Pauline MARION-ANDRES - Mémoire de fin d'études Céramique et verre - Promo 2018 - École de Condé

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CONSERVATION - RESTAURATION D’UN BOBBEJAK EN FAÏENCE DE DELFT, DATANT DU XVIIIE SIÈCLE Sujet technico-scientifique : étude et mesure de l'adhérence du Mowital® B60HH, du Paraloïd® B-48N et du HMG lors de collage céramique-cuivre et céramique-plomb Mots clés : De Klaauw - Poussah – Théâtre populaire – Flügger – Toile de verre – Test de clivage – Objets composites

Pauline MARION-ANDRÈS Spécialité Céramique et Verre - Promotion 2018



À Béatrice,

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REMERCIEMENTS Ce mémoire a vu le jour grâce à monsieur Jean-Michel Roudier, qui a eu la générosité et la confiance de me prêter une œuvre aussi atypique que le Bobbejak. Je remercie tous les professionnels de la Conservation-Restauration que j’ai rencontrés et qui m’ont orientée dans mes recherches historiques : - Monsieur Jacques Peiffer, expert céramologue et directeur du laboratoire de la Faïencerie Saint-Jean-l'Aigle, Herserange, - Madame Isabelle Garachon, restauratrice de céramique au Rijksmuseum, Amsterdam, - Madame Femke Diercks, conservatrice des céramiques européennes au Rijksmuseum, Amsterdam, - Madame Suzanne Klüver, conservatrice des arts décoratifs au Prinsenhof Museum, Delft, - Monsieur Cédric Pieckowsky, conservateur et directeur du Musée de la Céramique, Andenne, - Monsieur Jaap Jongstra, ancien conservateur au Princessehof Museum, -

Leeuwarden, Monsieur Richard Hird, expert chez Sotheby’s, département des céramiques européennes.

Un grand merci également à mes tuteurs pour leur suivi et leurs conseils : - Madame Cécile de Chillaz, professeur de Conservation-Restauration à l’École de Condé et restauratrice indépendante de céramiques, - Monsieur Jean Rosen, Docteur en Art et Archéologie et directeur de recherche émérite au CNRS, - Madame Amélie Castel, professeur de sciences appliquées à la restauration du patrimoine à l’École de Condé et restauratrice indépendante de peintures. J’adresse aussi toute ma reconnaissance à mes maîtres de stages qui m’ont offert de formidables opportunités de découvertes et d’enrichissements : - Monsieur Dirk Boomsma, responsable du département conservation au Princessehof Museum, Leeuwarden, - Monsieur Stephen Koob, restaurateur de verre au Corning Museum of Glass, Corning New York, -

Madame Florence Hayward, restauratrice d’objets au Conservation Studio, Londres, Monsieur Tobias Friedrich, restaurateur de céramique, verre et métal au Museum für Angewandte Kunst, Cologne.

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J’exprime également ma gratitude à Monsieur Olivier Omnès, restaurateur indépéndant de céramique, pour le prêt de son mémoire qui a été une formidable source d’informations. J’ai une pensée particulière pour ma co-stagiaire au Princessehof Museum de Leeuwarden, Lien Acke, qui m’a fait bénéficier de ses qualités d’interprète franconéerlandais. Je remercie mes collègues de promotion, en particulier Léa, Emilie et Jeanne, pour leur aide, leur générosité et leur bonne humeur. Enfin, merci à Christian qui a permis la réalisation de mon projet technicoscientifique, à ma famille pour son soutien, sa curiosité, ses talents de bricolage, et en particulier à Tristan pour sa patience, sa dextérité informatique et son soutien inconditionnel.

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RÉSUMÉ / ABSTRACT1 Les deux dernières années d’études à l’École de Condé sont consacrées à la restauration d'une pièce en céramique liée à la rédaction d'un mémoire. Le Musée Auguste Grasset, à Varzy, nous a confié une fontaine de table en faïence*, traditionnellement appelée Bobbejak en néerlandais. L’objet date du XVIIIe siècle et a été produit par la manufacture De Klaauw (ainsi nommée pour sa signature en forme de griffe), à Delft, aux Pays-Bas. Il représente un homme assis sur un tertre, tenant son gros ventre entre ses mains. La fontaine possédait autrefois un robinet métallique, localisé entre les mollets du personnage, qui servait à verser l’alcool contenu. Le robinet pouvait être en plomb, en étain ou en cuivre. Il a aujourd’hui disparu et ne sera pas restitué au cours de la restauration. À travers l’aspect grotesque du personnage, l’objet fait une critique de la classe bourgeoise et de ses vices. La représentation de l’œuvre est liée à Dionysos, dieu du vin et du théâtre, mais elle a également des origines asiatiques, en particulier chinoises et indiennes. Au XIXe ou au début du XXe siècle, l’œuvre a été cassée et restaurée avec des produits d’origine naturelle. La restauration était abusive et vieillissante. En dérestaurant, nous avons pu constater l’état réel de la fontaine : de fait, elle était brisée en seize tessons. Les interventions de collage (au Paraloïd® B-72) et de comblement (Polyfilla et Flügger®) ont été faites en parallèle, afin de pouvoir combler certaines lacunes auxquelles il aurait été impossible d’accéder si le collage avait été effectué sans interruption. Les comblements ont été retouchés avec des peintures acryliques de sorte à imiter le décor original et à respecter l’intégrité de l’œuvre. Enfin, l’objet possédait à l’origine un robinet métallique : en cuivre, en plomb ou en étain. Notre étude technico-scientifique a pour but de déterminer quel adhésif adhère le mieux dans le cas d’un collage céramique-cuivre et céramique-plomb. Trois adhésifs sont testés : le HMG, le Mowital® B60HH et le Paraloïd® B-48N. Après avoir expliqué les propriétés des matériaux, des tests de rupture par clivage ont été effectués. Les résultats indiquent que, lors d’un collage céramique-plomb, le Paraloïd® B-48N est plus adapté tandis que lors d’un collage céramique-cuivre, le Mowital® B60HH est à favoriser.

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Les mots suivis d’un astérisque dans le mémoire sont définis dans un glossaire p. 223.

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The fourth and fifth years of my training in École de Condé are dedicated to a ceramics artwork restoration in relation to the writing of a master thesis. I was given an object from the The Musée Auguste Grasset collection: a faience flask, traditionally called in Dutch a Bobbejak. The object dates from the second half of the eighteenth century. It was produced by De Klaauw factory (whose the signature is a claw), in Delft, in the Netherlands. It depicts a man, sitting on a mound, holding his big ¨Beer belly¨ between his hands. Bellow the figure there is a hole, which at one time had a tap that allowed liquid out. The tap was made either of lead, copper or pewter. This has now been lost and we have no intention to replace it. The figure and its shape allude to Dionysus, the God of Wine and Theater and at the same time show hints of Asian influences, probably from China or India. Thanks to the clownish aspect of the figure, it seems it’s meant as a critique of the bourgeoisie of the time Some time between the 19th and the beginning of the 20th century, the Bobbejak broke and was restored with materials that were available at the time. The restoration was excessive covering large areas and, of course, it showed clear signs of deterioration due to aging. After cleaning and dismantling, one could clearly assess the condition of the decanter. It was in 16 pieces. Once the Bobbejak was clean and dismantled I glued (using Paraloïd® B-72, an acrylic adhesive) and filled (Polyfilla™ et Flügger®) simultaneously. This had to be done so due to lack of access to some parts of the figure if I separated the two proessess. Last was retouching the restored areas with acrylic paint. As I also had to relate in my final project to the scientific angle of our work, I compared three adhesives – HMG, Mowital® B60HH and Paraloïd® B-48N – to determine which one of them would be the best one for bonding ceramic and copper/ceramic with lead. The aim of the findings was to determione, in terms of bonding strength, the best material if (and when?) the missing tap will be re-attached. The results show that Mowital® B60HH is the more efficient for ceramic and copper bonding, and Paraloïd® B-48N is better for ceramic and lead bonding.

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FICHE D’IDENTIFICATION Face A

Face B

Face C

Face D

Fig. 1 : Photos avant restauration

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Renseignements relatifs au bien Titre ou appellation : Bobbejak Datation XVIIIe siècle Manufacture De Klaauw

Domaine Céramique domestique, service de table Lieu d’exécution Delft, Pays-Bas

Statut Lieu de conservation Réserve du Musée Auguste Grasset Numéro d’inventaire (Fontaine) V.F.185-a (Bouchon) V.F.185-b

Date d’entrée dans la collection 1864 Mode d’acquisition Don de M. Geslin

Fonction et nature de l’œuvre Typologie, description de la forme Homme assis sur un tertre, tenant son ventre proéminent entre ses mains. Il porte une tricorne, une collerette, un habit deux pièces, des chausses, et des souliers. Le tricorne accueille un bouchon, et un robinet métallique se trouvait entre les mollets de l’homme. Le robinet a disparu mais un embout métallique se trouve à son emplacement. Dimensions Poids avant restauration : 2,17 kg Hauteur maximale : 34,2 cm Poids après restauration : 2,004 kg Largeur maximale : 25 cm Épaisseur maximale des tessons : 1,2 cm Fonction Fontaine de table qui contenait de l’alcool. Matière (pâte et couche de revêtement) Pâte à faïence* calcaire de couleur beige-ivoire. Émail stannifère* blanc et opaque. Techniques de fabrication Moulage, cuisson oxydo-réductrice et décor de grand feu*. Etat de conservation Personnage : Bouchon : - Fort empoussièrement - Fort empoussièrement - Nombre de fragments : 14 - Nombre de fragments : 2 - Lacunes : 3 - Lacunes : 1 - Interventions antérieures : collage, - Interventions antérieures : collage et comblement et retouche retouche Décor, inscription Décor au bleu de cobalt. Les motifs de l’habit représentent des entrelacs végétaux. Signature sous le tertre en forme de griffe.

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SOMMAIRE REMERCIEMENTS ........................................................................................................................................ 2 RÉSUMÉ / ABSTRACT ................................................................................................................................. 4 FICHE D’IDENTIFICATION......................................................................................................................... 6 AVANT-PROPOS ........................................................................................................................................ 11 INTRODUCTION GÉNÉRALE .................................................................................................................. 12

PREMIERE PARTIE : ÉTUDE TECHNOLOGIQUE ET HISTORIQUE ........... 13 INTRODUCTION......................................................................................................................................... 14 CHAPITRE 1 : ORIGINES DE L’ŒUVRE ................................................................................................... 16 I- ATTRIBUTION ET DATATION ..................................................................................................................... 16

I.1. La marque ................................................................................................................................................................................................... 16 I.2. Delft ............................................................................................................................................................................................................... 18

II- ÉTUDE FONCTIONELLE ET MATÉRIELLE ........................................................................................... 22

II.1. Origine et fonction ................................................................................................................................................................................ 22 II.2. L’artiste Willems et les Bobbejakken ........................................................................................................................................... 27 II.3 Tradition et autres formes ................................................................................................................................................................. 29 CHAPITRE 2 : ANALYSE TECHNOLOGIQUE ET ICONOGRAPHIQUE .............................................. 36

I- PROCÉDÉS DE FABRICATION ..................................................................................................................... 36

I.1. Préparation des terres.......................................................................................................................................................................... 36 I.2. Moulage ....................................................................................................................................................................................................... 37 I.3. Première cuisson..................................................................................................................................................................................... 37 I.4. Emaillage ..................................................................................................................................................................................................... 37 I.5. Décor ............................................................................................................................................................................................................. 38 I.6. Seconde cuisson....................................................................................................................................................................................... 39

II- ANALYSE DU DÉCOR ET SES INFLUENCES.......................................................................................... 40

II.1. Influences asiatiques ........................................................................................................................................................................... 40 II.2 Influences européennes ...................................................................................................................................................................... 44

CONCLUSION .............................................................................................................................................. 52

DEUXIEME PARTIE : CONSERVATION-RESTAURATION ............................ 53 INTRODUCTION CONSERVATION-RESTAURATION ...................................................................... 54 CHAPITRE 1 : CONSTAT D’ÉTAT .............................................................................................................. 55 I- ANALYSE DE L’ÉTAT DE SURFACE ........................................................................................................... 57

I.1. État de l’émail ........................................................................................................................................................................................... 57 I.2. Encrassement ........................................................................................................................................................................................... 60 I.3. Dépôts........................................................................................................................................................................................................... 61 I.4. Rayures ........................................................................................................................................................................................................ 63 I.5. Fêlures .......................................................................................................................................................................................................... 63 I.6. Éclats d’émail ............................................................................................................................................................................................ 64

II- ANALYSE DE L’ÉTAT STRUCTUREL........................................................................................................ 65

II.1. Éclats ........................................................................................................................................................................................................... 65 II.2. Lacunes....................................................................................................................................................................................................... 65 II.3. Cassures ..................................................................................................................................................................................................... 66

III- ANALYSE DES ANCIENNES INTERVENTIONS .................................................................................. 67

III.1. Marquage ................................................................................................................................................................................................. 67 III.2. Retouche .................................................................................................................................................................................................. 67 III.3. Comblement ........................................................................................................................................................................................... 69 III.4. Embout métallique.............................................................................................................................................................................. 70 III.5. Collage ....................................................................................................................................................................................................... 71 CHAPITRE 2 : DIAGNOSTIC ....................................................................................................................... 72

I- DÉFAUTS LIÉS AU PROCESSUS DE FABRICATION............................................................................. 72 II- DIAGNOSTIC DES ALTÉRATIONS ............................................................................................................ 73

II.1. Altérations humaines ou d’usage .................................................................................................................................................. 73 II.2. Altérations liées aux anciennes restaurations ........................................................................................................................ 76 II.3. Stockage ..................................................................................................................................................................................................... 79

III- ÉVALUATION DES RISQUES ..................................................................................................................... 79

III.1. Risques physiques ............................................................................................................................................................................... 79

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III.2. Risques esthétiques ............................................................................................................................................................................ 79 III.3. Risques historiques ............................................................................................................................................................................ 79

IV- RÉSUMÉ DU DIAGNOSTIC.......................................................................................................................... 80 CHAPITRE 3 : PROPOSITION DE TRAITEMENT .................................................................................. 81 I- LES VALEURS DE L’ŒUVRE ......................................................................................................................... 81 II- LES OBJECTIFS DE LA RESTAURATION ................................................................................................ 82 III- LES ATTENTES DU MUSÉE ....................................................................................................................... 83 IV- CHOIX GLOBAL DE RESTAURATION ..................................................................................................... 84

IV.2. Restauration ........................................................................................................................................................................................... 88

CHAPITRE 4 : TRAITEMENTS DE CONSERVATION-RESTAURATION .......................................... 92 I- CONDITIONNEMENT POUR LA MANIPULATION, LE TRANSPORT ET LE STOCKAGE ....... 92 II- NETTOYAGE ET DÉRESTAURATION ...................................................................................................... 98

II.1. Nettoyage et retrait de la retouche ............................................................................................................................................... 98 II.2. Démantèlement ................................................................................................................................................................................... 105 II.3 Retrait des résidus .............................................................................................................................................................................. 112 II.4. Assainissement de la pâte .............................................................................................................................................................. 121 II.5. Deuxième constat d’état.................................................................................................................................................................. 125

III- TRAITEMENTS PRÉVENTIFS ................................................................................................................ 127 III.1. Nettoyage des fêlures et fixage de l’émail ............................................................................................................................. 127 III.2. Prévention de prolifération de microorganismes ............................................................................................................ 131

IV- COLLAGE ........................................................................................................................................................ 134 V- COMBLEMENT .............................................................................................................................................. 142 V.1. « L’âme » ................................................................................................................................................................................................. 143 V.2. « La peau » ............................................................................................................................................................................................. 150 V.3. Le cas de la grande lacune sur le tricorne .............................................................................................................................. 157

VI- LA RETOUCHE ............................................................................................................................................. 165 VI.1. La réintégration colorée ................................................................................................................................................................ 165 VI.2. Le vernis ................................................................................................................................................................................................ 169

VII- MARQUAGE ET SYSTÈME DE SÉCURITÉ DU BOUCHON .......................................................... 172

VII.1. Marquage............................................................................................................................................................................................. 172 VII.2. Système de sécurité du bouchon ............................................................................................................................................. 173 CHAPITRE 5 : CONSERVATION PRÉVENTIVE ....................................................................................175

I- RISQUES HUMAINS....................................................................................................................................... 175 II- CONTRÔLE DE L’ENVIRONNEMENT ................................................................................................... 176 CONCLUSION ............................................................................................................................................181

TROISIEME PARTIE : PROJET TECHNICO-SCIENTIFIQUE ...................... 182

INTRODUCTION.......................................................................................................................................183 CHAPITRE 1 : PRINCIPES DE COLLAGE ...............................................................................................185 CHAPITRE 2 : PRÉSENTATION DES PRODUITS ................................................................................191 I- LA CÉRAMIQUE .............................................................................................................................................. 191 II- LES MÉTAUX .................................................................................................................................................. 192 II.1. Le cuivre ................................................................................................................................................................................................. 192 II.2. Le plomb ................................................................................................................................................................................................. 194

III- LES ADHÉSIFS ............................................................................................................................................. 196

III.1. HMG ......................................................................................................................................................................................................... 196 III.2. Mowital® B60HH ............................................................................................................................................................................. 199 III.3. Paraloïd® B-48N .............................................................................................................................................................................. 202 CHAPITRE 3 : PROTOCOLES....................................................................................................................205

I- PROTOCOLE DE FABRICATION DES ÉPROUVETTES ..................................................................... 205 I.1. La céramique .......................................................................................................................................................................................... 205 I.2. Les métaux .............................................................................................................................................................................................. 205 I.3. Les adhésifs............................................................................................................................................................................................. 207 I.4. Le collage ................................................................................................................................................................................................. 207

II- PRÉ-TESTS...................................................................................................................................................... 209 II.1. Tests de cisaillement ........................................................................................................................................................................ 209 II.2. Test de clivage ..................................................................................................................................................................................... 209 II.3. Modification de l’application des adhésifs ............................................................................................................................. 210

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CHAPITRE 4 : RÉSULTATS .......................................................................................................................212 I- RÉSULTATS PAR SÉRIE .............................................................................................................................. 212 I.1. Série Mowital® B60HH .................................................................................................................................................................... 212 I.2. Série HMG ................................................................................................................................................................................................ 213 I.3. Série Paraloïd® B-48N...................................................................................................................................................................... 214

II- COMPARAISON ET INTERPRÉTATIONS ............................................................................................ 214 II.1. Comparaison des mesures obtenues ........................................................................................................................................ 214 II.2. Interprétations des résultats ........................................................................................................................................................ 215 II.3. Limites et critiques de cette étude ............................................................................................................................................. 217

CONCLUSION ............................................................................................................................................218 CONCLUSION GÉNÉRALE ......................................................................................................................220 GLOSSAIRE ................................................................................................................................................222 BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................................................225 PARTIE HISTORIQUE ....................................................................................................................................... 225 PARTIE RESTAURATION ................................................................................................................................ 230 PARTIE TECHNICO-SCIENTIFIQUE............................................................................................................ 241 TABLE DES ILLUSTRATIONS ...............................................................................................................245 ANNEXES ....................................................................................................................................................248 Annexe 1 : Manuscrit du musée Grasset, extrait du rapport n°4 du 8 juin 1864 .................... 249 Annexe 2 : Bobbejakken .................................................................................................................................. 250 Annexe 3 : Dauphin ........................................................................................................................................... 251 Annexe 4 : Chanson « The Brown Jug » .................................................................................................... 252 Annexe 5 : Bouteille en faïence .................................................................................................................... 253 Annexe 6 : Bobbejak chinois.......................................................................................................................... 254 Annexe 7 : Costume d’Hanswurst ............................................................................................................... 255 Annexe 8 : Porcelaine Hanswurst ............................................................................................................... 256 Annexe 9 : Constat d’état avant et après le transport ........................................................................ 257 Annexe 10 : Lampe U.V. Waldmann ........................................................................................................... 259 Annexe 11 : Récapitulatif des tests effectués ......................................................................................... 260 Annexe 12 : Ethafoam®.................................................................................................................................... 266 Annexe 13 : Tyvek® ........................................................................................................................................... 267 Annexe 14 : Tween® 20 ................................................................................................................................... 269 Annexe 15 : Générateur de vapeur Minor 164 ...................................................................................... 278 Annexe 16 : Carbopol®..................................................................................................................................... 280 Annexe 17 : Ethomeen® C25 ......................................................................................................................... 285 Annexe 18 : Arbocel® BC200......................................................................................................................... 296 Annexe 19 : Eau oxygénée ............................................................................................................................. 308 Annexe 20 : Mowital® B60HH ....................................................................................................................... 316 Annexe 21 : Échanges avec monsieur Roudier...................................................................................... 324 Annexe 22 : Paraloïd® B-72 ........................................................................................................................... 325 Annexe 23 : Polyfilla™ intérieur ................................................................................................................ 331 Annexe 24 : Cire dentaire ............................................................................................................................... 334 Annexe 25 : Flügger® ........................................................................................................................................ 337 Annexe 26 : Eva art ........................................................................................................................................... 344 Annexe 27 : Parafilm® M ................................................................................................................................. 345 Annexe 28 : Acryliques Golden® Open ...................................................................................................... 349 Annexe 29 : Primal™ WS24 .......................................................................................................................... 359 Annexe 30 : Encre de Chine Lefranc Bourgeois .................................................................................... 360 Annexe 31 : HMG Heat and Waterproof ................................................................................................... 365 Annexe 32 : Paraloïd® B48-N ........................................................................................................................ 375

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AVANT-PROPOS

En accord avec mon projet professionnel de travailler dans une institution, je souhaitais effectuer mon travail de mémoire sur une œuvre muséale. Mes préférences allaient pour une pièce de forme, d’époque moderne. J’ai contacté divers musées français susceptibles d’avoir des œuvres qui m’intéresseraient et plusieurs réponses positives m’ont été adressées. Un choix varié s’offrait à moi, néanmoins, aucune œuvre ne retenait vraiment mon attention. J’ai alors envoyé une demande au Musée Auguste Grasset. L’ayant visité en famille lorsque j’étais enfant, je connaissais ce musée depuis plusieurs années. J’aimais sa collection que je trouvais extrêmement riche pour un aussi petit bourg que Varzy. Je savais également que, quelques années auparavant, le musée avait déjà prêté une œuvre à une étudiante de l’École de Condé, Audrey Cavin. Le conservateur, Monsieur Roudier, m’a répondu très rapidement et m’a aussitôt proposé le Bobbejak de Delft. J’ai été séduite par l’aspect insolite et amusant de l’œuvre. C’était la première fois que je voyais un tel objet, et la première fois qu’un étudiant à l’École de Condé pouvait en restaurer un.

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INTRODUCTION GÉNÉRALE Le XIXe siècle connaît un fort phénomène de collectionnisme. D’abord considéré comme un original, un excentrique, le collectionneur est ensuite, à partir des années 1870, une figure à la mode2. En 1863, le musée de Varzy 3 ouvre officiellement sous la direction de monsieur Auguste Grasset4. Dans le souci d’égaliser les institutions parisiennes, il sollicite les dons pour amasser un maximum d’œuvres dans son musée éponyme. Il fait ainsi l’acquisition, en 1864, de l’objet n° V.F.185 (a et b) grâce à monsieur Geslin. Il s’agit d’une fontaine de table anthropomorphe en faïence*, originaire de Delft. Le terme néerlandais pour décrire un tel objet est Bobbejak. Peu d’exemplaires sont visibles en France. Afin de comprendre cette œuvre, notre étude sera structurée en trois parties. Tout d’abord nous nous intéresserons à l’histoire de l’objet : en analysant sa signature, ses matériaux de constitution, l’originalité de sa forme, et son décor, nous tenterons de déterminer ses influences, ainsi que son lieu et son époque de production. Puis nous dresserons le constat d’état du Bobbejak, et déterminerons un diagnostic qui permettra d’établir un protocole de restauration. Chaque traitement sera illustré et justifié grâce à la réalisation de tests et à l’appui de la documentation scientifique. Le projet aura pour but de retirer la précédente restauration qui fragilise et met en danger l’œuvre, de redonner à la fontaine une stabilité, et de mettre en valeur sa forme et ses décors. Enfin, une étude technico-scientifique conclura ce mémoire : le Bobbejak possédait autrefois un robinet métallique. Nous avons souhaité mesurer l’adhérence de trois adhésifs dans le cadre de collage céramique-métaux afin de déterminer quel hypothétique adhésif nous aurions pu utiliser si nous avions été en possession du robinet original et qu’il aurait fallu le recoller lors de la restauration.

Dominique Pety, « Le Personnage du collectionneur au XIX e siècle : de l'excentrique à l'amateur distingué », Romantisme, 2001, n°112, pp. 71-81, p. 74. 3 58210, Nièvre, France. 4 Le musée naît le 15 novembre 1856 grâce à monsieur Henri Piffaut qui décide d’associer sa collection privée à la bibliothèque déjà existante de la ville. Le 14 juillet 1862, monsieur Grasset le remplace. 2

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Première partie : ÉTUDE TECHNOLOGIQUE ET HISTORIQUE

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INTRODUCTION L’objet n°VF 185 du Musée Auguste Grasset5 est une fontaine anthropomorphe en faïence* mesurant 34,2 cm de hauteur et 25 cm de largeur6. L’objet représente un homme assis sur un tertre qui tient son gros ventre entre ses mains et qui est vêtu d’un tricorne, d’une collerette, d’un habit deux pièces, de chausses et de souliers. Ses longs cheveux tressés forment une anse. Son tricorne accueille un bouchon, également en faïence*. La polychromie est bleue et blanche. Une marque est visible sous le tertre. À l’origine, un robinet métallique – aujourd’hui disparu – se situait entre les mollets du personnage et permettait de verser une boisson. Le conservateur du Musée Grasset, M. Roudier, nous a confié l’œuvre en la qualifiant de « Pot Jacquot ». Elle est entrée dans la collection du musée en 1864 grâce au don d’un certain M. Geslin. Dans le rapport qu’il tient devant la société du musée, M. Grasset écrit : « Le curieux pot n°185 en faïence du XVIIe siècle représente un homme, bon vivant, assis les jambes écartées sur un tertre creux dans lequel est pratiquée une ouverture sur le devant pour recevoir une petite cannelle. Cette figurine est en forme de pot, car le fond de son chapeau est un bouchon en faïence, et ses cheveux tressés servent d'anse pour le saisir. Nous devons cette curieuse céramique à la générosité de M. Geslin de Varzy, qui l'a rapporté de Belgique pour le musée »7. D’après les recherches et observations faites, M. Grasset n’était pas toujours exact quant à la description de ses collections. C’est pourquoi nous ne pouvons pas prendre pour acquis les informations qu’il livre, comme par exemple, la datation du XVIIe siècle. Notre objectif est alors de répondre aux questions suivantes : d’où provient cet objet ? Quand a-t-il été produit ? Qu’est-ce qu’un Pot Jacquot ? Est-ce réellement un Pot Jacquot ? Notre étude historique s’articulera en deux axes : dans un premier temps, nous tâcherons de retracer les origines de la pièce. L’identification de la signature qui se trouve sous le tertre nous permettra d’attribuer une provenance et une datation à l’œuvre, mais aussi de la resituer dans un contexte culturel de production, de la rattacher à une tradition et 58210 Varzy. Mesure maximale. 7 Voir annexe n°1 p. 249. 5 6

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d’établir des points de comparaisons entre des céramiques similaires. Dans un second temps, nous procéderons à l’analyse technologique et iconographique de l’œuvre, d’une part en expliquant les différentes étapes du procédé de fabrication, d’autre part en analysant le décor et ses influences, à la fois asiatiques et européennes. Cependant, nous devons préciser quant à cette dernière partie, qu’il n’existe aucun écrit spécifique sur ce type de fontaine de table et que nous ne pouvons livrer que des hypothèses et des pistes d’interprétation.

Fig. 2 : Objet VF 185 du Musée Auguste Grasset

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Chapitre 1 : ORIGINES DE L’ŒUVRE I- ATTRIBUTION ET DATATION Une signature est visible sous le tertre (Fig. 3). Nous avons commencé notre étude en recherchant la manufacture qui correspondait à cette marque.

I.1. La marque

Fig. 3 : Signature sous le tertre

Nous sommes parvenue à rattacher la pièce à la manufacture De Klaauw (1661-1840) – qui signifie la Griffe – qui se trouvait à Delft, aux Pays-Bas. En 1661, la manufacture a été créée à l’Est de la rue et canal « Koornmarkt, face à la manufacture du Paon »8. L’évolution de la faïencerie au cours du temps est liée à ses divers propriétaires et nous éclaire sur la signature que nous avons découverte. D’abord, la manufacture est le fruit d’un partenariat entre le directeur et chef de fabrication Cornelis van der Houve (ou Cornelis Cornelisz van der Hoeve) et les propriétaires des lieux, la famille van Schoonhoven. Puis, en 1668, le travail effectué par Cornelis van der Houve étant jugé Fig. 4 : Localisation de la manufacture 9 insatisfaisant , la famille – en l’occurrence les trois sœurs, Elisabeth, Cornelia et Maria – finit par diriger seule la manufacture. Deux chefs de fabrication se succèdent : Jan Oette (ou Otten) Van Schagen puis Cornelis Van Schagen. Les marques utilisées sont alors CVS et le signe d’une griffe. Sur les pièces produites, le dessin du décor est précis, et les couleurs de grand feu* sont vives10.

Marion S. van Aken-Fehmers, Loet A. Schledorn, Delft Aardewerk, Geschiedenis van een nationaal product, Zwolle, Waanders Uitgevers, 2001, vol. 2, p. 305. 9 Ibidem, p. 81. 10 Ernest Simon Auscher, Comment reconnaître les porcelaines et les faïences d’après leurs marques et leurs caractères, Paris, Garnier, 1928, vol. 1, p. 388. 8

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Fig. 5 : Signatures sous la direction de la famille van Schoonhoven (1661-1702)

En 1702 la manufacture est mise en vente. Une des sœurs, Elisabeth, publie une annonce dans le journal où elle décrit le lieu comme une « entreprise prospère, avec des pièces grandes et propres »11. Tout est inclus dans la vente : le logement, les outils, etc. Néanmoins, il faut attendre 1705 pour que la manufacture soit rachetée, par Pieter van Oosterwijck12. En 1713, sa veuve, Margaretha van der Gucht, épouse Johannes van Lockhorst, un marchand et fabricant de porcelaine originaire de Rotterdam. Bien que Margaretha reste la propriétaire officielle, Johannes gère la manufacture. On lui attribue la marque IVL.

Fig. 6 : Signature de la production van Lockhorst (1713-1740)

Le couple van Lockhorst décède en 1740 et ce sont leurs filles, Johanna et Maria, qui héritent de la faïencerie. À nouveau le lieu est mis en vente : il est décrit comme « un véritable havre de paix »13. Une fois encore, tout est inclus dans la vente, les outils, les matières premières, la maison, la maison de jardin, le jardin… Il semblerait que l’entreprise soit alors reprise par un certain Dirck van Dijck, avant d’être gérée, en 1763, par Lambertus Sanderus.

Fig. 7 : Signatures sous la direction de Lambertus Sanderus (1763-1806)

Marion S. van Aken-Fehmers, Loet A. Schledorn, op. cit., p. 305 « een Welbeneeringde en als nog gaende porceleijn-bakkerij genaemt de Claeuw, voorzien met schone en groote ruymtens » (Amsterdamse Courant, n° 27, 4 mars 1702) 12 Plus exactement, l’entreprise est vendue à Jacobus de Waal, marié à Martijntje Catersvelt, mère de Pieter van Oosterwijck (p. 81). Ce dernier meurt en 1709. 13 Marion S. van Aken-Fehmers, Loet A. Schledorn, op. cit., p. 306 « Het zal een waar lustoord zijn geweest met tuibanken ». 11

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La production de Lambertus est décrite comme « traditionnelle » 14 , avec « ses fabrications d’assiettes et de plats forts décoratifs avec ses décors bleus ou polychromes en forme de bouquets de fleurs qui se négocient fort bien à l’époque »15. C’est sous sa direction que l’on trouve les premiers objets similaires à celui que nous étudions. En 1806, Lambertus vend 60% de sa faïencerie16. Elle est ensuite contrôlée par trois directeurs. Enfin, en 1840, la manufacture De Klaauw est vendue aux propriétaires De Drie Klotten, sous la firme J. van Putten.

Fig. 8 : Fontaine avec robinet représentant une femme assise, De Klaauw, faïence polychrome, 32,5 x 19 x 22 cm, 1661 - 1840, Musée Prinsenhof, Delft

Fig. 9 : Fontaine avec robinet représentant un homme assis sur un tonneau, De Klaauw, faïence polychrome, 31,4 x 42,2 x 21 cm, 1661 - 1840, Musée Prinsenhof, Delft

Ces recherches nous permettent d’avancer que la fontaine du musée Auguste Grasset a été produite par la manufacture De Klaauw, qui se situe à Delft. La griffe qui illustre la signature a évolué tout au long de l’histoire de la manufacture : elle n’est jamais exécutée de la même façon et, de fait, il est impossible d’attribuer une datation à la fontaine de Varzy selon la forme de sa marque. Néanmoins, elle aurait été réalisée sous la direction de Lambertus Sanderus, entre 1763 et 1806 car la production d’objets semblables apparaît à cette époque.

I.2. Delft Delft se situe dans la province de Hollande des Pays-Bas. Au début du XVIe siècle, l’installation d’artisans italiens à Anvers marque le début de la production de majolique aux Pays-Bas17. Cette dernière cesse dès le premier quart du XVIIe, au profit de la faïence18. Christine Lahaussois, Faïences de Delft, Musée National de Céramique, RMN, Paris, 1998, p. 297. Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, Les Faïences de Delft, Paris, Ed. Jacques Grancher, 1980, p. 282-283. 16 Jan Danïel van Dam, Delffse Porceleyne, Dutch delftware 1620-1850, Zwolle, Waanders, 2006, p. 163: « After about 1780 the largest and most profitable factories could no longer be sold as a whole. They became companies with twenty to forty shares, some of them owned by the heirs of former owners, some held by investors from outside the sector ». 17 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 11. 18 Christine Lahaussois, Comment reconnaître une faïence de Delft, Paris, Rmn, 2006, p. 7. 14 15

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Nous ne pouvons qu’émettre des hypothèses pour expliquer l’essor de la faïence à Delft précisément. Tout d’abord, la région de Delft s’était enrichie grâce aux brasseries19 mais au début du siècle, l’eau des canaux devient trop polluée pour être utilisée et les établissements doivent fermer. La ville réunit alors différents facteurs qui attirent les faïenciers, comme la possibilité de bénéficier de vastes espaces de travail, et d’utiliser de l’eau comme matière première et comme voie de communication pour le transport. Par ailleurs, les brasseries collaboraient avec des verreries, et il est possible que ces dernières aient commencé à produire, parallèlement, des faïences* 20 . Enfin, compte tenu de sa proximité géographique avec La Haye et donc la Cour, la ville compte la présence de familles riches qui investissent d’importants capitaux et rassemblent la main d’œuvre nécessaire21. Les manufactures delftoises vont ainsi être sous la protection de Guillaume III d’Orange. Les Pays-Bas sont prospères. Ils mettent en place un système financier de bourse22 qui fascine leurs voisins, en particulier la France. De ce fait, le protestantisme – religion majoritaire dans le pays – serait propice à l’enrichissement, à l’esprit « capitaliste » des individus 23 : l’entreprenariat, l’investissement, l’épargne, etc. sont autant de valeurs qui adhèrent à l’éthique calviniste. De plus, le pays contrôle le trafic maritime international : « avec quelque six mille navires et plusieurs dizaines de milliers d'hommes d'équipage, [la flotte néerlandaise] équivalait à l'ensemble des autres flottes européennes »24. Les Pays-Bas fondent ainsi un empire colonial et deviennent la plateforme commerciale d’Europe. En 1602, la Compagnie Néerlandaise des Indes Orientales, appelée VOC25, est créée. Le pays commence alors à importer des porcelaines chinoises, mais ce commerce est interrompu entre 1647 à 1652, lorsque la Chine ferme ses frontières. Tout en ouvrant de nouveaux échanges avec le Japon, cette période offre également à Delft l’occasion de se développer. Ainsi de nouvelles manufactures se créent-elles26, et, dès 1660, Delft imite les porcelaines asiatiques et les exporte en Europe27. Les faïenceries commencent à apposer leur marque qui Aronson, Dutch Delftware, Facing East: oriental sources for Dutch Delftware chinoiserie figures, 2010, p. 160. 20 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 12. 21 Entretien avec Jaap Jongstra, le 21/09/2017. 22 Andreas Nijenhuis, « Regards français sur le commerce urbain aux Provinces-Unies (1600-1650) » [document électronique] http://a.nijenhuis.free.fr/publications/publications/Textes_files/La%20place%20publique%20urbaine.p df, p. 6 23 UNIVERSITE DE LAUSANNE, « Histoire économique des Pays-Bas, Les Provinces-Unies » [document électronique] http://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=9&ved=0ahUKEwjkwZPd29DaAhX EwBQKHbswCccQFghhMAg&url=http%3A%2F%2Fwww.hec.unil.ch%2Fjlambelet%2FGroupe8_HE.doc& usg=AOvVaw18N3m1ft2Mn3RpiFmW7u_S, p. 18 24 BNF EXPOSITIONS, PASTOUREAU Mireille, Les Hollandais conquérants des mers [en ligne] Disponible sur : http://expositions.bnf.fr/marine/arret/06.htm [Consulté le 10/09/2017] 25 La Compagnie Néerlandaise des Indes Occidentales est appelée WIC. 26 Entre autres De Porceleyne Klaauw en 1658. 27 Christine Lahaussois, op. cit., p. 13. 19

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peut avoir différentes formes – « initiales, mots, symboles ou chiffres » 28 – et évoluer au fil du temps.

Fig. 10 : Routes empruntées par la VOC et WIC

Le XVIIe siècle est l’âge d’or des Pays-Bas, et par la même occasion, de son industrie faïencière. Delft produit des pièces des services de table, des pièces ornementales ou d’apparat et des pièces à usage domestique29. L’histoire des Pays-Bas peut nous apporter des éléments de réponses quant à l’essor de Delft. En 164530, les Pays-Bas sont officiellement divisés en deux nations : les Provinces-Unies au Nord, et les Pays-Bas espagnols au Sud. Le climat de paix est favorable au commerce. En comparaison avec le siècle précédent qui marquait l’extraordinaire réussite des Pays-Bas, le XVIIIe siècle est une période de déclin. En 1740, la Guerre de Succession d’Autriche éclate : alliées de l’Angleterre et de l’Autriche, les ProvincesUnies sont contraintes d’y prendre part. Le conflit se déroule essentiellement dans les

Fig. 11 : Provinces-Unies et Pays-Bas espagnols en 1648

Ibidem, p. 19. Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 51. 30 L’indépendance avait été proclamée en 1588 mais l’Espagne ne reconnaît les Provinces-Unies que lors des Traités de Westphalie, le 24 octobre 1648. 28 29

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Pays-Bas du Sud, et laisse un grand sentiment d’insatisfaction politique dans le pays. En 1747, le pouvoir est à nouveau donné à la dynastie d’Orange et le stadhoudérat31 est déclaré héréditaire : Guillaume IV (1711-1751) a alors les pleins pouvoirs, pourtant il est incapable « d’impulser des réformes et le rétablissement moral »32. Lorsqu’il meurt, son fils Guillaume V est âgé de trois ans, et son épouse Anne devient régente du pays. C’est le début d’une guerre civile entre les partisans de la Maison d’Orange et les « patriotes » réformateurs libéraux qui exigent davantage de démocratie. Pendant ce temps, les alliances européennes se transforment : la France est désormais alliée de l’Autriche, et l’Europe s’engage dans une nouvelle guerre, la Guerre de Sept Ans (1756-1763). L’emprise économique de l’Angleterre, dont les colonies se cessent de s’étendre, desserve les Provinces-Unies 33 qui plongent dans un lent déclin : la population dans les villes diminue fortement, le commerce et l’industrie pâtissent jusqu’à s’effondrer complètement au dernier quart du siècle. Mais, par opposition, « les zones rurales profitent d’une nouvelle période de prospérité après 1750 » 34 , notamment Delft. Avec la guerre, l’industrie de la faïence* prospère car le conflit nuit à l’industrie de la céramique française et allemande et Delft peut répondre à la demande intérieure. Dans le but alors de protéger leurs manufactures, en avril 1764, le Conseil Municipal de Delft émet un « Arrêté contre les copies des signes et marques de poteries, et le changement des précités signes et marques » qui oblige les faïenciers à faire enregistrer la marque de leur manufacture pour lutter contre la concurrence et de protéger les productions delftoises en les faisant reconnaître. Cela ne suffit pas à prévenir l’importation des faïences fines* anglaises qui ont des décors et des formes plus modernes et affichent des prix très compétitifs. De plus, l’essor des porcelaines de Meissen, de Tournai ou encore de manufactures hollandaises (De Weesp, Loosdrecht, Nieuwer Amstel 35 ) provoque le déclin de Delft. Entre 1764 et 1815, les manufactures delftoises ferment les unes après les autres : en 1815, il n’en reste que cinq (De Grieksche A, De Blompot, De Klaauw, De Drie Klokken et De Porceleyne Fles). Certaines d’entre elles essaient de survivre en adoptant la technologie anglaise et en produisant des faïences fines*, d’autres – notamment De Klaauw et De Drie Klokken – restent fidèles à leur tradition.

DICTIONNAIRE LAROUSSE, Stathouder [en ligne] Disponible sur : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/stathouder/74496 [Consulté le 10/09/2017] Le Stathouder est le « chef du pouvoir exécutif d'une province ou de l'ensemble de l'Union. » Consulté le 20/09/2017. 32 Catherine Denys, Isabelle Paresys, Les Anciens Pays-Bas à l’époque moderne 1404-1815, Ellipses, 2016, p. 170. 33 Loc. cit. 34 Jan Danïel van Dam, op. cit., p. 161. 35 Christine Lahaussois, Faïences de Delft, La Collection du musée des Arts Décoratifs, Paris, Rmn, 1994. 31

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Delft ne parvient pas à innover comme le reste de l’Europe et la production perd son « caractère aristocratique »36 pour devenir de plus en plus populaire : avec notamment le « Delft paysan* », elle s’adresse à une communauté rurale dont les goûts sont moins exigeants et les budgets plus restreints. Les faïences* sont exécutées avec moins de qualité, les décors sont simplifiés, le décor au feu de réverbère37 est abandonné. Pourtant, le troisième quart du XVIIIe siècle marque un sursaut dans la production delftoise qui commence à produire un grand nombre de figurines de toutes tailles. Parmi elles, se trouvent des fontaines de tables représentant des figures d’hommes ou de femmes assis sur des tonneaux ou des tertres, à l’instar de l’objet que nous étudions, produit par la manufacture De Klaauw entre 1763 et 1806. Nous avons vu dans quelle condition la production de la faïence* à Delft est devenue plus populaire. Nous allons désormais tenter de comprendre le contexte artistique qui entoure l’apparition de la fontaine que nous étudions. Cette production s’inscrit dans le contexte culturel de l’époque, mais aussi participe à une tradition millénaire.

II- ÉTUDE FONCTIONELLE ET MATÉRIELLE II.1. Origine et fonction II.1.1. Contexte au XVIIIe siècle et « culture de la table » De nouveaux thèmes voient le jour. Le XVIIIe siècle se passionne ainsi pour l’Antiquité suite à la découverte des ruines d’Herculanum et Pompéi, mais aussi pour la Nature, ce qui comprend l’homme en lui-même et sa psychologie. De même, l’exotisme est à la mode et les chinoiseries et turqueries se multiplient. Le style Rocaille émerge alors : c’est un style léger, raffiné, tourné vers le plaisir et la satisfaction des sens qui prône la fluidité et la fantaisie et se manifeste par des jeux de courbe et contre-courbes38, et d’asymétrie. Le but est d’imiter la nature, c’est pourquoi des éléments naturels, comme la coquille ou le coquillage, sont transformés en motifs décoratifs. Le style s’épanouit véritablement à partir de 1730 et se diffuse rapidement dans toute l’Europe grâce aux gravures des dessinateurs « ornemanistes ». Parallèlement, les arts de la table se développent au XVIIIe siècle, comme en témoignent les inventions de la salle à manger, du restaurant et du menu. La culture française domine l’Europe, et sert de modèle de référence, essentiellement dans les pays d’Europe centrale et du Nord, comme les Pays-Bas. Cela conduit à une unification des styles. Henri-Pierre Fourest, La Faïence de Delft, Fribourg, Office du livre, 1980, p. 121. Il s’agit de la « seconde cuisson de décor de faïence et porcelaine en petit feu à basse température » (Jean-Paul Van Lith, Céramique, dictionnaire encyclopédique, L’Amateur, 2000, p. 161.) 38 Enroulements, ondulations, renflements. 36 37

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Le festin devient une œuvre d’art 39 . Les buffets se transforment en compositions architecturales40. Le plaisir gustatif s’accompagne d’un ravissement visuel : cette association intime du goût et du regard est à l’origine des services assortis, des surtouts… L’importance de l’art visuel pendant les repas existait déjà au Moyen-Age avec les spectacles lors des banquets. Mais, au XVIIIe siècle, ils sont miniaturisés, et se posent au milieu de la table, sur la nappe41. Cet art de décorer les tables remonterait au XVe siècle et proviendrait d’Italie, plus précisément de Venise où arrivait le sucre de canne. De fait, en 1483, le cardinal Pietro Riario, neveu de Sixte IV, organise à Rome une somptueuse réception en l’honneur de son invitée, la princesse Eléonore d’Aragon. Sur la nappe, trônent des « personnages en sucre représentant les douze travaux d’Hercule en l’honneur du fiancé d’Eléonore, Hercule Ier d’Este »42. Au XVIe siècle, la mode se développe, et, au XVIIIe siècle, les figures en sucre sont remplacées par des surtouts en biscuit* de porcelaine*.

Fig. 12 : Isidore-Stanislas Helman, D'après Moreau le Jeune, Le Souper fin, eau forte, 1781, 27 x 22 cm, Département des Arts Graphiques du Musée du Louvre

II.1.2. Trompe l’œil Au XVIIIe siècle, avec l’accroissement de la concurrence, Delft doit s’adapter à une nouvelle clientèle et se lancer dans de nouvelles recherches plastiques. Les manufactures reprennent la tradition du trompe-l’œil au service de la table 43 et empruntent aux ateliers de porcelaine la statuaire décorative44. De nombreuses figurines animalières sont produites, inspirées de Chine – comme les couples de perroquets ou les pots en lait en forme de singe –

Fig. 13 : Terrine en forme de raisin, Delft, faïence polychrome, 11 x 19 x 15,4 cm, Gemeentemuseum, La Haye

La gastronomie française s’impose. Zeev Gourarier, Arts et manières de table en Occident, des origines à nos jours, G. Klopp, 1994, p. 151. 41 Zeev Gourarier, op. cit., p. 161. 42 Zeev Gourarier, op. cit., p. 162. 43 Déjà existante à la Renaissance. 44 Christine Lahaussois, Comment reconnaître une faïence de Delft, Paris, Rmn, 2006, p. 57. 39

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d’Europe, de bronzes italiens ou encore de gravures néerlandaises. Nous pouvons trouver des vaches, directement inspirées des animaux qui défilaient une fois par an dans les rues des villes des Pays-Bas, avec des cornes dorées et ornées de guirlandes de fleurs 45. Ce sont des œuvres typiquement rococo qui témoignent de la fantaisie des potiers delftois. On trouve également une multitude de petits personnages de la vie quotidienne, qui représentent tous les corps de métier « musiciens, bateleurs, marchands de la rue ou de la campagne. On trouve aussi de jeunes citadins et citadines en costume Louis XV traités surtout en petit feu*»46.

Fig. 14 : Deux sculptures de vaches, Delft, faïence polychrome, 10,2 x 15 x 6,8 cm, vers 1750 - 1775, Gemeentemuseum, La Haye

Fig. 15 : Pot à lait en forme de singe, Delft, faïence, H. 19,5 cm, vers 1760-1780, Rijksmuseum, Amsterdam

II.1.3. Fontaines de table Dans ce contexte artistique, Delft réalise entre autres des fontaines de table, comme c’est le cas de l’objet de notre étude. L’origine latine du mot – fontana – indique la fontaine comme la source d’un liquide : de l’eau, du vin, du thé, ou encore du parfum47. Il existe différentes sortes de fontaine. Henri Havard 48 en classifie quatre : les fontaines monumentales, les fontaines d’apparat, les fontaines de propreté, et les fontaines de ménage. Il est difficile d’attribuer l’une de ces catégories à la fontaine que nous étudions, car il s’agit à la fois d’un objet décoratif et domestique, néanmoins, il se rattacherait davantage aux fontaines de ménage. Si l’on suit la définition donnée par Blondel et Arminjon49, une fontaine de table est un « récipient couvert ou non, en métal ou en céramique ou matériaux variés, dont le corps, plus haut que large, posé sur un ou plusieurs pieds, est utilisé comme réservoir à boisson Cartel d’exposition au Gemeentemuseum, La Haye. Henri-Pierre Fourest, op. cit., p. 155. 47 Aurélia et Anne Lovreglio, Dictionnaire des mobiliers et objets d’art : du Moyen-Age au XXIe siècle, Dictionnaire Le Robert, 2006, p. 181. 48 Henry Havard, Dictionnaire de l’ameublement et de la décoration, depuis le XIII e siècle jusqu’à nos jours, Paris, Maison Quantin, 1894, tome 2 D-H, p.494 49 Nicole Blondel, Catherine Arminjon, Objets civils domestiques. Vocabulaire typologique, Monum, 2002, p. 166. 45 46

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chaude ou froide, et muni en sa partie inférieure d’un ou plusieurs petits robinets correspondant à des compartiments intérieurs (cette fontaine pouvait être disposée sur le dressoir50). La fontaine de table, souvent très ornée, a pu servir de décor de table du XIV e au XVIIe siècle ».

a). Fontaine de table avec un homme assis sur un piédestal, Delft, faïence polychrome, H. 56,5 cm, vers 1760-1775, Rijksmuseum, Amsterdam

b). Fontaine de table, Delft, Manufacture De Witte Ster, faïence polychrome, 34,6 x 18,3 x 17 cm, vers 1762-1774, Museum Arnhem

c). Statue, Homme sur un tonneau, Delft, d). Objet décoratif, Homme sur tonneau avec une Manufacture De Porceleyne Schotel, faïence bouteille à la main, Delft, faïence polychrome, 38 x polychrome, H. 41 cm, vers 1765-1775, 17,5 x 13,5 cm, vers 1760-1790, Rijksmuseum, Rijksmuseum, Amsterdam Amsterdam Fig. 16 : Fontaines de Delft

Ces fontaines (Fig. 16) servaient à priori à contenir de l’alcool : du vin, de la bière ou encore du gin51. Certaines sont réalistes, voire élégantes (modèles 1 et 2) – elles auraient d’ailleurs des pendants féminins auxquels elles auraient fait face de façon galante – et

DICTIONNAIRE LAROUSSE, Dressoir [en ligne] Disponible sur : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/dressoir/26793 [Consulté le 13/11/2017] « Meuble du Moyen Age à tablettes superposées, qui servait à exposer la vaisselle précieuse » 51 Le jenever est un alcool typiquement néerlandais. 50

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d’autres sont plus stylisées et humoristiques (modèles 3 et 4). Celle que nous étudions est encore plus grotesque. Il est très difficile de savoir quand et comment était utilisée la fontaine car il n’existe aucun écrit relatif à cela. Nous ignorons s’il s’agit d’un objet du quotidien, ou de fête. De même, nous ne pouvons savoir exactement si elle était posée au centre de la table à manger, à la fin du repas pour servir le digestif ou posée sur une console ou un buffet52, ni si elle se trouvait davantage dans les maisons privées ou les établissements publics… Toutefois, il nous semble plus probable que ce type d’objet appartenait à la classe moyenne, aux artisans, et non à la haute société, à cause de leur aspect grossier et caricatural. Cela est d’autant plus flagrant avec les personnages féminins qui montrent leur sein droit et relèvent un pan de leur robe (cf. Fig. 8 p. 18 et Fig. 21 c. p. 29). Selon Christine Lahaussois, ces fontaines pouvaient être installées dans des niches de buffet qui comprenaient différentes consoles pour accueillir des objets décoratifs. « Les buffets ainsi décorés accompagnaient des tables dressées à l’occasion de fêtes pour le plaisir des yeux »53.

Fig. 17 : Buffet

C’est au Friesmuseum de Leeuwarden que nous avons trouvé l’information la plus importante à ce sujet : à l’occasion de l’Exposition Universelle à Paris en 1878, un mobile transportable a été conçu afin de présenter la reconstitution de l’intérieur d’une maison d’Hindeloopen, une ville des Pays-Bas. Au XVIIe et XVIIIe siècle, cette ville était considérée comme une véritable plateforme commerciale car les marins qui y vivaient rapportaient des merveilles de leurs voyages et en décoraient leur maison. Ces intérieurs colorés sont rapidement devenus une spécificité néerlandaise. Dans la reconstitution qui est Karin Kievit et al., Meer dan Blauw/More Than Blue, Museum Prinsenhof Delft, 2015, p. 73 « […] intended to be placed on the sideboard » 53 Christine Lahaussois, Delft, faïence, Paris, Rmn, 2008, p. 178. 52

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visible au Friesmuseum, nous pouvons voir une fontaine similaire posée sur la table à manger.

Fig. 18 : Hindeloopen, Friesmuseum, Leeuwarden

II.2. L’artiste Willems et les Bobbejakken Cependant, le terme « fontaine de table » n’est pas systématiquement employé par les professionnels et les institutions, comme s’il était difficile de définir ce type d’objet. Certains antiquaires (Aronson, Rob Michiels, Christie’s) attribuent un no m spécifique au type de fontaine que nous analysons : Bobbejak. Selon Christine Lahaussois 54 , l’objet qui aurait inspiré la production des Bobbejakken est une sculpture en terre cuite signée Willems et datée 1744 qui représente un bouffon, hilare, tenant son ventre à deux mains et chevauchant un dauphin.

