Cabarets corses au temps des guitares

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CABARETS CORSES



Dominique Lanzalavi

CABARETS CORSES


C’est le temps des guitares, C’est le temps des beaux jours, Oui, oui, oui C’est le temps des guitares, Le temps des filles et de l’amour. C’est le temps des copains, Le temps du plaisir et de la jeunesse Quand on a 18 ans on a plus Le temps d’attendre longtemps. C’est le temps qui s’en va, Qu’il faut à présent gagner de vitesse, C’est le temps qui s’enfuit, Le temps des enfants d’aujourd’hui.

Extrait de la chanson Le Temps des guitares de Raymond Vinci et Francis Lopez interprétée par Tino Rossi.


Ghjuventù in Aiacciu a mea tempi fà

Sò spariti i cumpagni, ùn ci n’hè quasi più

Tutta di puesia è fata per cantà

Tutti quelli cantanti ch’ùn esistanu più

Si campa di sperenza, di gioie, d’allegria

A voce di Larenzu, quella di Bocognano

Tuttu si sbuccia è lu fiore è l’amore

È tutti i musicanti spariti pianu pianu

Si rispond’à la chjama cume sempre si corre Pocu à pocu a vita à la muta trascore

Vuleria turnà ma ùn sò comu fà Quandu pensu à què aghju a nostalgia

Sò spariti i cumpagni, ùn ci n’hè quasi più

Ma quand’ella mi piglia me mettu à sunnià

Tutti quelli cantanti ch’ùn esistanu più

À quella ghjuventù d’Aiacciu tempi fà

A voce di Chapetta, quella di Deidda L’arragita d’Arrighi o quella di Pasquale Ci hè Polò chi ghjè mortu è Bonelli dinù Sò sparite e ghitare in tutti i cabulò In sti tempi beati si cantava l’amore È quandu pensu à què si lagna lu mio cuore Solamente he cusì, ùn si ritorna più à quelli tempi fà D’Aiacciu ghjuventù

Ghjuventù aiaccina Chanson inédite de Tony Toga.



INTRODUCTION

« Une époque bénie qui ne reviendra plus ! » C’est de cette façon que les Corses qui l’ont connue qualifient le plus souvent cette période qui court de la fin de la Seconde Guerre mondiale aux années quatre-vingt. C’était le temps de la fête et de l’insouciance, le temps de l’amour, le temps des copains et de l’aventure. Au niveau national, ces années furent si prospères que l’on a coutume de les appeler les Trente Glorieuses. Cette époque qui ne connaissait pas la crise est habituellement vue comme un âge d’or au cours duquel l’Europe allait connaître une croissance exceptionnelle et entrer dans la société de consommation. De son côté, la Corse n’a pas profité de ce miracle économique. Très peu développée, elle a continué de voir ses villages se vider au profit des villes, de subir l’exil de sa jeunesse attirée par les opportunités d’emploi du continent ou d’ailleurs, par l’espoir de vivre une vie moins contraignante ou moins misérable que celle des anciens. Pourtant, cette époque est restée mythique dans le cœur de plusieurs générations d’insulaires. Certainement parce qu’elle fut celle de leur jeunesse, parce qu’elle fut marquée par l’arrivée du rock, des yéyés… et des touristes et parce

qu’elle est associée à la libération des mœurs qui étaient restées austères dans une société jusqu’alors très fermée. Pour les Corses, cette période est également associée à un phénomène musical : les cabarets. Dans le langage populaire, ce mot peut revêtir plusieurs significations. Il désigne tout à la fois un lieu de spectacles comme le Moulin-Rouge ou les Folies-Bergère, avec des numéros et des revues, un bar à striptease, voire à entraîneuses, ou encore un lieu où l’on écoute chanter en mangeant ou en buvant un verre comme on pouvait en fréquenter à Montmartre ou SaintGermain-des-Prés. C’est dans cette dernière catégorie que se classaient les cabarets corses avec, comme nous le verrons, des particularités qui ont assuré leur succès. Leur ambiance et leur répertoire typiques ont séduit un large public qui dépassait de loin la seule communauté corse. Durant une quarantaine d’années, ils se sont répandus un peu partout sur la planète en marchant dans les pas de la diaspora : le Son des Guitares à Ajaccio, Calvi, Paris, Marseille ou Nice ; Le Pavillon bleu, Le Colibri, le Temps des Guitares et le Méditerranée à Ajaccio ; Le Caveau du Marin, Le Temps des Guitares, le Rataghju et le Fanale à Bastia ; Les 3 Guitares


