CONSERVATION - RESTAURATION PORTRAIT DE FEMME AU VASE FLEURI Sujet technico-scientifique: Etude comparative de quatre adhésifs d'imprégnation dans le cadre de la consolidation d'une préparation argileuse Mots clés : préparation argileuse – portrait classique- XVIIème siècle – doublage – imprégnation - déchirure
Tatiana RONJON Spécialité Peinture de chevalet - Promotion 2018
2 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Remerciements Avant toute chose, je voudrais remercier toutes les personnes qui ont participé à l’élaboration de ce travail et qui ont permis son aboutissement. Je remercie, tout d’abord, les professeurs de l’Ecole de Condé, pour leur précieux enseignement au cours de ces cinq années d’études, leur bienveillance et leurs encouragements. Ma reconnaissance va tout particulièrement à mes tuteurs de mémoire, Marguerite Szyc, Olivier Nouaille, Amélie Castel et Catherine Authier, qui ont répondu à mes interrogations, ont guidé mes pas hésitants, et par-dessus tout, m’ont transmis leur passion pour leur métier. Merci également à Monsieur Da Cruz pour son aide et son soutien lors de la réalisation de mon sujet technico-scientifique. Merci également à l’équipe administrative de l’école pour son soutien et sa gentillesse. Toute ma gratitude va également à mon prêteur d’œuvre Alban Thomine-Desmazures, qui a eu la gentillesse de m’accorder sa confiance. Il m’a donné l’occasion d’entreprendre des recherches passionnantes et enrichissantes sur un tableau ayant traversé plusieurs siècles, notamment grâce à sa famille. Je remercie très sincèrement Sophie Kliszowski, pour la mise en relation avec Alban et pour son soutien très enthousiaste lors chacune des étapes de ce travail. J’éprouve en outre une grande reconnaissance aussi envers mes maîtres de stages. Julie Catalo qui, avec patience et bonne humeur, m’a fait découvrir la restauration des sculptures en bois polychrome et le travail en collaboration avec les Monuments Historiques et la DRAC. Toute l’équipe d’ArtBee conservation a été d’un réel soutien et a su me faire partager son savoir lors de débats passionnants. Merci à tous les membres de l’équipe Redivivus pour leur accueil, leur dynamisme et les belles expériences qu’elle m’a fait partager. Merci également à toutes les personnes de ma promotion pour nos discussions si intéressantes et notamment à Pauline, Léa, Emilie, Johanne, Morgane, Charlotte, Aude et Philippine pour leur soutien psychologique, leur amitié et les échanges que nous avons pu avoir. Pour finir, je souhaite exprimer toute ma reconnaissance à ma famille et à mon compagnon pour leur amour, leur aide et leur soutien tout au long de ces années. Je ne pourrai jamais assez remercier mes parents qui m’ont offert la chance de poursuivre mes études dans une voie qui me tenait réellement à cœur et qui ont toujours été là pour m’épauler et m’encourager, même dans les moments les plus difficiles. Merci à tous.
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Résumé introductif
Ce mémoire est organisé autour du portrait d’une jeune inconnue, peint à l’huile sur toile au cours du XVIIème siècle. En l’absence de titre officiel, cette œuvre a été nommée Portrait de femme au vase fleuri. Elle a été généreusement prêtée par un propriétaire particulier. Dans un premier temps, dans le cadre de l’étude historique, l’œuvre a pu être replacée dans un courant artistique, qui est le classicisme français. L’iconographie du tableau a permis de préciser la date probable de sa création, se restreignant aux années 1672-1678. Son parcours et l’identité de la jeune dame restent, malheureusement, hypothétiques. L’étude matérielle de l’œuvre met en évidence l’enchaînement des étapes du travail de conservation-restauration effectué sur ce tableau, arrivé très largement déchiré. Sa mise en œuvre est traditionnelle, cependant, la présence d’une préparation rouge problématique a conduit à une restauration employant une majorité de matériaux synthétiques. Chaque étape a été réalisée dans le but de stabiliser l’œuvre et de lui rendre son unité aussi bien physique qu’esthétique. Le sujet de l’étude scientifique est venu de cette problématique à laquelle nous nous sommes heurtés lors de la restauration du tableau de mémoire : comment stabiliser une préparation rouge contenant des argiles sensibles à l’humidité ? Des échantillons de préparations argileuses, imprégnées de différents adhésifs de consolidation ont été mis à l’épreuve par des tests de dureté et de traction.
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Abstract This report is focused on the portrait of a young unknown woman, painted with oil on canvas, during the XVIIth century. In the absence of an official title, this artwork has been named Portrait of a lady with a flowery vase. A private owner generously lent it to us. At first, thanks to a historic and iconographic study, the artwork has been placed in an artistic movement, which is French Classicism. The painting’s iconography allowed to refine its date of creation, passing from XVIIth century to more precisely around 1671-1678. Unfortunately, the painter and the young lady’s identity remain hypothetical. The material study of the artwork bring out the steps of a conservation-restoration of work of art, which arrived very widely ripped. Its composition is traditional, however, a problematic red priming led to a restotration using a majority of synthetic materials. Every step has been realized to stabilize the artwork and to give it back its physical and aesthetic unity. The subject of the scientific study came from a problem encountered during the restoration of the painting : how could we stabilize a red priming containing clays, sensitive to humidity ? Some samples of a clay priming, soaked in various adhesives of impregnation, were tested for hardness and tensile tests.
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Fiche d’identification
Désignation de l’œuvre : Portrait de femme au vase fleuri (?) Artiste : inconnu Epoque : XVIIème siècle Technique : peinture à l’huile sur toile montée sur châssis Dimensions : 101,5 x 83,4 x 2,6 cm Inscription(s) particulière(s) : un cercle tracé au crayon à papier sur le montant senestre du châssis Désignation du prêteur de l’œuvre: particulier Lieu de conservation : maison habitée toute l’année Nom de l’étudiant : RONJON Tatiana
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Œuvre de mémoire avant restauration
Image 1 : Œuvre de mémoire avant restauration
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Œuvre de mémoire après restauration
Image 2 : Œuvre de mémoire après restauration
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Sommaire Remerciements…………………………………………………………………………………………………..3 Résumé……………………………………………………………………………………………………………….4 Abstract………………………………………………………………………………………………………………5 Fiche d’identification ………………………………………………………………………………………….7 Avant-propos ……………………………………………………………………………………………………14 Introduction générale ……………………………………………………………………………………….15 Analyse historique………………………………………………………………………………………...17 Introduction …………………………………………………………………………………………………………………18 Analyse plastique ……………………………………………………………………………………………………..….19 I. Les courantes artistiques du XVIIème siècle ……………………………………………..20 1. La peinture baroque …………………………………………………………………………….20 2. La peinture classique …………………………………………………………………….……..22 3. La querelle des coloris ………………………………………………………………………….23 II. Le portrait du XVIIème siècle …………………………………………………………………….24 1. Histoire du portrait ……………………………………………………………………………...24 2. Différents types de portraits………………………………………………………………...28 III. Contexte de création du tableau …………………………………………………………..…..32 1. Composition classique française …………………………………………………………..32 2. Portrait idéalisé, réalisé en atelier…………………………………………………..….…36 Analyse iconographie ………………………………………………………………………………………………….43 I. Le vêtement ……………………………………………………………………………………………..43 II. La coiffure …………………………………………………………………………………………………45 III. Les bijoux ……………………………………………………………………………………………….…47 IV. Le maquillage …………………………………………………………………………………………...48 V. Les fleurs ……………………………………………………………………………………………...….50 VI. Age et statut du sujet ……………………………………………………………………………….52 Parcours de l’œuvre étudiée………………………………………………………………………………………..54 I. Informations permettant de débuter la recherche ……………………………………54 1. Les origines ……………………………………………………………………………………….…54 2. La révolution française ………………………………………………………………………...55 3. Achat par la famille Regnault………………………………………………………………..55 II. Recherches entreprises …………………………………………………………………………....57 III. Hypothèses possibles…………………………………………………………………………………60 1. Portrait acquis pour remeubles le château après son achat ………………….60 2. Portrait de famille de Nicolas Regnault ………………………………………………..61 3. Portrait encore présent au château à l’achat ………………………………………..61 Conclusion de l’analyse historique………………………………………………………………………………...63 10 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conservation-restauration ………………………………………………………………………………65 Introduction ………………………………………………………………………………………………….….…..66 Constat d’état …………………………………………………………………………………………………….…67 I. Description des matériaux constitutifs de l’œuvre ……………………………....67 1. Analyse du support ………………………………………………………………………...67 2. Analyse de la couche picturale………………………………………………………...74 II. Relevé d’altération des matériaux constitutifs ……………………………………..82 1. Châssis…………………………………………………………………………………………….82 2. Système de fixation …………………………………………………………………………83 3. Toile ……………………………………………………………………………………………....84 4. Couche picturale …………………………………………………………………………….86 5. Anciennes restaurations………………………………………………………………....89 Diagnostic ………………………………………………………………………………………………………..…..94 Pronostic ………………………………………………………………………………………………………….…..97 Nécessité d’intervention …………………………………………………………………………………….….98 Cahier des charges ……………………………………………………………………………………………..…99 Proposition de traitement ………………………………………………………………………………..….102 I. Démontage de l’œuvre du châssis ……………………………………………………..102 II. Rétablissement de planéité ……………………………………………………………….104 III. Traitement des argiles …………………………………………………………………….…109 IV. Assainissement de la couche picturale ………………………………………………110 V. Renfort général du support ……………………………………………………………….114 VI. Retour de l’homogénéité esthétique de l’œuvre …………………………..….115 Rapport d’intervention……………………………………………………………..…………………………120 I. Démontage de l’œuvre du châssis……………………………………………………...120 II. Rétablissement de planéité………………………………………..………………………126 III. Traitement des argiles …………………………………………………………….…………131 IV. Assainissement de la couche picturale ………………………………………………133 V. Renfort général du support………………………………………………………………..139 VI. Rétablissement de l’homogénéité esthétique de l’œuvre …………..……..149
Sujet technico-scientifique ………………………………………………………………………………157 Introduction …………………………………………………………………………………………….………….158 I. Les matériaux et leur histoire …………………………………………………………....159 1. La préparation argileuse …………………………………………………………..159 2. Les adhésifs d’imprégnation……………………………………………………..169 II. Le choix des matériaux de l’étude………………………………………………………172 11 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
1. La préparation argileuse …………………………………………………………..172 2. Les adhésifs sélectionnés ………………………………………………………….174 III. Mise en place et résultats du test de dureté …………………………….……….176 1. But et principe du test de dureté ……….………………………..………….176 2. Echantillons ……………………………………………………………………………..177 3. Protocol expérimental………………………………………………………………177 4. Appareil et méthodes de mesure …………………………………………….179 5. Prétests ……………………………………………………………………………………182 6. Résultats…………………………………………………………………………..………184 IV. Mise en place et résultats du test de traction ……………………………………189 1. But et principe du test de traction ……………………………………………189 2. Echantillons …………………………………………………………………………..…189 3. Plan d’expérience……………………………………………………………..………190 4. Méthode et appareil de mesure ……………………………………………….190 5. Prétests …………………………………………………………………………………...192 6. Résultats………………………………………………………………….……………….192 V. Interprétation générale …………………………………………………………….…….…197 VI. Limite de l’étude …………………………………………………………….…………………200 Conclusion ………………………………………………………………………………………………….…….…202 Conclusion générale ……………………………………………………………………………………………204 Annexe Histoire de l’art…………………………………………………………………………………….…208 Annexe 1 : Histoire du château de Frôlois………………………………………………..209 Annexe 2 : Génération des Regnault, contemporaine à la jeune femme…..210 Annexe Restauration ……………………………………………………………………………………..…..211 Annexe 1 : Tests de nettoyage du revers de la toile………………………………….212 Annexe 2 : Choix de l’adhésif d’imprégnation……………………………….…………..214 Annexe 3 : Assainissement de la couche picturale…………………………………....217 Annexe 4 : Choix du protocole de doublage……………………………..…………….…235 Annexe 5 : Choix du vernis…………………………………………………………………….… 247 Annexe Scientifique……………………………………………………………………………………..….....251 Annexe 1 : Calcul de la vitesse d’impact…………………………………………………...252 Annexe 2 : Formule de dispersion statistique …………………………………………..254 Annexe 3 : Fiche technique du dynamomètre…………………………………………..255 Annexe des fiches techniques et de sécurité…………………………………….………………….256 Bibliographie……………………………………………………………………………………………………….282 Table des illustrations………………………………………………………………………………………….294
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Avant-propos
J’ai découvert le métier de restaurateur assez tardivement, à l’occasion de reportages, mais cela m’a immédiatement séduite. J’ai donc naturellement cherché, après mon baccalauréat, à intégrer une école de restauration. Depuis le début de cette aventure, ma curiosité et ma passion n’ont fait qu’augmenter. Mes professeurs et mes stages m’ont permis de voir diverses œuvres, avec différentes problématiques très intéressantes, dans des endroits charmants. Dans le cadre du mastère, tout le travail de mémoire tourne autour d’une œuvre. Ce choix doit donc être mûrement réfléchi. Après une prise de contact avec plusieurs particuliers et institutions, c’est par l’intermédiaire de ma professeure de dorure, Sophie Kliszowski, que j’ai trouvé l’œuvre que je souhaitais. Elle appartient à une époque qui m’a toujours fascinée. La promesse d’un travail spécifique autour d’une personne ayant vécu plusieurs siècles auparavant et l’étude de ce qui est probablement l’unique représentation de cette femme m’ont séduite. De plus, son état de conservation correspondait aux exigences de l’école et à mon désir d’avoir un important travail de support à réaliser. L’œuvre m’a immédiatement plu et a suscité mon envie de lui rendre son intégrité.
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Introduction générale
Le travail de mémoire est l’aboutissement des cinq années d’apprentissage du métier de conservateur restaurateur. Le travail sur le Portrait de femme au vase fleuri est l’occasion de montrer notre capacité à étudier et à restaurer une œuvre en profondeur. L’œuvre sera étudiée d’un point de vue historique, matériel puis un projet scientifique sera monté en relation avec une des particularités de celle-ci. L’étude historique sera axée majoritairement sur l’aspect matériel et visuel de l’œuvre en elle-même. Le tableau n’est pas signé et aucune information ne nous est parvenue quant à l’identité de la jeune femme représentée. Cette étude a donc pour but de replacer l’œuvre dans un contexte artistique, essayer de dater plus précisément sa création ainsi que d’essayer de retracer son parcours de cette date à aujourd’hui. Pour cela une analyse plastique sera réalisée et conduira à un rattachement à un courant artistique et à un pays. Par la suite, la datation sera affinée grâce à une analyse iconographique, qui permettra également de comprendre dans quel but ce portrait a été peint. Le parcours de l’œuvre sera retracé et aura pour base les informations fournies par le propriétaire. La seconde partie sera consacrée à l’étude matérielle de l’œuvre. Dans un premier temps, la composition stratigraphique sera détaillée puis l’état de conservation de chacune de ces couches constitutives sera vérifiée et référencée. Cette phase permet de comprendre ce que l’œuvre a traversé et si une restauration est nécessaire. Elle permet aussi d’identifier les zones de danger pour l’œuvre et les réactions dont il faudra se méfier au cours des interventions de conservation-restauration. D’après les conclusions qui en ressortiront, une proposition de traitement sera établie et son application sera détaillée dans un rapport d’intervention. Ce rapport servira de base au prochain restaurateur qui sera en charge de la conservationrestauration de l’œuvre. La dernière partie de ce mémoire sera consacrée à la mise en place d’un projet scientifique qui aura pour but de comprendre la forte sensibilité de la préparation argileuse, à l’humidité. La structure de certaines argiles sera détaillée, tout comme la réaction de gonflement. Cette compréhension plus précise permettra de mettre au point un cahier des charges pour les adhésifs, potentiellement utilisables afin de stabiliser cette réaction. L’efficacité de quatre adhésifs couramment utilisés en restauration, sera mise à l’épreuve par un test de résistance au choc et par un test de traction.
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Première partie : Analyse historique
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Introduction
L’œuvre qui sera étudiée dans cette partie est une huile sur toile, représentant le portrait d’une femme. Le modèle est mis en scène au côté d’une composition florale qu’elle arrange d’une main distraite. Très peu d’information la concernant sont arrivées jusqu’à nous. L’œuvre n’est ni datée ni signée. Aucun nom ni blason ne permet d’identifier la jeune femme. Le seul indice est sa présence dans la collection du château de Frôlois, en Côte-d’Or, au milieu du XVIIème siècle. Ce manque d’information amène plusieurs questions : D’où vient cette œuvre, qui l’a peinte, à quelle époque, qui est représentée, pourquoi désirait-elle un portrait ? L’étude historique s’organisera autour de trois axes principaux. Au cours d’un premier chapitre, une analyse stylistique et plastique sera faite, dans le but de répondre à la question du courant artistique dans lequel se place l’œuvre et celle de l’attribution à un artiste ou à une école. Dans un second temps, une analyse iconographique tentera de répondre aux questions de la datation de l’œuvre et du contexte de réalisation. Une dernière partie retracera les différentes recherches qui ont été effectuées sur le parcours de l’œuvre. Plusieurs hypothèses seront proposées menant potentiellement à une identification du modèle.
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Analyse plastique Avant de débuter l’analyse stylistique de l’œuvre, il est important de signaler qu’un élément de la composition du tableau nous offre une base pour nos recherches. En effet, la préparation de couleur rouge est caractéristique d’une période de l’histoire de l’art : de la seconde moitié du XVIème siècle jusqu’à la fin du XVIIIème siècle.
Plus précisément,
l’application en couche mince de la préparation rouge sur la toile, correspondant à celle de l’œuvre de mémoire, est caractéristique du XVIIème siècle1. Au vu de ces informations, notre travail va donc s’axer autour de ce siècle, appelé « Le Grand Siècle ». Au cours de cette centaine d’années, plusieurs rois de la dynastie des Bourbon vont se succéder. Henry IV régna de 1589 à 1610, date à laquelle il fut assassiné par Ravaillac. Louis XIII fut roi de 1610 à 1643 mais n’exercera le pouvoir qu’à partir de 1614 (sa mère Marie de Médicis fut régente au cours de cette période). En 1643, Louis XIV devient roi mais, tout comme son prédécesseur, la régence fut assurée par sa mère Anne d’Autriche. En 1661, il déclare vouloir gouverner seul et par lui-même : c’est la naissance de la monarchie absolue. Il régna jusqu’à sa mort en 17152. La fin du XVIème et le début du XVIIème siècle sont marqués par une affirmation de l’identité nationale particulièrement notable. Ce changement de mentalité va mener le roi et les artistes à
vouloir poser les bases d’un art français3. Ils vont synthétiser les
caractéristiques plastiques de différents courants européens tout en recherchant un langage artistique plus personnel. Ainsi, en 1635, le cardinal Richelieu fit naître l’Académie Française. Cette institution a eu pour rôle d’épurer la langue française et d’en fixer les règles. Par la suite, naîtront l’Académie Royale de peinture et de sculpture (1648) et l’Académie Royale d’architecture (1671).
1
HENDY, LUCAS, La préparation des peintures, museum, 1968, format pdf.p.244 Larousse : http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Louis_XIV/130427 3 Musée Jacquemart-André, Du baroque au classicisme Rubens, Poussin, et les peintres du XVIIème siècle, Culturespages, Fonds Mercator, Vottem, 2010.p.153 2
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Dans un premier temps, l’Académie Royale de peinture et de sculpture a été mise en place afin d’aider les artistes à s’affranchir du système des corporations4. Par la suite, elle a également eu pour charge de structurer son art et de transmettre ses différentes doctrines, jusqu’en 1793 (année de sa suppression). En 1671, Louis XIV l’installe au Louvre et devient son principal mécène et protecteur. Les académies obtiennent un quasi-monopole de l’enseignement, des expositions et des commandes royales5. Tout au long de son règne, le Roi Soleil va utiliser l’art comme un instrument de puissance et comme une vitrine de son pouvoir. Un langage artistique typiquement français, appliqué à tous les corps de métiers, se développe à cette fin. C’est dans ce cadre que le classicisme va connaitre un réel succès. Ce climat politique tourné vers la culture et la création va placer Paris au centre de la production artistique. Ce siècle va donc voir naître le classicisme, un courant très français, mais il va aussi assister au développement d’un courant plus européen : le baroque6.
I.
Les courants artistiques du XVIIème siècle 1. La peinture baroque
Le mouvement baroque est apparu à la fin du XVIème en Italie puis s’est propagé dans toute l’Europe et restera implanté jusqu’à la fin du siècle suivant. Il s’est développé suite aux exigences imposées lors du Concile de Trente (1545-1563) : celle d’un art plus accessible pour tous et plus expressif. Caravage est un des premiers peintres à tenter une nouvelle approche de la représentation religieuse, mais sera jugé trop réaliste et brutal par l’Eglise. Cependant, il va donner naissance au Caravagisme qui sera une des grandes références du Baroque, pour son réalisme, son cadrage et son fort clair-obscur. Le maniérisme de Michel-Ange est aussi une référence pour son expressivité des corps, les postures tourmentées de ses modèles et ses trompe-l’œil. Le grand réalisme est inspiré des représentations des peintres bolonais (les
4
MICHEL (Christian) , L’académie royale de peinture et de sculpture , Genève-Paris, Librairie Droz, Collection ars Longa n°3, 2012.P.22 5 Ibid.p.8 6 Un courant est une unité de style entre tous les arts
20 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
frères Carrache). La touche et l’utilisation des couleurs s’inspireront de celle des grands artistes vénitiens. L’art
baroque
en
peinture
se
caractérise par sa volonté de susciter l’émotion chez tous les spectateurs et pas uniquement chez les érudits. Pour ce faire, les artistes vont employer des moyens plastiques très expressifs : un fort clair-obscur qui dramatise la scène, une touche vibrante, un cadrage serré qui focalise l’attention, une structure en courbe et contre-courbes qui fait circuler l’œil dans la composition, l’utilisation de personnages repoussoir (personnage à cheval entre le plan du spectateur et celui de Image 3 : Caravage, Le crucifiement de Saint Pierre, 1604, huile sur toile, 230x175cm, Eglise Santa Maria del Popolo, Rome
la composition), l’emploi de perspectives inattendues composition.
qui
semble
déstabiliser
la
Cette grande dynamique est
encore accentuée par la représentation d’une scène au moment même où l’action se déroule, et non pas juste avant, comme il était fait habituellement. Cette recherche du spectaculaire donne à l’œuvre une dimension théâtrale. Ce type de représentation permet de comprendre la scène sans avoir besoin de connaissance particulière et permet de se sentir concerné par la grande émotion des personnages. La violence et l’énergie représentée ont pour but, notamment dans la peinture religieuse, de créer un sentiment percutant chez le spectateur.
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2. La peinture classique La peinture dite classique du XVIIème siècle s’est réellement implantée en France quelques années après l’apparition du baroque. Au contraire de celle-ci, cet art privilégie le calme et la raison dans ses compositions. La scène est représentée juste avant l’évènement7. Il est donc reconnaissable par des objets ou des éléments, qui sont présents dans la composition et laissent présager l’action à suivre. La compréhension de la peinture d’histoire classique nécessite une bonne connaissance
du
biblique,
la
de
registre littérature
ancienne ou contemporaine, de l’histoire et de la mythologie. Ces compositions visent une population plus restreinte que celles du baroque : elles ne sont réellement
compréhensibles
que par les érudits.
Image 4 : Poussin Nicolas, Le jugement de Salomon, 1649, Huile sur toile, 101x150cm, Musée du Louvre, Paris
La composition des peintures classiques se caractérise par une structure stable, équilibrée, des formes harmonieuses et formule une certaine réserve concernant l’expression des personnages8. Les personnages des peintures d’histoire classique sont idéalisés et inspirés des canons de l’Antiquité gréco-romaine. C’est également à l’Antiquité qu’ils doivent cette volonté d’harmonie générale et cette recherche de la perfection. L’accent est également mis sur la précision des représentations, une précision inspirée de l’art flamand. Cependant certaines lignes des corps sont allongées pour créer un dynamisme9. La ligne est généralement très présente. La couleur est au service du dessin. Le dessin représente l’esprit alors que la couleur est la matière. Le classicisme va donc privilégier la ligne afin de favoriser la primauté de l’esprit sur les sens10.
7
Larousse : http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/le_classicisme_dans_les_arts/185983 Ibid. 9 Ibid 10 BARRIELLE Jean François, Le style Louis XIV, Paris, La grammaire des styles, Flammarion, 1982, p. 41 8
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Malgré une production essentiellement romaine, Poussin est un artiste français très représentatif de ce style. Ses sujets sont majoritairement inspirés de l’Antiquité, la philosophie, l’histoire, les sujets religieux. Il va attacher une attention toute particulière à la justesse des vêtements et du décor représenté dans ses compositions gréco-romaines. Toutefois, au fil de ses années de production, on lui reproche de privilégier une rhétorique complexe et abstraite, au détriment de l’esthétique, produisant un ensemble studieux11.
3. La querelle des coloris La confrontation entre ces deux écoles, baroque et classique, sera plus tard nommée la querelle des coloris (juin 1671)12. Elle va opposer l’art de Poussin à la peinture des Vénitiens et de Rubens : d’un côté, « une peinture méditée, qui s’adresse à l’intellect plus qu’aux sens et sait que l’austérité de la facture doit soutenir la noblesse de la leçon13 » et de l’autre, « la revendication d’un art soucieux de plaire, d’arracher d’emblée au Image 5 : De La Fosse, Charles, Le Sacrifice d’Iphigénie, 1680, huile sur toile, 223x212cm, Musée National des châteaux de Versailles
spectateur ce « Ah, voila qu’il est beau ! » dont Roger de Piles […] fait déjà l’un de ses critères 14». Les deux écoles s’affrontent donc sur une question
de l’utilisation de la couleur mais aussi, pour la peinture d’histoire, sur le respect d’exigences historiques et des règles de convenances.
11
Larousse, Op.Cit. « La querelle proprement dite éclata en Juin 1671 quand, lors d’une conférence, Philippe de Champaigne commença par critiquer discrètement Titien pour conclure, en des termes beaucoup plus durs, par une mise en garde des jeunes peintres contre l’intérêt excessif pour le coloris. Il cita l’exemple de Poussin qui avait été un coloriste dans sa jeunesse avant de se tourner vers des préoccupations plus sérieuses » ALLEN (Christopher), Le Grand Siècle de la peinture française, Paris, Tharmes et HudsonLtd, 2004 . p 159 13 THUILLIER (Jacques), La peinture française au XVIIème siècle, Editions Faton, Saint- Etienne, 2014.P.254 14 Ibid. P.254 12
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Cette querelle va se solder par une réouverture à l’art international et à la création d’un compromis entre la technique des deux partis, visible notamment avec le peintre Charles de La Fosse15.
II.
Le portrait du XVIIème siècle 1. Histoire du portrait A l’académie, une « hiérarchie des genres » a été établie. Les sujets sont classés en fonction de leur difficulté de création et de leur message intellectuel. Le portrait est classé parmi les genres mineurs de la peinture. La définition du portrait que nous donne Furetière dans son dictionnaire en 1690 est que c’est une « Représentation faite d’une personne telle qu’elle est au naturel »16. Cette explication nous rappelle que le portrait n’est à l’origine qu’une copie de la nature, le portrait ne peut donc pas
Image 6 : Vecellio, dit Titien, Portrait de François Ier, 1539, Huile sur toile, 109 x 89cm, Musée du Louvre
être considéré comme équivalent à la peinture d’histoire17,
genre
majeur
de
l’époque.
Cependant, la mode du portrait va prendre de l’ampleur et le genre va se développer. Au début du siècle, les portraits en buste ou uniquement de la tête sont très répandus18. Cette formule mise au point sous François Ier, se base sur des influences
15
Ibid. P.254 FURETIERE, Dictionnaire, 1690, article « Portrait » 17 La peinture d’histoire est aussi appelée le grand genre. Il s’agit d’une composition inventée par le peintre, illustrant un sujet religieux, mythologique, allégorique, littéraire ou un épisode historique (ancien ou récent). http://www.larousse.fr/encyclopedie/peinture/histoire/152572 Musée des beaux-arts de Bordeaux : http://tice33.acbordeaux.fr/Ecolien/LinkClick.aspx?fileticket=ZNzS%2FfvDJto%3D&tabid=2082&mid=3845&languag e=fr-FR http://musee.louvre.fr/bases/lafayette/contenu_a.php?page=2130&lng=0& 18 MEROT (Alain), La peinture française au XVIIème siècle, France, Gallimard/Electa, 1994. p. 184 16
24 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
nordiques et italiennes19. Il met en valeur les qualités des modèles, dans un réalisme et une virtuosité flamande, et les représente dans une posture en buste mise en place en Italie. Le visage et sa ressemblance à son modèle réel, prime sur le reste de la composition. Peu d’éléments du corps étaient visibles, par exemple les mains ne sont pas représentées, ce qui limite énormément la possibilité de donner une attitude ou un mouvement au sujet20. Le portrait partira d’une représentation très rigide, sévère, figée à quelque chose de plus souple et vivant. Vouet21, entre autre, va jouer un grand rôle dans ce changement. En effet, lors de son voyage en Italie, il va rapporter avec lui des références oubliées : les Vénitiens du Cinquecento, Bernardo Strozzi, Annibal Carrache ainsi que les artistes nordiques rencontrés sur place22. A son retour, sa facture est plus empâtée, plus vivante et authentique, il ajoute une dissymétrie afin d’augmenter l’aspect vivant. Par la suite, il mettra l’accent sur l’expression du regard, une pose naturelle mais rigoureuse. Beaucoup de portraitistes de la seconde moitié du siècle vont s’en inspirer. Les éléments plastiques que l’on retrouve dans le portrait classique d’apparat ont également été apportés par Philippe de Champaigne23. Peintre
Image 7 : Champaigne, Philippe (de), Portrait du cardinal Richelieu, 1639, 222x155cm, Musée du Louvre, Paris.
ayant une formation flamande, il fait partie des artistes qui ont ajouté une touche précieuse et un réalisme à ses portraits, caractéristique des portraits en pied d’apparat nordiques24.
19
REUNION DES MONUMENTS NATIONAUX, Peinture, le portrait : https://www.grandpalais.fr/fr/article/peinture-le-portrait 20 MEROT, La peinture française au XVIIe siècle, Op.Cit. .p.184 21 Ibid.p.184 22 Musée, Du baroque au classicisme Rubens, Poussin, et les peintres du XVIIème siècle, Op.Cit. P.189 23 MEROT, La peinture française au XVIIe siècle, Op.Cit..p.188. 24 Ibid. P.187
25 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La mode du portrait, aussi bien littéraire que picturale, prend une grande ampleur sous le règne de Louis XIV. Dans ses correspondances, madame de Sévigné en témoigne : « pendant les années 1656, 1657 et 1658, par une espèce de mode générale que la cour et la ville suivaient avec une égale ardeur, chacun faisait son propre portrait en composant des discours et en écrivant des lettres où l’on se représentait
soi-même
remarquables
qualités
avec du
les
corps
plus et
de
l’esprit. »25. Madame de Coulanges lui écrivit un peu plus tard : « Comme on ne parlait plus à Paris que de portraits et que tous les bons esprits étaient curieux d’en avoir ou d’en savoir faire, nous étions ravis d’aller au lieu où habitaient les meilleurs maîtres de cet art »26. Le Image 8 : Ecole Française, Portrait de femme écrivant, autrefois identifiée comme Mme de Sévigné, 1680, Musée Carnavalet, Paris.
développement
des
portraits
peints
et
littéraires est le témoignage d’un début de questionnement sur le rapport entre le mental
et le physique27. Ce questionnement se poursuivra et s’approfondira dès le début du siècle des Lumières.
25
Mme de Sévigné, Correspondance, Paris, 1974, p 63, 19 aout 1675 cité dans Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715,Op.Cit.p.15 26 Mme de Coulange, correspondance de Mme de Sévigné, 1978 p.1067, 29 octobre 1694 cité dans Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715, Op.Cit.p.160 27 Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV, Somogy édition art,1997, p 15
26 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Au cours du « Grand Siècle », la composition des portraits va se complexifier et s’agrandir. Les femmes sont représentées de manière moins rigide, les mains apparaissent dans les compositions et les éléments décoratifs prennent de l’importance28. Les artistes vont parfois même jusqu’à se rapprocher des types de peinture plus nobles tel que la peinture allégorique29 ou mettre en contexte les personnes portraiturées
dans des œuvres proches des
peintures d’histoire. De plus en plus souvent, ils
Image
9 : Pierre Mignard, Madame de
intègrent dans leur composition des paysages, Seignelay et son fils, sous les traits de Thétis des scènes de genres et/ou des natures mortes.
et d’Achille, 1691, Huile sur toile, 194x155cm, Londres National Galerie
Les frontières entre les spécialités des artistes s’amincissent. Les portraitistes deviennent des artistes de plus en plus polyvalents. L’enjeu n’est plus seulement une représentation fidèle des traits du modèle et de ses attributs, mais la mise en scène d’une véritable composition complexe mêlant virtuosité technique et référence culturelle30.
28
MEROT, La peinture française au XVIIe siècle, Op.Cit.p.188 Ibid. p.194 30 Ibid. P.183 29
27 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. Différents types de portrait Il existe deux familles de portraits individuels : les portraits d’apparats et les portraits intimes. Le
portrait
d’apparat31
s’est
particulièrement développé au cours du XVIIème siècle. Il se caractérise par ses dimensions importantes et par une composition théâtrale. La pose du modèle est de fait peu naturelle, dans un environnement composé de toute pièce. La richesse et la noblesse de la personne sont illustrées par la présence de nombreux accessoires. Ils sont également un moyen plastique de creuser l’espace. Mais avant tout, ils possèdent une symbolique permettant au spectateur d’identifier la personne représentée, ou tout du moins sa fonction. Ce sont des attributs. Les vêtements font partie des moyens d’identification. Il est courant que le modèle soit
Image 10 : Rigaud Hyacinthe, Louis XIV en costume de sacre, 1701, Huile sur toile, 277x194cm, Musée du Louvre, Paris
représenté devant un drapé, une architecture antique ou une ouverture sur un jardin. Les nobles de l’époque choisissaient bien souvent de se faire représenter de manière classique. C’est un genre qui met en valeur leur dignité, leur noblesse et leur statut, ce qui est idéal pour un portrait destiné à être admiré en société.
31
Musée d’Orléans, Portrait et pouvoir au 17e et 18e siècle, format pdf. p.5
28 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
En parallèle, le portrait intime se développe lui aussi et est très en vogue. Ce portrait a un but tout à fait différent de celui du portrait d’apparat. Il joue le rôle de souvenir familial. La justesse de la représentation des traits a donc son importance, davantage que pour le portrait d’apparat. L’artiste y ajoutera souvent une dimension psychologique. Il est généralement plus sobre dans sa mise en scène et plus naturel dans sa pose. Les attributs sont très rarement Image 11 : Champaigne, Philippe (de), Portrait d’homme, 1650, Huile sur toile, 91x72cm, Musée du Louvre, Paris
représentés. Les habits peuvent être également des vêtements d’intérieur et non pas de cour.
29 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le portrait du réel ou le portrait du beau : Concernant les portraits de femme, il y a deux types de peintre : ceux qui représentent scrupuleusement le modèle et ceux qui corrigent le visage en se rapprochant des canons de l’époque32.
Image 12 : Kaspar Nešer, La marquise de Montespan (?), 1662, collection privée
Image 13 : Mignard Pierre, Madame de Montespan, habillée en Diane Chasseresse, XVIIème siècle, huile sur toile, 130x95,5 cm , Maison de Particulier.
Le portrait, tel que le présente la définition même de ce mot, est destiné à représenter la réalité esthétique du modèle. L’artiste ne doit que copier la nature, raison de son classement inférieur dans la hiérarchie des genres. Cependant, cette définition ne convenait pas à cette époque, qui était très attentive aux apparences et au paraître. Les artistes ayant le plus grand succès auprès des femmes particulièrement, appartenaient à la seconde catégorie. Cependant, quelques artistes se sont cantonnés à représenter la stricte
32
Réunion des musées Nationaux, Portrait : le portrait dans les collections des musées Rhône-Alpes, ADAGP, 2001, p.109.
30 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
vérité : Vouet, Rigaud, etc. Ce sont des artistes qui se sont spécialisés dans la représentation des hommes, plus réaliste que celles de femmes. Hyacinthe Rigaud aurait signifié « qu’il n’aimait pas faire de portraits de femmes car s’il les faisait comme il le souhaitait, elles n’étaient jamais contentes parce que représentées telles quelles 33». L’artiste doit savoir satisfaire le modèle en lui peignant un portrait ressemblant mais aussi avantageux : le modèle doit avoir « un air qui plait »34. Le thème même des écrits de Charles Perrault (1628-1703) nous souligne cette exigence contradictoire des modèles. Dans son conte Le Miroir ou La Métamorphose d’Orante, Orante est un portraitiste peignant ses modèles avec beaucoup et même trop de sincérité. Sa mort va survenir suite à la réalisation d’un portrait où il n’a pas su flatter une femme enlaidie par la maladie. Suite à cela, il va se métamorphoser en miroir35. Les artistes très en vogue auprès des femmes du monde, faisaient bien souvent partie de la seconde catégorie. Molière témoigne du caractère courant de cette pratique dans sa pièce Le Sicilien ou l’Amour peintre de 1667 : « Je ne suis pas comme ces femmes qui veulent, en se faisant peindre, des portraits qui ne sont point elles, et ne sont point satisfaites du peintre s’il ne les fait toujours plus belles que le jour. Il faudroit, pour les contenter, ne faire qu’un portrait pour toutes ; car toutes demandent les mêmes choses : un teint tout de lis et de rose, un nez bien fait, une petite bouche, et de grands yeux vifs, bien fendus, et surtout le visage pas plus gros que le poing, l’eussent-elles d’un pied de large. Pour moi, je vous demande un portrait qui soit moi, et qui n’oblige pas à demander qui c’est »36.
33
RMN, Portrait : le portrait dans les collections des musées Rhône-Alpes, Op.Citp.109. Ibid. p.110. 35 Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715, Op.Cit,.P.26 36 MOLIERE, le Sicilien ou l’Amour peintre, scène XI, 1667. 34
31 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
III.
Contexte de création du tableau
Les recherches qui viennent d’être présentées permettent la compréhension des portraits réalisés au XVIIème siècle. Il est temps maintenant de détailler l’œuvre de mémoire et de la placer plus précisément dans une des tendances de son époque.
1. Composition classique française Toute la composition s’organise en fonction du sujet principal : la jeune femme. Elle est représentée en buste, avec une posture de trois quarts. Elle semble se tenir debout, devant une table et au côté d’un vase contenant un bouquet de fleurs. De nombreux moyens plastiques sont utilisés pour mettre en valeur le sujet du portrait ainsi que pour assurer une circulation de l’œil au sein de la composition. Leur analyse va conduire à l’identification d’un mouvement artistique.
a. Description plastique
Son visage est mis en valeur par différents moyens plastiques. Le cadrage serré focalise l’attention sur la scène. La différence entre l’espace du modèle et l’espace du spectateur qui l’admire est matérialisée par la table placée au premier plan. Cependant, le pompon du coussin est positionné entre les deux plans et permet ainsi un dialogue ceux-ci. Ce procédé est renforcé par le Image 14 : Portrait de femme au vase fleuri
regard que la jeune dame pose sur le spectateur. Ces méthodes ont été principalement utilisées dans les
peintures flamandes depuis plusieurs siècles. 32 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La peinture que nous étudions est organisée de manière claire et rigoureuse, avec une structure en lignes verticales et horizontales. Les axes verticaux sont matérialisés par le bouquet de fleurs et par le buste du modèle. Les axes horizontaux sont représentés par l’angle des bras, les lignes de la table et celles du coussin. Cet ensemble donne sa stabilité à l’œuvre mais aussi son Image 15 : Visage détail de l’œuvre statisme. Cette mise en valeur du visage n’est pas sans rappeler le Giancarlo Doria de Simon Vouet. La composition est frontale, stable et magnifie l’intensité du regard37. Cependant, le regard et le visage du modèle de l’œuvre de mémoire demeurent moins expressifs. C’est ce même regard qui nous fait entrer dans la composition. L’œil du spectateur va s’attarder sur ce visage puis va descendre et suivre l’axe du bras droit vers le bouquet de fleurs. Il va ensuite être attiré par la tulipe puis par le coussin, avant de remonter vers le visage. Ce cheminement est induit par la structure de la composition
Image 16 : VOUET Simon, Giancarlo, 1621, huile sur toile, Louvre, Paris
décrite précédemment, et qui crée un minimum de dynamisme.
37
ALLEN C., Le Grand Siècle de la peinture Française, Op.Cit. P. 190
33 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Ce parcours visuel est renforcé par la couleur. Le rouge a un rôle de fil conducteur. En effet, il attire notre regard et le fait circuler à travers la composition, du coussin à la tulipe jusqu’aux lèvres pulpeuses du modèle. L’emploi du fil conducteur rouge est souvent visible chez des peintres tels que Rubens. L’utilisation de couleurs complémentaires38 donne aussi un dynamisme à l’ensemble. Le rouge est contrebalancé par le vert des fleurs tandis que le bleu est équilibré par la teinte orange du manteau-robe. De manière générale, Image 17 : Rubens Peter Paul, L’arrivée de Marie de Médicis à Marseille, 1622, huile sur toile, 394x293, Musée du Louvre, Paris.
la palette est variée et franche, et donne une tendance fraîche et joyeuse.
Le dessin est mis à l’honneur : les lignes sont franches et les ombres sont peintes avec un dégradé de noir et non des ombres colorées39. La couleur est au service du dessin mais en aucun cas elle ne prédomine sur celui-ci. C’est le dessin qui donne son caractère à l’œuvre. Le mouvement du pinceau est presque invisible et n’insuffle aucun mouvement supplémentaire à ceux déjà mis en place par le dessin. La facture est lisse sur la majeure partie de la peinture, néanmoins quelques empâtements sont visibles sur les dorures de la robe et du coussin et sur quelques fleurs du bouquet. L’ensemble est travaillé en glacis. La lumière joue aussi son rôle. Elle permet de mettre en valeur les éléments importants de la peinture. Elle focalise l’attention sur le visage qui est presque surexposé, devant un
38
Les couleurs complémentaires se situent à l’opposé l’une de l’autre sur le cercle chromatique. Lorsqu’elles sont mélangées, elles annulent leurs couleurs et produisent un simple gris. Par contre, mise côte à côte, elles se transcendent. Les peintres (antérieurs au XIXème siècle) ont souvent considéré cette configuration trop agressive, ils ne les posent donc pas directement en relation ni en quantité égale. De cette manière, les deux couleurs se répondent et offre une dynamique sans violence pour l’œuvre. ROQUE (Georges), Les couleurs complémentaires : un nouveau paradigme, Revue d’histoire des sciences, 1995.P.424 39 Les ombres colorées sont beaucoup plus utilisé chez les partisans de la couleur, les artistes baroques.
34 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
fond très sombre. L’exposant de manière latérale, elle lui donne aussi son volume. Elle va également indure une texture propre aux différentes matières représentées. Le satin du châle renvoie une lumière plus franche que ne le fait le velours du coussin, dont la lumière renvoyée est plus diffuse. Cependant, quelques incohérences sont décelables quant à la localisation de la source de lumière. La majorité de la composition est éclairée par une source située devant le modèle dans la partie haute et à senestre, tandis que l’ombre du pot de fleurs suggère un éclairage parfaitement latéral senestre ; les fleurs, quant à elles, ont une source propre à chacune.
b. Mouvement et pays de création Le portrait dit classique français, est un genre qui se situe, en réalité, à l’intersection entre le classique et le baroque. Ce mélange est détectable sur l’œuvre étudiée. Après avoir détaillé tous ces éléments plastiques, il en ressort qu’elle présente des caractéristiques plastiques propres aux deux courants. La composition est fermée (aucun élément ne sort du cadre du tableau contrairement aux œuvres baroques), la structure est en axes horizontaux et verticaux, le dessin prédomine sur la touche colorée, ombre en dégradée de noir, pas de fort clair-obscur, une expressivité modérée, une facture en majorité lisse, statisme général, etc.. Ces éléments correspondent parfaitement au classicisme du XVIIème siècle. Cependant, quelques éléments sont baroques : le renforcement du parcours visuel avec de la couleur rouge sont empruntés au mouvement baroque ; malgré un apparent statisme, le sujet est mis en scène et la représentation des matières occupe une certaine place également. L’œuvre est donc à la fois baroque et classique. Cette mixité est caractéristique du portrait à la française du XVIIème siècle. De plus, ce tableau est un portrait, toutefois, une nature morte est immiscée dans la composition. C’est une pratique courante en France, notamment dans la seconde partie du siècle40.
40
MEROT, La peinture française au XVIIe siècle, Op.Cit.P.183
35 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Un autre indice nous permet d’affirmer que l’œuvre est française : le mélange d’influence des pays alentours. La posture est statique et le visage est idéalisé, comme dans les portraits de Raphaël. La facture est lisse et précieuse, les matières sont travaillées, comme dans les représentations nordiques. La représentation du nacré de la peau rappelle les portraits de Van Dyck. L’utilisation du fil conducteur rouge est inspirée des œuvres de Rubens. L’emploi de nature morte et le positionnement d’un objet entre deux plans sont également hérités des peintures flamandes des siècles précédents41. Quelques maladresses sont visibles, trahissant une qualité moindre. La perspective et la lumière ne sont pas toujours cohérentes les unes avec les autres. Le vêtement de la jeune dame est travaillé, tout comme le bouquet de fleurs, mais ils manquent de « finesse42 ». Toutefois, il faut garder en tête que l’œuvre a subi de multiples nettoyages au cours des siècles, il est possible et même probable que certain glacis aient été perdus. Si cela a en effet été le cas, seul les tons de fonds sont encore visibles par endroit et donnent en sensation de lourdeur, qui n’y était pas à l’origine.