Fig. 19 : Fontaine de Willems

La représentation du dauphin sur l’œuvre de Willems interpelle. Nous avons cherché à comprendre sa signification et le lien qu’elle pouvait avoir avec la fontaine de notre étude. Les dimensions symboliques du dauphin sont multiples 55 , mais c’est en tant qu’attribut dionysiaque que nous comprenons pourquoi il a été représenté. Venant d'Orient, Dionysos est le Dieu du vin mais plus largement le Dieu de toute fécondité animale, végétale, humaine 56 . De plus, Dionysos est le dieu du théâtre. Or dans l’imaginaire populaire, le dauphin est réputé pour avoir un comportement amical et la courbure de sa gueule ressemble Christine Lahaussois, op. cit., p. 174. Il est entre autres considéré comme le roi des animaux aquatiques, et peut être une représentation du Christ sauveur… (Jacques Millet, L’animal dans l’art, Symbolique et iconographie, Michel Dansel, 1984, p. 85). 56 Voir annexe n°3 p. 251 pour plus d’informations sur le lien entre Dionysos et le dauphin. 54 55

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à un éternel sourire, qui n’est pas sans nous évoquer celui des clowns 57 mais aussi celui de l’homme en état d’ébriété. Cette idée pourrait expliquer pourquoi il porte un bouffon sur son dos. À l’instar du reste de la production des Bobbejakken, la fontaine du Musée Auguste Grasset ne présente pas de dauphin : le personnage est assis sur un tertre. Néanmoins, il subsiste un élément qui rappelle l’animal aquatique et nous permet ainsi d’établir un lien entre le Bobbejak et le dieu Dionysos : l’ornement autour de l’emplacement du robinet. Nous pensons qu’il s’agit d’une représentation stylisée « d’eaux jaillissantes ». Cet élément est présent sur beaucoup de Fig. 20 : Ornement autour de Bobbejakken. Il évoque évidemment le modèle de Willems l'emplacement du robinet avec le dauphin, mais souligne également la fonction de la fontaine qui consiste à verser un liquide. Si les Bobbejakken sont facilement reconnaissables et ont des caractéristiques communes (position et physionomie du personnage, ornement du robinet), ils présentent chacun des nuances et varient de l’un à l’autre : les motifs et les couleurs des vêtements, mais aussi la forme du chapeau sont variables. Le Bobbejak du Rijksmuseum (Fig. 21 a) ressemble en tous points à celui du Musée Grasset, à la différence que son décor n’est pas bichrome mais inclue des touches de jaune (boutons dorés de la veste) et de brun (souliers, cheveux et tricorne).

a). Pichet en forme d’homme assis, Delft, faïence polychrome, H. 36 cm × L. 16 cm, vers 1750-1775, Rijksmuseum, Amsterdam

b). Fontaine, Delft, faïence en bleu et blanc, H. 33,5 cm, vers 1750-1799, Gemeentemuseum, La Haye

Xosé Ramón Mariño Ferro, Symboles animaux : un dictionnaire des représentations et croyances en Occident, Desclée de Brouwer, 1996, p. 122. 57

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c). Bobbejak, Delft, faïence en bleu et blanc, H. 30,5 d). Bobbejak, Delft, faïence polychrome, H. 33 cm, cm, XVIIIe siècle XVIIIe siècle 58 Fig. 21 : Bobbejakken

II.3 Tradition et autres formes Au XVIIIe siècle, la création des Bobbejakken n’est que l’aboutissement d’une production millénaire. De même, d’autres formes similaires contemporaines apparaissent.

II.3.1. Mythologie : Dionysos et Silène Les céramiques anthropomorphes liées à la divinité du vin ne sont pas une invention de Delft, ni du XVIIIe siècle. La production de Bobbejak s’inscrit dans une longue tradition qui remonte à l’Antiquité. Cependant il est possible que la figure de Dionysos connaisse un regain d’intérêt au XVIIIe siècle car une véritable passion pour l’Antiquité voit le jour.

a). Cruche anthropomorphe à panse en forme de tête de Bacchus, Grande Grèce, Campanie, terre cuite à vernis noir, H. 12,2 cm, IVe-IIIe siècle av. J-C.

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b). Pichet en forme de Dionysos, Culture Grecque ou Romaine, terre cuite, H. 14.9 cm, Ier siècle av. J-C, The Metropolitan Museum of Art, New-York

Voir d’autres exemples de Bobbejakken en annexe n°2 p. 250.

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c). Bouteille avec un motif de double tête, Culture Romaine, Syrie, verre moulé et soufflé, H. 6.8 cm, IIe siècle, The Metropolitan Museum of Art, New-York

d). Fontaine de table avec Bacchus, Urbino, Atelier des Patanazzi, faïence à décor polychrome, H. 33 cm, fin du XVIe siècle.

e). Groupe figuratif, Urbino, Manufacture Fontana, f). Christoph Gandtner, Le Glouton, faïence faïence et émaux, 29,5 x 22 x 19 cm, vers 1560polychrome, H. 24,8 cm, vers 1580-90 1575, Victoria and Albert Museum, Londres Kunsthistorisches Museum, Vienne Fig. 22 : Céramiques représentant Dionysos

L’objet (Fig. 22 e) est particulièrement intéressant car « il représente un Bacchus59 ivre, reposant sur un tonneau de vin » 60. Tout comme le Bobbejak, le personnage a un trou au niveau de la tête qui permet de remplir la fontaine de liquide. Toutefois, le contenu ne s’échappe pas uniquement du trou dans le tonneau, mais aussi du sexe de Bacchus. « Il est à la fois ivre et en train de se soulager sur lui-même. De tels objets avaient évidemment pour but d’amuser les invités lors de diners »61. Le Glouton (Fig. 22 f) est quant à lui un pichet. La tête du personnage fait office de bouchon et peut se retirer afin de remplir le contenant / verser le contenu. L’objet faisait partie Bacchus est l’équivalent de Dionysos dans la civilisation romaine. VICTORIA AND ALBERT MUSEUM, Search the Collections [en ligne] Disponible sur : http://collections.vam.ac.uk/item/O17434/figure-group-fontana-workshop/ [Consulté le 25/11/2017] 61 Loc. cit. « He is literary pissed and pissing at the same time. Objects such as this were obviously intended to provide some entertainment for guests at dinner parties. » 59 60

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d’un ensemble de figures qui appartenaient à la famille des Habsbourg, plus précisément à Ferdinand II de Tyrol62 (1529-1595) et sa seconde épouse Anne-Catherine de Mantoue (15661621). Il est donc issu d’une production royale. Or, à l’instar de nombreuses Cours à la Renaissance, Ferdinand II de Tyrol vouait un culte à Dionysos et organisait dans son château d’Ambras (à Innsbruck) des festins visant à reproduire les Bacchanales63. De fait, le personnage du Glouton est identifiable à Dionysos / Bacchus : il arbore une couronne et une ceinture de feuilles de vigne et de grappes de raisin. Il est assis à califourchon sur un tonneau – posture que l’on retrouve chez certaines fontaines de table de Delft. Une assiette pleine de nourriture est posée devant lui : parmi les aliments, une tête de cochon est identifiable. Enfin, nous remarquons que le sexe du personnage est en érection. Cette importance accordée au sexe, et la place qu’on lui accorde dans la fonction de la fontaine (cf. Fig. 22 e), ne sont pas sans évoquer la célèbre fontaine du Manneken-Pis ou encore le robinet qui orne les Bobbejakken et qui se situe entre les jambes du personnage64. Bacchus (ou Dionysos) est certes le dieu de la fertilité, mais nous pouvons également penser à un autre personnage de la mythologie grecque, à savoir Silène. Silène est un satyre, soit une créature mi-homme mi-animal représentée avec des oreilles et une queue de cheval et un phallus en érection. A partir du Ve siècle, il devient le précepteur de Dionysos. Dès lors, les satyres sont liés au culte dionysiaque : pendant les fêtes dionysiaques à Athènes, on jouait trois tragédies suivies d’un drame satyrique dans lequel les membres du chœur étaient habillés en satyres. Silène est souvent représenté en vieillard jovial mais très laid, avec un nez épaté, des traits lourds et un ventre bedonnant. Il est monté sur un âne sur lequel il tient à peine car il a la réputation de boire à outrance. Cette physionomie pourrait correspondre à la bonhommie du personnage de la fontaine.

Fig. 23 : Peintre du groupe E (attribué au), Amphore à figures noires, Dionysos et satyres, vers 540 av. J.-C., H. 43 cm, Musée du Louvre, Paris Fils cadet de l’empereur germanique, Ferdinand Ier. Peter Stupples, Art and Food, Cambridge Scholars Publishing, 2014, p. 34. 64 Celui sur le Bobbejak que nous étudions a disparu. 62 63

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Fig. 24 : Silène ivre accompagné par deux jeunes gens, stamnos étrusque, 34,5 x 27,5 x 24,3 cm, vers 300 av. J.-C., Musée du Louvre, Paris

Fig. 25 : Coupe Le Cortège de Silène, Urbino, Atelier des Marches, faïence, vers 1540, Petit Palais, Paris

II.3.2. Formes contemporaines : Toby Jug et Pot Jacquot À la même époque, deux autres types de céramiques anthropomorphes voient le jour : les Toby Jugs anglais et les Pots Jacquots français. Ils partagent avec les Bobbejakken des caractéristiques similaires, notamment, ils incluent tous les trois le même prénom populaire, sous une forme diminutive : Toby, Jacquot et Bob. L’expression française « faire le Jacques »65, qui signifie « faire l’imbécile », pourrait expliquer pourquoi les personnages de ces céramiques ont des traits caricaturaux. Toby Jug Vers les années 1770, les Toby Jugs commencent à être créés en Angleterre. Ce sont des pichets anthropomorphes qui représentent un homme vieux et gros, assis sur une chaise, en train de boire une bière moussante ou de fumer une pipe. Il porte un tricorne dont le sommet est détachable et permet de verser dans le pichet n’importe quel liquide que l’on souhaite qu’il contienne. Ce personnage s’appelle Toby Fillpot. Les historiens ont des opinions variées en ce qui concerne l’origine de ce personnage : certains pensent qu’il découle de la pièce de théâtre de Shakespeare Twelfth Night,

Fig. 26 : Ralph Wood le Jeune,

d’autres y voient une corrélation avec le livre contemporain My Toby Jug, Burslem, faïence, H. uncle Toby de Laurence Sterne. Une dernière hypothèse semble 25,7 cm, 1785, Victoria and Albert Museum, Londres

Cette expression provient très probablement de l’anglais, plus précisément de la pièce Much ado for nothing de Shakespeare, publié en 1600 (Acte I, scène 1 « […] do you play the flouting Jack »). 65

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plus probable : l’origine de Toby serait une gravure de Robert Dighton (1752-1812) qui est apparue vers 1760 dans la boutique de Carrington & Bowles 66 et a été vendue au potier Ralph Wood. Elle montre « un vieil homme enjoué, à la face vermeille, jovial, affalé sur une table dans un jardin, avec une pipe en argile* dans une main et une énorme pinte dans l’autre »67 et est accompagnée de quelques vers, avec le titre « Toby Fillpot ».

Fig. 27 : Gravure de Dighton

Le véritable titre de ces vers est en fait « the Brown Jug » et le poème provient de l’ouvrage du Révérant Francis Fawkes68, Original Poems and Translations, qu’il a publié en 1761. Il y a une corrélation entre l’aspect populaire des Toby Jugs et l’esprit de la chanson « de buverie »69 : tous deux livrent une satire de la bourgeoisie en dénonçant ses vices et mesquineries70. De fait, ces pichets étaient destinés aux classes sophistiquées des villes qui, nostalgiques d’une « Merrye Englande » disparue, devaient accorder beaucoup de charme à ces objets71. En ce qui concerne le personnage-même qui est représenté sur la gravure de Dighton, nous pouvons constater que le Toby en diffère complètement : « il a des cheveux ternes, en filasses, et des traits épais, grossiers, habituellement austères, et arbore souvent une expression confuse, presque abrutie »72. Certains y voient la caricature d’une personne réelle contemporaine, en l’occurrence, soit Harry Elwes, soit Paul Parnell, tous deux originaires du Yorkshire. Par la suite, le personnage des Toby Jugs va évoluer et se diversifier afin de représenter différentes personnes ou corps de métier. 69 St Paul’s Churchyard, Londres. John Bedford, Toby Jugs, Littlehampton Book Services, 1968, p. 10 : « a cheerful, ruddy, jovial old fellow, sprawling at a table in a garden, with a clay pipe in one hand and a huge jug in the other. » 68 Francis Fawkes est un célèbre traducteur des auteurs classiques et il semblerait qu’il ait puisé l’inspiration de son poème chez le médecin humaniste Geronimo Amalteo (Oderzo, Treviso, 1507 – 1574). 69 Voir annexe n° 4 p. 252. 70 Edmund De Waal, Claudia Clare, The Pot book, Phaidon, 2011, p. 295. 71 Robin Hildyard, English pottery, 1620-1840, Londres, V&A publications, 2005, p. 161. 72 John Bedford, op. cit., p. 17 « he has lank stringy hair and heavy, coarse, usually unsmiling features, and often wears a dazed, almost besotted expression. » 66 67

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Pot Jacquot Au XVIIIe siècle, puis au XIXe, d’autres centres faïenciers imitent les fontaines delftoises : d’abord Bruxelles, puis le Nord de la France (Lille, Desvres, Stomer, Bailleul) et l’Est de la France (Saint-Clément, Lunéville) où ils prennent alors le nom de « Bacchus ». Un Pot Jacquot représente un homme et un Pot Jacqueline, une femme. Tout comme les Toby Jugs, ce sont des pichets anthropomorphes, soient « […] un pichet en bois, en verre ou en céramique, empruntant une forme humaine (homme ou femme) en tête ou en buste, debout ou assis, la tête servant de col et de bec verseur, le bonnet ou le chapeau faisant parfois fonction de couvercle »73. Ils servaient bien évidemment à servir du vin ou de la bière, mais Moser leur attribue aussi la possible fonction de faire office de publicité dans un bar, afin d’inciter les clients à consommer74.

Fig. 28 : Pot Jacquot, Lille, faïence décor de grand feu, 33,3 x 14 x 19,5 cm, fin XVIIIe siècle, Musée des Beaux-Arts, Lille

Fig. 29 : Pot Jacqueline, Lille, faïence décor de grand feu, 33 x 15 x 18,5 cm, fin XVIIIe siècle, Musée des Beaux-Arts, Lille

C’est une production populaire qui était utilisée au quotidien75, et, à l’instar des Toby Jugs, leurs représentations variées tendent à illustrer une multitude de types de personnes. Cette profusion de modèles ainsi que leur unicité peuvent s’expliquer de la manière suivante : les particuliers pouvaient commander à leur faïencier un exemplaire personnalisé76. Peut-être est-ce là l’une des principales différences entre les Bobbejakken et les Pots Jacquots et Toby Jugs : ces derniers peuvent être rattachés à des personnes réelles (ou du moins à des professions), or les Bobbejakken ne font partie d’aucune réalité.

Nicole Blondel, Catherine Arminjon, Objets civils domestiques. Vocabulaire typologique, Monum, 2002, p. 160. 74 Yvonne Moser, « "Jacqueline et Jacquot". Pots anthropomorphes en faïence », Trouvailles, n° 94, Mars 1992, p. 36. 75 Jean Rosen, Jacquot Jacqueline et Cie, Pichets anthropomorphes en céramique, cat. expo. Nevers, Musée de la Faïence et des Beaux-Arts, (3 mai - 18 septembre 2016), Nevers, Musée de la Faïence et des Beaux-Arts, 2016, p. 9. 76 Yvonne Moser, art. cit., p. 36. 73

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La représentation des Pots Jacquots est certes amusante, mais elle reste plus « sage » que celle des Bobbejakken77. Leur origine exacte est inconnue mais se rattache à la légende de Jacqueline (ou Jacoba) de Bavière (1401-1436), comtesse de Hainaut, de Hollande, de Frise et de Zélande, qui aurait fabriqué des cruches similaires au château de Teylingen à Voorhout. À la fin du XVIIe siècle, des pichets en grès ont été retrouvés dans les douves et ont été nommés « Jacobakannetjes » ce qui signifie « petits pichets de Jacqueline »78 . Pourtant, aux Pays-Bas, les Jacobakan sont de pichets ordinaires en grès. Fig. 30 : Localisation de Voorhout

Fig. 31 : Jacobakannetje, grès de Sieburg, H. 18,5 cm, 1325-1350, trouvée à Rotterdam, Coll. Part.

Le premier objet qui atteste de l’utilisation du nom « Jacquot/Jacqueline » est une bouteille provenant de Nevers79 sur laquelle est représentée une fête de village80. Nous pouvons ainsi dire que la production des Bobbejakken est liée à celle des Toby Jugs et des Pots Jacquots : toutes ces pièces de céramique servent le même propos, à savoir la critique de la société. Elles empruntent parfois des chemins différents : les Toby Jugs et les Pots Jacquots représenteraient différentes classes sociales (soldats, paysans…), tandis que les Bobbejakken, de facture plus libre, grossissent certains travers bourgeois.

Janine Bonifas, Faïences du Nord de la France, Paris, Rmn, 1994, p. 145. Jean Rosen, art. cit., p. 8. 79 Voir annexe n°5 p. 253. 80 Jean Rosen, art. cit., p. 10. 77 78

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Chapitre 2 : ANALYSE TECHNOLOGIQUE ET ICONOGRAPHIQUE Il nous faut à présent porter notre attention sur les différentes étapes de fabrication qui ont été nécessaires pour réaliser le Bobbejak. Nous tenterons ensuite d’analyser le décor à travers différentes hypothèses en ce qui concerne ses influences.

I- PROCÉDÉS DE FABRICATION En observant un tesson de la fontaine, nous pouvons faire plusieurs constatations. D’une part, la pâte est de couleur ivoire, et a une granulométrie fine. D’autre part, l’émail est très brillant, dur, et est solidement lié à la pâte. Compte tenu de ces observations, nous sommes en droit de penser que la fontaine provient de Delft car elle répond à certaines de ses caractéristiques, à savoir : elle a un poids léger, un émail très brillant et peu épais, elle affiche de nombreuses imperfections et la terre est de couleur beige clair avec un grain assez serré81. La fabrication d’une faïence* à Delft se faisait de la manière suivante :

I.1. Préparation des terres Selon Gerrit Paape82, Delft mélangeait trois terres pour ses productions : la terre noire ou Rhijnlandsche provenant du pays du Rhin, celle de Tournai en Flandre 83 et une autre trouvée dans les environs de Delft-même. Ces terres ont une faible teneur en fer, ce qui confère à la pâte sa teinte claire, proche de celles des porcelaines84. L’argile* était ensuite méticuleusement préparée. Elle était d’abord lavée selon le principe de lévigation* en passant dans un système de différents bassins. Cette étape explique la finesse de la terre. Puis venait l’étape du marchage qui consistait à fouler la terre afin d’éviter les bulles d’air. Enfin, la terre était divisée en plusieurs tas et pétrie.

Henri-Pierre Fourest, La Faïence de Delft, Fribourg, Office du livre, 1980, p.17 et Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, Les Faïences de Delft, Paris, Ed. Jacques Grancher, 1980, p. 32. 82 Geerit Paape, De Plaeelbaeker of Delftsch Dardenavewerkmaker, Dordrecht, 1974. 83 La terre de Tournai venait en fait de Bruyelles, petit village situé aux environs (Henri-Pierre Fourest, La Faïence de Delft, Fribourg, Office du livre, 1980, p. 17). 84 Christine Lahaussois, Comment reconnaître une faïence de Delft, Paris, RMN, 2006, p. 26. 81

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I.2. Moulage85 Compte tenu de la complexité formelle de l’objet et de l’irrégularité de l’épaisseur de la pâte, nous pouvons en conclure que la fontaine a été fabriquée selon le procédé du moulage par estampage. Cela implique l’utilisation d’un moule à pièces. Le procédé était couteux86. Pour cela, il faut dans un premier temps fabriquer un modèle en argile* et le fragmenter en autant d'éléments qu'il est nécessaire pour pouvoir être reproduit. Selon la difficulté de la sculpture, il y aura plus ou moins de morceaux et donc plus ou moins de moules. L'ensemble des moules s'appelle « la ronde des moules ». Puis il faut appliquer à l'intérieur du moule une couche de pâte d'épaisseur uniforme - appelée « croûte » - qui épouse aussi parfaitement que possible toutes les anfractuosités du moule. Une fois que toutes les parties ont été moulées, et qu’elles sont à l’état « vert »*, soit légèrement humide, elles sont assemblées par un joint de barbotine*. Après cuisson, les coutures* qui indiqueraient les points de liaison entre les différentes parties de l’objet ne sont pas visibles sur une faïence* car la céramique n’est pas assez vitrifiée et donc « sensible ». Néanmoins, nous pouvons émettre des hypothèses quant au morcellement de la fontaine. En observant les deux pieds du personnage, ils nous semblent assez similaires c’est pourquoi il est possible qu’ils proviennent du même moule. Le tricorne n’a pas une épaisseur égale et il semble trop compliqué à mouler : il s’agit sans doute d’un morceau de terre qui a été aplati à la main, puis réajusté. De même les manches de la veste ont probablement été pincées entre les doigts pour obtenir l’aspect affiné qu’elles ont. Enfin, l’anse résulte de l’association de deux colombins*.

I.3. Première cuisson La pièce est ensuite biscuitée*, c’est-à-dire qu’elle est cuite une première fois à une température proche de 800°C87. La cuisson assure le maintien de la forme pour permettre la manipulation de l’objet. Elle est faite dans un four carré aux murs épais. Le bois était le combustible utilisé, c’est pourquoi la cuisson était irrégulière.

I.4. Emaillage La fontaine est une faïence*, autrement dit la pâte est recouverte par un émail stannifère* c’est-à-dire une couche de revêtement vitrifiée qui contient de l’oxyde d’étain qui la rend blanche, opaque et imperméable. Cela permet de dissimuler les impuretés ou la coloration de l'argile*, d’offrir une surface de décor et d’assurer l'étanchéité de la pièce.

Henri-Pierre. Fourest, op. cit., p. 155 « En raison de la finesse de sa pâte, le potier de Delft a dû assez tôt chercher à créer des œuvres plastiques grâce à des moules dont la variété fut grande. » 86 Christine Lahaussois, Delft, faïence, Paris, Rmn, 2008, p. 174 87 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 50. 85

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Un émail stannifère* naît du mélange d’une fritte* et de la calcine*. Pour obtenir une fritte, il faut faire fondre ensemble de la silice et des fondants*88. Un verre est alors obtenu. Cette opération s’appelle le frittage*. La calcine*, quant à elle, résulte de la fusion du plomb et de l’étain : à la cuisson, une mousse blanche apparaît à la surface du mélange. Une partie est dissoute, tandis qu’une autre reste présente, ce qui opacifie la couche de revêtement89. L’artisan qui réalise l’émaillage est le gever ou geever (donneur d’émail). Il plonge l’objet dans un bain d’émail semi liquide appelé witte ou witt ce qui signifie « blanc »90, qui se dépose en couche uniforme. La pâte absorbe rapidement l’émail qui se retrouve alors à l’état pulvérulent et est donc extrêmement fragile : le moindre frottement est susceptible de l’enlever. Nous pouvons ainsi savoir où l’émailleur tenait l’objet en l’immergeant grâce aux marques de doigt qu’il a laissé sous le tertre, mais aussi sur le bouchon.

Fig. 32 : Traces de doigt dans l'émail

La solidité et la brillance de l’émail, ainsi que la vivacité des couleurs du décor après cuisson viendraient du fait que l’émail contient plus de sel et de sable que d’ordinaire91. Après cuisson, la terre et l’émail sont très solidaires : l’émail ne s’écaille pas.

I.5. Décor Cette opération ne permet aucun repentir car le peintre doit appliquer le décor sur l’émail cru et la terre, encore poreuse, absorbe les oxydes colorants. Ce type de décor s’appelle décor au « grand feu »*. Souvent, les peintres de Delft utilisent le poncis* pour réaliser leur décor, ce qui leur assure une certaine sécurité. Or, dans le cas du Bobbejak, le trait est extrêmement fluide, aléatoire, voire naïf. Le décor a plutôt dû être effectué à main levée. Nous pouvons d’ailleurs constater les reprises de décor : là où la couleur est plus intense, le peintre a rechargé son pinceau.

Composés du plomb, de la soude, de la potasse ou du borax. Entretien avec M. Peiffer, le 26/10/2016. 90 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 32. 91 Christine Lahaussois, Comment reconnaître une faïence de Delft, Paris, RMN, 2006, p. 26. 88 89

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Fig. 33 : Variations de teintes dans le décor

Seule la couleur bleue est présente. Le peintre a donc utilisé de l’oxyde de cobalt. Selon Christine Lahaussois, au XVIIIe siècle, il n’existe pas un bleu à Delft, mais un éventail de nuances92. À cette époque notamment, la couleur devient plus soutenue et l’émail luimême se charge en reflets bleutés. Ces constatations correspondent à la fontaine. De plus, de nombreuses taches de cobalt sont remarquables93, ce qui nous suggère que l’objet n’est pas une pièce d’une qualité irréprochable.

Fig. 34 : Taches de cobalt

D’ordinaire, les peintres soulignent le décor par le trek* soit un trait de couleur noire, obtenue à partir de l’oxyde de manganèse. Cela permet de dessiner les contours et ainsi de mieux faire ressortir la couleur bleue 94 . Cependant, la fontaine ne présente pas cette particularité delftoise.

I.6. Seconde cuisson La cuisson est en atmosphère oxydante* ce qui permet aux couleurs de garder leur intensité. Le décor pénètre dans l’émail* qui se vitrifie, devient lisse, imperméable et brillant. C’est lors de cette cuisson finale que les défauts de fabrication sont révélés. Ils sont nombreux sur la fontaine95. À l’aide d’une brosse, les artisans de Delft ont l’habitude d’appliquer une seconde glaçure*, appelée kwaart*. Il s’agit d’une solution plombifère, qui, à la cuisson (900°C), forme un verre translucide. Le résultat est proche de la copperta* des majoliques* italiennes Christine Lahaussois, op. cit., p. 30. Cf. Constat d’état, p. 59. 94 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 47. 95 Cf. Constat d’état, p. 57 à 59. 92 93

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et a pour but d’apporter davantage de brillance à la pièce, dans un perpétuel souci de se rapprocher des porcelaines* chinoises. Selon Boyazoglu, le kwaart serait composé de « trente-six livres de mastic, 42 livres de litharge d’or (goudgleis), 4 livres de potasse et 7 livres de sel »96. La très grande brillance du Bobbejak témoigne de la présence du kwaart. Cependant, en observant la tranche de l’un des tessons, il ne nous est pas permis de constater cette deuxième glaçure*. De fait, elle est si intimement « liée » à l’émail stannifère qu’elle n’est pas perspeptible à l’œil nu et peut uniquempent être vue avec des appareils scientifiques adaptés.

II- ANALYSE DU DÉCOR ET SES INFLUENCES Les pistes d’interprétation de l’œuvre sont nombreuses. Au cours de nos recherches, nous avons pu distinguer deux grandes influences artistiques qui ont pu jouer un rôle dans l’élaboration du Bobbejak : l’une d’origine asiatique, et l’autre d’origine européenne.

II.1. Influences asiatiques La physionomie et la posture du personnage de la fontaine, ainsi que son vêtement et sa coiffure pourraient avoir puiser leur source dans l’art et les traditions asiatiques.

II.1.1. Céramique chinoise Nous savons que Delft s’est largement inspiré de la porcelaine* asiatique pour sa production. Au XVIIIe siècle, l’Asie est à la mode. L’Europe souhaitait imiter la Chine qui impressionnait par « la splendeur, l’excellence politique et la bonne organisation économique » 97 . La littérature et la presse participent à alimenter cet engouement. Le rôle des Jésuites au XVIIe et XVIIIe siècle est alors non négligeable car ils permettent de constituer un inventaire encyclopédique sur cet Orient fantasmé. La mode de la « pseudo-Chine » voit le jour soit « la publication et le commerce de livres dans le goût chinois » 98 avec des gravures, et des estampes. Ces ouvrages illustrés - Nieuhof99, Kircher100 et Du Halde101 sont extrêmement diffusés - ont fourni des exemples aux artistes de l’époque.

Fig. 35 : Ouvrage de Kircher

Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 47. Brigitte D'Hainaut-Zveny, Jacques Marx, Formes et figures du goût chinois dans les anciens Pays-Bas, Bruxelles, Ed. de l’Université de Bruxelles, 2009, p. 57. 98 Brigitte D'Hainaut-Zveny, Jacques Marx, ibidem, p. 145. 99 Johan Nieuhof, L'Ambassade de la Compagnie orientale des Provinces Unies vers l'Empereur de la Chine ou du Grand Cam de Tartarie, Leyde, J. de Meurs, 1665. 100 Athanasius Kircher, La Chine illustrée, Amsterdam, Jean Jeansson, 1670. 101 Jean-Baptiste Du Halde, Description géographique, historique, chronologique, politique et physique de l'Empire de la Chine et de la Tartarie chinoise, Paris, Le Mercier, 1735. 96 97

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Cependant les symboles asiatiques perçus par les Occidentaux n’étaient pas pour autant toujours compris, et ils se les ont appropriés en changeant leur signification. Il est ainsi possible que les faïenciers aient repris et transformé l’iconographie du magot oriental pour créer le personnage au ventre proéminent de la fontaine. En effet, au XVIIIe siècle, il était courant de trouver des « magots de Chine » dans les intérieurs élégants en Europe. Selon le Larousse, le terme pourrait dériver de l’hébreu « Magog » (Apocalypse, XX, 8) qui désigne les peuples orientaux, les barbares. Le dictionnaire lui attribue trois sens : un magot désigne un grand singe sans queue appelé aussi singe de Barbarie102 sans doute par esprit de dérision de son sens premier ; un homme très laid ; et enfin une figurine trapue, souriante et grotesque, en porcelaine*, jade, etc. originaire de Chine ou du Japon et que les Occidentaux ont imité.

Fig. 36 : Boucher, Le Déjeuner, huile sur toile, 81,5 x 61,5 cm, 1739, Musée du Louvre, Paris

Fig. 37 : Boucher, Portrait présumé de Madame Boucher, huile sur toile, Frick Collection, New York

En l’occurrence, le magot qui aurait servi de source d’inspiration serait un poussah. Le mot vient du sanskrit « Bodhisattva » qui « désigne l’image ou la figurine représentant une divinité »103. Par dérivation métonymique, il a donné « Putisato »104 en Chinois, puis « Pusa ». Un poussah est une figurine chinoise qui incarne le contentement et la sensualité, et est décrite comme « Obèse, débraillé […] sa figure, aux yeux mi-clos, rayonne sous un rictus éternel »105. Le terme « poussah » est ainsi passé dans le langage courant et désigne désormais une personne dont l’embonpoint est si important, qu’elle en est gênée au quotidien106.

Région de l’Afrique du Nord. Situ Shuang, Le Magot de Chine ou trésor du symbolisme chinois, Librairie You Feng, 2001, p. 240. 104 Loc. cit. : « de "Pu" (…) le « "figuier des pagodes" soit l’arbre sous lequel le Bouddha aurait eu sa dernière illumination ; "Puti" est la transcription du sanskrit "bodhi", "éveil" ou "illumination" ». 105 Jan Boyazoglu, Louis de Neuville, op. cit., p. 79. 106 Eugène Muller, Curiosités historiques et littéraires, [en ligne] Sur books.google.fr, [Consulté le 23/06/2017]. 102 103

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Les avis divergent en ce qui concerne l’interprétation de ce personnage : certains y voit « le moine au sac de toile » ou Budai heshang qui est un moine qui aurait réellement vécu au Xe siècle dans l’actuelle province du Zhejiang. D’autres, pensent qu’il est question de « Mile ». Ce mot chinois signifie « Maitreya » en sanskrit, or le Maitreya désigne le Bouddhisme du Grand Véhicule, autrement dit après la mort du Bouddha historique. Il s’agit alors du « bouddha du futur ». De fait, ces deux personnages – Budai heshang et Mile – sont liés et il est peu important de savoir lequel a inspiré l’autre. Ils possèdent tous les deux un sac appelé qimu, ce qui signifie « mère des souffles » car il contiendrait le souffle primordial de la vie, soit la semence de tous les mondes passés107. De plus, ils sont tous les deux décrits comme torse nu, obèses, hilares, et entourés d’enfants qui leur grimpent dessus et jouent avec eux. Delft s’est réapproprié cette iconographie et l’a transformé en y ajoutant des éléments occidentaux. Désormais, Budai ou Mile, « fume une pipe ou tient une tasse et une soucoupe et parfois même il porte un large chapeau »108.

Fig. 38 : Budai riant, Chine, porcelaine blanc de Chine, H. 13,6 cm, vers 1640-1680

Fig. 39 : Budai Heshang, Delft, faïence, H. 12,9 cm, vers 1700-1725

Nous voyons bien des points communs avec le personnage de la fontaine et l’exemple ci-dessus : sa corpulence, son hilarité…

II.1.2. Coiffure et vêtement La tresse Le personnage du Bobbejak est coiffé d’une longue tresse qui forme une anse. L’origine de cette coiffure est probablement chinoise, et daterait du XVIIe siècle, ce qui renforce notre hypothèse sur les liens existants entre l’Asie et la fontaine. À cette époque, l’Empire Ming est agité par de nombreuses révoltes. Pour y mettre fin, la dynastie demande

Fig. 40 : Tresse du Bobbejak du Musée Auguste Grasset

Yves Bonnefoy, Wendy Doninger, Asian Mythologies, University of Chicago Press, 1993, p. 132. Aronson, Dutch Delftware, Facing East: oriental sources for Dutch Delftware chinoiserie figures, 2010, p. 7. 107 108

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l’aide des militaires Mongols : les Jurchen ou Mandchous. Ces-derniers s’emparent du pouvoir et chassent les Ming109. La tradition chinoise voulait que l’on se laisse pousser les cheveux, en respect pour ses ancêtres. En signe de soumission, le nouvel empereur ordonne aux Chinois Han de se raser le front et les côtés de la tête et de tresser une « queue » dans leur dos 110 . Ceux qui refusaient étaient coupables de trahison. Au fil des siècles, cette coiffure a fait partie intégrante de l’héritage culturel chinois. Il est possible que la tresse du Bobbejak soit directement influencée de la « queue » chinoise, et renvoie ainsi aux origines de la céramique hollandaise en bleu et blanc. Par ailleurs, la « queue » devient à la mode au XVIIIe siècle en Europe 111 , probablement en imitation des soldats et marins anglais.

Fig. 41 : Thomas Allom, Itinerant Barber, gravure, 12,4 x 18,7 cm (dans "China, in a series of vieus, displaying the scenery, architecture, and social habits of that ancient empire" du Rev. G. N. Wright, Fisher, Son & Co. London, 1843)

Le chintz*112 Nous avons tenté d’analyser les motifs fleuris ou végétaux sur les vêtements du personnage de la fontaine. Les motifs de la veste sont différents de ceux du pantalon. Une fois de plus, nous trouvons une explication possible en lien avec la ville d’Hindeloopen.

Fig. 42 : Motifs du pantalon

Fig. 43 : Motifs de la veste

Ils donnent naissance à la dynastie Qing (1644-1911). Elle est la dernière dynastie impériale de Chine. Wu Hung, Zooming in : Histories of Photography in China, Reaktion Books, 2016, p. 39. 111 José Blanco et al., , Clothing and Fashion : American Fashion from Head to Toe, ABC-CLIO, 2015, p. 268. 112 Le mot viendrait de l’indien « chint » qui signifie vaporiser ou saupoudrer (Rosemary Crill, Ian Thomas, Chintz, Indian textiles for the West, Londres, The Victoria and Albert museum, 2008, p. 9). 109 110

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Dès le XVIIe siècle, la Compagnie Néerlandaise des Indes Orientales échange des épices obtenus en Indonésie contre du chintz* indien, soit du coton brillant, peint à la main avec des colorants naturels et représentant de très variés motifs floraux. Le chintz* est considéré comme « l’or » de la VOC. Les premiers à avoir rapporté chez eux ces tissus pour les offrir à leur épouse sont les marins en provenance de la ville d’Hindeloopen. Les habitants se sont rapidement appropriés ce tissu exotique pour en faire un symbole de l’identité frisonne113. Au XVIIIe siècle, avec le style rocaille, les artistes puisent en partie leur inspiration dans les arts orientaux ce qui peut expliquer la diffusion et le succès de ces motifs114.

Fig. 44 : Manteau de femme, Hindeloopen, chintz, fait en Inde vers 1730, Friesmuseum, Leeuwarden

Fig. 45 : Veste et jupe, Hindeloopen, chintz, fait en Inde vers 1750, Friesmuseum, Leeuwarden

La production de Bobbejakken puise donc certaines racines dans la céramique et la culture asiatique, notamment chinoise. Mais une fois que la production delftoise a trouvé sa forme finalisée, les Chinois l’ont à leur tour copié pour réaliser des Bobbejakken en porcelaine* et répondre à la demande européenne115. Il est ainsi amusant de constater ce jeu de miroir : les Néerlandais ont réinterprété les poussahs chinois pour imaginer les Bobbejakken, puis les Chinois ont repris ce modèle et l’ont raffiné. Parallèlement, certains éléments du Bobbejak semblent provenir d’Europe.

II.2 Influences européennes Indépendamment du chapeau qui paraît être un accessoire européen, c’est l’attitude en elle-même de l’homme et son apparence grotesque qui nous font penser que certaines racines du Bobbejak sont occidentales. Nous y voyons notamment une corrélation avec les personnages de théâtre populaire.

Hindeloopen se situe dans la région de la Frise. Les habitants s’appellent donc les Frisons. Noël Riley, Grammaire des Arts décoratifs : de la Renaissance au postmodernisme, Flammarion, 2004, p. 124. 115 Voir Annexe n° 6, p. 254. 113 114

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II.2.1 Le tricorne Le personnage de la fontaine porte un tricorne, à l’imitation des Toby Jugs ou des Pots Jacquots révolutionnaires116. Le tricorne est d’origine anglaise. Or, une véritable anglomanie se développe aux environs de 1740117, et touche également le domaine de la mode. Nous pourrions alors y voir une façon d’ancrer le personnage dans son époque, autrement dit, il suivrait une mode européenne du XVIIIe siècle. Le tricorne est un chapeau dont le bord est « relevé et attaché Fig. 46 : Tricorne 118 e de manière à former un triangle » . Il se répand au XVIII siècle et est porté par toutes les catégories sociales. Il s’agit d’un « chapeau de ville que l’on mettait pour parader »119. Il aurait été créé de la façon suivante : au XVIIe siècle, les chapeaux étaient ronds et plus ou moins mous et les bords devaient donc être retroussés pour dégager la vue. « On commença par l’épingler sur le côté droit afin qu’un homme pût, au moins, balancer son bras droit correctement. Puis on releva et on épingla les trois côtés pour qu’un homme sur un cheval au galop ne perde pas son chapeau ou ne risque pas d’être désarçonné en essayant de le maintenir »120. Dès lors, différents types de tricornes se succèdent. Le tricorne disparaît à la Révolution Française.

Fig. 47 : Évolution du tricorne

Ou encore des pots a lait en forme de singe (cf. fig. 12 p. 11). Farid Chenoune, Des modes et des hommes : deux siècles d’élégance masculine, Paris, Flammarion, 1993, p. 12 « Après Voltaire et ses Lettres anglaises en 1736, Montesquieu, à son tour, fait du système britannique un des relais de sa réflexion politique dans L’Esprit des lois, en 1748 ». 118 James Laver, Histoire de la mode et du costume, Londres, Thames & Hudson, 1990, p. 141. 119 Colin McDowell, Le Chapeau et la mode… des origines à nos jours, Paris, Celiv, 1994, p. 13. 120 Loc. cit. 116 117

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II.2.2. Le théâtre Outre la fonction du Bobbejak, nous avons vu que son iconographie avait un lien étroit avec Dionysos, le dieu du vin et du théâtre. Le genre est né en Grèce, entre le VIe et IVe siècle av. J-C. Intimement lié à la démocratie athénienne, le théâtre assure aussi un rôle religieux car il est né du culte de Dionysos. Il est possible pour l’homme d’établir une relation directe avec ce dieu, d’entrer en communion avec lui : d’une part en étant en état d’ivresse, autrement dit en étant « enthousiaste » c’est-à-dire « en-soi » ; d’autre part grâce aux cérémonies des Bacchanales121 qui regroupent des chants, des danses et des rituels qui vont jusqu'à la transe collective122. Le caractère grotesque, voire vulgaire du personnage qui se tient penché en arrière et tient ainsi son ventre proéminent, plein à satiété, nous renvoie aux facéties de certains personnages de théâtre ou des fêtes populaires. La Commedia dell’arte Au XVIIIe siècle, les faïenciers delftois123 imitent un phénomène de mode qui s’est emparé de l’Europe et se passionnent pour la Commedia dell’arte. Ils en utilisent le vocabulaire décoratif pour orner des plateries ou des carreaux, mais aussi pour confectionner de petites figurines. Selon Aronson, la plasticité de la céramique permet de répondre à la gestuelle et à l’expressivité des acteurs124. Née en Italie au XVIe siècle, la Commedia dell’arte incarne le théâtre populaire comique de l’époque125. Les acteurs improvisent mais campent des personnages-types que le public reconnaît aussitôt grâce à leur masque et costume 126 . Le succès de la Commedia dell’arte est tel qu’elle conquiert les classes sociales supérieures, et gagne les pays voisins comme la France, l’Allemagne et les Pays-Bas. Des gravures et des illustrations reprennent ces personnages stéréotypés.

Cela a donné naissance au mot « orgie ». Ainsi, y a-t-il quatre grandes fêtes de Dionysos à Athènes, dont les Grandes Dionysies. Ces dernières se déroulent à la période mars-avril et donnent lieu aux représentations théâtrales, sous forme de concours. Toute fête commence par le sacrifice d’un animal emblématique de Dionysos : le bouc. Cela peut expliquer l’apparition à cette époque du mot « tragédie » qui signifie « chant du bouc » (« Tragos » signifie « bouc » et « ôdè », « chant ».). Mais il est également possible que son origine soit liée aux satyres. 123 Et les porcelainiers chinois (D.F. Lunsingh Scheurleer, « Delfts met toneelspelers, potsenmakers en figuren uit de Commedia dell’arte », Antiek, n°2, vol 21, août-septembre 1986, p. 60). 124 ARONSON DELFTWARE, Delft & the Commedia dell’arte [en ligne] Disponible sur : www.aronson.com/in-depth/delft-commedia-dell-arte/, [Consulté le 15/10/2017]. 125 Collectif, Porcelaine et arts de la table, Paris, Hachette collections, 2005, p. 165. 126 ARONSON DELFTWARE, Delft & the Commedia dell’arte [en ligne] op. cit. 121 122

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Fig. 48 : Arlequin, Harlingen, faïence, 38,7 x 26,1 x 1,6 cm, 1760, Princessehof Museum, Leeuwarden

Fig. 49 : Scaramouche, Delft, H. 29 cm, vers 17251740, Rijksmuseum, Amsterdam, inv. no. BK-16393

Dionysos étant le dieu du théâtre, il est logique de trouver des exemples de personnages de scène parmi les Bobbejakken, ce qui pourrait expliquer leur aspect grotesque. Certains professionnels127 ont vu en eux les personnages d’Arlequin – à cause de son costume multicolore - Polichinelle – à cause de sa difformité – ou encore Pierrot – avec son visage « lunaire ». Arlequin : Arlequin joue le rôle d’un serviteur. Il « campe un personnage joyeux et comique à l’esprit agile, se livrant à mille bouffonneries, cabrioles et débitant des plaisanteries le plus souvent obscènes »128. Ses préoccupations sont de satisfaire des besoins triviaux : boire, manger, forniquer et dormir. Il est associé à la figure du diable : son nom viendrait d’un démon, Alichino, de l’enfer de la Divine Comédie de Dante. Il porte un masque noir censé représenter son visage couvert de suie. Par ailleurs, il est réputé pour porter un costume multicolore – ce qui explique peut-être les couleurs de petit feu* sur le Bobbejak Fig. 50 (p. 48)129. « On prêtait à cet habit bariolé le pouvoir magique de faire éclore les fleurs et de mûrir les fruits : Arlequin hérite ainsi des pouvoirs de Dionysos »130. Polichinelle : À l’instar d’Arlequin, Polichinelle est souvent un serviteur. Il porte également un masque noir et son caractère démoniaque est renforcé par sa difformité physique131. Il a lui aussi un côté primaire, même animal puisque son nez est dit en forme de bec et qu’il aime imiter les animaux de la basse-cour. Son nom viendrait ainsi de « Pulliciniello » soit « poussin » en italien. Néanmoins, il s’oppose à Arlequin par son costume qui est entièrement blanc.

L’antiquaire Aronson, la maison de vente Sotheby’s, le musée des Beaux-Arts de Lille… Collectif, op. cit., p. 165. 129 Aronson, Dutch Delftware, Facing East: oriental sources for Dutch Delftware chinoiseries figures, 2010, p. 128. 130 LAROUSSE ENCYCLOPÉDIE, Commedia dell’arte [en ligne] Disponible sur : http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/commedia_dellarte/35450, [Consulté le 04/11/2017]. 131 Meredith Chilton, Harlequin unmasked, The Commedia dell’arte and porcelain sculpture, Londres, Yale University Press, 2001, p. 94 : « His exaggerated belly is emphasized by his hunchback, and both are echoed in his mask, with its grotesque hooked nose ». 127 128

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Pierrot : Le personnage de Pierrot semble être en totale opposition avec ceux d’Arlequin ou de Polichinelle. À l’origine représenté sans masque, mais le visage enfariné pour symboliser sa naïveté, Pierrot incarne l’éternel amoureux. Avec son costume blanc, c’est un personnage émouvant, rêveur et poétique qui souffre souvent de tours qu’on lui joue.

Fig. 50 : Fontaine Arlequin, Delft, faïence, vers 1750-1770

Fig. 51 : Fontaine Polichinelle, Delft, faïence, 42 x 24 x 25 cm, 1760-1800, Musée des BeauxArts, Lille

Fig. 52 : Bobbejak Pierrot, Delft, faïence, H. 33,8 cm, vers 1760

Hanswurst L’analyse de deux Bobbejakken faite par Tussen Kunst en Kitsch 132 nous a également orienté vers l’hypothèse d’un autre personnage de théâtre, plus contemporain, mais qui était souvent intégré et joué par les comédiens Allemands de la Commedia dell’arte133 : Hanswurst.

Fig. 53 : Bobbejakken chez Tussen Kunst en Kitsch

AVROTROS [en ligne] Disponible sur : https://www.avrotros.nl/site/gemist/item/tussen-kunst-enkitsch-14-oktober-2015-14-10-2015/, [Consulté le 10/09/2017]. 133 Meredith Chilton, op. cit., p. 45-46. 132

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« Hanswurst » est composé du prénom classique Hans et du mot « saucisse » (wurst). Il se traduit littéralement en français comme « Jean Saucisse ». Une fois encore nous retrouvons cette idée d’intégrer un prénom (Toby, Jacquot et Bob). Il s’agit d’un personnage de théâtre comique au MoyenAge en Allemagne, qui est à la fois un fou et un clown. C’est pourquoi il a donné naissance au mot « hansworst » qui signifie « bouffon » en allemand. Tout comme Arlequin ou Polichinelle, c’est un personnage vulgaire, qui interpelle le public, et multiplie les allusions sexuelles, scatologiques. Sa gestuelle est exagérée à outrance et a pour but de souligner l’obscénité de son discours. Son seul objectif est de satisfaire ses désirs charnels et de se complaire dans le péché. Ainsi, a-til souvent été rattaché à la figure du Diable. Il incarne souvent un serviteur pour un personnage noble mais il refuse toute autorité. « Son rôle est de détruire le sérieux (…) Il a la position de l’enfant rebelle » 134 . C’est pourquoi il s’oppose totalement à l’esprit des Lumières.

Fig. 54 : Bucco (Ficoroni, Plate XXXI, New York Public Library at Lincoln Center)

Hanswurst puise ses racines dans la culture Méditerranéenne, et notamment le théâtre romain, avec par exemple les farces des Atellanes qui comprenaient quatre personnagestypes, reconnaissables par leur masque caractéristique, qui improvisaient des plaisanteries grossières et des satires : parmi eux, Bucco le Malicieux135 est défini comme un fou aux grosses joues, qui parle et mange énormément136. Le genre des Atellanes a évolué au fil des siècles jusqu’à donner naissance à la Commedia dell’arte, où le personnage d’Arlequin n’est pas sans évoquer celui d’Hanswurst. Mais il est possible d’attribuer d’autres origines à Hanswurst, comme par exemple les Englische Komödianten, soit des troupes de théâtre itinérantes d’acteurs anglais, qui faisaient de nombreuses représentations en Allemagne au début du XVIIe siècle. Par la suite, Hanswurst a eu plusieurs héritiers, comme Papageno de la Flûte Enchantée de Mozart, ou Kasperl de Johan Josef La Roche (qui devient le Guignol français), etc. Le personnage d’Hanswurst a véritablement été « établi » en 1705, à Vienne, par le directeur de théâtre Josef Anton Stranitzky (1676-1726) qui, fort de cette tradition européenne, lui a forgé des origines de toute pièce pour en faire un paysan de Salzbourg avec un pantalon jaune, une collerette blanche, et une veste rouge 137, dont le travail consiste à

CANAL-U, Gérald Stieg « La figure du Hanswurst dans la littérature et la culture autrichienne » [en ligne] Disponible sur : https://www.canalu.tv/video/fmsh/la_figure_du_hanswurst_dans_la_litterature_et_la_culture_autrichienn es.28567, [Consulté le 07/09/2017]. 135 Cette dénomination, « Bucco », rappelle fortement le Glouton de Cristoph Gandtner. 136 Paul Kuritz, The Making of theater history, Pearson College Div, 1988, p. 42. 137 Voir Costume d’Hanswurst en annexe n°7, p. 255. 134

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castrer des porcs138. Peu à peu l’iconographie d’Hanswurst se codifie et il devient identifiable à sa barbe et au cœur qu’il arbore sur la poitrine139 : les Bobbejakken ne reprennent pas ces éléments. Carnaval Dès lors, des auteurs, comme Kassay-Schuster, se sont attachés à démontrer le lien intrinsèque qu’il existait entre Hanswurst et le roi Carnaval140. Rappelons que le Mardi Gras est le dernier jour où il est autorisé de s’accorder des plaisirs, avant de commencer le Carême et de vivre une période de privations. Il s’agit donc d’un jour de fête, pendant lequel les gens mangeaient des plats riches, et buvaient. Le Carnaval était logiquement organisé par la corporation des bouchers, car ils fournissaient la viande pour les festivités, ce qui était l’occasion d’écouler les réserves et de compenser le futur non-vendu. De fait, en étudiant le tableau Le Combat de Carnaval contre Carême de Bruegel l’Ancien, nous remarquons que tout oppose les deux personnages principaux (Carnaval et Carême) : leur sexe, leur répartition dans l’espace, leur cortège, leur iconographie. Celle de Carnaval nous intéresse tout particulièrement : il est assis sur un tonneau, à l’instar de certains Pots Jacquots français et de certaines fontaines de Delft, et il a un ventre proéminent et un visage bouffi, tout comme le Bobbejak du musée Auguste Grasset. Il brandit une pique comme arme, sur laquelle sont embrochés une tête de cochon141, un poulet rôti, et où une saucisse est accrochée.

Fig. 55 : Pieter Bruegel l'ancien, Le Combat de Carnaval et Carême, huile sur bois, 118 x 164,5 cm, 1559, Kunsthistorisches Museum, Vienne

Nous retrouvons cette arme sur une gravure sur cuivre de Martin Engelbrecht d’Augsbourg, mais elle est alors l’attribut d’Hanswurst. Ce dernier est d’ailleurs assis sur le

Dorothy Chansky, Ann Folino White, Food and Theatre on the World Stage, Routledge, 2015, p. 87. Voir statuette en porcelaine représentant Hanswurst en annexe n°8, p. 256. 140 Dionysos serait le précurseur de Carnaval. 141 La tête de cochon était également présente chez le Glouton de Gandter. 138 139

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dos d’un âne, tout comme Silène l’était. La saucisse est l’aliment stéréotype rattaché à Carnaval. Elle a évidemment une symbolique ithyphallique. Cela fait écho au nom de Hanswurst, ainsi qu’à sa gestuelle obscène sur scène. Cette symbolique se retrouve, à nouveau, chez les satyres, et peut également être présente sur la fontaine avec le robinet.

Fig. 56 : Martin Engelbrecht, Hanswurst, Der lächerliche und auf das Simpelste sich verstellende Hans Wurst, Gravure sur cuivre, vers 1730-1740, 440 x 300 mm, Deutsches Theatermuseum, Munich

Fig. 57 : Un Hanswurst priapique, eau-forte, XVIIXVIIIe siècle, Germanisches Nationalmuseum, Nuremberg

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CONCLUSION

La fontaine de table Bobbejak que nous étudions a certainement été produite par la manufacture De Klaauw, à Delft, entre 1763 et 1806, soit sous la direction de Lambertus Sanderus. De fait, l’hypothèse du faux semble peu probable. L’analyse de cette production est complexe, riche d’une multitude d’influences culturelles – européennes et asiatiques – qui, au fil du temps, se croisent et évoluent. Quelque soit son inspiration, elle a un lien avec une divinité (Dionysos ou Budai heshang et Mile) et elle a perdu son statut sacré par son usage profane. « Le domaine du profane se présente comme celui de l'usage commun, celui des gestes qui ne nécessitent aucune précaution et qui se tiennent dans la marge souvent étroite laissée à l'homme pour exercer sans contrainte son activité »142. La société humaine est composée du monde du sacré et du monde du profane. Ils sont complémentaires : le premier correspond donc à celui des interdits, et le second à celui de la fête et des transgressions limitées. En devenant des objets profanes, les Bobbejakken sont devenus des objets du quotidien, des céramiques confectionnées par l’homme, pour l’homme. En s’inspirant des personnages du théâtre populaire (Hanswurst, Commedia dell’arte, etc.), ils illustrent les excès assumés de l’homme dont on ne moque mais qui réjouissent dans la vie quotidienne (ivresse, sexualité, etc.), et qui sont le reflet d’une fantaisie et d’une joyeuse créativité.

