste-t-il dans le film ? Y a-t-il extraction de certains composants du film de peinture ? Le solvant dépose-t-il des résidus ? Le comportement mécanique du film subit-il une transformation ? Sa morphologie est-elle modifiée ? Le film est-il changé de manière interne ?

353

Cf. DOMENECH-CARBO, et al., Op. cit., 2012

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144

Tableau 8 : Récapitulatif des informations recherchées, tests et paramètres mesurés

Informations recherchées

Tests

Paramètres mesurés

Rétention du solvant

Analyse gravimétrique

Masse

IRTF

Absorbance infrarouge

Extraction de composants Résidus

Machine d’essai

Élasticité

universelle

Allongement relatif maximal Force nécessaire à la rupture Module d’élasticité

Modifications

MEB

Critères optiques

morphologiques

AFM

Rugosité quadratique

DSC

Température de transition

AMD

vitreuse

Changements physiques

Analyse gravimétrique II.4.1.1.

Descriptif

À l’aide d’une balance de précision, les masses peuvent être comparées. Cette machine peut permettre d’observer comment le film réagit au solvant : absorption, évaporation, solubilisation de composants. II.4.1.2.

Mise en application

L’analyse s’est déroulée au laboratoire (LANBOZ) du musée National de Cracovie en Pologne. L’environnement était stable et contrôlé : ± 21°C pour ± 50% d’humidité relative. La balance utilisée est le modèle MAC 50/1 de Radwag® et possède une précision de 0,0001 g. L’échantillon est pesé avant immersion et à chaque temps après immersion. Les données ont été collectées sur Excel et la différence de masse entre différents temps est présentée en histogramme.

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145

Spectroscopie infrarouge à transmission de Fourrier en mode réflectance totale atténuée (IRTF-ATR) II.4.2.1.

Descriptif de la technique

La spectroscopie infrarouge à transmission de Fourrier (IRTF) est une technique très utilisée pour l’analyse des matériaux354. Elle permet de déterminer la nature (leur fonction) des liaisons chimiques dans une molécule355. Chaque espèce possède un spectre qui lui est propre. Cette méthode est l’une des plus utilisées pour l’identification des plastiques. L’instrument est équipé de différents éléments essentiels : la source infrarouge, un détecteur, un interféromètre et l’électronique de calcul356. L’appareil envoie une énergie vibrationnelle sur une gamme de fréquences définies (4000 à 1000cm-1 pour le moyen infrarouge par exemple357) à l’aide d’un faisceau infrarouge. Ce dernier est amené, par divers miroirs, jusqu’à l’échantillon en passant préalablement par le cristal de diamant (Figure 106). Le faisceau repart ensuite vers l’interféromètre et est envoyé vers le détecteur. À l’aide d’un ordinateur, les données sont traitées mathématiquement (transformée de Fourrier), ce qui permet de visualiser le spectre d’absorbance ou de transmittance en fonction du nombre d’ondes. L’absorbance est communément utilisée pour l’ordonnée des spectres infrarouges, tant pour les analyses qualitatives que quantitatives358. Elle n’a pas d’unité et détermine la

Figure 104: Fonctionnement de l'IRTF en mode ATR

LOBO, H., BONILLA, J.V., “General introduction to plastics analysis”, Handbook of Plastic Analysis, CRC Press, Boca Raton, 2003, pp. 1-42 355 BRÜGEL, W., An Introduction to Infrared Spectroscopy. Methuen & Co. Ltd., 1962 356 BORELLA, M., Contrôle de la fonctionnalisation de surface de revêtements obtenus par PECVD à partir d’un composé organosilicié cyclique, Thèse Science et ingénierie des matériaux, École Nationale Supérieure des Mines de Nancy, 2006. 357 ROUESSAC, F., ROUESSAC, A., Analyse chimique, Méthodes et techniques instrumentales, 8e édition, Dunod, p. 214 358 SMITH, B.C., Fundamentals of Fourier Transform Infrared Spectroscopy, CRC Press, Boca Raton, 2de edition, p. 6 354

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146

̅ , il est l’inverse radiation infrarouge absorbÊe par l’Êchantillon. Quant au nombre d’ondes � 1

Ě…đ?‘?đ?‘šâˆ’1 = de la longueur d’onde359. Il s’exprime en cm-1 et correspond Ă la formule : đ?‘Ł . đ?œ† đ?‘?đ?‘š

Le mode rĂŠflectance totale attĂŠnuĂŠe (ATR) permet de diriger le faisceau de sorte qu’il effectue plusieurs rĂŠflexions entre un ĂŠchantillon et un cristal Ă forte rĂŠfraction360. Lorsque le rayonnement initial, d’intensitĂŠ I, traverse le cristal, il est rĂŠflĂŠchi Ă l’interface ĂŠchantilloncristal. Ce faisceau n’est pas totalement rĂŠflĂŠchi puisqu’il y a existence d’une ÂŤ onde ĂŠvanescente Âť. Elle pĂŠnètre de quelques micromètres l’Êchantillon : cette ĂŠnergie est donc retenue. La rĂŠflexion totale est attĂŠnuĂŠe. Les nombreuses rĂŠflexions Ă l’interface ĂŠchantilloncristal permettent d’augmenter l’intensitĂŠ d’absorption. II.4.2.2.

Mise en application

L’analyse s’est dĂŠroulĂŠe au laboratoire (LANBOZ) du musĂŠe National de Cracovie en Pologne. L’environnement ĂŠtait stable et contrĂ´lĂŠ : 21°C pour 50% d’humiditĂŠ relative. L’instrument utilisĂŠ est le spectroscope GladiATRÂŽVision combinĂŠ au logiciel IR Solution. Chaque spectre est la moyenne de 300 scans avec une rĂŠsolution Ă 4 cm-1 sur une gamme de 4000 Ă 400 cm-1. L’Êchantillon est maintenu par la pression d’une lame de microscope et la presse. Le but, ici, n’est pas de dĂŠterminer la composition de la peinture (oĂš la Py-GC-MS s’avère nettement supĂŠrieure), mais de voir s’il existe des diffĂŠrences notables entre les spectres avant et après immersion. Le solvant après immersion est gardĂŠ, chauffĂŠ Ă 50 °C et les composants non volatils sont eux aussi examinĂŠs. CalorimĂŠtrie diffĂŠrentielle Ă balayage (DSC) II.4.3.1.

Descriptif de la technique

La calorimĂŠtrie diffĂŠrentielle Ă balayage (DSC) est une technique d’analyse thermique mesurant l’enthalpie361 (ΔH), c’est-Ă -dire les diffĂŠrences entre les ĂŠchanges de chaleur entre un ĂŠchantillon et un matĂŠriau de rĂŠfĂŠrence subissant les mĂŞmes variations de tempĂŠrature362. D’après les donnĂŠes obtenues, il est possible d’en dĂŠduire la variation de la

359

ROUESSAC, F., ROUESSAC, A, Op. Cit., 213 EL HAJJI, A., ZAYDOUN, S., Cours de spectroscopie infrarouge, Master sciences analytiques http://www.fsr.ac.ma/cours/chimie/GUEDIRA/Master%20de%20Sciences%20AnalytiquesM9%20Spectr.%20UV-visible/Word/Master%20Sc%20Anal%20Cours%20IR.pdf 361 Ou flux de chaleur 362 SKOOG, D.A., HOLLER, J., NIEMAN, T., Principes d'analyse instrumentale, 5e ĂŠdition, De Boeck universitĂŠ, Paris, 2003, p.805 360

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147

capacité calorifique (ΔCP) 363. Elle définit la quantité de chaleur nécessaire pour augmenter la température de l’échantillon de 1 °K 364. L’instrument est fait de deux creusets identiques où l’un reçoit l’échantillon à examiner et l’autre reçoit un matériau dont le comportement est connu et ne change pas. Ces cellules sont mises dans des environnements thermiques et physico-chimiques identiques. La chaleur est ensuite augmentée à vitesse constante. La nature du matériau et ses différentes phases font que le flux de chaleur délivré, visant à maintenir une température semblable dans les deux cellules, devra être différent365. C’est cette différence de chaleur qui est analysée, c’est-à-dire la chaleur absorbée par le matériau. La courbe obtenue permettra de déterminer les changements d’état du matériau comme la température de transition vitreuse et le point de fusion366. II.4.3.2.

Mise en application

L’étude a été effectuée sur une journée à la faculté de chimie Jagiellonian à Cracovie en Pologne. L’instrument utilisé est le DSC 822e de Mettler Toledo® combiné avec le logiciel STARe®. Les analyses se sont déroulées sous balayage d’azote sur une gamme de températures de -60 à 100 °C à un taux de 10 °C/min. Les échantillons pesaient entre 7 et 13 g. Analyse mécanique dynamique (AMD) II.4.4.1.

Descriptif de la technique

L’analyse mécanique dynamique (AMD) est une technique souvent utilisée dans l’étude des polymères367. Elle permet de déterminer les propriétés mécaniques et thermiques d’un matériau viscoélastique. Cet instrument applique une contrainte contrôlée (traction, flexion, torsion, compression), de manière oscillatoire, sur un échantillon en fonction d’une température et à une fréquence donnée368. L’analyse permet de préciser différentes caractéristiques comme le module de conservation (E’) qui représente la rigidité et l’élasticité d’un matériau viscoélastique. Il est proportionnel à l’énergie emmagasinée 363

CLAUDY, P., Analyse calorimétrique différentielle, Théorie et application de la d.s.c., TEC&DOC Lavoisier, Cachan, 2005, p. 13 364 Salomon, A.W., FIELDER, K. J., “Practical use of Differential scanning calorimetry for plastics”, Handbook of Plastics Analysis, CRC Press, Boca Raton, 2003, pp.78-110 365 CLAUDY, P., Op. Cit., p. 84 366 LOBO, H., BONILLA, J.V., Op. Cit., p. 24 367 DUPUY, J-S. et al., Comparaison de méthodes dynamiques d’analyse du comportement mécanique de matériaux, 18e Congrès Français de la Mécanique, Grenoble, 27-31 août 2007, p. 2 368 MENARD, K. P., Dynamic Mechanical Analysis: A Practical Introduction, 2de édition, CRC Press, Boca Raton, 2008

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148

pendant un cycle369. Le module de perte (E’’) fait référence, quant à lui, à la viscosité du matériau. Le facteur d’amortissement (tan δ) mesure l’énergie perdue et représente l’amortissement mécanique du système viscoélastique (ratio E’’/E’). Lors d’un essai et lorsqu’il y a changement de phase, on peut observer une chute de E’ et une augmentation de tan δ. Ces données permettent de déterminer la température de transition vitreuse (Tg) du matériau étudié. L’AMD est 10 à 100 fois plus sensible que la calorimétrie différentielle à balayage pour la caractérisation de la Tg370. II.4.4.2.

Mise en application

L’étude s’est déroulée sur deux journées à l’institut Jerzy Heber de catalyse et chimie des surfaces (Académie polonaise des Sciences) à Cracovie en Pologne. Les analyses ont été réalisées avec la machine Tritec 2000 DMA (Triton Technology Ltd) en mode traction. Les données d’expérimentation ont été trouvées au fur et à mesure des expérimentations : les premières données utilisées étaient tirées de « The Effects of Surface Cleaning on Acrylic Emulsion Paintings: A Preliminary Investigation371 » puis elles furent ajustées pour donner la meilleure courbe possible. La gamme de températures utilisée est de -20 à 70 °C, avec une augmentation de 3°C par minute. La fréquence est de 1 Hz, la tension de 0,6 mm. Les échantillons mesurent 8 x 5 mm.

Poste de travail

Azote liquide Four

Figure 105 : Photographie et description générale du Tritec 2000 DMA (Triton Technology Ltd)

369

Ibid., p. 237 MENARD, K. P., “Thermomechanical and Dynamic Mechanical Analysis”, Handbook of Plastics Analysis, CRC Press, Boca Raton, 2003, pp. 155-200 371 KAMPASAKALI, et al., Op. Cit., 2011 370

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149

Pince statique

Échantillon Pince dynamique Pince statique

Figure 106 : Description de l’intérieur du four

Machine d’essais universelle électromécanique de traction (UTM) II.4.5.1.

Descriptif de la technique

La machine d’essais universelle (UTM) est une machine de traction où les échantillons sont déformés à vitesse constante. Les informations obtenues sont communément le module de Young, l’allongement relatif maximal, la résistance à la traction, etc. L’instrument est équipé d’un capteur de déplacement, d’un mors fixe et d’une traverse mobile sur laquelle sont placés un mors et un capteur de force. L’équipement est connecté à un ordinateur qui permet de tracer, en temps réel, le graphique de l’essai. II.4.5.2.

Mise en application

L’étude a été effectuée au laboratoire (LANBOZ) du musée National de Cracovie en Pologne. Les essais ont été réalisés avec l’UTM Z010 de Zwick/Roell® et l’obtention des courbes avec le logiciel TestXpert® II. La vitesse du mors mobile est de 50 mm par minute. L’épaisseur moyenne des deux types de films est prise en compte (liant : 0,25 mm et blanc : 0,2346 mm). Pour éviter les effets de bords lors de la traction, les échantillons sont usinés de manière à minimiser les effets des pinces (schéma 9).

Système de pinces Échantillon usiné

Schéma 9 : Échantillon usiné et système de pinces

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Rail guidage

Mors supérieur mobile

Poste travail

Mors inférieur fixe

de

de

Figure 107 : Description de la machine d’essais universelle utilisée

Microscope électronique à balayage (MEB) II.4.6.1.

