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FIFF de Namur

HCes derniers mois, la déléguée générale du FIFF s’est battue avec son équipe pour réinventer, en dépit de toutes les incertitudes liées à la crise sanitaire, un festival du film francophone à la sélection rigoureuse, sans trop perdre de la convivialité qui en fait tout le charme.

Organiser un festival decinéma en pleine pandémie est probablement le pire contexte imaginable. Dans quel état d’esprit abordez-vous cette 35 e édition?

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Nous avons dû imaginer différents plans successifs en fonction du développement de la pandémie, mais nous avons toujours eu la volonté de réaliser cet événement “en présentiel” dès que les salles seraient en mesure de rouvrir. Nous avions l’envie et le besoin d’être là pour relancer cette façon de “vivre le cinéma en vrai, en grand”, comme le dit le slogan du FIFF. Nous tenons évidemment compte de toutes les mesures sanitaires obligatoires. Il était important pour nous de relancer le cinéma dans les salles, de soutenir les professionnels, de relancer les contacts sociaux, même si c’est dans des limites balisées. Au-delà, nous voulions aussi relancer la culture à Namur avec les partenaires culturels locaux, les cafés et restaurants, puisqu’il n’y aura pas de chapiteau central cette année.

Nous sommes dans un esprit de solidarité, notamment avec les exploitants qui nous ont demandé de réduire le nombre de salles dévolues au festival pour maintenir leur propre programmation. Mais cela n’a pas été évident de travailler sans savoir combien on aurait de films, quels seraient nos invités, et avec toutes ces incertitudes sur les territoires ouverts aux voyages, notamment en Afrique.

Dans quelle mesure la sélection des films a-t-elle été affectée?

Nous avons reçu beaucoup de liens, de films sur les plateformes, même s’il y en a dont la sortie est reportée en 2021 et auxquels nous n’avons pas eu accès. Nous nous sommes très rapidement aperçus que l’on aurait moins de films, toujours issus de l’espace francophone. Nous avons choisi de faire une seule compétition, mélangeant premières œuvres et deuxièmes, troisièmes, quatrièmes films... Il y aura, par exemple, La Déesse des mouches à feu, même si la réalisatrice québécoise Anaïs BarbeauLavalette ne pourra pas faire le déplacement à Namur. Il est clair qu’il y a moins de films disponibles, mais la volonté est toujours d’avoir du cinéma de qualité.

Dans un esprit de solidarité, nous allons aussi donner une carte blanche au BRIFFF (Brussels International Fantastic Film Festival), qui a été annulé en avril dernier, pour diffuser des films de zombies (Yummy, du Néerlandais Lars Damoiseaux).

Nicole Gillet

« Le 35 e FIFF s'inscrit dans un esprit de solidarité et de relance »

Pour la première fois, certains films seront aussi accessibles enligne.

Nous avions envie de compléter les projections en salles par des projections via la plateforme Ciné Chez Vous du distributeur Lumière, mais dans un mode d’organisation de festival. Quelques films seront accessibles au lendemain de leur projection à Namur et pour 24heures seulement. Nous ne sommes pas dans une conception de diffusion large mais plutôt dans une conception de festival parce qu’on se rend bien compte que tout le monde ne peut pas se déplacer.

L’incertitude plane encore sur lesséances scolaires organisées dans le cadre du FIFF Campus.

Toutes les projections sont prévues, même si on a un peu réduit le périmètre. Enormément de séances pour le réseau primaire sont déjà complètes, signe qu’il y a une grande attente dans les écoles, chez les professeurs et les instituteurs par rapport au festival. C’est aujourd’hui plus compliqué pour les élèves du secondaire, pour lequel toutes les sorties sont pour l’instant interdites. On sait cependant que les ministres de la Culture et de l’Enseignement ont la volonté de lever cette interdiction [cela semble au- jourd’hui acquis, Ndlr]. C’est important pour les enfants qui ont été confinés chez eux pendant des semaines et ont été confrontés à beaucoup d’images ; il faut qu’ils puissent comprendre que ces images sont construites. C’est l’objet de nos ateliers techniques, pour lesquels il y a une vraie demande des enseignants. Chaque année, 6 000 à 7 000 jeunes viennent au FIFF Campus, parfois pour une journée complète.