142

Roger Caillois, L’Homme et le sacré, Paris, Gallimard, 1950, p. 30.

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Deuxième partie : CONSERVATIONRESTAURATION

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INTRODUCTION CONSERVATIONRESTAURATION

Cette partie est consacrée à la conservation et à la restauration de l’œuvre de mémoire. Les traitements réalisés doivent respecter les exigences de la déontologie, à savoir l’innocuité des produits et leur réversibilité. Par ailleurs, la restauration ne peut être envisagée qu’après un long et rigoureux raisonnement. Dans le cas de cette étude, l’objet est fracturé en seize tessons : le tertre et le corps du personnage en sont composés de neuf d’entre eux, le chapeau de cinq et le bouchon de deux. L’œuvre a été antérieurement restaurée : elle a connu des opérations de collage, comblement et retouche. Ces interventions sont vieillissantes et nuisent à la lisibilité et à la valeur esthétique de la pièce. En l’état actuel, l’objet ne peut être exposé. De plus, la grande majorité de la surface est couverte de dépôts et de poussières. Avant d’effectuer le transport de l’œuvre du musée Auguste Grasset à l’École de Condé143, il a fallu s’assurer que cela n’endommagerait pas le Bobbejak. De fait, il était difficile de déterminer l’état global de l’objet, en raison des ressauts du collage, des débordements du bouchage et de la retouche, de la mauvaise teinte de cette dernière, mais aussi de l’importance des dépôts. Un constat d’état détaillé énumère les altérations de l’objet, ce qui permet de déduire leurs causes, grâce à un diagnostic. Nous pouvons ensuite établir un protocole et une proposition de traitement qui seront motivés par la restitution des valeurs historiques, esthétiques et fonctionnelles au Bobbejak. Pour chaque traitement de restauration, les produits sont sélectionnés à partir de la documentation scientifique et de tests effectués en atelier.

143

Voir le déroulement du transport en annexe n°9, p. 257.

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Chapitre 1 : CONSTAT D’ÉTAT144

Le constat d'état est un rapport établissant les différents défauts de fabrication et altérations de l'objet. Leur observation et leur analyse permettent d'établir une étude technique qui servira à établir un diagnostic puis à proposer des traitements adaptés. Le constat d’état dresse simultanément les observations faites sur la fontaine et le bouchon. Cependant, un second constat d’état devra être dressé après la dérestauration car l’état actuel de l’objet ne permet pas de faire toutes les observations souhaitées. L’objet est fortement endommagé. Nous avons choisi de classer nos observations sur son état en trois catégories distinctes : l’analyse de l’état de surface, de l’état structurel et des anciennes restaurations. La première prend en compte les altérations superficielles. La deuxième regroupe les dégradations qui sont plus importantes d'un point de vue volumique. Enfin, la dernière analyse note toutes les interventions humaines qui ont été faites sur l’objet depuis sa création. Les examens ont été réalisés à l’œil nu, à l’aide d’un appareil photo Canon EOS 100D, d’un scalpel, d’une lampe à rayons ultraviolets Waldmann DHLL 204 UM145, d’une règle graduée et d’un mètre ruban. Certains tests et prélèvements ont été effectués sur les matériaux exogènes 146 pour déterminer leur composition 147 , ce qui permettra ensuite de connaître leur origine. Afin de situer les défauts et altérations et de faciliter leur compréhension, les différentes faces de la fontaine et du bouchon sont nommées par des lettres (Fig. 58 et 59, p. 56).

Le constat d’état a débuté en décembre 2016. Fiche technique en Annexe n°10, p. 259. 146 Ils ne font pas partie de la céramique originale, mais proviennent d’une cause externe. 147 Voir tableau récapitulatif en Annexe n°11 p. 260. 144 145

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Face A

Face B

Face C

Face D

Face E

Fig. 58 : Dénomination des faces du corps

Face A

Face B

Face C

Face D

Face E

Face F

Fig. 59 : Dénomination des faces du bouchon

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I- ANALYSE DE L’ÉTAT DE SURFACE Nous décrirons d’abord l’état de l’émail, puis nous relèverons les altérations, de la plus superficielle à la plus profonde, autrement dit l’encrassement, les dépôts, les rayures, les fêlures et enfin les éclats d’émail*.

I.1. État de l’émail148 I.1.1. Trous d’épingles Il s’agit de « minuscules trous, isolés ou en groupe, à la surface de la couche de revêtement, apparaissant souvent comme de petits points sombres au fond d’un cratère »149. Ces trous sont de petite taille, et sont isolés à la surface de l’émail. Il s’agit de points vers lequel l’émail converge. La pâte n’est pas visible car les trous d’épingles sont encrassés et de couleur noire. Nous comptons cinq trous d’épingle dans le dos du personnage, deux sur le rocher, et un sur la manche droite (Fig. 60).

0,3 cm

Fig. 60 : Exemple de trous d'épingles (Face D)

I.1.2. « Excroissances » de la pâte Ces excroissances sont en relief par rapport à la couche de revêtement qui est alors plus fine et donc moins opaque : la couleur de la pâte est visible par transparence. Leur localisation est aléatoire : sous la tresse (Fig. 61), dans le bouchon, sous la main et le bras droits…

0,5 cm

Fig. 61 : Exemple d'excroissance de pâte près de la tresse (Face D)

148 149

Cf. Schéma récapitulatif fig. 68, p. 59. Nicole Blondel, Antoinette Faÿ-Hallé, Céramique : vocabulaire technique, Paris, Monum, 2001, p. 383.

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I.1.3. Retraits d’émail Un retrait d’émail, ou retirement, est un « trou dans la couche de revêtement. Celle-ci se divise et se rétracte sur elle-même, en bourrelets autour de plages dégarnies, de forme et de taille variables »150. De fait, nous observons des « manques » dans la couche d’émail qui laissent la pâte visible. La poussière s’est incrustée dans la porosité de la pâte. Il ne s’agit pas d’éclats car les bords de l’émail* forment des bourrelets. Il y a des retraits d’émail sur le bouchon, sous le rocher, quatre le long du bras droit (Fig. 62), quatre au niveau du poignet gauche, un sous la manche et un le long de la cheville gauche.

Fig. 62 : Exemple de retrait d'émail le long du bras droit (Face B)

I.1.4. Maigreurs Il s’agit d’un « manque d’épaisseur de la couche de revêtement »151. L’émail est fin. La pâte beige-rose est visible par transparence.

0,5 cm

2 cm

Fig. 63 : Maigreurs d'émail (Face D bouchon) (Face E corps)

I.1.5. Points noirs Ces points sont ronds, noirs et leur dimension est de l’ordre du millimètre. Ils sont sous l’émail*. On en compte deux : un dans le bouchon et un sur le genou droit (Fig. 64).

0,5 cm

Fig. 64 : Exemple de point noir, sur le genou droit (Face B) 150 151

Blondel, Faÿ-Hallé, op. cit., p. 384. Ibidem, p. 382.

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I.1.6. Points et taches bleus Ces marques bleu foncé ont une couleur qui ressemble à celle du décor peint. Elles sont dans l’émail*. Il y a quatre points (sous le genou gauche, sous le poignet gauche, index droit, à droite sur le ventre) et quatre taches (sur la fesse gauche, sous le rocher, en bas du pantalon à gauche, dans l’aine droite) (Fig. 65).

0,5 cm

0,2 cm

Fig. 65 : Exemple de point et tache bleus (Face B)

I.1.7. Marques blanches

Ces marques sont de couleur blanc-bleuté et rappellent la teinte de l’émail. Elles peuvent avoir la forme de tache (sur le bouchon, Fig. 66) ou de ligne (sur le tertre, Fig. 67).

1 cm

0,2 cm

Fig. 66 : Marque blanche sur le bouchon (Face E)

Face A

Face B

Fig. 68 : Schéma récapitulatif des défauts d'émail

Fig. 67 : Marque blanche sur le tertre (Face C)

Face C

Légende : Trous d’épingles Excroissances de pâte Retraits d’émail

Face D

Points noirs Points et taches bleus Marques blanches

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I.2. Encrassement L’encrassement se définit comme une accumulation de salissures. L’objet en présente des types différents : une poussière mobile et une poussière incrustée.

I.2.1. Poussière mobile L’objet présente un état d’empoussièrement général peu avancé. Une couche de poussière s’accumule dans les zones en creux et horizontales de l’objet. Elle se dépose sur un coton sec : elle est donc superficielle et mobile. Les retraits d’émail, les zones qui ont été retouchées (tricorne, arrière du rocher, entrejambe du personnage) et la tresse sont particulièrement touchés. Cette-dernière présente même quelques fibres. Enfin, l’intérieur de la fontaine présente entre autres des fils et un cadavre d’araignée.

I.2.2. Poussière incrustée Certaines zones de l’objet ont un encrassement plus prononcé (qu’il est plus difficile de retirer). Ces zones montrent la pâte à nu, c’est-à-dire qu’elle n’est pas (ou plus) protégée par l’émail. • L’encrassement s’est incrusté dans la porosité de la pâte et a pris une couleur noire. C’est le cas, du pied de l’œuvre, des fêlures, des rayures et des trous d’épingles. • Le matériau de comblement qui souligne toutes les lignes de cassure est également fortement encrassé. De fait, il semble recouvert d’une couche grasse qui a accroché la saleté. Il a ainsi pris une teinte grisâtre. • Enfin, rappelons que le bouchon est cassé : il est composé de deux tessons et comporte plusieurs éclats. Les tranches de la cassure sont recouvertes d’une fine pellicule grise, dure, et cassante au scalpel. Sous lumière U.V., l’encrassement prend une fluorescence blanche vive (Fig. 69)152. Parallèlement, les tranches des éclats sont propres. Lors de tests153, l’encrassement s’est révélé soluble à l’eau déminéralisée. Lumière naturelle

Lumière U.V.

Fig. 69 : Encrassement de l'une des tranches du bouchon, sous deux éclairages Les rayons de la lampe U.V. ont une longueur d’onde comprise entre 4000 et 200 Å. Ce test permet de révéler la fluorescence de certains matériaux, autrement dit leur capacité « d’absorber la lumière et de la réémettre sous forme de rayonnement de longueur d’onde plus grande »152, et ainsi de déterminer leur composition et leur origine. DICTIONNAIRE LAROUSSE, Ultraviolet [en ligne] Disponible sur : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/ultraviolet_ultraviolette/80499 [consulté le 11/05/2018]. 153 Voir annexe n°11 p. 260. 152

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I.3. Dépôts Nicole Blondel définit un dépôt comme un « amas de matière homogène ou non, collé accidentellement à la surface des céramiques. Sa forme, son volume, sa couleur et sa dureté sont variables. Il est de nature organique ou minérale »154. Les dépôts présents sur la fontaine sont de trois types. Un schéma récapitulatif est présenté p. 62 (Fig. 73).

I.3.1. Dépôts brun-vert

Ils sont peu en relief et peuvent être facilement grattés au

1 cm

Fig. 70 : Exemple de dépôt brun-vert sous l'avant-bras gauche

scalpel. Ils sont solubles pour la plupart à l’eau déminéralisée froide : les autres se solubilisent à l’eau déminéralisée chaude. Ils se situent le long de l’aine droite du personnage, sous les avant-bras (Fig. 70). Nous pouvons d’ailleurs observer que, sous l’avant-bras droit, le dépôt est sous la forme d’une empreinte digitale.

Compte tenu de leur localisation, nous ne pouvons rapprocher la lampe U.V. suffisamment près pour pouvoir examiner leur fluorescence.

I.3.2. Dépôts blanc-gris Ces dépôts sont très durs et en relief. Ils sont de couleur blanche, devenue légèrement grise compte tenu de leur encrassement. Ils mesurent quelques millimètres et sont observables sur de nombreuses zones de l’objet, sans ordre apparent : dans le dos, sous poignet gauche, près de la cheville gauche (Fig. 71), etc. Ils s’éliminent assez 154

Face B

Face D

0,5 cm

Face C

0,5 cm Fig. 71 : Exemples de dépôts blanc-gris sur la cheville et le poignet gauche

Blondel, Faÿ-Hallé, op. cit., p. 379.

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facilement avec le scalpel, mais ils ne réagissent à aucun solvant. Sous la lumière U.V., ils ont une fluorescence orange clair.

I.3.3. Dépôts jaune orangé Ils sont fins, durs et cassants sous le scalpel. Ils sont de couleur jaune mais lorsqu’ils sont légèrement en surépaisseur, ils deviennent plus orangés. Ils sont uniquement localisés sous le rocher, notamment le long de la ligne de cassure. Ils sont solubles à l’eau déminéralisée froide et réagissent aux ultra-violets en adoptant une fluorescence jaune vif (Fig. 72). Face E

Lumière naturelle

Lumière U.V.

0,2 cm Fig. 72 : Exemple de dépôt jaune orangé, sous deux éclairages

Face A

Face B

Face D

Fig. 73 : Schéma récapitulatif des dépôts

Face C

Face E

Légende : Dépôts brun-vert Dépôts blanc-gris

Dépôts jaune orangé

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I.4. Rayures À l’extérieur du genou droit du personnage (Fig. 74), l’émail* est rayé. Les rayures semblent peu profondes : elles sont fines et courtes. Ces rayures sont encrassées et ont une couleur noire. Un schéma récapitulatif (Fig. 77 p. 64) localise l’ensemble des rayures, ainsi que les deux altérations suivantes (fêlures et éclats d’émail*).

1 cm

Fig. 74 : Exemple de rayures (Face A)

I.5. Fêlures La fêlure est une petite fente soit une « ouverture plus ou moins longue et étroite dans l’épaisseur de la paroi du tesson ou des couches de revêtement »155. Quatre fêlures sont présentes. Elles sont regroupées au niveau de la main droite du personnage : la plus longue mesure 7 cm et rejoint le pouce et le coude. La fêlure n°2 (4,5 cm) part d’une cassure sur la veste et remonte jusqu’à l’index. La fêlure n°3 a pour point de départ un éclat sur le majeur et mesure 1 cm (Fig. 75). La fêlure n°4 est sous le pouce (2 cm). Les fêlures sont encrassées et ont une teinte noirâtre, ce qui les rend très Fig. 75 : Fêlures n°2 et 3 (Face B) visibles à l’œil nu. Sans dérestauration, il n’est pas possible de savoir si elles sont traversantes c’est-à-dire si elles traversent entièrement l’épaisseur de la céramique et sont alors visibles à l’intérieur et à l’extérieur de la fontaine. Cependant, elles semblent très fines.

155

Blondel, Faÿ-Hallé, op. cit. p. 380.

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I.6. Éclats d’émail Lorsqu’un fragment se détache violemment de la surface d’un corps dur, il laisse une marque que l’on appelle éclat156. Il s’agit ici de pertes superficielles de matière : seul l’émail est endommagé. Ces éclats sont de petite taille et ne pénètrent pas profondément dans la pâte. Ils sont principalement localisés sur les zones saillantes de l’objet qui peuvent facilement subir un choc. L’éclat le plus important est sur le bouchon (2 x 1,5 cm). Il y en a également quatre sur la cuisse gauche, un sur l’index droit (Fig. 76), un en bas de la tresse, six sur le pantalon, trois sous le capuchon du bouchon, un à chaque manche, un sous chaque soulier. Notons que l’un des éclats sur le bouchon et celui sur la manche droite ont été retouchés avec une couleur bleu foncé, proche de la couleur du décor.

0,5 cm

Fig. 76 : Exemple d'éclats d’émail sur l'index droit et la cuisse gauche (Face B) Face A

Face B

Face C

Face D

Fig. 77 : Schéma récapitulatif des rayures, fêlures et éclats de surface Légende : Rayures Fêlures Éclats de surface DICTIONNAIRE LAROUSSE, Éclat [en ligne] Disponible sur : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/éclat/27559?q=éclat#27413 [Consulté le 11/05/2018] 156

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II- ANALYSE DE L’ÉTAT STRUCTUREL Trois altérations ont été relevées : les éclats, les lacunes et les cassures.

II.1. Éclats Ces éclats affectent non seulement l’émail, mais aussi la pâte. Toutefois ils ne la traversent pas complètement. Ils ont différents niveaux d’encrassement. Celui à l’extrémité de la manche droite (2 mm) est encrassé et les tranches sont érodées. Le bouchon en a deux : le premier se situe sur le bord inférieur (2,5 x 0,5 cm) et ses tranches sont propres et non érodées, le second est sur le capuchon (4 x 2 cm) et a été retouché avec une couleur bleu foncé proche de celle du décor (Fig. 78). Enfin, il est probable qu’il y ait un éclat à l’œil gauche, sous le matériau de comblement.

0,5 cm

Fig. 78 : Exemple d'éclat structurel peint, sur le bouchon (Face E)

II.2. Lacunes Une lacune est un « fragment ou élément d’une pièce céramique manquant »157. En dépit de la difficulté à analyser l’état véritable de la fontaine, deux lacunes sont clairement notables : l’une sur le bouchon (2,2 x 4,1 cm, Fig. 79) et l’autre sur la cuisse droite (4,3 x 2,6 cm, Fig. 80). Les fragments ont été perdus. Il est également possible qu’il y ait une lacune dans l’aine droite du personnage car la zone comblée est relativement importante (1 cm de hauteur). De même, la texture granuleuse du chapeau fait penser à la présence d’un comblement.

Fig. 79 : Lacune du bouchon

1 cm

Fig. 80 : Lacune sur la cuisse droite (Face A) 157

Blondel, Faÿ-Hallé, op. cit. p. 381.

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II.3. Cassures Une cassure est une « rupture d’une pièce céramique en plusieurs fragments »158 . Nous ne pouvons dénombrer les cassures car, compte tenu de l’ouverture trop étroite de l’objet, nous ne pouvons observer l’intérieur. Le bouchon comprend deux tessons : ce sont les seules tranches qui sont visibles. La cassure est d’ailleurs nette et les tranches ne paraissent pas émoussées. Mais il est difficile, avant de procéder à la dérestauration et au nettoyage, d’identifier précisément le nombre de fragments qui composent le reste de l’objet. Il semblerait que le corps en compte sept, dont le plus important est le fragment qui regroupe la tête et le ventre du personnage (22,5 cm de hauteur et 16,5 cm de largeur). Le chapeau paraît être composé de six tessons. Face A

Face B

Face D

Face C

Face E

Fig. 81 : Schéma des lignes de cassure sur le corps Face A

Face B

Face C

Face E

Face F

Fig. 82 : Schéma des lignes de cassure sur le bouchon 158

Blondel, Faÿ-Hallé, op. cit. p. 381.

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III- ANALYSE DES ANCIENNES INTERVENTIONS III.1. Marquage Deux inscriptions de couleur noire sont visibles sur l’émail : l’une sur la face E de la fontaine, et l’autre sur la face A du bouchon. Elles sont identiques et comprennent toutes les deux « V.F.453. », néanmoins l’inscription de la fontaine se termine par « 1 » (Fig. 83) tandis que celle du bouchon par « 2 » (Fig. 84). Elles sont solubles à l’eau déminéralisée froide.

Fig. 83 : Marquage sur la face E de la fontaine

Fig. 84 : Marquage sur la face A du bouchon

III.2. Retouche La retouche correspond aux différentes couches picturales appliquées sur la céramique dans le but d’imiter ou de se rapprocher du décor original. Elle implique parfois une couche de préparation en-dessous et un vernis au-dessous. • Le capuchon, les pieds, l’avant et l’arrière du rocher, la tresse, les oreilles, et le chapeau ont été retouchés avec une couleur bleu foncé qui a un aspect mat. La retouche ne se limite pas aux lignes de cassure, mais est débordante sur l’émail (rocher). De plus, elle est plus épaisse sur le rocher, et particulièrement sur le chapeau : elle s’est écaillée à ces endroits et un enduit blanc est visible sur les arêtes et au revers des écailles. Au toucher, la retouche sur le tricorne semble avoir une texture légèrement grasse. • Certains éclats ont été retouchés avec une peinture bleue : un sur la manche droite, et trois éclats sur le bouchon. • Enfin, sur le comblement de la cuisse droite et sur certaines lignes de cassure sur les jambes, des essais de retouche ont été faits pour imiter les motifs végétaux qui ornent l’habit du personnage. Sous la lampe UV, la retouche a une fluorescence verdâtre (Fig. 85 p. 68). Nous constatons lors de test que les compresses d’eau déminéralisée chaude font gonfler la retouche et la solubilise. Le retrait au scalpel s’effectue ensuite sans difficulté.

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Lumière naturelle

Lumière U.V.

1 cm

Fig. 85 : Exemple de retouche, sur le chapeau, sous deux éclairages

Face A

Face B

Face C

Face D

Fig. 86 : Schéma de localisation des zones retouchées sur le corps

Face A

Face B

Face C

Face D

Face E

Fig. 87 : Schéma de localisation des zones retouchées sur le bouchon Légende : Zone retouchée

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• Sous la retouche du chapeau et du tertre (Fig. 88), un enduit a été appliqué, probablement pour uniformiser les niveaux des fragments. Il est de couleur blanche. Étant à peine visible, il est impossible d’en analyser la dureté. Aux ultraviolets, il donne une florescence vert-jaune vif.

0,2 cm

• Sur la surface de la retouche, une Fig. 88 : Exemple d'enduit sous la retouche, sur le pellicule orangée est visible (Fig. 89). Elle tertre (Face D) est fine, transparente, et soluble à l’eau déminéralisée. En lumière rasante, une empreinte digitale est visible dans cette pellicule, à l’arrière du rocher (Fig. 90).

1 cm

1 cm

Fig. 89 : Taches orangées sur la retouche, sous le tricorne

Fig. 90 : Empreinte digitale dans la retouche (Face D)

III.3. Comblement • Un matériau de couleur blanc crème est encrassé, ce qui lui donne une teinte grisâtre. Il a été utilisé pour réaliser un comblement – aujourd’hui cassé – autour de l’emplacement du robinet (Fig. 91). Il est également visible le long de la ligne de cassure, sous le rocher, car il est débordant. Il est dur, mais très cassant au scalpel. Ce matériau a aussi servi à souligner les lignes de cassure et la lacune qui se trouvent sur le personnage-même. Il semble alors recouvert d’une couche grasse qui lui donne un aspect satiné. Sous la lampe UV, ce matériau a une florescence orange clair (Fig. 92).

1 cm Fig. 91 : Exemple du comblement autour de l'emplacement du robinet (Face B)

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Face B

Lumière naturelle

Lumière U.V.

Fig. 92 : Exemple de comblement sur la cuisse gauche, sous deux éclairages

Afin d’identifier la composition du produit, nous avons effectué plusieurs prélèvements. En immersion dans l’éthanol et l’acétone, l’enduit s’imprègne des solvants et devient plus tendre. Nous nous sommes ensuite fondée sur les indications de Petronella Nel159 pour réaliser le test de Biuret – qui a pour but de détecter la Fig. 93 : Test à l'acide présence de protéine – et de Molisch – qui révèle la cellulose : ils chlorhydrique ont été négatifs. Nous avons ensuite versé quelques gouttes d’acide chlorhydrique sur un nouveau prélèvement : le mélange a provoqué une émulsion de bulles et l’acide a pris une coloration jaune (Fig. 93). Enfin, un test de spectrométrie à fluorescence X160 a été effectué : l’appareil permet de déterminer la composition chimique à travers l’étude des spectres161.

III.4. Embout métallique Un embout métallique tubulaire a été inséré dans le trou consacré au robinet. Le tube s’arrête avant le bord du comblement. Il mesure 1,1 cm de diamètre et 1 cm de profondeur. Au fond, nous remarquons des gouttes orange qui perlent (Fig. 94). Elles sont très brillantes, translucides et pulvérulentes. Compte tenu de leur emplacement, nous ne pouvons examiner ni leur fluorescence ni leur solubilité.

Fig. 94 : Gouttes orange à l'arrière de l'embout

Petronella Nel, « A preliminary investigation into the identification of adhesives on archaeological pottery », AICCM Bulletin, 2007, vol. 30, pp. 27-37, p. 30. 160 Avec un « Analyseur Fx portable Niton™ XL3t » de Thermofisher Scientific™. 161 DICTIONNAIRE LAROUSSE, Spectroscopie [en ligne] Disponible sur : http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/spectroscopie/93309 [Consulté le 05/12/2017] 159

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III.5. Collage Aucune trace de colle n’a été relevée le long des lignes de cassure. Toutes les lignes de cassures présentent des ressauts visibles autrement dit les tessons ont des différences de niveau et forment des saillies. Le plus important est celui d’un tesson sur la cuisse gauche (3 mm de relief). Il est possible que le chapeau comporte lui-même des décalages, qui auraient alors été recouverts de matériau de comblement pour être mis à niveau. Lors de manipulation, un fragment du tricorne s’est détaché. L’adhésif est devenu alors tout à fait visible. Sa fluorescence (Fig. 95) nous indique qu’il s’agit d’un matériau composite : à l’œil nu, nous constatons un matériau de couleur blanc crème, parsemé de taches orange. À la lumière U.V., leur fluorescence est respectivement jaune vif et orange vif. Des prélèvements sont réalisés pour tester la solubilité de l’adhésif : il se ramollit en contact prolongé avec l’éthanol et l’acétone. À l’instar du matériau de comblement, le même phénomène se produit lorsque l’adhésif est en contact avec l’acide chlorhydrique. Lumière naturelle

Lumière U.V.

Fig. 95 : Adhésif du tricorne sous deux éclairages

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71


Chapitre 2 : DIAGNOSTIC Cette étape a pour but d’expliquer l’origine des observations faites lors du constat d’état. Cela permet de déduire les conséquences, d’évaluer les risques encourus et donc de proposer un traitement de conservation-restauration adéquat. Les observations sont abordées selon leur ordre chronologique d’apparition : défauts liés au processus de fabrication, altérations humaines ou d’usage, altérations liées aux anciennes restaurations, altérations liées au stockage. De fait, il ne faut pas confondre un défaut et une altération : tous deux correspondent à une « modification de l’éclat, de la couleur, de l’homogénéité ou de la forme du tesson et / ou des couches de revêtement d’une pièce céramique », mais un défaut se produit « pendant [la] mise en œuvre » de l’objet tandis que l’altération « se produit pendant son utilisation ou après son abandon, à l’air libre ou dans un milieu d’enfouissement (terre ou eau) »162.

I- DÉFAUTS LIÉS AU PROCESSUS DE FABRICATION La mise en œuvre de l’objet est imparfaite. Les défauts de fabrication ne peuvent être considérés comme des altérations puisqu’ils sont survenus au cours de la création de la pièce. Chaque étape de la fabrication – estampage, émaillage, cuisson – comporte des défauts qui sont révélés à l’achèvement de la pièce. • Tout d’abord, un mauvais pétrissage de la pâte a engendré l’apparition d’excroissances à la surface de la céramique. Le potier n’a pas suffisamment homogénéisé l’argile*, ou l’a mal manipulé, et les impuretés contenues dans la pâte sont ressorties à la cuisson. • Le nappage de l’émail est également défectueux et présente des retirements et des trous d’épingles. Ces altérations sont révélées à la cuisson. Les causes du retrait d’émail sont très variées. Il s’agit en fait d’un mauvais accord de la couche de revêtement et de la pâte. Cette altération technologique permet à l’humidité et à la poussière de pénétrer dans la pâte. Les trous d’épingles témoignent eux aussi d’une mauvaise adhérence de l’émail sur la pâte. De fait, des grains de poussière ou de très petites bulles crèvent la couche de revêtement à la cuisson, lors, par exemple, de la décomposition d’un carbonate dans la pâte qui s’échappe à la cuisson.

162

Nicole Blondel, Antoinette Faÿ-Hallé, Céramique : vocabulaire technique, Paris, Monum, 2001, p. 376.

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• Concernant l’étape de la pose du décor, nous avons noté la présence de maigreurs sous le tertre et sur le bouchon. Leur origine s’explique de la façon suivante : en émaillant l’objet dans un bain d’émail, l’artisan tenait la pièce. Il a alors laissé l’empreinte de ses doigts dans l’émail. Nous remarquons également des points et taches bleus sous l’émail*. Il doit s’agir de taches d’oxyde de cobalt. Avec son pinceau, le peintre a provoqué des projections ou des bavures de couleur. Or, l’émail est pulvérulent et interdit tout repentir. De même, les marques blanches observables dans le décor sont en fait des retraits de la couleur qui laissent visible l’émail sous-jacent. Alexandre Brongniart explique que « le retirage de la couleur paraît être, pour les couleurs de moufles, analogue à celui que présente le bleu au grand feu*. Ce défaut vient de ce que le peintre a employé des essences devenues trop grasses par l’action de l’air »163. • Les derniers défauts sont liés à la cuisson de l’œuvre. Les points noirs peuvent être dus à des pointes de fer, soient d’infimes particules de fer contenues dans la pâte et qui grossissent à la cuisson, ou bien à des impuretés emprisonnées sous l’émail*, dans le four, telles des poussières de carbone. Compte tenu de ces informations, nous pouvons conclure que ces défauts ne représentent pas un danger pour l’intégrité de l’œuvre. Ils ne sont pas considérés comme des altérations et par conséquent ils ne relèvent pas du domaine de la restauration. Parallèlement, ils peuvent être perçus comme des marqueurs historiques : il est parfois possible de déterminer un lieu de production en examinant les défauts de fabrication d’une céramique.

II- DIAGNOSTIC DES ALTÉRATIONS II.1. Altérations humaines ou d’usage • De par sa fonction, l’objet est amené à être souvent manipulé. De plus, l’inventaire du musée Auguste Grasset nous indique qu’il a été acheté en Belgique, avant de voyager et d’intégrer les réserves de l’institution. Il est sans doute passé entre de nombreuses mains. C’est probablement lors de l’une de ces manipulations que l’objet a subies des rayures. Celles-ci sont localisées vers l’extérieur des membres du personnage (les deux jambes et le bras gauche) soient les parties les plus sujettes à être exposées aux frottements : l’orientation horizontale des rayures nous indique que l’objet a été pivoté sur lui-même et qu’il a rencontré un matériau plus dur que l’émail. De même, les parties saillantes de l’objet sont particulièrement exposées à l’usure et aux chocs et sont donc plus fragiles. C’est pourquoi elles comportent des éclats d’émail*.

Alexandre Brongniart, Traité des arts céramiques ou Des poteries considérées dans leur histoire, leur pratique et leur théorie, Paris, A. Mathias, 1977, T.2, p. 686. 163

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• Il semble évident que la céramique a subi un choc plus important qui l’a brisé en plusieurs fragments. Lors de la casse, certains tessons ont été perdus et ont provoqué des lacunes. L’objet est lourd et son pied est stable. Il n’a donc pas pu basculer seul. Mais il devait être installé au bord d’une console pour permettre de se servir une boisson et il est possible que, en voulant l’utiliser, un individu ait fait un faux mouvement et l’ait fait tomber. Le poids et l’épaisseur de la céramique ont empêché que l’objet ne se casse en une multitude de petits fragments. Le choc a dû avoir lieu sur l’arrière du rocher, puis le corps a dû basculer sur le côté et ainsi briser le tricorne. Les éclats et les fêlures ont sans doute la même origine. Pour le rappeler, les fêlures partent d’éclats ou de lacunes, autrement dit de zones de céramique fragilisées par le choc. Il est cependant possible que l’objet ait connu plusieurs chocs, relativement légers, différents de celui qui a engendré la casse. Enfin, en observant le bouchon, nous constatons qu’il est très endommagé 164 . À l’origine, il était relié au tricorne par une chaînette métallique. Lors de la casse de l’objet, le bouchon a seulement dû avoir des éclats, qui ont alors été retouchés à l’instar du reste de la céramique. Le bouchon a ensuite subi un premier choc qui l’a cassé et a engendré la perte d’un fragment. Il a alors été recollé, comme en témoigne la pellicule grise sur la tranche. Enfin, il a connu un second choc qui a provoqué la désolidarisation du collage et la création de nouveaux éclats. Ces éclats se distinguent des précédents, car leurs tranches sont très propres. Ils sont donc plus récents. Nous pouvons supposer que, pour avoir été cassé, le bouchon ne possédait plus de chaînette et était indépendant de la fontaine. Il devait être positionné à l’emplacement qui lui est dû, c’est-à-dire dans le tricorne. Or, lorsqu’il est placé dans le tricorne, le bouchon ne doit pas être très visible. Les personnes qui manipulaient l’objet n’y prenaient pas garde, et le bouchon a dû chuter.

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Un tableau p. 75 énumère les altérations du bouchon selon leur ordre chronologique d’apparition.

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Premier choc : - Casse du personnage - Trois éclats sur le bouchon (retouchés)

Face B

Face E

Deuxième choc sur le bouchon : - Casse du bouchon - Éclats (encrassés)

Face E

Troisième choc sur le bouchon : - Décollement - Nouveaux éclats (propres) Face E

Face F Fig. 96 : Tableau récapitulatif des altérations du bouchon

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II.2. Altérations liées aux anciennes restaurations Plusieurs interventions de restauration ont été réalisées sur l’objet. • Après avoir été cassée, l’œuvre a d’abord été collée. Le matériau de comblement a été appliqué sur toutes les lignes de cassure. Il devait servir d’enduit de collage 165. L’adhésif a été appliqué généreusement et l’excédent n’a pas été nettoyé. L’épaisseur de l’adhésif a provoqué des ressauts sur l’intégralité du collage. Olivier Omnès explique qu’il s’agit d’une pratique courante : « Appliqués avec générosité par les restaurateurs du XIXe siècle, la plupart de ces produits de collage jouent à la fois un rôle de collage et de comblement. (…) Par leur nature et du fait d’un emploi nécessitant une certaine expérience, surtout en ce qui concerne la juste température et dilution, ces colles créaient en général des surépaisseurs, engendrant des ressauts qui n’étaient certes pas souhaités pour le résultat final »166. Parallèlement, il est aussi possible que les fragments aient été déformés lors de la casse et soient devenus peu jointifs. Visuellement, le matériau n’est pas homogène. Il réagit avec l’acide chlorhydrique en provoquant une effervescence. Il est donc composé de calcium167. Un test de spectrométrie à fluorescence X nous confirme qu’il contient 10% de calcium, mais aussi du potassium168. Cependant cette analyse ne peut détecter que la présence d’éléments inorganiques. La composition qu’elle révèle étant fortement incomplète, nous pouvons en déduire que le matériau contient également des éléments organiques, cependant nous savons qu’il ne contient ni protéine ni cellulose. La coloration jaune que le produit confère à l’acide chlorhydrique est sans doute dû au liant. Ce liant doit probablement être un corps gras, comme de l’huile ou de la cire169, ce qui pourrait expliquer l’aspect satiné de l’enduit. Une telle recette – calcaire et huile – était fréquemment utilisée en restauration, notamment pour le scellement des fontainiers 170 et est communément appelé « mastic de vitrier ». Les

Oscar-Edmond Ris-Paquot, Manière de restaurer soi-même…, Paris, Raphaël Simon, 1876, p. 85. Olivier Omnès (2002), Approche historique de la restauration de la céramique, Mémoire de Master : Conservation-Restauration de Céramique, Saint-Denis, INP, p. 97. 167 La réaction provoque la disparition de certains corps chimiques et l’apparition d’autres, comme le dioxyde de carbone. COLLÈGE MOZART, 01 avril 2011, Action de l’acide chlorhydrique sur la craie [en ligne] Disponible sur : http://sciencesphysiquescollegemozart.over-blog.com/article-action-de-l-acidechlorhydrique-sur-la-craie-70781197.html, [Consulté le 11/05/2018] 168 Voir les résultats en annexe, p. 264 et 265. 169 Stephen Koob, « Obsolete fill materials found on ceramics », JAIC [en ligne] vol. 37, n°1, (1998) : « small amounts of linseed oil and turpentine (Rathgen 1905) were added to provide glue putties with better workability, prolonged settings times, and durability. They are no longer used because of their poor stability and tendency to migrate out of the putty and stain the ceramic. » 170 Entretien avec Olivier Omnès, le 16/03/2018 . 165 166

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composants principaux sont « la litharge, la céruse, le blanc d’Espagne et, bien sûr, l’huile de lin »171. La dureté, la teinte, et l’insolubilité des dépôts blanc-gris nous font penser qu’ils sont de même nature que le matériau utilisé pour combler les lacunes et les lignes de cassure. Ils seraient alors des taches de ce mastic de vitrier, dues au manque de soin de l’application. Toutefois, en observant la tranche du tesson du tricorne qui s’est désolidarisé, nous remarquons que l’enduit n’est pas homogène : le collage a été renforcé par un matériau qui forme des taches orange. La couleur, la localisation et la fluorescence (orange vif) de ces dernières, nous suggèrent une gomme laque172. Cette idée est fort probable car la gommelaque semble avoir été utilisée comme adhésif pour positionner l’embout métallique à l’intérieur du système du robinet. En effet, des gouttes orange sont visibles au fond, autour de l’embout : elles sont brillantes, translucides et très cassantes, voire même pulvérulentes. • Les dépôts sur les tranches du bouchon semblent correspondre aux résidus d’un collage. Ils sont solubles à l’eau froide, et ont une fluorescence blanche. De plus, le collage n’a pas résisté, ce qui signifie que l’adhésif a un faible pouvoir adhérant. Toutes ces caractéristiques nous évoquent un méthyl cellulose. Cette colle est facile à se procurer, sous forme de colle à papier peint. Il y aurait donc deux types d’adhésifs sur l’objet, ce qui témoigne de deux restaurations survenues à des époques différentes. • L’embout métallique avait une utilité : il devait servir de bague pour maintenir le robinet et assurer une meilleure étanchéité. Néanmoins, il est possible que l’embout ne soit pas authentique. Le comblement autour de l’emplacement du robinet comporte des éclats qui dévoilent la céramique originale : cette dernière semble présenter des excroissances. Cependant, il ne s’agit pas de défauts de fabrication qu’il aurait fallu masquer. En Fig. 97 : Pichet en forme procédant à une comparaison formelle de l’objet avec d’autres d'homme assis, Delft, faïence fontaines similaires, nous avons pu en déduire que ces polychrome, H. 36 x L. 16 cm, excroissances étaient en fait un décor en relief caractéristique de vers 1750-1775, Rijksmuseum, Amsterdam la production173. • Enfin l’objet a été retouché. Habituellement, la retouche devrait se fondre avec l’œuvre et ne pas gêner sa lisibilité. Or, ici elle a foncé et est très encrassée. Elle attire le Omnès, op. cit., p. 124. Koob, op. cit. : « Unfired clay is not very stable, particularly in high humidity. Animal glue and shellac were common additives in the 19th century, as they allowed the clay to be molded or shaped, and they imparted significant strength and durability after drying and setting (…) Shellac became a favorite adhesive for complex pottery assemblies because of its thermoplasticity. » 173 Voir Partie historique, p. 29. 171 172

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regard du spectateur. Elle a été réalisée avec la volonté de camoufler les éclats en essayant de restituer les motifs colorés. Nous ne pouvons cependant pas parler de restauration illusionniste, compte tenu du résultat insatisfaisant de la réalisation. Rappelons que la retouche a une fluorescence verdâtre. Elle gonfle à l’eau chaude mais ne se dissout pas. Il s’agirait donc d’une peinture à base d’eau, comme par exemple, des pigments broyés et mélangés à un liant afin de pouvoir adhérer sur la surface émaillée. La nature du liant est difficile à déterminer : cela pourrait être une gomme arabique, un vernis, une protéine, etc. Les taches orangées sur la retouche bleue ont une fluorescence verdâtre qui se confond avec celle de la peinture. Elles correspondent sans doute à un vernis, placé sur la retouche, pour la protéger ou lui donner plus de brillance et ainsi se rapprocher de l’aspect de l’émail. L’empreinte digitale relevée dans le vernis, sur le tertre, est sans doute à l’origine de celle qui se situe sous le bras droit du personnage et qui forme l’un des dépôts brunverdâtre : l’individu qui a procédé à la retouche de l’objet a mal placé l’un de ses doigts et a sali la céramique en la manipulant. De ce fait, tous les dépôts brun-vert que nous avons relevés, seraient des taches de vernis encrassées. De plus, les taches orangées ont une couleur et une solubilité proches de celles des dépôts jaune orangé qui se situent sous le tertre. Enfin, les bordures blanches observées sous les écailles de retouche correspondent à une couche de préparation qui devait uniformiser la surface avant que la retouche ne soit appliquée, et également faciliter l’accrochage de la peinture. • Nous pouvons en conclure que, à l’exception de l’adhésif utilisé pour le bouchon, tous les matériaux de restauration sont non synthétiques. Il est donc probable que la restauration du corps soit antérieure aux années 1950. De plus, le manque de soin et d’application apporté indique que la restauration n’a pas été réalisée par un restaurateur professionnel, mais plutôt par un amateur174. Il nous est impossible de déterminer exactement les mélanges utilisés, car ils font appel à des méthodes fantaisistes. Peu de ces anciennes recettes ont été écrites, et elles ont souvent été éliminées sans qu’on en conserve des traces lors d’interventions plus récentes175. De plus, le musée Grasset ne possède aucune information concernant l’état de l’œuvre lors de son arrivée à Varzy. Nous ignorons si l’objet était déjà endommagé ou restauré lorsque monsieur Geslin l’a acheté, ni s’il a été restauré par un membre du musée. Nous ne pouvons donc que nous contenter d’hypothèses.

À l’époque, le métier de restaurateur à proprement parler n’existait pas encore. Dominique Driesmans (1991), Approche éthique du concept de la conservation-restauration des céramiques en fonction de son histoire et de ses matériaux, Mémoire de Master : Conservation-Restauration de Céramique, Bruxelles, La Cambre, p. 47. 174 175

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II.3. Stockage • Après sa restauration, l’objet a été stocké dans un lieu peu adapté à la conservation : les zones de retouche, probablement encore humides, ont accumulé et emprisonné une quantité importante de saletés, jusqu’à être complètement encrassées. L’objet a été entreposé dans les réserves du musée Auguste Grasset. Il n’était pas protégé par une boîte de conditionnement ce qui a entraîné le dépôt de poussière mobile sur l’intégralité de l’objet.

III- ÉVALUATION DES RISQUES Les diverses altérations que nous venons d’observer peuvent avoir des conséquences négatives pour l’intégrité de l’œuvre.

III.1. Risques physiques L’encrassement pourrait causer des dégâts importants, notamment le développement de microorganismes. Nous ne pouvons savoir si les fêlures sont traversantes avant d’avoir dérestauré l’objet. Néanmoins, si tel était le cas, elles pourraient être élargies par les chocs et vibrations que l’œuvre subit lors de manipulation, transport, etc., auquel cas les fêlures pourraient se prolonger jusqu’à la rupture de la céramique. Les matériaux utilisés pour la précédente restauration (adhésif et comblement) mettent en péril l’œuvre. Le collage avec ressauts pourrait engendrer l’abrasion des tranches, les matériaux pourraient pénétrer dans la pâte 176 , mais avant tout, il s’agit de matériaux anciens et donc instables. À l’image de l’un des fragments du tricorne qui s’est détaché lors d’une manipulation, les tessons sont susceptibles de tomber et de s’endommager.

III.2. Risques esthétiques La retouche engendre une mauvaise lecture générale de l’œuvre : le décor, mais également la forme (chapeau) sont faussés. Cette atteinte à l’esthétique de l’œuvre est renforcée par un contraste important entre la brillance de l’émail* original et la matité de la retouche.

III.3. Risques historiques De plus, la restauration nuit à l’authenticité de l’œuvre et induit une perte d’informations pour l’expertise, en dissimulant sous un comblement l’ornement autour du robinet qui est un décor caractéristique de la production de ce type de fontaine.

176

La gomme-laque peut ainsi provoquer des taches irréversibles.

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Fabrication

IV- RÉSUMÉ DU DIAGNOSTIC Pétrissage

Excroissances Retirements

Emaillage Trous d'épingles

Décor

Cuisson

Points et taches bleus Marques blanches Points noirs Rayures Manipulation Éclats de glaçure

Usage

Cassure Lacunes Choc Éclats Fêlures

Altérations

Mastic de vitrier

Dépôts blancgris Taches orange

Collage

Gomme-laque Gouttes orange Méthyl cellulose

Anciennes restaurations

Dépôts gris Taches orangées

Vernis

Retouche Poussière Stockage

Dépôts jaune orangé

Dépôts brun-vert Couche de préparation

Borbures blanches

Encrassement

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Chapitre 3 : PROPOSITION DE TRAITEMENT Après avoir répertorié chaque altération et tenté d’en expliquer l’origine, la proposition de traitement permet de définir des différentes étapes de restauration. Ces étapes sont déterminées selon les valeurs de l’objet et les problématiques qu’il pose, mais aussi en fonction du choix du propriétaire et du devenir de l’œuvre.

I- LES VALEURS DE L’ŒUVRE Cesare Brandi 177 , Aloïs Riegl 178 et Barbara Appelbaum 179 accordent différentes valeurs à une œuvre. Elles ne sont pas exhaustives, et certaines d’entre elles sont communes à ces trois théoriciens. • L’une des principales valeurs de la fontaine anthropomorphe est sa valeur historique. L’objet est en effet associé à une période historique, témoignage du développement humain et de la création artistique : il renseigne sur un lieu de production, à savoir la manufacture De Klaauw, à Delft. La faïence* européenne en bleu et blanc avait pour but d’imiter la porcelaine* chinoise, mais dès le milieu du XVIIIe siècle – époque où fontaine a été produite – elle laisse peu à peu la place à la porcelaine* occidentale. La fontaine s’inscrit donc dans ce cadre de « dernier sursaut » de création de la faïence*. Les altérations et les anciennes restaurations de l’œuvre participent à sa valeur historique : les éclats, les rayures, les fêlures… correspondent à la « patine » de l’objet car elles attestent du passage de temps sur lui. Quant aux anciennes restaurations, elles démontrent le savoir-faire d’une époque, ou plutôt les balbutiements de la profession, et sont intéressantes à étudier du point de vue de son histoire. De cette valeur historique découle une valeur pédagogique180 : la fontaine est une œuvre muséale, qui, après restauration, pourrait être exposée en vitrine pour transmettre un enseignement au public car il existe peu d’œuvres similaires, surtout en France (valeur de rareté181) et qu’elle démontre un art de vivre, ou plutôt un art de la table (valeur d’usage182) car l’objet était utilisé au quotidien. • Parallèlement, l’objet a également une valeur esthétique183 car il a été créé dans un but artistique, autrement dit pour être agréable à regarder. C’est un objet à la fois domestique et décoratif. Riegl précise qu’un objet esthétique doit répondre à la notion de

Cesare Brandi, Théorie de la restauration, Paris, Monum, 2001. Aloïs Riegl, Le culte moderne des monuments, son essence et sa genèse, Paris, L'Harmattan, 2003. 179 Barbara Appelbaum, Conservation treatment methodology, Paris, Butterworth-Heinemann, 2007. 180Ibidem, p. 204 : « Educational value » 181 Ibidem, p. 205 : « Rarity » 182 Ibidem, p. 204 : « Use value » 183 Cesare Brandi parle de la « double polarité esthétique et historique » d’une œuvre d’art (op. cit., p. 30). 177 178

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« kunstwollen ». Le terme a été défini comme « vouloir d’art moderne » 184 ou « volonté artistique ». Riegl pense que toute production d’objet traduit une pulsion de l’artiste. Ainsi, Isabelle Frank écrit que Riegl « analyse la volonté artistique comme étant la source cachée de toute évolution artistique, et l’investit d’un pouvoir créateur presque illimité »185. Du fait de son état de conservation, la fontaine ne peut plus être utilisée, mais son esthétique lui confère aujourd’hui une valeur artistique186 : de nos jours, elle est appréciée comme un objet d’art.

II- LES OBJECTIFS DE LA RESTAURATION • Notre objectif d’intervention est double et comprend conservation et restauration. La conservation se divise en deux notions : la conservation préventive et la conservation curative. La première entend toute « intervention indirecte sur le bien culturel afin d’en retarder la détérioration ou d’en prévoir les risques d’altération en créant les conditions optimales de préservation »187 tandis que la seconde se définit comme toute « intervention directe sur le bien culturel dans le but d’en retarder / stabiliser l’altération »188. La restauration, quant à elle, est une « intervention directe sur des biens culturels endommagés ou détériorés dans le but d’en faciliter la lecture tout en respectant autant que possible leur intégrité esthétique, historique et physique » 189 . De fait, le respect de l’authenticité d’une œuvre est essentiel190. Cependant, la distinction entre ces trois notions n’est pas toujours aussi nette : « ainsi, l’élimination d’un vernis peut relever à la fois de la conservation curative et de la restauration, l’application d’un revêtement protecteur de la restauration et de la conservation préventive, le réenfouissement de mosaïques de la conservation préventive et curative »191. • Nos objectifs sont de : - retirer les anciennes restaurations qui nuisent esthétiquement et à l’intégrité de -

l’œuvre restituer la lecture formelle en assemblant correctement les fragments (notamment ceux du chapeau) et consolidant les zones de faiblesse (fêlures) retrouver la continuité de la surface en comblant les lacunes et retouchant le décor

Riegl, op. cit., p. 95. Isabelle Frank, « Alois Riegl (1858-1905) et l’analyse du style des arts plastiques », Littérature, 1997, vol. 105, n°1, pp. 66-77, p. 69. 186 Appelbaum, op. cit., p. 203 : « Art value » 187 Confédération Européenne des Organisations de Conservateurs-restaurateurs (ECCO), La profession de conservateur-restaurateur, code d'éthique et de formation, Bruxelles, ECCO, mars 2003. 188 Loc. cit. 189 Loc. cit. 190 International Council on Monuments and Sites (ICOMOS), Document Nara sur l'Authenticité, Paris, ICOMOS, 1994, article 13. 191 ICOM-CC, Terminologie de la conservation-restauration du patrimoine culturel matériel, Paris, ICOM, 2008. 184 185

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• Chaque bien culturel représente une « richesse intellectuelle irremplaçable pour l’humanité » 192 . Le conservateur-restaurateur a donc une importante responsabilité : son travail s’apparente à celui d’un chirurgien, et chacun de ses gestes peut être lourd de conséquence 193 . Le conservateur-restaurateur doit comprendre le bien culturel : sa composition mais aussi ses altérations, autrement dit tout ce qui constitue sa « nature documentaire »194. Pour cela, il doit procéder à un examen et analyser soigneusement les observations relevées. Les traitements ensuite réalisés doivent répondre à plusieurs principes déontologiques. Le premier est l’innocuité de l’intervention195. Le traitement effectué sur une œuvre ne doit pas l’endommager davantage et doit être respectueux de sa structure, de ses matériaux constitutifs. Par conséquent, les produits utilisés doivent être stables aussi bien physiquement que chimiquement, afin de ne pas nuire au bien culturel au fil du temps. De plus, ces produits doivent être réversibles. Ségolène Bergeon explique que « le fondement de ce principe est la foi dans le progrès tant des matériaux disponibles que des méthodes de diagnostic ou de contrôle du travail »196. Enfin, la restauration doit être lisible, c’est-à-dire discernable. Elle doit être visible – par l’œil – et intelligible – du fait de la culture personnelle du spectateur197. Le but est de ne pas falsifier l’œuvre198, en trompant le spectateur sur son état actuel.

III- LES ATTENTES DU MUSÉE Les traitements varient selon le propriétaire et le devenir de l’œuvre 199 . Après restitution au musée, la fontaine sera peut-être exposée en vitrine avant d’être entreposée dans les réserves. Elle sera sujette aux variations hygrométriques et d’éclairage. Les traitements de restauration devront donc tenir compte de ces informations. L’objectif du conservateur, monsieur Roudier, est de présenter un objet inhabituel au public du musée. Par ailleurs, il souhaite restituer la lecture formelle et décorative de ICOMOS, op. cit., article 5. Conseil international des musées (ICOM), Comité pour la conservation, groupe de travail pour la formation en conservation et restauration, Le conservateur-restaurateur : une définition de la profession, Copenhague, sept. 1984, pp. 5-6, p. 6. 194 Ibidem, p. 5. 195 Ségolène Bergeon, « La conservation-restauration : une exigence d’interdisciplinarité », Culture et Recherche, nov.-déc. 1998, pp. 4-6, p. 4. 196 Loc. cit. 197 Ségolène Bergeon-Langle (juin 2002), « Lisibilité et réintégration », A.R.A.A.F.U., Paris, juin 2002, 121130, p. 122. 198 ICOMOS, Charte internationale sur la conservation et la restauration des monuments et des sites, Charte de Venise, IIe Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques, Venise, 1964, article 12. 199 Eve Bouyer, « Quelques pistes de réflexions sur la restauration perceptible des vases céramiques antiques », CeROArt, [En ligne] EGG1 (2010) : « On ne travaille généralement pas de la même façon pour un collectionneur privé, un conservateur de musée ou un archéologue ; autrement dit, le traitement d'un objet destiné à être exposé dans un intérieur ou une salle d'exposition ou encore à être étudié puis entreposé sera très souvent différent ». 192 193

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l’œuvre, autrement dit la restauration doit être peu discernable pour mettre en valeur les qualités esthétiques de la pièce. Il n’envisage cependant pas la restitution du robinet métallique. En effet, il est contraire à la déontologie de réaliser une restauration abusive qui donnerait l’illusion d’observer un objet intact. De fait, la restauration doit être lisible de près par les professionnels, mais très peu perceptible par des spectateurs inexpérimentés, à une certaine distance. Il faut avoir conscience de la fragilité de la pièce quand elle est manipulée, et ne pas être trompé par son état de conservation. De même, les spectateurs doivent constater le passage du temps sur l’objet, ce qui implique de ne pas toucher à sa patine. En ce qui concerne la restitution du robinet, cela impliquerait une interprétation et donc une falsification de l’objet car, même s’il existe des œuvres similaires, nous en ignorons l’aspect. De plus, parmi ces œuvres, plusieurs d’entre elles sont exposées sans leur robinet. Barbara Appelbaum définit la notion d’état idéal 200 qui a pour but d’orienter la restauration : au cours de son histoire, une œuvre incarne une multitude de valeurs et le restaurateur doit déterminer laquelle est la plus importante afin de décider des traitements à réaliser. Dans le cas du Bobbejak, nous souhaiterions retrouver son état avant qu’il ne soit cassé, et donc avant qu’il ne soit restauré : les matériaux exogènes qui recouvrent la fontaine seront retirés, et ses lacunes et lignes de cassure, à défaut d’être rendues invisibles, devront être discrètes. Toutefois, l’état idéal est, par définition, un mythe201 : l’état original de l’objet est un état inconnu qu’il est impossible de réellement retrouver. Il sera de fait impossible de dissimiler complètement les lignes de cassure du Bobbejak.