2. Portrait idéalisé, réalisé en atelier a. Réalisation en atelier Lors de notre étude, il est apparu que l’œuvre présente une différence de qualité entre le corps de la jeune femme et le reste des éléments. En effet, le visage ainsi que les mains ont été traités de manière beaucoup plus légère et délicate que le reste de l’œuvre. L’œuvre a probablement été réalisée par plusieurs personnes. A cette époque, les artistes travaillaient très souvent en atelier. Les maîtres engageaient des apprentis pour leur transmettre leur art mais aussi pour augmenter leur vitesse de production. Les commandes étaient donc réalisées en équipes. Une hiérarchie était instaurée par le maître au sein de cet atelier. Il attribuait les taches aux différentes
41
Musée Jacquemart-André, Du baroque au classicisme Rubens, Poussin, et les peintres du XVIIème siècle, op.Cit.P.153 42 C’est une impression personnelle qui a été confirmée par l’expert Jean-Claude Boyer lors d’un très rapide échange.
36 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
personnes et elles devaient s’y restreindre43. L’un était préposé à la réalisation des vêtements, l’autre aux natures mortes, etc. Selon l’importance de la commande, le maître y passe plus ou moins de temps. L’ensemble de l’habit, le coussin et le bouquet de fleurs auraient été peints par un ou plusieurs apprentis, ou un collaborateur occasionnel44, présent dans l’atelier au moment de la conception. La tête et les mains auraient ensuite été peintes par le maître de l’atelier.
b. Portrait idéalisé et peu personnel La concordance des traits du visage de cette jeune femme avec la description que fait Molière des canons de l’époque45, est importante. Il est donc probable que le peintre, ayant réalisé le portrait de cette dame, faisait partie de ceux qui avaient tendance à idéaliser leurs modèles. Le but du portrait est de montrer les qualités et la richesse du modèle. L’œuvre s’inscrit bien dans ces œuvres où la psychologie n’est pas du tout représentée et où seul un masque de beauté est visible. Le visage de cette jeune dame est stéréotypé et est très proche des canons de l’époque, ce qui laisse penser que le portrait ne représente pas la réalité physique. Cette caractéristique confirme que l’œuvre est probablement un portrait d’apparat, mettant en valeur son statut social plutôt que sa psychologie. Les traits du visage sont travaillés de manière très fine mais une grande importance est également accordée aux accessoires. Il arrivait souvent même, à l’époque, que les drapés prennent le pas sur le visage du modèle, plus désireux d’une représentation de sa fortune que d’une image réelle de lui-même46. Si ce n’est cette différence de qualité de réalisation, ici, le décor est presque aussi important dans la composition que le visage. Or, comme signalé précédemment, le visage est aussi idéalisé, reflet de ce désir de paraître riche et beau47. Ce visage est aussi caractéristique de ces portraits où, dans le but de flatter, les
43
Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715, Op.Cit. p.156 44 Ibid. p.156 45 Citation de Molière cf p.31 46 Ibid. P.50 47 Ibid. P.51
37 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
peintres utilisent une lumière floutée qui adoucit les traits et des rehauts de couleurs qui donnent de la vie aux joues48. Cette méthode est décrite par Jacques Thuillier comme étant une « heureuse supercherie qui vide un visage de sa personnalité pour le modeler sur un type à la mode »49. En conclusion, ce visage peint ressemble à celui de bien d’autres portraits. De plus, lors des recherches, il est apparu que plusieurs portraits présentaient les mêmes éléments iconographiques et même plastiques. C’est le cas du portrait de la Duchesse d’Aumont, récemment attribué au peintre Mignard50. Ce tableau conservé au Musée Condé de Chantilly, est identique dans les éléments de la composition, dans la posture de la jeune femme ainsi que dans la plastique.
Image 19 : attribuée à Pierre Mignard, Portrait de la duchesse d’Aumont, XVIIème siècle, Musée Condé, Chantilly
Image 19 : Œuvre de mémoire
Les seules différences se trouvent dans la qualité de la réalisation, la guirlande de fleurs et dans le visage. Les fleurs ne sont pas représentées de la même façon, cependant les variétés sont les mêmes. Le visage n’étant pas le même, nous ne pouvons pas parler d’une réelle copie, mais nul doute qu’il existe un lien entre les deux œuvres.
48
THUILLIER, La peinture Française au XVIIème siècle, Op.Cit., P.134 Ibid. P.134 50 Cette attribution est contestée 49
38 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
c. Rapprochement de l’école Mignard
Image 21 : Pierre Mignard (attribué à), Portrait d’une femme avec un enfant, Madame de Sillery et son fils, 1675, huile sur toile, 115x88cm, Dole, Musée municipal
Image 21 : Hyacinthe Rigaud, Le cardinal de Bouillon, 1708, huile sur toile, 247x217, Musée Hyacinthe Rigaud, Perpignan
D’autres portraits de l’artiste Pierre Mignard, ont des accessoires ou des postures similaires. En voici quelques exemples : un drapé bleu, une robe et une dentelle très proches, une même posture du modèle et particulièrement des mains, un même coussin, même bijoux,…
39 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 23 : Mignard Pierre, La fillette aux bulles de savon, 1681, Huile sur toile, 130x96cm, Versailles, musée National du Château.
Image 22 : Pierre Mignard (attribué à), Hélène Ferrand, marquise de Saint-Germain-Beaupré, vers 1678, huile sur toile, 79x65 cm, Blois, Musée du Château
Nous retrouvons régulièrement le coussin rouge avec des broderies dorées, la table et la robe ainsi que le châle bleu. La gamme chromatique de l’œuvre étudiée est aussi globalement très proche. Nous pouvons donc supposer qu’il y a un lien entre l’atelier Mignard et l’atelier ayant réalisé le tableau. Pierre Mignard (1612-1695) est un peintre français, qui fut un des élèves de Vouet. Il travailla de 1635 à 1657 à Rome avant d’étre rappelé en France par le roi51. Il deviendra premier peintre du roi et directeur de l’Académie en 1690, à la mort de Charles Le Brun. Il est très populaire en tant que portraitiste et notamment pour des portraits de cour52. Il met en valeur les accessoires tout en flattant et idéalisant son modèle, en fonction de la mode du moment53. Il disait lui-même que « la plupart des femmes ne savent ce que c’est que de
51
Dictionnaire Larousse FINOUS (Hervé), MAZIER (Nadine), RINGUEDE (Odile), MASSARDIER (Dominique), Portrait et pouvoir aux 17e et 18e siècles, Service culturel des Musées d’Orléans, p.2 et 3 53 Ibid. p.2 et 3 52
40 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
se faire peindre telles qu’elles sont, elles ont une idée de la beauté à laquelle elles veulent ressembler ; c’est leur idée qu’elles veulent qu’on copie, et non leur visage »
54
.
Son art est à mi-chemin entre le classicisme et le baroque. Il va fournir une synthèse entre ces deux courants par une réalisation rigoureuse dans les accessoires, un raffinement décoratif et une inventivité proche de celle des peintures d’histoire55. Par la suite, beaucoup de jeunes artistes vont suivre son exemple. D’autres artistes, tel que Poussin l’écrit, trouvent ses portraits « froids, pilés, fardés et sans aucune facilité ni rigueur56 ». De plus, des études sur les préparations des artistes du XVIIème siècle réalisées par Rioux, indiquent que « Mignard […a] alternativement utilisé des préparations rouges briques, rouges sombres, brunes sans couche d’impression et des préparations doubles avec impression rose, ocre jaune ou grise »57. Le tableau fait partie de la catégorie des œuvres ayant une préparation rouge sombre, pouvant correspondre à la manière de faire de l’atelier Mignard. L’époque de réalisation et la description faite du travail de Mignard correspondent parfaitement à l’œuvre étudiée. De plus, les éléments présents sur le portrait sont retrouvés dans d’autre de ces tableaux. L’œuvre n’étant pas de qualité suffisante pour qu’elle ait pu être peinte par Mignard lui-même, elle peut toutefois être désignée comme appartenant à l’école de Mignard.
54
M.L’ABBE DE MONVILLE, La vie de Pierre Mignard, premier peintre du Roy, 1731, A Amsterdam, aux dépens de la compagnie. P. 127-128 55 Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715 Op.Cit. p 61 56 JOUANNY, Correspondance de Nicolas Poussin, Paris, 1911, n°163, lettre à Cantelou, 2 aout 1648. Cité dans THUILLIER, La peinture Française au XVIIème siècle, Op.Cit. p.194 57 RIOUX (J.P), Note sur l’analyse de quelques enduits provenant de peintures françaises des XVII eme et XVIIIeme siècles, Annales du laboratoire des Musées de France, 1973.p.35 à 43 cité dans DUPREZ (Elena), Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban, Mémoire IFROA, Paris, 1987. p.12.
41 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion L’analyse plastique de l’œuvre a permis de mettre en avant beaucoup d’informations. L’œuvre étudiée est un portrait classique français datant vraisemblablement de la seconde moitié du XVIIème siècle. Certains éléments maladroits indiquent un portrait de qualité moyenne et donc à prix moyen. Son absence de psychologie, sa mise en scène, la valorisation des richesses et son idéalisation laissent penser que l’œuvre est un portrait d’apparat. Le modèle fait probablement partie de la noblesse, cependant, rien ne permet de l’identifier. La différence de qualité entre les différents éléments de la représentation suggère une œuvre produite en atelier. Cet atelier est très vraisemblablement lié à celui du peintre Pierre Mignard. De nombreux éléments sont inspirés des portraits peints par ce dernier et il fait partie des artistes flatteurs. L’œuvre pourrait donc être désignée comme appartenant à l’atelier de Mignard ou l’école de Mignard. Une autre caractéristique de la composition de ce tableau a retenu notre attention. La jeune femme est tournée vers la droite. Traditionnellement, les portraits de mariage sont réalisés par paire : le mari et la femme. Ils se répondent de manière à figurer côte-à-côte sur le mur de la maison familiale. Le portrait de l’homme est placé généralement à gauche tourné vers celui de sa femme, laquelle se tournant vers la droite pour lui répondre58. Cette organisation plastique laisse présager que ce tableau n’était peut-être pas seul. Cette théorie soutient l’hypothèse d’un portrait de mariage.
58
RMN, Portrait, Le portrait dans la collection des musées Rhône-Alpes, Op.Cit. P.110
42 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Analyse Iconographique Suite à cette analyse plastique, l’analyse iconographie va venir compléter les déductions faites jusqu’à présent. L’analyse iconographie est, comme son nom l’indique, une étude de l’histoire et des symboles des éléments représentés sur le tableau. Cette partie sera donc consacrée à l’analyse des accessoires habillant la jeune femme. Nous tenterons de confirmer l’hypothèse d’un portrait de mariage ou de fiançailles et d’affiner la datation.
I.
Le vêtement Le vêtement que porte cette jeune dame est composé de différents éléments, décrits de façon détaillée par François Boucher dans son livre portant sur la mode occidentale : c’est un «corps de cotte couvrant un corps baleiné rigide qui descend plus bas que la taille. Décolleté large où dépasse la dentelle de la chemise dont les manches bouffantes sont visibles sous celle de la robe »59. Le manteau robe est rayé rose et or, brodé
Image 24 : Détail de la robe de l’œuvre de mémoire
de fils dorés et argenté, particulièrement au niveau des manches60.
La tenue de cette jeune femme est de facture précieuse. En effet, les matières telles que le satin du châle bleu, la soie brodée du corsage et les manches brodées en or et argent, étaient très onéreuses à l’époque. Cette manière de les disposer en rayure sur le corsage est caractéristique des années 167061. Les robes de cours possèdent des manches courtes laissant visible la dentelle de la chemise. La dentelle étant très coûteuse à l’époque, elle représente également une marque de richesse62. Image 25 : Détail de l’épaule gauche du modèle 59
BOUCHER (François), histoire du costume en Occident : des origines à nos jours, Paris, Flammarion, 2008. P. 223. 60 Ibid. P.223 61 RUPPERT, (Jacques), Le Costume : époques Louis XIV et Louis XV, France, Flammarion, 1990. P. 22. 62 ARIZZOLI-CLEMENTEL P., GORGUET BALLESTEROS P., Fastes de la cours et cérémonies royales, le costume de cour en Europe 1650- 1800., Paris, Réunion des musées nationaux, 2009.p. 78
43 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le classement des tissus au milieu du XVIIIème siècle63 Type de tissu
Prix de l’aune au détail (livres françaises64)
Etoffes unies
2 à 14
Etoffes façonnées en pure soie
3 à 40
Velours unis
17 à 26
Velours façonnés
16 à 70
Etoffes en dorures
13 à 400
petits
13 à 36
moyennes
26 à 180
hautes
180 à 400
Dentelles
54 à 480
François Boucher précise que le vêtement de la femme n’évoluera pas énormément au cours du XVIIème siècle. Le seul changement notable est la disparition des collets serrant le cou. Il devient une dentelle ou un tissu suivant le décolleté de la robe, au début du règne de Louis XIV65. D’autre part, à partir de 1680, les corsages s’alourdissent en broderies, en décorations et en nœuds de ruban appelés galants. Ces informations nous permettent de dater l’œuvre entre le début du règne de Louis XIV et 168066. Malgré son aspect somptueux, la robe semble faire partie des robes d’intérieur appelées « déshabillé »67. Cette mode de la pose en « déshabillé » a été lancée par Mme de Montespan, en 167268, au cours de l’une de ses grossesses69.
63
Ce tableau présente les prix du siècle suivant, cependant il nous donne une indication sur le prix des tissus pratiqué au cours de la fin du XVIIème siècle. Ibid. p78 64 Une livre équivaut à 9euros 45centimes : col71-louisaragon.ac-dijon.fr/IMG/doc_argent_au_XVII__2.doc 65
BOUCHER. Histoire du costume, La mode en Occident : des origines à nos jours, Op. Cit. p.224 Ibid.p. 224 67 Entretien avec Marie Laure-Colomban, Diplômée des métiers d’Arts en tant que costumier réalisateur (DMA). https://defilendentelle.wordpress.com/2015/06/23/robe-de-cour-xviieme-siecle/ 68 RUPPERT, Le Costume : époques Louis XIV et Louis XV, Op.Cit.p.23 69 BOUCHER. Histoire du costume, La mode en Occident : des origines à nos jours, Op. Cit. p.224 66
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Cependant, quelques réserves peuvent être émises quant à l’existence de cette robe en particulier. Il est courant que le peintre demande un morceau d’étoffe au modèle, afin de s’en inspirer pour peindre le vêtement et de limiter son temps de pose70. Il est également possible que le peintre s’inspire d’accessoires lui appartenant71. Il arrive donc régulièrement que la personne représentée sur les portraits soit vêtue d’un habit semi-réel semiimaginaire72. La ressemblance de ce vêtement avec celle d’autres modèles des portraits de Mignard pousse à penser que la jeune femme n’a probablement jamais porté cette robe. La différence de qualité de réalisation entre le visage et le vêtement appuie cette hypothèse.
II.
La coiffure
La coiffure représentée sur ce tableau est visible sur plusieurs portraits de femme du début de règne de Louis XIV.
Image 26 : Coiffure de la femme de l’œuvre de mémoire
70
Collectif, Visages du grand siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV.Op.Cit p.146 Ibid. p.146 72 Entretien avec Marie-Laure Colomban 71
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Elle se nomme coiffure Hurluberlu ou Hurlupé. En ancien français, Hurelu qui signifie ébouriffé, hérissé et Berlu, excentrique, écervelé73. Cette coiffure fût inaugurée par la Duchesse de Nevers en 1671 et restera à la mode jusqu’en 167874. Cette apparition a été commentée le 18 mars 1671 dans une lettre adressée à Mme de Grignan : " Melle de Nevers avait tous les cheveux coupés sur la tête et frises naturellement par cent papillotes qui lui font souffrir toute la nuit mort et passion ; tout cela fait
Image 27 : Voet Jacob Ferdinand, Portrait of
une petite tête de chou ronde, sans nulle chose par a Woman, entre 1659 et 1700, Huile sur toile, 76x64 cm, Musee du Petit-Palais, Paris
les cotés, toute la tête nue et hurlupée"75.
La coiffure Hurluberlu laissera sa place à la coiffure à la Fontange vers 167876. Cet élément d’iconographie a une grande importance. Elle nous permet d’affirmer que le modèle est à la mode portée à la cour de Louis XIV, entre 1671 Image 28 : Coiffure Hurluberlu
et 1678.
Image 29 : Coiffure Fontange à tour
73
DUCHER., Manuel des coiffures historiques : http://www.coiffure-ducher.fr/louisxiv_femgene.html Larousse, Dictionnaire, http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/hurluberlu_hurluberlue/40686 74 DUCHER., Op.Cit. 75 Ibid. 76 BOUCHER, Histoire du costume, La mode en Occident : des origines à nos jours, Op. Cit. p.225 DUCHER., Op.Cit.
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III.
Les bijoux
Les bijoux qu’arbore cette jeune femme sont très courants au XVIIème siècle. Un unique rang de perles met en valeur son cou, des grosses perles pendent de ses oreilles. Sa coiffure est ornée par d’autres perles blanches, qui tranchent avec ses cheveux noirs et permettent d’apprécier la coiffure. Ces bijoux sont presque systématiquement représentés sur les portraits de femme, tout au long du XVIIème siècle. Les perles étaient chères, les représenter est donc une manière 77
de montrer sa richesse au monde . Par ailleurs, de par leur
Image 30 : Perles du portrait étudié
blancheur, elles symbolisent la pureté, la douceur, l’innocence et la vertu78. Un bracelet traité de manière assez floue est présent à son poignet gauche. La facture ne nous permet pas de déterminer en quelle matière est fait ce bijou, cependant nous pouvons affirmer que ce ne sont pas des perles. De plus, lors de nos recherches, nous avons pu constater qu’il ressemblait beaucoup à des bracelets visibles sur certains portraits attribués à Pierre Mignard.
Image 33 : Détail du bracelet de l’œuvre étudiée
77 78
Image 33 : détail de bracelet, Pierre Image 33 : Bracelet de la Mignard (Attribuée à), Portrait de Duchesse d’Aumont : attribuée à Pierre Mignard, Portrait de la femme (Mademoiselle de Fontanges ?) duchesse d’Aumont, Seconde et Cupidon, huile sur toile, 107x90,5 cm, Collection privée moitié du XVIIème siècle, Musée Condé, Chantilly.
MOREL (Bernard). Les joyaux de la couronne de France, Belgique, Albin Michel, 1988 . P 139 https://www.gemperles.com/mythes-symboles-perles
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La taille des bijoux évolue à partir du milieu du XVIIème siècle. En effet, elle passe de la taille en table à la taille en rose79. Cet aspect en rose est celui du bijou visible sur le haut de la manche du modèle. Cela donne un indice supplémentaire : le tableau a été peint après 1650.
Image 34 : Détail du bijou visible sur l’épaule gauche du modèle de l’œuvre de mémoire
IV.
Le maquillage Dans une communauté où le paraître est si important, le maquillage est une manière
de donner une impression de propreté et de noblesse. En effet, à l’époque, l’hygiène n’était pas la même qu’aujourd’hui. La toilette s’effectuait à sec, par friction avec un linge et généralement limitée aux zones visibles80. Il fallait donc donner l’impression que l’on était propre en se poudrant le visage et les parties du corps visibles. Dans ce même but81, on changeait régulièrement de chemise, afin que celle-ci soit toujours Image 35 : Détail du visage du modèle de l’œuvre de mémoire
blanche.
79
SCARISBRICK D., VACHAUDEZ C., WALGRAVE J., Parures du pouvoir, joyaux des cours européennes, Op.Cit,. P.123 80 BRACHER J., Versailles : le propre et le sale, AB Productions, 2016. https://www.youtube.com/watch?v=YcBG0AjSlhc 81 Ibid.
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Par ailleurs, une peau blanche est une peau qui n’a pas été exposée au soleil, donc appartenant à une personne qui n’a pas eu à travailler dans les champs. La blancheur de la peau est, par conséquent, un des marqueurs sociaux de l’époque, celui d’une personne de noble naissance ou de haute bourgeoisie et non celle d’un paysan. De plus les pots de ces poudres coûtaient eux aussi assez cher82. Des recherches sur la composition de cette poudre ont révélé qu’elle était souvent à base de céruse83. La poudre rouge qui la rehaussait était du rouge d’Espagne84. Elles ont, très probablement, été à l’origine de nombreuses maladies de peau, de poumon et de vue85. C’est à cette occasion que la 86
mouche
est
apparue,
afin
de
cacher
les
rides
Image 36 : Représentation de la mode du port de la mouche
prématurément apparue, mais aussi les crevasses et d’autres maladies telles que la petite vérole. Mais, ce qui nous semble le plus important dans le cas du modèle du portrait analysé, est que la blancheur de la peau est aussi symbole d’un idéal de virginité, d’une âme immaculée87. Cela pourrait indiquer le statut matrimonial de cette femme. L’utilisation du maquillage ne fait que confirmer la volonté de paraître pure aux yeux des spectateurs et l’appartenance du modèle à une classe riche.
82
LANOË (Catherine), La céruse dans la fabrication des cosmétiques sous l’Ancien Régime (XVIeXVIIIe siècles), Techniques et culture, CNRS, 2003.p.1 83 FITELIEU, la contre mode, 1642. Cité dans LANOË, Op.Cit. p. 5 84 Ibid. 85
Ces effets sont dénoncés à plusieurs reprises. Cependant, c’est la précision de Jacques Savary des Brûlons, en 1748, qui va mener à un changement de formule. C’est « un poison dangereux quand elle opère au-dedans et elle fait même sentir au-dehors sa malignité puisqu’elle gâte la vue et les dents des personnes qui prétendent s’en embellir et qu’outre quantité d’autres incommodités qu’elle leur cause, elle semble avancer la vieillesse, en faisant venir des rides plus tôt qu’on en aurait ». Ibid. . p. 6 86 Petit morceau de velours ou de taffetas noir collé sur la peau. Ce n’est que par la suite que les mouches deviendront un élément de mode et de communication. BRACHER J., Versailles : le propre et le sale, Op.cit. 87 LANOË, La céruse dans la fabrication des cosmétiques sous l’Ancien Régime (XVIe-XVIIIe siècles), Op.Cit. p.2
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V.
Les fleurs La jeune femme est accompagnée d’un bouquet de fleurs et semble l’arranger. Les fleurs reposent dans un vase, installé sur la table au premier plan. L’utilisation des bouquets de fleurs comme éléments symboliques a vu le jour dans les Flandres et en Hollande, et va se répandre par la suite dans toute l’Europe. « L’allégorie florale mise au point par les écoles du Nord, sous la forme de bouquet chez les Hollandais et de la couronne chez les Flamands, bouleverse par sa nouveauté la tradition de l’expression symbolique »88. Chaque fleur, en
Image 37 : Détail des fleurs de l’œuvre de mémoire
plus de ses qualités esthétiques, va représenter une vertu ou une métaphore. Dans le cas des portraits, la symbolique
qui résultera du bouquet de fleurs sera mis en relation avec le modèle. Le bouquet représenté sur l’œuvre étudiée n’y fait apparemment pas exception, et permet de faire passer un message à la majorité des contemporains. Nous tentons donc de le décrypter.
Détails du bouquet
Identification
Symbolique associée89
de la fleur
Orgueil et vanité Appréciée par les nécromanciens. Symbole des vanités modernes, la collection, la curiosité. Quelquefois reprise Tulipe
après le symbolisme chrétien comme image profane de la Grâce.90 « Embrase l’âme d’un désir d’être embelli d’une grande variété de vertus »91
88
TAPIE A. Le sens caché des fleurs, Symbolique et Botanique dans la peinture du XVIIème siècle, Adam Biro, Paris 2000. P. 49-50 89 Ibid. p. 148 FETTWEIS (Geneviève), Les fleurs dans la peinture des XVe, XVIe et XVIIe siècles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique.p. 37-38-49. 90 TAPIE A. Op.Cit P 148 91 R.P. LEROY ALARD, La sainteté de vie tirée de la considération des plantes, Liège, 1641. Cité dans
Ibid. p.148 50 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Pivoine
Beauté
Prudence et sagesse Symbole de prudence et de sagesse, cette fleur, qui
Jacinthe
répand un parfum suave, évoque le Christ dans la culture chrétienne
Fertilité et renaissance Fleur du vent, elle symbolise l’éphémère, le printemps qui renaît, la beauté fragile. Elle est née du sang
Anémone
d’Adonis, amoureux de Vénus et mortellement blessé par son rival Mars. Des pleurs de Vénus naquit l’anémone.
Narcisse
Négliger la beauté précieuse
Le jasmin officinal, qui fleurit au mois de mai, est Jasmin
consacré à la Vierge Marie. Sa blancheur évoque la pureté mais aussi la grâce, l’élégance et l’amour divin.
En conclusion, ce bouquet met en valeur les qualités physiques et morales du modèle : la beauté, la prudence, la sagesse. La pureté ainsi que la fertilité sont deux éléments qui sont importants à mettre en avant, pour un portrait de fiançailles ou de mariage. Cependant, l’œillet et la rose manquent à l’appel. Ils sont traditionnellement placés dans ce genre de portrait symbolisant respectivement les fiançailles ou la fertilité et l’amour.
51 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
VI.
Âge et statut du sujet
Cette femme semble jeune. Elle n’est ni une enfant ni une dame d’âge mûr, elle a probablement été peinte entre vingt et vingt-cinq ans. Toutefois, l’estimation d’un âge pour une personne de cette époque n’est pas chose facile. Au XVIIème siècle, l’espérance de vie était beaucoup plus courte qu’aujourd’hui. Cette jeune femme peu nous paraitre beaucoup plus âgée qu’elle ne l’était au moment de la réalisation du portrait. Il est très courant que les femmes du beau monde soient représentées à des moments importants de leur vie. Rare sont les familles ayant les moyens de se s’offrir plusieurs portraits par personne. Le plus souvent cela se passe au moment de fiançailles ou de mariage. C’est aussi une manière de témoigner de l’alliance entre deux familles et de valoriser la continuité dynastique92. Les femmes de la haute noblesse de l’époque se mariaient jeunes afin d’assurer la succession, aux alentours de quinze ans. Dans le cas du modèle, il pourrait s’agir d’un premier ou d’un second mariage. Cette hypothèse est également compatible avec la symbolique des éléments mis en avant sur le portrait. Elle revêt sur le tableau des habits de belle qualité ainsi que des bijoux précieux. Cependant, il est difficile de différencier la grande bourgeoisie de la petite noblesse à l’époque. Voulant élever leur classe sociale, les bourgeois vont copier la mode vestimentaire de la cour93. Nous ne pouvons donc pas déterminer avec certitude la classe sociale du modèle. Conclusion Nos recherches sur les éléments iconographiques du portrait nous ont permis de dater plus précisément l’œuvre et d’émettre quelques hypothèses quant à son contexte de réalisation. La plupart des éléments nous ont permis de rattacher le tableau au règne de Louis XIV. Les vêtements et la coiffure nous font affirmer que le modèle porte la mode des années 92
COLLECTIF , Visages du grand siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV, Op.Cit. p. 16 BESSON (Jean-Louis), Le Livre des costumes, La mode à travers les siècles, Paris, Éditions Gallimard, 1986, p.75 93
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1671 à 1678. Il est possible que l’œuvre ait été peinte au cours de cette période. Mais si le modèle vivait en province, il peut exister un décalage de quelques années. Par ailleurs, la richesse des éléments représentés nous indique une appartenance à la haute bourgeoisie ou à la noblesse. Aucun indice ne nous permet de l’identifier cependant nous estimons sont âge entre vingt et vingt-cinq ans. La symbolique générale est la pureté, l’innocence et la beauté. Il est probable que l’œuvre ait été peinte en vue d’un mariage. Il était très courant à l’époque de faire copier son portrait pour l’envoyer aux membres de la famille ou à des amis94. L’œuvre pourrait faire partie de celles-ci, cependant, la différence de qualité des éléments au sein de la composition nous fait douter. De plus, la duplication était souvent réalisée dans le même atelier que le tableau d’origine95, présentait un coût supplémentaire. En prenant en compte la qualité moyenne de l’œuvre, il est peu probable que les commanditaires aient commandé des copies en plus du tableau.
94
Collectif, Visage du grand Siècle, le portrait français sous le règne de Louis XIV 1660-1715, Op. Cit. p.146 95 Ibid.
53 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Parcours de l’œuvre étudiée Au cours de notre travail sur ce tableau, nous avons cherché à retracer son histoire. Le XVIIème siècle a été un siècle de production intense en matière de portrait. Malheureusement, peu en comparaison avec ce nombre, sont parvenus jusqu’à nous. Ce sort est dû aux destructions révolutionnaires et aux négligences lors des successions. Parmi ceuxlà, la majorité n’est pas signée et les informations les concernant se sont perdues96. Le but de cette dernière partie est de relater les pistes que nous avons suivies afin de mieux comprendre quel a été le parcours de l’œuvre et surtout d’essayer par ce moyen d’identifier la jeune femme. Dans un premier temps, les informations qui ont servi de base à l’enquête seront rappelées. Ensuite, les différentes étapes de la recherche seront relatées. Ainsi, nous tenterons de mettre en évidence une ou plusieurs hypothèses plausibles quant au chemin que l’œuvre a pu emprunter jusqu’à nous.
I.
Informations permettant de débuter la recherche 1. Les origines Les propriétaires actuels n’ont pu nous fournir aucune information concernant la
date et les circonstances de création de ce portrait. Cependant, une analyse plastique et iconographique nous a permis de déterminer que c’est un portrait de famille aisée, probablement réalisé à l’occasion d’une alliance entre deux familles, autours des années 1672-1678. Il a certainement été conservé dans la famille du commanditaire de l’œuvre et/ou de la jeune femme durant de nombreuses années.
96
THUILLIER, La peinture Française au XVIIème siècle, Op.Cit.127
54 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. La révolution française La Révolution française a été un revirement de situation important pour la majorité des familles nobles, il est donc possible que cela marque un changement de propriétaire pour ce tableau de famille. De nombreuses familles de nobles furent contraintes à quitter le pays. Ils abandonnèrent sur place une partie de leurs biens, qui furent détruits97 ou pillés. Les portraits d’apparat, fortement rattachés à l’ancien régime, représentent une partie de ces biens. Il est possible que l’œuvre étudiée ait connu le même sort, toutefois aucun élément concret ne le prouve. Nous insistons donc sur le fait que c’est une possibilité. Ne connaissant pas le nom de la femme représentée, il est difficile de confirmer ou d’infirmer cette hypothèse. De plus, aucun document de vente n’a été retrouvé et il n’est pas certain qu’il s’agisse d’une noble.
3. Achat de la famille Regnault Toutefois, peu de temps après la révolution française, la famille Regnault a acquis un château en Bourgogne : le château de Frôlois. Les propriétaires actuels nous ont assuré que le portrait a été conservé dans ce lieu, jusqu’à la moitié du XIXème siècle. Par la suite, il a été transmis au sein de la famille, de génération en génération, jusqu’à eux. Nous avons donc cherché à confirmer cette information. Pour ce faire, nous nous sommes renseignées sur l’histoire du château. Image 38 : vue aérienne du château de Frôlois, en Bourgogne
97
Ibid.P.127
55 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Les propriétaires du château de Frôlois ont révélé qu’il a été acquis par la famille Regnault en 1794.
Période de création
Révolution française
16711678
Achat du château de Frôlois démeublé
1789
1794
Œuvre présente au château
Moitié du XIXème siècle
Période d’incertitude
Arrivée chez le propriétaire actuel
2011-2012
Période de don et de succession au sein de la famille des propriétaires
Image 39 : Flèche chronologique du parcours de l’œuvre
Le mobilier du château a été presque intégralement vendu aux enchères en 179298. Quelques tableaux sont restés en place99, mais d’après le châtelain de Frôlois, Mr. Santiard, l’œuvre ne faisait pas partie de ceux-là. Malheureusement, il n’a pu mettre aucune archive à notre disposition afin de le confirmer. Si, au contraire, il s’avère que l’œuvre a échappé à la vente aux enchères, la femme appartiendrait à la famille des Rochefort ou des Duban de la Feuillée100. Les différentes générations, qui ont successivement habité au château, ont contribué à sa restauration et à le remeubler. C’est au cours de ces années que l’œuvre aurait pu être acquise. Nous sommes actuellement en train d’enquêter sur l’époque de l’entrée de ce tableau dans la famille Regnault-Santiard. Nous cherchons dans les inventaires de succession
98
Informations fournies par le châtelain COUTERET (Simone), Du moyen âge à la fin du XXème siècle sur Frolois , article 1961, Par ARAL1 dans Histoire le 15 Décembre 2007. 100 Cf. Annexe n°1 p.209 Informations fournies par le châtelain. 99
56 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
de cette famille afin de déterminer à partir de quel moment cette œuvre fait son apparition. Il est possible que des informations sur la femme représentée sur ce portrait, ou sur l’identité du peintre, soient encore présentes dans ces archives. Elles se seraient perdues par la suite au cours des changements successifs de propriétaires. Nous savons que l’œuvre a été transmise par le biais de dons et de successions jusqu’à la famille des Thomines-Desmasure (cousins de la famille Regnault-Santiard). Le tableau a été acquis par le propriétaire actuel il y a six ans et a ainsi intégré sa collection. Conclusion Nous avons peu d’informations précises sur l’histoire de l’œuvre de mémoire, aujourd’hui. Nos recherches ont pour but de venir compléter ces informations de bases. A partir de maintenant il serait intéressant d’avoir accès aux archives familiales pour déterminer si l’œuvre à bien été acquise après l’achat du château, ou aux inventaires de successions afin de daté plus précisément l’arrivée de l’œuvre dans la famille. Ces documents pourraient également nous apporter des informations sur l’œuvre en elle-même, comme par exemple, le nom de la Dame et/ou de l’artiste.
II.
Recherches entreprises Pour débuter nos recherches nous nous sommes basés sur les informations fournies
par les propriétaires de l’œuvre étudiée, c’est-à-dire, la présence du tableau au château de Frôlois jusqu’au milieu du XIXème siècle et sa circulation au sein de la famille. Nous nous sommes donc rendus au château de Frôlois, afin de commencer notre enquête
et
de
confirmer
ces
informations. Avant toute chose, nous avons interrogé le châtelain sur ce qu’il savait à propos de l’œuvre du portrait. N’ayant aucun souvenir de ce tableau, il n’a pas pu nous en dire plus. Par Image 40 : Vue du Château de Frôlois
ailleurs, aucune archive, ayant un 57
Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
rapport avec le mouvement des anciens biens mobiliers, n’était consultable au château. Deux ans avant l’acquisition du château par la famille, le mobilier avait été vendue aux enchères. Nous avons cherché à avoir accès à l’inventaire de cette vente, mais sans résultats. Par ailleurs, les propriétaires pensent que le tableau a pu être acheté pour remeubler le château. Seuls des inventaires des biens familiaux peuvent confirmer cette hypothèse. Nous avons consulté sur l’arbre généalogique de la famille Regnault, afin de cibler quelles archives familiales nous seraient utiles. Il est apparu que le premier propriétaire du château de cette famille était Nicolas Pierre Regnault de Vaubuzin101, né le 24 avril 1779, et décédé le 27 novembre 1839 à l’âge de 60 ans. L’inventaire de succession de Nicolas Regnault aurait pu confirmer la présence du tableau dès le départ au château et ainsi, conduire à la question du portrait de famille ou d’un portrait laissé par la famille précédente. Or, nous avons contacté les archives départementales de Côte d’Or, département comprenant la commune de Frôlois, ainsi que les archives régionales. Malgré toute l’aide de l’équipe des archives, ce document est resté introuvable, tout comme ceux de ses enfants directs. Il était peut-être conservé dans les archives du notaire ayant traité la succession. Or, le nom du notaire en question nous reste inconnu. Nous nous sommes donc renseignées auprès du cabinet de notaire travaillant à proximité du château, le bureau de Montbard. Les documents conservés chez eux remontent au plus tôt à 1838. L’inventaire aurait donc pu en faire partie, mais il s’est avéré que ce n’est pas le cas. Le nom de Regnault ne figure sur aucun des documents conservés chez eux. Cela signifie donc que ni l’inventaire de Nicolas ni ceux de ses descendants ne sont présents dans les lieux les plus accessibles pour nous. La question suivante a été : Nicolas Regnault est-il bien mort à Frôlois, en 1839 ? Dans le cas contraire, le notaire ayant traité la succession, pourrait être liée à son lieu de décès. Or, le lieu de décès ne figure pas sur l’arbre généalogique, mis à notre disposition. Nous savons seulement qu’il est né le 24 avril 1779 à Villeneuve l’Archevêque en Bourgogne et qu’il est mort en 1839.
101
http://www.tournemire.net/FROLOIS.pdf
58 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cette information pourrait figurer sur son acte de naissance, comme il est de coutume aujourd’hui. Ce type de document est traditionnellement conservé dans la ville de naissance. Lors de la prise de contact avec la mairie de Villeneuve l’Archevêque, notre interlocutrice nous a assuré que si le document a été conservé depuis toutes ses années, c’est chez eux qu’il se trouve. Il est malheureusement demeuré introuvable et nous avons été ainsi contraintes d’abandonner cette piste de recherche. Conclusion Les recherches que nous venons de présenter ne nous ont pas apporté beaucoup plus d’information. N’ayant aucune preuve tangible sur l’identité du modèle ni sur le parcours exacte de sa représentation, nous devrons nous contenter d’hypothèses plausibles.
59 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
III.
Hypothèses possibles 1. Portrait acquis pour remeubler le château après son achat C’est
l’hypothèse
vers
laquelle
les
propriétaires semblent se tourner. Ils ont en leur possession un autre tableau qui a a priori le même parcours. C’est un portrait d’homme en armure comportant une inscription au revers le datant de 1680.
L’homme
représenté
est
donc
un
contemporain du modèle du tableau de mémoire. Cependant, nous avons écarté l’hypothèse que les deux tableaux soient des pendants. Le tableau de l’homme en armure est plus petit et de facture inférieure à celui de la dame. Image 41 : Portrait d’homme
Par ailleurs, une seconde inscription indiquant C.MAIRE.F. Chatillon sur seine (?) 1680, est également visible. Il s’agit peut-être de la signature d’un artiste, d’une salle des ventes de l’époque ou d’un ancien lieu de conservation. Si les deux tableaux ont été conservés ensemble depuis si longtemps, il est possible qu’ils aient été achetés au même moment. Mais dans ce cas, pourquoi l’un aurait une inscription et pas le second ? Ils auraient ensuite, été exposés au château de Frôlois avant de passer de main en main au sein de la famille. La jeune femme pourrait donc appartenir à n’importe quelle famille de la noblesse de l’époque. Image 42 : Inscription présente au dos du tableau du portrait d’homme.
60 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. Portrait de famille de Nicolas Regnault Notre seconde hypothèse est que le portrait provienne de la Famille Regnault. Seraitil possible que Nicolas Regnault ait apporté le tableau avec lui lors de son emménagement au château ? Serait-il possible que le modèle ait fait partie de sa famille ? Si c’est le cas, au vu des dates supposées de la création, le modèle pourrait être Charlotte Regnault née en 1658102. Cependant, la famille Regnault ne faisait pas partie de la noblesse de l’époque. Le frère de Charlotte était laboureur, et étant le premier né, il aurait été l’héritier des titres des parents (titre inexistant sur l’arbre généalogique). Il est même peu probable qu’ils aient fait partie de la bourgeoisie. 3. Portrait encore présent au château à l’achat La troisième hypothèse est celle de la présence du tableau dans le château au moment de l’achat de celui-ci. Un document103 indique que tout le mobilier a été vendu au cours d’une vente aux enchères en 1792. Cependant, certains portraits seraient restés en place. Serait-il possible que le tableau soit l’un d’eux ? C’est une bonne piste, cependant, l’inventaire des biens de la vente est demeuré inaccessible et tout comme l’auteur de cet article. Le château a appartenu à différentes familles au cours des siècles. Un changement de mains s’est fait entre la famille des Rochefort et celle des Duban de la Feuillé en 1683. Si les dates de création de l’œuvre que nous avons estimées sont exactes, le modèle peut appartenir à l’une ou à l’autre. Toutes deux sont des familles nobles et pourraient correspondre au statut que met en valeur cette femme. Un indice inciterait à penser que la jeune femme a appartenu à la famille des Rochefort. Lors de la consultation de leur arbre généalogique, un des membres de la famille
102 103
Annexe 2 : Génération des Regnault, contemporaine à la jeune femme p.210 COUTERET, Du moyen âge à la fin du XXème siècle sur Frolois, Op.Cit.
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a été inscrit ainsi : « François-Louis (1705-), dit le marquis de Rochefort, page de la Chambre du roi, sous le Duc d'Aumont son oncle, en 1708, puis mousquetaire sous d'Artagnan »104.
La forte ressemblance entre le portrait de la duchesse d’Aumont et celui que nous étudions pourrait donc s’expliquer par un lien familial. La jeune femme ferait donc partie de la famille des Rochefort et serait ainsi indirectement lié à la Duchesse d’Aumont, également appelée Françoise Angélique de La Mothe-Houdancourt, née en 1650 et décédée en 1711. Cependant, la source de cet indice n’est pas très fiable et aucune autre source ne l’a mentionné. Il serait malgré tout très intéressant d’approfondir la recherche dans ce sens et de consulter des arbres généalogiques plus complets.
104
https://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_de_Rochefort_(Franche-Comt%C3%A9) 62 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion de l’analyse historique L’organisation spatiale au sein du tableau, ainsi que sa structure ont permis de déterminer que l’œuvre est un portrait classique français du XVIIème siècle. Un rapprochement avec d’autres portraits de la même époque a permis de mettre en évidence un lien avec la production de Pierre Mignard. La qualité n’étant pas suffisante pour être une œuvre du maître lui-même, l’œuvre sera désignée comme étant un tableau de l’école de Mignard. Les accessoires visibles sur l’œuvre ont été mis en relation avec la mode vestimentaire du XVIIème siècle. Les différents éléments ont permis de dater l’œuvre aux alentours de 1671-1678. De plus, une symbolique générale de douceur et de pureté implique que l’œuvre a probablement été réalisée à l’occasion de fiançailles ou d’un mariage. Quelques hypothèses ont été proposées mais de nombreuses incertitudes demeurent et rendent difficiles la mise en place du parcours matériel de l’œuvre. L’identification de la jeune femme n’est pas chose aisée et les recherches méritent d’être approfondies. La consultation des arbres généalogiques de la famille Rochefort et de la famille de la duchesse d’Aumont serait particulièrement intéressante à cet égard. Par ailleurs, il est possible que les inventaires de succession des châtelains de Frôlois soient conservés dans un autre endroit que ceux que nous avons contactés. Les informations qui ont pu être mises à jour ont permis de redonner à l’œuvre une histoire et de la resituer dans une époque de création artistique très productive.
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64 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Seconde Partie : ConservationRestauration de l’œuvre
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Introduction Ce tableau nous a été confié afin de réaliser un travail complet de conservation restauration. Le travail d’un restaurateur débute par l’analyse visuelle de l’œuvre qu’il va traiter. En effet, l’analyse de la stratigraphie permet une meilleure compréhension de l’état de l’œuvre. Il est essentiel d’avoir une bonne connaissance des matériaux qui la composent, ainsi que des techniques employées. Cette compréhension complète de l’œuvre et de ses altérations, permet d’intervenir de manière adaptée sur son environnement et si besoin, en appliquant des traitements de conservation et de restauration spécifiques. Cette analyse visuelle débutera par l’identification des matériaux constitutifs puis par un relevé des altérations. Une explication de l’état actuel de l’œuvre sera proposée dans le diagnostic, nous déterminerons si l’œuvre a besoin de subir une campagne de restauration, et nous préciserons le caractère d’urgence de ces interventions. C’est seulement après avoir effectué ce travail qu’une proposition de traitement pourra être établie.
Image 43: Œuvre de mémoire avant restauration
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I.
Description des matériaux constitutifs de l’œuvre
La stratigraphie est classique, elle est organisée en différents niveaux détaillés ci-dessous :
Un châssis Une toile Un encollage Une préparation colorée Une couche colorée Un vernis
Image 44 : Schéma de la stratigraphie
1. Analyse du support a- Châssis La toile est maintenue en tension au moyen d’un châssis en bois. Ici, il est constitué de quatre montants et d’une traverse horizontale. Les angles sont assemblés en tenonmortaise traversant avec renfort d’épaulement (image 2 a), et la traverse est en tenon mortaise aveugle (image 2b). 105 Ce type d’assemblage correspond aux assemblages réalisés par les artisans du début du XXème siècle.
105
CROCHEMOR, Jean, Tous les assemblages du bois et leurs utilisations, France, ed : Eyrolles, 2011.
P. 21
67 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 45 : (a) Assemblage tenon-mortaise traversant avec languette et (b) tenon mortaise aveugle1
Image 46 : Photographie de l’assemblage des angles
Le montage des angles est mobile, c’est-à-dire que le châssis est extensible grâce à des clefs. Il est équilibré et chanfreiné de 5mm au niveau de la rive intérieure et sur l’arête extérieure. La réalisation d’un chanfrein de la rive intérieure permet de ne pas marquer la toile si elle se détend. Les dimensions du châssis sont de 102 cm de hauteur ; 83,2 cm de largeur, 2 cm d’épaisseur. Ces dimensions ne correspondent pas à un châssis standard.