Descriptif de la technique

Le microscope électronique à balayage (MEB) est un appareil permettant l’observation approfondie de surfaces jusqu’à une échelle nanométrique. Il permet de distinguer l’état de surface d’échantillons solides. Lorsqu’il est couplé à un système EDS (energy dispersive spectroscopy), la composition chimique de l’échantillon peut être effectuée. Son principe est basé sur la détection d’électrons, préalablement émis, qui interagissent avec l’échantillon372. La formation de l’image est effectuée point par point grâce au déplacement du faisceau d’électrons primaires sur l’échantillon372. La récupération, par les détecteurs, des électrons secondaires éjectés de la couche superficielle de l’échantillon permet créer une image donnant des informations sur la topographie de l’échantillon (figure 110). C’est fut utilisée par la suite.

372

RUSTE, Jacky, « Microscopie électronique à balayage, principe et équipement », Techniques d'analyse par imagerie, Editions T.I., Paris, 2017 http://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/mesures-analyses-th1/techniques-d-analyse-parimagerie-42387210/microscopie-electronique-a-balayage-p865/

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151

Figure 108 : Principe d'un microscope électronique à balayage

II.4.6.2.

Mise en application

L’étude a été effectuée au laboratoire (LANBOZ) du musée National de Cracovie en Pologne. L’instrument utilisé est le Phenom® proX (figure 111) combiné au logiciel Phenom®. L’analyse a été réalisée à 10kV en mode Topographie B373. Différents zooms ont

Figure 109 : Schéma du Phenom® pro X 373

Qui est le mode topographique et non servant à étudier la composition (full).

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152

été appliqués : x300, x500 et x1000. Dix images par temps de séchage et types d’échantillon ont été prises, soit 240 images. Le temps « juste après » n’a pas été analysé pour éviter toute insertion de liquide dans l’appareil. Microscope à force atomique II.4.7.1.

Descriptif de la technique

Un microscope à force atomique (AFM) permet d’obtenir des profils 3D avec une résolution de l’ordre du nanomètre (il fait partie de la gamme des rugosimètres)374. Pour ce

faire,

l’AFM

mesure

les

forces

d’absorption physique générées entre les atomes de la surface et la pointe (cf. schéma). On obtient les forces de Van der Waals*, électrostatiques, de frictions, etc. Il existe

Figure 110 : Schéma de fonctionnement de l'AFM

différents modes de fonction de l’AFM : Mode contact : Il s’agit du mode de l’AFM le plus couramment utilisé. Son nom vient du fait que la pointe reste à proximité de l’échantillon lors du balayage. La faible distance entre la surface et la pointe de l’AFM permet de créer une force répulsive (interactions entre les nuages électroniques des atomes de la pointe et ceux de la surface de l’échantillon). Cette méthode rend donc compte de la densité électronique. Mode intermittent (ou mode Tapping) : Dans ce mode, la pointe est en contact intermittent avec la surface. Lors du balayement, la pointe vibre avec sa fréquence résonance et une amplitude entre 20 et 100 nm. Cette méthode permet d’obtenir des informations qualitatives sur les différences de composition chimique de l’échantillon ainsi que des propriétés d’adhésion et de friction. Mode non-contact : Ce dernier utilise un mouvement oscillatoire de la pointe. Cette technique ne mesure plus les forces de répulsions, mais celles d’attractions. Elle est cependant compliquée dans la mise en œuvre, car elle doit se faire de préférence sous vide.

374

NAJJAR, S., Couplage AFM/Raman et spectroscopie Raman exaltée par effet de pointe de nanostructures, Université Bordeaux 1, École doctorale des Sciences Chimiques, 2013, pp. 4-5 http://ori-oai.u-bordeaux1.fr/pdf/2013/NAJJAR_SAMAR_2013.pdf

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ÉTUDE TECHNICO-SCIENTIFIQUE II.4.7.2.

153

Mise en application

L’étude s’est déroulée sur une journée au Centre de Thérapie Expérimentale Jagiellonian. L’instrument utilisé est le WITec alpha 300 qui est un spectromètre Raman couplé à un accessoire AFM (microscope à force atomique). Le mode utilisé est le mode contact sur les films « liant » et « blanc » avant et 3 heures après immersion375.

Figure 111 : Instrument WITec alpha 300 et poste de travail

Les données ont ensuite été travaillées avec le logiciel Gwyddion®. Divers filtrages et nivellements ont été appliqués : fixer le zéro, niveau plan, aligner les lignes, supprimer les points chauds, supprimer les défauts linéaires, masquer les points aberrants. Les analyses ont permis d’obtenir la rugosité quadratique (Rq). Elle est la moyenne quadratique de rugosité des pics et des vallées376. D’un point de vue mathématique, la moyenne quadratique est la racine carrée de la moyenne arithmétique des carrés des valeurs obtenues. La rugosité quadratique est plus sensible aux modifications microscopiques que la rugosité arithmétique.

L’échantillon est ainsi sec et s’il y a gonflement il peut encore être présent. Cf. KAMPASAKALI, et al., Op. cit. 2011 376 NAJJAR, S., Op. cit., p. 4 375

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154

III. Résultats III.1.

Rétention du solvant

L’objectif est d’observer l’absorption du solvant, son évaporation et s’il y a, rétention. Il sera peut-être aussi possible de voir si des composants, comme les additifs, sont solubilisés (avec diminution de la masse) ou non lors de l’immersion. L’analyse gravimétrique a été effectuée sur un total de 53 films « liant » et 53 « blanc ». L’étude a été effectuée pour chaque temps : avant immersion, après suppression de l’excès de solvant (« après immersion »), 3 heures, 24 heures et 1 semaine après immersion. L’erreur relative sur la moyenne de la masse des échantillons se situe aux alentours de 3,6%377.

Figure 112 : Histogrammes des gains ou pertes de masse des films « liant » aux différents temps

Figure 113 : Histogrammes des gains ou pertes de masse des films « blanc » aux différents temps

Tableau 9 : Récapitulatif des données de masse entre différents temps de séchage

Liant Blanc

m(« après immersion ») – m(avant)

m(3h après) – m(« après immersion »)

m(24h après) – m(« après immersion »)

m(1 semaine après) – m(« après immersion »)

9.10-3 ± 6.10-4 g 1,0.10-2 ± 8.10-4 g

-9.10-3 ± 7.10-4 g -1,0.10-2 ± 8.10-4 g

-9.10-3 ± 7.10-4 g -1,0.10-2 ± 9.10-4g

-1,0.10-2 ± 7.10-4 g -1,0.10-2 ± 9.10-4 g

La rétention du Cyclométhicone® D5 est comparable dans les deux types de films378. Les deux sortes d’échantillons gagnent et perdent sensiblement la même masse lors de l’immersion et du séchage, soit environ 1 - 2% de leur masse d’origine379. L’erreur relative

377

Cf. calculs en annexe 18. Cf. annexe 19 379 Cf. annexe 19 378

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155

de leur gain ou perte de masse est comprise entre 7 et 9 %. En dessous de 15 %, l’expérience est qualifiée de valable. Après 3 heures de séchage, le solvant semble s’être totalement évaporé pour chacun des films. La rétention dépend de différents paramètres comme la pénétration et l’évaporation du solvant380. Ces derniers découlent réciproquement de l’étude de la tension superficielle et de la viscosité, ainsi que de l’étude de la pression de vapeur saturante et de la chaleur latente. Ce phénomène dépend aussi de l’interaction entre le solvant et le substrat. Les solvants siliconés ont une pression de vapeur saturante nettement inférieure aux hydrocarbures aromatiques 381. Leur rétention peut donc être plus faible. L’action sur le substrat peut alors se trouver amoindrie. Toutefois, même si l’effet est faible, le solvant peut quand même interagir avec d’autres composés, peu ou non polaires, contenus dans le film.

III.2.

Résidus et composés extractibles

L’objectif est d’observer si le solvant siliconé laisse des résidus sur le film et s’il extrait des composants de l’échantillon. La prise de mesures IRTF a été réalisée sur 10 échantillons des deux types de films « liant » et « blanc » pour chacun des temps mesurés (avant, « après immersion », 3h après, 24h après, 1 semaine après) soit un total de 100 mesures. L’analyse des pics est ensuite réalisée avec OriginPro®382 pour déterminer l’emplacement, ou nombre d’ondes, de chacun et ainsi calculer l’erreur relative de cette analyse. L’erreur relative est comprise entre 0 et 0,14%383. L’analyse est donc fiable et l’utilisation du spectre moyen est possible. Un spectre moyen sera donc réalisé pour comparer les temps entre eux. Il est possible d’observer sur cette même courbe que l’absorbance varie légèrement pour un même type d’échantillon, en particulier dans la zone 4000 – 2000 cm-1.

380

MASSCHELEIN-KLEINER, L., Les solvants, Cours de conservation 2, Institut royal du Patrimoine artistique, Bruxelles, 1981, p. 112 381 Par exemple : Pression de vapeur saturante du Cyclométhicone® D5 = 140 Pa et pression de vapeur saturante du xylène = 663 Pa. GRANGE, D., HOST, S., GREMY, I., Les composés organiques volatils (COV), Observatoire régional de santé d’Ile-de-France, décembre 2007 382 Logiciel d’analyses de données et graphique. http://originlab.com/ 383 Cf. annexe 20

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Figure 114 : Spectres IRTF de 10 échantillons "blanc" pour le temps « après immersion », c’est-à-dire après l’absorption de l'excès de solvant

Figure 115 : Spectre IRTF de la moyenne des échantillons "liant" aux différents temps de séchage. La valeur du nombre d’ondes des pics semblant correspondre au Cyclométhicone® pour le temps « après immersion » est annotée.

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Figure 116 : Spectre IRTF de la moyenne des échantillons "blanc" aux différents temps de séchage. La valeur du nombre d’onde des pics semblant correspondre au Cyclométhicone® pour le temps « après immersion » est annotée.

Les spectres IRTF montrent (figures 117 et 118), pour chacun des films, un changement au temps « après immersion » c’est-à-dire après absorption de l’excédent de solvant. Certains pics se retrouvent dans les deux types de films (1260 cm-1, ± 1065 cm-1 et ± 807 cm-1). D’autres ne sont visibles que sur l’un des deux spectres. Les changements de pics sont nettement plus visibles sur le film « blanc » que sur le film « liant ». Ces pics retournent à la normale après 3 heures de séchage. Aucun résidu ne semble présent après 3 heures de séchage. Toutefois, les résultats sont à nuancer, les courbes nécessitant une déconvolution384, ce qui permettrait de donner plus de précisions. L’IRTF montre ici ses limites et une pyrolyse couplée à la spectrométrie de masse serait une technique qui donnerait davantage de résultats.

384

Moyen mathématique réduisant les largeurs de bandes. Ainsi, les bandes superposées peuvent être déterminées. TOOKE, P.B., “Fourrier self-deconvolution in IR spectroscopy”, TrAC Trends in Analytical Chemistry, Vol. 7, n°4, avril 1988, pp. 130-136

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158

Des analyses supplémentaires ont été réalisées sur le liquide d’immersion (figure 119). Le spectre de ce solvant d’immersion montre des pics n’appartenant pas au Cyclométhicone D5.

Figure 117 : Spectre IRTF des composés non volatils du liquide d’immersion. En rouge : pics correspondant au solvant En bleu : pics correspondant à des composants du film acrylique En gris : pics pouvant correspondre aux deux.

Les pics à 1375 et 1735 cm-1 peuvent être retrouvés dans les deux types de peinture acrylique. Ils pourraient correspondre à des composants internes du film. Le pic à 1735 cm1

semble correspondre au signal carbonyle (liaison C=O)385, caractéristique des peintures

acryliques en émulsion. Le tensioactif oxyde de polyéthylène pourrait être celui solubilisé, car il possède ses principaux signaux à 1110 et 1730 cm-1 386. Le pic à 1375 cm-1 correspond aussi aux peintures acryliques en émulsion387. Son origine est toutefois plus difficile à connaître, car de nombreux composés de l’acrylique ont la même zone de vibration. D’autres pics ne sont peut-être pas visibles par la superposition de ceux correspondant au solvant et ceux correspondant aux composants des films de peinture acrylique. Le Cyclométhicone® D5 semble donc avoir une certaine action sur le substrat.

III.3.

Changements physiques

L’objectif est de déterminer s’il y a modification de la transition vitreuse (Tg). Cette température est liée aux propriétés du matériau et, par exemple, si le solvant agissait en tant que plastifiant sur le film, sa Tg se verrait diminuer388. Celle-ci s’avère donc importante dans l’observation de changements physiques internes aux films.