IV- CHOIX GLOBAL DE RESTAURATION La conservation et la restauration devront évidemment respecter les règles de déontologie : nous devons nous informer des matériaux utilisés lors des précédentes restaurations afin de déterminer des traitements adaptés pour les retirer, opter pour de nouveaux matériaux plus respectueux de la céramique, réversibles et stables dans le temps. Pour chaque étape, nous opterons d’abord pour le traitement le plus doux et le moins invasif pour l’œuvre. S’il s’avère inefficace, nous choisirons des techniques de plus en plus fortes.

Appelbaum, op. cit., p. 173 : « The ideal state is the physical state of an object that is considered most desirable by its custodian. […] the state that best embodies the object’s values. » 201 Ségolène Bergeon-Langle, « Les pièges du temps en restauration : réalités et conjectures », APROA, « Le mythe du retour à l’origine, Le conservateur-restaurateur face à l’authenticité et à l’interprétation », Bruxelles, 22 et 23 novembre 2007, Bruxelles, APROA, 2008, pp. 7-19, p. 7. 200

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IV.1. Conservation IV.1.1. Conservation préventive : conditionnement Dans une approche de conservation, nous devons anticiper les risques extérieurs qui pourraient nuire à l’œuvre, aussi bien lors de sa restauration à l’Ecole de Condé, que lors du transport de l’école jusqu’au musée, et lors du stockage dans les réserves du musée. Le conservateur du musée Grasset, monsieur Roudier, nous a confié le Bobbejak dans une boîte en plastique rigide, avec couvercle. L’œuvre est enveloppée de papier de soie et est calée par des plaques de polyéthylène extrudé de 5 cm d’épaisseur. Les trois inconvénients que cette boîte présente sont que l’objet y est installé à l’horizontale – ce qui signifie qu’il est appuyé sur des zones sensibles –, que la boîte est profonde – l’objet est difficilement préhensible – et qu’elle est opaque – or il est préférable que la lumière pénètre dans la boîte pour éviter que la restauration se dégrade. Nous envisageons une nouvelle boîte de conditionnement, plus adaptée aux conditions du Bobbejak et qui garantirait la sécurité de l’œuvre pour le transport et le stockage. Il est également nécessaire de réaliser une boîte qui accueillera les tessons après la dérestauration, ainsi qu’un coussin qui offre une surface de travail sécurisée pour effectuer toutes les tâches de la restauration.

IV.1.2. Conservation curative : nettoyage Le nettoyage vise à éliminer l’encrassement et les matériaux exogènes qui recouvrent l’œuvre et à retrouver la matière originale : il comprend donc le retrait de la poussière et des encrassements. Le nettoyage est irréversible : nous devons donc prendre garde à ne pas être trop extrême dans la réalisation, pour ne pas détériorer l’objet et effacer sa patine. Pourquoi nettoyer ? Le nettoyage est indispensable avant de procéder à la dérestauration car, au cours du décollage de la fontaine, la poussière pourrait pénétrer dans la pâte et s’y incruster. De plus, elle empêche de bien distinguer les zones de retouches tant ces dernières sont encrassées. Comment nettoyer ? Cependant, puisque la retouche va être retirée, nous ne voyons pas l’intérêt de la nettoyer méticuleusement. Nous nous contenterons d’un nettoyage léger et nous poursuivrons l’opération de nettoyage après la dérestauration. Ainsi effectuerons-nous un retrait de la poussière mobile, et une atténuation des zones encrassées… Le retrait des dépôts dépend quant à lui du protocole de dérestauration202. La surface émaillée de la fontaine ne se raye pas facilement. Nous pourrons procéder à un dégagement mécanique au scalpel si cela est nécessaire.

202

Puisqu’il s’agit des mêmes matériaux de restauration.

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IV.1.3. Dérestauration Qu’est-ce que la dérestauration ? La dérestauration est l’élimination des restaurations réalisées antérieurement sur l’œuvre et se caractérise par le démantèlement du collage, le dégagement des ajouts ou des comblements et des retouches. Toutefois, le terme « dérestauration » n’est pas attesté dans le dictionnaire. Il appartient plus à un certain jargon de la profession qu’à réellement un vocabulaire technique. De fait, la dérestauration est, par déduction, impossible car toutes les interventions passées ne peuvent pas être éliminées : elle n’existe pas au sens strict. Les conséquences des apports ou des suppressions sur un objet ne disparaîtront jamais. Pour ce qui est de « remettre en état », il faut encore définir l’état dont nous parlons203 car c’est lui qui orientera l’intervention. Pourquoi dérestaurer le Bobbejak ? La fontaine présente un comblement autour de l’emplacement du robinet. Au cours du temps, l’œuvre a donc connu des modifications, ou plus précisément des remaniements204 qui portent atteinte à la fois à sa valeur historique et sa valeur esthétique. Ce comblement masque ce qui nous semble être une caractéristique de la production, à savoir des éléments stylisés représentant des éclaboussures205. Ils ont sans doute été décrétés inesthétiques ou considérés comme des défauts de fabrication ce qui explique leur dissimulation. Certes, il fait partie de l’histoire de l’objet, mais il n’apporte aucune information, au contraire, il en cache. Il peut antidater l’œuvre, c’est-à-dire la décréter comme fausse, et doit donc être supprimé. Cependant, si le comblement est retiré, le tube métallique sera conservé et sera remis, séparément, au Musée Auguste Grasset. En effet, bien qu’il ne soit peut-être pas authentique, l’embout donne des informations sur l’usage de l’œuvre. • De même, les anciennes restaurations font partie de l’histoire de l’œuvre. Elles apportent des informations sur des techniques et des recettes employées par le passé. En les dérestaurant, une « page » de l’objet serait effacée. La dérestauration pose alors le problème de prendre en compte l’histoire de l’œuvre, avec « ses réparations, adjonctions, remaniements, rafraîchissements… »206.

Bergeon-Langle et Brunel, La restauration des œuvres d’art, Vade-mecum en quelques mots, Paris, Hermann, 2014, p. 17 : « (…) selon que l’on se réfère à un état idéal, à l’état primitif ou présumé tel, au dernier état connu avec certitude, à l’état de fonctionnement pour les objets qui ont une utilisé pratique ou encore à un état de présentation satisfaisant, la restauration suivra des voies très différentes et les résultats qu’elle produira n’auront rien de commun entre eux ». 204 Cesare Brandi, Théorie de la restauration, Paris, Monum, 2001, p. 59. 205 Ces éléments suggèrent quelque chose qui coule et donc sont en lien avec la fonction de l’objet. 206 Jean-Pierre Mohen, Les Sciences du patrimoine, identifier, conserver, restaurer, Paris, Odile Jacob, 1999, p. 194. 203

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Néanmoins la dérestauration peut être motivée par la protection de l’objet. Chaque intervention a une durée de vie au-delà de laquelle elle n’est plus solide ou esthétique207. Les matériaux utilisés sont visuellement désagréables, gênants et nuisent à la lisibilité de la forme et du décor. George Brunel écrit qu’il ne s’agit pas « d’effacer les traces du temps, mais d’en atténuer ce qu’elles ont de dégradant »208. De plus, ces matériaux représentent un danger pour l’objet : ils sont inadaptés à la pâte car ils sont plus durs qu’elle et ils ont vieilli et sont fragiles : les tessons se décollent et tombent ; ils peuvent alors se briser, ou être égarés… Dans ce cas, la valeur historique de la restauration ne suffit plus pour qu’elle soit préservée. La conservation de l’œuvre a la primauté. Il faut procéder à la dérestauration entière de l’objet. La pièce devra ensuite être reconstituée et assemblée afin de limiter la perte de fragments et en permettre la lecture. Quels risques ? La dérestauration est un travail délicat : le restaurateur doit être constamment attentif aux changements qui pourraient nuire définitivement à l’œuvre. Il doit être conscient des conséquences que pourraient avoir chacun de ses gestes, car une dérestauration, aussi minime soit-elle, peut supposer une dégradation de l’œuvre209. Par ailleurs, dans le cas de la fontaine, la dérestauration demande d’autant plus de précautions que nous en ignorons l’étendue : après avoir retiré les repeints, dans quel état découvrirons-nous le tricorne ? Y aura-t-il un comblement ou bien est-ce que tous les tessons seront présents ? Comment dérestaurer ? Lors des pré-tests, l’enduit de collage / comblement était sensible aux solvants acétone et éthanol. Nous avions utilisé des bains sur un prélèvement et le résultat avait été relativement satisfaisant : le matériau ne se solubilise pas, mais il se ramollit. De fait, le matériau, pour se retirer, semble devoir être complètement imbibé de solvant. Cependant, une action mécanique (scalpel) nous semble indispensable pour retirer l’enduit au fur et à mesure qu’il gonfle sous l’action des solvants.

IV.1.4. La consolidation Après désolidarisation des tessons, les fêlures devront être consolidées pour éviter qu’elles ne se propagent et aboutissent à la rupture de la céramique. La consolidation est une étape souvent irréversible210 car le produit pénètre dans la structure. Il doit donc être très stable dans le temps et relativement réversible.

Jacques Peiffer, La Céramique, expertise et restauration, Dijon, Faton, 2010, p. 159. Georges Brunel et José de Los Llanos, La Patine du temps, Paris, Paris-musées, 2011, p. 39. 209 Peiffer, op. cit., p. 172. 210 Marie Berducou, La Conservation en archéologie, Paris, Masson, 1990, p. 107. 207 208

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IV.2. Restauration IV.2.1. Le collage Pré-montage Avant de procéder au collage, nous réaliserons un pré-montage pour : - déterminer dans quel ordre les tessons devront être collés - constater si les fragments sont jointifs et donc si les tranches ont été correctement nettoyées pour ne pas engendrer de ressauts - anticiper et équilibrer les décalages engendrés par le choc Par ailleurs, en dérestaurant, nous découvrirons peut-être des lacunes (nous ne parvenons pas à voir le comblement à l’intérieur de la fontaine), nous devrons alors interrompre le pré-montage pour réaliser le comblement, car l’entrée de la fontaine est trop étroite pour que nous puissions y glisser la main et travailler le comblement après le collage de la pièce. Comment coller ? Le collage permettra de redonner à l’objet sa forme originelle et sa stabilité structurelle et d’en apprécier le décor. La forme est stable. Un collage par infiltration ne semble pas adapté pour l’œuvre car l’adhésif pourrait : - s’infiltrer sous la couche de revêtement et faire apparaître des taches - pénétrer complètement dans la pâte - s’insérer uniquement dans les creux des tranches et non pénétrer à cœur De plus si nous appliquons un primaire qui est de même nature que l’adhésif, le solvant contenu dans l’adhésif pourrait le solubiliser. Nous pensons donc réaliser un collage par contact, soit appliquer la colle sur une tranche, puis presser les deux fragments l’un contre l’autre et les maintenir avec des rubans adhésifs. Nous ne connaissons par l’état des tranches mais compte tenu de l’enduit qui les recouvre nous pouvons supposer qu’elles sont peu jointives, ce qui compliquera le collage. Il est possible qu’il y ait des jours*. L’adhésif ne devra pas assombrir les lignes de cassure : visuellement, il devra être discret et se rapprocher de l’état de matière de l’émail stannifère*. Ainsi, la couche de revêtement est-elle assez opaque : elle est de couleur blanche mais conserve une certaine translucidité. Il faudra donc sans doute teinter l’adhésif avec des pigments blancs. Ce dernier devra s’adapter à la porosité et à la résistance de la terre cuite : sa température de transition vitreuse (Tg) devra également être adaptée aux conditions d’exposition et des réserves. La Tg est la température au-dessus de laquelle les polymères

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deviennent « plastiques » et se déforment 211 . Il est alors possible qu’un collage se désolidarise.

IV.2.2. Le comblement Le comblement consiste à restituer les parties lacunaires dans le but d’assurer la stabilité de la structure de l’objet et de rendre sa forme plus lisible212. Pourquoi combler ? L’objet est peu lacunaire et il ne semble pas nécessaire de procéder à un comblement. Les lacunes ne compromettent ni la forme, ni la structure, ni la fonction de l’œuvre : selon la règle de l’unité potentielle définie par Brandi213, la forme reste compréhensible, la structure est stable, et, en ce qui concerne la fonction, il est évident que la fontaine ne pourra plus jamais être utilisée ou contenir une boisson. De plus, même si le comblement sur la cuisse droite masque une lacune traversante, la valeur pédagogique de la fontaine n’est pas mise à mal. En revanche, la lacune du bouchon le fragilise et gêne son emplacement dans le tricorne. Parallèlement, il s’agit d’une œuvre décorative, destinée à être exposée, et les lacunes attireraient trop l’attention du spectateur214. Le souhait du propriétaire nous conforte dans notre choix de procéder au comblement des lacunes, afin de redonner son aspect esthétique à l’œuvre. Cela implique de combler les lacunes et éventuellement les lignes de cassure si elles sont trop visibles, car elles risquent alors d’attirer le regard du spectateur et de nuire à la lisibilité de l’œuvre. Dans ce sens, Ségolène Bergeon-Langle différencie la lacune du manque : la réintégration d’une lacune a essentiellement pour but d’assurer la compréhension d’un objet, tandis que la réintégration d’un manque concerne la conservation ou l’esthétique215. Comment combler ? Les éclats de surface participent à l’histoire de l’œuvre et sont la preuve de son passage dans le temps. Ils ne seront donc pas comblés afin de ne pas tromper le spectateur sur la nature de l’objet. De plus, les lignes de cassure ne seront pas réintégrées si le collage est satisfaisant c’est-à-dire si les lignes de cassure sont très jointives et donc peu visibles.

Charles Velson Horie, Materials for Conservation, organic consolidants, adhesives and coatings, Butterworths, 1987, p. 18 : « As the temperature is raised, the polymer changes from a glassy state to a rubbery one. (…) The temperature of this transition is called the glass transition temperature. » 212 Marie Berducou, op. cit., p. 113. 213 Brandi, op. cit., p. 37. 214 Isabelle Garachon, « Restauration de céramiques et terres cuites au Rijksmuseum d’Amsterdam : choix de visibilité et de lisibilité », ARAAFU, 2003, pp. 131-137, p. 134. 215 Ségolène Bergeon-Langle, « De l’usure au manqué, de la reintégration au comblement », APROA-BRK, La problématique des lacunes en conservation-restauration, 20-21 nov. 2005, posprints, Bruxelles, APROA, 2007, pp. 7-9. 211

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Cependant les éclats de structure et les lacunes seront comblés. Le matériau de comblement devra donc être invisible à plus d’un mètre de l’objet : pour cela, il doit avoir une teinte, une texture et une brillance proches de l’émail. Nous pensons donc à un comblement à niveau, c’est-à-dire qu’il se situe au même niveau que la surface, dans la continuité de la forme, et teinté dans la masse pour avoir une tonalité proche de la couleur de fond de la surface originale et pour faciliter le travail de retouche. Enfin, le comblement se limitera aux contours de la lacune.

IV.2.3. La retouche Pourquoi retoucher ? La retouche des lacunes permet de ne pas attirer le regard et d’assurer une continuité du décor216. Elle offre ainsi un ensemble harmonieux. La déontologie impose que la retouche soit visible jusqu’à une certaine distance. Le spectateur ne doit pas être trompé et doit pouvoir faire la différence entre les parties retouchées et la céramique originale. Comment retoucher ? Le choix de retoucher implique deux éléments : la couleur de fond qui correspond à l’émail blanc, et le décor au bleu de cobalt. Il n’est pas nécessaire de procéder à la retouche de la couleur de fond si le comblement l’imite parfaitement. La couleur bleue est souvent difficile à trouver car elle implique le problème du métamérisme 217 . Il s’agit d’un phénomène optique : deux couleurs métamères « produisent la même impression visuelle sans avoir la même composition spectrale » 218 . Autrement dit, une couleur changera de teinte en fonction de son éclairage. En accord avec le conservateur, le degré de réintégration a été arrêté sur une retouche semi-illusionniste. Cependant les éléments du décor sont traités de façon aléatoire, même s’ils sont répétitifs : les écartements, les courbes, les fleurs… diffèrent constamment. Il est alors impossible de connaître l’emplacement exact des éléments qui manquent. La retouche se limitera aux contours de la lacune, et la technique de réintégration devra être perceptible : le décor sera ainsi suggéré grâce à une teinte plus claire ou à des petits points juxtaposés.

Garachon, op. cit., p. 134. Susen Buys, Victoria, Oakley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, ButterworthHeinemann, 1996, p. 201 : « the only way to ensure perfect colour-matching under all lighting conditions is to select pigments with similar reflectance curves to that of the original colour to be matched (...) the transparency or opacity of a pigment depends on the thickness or thinness of the coating and the method of application. 218 DICTIONNAIRE LAROUSSE, Métamère [en ligne] Disponible sur : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/métamère/50868, [Consulté le 12/06/2017] 216 217

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IV.2.4. Sécurité du bouchon Pourquoi ? Le bouchon a connu plusieurs chocs qui l’ont altéré à de nombreuses reprises. Lors de la manipulation de la fontaine, le bouchon est tombé. Après la restauration de l’œuvre, ce problème risque fortement de se reproduire219. Comment ? Deux solutions sont envisageables : soit nous présentons le bouchon à côté de la fontaine, dans un écrin qui le met en valeur ; soit nous trouvons un système de fixation du bouchon dans le tricorne, de telle sorte qu’il conserve son emplacement d’origine mais ne risque pas de chuter et de s’altérer. Dans ce cas, le bouchon devra pouvoir être facilement retiré du tricorne et non y être fixé de façon définitive. Nous penchons pour cette deuxième proposition : nous pourrions réutiliser le système d’accroche initial en reliant le bouchon à la fontaine avec un cordon transparent ou un fil de nylon. Ce système est notamment utilisé au Getty Museum pour sécuriser les couvercles de certains objets. Lorsque le bouchon est positionné dans le tricorne, il pourrait y être maintenu par une mousse ou un caoutchouc.

Fig. 98 : Œuvre avec fil de nylon

IV.2.5. Réécriture des marquages La fontaine et le bouchon ont deux marquages différents, respectivement V.F.453.1 et V.F.453.2. Pour ne pas interférer avec les produits utilisés lors de la restauration, ces marquages seront effacés. Mais par respect pour l’histoire de l’œuvre, ils seront réinscrits à la fin du travail. La manière de procéder sera la même et consistera à poser une couche de vernis, puis à écrire les marques à l’encre de Chine et à les couvrir d’une couche de vernis de protection.

Conclusion Cette proposition est établie sans avoir une visibilité totale de l’état de l’objet. Il s’agit donc d’une proposition idéale, appuyée sur nos observations. Mais des modifications futures sont envisageables en fonction de nos recherches et de l’avancée des étapes. Pour déterminer les produits que nous utiliserons, nous devons effectuer des tests et établir une sélection. 219

Cf. Diagnostic, p. 74 et 75.

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Chapitre 4 : TRAITEMENTS DE CONSERVATION-RESTAURATION Les traitements sont élaborés étape par étape. Nous commencerons d’abord par la dérestauration de l’œuvre, puis nous aborderons les traitements préventifs qui ont été mis en place, avant de traiter du collage, du comblement et de la retouche.

I- CONDITIONNEMENT POUR LA MANIPULATION, LE TRANSPORT ET LE STOCKAGE Le Bobbejak collé (avant et après restauration) doit être conservé dans une boîte, dite boîte de présentation. Dans cette boîte, l’objet doit tenir à la verticale, c’est-à-dire debout sur son pied, afin de minimiser les tensions sur certains éléments très en relief, comme le tricorne, ou la tresse de cheveux. De plus, l’objet doit être calé dans la boîte de présentation par un matériau qui amortira les éventuels chocs220. Après avoir été décollés, les tessons doivent être stockés dans plusieurs boîtes. Les tessons seront regroupés selon leurs mesures. Ces boîtes auront des dimensions plus petites que la boîte de présentation et seront donc plus manipulables. Les tessons décollés ne doivent pas être en contact les uns avec les autres pour éviter d’endommager des tranches qui peuvent être fragiles. Ils doivent être bien immobilisés. Enfin, un coussin est nécessaire pour protéger l’objet de la surface dure du plan de travail. Il permet de le manipuler et de travailler sans risque. Cahier des charges Les matériaux utilisés doivent être : - légers, manipulables - stables - non abrasifs - indéchirables - robustes - non acides - imputrescibles - résistants aux chocs, aux vibrations et à l’eau

Denis Guillemard et Claude Laroque, Manuel de conservation préventive, Gestion et contrôle des collections, Dijon, OCIM, 1999, p. 61. 220

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Mise en œuvre Quelle boîte de présentation ? Nous ignorons si, après sa restauration, l’objet sera réinstallé en réserve ou s’il sera exposé dans une vitrine. Par mesure de précaution, nous préférons envisager la première hypothèse. Dans ce cas, la boîte de stockage doit être robuste, durable mais aussi, lors de son ouverture, assurer une bonne préhension de l’objet. Nous nous sommes tournée vers une solution peu coûteuse et respectueuse du cahier des charges et de la déontologie. La principale difficulté est de trouver une boîte plus haute que longue. Or, le plus souvent, nous trouvons l’inverse dans le commerce. Nous avons acheté à Leroy Merlin deux boîtes Modular clear box 221 en polypropylène, soit un plastique qui convient au conditionnement à long terme 222 . Nous les avons superposées l’une sur l’autre (ouverture contre ouverture) de telle sorte qu’elles ne forment plus qu’une grande boîte, haute de 60 cm. Ce montage répond à nos principales

30,5 cm

34 cm

39,5 cm

Fig. 99 : Boîte Modular clear box exigences : le Bobbejak est positionné debout, et il peut être manipulé facilement. En effet, en ouvrant la boîte, l’objet se trouve découvert de moitié. Afin d’assurer un système de fermeture de la boîte de présentation, quatre trous sont percés avec un foret de 3 mm sur les bords des deux boîtes223 (deux trous sur une face et deux trous sur une autre) et des vis avec boulons sont installées (Fig. 100). Pour éviter que les trous n’endommagent et ne fissurent le plastique, ils ont été percés face aux renforts des bords, car c’est une zone moins sensible. De plus cette Fig. 100 : Boîte vide fermée par des vis solution nous offre un point de repère et facilite le bon positionnement des boîtes l’une sur l’autre. Pour ouvrir et fermer la boîte il faut donc viser ou dévisser les quatre vis avec un petit tournevis.

Elles mesurent chacune 30,5 x 34 x 39,5 cm et coûte 8,90€ l’unité. Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF), Vade-Mecum de la conservation préventive, Paris, C2RMF, p. 24. 223 Les trous ont été percés sur les deux faces les moins larges de la boîte. 221 222

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Quel matériau amortissant ? Nous avons dit que la boîte de présentation devait comporter un matériau amortissant, d’une part pour protéger le Bobbejak des chocs, et d’autre part, pour éviter que celui-ci ne touche les parois de la boîte. La mousse en polyéthylène répond à nos critères : sa faculté antichoc et sa stabilité physique sont très bonnes et elle n’est pas Fig. 101 : Ethafoam® nocive 224 . Compte tenu du coût financier, nous optons pour une mousse polyéthylène extrudée, Ethafoam®225, plutôt qu’expansée. L’Ethafoam® est une mousse blanche, résistante et de densité moyenne226. Elle peut être découpée sur mesure et servir de matériau de rembourrage ou de calage227. Monsieur Roudier nous a donné son accord pour réutiliser les mousses en polyéthylène extrudées qu’il avait installées dans la boîte de transport, épaisses de 5 cm. Parallèlement, nous achetons au près du fournisseur Raja228 des plaques de la même mousse mais d’épaisseur moindre, soit 2,5 cm. La densité de la mousse est moyenne : elle est à la fois suffisamment souple pour amortir les chocs et épouser les formes du Bobbejak en cas de pression, et assez dense pour assurer un maintien de l’objet. Nous positionnons une plaque de mousse sur chaque paroi de l’une des deux boîtes, de telle sorte qu’elles soient disposées tout autour du Bobbejak. Les parois qui sont dans le sens de la profondeur de la boîte sont couvertes de mousses épaisses de 5 cm tandis que les parois qui sont dans le sens de la largeur de la boîte sont recouvertes de mousses épaisses de 2,5 cm.

Mousse B

Mousse A

Mousse C Mousse E Mousse D

Fig. 102 : Numérotation et mesures des plaques de mousse

Légende : Mousse du musée Grasset (5 cm d’épaisseur) Mousse achetée (2,5 cm d’épaisseur)

Guillemard, Laroque, op. cit., p. 60. Voir fiche technique en Annexe n°12 p. 266. 226 CONSERVATION RESOURCES, Ethafoam, [en ligne] Disponible sur : http://www.conservationresources.com/Main/section_10/section10_16.htm, [Consulté le 13/06/2018] 227 RAJA, Plaque mousse polyéthylène Blanc, [en ligne] Disponible sur : https://www.raja.fr/calageprotection/plaque-profile-et-manchon/plaques-de-calage/plaques-mousse-polyethylene-densitemoyenne_PDT01317.html [Consulté le 13/06/2018] 228 20,50€ les six plaques. 224 225

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Avec une telle installation, le Bobbejak n’est pas suffisamment stabilisé, c’est pourquoi nous découpons deux petites cales en polyéthylène qui sont installées devant et derrière l’objet, soit respectivement devant ses pieds et derrière le tertre229. Pour ne pas créer de point de pression entre la mousse et la céramique, les mousses sont creusées afin d’épouser les formes de la céramique (Fig. 103).

Fig. 103 : Cales creusées devant et derrière le Bobbejak (Vue de haut et vue traversale)

Fig. 104 : Finalisation des cales

Enfin, deux autres cales sont confectionnées230 et disposées sur les épaules du personnage du Bobbejak (Fig. 104). La mousse en polyéthylène n’est pas suffisamment douce pour être directement en contact avec le Bobbejak. Elle est donc être recouverte de Tyvek® 231 , soit un matériau synthétique non tissé fabriqué à partir de fibres de polyéthylène de haute densité. Le Tyvek® est léger, blanc, opaque, non pelucheux, et presque indéchirable. Il est non toxique et est résistant à l’eau, aux solvants, aux moisissures232. Comment conditionner les tessons décollés ?

Fig. 105 : Boîte finale

Après la dérestauration, les tessons doivent être conservés dans une boîte adaptée. En fonction de leur différence de taille, nous prévoyons quatre boîtes. Pour assurer un coût minime et éviter de disperser les boîtes et les tessons, nous optons pour une tour de rangement Orgamix233 en polypropylène.

63 cm

36,5 cm

26 cm Fig. 106 : Tour de rangement Orgamix

Le meuble a quatre tiroirs : - ceux des deux étages supérieurs mesurent 11 cm de hauteur : ils accueilleront les plus petits tessons de

Les cales mesurent respectivement 24 x 17 x 5 cm et 19 x 17 x 5 cm. Leurs dimensions sont de 2,5 x 5 x 28 cm. 231 Voir fiche technique en Annexe n°13, p. 267. 232 CAMEO, Tyvek [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Tyvek [Consulté le 13/06/2018] 233 Elle mesure 63 x 26 x 36,5 cm, en prenant en compte la structure de la tour, et coûte 19,90€. 229 230

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l’œuvre, soit les fragments du bouchon, du tricorne et les plus petits qui composent le tertre et l’habit du personnage. ceux des deux étages inférieurs ont une hauteur de 18 cm : l’un deux accueillera exclusivement la tête et le ventre du personnage qui ne forment qu’un seul morceau de taille imposante234. L’autre tiroir recevra les gros tessons qui composent le tertre et les jambes du personnage235.

A l’instar de la boîte de présentation, le fond des tiroirs est recouvert d’une plaque de mousse Ethafoam® de 2,5 cm d’épaisseur, elle-même recouverte de Tyvek® (pour ne pas abraser les tessons). Dans le cas du fragment qui représente la tête et le ventre du personnage, un coussin de 20 x 20 cm est confectionné pour éviter que le fragment ne roule. Pour cela, nous remplissons un sachet de congélation de 220g pulpe de papier, soit un matériau souple et malléable qui épouse les formes de la céramique et l’immobilise sans exercer de pression. Le sachet de congélation est ensuite recouvert de Tyvek®.

Fig. 107 : Disposition de la mousse Tyvek® dans les tiroirs

Plaque de travail, coussins et cales La confection d’une plaque de travail est nécessaire pour la manipulation de l’objet. La plaque est plus grande que l’œuvre, et suffisamment épaisse pour qu’elle y soit stable. A nouveau, nous optons pour une plaque en polyéthylène extrudée236, recouverte de Tyvek® : le Bobbejak peut y être installé verticalement sans autre précaution car il est stable. Néanmoins, il est nécessaire de concevoir d’autres dispositifs pour les cas où il sera allongé sur le dos ou sur le côté, afin de soulager les tensions au niveau de la tresse ou du tricorne. Avec des sachets de congélation remplies de lentilles sèches, nous fabriquons trois coussins cousus dans du Tyvek®. Une petite cale en mousse souple est également faite.

Fig. 108 : Confection des coussins de lentilles sèches

Un des coussins est réalisé dans des dimensions supérieures aux deux autres : les lentilles sèches ont donc plus d’espace pour s’étaler et le coussin a un aspect moins Il mesure 22,5 cm de hauteur et 16,5 cm de largeur. Leurs dimensions maximales sont de 19 cm de longueur et de 10 cm de largeur. 236 De 36 x 56 x 5 cm. 234 235

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rembourré. Ce coussin est installé sous les reins et les fesses du personnage. Les deux autres sont placés de chaque côté du tertre. Étant donné qu’ils sont plus épais, ils stabilisent davantage le Bobbejak.

Coussin n°1 (18 x 10 cm) Cale (2,7 x 5 x 17 cm) Support de travail (36 x 56 x 5 cm) Coussin n°3 (21,5 x 10,5 cm)

Coussin n°2 (18 x 10 cm)

Fig. 109 : Bobbejak, couché sur le dos, sur son support de travail

Pour tous les coussins237, le fil utilisé est du fil de coton blanc. Il est doublé pour assurer une meilleure solidité de la couture. Cependant, au cas où les points de suture rompraient, les sachets de congélation qui contiennent la pulpe de papier et les lentilles sèches assurent un rôle de sécurité en empêchant les matériaux de se disperser.

Fig. 110 : Figure précédente, vue transversale

Coût total du conditionnement : (8,90 x 2) + 19,90 + 20,50 = 58,20 € Temps de l’intervention : 32 h

237

Coussins de travail et coussin dans la tour de rangement.

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II- NETTOYAGE ET DÉRESTAURATION La dérestauration est l’étape principale du travail de restauration du Bobbejak.

II.1. Nettoyage et retrait de la retouche La poussière s’est déposée sur la retouche et forme un voile qui s’est rigidifié. Nous souhaiterions effectuer un traitement qui nettoie à la fois la poussière238, et qui dérestaure la retouche. Le but est essentiellement de rendre visible la délimitation des anciennes restaurations. Cela nous permettra de connaître le nombre exact de tessons. Cahier des charges -

Seules les zones émaillées sont concernées : nous pouvons donc réaliser un traitement aqueux sans risque.

-

Le traitement doit être non abrasif239. Il faut donc analyser la solidité de l’émail car il pourrait souffrir de griffures ou être attaqué par la nature acide ou basique des produits de restauration. De plus les outils doivent avoir une dureté inférieure à celle de l’émail.

-

L’encrassement est si important que nous pensons réaliser une action couplée : chimique c’est-à-dire « qui par nature appartient à la chimie, qui relève de la chimie »240 et mécanique « qui est produit, exécuté, actionné par une machine, un mécanisme »241 autrement dit par un mouvement.

Choix des produits Lors des pré-tests, nous avions vu que la crasse se solubilisait à l’eau, et que la retouche gonflait avec de l’eau chaude. L’eau est polaire : sa structure moléculaire implique que l’eau crée des liaisons hydrogènes, capables de « dissoudre, ramollir ou faire gonfler des substances organiques dont les molécules contiennent assez de groupes polaires (souvent – OH) »242. De plus la saleté est souvent hygroscopique, autrement dit attirée par l’eau243. Sur l’ensemble du Bobbejak afin d’éviter que la poussière ne pénètre dans la pâte. CENTRE NATIONAL DE RESSOURCES TEXTUELLES ET LEXICALES, Abrasion [en ligne] Disponible sur : http://www.cnrtl.fr/definition/abrasion [Consulté le 04/01/2018] « Action d'user par frottement, grattement ou altération spontanée ». 240 CNRTL, Chimique [en ligne] Disponible sur : http://www.cnrtl.fr/definition/chimique [Consulté le 04/01/2018] 241 CNRTL, Mécanique [en ligne] Disponible sur : http://www.cnrtl.fr/definition/mecanique [Consulté le 04/01/2018] 242 Jonathan Ashley-Smith et al., Science for conservators, Cleaning, Conservation Science Teahcing Series, 1992, vol. 2, p. 76 « dissolve, solften or swell organic substances whose molecules contain enough polar groups (often –OH) ». 243 Ibidem, p. 14. 238 239

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Toutefois, les pré-tests ont indiqué que l’eau seule n’était pas assez efficace pour solubiliser la retouche. Pour accroître sa polarité, l’ajout d’un tensio-actif (ou détergent) est préconisé. Il s’agit d’un composé souvent issu du pétrole qui abaisse la tension superficielle – soit « la force qui maintient en contact les molécules de la surface d’un liquide, sur une longueur d’un cm » 244 – entre deux surfaces en l’occurrence, solideliquide. Cela va améliorer le mouillage. Les molécules tensioactives sont amphiphiles245 : -

la queue est lipophile : elle retient les graisses et est apolaire,

-

Fig. 111 : Micelle

la tête est hydrophile : elle est miscible dans l’eau et polaire. Elles forment des micelles246 qui absorbent la graisse. Un détergent est capable d’enlever les salissures, en particulier grasses. Il doit de préférence avoir un pH neutre. Ce dernier se traduit comme « une mesure de l’acidité ou de l’alcalinité d’une solution aqueuse ou d’une dispersion. C’est la mesure de la concentration d’ions hydrogène »247. Cette mesure est comprise entre 1 et 14 : entre 1 et 7, la solution est dite acide, et entre 7 et 14, elle est dite basique. En Restauration, un pH compris entre 5,5 et 8 est considéré comme neutre, autrement dit il n’aura pas un impact néfaste sur la céramique ou les produits de restauration.

Fig. 112 : pH adaptés aux matériaux Liliane Masschelein-Kleiner, Les Solvants, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1981, p. 15. 245 Autrement dit, elles sont composées de deux parties aux particularités différentes. 246 Ashley-Smith, op. cit., p. 83. 247 Jane Down, Adhesive compendium for conservation, Ottawa, Canadian Conservation Institute, 2015, p. 13. 244

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Quel type de tensio-actif ? Il existe différents types de détergents : les anioniques, les cationiques, les non ioniques 248 . Ces derniers sont doux 249 et faciles à nettoyer 250 . Contrairement aux autres tensio-actifs, ils « ne présentent pas de dissociation électrolytique en solution aqueuse »251 autrement dit ils ne vont pas former d’ions qui pourraient interagir avec la céramique, ni laisser de charge sur la surface.

Fig. 113 : Molécule de détergent non ionique

Il existe une multitude de tensio-actifs non ioniques. En restauration de céramique, le Tween® 20 et le Triton™ X100 sont des détergents qui sont utilisés. Les critères idéaux pour sélectionner un tensio-actif sont : -

« un pH légèrement acide ou neutre

-

un bon pouvoir mouillant

-

un bon pouvoir détergent

-

un rinçage facile (peu moussant)

-

une relative biodégradabilité

-

une forme liquide pour une bonne miscibilité à l’eau »252 Quel tensio-actif non ionique ?

Le Triton™ X-100 et le Tween® 20 ont des propriétés très proches, mais le Tween® 20253 est considéré comme plus doux, et plus facile à rincer. Il s’agit d’une solution aqueuse composée de 10% de polyoxyéthylène-sorbitan-monolaurate. Il est soluble dans de nombreux solvants, notamment l’eau. Il a un pH neutre, compris entre 6 et 8 à 20°C, et une toxicité faible. Richard Wolbers, Le Nettoyage des surfaces peintes, Méthodes aqueuses, Eyrolles, 2013, p. 40 : « Les amphotères sont des molécules soit anioniques soit cationiques, en fonction du pH de l’eau environnante ». 249 LABOME, Triton X-100, Tween-20, and More [en ligne] « Ils sont considérés comme surfactants doux car ils dissolvent les interactions lipide-lipide et lipide-protéine mais pas les interactions protéineprotéine et la plupart ne dénature pas les protéines. » [Consulté le 16/11/2017] 250 Frank Matero et al., « An approach to the evaluation of cleaning methods for unglazed architectural terracotta in the USA », Architectural Ceramics, their history, manufacture and conservation, sept. 1994, pp. 57-88, p. 70 : « Non-ionic detergents do not leave cations or anions on the surface when removed, whereas ionic detergents may leave a charged surface which can attract soiling. (…) As non-ionic detergents are polar enough to be soluble in water, they are not as difficult to remove from the surface as ionic ones ». 251 BASF France, « Les Tensioactifs non ioniques peu moussants de BASF », L’Actualité Chimique, Dunod, mars avril mai 1996, n°2-3, p. 58. 252William Bienstman, Benjamin Heyman, « Optimisation du nettoyage des tapisseries en laine et soie – Étude compartative de divers tensioactifs non ioniques », Coré, Déc. 2009, n°23, pp. 47-55, p. 49. 253 Cf. Fiche technique en Annexe n°14 p. 269. 248

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Choix de la technique Nous souhaitons réaliser une action couplée, c’est-à-dire à la fois chimique et mécanique. De fait, la retouche est parfois assez épaisse et une action mécanique pourrait favoriser sa solubilisation. Nous pensons ainsi utiliser un bâtonnet avec du coton : certes, la surface de contact avec la céramique n’est pas très grande mais elle permet un nettoyage progressif, contrôlé et non abrasif. Protocole Technique Bâtonnet avec coton

Matériel Bouilloire Verrerie Balance de précision

Matériaux Eau déminéralisée chaude Tween® 20

Nous commencerons par utiliser une faible concentration de tensio-actif. Si les résultats ne sont pas satisfaisants, nous en augmenterons progressivement la quantité. Mise en œuvre Nous avons commencé par utiliser une concentration très faible de Tween ® 20 : 1% dilué dans l’eau déminéralisée chaude 254 (à environ 60°C 255 ). Nous avons imprégné un bâtonnet ouaté dans la solution et avons commencé le nettoyage des zones retouchées. Etape 1

Etape 2

Etape 3

Fig. 114 : Étapes de retrait de la retouche

Etape 1. La poussière a été captée et la retouche s’est mise à gonfler, voire à se solubiliser. Nous avons donc poursuivi le traitement sur l’intégralité des retouches de la fontaine. Etape 2. Il arrivait parfois que la retouche soit plus difficile à réactiver : elle se contentait de gonfler. Nous avons alors utilisé un scalpel pour gratter délicatement la surface de la retouche, en prenant soin de ne pas rayer l’émail*256. Pour faciliter le gonflement de 5 g d’eau (99 %) pour 0,05 g de Tween® 20 (1%). 255 L’eau a bouilli à 100°C. Dès qu’elle refroidissait trop, elle était renouvelée. 256 Buys, Oakley, op. cit., p. 75 : « Where the underlying surface of the object is glazed, a sharp scalpel can be used to remove paint with little risk of damage. » 254

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certains repeints, nous avons également procédé à des petites compresses de coton imprégnées de la même solution. Elles étaient laissées quelques minutes, jusqu’à ce qu’elles refroidissent. Dans le cas du tricorne, la retouche réagit avec la solution chaude et une coloration brunâtre apparaît : il s’agit du vernis qui a été appliqué particulièrement généreusement sur cette zone de la fontaine257 et qui se solubilise. Etape 3. Nous avons ensuite nettoyé à nouveau l’émail avec la solution de Tween® 20 à 1%. Enfin, les zones nettoyées ont été rincées dans un bâtonnet ouaté et de l’eau déminéralisée. Avant

Après

Fig. 115 : Compresse sur la retouche du tricorne

257

Le phénomène est alors d’autant mieux visible.

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Avant

Après

Fig. 116 : Retrait de la retouche

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II.1.1. Les dépôts Les dépôts brun-vert et les dépôts jaune-orangé sont probablement des taches de vernis encrassées. Ils sont nettoyés avec la même solution que celle utilisée pour retirer la retouche à savoir un mélange d’eau déminéralisée chaude et de Tween® 20 à 1%. Avant

Après

Fig. 117 : Nettoyage des dépôts brun-vert et jaune orangé

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Les dépôts blanc-gris sont retirés au scalpel, en orientant la lame de façon à ne pas rayer l’émail. Avant

Après

Fig. 118 : Nettoyage des dépôts blanc-gris

Conclusion sur le nettoyage et le retrait de la retouche La technique proposée pour retirer la retouche n’était pas suffisamment efficace et le recours à un scalpel et à des compresses a été nécessaire. Le résultat obtenu est satisfaisant puisque l’intégralité de la poussière et surtout de la retouche a été retirée sans endommager l’émail. Les couleurs originelles du décor sont à nouveau visibles, ainsi que les lignes de cassure. Ainsi, nous avons un meilleur aperçu de l’état réel du Bobbejak : de fait les repeints étaient principalement sur l’émail* et non sur des comblements. Nous pourrons effectuer un second constat d’état après démantèlement de la pièce. Temps de l’intervention : 29h

II.2. Démantèlement Nous pensons que le matériau de comblement et adhésif est composé de mastic de vitrier, renforcé par de la gomme-laque. Il s’agit de produits naturels, susceptibles de réagir à la chaleur. De plus, les joints sont épais et nous ignorons l’épaisseur de la pâte à l’intérieur de la fontaine. Nous souhaiterions donc effectuer une action localisée, précise. Cahier des charges -

-

Utilisation d’une technique qui utilise de la chaleur. Compte tenu de l’épaisseur de la pâte, une imprégnation longue est nécessaire pour diffuser la chaleur à cœur. Une action prolongée agira ainsi sur l’ensemble de la céramique. La chaleur doit être progressive et uniforme, globale. Elle ne doit pas susciter de tension sur l’objet car il existe une différence de dilatation entre l’émail et l’argile*. Si cela n’est pas possible, il faut être certain de la solidité et de la cohésion de l’émail.

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Choix de la technique La casserole d’eau bouillante L’objet est placé sur une grille au-dessus d’une casserole d’eau qui chauffe progressivement. Ainsi les vapeurs sont sans pression. Il s’agit d’une technique douce avec une action prolongée. Elle est sans risque pour la santé car elle ne requiert pas l’utilisation de produits chimiques de nettoyage. Elle est considérée très efficace pour les céramiques épaisses. Elle nécessite cependant quelques précautions : l’œuvre ne doit pas être en contact direct avec la grille métallique258 car elle pourrait être rayée et elle doit être parfaitement maintenue par de cales, car, en se décollant sous l’effet de la chaleur, les tessons pourraient tomber. Enfin, les gouttes en formation sur la surface doivent être régulièrement essuyées pour éviter la formation de calcaire. Le générateur de vapeur Cette technique – non nocive pour l’homme – allie pression (2,7 bars) et chaleur (100°C) de l’eau. La pression est ajustable – plus le jet est près, plus il est puissant – et ses effets sont immédiats259. Très populaire au milieu du XXe siècle, elle permet de faire gonfler et de retirer les dépôts gras et organiques260. Cet outil a été adapté dans le domaine de la restauration, mais il est traditionnellement utilisé dans d’autres corps de métiers pour procéder à un travail de nettoyage ou de désinfection : sont concernés la dentisterie (prothèses dentaires), les pressings (textiles), la bijouterie (bijoux), l’agro-alimentaire (cuves et tuyauteries en inox)261. Néanmoins cette méthode comporte des risques : en restant trop longtemps focalisé sur une zone précise, cela peut provoquer une dispersion inégale de la chaleur dans la céramique et engendrer un choc thermique et donc une rupture. De plus cette technique est déconseillée lorsque l’objet est très poreux, ou présente une dorure… dans le cas d’une faïence*, la puissance du jet de vapeur pourrait provoquer le soulèvement d’écailles de la couche de revêtement. Néanmoins, l’émail du Bobbejak ne présente pas de fragilité. Il faut toutefois orienter le jet de pression vers l’intérieur des tranches et non l’extérieur, de façon à ne pas provoquer de tension sur les tranches ou l’émail*. Nous devons également nous protéger en portant des gants résistant à la chaleur et des lunettes de protection dans le cas où il y aurait des projections d’enduit lorsqu’il se

L’installation d’un linge est possible. Kenneth Watt, « Cleaning ceramics », Dust, Dirt and Debris: transcritps of Lectures given at the Ceramics and Glass conservation Group meetings, West Dean College, 25-27 April 1997, London, UKIC, 1997, p. 6. 260 Frank Matero et al., « An approach to the evaluation of cleaning methods for unglazed architectural terracotta in the USA », Architectural Ceramics, their history, manufacture and conservation, sept. 1994, pp. 57-88, p. 70. 261 AURA INDUSTRIE, Générateurs de vapeur industriels électriques [en ligne] Disponible sur : www.generateurvapeur.com [Consulté le 16/11/2017] 258 259

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détache. Enfin, il est recommandé de travailler sur une surface absorbante afin d’essuyer les coulures qui pourraient laisser des taches. Tests La casserole d’eau bouillante Un premier test est effectué avec la technique la plus douce, à savoir la casserole d’eau bouillante. Un intermédiaure262 est placé entre la grille métallique et l’œuvre et cette dernière est immobilisée par des coussins confectionnés dans le cadre du conditionnement263. De l’eau tiède est versée dans la casserole et mise à chauffer progressivement, jusqu’à ébullition. Au bout de deux heures, aucune réaction n’est visible. Nous décidons de tester le générateur de vapeur.

Fig. 119 : Test à la casserole d'eau

Le générateur de vapeur Le test est réalisé avec le générateur Minor 164264 sur le fragment du tricorne qui s’est désolidarisé. Sous le jet de vapeur, l’enduit gonfle, se ramollit jusqu’à prendre une texture extrêmement tendre voire caoutchouteuse, et se détache de la céramique. Une légère odeur de « pourri » est perceptible. Dès que l’enduit refroidit, il reprend sa dureté originale. Nous avions prévu « d’aider » l’enduit à se décoller de la pâte avec un scalpel, néanmoins cela n’a pas été nécessaire. Cette technique est validée. Avant

Fig. 120 : Test au générateur de vapeur Après

Un tissu de coton. Voir Boîte de conditionnement p. 96. 264 Voir Fiche technique en Annexe n°15, p. 278. 262 263

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Fig. 121 : Test de nettoyage au générateur de vapeur

Protocole Technique

Matériel

Générateur de vapeur

- Bac en plastique - Serviette éponge - Serre-joints - Mousses en polyéthylène extrudées - Coussins - Crochet de dentiste - Lunettes de protection - Gants protection thermique

Fig. 122 : Bobbejak enveloppé

Fig. 123 : Décollement de l'enduit sous l'effet du générateur

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Mise en œuvre La fontaine est placée dans un bac en plastique qui servira à recueillir l’excédent d’eau provoqué par le générateur de vapeur. De plus, elle est enveloppée dans une serviette éponge. La fontaine est inclinée afin d’offrir un meilleur angle de vue pour nettoyer les lignes de cassure et est calée par des mousses en polyéthylène extrudé et des coussins emballés265 dans des sacs plastiques pour éviter qu’ils ne soient trempés. Nous commençons par traiter les lignes de cassure du tricorne. L’opération est assez facile et rapide car nous avons accès aux deux côtés de la cassure. Puis nous entreprenons de désolidariser le corps. Nous faisons un « premier passage » sur l’intégralité des lignes de cassure afin d’évoluer de façon progressive. Néanmoins, nous devons avoir recours à un crochet de dentiste pour creuser légèrement l’enduit et aider à son ramollissement. Nous prenons soin à ne pas rayer l’émail*, ni à toucher la pâte dans la cassure.

Fig. 124 : Nettoyage des lignes de cassure

Fig. 125 : Après dérestauration du tricorne

Nous parvenons ainsi à détacher un fragment sur la face B de la fontaine, entre les jambes du personnage. Cela nous offre une ouverture pour avoir accès à l’intérieur du Bobbejak. Une lampe électrique est placée au niveau de la tête pour éclairer l’intérieur et nous pouvons constater que les tessons du tertre (face D) sont badigeonnés d’enduit. Fig. 126 : En cours de dérestauration L’intervention est longue et minutieuse. Lorsque les tessons ont été désolidarisés, nous avons pu nous rendre compte à quel point l’enduit était réparti en couches épaisses sur les tranches, mais le générateur de vapeur l’a rendu souple sur l’ensemble de la pièce. Il a ainsi été possible de retirer la majorité de l’enduit sur les tranches.

265

Confectionnés dans le cadre de la boîte de conditionnement, p. 96.

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Par ailleurs, nous avons constaté que l’intérieur de la fontaine était très encrassé et partiellement émaillé266. Certaines zones non émaillées présentaient ainsi des dépôts rouges ou noirs, probablement dus à l’absorption par la pâte des liquides que la fontaine contenait lorsqu’elle était en fonction – comme du vin par exemple.

Fig. 127 : Épaisseur de l'enduit

Fig. 128 : Exemple de tesson non émaillé à l'intérieur, avec dépôts

Les particules solides – poussière mais aussi morceaux d’enduit détachés à cause du générateur – ont été nettoyées avec un pinceau à poils synthétiques doux. Avant

Pendant

Fig. 129 : Dépoussièrage de l'intérieur

Nous avons poursuivi le nettoyage au générateur de vapeur pour retirer la majeure partie de l’enduit sur les tranches. Nous nous sommes aperçue que des résidus de gommelaque se trouvaient sous l’enduit : cela signifie que, pour renforcer le collage, la gommelaque a d’abord été appliquée sur les tranches avant le mastic.

266

Cela concerne six tessons.

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Avant

Après

Fig. 130 : Avant / Après nettoyage au générateur de vapeur

Les tessons ont ensuite été placés dans le meuble à tiroirs en plastique prévu à cet effet. Le buste du personnage a été posé sur le coussin afin qu’il en épouse les formes sans créer de tensions. Les tiroirs sont restés ouverts afin que l’air puisse circuler et permettre le séchage de la pâte. Ils ont séché pendant cinq mois. De plus ils n’étaient pas conservés dans l’obscurité, afin d’éviter tout développement de moisissures. En effet, les produits protéiniques qui ont été utilisés lors de la précédente restauration représentent un risque de source de nourriture pour les micro-organismes.

Fig. 131 : Après démantèlement

Fig. 132 : En conditionnement

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Au retour de la période de stages, l’encrassement sur l’émail à l’intérieur de la fontaine a été retiré avec un coton et de l’eau déminéralisée. Conclusion sur le démantèlement L’enduit utilisé pour le collage et le comblement réagit avec la chaleur, ce qui a permis de démanteler le Bobbejak avec un Fig. 133 : Après nettoyage de l'encrassement intérieur générateur de vapeur. Néanmoins, de nombreux résidus sont restés accrochés à la rugosité de la pâte. Avant de tenter de les retirer grâce à une autre technique, nous devons d’abord nettoyer des résidus de gomme-laque pour éviter de les faire irrévocablement pénétrer dans la pâte. De fait, nous avons eu confirmation de ce que le fragment de tricorne désolidarisé nous avait suggéré, à savoir que toutes les tranches ont d’abord été couvertes de gomme-laque avant que l’enduit ne soit appliqué. Le démantèlement nous a permis de constater que l’intérieur de l’objet est inégalement émaillé. Des dépôts se sont alors incrustés dans la pâte à nue. Etant relatifs à l’histoire de la fontaine, ces dépôts ne seront pas nettoyés. Temps de l’intervention : 13 heures et 45 minutes

II.3 Retrait des résidus II.3.1. Les résidus de gomme-laque La fontaine est désormais démantelée et la plus importante partie du mastic de vitrier a été retirée des tranches. En examinant les tranches, nous remarquons que, contrairement à ce que nous avions pensé, la gomme-laque n’a pas été mélangée à l’enduit pour coller l’objet : elle a d’abord été appliquée sur les tranches, avant l’enduit. De fait, en nettoyant le mastic avec le générateur, les résidus de gomme-laque apparaissent. Lumière naturelle

Lumière UV

Fig. 134 : Résidus de gomme-laque sous deux éclairages

Il s’agit d’une résine de couleur rouge produite par un insecte de la famille des Coccidés – Laccider lacca, Coccus lacca, ou Tacchardia lacca – qui vit essentiellement dans

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un arbre en Inde267. La gomme-laque est composée « d’esters d’acides gras hydroxylés et d’acides sesquiterpéniques à squelette cédrène » et contient également « entre 3 et 5% d’une cire »268. Quel solvant ? La gomme laque réagit avec de nombreux solvants. Le moins toxique pour l’homme est l’eau269. De fait, la gomme-laque gonfle en contact de l’eau chaude. Précisons que, si la gomme-laque devient insoluble en vieillissant, elle « conserve ses propriétés thermoplastiques, en se ramollissant lorsqu’elle est chauffée »270. Quelle technique ? Nous pensons poursuivre l’utilisation du générateur de vapeur qui combine la chaleur avec l’eau. Une action mécanique au scalpel sera requise pour faciliter le retrait de la gomme-laque. Si notre test s’avère peu concluant, nous chercherons un solvant qui retire la gomme-laque271. Test au générateur de vapeur Avant

Après

Fig. 135 : Avant / Après test au générateur de vapeur

Sous la pression du générateur, la gomme laque gonfle et se décolle d’elle-même. Nous devons cependant « aider » à son décollement de la pâte, en la grattant légèrement avec une lame de scalpel.