Comment comptez-vous préserver l’aspect festif et social intrinsèque à un festival de cinéma?

C’est très compliqué. Cependant, le fait même d’être dans une salle de cinéma –tout en respectant les distances de sécurité –, de voir des invités défendre leur film, fût-ce par écran interposé, tout ceci permet quand même de créer ces liens qui font l’essence même d’un festival. On aura évidemment moins l’occasion d’échanger dans les files à l’entrée des salles, mais on peut le faire sur les réseaux sociaux. Nos accords avec les cafés et bars namurois permettent aussi à ces publics de s’y retrouver avant ou après les projections.

Les rencontres professionnelles sont un autre volet important du FIFF. Vous l’inscrivez dans un esprit de relance, mais pourquoi avoir renoncé au Forum de développement?

Dans le milieu professionnel, tout le monde a dû se coltiner ces derniers mois tellement de rendez-vous virtuels que nous avons tous besoin d’un peu de convivialité. Pour le Forum, qui vise les projets en développement, le ressenti, la relation directe est primordiale ; nous avons donc préféré le reprendre l’année prochaine. En revanche, nous favorisons la relance en soutenant des jeunes réalisateurs belges désireux de passer au long métrage, via un atelier “en présentiel”, tout comme avec notre atelier pour les jeunes comédiens et comédiennes. Organisé en collaboration avec le festival du film d’Aubagne, l’atelier Troisième personnage, consacré à la musique, sera, lui, virtuel.

Une rencontre sera aussi consacrée aux éco-tournages.

Nous avions pensé au départ à un sujet lié à la crise du Covid-19 ou à la chronologie des médias, très fortement bouleversée pendant la pandémie, mais on manque un peu de recul. Nous avons donc eu envie d’une réflexion tournée vers l’avenir. Les éco-tournages ont été mis un peu de côté avec la crise, mais on sait que l’on va devoir passer par là. La jeune génération a des ambitions écologiques qui s’inscrivent dans “le monde d’après” et elle a envie que les choses se fassent. Les fonds régionaux comme le VAF, screen.brussels et Wallimage ont aussi pas mal avancé en la matière. Ils vont nous l’expliquer.

Propos recueillis par Thierry Leclercq

Les films de la 35 e édition

HPour cette 35 e édition hors normes, avec moins de salles et de séances, le FIFF reste une importante vitrine pour découvrir “le meilleur du cinéma de l’espace francophone”.

Sur près de 1 100 films reçus, quelque 88 films ont été sélectionnés dans une programmation à la tonalité résolument contemporaine, explique le Directeur de la programmation, Hervé Le Phuez. “Ses lignes directrices se sont profilées au fur et à mesure que se construisait la programmation. Elles sont assez significatives de cette année 2020 et de la situation que nous vivons. Elle comporte essentiellement deux grands axes. D’un côté la nécessité et l’importance du collectif, permettant d’avancer, de lutter, de construire, de chercher la vérité. De l’autre côté, la démonstration qu’il est fondamental de croire toujours au pouvoir de l’imaginaire, de la création et de la culture. Je pense que ce sont des sujets qui sont complètement d’actualité.”

La compétition officielle réunit “treize films incontournables du moment” et compte tant des premiers films que des longs métrages de réalisateurs confirmés, des fictions que des documentaires et un film d’animation. Sept longs métrages sont annoncés hors compétition dans la section “pépites”, tandis que 21 courts métrages belges et internationaux concourent au sein de la même compétition. On pourra aussi voir à Namur des longs métrages et des documentaires belges, “tous récents”, une sélection de films flamands, une séance spéciale “gore” en solidarité avec le festival du film fantastique de Bruxelles (BIFFF).

