ASSOCIU LINGUA SCRITTA sott’à a direzzione d’Andria Fazi
Affissu è cuntestazione in Corsica 1970-1990
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I cuntributori Ghjuvanghjacumu Albertini, presidente di l’associu U Palazzu naziunale, editore di u libru L’affissu per memoria. Jean-Joseph Albertini, insignante in Arte à l’università di Corsica. Vannina Bernard-Leoni, autore, fundatrice di a rivista Fora! Zoé Carle, duttore in literature apparagunate di l’Università Parigi III. Xavier Crettiez, prufissore di scenza pulìtica à l’Università di Versailles-Saint-Quentin. Petru Paulu de Casabianca autore, fundatore d’A Piazzetta. Lea Eouzan-Pieri, autore-ritrattatore. Andria Fazi, maestru di cunfarenze in scenza pulìtica à l’università di Corsica. Ghjiseppu Orsolini, autore è direttore di u libru L’affissu per memoria.
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I. PER PRINCIPIÀ
À l’origine, ci hè un rigalu… • Petru Paulu de Casabianca Via affissi • Ghjuvanghjacumu Albertini L’affissu per memoria • Ghjiseppu Orsolini Signifier, informer, émouvoir : le « cadrage » des affiches politiques • Xavier Crettiez
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II. ESTÈTICA È MUBILIZAZIONE : DUI DECENNII DI MOSSE IN CORSICA • Andria Fazi 20 Intròitu 1 2
U sviluppu di una cuntestazione nova A prima radicalizazione Viulenza o micca ? Testimunianza Battì Manfruelli
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Di pettu à a ripressione Di pettu à l’elettori Testimunianza Leò Battesti
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A Corsica spaccata U Fronte spaccatu Testimunianza Tonì Casalonga
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Militanti, prigiuneri è martiri A dimensione internaziunale Testimunianza Carlu Castellani
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Una sucetà in mossa A difesa di l’ambiente Testimunianza Ghjiseppu Orsolini
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Lingua è identità Un università per a Corsica Testimunianza Ghjuvanghjacumu Albertini
Bibliugraffia III. FIGURE DI STILE. RINNOVU DI A CUMUNICAZIONE PULÌTICA
Naissance d’un graphisme politique corse • Vannina Bernard-Leoni La voix du peuple • Zoé Carle IV. PER COMPIE… PER AVÀ • Petru Paulu de Casabianca
22 26 38 58 59 90 112 113 127 135 138 151 161 162 186 199 201 227 240 241 244 246 269 273
È dopu ? 1990-2010 : da l’anni di piombu à a rinascita Una prova di cunclusione
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Table des illustrations Quale simu ? Vulemu ringrazià…
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CAPITULU IX
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À L’ O R I G I N E , C I H È U N R I G A LU … • P E T R U PAU LU D E C A S A B I A N C A
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Petru Paulu de Casabianca Ghjuvanghjacumu Albertini Ghjiseppu Orsolini Xavier Crettiez
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Xavier Crettiez
Signifier, informer, émouvoir : le « cadrage » des affiches politiques
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epuis quelques années, de nombreux sociologues du politique ont cherché à dépasser l’approche classique des mobilisations collectives de type politique, passant prioritairement par l’étude des appareils, des formes du militantisme, des contraintes d’organisation ou des structures d’opportunités politiques, en portant le regard sur certains répertoires d’action, certains outils de mobilisation non immédiatement politiques, jusqu’alors peu étudiés1. Les chants, les répertoires artistiques2, les commémorations funéraires3, les registres iconographiques4 et bien sûr les affiches militantes5. Concernant les mouvements nationalistes, un récent article de Mathieu Petithomme proposait une intéressante réflexion sur la production mémorielle du mouvement abertzale au Pays basque, insistant particulièrement sur l’usage instrumental des
1. Stéphane Cadiou, Stéphanie Dechezelles et Antoine Roger, Passer à l’action : les mobilisations émergentes, Paris, L’Harmattan, 2006. 2. Justyne Balasinsky, « Art et contestation », in Olivier Fillieule, Lilian Mathieu, Cécile Péchu, Dictionnaire des mouvements sociaux, Paris, Presses de sciences po, 2009, p. 67. 3. Stéphane Latté, « Le choix des larmes. La commémoration comme mode de protestation », Politix, n° 110, 2015, pp. 7-34. 4. Xavier Crettiez, Pierre Piazza, « Des murs qui parlent : l’iconographie contestataire nationaliste en Corse », in Isabelle Sommier et Xavier Crettiez, Les dimensions émotionnelles du politique, Rennes, PUR, 2012, pp. 143 et s. 5. Alexandre Dezé, « L’image en question. Retour sur une enquête de réception du discours graphique du Front national », in Pierre Favre, Olivier Fillieule et Fabien Jobard, L’atelier du politiste, Paris, La découverte, 2007, pp. 313-330.