Liliane Masschelein-Kleiner, Liants, vernis et adhéisifs anciens, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1992, p. 106 : « La “sticklac” brute est lavée et triée (”seedlac”), puis fondue, filtrée et solidifiée en gouttes, ”button lac” ou en feuilles, ”shellac” ». 268 Loc. cit. 269 Marie Svoboda, « An investigation into the staining of ceramics from aged shellac repais », Glass and Ceramics, 2008, vol. 1, pp. 237-244, p. 243. 270 Susan Buys, Victoria Oakley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, ButterwothHeinemann, 1996, p. 190. 271 Sans provoquer de taches roses irréversibles. Cf. Marie Svoboda, op. cit.. 267

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Protocole Technique

Matériel Bac en plastique Serviette éponge Serre-joints Mousses en polyéthylène extrudées Coussins Scalpel Gants protection thermique

Générateur de vapeur

Mise en œuvre La même installation est prévue pour manipuler les tessons que pour démanteler la fontaine : les fragments sont placés dans un bac en plastique, calés par des coussins. Afin de les maintenir dans la position adéquate pour pouvoir manipuler le générateur de vapeur et gratter les résidus au scalpel, ils sont immobilisés à l’aide d’un serre-joint272.

Fig. 136 : Dérestauration en cours

Avant

Après

Fig. 137 : Retrait de la gomme-laque

Conclusion sur le nettoyage des résidus de gomme-laque La gomme-laque gonflait à l’eau. La plupart des résidus se sont retirés, mais ils ont tout de même laissé une légère coloration à la pâte. Il est désormais possible de procéder au nettoyage des résidus d’enduit. Temps de l’intervention : 4 h

272

Avec une serviette éponge comme interface.

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II.3.2. Les résidus d’enduit La grande majorité de l’enduit s’est décollée, néanmoins, il reste de nombreux petits résidus, incrustés dans les pores de la pâte. Nous ne souhaitons pas prolonger l’action du générateur de vapeur outre mesure en restant « focaliser » trop longtemps sur une zone précise. Nous préférons trouver une technique qui permettrait de faire gonfler les résidus d’enduit et ainsi de faciliter leur détachement sous l’action du générateur de vapeur.

Fig. 138 : Résidus d'enduit dans la pâte

Quelle technique ? La technique employée devra traiter la surface et ne devra pas demander la pénétration des produits dans la céramique. Pour cela il est possible d’utiliser des compresses de coton ou de pulpe de cellulose, mais elles ne permettent pas une action prolongée (les solvants s’évaporent rapidement) et peuvent laisser des fibres ou résidus. Nous nous tournons vers les gels. Développée dans les années 1980273, cette méthode permet également « d’obtenir une solution homogène de tous les produits », de « contrôler la durée de l’application et le pouvoir de dissolution du mélange »274. Quel solvant ? D’après nos tests de solubilité275, l’eau n’est efficace que lorsqu’elle est chaude. Or il n’est pas possible de réaliser un gel avec de l’eau chaude, mais avec de l’eau froide. Néanmoins lors des pré-tests, des prélèvements d’enduit avaient été immergés dans de l’acétone et de l’éthanol et avaient été ramollis par les solvants. Nous décidons d’effectuer un test avec ces produits. Quel gel ? Il existe différents produits pour obtenir un gel : -

les éthers de cellulose

-

l’acide polyacrylique

-

l’agar-agar

-

les argiles

Les seuls qui peuvent être mélangés avec un solvant organique et qui ne nécessitent pas d’eau sont le Klucel® (éther de cellulose) et le Carbopol® (acide polyacrylique). David Miller, « Scientific investigation of surface cleaning processes: quantitative study of gel residue on porous and topographically complex surfaces », ICOM Commitee for conservation, 13th Triennal Meeting Rio de Janeiro, 22-27 September 2002, preprints, London, James & James, 2002, pp. 245-251, p. 245. 274 David Liot, Véronique Stedman, « La Restauration de l’Éternel printemps, 1908, de Maurice Denis », Revue du Louvre, Déc. 1999, n°5, pp. 67-74, p. 74. 275 Voir résultats des tests effectués lors du constat d’état en annexe p. 262. 273

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Il existe plusieurs Klucel® : H, M, G, J, L ou E276. Le gel Klucel® G est celui qui est le plus utilisé dans le domaine de la Restauration. Par comparaison avec le Carbopol®, son pH est acide277 et ses propriétés épaississantes sont moindres. En effet, le Carbopol® forme un gel plus visqueux, pour une concentration plus faible 278 . Nous penchons alors pour l’utilisation du Carbopol®Ⓡ. Le Carbopol® a révolutionné le nettoyage moderne par gels279. Il s’agit d’un acide polyacrylique utilisé comme agent épaississant et gélifiant. Il est de nos jours largement employé, par exemple dans les produits cosmétiques ou encore la confection de médicaments pharmaceutiques 280 . La société chimique américaine Lubrizol le considère comme « le polymère carbomère dispersant le plus simple disponible aujourd'hui pour une utilisation dans des gels transparents et des systèmes d'émulsion (…). Le polymère Carbopol® fournit un épaississement très efficace et une excellente transparence, une puissance de suspension et une stabilité de l'émulsion »281. Afin d’obtenir un gel, l’environnement chimique de l’acide polyacrylique doit être compatible avec le solvant que l’on souhaite gélifier282, autrement dit cela revient à modifier les groupes d’acide carboxylique latéraux. Les amines tertiaires et secondaires sont utilisées afin d’établir des ponts entre les groupes acides du polymère et le solvant. Par ailleurs, le Carbopol® a un pH acide (2,5-3), il faut donc trouver un moyen de le rééquilibrer avec une base 283 . Richard Wolbers 284 a alors développé une technique où il mélange le Carbopol® à une amine, l’Ethomeen®, pour obtenir un gel neutre. Le gel Carbopol-Ethomeen présente pour avantage de pouvoir contenir beaucoup de solvant et de retenir efficacement, même les plus volatils (comme acétone). Pour des raisons de facilité de procuration du produit, nous sélectionnons le Carpobol® Ultrez 21285, commercialisé par CTS.

Claire Dupuy, « Les Solvants organiques neutres épaissis pour le nettoyage d’une couche picturale, Comparaison des acides polyacryliques et des éthers de cellulose comme gagents épaississant des olavnts organiques », CeROArt [en ligne] EGG2 (2012) : Leur différence réside dans leur degré de polymérisation qui régit la longueur de leur chaîne moléculaire. Chacun présentera alors une viscosité différente. 277 Loc. cit. 278 Jeffrey Warda et al., « Analysis of Agarose, Carpobol, and Laponite gel, Poultices in paper conservation », Journal of the American Institute for Conservation, fall/winter 2007, vol. 43, n°3, pp. 263279, p. 272 : « Carbopol showed similar working properties to methylcellulose when used for the removal of moisture-sensitive adhesives, even though if forms a more viscous gel at lower concentrations ». 279 Lora Vihrova Angelova et al, Gels in the conservation of Art, Londres, 2017, p. 209 280 SILVERSON, Carbopol® [en ligne] Disponible sur : http://www.silverson.fr/fr/industries/cosmetique/carbopol1 [Consulté le 16/12/2017] 281 LUBRIZOL, Carbopol® Polymer Products [en ligne] Disponible sur : https://www.lubrizol.com/LifeSciences/Products/Carbopol-Polymer-Products [Consulté le 16/12/2017] 282 Lora Vihrova Angelova et al, op. cit., p. 210 283 Paolo Cremonesi, Erminio Signorini, Un approccio alla pulitura dei dipinti mobili, Padova, Il prato, 2012, p. 42 284 Richard Wolbers, 2004, p. 38 : « … Ethomeen and Carbopol undergo an acid-base neutralization reaction with each other during the gel-forming process… ». 285 Voir fiche technique en Annexe n°16, p. 280. 276

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Quel Ethomeen® ? L’Ethomeen® est une amine polyéthoxylate, obtenue à partir de la noix de coco et aux propriétés tensio-actives, qui se présente sous la forme d’un liquide visqueux jaune. Il existe deux sortes d’Ethomeen : le C12 et le C25. Le premier est principalement soluble dans les solvants non polaires, tandis que le second est soluble dans les solvants non polaires et polaires. Or nous souhaitons justement utiliser des solvants polaires (éthanol et acétone). Nous nous tournons donc vers l’Ethomeen® C25286. Test Un gel Carbopol®-Ethomeen®-solvant se prépare dans les proportions 1/10/100 en poids. Néanmoins ce rapport dépend de la viscosité du solvant : plus un solvant est fluide, et plus le gel le sera également. L’acétone a une viscosité de 0,31 cP 287, elle est donc très fluide. Nous décidons ainsi de réduire le rapport à 1/10/80. Nous pesons les produits dans l’ordre suivant : Carbopol® 0,5g ; Ethomeen® 5g ; Acétone 40g Avant d’ajouter l’acétone, le Carbopol® – qui est sous forme de poudre blanche – est mélangé avec l’Ethomeen® afin de ne pas créer de grumeaux. Une fois que l’acétone est ajoutée, quelques gouttes d’eau sont versées : c’est elle qui va engendrer le processus de gélification288. Le gel est ensuite appliqué à la spatule, en épaisseur uniforme, sur toute la largeur de la tranche. Nous posons un film alimentaire dessus afin de ralentir l’évaporation des produits. Le gel reste posé une heure. Puis nous passons un coton imbibé d’acétone dessus pour le nettoyer, et aussitôt nous utilisons le générateur de vapeur. Les résidus d’enduit se détachent instantanément de la pâte et laissent la tranche propre. Avant

Pendant

Après

Fig. 139 : Retrait avec gel des résidus de mastic

Voir fiche technique en annexe n°17, p. 285. Liliane Masschelein-Kleiner, Les solvants, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1981, p. 79. 288 CTS, Préparation du gel : « sa fonction est précisément celle de permettre le « déroulement » des chaînes de l’acide, qui sinon resterait enroulé sur lui-même ». 286 287

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Protocole Technique Gel + générateur de vapeur

Matériel Balance de précision Spatule Film alimentaire

Matériaux Carbopol® Ultrez 21 Ethomeen® Acétone

Mise en œuvre Nous avons appliqué le protocole sur toutes les tranches des cassures du Bobbejak. Le port d’un masque de protection s’est révélé impératif car, bien qu’ayant nettoyé au préalable l’excédent de gel sur les tranches, le générateur dégageait des vapeurs de solvant désagréables. De même, la pose d’un seul gel sur les tranches n’a pas été suffisante. Il a fallu procéder à cinq applications de gels par tranche, mais également gratter l’enduit avec une lame de scalpel289 pour retirer tous les résidus.

Fig. 140 : Pose de gel

Fig. 141 : Protection du gel

Conclusion sur les gels L’utilisation répétée du générateur de vapeur a diffusé de la chaleur dans tous les tessons et provoqué le ramollissement des résidus qui étaient sur l’émail, à l’intérieur de la fontaine. Ils ont ensuite été retirés avec une lame de scalpel. Nous découvrons que la pâte n’est pas parfaitement uniforme : quelques points noirs et rouges sont visibles. Fig. 142 : Détail de la pâte

289

Après avoir retiré l’excédent de gel et juste avant de passer le jet de vapeur.

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De plus nous remarquons un petit trou sur une tranche de deux tessons (localisation fig. 143). Un pré-montage indique que ces fragments sont jointifs et que les trous se superposent. Il s’agit probablement d’une impureté organique qui devait être emprisonnée dans la pâte et qui s’est consumée lors de la cuisson de l’objet, laissant une « cavité » dans l’argile*.

Fig. 143 : Localisation des tessons avec trous

Fig. 144 : Trous dans les tranches

Malgré un nettoyage avec une technique de gel, l’Ethomeen® a pénétré dans la porosité de la céramique : une odeur de savon se dégage de la pâte. Nous allons donc devoir recourir à un moyen pour extraire l’Ethomeen®.

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Après démantèlement

Après générateur

Après gel

Fig. 145 : Étapes de retrait de l'enduit

Temps de pose des gels : 10 h Temps de l’intervention : 33 h

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II.4. Assainissement de la pâte Malgré un nettoyage des tranches avec des gels, l’Ethomeen® a pénétré dans la pâte : une odeur de savon se dégageait de la pâte. Cahier des charges - Le produit devra pouvoir drainer l’Ethomeen® qui a pénétré dans la pâte : il devra donc pénétrer dans la céramique et en être retiré par la suite -

Innocuité du produit (pH neutre)

-

Limitation des produits

Choix des produits Quelle technique ? Le solvant le moins toxique et le plus neutre est l’eau. Dans le cadre de la restauration de la pierre et des peintures murales, des cataplasmes d’eau avec de la pulpe de cellulose sont souvent réalisés afin d’extraire des sels ou de réaliser un nettoyage. Ces pulpes ont différents avantages : leur pH neutre leur assure une grande stabilité, elles ont un fort pouvoir de rétention, de diffusion et d’absorption, elles sont faciles et agréables à travailler et adhèrent au substrat même si elles sont appliquées de façon à rester à la verticale290. Elles sont insolubles dans l’eau mais hydrophiles291. Quelle pulpe de cellulose ? Parmi les pulpes disponibles, celles de la marque Arbocel® ont été largement étudiées et sont souvent employées en restauration : Arbocel® BC1000, BC200, BWW40, B800… Elles se distinguent par la longueur de leurs fibres. D’après l’étude de Charlotte Redman, la pulpe qui a une longueur de fibres et une densité intermédiaires est l’Arbocel® BC 200292, soit respectivement 300 μm et 60-80 g/l. Faut-il un intermédiaire ? Les pulpes de cellulose sont réputées pour laisser peu de résidus. Néanmoins, il est possible d’éviter totalement les résidus en utilisant un intermédiaire entre le substrat et le cataplasme, notamment du papier Japon293. Le grammage du papier ne doit pas être trop élevé car il pourrait altérer la bonne adhésion du papier à la céramique. Nous sélectionnons

Veronique Verges-Belmin, et al., « Powdered Cellulose Poultices in Stone and Wall Painting Conservation Myths and Realities », Studies in Conservation, 2011, vol. 56, n° 4, pp. 281-297. 291 Charlotte Redman, « Cellulose sorbents: an evaluation of their working properties for use in wall painting conservation », The Conservator, 1999, n°23, pp. 68-76, p. 69. 292 Voir fiche technique en Annexe n°18, p. 296. 293 Piero Baglioni, et al., Nanotechnologies in the Conservation of Cultural Heritage: A compendium of materials and techniques, Springer, 2014, p. 46. 290

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donc un grammage de 7g294, ce qui permet la bonne diffusion et absorption de l’eau tout en retenant les particules de pulpe et ainsi éviter les résidus. Protocole Technique

Matériel

Matériaux

Compresse

Bol Ciseaux Spatule

Pulpe Arbocel® BC 20 Eau Papier Japon 7g

Mise en œuvre Dans un bol en silicone, nous avons ajouté de l’eau déminéralisée à la pulpe Arbocel® BC200, de sorte à obtenir une sorte de purée liquide. Le papier Japon a été découpé de façon à avoir des dimensions proches de celles des tranches. Les bandes obtenues ont ensuite été placées sur les tranches et la pulpe de cellulose a été appliquée dessus à l’aide d’une spatule. En séchant, les résidus d’Ethomeen® étaient absorbés par capillarité et conféraient à la pulpe de papier une coloration jaune. L’opération a été répétée tous les jours pendant plus de deux semaines jusqu’à ce que les fragments soient propres. Toutefois, ceux qui sont partiellement émaillés continuaient à colorer la pulpe de papier. Nous avons décidé d’arrêter le nettoyage car il s’agit probablement de graisses et des résidus de boissons que la fontaine a absorbé lorsqu’elle était en fonction. Le Bobbejak a ensuite séché pendant deux semaines à l’air ambiant, tout en étant exposé à la lumière naturelle.

Fig. 146 : Application de la pulpe de papier sur le papier Japon

Fig. 147 : Compresse de pulpe de papier après séchage

Temps de pose des compresses : 360 h Temps de l’intervention : 47 h

294

Chez Sennelier.

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Avant

Après

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Avant

Après

Fig.148 : Avant / Après retrait de l'encrassement et des résidus

Conclusion sur la dérestauration La dérestauration était l’étape la plus importante de restauration. Elle a nécessité des traitements longs et répétitifs. La retouche et l’enduit de collage ont été entièrement retirés mais la pâte présente toujours quelques taches : nous pensons qu’elles sont dues aux liquides que la fontaine contenait lorsqu’elle était en fonction. Cependant, la pâte a retrouvé sa couleur d’origine et un aspect sain. Un pré-montage nous assurera qu’il ne reste aucun résidu et que les tranches sont jointives. Temps de pose des produits : 370 h Temps total de dérestauration : 127 h

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II.5. Deuxième constat d’état Nous pouvons dès lors corriger le constat d’état précédemment réalisé pour émettre des correctiosn en ce qui concerne l’état de surface et l’état de structure de l’objet.

État de surface • Ce que nous pensions être une lacune sur la cuisse droite du personnage est en réalité un grand éclat d’émail. Parallèlement deux lacunes se situent entre les jambes du personnage. La plus grande lacune est localisée sur le devant du tricorne : deux tessons n’ont aucun point de contact avec le reste du chapeau.

Fig. 149 : Grand éclat d'émail sur la cuisse droite

• Le réseau de fêlures sur la main droite est en fait traversantes (elles sont visibles à l’intérieur de la fontaine), mais elles sont extrêmement fines. • À l’intérieur de la fontaine, la pâte a mal été émaillée et est à nu. Des taches suspectes sont observables sur l’un des tessons. Elles ressemblent beaucoup à une bactérie qui se serait développée.

Fig. 150 : Points noirs sur la pâte à nu

Enfin, des défauts de fabrication sont devenus apparents : sur le terte et la collerette du personnage, des amas de dépôts sont visibles (Fig. 153). Ils se présentent sous une forme de grains – plus ou moins circulaires – en relief. Ils sont solidaires de l’émail. Il s’agit peutêtre de dépôt de cendre295, produits lors de la cuisson.

295

Nicole Blondel, Antoinette Fay-Hallé, Céramique : vocabulaire technique, Paris, Monum, 2001, p. 379.

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Fig. 151 : Défauts d'émail sur le tertre (Face C)

État de structure Nous pouvons aussi désormais localiser précisément les lignes de cassure. De fait, l’objet est cassé en seize tessons et non en treize : trois fragments de plus composent le tertre (il comprend au total onze fragments et non six). Le tricorne est composé de cinq tessons (et non de quatre). Face A

Face B

Face C

Face D

Fig. 152 : Lignes de cassure visibles après dérestauration

• La dérestauration a également permis de récupérer l’embout métallique et de révéler l’ornement autour du robinet : une moitié des volutes est lacunaire. L’embout est fortement corrodé. En assemblant les tessons et en replaçant l’embout dans le trou du robinet, nous pouvons constater que l’embout est de dimension inférieure au diamètre du trou. Cela signifie qu’il ne s’agit pas d’un élément d’origine et

Fig. 153 : Embout métallique

nous conforte dans notre choix de ne pas le recoller lors de la restauration. Il sera néanmoins placé dans un sachet minigrip et remis au conservateur du Musée Auguste Grasset.

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III- TRAITEMENTS PRÉVENTIFS Suite à la dérestauration de l’œuvre, nous avons pu nous rendre compte de l’état réel du Bobbejak et dresser un second constat d’état. Deux altérations nous semblent nécessiter une intervention préventive : les fêlures et le développement de microorganismes.

III.1. Nettoyage des fêlures et fixage de l’émail Un réseau de fêlures est visible près de la main droite du Bobbejak. Elles sont encrassées et se manifestent sous la forme de fines lignes noires dans l’émail.

II.1.1. Nettoyage Choix des produits Nous ignorons la nature de l’encrassement, c’est pourquoi nous réalisons différentes sortes de tests, d’abord par action chimique (compresse et gel) puis par action couplée (bâtonnet avec coton). L’utilisation du générateur de vapeur est à proscrire compte tenu de la fragilité d’une zone de l’émail qui se soulève. Test296 Compresse de coton Eau déminéralisée froide Tween 20 à 10% dans eau déminéralisée froide Acétone

Aucun résultat Aucun résultat Aucun résultat

Gel CMC 10% dans l’eau CMC (7% dans l’eau) + Triton Ethomeen-Carbopol Acétone-éthanol

Aucun résultat Aucun résultat Aucun résultat

Passage bâtonnet + coton Eau chaude + Tween 20 (10%) Acétone

Aucun résultat Allègement l’encrassement

de

Une action à la fois chimique et mécanique avec l’acétone comme solvant est parvenue à alléger la couleur noire des fêlures, toutefois les lignes grises restent visibles. Nous avons testé le même traitement sur l’éclat d’émail qui jouxte le réseau

296

Il aurait été intéressant de réaliser un test avec une argile.

Fig. 154 : Nettoyage des fêlures et de l'éclat d'émail

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de fêlures, et qui dévoile la pâte à nu : l’encrassement s’est aussitôt retiré. Avant

Après

Fig. 155 : Nettoyage à l'acétone

Nous pensons alors utiliser un agent blanchissant. Le plus utilisé en restauration est le peroxyde d’hydrogène 297 , ou eau oxygénée. Inventé en 1818 par le chimiste LouisJacques Thénard298, il joue également un rôle d’antiseptique. Il est incolore et a une viscosité légèrement supérieure à l’eau. Il se décompose en oxygène – dont les atomes attaquent les taches – et en eau299 (2H2O2 > 2H2O + O2). Ainsi ne laisse-t-il pas de résidu et n’est pas toxique. Cependant, il est corrosif pour la peau et les yeux et nécessite le port de gants et de lunettes de protection. Quelle technique ? En Restauration, elle est utilisée avec une compresse de coton ou de pulpe de papier qui est laissée en place sur la fêlure jusqu’à séchage complet. Nous favorisons la compresse de coton qui assure une mise en œuvre plus simple. Quelle concentration ? L’eau oxygénée ne doit pas être utilisée pure mais doit être diluée. Il en existe différentes concentrations. « Son titre commercial est de 130 volumes, à diluer dans au moins 50% d’eau »300. L’encrassement étant assez minime, nous procèderons à un nettoyage léger. Nous commencerons par une concentration assez faible, soit 30%. Voir fiche technique en Annexe n°19, p. 308. John Emsley, « The pure power of peroxide », New Scientist, 19 Février 1987, pp. 41-43, p. 42 : « He heated barium oxide, BaO, to produce barium peroxide, BaO2. He then added sulphuric acid to the barium peroxide to produce a solution of hydrogen peroxide and insoluble barium sulphate: BaO 2 + H2SO4 > BaSO4 + H2O2 » 299 Claire Gonnier (2008), Entre usage et décoration : conservation et restauration d'un ensemble de pots de pharmacie en faïence du XVIIIe siècle de l'apothicairerie de Saint-Amour (Jura) - Etude du comportement au vieillissement artificiel de sept vernis de protection, Mémoire de Master : Restauration-Conservation de Céramique, Saint-Denis, INP, p. 147. 300 Jacques Peiffer, La Céramique, expertise et restauration, Dijon, Faton, 2010, p. 177. 297 298

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Certains professionnels ajoutent quelques gouttes d’ammoniac pour accélérer le phénomène de blanchiment, mais cela peut engendrer la formation de sels. Nous ne préconisons donc pas ce mélange. Protocole Technique Compresse

Matériaux Coton Eau oxygénée dans 30 % d’eau Pipette Gants de protection

Mise en œuvre Nous réalisons une solution de 30% d’eau oxygénée dans l’eau déminéralisée, soit 6,4g pour 15g. De fines compresses de coton sont réalisées et placées sur les fêlures. Avec une pipette nous imprégnons les compresses de la solution préparée. Après 24h de séchage, les compresses sont retirées. Aucun résultat n’est visible. Nous décidons de ne pas poursuivre le nettoyage qui risquerait alors d’être abusif. Fig. 156 : Compresses d'eau oxygénée

Temps de l’intervention : 20 min

II.1.2. Fixage Après dérestauration nous nous sommes rendue compte que les fêlures étaient traversantes, cependant elles sont très fines. Une consolidation à cœur risquerait d’être inefficace car les produits pourraient se diffuser dans la céramique. Néanmoins un morceau d’émail se soulève légèrement sur l’un des doigts du personnage. Nous souhaiterions réaliser un fixage soit une consolidation superficielle sur cette zone, pour éviter que l’émail ne se détache de la pâte et ne soit perdu. Cahier des charges -

Réversible

-

Stable chimiquement

-

Respecte l’aspect de surface : peu brillant (car l’éclat d’émail à côté ne sera pas comblé) et n’assombrissant pas la couleur de la pâte

-

Soluble dans un solvant peu volatil et relativement pénétrant

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Choix des produits Nous évaluons à l’œil nu les éventuelles modifications de couleur et de brillance que les adhésifs ont provoqué sur la pâte. Pour cela nous appliquons au pinceau différents adhésifs sur des éprouvettes en terre crue. Aquazol 500 10% dans l’éthanol

Culminal MC 2000 2% dans l’eau

Primal WS24

Aquazol 200 10% dans l’éthanol

Eva Art

Acryl 33

PB 72 10% dans l’acétone

Mowital 10% dans l’éthanol

Fig.157 : Comparaison de couleur

Comme nous pouvons le voir, les acryliques – Paraloïd® B-72, Aquazol® 200 et Aquazol® 500 – modifient la couleur de la pate en la fonçant légèrement.

Fig. 158 : Comparaison de brillance

Le Primal™ WS24, l’Eva Art et l’Acryl 33 sont trop brillants. Restent le Culminal™ MC 2000 et le Mowital® B60HH : le premier ne modifie ni la couleur ni la matité tandis que le second consolidant donne un aspect légèrement satiné301. Cependant, le Culminal™ MC 2000 à 2% dans l’eau a une viscosité comprise entre 2100 et 2900 mPa.s302, contre 120 à 280 mPa.s pour le Mowital® B60HH à 10% dans l’éthanol. Le Mowital® B60HH303 est donc sélectionné pour la consolidation, car la solution sera plus à même de pénétrer dans la fêlure. L’adhésif se prépare dans l’alcool304. Il modifie néanmoins à peine la couleur de la pâte. ASHLAND « Product date, Culminal™ methylcellulose derivatives » [document électronqiue] http://www.brenntag.com/media/documents/bsi/product_data_sheets/material_science/ashland_cellul ose_rheology_modifiers/culminal_mc_mhec_pds.pdf 303 Voir fiche technique en Annexe n°20, p. 316. 304 CTS EUROPE, Mowital® B 60HH [en ligne] Disponible sur : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=2432 [Consulté le 13/11/2017] 301 302

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Quelle concentration ? La concentration de solvant doit être judicieusement choisie car si elle est trop élevée, l’adhésif se diffusera profondément dans la pâte ; si elle est trop faible, le consolidant sera trop visqueux et aura des difficultés à pénétrer dans la fêlure et à la consolider entièrement. L’éthanol a une viscosité de 1,08 Pa.s305. À 10% dans l’éthanol, le Mowital® B60HH est assez visqueuse et risque d’avoir des difficultés à pénétrer dans la fêlure fine. Nous réalisons des tests « à la goutte » de l’adhésif à des concentrations différentes dans l’éthanol : 2%, 5%, 8% et 10%. Celle à 5% dans l’éthanol est adéquate. Quelle technique ? Il est nécessaire de réaliser une infiltration. Pour cela il est possible d’utiliser différents outils : une seringue, un bâtonnet, une lame de scalpel, etc. La fêlure est facile d’accès. Pour limiter l’excès de consolidant, nous réalisons un test avec une seringue à insuline soit avec une aiguille extrêmement fine : le Mowital® B60HH à 5% dans l’éthanol sort de l’aiguille en très petites gouttes. Nous utiliserons donc une seringue à insuline. Protocole Technique Infiltration

Matériaux B60HH à 5 % dans l’éthanol Seringue à insuline

Mowital®

Mise en œuvre Le fragment représentant le buste du personnage est immobilisé de telle sorte que les fêlures soient parallèles à la ligne d’horizon, ce qui a pour but de limiter les coulures d’adhésif. Fig. 159 : Infiltration en cours

Temps de l’intervention : 5 min

III.2. Prévention de prolifération de microorganismes Après avoir retiré les matériaux exogènes à l’œuvre et ainsi finir la dérestauration, de petits points noirs se sont révélés sur une zone non émaillée d’un fragment correspondant à une partie de la base de la fontaine. L’idée qu’il s’agissait d’une bactérie a été émise. De fait, Liliane Masschelein-Kleiner, Les solvants, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1981, p. 70. 305

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il n’est pas rare de voir ce type de contamination sur les matériaux inorganiques306. Dans le cas des céramiques, les microorganismes peuvent se développer dans la porosité de la pâte, à cause de sa grande capacité à retenir l’eau307. Un prélèvement et un examen au microscope ont donc été effectués. L’analyse s’est révélée peu concluante, néanmoins, dans le but d’enrayer la propagation de microorganismes, nous recherchons un bactéricide à appliquer.

Fig. 160 : Points noirs sur la pâte à nu

Quel bactéricide ? En Restauration de papier, le bactéricide le plus utilisé est l’éthanol ou alcool éthylique (CH3CH2OH). Il se trouve facilement dans le commerce et a une toxicité faible pour l’homme. Il agit également comme fongicide et virucide. Quelle concentration ? L’alcool dénaturé est mélangé avec 30% d’eau, ce qui « favorise la pénétration de l’alcool dans la cellule »308. Les moisissures sont tuées par l’éthanol qui les déshydrate et dénature leurs protéines309. Quelle technique ? Outre la zone où les points noirs sont localisés, l’éthanol sera appliqué sur l’intégralité des zones non émaillées car la majeure partie d’entre elles présentent des dépôts – probablement organiques. Afin de faciliter l’application du solvant, ce dernier sera badigeonné au pinceau.

Giulia Caneva et al., Biology in the conservation of works of Art, ICCROM, Rome, 1991, p. 87. Loc. cit. 308 Jean-Marie Mougeolle, Progrès en dermato-allergologie - GERDA, Nancy, John Libbey Eurotext, 1998, p. 135. 309 John E. Dawson, Thomas J.K. Strang, « Le contrôle des moisissures dans les musées », ICC Bulletin technique, 1991, n°12, pp. 1-8, p. 4. 306 307

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Protocole Technique

Matériaux

Badigeon

Ethanol à 70% dans l’eau Balance Pinceau à poils doux

Mise en œuvre 20g d’éthanol sont mélangés avec 8,6g d’eau déminéralisée. La solution est appliquée sur les zones non émaillées des tessons, avec un pinceau synthétique à tête plate. Les tessons ont séché vingt-quatre heures à l’air libre, dans une pièce éclairée par la lumière du jour.

Fig. 161 : Traitement bactéricide

Temps de l’intervention : 15 min

Conclusion sur les traitements préventifs Ces opérations n’ont pas présenté de difficulté particulière. Il était nécessaire de nettoyer les fêlures avant de les consolider, car la saleté aurait été emprisonnée. Les fêlures conservent néanmoins une légère couleur grise, mais poursuivre le nettoyage pourrait présenter un risque pour l’œuvre. Le bactéricide est une étape importante pour le devenir de l’objet. Néanmoins pour enrayer la propagation de microorganismes dans la pâte, il est essentiel de garder le Bobbejak dans des conditions optimales de conservation et de limiter les variations hygrométriques.

Temps total des traitements préventifs : 35 min

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IV- COLLAGE La fontaine est une faïence*, soit une terre poreuse recouverte d’un émail. La pâte, au niveau des tranches, ne présente pas de fragilité de cohésion. La taille et le poids des tessons sont variables, et très inégaux (minimum de 3,8g et maximum de 863,1g). Le tricorne a une forme ouverte autrement dit les lignes de cassure des fragments ne sont pas parallèles à la ligne d’horizon, mais sont obliques. Ainsi, la gravité exerce-t-elle une importante force de clivage sur les joints de collage. Le reste du corps a une forme fermée ce qui implique que les fragments se « soutiendront » mutuellement. Après restauration, l’œuvre sera exposée quelques temps en vitrine, puis rejoindra les réserves muséales. Le conservateur, monsieur Roudier, nous a fourni les valeurs de température et d’hygrométrie des réserves et du musée qui varient entre 15 et 22°C et 50 et 60% HR310. L’objet n’ayant pas de lacune importante, l’assemblage des tessons ne présente pas de difficulté particulière. Cependant, le collage sera interrompu pour procéder au comblement des petites lacunes et ainsi avoir accès à l’intérieur de la pièce. Le tricorne est une exception : deux fragments n’ont aucun point de contact avec le reste du chapeau. Nous réaliserons un comblement amovible qui sera ensuite collé311. La surface est émaillée, soit brillante et blanche (pour le corps) ou bleue (pour le tricorne et tertre). Un pré-montage nous indique que certaines lignes de cassure sont discrètes. Il aurait été envisageable de teinter en blanc l’adhésif lorsque la ligne de cassure traverse une zone émaillée blanche, afin de rendre le collage presque imperceptible. Néanmoins cela aurait impliqué la préparation deux adhésifs : - l’un teinté pour les lignes de cassure dans l’émail blanc - l’un incolore pour les lignes de cassure dans l’émail bleu Nous ne teinterons donc pas l’adhésif car, d’une part, cela ajouterait une étape à l’opération de collage et, d’autre part, les deux adhésifs n’auraient plus les mêmes propriétés physiques et chimiques. Dans le cas où de petits éclats rendraient les lignes de cassure visibles, ils seront comblés.

310 311

Voir Annexe n°21, p. 324. Voir partie Comblement, p. 142.

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Cahier des charges -

L’adhésif doit être réversible. Il doit avoir une température de transition vitreuse (Tg) relativement élevée (minimum 40°C). L’adhésif doit être fluide, autrement dit il doit être peu visqueux. La viscosité peut être définie comme la résistance à l’écoulement d’un fluide312. Plus cette résistance est grande, plus le fluide est dit « visqueux ». De fait, Masschelein-Kleiner établit la métaphore que les molécules d’un fluide s’écoulent telle « une série de lames parallèles glissant les unes que les autres avec frottement et entraînement mutuel »313. Ce critère est primordial car les tranches des fragments à coller sont longues : l’adhésif risque de commencer à sécher le temps avant d’être complètement appliqué. De plus, la pâte étant poreuse, elle absorbera l’adhésif et accélèrera son séchage.

Choix des produits Il existe deux catégories d’adhésifs : -

les polymères thermoplastiques : ils forment des liaisons linéaires ou ramifiées qui sont fusibles sous la chaleur. Ils sont donc réversibles.

-

les thermodurcissables : ils forment des liaisons réticulées qui sont presque insolubles et donc irréversibles.

Un adhésif thermoplastique répond au cahier des charges. Il en existe différents types qui sont employés pour le collage des céramiques : -

les cellulosiques

-

les vinyliques

-

les acryliques

La viscosité s’exprime en poise (P) ou centipoise (cP), ou encore en Pascal secondes (Pa.s) ou millipascal secondes (mPa.s). Rapport de conversion : 10 P = 1Pa.s et 1cP = 1mPa.s 313 Masschelein-Kleiner, op. cit., p. 10. 312

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Vinyliques Avantages

Nom PVAC PVB

Inconvénients

Réversible même longtemps après314

Joints peu solides et jaunit315

Réversible, assez stable316

Devient cassant317

Cellulosiques Avantages

Nom Nitrate de cellulose

Facile à utiliser, sèche vite318

Acétate de cellulose

Plus stable cellulose321

que

les

nitrates

de

Inconvénients Devient cassant et résistant319 Toxique et instable320

moins

Devient cassant résistant322

moins

Acryliques Avantages

et

Inconvénients

Peuvent être travaillés longtemps323 Conservent leur flexibilité324 Résistent à la lumière et à l’oxydation325

Les acryliques sont les adhésifs qui répondent le mieux à notre cahier des charges. Il existe deux familles de monomères326 : -

les acrylates qui dérivent de l’acide acrylique

-

les méthacrylates qui dérivent de l’acide méthacrylique

Charles Velson Horie, Materials for Conservation, Organic consolidants, adhesives and coatings, Butterworths, 1987, p. 92. 315Jane Down, Adhesive compendium for conservation, Ottawa, Canadian Conservation Institute, 2015, p. 69 et p. 74. 316 Ibidem, p. 78. 317 Ibidem, p. 79. 318 Ibidem, p. 62. 319 Susan Buys, Victoria Oakley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, Butterworth Heinemann, 1996, p. 192. 320 Down, op. cit., p. 61. 321 Ibidem, p. 58. 322 Loc. cit. 323 Buys et Oakley, op. cit., p. 191. 324 Down, op. cit., p. 84. 325 Buys et Oakley, op. cit., p. 191. 326 Horie, op. cit., p. 103. 314

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Quel acrylique ? L’adhésif le plus utilisé et le plus documenté en Restauration est le Paraloïd® B72 327 . Il s’agit d’un copolymère composé à 70% de méthacrylate d’éthyle et de 30% d’acrylate de méthyle328 (P(EMA/MA). Il est réputé pour être extrêmement stable329 et est réversible dans le temps. Il se présente sous la forme de grains transparents et se prépare en solution dans un solvant. Il forme ensuite un film solide mais non cassant, qui est « insoluble dans l’eau et résiste bien aux agents chimiques – acides – bases. Il a également une bonne tenue aux agents atmosphériques »330. En Restauration, il peut être utilisé comme vernis, consolidant ou adhésif331 sur des matériaux variés332. Il a une Tg de 40°C et une dureté Knoop333 de 10 à 11334. Il brille335, son indice de réfraction Ir étant compris entre 1,47 et 1,49336. Ses propriétés sont « stabilité (résistance à l’oxydation, à la lumière, à l’hydrolyse et à une température modérée), transparence, résistance mécanique et réversibilité »337 . D’après une étude 338 qui analyse les propriétés (résistance et épaisseur du joint, jaunissement, vieillissement et temps de travail de l’adhésif) de différents adhésifs (époxy, nitrate de cellulose, acétate de polyvinyle, cyanoacrylate et acrylique), le Paraloïd® B-72 présenterait les meilleurs résultats339. Quel solvant ? Le Paraloïd® B-72 se prépare en solution dans des solvants : il est soluble dans de nombreux solvants340. Selon Stephen Koob341, la meilleure efficacité serait obtenue avec un mélange 50-50 de Paraloïd® B-72 et d’acétone342.

Voir fiche technique en Annexe n°22, p. 325. Down, op. cit., p. 85. 329 Horie, op. cit., p. 106. 330 Stefaan Florquin et al., « Etude comparative de quelques “colles universelles” », ConservationRestauration, 1986-1987, n°7-8, pp. 34-38, p. 38. 331 CAMEO, Paraloïd B-72 [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Paraloid@_B-72 [Consulté le 22/01/2018] 332 Bois, pierre, etc. 333 Test de dureté des matériaux fragiles – verre ou céramique – qui sont pénétrés par une pointe de diamant. (THOMASSET Thierry, « Tout sur les unités de mesure » [document électronique] 334 À titre de comparaison, le carbure de silicium à une dureté Knoop de 2500. 335 Down, op. cit., p. 85 « high gloss » 336 Florquin et al., op. cit., p. 38. 337 Stephen Koob, « L’utilisation de PB72 comme adhésif : son utilisation pour les céramiques archéologiques et autres matériaux », Studies in Conservation, vol. 31, 1986, pp. 7-14, p. 7. 338 Elvira Aura Castro et Maria Teresa Doménech Carbó, « An appraisal of the properties of adhesives suitable for the restoration of Spanish medieval ceramics », The Conservation Glass and Ceramics, 1999, pp. 114-131. 339 Ibidem, p. 126. 340 Buys et Oakley, op. cit., p. 192 : « Soluble in acetone, xylene, toluene, m-butanol, diacetone, alcohol, methylene chloride, ethylene dichloride, trichlorethylene, ethyl acetate, methylethylketone, dimethyl formamide and Cellosolve. » 341 Koob, op. cit., p. 9. 342 Castro et Doménech Carbó, op. cit., p. 126. 327 328

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Néanmoins l’acétone est très volatile et certaines tranches du Bobbejak sont longues et larges : le temps d’appliquer l’adhésif, il risque de devenir trop visqueux et de former des joints épais entre les fragments, ce qui provoquerait des ressauts dans le collage. Un mélange avec un solvant moins volatil serait plus adapté. Nous opterons pour un mélange d’acétone-éthanol à 75-25%. Quelle technique ? Les tranches des tessons sont larges et l’adhésif est visqueux. Un collage par contact sera donc effectué. Un collage par infiltration implique un risque de formation de bulles et une mauvaise uniformité du joint. Faut-il ajouter une charge ? Gregory Byrne explique que l’ajout d’une très petite quantité de silice colloïdale ou en aérosol 343 (0,1% par poids) dans un adhésif permet de « modifier les propriétés de mobilité, de plasticité, de thixotropie et de viscosité des adhésifs en dispersion, en suspension, en émulsion ou en solution »344. Cette silice très pure, extrêmement fine345 est obtenue de la façon suivante : lors de sa combustion en atmosphère hydrogène (H)-oxygène (O), le tétrachlorure de silicium (SiCl4) devient du dioxyde de silicium (SiO2)346. 2H2 + O2 > 2H2O SiCl4 + 2H2O > SiO2 + 4HCl 2H2 + O2 + SiCl4 > SiO2 > 4HCl En ajoutant de la silice colloïdale à un adhésif, on obtient un « gel adhésif thixotropique »347, autrement dit l’adhésif passe de l’état de gel à celui de liquide lorsqu’il est soumis à une agitation – car les forces exercées vont alors rompre les liaisons hydrogène qui unissent les molécules de silice. De même, lorsque l’adhésif est au repos, il redevient un gel. Cela signifie que, lors d’un collage, la force exercée sur deux tessons pour les coller va « solubiliser » l’adhésif qui se répandra mieux sur les tranches de la céramique, et créera

Gregory Byrne, « Formulation d’adhésifs par addition d’aérosols de silice colloïdale », Adhésifs et consolidants Xème Congrès International SFIIC, 1984, pp. 80-82, p. 80 : « Le mot « aérosol » a pour origine l’apparence de fumée du matériau pendant sa formation dans le four. » 344 Loc. cit. 345 Loc. cit. : « Particule sphérique dont le diamètre varie de 7 à 14 nanomètres ». 346 Anne-Sophie Ninino (2011), Etude et restauration d’un vase sigillé Déch.72 daté du IIIe siècle après J-C et provenant des ateliers de l’Est de la Gaule, Etude du comportement mécanique du Paraloïd Ⓡ B72 avec charge: la silice de pyrohydrolyse améliore-t-elle l’adhésivité du ParaloïdⓇ B72 ?, Mémoire de Mastère : Restauration-Conservation de Céramique et Verre, Paris, École de Condé, p. 101 : « La SiCl4 sous forme gazeuse réagit avec de l’eau (H2O) pour donner SiO2 et l’acide chlorhydrique (HCl). HCl étant un gaz, il est ensuite séparé de SiO2 sous forme solide. » 347 Byrne, op. cit., p. 81. 343

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ainsi un joint uniforme et fin. Grâce à la silice, le collage sera réalisé sans coulures et sa force d’adhésion sera renforcée. Stephen Koob reprend cette étude pour l’appliquer au Paraloïd® B72. Il confirme que l’ajout infime de silice « améliore les propriétés rhéologiques de l’adhésif »348. Faut-il poser un primaire ? Un primaire est, par définition, une première application d’adhésif. Il est très dilué afin de former un film fin protecteur et isolant. La pose d’un primaire n’est pas systématique. Cela dépend de la fragilité et de la porosité de la pâte : -

si les tranches sont fragiles, le primaire agit comme un consolidant

-

si elles sont poreuses, il « bouche » partiellement les pores, ce qui : o améliore l’adhérence au substrat et la résistance du collage349 o améliore le mouillage de l’adhésif et donc limite la quantité utilisée350 o rend le substrat plus compatible avec l’adhésif

o empêche la trop forte adhésion du matériau de comblement et donc améliore la réversibilité351 Le Bobbejak est une faïence* – la pâte est donc poreuse – mais surtout les tranches sont parfois peu jointives. La pose d’un primaire pourrait ainsi solidifier le collage. Quel primaire ? Afin de limiter les interactions entre le primaire et l’adhésif, nous utiliserons le même produit, à savoir du Paraloïd® B-72. Quel solvant ? Pour le primaire, il est préconisé d’utiliser un solvant volatil car il va éviter que le primaire ne pénètre trop profondément dans la pâte. L’acétone est sélectionnée. Pour la préparation d’un primaire, le Paraloïd® B-72 peut avoir différentes concentrations mais Adélie Réveillaud explique qu’il est plus adapté lorsqu’il est concentré à 10% dans l’acétone352.

Koob, op. cit., p. 9. Ibidem., p. 11. 350 Loc. cit. 351 Buys et Oakley, op. cit., p. 124 : « Neither Polyfilla nor plaster of Paris is easy to remove completely from the ceramic body once cured, although sealing the surface of the ceramic (e.g. with Paraloid B-72 of poly(vinyl acetate) emulsion) will greatly improve reversibility. » 352 Adélie Réveillaud (2012), Restauration d’un plateau en faïence du XVIII e siècle provenant du musée de Bernay – Rôles des primaires d’adhésion lors du collage des faïences, Mémoire de Mastère : RestaurationConservation de Céramique et Verre, Paris, École de Condé, p 76-77. 348 349

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Test Quinze éprouvettes en terre cuite sont confectionnées mécaniquement pour être de dimensions égales. Nous commençons par tracer une marque à 2 cm du bord et les casser à cet endroit. -

Cinq sont collées au Paraloïd® B72 à 50% dans l’acétone-éthanol (75-25)

-

Cinq sont protégées par un primaire de Paraloïd® B72 à 10% dans l’acétone puis collées au Paraloïd® B72 à 50% dans l’acétone-éthanol (75-25)

-

Cinq sont protégées par un primaire de Paraloïd® B72 à 10% dans l’acétone puis

collées au Paraloïd® B72 à 50% dans l’acétone-éthanol (75-25) auquel est ajouté 0,1% de silice. Après une semaine de séchage, nous réalisons des tests de résistance à la rupture (avec une force de clivage) et nous notons le poids qui a été nécessaire pour rompre les éprouvettes. Mélange 50% PB72 dans l’acétone-éthanol (75-25)

Moyenne du poids à la rupture (en kg) 19,1

50% PB72 dans l’acétone-éthanol (75-25) + primaire à 10%

22,7

50% PB72 dans l’acétone-éthanol (75-25) + primaire à 10% + silice

28,5

La pose d’un primaire augmente bel et bien la résistance de l’adhésif. L’ajout de silice dans l’adhésif accroît encore sa résistance.

Protocole Techniques Pose du primaire

Collage par contact

Matériel Verrerie Balance de précision Pinceau Verrerie Balance de précision Compresse de gaze

Matériaux Acétone Paraloïd® B-72 (10 %) 75-25 Acétone-Ethanol Paraloïd® B-72 (50%) 0,1% silice colloïdale

Pinceau

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Un prémontage nous indique l’ordre des tessons à coller. Les fragments du tricorne qui ne sont pas jointifs, sont réservés. Des ressauts sont notables sur certaines jointures du tertre et du buste. Ils sont dus à l’abrasion et aux altérations de la pâte. Certains tessons étant lourds, nous nous servirons de la gravité pour exercer une force sur les joints de collage, et aider au bon positionnement des fragments. Il est d’ordinaire recommander de coller tous les tessons en une seule fois. Or, deux lacunes se situent sur la face B, près de l’emplacement du robinet, et afin d’avoir accès aux deux côtés des lacunes et ainsi réaliser les comblements, le collage devra être interrompu avant Fig. 162 : Prémontage 353 de placer le buste du personnage . Les éventuels décalages entre les fragments collés pourront être rectifiés par apport de chaleur. Mise en œuvre

Fig. 163 : Collage en cours

Temps total des traitements préventifs : 5 h

Nous avons pu nous entraîner à la réalisation de cette technique lors d’un stage au Corning Museum of Glass, à Corning NY, Etats-Unis. 353

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V- COMBLEMENT Afin de respecter la volonté du conservateur, monsieur Roudier, ainsi que la fonction décorative et esthétique de l’œuvre, les lacunes, mais également certains éclats doivent être comblés. Cela concerne : -

Les lacunes o Les deux lacunes qui se situent près du robinet o La petite lacune dans le tricorne o La lacune du bouchon

-

Toutes les lignes de cassure

-

Les éclats o Les éclats sur le tricorne (intérieur et extérieur) o Tous les éclats du tertre o L’éclat de surface sur la manche droite o Les éclats du bouchon, à l’exception des égrenures qui se situent sous le rebord

La restitution de la partie manquante du tricorne sera abordée plus tard. Les autres éclats de surface ainsi que l’éclat de structure sur le côté de la manche droite ne seront pas comblés car ils ne sont pas ou peu visibles de face. De plus, ils peuvent faire penser à des éclats dûs à une usure et non à des chocs, ce qui souligne le caractère authentique de l’œuvre. Le collage devra être interrompu pour combler : -

les éclats et la petite lacune dans le tricorne : pour éviter de faire tomber de la poussière à l’intérieur de la fontaine lors du ponçage car elle y resterait prisonnière

-

les deux lacunes près du robinet : pour avoir un meilleur accès à l’intérieur de la pièce En ce qui concerne la plus grande des lacunes près du robinet, son comblement implique la restitution en relief des volutes / eaux jaillissantes. En effet, laisser un comblement lisse nuirait à l’esthétique de l’œuvre. Il nous est possible de connaître la forme des motifs en comparant l’objet avec d’autres Bobbejakken354. Les lignes de cassure et les éclats de surface seront directement comblés avec un matériau de finition qui imitera l’émail. Or ces matériaux ont un retrait trop important et ne peuvent pas être appliqués sur des épaisseurs supérieures à 1 ou 2 mm. Pour les lacunes et les éclats de structure, nous devons donc avoir recours à un autre matériau, qui ne subit pas de retrait en séchant et qui assurera la solidité des comblements. Nous pouvons ainsi réaliser un comblement à double structure ou en deux 354

Voir Partie historique, p. 28.

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couches : une « âme » qui vise à redonner une solidité à la structure de l’objet, à améliorer le soutien des fragments et une « peau » qui améliore l’esthétique de l’œuvre en imitant son aspect (texture, brillance, couleur, etc.). Ce comblement à double structure permettra d’autre part de nous rapprocher de la structure du Bobbejak : le premier imite la pâte poreuse tandis que le second reproduit l’émail stannifère*. La forme biseautée des cassures des lacunes pourrait donner lieu à des contredépouilles soit des « partie(s) contrariant ou empêchant le démoulage dans l’axe prévu »355. La fabrication de comblements amovibles356, c’est-à-dire de comblements qui peuvent être détachés de l’objet tel de véritables tessons, n’est pas préconisée car elle compliquerait les opérations de collage et comblement.