T. L.

Ouverture

H Une vie démente, d’Ann Sirot et Raphaël Balboni (Belgique). Première mondiale, précédé du court métrage

Les Deux Couillons, de Thibault Segouin (France).

Compétition officielle

H 1982, fiction de Oualid Mouaness (Liban, Etats-Unis, Qatar). H Adieu les cons, fiction d’Albert Dupontel (France). H L’Affaire Colectiv, documentaire d’Alexander Nanau (Roumanie, Luxembourg). H Heidi en Chine, documentaire de François Yang (Suisse, France). H Josep, long métrage d’animation d’Aurel (France, Espagne, Belgique). H La Déesse des mouches à feu, fiction d’Anaïs Barbeau-Lavalette (Québec). H La Nuit des rois, fiction de Philippe Lacôte (France, Côte d’Ivoire, Québec). H La Troisième Guerre, fiction de Giovanni Aloi (France). H Petit Samedi, documentaire de Paloma Sermon-Daï (Belgique). H Si le vent tombe, fiction de Nora Martyrosyan (France, Belgique, Arménie). H Slalom, fiction de Charlène Favier (France, Belgique). H Une vie démente, fiction d’Ann Sirot et Raphaël Balboni (Belgique). Film d’ouverture. H Vaurien, fiction de Peter Dourountzis (France).

Compétition du court métrage

H A la retraite, de Yann Ducreux & Laureline Maurer (Belgique, France) H Autour d’eux, la nuit, de Vassili Schémann (Belgique, Pologne) H Baltringue, de Josza Anjembe (France) H Clebs, de Halima Ouardiri (Québec, Maroc) H Des gens bien, de Maxime Roy (France) H I’m Afraid To Forget Your Face, de Sameh Alaa (Égypte, France, Qatar, Belgique) H Journal de désintégration 2, de Loris Ciaburri (Suisse) H Juillet 96, de Michèle Jacob (Belgique)

Adieu les cons “Si le vent tombe”, de Nora Martyrosyan (compétition officielle).

H La Disparition de Tom R., de Paul Sirague (Belgique) H Le Canapé, de Karim Barras et Baptiste Sornin (Belgique) H Le Départ, de Saïd Hamich (Maroc, France) H Les Rois de la jungle, de Victoria Jadot (Belgique) H Les Tissus blancs, de Moly Kane (Sénégal, France) H Maalbeek, d’Ismaël Joffroy Chandoutis (France) H Novembre, de Camille De Leu (Belgique) H Nuit debout, de Nelson Makengo (R.D. Congo, Belgique) H On est pas près d’être des super-héros, de Lia Bertels (Belgique, France, Portugal) H On My Way de Sonam Larcin (Belgique) H Qu’importe si les bêtes meurent, de Sofia Alaoui (Maroc, France) H Shams, de Pauline Beugnies (Belgique) H Un jour de fête, de Philippe Arsenault (Québec)

Les pépites

H L’Enfant rêvé, de Raphaël Jacoulot (France) H L’Origine du monde, de Laurent Lafitte (France, Belgique) H La Francisca, une jeunesse chilienne, de Rodrigo Litorriaga (Belgique, France, Chili) H Miss, de Ruben Alves (France, Belgique) H Calamity, une enfance…, de Rémi Chayé (France, Danemark) H La Chouette en toque, d’A. Demuynck, P. Hecquet, F.  Standaert, C. Tisserant et C. Tocco (France, Belgique) H Petit Vampire, de Joann Sfar (France, Belgique)

Place au doc belge !