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83,2 cm
cmcmc
40,5 cm
86,9 cm
102 cm
Fiche
Ep : 2 cm 7,5 cm Image 47 : Châssis avec ses dimensions
Après comparaison avec différentes essences, il semblerait que le bois soit du peuplier. Cet arbre fait partie de la catégorie des feuillus qui fournissent un bois assez tendre mais résistant. Les châssis de peuplier sont couramment utilisés depuis plusieurs siècles. L’absence de nœud de bois et son bon état de conservation sont des signes de bonne qualité. Le montage mobile du châssis est un indice de datation. Pernety106 l’a mentionné en 1757 pour la première fois : « On a inventé depuis peu une manière de faire des châssis qu'on appelle châssis à clefs; ils sont préférables & en tout aux anciens châssis parce qu'au moyen des clefs on tend la toile plus fortement & toutes les fois que la sécheresse la relâche. Ces clefs se mettent dans tous les coins d'assemblage & aux bouts de chaque traverse.»107. De plus, le chanfrein n’est apparu qu’au cours des dernières années du XVIIème siècle108. Mais le parfait usinage des éléments indique que ce châssis a été fabriqué industriellement, de fait à partir du milieu du XIXème siècle. La toile datant de la fin du XVIIème
106
Dom Antoine -Joseph PERNETY (1716-1796) était un religieux Bénédictin de la Congrégation de Saint Maur. Il était également alchimiste et écrivain. Il a notamment écrit un traité sur la pratique de la peinture, de la sculpture et de la gravure, publié en 1757. 107 PERNETY, Dom Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure avec un traité pratique des différentes manières de peindre, dont la théorie est développée dans les articles qui en sont susceptibles. Ouvrage utile aux artistes, aux élèves & aux amateurs, Paris, 1757.P. XC-XCI. 108 LABREUCHE, Pascal, Paris, Capitale de la toile à peindre. XVIIIème-XIXème siècle. CTHS-INHA, l’art et l’essai, 2011. P. 44.
69 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
siècle, il est évident que le châssis n’est pas d’origine et que l’œuvre a fait l’objet d’au moins une campagne de restauration. Un autre élément nous permet de l’affirmer. Les marques d’un ancien châssis, qu’on peut supposer être celui d’origine, sont visibles sur la toile, en périphérie et au niveau de la traverse. Ces marques linéaires témoignent des dimensions de cet ancien châssis. Afin de déterminer la largeur des montants, nous avons mesuré l’espace entre les marques laissées par le châssis et les limites de la peinture.
3 cm
3 cm 4 cm 99,5 cm
v Image 48 : Marques d’un ancien châssis visibles sur la toile et schéma avec les dimensions présumées de celui-ci
81 cm
Les clefs du châssis sont pour la plupart en peuplier
Clef en peuplier
cependant trois d’entre elles se différencient par leur masse, leurs veines, et leur couleur. Elles sont
Clef en noyer
en bois de noyer. Image 49 : Photographie des deux types de clefs
70 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
On remarque une trace exogène, au niveau du centre du montant senestre, un cercle a été tracé au crayon carbone, d’un diamètre d’environ 2,5 cm.
Image 50 : trace exogène
b- Système d’assemblage de la toile sur le châssis La toile a été fixée au châssis avec des semences, il s’agit de la méthode très courante depuis plusieurs siècles. Un papier de bordage relativement épais recouvre tout le pourtour de l’œuvre. Cela rend l’observation des bords de tension Image 51 : Exemples de semences
délicate. Il dépasse, sur la face du tableau, de 1,3 cm au maximum sur les bords latéraux, et de 6 mm au maximum sur les bords
horizontaux. Il est aussi rabattu sur le revers.
Papier de bordage repeint Image 52 : Papier de bordage débordant sur la face
Image 53 : Papier de bordage rabattu
sur le revers
Malgré cela, du fait de leur oxydation, la trace des semences est visible à travers le papier de bordage, ce qui permet de les compter. La toile est maintenue sur le châssis par 71 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
un total de 72 semences. Elles sont réparties de manière très inégale : 20 sur le montant supérieur, 17 sur le montant dextre, 21 sur le montant inférieur et 14 sur le montant senestre. Des pans entiers des bords de tension n’ont pas de semences. Sous le papier de bordage, on peut sentir que les bords de la toile sont très proches de l’arête du châssis. Sur la face, à certains endroits, le papier de bordage peint laisse voir une toile exempte de couche picturale. Ceci confirme que le châssis actuel est légèrement plus grand que celui d’origine et que les bords de tension de la toile sont maintenant sur la face.
Semence
Toile Châssis
Papier de bordage Image 54 : Schéma du montage actuel de la toile sur le châssis
72 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
c-
Toile Le support est une toile au tissage dit armure
toile (un pris, un sauté). La toile est épaisse et régulière, le tissage est serré (13 par 13 fils au cm2). Aucune lisière n’est accessible, ce qui complique l’identification du sens chaine et de sens trame, cependant les fils de chaine semblent être horizont aux, car ces derniers paraissent plus ondulés. Image 57 : Photo de la toile de l’œuvre
La toile a une teinte marron-beige, son oxydation ressemble à celle des toiles naturelles. Le comportement d’un de ses fils, lors d’un test de combustion, a révélé que la fibre est en lin ou en coton109. Une observation au microscope a permis de corroborer l’hypothèse de la CHAINE
fibre de lin110. Les fils présentent une torsion en « Z ». L’embuvage ne paraît pas anormalement important.
Image 57 : schéma d’une armure toile
La toile est globalement de bonne qualité, malgré la présence de quelques bourres de toiles.
Image 57 : Bourre de toile
109
D’après le protocole et les analyses de l’Institut Canadien of Conservation (ICC), les fibres de lin et de coton « brûlent facilement, laissent une odeur de papier qui brûle et laisse une cendre de couleur blanche-grise de texture pelucheuse ». http://canada.pch.gc.ca/fra/1439925170925 110 « Caractéristiques longitudinales : les fibres [de lin] simples présentent, par intervalles et sur leur longueur, des nœuds en forme de I, de V ou de X, ressemblant à ceux du bambou, largeur inégale, le canal médullaire (dit lumen) est plutôt petit et constitue normalement moins de la moitié de la largeur de la fibre, les fibres se présentent souvent sous la forme d'un faisceau serré dans le sens de la longueur, plutôt que sous celle de fibres distinctes. » http://canada.pch.gc.ca/fra/1439925170925
73 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. Analyse de la couche picturale a- Encollage L’encollage est une couche essentielle dans la stratigraphie du tableau. Il est appliqué lors de sa mise en tension sur un bâti. Il a pour rôle de maintenir la toile dans cette position tendue. Il protège également la cellulose contenue dans les fibres et isole les fils de l’air ambiant et du liant lipidique, retardant leur oxydation111. De plus, il assure l’adhérence de la couche picturale au support. Cette couche sert « tant à économiser l’enduit huileux superposé, en empêchant son passage à travers les mailles de la toile et dans ses fils, qu’à prémunir les fibres textiles de l’action oxydante de l’huile »112. Généralement, l’encollage est présent, bien que peu visible. Dans le cas du tableau étudié, une bonne adhérence ainsi que l’absence de perle de préparation113 au revers, et une légère brillance dans les lacunes, signalent sa présence. Des hypothèses peuvent être émises quant à sa composition grâce aux mémoires et écrits d’artistes comme Charles Lebrun et parfois par des érudits tels que Théodore Turquet de Mayerne114. La colle de gant ou de peaux d’animaux comme le mouton sont les plus courantes à cette époque. Dans le cas de tels adhésifs, le pouvoir collant est assuré par le collagène115. La seule analyse visuelle ne permet pas de déterminer la composition exacte de cet encollage.
111
BERGEON (Ségolène), Science et patience ou la restauration des peintures, Paris, RMN, 1992.p.43 LABREUCHE, (Pascal), Paris, Capitale de la toile à peindre. XVIIIème-XIXème siècles, Paris, CTHS-INHA, l’art et l’essai, 2011. P.44 113 Si l’encollage n’est pas présent sur une toile lors de la pose de la préparation, cette dernière passe entre les pores et forme des petites gouttes au revers. 114 Médecin et chimiste suisse (1573-1655) qui a régulièrement travaillé avec des artistes et notamment sur les pigments. NANCE (Brian), Turquet de Mayerne as baroque physician: the art of medical portraiture, Rodopi, 2002. 112
115
Fibre élastique adhérente 74 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
b- Préparation116 La préparation permet d’offrir une surface plus plane et plus ou moins absorbante, selon le souhait de l’artiste, avec une meilleure adhérence à la toile. Elle joue également un rôle esthétique de par son épaisseur et sa couleur. Elle est visible sur l’œuvre, au niveau des lacunes de couche colorée. Elle a été posée en fines couches de couleur rouge brun. Elle semble répartie de manière homogène et régulière sur l’ensemble de la surface à peindre. Des tests ont été réalisés afin de déterminer la nature de cette préparation. La plupart des expériences ont été faites sur des écailles, ayant chuté au cours du transport du tableau jusqu’à l’école. De cette manière, les tests ne risquent pas d’endommager l’œuvre en elle-même. En immersion dans l’eau, l’écaille de préparation ne se dissout pas et ne teinte pas le bain, ni au repos, ni à la suite d’une action mécanique. Ce test indique que la préparation n’est pas à base d’argile gonflante117.
Image 58 : Ecailles de préparation en immersion
Cependant, certaines réactions, au cours de la restauration, vont prouver le contraire. Cette observation souligne également que le liant de la préparation n’est pas une colle naturelle. Elle est vraisemblablement de nature lipidique, dite grasse. Des auteurs de traités anciens tels que Félibien118, Pernety, Dupuy du Grez et bien d’autres, ont mentionné l’utilisation de différentes huiles dans les préparations. La préparation dite grasse s’est répandue du milieu du XVIe au XVIIIe siècle dans le domaine des peintures à l’huile. Elle était appelée couche «d’impression » ou « imprimeur » à cette époque.
116
L’historique, le rôle ainsi que la composition des préparations rouges, sont davantage détaillés dans notre partie scientifique p. 159 117 Les argiles dites gonflantes sont des argiles vertes, qui malgré la cuisson pour les transformer en pigments, continuent à réagir très fortement à l’eau. Cf. Sujet technico-scientifique p.159 118 Félibien des Avaux : membre de l’Académie des inscriptions et des belles-lettres, ainsi secrétaire de l’Académie royale d’architecture. Il a écrit sur l’architecture, la peinture et la sculpture de son époque.
75 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Elle est composée généralement d’huile de lin ou d’huile de noix, parfois d’un siccatif, d’une charge (carbonate de calcium, blanc de plomb ou minium par exemple) et de trois familles de pigment : les terres brunes, les ocres et les oxydes de fer. D’après sa couleur, l’artiste a probablement utilisé de l’ocre rouge sur cette Image 59 : Préparation rouge au niveau de la déchirure
œuvre119.
c- Couche colorée Cette couche est plus communément appelé la couche de peinture. Elle est composée de pigments en suspension dans un liant lipidique (dans le cas des peinture à l’huile). Dans le domaine de la peinture, l’huile de lin est la plus couramment employée pour son caractère siccatif. Cependant au XVIIème siècle, de nombreux témoignages de peintres nous indiquent que l’huile de noix était aussi souvent utilisée. Son caractère plus transparent et moins jaune que l’huile
Image 60 : Empâtement sur les pétales d’une fleur
de lin donnait un meilleur rendu de couleurs.120Seule une analyse chimique pourrait déterminer s’il s’agit de l’une ou de l’autre des deux huiles. La facture est lisse, fine et régulière sur la majorité de la toile. Des demi-pâtes forment les dorures des vêtements, du coussin et les pétales des fleurs qui composent le bouquet. Le vernis étant oxydé, il peut modifier notre perception. La palette est raffinée et variée. Elle comprend des rouges, roses, jaunes, ocres et bruns pour les couleurs chaudes, et
119
PEREGO, François., Dictionnaire des matériaux du peintre, France, Belin, 2005. P.615 Félibien des Avaux, 1690, p.413. PERNETY, Op.Cit., 1757, p.CCCLXVII. 120
76 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
des bleus et des verts viennent équilibrer la composition. Du noir et du blanc viennent rehausser l’ensemble. En rapprochant la datation de l’œuvre et les documents mentionnant les différents pigments utilisés à cette époque, tel que « Pigments through the Ages » et « Pigment Compendium »121, nos hypothèses quant à la nature des couleurs utilisées par l’artiste, sont exposées dans le tableau ci-dessous. Comme énoncé précédemment, seule une analyse scientifique poussée donnerait avec certitude le détail des pigments employés.
Pigments utilisés au XVIIème siècle122
Supposition après l’analyse visuelle
Couleurs présentes sur le tableau de mémoire Rouge
Ocre rouge
Vermillon (synthétique)
Le rouge semble être à base d’un pigment d’ocre rouge (Oxyhydroxyde de fer) ou de minium (Pb3O4, obtenu en chauffant du blanc de plomb)
Minium
Carmin de cochenille
Laque de garance
121
EASTAUGH N., WALSH V., CHAPLIN T., SIDDALL R., Pigment Compendium, A Dictionary and Optical Microscopy of Historical Pigments, Butterworth-Heinemann, Elsevier, 1990. 122 Chronologie de l’utilisation des pigments Pigment throught the Ages, Renaissance and Baroque : http://www.webexhibits.org/pigments/intro/renaissance.html
77 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Caput mortuum
Vert
Terre verte
Malachite
Le pigment vert présente plus de ressemblance avec la terre verte (mélange de silicates colorés et de glauconite principalement)
Verdigris
Bleu
Azurite
Le bleu est assez similaire au bleu verditer (carbonate basique de cuivre)
Lapis-lazuli
Bleu verditer
Indigo
Smalt 78 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Jaune
Ocre jaune
Jaune de plomb-étain
Les jaunes sont difficiles à différencier. Aucune hypothèse ne semble plus probante que les autres.
Jaune indien
Laques jaunes
Jaune royal
Brun
Ocre
A cette époque, le brun le plus utilisé est à base d’ocre.
Noir
Charbon de bois
Le noir ressemble à du noir de fumée (obtenu par calcination de végétaux)
Noir d’ivoire-os
Noir de fumée
79 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Graphite
Blanc
Carbonate de calcium
Kaolin
Une comparaison visuelle est compliquée à établir, mais le pigment plus couramment rencontré sur les œuvres du XVIIème est le blanc de plomb (2 PbCO3.Pb(OH)2)
Gypse
Blanc de plomb
Image 61 : Tableau des pigments hypothétiquement utilisés
80 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
d- Vernis Le vernis est la dernière couche de la stratigraphie d’un tableau traditionnel. Il se présente comme une solution
filmogène
transparente, composée d’une résine diluée dans un solvant. Il a pour but de protéger la couche
colorée
extérieures
(griffures,
des
agressions
poussières,
autres
salissures). Il a également un rôle esthétique car il rend la surface brillante et homogène, il sature les couleurs, et ajoute une profondeur à la Image 62 : Observation du vernis aux UltraViolets
peinture. 123 L’application du vernis sur l’œuvre
étudiée est régulière. La couche est brillante et fine. Elle recouvre entièrement la couche picturale. L’observation à la lumière du jour nous montre une légère coloration jaunâtre, certainement due à l’oxydation caractéristique des résines naturelles terpéniques, du type résine Dammar. Lors de l’observation sous lumière ultra-violette, nous notons une fluorescence verte et homogène. Ces caractéristiques confirment l’origine naturelle de la résine. Le vernis présent aujourd’hui n’est pas celui d’origine. En comparaison avec l’âge estimé du tableau, son oxydation n’est pas suffisamment avancée. De plus, il est présent sur le papier de bordage débordant sur la face du tableau, ce qui confirme qu’il a été posé au cours de la dernière campagne de restauration.
123
GRAZIA (Nicosia), Le vernis des apparences, CeROArt [En ligne], 5 | 2010, mis en ligne le 14 avril 2010, consulté le 24 novembre 2016. URL : http://ceroart.revues.org/1483
81 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
II.
Relevé d’altérations des matériaux constitutifs
1- Châssis
Image 65 : Trou d’accrochage
Image 65 : Foxing
Image 65 : Marques, ruban adhésif et clou présents sur le châssis
Le châssis est en bon état. Il est poussiéreux et présente quelques griffures et taches de crasse très superficielles. Des trous et des clous révèlent qu’il a été encadré. Il y a des pertes de matière sur le montant dextre et une sur le montant inférieur. Deux clous de cet ancien montage sont encore logés dans le châssis : un dans la partie haute de chaque montant latéral. Un morceau de ruban adhésif est visible au milieu de la traverse.
82 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La traverse centrale du châssis commence à se courber en direction de la toile. Quelques trous d’envol d’insectes xylophages sont présents sur une clef, trois sur le montant dextre et un sur la traverse du châssis. Ces dégradations n’affaiblissent cependant pas le châssis et les insectes semblent inactifs à ce jour (aucune trace de sciure de bois).
Image 66 : Trous d’envol sur la clef et sur le montant dextre du châssis
2- Système de fixation de la toile sur le châssis
Le papier de bordage est jauni et cassant mais il est encore bien fixé, tant sur la toile que sur le châssis. Il est déchiré aux niveaux des jointures des assemblages des montants. Il présente de nombreuses taches de rouille dans les zones de où il recouvre les Image 67 : Papier de bordage rompu
semences.
83 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Les bords de tension ne jouent plus leur rôle. La tension de la toile n’est plus assurée de manière correcte, ce qui met en danger l’œuvre.
Image 68 : Tache de rouille des semences à travers le papier
3- Toile Sous la lumière rasante, on observe que la toile est flottante. Ceci est lié à un mauvais maintient par les semences mais également à une grande déchirure présente sur toute la partie inférieure du tableau. La toile est, en outre, marquée par la traverse centrale. Elle commence à former des déformations en cuvette, des boursouflures sur le montant supérieur et des godets aux deux angles supérieurs.
Image 69 : Photographies de la toile en lumière rasante : formation de cuvette et de godets d’angles
84 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La déchirure est complexe, linéaire, en forme de « L ». Sa longueur totale est de 108 cm et les lèvres sont dirigées vers l’arrière de la toile, ce qui indique un enfoncement avec rupture de la toile par l’avant. Cependant, seules de très faibles pertes de matière sont à déplorer. Comme le montre l’image 72, après remise à plat, les bords de la déchirure se complètent. Les fils ont été sectionnés nets. Image 72 : Déchirure vue du revers de la toile
Les pièces de renfort en toile visibles au dos de la toile laisse penser qu’il y a des déchirures ou/et des lacunes. Elles n’ont pas marqué la toile124.
Image 72 : Détail de la déchirure bord à bord
La toile est peu poussiéreuse, compte tenu de son époque présumée. Quelques petites taches grises sont visibles au revers, elles sont très certainement le résultat de projections.
Image 72 : Taches grises sur la toile
124
Cf les altérations liées aux restaurations p. 89
85 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
4- Couche picturale Certaines altérations présentées concernent toutes les strates de la couche picturale : la préparation, la couche colorée et le vernis. Les altérations spécifiques seront présentées avant les altérations globales, concernant plusieurs strates. L’encollage ne semble pas altéré de manière alarmante. Il est devenu plus cassant au fil des années mais il conserve une bonne cohésion. Quelques déplaquages sont visibles mais ils sont situés dans les zones de restauration. Les autres semblent dus à des chocs plutôt qu’à un problème physico-chimique au sein
Image 73 : déplaquage de toute la stratigraphie dans une zone de restauration
de l’encollage. Il n’en va pas de même pour la couche
de
affaiblissement
préparation. au
sein
Un
même
du
matériau provoque la chute d’écailles. Des pertes sont à déplorer dans diverses zones
mais
elles
se
situent
principalement autour de la déchirure et Image 74 : Pulvérulence de la préparation et pertes d’écailles
sur la périphérie de tableau. Ces zones de
préparation visible, permettent de remarquer la forte pulvérulence de celle-ci.
86 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La couche colorée, quant à elle, montre un appauvrissement en liant. En effet, l’huile a vieilli et les couleurs devenues plus transparentes, laissent percevoir la couleur de la préparation sous-jacente. C’est un phénomène, signalé très tôt, a rapidement fait perdre leur notoriété aux préparations colorées125. Pernety en parle dans son livre : «Elle pourroit passer pour la plus parfaite manière de peindre si quelques-unes de ses couleurs ne se ternissoient pas dans la fuite du tems ; elles deviennent brunes de plus en plus & les carnations prennent un ton roux jaunâtre, qui en altère la vérité c'est le défaut inséparable, & peutêtre sans remède de l'huile »126.
Image 75 : structure de la toile visible à travers la couche picturale
De manière plus générale, la faible épaisseur de la couche picturale laisse entrevoir la structure de la toile. La préparation n’a pas été appliquée en quantité suffisante pour empêcher la peinture d’épouser les reliefs et les aspérités de la toile en vieillissant. Il est peu probable que cela soit dû à une volonté de l’artiste.
L’observation en lumière traversante permet de détecter des zones affaiblies de la couche picturale. Dans le cas de ce tableau, quelques points localisés sont observables. La stratigraphie semble toujours cohésive et adhérente dans son ensemble.
Image 76 : Observation en lumière traversante
125
DUPREZ Elena, Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban, Mémoire de l’IFROA, 1987.p.16 126 Pernety : dico p.LXXXVI
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Un réseau de craquelures d’âge se forme. Les mouvements de la toile, dû aux variations hygrométriques et la perte d’élasticité de la couche picturale ont conjointement provoqué ces craquelures. Ces dernières sont très fines et sont visibles sur l’ensemble du tableau. Image 77 : Réseau de craquelure généralisé
Nous constatons un encrassement général et un jaunissement du vernis qui commencent à altérer la perception des couleurs du tableau.
Image 78 : Encrassement et jaunissement du vernis
Le
vernis
certaines zones.
est
opaque
dans
Ceci est dû à un
désolidarisation entre le vernis et le reste de la couche picturale. L’aspect est donc blanc-jaune, particulièrement visible sur la retouche du coussin.
Image 79 : Déplacage de vernis
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5- Anciennes restaurations Ce tableau a déjà subi une campagne de restauration. La propreté de la toile laisse penser qu’un nettoyage a été pratiqué au cours de son existence. Quatre pièces de renfort sont présentes au dos de la toile. Elles suggèrent la présence probable de lacunes de support à ces endroits. La colle qui les fixe est blanchâtre, et dépasse un peu des pièces. Une goutte d’eau chaude a été appliquée sur l’adhésif, afin de déterminer s’il s’agit d’une colle naturelle, qui gonfle à l’eau, ou d’un adhésif à la cire, sans aucune pénétration d’eau. Après observation, il apparaît que l’eau ne pénètre pas du tout : il s’agit donc d’un adhésif à base de cire. Par ailleurs, lors d’une sollicitation mécanique à la spatule italienne, l’adhésif se Image 80 : Patine et brillance de l’adhésif
patine et devient brillant : cette réaction confirme l’hypothèse
de
l’utilisation
de
la
cire.
Cette
caractéristique rend l’assemblage imperméable et permet un bon maintien lors de variations hygrométriques, mais elle empêche tout retrait par méthode aqueuse. La forme particulière des pièces ne permet pas déterminer la période de la restauration. Cette technique est utilisée depuis la fin du XIXème. Des mastics et des retouches finalisent cet ancien travail. Les retouches ont été faites de manière soigneuse mais elles ont mal vieilli, les couleurs se sont altérées et les mastics ne sont plus à niveau.
Image 81 : Pièces de renfort au dos de la toile
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Lors du remontage de la toile sur le châssis, le format du tableau a été modifié. Les bords de tension originaux sont majoritairement placés sur la face. Pour maintenir la toile sur le châssis, les semences ont été plantées sur l’arrête à cause du manque de toile. Le maintien de l’œuvre est principalement assuré par un papier de bordage débordant et peint.
Image 82 : Ancienne restauration de la couche picturale
Une retouche a été réalisée sur les lacunes et sur le papier de bordage présent sur la face. Un nouveau vernis a été appliqué après la suppression du précèdent.
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Certaines retouches sont visibles à l’œil nu comme nous venons de le voir, mais certaines apparaissent
sensiblement
à
ultraviolette.
Des
plus
zones
la
lumière sombres
apparaissent sous le vernis de restauration, notamment dans le fond et au niveau de la table. Nous préférons parler de retouches et non de repeint car elles semblent se limiter aux lacunes de la couche picturale. L’application de la couleur semble précise et ponctuelle et non pas généralisée sur toute une zone. Au cours de la restauration, nous avons Image 83 : identification des retouches à la lumière ultraviolette
confirmé que ces zones correspondent à une reprise d’usures et de lacunes, un peu débordante. Par ailleurs, des repeints non visibles sous UV, ont été révélés au cours de la suppression du vernis. Ces repeints concernent la zone dextre du drapé bleu et les parties bleues du vase.
Le retrait aisé des repeints et des retouches, avec un mélange de solvants relativement léger, indique que ses interventions ne sont pas très anciennes. Cela corrobore les déductions faites précédemment : certaines interventions datent au plus tôt de la fin du XIXème siècle.
Image 84 : Usures
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Par ailleurs, des usures causées par des nettoyages abusifs ont été découvertes sous le vernis
et
les
repeints.
Ces
usures
sont
majoritairement visibles dans les bleus, les jaunes, le fond et plus modérément dans les carnations. Les crêtes des craquelures ont clairement été abrasées. Plusieurs feuilles du bouquet de fleurs sont très fortement lixiviées.
Image 85 : Usure et lixiviation
De plus, certains empâtements ont été écrasés au cours d’une intervention. Ces altérations sont visibles sur les fleurs bleues.
Image 86 : Empâtements écrasés par une restauration abusive
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Récapitulatif des altérations
Légende Déchirure
Déformations de toile Perte de couche picturale Retouches Papier de bordage peint Repeint et repiquage
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Diagnostic
Le diagnostic est une étape pendant laquelle les altérations sont observées dans leur ensemble. Ainsi, des hypothèses peuvent être émises quant aux raisons de l’état de conservation actuel du tableau. Cette interprétation des altérations qui permettra de mettre au point un protocole de conservation adapté. Dans ce protocole seront comprises les interventions physiques mais aussi environnementales, afin de stopper ou limiter les dégradations. Plusieurs hypothèses, peuvent être émises d’après les observations précédentes. Une chronologie des apparitions aide à la compréhension du vécu de l’œuvre. Au cours de la vie d’une œuvre, cette dernière est soumise à de multiples paramètres qui influencent son état de conservation :
Mauvais stockage Le lieu de stockage est important car son impact sur la longévité de l’œuvre est significatif. Le tableau de mémoire a été conservé dans un endroit plutôt stable en température et en hygrométrie, mais il n’a pas été protégé de la poussière, des projections et des déjections d’insectes. En effet, l’œuvre présente un empoussièrement général sur la face et sur le revers. La poussière s’est accumulée dans l’espace entre la toile et le châssis. Cet amas, provoquant des déformations de la toile, est appelé scrupule. Ce portrait était exposé dans la maison de son propriétaire. Avec les années, le système d’accrochage de l’œuvre a vieilli, et a fini par céder, il y a cinq ans127. Le tableau était positionné au-dessus d’une pendule et s’est empalé sur celle-ci lors de sa chute. Ces informations fournies par le propriétaire permettent de comprendre la présence de cette grande déchirure.
127
Information fournie par le propriétaire.
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De toute évidence, après l’accident, la toile a été stockée en position horizontale ou en appui sur un mur avec la face vers le haut. Cette posture a mené la toile à s’appuyer sur la traverse. En épousant cette dernière, le support s’est déformé et les cuvettes se sont ainsi formées. Vieillissement naturel et physico-chimique Il est normal, après un certain nombre d’années, que des signes de fatigue des matériaux se manifestent. L’œuvre est composée de différents types d’éléments, qui ont chacun une tenue dans le temps différente, et qui s’influencent les uns les autres. Les forces qui s’exercent sur le châssis depuis la remise en tension de la toile, ont commencé à faire courber la traverse centrale du châssis. Ce phénomène s’est également produit à cause du caractère hygroscopique du bois et des variations d’hygrométrie. C’est un phénomène normal pour ce matériau. Ce vieillissement se traduit aussi
par une perte d’élasticité de la toile, un
allongement des fils menant à une perte de tension et un jaunissement du support. Les semences ont rouillé et ont, par ce phénomène, contribué à la perte de tension de la toile. Les mouvements de la toile lors des variations hygrométriques ont provoqué la formation de craquelures sur une couche picturale qui a perdu son élasticité avec le temps. Les zones de carnations présentent globalement des craquelures plus importantes. Cela peut être provoqué par un pigment moins élastique tel que le blanc de plomb. Les déplaquages observés à l’interface encollage/préparation trahissent un appauvrissement de la matière collagénique
et donc une perte d’adhérence. Les
déplaquages à l’interface préparation/couche colorée sont dus à la nature de la préparation et à son vieillissement128. Le vernis a jauni. C’est un phénomène courant pour un vernis naturel de protection. Plus précisément, le vieillissement du vernis se traduit par la formation de groupes chromophores. Leurs structures absorbent les rayonnements ultraviolets et bleu. La matière réfléchit ainsi la couleur complémentaire : le jaune, induisant cette sensation de jaunissement. Ce vieillissement du matériau est dû à l’oxydation de la résine naturelle qu’il
128
Nous expliquons plus en détail ce phénomène dans notre partie scientifique. P.159
95 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
contient, ainsi qu’à l’huile utilisée comme liant de la couche colorée129. Les vernis mis en contact avec des huiles contenant beaucoup d’acides gras très insaturés, sont ceux qui vont jaunir le plus130. Le vernis se désolidarise de la couche picturale et forme des cloques à la surface. Cette réaction est probablement due à un problème de mise en œuvre au moment de l’application ou à une fragilisation au cours du temps. Altérations liées à une ancienne restauration : D’après l’observation de l’œuvre, au moins deux campagnes de restauration ont été effectuées jusqu’à aujourd’hui. Ces restaurations impliquent une modification volontaire de la stratigraphie d’origine de l’œuvre, il sera donc qualifié de facteur humain. Il est difficile de dire avec certitude quelle a été la chronologie des interventions de restauration. Il est probable que les empiècements au dos de l’œuvre proviennent de la même campagne de restauration que les retouches et les zones de repiquage, ainsi que l’actuel vernis et le châssis. Etant la restauration la plus soigneuse, il est probable qu’elle soit la dernière en date. Une ou plusieurs autres restaurations ont été pratiquées. Des nettoyages abusifs ont causé la perte de glacis qui rendaient probablement des zones du tableau plus fines et les arêtes des craquelures sont clairement abrasées. Cela est dû à l’usage d’un solvant trop fort mais surtout à des frottements trop insistants. Ces multiples interventions ont créé des déséquilibres à plusieurs niveaux de la stratigraphie. En effet, le faible maintien de la toile, à l’aide de semences posées de manière irrégulière, a créé une perte de tension qui a entrainé la formation de cuvettes. Les pièces de renfort en toile sont trop contraignantes. La stratigraphie ayant commencé à se rééquilibrer en fonction de cet ajout, une déformation du côté de la face de la toile se forme. Cependant, la forme particulière de ces pièces a minimisé ce mouvement, car ces
129
THOURY Mathieu, Identification non-destructive des vernis des œuvres d’art par fluorescence UV, thèse de doctorat de l’université Pierre et Marie Curie, 2006, p.15. 130 « En effet l’oxydation des huiles peut entraîner la création, au sein du réseau tridimensionnel de triglycérides, de cétones conjuguées absorbant fortement dans le bleu. » Ibid..
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dernières ne présentant pas de bords nets, les forces se sont mieux reparties que si leurs bords avaient été droits. Mauvaises manipulations : L’œuvre a subi d’autres dégâts provoqués par la main de l’homme. Les altérations dues aux mauvaises manipulations d’un tableau sont un problème malheureusement récurrent. Les pertes de matière et les griffures sur le châssis en sont les preuves. La toile présente également des déformations, plusieurs déchirures lacunaires et des enfoncements, causés par des chocs divers. Ces mêmes chocs ont provoqué des pertes de matière au niveau de la couche picturale et des griffures sur le vernis.
Pronostic Le pronostic permet de mettre en évidence le niveau d’urgence d’une intervention de conservation et restauration. Les altérations présentées précédemment sont plus ou moins évolutives dans le temps. En effet, si l’œuvre est laissée telle qu’elle est actuellement, la toile effectuera ses mouvements lors des variations hygrométriques, ce qui est normal. Cependant, sa mauvaise tension et sa rupture de continuité provoqueront une augmentation de sa déformation. Les cuvettes vont s’approfondir et les bords de la déchirure vont se rétracter à moyen terme. La couche picturale a perdu de son élasticité en vieillissant. Les mouvements de la toile mal tendue vont augmenter le réseau de craquelures et les pertes de matière au niveau de la déchirure. Par ailleurs, la présence des argiles vertes dans la préparation, risque d’entrainer un important déplaquage, notamment si l’hygrométrie du lieu de stockage augmente beaucoup. Les restaurations présentes sur l’œuvre vont, elles aussi, occasionner des déformations et les retouches, tout comme les repeints, vont devenir réellement gênants pour l’œil du spectateur. Le vernis va continuer à s’oxyder et de fait à perturber la lisibilité de l’œuvre en jaunissant. A long terme, toutes ces évolutions vont fortement altérer la lisibilité au tableau et causer la perte des matériaux constitutifs.
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Nécessité d’intervention L’œuvre présente une importante rupture de continuité du support et une préparation réagissant à l’eau mais elle n’est pas dans un état de précarité justifiant une réelle urgence d’intervention. Si l’œuvre est conservée dans un lieu à température et hygrométrie parfaitement stables, si elle est posée sur une surface plane, face vers le bas, elle ne devrait pas se dégrader de manière alarmante. Ce ne sont cependant pas des méthodes de conservation évidentes, un projet de conservation-restauration doit donc être envisagé assez rapidement. Le constat d’état a prouvé que les multiples altérations rendent l’œuvre difficilement manipulable. De plus sa pérennité est menacée et sa lisibilité est déjà entravée. La perte d’écailles, due à la composition de la préparation, va très vite rendre l’œuvre illisible. Les exigences de conservation présentées précédemment, ne permettent pas au propriétaire d’exposer l’œuvre chez lui et d’en profiter. Le tableau perdrait son utilité première et il n’y a aucun intérêt à risquer de le laisser se dégrader, et de compromettre la transmission de ce patrimoine à des générations futures.
Niveau d’intervention Le code de déontologie et d’éthique du restaurateur (code ECCO)131 indique que « la restauration consiste à intervenir directement sur des biens culturels endommagés ou détériorés dans le but d’en faciliter la lecture tout en respectant autant que possible leur intégrité esthétique, historique et physique »132. La restauration proposée visera en tout premier lieu la stabilisation et le rétablissement de la pérennité et de la lisibilité de l’œuvre. Chaque opération sera justifiée et nécessaire. Le but n’est ni de la laisser se détériorer, ni d’effacer toute trace du passage du temps. L’authenticité sera conservée autant que possible133, mais cela ne se fera pas au détriment de la sauvegarde de l’œuvre.
131
ECCO : Confédération Européenne des Organisations de Conservateurs-Restaurateurs. Code ECCO : http://www.ffcr.fr/files/pdf%20permanent/textes%20reference%20ecco.pdf. P. 2 133 ROUDET L., L’intervention minimale en conservation-restauration des biens culturels : exploration d’une notion, Mémoire de Master en Conservation-Restauration, Université Paris I PanthéonSorbonne, 2007, p. 3 132
98 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cahier des charges
Le cahier des charges est la mise au clair des besoins et des contraintes que l’œuvre nous impose dans le cadre de sa restauration. Il donne les bases d’une proposition de traitement adaptée et réfléchie. Ces bases vont prendre en compte les matériaux constitutifs de l’œuvre, leur état de dégradation, ainsi que la réversibilité des interventions et des matériaux. La toxicité pour le restaurateur des produits employés est un paramètre dont il faut aussi tenir compte. Les matériaux utilisés doivent donc être réversibles, stables dans le temps et de préférence, non toxiques. De plus, la restauration a des conséquences sur la stratigraphie de l’œuvre ainsi que sur la structure chimique des matériaux. Il est important d’intervenir avec prudence, réflexion et de travailler de la manière la plus minimaliste possible.
Conditions futures de conservation de l’œuvre Le choix des matériaux et des techniques de conservation-restauration doit prendre en compte le futur lieu de conservation de l’œuvre. Celle-ci retournera chez son propriétaire, dans une maison privée. Les conditions environnementales seront variables. Des changements de température et d’hygrométrie sont à prévoir, toutefois sans être trop alarmants. La maison étant habitée toute l’année, les fluctuations seront atténuées. Malgré tout, la température, l’humidité relative et l’intensité d’exposition à la lumière ne seront pas contrôlés. Les matériaux employés devront donc être relativement stables afin de supporter ces conditions dans le temps. Contraintes imposées par l’œuvre : Grâce à nos observations lors du constat d’état, il est apparu que l’œuvre présente différentes problématiques de restauration.
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L’une des exigences des propriétaires est la conservation du format actuel de l’œuvre. Disposant d’un cadre correspondant à ces dimensions, ils ne souhaitent pas de modification des dimensions du châssis. Par ailleurs, la stabilisation de la dégradation de la préparation est urgente et est nécessaire pour la suite des opérations. En effet, l’état actuel du tableau limite sa manipulation et empêche l’emploi de matériaux aqueux. Cela limite grandement les techniques possibles d’intervention. L’opération visant à rétablir la cohésion et à isoler la préparation de l’humidité devra être réalisée très rapidement. Cela évitera de mettre inutilement l’œuvre en danger. La toile est aussi un matériau naturel et hygroscopique, il faut donc être prudent quant à l’utilisation de techniques aqueuses de restauration. Néanmoins, la toile ne présente pas d’altération laissant présager une grande sensibilité à l’humidité et les fils ne se dilatent pas de manière alarmante lors de leur immersion. Nous estimons donc que l’œuvre supportera l’emploi de solvants aqueux, tant qu’ils ne pénétrent pas en grande quantité dans la couche picturale. La couche picturale devra être décrassée et le vernis sera allégé ou supprimé avec des solvants adaptés qui seront déterminés lors de protocole de nettoyage et d’allègement de vernis. Il en sera de même pour la suppression des anciennes retouches. Une fois que l’œuvre aura retrouvé ses couleurs et ses contrastes d’antan, des retouches et un vernis protecteur devra être appliqué à la fin de la restauration. Il est nécessaire puisque le temps d’exposition de l’œuvre à la lumière ne sera pas contrôlé. Matériaux privilégiés : Le choix des matériaux de restauration a un impact sur la conservation de l’œuvre. Le futur lieu de conservation est à prendre en compte : si ce lieu est hygrométriquement stable, tous les matériaux de conservation ajoutés à l’œuvre peuvent être utilisés ; si au contraire, l’œuvre retourne dans une église par exemple, il n’est pas judicieux d’utiliser des adhésifs naturels (risque de moisissures et d’affaiblissement des matériaux). Dans le cas du tableau, le lieu de conservation ne sera pas parfaitement stable mais sera tout de même régulé. Les matériaux employés pourraient donc être naturels comme synthétiques.
100 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
L’âge de l’œuvre et la compatibilité des matériaux de conservation avec les matériaux constitutifs sont aussi des critères à considérer. Cependant, certaines contre-indications quant aux matériaux aqueux sont à prendre en compte. La présence de matériaux très hygroscopiques très sensible dans la préparation ne nous laisse pas le choix. Les interventions importantes qui seront effectuées sur l’œuvre seront nécessairement réalisées à l’aide de matériaux synthétiques. La décision de réaliser une imprégnation avec un adhésif vinylique peut paraitre invasive. En effet, l’adhésif sera introduit au plus profond de la stratigraphie et il ne sera pas réversible. Habituellement, dans ce type d’intervention, un adhésif naturel est privilégié pour sa compatibilité avec les matériaux constitutifs de l’œuvre. Cependant, cette méthode aurait un effet désastreux sur le tableau et créerait probablement une transposition. Prendre ce risque n’est pas envisageable. Malgré cela, une fois cette opération faite, les techniques aqueuses pourrons être utilisées, si elles s’avèrent adéquates. Toutefois, les adhésifs synthétiques seront privilégiés pour les opérations principales.
101 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Proposition de traitement La proposition de traitement est l’étape au cours de laquelle, le restaurateur réfléchit aux interventions les plus adaptées pour l’œuvre et propose une solution. Cette solution est justifiée, argumentée et organisée en fonction des altérations énumérées précédemment. Il sert de base à la pratique et permet de donner un ordre précis aux différentes interventions. Suite à la découverte de la sensibilité de la préparation à l’eau, la proposition de traitement a été reprise134. Les interventions n’étaient plus du tout adaptées et risquaient de mettre l’œuvre en péril. La nouvelle proposition de traitement aura, dans l’ensemble, les mêmes buts que précédemment, mais elle sera réalisée avec des techniques et des matériaux différents. Les premières étapes sont celles qui ont été effectuées avant la découverte de cette préparation.
I.
Démontage de l’œuvre du châssis :
L’œuvre devra être démontée de son châssis. L’état de l’œuvre exige un rétablissement de la planéité et de la continuité du support. Or, pour cela, la toile doit être entièrement accessible. Cette opération se déroulera en plusieurs étapes : maintien de la déchirure, un dépoussiérage léger, une pose de facing dans les zones à risque, suppression du papier de bordage, suppression des semences et pose du tableau sur un fond. Un léger dépoussiérage à l’aspirateur et avec une brosse douce permettra de ne pas fixer la poussière sur l’œuvre lors de la pose de facing. Cette méthode est plus légère qu’un nettoyage qui risquerait d’entrainer une perte d’écailles. Le facing sera posé dans les zones de fragilités de couche picturale de l’œuvre. Une protection complète ne sera pas nécessaire, la couche picturale semble suffisamment
134
Comme décrit plus tard dans le rapport d’intervention, la découverte de cette réaction a été faite lors de la suppression des papiers de protection locaux.
102 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
cohésive pour supporter une dépose. Le papier de protection local sera un papier Japon (faible retrait au séchage) et sera collé avec un adhésif naturel (colle de pâte). Afin d’accéder aux semences qui maintiennent l’œuvre sur son châssis, le papier de bordage devra être retiré. Les tests réalisés montrent que l’adhésif se réactive à l’eau, il sera donc aisé de supprimer le papier mécaniquement à la spatule et en réactivant l’adhésif. Les semences seront par la suite retirées à l’aide d’un ôte semence. L’oxydation des semences peut rendre difficile leur retrait total. Il sera néanmoins important de les retirer afin d’éviter les problèmes de gêne au moment du remontage de l’œuvre et les problèmes de conservation. Le châssis sera conservé dans de bonnes conditions dans le but de sa réutilisation. La toile sera déposée sur un fond en bois ou en contreplaqué, permettant une manipulation sans danger et une conservation à plat.
Suppression des pièces de renfort et de l’adhésif
Comme signalé dans le constat d’état, les pièces de renfort sont contraignantes. Elles créent localement une surépaisseur importante. Elles présentent donc une gêne pour la suite des opérations, les laisser entrainerait un déséquilibre mécanique et une gêne visuelle. Le fait qu’elles soient fixées avec un adhésif de nature cireuse, pose également un problème. Des tests de retrait ont montré que l’adhésif est cassant et ne résiste pas à des sollicitations mécaniques. Cependant, cet adhésif cireux pose un problème pour le retrait des résidus sur la toile. Les laisser n’est pas envisageable, ils rendent une partie de la toile hydrophobe135 et cela risque d’engendrer des problèmes inutiles. La majeure partie de la cire sera supprimée avec une action mécanique, mais de manière très superficielle étant donné la friabilité de la toile. Des tests seront réalisés afin de déterminer quelle est la meilleure méthode pour supprimer les résidus les plus profonds.
135
La cire ne se réactive pas à l’eau, de plus elle bouche les pores des matériaux constitutifs. Elle provoquera une barrière locale lors des opérations comportant des adhésifs aqueux. BERGER, (Gustave.A), ZELIGER, (Harold I.), Wax Impregnation of cellulose : an irreversible process, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , Greenwich, 1974. P.27.
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C’est après la suppression des papiers de protection locaux que la proposition de traitement a été reprise. Voici la partie rectifiée :
II.
Mise en tension de l’œuvre : rétablissement de la planéité Nettoyer le revers de la toile 136 Avant de réaliser des opérations plus importantes, le revers devra être nettoyé. Il
est important d’offrir une base la plus saine possible aux opérations de support. Laisser la poussière lors d’une imprégnation ou d’un doublage entrainerait sa pénétration et sa fixation au sein de la stratigraphie. Ces particules pourraient par la suite entrainer des fragilités au sein des matériaux. La friabilité de la toile ne permet pas un nettoyage avec des méthodes sèches tel que la gomme Wishab, qui est relativement abrasive. Un gommage risquerait d’augmenter la faiblesse de la toile en lui retirant de la matière. L’emploi de l’eau liquide est trop dangereux, et l’utilisation d’un autre solvant avec un bâtonnet ouaté impliquerait trop d’abrasion. Nous testerons donc des gels de solvants. Dans le cas des gels à l’eau déminéralisée, un gel trop liquide posé sur la toile entrainerait un apport d’eau trop important ou une action mécanique inutile pour le retirer de la toile. Les gal d’agar-agar137 et de Klucel G138 sont testés. Le gel d’Agar-Agar à 3% est le plus adapté à la situation.
Résorber les déformations au maximum
Les déformations de l’œuvre risquent de gêner le rétablissement de la continuité de la toile, notamment au niveau des bords de la déchirure. Afin réaliser un pontage correcte, cette déformation devra être grandement diminuée, voire, idéalement, complètement résorbée.