385

LEARNER, T., Analysis of Modern Paints (Research in Conservation), Los Angeles, The Getty Conservation Institute, 2005, p. 84 386 BLANCHET, J., Op. cit., p. 38 387 LEARNER, T., Op. Cit., pp. 84-85 388 HALARY, J-L, LAUPRÊTRE, F., MONNERIE, L., Mécaniques des matériaux polymères, Belin, Paris, 2008, p.37

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CalorimĂŠtrie diffĂŠrentielle Ă balayage (DSC) L’analyse DSC n’a pu ĂŞtre effectuĂŠe que sur un ĂŠchantillon de chaque type ÂŤ liant Âť et ÂŤ blanc Âť pour deux temps : avant immersion et une semaine après immersion. La mĂŠthode utilisĂŠe pour trouver la tempĂŠrature de transition vitreuse est celle des tangentes puis du demi-palier sur la variation du flux de chaleur et la capacitĂŠ calorifique. La courbe de capacitĂŠ calorifique a ĂŠtĂŠ rĂŠalisĂŠe grâce aux formules la reliant au flux de chaleur : đ??šđ?‘™đ?‘˘đ?‘Ľ đ?‘‘đ?‘’ đ?‘?â„Žđ?‘Žđ?‘™đ?‘’đ?‘˘đ?‘&#x; =

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Figure 118 : Courbes du flux de chaleur en fonction de la tempÊrature et de la dÊtermination de la tempÊrature de transition vitreuse pour le film  liant  avant et 1 semaine après immersion

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Figure 119 : Courbes de la capacité calorifique en fonction de la température et détermination de la température de transition vitreuse pour le film « liant » avant et 1 semaine après immersion

Figure 120 : Courbes du flux de chaleur en fonction de la température et détermination de la température de transition vitreuse pour le film « blanc » avant et 1 semaine après immersion

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Figure 121 : Courbes de la capacité calorifique en fonction de la température et détermination de la température de transition vitreuse pour le film « blanc » avant et 1 semaine après immersion

Tableau 10 : Récapitulatif des températures de transition vitreuse mesurées

Liant Flux de chaleur Capacité calorifique

Avant 18,3 °C 18,5 °C

Blanc Après 19,2 °C 18,7 °C

Avant 42 °C 42,2 °C

Après 40,8 °C 43,2 °C

Par ces mesures, différents points sont observables : -

Les valeurs de températures de transition vitreuse pour les courbes avant – après et pour le même échantillon sont semblables ± 1°C, que ce soit en flux de chaleur ou capacité calorifique.

-

La différence de valeur de la température de transition vitreuse par la courbe du flux de chaleur ou de la capacité calorifique est moindre.

-

La courbe du flux de chaleur en fonction de la température de l’échantillon « blanc » présente un pic de relaxation endothermique389.

-

Les valeurs des deux types d’échantillons « liant » et « blanc » diffèrent, que ce soit avant ou après immersion.

389

METTLER TOLEDO, Interprétation des courbes DSC Partie 1 : mesures dynamiques, p. 6 http://fr.mt.com/mt_ext_files/Editorial/Generic/8/TA_UserCom11_0655823710252341_files/tausc11f.pdf

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Néanmoins, ces résultats sont à nuancer car ils n’ont été effectués qu’une seule fois pour chaque type d’échantillon. Aucune erreur ne peut être déduite de ceux-là, la qualité de l’expérience n’est donc pas connue. Analyse mécanique dynamique Comme la calorimétrie différentielle à balayage, l’analyse mécanique n’a pu être réalisée qu’une fois pour chacun des types d’échantillons. La température de transition vitreuse peut être déterminée de différentes manières : avec les variations du module de conservation E’ (échelle standard ou logarithmique), de tan δ ou encore du module de perte E’’390. Les valeurs peuvent moduler de plusieurs degrés pour les mêmes données.

Figure 122 : Courbes AMD du film "liant" avant immersion

390

MENARD, K., Op. Cit. pp. 155-200

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Figure 123 : Courbes AMD du film "liant" une semaine après immersion

Les courbes des échantillons « liant » avant immersion montrent des résultats cohérents entre eux. Deux températures de transition sont observables. En rassemblant les quatre courbes, deux températures moyennes sont relevées : 29,9 ± 0,3 °C et 40,9 ± 0,2 °C391. Les courbes des échantillons « liant » une semaine après immersion montrent des résultats moins homogènes. La courbe tan δ montre davantage des paliers de transition vitreuse que des pics. Quant aux courbes E’ et E’’, trois températures de transition semblent discernables. Toutefois les valeurs restent semblables : -

20,6 ± 0,3 °C pour les courbes E’ et E’’ et un palier entre 15,5 et 22,3 °C pour tan δ.

-

391

38,2 ± 0 °C pour les courbes E’ et E’’ et un palier entre 30,4 et 40 °C pour tan δ.

Cf. annexe 21

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La température de 30,4 °C est relevée sur les courbes E’ (échelle logarithmique) et E’’ comme de légers pics. Elle n’est pas visible sur E’ (échelle linéaire) mais fait aussi partie du palier de tan δ.

Figure 124 : Histogrammes des températures moyennes relevées par l'AMD pour les films "liant" avant et après immersion

Trois températures de transitions sont observables après immersion contre deux avant. La température 20,6 °C du liant après immersion ne semble pas correspondre à l’une des deux valeurs d’avant immersion. Les températures 29,9°C et 30,4°C correspondant

Figure 125 : Courbes AMD du film "blanc" avant immersion

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respectivement à « liant avant 1 » et « liant après 2 » paraissent nettement plus proches. Les valeurs « liant avant 2 » et « liant après 3 » semblent aussi correspondre.

Figure 126 : Courbes AMD du film "blanc" une semaine après immersion

Les courbes des échantillons « blanc » avant immersion montrent des résultats assez proches. Deux températures de transition sont observables. En rassemblant les quatre courbes, deux températures moyennes sont relevées : 20,6 ± 1,4 °C et 33,3 ± 0 °C. Les courbes des échantillons « blanc » une semaine après immersion montrent des résultats moins homogènes avec une moyenne à 23,4 ± 2,6 °C. La courbe tan δ montre une valeur inférieure aux autres courbes. Les courbes tan δ et E’ (échelle logarithmique) présentent un deuxième pic vers 42,7 ± 0,3 °C.

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Figure 127: Histogramme des températures moyennes relevées par l'AMD pour les films "blanc" avant et après immersion

Les températures « Blanc avant 1 » et « Blanc après 1 » sont semblables. Cependant, les températures « Blanc avant 2 » et « Blanc après 2 » ont un écart de 10 °C. Tableau 11 : Récapitulatif des résultats obtenus par les différentes courbes d’analyse mécanique dynamique

Liant E’ (échelle linéaire)

Avant Début 29,8 °C Pic 41 °C

E’ (échelle logarithmique)

Début 30,3 °C Pic 41 °C

Tan δ

Pics 29, 8 °C et 40,6 °C

E’’

Pics 29,8 °C et 41 °C

Blanc Après

Avant

Après

Début 20,3 °C

Début 21,8°C

Début 24,6°C

Début 18,7°C Pic 33,3 °C

Début 24,8 °C Pic 42,8 °C

Pics 20,4 °C et 33,3 °C

Pics 19,4°C et 42,5 °C

Début 21,5 °C Pic 33,3 °C

Début 24,6 °C

Début 20,6 °C Pics 30,4 et 38,2 °C Paliers 15,5 – 22,3 °C et 30,4 – 40 °C Pics 20,8 °C, 30,4 et 38,2 °C

Les deux types d’échantillons présentent plusieurs zones de transition. La première zone reste la plus stable avant – après. C’est à la seconde que les variations de température se font voir (-2 °C ; +10 °C). Celles-ci ne semblent pas cohérentes entre elles. Elles ne montrent pas un comportement homogène des films acryliques face au solvant siliconé. Un matériau peut avoir plusieurs zones de transition (transition vitreuse, fusion, fluidification par exemple)392. Ici, il est plus probable que ces zones correspondent aux transitions vitreuses des différents polymères contenus dans la peinture.

BILLON, N., Comportement mécanique des polymères, Mines de Paris – Centre de mise en forme des matériaux, Powerpoint. http://mms2.ensmp.fr/mat_paris/deformation/transparents/Amphi_Deformation_Polymeres_2007.pdf 392

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Encore une fois, ces résultats sont à nuancer car ils n’ont été effectués qu’une seule fois pour chaque type d’échantillon. Aucune erreur ne peut être déduite, la qualité de l’expérience n’est donc pas connue. En comparant les analyses obtenues par le DSC et l’AMD, plusieurs observations peuvent être faites : -

Le DSC ne montre qu’une seule zone de transition contrairement à l’AMD.

-

Les résultats du DSC pour les films « liant » montrent un écart important avec les résultats de l’AMD pour « liant » avant immersion (+10 °C), mais correspondraient à la première transition du « liant » après.

-

La deuxième zone de transition pour les films « blanc » correspond aux résultats du DSC.

III.4.

Propriétés mécaniques

L’objectif de cette expérience est de déterminer s’il y a un changement au niveau de l’élasticité des films. Les différents tests, à l’aide de la machine de traction, ont été réalisés sur 50 échantillons des deux types « liant » et « blanc » pour deux temps : avant et une semaine après immersion. Cela constitue un total de 200 films testés. Les courbes offrent différentes données qui vont être analysées. L’erreur relative pour ces tests est comprise entre 2,5 et 4,7 %. Elle est inférieure à 15 %, l’expérience est donc considérée comme fiable.

Figure 129 : Moyenne de l'allongement relatif maximal pour le film « liant » avant et une semaine après immersion

Figure 129 : Moyenne de la force nécessaire à la rupture pour le film « liant » avant et une semaine après immersion

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Figure 131 : Valeurs moyennes du module de Young avant et une semaine après immersion des films « liant » dans le Cyclométhicone D5

Figure 131 : Valeurs moyennes du module de Young avant et une semaine après immersion des films « blanc » dans le Cyclométhicone D5

Figure 133 : Moyenne de l'allongement relatif maximal pour le film « blanc » avant et une semaine après immersion

Figure 133 : Moyenne de la force nécessaire à la rupture pour le film « blanc » avant et une semaine après immersion

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Tableau 12 : Récapitulatif des données obtenues avec l'UTM393

Liant

Allongement relatif maximal Force nécessaire à la rupture Module de Young

Blanc

Avant

Après

Avant

Après

22,0 ± 1,0 %

20,2 ± 0,9 %

148,2 ± 4,8 %

131,7 ± 3,4 %

8,6 ± 0,4 N

9,9 ± 0,5 N

3,9 ± 0,2 N

4,3 ± 0,2 N

2,9 ± 0,2 GPa

3,2 ± 0,1 GPa

0,042 ± 0,002 GPa

0,045 ± 0,003 GPa

Les valeurs entre les échantillons « liant » et « blanc » diffèrent largement entre elles. Différents comportements mécaniques sont donc observés entre les deux types de peinture. Cela montre qu’avec différentes formulations, l’élasticité d’un film peut être largement modifiée. Pour un même type de film, les valeurs sont semblables. Seul l’allongement relatif maximal du film « blanc » est légèrement réduit après immersion pour une force de traction identique. L’échantillon se serait alors rigidifié. Néanmoins, son module de Young reste le même. S’il y avait réellement une modification des propriétés mécaniques, le film subirait aussi un changement structurel interne. Le solvant siliconé pénètrerait dans le film, entre les particules, et jouerait le rôle d’un plastifiant.

393

Cf. calculs en annexe 22

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III.5.

170

Modifications morphologiques

L’objectif de ces analyses est de déterminer si le film après immersion change de morphologie avec, par exemple, des résidus visibles ou une porosité plus importante. Microscope électronique à balayage (MEB) Les observations à l’aide du MEB ont été effectuées pour chacun des temps et types d’échantillons, 10 fois et à 3 grossissements : x300, x500 et x1000. Seul le zoom x1000 sera présenté ici, puisque si rien n’est observable au plus fort grossissement, il est fort probable qu’il en soit de même au plus faible394. Chaque photographie est un échantillon différent puisque le MEB l’endommage lors de l’analyse.

Avant immersion

24h après immersion

3h après immersion

1 semaine après immersion

Figure 134 : Film « liant » vu au MEB, grossissement x1000

394

Cette analyse ayant déjà été faite au préalable.

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ÉTUDE TECHNICO-SCIENTIFIQUE Avant immersion

24h après immersion

171 3h après immersion

1 semaine après immersion

Figure 135 : Film « blanc » vu au MEB, grossissement x1000

Les images prises par le MEB montrent une nette différence entre la morphologie des deux types de films. Un même type observé avant et après immersion ne montre par contre aucun changement significatif. Le solvant siliconé ne semble pas affecter la surface des films.

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Microscope à force atomique (AFM) L’analyse a été effectuée une fois sur chaque type d’échantillons avant et 3 heures après immersion : chaque image correspond à différents échantillons et non au même avant/après. Les mêmes filtrages et nivellements sont mis pour tous les échantillons. La rugosité quadratique* est ensuite calculée directement par le logiciel.

Figure 136 : Topographie 3D du film "liant" avant et après immersion

Avant immersion

Après immersion

Figure 137 : Surface de l’échantillon « liant » vu à l’AFM avant et après immersion

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Figure 138 : Topographie 3D du film "blanc" avant et après immersion

Avant immersion

Après immersion

Figure 139 : Surface de l’échantillon « liant » vu à l’AFM avant et après immersion

Liant

Rugosité quadratique

Blanc

Avant

Après

Avant

Après

0,421 µm

0,343 µm

130,2 nm

90,1 nm

Le peu d’images prises par l’AFM ne permet pas d’arriver à des conclusions fiables. Les valeurs de rugosité quadratique mesurées par le logiciel montrent que la rugosité varie fortement selon le type d’échantillon. Elles montrent une légère diminution pour chacun des avant/après.