H Ailleurs, partout, d’Isabelle Ingold et Vivianne Perelmuter (Belgique) H Chance, d’Effi et Amir (Belgique) H China Dream, de Hugo Brilmaker et Thomas Licata (Belgique) H Ma voix t’accompagnera, de Bruno Tracq (Belgique) H Naître d’une autre, de Cathie Dambel (France, Belgique)

Focus Cinéma belge francophone

H Filles de joie, de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich (Belgique, France) H Jumbo, de Zoé Wittock (France, Belgique, Luxembourg) H Pompei, d’Anna Falguères et John Shank (Belgique, France, Québec) H Sans frapper, d’Alexe Poukine (Belgique, France)

Cap sur la Flandre

H Yummy, long métrage de Lars Damoiseaux (Belgique) H Alwaar de koe verdween (Où la vache a disparu) (12’), de Philip Heremans (Belgique) H De passant (15’), de Pieter Coudyzer (Belgique) H FKTF (French Kissing Tooth Fairy) (18’), d’Aline Boyen (Belgique) H Holiday (23’), de Michiel Dhont (Belgique) H The Memory Shop (17’), de Christiaan Neu (Belgique)

La belge collection (courts métrages)

H Des choses en commun, d’Ann Sirot et Raphaël Balboni H Mieux que les rois et la gloire, de Guillaume Senez H Rien lâcher, de Laura Petrone et Guillaume Kerbusch H Sprötch, de Xavier Seron

FIFF en séries

H Dix pour cent, de Marc Fitoussi (ép. 1) et Antoine Garceau (ép. 2) (France) H Invisible, de Marie et Geoffrey Enthoven (Belgique)

Carte blanche BIFFF @ FIFF H Yummy, de Lars Damoiseaux H Julia, de Vincent Smitz (CM)

Clôture

H Un triomphe, d’Emmanuel Courcol (France)

Un jury présidé par Samuel Benchetrit

HLe jury qui décernera les Bayard parmi les 13 longs métrages de la Compétition officielle sera présidé par le réalisateur, scénariste, romancier et dramaturge français Samuel Benchetrit.

Il avait enchanté le public du FIFF en 2007 avec la projection de son deuxième long métrage, le très parodique J’ai toujours rêvé d’être un gangster, avec Anna Mouglalis, Edouard Baer, Bouli Lanners, Serge Larivière, Alain Bashung et Arno. En 2017, il y a décroché trois Bayard, dont le Bayard d’or du meilleur film et celui du meilleur scénario pour son long métrage Chien, adaptation de l’un de ses romans mettant en scène Vincent Macaigne (Bayard du meilleur comédien), Vanessa Paradis et Bouli Lanners. Samuel Benchetrit (photo) connaît bien la Belgique puisqu’il y avait aussi situé son film Chez Gino, un hommage à la comédie italienne avec José Garcia et Anna Mouglalis. On attend prochainement la sortie de son dernier long métrage, Cette musique ne joue pour personne, avec notamment Vanessa Paradis, François Damiens et Bouli Lanners.

A ses côtés, le jury long métrage accueille le comédien belge Yoann Zimmer, originaire de Namur, que l’on a vu notamment dans Deux jours une nuit et La Fille inconnue, des frères Dardenne, Crache cœur, de Julia Kowalski, et Rêves de jeunesse, d’Alain Raoult. Il apparaît actuellement dans Eté 85, de François Ozon et surtout Des hommes, de Lucas Belvaux, où il incarne le héros principal, avec notamment Gérard Depardieu.

Autre Belge dans le jury, le réalisateur Guillaume Senez, dont le FIFF avait présenté il y a cinq ans le premier long métrage, Keeper (lauréat de trois Magritte du cinéma), et, en 2018, Nos batailles (cinq Magritte en 2019) ; on verra à Namur son court métrage de la Belge Collection, Mieux que les rois et la gloire, l’histoire d’un jeune père qui tente de renouer les liens avec son fils.

L a c o m é d i e n n e g r e c o - b e l ge Daphné Patakia a, elle, été vue dans Interruption, de Yorgos Zois (Venise 2015) et Diam, de Tony Gatlif (Cannes 2017), et on la retrouvera l’an prochain aux cotés de Virginie Efira au générique de Benedetta, de Paul Verhoeven.

Le jury est complété par la présence de la programmatrice suisse Anne Delseth, active au sein des festivals de Fribourg, Locarno, Zurich, Neuchâtel, membre du comité de sélection de la Quinzaine des réalisateurs de Cannes depuis 2012 et qui a rejoint fin 2019 l'équipe du festival Premiers Plans d’Angers.