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affiches politiques de ce mouvement6. Mais il existe très peu de réflexions – pour ne pas dire aucune – sur ce thème concernant le terrain insulaire. Le recueil présenté ici comble cette lacune en proposant de rares et parfois anciennes affiches politiques, pour la plupart issues du ou des mouvements(s) nationaliste(s), partageant un légitime souci de popularisation de la parole identitariste dans l’île. Cet ouvrage vient compléter utilement une réflexion déjà proposée précédemment sur l’iconographie nationaliste murale, encore plus visible car nettement plus pérenne, partageant souvent des ambitions similaires7. Quelles sont ces ambitions ? Pour le dire autrement, à quoi servent ces affiches politiques au-delà d’une nécessaire publicisation de la cause nationaliste ? On émettra ici trois hypothèses sur leur usage en insistant particulièrement sur les effets de cadrage produits par ces supports militants8. Comme tous les entrepreneurs de mobilisation, les formations et acteurs nationalistes s’efforcent d’influer sur les représentations du réel à travers la construction de « cadres 6. Mathieu Petithomme, « Commémorer les “Gudaris” d’hier pour légitimer la violence d’aujourd’hui. Une étude socio-historique du détournement du biz-kargi et de l’abertia eguna au Pays basque », Pôle Sud, n° 42, 2015, pp. 105-135. 7. On se permettra de renvoyer à notre ouvrage, co-écrit avec Pierre Piazza : Murs rebelles. Iconographies nationalistes en Corse, Pays basque et Irlande du Nord, Paris, Karthala, 2015. 8. Par cadrage, on fait référence aux travaux de sociologie de l’action collective insistant sur le fait qu’un mouvement social a besoin de proposer à ses sympathisants et militants un schéma de compréhension de leur action, un récit de légitimation de leur engagement qui donne sens à ce dernier. Voir la très belle synthèse sur ce sujet de Jean-Gabriel Contamin, « Cadrages et luttes de sens », in Olivier Fillieule, Éric Agrikoliansky, Isabelle Sommier, Penser les mouvements sociaux, Paris, La découverte, 2010, pp. 55 et s.
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I • PER PRINCIPIÀ
d’action collective », véritables ensembles de croyances et représentations destinés à pousser à l’action en mettant en scène soit l’injustice ou l’amoralité flagrante d’une situation, soit l’inscription identitaire bafouée ou censurée. Les affiches politiques sont ces « cadres picturaux » qui présentent selon nous trois fonctions majeures : « cadres cognitifs », elles offrent à ceux qui y posent le regard un discours idéologique et politique de mise en scène de la communauté corse, résistante et unitaire ; « cadres pratiques », les affiches sont également d’utiles instruments d’une parole concrète cherchant à informer, à recruter, à mobiliser, à sensibiliser le spectateur involontaire ; enfin « cadres sensitifs », les affiches sont d’habiles relais émotionnels permettant « de susciter des réactions affectives qui prédisposent ceux qui les éprouvent à s’engager ou à soutenir la cause défendue9 ».
Cadrages cognitifs Quelles que soient les époques considérées, on retrouve dans la production picturale des affiches militantes nationalistes cinq thématiques majeures qui proposent un véritable « paysage de sens10 », souvent concurrent d’un ordre dominant imposé par l’État et ses institutions. Notons que l’imposition militante d’un cadrage singulier n’est pas totalement libre. Elle va fortement dépendre de ce que David Snow appelle un « master frame », capable d’accueillir l’assentiment d’une population détentrice d’une certaine culture et de normes partagées11. Ainsi, à l’inverse des affiches mobilisées par le mouvement basque, celles ici proposées ne font que peu référence à une situation de guerre (incompréhensible en Corse) ou à l’usage légitime d’une violence de forte intensité (non acceptée dans l’île). De la même façon, l’histoire mobilisée demeure locale et les référents étrangers rares alors que, à l’inverse du mouvement basque, l’ancrage marxiste de la contestation est presque inexistant.