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IV. Discussion Des différences de résultats entre les deux types d’échantillons ont été observées, montrant ainsi deux sortes de comportements bien distincts. Il est certain que les formulations employées sont différentes, tant au niveau des polymères que des additifs ajoutés. L’ajout des pigments et charges accentue aussi certainement cette inégalité. Les résultats de l’effet du solvant sur ces films sont comparables. Le Cyclométhicone® D5 a un certain impact sur la peinture acrylique en émulsion, même si les changements restent limités. La quantité de solvant retenue sur les échantillons est similaire. Deux types de films, aux propriétés et à l’aspect très différents, semblent retenir la même dose de solvant. L’évaporation de ce dernier redonne à chacun d’eux sa masse initiale comme le montrent les résultats de l’analyse gravimétrique. Les analyses IRTF n’ont pas mis en évidence la présence de résidus, contrairement aux tests de Julie Blanchet dans son mémoire395. L’intensité variable de la zone 2850-3000 cm-1 est aussi visible dans divers échantillons d’un même type de film. Toutefois, les résultats obtenus quant à l’analyse des composés non volatils du liquide d’immersion concordent avec les siens. Le solvant siliconé extrait des matériaux appartient au film lors de son immersion. Les résultats obtenus par le DSC et l’AMD ne permettent pas d’établir de réelles conclusions étant donné le nombre réduit d’échantillons testés. Toutefois, il est normal de trouver des écarts entre les résultats du DSC et de l’AMD pouvant parfois varier jusqu’à 20 °C396. Il semblerait par contre que l’AMD soit dix à cent fois plus sensible que le DSC dans la détection de transitions. Selon la méthode utilisée, les valeurs de l’AMD peuvent varier jusqu’à 25°C. Elles dépendent en grande partie de la fréquence utilisée, d’autres résultats peuvent donc être trouvés pour les mêmes échantillons. Les tests de traction n’ont pas permis de relier cette extraction à une perte d’élasticité pour les films « liant ». En revanche, la mesure de l’allongement relatif montre des films « blanc » plus rigides après immersion. Toutefois, le module de Young ne montre pas cette modification. La perte d’élasticité concorde avec les résultats du mémoire de Julie Blanchet. Le solvant siliconé s’insèrerait entre les particules et prendrait le rôle de plastifiant. Il est

395 396

BLANCHET, J., Op. Cit., p. 38 MENARD, K., Op. Cit., pp. 155-200

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plausible que cet effet soit exacerbé par l’ajout des charges et pigments. Ils augmentent le nombre de zones entre les particules, laissant une plus grande place au solvant. L’étude morphologique n’a pas montré de changements. Le solvant n’a que peu d’influence sur les propriétés optiques des films acryliques. Les mesures de rugosité par l’AFM ne permettent pas d’émettre de réelles conclusions. Les résultats sont hypothétiques. L’ensemble des résultats obtenus montre donc que le solvant a un bien impact sur le film acrylique. Dès lors, est-il vraiment moins risqué d’employer un solvant siliconé plutôt qu’un hydrocarbure aliphatique397 ? Que vaudrait-il mieux utiliser ? Le comportement des hydrocarbures aliphatiques étant mieux connu pour le moment, il semble plus sûr, pour l’instant de les utiliser. D’autres recherches doivent être entreprises pour avoir une meilleure connaissance sur les solvants siliconés et leurs effets. Diverses erreurs doivent être prises en compte, elles sont humaines ou dues au système (limites de l’instrument, étalonnage, accessibilité, nombre d’échantillons, fiabilité de la mesure, erreur de l’expérimentateur). L’environnement d’essai étant stable et contrôlé, il ne fait pas partie des possibles erreurs. La création des échantillons pourrait être nettement améliorée avec un applicateur de film industriel398. Cela permettrait une masse et une épaisseur égale pour chacun. Le nombre global d’échantillons et de mesures serait à augmenter pour valider la pertinence des résultats. Il serait aussi intéressant d’élargir le type de films avec d’autres marques et d’autres couleurs et de les comparer entre eux. De par des contraintes temporelles, les analyses DSC, AMD et AFM donnent des résultats hypothétiques. Il serait intéressant de les continuer pour émettre de réelles conclusions. L’étude a été réalisée avec les machines d’analyses à notre disposition, mais elle aurait pu s’étendre davantage pour caractériser d’autres paramètres. La pyrolyse couplée à la spectrométrie de masse (Py-CG-SM) s’avèrerait très utile pour connaître la formulation des films et les comparer entre eux. Étudier les modifications de brillance et de colorimétrie des échantillons aurait permis de confronter les résultats à ceux obtenus par Julie Blanchet399.

ZUMBÜHL, S., “Solvent action on dispersion paint systems and the influence on the morphology – changes and destruction of the latex microstructure”, Modern Paints Uncovered The Getty Conservation Institute, 2007, p. 257-268 398 http://www.directindustry.fr/fabricant-industriel/applicateur-film-automatique-131963.html 399 BLANCHET, J., Op. Cit., p. 59 397

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Conclusion Cette étude a pu être menée au laboratoire d’analyses et de recherches non destructives des objets du patrimoine (LANBOZ) et dans divers lieux qui nous ont accueillie. Le but de cette recherche était de caractériser les effets du Cyclométhicone® D5 sur des films de peinture acrylique en émulsion à l’aide de différentes techniques d’analyses (analyse gravimétrique, spectroscopie infrarouge à transmission de Fourrier, calorimétrie différentielle à balayage, analyse mécanique dynamique, machine d’essais universelle, microscope électronique à balayage et microscope à force atomique). Ces techniques ont permis de donner des informations sur le comportement de films acryliques par immersion dans un solvant siliconé. L’analyse a été effectuée sur deux types de peinture : un liant pur Lefranc & Bourgeois® et une peinture acrylique blanche Liquitex®. Les résultats ne montrent pas de modifications morphologiques des échantillons et ne semblent pas exposer la présence de résidus. Les propriétés mécaniques des films contenant des pigments paraissent modifiées avec une baisse d’élasticité. Enfin, l’analyse du liquide d’immersion dévoile une extraction de certains composants du film acrylique. Ainsi, la recherche a répondu à l’objectif de donner une meilleure compréhension de l’effet d’un solvant siliconé sur les films acryliques. Dans la pratique, un solvant sans risque pour les peintures acryliques n’a toujours pas été trouvé. Le solvant siliconé a un impact, il est donc nécessaire de continuer les recherches pour mieux caractériser et comprendre ces effets à court, moyen et long terme. L’utilisation des solvants siliconés semble donc aussi risquée que celle des hydrocarbures aliphatiques.

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Conclusion générale Ce mémoire est avant tout une rencontre, celle de Marian Kasperczyk. L’exploration des nombreux aspects de La Main a été source d’enrichissement tant personnel que professionnel. L’étude à propos de Marian Kasperczyk nous a amenée à de multiples interviews d’artistes passionnantes et nous a même entraînée jusqu’à Cracovie, lieu de ses études. Les recherches sur les peintures acryliques en conservation – restauration et scientifiques nous ont menée à de multiples échanges fructueux, gratifiants et conduisant à des relations professionnelles durables. L’étude historique a permis d’appréhender pleinement cette œuvre hors du commun. La connaissance de l’histoire de l’artiste, de ses œuvres et les recherches approfondies sur le tableau ont donné des renseignements essentiels. Marian Kasperczyk nous dévoile ainsi un art personnel, quasi philosophique dans lequel l’œuvre évolue à travers diverses influences comme le matiérisme, le néo-expressionnisme ou encore l’informel. L’étude technologique nous a entraînée vers des problématiques complexes et passionnantes sur les matériaux et altérations du tableau. Par le diagnostic de ces dernières, un cahier des charges et une proposition de traitement ont été dressés. Le traitement a ensuite pu être réalisé en gardant différents objectifs en tête : la lisibilité, stabilité, compatibilité et retraitabilité. Les interventions réalisées ont solidifié nos compétences acquises au cours de ces cinq années de formation. Ces problématiques liées aux œuvres acryliques, qui nous passionnent depuis plusieurs années, nous ont dirigée vers un sujet technico-scientifique par lequel nous avons appris l’utilisation de différentes notions et machines d’analyse. Cela a rajouté à notre cursus un atout supplémentaire. Ce sujet a permis de mettre en évidence l’impact du Cyclométhicone® D5 sur différents films acryliques. L’innocuité de celui-ci n’a donc malheureusement pas été prouvée. Cette étude aurait pu faire l’objet d’un mémoire complet, les recherches sont à poursuivre pour avoir une meilleure compréhension sur les effets de ce type de solvants. Ces nombreuses expériences et les multiples échanges avec professionnels et camarades de toutes spécialités nous ont permis d’acquérir de nouvelles aptitudes qui seront essentielles pour l’exercice de ce métier.

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pour

les

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196

Glossaire

A Additif : nom générique de substances qui, additionnées à certains produits, leur confèrent des propriétés spéciales ou améliorent leurs propriétés. Armure : mode d’entrecroisements des fils de chaîne et de trame, caractérisé par le nombre de fils de chaîne pris et laissés à chaque duite suivant un cycle déterminé, la répartition des liages, ainsi que la présence éventuelle de chaînes et de trames supplémentaires.

B Blanchissage : action de blanchir le linge, par procédé chimique par exemple. Bordage : opération consistant à coller un papier de protection sur le pourtour d’un tableau, le plus souvent sur toile tendue sur châssis. Brucelles : pinces fines à ressort, pour saisir de très petits objets.

C Cellulose : glucide macromoléculaire qui constitue la paroi des cellules végétales. La cellulose est le constituant principal des fibres de coton, qui en renferment de 92 à 95 %. Dans les autres matériaux naturels fibreux, elle est souvent associée à des substances variées : lignine, matières minérales, éventuellement résines, tanins, matières grasses, matières colorantes, etc. Chaleur latente : chaleur accompagnant un changement d'état Chanfrein : petite coupe en biseau effectuée sur l'arête vive d'une pièce de bois ; surface oblique ainsi obtenue.

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197 Clef : élément permettant l’écartement des montants du châssis, donc l’extension de sa surface conditionnant le réglage de la tension de la toile. Composé organique volatil (COV) : composés organiques pouvant facilement se trouver sous forme gazeuse dans l'atmosphère. Concentration pigmentaire volumique : concentration en volume d’un pigment ou d’une charge dans un film sec (peinture par exemple). Elle s’exprime par le rapport [volume de pigment/ (volume de pigment + volume de liant sec)] x 100. Concentration pigmentaire volumique critique : valeur limite de la CVP au-dessus de laquelle le liant n’est plus suffisant pour combler tous les interstices entre les grains de pigment ou de charge, un tel film est obligatoirement mat et plutôt opaque. Conductivité : grandeur physique σ, caractérisant la capacité de conduction d'une substance, égale au rapport de la densité de courant électrique j traversant la substance au champ électrique appliqué E (j = σE). [L'unité SI de conductivité électrique est l'ohm−1. mètre−1 (Ω−1. m−1), ou siemens par mètre (S. m−1).] Contexture : caractère clos ou ouvert d’un tissage, respectivement qualifié de serré ou lâche. Couture : assemblage de deux morceaux de tissu à l’aide d’un fil passé dans l’un et l’autre.

E Embuvage : différence entre la longueur initiale du fil de chaîne et la longueur du tissu après insertion de la trame. Empâté (Empâtement) : relief de la couche picturale dû à l’instrument utilisé, à la consistance de la matière picturale et au processus de séchage.

F Facture : manière dont une œuvre d'art est composée sur le plan technique. Feuil : pellicule résultant de l'application d'une peinture ou d'un vernis et constituant tout ou partie d'un système de peintures. Force ionique : concentration des différents ions en solution en mol.L-1. Une estimation de la force ionique peut être effectuée en connaissant la conductivité électrique (S.cm-1).

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198 Fibre : filament naturel d’origine animale, d’origine végétale, artificielle ou synthétique, susceptible d’être utilisé pour former des fils résistants et souples propres au tissage ou au simple enchevêtrement. Fil : élément fin et allongé obtenu par simple dévidage, par étirage, ou faisceau de fibres assemblées par filage. La régularité, la grosseur, la torsion et le nombre de fils au centimètre déterminent les qualités des textiles.

H Hémicellulose : substance contenue dans la membrane des cellules végétales, soluble dans les alcalis et souvent associée à des gommes ou à des mucilages. Humidité relative : rapport exprimé en % entre la quantité d’humidité contenue dans un volume d’air et le maximum que ce même volume peut retenir à la température considérée. HR % = (h/H) x 100 ; h = humidité réelle, H = humidité saturante. Hydrocarbure : corps constitué de molécules contenant exclusivement du carbone et de l’hydrogène. Hydrocarbure aliphatique : hydrocarbure dont la molécule est dite « linéaire » plus ou moins ramifiée, ou encore chaîne carbonée. Hydrocarbure aromatique : hydrocarbure dont la molécule comprend un noyau benzénique.

I Initiateur : substance qui produit aussi l'accélération de certains processus chimiques, mais ce faisant, il est nécessairement détruit.

L Lé : largeur d'une pièce d'étoffe prise entre ses deux lisières. Lignine : substance organique complexe qui imprègne les éléments constitutifs du bois auquel elle donne sa consistance. Lisière : bord longitudinal d'une pièce d'étoffe, parfois d'une armure différente et souvent d'une autre couleur que le reste de la pièce. Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


199 Lixiviation : extraction de certains constituants du feuil par un solvant.

M Mercerisage : traitement à la soude caustique des fils et des tissus de coton, maintenus sous tension, en vue d'obtenir un aspect brillant et soyeux et d'améliorer leur affinité tinctoriale. Microémulsion : système concentré et stable de micelles indépendantes. (Les microémulsions contiennent en général de l'eau, de l'huile, un tensio-actif et un « cotensioactif », comme le pentanol. Elles sont d'un grand intérêt pour la récupération assistée du pétrole. Monomère : molécule qui, par enchaînements successifs avec des molécules identiques ou différentes, donne naissance à une structure polymère. Montant : élément allongé et rigide dont l’assemblage forme périphériquement le châssis à tableau.