Des jurés (presque) 100 % belges pour les courts métrages

Cette année, les courts métrages nationaux et internationaux sont rassemblés en une seule et unique compétition. Il jury est présidé par la réalisatrice flamande Fien Troch, qui compte à son actif quatre longs métrages: Een ander zijn geluk (2004), Unspoken (2008), Kid (2012) et Home (2017). Elle termine actuellement le scénario de son nouveau film intitulé Holly, pour lequel elle entame la phase de financement et de production. Siégeront à ses côtés à Namur: le directeur photo français Léo Lefèvre (Les Amoureuses, Garçon, Papicha) qui signe aujourd’hui l’image de L’Ennemi, de Stephan Streker ; l’auteure-compositrice-interprète belgo-congolaise Lous and the Yakuza dont le premier album, Gore, sort cet automne ; le comédien, scénariste et réalisateur Jean-Benoît Ugeux, qui a joué principalement pour

Emmanuel Marre, Benoît Mariage, Xavier Seron, Matthieu Donck, Michaël Roskam, et a remporté l’an dernier avec son film La Musique le Bayard du meilleur court métrage ; le chorégraphe et danseur franco-belge Damien Jalet dont les créations (Babel (words), Les Médusés, Yama, Omphalos, Vessel) ont été présentées aux quatre coins du monde. T. L.

L’écoresponsabilité de la filière cinéma

HAprès des mois d’interruption pour cause de crise sanitaire, les tournages ont repris en Belgique, encadrés par des protocoles très stricts sous la supervision de “conseillers Covid”. C’est pourtant sur un autre thème, tout aussi important pour l’avenir, que le FIFF a choisi de réunir les professionnels à Namur: celui des objectifs d’écoresponsabilité dans la filière cinématographique.

Cette rencontre sera modérée par Sophie Cornet, éco-conseillère qui, il y a dix ans déjà, a réalisé pour le Centre du cinéma et de l’audiovisuel une première étude sur l’impact environnemental des tournages proposant quelques pistes d’action telles que la création d’une prime écologique au niveau des aides à la production et/ou la création d’un écolabel pour le cinéma.

Mais c’est du côté néerlandophone que le VAF (Fonds audiovisuel de Flandre) fut, en 2013, le premier partenaire institutionnel à s’inscrire concrètement dans cette démarche: recours à un calculateur CO 2 , mise à disposition d’un coach, octroi du label vert “e.mission”... La tendance est de se focaliser sur le recyclage des déchets et l’utilisation responsable des matériaux (décors, costumes) qui compteraient pour 28% dans l’impact environnemental du tournage d’un long métrage. En 2019, 14 projets soutenus par le VAF ont été supervisés individuellement. Le VAF, qui tra

HCovid oblige, le FIFF a dû renoncer à certains de ses rendez-vous phares accueillant traditionnellement des professionnels de l’espace francophone (Forum de développement, Atelier Grand Nord de réécriture de scénario).

Plusieurs événements demeurent à l’agenda afin de “participer activement à la relance après des mois de pause et de ralentissement forcés”, souligne la déléguée générale, Nicole Gillet.

Atelier de long métrage

Partant du constat du temps long qui s’écoule entre la sortie des études et la réalisation d’un premier long métrage, la Manufacture XXL propose ainsi à tous les réalisateurs et réalisatrices belges ayant présenté un vaille avec des partenaires européens dans le cadre du projet Green Screen développe par ailleurs une approche qui privilégie l’économie circulaire (projet SCIFI - Supporting Circular Innovations in the Film Industry).