à Algajola, L’Arc-en-ciel à Corte, Le Bar de la Marine à Propriano, Le Stella marina à Solenzara, Le Troubadour et la Taverne du Roi Théodore de Porto-Vecchio ou encore le Chants et guitares, L’Ajaccienne, Le Père Vincent, Le Temps des guitares, le Club des Corses, La Lanterne, Le Spuntinu à Paris, mais aussi le Son des Guitares d’Alger, le Dolce Vita de Dakar, La Taverne de Douala et tant d’autres ! Il serait impossible de tous les nommer.

qui avaient délaissé ce répertoire jugé trop folklorique et français. Ainsi, en 2004, alors que Jean Menconi sortait un album, Maï Pesce, fondateur du groupe I Chjami Aghjalesi, a commencé à rendre hommage aux chansons qui avaient bercé son enfance dans les albums Vox populi et Era eu stu zitellu (C’était moi cet enfant). Depuis, de multiples albums de ce type sont régulièrement enregistrés, notamment par une génération de trentenaires et de quadragénaires comme Francine Massiani, Paul Mancini ou Paul Miniconi qui assument cet héritage longtemps délaissé. Il s’agit donc de tenter de comprendre comment et pourquoi cette époque est devenue légendaire grâce aux témoignages de ceux qui en ont été les acteurs et que nous avons eu la chance de rencontrer.

Ces lieux d’expression musicale ont vu émerger une génération pléthorique d’artistes corses comme Charles Rocchi, Antoine Ciosi, Tony Toga, les frères Vincenti, Jean Tavera, Maryse Nicolaï ou encore Regina et Bruno… La rencontre entre ces interprètes de grand talent et de nouveaux auteurs et compositeurs prolixes a permis l’apparition de tout un répertoire devenu culte avec de grands succès en français comme Solenzara, Le Prisonnier, Le Porte Croix ou Le Dernier des bandits… mais surtout avec de magnifiques chansons en langue corse comme Paese spentu, Ritornu, Casa paterna, L’Ombre, U Tragulinu, ou Chi fà qui ont fortement enrichi le patrimoine culturel insulaire.

Issu d’une famille de musiciens, j’ai baigné très tôt dans le chant et la musique corse. J’ai toujours entendu parler des soirées endiablées animées par mon oncle Charles Lanzalavi, un guitariste autodidacte et passionné, dans son restaurant de Corte puis de Lumio dans les années cinquante-soixante et dont le fils Ange est devenu un mandoliniste réputé. J’ai également connu, alors que j’étais tout jeune, au début des années quatre-vingt, le poète et humoriste Tintin Pasqualini et son équipe au fameux cabaret U Rataghju à Bastia situé à côté du restaurant de mes parents, ainsi qu’Antoine Ciosi que mon cousin Ange accompagne depuis plus de vingt ans. Je me souviens aussi m’être rendu avec ce dernier dans l’arrière-salle du café Le Rex à Calvi où il répétait avec des guitaristes comme Charles Santori et Jean-François Oricelli. Et puis un jour, j’ai fini par prendre moi aussi des cours

Depuis quelques années, alors que les cabarets corses ont presque tous disparu, ces chansons connaissent une véritable renaissance. Elles sont même reprises aujourd’hui dans leur tour de chant par des artistes appartenant au Riacquistu1