Fig. 164 : Schéma d'une contre-dépouille

V.1. « L’âme » Cahier des charges Le matériau de comblement devra être : - réversible - respectueux et compatible avec la céramique357 - capable d’être teinté -

moins résistant et donc plus tendre que la céramique358 facile à poncer avec le même aspect que la pâte359 avec un retrait, afin de pouvoir appliquer un second comblement par-dessus

LYCÉE LE GUÉ, « Contre-dépouille » [document électronique] Disponible sur : http://www.codplatre.fr/PDF/LLGT-Contre-depouille.pdf 356 Stephen Koob, « Detachable plaster restorations for archaeological ceramics », Recent advances in the conservation and analysis of artifacts: jubilee conservation conference papers, London, University of London Institute of Archaeology, 1987, pp. 63-67. 357 Zdravko Barov, Frank Lambert, « Mechanical properties of some fill materials for ceramic conservation », ICOM Committee for Conservation, 7th Triennal meeting, Copenhagen, 10-14 sept 1984, Preprints, Paris, ICOM, 1984, pp. 84.20.1-4 : « The difference in coefficients of thermal expansion between synthetic filler and ceramic substrate s the most important factor if incompatibility ». 358 La pâte n’est pas particulièrement fragile. 359 Elisabeth Carbonneaux, Restauration de l’Objet Archéologique à propos de l’exposition « Origines de Caen », Caen, Publication du Musée de Normandie, 1983, n°4, p. 38 : « La matière de remplacement de l’argile cuite doit, dans la mesure du possible, en imiter la texture, la dureté voire la couleur ». 355

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Choix des produits Il existe différents produits pour réaliser un tel comblement : Plâtre de Paris

Plâtres cellulosiques - Polyfilla™ intérieur - Moltofill Innen™

Pâtes syntactiques360 Knauf Renoband®

Plâtre de Paris Avantages

Inconvénients

Peut se teinter dans la masse Se trouve facilement dans le commerce Peu de retrait

Porteur de sels

Se retire mécaniquement et avec de l’eau Polyfilla™ intérieur Avantages Se trouve facilement dans le commerce

Inconvénients 361

Peut se teinter dans la masse Temps de travail plus long que le plâtre de Paris362 Inerte

Assez faible

363

Peu adhérent aux surfaces lisses

Sèche vite Se retire mécaniquement et avec de l’eau Moltofill Innen™ Avantages

Inconvénients

Peut se teinter dans la masse Contient moins de plâtre que le Polyfilla 364 Aspect de surface très fin et très blanc 365

Moins facile à se procurer (uniquement en

Se retire mécaniquement et avec de l’eau

Allemagne et au Luxembourg BELGIQUE)

N’apporte pas de sels Sèche vite Knauf Renoband® Avantages

Inconvénients

Pas de retrait

Difficile à se procurer

Prête à l’emploi

Séchage long (deux semaines)

Réversible mécaniquement

Mécaniquement faible

Viviane Béchoux « Utilisation des mousses et des pâtes syntactiques pour combler les lacunes des poteries archéologiques », CeROArt [en ligne] 2 (2008) Disponible sur : https://journals.openedition.org/ceroart/657, [Consulté le 05/03/2018] 361 Adeline Beuken et al., « Les acryliques en dispersion aqueuse chargées avec des microballons de verre pour le comblement des terres cuites à basse température », Araafu, n°18, 2010, pp. 32-37, p. 33 362 Susan Buys, Victoria Oakley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, Butterworth Heinemann, 1996, p. 198 363 J. Larson, « The conservation of Terracotta Sculpture », Conservator, 1980, n°4, pp. 38-45. 364 Beuken et al., op. cit., p. 33 365 Loc. cit. 360

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Le Polyfilla™ intérieur366 répond le mieux au cahier des charges. Il s’agit d’un plâtre cellulosique, soit un mélange de « sulfate de calcium, d’éther de cellulose et d’agents retardant » 367. Selon Maria P. Nugari, la présence de cellulose ne représente pas un risque d’attaque de microorganismes368. Le Polyfilla™ se prépare en mélangeant une part d’eau pour deux parts de poudre. Mais il est possible d’obtenir des consistances différentes : plus on ajoute d’eau, et plus la pâte est souple, fluide. Il est possible de le renforcer en ajoutant une petite quantité de PVAc, mais cela ne semble pas nécessaire pour les lacunes à combler369. Le produit peut être travaillé pendant 45 min 370 , temps au-delà duquel il durcit. Enfin, le comblement obtenu est facile à poncer, ce qui réduit les risques d’abrasion de la céramique371 : il est moins dur que la terre cuite et, en cas de choc, il se cassera avant elle372. Nous souhaiterions teinter le Polyfilla™ dans la masse pour obtenir une couleur beige proche de celle de la pâte. Héléna Heukeshoven 373 livre la méthode de préparation en indiquant que les pigments secs doivent d’abord être mélangés avec le Polyfilla™ en poudre, avant d’ajouter la part d’eau. Quelle concentration de pigment ? Un examen visuel nous oriente dans le choix de la couleur des pigments : ocre jaune et terre de sienne naturelle. Pour déterminer la concentration de pigments à mélanger avec le Polyfilla™ et nous conforter dans le choix de la couleur, nous réalisons différents mélanges à différentes concentrations. L’échantillon à 3% d’ocre jaune est retenu. Comment combler ?

Fig. 165 : Recherches de la teinte du comblement

L’utilisation d’un support de fond est requise. Compte tenu des lacunes à combler, il sera placé à l’intérieur de la fontaine, car les parois sont plus lisses (l’extérieur présente des reliefs). Il est possible d’utiliser : - de la Plastiline® - de la cire dentaire Il existe un Polyfilla extérieur mais il est beaucoup plus résistant car il contient du ciment. Buys et Oakley, op. cit., p. 198 368 Maria Piu Nugari, « Prove di resistenza all’attacco biologico dell’Interior Polyfilla a della Fina Surface Polyfilla », in Faenza LXXV, 1989, fasc. I-III, pp. 34-38. 369 Elles ne sont pas localisées dans des zones exposées aux chocs. 370 Voir fiche technique en Annexe n°23, p. 331. 371 Fernanda Cavari, « Introduzione allo studio della ceramica in archeologia », Dipartimento di Archeologia e Storia delle Arti, Sienna, 2007, pp. 63-86, p. 74. 372 Larson, op. cit., p. 44 373 Héléna Heukeshoven, (2008), Les lacunes dans les objets d’art décoratifs en faïence et en porcelaine, Réflexion méthodologiques en vue de leur réintégration, Mémoire de Master : Restauration-Conservation de Céramique, Bruxelles, La Cambre, p. 54. 366 367

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L’intérieur de la fontaine est non émaillé et l’endroit où le fond sera placé est étroit. La Plastiline® – qui se présente sous forme de pâte à modeler qui peut être plus ou moins souple – laisse des dépôts gras sur une matière poreuse et doit être enveloppée de film alimentaire. D’autre part, elle est assez épaisse, même lorsqu’elle est aplatie, et serait peu facile à installer à l’intérieur de la fontaine. Parallèlement, la cire dentaire est une plaque fine374, blanche ou rose, qui peut être découpée à des dimensions légèrement supérieures à celles de la lacune. Elle est souvent ramollie à la chaleur afin d’épouser les formes de l’objet. Ainsi, ses bords adhèrent-ils bien à la céramique. La cire peut être immobilisée par des rubans adhésifs tels que le Tesa® ou le Micropore™. Elle ne laisse pas de dépôts et se détache facilement du comblement réalisé. Compte tenu de ces informations, notre choix s’oriente vers la cire dentaire375. Il en existe deux sortes : une cire d’hiver, très souple, et une cire d’été, plus dure, qui peut supporter des températures plus élevées. Dans le cas de la restitution des volutes, la réalisation d’un moule en négatif serait trop longue et dépasserait nos compétences. Nous procèderons plutôt à une « franche sculpture » c’est-à-dire à un « modelage direct » 376.. Comment poncer ? Il est nécessaire de poncer le matériau de comblement après séchage pour uniformiser sa surface et lui donner un retrait par rapport à la céramique. Il est possible d’utiliser différents outils pour cela (rifloir, scalpel, etc.) mais ils risqueraient d’endommager l’émail étant donné leur dureté. Manon Dudouet mène une étude comparative entre différents papiers abrasifs (3M©, Klingspor®, Flexovit©, Gerlon©, etc.) pour comparer leur efficacité de ponçage sur différents matériaux de comblement et leur impact sur la céramique. Elle en conclue que le papier Oakey© est le moins abrasif et l’un des plus performants377. Inventé par John Oakey à Londres378, il s’agit d’un abrasif naturel puisque de petites particules de verre sont collées sur le papier. Il ne raye pas l’émail stannifère* car il est luimême composé de verre (indice de dureté sur l’échelle de Mohs compris entre 4,5 et 6,5). Plus le papier abrasif aura un grain grossier et dur (le numéro sera petit), et plus le ponçage

1,5 mm d’épaisseur. Voir fiche technique en Annexe n°24, p. 334. 376 Jacques Peiffer, La Céramique, expertise et restauration, Dijon, Faton, p. 200 377 Manon Dudouet (2016), Conservation-Restauration d’une Vierge à l’enfant en faïence, probablement datée entre a fin XVIIe siècle et début XVIIIe siècle, Etude des papiers abrasifs adaptés au ponçage des surfaces émaillées, Mémoire de Mastère : Restauration-Conservation de Céramique et Verre, Paris, École de Condé, p. 77. 378 Il fonde sa société John Oakey & Sons Limited en 1833 (OAKEY ABRASIVE [en ligne] www.oakeyabrasive.co.uk [Consulté le 13/06/2018]) 374 375

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sera rapide, mais plus le grain du papier sera fin (le numéro sera grand) et plus le matériau poncé sera lisse379. Nous disposons de papier Oakey à grains 120, 140 et 240. Protocole En parallèle aux comblements des éclats du tricorne, les comblements autour du robinet seront faits en deux temps. 1.

Début du collage de la base : dégagement de la première lacune à combler Comblement de la lacune

Face A 2.

Face B

Poursuite du collage de la base : dégagement de la deuxième lacune à combler Comblement de la lacune

Face A Fig. 166 : Étapes de comblement / collage

Face B Légende :

L

Lacunes à combler

Noel Riley, Tom Rowland, A-Z Guide to Cleaning, Conserving and Repairing Antiques, Constable and Co., Ltd., London, 1981, p. 147 379

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Les comblements seront ensuite poncés à l’extérieur jusqu’à atteindre un retrait. Nos tests nous indiquent que le ponçage éclaircit la couleur du Polyfilla™. Il est toutefois possible de la réajuster en appliquant un primaire de Paraloïd® B-72 à 5% dans l’acétone. Technique

Application à la spatule et « franche sculpture »

Matériel

Matériaux

- Balance de précision - Cire dentaire rose CTS - Sèche-cheveux - Tesa® - Verrerie - Spatule souple - Bol en silicone - Papier Oakey© - Pinceau synthétique

- Polyfilla™ intérieur - Eau déminéralisée - Pigment ocre jaune (3%) - Paraloïd® B-72 à 5% dans l’acétone

Mise en œuvre Comblement n°1 Les tranches sont isolées avec un primaire Paraloïd® B-72 à 5% dans l’acétone, avec un pinceau à poils synthétiques. Pendant que le primaire sèche, nous découpons un morceau de cire dentaire à des dimensions légèrement supérieures de la lacune, et nous le chauffons avec un sèche-cheveux afin qu’il soit souple. Il est ensuite placé à l’intérieur de la fontaine et maintenu avec des bandes de ruban adhésif Tesa®. En refroidissant, la cire retrouve sa dureté initiale. Le mélange de Polyfilla™ et de pigment ocre jaune est confectionné dans les proportions suivantes : 30g de Polyfilla™ et 0,927g de pigments (3%). L’ensemble est conditionné avec un récipient en verre avec couvercle et est énergiquement secoué afin de mélanger uniformément les pigments avec le plâtre cellulosique. Nous prélevons ensuite une petite quantité de la poudre obtenue, soit 5g. Cet échantillon contient donc 4,85g de Polyfilla™ (97%) et 0,15g de pigments (3%). Nous savons que deux parts de poudre de Polyfilla™ doivent être mélangées avec une part d’eau. Pour que le ratio soit respecté, et déterminer la bonne proportion d’eau à ajouter, la somme de la quantité de Polyfilla™ et celle des pigments doit être divisée par deux, autrement dit 2,5g380. Une pâte est obtenue. Elle est appliquée généreusement à la spatule dans la lacune, côté extérieur, de sorte à déborder de la zone à combler. Après séchage du Polyfilla™, la cire est retirée. Compte tenu de la forme de la cassure, le Polyfilla™ n’a pas pu se répartir uniformément à l’intérieur de la fontaine et épouser la plaque de cire. Nous avons donc 380

5 / 2 = 2,5.

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ajouté de la matière, à l’intérieur, pour obtenir une surface lisse. Le comblement a ensuite été poncé avec un rifloir pour égaliser les niveaux. À l’extérieur, le comblement est poncé avec un papier Oakey® – d’abord un gros grain (150) pour retirer l’excèdent puis à grain plus fin (240) pour obtenir une surface fine – jusqu’à obtenir un léger retrait de moins d’1 mm. Extérieur

Intérieur

Avant comblement

Comblement

Après ponçage

Fig. 167 : Étapes du comblement n°1

Comblement n°2 Après avoir collé les derniers tessons du tertre, la deuxième lacune est apparue. Son comblement a été réalisé de la même façon que pour le comblement n°1, à la différence que, une fois que le Polyfilla™ a séché, nous avons dessiné dessus les motifs pour reproduire en négatif les volutes (Étape 4). Du produit de comblement a ensuite été ajouté sur les zones à modeler. Après séchage, les reliefs ont été sculptés avec une lame de scalpel.

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1. Avant comblement (plaque de cire visible)

2. Après séchage du comblement

3. Ponçage à l’intérieur avec un rifloir

4. Dessin des motifs

5. Ajout de Polyfilla™

6. Reliefs sculptés après séchage

Fig. 168 : Étapes du comblement n°2

À nouveau, le Polyfilla™ n’a pas pu épouser parfaitement la plaque de cire et il a fallu ajouter de la matière, à l’intérieur de la fontaine, pour obtenir une surface lisse. Enfin, le comblement a été poncé avec un rifloir. Temps de l’intervention : 10 h

V.2. « La peau » Cahier des charges Le matériau de finition devra être : - Réversible - Stable dans le temps - Respectueux de la céramique - Facile à poncer - Peut être poli - Peut se teinter dans la masse - Avec un aspect proche de celui de l’émail*

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Choix des produits Différents produits répondent au cahier des charges : les pâtes de stuc : Modostuc® les plâtres cellulosiques : Fine Surface Polyfilla les enduits acryliques : Flügger® Modostuc® Avantages

Inconvénients

Très tendre

Moins lisse que le Flügger®

Se trouve déjà teinté dans le commerce 381 Très soluble à l’eau

Plus poreux que le Flügger® Peut moisir dans le pot

Fine Surface Polyfilla Avantages

Inconvénients

Très tendre

Manque d’adhésion sur les surfaces lisses382 Moins lisse que le Flügger®

Très soluble à l’eau

Plus poreux que le Flügger® Plus grand retrait que le Flügger®383 Flügger®

Avantages384

Inconvénients ®

Plus lisse que le Modostuc Ponçage et polissage plus rapide que le Modostuc® Bonne accroche à la céramique Ne moisit pas Séchage rapide385 Faible retrait Compatible avec des médiums de retouche aqueux ou à base de solvant Peut être appliqué en couche relativement épaisse sans se fissurer386

Moins réversible : gonfle à l’eau

Au vu de ces informations, et après avoir réalisé des tests sur éprouvettes, le Flügger® est sélectionné. Flügger est une entreprise danoise, créée en 1783387, fournisseur Sabine Kessler (1997), Etude et restauration d'une Jeanne d'Arc en terre cuite conservée au musée des Beaux-Arts d'Orléans, Etude d'un matériau de bouchage : le Modostuc, Mémoire de Master : RestaurationConservation de Céramique, Saint-Denis, IFROA, p. 143. 382 Susan Buys, Victoria Oakley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, Butterworth Heinemann, 1996, p. 198. 383 CONSERVATION RESOURCES INTERNATIONAL, Flügger Acrylic Putty [en ligne] Disponible sur : http://www.conservation-resources.co.uk/index.php?main_page=product_info&products_id=861 [Consulté le 13/06/2018] 384 Léa Rocourt (2016), « Une jungle à l'Elysée. » Etude et conservation-restauration d'un médaillon de cheminée réalisé pour une salle à manger de l'Elysée, 1947-1948 (Centre national des arts plastiques), Etude comparative de deux mastics prêts à l'emploi, utilisés pour les comblements superficiels : le Modostuc ® et le Flügger®, Aubervilliers, INP, p. 90. 385 Joyce Hill Stoner, Rebecca Rushfield, Conservation of Easel Paintings, N.Y., Routledge, 2012, p. 592. 386 Il peut être appliqué avec une épaisseur maximale de 2 mm (FLÜGGER [en ligne] Disponible sur : https://www.flugger.dk) 381

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pour peintres professionnels. Mais, suite à une crise financière en 1974, l’entreprise doit élargir son marché pour faire face au déclin de ses ventes : elle commence alors à vendre à des clients privés. Le Flügger® Acrylspartel 388 , plus simplement appelé Flügger®, s’emploie à l’intérieur des bâtiments, pour les murs ou plafonds. En restauration, il est utilisé sur les objets 3D, les bois et dorures – car il peut être brunit389 –, notamment aux Etats-Unis. Le produit, prêt à l’emploi, est une pâte blanche conditionnée en tube. Il s’agit d’une dispersion dans l’eau, composée de méthacrylate du butyle (C8H14O2) très pur, d’une charge, le carbonate de calcium (CaCO3), d’un antibactérien (bronopol, C3H6BrNO4) et d’un biocide (isothiazolinone, C4H4ClNOS et C4H5NOS (3 :1)) 390. Ces deux derniers composants sont en petites quantités, mais ils ont pour but de prévenir l’apparition de moisissures. De faible toxicité, le Flügger® est décrit comme ayant une très bonne adhésion et résistance à l’abrasion. Il obtient un aspect « sec » au bout d’une heure, mais nécessite plusieurs jours pour atteindre sa dureté finale. Il peut être affiné ou poncé à l’eau. Son pH est environ de 9.0391. Comment teinter ? Il est possible d’utiliser des peintures acryliques, des pigments ou encore des colorants. Les acryliques offrent un résultat extrêmement lisse et lumineux, malheureusement il faut des quantités microscopiques pour colorer le Flügger® et il est impossible de déterminer quelle quantité exacte ajouter en pesant les peintures. Puisqu’il n’est pas possible de définir une « recette » répétable, nous nous sommes tournés vers les pigments. Nous utilisons ceux de la marque Sennelier. Quelle concentration ? Différentes concentrations et couleur de pigments ont été mélangées avec du Flügger® afin de déterminer deux couleurs : - une se rapprochant de la couleur blanche de l’émail* (lorsqu’il n’y a pas de décor peint). Nous l’appellerons Couleur n°1. - une autre qui reproduit le bleu le plus clair utilisé pour peindre les décors. Nous la désignerons comme Couleur n°2.

Loc. cit. Elle est fondée par Daniel Flügger, en 1783, à Hambourg, en Allemagne. Une branche est ouverte au Danemark le 1er novembre 1890. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l’Etat Danois confisque les propriétés allemandes qui sont sur son territoire. Le directeur danois de la compagnie, Michael Schnack prend ainsi la direction générale. 388 Voir fiche technique en Annexe n°25, p. 337. 389 Hill Stoner et Rushfield, op. cit., p. 592. 390 Rocourt, op. cit., p. 94. 391 CAMEO, Flügger Acrylic Putty [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Flügger_Acrylic_Putty [Consulté le 01/03/2018] 387

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Fig. 169 : Échantillons de Flügger® teintés pour la recherche de la couleur n°1

La recherche de teinte a été particulièrement minutieuse car il a fallu peser d’infimes quantités de pigments : de 0,5 et 3%. Les échantillons ont tous été poncés, polis et vernis. Les résultats retenus sont : - Couleur n°1 : 0,5% de pigment (75% de bleu lumière et 25% de terre d’ombre brûlée) - Couleur n°2 : 3% de pigment (80% de bleu outremer et 15% de terre d’ombre naturelle). Pourquoi et comment polir ?

Fig. 170 : Pesée des pigments

D’après nos tests, le Flügger® acquiert un état de surface brillant, presque « vitrifié », lorsqu’il est polit. Afin de se rapprocher de l’aspect émaillé du Bobbejak, les comblements seront donc polis avant d’être retouchés. Les feuilles Micro-Mesh® Ultra-flex Regular sont des toiles de polissage392, souvent utilisées en restauration d’art393. Elles sont composées de particules abrasives, fixées à un film de latex qui lui-même est attaché à un support en toile de coton 394. Les grains sont extrêmement fins : l’abrasif des feuilles dont la taille des grains varie de 1500-6000 contient du carbure de silicium tandis que celui des feuilles dont les grains sont plus fins (8000 et 12000) contient de l'oxyde d'aluminium395 Les Micro-Mesh® peuvent être utilisées sèches ou mouillées pour nettoyer les métaux ou polir différentes matières : « acrylique, bois, céramique, métal, peinture, époxy,

Manon Dudouet (2016), Conservation-Restauration d’une Vierge à l’enfant en faïence, probablement datée entre a fin XVIIe siècle et début XVIIIe siècle, Etude des papiers abrasifs adaptés au ponçage des surfaces émaillées, Mémoire de Mastère : Restauration-Conservation de Céramique et Verre, Paris, École de Condé, p. 57. 393 Stephen Koob, Conservation and care of glass objects, Corning N.Y., The Corning Museum of Glass, 2006, p. 108. 394 CAMEO, Micro-Mesh® [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Parafilm®_M [Consulté le 13/06/2018] 395 Sur l’échelle de dureté de Mohs, le carbure de silicium est à 9,5 et l’oxyde d’aluminium à 9. 392

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pierre, et la plupart des surfaces dures »396. Enfin, elles présentent l’avantage de pouvoir être lavées. Protocole Technique Application aux pinceaux siliconés

Matériel Balance de précision Carreau de faïence Verrerie Pinceaux siliconés

Matériaux Flügger® Pigments Sennelier Eau déminéralisée

Mise en œuvre Nous préparons les deux couleurs pour les conditionner dans de petits pots en verre hermétiques397. Couleur n°1 : Nous pesons 6g de Flügger® que nous réservons, puis 0,0225g de bleu lumière et 0,007 g de terre d’ombre brûlée. Même avec une balance de précision, il a été difficile de doser de si infimes quantités. Les pigments sont ensuite placés sur un carreau de faïence blanc et propre, et broyés à la spatule avec une goutte d’eau. Lorsque le mélange est homogène, nous ajoutons progressivement le Flügger®, en nous assurant qu’il n’y a pas de grain de pigment visible.

Fig. 171 : Mélange eau et pigments

Fig. 172 : Ajout du Flügger®

Le Flügger® teinté est ensuite ajouté par petites touches sur le Polyfilla™ avec des pinceaux siliconés dont les embouts ont une forme et une taille variables. L’enduit a été appliqué en même temps que la forme était redessinée, mais le remodelage des volutes a été plus compliqué que lors du comblement de l’âme. Il fallait attendre que le Flügger® sèche pour alors l’humidifier légèrement et utiliser différents outils (pinceaux siliconés, bâtonnet, lame de scalpel) pour structurer la figure ou lisser l’enduit. Souvent, il était nécessaire de rajouter de la matière pour obtenir les courbes souhaitées.

ARCHIVAL CONSERVATION PRESERVATION RESTORATION MATERIALS AND SUPPLIES, Micro-Mesh abrasives [en ligne] Disponible sur : http://www.ote.ie/micro-mesh-abrasives [Consulté le 11/05/2018] 397 Avec quelques gouttes d’eau pour éviter que les préparations ne sèchent. 396

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Pose de Flügger® sur le Polyfilla™

Modelage de la forme

Polissage aux Micro-Mesh®

Fig. 173 : Étapes de la "peau" du comblement n°2

Après un léger ponçage au papier Oakey®, le comblement a été poli avec des MicroMesh®, d’abord avec un grain à 2400, puis 3200, 4000, 6000 et enfin 12000. Intérieur du tricorne

Volutes autour du robinet

Avant comblement

Après Polyfilla™

Après Flügger®

Fig. 174 : Avant / Après comblement

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Après le comblement des lacunes autour de l’ornement du robinet et des éclats, il a été possible de terminer le collage de la fontaine. Dès lors, les lignes de cassure et les éclats de structure ont été comblés.

Fig. 175 : Bobbejak après collage Avant

Après

Fig. 176 : Avant / Après comblement

Temps de l’intervention : 38 h

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V.3. Le cas de la grande lacune sur le tricorne Deux fragments du tricorne ne sont pas jointifs avec le reste du chapeau et « flottent dans le vide ». Le comblement à réaliser est donc de taille importante. De plus, il sera soumis, à cause de la gravité, à une force de clivage (puisque le tricorne a une forme évasée). A l’instar des autres comblements effectués sur le Bobbejak, celui-ci pourra avoir une double structure, soit avec une âme et une peau. Les produits précédemment utilisés pour les comblements398 seront conservés, à savoir le Polyfilla™ intérieur et le Flügger®. Il s’agit à présent de trouver un moyen de renforcer le Polyfilla™. Cahier des charges Le matériau de comblement devra être : - Réversible - Stable - Respectueux du matériau céramique - Résistant aux chocs - Solidement fixé à la fontaine Choix des produits Au cours de nos recherches399, nous avons pu voir qu’il était possible de renforcer le Polyfilla en lui ajoutant une petite quantité de PVA. Quelle PVA ? Les PVAC, ou acétate de polyvinyle, sont des adhésifs en émulsion utilisés pour la restauration de papier et reliure400. En 1912, le chimiste allemand Fritz Klatte synthétise l’acétate de vinyle, et l’utilisation des PVAC se répand dans les années 1930401. L’adhésif est entre autres très utilisé pour le collage du bois. Puisqu’ils sont solubles dans l’eau, ils peuvent être préparés en émulsion autrement dit le monomère est mélangé avec un agent dispersant dans l’eau. On ajoute un catalyseur pour polymériser les gouttelettes qui sont suspendues dans l’eau. Les particules d’une émulsion sont solides et mesurent entre 0.1-10 microns : elles sont donc assez larges pour refléter la lumière et ainsi conférer cette couleur blanche à l’adhésif 402. En séchant, l’adhésif devient brillant et transparent.

Voir, p. 148 et 154. Voir p. 145. 400 Karen Cardwell, « A chemical investigation of PVA based adhesives in book binding », AICCM Bulletin, 1991, vol. 17, n°1/2, pp. 21-29, p. 21. 401 Loc. cit. 402 Ibidem, p. 23. 398 399

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Les PVAC ont pour avantage d’avoir une résistance moyenne et d’être faciles à utiliser, mais elles s’acidifient, dégagent des éléments volatils et deviennent cassant403. Jane Down démontre alors que, parmi les PVAC, les EVA (éthylène vinyle acétate) sont à favoriser 404 : elles ont un pH neutre, ne dégagent pas de vapeurs toxiques, sont flexibles et jaunissent peu. De plus, les EVA ne contiennent pas d’additif 405 . Nous choisirons donc une EVA comme adhésif de consolidation du Polyfilla™. Quelle EVA ? Par souci d’éviter des interférences entre tous les produits, nous avons souhaité rechercher une EVA à la composition la plus simple. Or peu d’EVA sont composées seulement d’éthylène vinyle acétate. De fait, les adhésifs de la ligne Beva contiennent ainsi des mélanges de polymères de différentes classes406. A notre connaissance, seuls l’Evacon-R™ et l’Eva Art répondent à notre demande. Eva Mariasole Angelin les étudie au cours de sa thèse et présente les résultats suivants407 : les deux adhésifs restent stables au fil du temps (vieillissement à la lumière, chaleur et obscurité). Ils ne jaunissent pas ou peu et ne forment pas d’acide acétique. Le fournisseur CTS les recommande tous les deux comme « adhésif pour documents papier, consolidant et fixatif des couches picturales, liant pour pigments naturels et synthétiques ». Nous décidons d’utiliser l’Eva Art408, aux dépens de l’Evacon-R™, car l’adhésif est disponible à l’atelier et n’implique pas de frais supplémentaires. Quelle concentration ? Louise Luttringer 409 compare le comportement à la rupture et à la déformation d’échantillons de Polyfilla™ teinté dans lesquels elle a jouté 10, 20 ou 30% d’Eva Art. D’après ses résultats, ceux avec 20% d’Eva Art sont les plus résistants. Nous nous fonderons donc sur cette étude pour déterminer le pourcentage d’adhésif à ajouter.

Down Jane, « A la recherche d’un meilleur adhésif en émulsion pour la conservation – Rapport préliminaire des modificateurs sur la stabilité d’un adhésif à base d’une émulsion de copolymère acétate de vinyle/éthylène », Ottawa, ICC, 2000, p. 1. 404 Loc. cit. : « Of all the PVAC adhesives tested, the VAE copolymer group displayed the best properties » 405 Cardwell, op. cit., p. 23 : « EVA films, by nature, are much more flexible than PVA, and no additives are needed to enhance their flexibility. EVA is internally plasticized, flexibility being inherent on the copolymer. » 406 CTS EUROPE, Nouveaux produits – Eva Art [en ligne] Disponible sur : https://www.ctseurope.com/fr/dettaglio-news.php?id=334 [Consulté le 09/04/2018] 407 Loc. cit. 408 Voir fiche technique en Annexe n°26, p. 344. 409 Louise Luttringer (2016), Étude et conservation-restauration d’un vase à bulbe d’oignon du premier âge du Fer – Étude des propriétés physico-chimiques de mousses et pâtes syntactiques, Mémoire de Mastère : Conservation-restaiuration de Céramique et Verre, Paris, École de Condé, p. 136 403

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Est-ce suffisamment consolidé ? Un autre système de consolidation ou renfort est utilisé dans le cadre de restauration de plâtre, mais aussi de peinture sur chevalet (pour les doublages), de métal (consolidation des structures fragiles), de sculpture et des arts graphiques : les fibres de verre. En aéronautique et dans l’industrie de l’automobile, cette méthode sert à fabriquer des matériaux légers mais très résistants410. Elle est également utilisée dans la construction, avec notamment le staff411. Les fibres peuvent avoir des formes (tissus, fil, fibres coupées) et des grammages très différents. Elles sont transparentes, résistantes aux contraintes mécaniques et extrêmement stables412. Elles sont obtenues de la manière suivante : « le verre fondu413 est filé à travers une filière qui contient des trous de 1 à 2mm de diamètre. Les filaments sont étirés à un diamètre final compris entre 5 et 15 µm, produisant une mèche de fibre de verre »414. Dans le cas d’un tissu ou toile de fibres de verre, les fibres sont « disposées en deux séries croisées à angle droit »415. Afin de conserver la facilité de ponçage du Polyfilla, celui-ci ne sera pas renforcé par des fibres coupées. Une toile imprégnée d’adhésif416 sera plutôt placée en son cœur. Quel adhésif ? L’imprégnation de la toile de verre aura plusieurs avantages : en le rigidifiant, elle rendra le tissu plus facilement manipulable, mais elle augmentera aussi sa résistance, et par conséquent, celle du comblement. L’adhésif devra être souple afin que la toile puisse épouser la courbe du comblement. Pour une meilleure compatibilité entre les matériaux, la toile de verre sera imprégnée d’Eva Art.

Jeanne Cassier (2006), Étude et restauration d’un moulage en plâtre patiné d’un bas-relief d’Angkor-Vat (musée national des arts asiatiques-Guimet Paris), Étude pour la solidarisation d’une tsructure de renfort par l’intermédiaire de fibre de verre imprégnée d’un adhésif, Mémoire de Master : Conservation-Restauration de Céramique, Saint-Denis, INP, p. 139. 411 Élise Lopez (2016), Redécouverte de l’ancien cadre du passeur de Corot : Étude et conservationrestauration d’un care de la fin du XIXe siècle en bois et plâtre doré (Paris, Musée du Louvre), Évaluation de différents matériaux radio-opaques pour la restitution des lacunes, Mémoire de Master : ConservationRestauration du Mobilier, Aubervilliers, INP, p. 194. 412 Alain G. Boissonnas, « Relining with glass-fiber fabric », Studies in Conservation, 1961, vol. 6, n° 1, pp. 26-30 ; Alizée Lacourtiade (2013), À la confluence des traditions et des savoir-faire. Étude et restauration d’un manuscrit arabico-malgache sorabe consevé au musée du quai Branly, Paris – Évaluation du potentiel des fibres de verre comme matériau de restauration, Mémoire de Master : Conservation-Restauration de Céramique, Aubervilliers, INP, p. 89. Elles ne se dégradent pas sous l’action des solvants, de la lumière et chaleur, et des microorganismes. 413 Axelle Bourgeois (2015), « Le Centaure brisé », Recherche d’optimisation de la résistance mécanique d’un système de collage avec des bandes de renfort en tissu de fibres de verre imprégné de Paraloïd B44, Mémoire de Master : Conservation-Restauration de Céramique, Aubervilliers, INP, p. 96 : « silice et carbonates de sodium et de calcium » 414 Lacourtiade, op. cit. p. 90. 415 Bourgeois, op. cit., p. 96. 416 Cassier, op. cit., p. 139 ; Bourgeois, op. cit. p. 96. 410

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Comment combler ? Il faut faire un comblement amovible, c’est-à-dire que, après séchage, le comblement sera détaché puis collé à la céramique. Pour réaliser une telle technique, cela implique que les tranches des tessons soient parfaitement isolées, de sorte que le Polyfilla™ n’y adhère pas. La pose d’un primaire n’est pas suffisante pour les protéger. Il est nécessaire d’utiliser un matériau plus épais et malléable, de sorte à pouvoir épouser toutes les anfractuosités de la pâte, et qui ne colle pas à la céramique.

Fig. 177 : Verre scellé au Parafilm® M

En restauration de verre, de métal, ou encore de pierre, le Parafilm® M417 est utilisé comme matériau isolant. Il s’agit d’un film thermoplastique étirable 418 , produit par l’American Can Company, qui sert d’ordinaire à sceller la verrerie dans les laboratoires419. Composé de butadiène, de polyéthylène et d'une cire de paraffine, sans plastifiant ajouté420, il se présente sous forme de rouleau et est recouvert d’une interface en papier pour éviter qu’il ne colle sur lui-même421. Sa grande flexibilité et adhérence, ainsi que sa résistance et sa perméabilité à l’oxygène et au dioxyde de carbone422 en font un matériau aux propriétés intéressantes. Protocole Technique

Comblement amovible

Matériel - Cire dentaire rose CTS - Pinces - Balance de précision - Spatule souple - Parafilm® M - Toile de verre

Matériaux - Polyfilla™ intérieur - Eau déminéralisée - Pigment ocre jaune (3%) - Eva Art - Paraloïd B-72 à 50% dans l’acétone

Nous commencerons en utilisant la même méthode que pour les comblements précédents, à savoir avec une plaque de cire comme matériau de support. La plaque devra être légèrement chauffée au préalable pour prendre l’empreinte d’un côté du tricorne. Puis lorsqu’elle aura refroidi, elle sera placée au niveau de la lacune. Les tranches de la

Voir fiche technique en Annexe n°27 p. 345. S’il est étiré dans le sens de la longueur, il augmente de 200%. JAIC, A Method for reinforcing fragile ivory [en ligne] 419 JAIC, A Method for reinforcing fragile ivory [en ligne] 420 CAMEO, Parafilm®_M [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Parafilm®_M [Consulté le 10/04/2018] 421 JAIC, A Method for reinforcing fragile ivory [en ligne] op. cit. 422 CAMEO, Parafilm®_M [en ligne] op. cit. 417 418

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céramique qui seront en contact avec le comblement au Polyfilla™ seront protégés par du Parafilm® M puis les deux fragments non collés devront être parfaitement immobilisés dans la plaque de cire, à l’emplacement exact qu’ils doivent avoir (Étape 1). Légende : Plaque de cire Étape 1

Bobbejak

Parafilm® M

Polyfilla™ renforcé

Collage au PB-72 Toile de verre

Flügger®

Nous poserons ensuite une première couche de Polyfilla™, de sorte à atteindre la moitié de l’épaisseur du comblement final (Étape 2). La toile de verre imprégnée d’Eva Art sera ensuite placée sur la couche de Polyfilla™ (Étape 3), avant d’être recouverte par une seconde couche de Polyfilla™ (Étape 4). Étape 2

Étape 3

Étape 4

Après séchage, la plaque de cire sera retirée et nous procèderons à un retrait du comblement (Étape 5). Le comblement pourra alors être détaché de la céramique, et le Parafilm® M sera enlevé des tranches (Étape 6). Puis, le comblement sera collé aux fragments avec du Paraloïd B-72 à 50% dans l’acétone (Étape 7). Étape 5

Étape 6

Étape 7

Enfin, une couche de Flügger® teinté sera appliquée sur les deux côtés du comblement afin d’être au même niveau que la surface de l’émail* (Étape 8). Étape 8

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Mise en œuvre Nous avons commencé par isoler les tranches des fragments avec le Parafilm ® M. Puis un moulage de l’un des côtés du tricorne est fait avec une plaque de cire. Cette étape s’est avérée pour compliquée que ce qui était escompté. Les deux côtés du chapeau ne sont parfaitement identiques : ils ont une courbure et une longueur légèrement différentes. Cela implique que le côté lacunaire a lui aussi une forme unique. Le positionnement exact des tessons « flottants » est impossible. Nous ne pouvons que le deviner. Ne pas combler la lacune n’est pas envisageable car, outre l’aspect inesthétique, cela représenterait un risque de perdre les deux fragments non jointifs. Après avoir refroidit, la plaque de cire est positionnée devant la lacune et maintenue à la céramique par des serre-joints. Les deux tessons « flottants » sont immobilisés dans la plaque de cire avec des serre-joints.

Fig. 178 : Parafilm® M sur les tranches des tessons

Fig. 179 : Plaque de cire et tessons avec serre-joints

Avec un pinceau, la toile de verre est imprégnée d’Eva Art. Le temps qu’elle sèche, le Polyfilla™ teinté et renforcé est préparé : 30g de Polyfilla™ en poudre sont mélangés avec 0,927g de pigment ocre jaune (3% de pigments). Parallèlement 20% d’Eva Art sont mélangés avec la part d’eau : soit 3,1g d’Eva et 12,4g d’eau déminéralisée. La poudre et la solution aqueuse sont ensuite mélangées afin d’obtenir une pâte. Une première couche de Polyfilla™ est appliquée à la spatule dans la lacune. La toile de verre est ensuite découpée aux dimensions de la lacune est plaquée contre la couche de Polyfilla™, de sorte à éviter les bulles d’air. Une seconde couche de Polyfilla™ est ensuite posée. Parafilm ® M Première couche de Polyfilla™ Tesson de céramique Toile de verre Serre-joint Deuxième couche de Polyfilla™ Tesson de céramique Fig. 180 : Comblement en cours

Après séchage complet du Polyfilla™, la plaque de cire est retirée. En commençant à réaliser le ponçage et le retrait du comblement, les mouvements mécaniques que nous

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exercions ont entrainé la désolidarisation du comblement de la céramique. Le Parafilm® M a alors été retiré des tranches de la céramique. Ces dernières ont ensuite été isolées avec un primaire de Paraloïd B-72 à 10% dans l’acétone, à l’instar des tranches du comblement.

Fig. 181 : Désolidarisation du comblement

Fig. 182 : Pose du primaire

Le comblement et les tessons sont ensuite collés avec du Paraloïd® B-72 à 50% dans l’acétone. La viscosité de l’adhésif permet une prise rapide du collage. Aucun ruban adhésif n’est posé pour stabiliser le collage, mais la fontaine est placée de sorte que la gravité aide à immobiliser les tessons. Lorsque l’adhésif a été sec, nous avons pu procéder Fig. 183 : Collage du comblement au ponçage du Polyfilla™ et réaliser un retrait. Un peu de produit de comblement a été ajouté pour uniformiser la surface. Face A

Face B

Fig. 184 : "L'âme" du comblement du tricorne

Enfin, l’enduit de finition Flügger® a été appliqué à la spatule. Après séchage, le comblement a été poncé pour être parfaitement lisse et uniforme. Le ponçage a été particulièrement long et a souvent nécessité l’ajout de quanités infimes de Flügger® pour égaliser la surface. Enfin, le comblement a été poli jusqu’à obtenir la brillance souhaitée.

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Face A

Face B

Fig. 185 : "La peau" du comblement du tricorne

Temps de l’intervention : 40 h Conclusion Le comblement du tricorne a été une étape difficile que ce que nous espérions car il ne nous été pas permis de retrouver l’emplacement exact des tessons flottants. Cela a impliqué la réinterpréation de la forme, en modifiant légèrement la courbure du moule réalisé avec la plaque de cire. De plus, le ponçage du Flügger® a été très compliqué car il s’agit d’une zone de comblement très visible du fait de sa localisation et de ses dimensions importantes. Temps total de l’étape de comblement : 88 h

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VI- LA RETOUCHE Le décor de l’émail* comporte de nombreuses nuances de couleur et des effets de matière variés. Or les comblements sont de teinte uniforme. Ils sont très visibles, au détriment de l’œuvre423. Une réintégration picturale permettrait de « [mettre] en valeur la matière originale (…) en faisant oublier le mieux possible la présence des lacunes gênantes »424 . Il est possible de deviner le décor manquant en observant les tessons qui jouxtent les comblements. Le restaurateur est soumis à plusieurs contraintes : contrairement aux autres spécialités, la retouche doit être effectuée avec des produits synthétiques et non naturels425. De plus, il ne peut utiliser exactement les mêmes pigments que ceux qui ont été employés lors de la fabrication de l’objet. Cela facilite un phénomène de métamérisme, en particulier avec la couleur bleue. La retouche du Bobbejak risque donc d’être changeante en fonction de l’éclairage. Quelques précautions à prendre peuvent aider à pallier le problème : « opter pour une source lumineuse avec une répartition spectrale la plus uniforme possible, éviter les pigments qui sont réputés « changeants » sous certaines sources lumineuses (…), se renseigner sur les conditions d’éclairage choisies pour la conservation de l’œuvre que l’on restaure et les appliquer lors de l’exécution des retouches »426.

VI.1. La réintégration colorée Cahier des charges

-

Les matériaux utilisés pour la retouche doivent être : respectueux de la céramique (la retouche sera limitée aux comblements) réversibles stables dans le temps

-

simples d’utilisation utilisables en glacis satinés à brillants pour se rapprocher de l’aspect de l’émail*

Ségolène Bergeon, « Couleur et restauration », Technè, 1996, n°4, pp. 17-28, p. 20. Myriam Serck-Dewaide, « La reconstitution et la retouche en sculpture : pour qui ? pourquoi ? comment ? », ARAAFU, Paris, 13,14 et 15 juin 2002, pp. 151-161, p. 154. 425 Isabelle Garachon, « Restauration de céramiques et terres cuites au Rijksmuseum d’Amsterdam : choix de visibilité et de lisibilité », ARAAFU, Paris, 13,14 et 15 juin 2002, pp. 131-137, p. 131. 426 Gaëlle Leclercq, « Métamérisme, La problématique des retouches dans les tons bleus », CeROArt [en ligne] EGG1 (2010), Disponible sur : https://journals.openedition.org/ceroart/1818?lang=fr [Consulté le 21/05/2018] 423 424

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Choix des produits

-

Différents produis sont disponibles pour effectuer une réintégration picturale : les colorants les pigments les peintures en tube

Les colorants et les pigments nécessitent plus de temps de préparation, contrairement aux peintures en tube qui sont plus simples à utiliser car « les pigments sont déjà mélangées avec le médium » 427. C’est donc elles que nous utiliserons. Quelle peinture en tube ? Les peintures en tube utilisées en restauration et qui respectent les critères souhaités de stabilité et réversibilité sont les aquarelles et les acryliques. Elles se travaillent à l’eau428 et permettent la réalisation de glacis. En réalisant des tests, nous constatons que l’aquarelle produit un effet mat tandis que l’acrylique est plus satiné. De même, l’acrylique a un aspect « plastifiant » qui permet d’obtenir des glacis plus couvrants que l’aquarelle. La peinture acrylique est sélectionnée pour la retouche. Quelle acrylique ? Les peintures acryliques sont souvent utilisées pour la retouche des faïences* 429 . Parmi les marques disponibles, les Golden® sont réputées d’excellentes qualités. Les pigments sont stables, ils ne jaunissent pas et sont réversibles aux solvants430. Les peintures acryliques sèchent vite mais il existe une gamme parmi les Golden® qui sèchent beaucoup plus lentement : les Golden® Open431 . Afin de pouvoir utiliser une même palette plus longtemps et éviter de devoir « retrouver » les couleurs 432 , ces acryliques seront utilisées. Nous Fig. 186 : ®Acrylique Golden Open, sélectionnons du blanc, bleu outremer, du bleu de cobalt, du rouge cadmium bleu outremer foncé, de l’ocre jaune, de la terre d’ombre naturelle et de la terre d’ombre brûlée.

Susan Buys, Victoria Oackley, The Conservation and Restoration of Ceramics, Boston, Butterworth Heinemann, 1996, p. 140. 428 Jacques Peiffer, La Céramique, expertise et restauration, Dijon, Faton, 2010, p. 219. 429 Buys et Oackley, op. cit., p. 140. 430 Nina L. Engel, Stefan Zumbuhl, « An evaluation of selected retouching media for acrylic emulsion paint », Journal of the American Institute for Conservation (JAIC), nov. 2015, vol. 54, n°4, pp. 224-237. 431 Voir fiche technique en Annexe n°28, p. 349. 432 GOLDEN PAINTS [en ligne] Disponible sur : https://www.goldenpaints.com/products/colors/open [Consulté le 21/05/2018] 427

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Faut-il isoler le comblement ? Lors de nos tests, nous avons pu constater que la peinture, aqueuse, était en partie absorbée par le comblement. Cela assombrissait à la fois la couleur des acryliques et celle du Flügger®. De plus, l’absorption de la peinture rend impossible tout repentir : il est impossible d’effacer la retouche si elle ne nous convient pas, sans endommager le comblement. Pour éviter cela, il faudrait isoler le comblement avec un primaire non sensible à l’eau (en solution dans l’acétone, l’éthanol, etc.) : la retouche pourrait alors être retirée à l’eau sans altérer le Flügger®. Afin de limiter l’utilisation de produits sur l’œuvre, nous sélectionnons le Paraloïd® B-72 et le Mowital® B60HH, déjà utilisés respectivement pour le collage et la consolidation. Nous faisons varier les concentrations à 2%, 5%, 8% et 10%. Le résultat le plus satisfaisant est obtenu avec le Mowital® B60HH à 5% dans l’éthanol : - la couleur du Flügger® ne change pas, - la couleur des acryliques, appliquées sur la couche de Mowital, ne change pas non plus - la retouche peut être effacée à l’eau sans que cela n’affecte le comblement Un primaire de Mowital® B60HH à 5% dans l’éthanol sera donc appliqué sur l’intégralité des comblements au Flügger®. Comment peindre ? Afin d’imiter les effets de matière de l’émail*, il est nécessaire d’appliquer plusieurs glacis, avec des tonalités différentes, plus ou moins sombres et intenses. Cette technique, dite de « superposition de glacis sur des tons de fond » permet d’obtenir une « égalisation chromatique »433. Le pinceau est l’outil nécessaire pour imiter les effets de superposition et de « marques » 434. Il permet un geste contrôlé et précis435. La taille des pinceaux pourra être variable afin d’imiter les coups de pinceaux, plus ou moins larges, de l’artisan. Dans le cas, de la réintégration des fines lignes des motifs végétaux sur les habits, un pinceau de taille zéro est requis. La lacune du bouchon ne présente aucun décor : l’émail* est blanc. Il faut donc utiliser un outil qui permette de réaliser des aplats de couleurs, sans laisser des marques. L’aérographe permettrait cela, mais son utilisation nécessite une grande dextérité. Nous préférons utiliser une petite éponge en silicone qui permettra de tamponner des glacis afin d’obtenir des nuances de teintes et de faire « vibrer » la couleur.

Bergeon, op. cit., p. 24 : elle consiste à « apposer des glacis transparents ou translucides, chauds ou sombres, sur des tons de fond opaques, clairs et froids : c’est dans ce sens, sombre sur clair, que la stabilité de la retouche est assurée ». 434 Buys et Oackley, op. cit., p. 145. 435 Loc. cit. 433

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Protocole Technique

Matériel

Superposition de glacis

- Pinceaux synthétiques - Carreau de faïence blanc - Éponge en silicone

Matériaux - Mowital® B60HH 5% dans l’éthanol - Eau déminéralisée - Acryliques Golden® open

Mise en œuvre Le primaire de Mowital® B60HH 5% dans l’éthanol est appliqué sur tous les comblements au Flügger®. Pour les zones où la retouche doit être bleue, les couleurs ont été montées progressivement, c’est-à-dire que nous avons commencé par appliquer la couleur la plus claire et que nous avons augmenté peu à peu l’intensité jusqu’à atteindre la couleur la plus sombre. Pour la retouche de la lacune du bouchon, l’intervention a été faite avec une éponge siliconée et des glacis clairs qui ont homogénéisé la couleur. La peinture débordante a été nettoyée avec un bâtonnet ouaté et un peu d’eau. Pour la restitution du décor sur le comblement de la cuisse droite, nous avons décalqué une fleur sur la cuisse gauche afin de respecter au mieux l’authenticité de la pièce. Les fines lignes des entrelacs ont été reproduites avec un pinceau zéro. La retouche a été faite légèrement plus claire que le décor original, en prévision d’un vernis qui pourrait modifier la teinte.

Fig. 187 : Retouche à l'éponge

Fig. 188 : Retouche au pinceau

Fig. 189 : Retouche au pinceau zéro

Temps de l’intervention : 71 h

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VI.2. Le vernis Bien que les acryliques produisent un effet satiné, la retouche est beaucoup plus mate que l’émail*, ce qui attire le regard du spectateur. Peiffer justifie la pose de vernis : « les vernis donnent l’illusion de la vitrification des glaçures et des émaux, ils font fonction à la fois de protection de ce qu’ils recouvrent et de finition esthétique »436. Cahier des charges Le vernis doit être : - brillant pour imiter l’émail* - réversible et stable dans le temps (ne jaunit pas) - et il ne doit pas modifier la retouche Choix du produit Nous sélectionnons différents vernis brillants pour confectionner des éprouvettes qui sont mises à vieillir pendant trois mois en chambre U.V. et en chambre noire : vernis UVLS Golden®, vernis Lascaux, Primal™ WS24, Paraloïd® B-72. Le Paraloïd® B-72 est celui qui présente les meilleurs résultats de stabilité. Malheureusement, il engendre une prolifération de bulles en séchant, ce qui le rend inutilisable en tant que vernis. Parmi les vernis restants, seul le Primal™ WS24 conserve sa transparence : les vernis UVLS Golden® et Lascaux blanchissent et s’opacifient. De plus, le Primal™ WS24 est le plus brillant des trois. Malheureusement il jaunit après exposition prolongée aux U.V. Il est toutefois sélectionné car il répond au mieux au cahier des charges. Il existe une multitude de Primal™ qui varie en dureté et flexibilité437. La gamme est produite par Rohm and Haas. Aux Etats-Unis, elle est connue sous le nom de Rhoplex®438. Le Primal™ WS24 est une résine acrylique en dispersion colloïdale : ses particules font 0,03 microns 439 . Il a un pH neutre, légèrement basique, compris entre 7 et 8 et sa Tg est à 46°C440. Le Primal™ WS24 est souvent utilisé comme consolidant (plâtre, peintures murales, os, etc.)441 mais sa grande brillance et sa dureté en fait un vernis adéquat pour la faïence*. Quelle technique ? L’utilisation du pinceau reste le meilleur moyen de contrôler l’application du vernis. Le Primal™ WS24 doit couvrir uniformément la retouche. La surface doit être lisse afin de Peiffer, op. cit., p. 236. CAMEO, Primal [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Primal [Consulté le 21/05/2018] 438 Loc. cit. 439 CONSERVATION RESOURCES, Rhoplex WS24 (Primal WS24) [en ligne] Disponible sur : http://www.conservationresources.com/Main/section_34/section34_36.htm [Consulté le 21/05/2018] 440 Voir Fiche technique en Annexe n°29, p. 359. 441 CONSERVATION RESOURCES , op. cit. 436 437

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ressembler à un verre : aucune trace de pinceau ne doit être visible. Le vernis doit être appliqué généreusement, sous forme de goutte que le pinceau viendra progressivement « étirer » jusqu’à recouvrir la surface souhaitée. De plus, le vernis doit être au même niveau que la surface de l’émail* et ne doit pas former de surépaisseur. Cela rendrait les comblements très visibles, en particulier les lignes de cassure qui se manifesteraient sous la forme de bourrelets. Il est donc préférable de diluer le Primal™ WS24 dans l’eau pour obtenir un vernis moins épais. Si la brillance n’est pas suffisante, une nouvelle couche diluée sera appliquée. Protocole Technique

Matériel

Matériau

Application au pinceau

- Verrerie - Balance de précision - Pinceaux synthétiques

- Primal™ WS24 - Eau déminéralisée

Mise en œuvre Le Primal™ WS24 est dilué à 60% dans l’eau déminéralisée. En fonction des dimensions des comblements, une goutte plus ou moins importante de vernis est appliquée sur l’une des extrémités du comblement, puis elle est doucement étirée avec le pinceau jusqu’à recouvrir entièrement la retouche. L’opération doit s’effectuer rapidement pour ne pas que le Primal™ WS24 commence à sécher. Plusieurs couches de vernis peuvent être superposées jusqu’à obtenir la brillance souhaitée. Le léger excès de Primal™ WS24 ayant débordé sur l’émail* est nettoyé après séchage, avec un bâtonnet ouaté imprégné d’acétone. Avant

Après

Fig. 190 : Avant / Après retouche du bouchon

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Avant

Après

Fig. 191 : Avant / Après retouche du tricorne

Temps de l’intervention : 5 h Conclusion L’intervention a été plaisante à réaliser. La retouche est évidemment un travail d’interprétation, presque artistique 442 , mais il faut être attentif au décor original pour comprendre et reproduire les motifs manquants. Notre but n’était pas de laisser libre cours à notre imagination, mais de respecter l’intégrité de l’œuvre. Le vernis a donné un effet de profondeur à la réintégration colorée. Nous avons demandé l’avis d’un public extérieur pour avoir un nouveau regard sur la retouche443. Le résultat est satisfaisant : lorsque le spectateur tient à une certaine distance, la retouche est suffisamment discrète pour ne pas être perceptible, mais lorsqu’il se rapproche, la retouche devient lisible. L’œuvre a retrouvé son esthétique. Temps total de la retouche : 76 h

Peiffer, op. cit., p. 218. Silvia Païn, « La restauration archéologique et sa lisibilité : une démarche de consultation du public », ARAAFU, Paris, 13,14 et 15 juin 2002, pp. 295-316, p. 301. 442 443

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VII- MARQUAGE ET SYSTÈME DE SÉCURITÉ DU BOUCHON Avant de restituer l’œuvre au musée Auguste Grasset, nous devons penser à la conservation de l’objet.

VII.1. Marquage La fontaine et le bouchon comportaient un marquage que nous avons dû effacer au cours du traitement de nettoyage et dérestauration. Selon les souhaits du conservateur, monsieur Roudier, ils doivent être réinscrits. Les numéros d’inventaire doivent être isolés de la céramique mais aussi protégés des éventuelles abrasions. Lors d’un stage de Conservation au Musée Princessehof à Leeuwarden (Pays-Bas), nous avons pu réaliser une intervention similaire sur les œuvres de la collection. Faute de moyens financiers, l’opération se faisait avec un vernis à ongles mais le matériau vieillit et est inadapté à la conservation. Une couche de Paraloïd® B-72 sera appliquée sur le Bobbejak, puis les numéros seront inscrits à l’encre, et enfin recouverts d’une nouvelle couche de Paraloïd®.