P pH : pour « potentiel Hydrogène ». Le pH 7 correspond à la neutralité ; en dessous et jusqu’à pH 0, le milieu est acide ; au-dessus et jusqu’à 14, il est basique (ou alcalin). Polymère : substance composée de molécules caractérisées par la répétition, un grand nombre de fois, d'un ou de plusieurs atomes ou groupes d'atomes. Polymérisation : réaction de formation des chaînes macromoléculaires à partir d'entités plus légères. Pression de vapeur saturante : pression exercée par la vapeur au-dessus d’un liquide volatil lorsque celui-ci et la vapeur sont à l’équilibre pour une température donnée Pression osmotique : pression qui détermine le phénomène d'osmose et qui correspond à la différence des pressions exercées de part et d'autre d'une membrane semi-perméable par deux liquides de concentration différente. Pyrolyse-chromatographie en phase gazeuse-spectrométrie de masse (Py-CG-SM) : la chromatographie en phase gazeuse - Spectrométrie de masse est une technique d'analyse et de quantification des composés organiques volatiles et semi-volatiles. La chromatographie en phase gazeuse (CG) sert à scinder les mixtures pour en faire des composants individuels au Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


200 moyen d'une colonne capillaire à température contrôlée. Les petites molécules, qui ont des stades d'ébullition bas, descendent le long de la colonne plus rapidement que les grandes molécules, qui ont des stades d'ébullition hauts. La spectrométrie de masse (MS) sert à identifier les diverses composantes dans leur spectre de masse. Chaque composant a un spectre de masse unique, ou quasi unique, que l'on peut comparer avec des bases de données de spectres de masse, ce qui permet de les identifier. Grâce à l'utilisation de normes, il est également possible de procéder à la quantification.

R Rhéologie : science de l’écoulement, plus précisément étude du comportement des fluides.

S Spectroscopie infrarouge à transformée de Fourrier (IRTF) : dans cette analyse, on obtient un spectre montrant des vibrations moléculaires pour modifier ou caractériser des matériaux organiques comme les polymères, les lubrifiants, les agents adhésifs et nettoyants. Spinelle : famille d'oxydes pouvant contenir également du fer et du chrome (magnétite, par ex.). Support textile : support souple constitué de fils soit entrecroisés, dits « tissés », soit enchevêtrés ou compressés, dits « non tissés ».

T Température de filmification : température à laquelle la formation du film s’effectue. Tensio-actif : substance modifiant la tension superficielle entre deux surfaces. Les tensio-actifs se composent de molécules amphiphiles présentant un côté lipophile (affinité pour les lipides) et un côté hydrophile (affinité pour l'eau). Cette propriété leur permet également de solubiliser deux phases non miscibles. Thermoplastique : Se dit d'un polymère qui, sous l'action de la chaleur, fond ou se ramollit suffisamment pour pouvoir être mis en forme. Tissage : action d’entrecroiser des fils généralement orthogonalement ; ceux-ci forment alors la chaîne et la trame du tissu. La largeur d’une bande de tissu, de lisière à lisière est un lé.

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201 Toile : armure produite par le passage en alternance régulière de la trame sur un fil de chaîne puis sous un autre à chaque duite (1 pris, 1 laissé) et décochement de 1 d’une duite à l’autre. Traverse : pièce allongée et rigide située à l’intérieur du châssis à tableau pour le renforcer.

V Van der Waals, forces : Forces électromagnétiques résiduelles faibles, d'origine quantique, s'exerçant entre des molécules et des atomes neutres. Sources des définitions des termes du glossaire : BERGEON-LANGLE, Ségolène ; CURIE, Pierre et Alain REY. Peinture & dessin : Vocabulaire typologique et technique, 2 volumes, éditions du Patrimoine Centre des monuments nationaux, 2009. PEREGO, François. Le dictionnaire des matériaux du peintre. Paris: Belin, 2005 Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL), http://www.cnrtl.fr/. Consulté le 15/05/2017 EAG Laboratories, http://www.eaglabs.fr/cm/gc-ms.html. Consulté le 15/05/2017 Larousse, http://www.larousse.fr/. Consulté le 15/05/2017

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202

Table des illustrations Schémas Schéma 1 : Schéma personnel .................................................................................................. 39 Schéma 2: Schéma personnel ................................................................................................... 39 Schéma 3 : Schéma personnel .................................................................................................. 47 Schéma 4 : Schéma personnel .................................................................................................. 52 Schéma 5 : Schéma personnel .................................................................................................. 53 Schéma 6 : Schéma personnel .................................................................................................. 70 Schéma 7 : Schéma personnel. ................................................................................................. 70 Schéma 8 : Schéma personnel .................................................................................................. 83 Schéma 9 : Schéma personnel ................................................................................................ 114 Schéma 10: Schéma personnel ............................................................................................... 118 Schéma 11 : Schéma personnel .............................................................................................. 149

Figures Figure 1 : Photographie personnelle........................................................................................... 5 Figure 2 : Photographie personnelle........................................................................................... 6 Figure 3 : http://krakow.fotopolska.eu/373846,foto.html?o=b4362 .......................................... 7 Figure 4 : Galerie Roi Doré. Marian Kasperczyk, Back to front painting / peinture périphérique. Paris: Editions yot-art, 2015. ...................................................................................................... 8 Figure 5 : Photographie personnelle........................................................................................... 9 Figure 6 : Photographie personnelle......................................................................................... 10 Figure 7 : Galerie Roi Doré. Marian Kasperczyk, Back to front painting / peinture périphérique. Paris: Editions yot-art, 2015. .................................................................................................... 11 Figure

8

:

http://www.christies.com/lotfinder/Lot/nicolas-de-stael-1914-1955-paysage-

mediterraneen-4315164-details.aspx........................................................................................ 12 Figure 9 : Galerie Roi Doré. Marian Kasperczyk, Back to front painting / peinture périphérique. Paris: Editions yot-art, 2015. .................................................................................................... 12 Figure 10 : https://www.moma.org/collection/works/78811?locale=fr. .................................. 14 Figure 11 : Photographie personnelle....................................................................................... 14 Figure 12 : Photographie personnelle....................................................................................... 15 Figure 13 : http://marcosramirezerre.com/187-pares-de-manos/ ............................................. 17 Figure 14 : http://marcosramirezerre.com/187-pares-de-manos/ ............................................. 17 Figure 15 : http://www1.rfi.fr/culturefr/articles/097/article_61072.asp ................................... 18 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


203 Figure 16 : DELAVEAU,P., GIBSON, M., PASTOUREAU, M., Mains : peinture de Isia Leviant, La différence, Paris, 1997 .......................................................................................... 18 Figure 17 : Photographies personnelles ................................................................................... 21 Figure 18 : Photographie personnelle....................................................................................... 23 Figure 19: Photographie personnelle........................................................................................ 23 Figure

20

:

http://catalogue.drouot.com/ref-drouot/lot-ventes-aux-encheres-

drouot.jsp?id=327681............................................................................................................... 30 Figure 21 : http://www.pba-auctions.com/html/fiche.jsp?id=1374647. .................................. 30 Figure 22 : https://www.slideshare.net/benklinger/art.. ........................................................... 31 Figure 23 : Photographie personnelle....................................................................................... 31 Figure

24

:

http://www.mba-lyon.fr/mba/sections/fr/documentation-musee/dossier-

pedagogique1/fiches-d_oeuvre/fautrier-ensavoirplu/?&view_zoom=1 ................................... 33 Figure 25 : http://www.cbx41.com/article-29007078.html ...................................................... 34 Figure 26 : http://www.tate.org.uk/whats-on/tate-britain/exhibition/frank-auerbach .............. 35 Figure 27 : http://www.tate.org.uk/art/artworks/auerbach-j-y-m-seated-no-1-t03319 ............ 35 Figure 28 : http://m.kasperczyk.free.fr/ .................................................................................... 39 Figure 29 : Photographie personnelle....................................................................................... 40 Figure 30 : Photographie personnelle....................................................................................... 40 Figure 31: Photographie personnelle........................................................................................ 41 Figure 32 : Photographie personnelle....................................................................................... 43 Figure 33 : Photographie personnelle....................................................................................... 43 Figure 34 : Photographie personnelle....................................................................................... 44 Figure 35 : Photographie personnelle....................................................................................... 45 Figure 36 : Sigma aldrich© ...................................................................................................... 45 Figure 37 : Photographie personnelle....................................................................................... 49 Figure 38 : Photographie personnelle....................................................................................... 52 Figure 39: GIULIANO, J, Bois : essences et variétés, Ed. H. Vial, 1984, p. 38 ..................... 52 Figure 40 : Photographie personnelle....................................................................................... 53 Figure 41 : Photographie personnelle....................................................................................... 54 Figure 42 : Photographie personnelle....................................................................................... 55 Figure 43 : Photographie personnelle....................................................................................... 56 Figure 44 : Photographie personnelle....................................................................................... 56 Figure 45 : Photographie personnelle....................................................................................... 57 Figure 46 : Photographie personnelle....................................................................................... 57 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


204 Figure 47 : Photographie personnelle....................................................................................... 58 Figure 48 : Photographie personnelle....................................................................................... 58 Figure 49 : Photographie personnelle....................................................................................... 59 Figure 50 : Photographie personnelle....................................................................................... 59 Figure 51 : Photographie personnelle....................................................................................... 60 Figure 52 : Photographie personnelle....................................................................................... 60 Figure 53 : Photographie personnelle...................................................................................... 61 Figure 54 : Photographie personnelle....................................................................................... 61 Figure 55 : Photographie personnelle....................................................................................... 62 Figure 56 : Photographie personnelle....................................................................................... 63 Figure 57 : Photographie personnelle....................................................................................... 63 Figure 58 : Photographie personnelle....................................................................................... 64 Figure 59 : Photographie personnelle....................................................................................... 64 Figure 60 : Photographie personnelle....................................................................................... 65 Figure 61 : Photographie personnelle....................................................................................... 65 Figure 62 : Photographie personnelle....................................................................................... 85 Figure 63 : Photographie personnelle....................................................................................... 88 Figure 64 : Photographie personnelle..................................................................................... 108 Figure 65 : Photographie personnelle..................................................................................... 109 Figure 66 : Photographie personnelle..................................................................................... 110 Figure 67 : Photographie personnelle..................................................................................... 113 Figure 68 : Photographie personnelle..................................................................................... 115 Figure 69: Photographie personnelle...................................................................................... 116 Figure 70 : Photographie personnelle..................................................................................... 117 Figure 71 : Photographie personnelle..................................................................................... 117 Figure 72 : Photographie personnelle..................................................................................... 118 Figure 73 : Photographie personnelle..................................................................................... 118 Figure 74 : Photographie personnelle..................................................................................... 119 Figure 75 : Photographie personnelle..................................................................................... 119 Figure 76 : Photographie personnelle..................................................................................... 119 Figure 77 : Photographie personnelle..................................................................................... 120 Figure 78 : Photographie personnelle..................................................................................... 121 Figure 79 : Photographie personnelle..................................................................................... 121 Figure 80 : Photographie personnelle..................................................................................... 121 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


205 Figure 81 : Photographie personnelle..................................................................................... 122 Figure 82 : Photographie personnelle..................................................................................... 122 Figure 83 : Photographie personnelle..................................................................................... 122 Figure 84 : Photographie personnelle..................................................................................... 123 Figure 85 : Photographie personnelle..................................................................................... 124 Figure 86 : Photographie personnelle..................................................................................... 124 Figure 87 : Photographie personnelle..................................................................................... 124 Figure 88 : Photographie personnelle..................................................................................... 124 Figure 89 : Photographie personnelle..................................................................................... 125 Figure 90 : Photographie personnelle..................................................................................... 125 Figure 91 : Photographie personnelle..................................................................................... 126 Figure 92 : Photographie personnelle..................................................................................... 127 Figure 93 : Photographie personnelle..................................................................................... 127 Figure 94 : Photographie personnelle..................................................................................... 127 Figure 95 : Photographie personnelle..................................................................................... 127 Figure 96 : Photographie personnelle..................................................................................... 128 Figure 97 : Photographie personnelle..................................................................................... 128 Figure 98 : Photographie personnelle..................................................................................... 129 Figure 99: Photographie personnelle...................................................................................... 130 Figure 100 : Photographie personnelle................................................................................... 131 Figure 101 : Photographie personnelle................................................................................... 132 Figure 102 : igma Aldrich© et « Cyclosiloxane » Materials for the December 4-5, 2008 Meeting of the California Environmental Contaminant Biomonitoring Program (CECBP) Scientific Guidance Panel (SGP) ............................................................................................................ 139 Figure 103 : Photographie personnelle................................................................................... 141 Figure 104 : Photographie personnelle................................................................................... 142 Figure 105 : Sigma Aldrich© ................................................................................................. 143 Figure 106: https://www.synchrotron-soleil.fr/fr/lignes-de-lumiere/ailes ............................. 145 Figure 107 : Photographie personnelle................................................................................... 148 Figure 108 : Photographie personnelle................................................................................... 149 Figure 109 : Photographie personnelle................................................................................... 150 Figure 110 : PAQUETON, Henri, RUSTE, Jacky, Microscopie électronique à balayage, principe et équipement p. 3 .................................................................................................... 151 Figure 111 : Phenom®© ......................................................................................................... 151 Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