1. Mouvement culturel qui a émergé dans les années soixante-dix en parallèle du mouvement nationaliste.

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Introduction

de guitare avec Jean-Michel Panunzio qui a débuté dans les cabarets, notamment auprès de Roberto Alagna dans le cabaret corse La Madrague à Paris, avant d’accompagner de grands artistes français. Leur répertoire ne correspondait déjà plus à ce qu’écoutait ma génération. Aux disques de mon père je préférais de loin ceux de Canta u populu corsu, I Chjami Aghjalesi ou I Muvrini. Mais à force de les entendre à la maison ou avec mon cousin, je connaissais par cœur les chansons populaires et la période qu’elles évoquaient me fascinait car elle renvoyait à une certaine Corse qui avait disparu, une Corse où la vie était si difficile et pourtant si joyeuse avec ses macagne, ses sérénades, ses bals et ses soirées musicales à l’esprit bon enfant qui contrastaient avec l’époque troublée que nous vivions. Ces merveilleuses rencontres m’ont également permis de recueillir une importante iconographie qui constitue la trame de cet ouvrage. Mes interlocuteurs, ainsi que d’autres personnes comme le collectionneur Jean-Claude Fieschi dit « Le Blage », Xavier Paoli ou Gilbert Blanc, ont eu la gentillesse de mettre à ma disposition leurs photos et leurs documents personnels et je ne saurais trop les en remercier. Quel plaisir ce fut de découvrir ces trésors dans les albums ou les boîtes en carton où ils étaient parfois remisés car leur propriétaire pensait qu’ils n’intéresseraient plus personne désormais. Qu’ils soient amateurs ou professionnels, ces clichés permettent de se projeter dans l’univers des cabarets corses, de redonner vie aux sourires et aux tenues élégantes, de rêver à ces douces soirées bercées par le son des guitares.

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II

NAISSANCE NAISSANCE


DES LENDEMAINS QUI CHANTENT QUI CHANTENT ’apparition des cabarets corses n’est pas un événement que l’on peut dater avec précision. Elle est plutôt le fruit d’une évolution. La musique et le chant ont toujours occupé une grande place dans la vie des Corses. Nous ne reviendrons pas ici sur cette question qui a fait l’objet de recherches approfondies et nous nous contenterons de parler du xxe siècle. Ses premières décennies ont été très riches avec de grands artistes lyriques comme César Vezzani et son épouse Agnès Borgo, Gaston Micheletti, José Luccioni, Martha Angelici, Colomba Mazzoni ou encore le compositeur Henri Tomasi. Les théâtres de Bastia et d’Ajaccio ont connu un grand succès et c’est d’ailleurs ce dernier qui faisait rêver un jeune garçon qui allait endosser un incroyable destin : Tino Rossi. L’enfant de la rue Fesch allait bientôt devenir l’une des plus grandes stars françaises. Même s’il a parfois fait l’objet de critiques de la part de certains de ses compatriotes qui lui reprochaient de ne pas avoir assez fait pour son île, je pense pour ma part qu’il lui a beaucoup apporté : ses succès ont popularisé la chanson corse et favorisé l’émergence d’un nouveau répertoire et d’une nouvelle génération de chanteurs. Les chansons et les films de l’Ajaccien à la voix d’or ont permis

L

En 1936, Tino Rossi chante pour la première fois en vedette sur la scène du Casino de Paris dans le spectacle Tout Paris chante. Cette même année, il joue dans le film Marinella dans lequel il interprète des chansons de Vincent Scotto comme Marinella ou Tchi-Tchi qui vont connaître un immense succès.

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Des lendemains qui chantent

L’hôtel L’Île-de-Beauté dans le quartier de la gare de Bastia.

le développement des cabarets et même du tourisme en faisant de l’île une destination à la mode. Dès les années trente et quarante, Tino Rossi a enregistré des disques en langue corse comme Vieni… vieni… de Vincent Scotto1, Ciucciarella ou encore La Complainte corse de Roger Lucchesi2 qui ont connu un immense succès. Vieni… vieni… se classant même plusieurs semaines dans les meilleures ventes de disques aux ÉtatsUnis ! Certains de ces titres sont tirés de films qui mettent la Corse à l’honneur comme Marinella et Au Son des Guitares en 1936 ou L’Île d’amour en 1943. Ils sont rapidement devenus des classiques que les Corses reprenaient dans les nombreux

L’orchestre de l’hôtel L’Île-de-Beauté à Bastia : André Lucciardi, J.Defranco, Raymond Vinciguerra, Francis Vannucci

bars et cantines, ces petits établissements où l’on venait boire du vin jusqu’à pas d’heure pour discuter, s’enivrer, décrocher la guitare du mur et entonner des chants d’ici et d’ailleurs. La Seconde Guerre mondiale est bien évidemment venue briser ce bel élan. Premier département français métropolitain libéré en septembre 1943, la Corse n’en a pas moins subi les affres de cet atroce conflit. Affamée par le manque de ravitaillement dû aux problèmes de navigation en Méditerranée et à la présence sur son territoire des forces d’occupation avec plus de 80 000 soldats italiens et quelques milliers d’Allemands, elle a continué à manquer de nourriture bien après la Libération. Mais, comme partout, une fois le temps du deuil passé et malgré les difficultés, la vie a repris son cours et les Corses se sont peu à peu remis à chanter.