Fig. 192 : Marquage au Princessehof Museum

Protocole Technique

Matériel

Matériau

Sandwich

- Verrerie - Pinceau carré - Plume

- Paraloïd® B-72 - Encre de Chine Lefranc Bourgeois

Mise en œuvre Avec un pinceau synthétique carré, une première couche de Paraloïd® B-72 est appliquée sous le tertre et la face A du bouchon, à l’emplacement des anciens numéros d’inventaire. L’adhésif doit être posé en une couche fine et uniforme. Le séchage s’effectue rapidement. Avec de l’encre de Chine Lefranc Bourgeois444, les numéros sont inscrits à la

444

Voir fiche technique en Annexe n°30, p. 360.

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plume. La plume doit être chargée correctement en encre afin que le marquage soit lisible : les lettres et les chiffres ne doivent ni être trop fins ni trop épais. Après séchage, une seconde couche de Paraloïd® B-72 est posée. Le fait que le marquage soit compris entre deux applications d’adhésif permet à la fois de ne pas endommager la céramique et de protéger l’écriture d’éventuelles abrasions qui pourraient l’effacer.

Fig. 193 : Écriture du numéro d'inventaire

Fig. 194 : Bouchon après marquage (Face A)

Temps de l’intervention : 45 min

VII.2. Système de sécurité du bouchon Pour renforcer la valeur didactique de l’œuvre et respecter son authenticité, un système de fixation du bouchon doit être prévu. Ce système ne doit pas être immuable, mais « réversible » ou temporaire. En effet, ce système ne doit être en fonction que lorsque le Bobbejak est exposé : le bouchon pourra alors être présenté soit pendu au tricorne, soit positionné à son emplacement, dans le trou. Parallèlement, lorsque l’objet sera entreposé dans les réserves, le bouchon ne devra pas être dans le trou du tricorne afin de permettre une circulation de l’air dans l’œuvre. Le bouchon devra alors être détaché et entreposé à part pour être protégé des éventuels chocs dus à la manipulation de l’objet. Cahier des charges Le matériau utilisé pour le système de fixation devra être : - discret -

non abrasif stable dans le temps résistant à la traction

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Choix du produit L’idée a été inspirée par une exposition au Getty Museum445, où certaines œuvres étaient immobilisées par des fils de nylon. Le nylon est un polymère thermoplastique de la famille des polyamides. En vieillissant, le nylon ne jaunit pas ou peu446. Il peut prendre des formes très variées. Les fils de nylon sont « transparents, élastiques et sensibles à la chaleur (point de fusion à 260°C) »447, très résistants à la traction, aux produits chimiques et à l’abrasion448. Outre leur utilisation comme système de fixation pour certaines œuvres449, les fils sont aussi utilisés en restauration de textile450. Protocole Technique

Matériel

Système d’accrochage

Fil de nylon

Mise en œuvre Le système ne sera pas mis en place par nos soins. Il s’agit ici d’une suggestion adressée au musée Auguste Grasset. Voici néanmoins un schéma permettant de visualiser le procédé. Le fil de nylon a uniquement été coloré en rouge afin de rendre le système plus visible et donc compréhensible au lecteur. Nous proposons une longueur d’environ cinq centimètres pour déplacer le bouchon451 avec plus de facilité.

Fig. 195 : Système de suspension du bouchon Légende : Fil de nylon

Voir Proposition de traitement, p. 91. Agnes Timar-Balazsy, Dinah Eastop, Chemical Principles of Textile Conservation, ButterworthHeinemann, 1998, p. 60. 447 CENTRE DE CONSERVATION DU QUÉBEC, Nylon [en ligne] Disponible sur : http://preservart.ccq.gouv.qc.ca/ModelessLexique.aspx?Id=336 [Consulté le 23/05/2018] 448 Loc. cit. 449 Samuel Quenault, « Œuvres composites / œuvres vivantes ? », CeRoArt [en ligne] HS De l’art à la nature (2013), Disponible sur : https://journals.openedition.org/ceroart/3450 [Consulté le 23/05/2018] 450 MUSEUM TEXTILE SERVICES, « Conservation netting », [document électronique] http://www.museumtextiles.com/uploads/7/8/9/0/7890082/2_using_nylon_net_overlays.pdf 451 Dans et hors du trou. 445 446

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Chapitre 5 : CONSERVATION PRÉVENTIVE Après restauration, l’œuvre a retrouvé une stabilité, néanmoins elle requiert plusieurs précautions afin d’anticiper l’apparition d’altération ou d’endommager la restauration. Ainsi, sa manipulation, son transport mais aussi son environnement de stockage et d’exposition doivent être soigneusement contrôlés. Nous n’aborderons que les potentiels risques directs sur l’œuvre. Les vols et vandalismes ainsi que les désastres ne seront donc pas traités car ils concernent l’organisation de la sécurité du musée. Il existe différents risques pour une œuvre, d’origine humaine ou non. Nous les classons en deux catégories : les risques humains qui incluent la manipulation et le transport de l’œuvre ; et le contrôle de l’environnement qui comprend la pollution, la lumière (et la chaleur) et l’humidité relative.

I- RISQUES HUMAINS Les risques humains concernent la manipulation et le transport de l’œuvre. Ils peuvent être anticipés grâce à la mise en place d’une formation du personnel qui doit être informé de l’état du Bobbejak et de la façon dont il doit être manipulé. Enfin, l’équipe muséale doit régulièrement inspecter les réserves pour vérifier l’état des collections452. Une boîte de conditionnement et de transport avec des matériaux stables et non nocifs a été réalisée auparavant453. Lorsque l’objet est déplacé, il est nécessaire d’anticiper et préparer le parcours au préalable454. Compte tenu de ses altérations et de sa restauration, l’objet est soumis à plusieurs contraintes : - Le tricorne est une zone fragile qui a connu des opérations de collage, comblement et retouche. Il est sensible aux chocs et ne doit en aucun cas être empoigné. - Les pieds et les manches sont également des éléments en relief, susceptibles d’être exposés aux chocs. Il faut y prêter une attention particulière lors de manipulation. - Afin de ne pas perdre le bouchon lors du stockage de l’œuvre en réserve, il doit être conservé dans la même boîte de conditionnement que la fontaine. Il ne doit pas être posé dans le tricorne pour permettre une circulation de l’œuvre dans l’objet. Il peut ainsi être posé sur la mousse de calage arrière et être calé par les mousses qui

COLLECTIF, sous la dir. de Jean-Paul Oddos, La Conservation, Principes et réalités, Paris, Ed. Du cercle de la librairie, 1995, p. 182 : « la connaissance de ces conditions, grâce à une inspection méthodique et régulière, constitue la première étape pour maîtriser les conditions de conservation des collections ». 453 Voir p. 92. 454 Les allées doivent être dégagées. 452

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enserrent le cou du personnage. Néanmoins, le personnel du musée doit être informé d’une telle disposition, afin d’éviter d’endommager la céramique. Pour une sécurité optimale, le Bobbejak doit être manipulé à deux mains, avec des gants en coton afin de ne pas abraser la retouche. L’objet doit être tenu par le dessous du tertre et le dos du personnage.

Fig. 196 : Bonne manipulation du Bobbejak

Il ne doit en aucun cas être porté par le cou, le tricorne, la tresse… ou encore uniquement par le « haut » du corps car cela créerait de fortes tensions sur les joints de collage.

Fig. 197 : Mauvaises manipulations

II- CONTRÔLE DE L’ENVIRONNEMENT • La pollution dans les réserves et les vitrines – poussières et solvants – peut être réduite respectivement grâce à un système de ventilation et l’installation de pièges à polluants455. Le Bobbejak peut être régulièrement dépoussiéré avec un pinceau doux et sec. Si toutefois, l’œuvre est considérée comme étant trop encrassée, il est préférable de le confier à un restaurateur professionnel. 455

COLLECTIF, op. cit., p. 172-173.

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• La céramique est un matériau inorganique insensible à la lumière 456, mais cela n’est pas le cas des produits utilisés pour la restauration. Par action photochimique, les ultraviolets peuvent décolorer la retouche tandis que le dégagement de chaleur induit par les infrarouges peut provoquer le décollement des fragments (si la Tg du Paraloïd® B-72 est atteinte). Le Bobbejak ne devra donc pas être placé près d’une source de chaleur et avoir un éclairage adapté457. Une température comprise entre 18°C et 23°C est préconisée pour la majorité des matériaux458. • Enfin, l’humidité relative (H.R.) peut être un facteur d’altération du Bobbejak. Il s’agit de « la quantité de vapeur d’eau contenue dans un volume d’air donné par rapport au maximum qu’il pourrait contenir à une température et à une pression données » 459 . L’humidité relative s’exprime en pourcentage, entre 0 et 100, sachant que, au-delà de 65% d’H.R., l’air est humide. Nous avons vu que l’œuvre avait déjà développé des microorganismes dans la porosité de la pâte. Pour éviter que le phénomène ne se reproduise, la fontaine devrait être conservée dans un environnement où l’humidité relative varie entre 47 et 53% pendant ± deux jours460. • L’environnement de stockage mais aussi d’exposition doit être sécurisé : l’œuvre ne doit pas être placée dans des zones à risques, loin des produits inflammables, et ne devra pas être exposée aux vibrations.

Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF), Vade-Mecum de la conservation préventive, Paris, C2RMF, 2013, p. 15. 457 Les ampoules utilisées devront être des LED, soit des diodes électroluminescentes. Elles ont une faible consommation électrique et ont une durée de vie plus longue que les ampoules halogènes. 458 C2RMF, op. cit., p. 14. 459 Ibidem, p. 13. 460 Ibidem, p. 14. 456

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Avant restauration

Après restauration

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Fig. 198 : Avant / Après restauration

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Face A

Face B

Face C

Face D

Fig. 199 : Photos après restauration

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CONCLUSION La conservation-restauration du Bobbejak a été intense et extrêmement enrichissante. Elle a offert un large éventail d’interventions et a nécessité, au total, environ 324 heures de travail. À cela s’ajoutent les temps « d’attente » des traitements (pose de gels et compresses, séchage de la pâte, polymérisation des adhésifs, séchage de la retouche…). Les choix de traitement ont toujours été effectués en accord avec le conservateur du Musée Auguste Grasset, d’où l’œuvre provient. L’œuvre avait déjà connu une précédente restauration qui ne répondait nullement aux critères de déontologie. La nouvelle restauration devait donc être moins intrusive, et plus esthétique. La dérestauration a été longue et a nécessité trois mois de travail car elle requérait des traitements répétitifs quotidiens pour retirer, sans endommager la céramique, des matériaux très durs et qui recouvraient généreusement l’objet. Compte tenu de la localisation de certaines lacunes, le collage des fragments a dû être interrompu pour procéder à certains comblements qu’il aurait être impossible de faire par la suite. Les comblements ont été fait en deux couches (système de double structure) afin de redonner une stabilité et une harmonie à la forme tout en se rapprochant de l’aspect vitrifié de l’émail*. La retouche a requis un grand sens de l’observation et de l’adaptabilité.

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Troisième partie : PROJET TECHNICO-SCIENTIFIQUE

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INTRODUCTION Le sujet est inspiré du Bobbejak étudié et s’inscrit dans une logique de restauration plus aboutie de l’objet. La fontaine possédait autrefois un robinet métallique fixé sur le tertre entre les jambes du personnage qui servait à l’écoulement de l’alcool que l’objet contenait. Le robinet ne sera pas restitué car, puisque nous ignorons sa forme exacte, cela reviendrait à tromper le spectateur sur l’état réel de l’objet. Cette hypothétique restauration aurait uniquement été entreprise dans un but décoratif : en aucun cas, la fontaine ne pourrait être remise en fonction car il faudrait pour cela utiliser des produits de restauration extrêmement résistants pour assurer une bonne étanchéité, or la plupart de ces produits ne respectent pas les critères de déontologie (réversibilité, innocuité, stabilité). Malgré cela, les recherches historiques effectuées ont révélé que trois métaux étaient utilisés pour réaliser les robinets des Bobbejakken : le plomb, l’étain, le cuivre. Cela nous a conduit à rechercher des adhésifs employés à la fois dans deux domaines de restauration : celle de la céramique et celle du métal. Les études menées jusqu’à présent pour comparer des adhésifs ne l’ont jamais été lorsque les deux matériaux, céramique et métal, étaient présents sur une même œuvre. Il semblait alors intéressant de mesurer l’adhérence des différents adhésifs selon le métal utilisé lors du collage pour savoir lequel aurait pu être choisi pour recoller le robinet à la fontaine. Néanmoins, ces trois métaux ne seront pas étudiés : pour des raisons budgétaires, seuls le plomb et le cuivre seront retenus. De plus, ils semblent présenter les plus importantes différences de comportement461. Le but de cette étude est de travailler sur l’adhésion entre la céramique et les métaux retenus. Jacques Cognard en donne la définition suivante : l’adhésion est « l’ensemble des interactions se produisant au contact solide-adhésif ». Pour mesurer la qualité de l’adhésion, il faut envisager des expérimentations qui mettront en évidence le niveau de résistance de l’adhésion en essayant de séparer les deux matériaux en contact. En mesurant l’adhérence c’est-à-dire « le résultat d’un essai de séparation »462, l’adhésif le plus susceptible de résister au temps, et à l’usage peut être déterminé. Objectif de l’étude : Mesurer et comparer l’adhérence de différents adhésifs lors d’un collage céramique-métal en analysant les forces nécessaires pour séparer les matériaux en contact afin de déterminer quel adhésif est le plus performant pour coller la céramique au plomb et au cuivre.

Voir p. 192. Jacques Cognard, Sciences et technologie du collage, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2004, p. 4. 461 462

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Afin de bien comprendre les mécanismes mis en œuvre, nous commencerons notre étude en rappelant les principes de collage. Puis, nous étudierons la nature et les propriétés des matériaux utilisés : la céramique, les métaux cuivre et plomb, et les adhésifs (polymères). Enfin, pour mesurer l’adhérence des différents adhésifs, nous procèderons à des tests de rupture, dont les résultats seront analysés et interprétés.

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Chapitre 1 : PRINCIPES DE COLLAGE L’étude regroupe les trois grandes classes de solides : les inorganiques (céramique), les métaux et les organiques (polymère). Le collage est le seul moyen « de joindre un métal à un matériau non métallique »463. Comprendre l’adhésion permet d’étudier l’adhérence. Comment fonctionne l’adhésion ? Tout d’abord, chaque corps est composé d’atomes et de molécules qui interagissent et forment des liaisons. Les atomes forment entre eux des liaisons fortes, ou primaires : -

les liaisons métalliques et ioniques « assurent la cohésion des solides »

- les liaisons covalentes « assurent la stabilité des molécules »464 Parallèlement, les molécules entre elles forment des liaisons secondaires, ou faibles. En cassant un objet, une céramique par exemple, on « casse » les différentes liaisons qui le composent, et il est impossible de recoller les fragments en les positionnant simplement les uns contre les autres. Néanmoins, si deux plaques de verre sont mises en contact, soient deux surfaces très lisses, elles adhèrent l’une à l’autre. Ce phénomène est possible grâce aux forces électriques appelées forces de Van der Waals. Les électrons des molécules d’une des plaques de verre se déplacent, attirés par les charges positives des molécules de l’autre plaque : c’est la polarisation. « La polarisation d’une molécule entraîne la polarisation de la suivante, etc. »465.

Fig. 200 : Polarisation des molécules

Évidemment il s’agit d’une adhésion faible car les deux plaques finiront par se détacher. Or le phénomène ne fonctionne pas si l’expérience est répétée avec deux surfaces moins lisses, comme par exemple deux plaques de Plexiglass : à l’échelle microscopique, on Samuel Bélakhowsky, Soudage, collage, Paris, PYC, 1983, p. 383. Ibidem, p. 2 465 RADIO TELEVISION SUISSE, Découverte, Sciences et environnement [en ligne] Disponible sur : https://www.rts.ch/decouverte/sciences-et-environnement/maths-physique-chimie/4642178-/ [Consulté le 11/02/2018] 463 464

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constate que les surfaces ont de nombreuses aspérités, ce qui signifie qu’il existe des « espaces d’air » entre les deux plaques. Si ces espaces sont comblés, comme par exemple, avec de l’eau si l’on mouille les surfaces, les deux plaques de Plexiglass adhèrent l’une à l’autre. L’eau joue alors le rôle d’adhésif.

Naissance du principe de la colle Pour combler tous les « espaces d’air », l’adhésif doit être réparti de façon à être le plus homogène possible. Il doit donc s’étaler facilement sur toute la surface à coller du substrat. Les molécules de l’adhésif doivent donc augmenter leur surface, or, dans un liquide, elles s’attirent mutuellement. Néanmoins celles en surface sont attirées par les molécules de l’intérieur : cette force est appelée tension de surface ou tension superficielle. De cette force, découle la capacité de mouillage d’un fluide : plus la tension de surface est grande, plus les molécules du fluide se rassemblent en goutte. Ce dernier aura donc des difficultés à « mouiller » la surface sur laquelle il est.

Fig. 201 : Différents cas de mouillage

Or les solides aussi ont une tension superficielle466. « Pour qu’une colle s’étale bien, il faut donc que sa tension de surface soit inférieure à celle du matériau à coller » 467 . L’énergie d’adhésion, Wa, découle des interactions engendrées par les forces de Van der Waals. Wa peut être calculé « à partir des énergies superficielles du substrat (ƴS) et de l’adhésif (ƴL) et de l’énergie interfaciale (ƴSL) » 468 . Le rapport est mis en évidence par l’équation de Dupré : Wa = (ƴS + ƴL) – ƴSL Dans le cas d’un adhésif bien appliqué, tous les « espaces » de la surface sont comblés, ce qui augmente la zone de collage. Jacques Cognard, op. cit., p. 20 « La surface des métaux (à l’exception de l’or) exposé à l’atmosphère est recouverte d’un oxyde hydraté de composition mal définie et variable. L’énergie superficielle du métal solide est en fait celle d’un oxo-hydroxyde, carbonate, non stœchiométrique. (…) Le collage des métaux est le collage des oxydes superficiels. (C’est pourquoi l’énergie superficielle des métaux n’intervient pas dans les problèmes de collages) ». 467 PORTAIL ET MAGAZINE AUX MULTIPLES, La colle colle, oui mais pourquoi ? [en ligne] Disponible sur : http://www.pomms.org/la-colle-colle-oui-mais-pourquoi--049.html [Consulté le 15/02/2018] 468 UNIVERSALIS, Collage [en ligne] Disponibel sur : https://www.universalis.fr/encyclopedie/collage/ [Consulté le 12/02/2018] 466

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Par ailleurs, la viscosité469 d’un adhésif est très importante : deux surfaces adhèreront mieux grâce à un adhésif visqueux plutôt que fluide. Brève histoire de la colle Selon Olivier Omnès, le collage était une pratique déjà existante en 6500 av. J-C470. « Les colles naturelles sont nombreuses, et recourent à toutes les origines et tous les “métiers” [...] on retrouve à la fois des produits très simples, le jus d’ail, la colle d’amidon, les colles de peau, de poisson, d’os, des colles protéiniques “autres” comme la caséine de fromage, le blanc d’œuf, etc. Elles peuvent être employées “pures” ou entrent dans la composition de recettes beaucoup plus élaborées [...] » Le miel et l’œuf étaient ainsi utilisés pour les parchemins, la caséine et le caoutchouc au début de l’aéronautique, etc. Dans les années 1920, Hermann Staudinger (1881-1965) se sert du principal constituant du caoutchouc – l’isoprène – pour révolutionner le collage en exploitant les propriétés de certaines macromolécules471 : les polymères472. Comment la colle adhère-t-elle ? L’adhésif et le substrat établissent des liaisons chimiques : -

Une liaison covalente, très solide : les atomes sont constitués d’un noyau autour duquel gravitent des électrons, disposés par couche473 dite couche de valence. Chaque couche comprend un nombre défini d’électrons. Une dernière couche pleine permet une réactivité optimale des atomes. Afin de remplir la dernière couche de valence, « un atome du matériau et un atome de la colle se partagent certains de leurs électrons »474.

-

-

Fig. 202 : Structure d'un atome

Une liaison ionique : « un atome du matériau donne un électron à un atome de colle »475 . L’atome du matériau devient un ion positif et celui de la colle un ion négatif. La liaison est créée car l’ion positif attire l’ion négatif. Une autre force est mise en œuvre : la force mécanique. En séchant, l’adhésif

Température au-dessus de laquelle un polymère adopte un comportement élastique. Olivier Omnès (2002), Approche historique de la restauration de la céramique, Mémoire de Master : Restauration-Conservation de Céramique, Saint-Denis, INP, p. 96. 471 VIDEOTHEQUE DU CNRS, La colle [en ligne] Disponible sur : http://videotheque.cnrs.fr/index.php?urlaction=doc&id_doc=2268 [Consulté le 15/02/2018] 472 Ils marquent le début des matières plastiques. 473 CNRS, LE JOURNAL, L’atome en images [en ligne] Disponible sur : https://lejournal.cnrs.fr/nosblogs/les-yeux-de-la-science/latome-en-images [Consulté le 15/02/2018] 474 PORTAIL ET MAGAZINE AUX MULTIPLES, La colle colle, oui mais pourquoi ? [en ligne] op. cit. 475 Loc. cit. 469 470

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« s’accroche » aux aspérités de la matière476. La liaison chimique qui est nécessaire pour unir les trois classes de solides mis en présence lors de cette étude – les inorganiques (céramique), les métaux et les organiques (polymère) – est la liaison ionique477. Un collage fait intervenir les interactions de quatre surfaces : celles de l’adhésif (inférieure et supérieure) et celles des éléments à assembler 478 . Chaque surface a des propriétés différentes.

Les polymères Tous les adhésifs sont des polymères, ce qui signifie qu’ils sont « faits de plusieurs parties ». Il existe des polymères naturels (cellulose, collagène, etc.) et synthétiques 479. De fait, les polymères sont des structures chimiques qui se caractérisent par de longs enchaînements de milliers de molécules, appelées monomères. Les monomères sont chimiquement liés les uns aux autres, telles les perles d’un collier 480 , par des liaisons chimiques fortes. Des milliers de chaînes composent le matériau polymère 481 et ses propriétés évoluent en fonction de leur longueur (plus une chaîne est longue, plus un polymère est visqueux). Ces longues chaînes s’emmêlent à l’image d’un plat de spaghettis – image établie par Pierre-Gilles de Gennes qui reçoit en 1991 le prix Nobel de physique482. Lorsqu’ils sont appliqués en tant qu’adhésifs, les polymères polymérisent, autrement dit ils vont durcir et former un joint solide. Deux formes de polymérisation sont possibles : - par polyaddition : les monomères identiques qui formaient des doubles liaisons, se lient les uns aux autres par de simples liaisons et forment de longues chaînes. - par polycondensation : deux monomères différents se lient l’un à l’autre, de façon répétitive. Les polymères peuvent être en solution dans un solvant : à faible concentration, ils forment des pelotes483 qui se comportent indépendamment les unes des autres. À plus forte concentration, ils « s’enchevêtrent à la façon d’une longue chevelure en désordre » 484 et rendent la solution plus visqueuse. « Dans cet état enchevêtré, les molécules peuvent se déplacer les unes par rapport aux autres comme un serpent qui se faufilerait entre des

K.W. Allen, « Adhésion et adhésifs : principes de base », Adhésifs et consolidants, Xe Congrès international, Paris 2-7 septembre 1984, Champs-Sur-Marne, SFIIC, pp. 1-8, p. 5 : « Pourvu que la surface elle-même soit résistante, une surface rugueuse là où les fibres ou les pores sont de l’ordre du micromètre donnera une liaison adhésive durable et de force améliorée. » 477 Bélakhowsky, op. cit, p. 383. 478 Cognard, op. cit., p. 11. 479 Etienne Guyon, Matières et matériaux, de quoi est fait le monde ?, Belin, 2010, p. 306. 480 Cognard, op. cit., p. 4. 481 VIDEOTHEQUE DU CNRS, La colle [en ligne] op. cit. 482 Guyon, op. cit., p. 307. 483 Appelées pelotes statistiques. 484 Guyon, op. cit., p. 308. 476

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obstacles » 485 . L’image du serpent a permis d’attribuer le terme de reptation à ce phénomène. Polymères en pelotes

Polymères enchevêtrés

Reptation des polymères

Fig. 203 : Fonctionnement des polymères

Il existe deux classes de polymères : - Les thermoplastiques - Les thermodurcissables Compte tenu de leur structure, ces derniers sont difficilement réversibles, c’est pourquoi seuls les thermoplastiques sont retenus pour cette étude. De même, George Epstein dit que les adhésifs les plus utilisés pour procéder au collage de métaux sont les thermoplastiques, car ils adhèrent très bien aux matériaux486. Polymères thermoplastiques : polymères linéaires ou ramifiés Les adhésifs thermoplastiques ont des chaînes linéaires ou ramifiées, qui se présentent sous la forme de ronces487 et dont les molécules sont liées par des liaisons de Van der Waals et des liaisons hydrogènes488. Lors de la polymérisation, les chaînes des polymères ramifiés sont greffées par des chaînes homopolymériques ou copolymériques. Polymères linéaires

Polymères ramifiés

(a) Homopolymère ; (b) Copolymère statistique ; (c) Copolymère alterne ; (d) Copolymère séquencé

(a) Homopolymère ramifié ; (b) Copolymère ramifié

Fig. 204 : Polymères linéaires et ramifiés Loc. cit.. George Epstein, Adhesive bonding of metals, New York, N.Y. : Reinhold, 1954, p. 43. 487 Cognard, op. cit., p. 4. 488 UNIVERSITE MEDICALE VIRTUELLE FRANCOPHONE, « La Chimie des polymères » [document électronique] http://campus.cerimes.fr/odontologie/enseignement/chap3/site/html/cours.pdf 485 486

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Les thermoplastiques se caractérisent de la façon suivante : leur état physique évolue en fonction de la température. À température ambiante, ils sont solides ou vitreux. Au fur et à mesure que la température augmente, ils deviennent viscoélastiques jusqu’à finalement être liquides. La température de transition vitreuse ou Tg est ainsi la température au-delà de laquelle le polymère se ramollit489, d’où l’appellation « thermoplastique ». Cahier des charges des adhésifs Les adhésifs sélectionnés doivent répondre à un même cahier des charges. Ils doivent être thermoplastiques (réversibles). Afin d’éviter toute interaction avec le métal, ils ne doivent pas être composés d’eau. Enfin, leur température de transition vitreuse (Tg) doit être relativement élevée, soit supérieure à 40°C, afin de supporter des variations de température. Il fallait rechercher des adhésifs qui étaient utilisés à la fois dans le domaine de la restauration de céramique et celle du métal et qui respectent le cahier des charges. D’après le Compendium des adhésifs de Jane Down 490 , les nitrates de cellulose, les poly(vinyles) butyral et les acryliques répondent aux critères. Ont été ainsi sélectionnés : -

nitrate de cellulose : HMG

-

poly(vinyle) butyral : Mowital® B60HH

-

acrylique : Paraloïd® B-48N Jusqu’à présent, des études ont été menées pour comparer ces adhésifs lorsqu’ils étaient utilisés pour le collage des céramiques491, ou comme vernis protecteur des métaux492, mais jamais lorsque les deux matériaux céramique et métal étaient présents sur une même œuvre.

Guyon, op. cit., p. 308 : « L’agitation thermique devient alors capable de briser les interactions interchaînes de type Van der Waals et liaisons hydrogène. » 490 Jane Down, Adhesive compendium for conservation, Canadian Conservation Institute, Ottawa, 2015. 491 Ida Pohoriljakova, Sara M. Moy, « A Re-evaluation of Adhesives used for mending Ceramics at KamanKalehöyük : A final assessment », AAS XVIII, 2013, pp. 83-92 492 Carol Grissom, « Evaluation of Coating Performance on Silver Exposed to Hydrogen Sulfide », Journal of the American Institute for Conservation, May 2013, vol. 52, pp. 82-96. 489

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Chapitre 2 : PRÉSENTATION DES PRODUITS Il nous faut connaître la structure des matériaux et produits sélectionnés pour mener à bien les expériences.

I- LA CÉRAMIQUE La céramique est un matériau inorganique, avec une structure cristallisée. Elle est composée d’argile* soit un mélange de « sédiments issus de la décomposition des roches feldspathiques et des métamorphoses de ces roches » 493 . L’argile* contient donc des minéraux – principalement la silice et l’alumine – et des oxydes métalliques. L’argile*, sous forme de poudre, peut être mélangée avec de l’eau pour obtenir une pâte 494 dont il est possible de modifier les propriétés – la plasticité, la finesse, la couleur, etc. – en ajoutant des adjuvants (fondant* et dégraissant*). La céramique est ensuite mise en forme par action de températures fortes 495 : la cuisson va permettre de souder les « grains » de l’argile* entre eux. Les liaisons qui assurent sa cohésion sont iono-covalentes autrement dit ce sont des liaisons très énergétiques, difficiles à casser. La céramique a donc les propriétés suivantes : - tenue en température élevée (matériau réfractaire) - dureté (résistance à la pénétration d’un corps) - faible conductivité de chaleur - fragilité - faible ductilité (déformable)496 De plus, la céramique résiste à la corrosion car elle est déjà oxydée puisqu’elle contient des éléments métalliques.

Jean-Paul van Lith, Céramique, dictionnaire encyclopédique, Paris, l’Amateur, 2000, p. 27. Ibidem, p. 28. 495 UNIVERSITE DE LIMOGES, « Les matériaux » [document électronique] http://pedagogie.aclimoges.fr/physique-chimie/IMG/pdf/Mate_riaux.pdf, p. 16 496 UNIVERSITE VIRTUELLE ENVIRONNEMENT & DEVELOPPEMENT DURABLE, Les trois classes de solides [en ligne] Disponible sur : http://stockage.univ-valenciennes.fr/EcoPEM/BoiteA/co/A_1_C_4.html [Consulté le 25/02/2018] 493 494

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II- LES MÉTAUX Les métaux sont composés d’une multitude de grains (2 à 20 µm), en forme de polyèdre. Ces grains sont en réalité des monocristaux, soit un « empilement régulier d’ions métalliques dont la cohésion est assurée par un gaz d’électrons »497. On dit que les métaux ont une structure cristalline. Chez les métaux purs, les cristaux ont une structure et une composition identiques. En ce qui concerne le cuivre et le plomb, ils ont tous les deux une structure cubique à faces centrées498. Les molécules des métaux sont liées par des liaisons métalliques, soit des liaisons de force moyenne. Cela explique pourquoi les métaux ont des résistances, duretés et températures de fusion intermédiaires. De plus, la liaison métallique n’est pas directionnelle. Ainsi, les molécules peuvent-elles se rapprocher le plus possible les unes des autres499 : les métaux ont donc une structure compacte, et une densité élevée. De plus ils sont de très bons conducteurs de chaleur et d’électricité, ils réfléchissent donc la lumière c’est pourquoi ils sont opaques et brillants.

II.1. Le cuivre Le cuivre est un métal naturellement coloré, de teinte rouge500, qui se présente sur Terre sous forme de minerais : ceux qui servent à sa métallurgie sont essentiellement les sulfures501. Les minerais sont tamis, broyés et enrichis par système de flottation. Puis ils peuvent subir deux sortes de traitements : - par voie sèche (pyrométallurgie) - par voie humide (hydrométallurgie) Le premier traitement est le plus employé : le minerai est placé dans un four à 1100°C en atmosphère oxydante où il fond et se divise en deux couches : la couche supérieure est composée de scories, la couche inférieure est la matte (contient 40 à 60% de cuivre). Cette matte est ensuite oxydée en présence de silice (d’abord oxydation de FeS, puis oxydation de Cu2S). Le métal, porté à 1250°C, est à l’état liquide : il est dénommé « cuivre blister » à cause de son apparence « cloquée »502.

Jean Barralis, Gérard Maeder, Précis de métallurgie : élaboration, structures, propriétés, normalisation, Paris, Nathan, 2005, p. 16. 498 Les deux autres structures principales qui existent sont : structure cubique centrée et hexagonale compacte. Jean Barralis et Gérard Maeder, 2005, p. 20. 499 Michel Colombié, Matériaux industriels : Matériaux métalliques, Paris, Dunod, 2000, p. 6. 500 Ibidem, p. 652. 501 Barralis et Maeder, op. cit., p. 14. 502 Ibidem, p. 15. 497

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Il subit ensuite un affinage : cette opération peut être d’ordre thermique, mais le plus souvent l’affinage est électrolytique. Enfin, le cuivre est transformé par coulage, moulage, etc. afin d’obtenir des demi-produits ou produits finis. Michel Colombié précise que « les caractéristiques mécaniques ne dépendent pas de la nuance de cuivre considérée et très peu de la forme des produits (laminés, tubes, barres). Elles sont surtout influencées par le taux d’écrouissage* »503. La métallurgie du cuivre date du Chalcolithique (2500 à 1800 av. J.-C.). De nos jours, le cuivre continue à être employé dans de nombreux domaines. Herbert H. Uhlig explique qu’il « est un métal très utilisé à cause d’une bonne résistance à la corrosion ainsi qu’une usinabilité mécanique, une conductibilité électrique et thermique excellentes et une grande aptitude au soudage et à la brasure »504. De fait, il est, après l’argent, le métal qui conduit le mieux l’électricité, et il sert comme conducteur thermique dans les chauffe-eaux ou chaudières, radiateurs, condenseurs et réchauffeurs des centrales électriques, thermiques, nucléaires505. D’un point de vue biologique, il est nécessaire pour l’Homme d’absorber du cuivre, néanmoins, à forte concentration, une intoxication est possible506. Tableau synthétique des propriétés du cuivre Symbole Famille chimique Numéro atomique Masse atomique M Masse volumique507 ρ Dureté Mohs508 Densité509 Température de fusion510 Coefficient de dilation511

Cu Métal de transition 29 63,54 8 930 kg.m-3 3 8,92 1084°C α = 16,6.10-6K-1 ( de 20°C à 100°C) α = 17,6.10-6K-1 (de 20°C à 300°C) α = 18,6.10-6K-1 (de 20°C à 500°C)

Colombié, op. cit, p. 652. Herbert H. Uhlig, Corrosion et protection, Paris, Dunod, 1970, p. 290. 505 FUTURA PLANETE, Les propriétés physiques du cuivre [en ligne] Disponible sur : https://www.futurasciences.com/planete/dossiers/geologie-cuivre-premier-metal-travaille-homme-779/page/2/ [Consulté le 27/02/2018] 506 Loc. cit. 507 Barralis et Maeder, op. cit., p. 138. 508 FUTURA PLANETE, Les propriétés physiques du cuivre [en ligne] op. cit. 509 Loc. cit. 510 Loc. cit. 511 Barralis et Maeder, op. cit., p. 138. 503 504

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II.2. Le plomb Le minerai qui contient le plus de plomb est la galène (PbS) : 86,6% de Pb en poids. La galène est d’abord séparée par gravimétrie ou par flottation. Des minerais « enrichis » ou « concentrés » sont alors obtenus : ils contiennent entre 60 et 80% de plomb (PbS). Puis le plomb est extrait à travers deux étapes : - le minerai (galène) est grillé à 700°C et se transforme en oxyde PbO - l’oxyde est ensuite réduit par pyrométallurgie à 900°C Un plomb brut dit « plomb d'œuvre »512 (98,5% de plomb) est obtenu. Il est ensuite affiné et donne un plomb épuré – pur à 99,9% – dit « plomb doux » 513 qui est coulé dans des lingotières de 45 kg appelés saumons514. Il est possible de trouver dans le commerce du plomb sous quatre « états » : « commun », « corrodé », « chimique » et « dur »515. Les trois premiers ont des propriétés proches, bien que le troisième soit plus résistant à la corrosion et à la fatigue mécanique ; le dernier, « dur », contient de l’antimoine ce qui rend ses propriétés mécaniques meilleures que celles des autres, jusqu’à 120°C. Le plomb peut adopter plusieurs formes : il peut être en poudre, en billes, ou en feuilles roulées plus ou moins épaisses516. Cette dernière présentation est d’ailleurs la moins chère. Les feuilles laminées sont très utilisées pour se protéger des ondes sonores, et des rayons électromagnétiques517. Étant imperméable à l’eau, le plomb est également employé comme gaine pour les câbles sous-marins à haute tension électrique. Il était également utilisé dans les peintures et les pesticides, jusqu’à ce que l’on découvre sa nocivité pour l’Homme518 (Saturnisme519).

TECHNIQUES DE L’INGENIEUR, Métallurgie du Plomb- Procédés classiques et ressources primaires [en ligne] Disponible sur : https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/materiauxth11/elaboration-et-recyclage-des-metaux-non-ferreux-42370210/metallurgie-du-plomb-m2264/ [Consulté le 02/03/2018] 513 Loc. cit. 514 FUTURA SCIENCES, Le plomb : le métal, la chimie et la production [en ligne] Disponible sur : https://www.futura-sciences.com/sciences/dossiers/chimie-metal-plomb-1030/page/7/ [Consulté le 02/03/2018] 515 Charles V. Cagle, Handbook of Adhesive Bonding, New York, Mc Graw-Hill, 1973, p. 13-2. 516 Ibidem., p. 13-1. 517 UNIVERSALIS, Plomb [en ligne] Disponible sur : https://www.universalis.fr/encyclopedie/plomb/2metallurgie/ [Consulté le 02/03/2018] 518 LENNTECH, Plomb – Pb [en ligne] Disponible sur : https://www.lenntech.fr/periodique/elements/pb.htm [Consulté le 02/03/2018] 519 Maladie ainsi nommée en référence à la planète Saturne qui est le symbole alchimique du plomb. 512

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Fig. 205 : Galène

Le plomb est un métal mou, malléable, facile à mettre en œuvre. Il a une densité élevée et une élasticité nulle. Ayant un point de fusion faible (les métaux pauvres ont une température de fusion inférieure à celle des métaux de transition), il est facile à souder520. C’est l’un des métaux qui résiste le mieux à la corrosion, c’est pourquoi il est très utilisé comme matériau de tuyauterie. Lorsqu’il est nettoyé, le plomb est de couleur argentée, mais au contact de l’air, il s’oxyde et se couvre d’un film protecteur d’oxyde et de carbonate qui lui confère un aspect gris-bleu. Tableau synthétique des propriétés du plomb Symbole Famille chimique Numéro atomique Masse atomique M Masse volumique521 ρ Dureté Mohs522 Densité523 Température de fusion524 Coefficient de dilation525

Pb Métal pauvre 82 207,2 11.340 kg/m3 1,5 11 600,61 K 29,1.10-6 entre 0 et 100 °C

UNIVERSALIS, Plomb [en ligne] op. cit. FUTURA SCIENCES, Le plomb : le métal, la chimie et la production [en ligne] Disponible sur : https://www.futura-sciences.com/sciences/dossiers/chimie-metal-plomb-1030/page/7/ [Consulté le 02/03/2018] 522 PERIODIC TABLE, Plomb [en ligne] Disponible sur : https://pt.kle.cz/fr_FR/plomb.html [Consulté le 02/03/2018] 523 UNIVERSALIS, Plomb [en ligne] op. cit. 524 FUTURA SCIENCES, Le plomb : le métal, la chimie et la production [en ligne] op. cit. 525 Loc. cit. 520 521

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III- LES ADHÉSIFS Comme tous les adhésifs, le HMG, le Mowital® B60HH et le Paraloïd® B-48N, sont composés de polymères, soit des matériaux organiques essentiellement composés de carbone. Les polymères sont de très mauvais conducteurs de chaleur (ils sont utilisés comme isolants), ils sont sensibles à la lumière et la chaleur (ils brûlent facilement), et ont une résistance mécanique et une rigidité faibles.

III.1. HMG526 La cellulose est un polymère naturel que se retrouve dans le bois, le papier, etc. Il s’agit d’un glucide, qui a une structure linéaire, cristalline et il ne contient qu’un seul motif de répétition (monomère) : c’est un homopolymère527.

Fig. 206 : Structure chimique de la cellulose

Fabrication Le nitrate de cellulose est l’ester polynitrate de cellulose528. Le coton ou la pulpe de cellulose est baigné dans un mélange d’eau et d’acides nitrique et sulfurique. Ce dernier catalyse529 et permet à l’acide nitrique de réagir avec des groupes hydroxyles (-OH) de la molécule de cellulose530. « The process goes through stages of nitration, purification, digestion, and dehydration. (…) Then follows a series of boiling and washing treatments in purified water of controlled pH to further decompose and remove unstable products »531.

Voir fiche technique en Annexe n°31, p. 365. CITE SCOLAIRE EMILE LOUBET, « TP Matériaux » [document électronique] http://www.acgrenoble.fr/loubet.valence/userfiles/file/Disciplines/Sciences/SPC/TS/Materiaux/colles.pdf p. 8. 528 Yvonne Shashoua, et al., « Degradation of cellulose nitrate adhesive », Studies in Conservation, Mai 1992 - Vol. 37 n° 2, pp. 113-119, p. 113. 529 Frank Douglas Miles, Cellulose nitrate, the physical chemistry of nitrocellulose, its formation and use, London, Oliver and Boyd, 1955, p. 24 : « 5% plasticizer, 20% CN and 75% solvent » 530 Jonathan Ashley-Smith, Science for conservators, Book 3: Adhesives and coatings, London, Crafts Council, 1983, p. 50. 531 Charles Selwitz, Cellulose nitrate in conservation, Los Angeles, The Getty Conservation Institute, 1988, p.11. 526 527

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Le fait de bouillir la solution dans de l’alcool a pour but de retirer les groupes résiduels de sulfates. Quand, au procédé de lavage, il vise à retirer l’excès d’acide. La formule du nitrate de cellulose est très proche de celle de la cellulose pure, mais les deux tiers des groupes hydroxyles latéraux sont remplacés par des groupes de nitrate (– NO3)532.

Fig. 207 : Comparaison de la structure chimique de la cellulose et du nitrate de cellulose

Il est possible d’ajouter un plastifiant pour rendre l’adhésif plus flexible : l’additif sépare ainsi les molécules et leur permet de glisser les unes sur les autres 533. Le camphre est le produit le plus utilisé à cet effet. En général, l’adhésif final contient « 5% de plastifiant, 20% de nitrate de cellulose et 75% de solvant » 534 . Malheureusement, en vieillissant, le camphre s’évapore, rendant le collage cassant535. Utilisation Le nitrate de cellulose a été largement utilisé, entre autres pour réaliser les premiers objets et ustensiles en plastique 536 . Il est également employé dans le domaine de la restauration à la fin du XIXe siècle, notamment comme consolidant de la pierre, des peintures murales et matériaux organiques, et comme adhésif de céramique, verre et métaux537. Pour ce dernier usage, il est alors sous forme de laques (exemple Agateen ®). Il est alors exposé à la fois à l’oxygène et à la lumière et se décompose d’autant plus

Ashley-Smith, op. cit., p. 50. Ashley-Smith, op. cit., p. 50. 534 Charles V. Horie, Materials for conservation, Organic consolidants, adhesives and coatings, London, Butterworths, 1987, p. 132. 535 Ashley-Smith, op. cit., p. 50. 536 Loc. cit. 537 Horie, op. cit., p. 133. 532 533

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rapidement 538 . De fait, il présente des inconvénients notables, bien qu’il soit un adhésif toujours très populaire. Avantages Facilité de travail539 Solubilité540

Inconvénients Instabilité chimique541 Devient cassant, et connaît un retrait542

L’oxydation et l’exposition à la lumière dégradent le nitrate de cellulose. Cela se manifeste par la réduction de la masse moléculaire et la production d’oxydes nitrogènes qui engendre la formation d’acide nitrique543. L’adhésif jaunit et forme un gel insoluble avec les oxydes métalliques, en particulier le plomb544. La durée de vie du polymère en lui-même est estimée à 150 ans et sa dégradation serait retardée par les plastifiants qu’il contient. Des recherches sont faites pour améliorer la qualité de ces plastifiants545. Yvonne Shashoua se penche alors sur le cas de l’adhésif « HMG Heat and Waterproof Adhesive », extrêmement utilisé au Royaume-Uni d’où il est originaire546. Créé pendant la Seconde Guerre Mondiale par le fondateur de la compagnie Guess, Herbert Falder, l’adhésif est composé de 5% de dibutyl phthalate (plastifiant), 25% de nitrate de cellulose et 70% de solvant (amylacétate et acétone)547. Le HMG est incolore et se présente prêt à l’emploi, conditionné dans un tube à embout fin. Il permet de coller différents types de matériaux : céramique, métal, bois, papier, cuir et textile, et sèche complètement en dix minutes. Fig. 208 : HMG Heat Le fournisseur vante les nombreuses qualités du produit and Waterproof « plasticité et viscosité requises pour une utilisation facile »,

Selwitz, op. cit., p. 49 : « (…) will be, therefore, subject to decomposition both by photochemical degradation of polymer bonds and by accelerated attack of radiation activated nitrogen oxides in the presence of oxygen ». 539 ICOM-CC, « Popping stoppers, crumbling coupons – Oddy testing of common cellulose nitrate ceramic adhesives » [document électronique] 540 Loc. cit. 541 Loc. cit. 542 Ashley-Smith, op. cit., p. 50. 543 Shashoua, op. cit., p. 113. 544 Horie, op. cit., p. 132. 545 Selwitz, op. cit., p. 41. 546 Shashoua, op. cit., p. 114. 547 CAMEO, HMG Adhesive [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/HMG_Adhesive [Consulté le 04/03/2018] 538

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« transparence », « excellente stabilité physique et chimique, réversibilité même dans le temps » 548 , etc. et prend pour preuve plusieurs institutions et professionnels de la restauration qui l’utilisent. Yvonne Shashoua démontre que, dans le cas de conditions de conservation muséales, le HMG est stable et résiste mieux à la dégradation thermique et photochimique que le nitrate de cellulose pur : le HMG reste souple et jaunit très peu549. La cause de cette stabilité est peut-être le dibutyl phthalate. Dès les années 1920, les phthalates sont utilisés comme plastifiants 550 . Le principal d’entre eux – et le moins cher – est le di(2-ethylhexyl) phthalate551.

III.2. Mowital® B60HH552 Fabrication Cet adhésif appartient à la famille des polyvinyles butyrals (PVB). Il dérive du polyacétate de vinyle (PVAC). Ce dernier est « préparé par action de l’acide acétique sur l’acétylène, ou par action de l’acide acétique sur l’éthylène en présence d’oxygène actif »553.

Fig. 209 : Réaction de l'acide acétique avec l'acétylène

Quand le PVAC est hydrolysé, on obtient un polyalcool (PVAL). L’action du butyraldéhyde sur le PVAL engendre l’obtention des butyrals de vinyle (PVB). « On les utilise pour la fabrication de films, d’encres, de vernis. Ils sont insolubles dans l’eau mais solubles dans alcools et cétones »554.

HMG PAINTS LTD., HMG Paints Adhesives Tacky Products With A Worldwie Reputation [en ligne] Disponible sur : http://www.hmgpaint.com/news/242/hmg-paints-adhesives-tacky-products-with-aworldwide-reputation [Consulté le 04/03/2018] 549 Shashoua, op. cit., p. 118. 550 Selwitz, op. cit., p. 43. 551 Il est breveté en 1933. 552 Voir fiche technique en Annexe n°20, p. 318. 553 Jean-Pierre Trotignon et al., Précis Matières Plastiques, Paris, Nathan, 2006, p. 65. 554 Loc. cit. 548

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Fig. 210 : Réaction du PVAL avec le butyraldéhyde

La réaction n’est pas complète555 : il reste une petite quantité de groupes hydroxyles soit entre 10 et 20%556. Acide acétique + acétylène OU acide acétique + éthylène (oxgène actif)

PVAC

Hydrolyse du PVAC

PVAL

PVAL + butyraldéhyde

Légende : Procédé Produit obtenu

PVB

Fig. 211 : Schéma récapitulatif de l'obtention du PVB

Loc. cit. : « Il s’agit donc plutôt de copolymères butyral-alcool vinylique-acétate de vinyle » George Epstein, Adhesive bonding of metals, New York, Reinhold, 1954, p. 46 : « This permits the polyvinyl acetals to actually react with phenolic and other thermosetting resins, with which they are extremely compatible. » 555 556

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Mowital® est une gamme d’adhésifs produite par l’entreprise Kuraray. Il en existe une large gamme : les adhésifs se distinguent alors par leur degré de polymérisation et le degré d’acétalisation qui influent sur leurs propriétés. Le degré de polymérisation – perceptible avec les numéros (B 30, B 45, B 60, B 75...) – définit la longueur d’une chaîne polymère. Plus il est élevé, plus le Mowital® est visqueux, a une masse molaire élevée et forme un film dur.

Fig. 212 : Dégré de polymérisation du Mowital®

Tandis que le degré d’acétalisation – caractérisé par les lettres (B…T, B…H, B…HH) – correspond à la transformation de l’alcool en acétal. Plus il augmente, plus l’adhésif est résistant à l’eau (car la molécule devient de moins en moins polaire) et est soluble dans les solvants apolaires. Autrement dit les Mowital® B…HH sont les plus résistants à l’eau et sont ceux qui se solubilisent le mieux dans les solvants apolaires c’est-àdire qu’ils sont très facilement réversibles.

Fig. 213 : Dégré d'acétalisation du Mowital®

La Tg baisse lorsque : - le degré de polymérisation diminue - le degré d’acétalisation augmente Les adhésifs forment des films résistants à l’eau, à la lumière, assez durs, et extrêmement transparents. Ils se présentent sous forme de fine poudre blanche, et sont vendus conditionnés en sacs557. Ils sont solubles dans les solvants organiques et peuvent être utilisés en solution ou bien être chauffés558. Par ailleurs, ils peuvent être combinés avec des résines thermodurcissables, KURARAY, « Mowital®, PVB Resin for the best connections » [document électronique] https://www.mowital.com/fileadmin/user_upload/MOWITAL/downloads/brochures/Broch_mowital.pdf 557

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telles des époxy, pour modifier leurs propriétés rhéologiques*, en améliorant l’élasticité et l’adhérence des collages559. Ils adhèrent très bien à la céramique, au verre, aux plastiques et aux métaux, c’est pourquoi ils sont utilisés comme films pour les verres feuilletés ou les verres de sécurité, et comme vernis ou sous-couches de protection et anticorrosion, ou encore comme liants dans les encres d’impression. Parmi la gamme produite par Kuraray, le Mowital® B60HH fait partie des adhésifs les plus résistants à l’eau, mais aussi les plus réversibles, puisqu’il est très soluble dans les solvants apolaires. Il a une Tg élevée à 65°C. Lorsqu’il est concentré à 10% dans l’éthanol, sa viscosité est comprise entre 120-280 mPa.s.

III.3. Paraloïd® B-48N560 Fabrication C’est un copolymère d’acrylate de butyle et de méthacrylate de méthyle 561 (BA/MMA). Il dérive de l’acide acrylique CH2=CH-COOH562.

Légende : Exemple méthyle

de

méthacrylate

de

Exemple d’acrylate de butyle Fig. 214 : Polymère d'acrylate de butyle et de méthacrylate de méthyle

KURARAY, Mowital® for adhesives [en ligne] Disponible sur : https://www.mowital.com/applications/adhesives/ [Consulté le 18/02/2018] 559 Loc. cit. 560 Voir fiche technique en Annexe n°32, p. 375. 561 CAMEO, Paraloïd B-48N [en ligne] Disponible sur : http://cameo.mfa.org/wiki/Paraloid_B-48N [Consulté le 02/03/2018] 562 ACADEMIE MONTPELLIER, Polymères [en ligne] Disponible sur : http://sciences-physiques.acmontpellier.fr/ABCDORGA/Famille/Polymere.htm [Consulté le 19/03/2018] 558

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Histoire Lors de sa thèse, le chimiste allemand, Rohm, étudie, en 1901, les polymères issus des esters acryliques 563 . En 1927, il ouvre son entreprise de production de polyméthyle acrylate, à Darmstadt, en collaboration avec Haas. D’abord baptisés Acryloid, ses produits s’appellent par la suite Paraloïd. George Epstein explique comment l’ester acrylique est préparé564 : l'éthylène (C2H4) réagit avec l'acide hypochloreux (HClO) pour former de l'éthylène chlorhydrine : C2H4 + HClO > CH2OH – CH2Cl Celui-ci réagit ensuite avec du cyanure de sodium (NaCN) et forme de la cyanhydrine : CH2OH – CH2Cl + NaCN > CH2OH – CH2 – CN Avec de l’acide sulfurique et un alcool, la cyanhydrine peut être estérifiée et former l’ester acrylique de l’alcool qui a été utilisé. Si de l’acétone cyanohydrine était utilisé au lieu de l’éthylène chlorhydrine, l’ester méthacrylique correspondant serait alors obtenu. Il existe une multitude d’adhésifs de la gamme Paraloïd®. En Restauration de céramique et verre, celui qui est le plus employé est le Paraloïd® B-72, puis vient le B-44. Or en restauration de métal, le B-48N est très utilisé en tant que vernis protecteur (cuivre, laiton, bronze et zinc). Il forme alors un film résistant, flexible et très stable565. Nous avons donc souhaité voir s’il était possible d’utiliser cet adhésif pour les collages céramique-métal. Propriétés Le Paraloïd® B-48N peut se trouver sous forme de grains incolores et transparents ou bien en solution à 45% dans le toluène (il s’appelle alors Paraloïd B48S). Il a une dureté de 11-12 KHN, une Tg de 50°C566 et un indice de réfraction de 1,89567. Il est soluble dans le toluène, le xylène, l’acétate Cellosolve, le méthyléthylecétone et l’acétone 568 . Il contiendrait un plastifiant, le dibutyle phthalate569. Fig. 215 : Paraloïd® B-48N

Epstein, op. cit., p. 47. Ibidem., p. 48. 565 CAMEO, Paraloïd B-48N [en ligne] op. cit. 566 CONSERVATION SUPPORT SYSTEMS, Acryloid B-48N [en ligne] Disponible sur : http://www.conservationsupportsystems.com/product/show/acryloid-b-48n/acryloid [Consulté le 22/02/2018] 567 CAMEO, Paraloïd B-48N [en ligne] op. cit. 568 Loc. cit. 569 Loc. cit. 563 564

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Une étude de l’Institut Canadien de Conservation (ICC), publiée en 1996570, vise à comparer vingt-sept adhésifs PVA et vingt-cinq adhésifs acryliques (évaluation de « leur pH, l’émission de produits volatils nocifs, leur force et leur flexibilité, et le jaunissement après vieillissement à la lumière et dans le noir » 571 ). Même après vieillissement, les propriétés du Paraloïd® B-48N n’évoluent pas572 : - Son pH reste inférieur à 5,5, soit acide - Il ne dégage pas de substance toxique volatile - Il possède une forte résistance à la traction (> 15 MPa) - Il conserve sa flexibilité et peut s’allonger de 20% -

Il ne jaunit pas ou presque (At < 0,05)

Rappels de l’étude Problématique : le Bobbejak possédait autrefois un robinet métallique en cuivre, en plomb ou en étain. Objectifs : Mesure et comparaison de l’adhérence de différents adhésifs lors d’un collage céramique-métal. Principe de l’expérience : Trois adhésifs sont testés : - HMG - Mowital® B60HH - Paraloïd® B-48N Ils seront utilisés pour des collages céramique-cuivre et céramique-plomb. Des tests de rupture permettront de rendre compte des différences d’adhérence.