Dans la région de Bruxelles, “depuis quatre ans, la commission du film (Screen.brussels Film Commission) tente d’accompagner avec une écoconseillère un ou deux tournages écoresponsable par an, sur une base volontaire de la part du producteur et du régisseur”, explique Pierrette Baillot, sa responsable jusqu’il y a peu. Outre la rémunération de cette éco-conseillère, la film commission propose des sacs poubelles tournages afin de stimuler le tri des déchets, l’utilisation de gourdes réutilisables pour les équipes, etc. ; une brochure détaille par ailleurs les critères sur lesquels les producteurs/régisseurs peuvent travailler dans une perspective écoresponsable. Un calculateur carbone permet de mesurer les impacts CO 2 les plus importants des tournages : le transport et l’hébergement, la consommation d’énergie et de matériaux, les déchets et la restauration. Mais il n’existe pas (encore) de lien avec l’octroi des aides à la production. “La question du rôle que peut jouer un fonds économique comme le nôtre en termes de développement durable est actuellement en débat au sein de notre CA, précise Noël Magis (Screen.brussels Fund). Cela va au-delà de l’aspect écologique pour intégrer aussi les autres paramètres fixés par l’ONU, tels que la diversité et l’égalité des genres, court métrage au sein de la compétition nationale au FIFF ces cinq dernières années d’obtenir des conseils dans ce parcours, via des expertises, masterclass et ateliers pratiques. Cet atelier est coorganisé par la société française Initiative Film et sera encadré par Isabelle Fauvel et Hakim Mao, avec, entre autres, des apports des cinéastes Ann Sirot et Raphaël Balboni, du Centre du cinéma et de l’audiovisuel (Jeanne Brunfaut, Thierry Vandersanden), du vendeur Martin Gondre (Best Friend Forever), du distributeur Stephan De Potter (Cinéart), de la responsable cinéma de la RTBF Arlette Zylberberg.

La moitié des réalisateurs sélectionnés ont déjà démarré le travail sur un projet de long métrage : Jonas Alexander (Vestiges de l’orage), Catherine Cosme (Bagarre), François Paquay (Toujours plus), Isabelle la rémunération équitable, etc...”

Côté wallon, W a l l i m a g e s e lance cet automne dans le processus de “vertification” du secteur audiovisuel, liant l’accès à ses aides à des engagements en matière d’écoresponsabilité. “Pour cela, nous avons mis en place un nouveau règlement sur base du modèle de “rating system” établi par la commission du film du Trentin, explique l e r e s p o n s a b l e de Greenfilm Wallonia, Benjamin Vanhagendorn. On établit une liste de critères que le producteur doit sélectionner en amont du tournage et sur lesquels il s’engage à travailler.” Ces critères génèrent des points lors du dépôt de dossier chez Wallimage et permettront aux producteurs les plus audacieux de se démarquer.

Wallimage reste accommodant… pour l’instant

Le mécanisme sera en phase de test jusqu’à la fin de l’année, notamment pour le dépôt de novembre, et deviendra un prérequis obligatoire pour chaque dépôt de dossier. En guise d’incitant, Wallimage propose une éligibilité à 200 % des frais liés Schapira (Leah, sans brûler), Vincent Smitz (Monsters Stories) et Majin Tikal (CDD: Corpus Crisis). Ils sont rejoints par six autres realisateurs.trices sans projet particulier en écriture.

Organisé avec la complicité du Festival International du Film d’Aubagne (FIFA) , l’atelier “Troisième personnage” (la musique, selon Federico Fellini) réunit le trio réalisateur.trice, producteur.trice, compositeur.trice autour d’une partition composée sur base de séquences du scénario ; les scénarios d’une dizaine de projets de courts et longs métrages sont soumis avec les intentions musicales initiales à une quinzaine de compositeurs.trices. De quoi permettre la rencontre la qualité artistique des projets musicaux et l’univers des cinéastes.

Un troisième atelier est ouvert à une vingtaine de comédien.ne.s pour 4 journées de coaching avec l’actrice et

Avant un tournage “green”, il faut entièrement repenser la logistique.

aux mesures vertes mises en place ainsi qu’une certification dont pourront se prévaloir les producteurs en termes de communication.