1. Marseillais d’origine italienne, Vincent Scotto (1874-1952) fut l’un des compositeurs français les plus prolixes de son époque avec près de 4 000 chansons, 200 musiques de films et 60 opérettes ! La chanson française lui doit notamment La Petite Tonkinoise, J’ai deux amours, Prosper yop la boum. Il est à l’origine de nombreux succès de Tino Rossi comme Vieni… vieni… Marinella, Le Plus Beau Tango du monde, O catalinetta bella tchi tchi, Pescadore, Chanson pour Nina, Ô Corse île d’amour et tant d’autres. 2. Auteur-compositeur et chanteur, Roger Lucchesi (1912-1983) est décédé la même année que Tino Rossi pour lequel il a écrit plusieurs chansons. Certaines d’entre elles sont interprétées dans des films comme La Complainte corse (L’Île d’amour, 1943) ou Maria (Fièvres, 1941).

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Naissance d'un phénomène

Le grand guitariste marseillais d’origine corse Marcel Bianchi, spécialiste de la guitare hawaïenne, a marqué les Bastiais qui venaient l’écouter au café L’Empire sur la place Saint-Nicolas au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

À la fin des années quarante et dans les années cinquante, une véritable fièvre musicale s’est alors emparée de l’île. « À Bastia, se souvient le chanteur Antoine Ciosi, le grand café L’Empire avait fait venir le célèbre guitariste Marcel Bianchi et son orchestre. Du coup, peu à peu, chaque café a voulu le sien et ainsi est née une belle cacophonie. »

Café Napoléon, dans le bas de la place, avec des musiciens comme le guitariste Coco Venturi, le père spirituel des guitaristes bastiais qui animait aussi les bals du grand hôtel L’Île-de-Beauté. Il était le plus souvent accompagné par les guitaristes Ferdinand Andreuccetti, Raymond Alvergne ou encore Toussaint Lenziani ainsi que par le batteur Victor Himo. Mais il y avait aussi des orchestres en terrasse au Café Bonin ou au Café des Palmiers. Nous attendions impatiemment l’été. » Antoine Ciosi, qui à cette époque fait ses premiers pas sur l’estrade de L’Empire, a vu les lieux de fête se répandre comme une traînée de poudre : « On guinchait à “l’Hollywood”, rue Miot, au Pigalle, rue de l’Opéra. Plus excentrés, Le Beau Rivage, Le Lido et Le Bois de Boulogne attiraient la jeunesse, alors que La Tremblante, une guinguette un peu mal famée, posée sur la mer juste à côté de l’abattoir municipal, attendait plutôt les entredeux-âges et les paumés. L’ouverture d’une boîte à striptease en plein centre-ville ne passa pas inaperçue. Le Florida occupait une partie du rez-de-chaussée d’un immeuble de standing, vers le bas du boulevard Paoli. Ce nouveau lieu de “débauche” alimenta les conversations. Ça jasait dur ! »

« Marcel Bianchi, qui était un guitariste corso-marseillais connu dans l’Europe entière, est venu en 1951 à L’Empire sur la place Saint-Nicolas – où se trouve l’actuel Crédit agricole – avec son fabuleux batteur-chanteur Tony Ovio, précise le guitariste Nanou Giuly. Du temps de M. Pancho Negroni, le gérant, la grande terrasse ombragée était noire de monde tout l’été : apéritif concert de 18 à 20 heures puis soirée de 21 heures à 23 heures. Nous qui n’étions encore que des sgaiuffi3, nous nous mettions près de l’estrade. Sans les serveurs, qui de temps à autre nous chassaient d’un jet d’eau de Seltz, nous aurions fini sur la scène parmi les musiciens ! Au lendemain de la guerre, les gens sortaient beaucoup et s’amusaient. L’été, il y avait aussi le 3. Garnement, polisson.