136
Choix et tests décrits dans l’Annexe 1 Le gel d’agar-agar est régulièrement utilisé pour le nettoyage des peintures sensibles à l’eau comme les Thang-kas par exemple. DAUCHEZ (Anne-Cécile), Approche comparative des colles d’algues Funori et JunFunori ®, CeROArt [Online], 8 | 2012, Online since 11 November 2012. URL : http://ceroart.revues.org/2865 138 GABRIAC (Patricia), Etude et restauration de la partie peinte d’un thang-ka tibétain du musée national des arts asiatiques – Guimet, Mémoire IFROA, 1997.p.181 137
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Dans ce but, l’humidité déjà présente dans la toile après la pose du gel peut être utilisée. Une fois le gel retiré de la surface, un buvard et un poids pourront être appliqués sur la zone encore humide. C’est une solution assez contraignante pour l’œuvre, mais elle n’induit pas une seconde humidification. Cela minimisera les risques de détérioration des argiles et de la préparation, mais permettra aussi d’éviter le gondolement de l’œuvre non maintenue, lors du séchage. L’utilisation de la table aspirante à ce stade impliquerait un démontage de l’œuvre de son fond et une dépose sur la table et une humidité homogène (ce qui ne sera pas le cas). Déplacer inutilement et contraindre une toile cassante déjà partiellement sèche, seraient plus dangereux que d’appliquer une masse au fur et à mesure. Le tableau n’étant pas empâté, cette méthode ne risque pas d’écraser la peinture.
Le pontage provisoire
Le pontage est une technique de renforcement localisé, qui a pour but de seconder ou de remplacer les fils rompus. Ici, il permettra de maintenir au mieux la déchirure, lors des opérations de mise en tension qui vont suivre. Si la déchirure n’est pas maintenue de manière adéquate, elle risque de s’ouvrir davantage, ou bien de créer des déformations supplémentaires. Les fils seront imprégnés d’adhésif et seront posés sur la toile dans le frais. Cette méthode permet une bonne adhérence malgré un apport d’adhésif moindre139. Pour le bon fonctionnement de cette technique, les matériaux doivent être assez élastiques140 pour ne pas contraindre localement le support dans ses mouvements141. Ils doivent cependant être
139
KAPUSCIAK (Maxime), Le traitement des déchirures d’œuvres peintes sur support toile, Mémoire La Cambre, 2007, p.85 140 « Les métaux se déforment différemment en fonction de la contrainte qui leur est appliquée. Il existe deux régimes : le régime élastique et le régime plastique. Les solides élastiques ont la particularité de se déformer de façon réversible. […] Cependant, si cette déformation n’est pas réversible et qu’un allongement résiduel subsiste après la suppression de la contrainte, on parle de déformation plastique.» http://mompiou.free.fr/pages/elasticite-fr.html 141 ROCHE (Alain), La conservation des peintures modernes et contemporaines, CNRS, Paris.p.27. « Dans un matériau composite, c’est l’élément possédant la rigidité la plus importante qui impose son comportement aux autres constituants ».
105 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
suffisamment résistants pour maintenir la déchirure et ne pas se rompre lors de ces mêmes mouvements142. Les matériaux qui sont choisis ici seront les mêmes que pour le pontage permanent. C’est un choix à faire rigoureusement car ce sont des matériaux qui remonteront143 sur l’œuvre après la restauration. Le choix s’est porté sur les fils d’Origam®. Ils sont réputés pour leur finesse et leur résistance144. Les fils étant très fins, ils ne créeront pas de surépaisseur et par conséquent, ne devraient pas marquer la toile avec le temps. Par ailleurs, lors de très fortes contraintes, c’est le fil d’Origam® qui rompt en premier et en son centre145, ménageant ainsi les matériaux d’origine. L’adhésif choisi est régulièrement utilisé dans ce cas de figure : il s’agit du Plextol® B500146, épaissi à la Tylose®MH300P147. En effet, cet adhésif est très souple148 et peu pénétrant149. Par ailleurs, comme souhaité, sa souplesse et son adhésivité indiquent qu’il devrait suivre les mouvements de la toile sans se rompre. L’autre raison de ce choix est l’emploi par la suite de Plextol® B500, lors du renfort général de support. Cela garantit une unité des matériaux utilisés. L’épaississant choisi (Tylose® MH 300P) est intéressant car il diminue la toxicité du mélange et augmente sa réversibilité150, tout en étant suffisamment résistant pour ce rôle.
142
DEPARDIEU C, Evaluation et comparaison de la résistance des collages par fil-à-fil de la déchirure de toile, Mémoire INP, 2011. p.112 143 Rééquilibrèrent des forces 144 CANDE L., Etude comparative de la résistance à la rupture de différents fils utilisés lors du traitement de pontage, Mémoire de fin d’étude Condé, 2015, p.74 145 Ibid. p.76. LOUVIERS (Alexandra), « Etude de l’influence de la structure des pontages, Origam® et Plextol® B500 épaissi au xylène, sur la résistance à la rupture », Mémoire de Condé, 2015.p169 146 Fiche technique Plextol® B500 p.270 147
ROCHE (Alain), Approche du principe de réversibilité des doublages de peintures sur toile, Studies in Conservation, n° 2, vol 48, 2003, p. 83-94. 148
D’HAENENS (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, CeROArt [Online], EGG 3 | 2013, Online since 11 May 2013. URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3082 149 MARTEL (Thiery), Pénétration capillaire des adhésifs dans un matériau poreux de type plâtre, mémoire IFROA 1993. p. 99 150 ROCHE (Alain), Op.cit. .88
106 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Même s’il ne s’agit que d’un pontage provisoire, les fils doivent être bien placés afin de rétablir au mieux la continuité et ne pas créer de déformation lors des opérations de mise en tension.
Toile Fil de pontage et adhésif
Image 87 : Schéma du pontage proposé
Les fils de renfort seront fixés perpendiculairement à la déchirure et seront placés entres les fils rompus. Les placer sur l’arête des fils de toile créeraient inutilement une surépaisseur. Les placer tous au même niveau augmenterait le risque d’apparition de déformations sur la face151. Il est donc recommandé de les placer en décalé les uns par rapport aux autres. Ce pontage est considéré comme provisoire car il sera durement mis à l’épreuve lors des prochaines opérations et il est fort probable que certains fils se cassent ou de déforment.
Poser les bandes de tension en intissé épais Les bandes de tension sont les éléments qui vont maintenir l’œuvre en tension pour
les opérations suivantes. Elles seront collées sur la face des bords de tension de la toile. De cette manière, l’intégralité du revers sera accessible. Les bandes de tension seront composées d’un intissé épais (70g/m2). L’intissé épais est très utile dans ce type d’intervention car il est rigide. Sa souplesse n’entravera pas la remise en tension du tableau sur bâti, contrairement à d’autres tissus. Les bandes seront collées sur la toile avec du Plextol B500® épaissi au xylène. Cet adhésif est à nouveau
151
LOUVIERS (Alexandra), Etude de l’influence de la structure des pontages, Origam® et Plextol®B500 épaissit au Xylène, sur la résistance à la rupture. Mémoire Condé, 2015.
107 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
sélectionné en raison de sa bonne adhérence, de sa transparence et dans un souci de cohérence des matériaux de conservation152. La question de la pose du Plextol B500® dans le frais ou par réactivation à la chaleur s’est posée. L’application dans le frais a l’avantage d’être plus rapide que la réactivation à la chaleur, mais l’adhésif risque d’être trop souple lors de la mise en tension. De plus, il pénètre plus profondément dans la toile et il est donc plus difficile à supprimer. L’adhésif sera appliqué en plusieurs couches sur la bande au préalable, afin de créer une épaisseur suffisante pour une bonne accroche. La bande sera ensuite positionnée sur la toile et l’adhésif sera réactivé à la chaleur.
Mise en tension sur bâti
Une fois les bandes fixées, la mise en tension sera possible. A ce stade, la tension appliquée sera très légère. La face de l’œuvre n’étant pas protégée, il serait dangereux d’exercer une tension trop importante, cela serait inutile et pourrait entrainer une perte de matière. Par ailleurs, cette mise en tension, est précisément destinée à permettre la pose des papiers de protection. Les bandes seront agrafées sur toute la périphérie du bâti Staro®. Les agrafes permettent un maintien uniforme et efficace. La tension de la toile devra être homogène pour permettre le rétablissement de la planéité et éviter de créer des contraintes et des déformations.
Poser deux papiers Bolloré de protection et de maintien sur la face du tableau, à la Tylose
Deux papiers Bolloré153 seront appliqués sur la face du tableau afin de le protéger lors des opérations qui vont suivre. La double épaisseur va aussi permettre un maintien et légèrement rigidifier l’ensemble. Par ailleurs, le papier Bolloré ayant un sens de rétraction, nous allons placer les deux feuilles l’une perpendiculairement à l’autre, afin de ne pas créer de déséquilibre (le retrait se fera dans les deux directions).
152
Nous évitons de multiplier les matériaux dans un souci de faciliter le travail du prochain restaurateur mais également pour éviter une possible réaction entre les matériaux dans le temps. Même si cela est peu probable, il n’est pas nécessaire de prendre ce risque. 153 C’est un mélange de chanvre de Manille, de pulpe de papier décolorée et de polyaminoépichloridrine. Il est résistant à l’eau. Source : https://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=2354
108 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le choix de l’adhésif est également important à cette étape. Le cahier des charges est le suivant : o
éviter l’eau liquide
o
avoir une évaporation rapide
o
être réversible sans mettre en danger l’œuvre
o
offrir un maintien suffisant pour que la protection de surface joue son rôle
La majorité des adhésifs, qui sont employés pour ce type d’opération, contiennent de l’eau. Connaissant la sensibilité de la préparation à ce solvant, une pénétration d’eau trop importante la mettrait en danger. Toutefois, certains adhésifs peuvent être employés sous forme de gel. C’est une option intéressante car cela limiterait l’apport d’eau à la surface et surtout au niveau de la préparation. La méthylcellulose154 ou la Tylose MH 300155 semblent être utilisables dans le cas présent. Leur maintien sera suffisant dans le cadre de cette opération. Par ailleurs, la suppression des résidus d’adhésifs se fera facilement à l’eau. D’autres gels peuvent être utilisés en restauration, tels que la Klucel G156. Il peut être épaissi avec des solvants plus volatils que l’eau, tels que l’éthanol et l’acétone, mais il serait dangereux de les employer sur une couche picturale. De plus, même à l’eau, la Klucel est pénétrante et laisse un résidu satiné. Un refixage à ce stade n’est pas intéressant et créerait même un mélange d’adhésifs au moment de l’imprégnation. Nous utiliserons donc un gel de Tylose à une viscosité suffisante pour éviter une trop forte pénétration dans l’ensemble dans la stratigraphie. III.
Traitement des argiles157 L’étape de l’imprégnation est l’une des plus importantes dans le traitement de
l’œuvre de mémoire. Comme signalé dans le constat d’état, la préparation rouge contient des argiles gonflantes, qui provoquent une sensibilité dangereuse à l’eau. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de prendre le risque de poursuivre notre restauration sans avoir 154
La méthylcellulose est un éther de cellulose. Feller R.L., Wilt M. , Evaluation of cellulose ether for conservation, The Getty conservation institute, 1990. 155 La tylose ou Methylhydroxyethylcellulose est un éther de cellulose. Feller R.L., Wilt M. , Evaluation of cellulose ether for conservation, The Getty conservation institute, 1990. 156 Résine synthétique composée d’hydroxypropylcellulose 157 Une étude plus approfondie du sujet est faite dans la partie scientifique du mémoire p.159 et dans
l’annexe n°2 p.214 109 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
stabilisé au préalable la couche de préparation. Une trop haute hygrométrie ou un traitement contenant de l’eau liquide provoqueraient un écaillage inquiétant158 voire une transposition. L’imprégnation aura donc pour rôle d’englober les molécules d’argiles gonflantes, afin de les isoler de l’humidité. Elle permettra aussi de restituer un liant à une couche devenu trop poreuse avec le temps. Cette intervention jouera donc les rôles de consolidation, de stabilisation et de refixage159. Après une analyse du cahier des charges et des différents adhésifs potentiellement utilisables160, c’est le Plexisol P550 qui nous a semblé être le plus adapté. Il sera appliqué au spalter en plusieurs passages puis l’œuvre sera placée sur table à basse pression.
IV.
Assainissement de la couche picturale161
La réalisation du nettoyage, à ce stade, va permettre de vérifier la bonne adhérence de la couche picturale après le refixage. Si elle n’est pas satisfaisante, le revers sera toujours accessible et il sera facile de l’imprégner à nouveau. Le protocole de nettoyage a pour but de déterminer quelle sera la technique la plus adaptée pour redonner sa lisibilité à l’œuvre. Dans le cas de l’œuvre de mémoire, ce rétablissement de l’harmonie visuelle se fera en plusieurs étapes : la suppression de la couche de crasse, le retrait de la couche de vernis oxydé puis la suppression des anciennes restaurations. Le décrassage est l’étape où toute la crasse incrustée à la surface du vernis est retirée. Cette phase permet de nettoyer toutes les impuretés qui gênent la lisibilité de l’œuvre. L’eau tiède est le solvant qui semble être le plus adapté, pour réaliser cette opération. Le décrassage offrira une surface dégagée et plus saine pour le dévernissage.
158
VIGUERIE, Approche de la stabilité à l’humidité de trois argiles pouvant être contenues dans les pigments constitutifs des préparations colorées, Mémoire IFROA, 1997.p.125 159 BOURNET-BECDELIEVRE, Natalie (de), Approche théorique du refixage, Mémoire IFROA, 1979.p.39 à 41 160 Annexe 2 : Choix de l’adhésif de consolidation p.214 161 Argumentation Annexe 3 : Protocol d’assainissement de la couche picturale p.217
110 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Il a été signalé dans le rapport d’altérations que le vernis est légèrement jauni. Cette oxydation n’est pas alarmante, cependant, le vernis recouvre d’anciennes restaurations qui sont à retirer, il sera donc supprimé. Cela se fera à l’aide d’un mélange de solvants : 20% d’éthanol dans 80% de cyclohexane. La suppression de certains mastics et retouches est nécessaire. Ils présentent un risque de déformation au cours des opérations de rétablissement de la planéité. Mais, ils sont avant tout, une gêne optique qui contrariera le retour de la lisibilité de l’œuvre. Nous établirons un protocole de suppression des retouches afin d’utiliser un solvant adapté. Puis, nous testerons la solubilité des mastics, s’ils demeurent trop rigides, nous les supprimerons mécaniquement à l’aide d’un scalpel neuf.
V.
Renfort général du support Réalisation d’incrustations dans les zones le nécessitant
Les interventions précédentes, notamment l’imprégnation, auront probablement grandement éprouvé la résistance du pontage temporaire. Il sera donc retiré, intégralement ou partiellement. Pour cela, l’œuvre sera détendue ou entièrement déposée sur un fond. Avant de réaliser le pontage définitif, des incrustations devront être réalisées dans les zones de manque de toile. Ces zones de manque étant retreintes, nous réaliserons probablement des amalgames de fibres de toile et de Plextol B500®. L’avantage de cette méthode sur une incrustation avec un fragment de toile, est sa rapidité. Par ailleurs, une incrustation sur des zones aussi petites sera difficile à réaliser et à positionner correctement. Cet amalgame sera très souple et, de par sa composition de fibres de lin, suivra les mouvements naturels de la toile d’origine. Les zones telles que la déchirure, ne présentant qu’un faible écartement, le manque sera donc comblé avec un fil de lin, et dans l’idéal un fil provenant de la toile d’origine. Ces deux types d’incrustations seront maintenus en place par l’adhésif mais aussi par le pontage.
111 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Réaliser le pontage permanent
Le pontage sera intégralement refait avec les mêmes matériaux que pour le pontage provisoire.
Rétablissement de la planéité et remise en tension de l’œuvre
La mise sur bâti Si au cours de la restauration l’œuvre de mémoire a retrouvé une bonne planéité, elle sera simplement mise en tension sur le bâti Staro® avant d’être doublée. Si au contraire, la planéité n’est pas parfaite, une opération d’aplanissement sera nécessaire avant l’opération de renfort général. Passage en chambre humide La chambre humide est un environnement volontairement saturé en humidité, qui est maitrisée. Cette humidité va permettre de jouer sur la capacité de dilatation ou de retrait de la stratigraphie. L’avantage est que l’eau reste à l’état gazeux et n’impose pas une contrainte sur la stratigraphie, elle s’organise en fonction de ses mouvements naturels. Au cours de cette opération, la toile est maintenue en tension relative sur un bâti. Cet ensemble permet de résorber les déformations. Le cartonnage Le cartonnage assurerait un bon rétablissement de la planéité avant le doublage. Certaines petites déformations subsistent et devront être mises à plat avant l’opération finale de support. De plus, la déchirure étant très importante, elle devra être parfaitement plane au moment du doublage. Le cartonnage rétablira au mieux la planéité et garantira un meilleur maintien de la déchirure lors du doublage. Si cela est nécessaire, il sera fait dans un premier temps avec un papier Bolloré® puis un intissé sera également fixé sur la face. Cette épaisseur d’intissé162 sera coupée dans des
162
ROCHE (Alain), La conservation des peintures modernes et contemporaine, propriété des matériaux, p.32 « Les non-tissés, à l’image des papiers, sont constitués d’une nappe de fibres synthétiques. Ils sont enduits d’une préparation vinylique ou acrylique blanche. »
112 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
dimensions bien supérieures à celles du tableau, afin de servir par la suite de bandes de tension sur le bâti. L’adhésif qui permettra le maintien du papier sur la peinture est à choisir. La Tylose utilisée précédemment ne sera pas suffisamment adhérente pour ce type de d’opération.
Diluant
Tylose
Klucel G
Eau
Eau,
Colle de pâte éthanol, Eau
acétone Adhérence Suppression résidus
+
+++
+++
des Facilement avec un Facilement avec un Facilement avec un coton ou une petite coton ou une petite coton ou une petite éponge humide
éponge humide
Vitesse
Vitesse
En
d’évaporation
d’évaporation
fonction
éponge humide du Vitesse
de solvant
d’évaporation
l’eau Remarques
Manque
de
l’eau -
d’adhérence
Joue aussi un Risque
de
rôle
et
de pénétration
consolidant mais matériaux utilisation
différents de ceux
déconseillée
à utilisé
utiliser
la présent
sur
très
jusqu’à
face car mat -
Risque
de
pénétration
La Klucel G® ne pourra être diluée dans autre chose que de l’eau en raison de la sensibilité de la couche colorée à l’éthanol et à l’acétone. La Klucel®G toutefois, limitera d’avantage la pénétration d’eau que la colle de pâte. La décision sera, malgré tout, prise suite à des tests réalisés au préalable. La réalisation d’un cartonnage permettrait un meilleur maintien de l’œuvre au cours du doublage, mais si elle est parfaitement plane cela ne sera pas nécessaire. 113 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La décision du degré d’intervention sera prise en fonction des réactions de l’œuvre au cours des traitements. Si une intervention est nécessaire nous privilégierons la chambre humide qui est moins invasive que le cartonnage.
le doublage 163
Une fois la continuité et la planéité rétablies, il est important de maintenir l’ensemble dans cette position par un renfort généralisé. Comme nous l’avons signalé dans le cahier des charges, la taille de la déchirure (108cm) ne permet pas un renfort uniquement localisé. Le doublage est le renfort général qui a semblé le plus adapté à l’œuvre étudiée. Il sera réalisé au Plextol B500® épaissi au Xylène, grâce à une toile Sailcloth®. L’adhésif sera réactivé au solvant puis à la chaleur, selon les préconisations de nos professeurs. La proposition faite au propriétaire, concernant le doublage aveugle, a été retenue.
Mise en tension de l’ensemble sur le châssis
Une fois le renfort fait, l’œuvre peut être remise en tension sur son châssis. Malgré le fait que ce châssis soit trop grand pour l’œuvre, le propriétaire a bien spécifié sa volonté de conserver l’œuvre aux dimensions d’avant restauration. L’œuvre est maintenue dans son format augmenté. Déontologiquement parlant, il aurait été probablement préférable de remettre l’œuvre aux dimensions qui lui sont adaptées. Cependant, cette opération ne met nullement l’œuvre en péril et aucune partie d’origine ne sera endommagée ou perdue. L’intervention est faite avec des matériaux réversibles. La remise en tension sera réalisée à l’aide d’agrafes. Elles ont l’avantage de ne pas trop fragiliser le châssis qui, nous le rappelons, a déjà maintenu l’œuvre avant cette restauration. Ce châssis offre encore une bonne résistance et une bonne planéité, mais des trous de semences sont déjà présents sur la périphérie. Remonter l’œuvre sur le châssis, à l’aide de semences, le fragiliserait et offrirait un moins bon maintien. Les agrafes ne se maintiennent qu’avec deux petites perforations au lieu d’une grosse. De plus, leur maintien en deux points permet une tension plus large et donc plus homogène de la toile.
163
Argumentation et prise de décision détaillées dans l’Annexe 4
114 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le seul désavantage est d’ordre esthétique. Une toile tendue avec des semences est plus belle et semble plus authentique qu’avec des agrafes. Cependant, l’application d’un papier de bordage est plus que probable, cette question esthétique ne se pose donc pas. La mise en tension se fera de manière traditionnelle : trois agrafes seront placées au milieu de chaque montant. Les agrafes sont ensuite fixées du centre vers les extrémités, une par une en restant toujours symétrique. Cette méthode facilite une tension homogène, relativement rectiligne et diminue le risque d’un important déséquilibre, entraînant des déformations164. VI.
Retour à une homogénéité esthétique de l’œuvre Pose d’un papier de bordage
Le papier de bordage est avant tout un élément esthétique. Il permet de recouvrir les bords de l’œuvre qui sont souvent marqués par la restauration et les anciens montages. Dans le cas de cette œuvre, le doublage étant réalisé avec une toile très inesthétique, il est préférable de ne pas laisser les bords apparent. Cela évitera également une dissonance entre les bords de tension et la toile de doublage aveugle. Par ailleurs, le bordage a un rôle de soutien165 et de protection pour les agrafes. L’œuvre retournant dans un cadre, il protège également les bords des frottements et de la poussière.
Mastics
La mise à niveau dans les zones lacunaires de couche picturale, est très importante pour le retour d’une bonne lisibilité de l’œuvre. Malgré une couleur parfaite, si la retouche n’est pas au même niveau que la couche colorée, elle sera immédiatement détectable. Nous compenserons donc ce manque de matière par l’application d’un mastic. Il arrive couramment que les mastics de restauration soient teintés en fonction de la couleur de la préparation d’origine. Pour des raisons d’identification des retouches, nous ne souhaitons pas réaliser un mastic ocre brun-rouge. Il sera aussi plus aisé pour le restaurateur futur de différencier la préparation d’origine des mastics de restauration. De plus, nous ne
164
DE LANGLAIS (Xavier), « La technique de la peinture à l’huile », Flammarion, 1959, p.99 MONTRONE (Angela), Le rôle du papier de bordage dans la tension de toile, mémoire de fin d’étude Ecole de Condé, promotion 2011. P.162 165
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sommes pas certains que le dossier de restauration sera entre ses mains à ce moment. Nous réaliserons donc des mastics de couleur blanche par un souci d’authenticité. La différence de couleur de base sera contrebalancée par une première couche de retouche opaque, de couleur proche de celle de la préparation. La composition du mastic peut être multiple et est à déterminer. Il existe de nombreuses recettes de mastics naturels. Pour ce qui est des mastics synthétiques, le plus utilisé est vendu prêt à l’emploi et se nomme le Modostuc®. Le choix entre le synthétique et le naturel est de nouveau à faire. Le cahier des charges préconise d’obtenir un mastic d’une grande finesse, dans son grain et dans l’épaisseur à appliquer. En effet, la couche colorée étant relativement fine, l’épaisseur du mastic doit être équivalente. De plus, le déplaquage de nombreuses zones s’est fait au sein de la strate de préparation, le mastic devra être d’autant plus fin. Cette finesse sera plus facile à atteindre à l’aide du Modostuc®. Sa réversibilité est bonne et il est facile à travailler. Les deux types de mastics auraient très bien pu être utilisés, cependant, le mastic synthétique permet d’obtenir une plus grande finesse. De plus, la majorité de l’œuvre ayant été restaurée à l’aide de produits synthétiques, il sera plus cohérent de continuer avec même gamme de matériaux.
Vernis intermédiaire166
Le vernis intermédiaire va protéger la couche picturale des opérations de restauration de l’image qui vont suivre. Elle va aussi redonner de la saturation aux couleurs et offrir une bonne base pour la réintégration colorée. Le vernis final sera le même que celui choisi ici. Le choix sera donc fait en tant que vernis intermédiaire et vernis final. Suite à nos réflexions, il s’est porté sur un vernis à base de Regalrez 1094®.
166
Choix détaillé dans l’annexe 5
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Retouche
Déontologie de la retouche La retouche est une étape qui va redonner à l’œuvre son homogénéité visuelle. Le but est d’appliquer une couleur sur la lacune167 qui va permettre de la rendre moins choquante, voire presque invisible aux yeux du spectateur. La difficulté est de déterminer où est l’équilibre entre la lisibilité du sujet et la lisibilité de l’intervention, jusqu’à quel point la restauration doit être différenciable de l’original. Le but de l’intervention est de rétablir une unité et une continuité visuelles au sein de l’image168. Cependant, selon de code ECCO une retouche doit rester détectable à l’œil nu à faible distance169, quel que soit le type de réintégration colorée choisi. Selon Cesare Brandi170 , elle doit être « invisible à la distance où l’œuvre d’art doit être regardée ». Il existe de multiples méthodes de retouche. Elles sont sélectionnées selon la nature de l’œuvre, la taille de la lacune, son ancienneté et son futur lieu de conservation. Le propriétaire est un particulier, il souhaite un retour à une homogénéité générale. L’œuvre n’est pas destinée à être exposée devant un public. La retouche dite archéologique ne conviendrait pas dans ce cadre. L’œuvre n’est pas suffisamment ancienne ni abîmée pour appliquer un simple ton de fond, permettant de bien différencier la restauration de l’original. Une retouche à tratteggio est souvent appliquée sur les fresques ou sur les grandes peintures murales. Elle permet également une bonne visibilité de la lacune pour un œil attentif, tout en la replaçant dans le plan du reste de la composition. Cependant, cette retouche est trop visible pour une œuvre qui sera observée à faible distance. S’offrent également à nous les différentes retouches illusionnistes. Ces retouches peuvent être appliquées de différentes manières : en petit traits, pointilliste (trivariance ou
167
Ségolène Bergeon nous donne une définition de lacune : « Du latin lacuna, le mot lacune désigne un espace vide au sein d’un corps, ce qui signifie l’interruption d’un texte ou d’une image dits alors lacunaires. Bergeon S., Journée d’étude APROA-BRK, Marjan Buyle(ed), Brussel, 2005. P .7 168 FAVRE-FELIX (Michel), Ambiguïtés, erreurs et conséquences : « Rendre l’œuvre lisible », CeROArt [Online], 3 | 2009, Online since 21 April 2009. URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1140 169 BERGEON-LANGLE (Ségolène), Lisibilité et réintégration, dans 5ème Colloque de l’ARAAFU, 2003, p. 122 170 BRANDI (Cesare), Théorie de la restauration, France, Edition du Patrimoine, 2001
117 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
couleurs mélangées), en aplats, en glacis, etc.. Cette retouche est la plus discrète et semble la plus adaptée dans un cadre privé. L’œuvre sera plus appréciée pour sa beauté visuelle que pour ses qualités historiques. Les retouches n’ont donc pas besoin d’être trop visibles. Nous proposons de réaliser une retouche illusionniste en aplats puis pointilliste qui sera très peu visible de loin mais sera parfaitement détectable à plus faible distance. Le liant de retouche Divers liants de retouches peuvent être utilisés dans le cadre de la restauration. Celui-ci devra avoir un poids moléculaire proche de celui de la peinture à l’huile, une brillance équivalente, une tension de surface adaptée aux mélanges avec divers pigments, une bonne saturation, devra pouvoir s’utiliser en couches opaques aussi bien qu’en glacis. Le liant ne devra pas avoir de changement optique au moment du séchage ni plus tard, il devra être réversible, compatible avec l’œuvre et le vernis, stable chimiquement (notamment face aux rayons UV et lors de son vieillissement). Son diluant joue aussi un rôle et ne doit pas mettre l’œuvre en danger, il devra être le moins toxique possible pour le restaurateur. Deux liants couramment employés correspondent particulièrement bien à ce cahier des charges : le Laropal A81® et le liant Berger®. Le Laropal A81® est une résine uréealdéhyde tandis que le Berger® est à base d’acétate de polyvinyle en solution. Ces deux résines ont un poids moléculaire171 et un indice de réfraction, qui sont proches de ceux des résines naturelles telles que le dammar et le mastic. Elles sont donc également proches de ceux du Regalrez 1094®. Le niveau de brillance devrait donc être équivalent et la saturation des couleurs sera bonne dans les deux cas. Les solvants solubilisant le Regalrez 1094® et ceux solubilisant le Laropal A81® et le liant Berger® sont différents. Lors de la retouche, le vernis intermédiaire posé au préalable ne sera pas solubilisé et protégera la couche colorée. Les solvants qui sont utilisés comme diluants sont moins toxiques172 pour le restaurateur que d’autres. De plus, ces résines ont
171
« D’après Feller, un haut poids moléculaire empêche un bon mouillage et un contact intime avec la surface peinte ». EREZIAN (Nouné), Brillant et couleurs des liants de retouches, mémoire de fin d’étude INP, 1994. 172 ELLISON (Rebecca), SMITHEN (Patricia), TURNBULL (Rachel), Mixing and Matching, Approaches to Retouching Painting, London, ICON and BAPCR, 2010 p.96 118 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
un bon pouvoir mouillant, semblent stable dans le temps173, jaunissent très faiblement en vieillissant et permettent de réaliser des tons opaques autant que des glacis174. Les deux liants sont donc équivalents. Nous avons eu l’occasion de pratiquer ces deux techniques au cours de nos expériences professionnelles. La maniabilité du Laropal A81® nous est, à l’heure actuelle, plus agréable. Nous le solubiliserons dans du lactate d’éthyle.
Vernis final Nous utiliserons à nouveau le vernis Regalrez 1094®. Ses qualités ont été décrites
précédemment. Nous faisons de choix d’utiliser le même vernis afin de ne pas multiplier les résines employées. Il sera appliqué à l’aide d’un pulvérisateur Ecospray® afin de ne pas augmenter la brillance de l’œuvre. De plus, cette méthode n’entrainera pas d’action mécanique sur le la surface et n’abîmera pas les retouches. La couche appliquée étant très fine, le vernis pourra être travaillé en plusieurs passages.
173
La stabilité de la résine urée-aldéhyde est d’autant plus satisfaisante si du Tinuvin est ajouté au mélange. LEONARD (Mark), WHITTEN (Jill), GAMBLIN (Robert), RENE De La RIE E., Developpement of new material for retouching, Tradition and innovation : advances in conservation, IIC Melbourn Congress, London, 2000.p.29-33. 174 ELLISON (Rebecca), SMITHEN (Patricia), TURNBULL (Rachel), Mixing and Matching, Approaches to Retouching Painting, Op.Cit. p.96
119 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Rapport d’intervention Après la réalisation de la proposition de traitement, le rapport d’intervention permet de relater le déroulement des interventions choisies. Cependant, certaines réactions de l’œuvre ont conduit à une réadaptation du protocole. L’étude préalable a été réalisée de la manière la plus approfondie possible, néanmoins, la restauration fait couramment découvrir de nouvelles choses sur l’œuvre. Les choix doivent parfois être repensés. I.
Démontage de l’œuvre du châssis :
Maintien temporaire des bords de la déchirure Avant toute manipulation, la déchirure exige un minimum de maintien. En effet, la déchirure en « L » de la toile s’ouvre de manière béante à chaque déplacement de l’œuvre. Nous avons donc décidé de la maintenir au mieux, mais sans contraindre la toile dans ses mouvements naturels. Le choix d’un ruban adhésif à faible adhérence a été retenu, plus
Image 88 : maintien de la déchirure avec des sparadraps micropore
particulièrement le sparadrap micropores175. Il a été placé perpendiculairement à la déchirure, tous les quatre centimètres environ. Dépoussiérage de la face Un léger dépoussiérage de la surface de la peinture a été réalisé à l’aide d’une brosse douce. La brosse permet de rabattre délicatement la poussière superficielle vers un aspirateur réglé à faible puissance.
175
Ce type de ruban est très peu adhésif, ne laisse aucun dépôt et est perméable. Il est donc idéal pour une solution temporaire de maintien des bords d’une déchirure.
120 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Pose de papiers de protection Certaines
zones
de
la
couche
picturale
présentent des fragilités : des lacunes de couche picturale ou des écailles menaçantes.
Nous
avons fait le choix de réaliser un léger refixage à la colle de poisson à 3% dans de l’eau déminéralisée. Les écailles de préparations testées lors de notre constat d’état n’ayant rien Image 89 : papier de protection montré d’inquiétant, l’emploi de l’eau ne semblait pas un problème. La pose du papier dans ces zones fragiles permettait d’éviter la perte d’écailles pendant le démontage. Il était également intéressant mécaniquement lors du refixage. Le papier se dilate à l’humidité et se rétracte en séchant, il permet de plaquer les écailles lors du refixage. Une légère chaleur a ensuite été appliquée avec une spatule chauffante pour assurer l’adhérence. Suppression du papier de bordage Le papier de bordage est préalablement humidifié à l’eau tiède, puis une action mécanique est apportée à l’aide d’une spatule italienne. Cependant, il s’est avéré que certaines zones de la couche picturale, recouvertes par le papier de bordage, ne supportaient ni la traction, même très faible, ni le grattage. Nous avons donc stoppé notre intervention sur ces zones, afin de ne pas prendre le risque de perdre des écailles. Cette fragilité est de toute évidence due à l’utilisation de colle aqueuse lors de la pose du papier. Les papiers jugés dangereux à retirer seront supprimés après le refixage général.
Image 90 : Papier de bordage en cours de suppression
121 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Dépose du tableau Par la suite, les semences ont été retirées grâce à un ôte-semence ou à une pince plate fine. Une fois cette opération réalisée, le châssis a été placé dans un endroit relativement stable176, et à l’abri de la poussière, dans l’attente de sa réutilisation. La toile, quant à elle, a été posée sur une planche de contreplaqué avec un Mélinex® en intermédiaire. Les bords de tension conservaient leur position perpendiculaire même après le démontage, il a donc été nécessaire de les aplanir. L’humidité apportée localement par un coton a permis de relaxer la toile et de l’aplatir délicatement sans risquer de la rompre. L’emploi de la spatule chauffante a complété le Image 91 : Dépoussiérage du revers (vue des amas présents entre le châssis et la toile
rétablissement de la planéité et a permis à l’humidité de mieux circuler entre les fibres et de s’évaporer.
Un dépoussiérage du revers a été réalisé de la même manière que sur la face. L’œuvre a été fixée sur le fond177, revers vers le haut, à l’aide de papiers rigides et d’agrafes. Les papiers ont été disposés tout autour de l’œuvre, les agrafes ont fixé le papier à cet emplacement mais ne devaient pas être plantées dans l’œuvre. De cette manière l’œuvre a pu être déplacée sans glisser du fond, mais demeuraient totalement libre dans ses mouvements.
Image 92 : Dépoussiérage du revers de la toile
176
Le châssis a été placé dans un espace clos composé de bois. La boîte n’était pas hermétique mais elle a permis de diminuer l’impact des variations hygrométriques et de la température environnante. 177 Un fond est une grande planche en contreplaqué ou en bois. Cette surface ne doit pas se déformer à très forte humidité ni rejeter des vapeurs chimiques sur l’œuvre (l’aggloméré n’est donc pas utilisable).
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Suppression des pièces de renfort Les pièces de renfort ont été collées au support à l’aide d’un adhésif à base de cire. Comme prévu, l’adhésif est cassant, une simple action mécanique a été suffisante. A l’aide d’une spatule fine, glissée sous les pièces de toile, les anciens renforts ont été séparés de la toile d’origine. Image 93 : Suppression mécanique d’une pièce de renfort
La partie la plus difficile fut la suppression des résidus d’adhésif. Nous avons supprimé mécaniquement tous les résidus de surface, à l’aide d’un scalpel neuf. Pour les résidus les plus incrustés dans la toile, nous avons testé trois méthodes. -
Méthode 1 : La toile étant très friable, nous avons alors réalisé des tests avec des solvants tels que le White Spirit et l’isooctane, ayant la capacité de ramollir les matériaux cireux. Il est apparu que les
Image 94 : Tests de suppression des résidus d’adhésif aux solvants
solvants n’avaient que peu d’action et les appliquer à l’aide d’un coton ne faisait qu’affaiblir la toile.
-
Méthode 2 : La cire ayant une température de transition vitreuse assez basse (50°C), l’utilisation de la chaleur est une possibilité de suppression sans endommager l’œuvre. En effet, l’application d’une chaleur proche de la transition vitreuse permet de ramollir la cire. Nous avons placé un papier buvard entre la spatule chauffante et les résidus de cire. Celle-ci a commencé à créer des auréoles sur le papier buvard, ce qui était l’effet recherché. Malheureusement cette technique a fonctionné pour les résidus en surface ou tout du moins proches de la surface. Augmenter la
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température de la spatule aurait fait courir le risque que la cire pénètre plus profondément au sein de la stratigraphie.
-
Méthode 3 : malgré les tests précédents,
nous pouvons encore voir la présence de l’adhésif entre les fils de toile. La dernière solution possible est l’action mécanique. Les résidus étant difficiles d’accès, nous avons utilisé un crochet à dentiste, afin gratter la cire entre chaque maille de la toile. Ce fut une méthode chronophage mais nous n’avons pas pris le Image 95 : Suppression mécanique des résidus d’adhésif
risque pas d’endommager la toile.
Suppression des papiers des protections locales Ne soupçonnant pas la nature de la préparation, nous avions prévu de réaliser un cartonnage léger. Le cartonnage aurait permis de rétablir la planéité et de préparer l’œuvre aux opérations du support. Nous devions donc retirer les papiers de protection posés lors du refixage localisé réalisé précédemment. Les laisser aurait risqué de créer des interférences au cours du cartonnage. Nous avons donc légèrement humidifié les papiers de protection avec un coton et de l’eau. Lors du retrait des papiers Japon, nous avons réalisé que les petites écailles, qui auraient dû être refixées par la colle de poisson, étaient restées collées sur les papiers. Aucune traction n’avait été exercée, la rupture n’était donc pas d’origine mécanique mais chimique. Malheureusement, les écailles étaient trop petites et trop fragiles pour être repositionnée par la suite.
124 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
De plus, nous avons passé un bâtonnet ouaté très légèrement humide (par précaution), afin de supprimer les résidus de colle. Le coton est devenu partiellement rouge et de la poussière de préparation est restée collée sur le Image 96 : Résidus de préparation pulvérulente sur un coton
coton. Nous avons compris à cet instant quel était le
problème : la présence d’argiles gonflantes dans la préparation. Malgré le résultat de nos tests au cours de l’étude de l’œuvre178, la préparation est bel et bien sensible à l’eau. Nous avons réalisé des recherches et refait intégralement la proposition de traitement en évitant le plus possible les méthodes aqueuses, ce qui n’était pas le cas de la proposition précédente. Nettoyage du revers Des tests ont été réalisés afin de déterminer la méthode la plus efficace pour nettoyer le revers de la toile : les gels d’agar-agar à différents pourcentages, des gels de Klucel/éthanol et de Klucel/éthanol/eau. D’après les résultats179, le gel d’agar-agar à 3% dans l’eau déminéralisée convient le mieux. C’est donc ce dernier qui a été utilisé lors du nettoyage du revers de la toile.
178 179
Constat d’état P.75 Résultats détaillés dans l’annexe 1 p. 212
125 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Gel d’agaragar
Zone nettoyée
Image 97 : Nettoyage de la toile
Au fur et à mesure de l’avancée du nettoyage, les zones humidifiées ont été placées sous papier buvard et poids. Cela a permis une remise à plat générale mais pas parfaite au niveau de la déchirure. Une légère humidité a été réappliquée localement avec du gel agaragar et la zone a été remise sous presse. Après un court temps de séchage, le support a retrouvé une planéité suffisante pour la réalisation du pontage.
Cependant, l’œuvre demeurant libre pour le moment, certaines déformations ont eu tendance à réapparaitre.
Image 98 : remontée des déformations de la toile
II.
Rétablissement de planéité : remise en tension
Le pontage provisoire De manière générale, les bords de la déchirure n’étaient que très légèrement rétractés. Une bonne partie des fils sont restés en face de leur moitié et sont presque jointifs. Malgré tout certaines zones de déchirures présentent un écartement et d’autre un chevauchement. Il était donc important de commencer par replacer et fixer les fils les uns en face des autres.
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Comme
décidé
dans
la
proposition de traitement, le pontage a été fait aux fils d’Origam® et au Plextol® B500 (20%) épaissi à la Tylose (80%). Chaque fil a été posé dans le frais. Ils sont positionnés en quinconce, tous les deux fils d’origine. Les fils d’Origam® étant très fins,
Image 99 : Pose des fils de pontage
il a été nécessaire de les tripler afin d’obtenir une résistance suffisante.
Une fois passés dans le Plextol, les trois fils n’en formaient plus qu’un et celui-ci a été positionné sur la toile. La pose est dite « dans le frais », mais le maintien a été renforcé par un scellage des fils à la chaleur. La chaleur appliquée était de l’ordre de 60°C. Nous avons choisi Image 100 : Pontage en cours de réalisation
cette température en nous référant à la température utilisée pour les doublages thermoplastiques au Plextol qui est de 70°C180.
180
Une toile peinte à l’huile standard peut théoriquement supporter une température allant jusqu’à 70°C. Les quantités d’adhésif que nous utilisons actuellement sont bien inférieures à un traitement de doublage, nous avons donc diminué la température de 10°C. Cela semble amplement suffisant pour un bon maintien mécanique. LE POIZAT (Virginie), « Étude de l’influence des couches de non-tissés intermédiaires dans la réversibilité du doublage thermoplastique au Plextol B500® », CeROArt [Online], EGG 2 | 2012, Online since 19 June 2012, connection on 11 December 2017.
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Suppression des papiers de bordage présents sur les bords de tension Cette étape de restauration visait avant tout la suppression du papier sur les bords de tension. La tendance très friable de la couche picturale sous le papier de bordage, rendait la suppression totale de celui-ci bien trop dangereuse. Certaines zones pouvaient être traitées mais la majorité du papier présent sur la peinture
Image 101 : Suppression des résidus de papier de bordage sur les bords de tensions
a été laissé pour le moment. Cette grande fragilité locale nous a
fait supposer que le papier de bordage a probablement été appliqué à l’aide d’une colle naturelle aqueuse. Le papier de bordage a très légèrement été humidifié et uniquement sur les zones recouvrant la toile, à l’aide d’un bâtonnet ouaté. La majorité du travail est réalisée à l’aide d’un scalpel. Les résidus seront supprimés une fois le refixage exécuté.
Réalisation des bandes de tensions en intissé Les bandes d’intissé ont été coupées aux dimensions adéquates. La surface des bords de tension étant assez petite, nous avons découpé les intissés au plus près de la couche picturale. Cela permettait d’exploiter cette surface au maximum, en prenant garde toutefois ne pas déborder sur la peinture.
Image 102 : Succession de couches appliquées sur les bandes de tension
Nous avons ensuite appliqué le Plextol épaissi au xylène en plusieurs
couches, en laissant à chacune le temps de sécher. Le but est de créer une épaisseur 128 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
importante d’adhésif, afin d’assurer un bon maintien. Trois couches épaisses ont été appliquées successivement. Une fois l’ensemble sec, les bandes ont été positionnées sur les bords de tension et une chaleur de 70°C a été appliquée à la spatule chauffante. En parallèle, une pression adéquate a été exercée. Cette opération visait à ramollir l’adhésif et ainsi à sceller l’ensemble. La pression a permis de s’assurer que la toile était bien imprimée dans l’adhésif, augmentant ainsi la fiabilité du collage181. Image 103 : Pose des bandes de tension provisoires en intissé
Mise en tension de l’œuvre L’oeuvre a été fixée sur bâti Staro®182, qui a permis une augmentation de son format en tournant des vis sans fin. Cela a permis de ne pas faire subir de choc à la toile lors de ce réglage contrairement au bâti à clefs. De plus, ce procédé est plus précis et suffisamment résistant pour des opérations de support. Les bandes de tension a été agrafées sur les côtés du bâti, la couche picturale se trouvant du même côté que le bâti. Ce détail est important
Image 104 : Mise en tension de l’œuvre sur bâti Staro®
car cela permettra de ne pas entraver les
181
LE POIZAT (Virginie), « Étude de l’influence des couches de non-tissés intermédiaires dans la réversibilité du doublage thermoplastique au Plextol B500® », CeROArt [Online], EGG 2 | 2012 182 « Un profil bois est intégré sur l’extérieur du châssis en aluminium afin de pouvoir fixer la toile. Ces châssis possèdent des angles mobiles, équipés de ressorts qui se déforment sous l’effet des tensions exercées par la peinture. Ils se distinguent des châssis conventionnels par leur déformabilité. Après le montage de la toile sur le châssis, les forces exercées entre la peinture et les ressorts s’équilibrent. Contrairement à la rigidité de la peinture, la raideur du ressort est indépendante de
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opérations qui vont suivre. Ces opérations nécessitant l’emploi d’une table chauffante, il était important que le revers de la toile puisse être contre la table. Comme prévu, la tension que nous avons appliquée était très légère. Elle était juste suffisante pour pouvoir manipuler l’œuvre et la maintenir au mieux dans le plan.