206 Figure 112 : NAJJAR, S., Couplage AFM/Raman et spectroscopie Raman exaltée par effet de pointe de nanostructures, Université Bordeaux 1, École doctorale des Sciences Chimiques, 2013, pp. 4-5........................................................................................................................... 152 Figure 113 : Photographie personnelle................................................................................... 153 Figure 114 : Graphique Origin® ............................................................................................. 154 Figure 115 : Graphique Origin® ............................................................................................. 154 Figure 116 : Graphique Origin® ............................................................................................. 156 Figure 117 : Graphique Origin®. ............................................................................................ 156 Figure 118 : Graphique Origin® ............................................................................................. 157 Figure 119 : Graphique Origin®. ............................................................................................ 158 Figure 120 : Graphique Origin® ............................................................................................. 159 Figure 121 : Graphique Origin® ............................................................................................. 160 Figure 122 : Graphique Origin® ............................................................................................. 160 Figure 123 : Graphique Origin® ............................................................................................. 161 Figure 124 : Graphique Origin® ............................................................................................. 162 Figure 125 : Graphique Origin® ............................................................................................. 163 Figure 126 : Graphique Origin® ............................................................................................. 164 Figure 127 : Graphique Origin® ............................................................................................. 164 Figure 128 : Graphique Origin® ............................................................................................. 165 Figure 129: Graphique Origin® .............................................................................................. 166 Figure 130 : Graphique Origin® ............................................................................................. 167 Figure 131 : Graphique Origin® ............................................................................................. 167 Figure 132 : Graphique Origin® ............................................................................................. 168 Figure 133 : Graphique Origin® ............................................................................................. 168 Figure 134 : Graphique Origin® ............................................................................................. 168 Figure 135 : Graphique Origin® ............................................................................................. 168 Figure 136 : Photographie Phenom® ..................................................................................... 170 Figure 137 : Photographie Phenom® ..................................................................................... 171 Figure 138 : Image Gwyddion® ............................................................................................ 172 Figure 139 : Image Gwyddion® ............................................................................................ 172 Figure 140 : Image Gwyddion® ............................................................................................ 173 Figure 141 : Image Gwyddion® ............................................................................................ 173

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ANNEXES

1

Annexes Annexe 1 - ACTE DE NAISSANCE ............................................................................................. 2 Annexe 2 - DIPLÔMES ............................................................................................................. 3 Annexe 3 - ENTRETIENS AVEC L’ARTISTE ............................................................................... 4 Annexe 4 - BIBLIOGRAPHIE : ENTRETIEN D’ARTISTE............................................................... 6 Annexe 5 - TESTS POUR L’IDENTIFICATION DES MATÉRIAUX CONSTITUTIFS ........................... 7 Annexe 6 - ANALYSE

STRUCTURELLE PAR PYROLYSE, CHROMATOGRAPHIE EN PHASE

GAZEUSE-SPECTROMÉTRIE DE MASSE - SOCIÉTÉ POLYMEX, FUVEAU, FRANCE ....................... 9

Annexe 7 - ANALYSE

STRUCTURELLE PAR PYROLYSE, CHROMATOGRAPHIE EN PHASE

GAZEUSE-SPECTROMÉTRIE DE MASSE - BRONWYN ORMSBY, TATE MODERN, LONDRES ....... 11

Annexe 8 - ANALYSE DE CONDUCTIMÉTRIE DE LA COUCHE PICTURALE ................................ 18 Annexe 9 - LOCALISATION DES ALTÉRATIONS ...................................................................... 19 Annexe 10 - MESURES DE CLIMAT DANS L’ATELIER DE MARIAN KASPERCZYK .................... 20 Annexe 11 - CARACTÉRISTIQUES DES ÉPONGES PVF............................................................ 24 Annexe 12 - TESTS DE NÉBULISATION .................................................................................. 25 Annexe 13 - MISE EN EXTENSION SUR LE BÂTI DE TRAVAIL .................................................. 28 Annexe 14 - COMPARAISON PRATIQUE ENTRE LES MASTICS À L’AQUAZOL® 200 ET 500 ..... 32 Annexe 15 - DEVIS DU CHÂSSIS AUTOTENSEUR .................................................................... 34 Annexe 16 - FICHES TECHNIQUES ......................................................................................... 35 Annexe 17 : Formules pour la dispersion statistique ........................................................... 40 Annexe 18 : Épaisseur des films .......................................................................................... 41 Annexe 19 : Analyse gravimétrique ..................................................................................... 42 Annexe 20 : Spectroscopie infrarouge à transmission de Fourrier en mode réflectance totale atténuée (IRTF-ATR) ........................................................................................................... 44 Annexe 21 : Analyse mécanique dynamique ....................................................................... 47 Annexe 22 : Machine d’essais universelle électromécanique de traction (UTM) ............... 48

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ANNEXES

2

Annexe 1 - ACTE DE NAISSANCE400

Les documents polonais officiels ont été photographiés par nos soins à Cracovie (Pologne) à l’Académie des Beaux-Arts. 400

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ANNEXES

3

Annexe 2 - DIPLÔMES Diplôme de l’École Nationale des Beaux-Arts de Cracovie :

« Baccalauréat » polonais :

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ANNEXES

4

Annexe 3 - ENTRETIENS AVEC L’ARTISTE Divers entretiens ont été conduits. Une première fiche fut d’abord envoyée pour préparer l’artiste aux questions qui lui seront posées. Elle comprenait principalement des questions de conservation – restauration (cf. questions suivantes). Les entretiens suivants furent, pour les principaux, enregistrés ; ils concernaient davantage le chapitre « Étude historique » du mémoire. Nous nous sommes appuyée sur des livres de référence pour mener à bien ces interviews (cf. annexe 4). 1. Quelles toiles utilisez-vous ? 2. Où les achetez-vous ? 3. Quelles sont les qualités que vous recherchez dans vos toiles ? 4. Quels adhésifs utilisez-vous ? (Si vous en utilisez) 5. Quelles sont les qualités que vous recherchez dans ces adhésifs ? 6. Quelles peintures utilisez-vous ? 7. Quels critères recherchez-vous dans ces peintures ? (ex : marques, couleurs, résistance, prix…) 8. Quelles combinaisons de matériaux peuvent être trouvées dans une seule œuvre ? 9. Avez-vous des préoccupations esthétiques en ce qui concerne le vieillissement de vos œuvres ? (Décoloration, tâches, craquelures, déchirure…) 10. (A quel moment décidez-vous qu’une œuvre est terminée ? 11. Avez-vous l’impression que vos œuvres évoluent avec le passage du temps et subissent certains changements physiques et chimiques ? 12. Considérez-vous que chacune de vos œuvres est dans « l’état voulu/délibéré » ? L’œil du public vous intéresse-t-il ? 13. Quand l’œuvre doit être restaurée si elle est endommagée ? 14. Quand un restaurateur doit-il intervenir ? 15. A quel point un restaurateur doit-il intervenir ?

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ANNEXES

5

16. Quel niveau de retouche aimeriez-vous voir ? (ton neutre, tratteggio, pointillisme, réintégration illusionniste ?) 17. Quelles sont les caractéristiques que vous souhaitez conserver le plus dans vos œuvres ? 18. Envisageriez-vous de changer vos matériaux si une substitution plus stable était disponible ? 19. Vos collectionneurs vous achètent-ils, en général, une seule ou un groupe d’œuvres ? 20. Qui possède le plus grand nombre de vos œuvres ? 21. Etes-vous au courant des traitements effectués sur votre travail ? 22. Quelles sont les conséquences de ces traitements ? 23. Est- ce que le propriétaire vous contacte pour obtenir des conseils ? 24. Êtes-vous satisfait du résultat ? 25. Qu’auriez-vous fait différemment ?

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ANNEXES

6

Annexe 4 - BIBLIOGRAPHIE : ENTRETIEN D’ARTISTE CHANUT, Julie, “Conservation-restauration de l’œuvre d’un artiste vivant : protocoles de documentation et de traitement », CeROArt, 2014, mis en ligne le 21 mars 2014, consulté le 11 août 2015. URL : http://ceroart.revues.org/3977 GUBRIUM, Jaber, F.; HOLSTEIN, James, A., Handbook of Interview Research, Context & Method, Londres : Sage Publications, 2002. Museum of Modern Art, Artist Interview and Biography Docs, Non publié. INCCA, Guide to good practice: Artists’ Interviews, s.d. MULFORD, Therese, “The Artist and the Conservator: The beginning of Dialogue at the Queen Victoria Museum and Art Gallery”, AICCM Bulletin, Décembre 1995. SHEESLEY, Samantha, “Artist Interview as Tools for Diligent Conservation Practice”. The Book and Paper Group Annual, n°26, 2007. SHEESLEY, Samantha, “Artist Interviews for use in Conservation including: A Documented Interview with Siri Berg”, ANAGPIC, 2007.

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ANNEXES

7

Annexe 5 - TESTS POUR L’IDENTIFICATION DES MATÉRIAUX CONSTITUTIFS Test de réactivité à l’humidité sur un fil de trame : Avant immersion dans l’eau, pendant immersion et après séchage le fil de trame (2,3 cm) ne présente aucune variation longitudinale. Apparemment il n’y a aucune variation radiale non plus, mais cela est difficilement observable à la loupe binoculaire. Observation sous microscope x400 : Les fibres semblent lustrées, le tissage a donc sûrement été mercerisé401. Il pourrait s’agir de lin ou de coton blanchi et mercerisé.

Figure 140 : Vue d'un fil de toile sous grossissement x400

Test de la goutte d’eau : Une goutte d’eau est déposée sur morceau de toile vierge et préalablement dépoussiéré. Sur le coton, la goutte doit rester en surface pendant un moment alors que sur le lin elle s’étend immédiatement.  Résultat : La goutte est restée en surface pendant 1 mn avant de pénétrer dans la toile. Il se peut donc que la toile est en coton.

Test de combustion : La flamme sur le fil se propage assez rapidement en laissant des cendres grises.  Résultat : On peut alors supposer qu’il s’agit d’une toile de coton. Figure 141 : fil de toile une fois la flamme éteinte

Note de l’ICC, « L’identification des fibres ressources/ccinotesicc/13-18_f.pdf Consulté le 20/09/2015 401

naturelles »

https://www.cci-icc.gc.ca/resources-

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ANNEXES

8

Test chimique :      

1er bain : Éthanol pur qui permet de nettoyer le fil 2e bain : Permanganate de potassium à 1% dans de l’eau Rinçage à l’eau distillée 3e bain : Acide chlorhydrique étendu (3% dans de l’eau). Bain servant de fixateur. Rinçage à l’eau distillée 4e bain : Ammoniac pur servant à révéler la coloration. o Légèrement rose = chanvre o Rouge = jute o Pas de changement de couleur = lin ou coton  Résultat : Aucune variation de couleur, il peut donc s’agir de lin ou de coton. Observation au microscope électronique à balayage :

Figure 142 : Fibres de la toile, grossissement 550x

Figure 143 : Fibres de la toile, grossissement 690x

Les analyses montrent que la toile présente deux types de fibre : du lin (fibre avec des stries) et du coton (fibre torsadée).

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ANNEXES

9

Annexe 6 - ANALYSE STRUCTURELLE PAR PYROLYSE, CHROMATOGRAPHIE EN PHASE GAZEUSESPECTROMÉTRIE DE MASSE - SOCIÉTÉ POLYMEX, FUVEAU, FRANCE

Paramètres du système Spectromètre de masse : Perkin Elmer Clarus 560 S Pyrolyseur : SGE – Pyrojector Mk II Colonne : Elite-5MS (capillaire, méthyl-silicone greffée 5% PH ME siloxane), 40 m x 0,18 mm x 0.18 µm. Injection : env. 0.5 mg – solvent delay : 0', injecteur en mode fuite 0. Échantillon : brut. Projet MS : Richard déc15.pr Méthode : Pyrolyse.mth Principe de l’analyse L'échantillon a été injecté dans le four du pyrolyseur chauffé à 580°C au moyen d’une seringue à solide. Instantanément, cela occasionne la fragmentation de certaines macromolécules (polymères) et la volatilisation simple des molécules organiques (adjuvants, solvants, monomères résiduels, pollution…) présentes dans l’échantillon. Tous ces fragments pyrolytiques et toutes ces molécules volatilisées vont être séparés par la colonne chromatographique, puis identifiés par le détecteur MS (spectrométrie de masse). La reconnaissance de fragments pyrolytiques « traceurs » et la comparaison à ceux obtenus avec des matrices connues permet l’identification certaine de la (ou des) matrice(s) polymérique(s) de l’échantillon. Pyrogramme de l’échantillon « Peinture »

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ANNEXES

10

Identification des fragments pyrolytiques issus de l’échantillon « Peinture » N°Pic

TR (min)

1

2.78

2

3.06

3

3.78

4

3.78

5

5.65

6

6.95

7

7.42

8

7.80

9

9.81

10

11.04

11

Aire brute 2 524 448 1 395 728 438 262 1 056 792 310 744 219 360 709 504 176 960 1 911 288

872

Aire partielle (%)

Identification

67-64-1

82

Acrylique

Acetic acid

64-19-7

86

Acrylique

10.93

1-Butanol

71-36-3

88

Acrylique n-BuA

3.21

Methyl methacrylate

80-62-6

75

Acrylique MMA

2.28

Toluene

108-88-3

85

Styrénique

7.34

Heptane, 3-methylene-

1632-16-2

88

Acrylique EHA

1.82

n-Butyl acetate

123-86-4

84

Acrylique n-BuA

19.78

Styrene

8910408

88

Styrénique

51 514 544

0.53

Hexanal, 2-ethyl-

123-05-7

84

Acrylique EHA

11.50

57 043 848

0.59

n-Butyl methacrylate

97-88-1

85

Acrylique n-BuA

12

11.62

183 600

1.90

α-Methylstyrene

98-83-9

85

Styrénique

13

14.41

42 860 204

0.44

2-Ethyl-1-hexanol acetate 103-09-3

84

Acrylique EHA

14

14.44

36 620 496

0.38

Benzene, propenyl)-

80

Styrénique

15

15.66

387 048

4.01

2-Ethylhexyl acrylate

103-11-7

89

Acrylique EHA

16

19.92

39 672 416

0.41

Bibenzyl

103-29-7

87

Styrénique

17

21.32

29 587 758

0.31

Dimere [EHA][BuA]

77

Acrylique EHA BuA

18

22.25

94 418 624

0.98

Dimere du styrene

88

Styrénique

257 411 939 509 004 068

231

194

14.44

Acetone

4.54

Appartenance Tous

613

CO2 + 2-Butene

Prob Identif (%) int

145

26.13

CAS

(1-ethyl-2- 19947-229

9 663 966 100.00 624

Conclusion Ces fragments pyrolytiques appartiennent tous à une matrice polymérique de type StyrénoAcrylique contenant au moins les co-monomères suivants : [sty] [ α-MeSty] [MMA] [BuA] [EHA].