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Des lendemains qui chantent

Bastia en 1956. Tony Toga, âgé de seulement 13 ans, chante en première partie de Charles Aznavour au cinéma Le Paris. Il interprète Vénus.

Tony Toga remporte un concours de chant sur la terrasse du Café Napoléon, place Saint-Nicolas, à la fin des années cinquante.

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Naissance d'un phénomène

L’été 1957 au café L’Empire sur la place Saint-Nicolas à Bastia. De gauche à droite : Henri Bertrand, le Niçois Luc Vernet au piano, Antoine Remiti à la batterie, Michel Carrega, futur champion du monde de tir, à l’accordéon et Nanou Giuly à la guitare.

Nanou Giuly se souvient lui aussi de cet étonnant : « Il y avait beaucoup d’endroits pour foisonnement  sortir à Bastia comme Le Wagram de M. Alessandrini sur le boulevard Paoli qui était un bar avec un dancing en dessous, Le Florida, qui était rue Saliceti avant de se déplacer rue Émile-Sari. Là, je me souviens qu’il y avait des filles qui dansaient. C’était ouvert toute l’année avec des trios et des quartets de musiciens qui s’y produisaient. Moi, j’étais adolescent au début des années cinquante, j’avais commencé la guitare à 14 ans et je jouais sur le Quai-desMartyrs au Caveau du Marin dont le patron, M. Franceschi, était surnommé “Maggiarò”. Il y avait un trio avec guitariste tournant. Les deux autres musiciens étaient l’accordéoniste Jeannot de Franco et le batteur Jacques Chevtenko qui y sont restés des années. Le guitariste Raymond Alvergne a beaucoup joué avec eux lui aussi. »

voisinage : « Le Caveau était devenu le lieu de rencontre des jeunes musicos bastiais ; ils venaient s’y faire la main avec des bœufs endiablés à n’en plus finir, qui tenaient le spectateur en haleine. Lorsque Coco Venturi ou Mimi Bonin prenaient le chorus à la Gibson, ça frisait le délire ! Au fond de la cave voûtée, quelques spots de couleur fichés dans le mur mettaient en évidence le décor de la scène : une fresque sans prétention, d’une naïveté touchante, qui montrait des marins barbus en train de lever leur filet sur une mer trop bleue, au milieu de mouettes aux ailes démesurées. Sur un semblant d’estrade, une vieille batterie, des amplis, une guitare, puis pêle-mêle tout l’attirail d’un percussionniste amateur : tambourin, maracas, bongo et autres “gouzi-gouzi”. » La voix de la chanteuse Esmeralda a bien souvent résonné dans ce décor typique toujours accompagnée par son mari guitariste et chanteur Ferdinand Andreuccetti  : « Nous avions aussi avec nous le guitariste Raymond Alvergne, le batteur Jacques Chevtenko, Paul Cianferani de Macinaggio qui jouait de l’accordéon et du piano et Nicole Agostini. Mais il arrivait que le patron chante lui aussi. »

Antoine Ciosi n’a pas oublié lui non plus l’incroyable ambiance festive de ce précurseur des cabarets. Le quai actuel n’existait pas encore et l’on pouvait donc y prendre l’apéro en terrasse, bercé par le son des vagues marié à celui des guitares avant d’aller se réfugier un peu plus tard à l’intérieur pour faire la nouba sans trop gêner le

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Des lendemains qui chantent

Réveillon du 31 décembre 1956 au Caveau du Marin à Bastia. À la guitare, Nanou Giuly, âgé de 16 ans, qui jouait pour la première fois dans un lieu public, Jacques Chevtenko à la batterie et Jeannot de Franco à l’accordéon.

Le guitariste bastiais Mimi Bonin.

Jean Defranco, Jacques Chevtenko, Raymond Alvergne.

L’auteur bastiais Eugène Anarella a très bien retranscrit cette atmosphère dans sa célèbre chanson U Campanile di San Ghjuvà : « A sera à u chjar di luna/O quella do venite à ffacà/ Chitarra è mandulina/Un serinatu pudete ascultà/O quanta alegria in Bastia canta e sona/Ancu u libecciu fischjerà/Sopra u campanile di San Ghjuvà…

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