Pose du papier de protection L’œuvre a été placée sur la table aspirante. Les fibres de la première feuille de papier
Bolloré posée, sont dans le sens de la longueur, le papier s’est donc rétracté de manière plus importante dans le sens de la largeur du tableau. Le papier a été posé à l’aide de Tylose® à 6%. Plus la viscosité est importante moins l’eau pénétrera183 dans la stratigraphie mais plus la traction à la surface du tableau sera forte. La Tylose® à 6% est un compromis entre ces caractéristiques. Une fois sèche, la seconde feuille a été est posée dans l’autre sens, les fibres dans le sens de la largeur. L’ensemble a été soumis à une pression de 200 hPa et à une température de 35°C. Cette pression importante a permis d’assurer une bonne adhérence des papiers de protection ainsi que la mise à plat des déformations. La température a permis de détendre la toile au cours de l’opération et de faciliter la circulation des molécules d’eau184. Ainsi, l’évaporation s’est faite plus rapidement et l’eau n’a pas stagné dans la couche picturale.
l’humidité. Les tensions provoquées par le comportement de la peinture lors du changement d’humidité entraîneront des variations du ressort. » source : http://www.starochassis.ch/ 183 On rappelle que la Tylose est réputée pour sa bonne mouillabilité, ce qui permet une bonne accroche. 184 Roche A, La conservation des peintures modernes et contemporaines, Paris, CNRS Edition, 2016.p.48
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III.
Traitement de l’argile :
Image 105 : Papier de protection en cours de séchage
Stabilisation des argiles et refixage des écailles par imprégnation au Plexisol P550®
Après avoir posé les papiers de protection, la tension de l’œuvre a été augmentée de façon à avoir une tension proche de celle d’un tableau standard185.
Une première couche de Plexisol P550® à 5% a été passée. Le Plexisol® a été dilué dans un mélange de White Spirit D40 et de xylène (2/3, 1/3). Il a été appliqué sur le revers au spalter. L’œuvre a ensuite été laissée pendant une nuit afin que les solvants aient le temps de s’évaporer.
Image 106 : Application du Plexisol au revers de l’œuvre
Une seconde couche a été appliquée dans les mêmes conditions et à la même concentration. La toile ne présentant aucun aspect satiné après le second passage, nous
185
D’après Alain Roche, la tension idéale d’une toile est d’environ de 20 daN/m. Op.Cit, p.25
131 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
avons jugé plus prudent de réitérer l’opération une fois supplémentaire. Une troisième couche à 5% a été appliquée. Une dernière couche de Plexisol à 10% a été passée. Une fois sèche un léger aspect satiné était visible entre et sur les fils de toile. Cette légère brillance était un signe de saturation de la préparation en adhésif. L’œuvre a finalement été placée sur la table basse pression et portée à une température de 75°C et à une pression de 120 mlBar. Une fois la table montée à 75°C, la température a été coupée en même temps que la pression a été augmentée. L’augmentation de la pression pendant le refroidissement a permis de maintenir les écailles et la peinture plaquées contre la toile et assure ainsi un meilleur maintien pour les opérations futures.
Image 107 : Réactivation du Plexisol sur la table aspirante
Il faut cependant signaler que les bandes de tension tendant l’œuvre sur le châssis Staro® avaient un maintien fragile. En effet, plusieurs fois au cours de cette intervention, les bandes se sont décollées du tableau et nous avons été contraints de les remettre en place. Par la suite, nous avons réalisé que ce manque d’accroche était dû à la faible pénétration de l’adhésif dans un intissé trop épais et à la présence de xylène dans le Plexisol® qui a réactivé le Plextol® des bandes de tension. Chaque application a fait se rétracter la toile et a déformé les bandes d’intissé. La toile a été détendue et retendue correctement avant la suite des opérations. Nous avons constaté que les bords de la déchirure avaient très vite tendance à remonter. Cette forte réaction, à ce stade, a confirmé que le doublage devra être rigide pour bien maintenir l’ensemble.
132 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
IV.
Assainissement de la couche picturale 186: Retrait des papiers de protection
Une fois tendus correctement, les papiers de protection ont pu être retirés un à un. Les deux papiers ont été humidifiés sur toute la surface, à l’éponge et à l’eau tiède. Le premier papier a été alors délité dans un premier temps. En maintenant l’ensemble humide, le second papier a pu à son tour être détaché de la surface de l’œuvre. Cette opération s’est déroulée sur table aspirante afin d’anticiper tout imprévu. C’est à cet instant, que nous avons pu constater que le refixage a fonctionné correctement. En effet, seuls quelques résidus infimes de la préparation sont restés collés sur le papier, notamment dans la zone de la déchirure. Par ailleurs, aucune zone de brillance due à la colle
Image 108 : Papier de protection en cours de suppression
d’imprégnation n’était visible.
A ce stade, seuls les résidus de l’adhésif utilisé pour la pose des papiers de protection, étaient encore présents.
Nettoyage des résidus de colle et de la crasse superficielle
Cette quantité de colle a été, dans un premier temps, grossièrement éliminée avec un gros coton humide, dans les zones les plus résistantes. Par la suite, les résidus ont été supprimés plus minutieusement à l’aide d’un bâtonnet ouaté. Les résidus de colle et la crasse présente à
Image 109 : Œuvre en cours de nettoyage
la surface du tableau, ont été simultanément
186
Détail des décisions et des tests dans l’Annexe 3 p.217
133 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
supprimés. Les tests ayant permis de constater que l’eau était le solvant le plus efficace pour le nettoyage, un seul passage a suffi pour les deux étapes.
Au fur et à mesure de l’évaporation de l’eau, nous avons constaté que des chancis de vernis se sont formés. Cette réaction n’a fait que confirmer l’état de faiblesse du vernis et la nécessité de supprimer
cette
couche
de
protection. Son oxydation combinée Image 110 : Apparition de chancis de travail
à l’humidité et à la chaleur des
interventions précédentes ont provoqué ce phénomène187. Ces chancis disparaîtront au fur et à mesure que le vernis sera supprimé. Le nettoyage nous a aussi permis de constater la forte abrasion de la couche picturale d’origine. En effet, depuis sa création, l’œuvre a dû subir plusieurs campagnes de nettoyage et la couche picturale a été endommagée. La peinture était abrasée sur les arêtes et les glacis certainement présents autrefois sur les couleurs, ont dû disparaitre au cours d’un dévernissage mal maîtrisé.
187
Le chanci est une altération de la matière organique, contenue dans le vernis ou dans la couche picturale. C’est une altération courante pour les œuvres du XVIe et du XVIIe siècle. Elle se traduit par une augmentation de la porosité de la surface, créant ainsi un phénomène optique de blanchiment. GENTY-VINCENT A., EVENO M., NOWIK W., BASTIAN G., RAVAUD E., CABILLIC I., UZIEL J., LUBINGERMAIN N., MENU M., « Blanching of Paint and Varnish Layers in Easel Paintings: Contribution to the Understanding of the Alteration », Applied Physics A, November 2015, Volume 121, Issue 3, p. 779788.
134 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 111 : Découverte de fortes abrasions de couche picturale
Dépose du tableau sur un fond
Les bandes de tension maintenant le tableau n’étaient pas fiables. Un démontage et un remontage des bandes sur l’œuvre puis de celle-ci sur le bâti sont devenus des opérations presque journalières. Lors de notre dernière tentative de travail à la verticale, une des bandes de tension s’est détachée et a provoqué l’arrachage d’une partie du pontage maintenant la déchirure. Nous avons jugé moins dangereux pour l’œuvre et moins fastidieux de la déposer sur un fond. Cela nous a permis de déplacer à nouveau la toile sans risque et de pouvoir travailler verticalement. L’inconvénient est que l’évaporation des solvants sera plus longue en raison de la présence du fond et du Melinex® au revers de la toile.
Retrait du vernis altéré
Comme prévu, le vernis a progressivement été retiré à l’aide d’un bâtonnet ouaté et d’un mélange de 20% d’éthanol dans 80% de cyclohexane. Un premier passage au CE2 (cyclohexane 80% et Ethanol 20%) a été réalisé ainsi qu’un second au CE1 (cyclohexane 90% et éthanol 10%). Le premier passage a permis le retrait de la majorité du vernis et le second passage au CE1 a permis de supprimer les résidus de manière plus douce pour l’œuvre.
135 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 113 : Vernis en cours de retrait
Image 113 : Vernis en cours de retrait observé sous UV
Cependant, certaines zones déjà particulièrement altérées n’ont subi qu’un seul passage. Comme nous le voyons sur la photographie de dextre, le vernis recouvrant les cheveux n’est que partiellement retiré. Malgré la présence de quelques repeints discrets, la couche colorée était trop fragile188 pour pousser plus loin le retrait. Nous avons appliqué cette méthode dans plusieurs parties de l’œuvre.
Image 114: Zones allégées visibles en vert sous rayon UV
188
PHENIX (Alan), Solvent Abuse, some observations on the safe use of solvents in the cleaning of painted and decorated surfaces, The Building Conservation Directory, 1997. Source :
www.buildingconservationcom/articles/solvent/solvent.htm 136 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Retrait des repeints et des mastics189
Le solvant permettant de réaliser la suppression de vernis a également agi sur les repeints et les retouches. Les restaurations maladroites ou ayant changé de couleur ont été supprimées en même temps que les repeints et le vernis190. Les repiquages recouvrant les grandes zones d’usure ont été conservés pour des raisons historiques et afin de ne pas risquer d’affaiblir davantage la couche colorée dans ces zones déjà très fragilisées.
Image 116 : Coton lors de la suppression du repeint du châle
Image 115 : Apparition des mastics sous les retouches
Le retrait des repeints nous a permis de confirmer la présence de fortes abrasions de la couche colorée. Lors de cette suppression, des zones de vernis se sont avérées beaucoup plus difficiles à retirer que d’autres. Ces zones étaient présentes sous les repeints. Il s’agissait probablement d’un vernis plus ancien que celui venant d’être retiré, il était peut être même d’origine. C’est une hypothèse que nous ne pourrons malheureusement pas vérifier. Une observation aux ultraviolets, nous a montré une forte fluorescence verte, plus soutenue que celle du vernis en cours de suppression. Ce fait a confirmé qu’il s’agissait bien d’un ancien vernis naturel.
189 190
Détail Annexe 3 Les tests et les choix sont expliqués dans le protocole d’assainissement de la couche picturale p.217
137 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 117 : Amas d’ancien vernis (lumière visible et rayon UV
Les tests ont révélé une forte résistance aux solvants. Ils seront donc atténués mécaniquement afin de ne pas mettre la couche picturale en péril.
Suppression des mastics Comme déterminé dans le protocole d’assainissement de la couche picturale, les
mastics ont été supprimés à l’aide d’une éponge à forte rétention contenant de l’eau et d’un scalpel pour les parties les plus épaisses. Un léger rougissement de la préparation au contact de l’eau a été remarqué. La question d’une nouvelle imprégnation s’est posée. En effet, lors de la suppression des anciens mastics à l’eau déminéralisée, la préparation a eu tendance à teinter le mastic et l’éponge. L’apport d’eau n’avait pas besoin d’être important, une légère action mécanique suffisait. Il paraissait donc évident qu’une seconde Image 118 : Retrait du mastic du visage
intervention de stabilisation serait nécessaire dans le futur. 138
Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cette opération s’est donc déroulée sans suppression de préparation originale et avec très peu de pénétration d’humidité. Malgré l’imprégnation au Plexisol®, l’eau reste un facteur de prudence et il n’est pas nécessaire de prendre de risque. V.
Renfort général du support :
Comblement des lacunes de support
Une fois l’assainissement de la couche picturale terminé, un temps d’évaporation était nécessaire. Les solvants employés précédemment sont volatiles, qu’ils ont donc tendance à s’évaporer assez rapidement après l’application. Par précaution, nous avons donc laissé l’œuvre à plat sans aucune protection la recouvrant, pendant une durée d’environ une semaine. Le traitement de refixage n’a pas été réalisé immédiatement pour éviter une rétention de solvant au sein de la stratigraphie, qui risquerait d’engendrer des dommages importants. A la fin de ce temps d’évaporation, l’œuvre de mémoire a été retournée et fixée à nouveau sur le fond, le revers visible. Lors des problèmes de mise en tension, les pontages réalisés ont été grandement sollicités, et de nombreux fils se sont décollés ou déformés. Tous ont été retirés de manière
Image 119 : Comblement des lacunes de toile
mécanique à l’aide d’une pince de dentiste. Avant de reposer un pontage définitif, les fils de toile sont rompus, mais encore en contact, ont été ressoudés au Plextol B500®. Les zones présentant un manque entre les fils ont été comblées par un fil de lin191 d’épaisseur similaire au fil d’origine. Les zones trop petites ont été comblées avec un amalgame de fibres de lin et de Plextol B500®. Dans les zones où le pontage était encore acceptable, le comblement s’est fait par la face de l’œuvre.
191
Les fils utilisés ont été prélevés sur une toile de lin préalablement décatie
139 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Pontage
Image 121 : Pontage après reprise
Image 121 : Premier pontage
Comme mentionné précédemment, une majorité des fils de pontage ont été supprimés à cause de leur obsolescence. Nous les avons donc remplacés par de nouveaux fils posés dans les mêmes conditions que précédemment.
Nouvelle consolidation par la face
Au cours de la suppression des mastics, il est apparu que la préparation n’était toujours pas parfaitement stable au contact de l’eau. Malgré la saturation apparente du revers après le refixage et plusieurs passages à un faible pourcentage d’adhésif, il semblerait que le consolidant n’ait pas pénétré la préparation jusqu’au bout. La mise en contact avec un coton humide provoquait à nouveau un transfert de couleur rouge. De plus, les opérations ultérieures allaient de nouveau soumettre l’œuvre à un fort taux d’humidité. Nous avons donc dû renouveler l’opération de consolidation. Suite à l’imprégnation précédente, la toile n’allait laisser passer qu’une très petite quantité d’adhésif. L’opération se fera donc par la face. La question de l’adhésif à utiliser s’est à nouveau posée. Les molécules de l’adhésif devaient être petites afin de traverser la couche colorée et atteindre la préparation. Les fiches techniques des adhésifs produits ainsi que des tests nous ont permis de départager différents adhésifs.
140 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Acryl ME 2%
Nature
Diluant
MFK
Résine acrylique
Eau
Plexisol 5% et Regalrez 2 ,5%
1094 5%
Résine
Résine
Résine
acrylique
acrylique
aliphatique
Eau
Xylène
et White spirit
White spirit Rendu visuel du Aucune brillance
Brillant
test
Beaucoup trop Pas
de
brillant même surbrillance à 2,5%
Test à l’eau
Très
mauvais Bon résultat
résultats,
aucune
Très
bon Très
bon
résultat aucun aucun résidu
différence
résidu sur le sur le coton coton
Compatibilité
Même
avec Plexisol
résine
type
de Même type Parfaite donc de
compatible
La nature des
résine
matériaux
donc
est différente
compatible Remarques
2
passages
: La
inefficaces 4
passages
Il
pénétration : ne
inefficaces
n’y
a Nécessite
visiblement
semble aucune
pas
pénétration
suffisante
sous la couche
plusieurs passages mais efficace
picturale.
Le Regalrez 1094® à 5% semble le plus adapté à cette situation. Différents diluants peuvent être utilisés. Traditionnellement cette résine est solubilisée dans du White Spirit mais elle peut aussi être utilisée dans d’autres solvants tel que le cyclohexane192. L’évaporation du cyclohexane est plus rapide que celle du White Spirit. Le bon comportement de la couche picturale au cyclohexane lors de l’opération de dévernissage nous pousse également à utiliser de même solvant. Sa composition est mieux maîtrisée que
192
Fiche technique du Regalrez Annexe n°275
141 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
celle du White Spirit193. Il arrive souvent que le White Spirit fasse apparaître un blanchiment sur la peinture. De plus, le cyclohexane est moins toxique pour le restaurateur. Le plastifiant sélectionné est le Kraton G 1650®194. Sa présence permet de limiter sa friabilité dans le temps et d’en assouplir le film. Il est ajouté à l’ensemble en proportion 2% de la masse sèche de la résine. La consolidation a été faite par la face et en deux couches, appliquées au spalter. Au premier passage, le consolidant a pénétré mais a laissé un dépôt satiné en surface. Le second a réagi de la même manière. Des tests de résistance à l’humidité ont alors été effectués sur les zones de préparation accessibles sur l’œuvre. Même après un contact relativement prolongé avec un coton
Image 122 : Œuvre après le second passage du Regalrez
humide, la préparation n’a pas semblé réagir comme elle le faisait précédemment. La décision d’interrompre l’opération a donc été prise.
Cartonnage Le cartonnage est une opération qui implique un fort apport d’humidité au sein de
la stratigraphie. Cette intervention était cependant nécessaire en raison des déformations persistantes de la toile et du besoin d’un maintien stable. Les bandes de tensions n’ayant pas suffi à maintenir l’œuvre efficacement, il était préférable de réaliser un maintien général. Le cartonnage a également offert à l’œuvre la planéité nécessaire pour la réalisation d’un doublage.
193
Le cyclohexane est un alcane cyclique pur, tandis que le White Spirite est un mélange d’hydrocarbures aliphatiques et aromatiques, dont la composition exacte et les proportions varient selon le fabricant. 194 JILL WHITTEN, « Regalrez 1094: Properties and Uses » http://cool.conservation-us.org/waac/wn/wn17/wn17-1/wn17-104.html
142 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
L’opération s’est donc déroulée en deux phases : un cartonnage réalisé avec un papier Bolloré® moyen et un deuxième réalisé avec un intissé 40g. Deux tests ont été réalisés avec deux adhésifs de cartonnage : la colle de pâte et la Klucel G1650® à l’eau. Les tests ont eu pour but d’observer les réactions de la préparation face à un contact prolongé avec de l’eau et de déterminer si elle avait tendance à réagir plus à l’un ou l’autre des deux adhésifs. Cela a en effet été le cas. Le papier Bolloré® posé à la colle de pâte sur la zone de préparation testée s’est légèrement teinté. Lors de la suppression de la colle, le coton a également rougi. Cela n’a pas été le cas lors du test à la Klucel G1650®. En effet, le papier posé dans une zone proche du test précèdent, ne s’est pas teinté et le coton n’a rougi que lors d’un frottement et non uniquement par contact. C’est donc à la Klucel G1650® à 5% dans de l’eau déminéralisée que nous avons réalisé le
Image 123 : Second cartonnage à l’intissé
cartonnage. Le premier cartonnage au Bolloré® n’a montré aucune remontée pigmentaire et la couche picturale n’a présenté aucun signe alarmant. La planéité était en effet bien meilleure, mais pas parfaite. Puisqu’une seconde épaisseur était prévue, cette fois à l’intissé 40g, elle a également été posée sous forme de cartonnage.
Mise en tension sur bâti
L’intissé ayant été coupé dans des dimensions adaptées, le tableau a été fixé au bâti Staro® à l’aide des bords dépassant de l’intissé. L’œuvre a donc été maintenue par la face, laissant accessible l’intégralité du revers.
143 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Doublage Phase 1 La première étape du doublage a été la mise en tension de la toile de doublage sur un bâti Rigamonti®.
Image 124 : Passage du lait de Plextol
Phase 2 L’étape suivante a été le passage d’un lait de Plextol B500® sur toute la surface destinée à renforcé l’œuvre de mémoire. Ce lait était un mélange de 50% de Plextol B500®, commercialisé en émulsion aqueuse et de 50% d’eau déminéralisée. Le Plextol B500® n’étant pas vendu pur dans le commerce, les propositions exactes étaient 25% de Plextol B500® dans 75% d’eau. Cette dilution avait pour but de faire pénétrer une petite quantité de Plextol B500® au sein de la toile de doublage. Cela a favorisé une bonne accroche à ce support de renfort. Cette opération a été effectuée uniquement sur cette toile car il était important que l’adhésif y adhère bien plus qu’à la toile originale. La tension de la toile après ce passage de lait de Plextol B500® au spalter et après séchage était est de 1.5 N/cm aux angles et de 1.2 N/cm au centre. Phase 3 Un premier passage de Plextol B500® épaissi au xylène a été appliqué à la spatule et l’intissé de 40g a été posé dessus dans le frais. Une fois positionné, un second passage de Plextol B500® épaissi à sa surface a assuré son Image 125 : Passage de la première scellage dans la stratigraphie. L’ensemble a été laissé
épaisseur de Plextol épaissi
ainsi afin de permettre au solvant de s’évaporer.
144 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Phase 4 Une dernière épaisseur de Plextol B500® épaissi a été appliquée à la spatule sur l’intissé mais cette fois, à travers une gaze. Cette méthode a permis de limiter l’apport d’adhésif, mais surtout de créer une structure d’accroche Image 126 : Passage du Plextol B500® à travers une gaze
intéressante.
Un
nouveau
temps
d’évaporation a été pris en compte.
Phase 5 Le Plextol B500® de la dernière épaisseur a été réactivé généreusement au xylène et l’œuvre a été placée rapidement sur la zone prévue. L’ensemble a ensuite été passé sur table à basse pression.
Image 128 : Réactivation du Plextol au Xylène
Cette méthode a une bonne réversibilité195 et son maintien est efficace. Cette opération a été supervisée par Marguerite Szyc.
Image 128 : Mise en place de l’œuvre sur la toile de doublage
195
D’HAENENS (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, CeROArt [Online], EGG 3 | 2013, Online since 11 May 2013. URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3082
145 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Doublage aveugle
Le choix de la réalisation d’un doublage aveugle est une question d’esthétisme. Le propriétaire a exprimé son désir d’avoir un revers visuellement agréable. Une toile de lin plutôt fine et harmonieuse196 avec le châssis, a été sélectionnée. Elle a été décatie à plusieurs reprises afin de retirer l’excédent d’apprêt, et de diminuer ses mouvements lors des variations hygrométriques. Elle a ensuite été fixée sur le châssis à l’aide d’agrafes
réparties
de
manière
homogène,
mais
relativement espacées. L’œuvre devant être fixée sur ce
Image 129 : Toile de doublage aveugle tendue sur le châssis
même châssis, il a fallu laisser la place à une deuxième série d’agrafes. Le montage a été réalisé en suivant le protocole décrit dans la proposition de traitement197.
Mise à niveau des lacunes
L’œuvre étant parfaitement plane suite à l’opération de doublage, la mise à niveau des mastics a pu être faite correctement. Il est souvent intéressant de réaliser un mastic temporaire avant une intervention de support afin d’éviter tout déséquilibre. La planéité de l’œuvre n’ayant été parfaitement obtenue qu’au moment du doublage, nous n’avons pas pu appliquer cette méthode. Par ailleurs, en raison la grande finesse de la couche colorée, il est probable que cela n’aurait apporté aucune différence significative. Leur mise à niveau, avant le démontage du bâti et la remise en tension de l’œuvre, est intéressante car elle diminuera encore les risques de mouvement des lacunes. Les lacunes, étant au même niveau que la couche picturale, ne créeront plus de déséquilibre lors de la perte de tension de la toile et de son augmentation de tension par la suite.
196 197
Toile n°33 du fournisseur Marin. Description de la méthode de mise en tension dans la proposition de traitement
146 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Mise en tension sur châssis
Ce même protocole a de nouveau été appliqué pour la mise en tension du tableau doublé. La toile a été tendue manuellement à l’aide d’une pince à tendre.
Image 131 : Revers de l’oeuvre remise en tension
Image 131 : face de l’œuvre remise en tension
Par la suite, les bords des toiles de doublage ont été coupés à la longueur adaptée et ont été collés au châssis à l’aide de cire résine. La zone de collage sur le châssis a été frictionnée brièvement avec un morceau de cire résine à l’état solide. Cela a permis d’appliquer une fine couche de cire et de rabattre la toile dessus. CelleImage 132 : Bord de la toile rabattu sur le revers du châssis
ci, une fois positionnée, a été de nouveau frictionnée afin d’assurer une bonne accroche. La friction a permis de faire
147 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
augmenter la température et d’atteindre le seuil de de transition vitreuse de la cire. Une fois l’action arrêtée, la cire a refroidi et s’est figée presque immédiatement. Lors du constat d’état, nous avons remarqué l’absence d’une clef de châssis, nous en avons donc réalisé une nouvelle. Image 133 : fabrication d’une clef de châssis : sciage d’un morceau de peuplier avec une scie japonaise
Elle a été taillée dans un morceau de peuplier, la même essence que le châssis et que la majorité des clefs. Ce morceau de bois a été découpé dans la masse à l’aide d’une scie japonaise (très fine), puis la pièce a été dégrossie à l’aide d’un ciseau à bois, avant d’être finalement poncée. Le bois de cette clef étant beaucoup plus clair que les autres, nous l’avons teinté au brou de noix
Image 134 : Clef du châssis déjà existante (dessous) et clef du châssis réalisé (dessus)
dilué.
148 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Rétablissement de l’homogénéité esthétique de l’œuvre :
Mastic
A ce stade, il est courant de poser un vernis d’isolation afin de protéger la couche colorée des abrasions que peut engendrer la pose de mastics. Ayant déjà posé une résine Regalrez 1094® au moment du refixage, une fine épaisseur de vernis protège déjà la face de l’œuvre. Ne souhaitant pas augmenter l’épaisseur du vernis ni multiplier l’application de couches, nous n’avons pas jugé cette opération nécessaire. Image 135 : Œuvre de mémoire après réalisation des mastics
La base des mastics ayant déjà été
posée
au
Modostuc®
précédemment, cette étape avait pour but de reproduire l’état de surface de l’œuvre. Pour ce faire, ils ont été structurés dans une chambre noire avec une lumière rasante. Les empâtements ainsi que la contexture de la toile ont été reproduits afin d’assurer une continuité de la surface et rendre la retouche plus discrète
Image 136 : mastic en cours de structuration
par la suite. 149 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Vernis : couche d’intervention
Les arguments198 de la sélection du Regalrez 1094199 comme vernis, sont renforcés par la présence de cette résine appliquée lors du refixage par la face200. Elle a simplement été utilisée dans une concentration plus importante afin de former un film protecteur en surface. Le vernis a été préparé à 18% dans du White Spirit, additionné de 2,5% de Tinuvin 292® et 3% de Kraton G 1650®. L’application en plusieurs couches fines donne un meilleur résultat optique qu’une seule couche épaisse201. Le mode d’application du vernis joue aussi son rôle sur la brillance du film. La couche picturale de l’œuvre étant affaiblie, le vernis a permis de saturer les couleurs et d’offrir une bonne base à la retouche.
Après ce premier passage au
spalter, les coloris ont retrouvé leur éclat et leur profondeur. Image 137 : Œuvre de mémoire après application du vernis intermédiaire
Certaines zones sont plus mates que d’autres, il s’agit probablement des zones les
plus affaiblies, tandis que d’autres sont immédiatement saturées. Cette inégalité sera travaillée lors de l’application de l’épaisseur de vernis final.
198
Cf. Annexe n°5 p.247 Résine hydrocarbure 100% hydrogénée. Propriétés optiques proches des résines naturelles, composition : monomère de vinyl toluène et alpha-méthyl styrène. 200 Etape du refixage par la face p. 140 201 LEONARD (Mark), Some observations on the use and appareance of two new synthetic resins for painting varnishes, Cleaning retouching and coatings,IIC, London, 1990,p.176. 199
150 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Retouches
Une fois les solvants du vernis évaporés, le travail de retouche a pu commencer. Les pigments ont été travaillés avec du Laropal A81® à 20% dans du lactate d’éthyle, puis sont disposés de manière pratique sur la palette. Le vernis et le solvant de dilution sont placés dans des godets à capuchons métalliques.
La retouche a été exécutée
en
plusieurs
étapes. Tout d’abord, nous avons appliqué un ton de fond d’une couleur proche de celle de la préparation. Image 138 : Pose d’un ton de fond général, de la couleur de la préparation
Puis, les couches suivantes ont été posées en couches semi opaques ou directement en glacis. Ces couleurs ont été posées en aplats, puis ont été travaillées en points ou de manière à reproduire les coups de pinceaux du peintre (sur la périphérie de l’œuvre). Les tons de fond étant très mats, les couleurs et les glacis ont été particulièrement saturés en vernis Laropal A81®. Repiquages des zones usées : le but était seulement d’atténuer les usures et non de les faire disparaitre. Certaines zones n’ont été repiquées que par des points très légers et un point sur deux.
151 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 139 : Repiquage de la carnation
Certaines craquelures dont les arêtes ont été abrasées ont été légèrement atténuées. Elles sont toujours visibles mais elles n’attirent plus l’œil. Cette opération a été réalisée dans les zones les plus usées : le visage, les cheveux et le drapé bleu.
Image 140 : Repiquage du drapé
152 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 141 : Repiquage des craquelures abrasées
Bordage
Au cours de son existence, la toile a été montée sur un châssis de taille différente de celui d’origine. Toutefois, le propriétaire a exprimé le désir de conserver l’œuvre dans son format actuel. Le châssis étant trop grand pour l’œuvre, la toile des bords de tension est partiellement visible sur la face de l’œuvre. Le papier de bordage a été positionné en fonction de la profondeur de la feuillure202 du cadre dans lequel l’œuvre va retourner. Le papier ne devra pas être visible une fois l’œuvre encadrée, pour des raisons esthétiques. Le papier de bordage a donc été placé à une distance de 5mm des bords. Il a été posé à la Klucel G1650® à 6%, la préparation réagissant toujours à la colle de pâte. La pose du papier a été très délicate étant le faible pouvoir adhérant de cet adhésif. Cet adhésif ne semble pas être une solution idéale dans ce cadre.
202
Rive intérieure du cadre, sur laquelle l’œuvre est placée. Une fois assemblée avec le tableau, elle se situera devant les bords du tableau.
153 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Vernis final
Le vernis final est une succession de couches de Regalrez 1096®. Un passage a été fait au pulvérisateur Ecospray®. Le rendu final n’étant pas satisfaisant, les passages suivants ont été réalisés grâce à un pulvérisateur relié à un compresseur.
Image 142 : Œuvre de mémoire après restauration
154 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
155 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
156 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Troisième partie : projet scientifique Sujet : Etude comparative de quatre adhésifs d’imprégnation dans le cadre de la consolidation d’une préparation argileuse
157 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Introduction Au cours de l’analyse de l’œuvre de mémoire, la présence d’une couche de préparation rouge a été mise en évidence. Son état de fragilité et de friabilité induisaient une perte d’écailles lors de chaque manipulation. Cette perte d’adhérence traduit une instabilité au sein même de la structure de la préparation. Cette fragilité particulière est due au manque de liant dans la préparation mais aussi à la présence d’un type d’argile appartenant à la catégorie des argiles dites vertes. Beaucoup de pigments utilisés dans les préparations rouges, sont obtenus par la calcination d’ocre jaune. La température de cette cuisson, ainsi que sa durée, vont avoir un impact sur la couleur du pigment et vont permettre la stabilisation à l’humidité des argiles203. Les argiles vertes sont particulièrement sensibles à l’eau et ne se stabilisent que lors d’une cuisson à 900°C. Une cuisson classique (inférieure à 800°C), augmente même sa sensibilité204. Cette sensibilité se traduit par un gonflement important des argiles, et même un désagrégement si l’eau est présente en trop grande quantité. Ce gonflement fragilise la structure des autres matériaux et induit des déplacages. La seule méthode pour résoudre ce type de problème est le renforcement de la préparation par un adhésif. Différents adhésifs peuvent être utilisés dans le cadre d’une préparation au comportement classique. Ainsi, l’étude présentée a pour but de déterminer si ces adhésifs de consolidation sont également efficaces sur une préparation contenant des argiles très sensibles à l’humidité. Une première partie est consacrée à la présentation des différents matériaux et à l’explication de ce phénomène. Ce chapitre sert de base à la mise en place d’une étude comparative entre plusieurs adhésifs, utilisés dans le cadre de la consolidation de peintures. L’efficacité du Plexisol P550®, le Médium de consolidation 4176®, le Regalrez 1126® et l’Acryl ME® sont comparés sur leur capacité à isoler l’argile de l’humidité ainsi que sur leur capacité à rétablir et à maintenir la cohésion au sein de la préparation.
203
VIGUERIE (France de), Approche de la stabilité à l’humidité de trois argiles pouvant être contenues dans les pigments constitutifs des préparations colorées, Mémoire IFROA, 1997. p.127 204 Ibid.p.195-196
158 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
I. Les matériaux et leur histoire 1. La préparation argileuse a. Définition de la préparation205 La préparation est une des strates composant la stratigraphie d’un tableau. Elle se situe entre la toile encollée et la couche colorée. Elle sert ainsi de support à la peinture en lui offrant une surface d’accroche adaptée selon la volonté du peintre. Elle peut être composée d’une ou de plusieurs couches.
Vernis Couche colorée
Préparation rouge
Toile encollée Image 143 : Schéma d’une stratigraphie de peinture sur toile ayant une préparation rouge
Il existe deux types de préparation : les préparations grasses et les préparations maigres. Les termes maigre ou gras désignent la nature du liant206 qui est utilisé. Une préparation maigre est un enduit au liant hydrosoluble (alcool polyvinylique, empois d’amidon, colle de farine, colle de peau)207. Une préparation grasse est un enduit contenant de l’huile siccative208, comme le sont l’huile de lin209 et l’huile de noix, couramment utilisées.
205
PEREGO (François), Dictionnaire des matériaux du peintre, Paris, Belin, 2005. P.614 « Un liant est une substance filmogène qui fixe les pigments et ou les charges entre eux et au support ». Ibid.P.453 207 Ibid. p.615. 208 Huile contenant des acides gras insaturés, induisant une capacité à sécher à l’air libre pour les couches fines. BEREGEON (Ségolène), CURIE (P), Peinture et dessin, p. 1003. 209 PEREGO, Op.Cit ., p.614. 206
159 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Leur couleur est due aux pigments utilisés par le peintre. Les préparations blanches contiennent généralement une charge210, comme le blanc de Meudon, et un pigment211 comme le blanc de zinc, le blanc de titane (Ti02) ou le blanc de lithopone. Les préparations colorées peuvent aller de jaune, rouge, brun à noir, et être composées d’un pigment seul ou additionné à une charge. La préparation a un rôle aussi bien mécanique qu’esthétique. En effet, elle offre un support à la peinture. Son caractère plus ou moins siccatif permet une meilleure accroche des couches supérieures qui seront toujours plus chargées en liant. Cela va également jouer sur la vitesse d’absorption du liant par la préparation et ainsi permettre un séchage plus ou moins rapide. Ainsi, elle offre une surface plus ou moins absorbante à la peinture. L’épaisseur de la préparation est primordiale pour le rendu esthétique de la peinture. En effet, selon son épaisseur, la préparation va plus ou moins effacer les aspérités de la toile et lui donner une texture précise. Un enduit épais va donner un aspect plus lisse alors qu’un enduit fin, comme celui de l’œuvre étudiée, va laisser la trame de la toile transparaître sur la face du tableau. Il existe des préparations blanches et des préparations colorées. Malgré le fait qu’elle soit invisible sous la peinture, sa luminosité et sa tonalité212 vont influencer le rendu final. Au cours de leurs expériences artistiques, les peintres ont découvert qu’une préparation colorée et sombre met davantage en valeur les jeux de contrastes213. Elle augmente ainsi la vitesse d’exécution, permettant de réaliser directement les zones claires, contrairement aux
210
« Les charges sont des matières solides, pulvérulentes, n’intervenant pas sur la couleur de la composition dans laquelle elles entrent ». Elles ont un rôle technique ou économique (moins de pigments onéreux). Ibid. p.177 211 Un pigment est une fine poudre blanche ou colorée, insoluble ou très peu soluble dans le milieu de dispersion, utilisée pour ses caractéristiques optiques. Son insolubilité le distingue d’un colorant. Ibid. p.577. 212 Une tonalité est l’intensité et le ressenti d’une couleur ou d’une teinte. https://web.acreims.fr/dsden10/exper/IMG/pdf/arts_plastiques_et_couleurs.pdf 213 HENDY, LUCAS, La préparation des peintures, museum, 1968, format pdf. p. 247
160 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
préparations blanches qui imposent la réalisation d’un dessin préparatoire214. Cette tonalité foncée ou claire va induire une variation de couleurs des couches supérieures215. La couleur de la préparation a donc une incidence immédiate sur le rendu visuel de l’œuvre. De plus, cette omniprésence colorée va augmenter au fur et à mesure des années, parallèlement à la dégradation de l’huile. Des études216 ont mis en avant la perte du pouvoir couvrant et ainsi l’augmentation de la transparence des couleurs de la peinture à l’huile. La couleur sous-jacente en devient d‘autant plus visible.
b. Historique de la préparation Au cours des siècles précédents, la peinture était appliquée sur un gesso traditionnel et sur un support en bois. Le gesso est une préparation à base d’une charge (telle que le carbonate de calcium) et d’une colle animale. Cette préparation assez rigide et cassante en vieillissant était adaptée à des supports rigides comme le bois mais plus du tout aux toiles217. Elle a, également, tendance à se dégrader et à moisir dans des lieux trop humides. La préparation à l’huile va apparaître au XVIème siècle, peu de temps après la démocratisation de la peinture sur toile218. Au moment où les peintres commencent réellement à voyager, la toile leur a offert un support beaucoup plus léger, moins cher et
214
PLESTERS, LAZZARINI, Preliminary observation on the technique and materials of Tintoret, Conservation and restauration of pictural art, Brommelle et Smith, Congrès de Lisbonne 1972, ed Butterworths,, London, Boston, 1976, p.7 à 27. 215 DORANGES (Léocadie), Mesure du rôle optique des couches de préparation colorées, Mémoire de fin d’étude, Ecole de Condé, Paris, 2012.p.182 P.182http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doschim/decouv/couleurs/loupe_diff_lumiere.html 216 HENDY et LUCAS les mentionnent dans leurs écrits, Op.Cit p.247 VIGUERIE, Op.Cit. p.127 VIGUERIE, DUCOURET, LEQUEUX, MOUTARD-MARTIN, WALTER, Historical evolution of oil painting media : A rheological study,, Comptes Rendus Physique,vol. 10, no. 7, p. 612–621, 2009. Mentionné par SALVANT (Johanna), Caractérisation des propriétés physico-chimiques des matériaux de peinture employés par Van Gogh : les peintures blanches, Université Pierre et Marie Curie, Parie VI, 2012. P.47 217 Certaines exceptions existent. Certains peintres ont très bien sus adapter le gesso à la toile : Titien, Tintoret et Palma le Jeune. DUPREZ E., Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban, Mémoire IFROA, Paris, 1987. P.9 218 LABREUCHE, Pascal, Paris, Capitale de la toile à peindre. XVIIIème-XIXème siècle. CTHS-INHA, l’art et l’essai, 2011. P. 44
161 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
pliable. Ils ont donc dû adapter leur préparation en conséquence, afin de conserver les avantages de la toile. L’ajout ou le remplacement de la colle par l’huile rend les propriétés de la préparation beaucoup plus intéressantes : sa souplesse permet de suivre les mouvements naturels de la toile. De plus, elle permet également de rouler les œuvres sans perdre d’écailles, ce qui n’était pas le cas des préparations au gesso219. L’emploi de préparations colorées s’étend dans toute l’Europe entre le milieu du XVIème siècle et la fin du XVIIIème siècle220. A partir du milieu du XVIème siècle, les artistes favorisent les préparations foncées, plutôt rouges ou brunes et même parfois noires221. Elles peuvent être simples ou doubles et changer selon les envies de l’artiste : « Mignard, Poussin, Dughet, Delafosse… ont alternativement utilisé des préparations rouges-brique, rougesombre, brunes sans couche d’impression et des préparations doubles avec impression rose, ocre jaune ou grise222. » Cependant, de nombreuses mises en garde prouvent que les artistes ont très tôt eu conscience des risques que comportent les tons trop sombres. Le déclin de la préparation colorée Dès 1587, Arménini signale que les préparations foncées s’assombrissent et que l’huile des préparations fonce et change de couleur223. Pernety en fait également la remarque dans son livre : «Elle pourroit passer pour la plus parfaite manière de peindre si quelques-unes de ses couleurs ne se ternissoient pas dans la fuite du temps ; elles deviennent brunes de plus en plus & les carnations prennent un ton
219
DUPREZ E., Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban, Op.Cit.p.14 219 HENDY, LUCAS, La préparation des peintures, Op.Cit. p. 246-247 220 DUPREZ E., Op.Cit.p.14 221 HENDY, LUCAS, Op.Cit. p. 246-247 222 J.P.RIOUX, Note sur l’analyse de quelques enduits provenant de peintures françaises des XVIIeme et XVIIIeme siècles, Annales du laboratoire des Musées de France, 1973.p.35 à 43 223 ARMENIE G B, De vari procetti della pittura, 1567, cité par DUPREZ E., Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban,Op.Cit.
162 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
roux jaunâtre, qui en altère la vérité c'est le défaut inséparable, & peut être sans remède de l'huile »224. Le problème du séchage est aussi d’importance. Les préparations à l’huile sèchent plus lentement que le gesso et sont moins absorbantes car déjà chargées en huile. Si le mélange de la préparation est dès le départ trop chargé en huile, la règle du gras sur maigre n’est pas respectée et l’accroche de la peinture sera mauvaise. Pour finir, lors de leur vieillissement, l’huile et les pigments deviennent plus transparents et la préparation sous-jacente devient ainsi visible225. Si la préparation est trop sombre le tableau s’assombrira d’autant plus. C’est une altération visible sur le tableau étudié dans ce mémoire. Toutes ces raisons ont fait peu à peu disparaître les préparations colorées dans les ateliers, vers le milieu du XVIIIème siècle. Les artistes vont à nouveau se tourner vers des préparations claires ou blanches. « Lorsque l’encollage est sec, on enlève, avec la pierreponce, les nœuds saillants ; ensuite, avec le couteau, on applique une couche blanche de céruse 226».
c. Composition de la préparation rouge argileuse Les nombreux écrits d’artistes du XVIIème siècle ont révélé une grande variété de compositions de préparations227. Cette même constatation a été faite par Alain Duval, qui a analysé un grand nombre de tableaux français des XVIIe et XVIIIe siècles228.
224
PERNETY, Dom Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure avec un traité pratique des différentes manières de peindre, dont la théorie est développée dans les articles qui en sont susceptibles. Ouvrage utile aux artistes, aux élèves & aux amateurs, Paris, 1757.p.LXXXVI(86) 225 DUPREZ, (Elena), Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Vénus et Vulcain » de l’Albane, Mémoire IFROA, 1982.p p.14 225 HENDY, LUCAS, La préparation des peintures, Op.Cit. p. 246-247 226 MERIMEE J.-F.-L (secrétaire perpétuel de l’école royale des Beaux-Arts), De la peinture à l’huile ou procédés matériels employés dans ce genre de peinture, depuis Hubert et Jean Van-Eyck jusqu’à nos jours, Paris, Mme Huzard, Librairie, 1830. 227 DUPREZ, Op.Cit. p.11 à 13 228 DUVAL, Etude d’enduit de préparations colorées de tableaux de l’école française des XVII et XVIIIe siècles par microanalyse X, Mémoire CNAM, 1989. DUVAL, Les préparations colorées des tableaux de l’Ecole française des dix-septièmes et dix-huitièmes siècles, Studies in conservation 37, 1992, p.239 à 258
163 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La couleur est généralement une ocre229, d’où la présence d’argile dans les préparations rouges. La concentration en oxyde de fer230 des préparations rouges détermine leur pouvoir couvrant. Les ocres à fort pouvoir couvrant pouvaient être coupées, plus facilement, avec une charge telle que le carbonate de calcium, ce qui réduisait les coûts. Environ la moitié des tableaux analysés par Alain image 144 : coupe stratigraphique d’une peinture du XVIIème siècle avec une préparation double : la première rouge et la seconde gris clair)
Duval, indique le caractère courant de cette solution plus économique. Les préparations étaient parfois doubles : une
première couche sombre, puis une deuxième, d’impression231 , avec une couleur plus claire, du fait de l’addition de blanc de plomb et d’ocre. L’étude se focalise sur la première couche de préparation rouge, la seule présente sur le tableau de mémoire.
DUVAL, Les enduits de préparations de tableaux de Nicolas Poussin, Techné 1, 1994, p.35 à 41. 229 Les ocres sont des terres argileuses colorées par l’oxyde de fer. PEREGO, Dictionnaire des matériaux du peintre, Op.Cit, p.505. 230 DUVAL, Etude d’enduit de préparations colorées de tableaux de l’école française des XVII et XVIIIe siècles par microanalyse X, Op.Cit. 231 BERGEON (Ségolène), MARTIN (Elisabeth), La technique de la peinture française des XVIIe et XVIIIe siècles, Techné 1., 1994 .p.69
164 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
d.
Structure des argiles
Définition et structure des argiles232 L’argile est un groupe de minéraux omniprésents à la surface de la terre. Elle est formée par une action de l’eau au cours d’une sédimentation233 minérale ou par une décomposition de plusieurs roches234. Les argiles sont des minéraux désignés comme étant des aluminosilicates, caractérisés par une structure en feuillets. Cette structure particulière leur
vaut
aussi
le
nom
phyllosilicates. Les feuillets
de sont
bidimensionnels ont deux types de couches différentes : - La Image 145 : Schéma de la structure des feuillets composant l’argile
couche
tétraédrique
est
composée de cations Si 4+ au milieu de quatre anions O2-. - La
couche
octaédrique
est
composée de cations Al3+ et Mg2+ au milieu de OH-. Ces deux couches forment des feuillets, séparés par des espaces interfoliaires. Ces espaces peuvent être vides, ou composés d’ions ou de molécules d’eau. La taille des espaces interfoliaires, l’épaisseur des feuillets ainsi que l’enchaînement des feuillets et sa charge électrique sont caractéristiques d’une famille de phyllosilicates. Quatre grandes familles en sont ressorties235 :
232
EL HACHMI (Abdelhadi), Argile et minéraux argileux : propriétés physico-chimiques, Mémoire de l’université d’Abdelmalek Essaadi, Master fondamentale Chimie, 2013. 233 Processus au cours duquel des particules de matière arrêtent leur déplacement et forment peu à peu une couche sédimentaire. 234
PHILLIPPOT P.,MORA.E, Conservation of Wall paintings, édition Butterworths, London, 1984, p36 à 38. 235
HOLTZAPFFEL (Thierry), Les minéraux argileux, Villeneuve d’Ascq, SGN, 1985.p.10
165 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 146 : Schéma de la structure des quatre familles principales d’argiles
-
La kaolinite : alternance de tétraèdres et d’octaèdres. Leur lien est assuré par des liaisons hydrogènes. Son épaisseur est très
petite (0,7nm), elle empêche la
pénétration de molécules d’eau. Elle ne peut donc pas gonfler.