Jane Down et al., « Adhesive testing at the Canadian Conservation Institute, an evaluation of selected poly(vinyl acetate) and acrylic adhesives », Studies in Conservation, 1996, vol. 41, pp. 19-44. 571 Down et al, op. cit. p. 44. 572 Ibidem, p. 41. 570

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Chapitre 3 : PROTOCOLES Il a fallu se procurer les matériaux nécessaires pour réaliser les expérimentations visant à mesurer l’adhérence des collages : les éprouvettes de céramique, les éprouvettes de plomb et de cuivre, et ensuite les trois adhésifs. Après avoir obtenu les éprouvettes de céramique et de métal, elles ont été collées selon un protocole précis. Pour une bonne répétabilité 573 et reproductibilité 574 de l’expérience, il était important que toutes les éprouvettes soient identiques.

I- PROTOCOLE DE FABRICATION DES ÉPROUVETTES I.1. La céramique Le travail est mené sur une terre poreuse, donc non émaillée. Afin d’avoir des éprouvettes identiques et réduire les erreurs de résultats, les éprouvettes ont été fabriquées par l’entreprise Peter Lavem Paris575. L’argile* utilisée est une faïence* blanche lisse 576 décrite comme « très plastique, idéale pour le tournage, modelage et estampage ». Elle cuit entre 980-1050°C et présente un retrait de 5%. Les éprouvettes ont été réalisées avec une croûteuse pour être de dimensions et de structure égales et mesurent 0,7 x 2,8 x 6 cm.

Fig. 216 : Croûteuse Rohde PW600

I.2. Les métaux I.2.1. Le cuivre Dans l’impossibilité d’obtenir du cuivre sous forme de plaque dans le commerce, une entreprise spécialisée dans les métaux, Weber Métaux577, a fourni une planche de 1000 x 1000 mm et de 0,2 mm d’épaisseur et s’est chargée de la découpe578 des éprouvettes de sorte à ce qu’elles mesurent toutes 2 x 4 cm. L’un des côtés de la planche était recouvert par un film

Fig. 217 : Retrait du film protecteur

Il s’agit de la possibilité d’effectuer une mesure plusieurs fois. La mesure est à chaque fois effectuée par une nouvelle personne mais le même phénomène est mesuré plusieurs fois. 575 PETER LAVEM, Accueil [en ligne] Disponible sur : https://www.peterlavem.fr [Consulté le 18/03/2018] 576 Numéro de référence : FA323 (11,76 € TTC les 10 kg). 577 WEBER METAUX, Métaux, [en ligne] Disponible sur : http://www.weber-metaux.com/content/8-nosmetaux [Consulté le 04/03/2018] 578 Nous avons payé au total 90€ pour l’achat et la découpe du cuivre. 573 574

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205


protecteur de couleur bleue. Il a donc été retiré sur toutes les éprouvettes (Fig. 217 p. 205). Ces dernières ont ensuite été dégraissées avec un coton imbibé d’éthanol.

I.2.2. Le plomb Se procurer du plomb a été plus facile. Un rouleau de plomb destiné à la toiture de maison a été récupéré. Il était fortement encrassé et oxydé. Or, il est essentiel que les surfaces à coller soient propres pour effectuer un bon collage 579 . Un nettoyage mécanique et chimique du plomb a donc été réalisé : la surface a d’abord été poncée avec un papier de verre – à gros grains puis à grains fins – puis frottée avec du papier imbibé d’éthanol.

Fig. 219 : Nettoyage mécanique

Fig. 218 : Rouleau de plomb

Fig. 220 : Nettoyage chimique

Sur la surface nettoyée, a été tracé un quadrillage pour obtenir des éprouvettes aux mêmes dimensions que celles en cuivre, soit 2 x 4 cm. Lors de leur découpe avec une pince à métaux, elles ont été déformées. Pour leur redonner leur planéité, elles ont été aplaties avec un burin.

Fig. 221 : Découpe des éprouvettes

579

Fig. 222 : Éprouvettes de plomb prêtes

Charles V. Cagle, Handbook of Adhesive Bonding, New York, Mc Graw-Hill, 1973, p. 13-3.

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I.3. Les adhésifs Le parti d’utiliser les adhésifs à leur concentration habituelle en restauration580, a été retenu, malgré le fait qu’ils aient des viscosités différentes et que cela puisse donc impacter sur leur adhérence. - Le HMG est acheté sur le site de vente en ligne, Amazon. Il est vendu déjà préparé, conditionné en tube avec un embout fin. - Le Mowital® B60HH provient du fournisseur CTS. Il est préparé en suivant les recommandations de Marianne Schenck581, à 20% dans l’éthanol. La poudre et le

-

solvant sont directement en contact. La solution peut être mélangée avec un agitateur, ou bien il faut attendre que la poudre se dissolve. Le Paraloïd® B-48N est livré par le fournisseur allemand Kremer582. Il est préparé selon la « méthode Koob »583 : dans un récipient en verre, les grains de Paraloïd doivent être emprisonnés et suspendus dans un balluchon de gaze audessus du solvant, de sorte à ce que l’extrémité du balluchon effleure le solvant. Le récipient est ensuite fermé. Le Paraloïd® se dissout progressivement grâce aux vapeurs de solvant. Cette technique permet d’éviter la formation de bulles dans l’adhésif. Les seules indications qui indiquent la concentration du Paraloïd® B-48N parlent d’une préparation à 45%. En conséquence, une préparation de Paraloïd® B-48N à 45% dans l’acétone a été adoptée.

Fig. 223 : Préparation du Paraloïd® B-48-N

I.4. Le collage Afin que tous les collages soient identiques et donc comparables, l’adhésif doit être déposé au même endroit sur les éprouvettes (afin de se répartir uniformément). Pour cela des repères ont été marqués : sur la face A des éprouvettes de métaux, une ligne droite est tracée à 1cm du bord, et, sur la face B, un point est marqué à 0,5 cm de chaque côté des extrémités. De même avec une perceuse électrique à métaux un trou de 0,2 cm de diamètre est percé 584 . Il servira à accrocher un poids pour réaliser les tests de cisaillement. Car ces concentrations sont conseillées pour une meilleure optimisation du collage. Marianne Schenck (2016), Étude et conservation-restauration d’un dolium en terre cuite, datant du Ier siècle et provenant du site gallo-romain d’Œdenburg (Alsace) – Recherche de primaires d’adhésion permettant d’améliorer le collage au Mowital ® B60HH pour l’adapter aux terres cuites de grand volume, Mémoire de Mastère : Conservation-Restauration de Céramique et Verre, Paris, École de Condé. 582 15,47€ les 500g, à quoi s’ajoutent les frais de port. 583 Stephen Koob, « The use of Paraloïd-B-72 as an adhesive: its application for archaeological ceramics and other materials », Studies in Conservation, 1986, vol. 31, pp. 7-14, p. 10 584 Le trou est localisé à 1 cm du bord dans le sens de longueur, et à 0,5 cm du bord dans le sens de la largeur de l’éprouvette. 580 581

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O,5 cm

Ligne

Point O,5 cm

1 cm

1 cm Trous

O,5 cm

Fig. 224 : Éprouvettes de métal Face A (gauche) ; Face B ( droite)

Les 10g d’adhésif sont déposés sur le point, tandis que la ligne sert de repère visuel : la ligne noire doit être au même niveau que l’extrémité de l’éprouvette en argile*. De ce fait, la surface de collage sera la même pour toutes les éprouvettes.

Fig. 225 : Éprouvette céramique-cuivre, collage HMG

Fig. 226 : Éprouvettes en cours de séchage (avec poids et mousse de support)

Lorsque l’adhésif est déposé sur le point marqué, l’éprouvette de métal est délicatement placée sur l’éprouvette en céramique. Un petit poids de 30g est posé sur la zone à coller et y est laissé pendant 5 min, le temps que la colle sèche. Les éprouvettes vont ensuite être soumises à un test de rupture. La force exercée sera le poids, P, mesuré en Newton. P = m.g m est la masse exprimée en kg et g est la constante de gravitation, égale à 9,81 m.s-2. Les mesures seront notées en g. Elles seront par la suite converties en kg pour avoir la mesure en Newton.

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II- PRÉ-TESTS II.1. Tests de cisaillement Les tests ont été effectués sur seulement cinq éprouvettes de chaque série, pour valider ou infirmer le protocole. Les tests ont été réalisés dans les conditions environnementales suivantes : 22,8°C et 45% HR. La partie en céramique des éprouvettes est fixée à un bord de table avec des serre-joints et une planche en bois. Un fil métallique de jardinage est placé à travers le trou dans les métaux, et un bidon y est accroché. De l’eau est progressivement versée dans le bidon, le poids nécessaire pour rompre le collage sera enregistré. Malheureusement, l’expérience ne fonctionne pas : même avec un poids de 20kg, le collage ne cède pas, quel que soit l’adhésif utilisé. Par ailleurs, dans le cas du plomb, le bidon est si lourd que le fil de jardinage Fig. 227 : Plomb coupé par le poids du bidon traverse le métal et le coupe. Pour remédier au caractère non significatif de l’expérience, il est décidé de modifier la nature du test de rupture au profit de l’exercice d’une force de clivage.

II.2. Test de clivage À nouveau les tests ont été réalisés sur seulement cinq éprouvettes de chaque série. La partie métallique des éprouvettes est placée face B contre une table. L’extrémité du métal de la zone collée est positionnée au bord de la table, de sorte que la partie céramique « flotte » dans le vide. Le métal est fixé avec un serre-joint. Avec un fil métallique, un bidon est accroché à la partie céramique. Pour que le bidon soit accroché au même endroit sur les éprouvettes, une droite a été tracée au préalable à 3cm de bord de la céramique : elle sert ainsi de repère pour placer le fil métallique qui soulève le bidon. Fig. 228 : Test de clivage De l’eau est versée dans le bidon, jusqu’à ce que le collage cède. Le poids enregistré, nécessaire à la rupture, est celui du bidon augmenté de celui du fil métallique, du ruban adhésif (utilisé pour accrocher le fil métallique au bidon), et

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de l’éprouvette en céramique collée au métal. Il faut préciser que les données ont une incertitude de 0,01g (balance) et 0,1cm (double décimètre). De fait, les collages se sont détachés. Les écarts entre les mesures relevées sont si importants que l’expérience avec le HMG et le Paraloïd® B-48N n’a pas été poursuivie. Série Mowital® B60HH Cuivre

Plomb

1

1593,2

1

2177,0

2

1107,3

2

3488,3

3

1263,5

3

1835,1

4

453,1

4

2298,7

5

796,4

5

1490,0

II.3. Modification de l’application des adhésifs Pour réduire cet écart, il faut que la quantité d’adhésif soit la même pour toutes les éprouvettes. 10g de l’adhésif sont alors pesés : cela correspond à deux gouttes de Mowital® B60HH avec une pipette et trois gouttes de HMG avec son embout fin. Malheureusement le Paraloïd® B-48N a une viscosité beaucoup trop élevée à 45%585 et ne peut pas être aspiré par la pipette. Pour pallier cet inconvénient, la concentration du Paraloïd® B-48N est réduite à 20% pour la rendre égale à celle du Mowital® B60HH. Après de nouveaux tests, le Paraloïd® peut être aspiré par la pipette : deux gouttes suffisent pour obtenir 10g d’adhésif. L’expérience a été renouvelée avec la série Mowital® B60HH pour le collage céramique-cuivre :

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Cuivre 1979,1 2235,4 2144,2 2080,9 1956,3 2117,8 2242,1 2103,2 2251,4 2101,5

Charles Selwitz, Cellulose nitrate in conservation, Los Angeles, The Getty Conservation Institute, 1988, p. 46: « B-48N at 45% solids has a viscosity of 1,740 cps. » 585

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Dans les calculs, les chiffres sont arrondis au centième : Moyenne : (1979,1 + 2235,4 + 2144,2 + 2080,9 + 1956,3 + 2117,8 + 2242,1 + 2103,2 + 2251,4 + 2101,5) / 10 = 2121,19 g Variance : (1979,1 - 2121,19)2 + (2235,4 - 2121,19)2 + (2144,2 - 2121,19)2 + (2080,9 2121,19)2 + (1956,3 - 2121,19)2 + (2117,8 - 2121,19)2 + (2242,1 - 2121,19)2 + (2103,2 2121,19)2 + (2251,4 - 2121,19)2 + (2101,5- 2121,19)2 / 9 = 10541, 29 g2 Écart-type : √10541, 29 = 102, 67 g Écart-type à la moyenne : 102, 67/ √10 = 32,47 Donc 2121,19 ± 32,47 g à 68% 2 x 102, 67/ √10 = 64,93 Donc 2121,19 ± 64,93 g à 95% Erreur relative : 102, 67 / 2121,19 = 0,04840207619 = 0,048 g 0,048 x 100 = 4,8 % L’erreur étant inférieure à 10%, le protocole est validé. L’expérience est poursuivie avec les autres collages.

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Chapitre 4 : RÉSULTATS I- RÉSULTATS PAR SÉRIE Les résultats sont dans un premier temps communiqués. Les interprétations seront livrées par la suite.

I.1. Série Mowital® B60HH Cuivre (en g) 1979,1 2235,4 2144,2 2080,9 1956,3 2117,8 2242,1 2103,2 2251,4 2101,5

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne (en g)

2121,19

Plomb (en g) 2816,9 2883,2 2459,2 2915,6 3093,3 2923,5 2483,1 2478,4 3057,8 2400,9 2751,19

Écart-type (en g) 102, 67

267,45 Écart-type à la moyenne à 68% (en g)

32,47

84,58 Écart-type à la moyenne à 95% (en g)

64,93

169,16 Erreur relative

4,8 %

9,7%

Poids (en Newton) Cuivre P = m.g P = 2,12 x 9,81 P = 20,79 P ≈ 21 N

Plomb P = m.g P = 2,75 x 9,81 P = 26,98 P ≈ 27 N

Il faut un poids de 27 N pour rompre un collage céramique-plomb avec du Mowital® B60HH, contre un poids de 21 N pour désolidariser un collage céramique-cuivre. Le Mowital® B60HH adhère donc mieux au plomb qu’au cuivre.

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I.2. Série HMG Cuivre (en g) 1979,4 2084,1 1920,5 1901,6 2169,1 1926,8 1937,3 2192,7 1966,4 2200,9

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne (en g)

2027,88

Plomb (en g) 3385,2 2998,7 3116,6 2824,9 2718,7 3345,6 2835,0 3048,2 3274,8 2906,4 3045,1

Écart-type (en g) 121,21

246,07 Écart-type à la moyenne 68% (en g)

38,33

77,81 Écart-type à la moyenne 95% (en g)

76,66

155,63 Erreur relative

5,98%

8,08%

Poids (en Newton) Cuivre P = m.g P = 2,03 x 9,81 P = 19,91 P ≈ 20 N

Plomb P = m.g P = 3,05 x 9,81 P = 29,92 P ≈ 30 N

On constate qu’il faut 30 N pour détacher du plomb collé à la céramique avec du HMG, tandis qu’il faut seulement 20 N pour décoller le cuivre de la céramique. Le HMG adhère mieux au plomb qu’au cuivre.

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I.3. Série Paraloïd® B-48N Cuivre (en g) 2034,3 1925,8 2100,2 1969,1 1946,5 2122,3 2019,7 2260,4 2251,7 1934,0

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Moyenne (en g)

2056,4

Plomb (en g) 3557,1 3798,3 4008,5 3543,8 3602,9 3899,4 3717,2 4060,9 3725,4 4322,7 3823,62

Écart-type (en g) 124,54

250,55 Écart-type à la moyenne à 68% (en g)

39,38

79,23 Écart-type à la moyenne à 95% (en g)

78,77

158,46 Erreur relative

6,06%

6,55%

Poids (en Newton) Cuivre

Plomb

P = m.g P = 2,06 x 9,81 P = 20,21 P ≈ 20 N

P = m.g P = 3,82 x 9,81 P = 37,47 P ≈ 37 N

37 N permettent de détacher du plomb collé à la céramique avec du Paraloïd® B48N. Seulement 20 N désolidarisent un collage de cuivre-céramique avec du Paraloïd® B48-N. Le Paraloïd® B48-N adhère mieux au plomb qu’au cuivre.

II- COMPARAISON ET INTERPRÉTATIONS II.1. Comparaison des mesures obtenues Mowital® B60HH Cuivre Plomb 2121,19 g 2751,19 g 21 N 27 N

HMG Cuivre 2027,88 g 20 N

Plomb 3045,1 g 30 N

Paraloïd® B-48N Cuivre Plomb 2056,4 g 3823,62 g 20 N 37 N

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40

35

Poids (N)

30 25 20

Plomb

15

Cuivre

10 5 0 Mowital® B60HH

HMG Adhésifs

Paraloïd® B-48N

Fig. 229 : Graphique du poids à la rupture selon l'adhésif utilisé 40 35

Poids (N)

30 25 Mowital® B60HH

20

HMG

15

Paraloïd® B-48N

10 5 0 Plomb

Cuivre Métaux

Fig. 230 : Graphique du poids à la rupture selon le métal collé

II.2. Interprétations des résultats De manière générale, quel que soit l’adhésif utilisé, il adhère mieux au plomb qu’au cuivre. Cela est probablement dû à l’ancrage mécanique qui est plus important pour le plomb que le cuivre car le plomb a été préparé artisanalement tandis que la plaque de cuivre a été préparée industriellement, et donc de façon beaucoup plus homogène. De même, quel que soit l’adhésif utilisé, les erreurs relatives sont systématiquement plus élevées pour les

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éprouvettes au plomb. Cela démontre bien les incertitudes liées à la fabrication artisanale des éprouvettes. Les trois adhésifs ont une adhérence similaire pour le collage cuivre-céramique, mais le Mowital® B60HH montre des résultats légèrement supérieurs. Parallèlement, le poids nécessaire pour rompre un collage céramique-plomb varie beaucoup selon l’adhésif utilisé. Le Paraloïd® B-48N est celui qui adhère le mieux : il est d’ailleurs presque deux fois plus adhérant que lorsqu’il est utilisé pour le collage céramiquecuivre. On peut remarquer un manque d’homogénéité dans la manière dont se rompent les échantillons : lors de la rupture des collages céramique-cuivre avec le HMG, le film adhésif s’est totalement détaché de la céramique : il n’y a aucun résidu. Le film est uniquement visible sur le cuivre. L’adhérence du HMG au cuivre est donc excellente. Inversement, lors de la rupture des collages céramique-plomb avec le Mowital® B60HH, le film adhésif est uniquement visible sur la céramique. Pour les autres séries, la rupture a eu lieu dans le joint de colle : les résidus d’adhésif sont visibles à la fois sur la céramique et le métal.

Fig. 231 : HMG et cuivre

Fig. 232 : Mowital® B600HH et plomb

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II.3. Limites et critiques de cette étude Il aurait été intéressant de réaliser cette étude en incluant l’étain. De même, il aurait été intéressant de mesurer l’adhérence des adhésifs après exposition des éprouvettes métalliques à humidité et température élevée afin d’étudier leur comportement des collages avec la dilatation des métaux. Il aurait peut-être fallu comparer les adhésifs à une viscosité égale, afin que le mouillage des surfaces se fasse de la même manière. Le taux d’erreur ne dépasse pas 10% néanmoins plusieurs critères de mise en œuvre sont à prendre en compte : le flux d’eau versé dans le bidon, la préparation manuelle et non industrielle des éprouvettes de plomb. Nous n’avons pas réussi à réaliser des tests de cisaillement qui auraient permis d’obtenir des mesures plus précises. Néanmoins l’expérience donnerait peut-être des résultats concluants avec une machine à traction dans un laboratoire.

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CONCLUSION Ce travail a été l’occasion d’étudier le collage de la céramique avec différents métaux, le plomb et le cuivre, et leur comportement à la rupture. On a pu remarquer que lorsqu’ils sont soumis à une force de cisaillement (qui s’explique par l’orientation de la force parallèle au joint de collage), les trois adhésifs ont une adhérence au moins dix fois supérieure à celle constatée par clivage (qui agit en levier). Les difficultés de mise en œuvre (procuration des produits, préparation des éprouvettes, adaptation du protocole expérimental) ont requis une grande patience et adaptabilité et n’ont pas permis de pousser plus loin les recherches. L’étude est donc incomplète pour répondre entièrement à la problématique. Dans le cas hypothétique où il faudrait coller le robinet métallique à la fontaine, le choix de l’adhésif serait avant tout déterminé par l’adhérence du collage du Bobbejak, autrement dit des tessons de céramique. Les collages céramique-céramique et céramiquemétal doivent avoir une adhérence similaire. De fait, il est difficile de décider quel adhésif serait utilisé dans le cas où le robinet aurait été en cuivre ou dans le cas où il aurait été en plomb. Idéalement, la rupture doit se produire dans le joint de collage586 car cela signifierait que l’adhésif adhère de façon égale à la céramique et au métal. Or, le HMG adhère plus au cuivre qu’à la céramique et le Mowital® B60HH adhère plus à la céramique qu’au plomb. Dans cette étude, ils ne peuvent pas être considérés comme les adhésifs les plus adaptés pour ces collages respectifs. Toutefois, d’un point de vue déontologique, tous les collages sont « valables » car la matière céramique n’a été endommagée pour aucune éprouvette, ce qui est un critère primordial lors du choix d’un adhésif en restauration587. Si le Bobbejak avait eu un robinet en plomb : les deux adhésifs sélectionnés pourraient donc être le HMG et le Paraloïd® B-48N. Le second est plus résistant à la rupture, mais il deviendrait moins flexible et moins soluble en vieillissant 588. Parallèlement, le HMG a une adhérence moindre. Bien que certains professionnels disent qu’il conserve de bonnes propriétés physiques et chimiques dans le temps, malheureusement d’autres continuent à le décrier, peut-être à tort, et son utilisation risque d’être critiquée589.

Rupture adhésive. En cas de rupture, elle ne doit pas être cohésive, c’est-à-dire pas dans le corps de la céramique. 588 Ida Pohoriljakova, Sara M. Moy, « A Re-evaluation of adhesives used for mending Ceramics at KamanKalehöyük: A final assessmen », AAS XVIII, 2013, pp. 83-92, p. 88. 589 Charles Velson Horie dit que le nitrate de cellulose devient insoluble en contact avec les oxydes de plomb, mais il faudrait vérifier si le HMG se comporte de la même manière. 586 587

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Si le robinet de la fontaine avait été en cuivre, le choix de l’adhésif s’orienterait plus volontiers vers le Mowital® B60HH ou le Paraloïd® B-48N qui présentent une adhérence similaire. Ce travail peut constituer une étape dans le projet éventuel de fabrication d’un adhésif métal / céramique performant. Ce dernier nécessiterait la prise en compte d’autres facteurs comme le vieillissement, la solubilité, etc. qui resteraient à étudier. En s’interrogeant sur des objets composites, cela nous a permis d’élargir nos aptitudes en restauration en travaillant sur des matériaux divers.

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CONCLUSION GÉNÉRALE Ce travail a été l’occasion de contacter et de rencontrer des professionnels de la conservation-restauration. Les recherches historiques ont été une véritable enquête policière et nous ont poussé à effectuer un voyage dans le Nord de la France, en Belgique et aux Pays-Bas pour découvrir des œuvres similaires et récolter des informations passionnantes. Cela nous a même incité à réaliser un stage au Princessehof Museum, à Leeuwarden, qui a apporté de nombreuses clés à la compréhension du Bobbejak (notamment avec la découverte d’Hindeloopen). En analysant la signature présente sous l’objet, nous avons pu déterminer un lieu de production et estimer une datation : le Bobbejak a été produit aux Pays-Bas, à Delft, par la manufacture De Klaauw, entre 1763 et 1806. Cette production est typiquement néerlandaise mais elle s’inscrit également dans un courant de l’époque, en se rapprochant des Toby Jugs anglais et des Pots Jacquots français. La représentation des Bobbejakken synthétise des influences européennes (théâtre populaire, tricorne) et asiatiques (décor en bleu et blanc, tresse, motifs du vêtement). Elle est également sans doute liée à une divinité qui progressivement aurait perdu son statut sacré pour créer un objet populaire, et satyrique (caricature de la classe bourgeoise). La restauration a pu redonner une nouvelle vie à l’œuvre en lui restituant sa stabilité et sa lisibilité. Le Bobbejak peut désormais réintégrer les collections du musée Auguste Grasset et transmettre ses valeurs au public. Les traitements nous ont permis d’effectuer des recherches qui ont enrichi nos compétences, aiguisé notre curiosité, et nous ont conforté dans notre passion pour le métier. Le travail de dérestauration a été conséquent et a rendu possible le constat de l’état réel de la fontaine. Le comblement et la retouche ont également été des étapes importantes : la première a conduit à redonner une unité à l’objet (notamment en rattachant deux tessons flottants) et à mettre en valeur la forme (volutes, tricorne) ; la seconde a été réalisée de sorte à atténuer l’aspect visuel des comblements et à sublimer le décor original. Les recherches historiques ont indiqué que l’objet possédait autrefois un robinet métallique, en cuivre, en plomb ou en étain. En nous fondant sur l’hypothèse qu’il aurait fallu recoller le robinet lors de la restauration, nous avons tenté de déterminer quel adhésif adhèrerait le mieux lors d’un collage céramique-cuivre et céramique-plomb. Les trois adhésifs testés – HMG, Mowital® B60HH, Paraloïd® B-48N – devaient correspondre aussi bien à la restauration du métal qu’à celle de la céramique. Les résultats des tests de clivage indiquent que le Paraloïd® B-48N pourrait convenir pour un collage céramique-plomb tandis que le Mowital® B60HH correspondrait mieux à un collage céramique-cuivre. Cette étude

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technico-scientifique permet une avancée en restauration d’objets composites tant au niveau de la pratique que du partage d’information entre professionnels.

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GLOSSAIRE A Argile : produit issu de la sédimentation des roches. Les principales composantes sont la silice et l’alumine. En ajoutant de l’eau, on peut obtenir une pâte qui peut être façonnée. Atmosphère oxydante : combustion en atmosphère de cuisson en excès d’oxygène. B Barbotine : argile délayée à l’eau. Biscuit : ce terme à plusieurs significations. Pour la faïence, il s’agit de la première cuisson de la céramique, avant l’application de l’émail. Pour la porcelaine, cela désigne le fait de cuire directement la pâte à sa température de maturation. La porcelaine est alors mate car aucune couverte n’est posée dessus. Cela concerne uniquement les statuettes. C Calcine : produit de la fusion du plomb et de l’étain. Chintz : toile de coton imprimée originaire d’Inde. Colombin : boudin d’argile. Copperta : à l’origine, il s’agit d’un accident de fabrication et se traduit par un manque de brillance de l’émail stannifère. Les Italiens appliquent alors une seconde glaçure (plombifère) pour redonner de la brillance à l’objet. Coutures : lors de la fabrication d’une céramique de forme complexe, les différents éléments sont créés séparément, avant d’être assemblés et collés par un joint de barbotine. Dans le cas de la porcelaine, ces joints laissent des marques qui, après cuisson, sont visibles à la surface. D Dégraissant : matériau de plasticité faible ou nulle qui ets ajouté à la pâte pour limiter son retrait au séchage (qui engendrait des fissures). Delft paysan : Faïences polychromes destinées à la paysannerie hollandaise entre 1725 et 1780.

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E Écrouissage : le fait de battre un métal à froid ou à une température inférieure à sa température de recuit, et éventuellement l'étirer ou le laminer, afin de le rendre plus dense, plus élastique et plus résistant. Émail stannifère : glaçure blanche et opaque obtenue grâce à la calcine (qui contient de l’étain, responsable de la couleur blanche et de l’opacité). L’émail stannifère est appliqué sur les faïences. État vert : consistance que la terre acquiert à son premier stade de séchage. F Faïence : pâte poreuse et opaque, de couleur rouge à blanchâtre, recouverte d’un émail stannifère qui permet d’obtenir une surface imperméable, blanche, opaque et brillante. Faïence fine : également appelée faïence feldspathique. Elle est mise au point par les Anglais à la fin du XVIIe, XVIIIe siècle. Elle contient une quantité d'argile très importante. Et notamment une argile réfractaire, du kaolin, pour obtenir une pâte la plus blanche possible. Puisque la pâte est blanche, elle est recouverte d’un vernis plombifère, et le décor peut se faire sous glaçure. Fondant : élément qui provoque ou qui accélère la fusion et la vitrification d'une pâte, d'une couleur, d'un engobe, et abaisse la température de vitrification. Frittage : il s’agit du fait de fritter. Les composants ont complètement fondu et ont formé une masse de verre. Fritte : verre obtenu lors d’un frittage. G Glaçure : revêtement vitreux formé par la fusion de la silice et d’un fondant (frittage). Grand feu : le décor est peint sur cru. Les oxydes métalliques utilisés sont limités et les couleurs se mélangent mal ensemble. J Jour : deux tessons sont mal jointifs. Un écart de quelques millimètres est visible le long de la ligne de cassure.

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K Kwaart : processus typiquement delftois. Après avoir peint le décor sur l’émail stannifère, une seconde couche de glaçure (plombifère) est appliquée avant cuisson afin de conférer davantage de brillance à la céramique. L Lévigation : la première étape du procédé de fabrication d’une céramique est le « nettoyage » de l’argile dans plusieurs bassins. Peu à peu l’eau délite à la terre : les particules lourdes tombent au fond d’un bassin, mais les plus légères peuvent s’écouler jusqu’au un deuxième, puis un troisième bassin. Ce processus confère la finesse de la pâte. M Majolique : Faïence italienne présentant la particularité d’être recouverte d’une copperta. Moufle : le décor de moufle est peint sur cuit. Il permet d’obtenir des couleurs fines et des dégradés. La pièce ne doit pas être en contact avec les flammes. P Petit feu : cuisson à basse température (750°C à 900°C). Poncis : pour tracer le dessin sur une céramique, le modèle est piqué et un petit sachet contenant du carbone est passé dessus. Porcelaine : Il existe de nombreuses sortes de porcelaine. La porcelaine contient du feldspath et du kaolin, soit une argile réfractaire, très blanche. Après cuisson à haute température (13001400°C), la céramique obtenue est dure, très blanche, translucide. Il est possible d’observer la brillance de la pâte lors d’une cassure. R Réfractaire : qui résiste à de très hautes températures. Rhéologie : étude de la déformation et de l'écoulement de la matière sous l'effet d'une contrainte appliquée. T Trek : Spécificité delftoise. Les peintres soulignent le décor avec un trait noir produit à partir de l’oxyde de manganèse.

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TABLE DES ILLUSTRATIONS Fig. 1 à 3 Fig. 4 Fig. 5 Fig. 6 Fig. 7 Fig. 8 et 9 Fig. 10 Fig. 11 Fig. 12 Fig. 13 Fig. 14 Fig. 15 Fig. 16

Fig. 17 Fig. 18 Fig. 19 Fig. 20

Fig. 21 Fig. 22

Fig. 23 Fig. 24 Fig. 25 Fig. 26 Fig. 27 Fig. 28 et 29 Fig. 30 Fig. 31 Fig. 32, 33 et 34 Fig. 35 Fig. 36 Fig. 37 Fig. 38 et 39 Fig. 40 Fig. 41 Fig. 42 et 43

©Pauline Marion-Andrès Marion S. van Aken-Fehmers, Loet A. Schledorn, 2001, vol. 2, p. 304 E.S. Auscher, 1920, vol. 1, p. 387 Marion S. van Aken-Fehmers, Loet A. Schledorn, 2001, vol. 2, p. 308 E.S. Auscher, 1920, vol. 1, p. 388 Musée Prinsenhof Friso Wielenga, 2015, p. 99 Friso Wielenga, 2015, p. 234 http://arts-graphiques.louvre.fr/detail/oeuvres/0/521840-Le-souper-fin https://www.gemeentemuseum.nl/en/collection/grape-shaped-tureen-dish?origin=gm https://www.gemeentemuseum.nl/en/collection/two-sculptures-cow?origin=gm https://www.rijksmuseum.nl/en/search?q=BK-NM-12400-243&v=&s=&ii=0&p=1 a). http://www.delftsaardewerk.nl/items/view/decoratief-object_fontein b). http://www.delftsaardewerk.nl/items?search=fontein&x=0&y=0#comment c Rijksmuseum d). Rijksmuseum Christine Lahaussois, 2008, p. 178 ©Pauline Marion-Andrès Christine Lahaussois, 2008, p. 174 a). Rijksmuseum b). https://www.gemeentemuseum.nl/en/collection/fountain-shape-man?origin=gm c). Rob Michiels Auctions (https://www.rm-auctions.com/fr/arts-deurope/1716-font?) d). Rob Michiels Auctions (https://www.rm-auctions.com/fr/arts-deurope/1713-unegrande-fontaine-de-table-figurative-bobbejak-18eme?) ©Pauline Marion-Andrès a). https://www.auction.fr/_fr/lot/cruche-anthropomorphe-grande-grece-campanie4eme-3eme-siecle-av-j-c-a-8317123#.Wzv7mekdJ34 b). https://www.metmuseum.org/art/collection/search/254484 c). https://www.metmuseum.org/art/collection/search/245387 d). https://www.auction.fr/_fr/lot/urbino-groupe-formant-fontaine-de-tablerepresentant-bacchus-1765622#.Wzv7WukdJ34 e). http://collections.vam.ac.uk/item/O17434/figure-group-fontana-workshop/ f). https://www.khm.at/objektdb/detail/89121/?offset=0&lv=list https://www.louvre.fr/moteur-de-recherche-oeuvres https://www.louvre.fr/oeuvre-notices/stamnoi-figures-rouges-dits-stamnoi-fould http://parismuseescollections.paris.fr/fr/petit-palais/oeuvres/le-cortege-de-silene#infosprincipales m.vam.ac.uk/item/0148866/toby-jug-wood-ralph-the/ John Bedford, 1968, p. 19 Annié Castier, Alain Tapié, 2008, p. 183 Google Maps Jean Rosen, 2016, p. 9 ©Pauline Marion-Andrès https://www.chineancienne.fr/kircher-la-chine-illustree/ https://www.louvre.fr/oeuvre-notices/le-dejeuner https://collections.frick.org/objects/ Aronson, 2010, p. 7 ©Pauline Marion-Andrès https://www.art.com/products/p38644352073-sa-i9833317/thomas-allom-itinerantbarber.htm ©Pauline Marion-Andrès

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Fig. 44 et 45 Fig. 46 Fig. 47 Fig. 48 Fig. 49 Fig. 50 Fig. 51 Fig. 52 Fig. 53 Fig. 54 Fig. 55 Fig. 56 Fig. 57 Fig. 58 à 96 Fig. 97 Fig. 98 Fig. 99 Fig. 100 Fig. 101 Fig.102 à 105 Fig. 106 Fig. 107 à 110 Fig. 111 Fig. 112 Fig. 113 Fig. 114 à 163 Fig. 164 Fig. 165 à 176 Fig. 177 Fig. 178 à 185 Fig. 186 Fig. 187 à 199 Fig. 200 Fig. 201 Fig 202 Fig. 203 Fig. 204 Fig. 205 Fig. 206

Fig. 207 Fig. 208 Fig. 209 et 210 Fig. 211 Fig. 212 et 213 Fig. 214 Fig. 215

https://www.friesmuseum.nl/en/see-and-do/exhibitions/chintz/ Hilda Amphlett, 2003, p. 123 Maurice Leloir, 1900, p. 369 Princessehof Museum https://www.rijksmuseum.nl/en/search/ Aronson, 2010, p. 128 Annié Castier, Alain Tapié, 2008, p. 142 http://www.sothebys.com/en/auctions/ecatalogue/2014/arts-of-europel14302/lot.5.html https://www.avrotros.nl/site/gemist/item/tussen-kunst-en-kitsch-14-oktober-2015-1410-2015 Paul Kuritz, 1988, p. 41 http://passerelles.bnf.fr/grand/pas_983.htm Dorothy Chansky, Ann Folino White, 2015, p. 92 Karen Jürs-Munby, 2007, p. 127 ©Pauline Marion-Andrès Rijskmuseum ©Cécile de Chillaz https://www.leroymerlin.fr/v3/p/produits/boite-modular-clear-box-plastique-l-34-x-p39-5-x-h-30-5-cm-e12043 ©Pauline Marion-Andrès http://www.conservationresources.com/Main/section_26/section26_01.htm ©Pauline Marion-Andrès https://www.leroymerlin.fr/v3/p/produits/tour-de-rangement-orgamix-plastique-l-26-xp-36-5-x-h-63-cm-e1400217014 ©Pauline Marion-Andrès Jonathan Ashley-Smith, 1992, p. 83 Jane Down, 2015, p. 13 Jonathan Ashley-Smith, 1992, p. 82 ©Pauline Marion-Andrès http://www.codplatre.fr/PDF/LLGT-Contre-depouille.pdf ©Pauline Marion-Andrès Fiche technique du Parafilm® M ©Pauline Marion-Andrès https://m.geant-beaux-arts.fr/acrylique-golden-open.html ©Pauline Marion-Andrès https://www.rts.ch/decouverte/sciences-et-environnement/maths-physiquechimie/4642178-comment-la-colle-ca-colle-.html https://tpe-colles.jimdo.com/l-adhérance-de-la-colle/ https://wattsupscience.wordpress.com/2016/11/20/structure-de-latome-fissionnucleaire-et-reacteur-a-fission-wus20/ Étienne Guyon, 2010, p. 308 http://campus.cerimes.fr/odontologie/enseignement/chap3/site/html/cours.pdf http://www.groupes.polymtl.ca/glq1100/mineraux/galene/galene.html http://www.acgrenoble.fr/loubet.valence/userfiles/file/Disciplines/Sciences/SPC/TS/Materiaux/colles.p df http://cool.conservation-us.org/jaic/articles/jaic30-02-003_2.html https://www.fredaldous.co.uk/products/h-m-g-heat-waterproof-adhesive https://www.memoireonline.com/06/11/4570/m_Le-verre-dans-le-batiment44.html ©Pauline Marion-Andrès https://www.mowital.com/pvbresin/properties-of-pvb/ https://www.chemicalbook.com/ChemicalProductProperty_EN_CB21210868.htm https://www.kremer-pigmente.com/fr/mediums-liants-und-colles/liants-solubles-dansdes-dissolvents/resines-synthetiques/2206/paraloid-b-48-n

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Fig. 216 Fig. 217 à 232 Fig. 233 Fig. 234

Fig. 235 Fig. 236 et 237 Fig. 238 Fig. 239 Fig. 240 Fig. 241 Fig. 242

https://www.peterlavem.fr/crouteuses/3958-crouteuse-rohde-pw600.html ©Pauline Marion-Andrès ©Jean-Michel Roudier a). Aronson, 2008, p. 55 b). Aronson, 2015, p. 101 c). Christie’s (https://www.christies.com/lotfinder/lot_details/?intobjectid=3886293) d). Rob Michiels Auctions (https://www.rm-auctions.com/fr/arts-deurope/1715-unegrande-fontaine-de-table-figurative-bobbejak-18eme-faience-de-delft-bleu-et-blanc) http://www.antike-am-koenigsplatz.mwn.de/en/ancient-masterpieces/museumhighlights/archive-of-museum-highlights/dionysos-cup.html ©Princessehof Museum, Leeuwarden John Bedford, 1968, p. 15 Jean Rosen, 2016, p. 10 http://collections.vam.ac.uk/item/O181302/flask-and-lid-unknown/ Meredith Chilton, 2001, p. 46 Meredith Chilton, 2001, p. 48

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ANNEXES

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Annexe 1 : Manuscrit du musée Grasset, extrait du rapport n°4 du 8 juin 1864

Fig. 233 : Rapports faits et lus à la Société Historique, Littéraire et Agricole, Protectrice de la Bibliothèque et du Musée de la ville de Varzy, par M. Grasset aîné, conservateur de la Bibliothèque et du Musée et Trésorier

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Annexe 2 : Bobbejakken

Citerne figurative avec couvercle, Delft, faïence polychrome, H. 33,2 cm, vers 1750- 1770

Citerne figurative avec couvercle, faïence polychrome, Delft, H. 34,2 cm, vers 1750-1770

Bouteille pour gin ou « Bobbejak », Delft, porcelaine, H. 34 cm, vers 1760

Bobbejak, Delft, faïence en bleu et blanc, H. 33 cm, XVIIIe siècle

Fig. 234 : Autres exemples de Bobbejakken

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250


Annexe 3 : Dauphin

Sur un kylix590, Exékias a immortalisé un célèbre épisode dionysiaque 591 : capturé par des marins tyrrhéniens qui ne le reconnaissent pas et veulent le manger, Dionysos se révèle à eux en faisant fleurir une vigne sur le mât et les punit en les transformant en dauphins. Nous voyons ainsi le dieu étendu sur une embarcation delphinomorphe, entouré par un double attribut : le dauphin – attribut marin – et la vigne – attribut terrestre. Fig. 235 : Exékias, Dionysos naviguant, Vulci, Kylix à figures noires, H. 13,6 cm, D. 30,5 cm, vers 530 av. J-C., Staatliche Antikensammlungen, Munich

Delft a repris l’iconographie du dauphin sur de nombreuses œuvres. En voici des exemples :

Fig. 236 : Tegel met blauwwit decor van een plassende putto op een dolfijn, faïence, 12,8 x 12,9 x 1,0 cm, 1670, Pays-Bas, Princessehof Museum Leeuwarden, NO 08691.D

Fig. 237 : Tegel met blauwwit decor van een man op een dolfijn, faïence, 13 x 12,8 x 1,0 cm, 1675, Harlingen, Princessehof Museum Leeuwarden, NO 08716.F

DICTIONNAIRE LAROUSSE, Kylix [en ligne] : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/ « Coupe grecque pourvue légèrement recourbées ». 591 Hymnes homériques, VII. 590

Disponible sur d’anses horizontales

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251


Annexe 4 : Chanson « The Brown Jug »

Fig. 238 : « The Brown Jug » de l’ouvrage de George Hogarth, How’s illustrated book of English songs, 1845. Dessiné par G.H. Hine et gravé par C. Gray (The British Museum)

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Annexe 5 : Bouteille en faïence

Fig. 239 : Bouteille, h. 45,5 cm, Nevers, 1740, Nevers, Musée de la Faïence et des Beaux-Arts, NF 202

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Annexe 6 : Bobbejak chinois

Fig. 240 : Flasque et bouchon, Chine, Jingdezhen, Porcelaine, décor polychrome et dorure, H. 33 cm, 17601780, Victoria & Albert Museum, Londres

Si les Chinois ont davantage accentué l’obésité du personnage, leur interprétation du Bobbejak est plus soignée. D’une part, la palette de décor est également plus raffinée, plus précieuse, et les boutons de la veste et du chapeau sont dorés. D’autre part, l’emploi de la porcelaine a permis de multiplier les détails : les traits du visage sont plus fins et rendent le personnage plus expressif. Le spectateur peut ainsi remarquer les plis et les rides de la peau, ainsi que les petites dents que le personnage dévoile en souriant.

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Annexe 7 : Costume d’Hanswurst

Fig. 241 : Jacket and trousers of Hanswurst, mid-18th century, Czech Republic, Velvet, silk and braid, State Institute of Cultural Heritage in České Budĕjovice, Castel Česky Krumlov, Czech Republic

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255


Annexe 8 : Porcelaine Hanswurst

Fig. 242 : Johann Wilhelm Lanz, Hanswurst, Frankenthal Porcelain Factory, porcelaine, 13 x 6.7 cm, vers 17551760, Gardiner Museum, Toronto

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Annexe 9 : Constat d’état avant et après le transport Le conservateur du musée Grasset, monsieur Roudier, s’est chargé du conditionnement de l’œuvre : l’objet a été placé à l’horizontale dans une casse en plastique dont les parois étaient protégées par des plaques de mousses en polyéthylène extrudée, épaisses de 5 cm. Le transport en voiture jusqu’à l’École de Condé a été réalisé pour nos soins. Un rapide constat d’état a été fait avant et après transport pour nous assurer que l’œuvre n’avait pas été endommagée.

Numéro d’inventaire Constat d’état daté du Observations générales Conditions de conservation Nombre de tessons Interventions antérieures Pourcentage lacunaire Dégradation active Empoussièrement Altérations Lacune Eclat Trésaillage Fêlure/Fissure Cassure Tâche/Auréole Concrétion Agrafes/Tenons Résidus divers Urgence de l’intervention Causes de l’altération Motifs de l’intervention

V.F.453.1 et V.F.453.2 Constat d’état avant transport 15/09/2016 Les retouches rendent illisible le nombre exact de tessons. Stockage dans les réserves du musée Grasset sans conditionnement sur une étagère. 15 Collage, comblement, retouche 0-25%

25-50% OUI

Fort

Moyen

50-75% NON Faible

75-100% Nul

Deux lacunes : sur la cuisse droite du personnage et sur le bouchon. Peut-être au niveau du chapeau. Peu nombreux. Surtout des éclats de surface. Fêlures sur la main droite. 30%

Poussière sur les creux, sur la tresse de cheveux et à l’intérieur. OUI NON Choc. Dérestauration dans le cadre d’une étude approfondie de l’œuvre.

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Numéro d’inventaire Constat d’état daté du Observations générales Conditions de conservation Nombre de tessons Interventions antérieures Pourcentage lacunaire Dégradation active Empoussièrement Altérations Lacune Eclat Trésaillage Fêlure/Fissure Cassure Tâche/Auréole Concrétion Agrafes/Tenons Résidus divers Urgence de l’intervention Causes de l’altération Motifs de l’intervention

V.F.453.1 et V.F.453.2 Constat d’état après transport 15/09/2016 Les retouches rendent illisible le nombre exact de tessons. Stockage dans les réserves du musée Grasset sans conditionnement sur une étagère. 15 Collage, comblement, retouche 0-25%

25-50% OUI

Fort

Moyen

50-75% NON Faible

75-100% Nul

Deux lacunes : sur la cuisse droite du personnage et sur le bouchon. Peut-être au niveau du chapeau. Peu nombreux. Surtout des éclats de surface. Fêlures sur la main droite. 30%

Poussière sur les creux, sur la tresse de cheveux et à l’intérieur. OUI NON Choc. Dérestauration dans le cadre d’une étude approfondie de l’œuvre.

Aucun dommage n’a été relevé entre le départ du musée Auguste Grasset et l’arrivée à l’École de Condé.

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Annexe 10 : Lampe U.V. Waldmann

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Annexe 11 : Récapitulatif des tests effectués I. Identification des matériaux exogènes I.1. Solubilité Etat de surface Altération

Encrassement Poussière Poussière mobile incrustée

Dépôts brunverdâtre

Dépôts Dépôts blanc-gris

Dépôts jauneorangé

(cratères, fêlures, rayures, éclats)

Test Coton sec

✔✔✔

Eau déminéralisée + coton Éthanol

✔✔✔

Acétone

White Spirit

✔✔✔

Anciennes interventions Altération Test Eau déminéralisée chaude + coton

Retouche (test sur l’œuvre)

Matériau de comblement (test sur prélèvement)

Matériau de collage (test sur prélèvement)

✔✔✔ (en contact

✔✔ (en contact

✔✔ (en contact

prolongé)

prolongé)

✔✔ (en contact

✔✔ (en contact

prolongé)

prolongé)

Éthanol Acétone

prolongé) ✖ ✖

White Spirit

Acide chlorhydrique

-

✔✔

✔✔

Test de Biuret

-

-

Test de Molisch

-

-

Légende : ✖ Aucune réaction592

✔✔ Réaction partielle du matériau

✔ Faible réaction du matériau

✔✔✔ Réaction immédiate et totale du matériau

592

Par « réaction » nous entendons une dissolution ou un gonflement…

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I.2. Fluorescence

Altération

Fluorescence Blanche

Dépôts tranches du bouchon

Dépôts Dépôts blancgris

Dépôts jauneorangé

Anciennes interventions Retouche Matériau de Matériau comblement de collage

Orange clair

Jaune vif Verdâtre

✔ ✔

✔ ✔

Orange vif

I.3. Spectrométrie Voir les spectres p. 262 et p. 263.

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II. Résistance des matériaux Les tests inventoriés dans ce tableau permettent de comprendre les propriétés mécaniques et chimiques de la matière originale mais aussi des anciennes restaurations.

Test de Mohs Il permet de comparer la dureté d’un élément avec des matériaux plus ou moins durs. L’échelle de Mohs est comprise entre 0 et 10, 10 étant son maximum et indiquant une très grande dureté. Email : L’émail n’est pas rayé au scalpel, ce qui signifie qu’il a au moins une dureté de 5 sur l’échelle de Mohs. Pâte : Une pièce de monnaie laisse des traces noires sur la pâte (dureté 3 sur l’échelle de Mohs). La pate est facilement rayée avec un scalpel (dureté 4 sur l’échelle de Mohs) Matériau de comblement : Il est rayable au scalpel (dureté 4 sur l’échelle de Mohs). Retouche : Elle est rayée par une pièce de monnaie (dureté 3 sur l ‘échelle de Mohs).

Test de pulvérulence Le but est de déterminer la fragilité d’une surface, ce qui orientera les traitements de restauration (un fixage ou une consolidation pourra être effectué) Retouche : La retouche sur le tricorne et le rocher s’écaille. Nous avons testé sa pulvérulence avec un ruban adhésif Tesa® : ce-dernier arrache la matière sans difficulté. Avant test

Après test

Ruban adhésif avec écailles de peinture

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Test de perméabilité L’objectif est de mesurer la rapidité d’absorption de l’eau d’un matériau, et donc sa perméabilité. En cas de matériau très poreux, les traitements liquides seront déconseillés. Pâte à nu593 : Ce test a été réalisé sur une des tranches du bouchon. La pâte met 13min10 à absorber complètement une goutte d’eau. 0 min

593

5 min

8 min 30

12 min 15

13 min 10

Sans retouche ni adhésif.

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Annexe 12 : Ethafoam®

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Annexe 13 : Tyvek®

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Annexe 14 : Tween® 20

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Annexe 15 : Générateur de vapeur Minor 164

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Annexe 16 : Carbopol®

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Annexe 17 : Ethomeen® C25

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Annexe 18 : Arbocel® BC200

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Annexe 19 : Eau oxygénée

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Annexe 20 : Mowital® B60HH

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Annexe 21 : Échanges avec monsieur Roudier Pauline Marion-Andrès<p.marionandres91@gmail.com> À : Jean-Michel ROUDIER <jeanmichel.roudier@nievre.fr> 18 février 2018 à 19:32 Cher M. Roudier, La dérestauration de la fontaine de Delft touche à sa fin. Je suis dès à présent en train de réfléchir à l’adhésif à utiliser pour le collage. Pour cela, j’ai besoin de connaître les variations hygrométriques et de température dans les réserves et les vitrines du musée. Connaissez-vous ces valeurs ? Disposez-vous d’un relevé régulier que vous pourriez me fournir ? En vous remerciant, Pauline Marion-Andrès

Jean-Michel ROUDIER<jeanmichel.roudier@nievre.fr> À : Pauline Marion-Andrès p.marionandres91@gmail.com 19 février 2018 à 15:29 Bonjour Pauline, Difficile de répondre simplement à votre question, dans la mesure où l'emplacement futur de la pièce n'est pas déterminé. Il est probable qu'elle soit présentée 6 mois dans le hall, comme "objet à la une" (avec justement une mise en valeur en "une" du journal du musée), avant de rejoindre soit les présentations permanentes de céramiques au 2° étage, soit la réserve des céramiques, qui est peu chauffée. En tout état de cause, vous pouvez vous baser sur les valeurs extrêmes comme suit : - température : de 15° à 22° C. - hygrométrie : de 50 à 60 %HR. Je reste à votre disposition pour toute question. Bon courage, et bien cordialement. Jean-Michel ROUDIER Conservateur en chef du Patrimoine Adjoint au conservateur départemental des Musées de la Nièvre Musée Auguste Grasset de VARZY 03 86 60 68 55 Service des musées et du patrimoine culturel - Direction de la culture et du sport. Direction général adjointe des solidarités, de la culture et du sport. Conseil départemental de la Nièvre - 58039 NEVERS cedex

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Annexe 22 : Paraloïd® B-72

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Annexe 23 : Polyfilla™ intérieur

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Annexe 24 : Cire dentaire

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Annexe 25 : Flügger®

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Annexe 26 : Eva art

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Annexe 27 : Parafilm® M

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Annexe 28 : Acryliques Golden® Open

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Annexe 29 : Primal™ WS24

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Annexe 30 : Encre de Chine Lefranc Bourgeois

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Annexe 31 : HMG Heat and Waterproof

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Annexe 32 : Paraloïd® B48-N

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