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ANNEXES

11

Annexe 7 - ANALYSE STRUCTURELLE PAR PYROLYSE, CHROMATOGRAPHIE EN PHASE GAZEUSESPECTROMÉTRIE DE MASSE - BRONWYN ORMSBY, TATE MODERN, LONDRES

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ANNEXES

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ANNEXES

18

Annexe 8 - ANALYSE DE CONDUCTIMÉTRIE DE LA COUCHE PICTURALE 1. Protocole Tout d’abord, il est nécessaire de calibrer le conductimètre. Puis, sur une zone dépoussiérée,

nous posons pendant 1 mn la quantité d’eau déminéralisée nécessaire au recouvrement des électrodes (3 gouttes). Une fois la minute écoulée, transvaser l’eau dans le conductimètre à l’aide d’une pipette. Cliquer sur le bouton mesurer et attendre le résultat. 2. Mesures 68 µS/cm

85 µS/cm

81 µS/cm

104 µS/cm

128 µS/cm

430 µS/cm

270 µS/cm

Nous pouvons observer les changements de conductivité : plus nous nous approchons de là où était immergée l’œuvre lors du dégât des eaux, plus la conductivité augmente. Ce dégât a donc du provoquer une diffusion dans la couche picturale des ions qui étaient présent dans l’eau. Elle devait donc être hypertonique par rapport à la couche picturale.

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ANNEXES

19

Annexe 9 - LOCALISATION DES ALTÉRATIONS Résidus de peintures Tableau 13 : Localisations et tailles des résidus

Position402

40,5 cm du b.s 15 cm du b.sn

Taille

0,2 x 1 cm

40,5 cm du b.s 18 cm du b.sn 0,4 x 0,5 cm

25 cm du b.s 14 cm du b.sn 0,7 x 1 cm

24,5 cm du b.s 16,5 cm du b.sn 0,5 x 0,7 cm

Position

10 cm du b.i 15 cm du b.i 27 cm du b.i 41 cm du b.i 17 cm du b.d 17 cm du b.d 15 cm du b.d 6 cm du b.d

Taille

0,5 x 0,5 cm

0,3 x 0,3 cm

0,5 x 0,5 cm

20 cm du b.s 18 cm du b.sn 0,4 x 0,3 cm

15 cm du b.s 8,5 du b.sn 0,2 x 0,7 cm

2,5 x 2 cm

Traces noires Tableau 14 : Taille, forme et localisation des traces noires

402

Forme

Taille

Emplacement

L à l’envers

11 cm

43,5 cm du bord supérieur et 8,5 cm du bord dextre

Ligne horizontale

4 cm

37,5 cm du bord supérieur et 12,3 du bord dextre

En S aplati

6 cm

39,5 cm du bord supérieur et 18,8 cm du bord dextre

Arc de cercle

3 cm

33 cm du bord supérieur et 19,7 cm du bord dextre

Ligne horizontale

1 cm

37 cm du bord inférieur et 8,5 cm du bord senestre

B.s = bord supérieur, b.i = bord inférieur, b.d = bord dextre, b.sn = bord sénestre

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ANNEXES

20

Annexe 10 - MESURES DE CLIMAT DANS L’ATELIER DE MARIAN KASPERCZYK 1. Période entière : 08/02/2016 – 08/072016

2. Un mois Février 2016

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ANNEXES

21

Mars

Avril

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ANNEXES

22

Mai

Juin

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ANNEXES

23

3. Une journée 8 Avril 2016

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ANNEXES

24

Annexe 11 - CARACTÉRISTIQUES DES ÉPONGES PVF Les informations sont tirées du mémoire de Juana Segura Escobar (2010). PVF est un acronyme de poly-vinyl-formal. Ces éponges sont basées sur ce polymère formé par la modification du poly-vinyl-alcool avec le formaldéhyde en solution aqueuse avec la présence d’acide sulfurique. Ce sont des éponges ayant une structure tridimensionnelle à cellules ouvertes interconnectées. Elles sont dures quand elles sont sèches et deviennent molles et flexibles lorsqu’elles sont humides. Leur taille de pores et configuration structurelle diffèrent des autres éponges. Ces données influent sur leur sorption* et ce sont elles qui présentent la plus grande capacité d’absorption sur une courte période. Les éponges PVF sont celles qui ont la plus faible probabilité de laisser des résidus puisqu’elles ne sont que « tamponnées » sur la surface. Rien n’est trouvé par analyse IRTF. Certaines montrent une sensibilité accrue à l’éthanol et l’acétone.

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ANNEXES

25

Annexe 12 - TESTS DE NÉBULISATION L’œuvre-test

est

L’allumette de Marian

Kasperczyk et date de 1992. Elle mesure 42 x 33,5 cm. L’artiste nous donna l’autorisation d’effectuer tout test de restauration sur cette œuvre. Elle fût donc démontée de son châssis puis mise en extension sur bâti. Des bandes de tension ont été collées en suivant l’annexe IV.4.

Figure 145 : Marian Kasperczyk, "L'allumette", 1992

Figure 146 : Œuvre sur bâti

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ANNEXES

26

L’œuvre montée sur bâti est ensuite mise sur table aspirante. Le nébuliseur à ultrason a été construit suivant le protocole d’Ann-Marlène Gagnon403. Des tests à des concentrations différentes d’adhésif sont réalisés. Le nébuliseur est lancé puis, lorsqu’une humidité relative haute (85-90%) est atteinte l’aspiration est lancée.

Adhésif

%

Temps de

Pression

d’adhésif

nébulisation (h)

(hPa)

Remarques

À changer Pression

1

3

120

Dépôt blanc

semble trop forte

Acril ME

Colle de poisson

1

3

80

Dépôt blanc

2

3

80

Dépôt blanc

1

3

80

Dépôt blanc

GAGNON, A-M, Fabrication d’un nébuliseur à ultrason, Mémoire de fin d’étude, Sujet technico-scientifique, 2014 403

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ANNEXES

27

Ce dépôt blanc est très gênant et semble être un dépôt d’adhésif à la surface de la toile. Il est probable que ce soit de l’adhésif sec qui arrive à la surface. Il ne forme pas un film, les particules restent désolidarisées.

Figure 14849 : Dépôt blanc

Figure 14750 : Dépôt blanc vu sous DinoLite®, 250x

Deux tests supplémentaires furent effectués à une concentration de 0,1% sur un intissé puis sur l’œuvre-test. Après 4h30, l’intissé semble plus rigide et ne présente pas de poudre blanche. Quant à l’œuvre-test, elle ne présente pas non plus de poudre mais la couche picturale semble encore très fragile.

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ANNEXES

28

Annexe 13 - MISE EN EXTENSION SUR LE BÂTI DE TRAVAIL La mise en extension de l’œuvre a pour but de rétablir la planéité puis par la suite, d’effectuer la consolidation générale. Cette intervention induit divers choix : celui d’un matériau pour les bandes d’intervention, d’un adhésif, d’une méthode de collage et enfin d’un bâti de travail. 1. Choix des bandes de tension provisoires Les bandes de tension provisoires devront être de résistance plus faible que la toile d’origine pour créer moins de contraintes et qu’en cas de problème ce soit elles qui rompent. Le non-tissé polyester sera choisi pour ces propriétés ainsi que l’absence de sens des fibres. Il existe trois épaisseurs de non-tissé polyester : 17, 35 et 70 g/m². Le plus fin n’est apparemment que peu réversible404 et certainement trop fin pour résister en tant que bande de tension. Le 35g/m² semble résistant tout en possédant une élasticité moyenne. Le non-tissé épais ne présente aucune élasticité et semble apporter davantage de contraintes que le non-tissé moyen. Ainsi, le non-tissé d’épaisseur moyenne (35 g/m²) sera choisi : il est plus fin que la toile, reste résistant et élastique à la tension et apporte un minimum de contraintes. 2. Choix de l’adhésif Quant au choix de l’adhésif, plusieurs paramètres sont à considérer : la nature de l’adhésif, le solvant dans lequel il est solubilisé ainsi que sa méthode de scellage. Ainsi, les adhésifs étant mélangés ou devant être réactivés à des solvants très polaires (type xylène ou toluène) sont écartés (Plextol® B500 épaissit au xylène ou toluène, Lascaux® 498 20-X et Beva® 371). Les produits étudiés sont résumés dans le Tableau 15.

LE POIZAT, Virginie, Étude de l’influence des couches de non-tissés intermédiaires dans la réversibilité du doublage thermoplastique au Plextol B500®, CeROArt, Juin 2012 404

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ANNEXES

29

Tableau 15: Comparaison d’adhésif pour bandes de tension

Produit

Nature de l’adhésif

Solvant

Plextol® B500

Dispersion d’acrylate d’éthyle (60 %), de méthacrylate de méthyle (40 %) et de méthacrylate d’éthyle Dispersion de méthacrylate de méthyle et d'acrylate de butyle épaissi avec de l’ester d'acide acrylique Dispersion de méthacrylate de méthyle et d'acrylate de butyle épaissi avec de l’ester d'acide acrylique

Lascaux® 360 HV405

Lascaux® 498HV

Eau

Température de scellage +70°C

Caractéristiques du film Dur-élastique après séchage

Eau

50°C

Reste collant après séchage

Eau

68-76°C

Dur-élastique après séchage

Pour ne pas risquer d’endommager la couche picturale présente jusqu’aux bords, nous ne retiendrons pas le Plextol B500 qui a une température de scellage trop élevée. Pour faire le bon choix, nous avons effectué de tests. Des échantillons d’intissé 35g/m² ont été encollés de une, trois ou cinq couches du produit pur ou en mélange. Puis, ils ont été scellés par chaleur sur une toile à contexture lâche se rapprochant de notre œuvre de mémoire. Quelques jours plus tard, ils ont été retirés par arrachage (cf. Tableau 16).

405

http://www.conservationsupportsystems.com/product/show/lascaux-acrylic-adhesive-360-498/lascauxrestauro-adhesives, Consulté le 02/05/2016

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ANNEXES

30

Tableau 16 : Tests visant à déterminer l'adhésif des bandes de tension

Produit

Nombre de couches

Température de scellage

Durée pour le scellage

Remarques sur le film après scellage

1 Lascaux® 3

303HV

50°C

5-10 mn

Inutilisable, trop poisseux Sec, non élastique

5 1 Lascaux® 498HV

3

Poisseux, très élastique

± 80°C

Sec, élastique

5

Mélange 1:1 (303HV498HV)

3

Légèrement collant, moyennement élastique ± 50°C

5-10 mn

X Peu de fibres arrachées Fibres arrachées

+ 10 mn

1

Remarques après arrachement Fibres de toile présentes sur le film Beaucoup de fibres de toile sur le film

Légèrement collant, élastique

5

Poisseux, élastique

Beaucoup de fibres de toile sur le film Peu de fibres arrachées Quelques fibres de toile présentes sur le film Beaucoup de fibres de toile sur le film

Comme bilan de ces tests, le 303HV pur nous paraît inutilisable car trop poisseux et élastique. Le 498HV montre un meilleur rendu mais sa température de scellage reste trop élevée. Enfin, le 1 et 3 couches du mélange 1:1 montrent un rendu plus que correct. Pour pallier la sensation collante et donc à l’attraction des poussières, nous pourrions enduire le côté en contact avec l’air avec une couche de 498HV. 3. Choix du bâti Un bâti à tension douce sera privilégié. Le Rigamonti® ne peut pas être utilisé les pics sont trop gros pour de l’intissé. Le Staro® sera donc choisi.