-
L’illite : un octaèdre intercalé entre deux tétraèdres. Leur lien est fait par une liaison ionique qui fixe son épaisseur à 10nm quelle que soit son hydratation. Elle renferme naturellement de l’eau (eau zéolithique) et par conséquent ne gonfle pas.
-
La chlorite : association d’une épaisseur : un octaèdre entre deux tétraèdres, avec une couche octaédrique indépendante dans la couche interfoliaire. Elle est composée d’hydroxyde de magnésium et d’oxyde ferreux. L’ensemble est très stable et mesure 14nm d’épaisseur.
-
La smectite : il en existe plusieurs types dont la composition et la forme diffèrent (minéral diactédrique ou trioctaédrique). Mais elles ont toutes la même base : un octaèdre encadré par deux tétraèdres. La montmorillonite est du type dioactaédrique, avec un déficit de charge octaédrique c’est-à-dire en charge négative. Les couches sont reliées entre elles par des forces de Van der Waals et des 166 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
forces électrostatiques attractives. Pour ces deux raisons, les ions interchangeables peuvent facilement les séparer et induisent une forte affinité de la montmorillonite avec l’eau236.
Au vu de ces informations, l’œuvre de mémoire ainsi que celles présentant une sensibilité accrue à l’eau, ont vraisemblablement une certaine quantité de montmorillonite contenue dans la préparation.
e. Les causes d’altérations des préparations argileuses Interactions huile/argile
L’argile interagit avec l’huile. De par sa composition, l’argile va aussi avoir tendance à capter les doubles liaisons présentes dans l’huile et à entraver son séchage chimique. Le mélange sèche donc beaucoup plus lentement qu’un film classique237. En outre, les terres contenues dans le mélange ont une importante prise d’huile238. Cette caractéristique rend le temps de séchage encore plus long, et a tendance à faire baisser excessivement la proportion d’huile dans le mélange. En d’autre termes, la capacité d’absorption d’huile par les ocres fragilise l’ensemble en le privant de liant et le rend pulvérulent et perméable239 plus rapidement. L’argile est également connue pour être un matériau très acide en surface240. Cette caractéristique peut catalyser certaines réactions, notamment lorsqu’elle est mise en
236
WALTIER (Thiery), Mécanique des sols, Cours CTN 504, ETS. http://slideplayer.fr/slide/1586613/ GRANDOU P, PASTOUR P, peintures et vernis, les constituants, édition Hermann, 1966, Paris, p. 778. (Dupez) 238 « Quantité d'huile de lin raffinée qui est absorbée, dans des conditions définies, par un échantillon de pigment ou de matière de charge » ISO 787, Méthodes générales d’essai des pigments et matières de charges, 1980, https://www.iso.org/obp/ui/#iso:std:iso:787:-5:ed-1:v1:fr 239 DUPREZ E., Etude historique et technique des préparations rouges à travers la restauration d’un tableau du XVIIème siècle peint d’après « Venus et Vulcain » de l’Alban, Op.,Cit. p.34 240 Ibid. p.35 237
167 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
contact avec un composé organique241. Ce phénomène entraîne rapidement
un
vieillissement du film, une augmentation de son acidité et une rupture des chaînes moléculaires242. Cette acidité vient s’ajouter à l’acidité due au vieillissement de l’huile. En effet, lorsqu’elle sèche, l’huile capte le dioxygène de l’air et forme des peroxydes et des liaisons covalentes avec les chaînes d’acide gras : c’est la réticulation243. Mais, après que l’oxygène ait procédé à son séchage, vont contribuer à sa dépolymérisation et à son acidification, tout comme la présence des acides gras insaturés.244 Au cours de ce vieillissement, les polymères se cassent et créent des radicaux hydrophiles. Ils ne forment donc plus de film protecteur autour des argiles, il fait même le contraire. Les argiles fragilisent donc la préparation dès le départ.
Gonflement des argiles montmorillonites au sein de la structure Lors de la réalisation de la préparation, le liant de celle-ci protège les argiles des variations d’humidité extérieure. Cependant, lors de son vieillissement, les polymères que l’huile a formés lors de sa réticulation245, se cassent. L’humidité peut donc circuler au sein de toute la couche et créer des affaiblissements. Les argiles sont composées de particules de très petites dimensions. Cette structure a son importance car elle explique la raison pour laquelle elles sont si absorbantes246. Plus un matériau est composé de petites particules, plus il offre une grande surface accessible à un autre matériau (l’huile dans le cas présent) : on parle de surface spécifique. Plus la surface de contact est grande plus le matériau est absorbant.
241
SOLOMON D M, HAWTHORNE D.G, Chemistry of pigments and rillers, Edition t.Wiley and Sons, New York, 1983. DUPREZ, Op.Cit.p.34 242
DUPREZ E., Op.Cit.p.35 ZOVI (Ornella), Fonctionnalisation et photopolymérisation de l’huile de lin en vue de l’élaboration de nouveaux matériaux sans émissions de composés organiques volatiles, INSA de Rouen, 2009. P.5 244 ZOVI, Op.Cit. P.5 245 Formation de réseau tridimensionnel lors de la polymérisation de l’huile. ZOVI, Op.Cit. P.5 246 DUPREZ, Op.,Cit. p 33 243
168 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
L’eau peut se trouver sous diverses formes dans une structure argileuse. Elle peut être adsorbée par la surface externe ou associée aux cations interfoliaires ou sous forme d’eau cristalline (d’hydroxyle (OH)). Le gonflement peut être cristallin ou osmotique. -
Le gonflement cristallin247 : pénétration de l’eau dans l’espace interfoliaire, qui conduit l’argile à son état hydraté. Ces molécules d’eau cassent les forces de Van der Waal qui maintenaient une certaine distance entre les feuillets, et ainsi créent un gonflement.
-
Le gonflement osmotique 248 ou macroscopique ou encore gonflement libre : lorsque la quantité d’eau a dépassé la capacité des forces électrostatiques attractives maintenant les feuillets entre eux249. L’eau passe alors librement entre les feuillets et l’argile perd sa cohésion250.
Dans le premier cas, un gonflement très important sollicite mécaniquement les autres composants de la préparation et contribue à la fragilisation générale. C’est dans ce deuxième cas, que l’argile devient un problème au sein de la préparation. Elle se désagrège et entraîne un déplacage d’une partie ou de la totalité de la strate : il s’agit d’une transposition spontanée. Il faut donc être prudent lors de l’utilisation de procédé aqueux au cours de la restauration d’œuvres contenant ce type d’argile. Hormis ce gonflement fragilisant, l’eau provoque une érosion des argiles qui contribue aussi à leur détérioration251. En outre, la migration et la cristallisation des sels solubles, transportés par l’eau, accentuent le désagrégement des argiles252.
247
EL HACHMI (Abdelhadi), Argile et minéraux argileux : propriétes physico-chimiques, Mémoire de l’université d’Abdelmalek Essaadi, Master fondamentale Chimie, 2013. 248 Ibidem 249 Ibidem 250 PHILLIPPOT P.,MORA.E, Conservation of Wall paintings, édition Butterworths, London, 1984, p36 à 38. 251 Fiche technique « peintures, pigments et vernis » nov.1971 « les argiles »p.601 à 605 cité par DUPREZ,.,Cit. p. 20 252 PHILLIPPOT P.,MORA.E, Conservation of Wall paintings, édition Butterworths, London, 1984, p36 à 38.
169 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. Les adhésifs d’imprégnation a. Restauration de tableaux ayant une préparation argileuse
En plus des problèmes esthétiques que posent les préparations colorées dans le temps, il y a des dégradations physiques et chimiques. Un problème de clivage au niveau de la préparation, une pulvérulence inquiétante et de nombreuses pertes d’écailles sont signalées253. Au XIXème siècle, on remarque déjà que certaines opérations de restauration telles que le rentoilage, ou le refixage à la colle animale, sont dangereuses et Merrifield dit même « qu’il est nécessaire d’enlever la préparation aussi bien que la toile, car la préparation apparaît quelquefois composée d’une terre rouge dure et friable »254. Plus récemment, Ségolène Bergeon incite de nouveau à la prudence : « Si le textile est trop serré et qu’il ne laisse passer que la partie aqueuse de la colle (comme dans certaines peintures françaises des XVIIe et XVIIIe siècles), en présence de préparation rouge et argileuse, celles-ci se délitant sous l’action de l’eau qui fait glisser les micelles d’argile, le risque de transposition spontanée est majeur255. » Malgré
tout,
certains
rentoilages
ont
fonctionné mais leur action est de courte durée. En effet, le principal problème de ces préparations est la présence d’argile réagissant à l’eau. Le rentoilage fait pénétrer une colle aqueuse au sein même de cette argile. Si par chance elle ne provoque pas une image 147 : Lauri (Filippo), saint François en extase, 2e moitié du XVIIe siècle, huile sur toile, 48x38cm, musée du Louvre, paris
transposition, elle ne permet pas longtemps d’isoler les argiles de l’humidité ambiante. Une fois son action terminée,
l’œuvre
se
soulève
encore
plus
dangereusement et rapidement. Cela a été le cas de St François en extase, œuvre de Lauri,
253
DUPREZ E., Op.,Cit. p. 20 MERRIFIELD M.P, Orginal treatises on the art of painting, New York, Dover Publication, 1967, Vol.1, Part 2 p CXLVII. 255 BERGEON S, CURIE P, Peinture et dessin, Edition du patrimoine, 2009, p.529 254
170 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
qui a subi un rentoilage, une reprise de rentoilage, un refixage à la colle animale. Un mois après, l’œuvre était de nouveau dangereusement soulevée256. Il est arrivé que les restaurateurs finissent par réaliser une transposition en retirant toute la préparation pour tenter de stabiliser l’œuvre. La Résurrection de Lazare du Guerchin, conservé au Louvre, en est un exemple, ainsi que Le Christ à la colonne attribué à Le Sueur, également conservé au Louvre257. Les traitements avec un adhésif naturel ne sont donc pas une solution adaptée dans le cas des préparations contenant des argiles vertes. Les adhésifs synthétiques qui ont été mis au point plus récemment, au cours des dernières décennies seront certainement une meilleure réponse à ce problème.
b. Cahier des charges de l’adhésif258 L’adhésif d’imprégnation devra jouer plusieurs rôles : assurer la protection des argiles, pallier l’insuffisance du liant, supporter les contraintes de cisaillement lors des mouvements de la toile. Une intervention d’imprégnation synthétique n’est pas une opération anodine. L’adhésif pénétrant au sein de la préparation n’est pas entièrement réversible259 et fera, au moins partiellement, partie de la stratigraphie. Sa stabilité dans le temps devra être très grande et il devra conserver ses propriétés chimiques et mécaniques. L’adhésif devra être suffisamment adhérent et souple, afin de ne pas se détériorer lors des mouvements naturels du support et supporter les contraintes existant au sein de la préparation.
256
VIGUERIE, Approche de la stabilité à l’humidité de trois argiles pouvant être contenues dans les pigments constitutifs des préparations colorées, Mémoire IFROA, 1997.p.125 257 Ibid.p.125 258 Ibid., p.72 et 73. BOURNET-BECDELIEVRE, Natalie (de), Approche théorique du refixage, Mémoire IFROA, 1979. 259 Dans ce cadre, il est plus appropriée de parle de retraitabilité. Un retour parfait en arrière n’est pas possible mais l’intervention est faite dans un souci de faciliter les interventions futures. BERTHOLON (Régis), De la pratique à la théorie : une déontologie née dans les ateliers, Journée d’étude à la Bibliothèque Nationale de France, 15 avril 2013.p.4.
171 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Il est très important qu’il n’ait aucune influence chimique sur les matériaux constitutifs. Le pH devra être le plus neutre possible et le solvant ne devra pas rester au sein de l’œuvre trop longtemps (la rétention de solvant peut être dangereuse lors d’un contact prolongé). L’adhésif devra être suffisamment pénétrant pour atteindre la préparation. Le solvant de dilution devra avoir une mouillabilité suffisante, et s’évaporer ni trop lentement ni trop vite. Si l’évaporation est trop rapide, l’adhésif ne pourra pas pénétrer suffisamment en profondeur. Il pourra être aqueux mais cela engendre un risque en raison de son affinité avec les argiles et de sa polarité. Par ailleurs, il est très important qu’après séchage, l’adhésif ne se resolubilise pas à l’eau (protection des argiles à l’humidité). Le mélange solvant-adhésif ne devra avoir qu’un minimum de retrait au séchage afin de le pas entraiîner des contraintes de cisaillement au sein de la préparation. Idéalement, l’adhésif ne devra apporter aucune modification visuelle à l’œuvre : ni de modification de couleur ni de modification de brillance. Une bonne pénétration et une bonne répartition de l’adhésif pourront aussi être favorisées par un apport de chaleur. L’emploi d’adhésifs thermoplastiques peut donc être intéressant.
172 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
II. Choix des matériaux de l’étude Afin d’estimer l’efficacité des adhésifs sélectionnés, deux séries de tests seront réalisées. Ils vont permettre de comparer la capacité de chaque adhésif à restituer et à maintenir la cohésion au sein des échantillons. Cette cohésion260 sera mise à l’épreuve par tests de résistance aux chocs et par des tests de traction.
1. La préparation argileuse Selon l’étude réalisée par Alain Duval261, 50% des artistes utilisaient des pigments seuls mélangés dans du liant et 50% contiennent une charge de carbonate de calcium. Afin de ne pas multiplier les composants, les échantillons seront élaborés selon la première recette. Une seule recette de préparation argileuse sera testée, elle sera donc la plus standard possible. La recette sera établie sur la base d’écrits du XVIIème siècle262. Les échantillons de préparation argileuse sont réalisés dans un mélange de 50% de terre de Sienne calcinée, 45% de colle de peau de lapin à 10% dans de l’eau et 5% de Bentonite. La terre de Sienne calcinée : il s’agit d’un pigment naturel de couleur brun rouge. Elle est obtenue par calcination à 700°C de terre de Sienne naturelle. Cette terre contient des oxydes de fer en majorité et des oxydes de manganèse. Ce pigment est très souvent retrouvé dans les écrits des artistes263 et contient les éléments retrouvés dans ces mêmes préparations lors d’études scientifiques plus approfondies264. Préparation maigre : Le choix d’une préparation maigre a été fait en raison du temps de séchage qui est beaucoup plus court que celui d’une préparation grasse265. L’huile siccative utilisée dans les préparations grasses, n’est considérée comme « sèche » que
260
La cohésion d’un matériau désigne l’ensemble des liens existant entre les molécules le composant. Ces liens sont des forces attractives permettant de maintenir les molécules les unes aux autres et donne ses propriétés mécaniques au matériau. 261 DUVAL, Op.Cit. 262 HENDY, LUCAS, Op.Cit.p.244 MAYERNE (Turquet de), Pictoria Sculptoria et quae subalternarum artium, 1620. 263 DUPREZ E., Op.,Cit. p p.20 et 35 Mayerne recommande l’utilisation de « ocre brûlée qui se rougit au feu » Mayernes, Pictoria Sculptoria et quae subalternarum artium, 1620. 264 DUVAL (Alain), Op.Cit. p.253 265 La réalisation d’échantillons de préparation grasse a été tentée, mais même avec un ajout d’huile cuite en très petite quantité, il n’a pas été possible de la faire sécher et d’obtenir un résultat utilisable dans le cadre de l’étude.
173 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
plusieurs mois après son application266. Ce temps est trop important pour que les échantillons soient utilisables dans le cadre de ce mémoire, sachant qu’il est d’autant plus long lorsque l’huile est mélangée avec de terre267. Par ailleurs, même si le film d’huile est sec il ne sera pas suffisamment détérioré pour être utilisable en tant que simulation d’une préparation altérée et agée de plusieurs siècles, comme celle de l’œuvre étudiée. La colle de peau a l’avantage de sécher en même temps que l’eau s’évapore. De par sa composition collagénique, cette préparation sera naturellement sensible à l’humidité, ce qui ne serait pas le cas d’une préparation contenant une huile qui n’aurait pas eu le temps de polymériser. Les échantillons sont donc pauvres en liant, poreux et sensible à l’eau. Choix de l’argile : la bentonite est une argile smectite de la famille des montmorillonites. La montmorillonite est connue pour sa grande capacité à gonfler en présence d’eau, qu’elle absorbe dans des quantités bien supérieures à celles des autres argiles268. C’est elle qui permettra de confirmer ou non l’efficacité des adhésifs utilisés pour la stabilisation d’une préparation argileuse. Elle est indiquée comme présente en « faible quantité269» dans certaines études, elle représentera donc 5% du mélange.
266
ZOVI, Op.Cit. P.5 Chapitre sur les interactions huile/argile p.167 268 G.TORRACA, Brique, adobe, stone and architectural ceramics : deterioration process and conservation practice, North American International Region Conference, Williamsburg, 10/16 sept. 1972. P.145 à 165 (Duprez p.34) Cf chapitre sur le gonflement des argiles p. 168 269 DUVAL (Alain), Les préparations colorées des tableaux de l’Ecole française des dix-septièmes et dixhuitièmes siècles, Studies in conservation 37, 1992. 267
174 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2. Les adhésifs sélectionnés Les adhésifs ont été sélectionnés en fonction des paramètres énoncés précédemment et de leur utilisation courante dans les opérations d’imprégnation270. Ils seront testés à concentration équivalente, c’est-à-dire que chaque échantillon recevra la même masse d’adhésif.
Plexisol P550
Nature
Solution acrylique
Médium de consolidation ®4176271 Emulsion acrylique
Composition
Méthacrylate de butyle
Acrylate et méthacrylate de butyle
Diluant(s) d’expérience Concentration commerciale Calculs de dilution
White Spirit, xylène 0,84kg/L à 40% C0xV0=C1xV1
Eau (75%) éthanol (25%) 1,0g/mL à 25%
C1= (V0xC0) /V1
V1=(C0xV0)/C1
C1=(0,84x1)/8
V1=(1,0x1)/0,1 =10ml
Concentration274 d’utilisation sur les échantillons
Mélange à 5% donc C= 0,1g/ml
C0xV0=C1xV1
Pourcentage : 25/10=2,5 Si C = 0,1 g/ml, alors mélange à 2,5 %
Acryl ME
Regalrez 1126272
Micro émulsion acrylique273
Résine aliphatique
Eau
Hydrocarbone cyclique, polymérisation de monomère de styrène White Spirit
1,0kg/L à 41%
0,97kg/L à 20%
C0xV0=C1xV1 V1=10ml Pourcentage : 41/10=4,1
C0xV0=C1xV1 V1=(0,97x1)/0,1 V1=9,7ml Donc Pourcentage : 20/9,7 = 2,1
Si C=0,1g/ml alors mélange à 4,1%
Si C=0,1g/ml alors mélange à 2,1%
270
Trois adhésif acryliques ont été sélectionnés, et ont des solvants de dilution différents. En plus de constater leur efficacité, il sera intéressant de voir si le solvant de dilution aqueux fragilise la préparation et diminue l’action de l’adhésif 271 LARDET (Guillemette), Comparaison du Plexisol® P550 et du Medium de Consolidation® 4176, CeROArt [Online], EGG 4 | 2014, Online since 19 March 2014, connection on 28 April 2018. URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3986 272 COLLABORATION, Consolidating properties of Regalrez 1126 and Paraloid B72 applied to wood, Département des sciences de la Terre, Université de Calabre, Italie, 2009. 273 Très fines particules, plus pénétrante qu’une émulsion normale 274 Utilisation de la formule de dilution : C0xV0=C1xV1
175 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Chaque adhésif sera appliqué à la seringue en 9 points, sur les échantillons destinés aux tests de dureté. Il sera appliqué en 4 passages, dans une quantité de 2ml par échantillon à chaque fois275. Chaque Schéma 1 : Points d’application de l’adhésif
échantillon aura donc 0,8g d’adhésif. Les adhésifs seront également appliqués en 9 points sur les
échantillons de traction, mais seulement en 2 passages. Chaque échantillon recevra 2mL au total.
III. Mise en place et résultats des tests de dureté 1. But et principe des tests de dureté Les tests de dureté ont pour but de mettre à l’épreuve la résistance à l’enfoncement et la ténacité276 de l’échantillon. Ils simuleront un impact causé par une mauvaise manipulation de l’œuvre. Une préparation argileuse fragilisée et non cohésive, ne résisterait pas à ce genre de choc et causerait une perte de matière. Il existe plusieurs types de tests de dureté : la dureté Brinell et la dureté Vickers277. C’est le principe de fonctionnement de ce dernier que sera repris au cours de cette expérience. La mesure de la dureté avec un test de Vickers se fait par la mesure de l’empreinte que laisse une pointe pyramidale en s’enfonçant dans l’échantillon. Plus l’échantillon est mou, plus la pointe s’enfoncera et plus l’empreinte sera grande.
Schéma 2 : Test de dureté Vickers
275
Le nombre de passages correspond au nombre moyen d’applications de Plexisol P550® sur un tableau. 276 « La ténacité est la capacité d’un matériau à résister à la propagation d’une fissure» BERLIROUXN, JACOB JC, GILLOUX JF, La ténacité, IUT Chambéry. Format PDF : www.sgm.univsavoie.fr/LP/...tenacite/Berlioux%20_Gilloux_Jacob__tenacite.pdf 277 https://www.struers.com/fr-FR/Knowledge/Hardness-testing#
176 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La force appliquée par la pointe est maintenue constante, tout comme l’angle appliqué et les conditions environnementales. Ces tests seront réalisés avec un système réalisé en atelier.
2. Echantillons Les échantillons de tests de résistance aux chocs ont tous été réalisés avec la préparation décrite précédemment278 : 50% de terre de Sienne calcinée, 45% de colle de peau de lapin, à 10% dans de l’eau, et 5% de Bentonite. Seuls les échantillons témoins, ont été réalisés sans argile : 55% de terre de Sienne calcinée et 45% de colle de peau liquide. Afin de réaliser les tests de dureté, les échantillons sont Image 148 : Echantillon du test de dureté
confectionnés sous forme de plaquettes. Ainsi aucun autre élément n’entre en compte dans l’expérience et ne risque d’influencer le
résultat. 20g de préparation est donc versée à l’aide d’une seringue, dans chaque moule, mesurant 4,75 x 2,5 x 1 cm. Lors du remplissage des moules, chaque composé de la préparation est pesé directement dans la seringue. Chaque échantillon a ainsi exactement la même quantité de liant et de pigment. Avant les prises de mesures, tous les échantillons subissent d’importantes variations de chaleur et d’humidité (1 cycle de 48 heures à 40°C, 1 cycle de 24 heures à 95% d’humidité relative et 1 cycle de 24 heures à 40°C). En tout dernier lieu, les échantillons seront portés à 60°C pendant une heure afin de fragiliser la structure collagénique du liant.
278
Cf choix des matériaux, Préparation argileuse p.172
177 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
3. Protocole expérimental Les pré-tests seront réalisés avec deux séries de dix échantillons. La première ne contiendra pas de bentonite dans sa composition et la seconde en contiendra. Les séries seront testées avant toute opération de fragilisation. Si les résultats sont satisfaisants, ils serviront de témoins, tout comme les catégories 1 et 2 présentées ci-dessous. Six types d’échantillons sont testés : -
Type 1 : échantillon sans argile
-
Type 2 : échantillon avec argile
-
Type 3 : échantillon testant le Plexisol P550®
-
Type 4 : échantillon testant le MFK®
-
Type 5 : échantillon testant l’Acryl ME®
-
Type 6 : échantillon testant le Regalrez 1126®
Les deux premiers types serviront de témoins au cours de l’expérience. Ils permettront de constater la différence de réaction entre une préparation avec des argiles classiques et celle avec un ajout d’argile gonflante. La catégorie 2 permettra aussi d’estimer l’efficacité ou l’inefficacité de chaque adhésif. Chaque catégorie est testée sur une série de 15 échantillons : -
Série 1 : 5 échantillons ayant subi des grandes variations de température et humidité, + l’adhésif (2 jour après l’application) ou sans (catégorie 1 et 2)
-
Série 2 : 5 échantillons comme ceux de la série 1 + 1 cycle de grandes variations de température et humidité
-
Série 3 : 5 échantillons comme ceux de la série 2 + immersion complète et séchage
La série 2 est composée d’échantillons ayant subi un second cycle de variations. Elle a pour but d’étudier l’efficacité de l’adhésif ayant subi des fortes variations hygrométriques et de déterminer si les argiles sont bien isolées ou non. La série 3 a pour but de simuler un dégât des eaux ou une restauration utilisant une forte humidité. Chaque échantillon aura été immergé pendant 20 secondes dans de l’eau à 178 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
15°C. Il sera ensuite laissé sécher pendant 24heures dans une pièce à 24°C et à 49% d’humidité relative. Le nombre total d’échantillon sera donc de 110.
4. Appareil et méthodes de mesure Les tests de dureté vont se dérouler en plusieurs étapes : la réalisation de l’impact dans l’échantillon, prise en photo de l’impact, mesure réalisée sur Photoshop et conversion de la mesure en millimètres.
Réalisation de l’impact Tout d’abord, les points d’impact devront être réalisés à une même température (24,9°C) et à une même humidité relative (49%). Travaillant sur des matériaux très sensibles à l’humidité, un changement dans ces paramètres pourrait fausser les résultats. Tous les points d’impact seront faits le même jour. L’impact des échantillons sera réalisé par une
Image 149 : Photographie du système de balancier
pointe de 42 degrés d’angle pour 3,5mm de profondeur. Le diamètre de l’impact sera compris entre 0 et 2,5mm. Afin que chaque échantillon ait le même angle et la même force d’impact, cette pointe est montée sur un système de balancier. Le balancier est lâché systématiquement à la même hauteur279 et sans apport de vitesse initiale. C’est la pesanteur qui donnera sa vitesse au pendule. Image 150 : Pointe
279
L’angle du lâcher a été déterminé par des tests préalables : à 30°, 40°, 45°, 50°, 55°, 60°,65°, 70°. Les angles de 30 à 45° ne donnaient pas un impact net et trop petit (augmentation du rapport taille,
179 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
D’après nos calculs280, la vitesse du pendule au moment de l’impact avec l’échantillon est de 1,4m/s. Photographie et conversion des données
Les dimensions des points d’impact étant très petites, elles ne peuvent être mesurées avec une simple règle, même précise. Chaque échantillon sera donc photographié et traité par un logiciel, pour une mesure au pixel près. Afin de réaliser des photographies précises et toujours identiques, un appareil photo Canon EDS 700D avec un objectif EFS18-135mm a été positionné sur un pied au-dessus d’une table, où se trouve l’échantillon. La lumière est une lumière entièrement artificielle, l’éclairement est d’une valeur de 261lux à l’emplacement de l’échantillon. L’objectif est positionné à 20,2cm au-dessus de l’impact et les réglages sont déterminés à une vitesse d’obturation de 1/30seconde, une sensibilité iso de Image 151 : Prise en photo d’un échantillon impacté.
6400 et une distance focale F36. Les photographies ont été enregistrées en JPEG de qualité élevée (5184x3456).
précision de mesure). La rupture des échantillons était presque systématique à 70°. Ne souhaitant pas risquer une casse trop fréquente des échantillons, c’est l’angle de lâcher 55° qui a été sélectionné. 280 Annexe 1 : Calcul de la vitesse d’impact
180 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Dans le but de réaliser la conversion du nombre de pixels en millimètres, un objet étalon281 a été pris en photo dans un premier temps. Deux lames mesurant très exactement 1,85mm
d’épaisseur
correspondaient
à
elles
deux,
à 120 pixels lors de la
mesure, grâce au logiciel Photoshop CS2.
Image 152 : Photo de la jauge d’épaisseur métrique
Toutes
les
photos
étant
paramétrées de la même manière, l’équivalence
sera
donc
1pixel=0,0154mm. Chaque échantillon est impacté puis pris en photo. Le positionnement de divers curseurs sur le logiciel Photoshop® permet de déterminer le nombre de pixels Image 153 : Traitement et mesure de l’impact sur Photoshop®
281
composant la forme voulue et ainsi de donner une mesure précise.
Jauge d’épaisseur métrique Facom
181 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
5. Pré-tests Les pré-tests ont pour but de démontrer que les résultats obtenus dans des conditions réelles d’expérience sont répétables. Ces deux notions, très importantes pour la crédibilité d’une étude scientifique, sont définies de la manière suivante :
-
Condition de répétabilité : « condition de mesurage dans un ensemble de conditions qui comprennent la même procédure de mesure, les mêmes opérateurs, le même système de mesure, les mêmes conditions de fonctionnement et le même lieu, ainsi que des mesurages répétés sur le même objet ou des objets similaires pendant une courte période de temps 282»
-
Condition de reproductibilité : « condition de mesurage dans un ensemble de conditions qui comprennent des lieux, des opérateurs et des systèmes de mesure différents, ainsi que des mesurages répétés sur le même objet ou des objets similaires » 283.
Les paramètres d’expériences ayant été préalablement détaillés, les mesures répétées sur des objets similaires peuvent être entamées. Vingt mesures sont réalisées sur dix échantillons de préparation sans bentonite et dix échantillons de préparation argileuse (colle de peau, terre de Sienne calcinée et bentonite). Aucune opération de fragilisation n’a été faite sur ces échantillons.
Cette double série de dix permet de déterminer si l’expérience est répétable, mais aussi d’observer s’il existe une différence de comportement face aux chocs entre les échantillons ayant de la bentonite dans leur composition et ceux n’en ayant pas. Les résultats indiquent que ce n’est pas le cas. Avant tout passage en chambre humide, les échantillons des deux séries sont très proches.
282
JCGM 200, Vocabulaire international de métrologie-Concepts fondamentaux et généraux et termes associés (VIM), version 2008. p.23. PDF : https://www.bipm.org/utils/common/documents/jcgm/JCGM_200_2012.pdf 283 Ibid. p.24 https://www.bipm.org/utils/common/documents/jcgm/JCGM_200_2012.pdf
182 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Pré-tests Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Echantillon 6 Echantillon 7 Echantillon 8 Echantillon 9 Echantillon 10 Moyenne Ecart type à la moyenne Incertitude relative à 95% Incertitude relative à 99%
Sans Bentonite Nb de pixels mm 81 1,247 80 1,232 85 1,309 87 1,340 82 1,263 84 1,294 82 1,263 88 1,355 85 1,309 82 1,263 1,287 mm 0,04055 mm 2,3% 3,2%
Avec Bentonite Nb de pixels mm 84 1,294 83 1,278 86 1,324 86 1,324 82 1,263 83 1,278 83 1,278 79 1,217 85 1,309 86 1,324 1,289 mm 0,03409 mm 1,9% 2,7%
284
Avant toute action de fragilisation, les échantillons ont des résultats identiques. La moyenne des échantillons sans bentonite est de 1,287mm de diamètre d’impact et la moyenne des échantillons avec bentonite est de 1,298mm. La différence entre les deux séries est en moyenne de 0,001mm, valeur qui peut être comprise dans l’incertitude de la mesure. L’incertitude relative à 99% est comprise entre 2,7 % et 3,2% pour les deux séries témoins. La tolérance d’incertitude relative lors de l’expérience de ce mémoire est à 10%. Au vu de ces données, les échantillons sont homogènes et peuvent être considérés comme des objets similaires, l’expérience est répétable et peut être validée. Les tests pourront être réalisés dans les mêmes conditions que pour ces deux séries.
284
Tous les calculs ont été détaillés dans l’Annexe 2 p.252
183 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
6. Résultats Il est important de signaler que les résultats présentés ci-dessous ne peuvent être utilisés en tant que valeurs indépendantes. Ce sont uniquement des valeurs permettant de réaliser une comparaison entre les différents éléments testés. Les échantillons témoins
Sans argile
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne Ecart type à moyenne Incertitude 95% Incertitude 99%
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 96 1,478 102 1,571 115 1,771 94 1,448 101 1,555 118 1,817 101 1,555 98 1,509 113 1,740 95 1,463 104 1,602 112 1,725 97 1,494 101 1,555 112 1,725 1,488mm 1,558mm 1,756mm la 0,0414mm 0,03363mm 0,03913mm
Avec argile
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne (mm) Ecart type à la moyenne (mm) Incertitude 95% Incertitude 99%
3,5% 5,7 %
2,7% 4,4%
3,9% 4,6%
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 119 1,831 135 2,079 Rupture 122 1,878 140 2,156 292 4,497 119 1,831 134 2,064 297 4,573 118 1,817 137 2,110 300 4,62 122 1,878 138 2,125 Rupture 1,847 2,107 4,563 0,02887 3,9% 3,2%
0,03663 2,2% 3,6%
0,06206 1,7% 2,8%
Dans un premier temps, les échantillons de base ont été testés. Les deux premières catégories sont étudiées afin de déterminer si les argiles ont bien une influence sur les propriétés cohésives des échantillons après fragilisation. Dans le cas contraire, l’étude n’aurait pas eu lieu d’être. 184 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Interprétation : Une perte de cohésion des deux séries d’échantillons est visible. Or une différence significative de comportement est visible dès la première mise en chambre humide : les échantillons sans argile présentent une meilleure cohésion que ceux qui en contiennent, dès la première série. L’écart entre les deux types d’échantillon va d’avantage se creuser après le second cycle de fragilisation. Les échantillons sans argile montrent une légère perte de résistance au choc mais cela est probablement aussi dû à la nature du liant. Les préparations avec bentonite s’affaiblissent également. La dernière série est la plus significative. On constate une perte de 60%285 de la résistance aux chocs pour les préparations argileuses, voir une fracture totale, contre 15% pour les préparations sans bentonite. Cette perte est bien inférieure à celle des préparations avec bentonite, cette dernière a très clairement une influence sur le comportement de l’échantillon.
Tests des échantillons imprégnés au Plexisol P550®
Plexisol P550®
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne (mm) Ecart type à la moyenne (mm) Incertitude à 95% Incertitude à 99%
285
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle +adhésif cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 119 1,833 126 1,940 123 1,894 117 1,802 126 1,940 119 1,833 114 1,756 128 1,971 124 1,910 119 1,833 127 1,956 122 1,879 118 1,833 128 1,971 125 1,925 1,811 1,956 1,879 0,03375 2,3% 4,8%
0,01550 2,1% 1,6%
0,04063 2,7% 4,4%
(4,563-1,847)x100/4,563=60 %
185 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Dans la première série, le Plexisol P550® ne semble pas avoir d’action sur les propriétés de résistance au choc de la préparation déjà fragilisée. Les résultats sont les mêmes qu’avant son application sur l’échantillon. La seconde série est plus révélatrice. L’échantillon perd 7,5% de sa résistance contre 12% pour l’échantillon sans adhésif. La dernière série présente une meilleure résistance que la seconde. Après immersion les échantillons ont une nouvelle augmentation de résistance de 4%. Le Plexisol P550® semble donc conserver la cohésion de l’échantillon et isoler les argiles de l’humidité.
Tests des échantillons imprégnés au médium de consolidation ®4176
MFK
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne (mm) Ecart type à la moyenne (mm) Incertitude 95% Incertitude 99%
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle +adhésif cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 96 1,478 116 1,786 217 3,342 98 1,509 114 1,756 225 3,465 97 1,494 113 1,740 Rupture 99 1,525 114 1,756 Rupture 98 1,509 113 1,740 Rupture 1,503 1,756 3,403 0,01776 1,5% 2,4%
0,01878 1,3% 2,2%
0,08697 3,2% 5,3%
Dans la première série l’imprégnation des échantillons au MFK® augmente leur résistance aux chocs. Ils ne retrouvent pas une cohésion équivalente à celle d’avant la première fragilisation mais ils se rapprochent de la préparation fragilisée sans bentonite. Cependant, cette tendance ne se confirme pas dans la seconde série. Les échantillons présentent une perte de résistance de 14%. Ce résultat indique que l’argile n’est probablement pas bien isolée ou que l’adhésif est aussi sensible aux variations d’humidité relative. Cette hypothèse est très largement démontrée par cette troisième série au cours de laquelle 3 échantillons se sont rompus. La perte de cohésion des deux restants est de 56% par rapport à la première série. La préparation est donc plus cassante que sans adhésif, elle est plus résistante mais se casse davantage.
186 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le MFK® ne semble pas du tout être une solution adaptée au problème d’isolation de préparation argileuse. Il fragilise plus qu’il ne consolide la préparation dans ce cas précis et n’isole pas du tout les argiles de l’humidité.
Tests des échantillons imprégnés à l’Acryl ME® Acryl ME
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne Ecart type Incertitude à 95% Incertitude à 99%
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle +adhésif cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 141 2,171 146 2,248 169 2,603 143 2,202 147 2,246 172 2,6492 146 2,248 148 2,279 168 2,587 146 2,248 147 2,264 167 2,572 145 2,233 148 2,279 169 2,603 2,220 2,263 2,613 0,03340 0,01602 0,03230 1,9% 0,9% 2,5% 3,1% 1,4% 1,5%
L’Acryl ME® fragilise immédiatement la préparation. Dès son application, les échantillons perdent 20%286 de leur résistance. L’ensemble est plus stable lors de la seconde série, il y a un léger affaiblissement mais beaucoup moins important. Dans la dernière série, l’échantillon continue perdre un peu de sa cohésion. Après avoir détérioré la préparation, il semblerait que l’Acryl ME® stabilise légèrement l’ensemble. Cependant, il parait risqué de l’utiliser dans un cadre réel, tout du moins dans ces conditions d’application.
Tests des échantillons imprégnés au Regalrez 1126® Regalrez 1126®
Echantillon 1 Echantillon 2 Echantillon 3 Echantillon 4 Echantillon 5 Moyenne (mm) Ecart type à la moyenne (mm) Incertitude à 95% Incertitude à 99% 286
Série 1 : Premier Série 2 : Second Série 3 : immersion cycle +adhésif cycle et séchage Pixels mm Pixels mm Pixels mm 137 2,110 121 1,863 124 1,910 135 2,079 120 1,848 126 1,940 132 2,033 121 1,863 125 1,925 137 2,110 120 1,848 128 1,971 132 2,033 124 1,910 124 1,910 2,073 1,866 1,925 0,03865 2,3% 3,8%
0,02550 1,7% 2,8%
0,01500 1,0% 1,6%
Par rapport à la préparation argileuse fragilisée sans adhésif : moyenne de 1,847mm.
187 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Le Regalrez 1126® commence par diminuer la résistance de l’échantillon de 12%. Cependant, dès la seconde série, sa résistance réaugmente de 10% et reste constante même après l’immersion dans l’eau. Il semblerait que le Regalrez 1126® permette d’empêcher le gonflement des argiles. Malgré une légère fragilisation au départ, il pourrait être une solution intéressante pour répondre au problème des préparations argileuses.
Tableau récapitulatif des moyennes des tests de dureté (en mm) Sans
Avec
Plexisol
MFK®
Acryl ME®
Regalrez
argile
argile
P550®
Série 1
1,488
1,847
1,811
1,503
2,220
2,073
Série 2
1,558
2,107
1,956
1,756
2,263
1,866
Série 3
1,756
4,563
1,879
3,403
2,613
1,925
1126®
D’après ces résultats, la présence des argiles gonflantes dans les échantillons à un réel impact sur son comportement mécanique. Les comportements des adhésifs de consolidation sont assez différents les uns des autres mais on constate une tendance plus ou moins importante à perdre en cohésion (hormis avec le Regalrez 1126®). A ce stade, seul le MFK® à un comportement totalement rédhibitoire, dans le cadre de l’expérience. Les tests de traction vont venir compléter ces résultats et nous permettre de proposer une interprétation plus approfondie287.
287
Cf. Interprétation générale des résultats p 197
188 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
IV. Mise en place et résultats des tests de traction 1. But et principe de l’expérience Les tests de traction sont réalisés en complément des tests de résistance aux chocs, présentés ci-dessus. La diminution de la résistance aux chocs peut être due à la perte de cohésion des échantillons même après imprégnation, ou à une augmentation de la souplesse. Si les adhésifs, présentant une diminution de résistance aux chocs, ont aussi une bonne résistance à la traction, ils peuvent s’avérer intéressants à utiliser. Ces tests traction vont également permettre de déterminer si la préparation encollée sera capable de suivre les mouvements d’une toile.
2. Echantillons Les échantillons de traction sont réalisés avec le même mélange de préparation que pour les tests de dureté. Cette fois, elle est appliquée sur une bande d’intissé épais288, en deux couches. Chaque échantillon représente environ 0,5g289 de préparation. 20 cm
2 cm 5 cm Schéma 3 : échantillon du test de traction
Chaque épaisseur de préparation est poncée, afin d’être plus proche du procédé réel mais surtout de diminuer les irrégularités.
288
Intissé TNT 55, 45g/m2 de chez le fournisseur CTS : ttps://www.ctseurope.com/fr/schedaprodotto.php?id=2693 289 0,5g ± 0,01g
189 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
3. Plan de l’expérience Cette expérience, étant un complément des tests de dureté ne comptera que 35 échantillons. 10 seront consacrés aux pré-tests. Les pré-tests seront réalisés avec une série d’échantillons n’ayant subi aucun affaiblissement préalable. La préparation aura été laissé à sécher pendant quatre jours dans une pièce ou l’humidité relative a varié entre 49 et 61%, pour une température comprise entre 18 et 24°C. Par la suite, chaque série comptera cinq échantillons : -
Série 1 : échantillons témoins, composés d’échantillons de préparation avec Bentonite
-
Série 2 : échantillons de préparation après imprégnation au Plexisol P550® (à 5% dans du White Spirit et du Xylène)
-
Série 3 : échantillons de préparation après imprégnation au MFK® (à 2,5% dans de l’eau et de l’éthanol)
-
Série 4 : échantillons de préparation après imprégnation à l’Acryl ME® (à 4,1% dans de l’eau)
-
Série 5 : échantillons de préparation après imprégnation au Regalrez 1126® (à 2,1% dans du White Spirit)
Chacune de ces séries aura subi un cycle de fragilisation, équivalent à celui de la série deux des échantillons des tests de dureté.
4. Méthode et appareil de mesure Les tests de traction seront effectués à l’aide d’une clef dynamométrique290 et d’une machine de traction. Un support en aluminium percé de cinq trous, sert de base à deux cylindres.
Schéma 4 : Machine à traction
290
Clef dynamométrique Sensotork 701®. Il est intéressant pour son faible couple de serrage comprise entre 1 et 20N.m. Fiche technique Annexe 3 p.255
190 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
L’un est fixe et l’autre permet une rotation. Les cinq trous permettent de régler la distance entre les deux accroches de l’échantillon. Les échantillons sont fixés par leurs extrémités sur les cylindres, à l’aide d’un ruban adhésif gaffer Diall®. La clef dynamométrique est conçue pour venir s’emboîter sur la douille hexagonale reliée au rouleau amovible. La force, appliquée manuellement, nécessaire pour faire fissurer l’échantillon s’affiche alors sur l’écran du dynamomètre (Newton-mètre).
Image 155 : Dynamomètre
Image 155 : Test de traction
Afin d’éviter une influence de paramètres tels que la température et l’hygrométrie sur les résultats des tests, toutes les mesures seront prises le même jour. La température est de 23°C au moment de la prise de mesure et l’hygrométrie est de 54%. Le test de traction s’interrompt à l’apparition de la première perte d’écaille.
191 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
5. Pré-tests Les résultats obtenus au cours des pré-tests sont référencés dans le tableau ci-dessous. Pré-tests
Mesure en N.m
Echantillon 1
1,18
Echantillon 2
1,19
Echantillon 3
1,17
Echantillon 4
1,01
Echantillon 5
1,08
Echantillon 6
1,09
Echantillon 7
1,16
Echantillon 8
0,98
Echantillon 9
1,10
Echantillon 10
1,13
Moyenne (N.m)
1,109
Ecart type (N.m)
0,07156194
Incertitude relative à 95%
4,61%
Incertitude relative à 99%
6,63% Les incertitudes relatives des pré-tests de traction sont un peu plus importantes291
que pour les tests de dureté mais restent inférieures à 10%. L’expérience peut donc être poursuivie dans les mêmes conditions.
6. Résultats
Image 156 : Echantillons de chaque série
291
Afin de palier a cette erreur relative plus importante, il aurait fallu augmenter le nombre de nos échantillons. Chose que nous n’avons pu faire faute de temps.
192 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Après l’application de l’adhésif et de son séchage, une grande différence de couleur est visible entre les échantillons d’Acryl ME® et les échantillons sans adhésif. Le Plexisol P550® ne semble pas le teinter. Le Regalrez 1126® et le MFK® apportent un très léger assombrissement. Les pré-tests ayant validé le système d’expérience, les tests sont réalisés dans la même journée et les mêmes conditions climatiques. Il est intéressant de remarquer aussi que sur la majorité des échantillons, la préparation se désagrège au niveau d’une extrémité. La préparation est probablement plus fine dans cette zone, cependant, l’adhésif étant présent sur toute la zone, cela reste un indice exploitable. Il est également possible que la préparation ait été fragilisée lors du découpage, pourtant prudent, des échantillons.