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9. Johanna Siméant, Christophe Traïni, « Pourquoi et comment sensibiliser à la cause ? », in Christophe Traïni (dir.), Emotions… Mobilisation !, Paris, Presses de Science po, 2009, p. 13. 10. Daniel Cefaï, Pourquoi se mobilise-t-on ? Les théories de l’action collective, Paris, La découverte, 2007, p. 483. 11. David Snow, Robert Benford, « Ideology, Frame Resonance and Participant Mobilization », in Bert Klandermans, Hanspeter Kriesi, Sidney Tarrow (dir.), From Structure to Action : Comparing Social Movement Research across Cultures, Greenwich, JAI Press, 1988.
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• Fonder une identité collective : on posera comme hypothèse forte que nombre d’affiches mobilisées ont comme finalité la construction et la mise en scène d’une identité collective forte sous la forme « d’incitations de solidarité permettant à un individu de se rattacher à une collectivité de référence et de renforcer son identité en conformant une partie de ses actes avec ses valeurs12 ». La création de cette identité collective apparaît dans ces affiches à la fois comme une ressource instrumentale de mobilisation mais également comme une fin en soi, « un achèvement culturel13 ». La représentation sur de nombreuses affiches de la tête de Maure, des contours stylisés du territoire de l’île, de représentations iconographiques de personnages folkloriques ou d’espaces emblématiques (bandit d’honneur, femmes en noir, paysan travailleur, Ponte Novu) comme l’utilisation récurrente de la langue corse sous la forme de slogans galvanisateurs, tout cela participe de la production – d’aucuns diraient de l’invention14 – d’une identité collective le plus souvent inscrite dans la résistance et l’intemporalité. • Assurer une filiation historique : l’affichage politique permet également des formes de « détournement de sens », entendu ici comme l’instrumentalisation pratique de filiations historiques pour valoriser l’expérience présente de la mobilisation. L’usage de figures locales de la résistance héroïque à l’image de Pasquale Paoli, sorti de l’indifférence collective lors du grand moment du revival identitaire dans les années soixante-dix, témoigne de cet effort de singularisation. En réhabilitant le général fondateur de la Corse indépendante aux dépens de l’image unificatrice napoléonienne – jamais présente sur les affiches – c’est à une autre lecture historique de l’île que se référent les mouvements nationalistes et régionalistes. En superposant dans une même affiche le profil de Paoli et la statue de la liberté, la filiation historique se double d’une filiation philosophique (l’ancrage démocratique) et d’une projection moderniste (une Corse indépendante ouverte sur l’Amérique). 12. Patrick Hassenteufel, « Pratiques représentatives et construction identitaire : une approche des coordinations », Revue française de science politique, vol. 41, n° 1, 1991, p. 17. 13. Olivier Fillieule, « L’analyse des mouvements sociaux », in O. FIllieule (dir), Sociologie de la protestation, Paris, L’Harmattan, 1993, p. 40. 14. Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales, Paris, Seuil, 1993.
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S I G SNI IGF NI EI FR I, EIRN, F IONRFM O ERRM, EÉRM, OÉ U M VOOUI VRO: I RL :E «L EC A« DCRAADGREA G» ED »E SD EA SF FAI C F FHIECSH EP SO LPI OT LI QI TUI EQSU E• CS •
• Projeter sur l’avenir : quelques affiches inscrivent à l’inverse l’île et ses habitants dans un futur moderne mais accueillant, évitant ainsi le piège de l’essentialisme qui guette invariablement les apôtres nationalistes15. L’utilisation d’une modernité technique (les tracteurs du syndicat corse de l’agriculture) ou technocratique (vantant une agriculture corse de production), l’inscription des habitants de l’île dans le savoir (affiche au style moderniste de défense de la langue corse à l’université) et le progrès social (affiches syndicales) ou l’insertion internationale d’une Corse composante d’une Europe des peuples (lors des Ghjurnate di Corti) dessinent une représentation presque avant-gardiste d’un peuple refusant son déclin en mariant progrès et identité. • Dénoncer l’injustice : parmi les formes dominantes de cadrage utile à l’action collective, on soulignera avec Doug McAdam l’importance des « cadres d’injustice » cherchant à dessiner publiquement la stigmatisation ressentie et les injustices produites à l’encontre du groupe mobilisé16. C’est par un effort de « libération cognitive17 » que les acteurs vont retourner le stigmate répressif et asseoir la contestation. L’affichage militant en