“L’objectif est qu’en pratique, sur les tournages, les producteurs prennent les dispositions pour limiter au maximum leur impact énergétique, en y réfléchissant en amont.” Benjamin Vanhagendorn reconnaît volontiers que “pour l’instant, avec la crise de la Covid, c’est un peu compliqué et on fera preuve d’un peu de souplesse; on est bien conscient que le principal souci actuellement est de relancer tout le secteur, mais à terme, on voudrait bien que ce critère de durabilité fasse partie intégrante de chaque dossier.”

Rencontres et ateliers professionnels pour favoriser la relance

T. L.

coach Cloé Xhauflaire; au programme, jeu et analyse des scènes face caméra.

Journée du cinéma belge

Côté rencontres, la traditionnelle Journée du cinéma belge (6 octobre) permettra aux producteurs, distributeurs, diffuseurs, exploitants et programmateurs de se retrouver autour des nouveaux films belges francophones attendus dans les mois à venir. La séance “C’est du belge !” fera ainsi découvrir les bandes-annonces, teasers ou extraits de longs métrages en cours de finition. Une demi-douzaine de films inédits seront aussi présentés à des diffuseurs potentiels au cours de la séance “C’est du doc belge!”. Par ailleurs, l’Académie André Delvaux fera état de ses réflexions sur la pertinence ou non d’organiser une édition classique (ou réaménagée) des Magritte du cinéma en février 2021. T. L.

“Une vie démente”, du rire aux larmes

HAprès plusieurs courts métrages réalisés en tandem (La version du loup, Lucha libre, Fable domestique, Avec Thelma...), tous présentés précédemment au FIFF, Ann Sirot et Raphaël Balboni ouvrent la 35 e édition avec leur premier long, Une vie démente, projeté en première mondiale en présence de leur équipe. Entretien avec la coréalisatrice de ce film aigre-doux.

Alex (Jean Le Peltier) et Noémie (Lucie Debay) voient leur projet de couple et d’enfant chamboulé par Suzanne (Jo Deseure), la mère d’Alex, atteinte de démence sémantique, maladie neurodégénérative qui affecte singulièrement son comportement. Ce nouveau film lumineux et touchant, conçu dans le contexte du soutien aux productions légères du Centre du cinéma, mélange habilement l’émotion, la tristesse et le rire et doit beaucoup à la justesse de jeu et de ton de ses comédiens et comédiennes. C’est l’aboutissement d’une méthode de travail que nous détaille la scénariste et réalisatrice Ann Sirot.

Comment est né ce projet de long métrage ?

Nous avons vécu nous-mêmes avec un parent atteint de cette maladie. Une expérience avec beaucoup de moments où, si nous arrivions un peu à nous en distancier, nous nous apercevions que la situation était du plus haut burlesque. Par exemple, quand, dans un supermarché, la personne malade se met à croquer dans tous les fruits : elle cause un désordre immédiat.

Nous nous sommes dit qu’il faudrait réussir à transmettre cet aspect de l’expérience, où la personne sur qui nous veillons s’avère finalement beaucoup plus libre que nous parce que la maladie lui enlève ses inhibitions. On côtoie alors quelqu’un qui s’autorise énormément de choses. Nous voulions restituer ce mélange entre la gestion de la maladie et cette interpellation par rapport à notre conditionnement à nous.

Comment avez-vous procédé pour concilier les aspects dramatiques et comiques de la situation ?

C’était exactement notre objectif dans ce film : montrer que dans la gestion de cette maladie, il y a une coexistence entre la profonde tristesse et des moments de vraie gaité, de vraie joie. Nous avons fait beaucoup de visionnages tests du film, nous l’avons beaucoup montré par étapes à un public neutre pour réussir à jauger la cohabitation des moments de gaité et de tristesse dans le public. L’angle du film, c’est de parler d’un sujet a priori hyper-

Jo Deseure, Jean Le Peltier et Lucie Debay concilient drame et burlesque dans “Une vie démente”.

triste, avec un couple qui se déchire parce qu’il doit gérer un parent avec une maladie de type Alzheimer et que c’est très lourd, tout en montrant que cette expérience peut aussi être très drôle, burlesque, parfois chargée de beaucoup de lumière.