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ANNEXES

31

Bilan de la méthode envisagée -

Bandes d’intissé 35 g/m² coupé en bandes pour permettre une meilleure tension lors de la résorption des déformations.

-

Une couche 498HV d’un côté (côté air) et 3 de l’autre (plus de matière = épouse mieux les formes de la toile lâche) scellée avec chaleur.

-

Monté ensuite sur bâti Staro®.

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ANNEXES

32

Annexe 14 - COMPARAISON PRATIQUE ENTRE LES MASTICS À L’AQUAZOL® 200 ET 500 Sur une toile, les mastics l’Aquazol® 200 et 500 ont été appliqués à différentes concentration d’adhésif et de charge. Une zone avec un couche de mastic, une autre avec plusieurs et des essais d’empâtements. Ils furent aussi appliqués sur des rectangles de Melinex® afin de mettre en lumière le degré de rétractation du mastic. Les Melinex ont été enroulés autour d’un cylindre pour observer leur souplesse.

Figure 149 : Tests des mastics à l'Aquazol® 500

Figure 150 : Tests des mastics à l'Aquazol® 200

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ANNEXES

Aquazol® 500

Aquazol® 200

33 % d’adhésif 20

% de CaCO3 60

20

67

20 10 10 33

90 67 90 67

33

90

20

67

20

90

10 10

67 90

Remarques

Melinex

Beige, Empâtements s’étalent

Se rétractent

Blanc, Empâtements ok Beige Application plus difficile Sèche très vite Blanc Empâtements moyens Blanc ++

Très peu de rétractation

Pliage sur cylindre Non testé Souple, craquèle un peu Casse, fragile Souple Souple Casse

Se rétractent Légère rétractation Très peu de rétractation Très peu de rétractation

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Casse Casse Casse Casse Casse


ANNEXES

34

Annexe 15 - DEVIS DU CHÂSSIS AUTOTENSEUR

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ANNEXES

35

Annexe 16 - FICHES TECHNIQUES

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ANNEXES

36

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ANNEXES

37

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ANNEXES

38

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ANNEXES

39

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ANNEXES

40

Annexe 17 : Formules pour la dispersion statistique

đ?’?

Moyenne :

đ?&#x;? Ě… = ∑ đ?’™đ?’Š đ?’™ đ?’?

OÚ n est le nombre d’Êchantillons

đ?’Š=đ?&#x;?

Variance :

đ?œŽ2 =

Écart-type standard :

∑(đ?‘Ľ − đ?‘ĽĚ… )² (đ?‘› − 1)

∑(đ?‘Ľ − đ?‘ĽĚ… )² đ?œŽ=√ (đ?‘› − 1)

Écart-type moyen :

đ?œŽđ?‘ĽĚ… =

đ?œŽ Ă 68% √đ?‘›

đ?œŽđ?‘ĽĚ… =

2đ?œŽ Ă 95% √đ?‘›

et

Erreur relative :

2đ?œŽ đ?‘› đ??¸đ?‘… = ( √ ) ∗ 100 đ?‘ĽĚ…

Aude Richard – MÊmoire de fin d’Êtudes École de CondÊ – Conservation - Restauration de peintures - 2017


ANNEXES

41

Annexe 18 : Épaisseur des films Tableau 17 : Dispersion statistique sur l'épaisseur des films « liant »

Informations

Valeurs

Moyenne (mm)

0,249833333

Variance (mm²)

0,001912612

Écart-type standard (mm)

0,043733424

Écart-type moyen, 68% (mm) 0,004609908 Écart-type moyen, 95% (mm) 0,009219815 Erreur relative (%)

3,690386369

Erreur absolue (mm)

0,009219815

Tableau 18 : Dispersion statistique sur l'épaisseur des films « blanc »

Informations

Valeurs

Moyenne (mm)

0,023461538

Variance (mm²)

4,22704E-05

Écart-type standard (mm)

0,006501565

Écart-type moyen, 68% (mm) 0,000546945 Écart-type moyen, 95% (mm)

0,001275062

Erreur relative (%)

5,434689869

Erreur absolue (mm)

0,001275062

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ANNEXES

42

Annexe 19 : Analyse gravimétrique Tableau 19 : Dispersion statistiques sur les masses aux différents temps

Avant

Après immersion

3h après

24h après

1 semaine après

Moyenne (g)

0,88409385

0,89437846

0,88433077 0,88303385

0,88392615

Variance (g²)

0,01683332

0,01717463

0,01688511 0,01673173

0,01687385

0,1297433

0,13105203

0,12994271 0,12935117

0,12989937

0,01609268

0,016255

0,01611741 0,01604404

0,01611203

0,03218535

0,03251001

0,03223482 0,03208808

0,03222407

3,64049051

3,6349273

3,64510894 3,63384454

3,64556117

0,03218535

0,03251001

0,03223482 0,03208808

0,03222407

Écart-type standard (g) Écart-type moyen, 68% (g) Écart-type moyen, 95% (g) Erreur relative (%) Erreur absolue (g)

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ANNEXES

43

Tableau 20 : Dispersion statistique sur l'écart des masses entre les différents temps et après immersion

Moyenne (g) Moyenne (%) Variance (g²) Écart-type standard (g)

Après

3h après –

24h après –

1 semaine après

immersion –

après

après

– après

avant

immersion

immersion

immersion

0,009745283

-0,00963585

-0,01011698

-0,00986415

1,102290561

-1,08991247

-1,1443334

-1,11573573

9,27406E-06

9,50427E-06

1,10553E-05

9,58619E-06

0,003045335

0,003082899

0,003324949

0,003096157

0,000418309

0,000423469

0,000456717

0,00042529

0,000836618

0,000846938

0,000913434

0,00085058

8,584848703

8,789443686

9,028717267

8,62294013

0,000836618

0,000846938

0,000913434

0,00085058

Écart-type moyen, 68% (g) Écart-type moyen, 95% (g) Erreur relative (%) Erreur absolue (g)

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ANNEXES

44

Annexe 20 : Spectroscopie infrarouge à transmission de Fourrier en mode réflectance totale atténuée (IRTF-ATR) Tableau 21 : Moyenne des pics sur le spectre IRTF après immersion

ÉcartMoyenne

type

(cm-1)

standar d (cm-1)

Varia

Écart-type

Écart-type

Erreur

Erreur

nce

moyen 68%

moyen à 95%

relative

absolue

(cm-2)

(cm-1)

(cm-1)

(%)

(cm-1)

0,314973354

0,629946708

0,136995

0,6299467

645

08

0,996033

0,992

201

08214

617,22112

0

0

0

0

0

0

700,16021

0

0

0

0

0

0

729,09245

0

0

0

0

0

0

1,19836

1,436

7,57912E-

1E-26

7,57912E-14

1,00497

E-13

3,78956E-14

E-14

14

0,931708

0,868

0,5892642

08087

0,589264243

0,073210

577

0,294632122

084

43

0,609943

0,372

277

0308

0,192881

0,385762

0

0

0

0

0,609943

0,372

277

0308

0,192881

0,406628852

0,996038

0,992

365

09242

0,314974987

0,629949974

2,39673

5,744

E-13

3E-26

7,57912E-14

1,51582E-13

0,609946

0,372

44

03466

0,192882

0,385764

0

0

0

0

1,725184

2,976

582

26184

0,862592291

1,725184582

1436,96792

0

0

0

1448,54082

0

0

0

459,829734

754,16706

804,894916

841,156661 877,61128 991,218539

1065,47796

1136,07262

1234,24936 1259,51685 1386,04717

0,045860 898

0,385762

0

0

0,041023

0,4066288

128

52

0,059123

0,6299499

698

74

1,33427

1,51582E-

E-14

13

0,031254 948

0,385764

0

0

0,124467

1,7251845

956

82

0

0

0

0

0

0

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


ANNEXES

45 0,413

1457,97059

0,64294

1726,29032

0

0

0,787433

0,620

385

05134

1,507823

2,273

157

53067

2929,55003

2956,66062

37184

0,214313333

0,428626667

0

0

0,321468333

0,642936667

0,502607719

1,005215438

0,029398

0,4286266

856

67

0

0

0,021946

0,6429366

601

67

0,033998

1,0052154

337

38

Figure 151: Détail du spectre IRTF des échantillons « liant»

Figure 152 : Détail du spectre IRTF des échantillons « blanc»

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


ANNEXES

46

Figure 153: Détail du spectre IRTF des échantillons « blanc »

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017


ANNEXES

47

Annexe 21 : Analyse mécanique dynamique

Tableau 22 : Dispersion statistique de l'AMD des pics des échantillons « liant »

Liant avant

Liant après

Pic 1

Pic 2

Moyenne (°C)

29,925

40,9

20,5666667 38,2

Variance (°C²)

0,0625

0,04

0,06333333

0

0

Écart-type standard (°C)

0,25

0,2

0,25166115

0

0

Écart-type moyen, 68% (°C)

0,125

0,1

0,14529663

0

0

Écart-type moyen, 95% (°C)

0,25

0,2

0,29059326

0

0

0,83542189 0,48899756 1,41293321

0

0

0

0

Erreur relative (%) Erreur absolue (°C)

0,25

Pic 1

0,2

Pic 2 Pic 3

0,29059326

Tableau 23: Dispersion statistique de l'AMD des pics des échantillons « blanc »

Blanc avant

Blanc après

Pic 1

Pic 2

Pic 1

Pic 2

Moyenne (°C)

20,6

33,3

23,35

42,65

Variance (°C²)

1,96666667

0

6,94333333

0,045

Écart-type standard (°C)

1,40237893

0

2,63502056 0,21213203

Écart-type moyen, 68% (°C) 0,70118947

0

1,31751028

0,15

Écart-type moyen, 95% (°C) 1,40237893

0

2,63502056

0,3

Erreur relative (%)

6,80766471

0

11,2848846 0,70339977

Erreur absolue (°C)

1,40237893

0

2,63502056

0,3

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30,4


ANNEXES

48

Annexe 22 : Machine d’essais universelle électromécanique de traction (UTM)

Tableau 24 : Dispersion statistique des essais de traction des échantillons « liant » avant immersion

Allongement relatif

Force nécessaire

Allongement à

maximal (%)

à la rupture

Fmax (%)

Moyenne

22,03554

8,63582 N

13,3141

Variance

12,6640832

1,57098346 N²

2,30649813

3,64309796

1,34872688 N

1,6178469

0,51521185

0,19073879 N

0,2287981

1,03042371

0,38147757 N

0,45759621

4,67618995 %

4,41738677 %

3,43692931

1,03042371

0,38147757 N

0,45759621

Écart-type standard Écart-type moyen, 68% Écart-type moyen, 95% Erreur relative Erreur absolue

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Fmax 9,06864 N 1,87074721 N² 1,46422373 N 0,20707251 N 0,41414501 N 4,56678192 % 0,41414501 N


ANNEXES

49

Tableau 25 : Dispersion statistique des essais de traction des échantillons « liant » après immersion

Allongement relatif

Force nécessaire

Allongement à

maximal (%)

à la rupture

Fmax (%)

Moyenne

20,19368

9,87084 N

11,96516

Variance

10,7130947

2,01840014 N²

2,31684965

3,27308641

1,4207041 N

1,52212012

0,46288432

0,2009179 N

0,21526029

0,92576864

0,4018358 N

0,43052058

4,58444741 %

4,07093825 %

3,59811806 %

0,92576864

0,4018358 N

0,43052058

Écart-type standard Écart-type moyen, 68% Écart-type moyen, 95% Erreur relative Erreur absolue

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017

Fmax 10,67466 N 2,54169402 N² 1,59426912 N 0,2254637 N 0,4509274 N 4,22427883 % 0,4509274 N


ANNEXES

50

Tableau 26 : Dispersion statistique des essais de traction des échantillons « blanc » avant immersion

Allongement relatif

Force nécessaire à

Allongement à

maximal (%)

la rupture

Fmax (%)

Moyenne

148,21888

3,94622 N

144,02022

Variance

284,262406

0,40066801 N²

249,708368

16,8600832

0,63298342 N

15,8021634

2,38437584

0,08951737 N

2,23476338

4,76875167

0,17903475 N

4,46952676

3,21737128 %

4,53686687 %

3,10340226 %

4,76875167

0,17903475 N

4,46952676

Écart-type standard Écart-type moyen, 68% Écart-type moyen, 95% Erreur relative Erreur abs

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017

Fmax 4,095 N 0,430416 45 N² 0,656061 31 N 0,092781 08 N 0,185562 16 N 4,531432 52 N 0,185562 16 N


ANNEXES

51

Tableau 27 : Dispersion statistique des essais de traction des échantillons « blanc » après immersion

Allongement relatif

Force nécessaire à

Allongement à

maximal (%)

la rupture

Fmax (%)

Moyenne

131,73574

4,26792 N

127,41606

Variance

140,52912

0,29664685 N²

130,158008

11,8544979

0,54465296 N

11,4086813

1,67647917

0,07702556 N

1,61343118

3,35295834

0,15405112 N

3,22686235

2,5452154 %

3,60951287 %

2,53253974 %

3,35295834

0,15405112 N

3,22686235

Écart-type standard Écart-type moyen, 68% Écart-type moyen, 95% Erreur relative Erreur abs

Aude Richard – Mémoire de fin d’études École de Condé – Conservation - Restauration de peintures - 2017

Fmax 4,42716 N 0,279589 44 N² 0,528762 18 N 0,074778 26 N 0,149556 53 N 3,378159 57 % 0,149556 53 N


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