Echantillons sans adhésif
Mesure en N.m
1
0,91
2
0,90
3
0,89
4
0,84
5
0,91
Moyenne
0,89
Ecart type à la moyenne Incertitude relative à 95%
0,02915476 4,07%
Incertitude relative à 99%
6,73%
Les échantillons avant et après le cycle de fragilisation n’ont pas les mêmes résultats. Ils perdent 20% de leur résistance à la traction au cours de cette opération. Echantillons imprégnés de Plexisol P550®
Mesure en N.m
1
1,44
2
1,45
3
1,51
4
1,44
5
1,47
Moyenne
1,462 193
Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Ecart type Incertitude relative à 95%
0,02949576 3,41%
Incertitude relative à 99%
4,15%
On constate une nette augmentation des valeurs après l’application du Plexisol P550® : 64,3%. Ce résultat indique que la cohésion et l’élasticité au sein de la préparation est plus grande que dans les échantillons sans adhésif. Le Plexisol P550® semble être une bonne solution pour les préparations affaiblies, même après avoir été placé dans un environnement à forte humidité relative. Echantillons imprégnés de MFK®
Mesure en N.m
1
0,74
2
0,78
3
0,9
4
0,87
5
0,76
Moyenne
0,81
Ecart type à la moyenne Incertitude relative à 95%
0,07071068 10,85%
Incertitude relative à 99%
17,95%
Les incertitudes de ces tests sont beaucoup plus importantes que pour les pré-tests. Il s’emblerait que le MFK® ne se repartisse pas de manière homogène, créant des différences de comportement. De plus, les points d’écaillages ne se situent pas tous dans la même zone, contrairement aux autres tests. Le MFK® ayant été appliqué comme les autres, et étant le seul à obtenir se résultats, il ne semble pas qu’il s’agisse d’un problème de mise en œuvre. Les résultats, autant qu’il est possible d’en juger, sont équivalents et même légèrement inférieurs aux résultats des échantillons sans adhésif. La cohésion de l’échantillon n’est pas meilleure.
194 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Echantillons imprégnés d’Acryl ME®
Mesure en N.m
1
1,09
2
1,19
3
1,07
4
1,13
5
1,09
Moyenne
1,114
Ecart type à la moyenne Incertitude relative à 95%
0,04775 5,32%
Incertitude relative à 99%
8,82%
L’ajout d’Acryl ME® permet une augmentation des valeurs : 25,2%. La réaction de cette série est très proche de celle des pré-tests dont la moyenne était de 1,109 N.m. Cet adhésif semble redonner la cohésion que l’échantillon a perdue lors de l’affaiblissement et la maintenir.
Echantillons imprégnés de Regalrez®
Mesure en N.m
1
1,35
2
1,52
3
1,38
4
1,39
5
1,41
Moyenne
1,41
Ecart type à la moyenne Incertitude relative à 95%
0,06519202 5,79%
Incertitude relative à 99%
9,58%
Le Regalrez 1126® redonne une bonne cohésion aux échantillons. Il augmente la résistance à la traction de 58%.
195 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Tableau récapitulatif des moyennes des tests de traction Avant
Sans
fragilisation adhésif
Plexisol
MFK®
P550®
Acryl
Regalrez
ME®
1126®
1,114
1,41
(témoin) Moyenne
1,13
0,89
1,462
0,81
(N.m)
D’après les résultats obtenus, il apparaît de manière évidente que l’échantillon sans adhésif est beaucoup moins cohésif après la fragilisation. Les échantillons imprégnés de MFK® ont un comportement qui montre une fragilité équivalente voire inférieure à celle de l’échantillon non consolidé. L’Acryl ME® permet à l’échantillon de conserver son élasticité, tandis que le Plexisol P550® et le Regalrez 1126® en augmente la cohésion.
196 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
V. Interprétation générale
Graphique général du test de dureté Taille de l'impact en mm
6 5 4 3
2 1 0 Sans bentonite
Avec bentonite
Plexisol
MFK
Acryl ME
Regalrez
Cathégorie d'échantillon Série 1:1er cycle
Série 2 : Second cycle
Série 3 : immersion et séchage
Force exercé par le bras de levier en N.m
Graphique général des tests de traction 1,8 1,6 1,4 1,2 1 0,8 0,6 0,4 0,2 0 Avant fragilisation
Sans adhésif
Plexisol P550
MFK
Acryl ME
Regalrez
Cathégorie d'échantilon Moyenne des mesures
Il est possible que le liant ait une influence sur la sensibilité à l’eau des échantillons, cependant, les résultats montrent de très nettes différences entre les différents adhésifs et même entre les échantillons avec argile et ceux sans argile.
197 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Malgré une proximité dans la composition des adhésifs acryliques, ils ont un comportement totalement différent les uns des autres. Bien qu’appliquée dans une quantité égale, ils n’isolent pas tous les argiles correctement à quantité égale. Le Plexisol P550® présente de bons résultats en tant que stabilisant. Il joue également son rôle de nouveau liant. Les tests de traction et les tests de dureté, indiquent une nette augmentation de sa résistance et de sa cohésion. Le Plexisol P550® semble être en quantité suffisante pour jouer un rôle de stabilisant, contrairement au MFK®. Soit la quantité du MFK® n’est pas suffisante, soit il n’est pas du tout adapté aux argiles. Dans l’immédiat, il consolide l’échantillon, ce qui indique que son solvant partiellement aqueux ne semble pas être un problème au moment de l’application. Cependant, dès la mise en contact avec de l’humidité, l’échantillon se fragilise à nouveau. Après l’immersion il perd partiellement ou totalement sa cohésion et semble même plus cassant que l’échantillon sans adhésif. Cette déduction est renforcée par les résultats de tests de traction qui montrent une élasticité très moyenne proche et même légèrement inférieure aux échantillons sans adhésif. En outre, ce second test a obtenu une incertitude relative anormalement importante avec cet adhésif, indiquant peut-être une mauvaise répartition de l’adhésif. Le MFK® ne semble vraiment pas être une solution envisageable. L’Acryl ME® a une réaction plus mitigée. Il commence par diminuer la résistance aux chocs de l’échantillon. Cette réaction est probablement due à son liant aqueux. Cependant, par la suite, il semble maintenir un minimum de cohésion au sein de l’échantillon. Une fois appliqué, il a tendance à diminuer les réactions à l’humidité. Les tests de traction semblent indiquer qu’il redonne et conserve une certaine cohésion, même en présence d’humidité. Toutefois, il faut probablement rester prudent quant à son utilisation dans le cadre d’une restauration d’une préparation argileuse. Il est possible qu’il fasse courir autant le risque d’une transposition qu’une colle naturelle. Malgré cela, il reste préférable à une colle naturelle car il aura une action bien plus longue sur la cohésion de la préparation et le gonflement des argiles292. L’échantillon perd de sa résistance après le séchage de la résine Regalrez 1126®, malgré l’absence d’eau dans son solvant. Serait-ce dû à un temps d’évaporation insuffisant
292
Cf restauration des tableaux ayant une préparation argileuse p 169
198 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
du solvant ? Cela est possible, puisque le White Spirit a un temps d’évaporation d’environ 7jours (à 20°C)
293
, par rapport à l’eau pour laquelle une journée suffit, à une même
température. Les échantillons ont été imprégnés 8 jours (de 18 à 23°C) avant les tests de dureté, ce qui a peut-être été insuffisant, étant donné l’épaisseur de l’échantillon. Malgré cela, cette résine semble stabiliser la préparation, même après immersion, les échantillons conservent une résistance aux chocs constante. Les échantillons des tests de traction montrent également une bonne élasticité même après la mise en chambre humide. En conclusion de cette série de tests, le Regalrez 1126® et le Plexisol P550® ont des résultats qui semblent correspondre aux attentes définies précédemment. Le MFK® ne semble pas du tout adapté. L’Acryl ME® est possiblement envisageable mais reste risqué.
293
MASSCHELEIN-KLEIER L., Les solvants, cours de conservation 2, Bruxelles, Koninklijk instituut voor het kunstpatrimonium, 1981.p.60 et 61.
199 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
VI. Les limites de l’étude Cette étude partielle, du sujet de la consolidation d’une préparation contenant des argiles gonflantes, a été réalisée avec peu de moyens et peut être améliorée de diverses manières. Il serait très intéressant d’observer les échantillons avec des moyens beaucoup plus précis. Un microscope et l’ajout d’un marqueur fluorescent permettrait d’observer le comportement de l’argile lors de l’ajout de l’adhésif et le comportement de cet adhésif au moment du séchage. Forme-t-il bien un film autour de l’argile ? Des coupes stratigraphiques de cet échantillon pourrait être réalisées et permettre d’observer avec ce même appareil sur l’adhésif a pénétré partout et de manière homogène. Cette même méthode permettra d’observer la réaction de cet échantillon imprégné lors d’un ajout d’eau. Par ailleurs, la réalisation d’un test de dureté avec un réel indenter294, appliquant une force parfaitement constante permettrait une mesure encore plus précise. L’étude pourrait être prolongée en réalisant un vieillissement des échantillons imprégnés et en réitérer les tests après humidification. Pour une question de temps, l’étude présentée n’a fait que montrer l’efficacité ou l’inefficacité des adhésifs à court terme. Une même expérience après vieillissement confirmerait ou non ces conclusions. Il faudrait également tester différentes recettes de préparations, comme il en existe tant, avec différents types de pigments argileux et de charges. Mais surtout, il serait intéressant de réaliser l’étude avec des préparations grasses, dont l’huile est suffisamment vieillie pour être en processus de dégradation avancée. Les échantillons des tests de dureté n’étaient maintenus que de manière très rudimentaire, n’empêchant aucunement les rebonds de l’échantillon lors du choc. C’est aussi pour cette raison que le calcul de la force d’impact n’a pas pu être réalisé. Ce rebond rend également les résultats moins fiables, cependant, ils sont plus représentatifs d’une situation réelle.
294
Cf .p.176
200 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Il serait également intéressant de mesurer plus précisément la quantité idéale d’un adhésif afin de respecter le cahier des charges, à savoir, isoler les argiles mais ne pas obturer complètement les pores de la strate295.
295
PHILLIPPOT P.,MORA.E, la conservation des peintures murales, Bologne ,Editrice compositori, 1977. p.243 MARTEL (Thiery), Pénétration capillaire des adhésifs dans un matériau poreux de type plâtre, mémoire IFROA 1993.p.87
201 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion La réalisation de cette étude a été une occasion de réaliser des recherches approfondies sur un sujet directement lié à la structure de l’œuvre étudiée. Elle a permis de comprendre le fonctionnement intime des argiles et leur gonflement. Elle a également permis de découvrir des adhésifs nouveaux pour nous. Après avoir expliqué le phénomène de gonflement des argiles et le phénomène de fragilisation des préparations argileuses, il a été possible de cibler quelques adhésifs potentiellement utilisables. Le rôle de cet adhésif étant la stabilisation à l’humidité des argiles, les tests ont été réalisés avant et après mise en contact avec une forte humidité relative. Les résultats des tests sont à utiliser avec précaution mais révèlent une tendance intéressante. Selon des paramètres de l’étude, le Plexisol P550® semble jouer son rôle de stabilisant pour les argiles et de liant complémentaire. De plus, la modification optique qu’il apporte à la préparation semble infime. Il parait être l’adhésif le plus adapté dans le cas que nous traitons. Le Médium de consolidation ®4176, au contraire, n’est clairement pas du tout adapté aux préparations argileuses. Il ne stabilise pas les argiles, ni n’augmente la cohésion et ne se répartit pas de manière homogène. Les résultats obtenus poussent même à penser qu’il augmente la fragilité des échantillons. Le MFK semble à proscrire en tant que consolidant de préparation argileuses sensible à l’humidité. L’Acryl ME® reste risqué pour l’œuvre, en raison de sa dilution dans l’eau. Les résultats obtenus le concernant sont intermédiaires. Dans un premier temps il fragilise la préparation mais, après un court laps de temps, il semble isoler les argiles de l’humidité. Les tests de tractions montrent qu’il redonne à l’échantillon fragilisé une cohésion équivalente à celle des échantillons avant fragilisation. Il peut donc potentiellement utilisable mais avec un certain risque et modifie grandement la couleur de la préparation. Le Regalrez 1126® diminue aussi la résistance au choc mais il semble isoler les argiles de l’humidité. Cette diminution de résistance aux chocs est contrebalancée par une augmentation de l’élasticité de la préparation. Cette résine peut donc être intéressante dans ce contexte. 202 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Une partie de cette étude nous a permis de travailler en partenariat avec une camarade de classe Morgane Noly et nous a ainsi permis de combiner nos compétences. Les tests de traction et les tests de dureté ont été réalisés avec les moyens mis à notre disposition et en fonction de nos capacités. Ce travail est donc présenté en toute humilité et peut être amélioré. Certains autres paramètres peuvent être pris en compte mais avant tout, une analyse avec un matériel plus précises confirmerait et affinerait les pistes que nous venons d’ouvrir.
203 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
204 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion générale
C’est avec une grande émotion que nous concluons le travail de ces deux dernières années sur le Portrait de femme au bouquet de fleurs. L’enquête entreprise, dans le cadre de l’étude historique, nous a sincèrement passionnés. Chaque indice ouvrait un nouvel éventail de possibilités et chaque piste, même infructueuse, était très enthousiasmante à explorer. Cette fouille dans un passé fragmenté nous a apporté beaucoup de connaissances et de détermination. L’œuvre de mémoire a piqué à vif notre curiosité, et nous a également permis de nous plonger dans l’époque du Roi Soleil, d’étudier la manière de vivre, la mode vestimentaire, les coiffures, les atours d’une certaine classe sociale et leur volonté grandissante de se faire représenter. Nous avons réceptionné dans un état critique et sa restauration s’est avérée bien plus ardue que soupçonné de prime abord. Cependant, toutes les difficultés rencontrées nous ont permis d’approfondir notre compréhension des phénomènes et des obstacles imprévus, auxquels un restaurateur peut être confronté en cours de restauration. Nous avons ainsi pu comprendre nos erreurs et apprendre à nous poser les bonnes questions. Ce travail a également été l’occasion d’employer de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux que nous n’avions pas encore testés. Cette prise en charge totale de l’œuvre a été très formatrice et a permis un approfondissement de notre formation et une remise en question constante, qui seront très utiles par la suite. La compréhension du phénomène de fragilisation d’une couche de préparation a pu être grandement approfondie, dans le cadre de l’étude technico-scientifique. Les recherches menées sur la structure des argiles et sur la réaction de la montmorillonite à l’humidité ont permis de mieux comprendre certaines altérations et réactions de l’œuvre lors de la conservation-restauration. Cela nous a aussi conduits à effectuer des recherches sur la meilleure manière de stabiliser cet apprêt très particulier. Ce sujet a été l’occasion de mener une expérience basée sur une démarche et de travailler momentanément en collaboration avec l’une de nos camarades. Chaque étape s’est révélée intense et enrichissante. Notre engagement dans ce mémoire nous a menés à gagner en maturité et à améliorer notre sens de l’organisation. 205 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Nous achevons ce projet confortés dans l’idée d’avoir trouvé notre voie et nous sommes enthousiastes face à la perspective d’en apprendre toujours plus.
206 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Les Annexes
207 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexes de l’analyse historique Annexe 1 : Histoire du château de Frôlois Annexe 2 : Génération des Regnault, contemporaine à la jeune femme
208 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 1 : Histoire du château de Frôlois
Dates
1038
Environs
Evènements
Qui ?
Création du château
Milon de Frôlois
Transaction inconnue
3 Ducs Grancey
Alliance
Antoines de Vergy
Confisqué par Louis XI et
Jean de Sault-Tavannes
1423 1477
changement de propriétaires 1577
Reprise par les Descendants
Famille de Rochefort, durant 9
Vergy
générations
Vente presque immédiate 1683
Vente
Pierre Duban de la Feuillée, puis François puis son neveu FrançoisHenry
1791
Mort des Duban de la
Famille Lebascle (lointains cousins)
Feuillée, donc héritage 1792
Vente du mobilier au Enchères
1793
Confisqué
Bien Nationaux
1794
Vente
Nicolas de Regnault
2010-
Regnault -Santiard
2011
209 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 2 : Génération des Regnault, contemporaine à la jeune femme
Nicolas REGNAULT, né le 13 mai 1655 à Robert Magny, 52, décédé avant 1707, Laboureur
Edmé REGNAULT, né en 1656, décédé
François REGNAULT,
Charlotte REGNAULT,
décédé après 1681
née en 1658, décédée
François REGNAULT, né en 1659, décédé
Claude REGNAULT, né en 1664, décédé
210 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe de conservationrestauration Annexe 1 : Tests de nettoyage du revers de la toile Annexe 2 : Choix de l’adhésif d’imprégnation Annexe 3 : Assainissement de la couche picturale Annexe 4 : Choix du protocole de doublage Annexe 5 : Choix du vernis
211 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 1 : Tests de nettoyage du revers de la toile
Comme nous l’avons signalé précédemment, la préparation est sensible à l’eau et la toile est friable. Nous avons réalisé des tests à l’aide de différents gels : agar-agar et Klucel G1650®. Agar-agar Le gel d’agar-agar (polysaccharide extrait d’une algue rouge)296 est mélangé avec de l’eau déminéralisée à différents pourcentages. Le principe est d’attendre que le gel d’agaragar se soit figé avant de le poser sur l’œuvre. Une fois posé, il faut le laisser agir, les temps de pose sont aussi à faire varier. L’avantage de l’agar-agar est que son contact fait migrer la poussière en son sein et n’humidifie que très légèrement la surface de la toile. C’est une solution qui
Image 157 : Pose du gel d’agar-agar au revers de la toile
convient théoriquement dans notre cas, les tests nous révèleront si elle est efficace. Klucel G (Hydroxypropylcellulose297)
La Klucel G1650® présente l’avantage de ne pas nécessiter obligatoirement d’eau pour gélifier. Le fait de ne pas ou peu mettre d’eau dans le gel, est une sécurité supplémentaire. Nous testerons donc un gel d’éthanol épaissi à la Klucel G1650® et un gel acétone Klucel G1650®. Le principe de l’action du gel sur la poussière est du même type que pour le gel agarImage 158 : Test du gel Klucel G éthanol+eau
agar. Toutefois, ce gel étant beaucoup moins visqueux il va capturer les poussières plus en
296
GOREL (Florence), Assessment of agar gel loaded with micro-emulsion for the cleaning of porous surfaces, CeROArt [Online], EGG 1 | 2010, Online since 17 November 2010. URL : http://ceroart.revues.org/1827 297 FELLER R.L, WILT.M., Evaluation of cellulose Ethers for Conservation, Research in conservation n°3, Getty Conservation Institute, 1990. P.87.
212 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
profondeur dans les aspérités de la toile. Même si la pénétration est légèrement plus importante que dans le cas des gels de Klucel G1650®, l’absence d’eau rend l’opération moins risquée. Cependant, cela rend son retrait plus difficile et risque d’entrainer des dégradations sur la toile. Résultats Gel et pourcentages Agar-agar 4% dans de l’eau déminéralisée
Durée d’application 15 minutes
Avantages
Inconvenants
Mouillage superficiel Très facile à manipuler Aucune action mécanique Permet de travailler sur de plus grandes surfaces en même temps Pas d’auréole Mouillage plus important mais modéré Solubilise les taches noires Très facile à manipuler Aucune action mécanique Pas d’auréole Effet rapide Efficace
Très long à agir et trop rigide pour épouser les aspérités de la toile, même avec un poids
Agar-agar 3% dans de l’eau déminéralisée
5 minutes
Agar-agar 2% dans de l’eau déminéralisée
1 minute
Klucel 7% dans éthanol pur
Quelques secondes
-
Evaporation rapide Ne contient pas d’eau
Klucel 7% dans 92% d’éthanol et 1% d’eau
Quelques secondes
-
Klucel 7% dans 93% d’acétone
Quelques secondes
Effet rapide Efficace, beau résultat Consolide la toile (mais attention peut aussi jouer une barrière pouvant gêner les opérations futures) Evaporation rapide Effet rapide Efficace Ne contient pas d’eau
-
Mouille trop Temps de séchage trop long Plus difficile à manipuler Début d’auréole Peu efficace Solubilise la préparation Résidu satiné Plus de pénétration Solubilise beaucoup la préparation Nécessite une action mécanique Solubilise fortement la préparation Nécessite une action mécanique
Conclusion Le gel d’agar-agar à 3% a été testé avec des temps de pose de 10 minutes, 7 minutes, 5 minutes et 2 minutes. La pose de 5min est la plus adaptée. La pénétration d’eau est modérée, le résultat de nettoyage est satisfaisant. C’est donc le gel d’agar-agar à 3% dans de l’eau déminéralisée avec un temps de pose de 5 minutes qui sera utilisé. 213 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 2 : Choix de l’adhésif d’imprégnation
L’opération d’imprégnation consistant en l’ajout d’un adhésif au sein d’une strate complète, son retrait sera très limité dans le futur. Il faut donc partir du principe que l’adhésif fera partie de l’œuvre. Le cahier des charges est donc très lourd et important à respecter. Nous avons établi les exigences et paramètres qu’il conviendra de considérer pour le choix d’un adhésif d’imprégnation : -
La capacité de pénétration
-
La compatibilité avec les matériaux d’origine
-
Il ne devra pas empêcher pas l’emploi d’autres méthodes de restauration
-
La stabilité physique et chimique
-
Il ne devra induire aucune modification optique (couleur, brillance, etc.)
-
Il ne devra pas employer d’eau ou alors en quantité très minime
-
La perméabilité de la state à la vapeur d’eau298
Plusieurs adhésifs pourraient correspondre, une comparaison est à entreprendre. Les adhésifs naturels Le choix entre un adhésif synthétique et un adhésif naturel est relativement facile dans notre cas. Les adhésifs naturels se diluent dans l’eau (hormis la cire), ce qui présente un risque important au moment de l’application et ont prouvé leur inefficacité dans le temps sur ce type d’œuvre299. Ils sont impérativement à proscrire lors de ce traitement. Cela reviendrait à aggraver le problème plutôt qu’à le résoudre. La cire est réputée pour ses caractéristiques hydrophobes. Elle jouerait donc parfaitement son rôle mais de manière excessive cependant. La cire empêcherait définitivement l’emploi de matériaux aqueux pour les futures restaurations. L’apport de chaleur n’est à priori pas un problème pour l’œuvre de mémoire, cependant, la cire est
298
PHILLIPPOT P.,MORA.E, Conservation of Wall paintings, édition Butterworths, London, 1984, p36 à 38. 299 Cf partie technico-scientifique p.169
214 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
connue pour son faible pouvoir pénétrant300. En outre, elle a tendance à fortement modifier l’aspect des peintures. La couche colorée de l’œuvre ayant tendance à s’affaiblir et à laisser transparaitre la préparation, cette technique n’est définitivement pas envisageable pour cette opération. Les adhésifs synthétiques Plusieurs adhésifs synthétiques pénétrants sont utilisés régulièrement au cours des refixages généraux. Quelques-unes de leurs caractéristiques sont regroupées dans ce tableau : Caractéristiques
Paraloïd
MFK (Médium Alcool
B72
de
Plexisol P550
Polyvinylique
Acryl ME
Consolidation 4176) Solvant
de White
dilution
Eau
Eau
chaude, White Spirit et Eau
Spirit
alcool
xylène
/acétone
hydrosoluble (éthanol)
Souplesse
+
+++301
+++
+++
+++
Stabilité
stable
stable
stable
stable
stable
Brillance
brillance
Très
chimique Modification optique302 Toxicité
Toxique
Non toxique
léger Très
assombrissement
assombrissement
Non toxique
Très toxique
(respiratoire) Insensibilité l’eau
léger aucun
Non toxique
à Insensible
Sensible303
Sensible304
Insensible
après
Peu sensible
séchage
300
MARTEL (Thiery), Pénétration capillaire des adhésifs dans un matériau poreux de type plâtre, mémoire IFROA 1993. p.99 301 LARDET (Guillemette), Comparaison du Plexisol® P550 et du Medium de Consolidation® 4176, CeROArt [Online], EGG 4 | 2014, Online since 19 March 2014, URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3986 59 302 Tests réalisés avant opération 303 Cf Sujet technico scientifique p 197 304 WALTIER (Thiery), Mécanique des sols, Cours CTN 504, ETS. http://slideplayer.fr/slide/1586613/
215 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Au vu de cette comparaison, seuls les adhésifs acryliques Acryl ME® et Plexisol P550® semblent être adaptés. L’Acryl ME® se diluant totalement dans l’eau, il représente un risque au moment de l’application de l’adhésif. Les deux adhésifs semblant équivalents, le choix se portera sur le moins risqué pour l’œuvre : le Plexisol P550®. a. Méthode d’application Notre choix se porte finalement sur le Plexisol P550®. L’application se fera par le revers. Un tableau est composé de différentes strates, allant de la plus poreuse à la moins poreuse, en respectant la loi du gras sur maigre305. La toile laissera passer l’adhésif jusqu’à la préparation. La couche colorée étant moins poreuse, elle risque de le bloquer. De plus, cela augmenterait le risque de modification optique du tableau. Habituellement, cet adhésif est utilisé dans des concentrations comprises entre 5 et 10%, dans le cas des imprégnations. Nous prévoyons d’appliquer cet adhésif en plusieurs passages : deux passages à 5% et un passage à 10%. Les deux applications à 5%, donc à faible concentration, permettent une bonne pénétration dans toute l’épaisseur de la couche de préparation. Le passage à 10% va permettre de bien saturer cette même préparation. Ces applications effectuées, l’œuvre passera sur table aspirante et chauffante. La chaleur de la table chauffante va réactiver le Plexisol P550®, qui est thermoplastique. Elle lui permettra de se ramollir et facilitera ainsi une pénétration plus homogène et générale de l’adhésif. Cela permet en outre également de rétablir la cohésion de l’ensemble en appliquant une pression.
305
La loi du gras sur maigre est une règle élémentaire lors de la réalisation des peintures. La couche appliquée doit toujours contenir une quantité de liant supérieure à la précédente. Cela permet une meilleure accroche entre chaque couche. Cela permet aussi une polymérisation appropriée de chaque film d’huile. Cela induit également une diminution de la proportion de pigments et de fait une diminution de la porosité au fur et à mesure des applications.
216 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 3 : Assainissement de la couche picturale A.
Nettoyage a. Définition de la crasse En restauration, la crasse est un dépôt de corps étrangers présent à la surface de la
couche picturale. Elle est composée de différents types de particules, variant en fonction du lieu de conservation et de l’environnement de l’œuvre306. Les principales sources de ces poussières sont : la combustion (fumée de cheminée, automobiles, cigarettes, bougies, rejets industriels, etc.), les pollens, les poussières issues de travaux, les déjections d’insectes, les microorganismes présents dans l’atmosphère, etc. Leur dépôt et leur accroche à la surface du vernis sont plus ou moins importants selon certains facteurs. Tout d’abord, certaines conditions atmosphériques permettent une circulation plus facile de ces particules dans l’air et favorise ainsi leur dépôt. Par la suite, les propriétés de la couche de vernis peuvent permettre ou non l’accroche de ces particules à sa surface (sa porosité, son hydrophobie ou hydrophilie, sa conductivité, etc.)307. Les particules se fixent sur le vernis de manière plus ou moins importante selon leur forme, leur taille
et les interactions qui vont se créer entre les deux composés
(électrostatiques ou capillaires entre autre)308. b. But et nécessité de l’opération
Le nettoyage est l’étape où la crasse présente à la surface du vernis est supprimée. Les particules déposées au fil des décennies obscurcissent l’œuvre. Elles créent un voile opaque et de fait une gêne pour le spectateur. Outre la gêne esthétique qu’elle provoque, la crasse superficielle risque d’entraver l‘opération suivant le nettoyage, qui est la suppression du vernis. Formant une barrière à la surface du vernis, les particules risquent de bloquer les solvants utilisés par la suite.
306
LORUSSO S., MARABELLI M., VIVIANO G., Pollution de l’environnement et impact sur les biens culturels, France, EREC. 1999.P.45 307 WOLBERS R., Le nettoyage des surfaces peintes, méthodes aqueuses, Eyrolles, Paris, 2013.p.14 308 Ibid. p 15
217 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Par ailleurs, un allègement ou une suppression de vernis, sans nettoyage au préalable, risquent de faire pénétrer ces mêmes particules dans le vernis résiduel. Cela créerait une couche affaiblie et gênante visuellement. Dans le pire des cas, les solvants pourraient faire pénétrer les particules plus profondément dans la stratigraphie. Il est donc nécessaire de réaliser un décrassage dès la prise en charge de l’œuvre. c. Méthodes possibles de décrassage Plusieurs méthodes de nettoyage sont régulièrement utilisées en restauration. i. Nettoyage à sec Le nettoyage à sec est une méthode utile pour le nettoyage des supports et des couches picturales sensibles aux solutions aqueuses. Elle permet de supprimer une partie de la crasse très superficielle mécaniquement sans aucune pénétration de d’eau. Le principe est de frictionner la surface de la couche picturale avec une gomme Wishab. Cependant, il s’agit d’une méthode légèrement abrasive. Par ailleurs, la couche de préparation de l’œuvre ayant été stabilisée au préalable, l’emploi de méthodes aqueuses pour cette étape ne comporte plus aucun risque. Dans certains cas néanmoins, les méthodes sèches peuvent être intéressantes à utiliser dans un premier temps, notamment pour le revers des toiles. ii. Nettoyage aux solutions aqueuses 1. Eau Richard Wolbers décrit l’eau « En tant que milieu fortement diélectrique, l’eau est particulièrement efficace pour séparer les particules chargées les unes des autres et peut réduire ou éliminer complètement les interactions basées sur les forces électriques et les forces de Coulomb »309. Elle est donc reconnue comme étant efficace. Nous la testerons en tout premier lieu.
309
WOLBERS, Le nettoyage des surfaces peintes, méthodes aqueuses. Op.Cit p.17
218 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
L’eau employée en restauration pour ce type d’opération est déminéralisée, afin d’éviter tout dépôt d’ions composant les sels minéraux présent dans l’eau courante310. Elle peut être efficace à différentes températures. C’est pour cette raison que nous la testerons tiède (40%) et froide. Cependant, il semble que régulièrement, l’eau déminéralisée seule ne soit pas suffisante : « Il faut également signaler que, si l’eau est utile dans le décrassage des surfaces, certains matériaux conservés seront toujours maintenus par les interactions de surface et devront être éliminés par des méthodes ou des matériaux additionnels, conjugués aux propriétés de l’eau. »311 2. Tensioactifs Le rôle de ce composé est de baisser la tension superficielle312 d’un liquide et d’ainsi permettre une meilleure mouillabilité. Une molécule de tensioactif est constituée d’une
tête
hydrophile
et
une
queue
hydrophobe. La crasse est une matière ayant
Image 160 : Schéma d’une molécule de tensioactif
tendance à être grasse, la queue du tensioactif devrait donc se fixer aux particules présentes à la surface de l’œuvre et former des micelles. Une fois le tensioactif appliqué, il faut le rincer à l’eau et c’est à ce moment que la crasse est arrachée de la surface du vernis. Les têtes des tensioactifs vont cette
Image 160 : Schéma de micelle
fois s’accrocher aux molécules d’eau et les particules vont être arrachées lors du rinçage.
310
http://www.dictionnaire-environnement.com/eau_demineralisee_ID2220.html WOLBERS, Le nettoyage des surfaces peintes, méthodes aqueuses. Op.Cit p.17 312 La tension superficielle est une force présente au niveau de la surface de contact de deux milieux différents. La tension superficielle ou interfaciale γ est la variation de cette énergie de surface d Fs par unité d'aire d A : https://www.universalis.fr/encyclopedie/phenomenes-de-surface/1tension-superficielle/ 311
219 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
3. Solutions tampons 313 Les solutions tamponnées contiennent de l’eau déminéralisée additionnée à des acides faibles et des bases faibles. Leur ajout permet une modification du pH de la solution. L’intérêt de cette méthode est de travailler en maîtrisant le pH de la solution utilisée et d’agir directement sur les ions présents dans la crasse. La méthode la plus efficace est de mesurer le pH de la surface du tableau et plus précisément de la crasse. Connaitre cette valeur va permettre de réaliser un mélange adapté. Dans le cas d’un pH de surface légèrement basique, la solution devra être légèrement acide et inversement. C’est une réaction acido-basique. Ce fonctionnement s’explique par la capacité des ions négatifs à capter des ions positifs et de même dans l’autre sens. La solution va permettre de casser les forces maintenant les ions de la crasse ensemble par l’introduction des ions opposés. Par la suite, la présence de l’eau lors du rinçage va permettre de les arracher définitivement de la surface. Lors de notre prise de mesure de pH avec un pH-mètre, la valeur était de 6,3 (donc légèrement acide). Nous testerons donc des solutions plutôt basiques (7,5-8-8,5). A priori, les solutions basiques devraient être les plus efficaces mais, pour confirmation, nous testerons tout de même les deux types de solutions. Lors de la réalisation de ces tests, nous avons utilisé de l’eau déminéralisée, NaOH (hydroxyde de sodium) et MES (Morpholio éthane sulfurique acide) pour les solutions acides. Les solutions basiques résultent d’un mélange d’eau déminéralisée, de TEA (tri éthanol amine) et HCl (acide chlorhydrique). Le matériel nécessaire à cette opération est un bâtonnet sur lequel est enroulé un bout de coton ouaté. Il est imbibé de la solution à tester. La solution de rinçage adaptée est tenue à portée de main. Il est préférable de se protéger les mains avec des gants, de porter une blouse et de ne pas laisser les contenants de solutions toxiques ouverts.
313
WOLBERS, Le nettoyage des surfaces peintes, méthodes aqueuses. Op.Cit p.21 à 26
220 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
d. Tests Les tests effectués sont regroupé dans le tableau ci-dessous. Tableau à N°
Solution
Pourcentage ou PH
1
Eau déminéralisée froide
pH : 6,8
Couleur s testées Blanc
Résultat
Observations
Leger
Pas besoin de frottement mais peu profond
Carnati on
Aucun résultat visible
Le coton est sale
Jaune
Aucun
Aucune
Bleu
Leger
Coton sale
Vert
Leger
Coton un peu sale
Rouge
Leger
Coton sale
Fond sombre
Non visible
Coton sale
Photographie des cotons et du test
221 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
2
Eau déminéralisée tiède
pH : 6,8
Blanc Carnati on
Leger
Coton sale
3
Solution tampon
pH : 5,5
Carnati on
Assez bien
Coton peu sale
4
Solution tampon
pH : 6,5
Carnati on Jaune
Aucun
Coton légèrement sale
5
Solution tampon
pH : 7
Carnati on
aucun
Coton légèrement sale
6
Solution tampon
pH : 7,5
Carnati on
Aucun
Coton sale
7
Solution tampon
pH : 8,5
Carnati on
Assez bon
Coton sale
8
Triamonium citrate314
1%
Blanc
Bon
Coton très sale
e. Conclusion Après avoir réalisé ces tests, il apparaît que la solution la plus adaptée est l’eau déminéralisée froide. Elle est efficace et nécessite peu d’action mécanique, ce qui évite les 314
Le triamonuim citrate ou TAC est un agent chélatant ou agent complexant. Il possède des propriétés semblable à celle des tensio-actifs. DUPRE (Caroline), L'emploi du citrate de triammonium pour le nettoyage des couches picturales contemporaines, CeROArt [Online], EGG 1 | 2010, Online since 17 November 2010, .URL : http://journals.openedition.org/ceroart/1686
222 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
usures. Par ailleurs, ce solvant ne nécessite pas de rinçage et reste la méthode la moins invasive, si son application et sa quantité sont maitrisées. Il sera donc sélectionné afin de nettoyer la couche picturale de l’œuvre de mémoire. B.
Retrait du vernis altéré a. But et nécessité de l’opération Le vernis de l’œuvre de mémoire comporte différentes altérations décrites dans le
constat d’état315. Nous rappelons que le vernis présente des bulles et des déplacages, ainsi qu’un jaunissement. De plus, il est fort probable qu’un chanci de travail, dû aux opérations de restauration du support, apparaisse, rendant d’autant plus visibles les craquelures et les affaiblissements de cette couche. Le jaunissement crée une atténuation des contrastes et une modification des couleurs, tandis que le chanci formera sûrement une voile blanc opaque sur de nombreuses zones du tableau. Si le vernis avait été uniquement jauni et n’avait pas recouvert des repeints, la patine aurait pu être conservée. Cela aurait limité le nombre d’interventions impliquant des solvants sur la couche picturale. Le vernis datant probablement du XXème siècle et le lieu de conservation futur étant relativement surveillé, il ne devrait pas se dégrader de manière importante au cours des prochaines années. Néanmoins, comme mentionné plus haut, le vernis est trop altéré pour être conservé et il empêche le retrait des anciennes restaurations. La majeure partie de ce vernis sera donc supprimé, avec précaution toutefois, pour ne pas trop solliciter la couche picturale. C’est une opération délicate. Une suppression du vernis est une opération potentiellement dangereuse pour la couche picturale. Malgré une grande prudence, le solvant utilisé pour cette suppression risque d’appauvrir en liant la couche colorée, et de la rendre plus cassante ou pulvérulente : on appelle ce phénomène la lixiviation316.Sauf dans un cas de nécessité, il est plus prudent de ne réaliser qu’un allègement. Dans notre cas, la suppression est préférable. Un vernis chanci est un vernis très appauvri, et le laisser revient à laisser une fragilité au sein de la stratigraphie. De plus, une suppression partielle oblige le futur restaurateur à travailler sur une succession de plusieurs couches de vernis, dont les 315
Cf. Constat d’état p. 67 JONES.P.L, The leaching of linseed oil films in isopropyl alcohol , Studies in Conservation, vol X, n°3, 1965 p.119-129. De plus, une lixiviation est déjà détectable sur l’œuvre, ce qui signale d’ors et déjà son état de faiblesse. 316
223 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
âges et les degrés d’altération et d’insolubilité sont variables. Cela entraine l’emploi de solvants plus forts et/ou plus polaires, sur la couche picturale et constitue donc un risque plus important.
b. Protocole de tests Afin de réaliser les tests de dévernissage, deux fenêtres de nettoyage sont ouvertes avec de l’eau déminéralisée (solution
de
décrassage
choisie
précédemment). Le nettoyage préalable de ces zones permet de s’assurer que la crasse n’interfèrera pas sur les résultats. Ces deux carrés de 5 cm de côté sont positionnés dans des zones donnant accès à la plus grande variété de pigments possibles. Cette précaution permet de tester le solvant ou le mélange de solvant choisi sur toutes les couleurs et ainsi de Image 161 : Emplacement des fenêtres de tests de suppression de vernis
vérifier qu’il ne détériore aucune couleur.
Pour plus de prudence, avant de réaliser les tests sur l’œuvre, les premiers solvants ont été appliqués sur le papier de bordage317. En effet, le papier étant recouvert de vernis318, il offre un support intéressant sans risque de détériorations pour la couche picturale originale. L’acétone et l’éthanol solubilisent bien le vernis mais leur action est beaucoup trop rapide lorsqu’ils sont à l’état pur.
317
Le papier de bordage a été posé avant l’application du vernis. Celui-ci est onc recouvert du même vernis que celui présent sur le tableau, permettant ainsi de réaliser des tests et de cibler les solvants les plus efficaces. 318 Le vernis le rends le papier de bordage imperméable et donc rends l’humidification du papier impossible. L’apport d’humidité ramollissant la colle sous le papier, il permet de limité les efforts de traction sur la couche picturale. Le retrait du vernis sur cette surface a donc également facilité le retrait du papier.
224 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Au vu des résultats obtenus sur le papier, les protocoles de tests établis par Masschelein Kleiner319 et Paolo Cremonesi320 ont été suivis. Ils consistent en la réalisation de mélanges de solvants, permettant l’emploi de l’éthanol321 ou de l’acétone322 dans des concentrations différentes et maitrisées. Cette méthode a pour but de mieux contrôler l’action (la vitesse et la profondeur) des solvants utilisés sur le vernis, en tempérant leur action grâce à un solvant apolaire. Celui utilisé lors des tests est le cyclohexane323. Les différents mélanges sont, tout d’abord, testés dans les zones claires, telles que les carnations. Ces zones contenant du plomb, elles sont très résistantes. Il y a donc moins de risque de perte de pigments, et cela permet de mieux apprécier la profondeur d’action du solvant. Une fois le dosage jugé satisfaisant, ce même mélange sera testé sur toutes les couleurs présentes dans les zones dégagées.
c. Tests Tableau 1 N°
E
Solvant ou mélange de solvants Ethanol
% ou pH
Résultat
Observations
pur
Très violent
Beaucoup trop puissant, nous l’avons testé sur un papier de bordage
Coton
319
MASSCHELEIN KLEINER (Liliane), Les Solvants, Edition Institut Royal du Patrimoine artistique, Bruxelles 1992, p.112 320 CREMONESI (Paolo), L’uso dei solventi organici nella pulitura ddi opere policrome, Rome : Il prato, 2004 (collection I talenti, metodologie, tecniche e formazione nel mondo del restauro, n°7), p.89. CREMONESI (Paolo), Nuovi Materiali e Metodi per la pulitura dei Dipinti, Italie : Phase, Prodotti per il restauro, 1995, p. 28. 321 L’éthanol est alcool très volatil mais réputé pour son efficacité lors du retrait de certaines résines. Il est faiblement toxique mais il est préférable de se protéger à chaque utilisation. MASSCHELEIN KLEINER, Liliane, Les Solvants, Edition Institut Royal du Patrimoine artistique, Bruxelles 1992, p.70 322 L’acétone appartient à la famille des cétones et est également très volatil. Il agit sur certaines résines naturelles et synthétiques. MASSCHELEIN KLEINER, Liliane, Les Solvants, Op.Cit, p.80 323 Le cyclohexane est un solvant ayant une évaporation rapide. Il fait partie des hydrocarbures alicycliques et est légèrement toxique. Le cyclohexane devra être le plus pur possible. La fiche technique est à retrouver p. 259
225 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
A
Acétone
pur
Trop violent
Testé sur le papier de bordage
CE1
Cyclohexane / éthanol
10% / 90%
Bon
CE2
Cyclohexane / éthanol
20% / 80%
Très bon
Réaction rapide mais pas immédiate, un peu d’action mécanique Rapide et efficace
CA1
Cyclohexane / Acétone
10% / 90%
Aucun
Aucune action
CA2
Cyclohexane/ Acétone
20% / 80%
Aucun
Aucune action
CA3
Cyclohexane/ Acétone
30% / 70%
Très peu
CA4
Cyclohexane/ Acétone
40% / 60%
Assez bon
Début d’action mais demande une importante action mécanique Réaction mais demande une peu d’action mécanique
CA5
Cyclohexane/ Acétone
50% / 50%
Trop puissant
Action immédiate
226 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Légende Fenêtre de nettoyage CE1 CE2 CA1
C
C
CA2 CA3 CA4 CA5
Image 162 : Tests de suppression de vernis
Durant l’exécution des tests, la pénétration des mélanges a été vérifiée aux rayons ultraviolets. Au vu des résultats, le CE2 a été testé sur des zones plus grandes et sur les différentes couleurs présentes dans les fenêtres de nettoyage. Tableau 2 : Tests de devernissage au CE2 Rouge
Vert
Bleu
Rose
Jaune
Le solvant CE2 est efficace, aucun pigment ne réagit lors de son application. L’action mécanique est très légère et ne risque pas d’entrainer des usures dues aux mouvements répétitifs et circulaires du coton. L’action du solvant est suffisamment efficace pour éviter un nombre de passages trop important. Deux passages seront certainement nécessaires. Le premier se fera au CE2 et le second pourra être fait au CE1. Cela dépendra de l’état de la couche colorée sous le vernis.
227 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Légende : A. symbolise éthanol et le S. symbolise le mélange CE2
Les aires de solubilité : -
Fd
-
Rose : Protéines et saccharides Jaune : résines synthétiques Vert : résines naturelles Bleu : huiles Violet : cires Orange : huiles vieillies
Aire de solubilité de la résine testée
Fd Figure 1 : Diagrammes de TEAS présentant les aires de solubilité des résines dammar (à senestre) et mastic (à dextre)
L’éthanol pur fait gonfler les matériaux à base de protéines et de saccharides. Ce résultat confirme l’hypothèse du vernis de restauration à base de résine naturelle, probablement de dammar ou de résine mastic. L’emploi d’un mélange léger de solvants confirme la jeunesse d’un vernis qui n’a probablement pas plus d’une centaine d’année.
228 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion Les résultats sont satisfaisants. Le CE2 semble être le bon compromis entre une vitesse de réaction tempérée et un faible apport d’action mécanique. De plus, ce mélange est relativement léger et une différence est visible entre les zones allégées et les zones recouvertes de vernis. Le CE1 sera utilisé pour un second passage dans un souci d’une plus grande douceur pour la couche colorée. Nous choisirons donc cette technique afin de réaliser la suppression de vernis de l’œuvre de mémoire. Le résultat de cette opération sera régulièrement examiné sous lumière utraviolette. C.
Suppression des anciennes restaurations et des repeints a. Les restaurations et les repeints Lors de tests réalisés dans les zones de retouches et de repeints, il a été constaté que
ces deux éléments partaient avec le même mélange de solvants que celui sélectionné pour le dévernissage. Cette réaction est autant un avantage qu’un inconvénient. Elle permet de réaliser l’opération du dévernissage et du retrait de repeints en une seule étape et avec un seul mélange, qui est peu concentré. Cependant, cela rend la question de la conservation ou non des repeints et des retouches plus difficile.