Ce film s’inscrit dans le cadre des films à production légère du CCA. Que cela implique-t-il par rapport à vos méthodes detravail et de production ?

Cela a été une chouette porte d’entrée dans le long métrage parce que nous avons pu utiliser notre méthode de travail en court métrage sur un format long, et que nous n’avons pas dû rendre un scénario préalable. A partir d’un synopsis de cinq pages, nous avions la garantie d’un tournage.

Nous fonctionnons avec un séquencier, qui rentre dans le détail de toutes les scènes mais sans dialogues précis. Nous faisons beaucoup d’allers-retours entre les répétitions avec les comédiens et ce séquencier. Nous filmons, nous montons les répétitions, et nous obtenons une sorte de maquette du film. A partir de là, nous réécrivons certaines choses. C’est une forme de création qui ressemble beaucoup à ce que font certaines compagnies de spectacle vivant: on assemble les choses pour qu’elles fonctionnent au mieux.

Le travail avec les comédiens est donc primordial, pour vous.

Nous avons besoin des acteurs très tôt, ce qui n’est pas possible dans un modèle de production classique. Nous avions déjà travaillé trois fois avec Jean Le Peltier, il était donc habitué à nos méthodes. Jo Deseure et Lucie Debay font beaucoup de théâtre, elles n’étaient pas surprises par cette façon de faire. Nous étions donc en présence de comédiens et comédiennes qui ne tombaient pas des nues, tous savaient très bien ce qu’est une création de plateau.

Un premier long et un nouveau court

H Une vie démente, long métrage (90’), est produit par Hélicotronc (Julie Esparbes, Anthony Rey), en coproduction avec L’Œil-Tambour. Il a bénéficié de l’aide du Centre du cinéma et de l’audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de Sreen.brussels et du tax shelter, et d’une coproduction de Proximus et Voo / Be tv. Il sera distribué en Belgique dès le 4 novembre par Imagine Film. H Des choses en commun, court métrage (25’, photo) inclus dans la Belge Collection avec Gwen Berrou, Ninon Borsei, Fanny Esteve, Jérémy Grynberg, Marie Lecomte, Benoit Piret, Hervé Piron. A bord de véhicules partagés, des destins qui se croisent ; conducteurs et passagers testent et réinventent leurs liens d’amour, d’amitié ou de famille… Il est coproduit par Hélicotronc et Angie Productions et est distribué par l’Agence belge du court métrage.

Vous revendiquez une “écriture à l’envers” ; qu’entendez-vous par là ?

Dans ce processus de production légère, on sait que l’on va travailler avec un budget très limité, avec deux décors et quatre comédiens ; autrement, on va sortir du cadre que l’on nous propose. Quand on écrit un scénario, on a plutôt l’habitude de laisser courir son imagination pour ensuite aller chercher les décors et les comédiens qui correspondent à l’histoire que l’on a conçue. Ce qui est “à l’envers”, c’est que nous établissons d’abord les ingrédients dont nous pouvons disposer et ensuite, nous écrivons quelque chose qui convient à tous ces éléments. Même si, au final, on est quand même dans une dramaturgie classique, nous avons eu la liberté d’y arriver de façon “organique” par le travail avec les acteurs, en procédant par petites touches, au gré de ce qui se passait en répétition et au tournage.

Parlez-nous de votre court métrage également présenté au FIFF dans la Belge Collection.

On est venu nous chercher pour faire partie de ce projet qui vise à mettre en lumière des comédiens et comédiennes qui ne sont pas connus du grand public, dans des courts métrages. Nous avions le choix des comédiens, mais les producteurs devaient approuver notre casting. Pour Des choses en commun, nous avons fait travailler sept acteurs dans un scénario construit autour d’usagers de voitures partagées qui laissent dans leur véhicule des traces subtiles de leur passage – ce qui en fait un endroit assez poétique et un dispositif scénaristiquement intéressant.

Propos recueillis par T. L.

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