229 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Signalons, tout d’abord les zones repeintes :
Image 164 : Observation des retouches et des repeints aux UV
Image 164 : Schéma des repeints (en bleu) et des retouches (en violet)
On observe deux types d’interventions : les repeints recouvrant la couche picturale et les retouches recouvrant des mastics. Les retouches sont visibles en rose sur le schéma et sont présentes sur le corps de la jeune femme ainsi que sur son vêtement et sur le coussin. Elles étaient visibles à l’œil nu mais pas nécessairement aux UV. Les zones que l’on peut qualifier de repeints sont les zones sombres discernables sous UV, présentes majoritairement sur la table et entre les fleurs du bouquet. Les repeints du drapé bleu et du vase ne sont quant à eux pas visibles aux UV. Les retouches et les mastics Les retouches et les mastics ont un problème de teinte et/ou un problème de niveau par rapport à la couche picturale d’origine. C’est donc pour des raisons esthétiques que nous ne les conserverons pas. Les retouches, tout comme les repeints, sont solubilisés avec le même solvant que le vernis. La suppression n’est donc pas un problème. Par la suite, les mastics ont également fait l’objet de tests de ramollissement. L’idéal est de pouvoir les supprimer plutôt chimiquement que mécaniquement. Les tests à l’eau déminéralisée froide et tiède ont révélé un gonflement. Cette hydrophilie indique qu’il s’agit très probablement d’un mastic naturel, à la colle de peau et au carbonate de calcium. 230 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cependant, l’épaisseur et l’âge du mastic rendent nécessaires plusieurs passages avec un coton humide. Cela risque de provoquer des abrasions sur la couche picturale avoisinante, sans compter le fait que les argiles de la préparation seraient mises à l’épreuve de manière excessive. Nous avons donc fait le choix de ramollir le mastic avec une éponge PVF324, légèrement humide et de travailler mécaniquement et plus localement au scalpel. Cette méthode permet de retirer une grande partie du mastic sans trop d’humidité. Le scalpel est utilisé afin d’atteindre la couche colorée ou la préparation sous-jacentes, toutefois sans les gratter. Seule la majorité du mastic est supprimée de la sorte, puis les résidus sont retirés à l’éponge humide, en prenant garde à ne pas introduire trop d’eau dans la couche picturale. A ce stade le scalpel risque de provoquer des abrasions et l’éponge sera plus efficace. Repeints Concernant les repeints, la décision est moins tranchée. Nous avons donc réfléchi aux arguments en faveur de l’une et de l’autre des deux options. Pour quelles raisons les conserver ?
Pour quelles raisons les supprimer ?
Les repeints sont généralement conservés pour une raison historique. En effet, les repeints font parti de l’histoire matérielle de l’œuvre. Ne pas les retirer permet de conserver une trace du vécu de l’œuvre. Une deuxième raison pour conserver les repeints est l’absence de couche picturale d’origine en dessous. Avant de prendre une décision, un sondage a été réalisé sur les repeints les plus importants. Chaque test a révélé que le repeint part entièrement au CE2 mais pas la couche picturale. Lorsque le repeint est entièrement supprimé, le solvant ne se teinte plus et la couche picturale d’origine apparaît. Cette dernière est abrasée mais est tout à fait présente.
La principale de raison qui pousse au choix de la suppression concerne l’unité esthétique de l’oeuvre. En effet, les repeints présents sur le tableau sont pour la plupart visuellement gênants. Comme nous l’avons signalé précédemment, le gonflement de la résine du vernis et du liant du repeint face au même solvant pose un problème si les repeints veulent être conservés. Le retrait du vernis entraîne systématiquement le retrait de la partie superficielle du repeint. La profondeur du retrait peut toutefois être maîtrisée.
324
Les éponges PVF sont fabriquées à base de polyvinyl alcool, de formaldéhyde et d’acide sulfurique en solution dans l’eau. Elles sont réputées pour leur grande capacité d’absorption sur une courte période et pour l’absence de résidu après leur passage. SEGURA ESCOBAR (Juana), Mémoire 2010 cité par RICHARD Aude, Restauration de la main, peint par Marian Kasperczyk en 1992, mémoire condé 2017, Annexe 24.
231 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Conclusion Les deux repeints seront supprimés. La couche picturale d’origine sous-jacente présente des couleurs beaucoup plus subtiles. d.
Ancien vernis découvert sous les repeints i. Localisation
Lors de la suppression du vernis et des repeints, des restes d’ancien vernis sont apparues. Leur présence sous les repeints traduit leur ancienneté. La fluorescence, comme expliqué dans le constat d’état, permet d’identifier un type de vernis. Cette fluorescence étant verte, le vernis est à base d’une résine naturelle. Il peut donc s’agir de vernis mastic ou dammar, comme celui que nous venons de supprimer. Dans ce dernier cas, le vernissage daterait au plus tôt de 1820325. Ce vernis ne serait donc pas d’origine. S’il s’agit d’un vernis mastic, il pourrait potentiellement être d’origine car cette résine est utilisée depuis le VIIIème siècle en tant que vernis et elle est mentionnée par Turquet de Mayerne au XVIIème siècle326.
Image 165 : Localisation des amas de vernis ancien
325
THOURY, Mathieu, Identification non-destructive des vernis des œuvres d’art par fluorescence UV, thèse de l’université Pierre et Marie Curie, Paris, 2006 p.38 326 Ibid. p.40
232 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Seuls les amas de vernis les plus importants sont répertoriés sur ce schéma. De nombreux petits « points » sont visibles et répartis de manière assez homogène sur l’ensemble du tableau.
Image 166 : Amas d’ancien vernis (lumière visible et rayon UV
ii. Tests Les premiers tests ont été réalisés avec les mêmes solvants que ceux ayant agi sur le vernis de restauration : les mélanges acétone/cyclohexane et éthanol/cyclohexane. Même dans des pourcentages beaucoup plus importants, la résine de cet ancien vernis n’a pas ou très peu réagi. Après une légère action mécanique au scalpel, le mélange CE2 fait sensiblement gonfler la résine mais ne suffit pas à la retirer. Nous avons testé d’autres mélanges de solvants mais aucun n’est efficace. Seul le mélange acétate d’éthyle/diméthylformamide a permis un gonflement, mais c’est un mélange extrêmement lourd pour l’œuvre et toxique pour le restaurateur. De plus, même dans des proportions minimes, de 10% de diméthylformamide et 90% d’acétate d’éthyle, un affaiblissement visible de la peinture d’origine se produit. En effet, malgré un temps de pose très restreint et une absence de couleur sur le coton, la peinture perd de sa saturation. Ce mélange provoquant une lixiviation, nous préférons trouver une autre méthode. 233 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cette résistance aux différents solvants traduit l’ancienneté de ce vernis résiduel. Par ailleurs, la peinture ayant déjà subi un dévernissage, les pigments réagissent beaucoup plus rapidement à n’importe quel mélange de solvants, même les plus légers. Nous avons donc fait le choix de faire gonfler la résine très légèrement avec le mélange d’éthanol à 20% et de cyclohexane à 80%, et de retirer mécaniquement le vernis, l’aide d’un scalpel neuf. Cette méthode n’est pas idéale, car elle risque de créer des abrasions malgré une grande prudence, et elle est très fastidieuse. Cependant, ce procédé est celui qui met le moins en péril l’œuvre. Cette méthode sera appliquée sur les îlots les plus importants et les plus gênants visuellement. Un maximum de vernis sera supprimé sans risquer la dégradation de la peinture originale. Le but est d’atténuer les surbrillances, mais nous estimons que la bonne conservation de l’œuvre est prioritaire sur son aspect visuel. C’est pour cette raison que l’opération sera interrompue, dès qu’elle deviendra trop risquée. Les résidus de vernis provoqueront des surbrillances mais seront trop fins pour représenter un réel risque pour la pérennité de l’œuvre. Il sera moins dangereux de laisser ces petits résidus plutôt que de s’acharner avec des solvants qui agiront partiellement sur le vernis et menaceront de lixiviation la peinture d’origine.
234 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 4 : Le choix du doublage
Choix de l’intervention Deux types de traitements sont possibles : le rentoilage et le doublage. Les argiles présentes dans la préparation étant stabilisées, le choix d’un adhésif aqueux entraînerait moins de risque. Malgré cela, les adhésifs de rentoilage327 étant plus pénétrants que les adhésifs de doublage, nous introduirons un mélange d’adhésif synthétique d’imprégnation
et de colle de pâte au sein de la préparation. Après
vieillissement, cela risquerait de poser des problèmes de conservation ainsi que de réversibilité pour le restaurateur futur. Pour ces deux raisons, il est plus prudent de conserver une cohérence dans les adhésifs appliqués sur l’œuvre. Il en va de même pour le rentoilage à la cire résine328, dont l’adhésif est pénétrant et diminue grandement la possibilité d’utilisation de produits aqueux au cours des prochaines restaurations. Nous optons donc pour un traitement de doublage. Le reproche principal qui est fait au doublage est sa réversibilité plus difficile que celle du rentoilage à la colle de pâte. Cependant, la pénétration de l’adhésif lors d’un doublage est bien inférieure à celle d’un rentoilage, le principal problème concerne donc la suppression de l’adhésif résiduel à la surface de la toile originale329. Nécessité d’un doublage rigide Le support original de l’œuvre étant très largement rompu, un doublage trop souple ne maintiendrait pas suffisamment l’ensemble. En effet, malgré un pontage, les bords de déchirures risquent de ne pas rester dans le plan, si le support de renfort ne maintient pas la toile correctement. Un doublage manquant de rigidité serait entraîné par les mouvements
327
PERCIVAL-PRESCOTT (Westby), The lining cycle : causes of physical detreioration on oil Painting on canvas, Greenwich, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , 1974, p.7. 328 Ibid. p.11 BERGER, (Gustave.A), ZELIGER (Harold I.), Wax Impregnation of cellulose : an irreversible process, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , Greenwich, 1974. P.27. 329 D’HAENENS (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, CeROArt [Online], EGG 3 | 2013, Online since 11 May 2013. URL : http://journals.openedition.org/ceroart/3082
235 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
naturels de la toile, laissant se rétracter et remonter les bords de la déchirure330. La tendance de la déchirure à remonter est visible actuellement sur l’œuvre :
Cependant, cette contrainte ne doit pas être excessive, car le but n’est pas de stopper complètement les mouvements de l’œuvre. Soulignons également le fait que Image 167 : remontée des bords de déchirure
les
mouvements d’une toile ayant déjà vécu trois
siècles et demi seront bien moindre que ceux d’une toile récente. L’opération d’imprégnation par le revers aura fait pénétrer le Plexisol P550® dans les fibres de la toile et cela diminuera encore sa réactivité aux variations extérieures. Nous serons donc face à une toile qui aura d’ores et déjà une amplitude de mouvement réduite. Le doublage pourra donc être relativement rigide sans risquer de créer des contraintes trop fortes au sein de la stratigraphie et d’entraîner des altérations des matériaux constitutifs. Cette rigidité sera possible grâce à un choix méticuleux de tous les éléments qui composent le doublage. Choix du type de doublage : Un doublage peut être renforcé par l’ajout d’une épaisseur à sa stratigraphie, visible sur le schéma suivant. En
Toile Toile de de doublage doublage
effet,
cette
couche
intermédiaire offre une rigidité
Adhésif
supplémentaire, plus ou moins
Intissé de polyester
forte selon le matériau et le
Adhésif
grammage. Tableau
Ceci
n’est
cependant pas son unique rôle.
Image 168 : Schéma explicatif du doublage renforcé
L’ajout d’un intermédiaire entre la toile de doublage et la toile d’origine permet d’éviter les interférences au niveau du
330
KAPUSCIAK, Maxime, les déchirures ouvertes, APROA BRK Bulletin, 3eme trimestre, 2007.
236 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
tissage. En effet, deux toiles même de la même contexture peuvent se gêner dans leurs mouvements. Dans ce contexte, la toile de doublage peut induire des déformations sur la toile d’origine et ainsi provoquer ou accélérer la formation d’une structure pavimenteuse sur la couche picturale. Cet intermédiaire va diminuer ou empêcher cette gêne, en fonction de son épaisseur. Il va également favoriser la répartition de l’adhésif sur toute sa surface et de créer une épaisseur de film homogène. Il va en outre augmenter la réversibilité331 du doublage. En effet, des études ont prouvé que la présence d’un intermédiaire permet un meilleur retrait de la toile de doublage et favorise une rupture de l’adhésif à l’interface adhésif/toile d’origine. Différents matériaux peuvent être employés dans ce rôle : la crêpeline de soie332, la toile de fibres de verre333, etc. Dans notre cas, l’intissé semble le plus adapté. L’intissé est souvent sélectionné pour sa résistance, mais également pour sa faible sensibilité aux variations hygrométriques. Il ne se dilatera pas lors de l’application de l’adhésif et ne se rétractera pas lors du séchage. Il en sera de même au cours de la vie du tableau, ne réagissant presque pas aux variations d’humidité relative, il ne se créera pas de contrainte de cisaillement au niveau du doublage. La stabilité chimique et la compatibilité de l’intissé avec les autres éléments du doublage est aussi un avantage. La rigidité donnée à l’ensemble peut être augmentée ou diminuée en fonction de l’épaisseur de l’intissé choisi. Toutefois, une épaisseur trop importante risque d’empêcher une bonne pénétration de l’adhésif en son sein et peut créer une faiblesse dans le doublage. C’est pour cette raison que nous utiliserons un intissé moyen (40g/m2 , commercialisé chez CTS). De plus, son addition à l’ensemble du doublage n’empêchera pas de rabattre des bords de tension sur le châssis (comme cela serait le cas avec une toile de fibres de verre).
331
Le Poizat (Virginie), Étude de l’influence des couches de non-tissés intermédiaires dans la réversibilité du doublage thermoplastique au Plextol B500®, CeROArt [Online], EGG 2 | 2012 : http://journals.openedition.org/ceroart/2690 332 LEMENAGER (Antoine), Les dessous d’un dessus de porte. Conservation restauration d’une scène de chasse du XVIIème siècle au format modifié, Mémoire de fin d’étude INP, promotion 2011, p.124 333 DEPARDIEU (Claire), Evaluation et comparaison de la résistance des collages par fil-à-fil des déchirures de la toile, Mémoire INP, 2011.p. 176.
237 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Choix de la toile de doublage Le choix de la toile de doublage aura également une incidence sur le maintien de l’œuvre de mémoire. Lors de nos recherches sur les différentes toiles de doublage utilisées en conservation, les toiles synthétiques nous ont semblé être les plus recommandées. Les toiles naturelles ont une sensibilité aux variations hygrométriques, et auront donc un mouvement probablement plus important que ceux de la toile d’origine. Ce mouvement supplémentaire risque d’augmenter les chances d’une rétractation des bords de la déchirure. Il est donc préférable de se tourner vers une toile ayant peu de sensibilité aux variations d’humidité relative : les toiles synthétiques semblent de fait les plus adaptées. Parmi les chercheurs en restauration, certains certifient que les toiles de polyester sont plus adaptées dans le cadre du renfort des toiles peintes334. Parmi les toiles synthétiques présentes sur le marché, la Polyester Sailcloth335 a particulièrement retenu notre attention. Elle est réputée pour sa grande stabilité dimensionnelle, son faible allongement à la rupture, la légèreté, sa stabilité dans le temps et sa résistance aux chocs. Par ailleurs, étant synthétique, elle prévient les risques de développement de moisissures et sera parfaitement stable face aux variations d’humidité relative. Cette toile tire sa rigidité de la tension qu’on lui donne, elle est donc à tendre en fonction de la rigidité que l’on veut donner à l’œuvre originale. Etant indéformable sauf sous une très forte contrainte, elle peut être tendue de manière très importante et offrir un support très rigide à l’œuvre336. Cette tension donnée au moment du remontage sur châssis ne variera pas. Cette toile regroupe donc toutes les qualités requises pour jouer le rôle de toile de doublage pour l’œuvre de mémoire. D’un point de vue mécanique, elle semble excellente. Son aspect visuel est néanmoins son principal défaut.
334
HEDLEY G., The stiffness of lining fabrics : theorical and practical considerations, ICOM, 6thTriennal meeting, Ottawa,1993. 335 HEDLEY G., VILLERS C., Polyester sailcloth fabric: a high-stiffness lining support, Studies in
Conservation, Volume 27, 1982. 336 Attention à ne pas trop tendre l’œuvre, cela risquerait de trop la contraindre, d’allonger les fils d’origine et de créer des contraintes de cisaillements néfastes pour l’œuvre.
238 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Ce côté peu esthétique de la toile peut aisément être contrebalancé par un doublage aveugle lors de la remise en tension de l’œuvre. La présence de l’intissé en intermédiaire ne nécessite pas de choisir une toile ayant une contexture proche de celle de la toile d’origine. Elle sera choisie en fonction des disponibilités sur le marché. La toile de doublage est légère et n’alourdit pas l’ensemble, la rigidité est donnée par la tension de cette toile sur le châssis.
Choix de l’adhésif : Les adhésifs synthétiques sont très utilisés pour leur souplesse, leur résistance aux attaques biologiques ainsi que pour leur insensibilité aux variations hygrométriques. Il diminuent aussi l’impact de l’humidité sur la toile originale et minimise ses mouvements. Plusieurs adhésifs peuvent être utilisés dans le cas présent : La BEVA 371® La BEVA 371® est un adhésif très communément employé afin de réaliser des doublages337. Elle est composée d’acétate d’éthylène vinyle, de paraffine et résine cétonique338. La méthode d’application de cet adhésif a son importance pour son accroche, sa pénétration339 et sa réversibilité. Il se trouve dans le commerce sous forme de film ou de liquide. Le film est découpé aux dimensions souhaitées et le scellage thermique se fait immédiatement. Sa réversibilité à court terme est bonne et sa pénétration est assez faible340. Sous forme liquide, la BEVA peut être appliquée au spalter ou par projection. Tandis que l’application au spalter offre une très mauvaise réversibilité, même à court terme, ainsi qu’une importante pénétration même à court terme, l’application par projection permet une
337
BERGER, (Gustav), Lining of a torn painting with BEVA 371, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , Greenwich, 1974. P.49-61. 338 https://www.ctseurope.com/fr/scheda-prodotto.php?id=2750 339 FIEUX, (Robert E.), Consolidation and lining adhesives compared, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , Greenwich, 1974. P.36. 340 D’HAENENS, (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, Op.Cit.
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bonne accroche, tout en restant réversible. Le meilleur équilibre entre adhérence et réversibilité est obtenu avec l’application au spray341. Des études ont prouvé qu’il est préférable de ne pas trop augmenter la température lors de la réactivation du film à la chaleur. En effet, une température adéquate permet un scellage tandis qu’une température élevée entraîne une baisse de la réversibilité de l’adhésif et une augmentation des résidus sur la toile d’origine lors du retrait du doublage342. En conclusion, la BEVA film est adaptée à notre problématique. Avantages
Inconvénients
Bonne rigidité
Stabilité chimique incertaine sur le long
Bonne adhérence
terme
Aucune présence aqueuse
Présence de composés cireux risquant de
Aucun ajout de solvant donc non toxique restreindre l’emploi
d’autre
type
de
pour le restaurateur
traitement plus tard
Travail très propre
Emploi d’une température relativement élevée Onéreux
Le Plextol B500® Parmi les adhésifs envisageables, Plextol B500® a également des propriétés intéressantes. Le Plextol B500® est un adhésif acrylique. Sa composition présente une bonne compatibilité avec le Plexisol P550® qui a été utilisé dans le cadre de l’opération d’imprégnation. Cet adhésif est utilisé sous forme épaissie et devient de fait très peu pénétrant343. Cette faible capacité de pénétration due
également à son haut poids
341
BIANCO (Lisa), AVALLE (Massimiliano), SCATTINA (Alessandro), CROVERTI (Paolo), PAGLIERO (Cesare), CHIANTORE (Oscar), A study on reversibility of BEVA 371 in the lining of paintings, Journal of Cultural Heritage, 2015, P.484 D’HAENENS, (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, Op.Cit. 342 Collectif, A study on reversibility of BEVA 371 in the lining of paintings, Journal of Cultural Heritage, Op.Cit. P.484 343 MARTEL (Thiery), Pénétration capillaire des adhésifs dans un matériau poreux de type plâtre, mémoire IFROA 1993. p. 99
240 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
moléculaire, est ici un avantage pour la réversibilité de l’intervention344. Cela permettra de réaliser une épaisseur intéressante de Plextol B500®, sans qu’il soit absorbé, et ainsi de réaliser un scellage adapté. Il existe plusieurs types de Plextol B500® dont les caractéristiques sont présentées ci-
Image 169 : Tableau comparatif des différents adhésifs de la gamme Plextol
dessous345 : Le Plextol B500® est actuellement le plus couramment utilisé. En effet, il possède des caractéristiques plus intéressantes que les autres car il combine une bonne adhérence et une bonne souplesse. Cette dernière caractéristique peut être un inconvénient dans le cas présent. Toutefois, cette grande souplesse peut être contrebalancée par une limitation de l’épaisseur du film l’adhésif. En effet, plus le film sera épais plus la souplesse sera grande. En diminuant cette quantité, la toile de doublage l’intissé et la toile d’origine seront plus intimement liés, et le film verra sa capacité d’allongement diminuée, s’il est soumis à des efforts de cisaillement. Cette méthode est un compromis intéressant. Son type d’application, tout comme la BEVA a une influence sur son maintien et sur sa réversibilité à court terme346.
344
MEHRA, V.R, A low-pressure cold-relining table,Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum , Greenwich, 1974. p.123 345 Arkivproducteur, Acrylic Resin Plextol B500, Plextol D360, Plextol D498 et Acronal 500 D. Source : http://www.arkivprodukter.no/skin/userfiles/files/Datablad/Lascaux_adhesives.pdf 346 D’HAENENS, (Manon), La pénétration des adhésifs de doublage, Op.Cit.
241 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Avantages
Inconvénients
Bonne adhérence
Dispersion aqueuse
Bonne réversibilité
Peut être toxique selon l’épaississant
Stabilité chimique Réversibilité augmentée par l’ajout d’un intissé Rigidité/ souplesse maîtrisable
Conclusion Les deux méthodes exposées précédemment sont équivalentes. La décision sera donc subjective. Ayant eu l’occasion de réaliser un doublage à la BEVA film® précédemment, nous avons pu apprécier son côté très pratique et efficace. Cependant, nous n’avons jamais pratiqué de doublage au Plextol B500®. Les deux méthodes étant équivalentes dans le cas présent, nous avons décidé de profiter de l’expérience de nos professeurs, pour effectuer un doublage au Plextol B500®. Choix de l’épaississant du Plextol B500® : Le Plextol B500® n’est pas un adhésif utilisable tel quel dans le cadre des doublages. En effet, cette opération de collage par contact exige l’application d’une épaisseur de film suffisante. Le Plextol B500® tel qu’il est conditionné pour la vente est bien trop liquide. Il est donc nécessaire d’y ajouter un épaississant. Il existe une grande quantité de solvants, plus ou moins utilisés selon les pays et les restaurateurs. Nous en avons sélectionné, appartenant chacun à une famille différente : La Tylose MH300P® fait partie des éthers de cellulose, le Rohagit® est un épaississant de type acrylique et le xylène est un hydrocarbure.
242 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Réversibilité Nature
Xylène + Solvant
Rohagit® + Emulsion acrylique
Compatibilité/affinité Ce solvant n’est pas avec les autres dangereux pour matériaux l’œuvre et a été utilisé précédemment
Vitesse d’évaporation
Toxicité349 Avantages
Inconvénients
Tylose MH300P® +++347 Epaississant cellulosique Affinité avec Compatible avec la l’adhésif toile de lin et le d’imprégnation polyester 348 présent dans l’œuvre et compatible avec le polyester Vitesse Rapide : vitesse d’évaporation de d’évaporation de l’eau l’eau Non toxique Aucun apport d’eau Meilleure autre que celui du réversibilité, Plextol B500® compatibilité des matériaux
Très toxique350 Aucun apport d’eau autre que celui du Plextol B500®, Après séchage présence uniquement du Plextol B500® Très toxique pour le Présence de deux Important apport restaurateur, composés résiduels d’eau, deux adhésif réversibilité difficile dont un susceptible de gonfler à l’humidité
Chacun a des avantages et des inconvénients. Afin de les départager, nous avons décidé de réaliser quelques échantillons.
347
ROCHE (Alain), Approche du principe de réversibilité des doublages de peintures sur toile, Op.Cit., p. 87 348 ROCHE (Alain), Approche du principe de réversibilité des doublages de peintures sur toile, Op.Cit.p.87 349 La toxicité dont nous parlons ici concerne uniquement l’inhalation ou le contact des produits avec la peau. 350 Fiche de sécurité du Xylène p.280
243 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Image 170 : Trois des échantillons de doublage sur table aspirante
Cela nous a permis de comprendre comment se déroule un doublage avec chaque échantillon et de comparer différents critères, tels que l’apport de rigidité qu’ils offrent351. Les résultats ont été présentés dans le tableau ci-dessous352.
Beva film®
Plextol (10%)
Xylène Plextol Rohagit® Plextol Tylose® (1,5%) (20%)353
Sens chaîne : 12
Sens trame : 7,8 Sens chaîne : 8,8
Sens trame : 12,2 Sens chaîne : 13,0
Sens trame : 12,4 Sens chaîne : 12,2
Sens trame : 8,0 Sens chaîne : 9,4
Sens trame : 13,0 Sens chaîne : 13,4
Sens trame : 12,4 Sens chaîne : 13,4
Sens trame : 9,2 Sens chaîne : 10,0
Sens trame : 13,6 Sens chaîne : 14,4
Aucune
Réactive l’encollage, d’humidité
Remarques sur Bonne les résidus adhérence, résidus après retrait
Fuse dans la toile de doublage et dans la toile d’origine Très bonne résistance, résidus résistants
Augmentation de rigidité
1,8 N/cm 1,4 N/cm
Toile (N/cm)
seule Sens trame : Sens trame : 10,8
7,8 Sens chaîne : 8,8 Toile +intissé Sens trame : 7,6 40g Sens chaîne : (N/cm) 8,4 Toile+ intissé+ Sens trame : 16,6 toile d’origine Sens chaîne : (N/cm) 16,0 Remarques à Fuse un peu dans la toile l’application de doublage
résistants 8,8 N/cm 7,2 N/cm
Peu de résidus mais résistants, doublage résistant 1,4 N/cm 1,2 N/cm
trop
Doublage moins résistant, peu de résidus et faciles à retirer 1,4 N/cm 1,4 N/cm
351
La prise des mesures de tension a été faite à l’aide d’un tensiomètre SEFAR®Tensocheck 100. Les tests ont été réalisés afin de nous donner un ordre d’idée. Il ne faut en aucun cas les prendre en tant que valeurs absolues. 353 Pourcentage estimé comme optimal par Alain Roche : ROCHE (Alain), Approche du principe de réversibilité des doublages de peintures sur toile, Op.Cit., p. 92. 352
244 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
D’après ces résultats de tests, c’est donc le doublage à la BEVA® film qui semble offrir la meilleure rigidité puis le Plextol B500® épaissit au xylène. L’épaississant du Plextol B500® ne semble pas avoir un grand impact sur sa rigidité, toutefois, l’épaississant au xylène est légèrement supérieur. Dans ce cas également, nous profiterons de l’expérience de nos professeurs et réaliserons un doublage au Plextol B500® épaissit au xylène. Pour cette technique, le Plextol B500® sera appliqué en plusieurs couches sur la toile de doublage avant d’être réactivé au xylène, mis en contact avec l’œuvre puis réactivé à la chaleur354 et une légère pression. L’utilisation de la table aspirante lors du doublage a beaucoup d’avantages : la pression et la chaleur sont maîtrisées et homogènes, la planéité est rétablie lors du doublage et les mouvements de la toile d’origine sont minimisés pendant le scellage thermoplastique, la fonction de refroidissement permet de figer rapidement assez vite l’adhésif en position et il n’y a aucun contact direct avec la source de chaleur.
Le doublage aveugle
Le doublage aveugle est une méthode de camouflage du revers de la toile. Une toile esthétiquement intéressante est fixée sur le châssis avant le remontage de l’œuvre doublée. Cette toile est en contact léger avec la toile de doublage mais elle n’y est pas collée.
Toile d’origine doublée Châssis
Toile de doublage aveugle Image 171 : Schéma du doublage aveugle
Mécaniquement parlant, le doublage aveugle n’apporte rien. La toile n’est pas fixée à l’œuvre et si elle est tendue correctement, elle n’induira pas de comportement indésirable à l’ensemble. Sa
présence empêche néanmoins un contrôle du revers de l’œuvre et alourdit
légèrement l’ensemble. Cependant, elle protège le revers de la poussière et diminue l’accès 354
CHITTENDEN, (Ronald), LEWIS, (Gillian), PERCIVAL-PRESCOTT (Westby), Prestretched low-pressure lining methods, Conference on Comparative Lining techniques, National Maritime Museum, Greenwich, 1974. P.43.
245 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
de l’humidité355 à la toile originale. Cette dernière caractéristique est relativement superflue dans notre cas étant donnée la nature de la toile de doublage. Elle est donc mécaniquement inutile. Sa présence n’engendre cependant aucun inconvénient. Il s’agit uniquement d’une question de confort visuel. La toile de doublage étant particulièrement inesthétique, l’opération sera proposée au propriétaire de l’œuvre, à qui reviendra la prise de cette décision.
355
MONIER (Sarah), Etude de dos protecteurs sur leur résistance aux contraintes, leurs microclimats et leurs effets tampons, Mémoire Condé 2012, p.143
246 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 5 : Choix du vernis intermédiaire et final
Cahier des charges du vernis356 : -
Composition connue et résine stable chimiquement
-
Le vernis doit être réversible, il doit donc rester soluble dans des solvants les moins polaires possibles, pas ou peu dangereux pour l’œuvre.
-
Adhésion au substrat : le vernis doit adhérer et être suffisamment souple pour suivre les mouvements du tableau,
-
Il doit offrir une protection contre les corps étrangers (poussières, salissures, faibles abrasions, etc.)
-
Propriétés optiques intéressantes : brillance et saturation proche de celles des résines naturelles. Il faut donc prendre en compte la masse moléculaire de la résine, sa viscosité de la solution, tension superficielle, l’idéal étant une résine à faible poids moléculaire, avec un indice de réfaction assez élevé357.
-
Température de transition vitreuse suffisamment élevée358
-
La molécule composant la résine doit être faiblement polaire, ne pas présenter de groupes fonctionnels (instabilité chimique due à la présence de double liaison C=C, ou autre) afin d’éviter l’oxydation359 et la formation de chromophores360. Les vernis naturels ne remplissent pas certaines exigences importantes qui viennent
d’être énoncées, à savoir, la faible polarité. Ils subissent donc un important jaunissement à moyen terme. Ils sont également caractérisés par un important électrostatisme et attirent de fait les poussières361.
356
FELLER R., STOLOW N., JONES E., On picture varnishes and their solvents, National Gallery of art, Washington, édition revue et augmentée, 1985. 357 RENE de la RIE E., Influences of varnishes on the appareance of paintings, Studies in conservation 32, 1987, P.12 358 Elle ne devra cependant être trop élevée afin de conserver une certaine souplesse à température ambiante. 359 RENE de la RIE E., McGLINCHEY Chrystopher W.,New synthetic resins for picture varnishes, cleaning retouching and coatings, IIC, London, 1990.p.170. 360 THOURY (Mathieu), Identification non-destructive des vernis des œuvres d’art par fluorescence UV, Thèse de l’Université Pierre et Marie Curie, Paris VI, p.15. 361 SOULAS (Ophélie), Etude comparative de l’électricité statique des différents vernis de restauration en vue de mettre au point un vernis antistatique, Mémoire de fin d’étude Condé, 2017.
247 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Deux vernis synthétiques correspondent bien à ce cahier des charges : le vernis Regalrez 1094® et le vernis Laropal A81®. Ces deux résines sont couramment utilisées en restauration pour leur stabilité chimique362, leur réversibilité et leurs qualités optiques. Toutefois, le Regalrez 1094® semble plus intéressant dans notre cas, pour les raisons suivantes : Absence de jaunissement Le vernis Regalrez 1094® est très intéressant dans le cas présent pour son absence de jaunissement dans le temps (absence de double liaison libre dans sa structure chimique). Son vieillissement se traduit plutôt par une fatigue physique, c’est-à-dire une augmentation de sa friabilité363. Ce défaut peut être contrebalancé par l’ajout d’un plastifiant : le Kraton G 1650®364 et d’un stabilisant, le Tinuvin 292®365. Le Kraton G 1650®® a pour rôle de diminuer le temprérature de transiion vitreuse du Regalrez 1094®, trop élevé donc trop cassant. Cette baisse permet d’obtenir un film de vernis plus souple à température ambiante. Cependant, ce plastifiant a tendance à s’oxyder et à accélérer le vieillissement du vernis. Ce désagrément peut être également compensé par l’action du Tinuvin 292® qui est un antioxydant ainsi qu’un anti-UV366. Les couleurs du tableau sont principalement des tons froids et nacrés. L’absence de jaunissement du Regalrez 1094® est intéressante car cela ne modifiera pas les couleurs froides de l’œuvre. Cet ajout de chaleur dans le temps peut convenir à certaines œuvres et offrir une patine agréable mais il ne sera pas favorable dans le cas de ce tableau. Le jaunissement créerait immédiatement une atténuation des contrastes et une sensation d’aplanissement de l’image.
362
DENIN (Bénédicte), Etude comparative du Regalrez 1126 en vernis par rapport au Regalrez 1094 et à la dammar, mémoire de condé 2012, p.138. E.RENE DE LA RIE, Polymere additives for synthetic Low-Molecular-Weight varnishes, Prepints of the 10th Triennal Meeting of the ICOM, Washington DC, ed. International Council of Museum, 1993, p.566-573 WHITTEN (Jill), Regalrez 1094 : properties and uses, WAAC Newsletter 17no.1, 1995.p 11 et 12. 363 WHITTEN (Jill), Regalrez 1094 : Properties ans uses, WAAC Newsletter 17 n°1, 1995, p.11 et 12. 364 Annexe Fiche technique 365 Annexe Fiche technique 366 RENE de la RIE,E., Polymere stabilizers. A survey with references to possible application in the conservation field, studies in conservation 33, 1988, 9 à 22.
248 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
La stabilité chimique et optique de Regalrez 1094® fait que ce vernis n’aura pas besoin d’être allégé aussi rapidement qu’un vernis naturel. Compte tenu du niveau d’usure de la couche colorée, il est préférable de minimiser le nombre d’interventions de ce type. De plus, le Regalrez 1094® fait partie des vernis les moins électrostatiques367, il attirera moins les poussières, ce qui diminuera la nécessité de décrassage dans le futur. Bonne réversibilité Par ailleurs, des tests réalisés sur le Regalrez 1094® ont montré que sa réversibilité368 était très bonne avec des solvants peu polaires, même à long terme. Cette réversibilité est meilleure que celle des autres vernis naturels comme synthétiques. Certains de ces solvants ont été testés au préalable sur l’œuvre, aucune solubilisation inquiétante ne semble s’être manifestée. La couche colorée ne devrait donc pas subir de dommage au moment d’une éventuelle suppression du vernis dans le futur Brillance En prenant en compte la date de création de l’œuvre, le vernis de restauration devra être brillant et le plus proche possible des caractéristiques optiques des résines naturelles. La saturation du Laropal A81® est réputée meilleure que celle du Regalrez 1094® mais cette dernière à des propriétés optiques plus proches de celles du vernis mastic369. Il ne faut cependant pas que le vernis soit trop brillant370 et empêche l’appréciation de l’œuvre dans son ensemble. A contrario un vernis trop mat ne correspondrait pas à la volonté initiale de l’artiste. Les œuvres classiques du XVIIème siècle étaient généralement recouvertes d’un
367
SOULAS (Ophélie), Etude comparative de l’éléctricité statique des différents vernis de restauration en vue de mettre au point un vernis antistatique, Mémoire de l’école Condé, promotion 2017. P. 153 368 RENE DE LA RIE, E., Polymere additives for synthetic Low-Molecular-Weight varnishes, Prepints of the 10th Triennal Meeting of the ICOM, Washington DC, ed. International Council of Museum, 1993,p.568-569. 369 WHITTEN (Jill), Regalrez 1094 : Properties and uses, The WAAC Newletter, Janvier 1995, vol.17, N°1 370 Ce vernis peut sembler très brillant seul, le Kraton est aussi un adjuvant qui matifie légèrement l’ensemble. HILL STONER (Joyce), (sous la direction de), Conservation of easel painting, ButterworthHeinemann Ldt, 2012. p.643
249 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
vernis brillant à base de résine mastic371. Un vernis très mat correspondrait plutôt à une œuvre contemporaine. Des tests devront être réalisés avant le vernissage de l’œuvre, afin de déterminer quelle est la concentration la plus adaptée. Le mélange de base sera réalisé selon les recommandations données par René de la Rie dans ses différents écrits372 : 20g de résine, 100ml de solvant qui est le White Spirit, 0,5 g de Tinuvin 292® et 0,6g de Kraton G 1650® (pour un vernis à 20%). Par ailleurs, le choix du Regalrez 1094® ne nous empêchera pas d’avoir la possibilité de sélectionner le Laropal A81® comme liant de retouche si nous le jugeons approprié.
371
THOURY (Mathieu), Identification non-destructive des vernis des œuvres d’art par fluorescence UV, thèse Université Pierre et Marie Curie, 2007, p.40 372 Collectif, BALCAR (Natalie) direction., les vernis : usage et propositions issues de recherches récentes,C2RMF, Paris, 2005.p.15
250 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexes scientifiques Annexe 1 : Calcul de la vitesse d’impact Annexe 2 : Formule de dispersion statistique Annexe 3 : Fiche technique du dynamomètre
251 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 1 : calcul de la vitesse d’impact A défaut de pouvoir calculer la force d’impact, nous sommes dans la capacité de calculer la vitesse de la pointe au moment de cet impact. L’axe OA correspond à la distance entre l’axe de rotation et le centre d’inertie. L’axe OC correspond à la position de A au moment de l’impact avec l’échantillon, donc au moment où sa vitesse sera maximale. Le calcul est fait dans le référentiel géocentrique.
Image 172 : Schéma d’un système de pendule (Source : http://physique.chimie.pagespersoorange.fr/Cours_de_physique/Physique_13_PENDULE_SIMPLE.htm)
Deux forces influencent le centre d’inertie A du système : le poids
et la force de
l’axe rigide sur point d’inertie . Le théorème de l’énergie cinétique est appliqué sur le point initial A et le point final C. Dans un référentiel Galiléen, la variation de l'énergie cinétique d'un solide, entre deux instants t initial et t final, est égale à la somme des travaux des forces extérieures appliquées au solide entre ces deux instants.
m.V²final -
m.V²initial = W (
)+W(
)
Aucune vitesse n’est donnée au moment du lâcher du pendule, la vitesse initiale est donc nulle. Donc :
m V f² - 0 = W (
)+W(
)
Les travaux des deux forces de lors du trajet circulaire de A vers C sont : W(
) = 0 Joule car
W(
) = mg x CE
reste perpendiculaire à la trajectoire circulaire.
CE = CO - CO x cos AOE = 24 - 24xcos 55° = 10,2 cm soit environ 0,1m
252 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Donc : W ( Alors :
) = 441,16 Joule m Vf² - 0 = 0 + mg x 0,1
Vf² =2g x 0,1 = 2 m²/s² , soit : Vf =1,4m/s La pointe étant fixée sur le système de balancier impact donc l’échantillon a une vitesse de 1,4m/s.
253 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 2 : Formule de dispersion statistique đ?‘›
Moyenne
1 đ?‘ĽĚ… = ∑ đ?‘Ľđ?‘– đ?‘› đ?‘–=1
Ecart-type standard
∑(đ?‘Ľ − đ?‘ĽĚ… )2 đ?œŽ=√ (đ?‘› − 1) Incertitudes Table de la loi statistique Student373
Incertitude absolue
đ?‘˜Ă—
đ?œŽ
√đ?‘› đ?œŽ đ?‘˜Ă— √đ?‘›) Ă— 100 ( đ?‘ĽĚ…
Incertitude relative
373
Le tableau de rĂŠfĂŠrence Student est plus adaptĂŠ aux petites sĂŠries statistiques que la courbe de Gauss plus exacte pour un grand nombre de donnĂŠes.
254 Tatiana Ronjon – MÊmoire de fin d’Êtudes Ecole de CondÊ – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexe 3 : Fiche technique du dynamomètre F
255 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Annexes des fiches techniques et de sécurité
256 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Agar-Agar
257 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Acétone
258 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Cyclohexane
259 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Ethanol
260 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Klucel G
261 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Kraton G1650
262 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Laropal A81
263 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Médium for Consolidation 4176
264 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
265 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
266 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Plexisol P550
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268 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
269 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Plextol B500
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271 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Regalrez 1126
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273 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
274 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Regalrez 1094
275 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
276 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
277 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Tinuvin 292
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White Spirit
279 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
Xylène
280 Tatiana Ronjon – Mémoire de fin d’études Ecole de Condé – Conservation- Restauration de peintures- 2018
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Sources des illustrations
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:
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Image 19 : Œuvre de mémoire. Photographie personnelle® Image 20 : Hyacinthe Rigaud, Le cardinal de Bouillon, 1708, huile sur toile, 247x217, Musée Hyacinthe Rigaud, Perpignan. Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/EmmanuelTh%C3%A9odose_de_La_Tour_d%27Auvergne_(1643-1715) Image 21 : Pierre Mignard (attribué à), Portrait d’une femme avec un enfant, Madame de Sillery et son fils, 1675, huile sur toile, 115x88cm, Dole, Musée municipal. Source : http://www.artnet.fr/artistes/pierre-mignardthe-elder/portrait-dune-femme-et-de-son-enfant-madame-de-PwGvs0PisfgTGDavt-kdrA2 Image 22 : Pierre Mignard (attribué à), Hélène Ferrand, marquise de Saint-Germain-Beaupré, vers 1678, huile sur toile, 79x65 cm, Blois, Musée du Château. Source : http://webmuseo.com/ws/musee-chateaublois/app/collection/record/685 Image 23 : Mignard Pierre, La fillette aux bulles de savon, 1681, Huile sur toile, 130x96cm, Versailles, musée National du Château. Source : https://www.akg-images.fr/archive/La-fillette-aux-bulles-de-savon2UMDHUS97N3Q.html Image 23 à 26 : Photographie personnelle® Image 27 : Voet Jacob Ferdinand, Portrait of a Woman, entre 1659 et 1700, Huile sur toile, 76x64 cm, Musee du Petit-Palais, Paris. Source : https://www.magnoliabox.com/products/portrait-of-a-woman-xir222247 Image 28 : Coiffure Hurluberlu. Source : https://www.pinterest.fr/pin/744571750863835088/ Image 29 : Coiffure Fontange à tour. Source : http://www.coiffure-ducher.fr/louisxiv_femdescr.html Image 30 : Perles du portrait étudié. Photographie personnelle® Image 31 : Détail du bracelet de l’œuvre étudiée. Photographie personnelle® Image 32 : Bracelet de la Duchesse d’Aumont : attribuée à Pierre Mignard, Portrait de la duchesse d’Aumont, Seconde moitié du XVIIème siècle, Musée Condé, Chantilly. Source : https://www.pinterest.com/pin/187462403223376330/ Image 33 : détail de bracelet, Pierre Mignard (Attribuée à), Portrait de femme (Mademoiselle de Fontanges ?) et Cupidon, huile sur toile, 107x90,5 cm, Collection privée. Source : Photographie personnelle® Image 34 : Détail du bijou visible sur l’épaule gauche du modèle de l’œuvre de mémoire. Photographie personnelle® Image 35 : Détail du visage du modèle de l’œuvre de mémoire. Photographie personnelle® Image 36 : Représentation de la mode du port de la mouche. Source : http://transenprovence.overblog.com/article-21831095.html Image 37 : Détail des fleurs de l’œuvre de mémoire. Photographie personnelle® Image 38 : vue aérienne du château de Frôlois, en Bourgogne. Source : http://www.route-desducs.com/chateau-de-frolois Image 39 : Flèche chronologique du parcours de l’œuvre, Schéma personnel® Image 40 : Vue du Château de Frôlois. Source : http://www.chateau-fort-manoir-chateau.eu/chateaux-cote-orchateau-a-frolois-chateau-de-frolois.html Image 41 : Portrait d’homme. Photographie d’Alban Thomines-Desmazure® Image 42 : Inscription présente au dos du tableau du portrait d’homme. Photographie d’Alban ThominesDesmazure®
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Image 43 : Œuvre de mémoire avant restauration, Photographie personnelle® Image 44 : Schéma de la stratigraphie, Schéma personnelle® Image 45 : (a) Assemblage tenon-mortaise traversant avec languette et (b) tenon mortaise aveugle1. Source : http://menuiserie-caserotto.fr/guide/assemblages/tenon_mortaise/index.htm Image 46 à 50 : Photographies personnelles® Image 51 : Exemples de semences, source : http://mimilo-tapissier-bordeaux.fr/lexique-de-la-tapisserie/lesfournitures-du-tapissier/ Images 52 à 144 : Photographies personnelles® Image 145 : Schéma de la structure des feuillets composant l’argile. Source : https://www.memoireonline.com/06/15/9140/Argile-et-mineraux-argileux-proprietes-physico-chimiques-etproprietes-et-proprietes-collo.html Image 146 : Schéma de la structure des quatre familles principales http://jacquesargaud.canalblog.com/archives/2016/12/28/34737113.html
d’argiles.
Sources
:
Image 147 : Lauri (Filippo), saint François en extase, 2e moitié du XVIIe siècle, huile sur toile, 48x38cm, musée du Louvre, paris. Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Filippo_Lauri Schéma 1, 2 et 3: schémas personnels® Images 148 à 152 : Photographies personnelles® Image 153 : Traitement et mesure de l’impact sur Photoshop®, Photographie de Morgane Noly® Schéma 4 : Machine de traction, source : fiche technique de la clef dynamométrique Image 154 : Test de traction, Photographie personnelle® Image 155 : Dynamomètre, source : fiche technique de la clef dynamométrique Image 156 : Echantillons de chaque série, Photographie personnelle
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