Corse a cette fonction révélatrice d’une assignation à demeure et à soumission jugée inacceptable. Les affiches sont nombreuses – et même majoritaires – à suggérer une domination coloniale, policière, culturelle, institutionnelle et même environnementale qu’il convient de refuser. L’appel à la résistance, à l’insoumission, la démonstration de l’iniquité du pouvoir et de sa force brute illustrent nombre de visuels et fonctionnent comme autant de marques d’une insupportable injustice. • Légitimer la violence : si cette dimension apparaît nettement plus visible dans l’univers sauvage du bombage mural militant18 15. Antoine Roger, Les grandes théories du nationalisme, Paris, Armand Colin, 2001. 16. Doug McAdam, Political Process and the Development of Black Insurgency 1930-1970, Chicago, University Of Chicago Press, 1982. 17. Par ce terme Doug McAdam entend la façon dont les entrepreneurs de cause parviennent à offrir une autre définition de la situation, transformant une représentation négative de soi et de son environnement en une variable positive. À titre d’exemple, le mouvement des Black Panthers parviendra à transformer le stigmate du « noir » en un « proud to be black », offrant à la situation de domination des Afro-Américains une autre explication que celle du pouvoir blanc (la fainéantise, l’indolence culturelle…) passant par l’exploitation impérialiste et le racisme institutionnel. 18. Xavier Crettiez, Pierre Piazza, « Sociologie d’une conversation silencieuse : protestation iconographique nationaliste et réception publique en Corse », Culture et Conflits, n° 91/92, 2013, pp. 101-123.
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ou dans d’autres univers de lutte nationaliste aux tensions nettement plus marquées (Irlande du Nord ou Euskadi)19, quelques affiches suggèrent en filigrane une forme de légitimation de la résistance violente qui repose principalement sur l’appel à la réaction face aux exactions de l’État. La représentation schématique de prisonniers politiques corses enchaînés, bâillonnés, incarcérés et parfois même affamés (assimilant la lutte insulaire à la hunger strike des militants de l’IRA), souvent barrés d’un slogan rageur (Libertà ! Fora ! Martiru !), fonctionne comme autant d’appels à une résistance qui serait légitimée par la répression du pouvoir. De rares affiches symbolisent également « l’être corse » en arme ou érigeant le fanion de l’identité au milieu des gaz lacrymogènes. Deux affiches sont à ce titre particulièrement intéressantes, offrant un cadrage guerrier à une situation qui objectivement ne le mérite pas : en représentant schématiquement l’érection du drapeau corse par un groupe de militants à la façon de la célèbre photo des GI américains sur l’île d’Iwo Jima et en présentant, sur la deuxième affiche, une scène d’arrestation sur fond de survol d’hélicoptères de combat (référence à Aleria), les entrepreneurs de cause nationalistes produisent une convergence de cadrage audacieuse mais fortement mobilisatrice.
Cadrages pratiques De façon plus prosaïque, l’affichage militant a également une fonction très pratique d’information, de mobilisation et de recrutement et peut-être également, dans le cas corse, de recomposition des référents politiques locaux. • C’est là évidemment une des fonctions premières de l’affichage politique : faire connaître tout autant que faire reconnaître. Les murs couverts sont autant de moyens d’informer la population-cible des grandes thématiques mises sur agenda par les formations nationalistes ou régionalistes : lutte contre les incendies et les atteintes écologiques, dénonciation de la répression d’État, promotion de la culture, sauvegarde de l’identité linguistique, dénonciation de la condition des prisonniers, soutien au syndicalisme endogène, stigmatisation des errances de la drogue, etc. L’affiche est un mode utile, rapide et souvent
19. Louis-Jean Calvet, La production révolutionnaire : Slogans, affiches, chansons, Paris, Payot, 1976.
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CAPITULU IX
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ESTÈTICA È MUBILIZAZIONE :
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SIGNIFIER, INFORMER, ÉMOUVOIR : LE « CADRAGE » DES AFFICHES POLITIQUES •
Andria Fazi
DUI DECENNII DI MOSSE IN CORSICA Avertimentu U prugettu Guarda fratellu ! hè statu pinsatu cum’è una spartera. Eppuru a spartera ùn hè solu mustrà ; ghjè dinò cuntà, riflette è interpretà. Mai ùn avemu imaginatu di limitacci à una ristituzione visuale di l’affissi cuncolti. Truverete quì l’affissi chì ci sò parsi i più impurtanti è significativi, ma dinò una cuntestualizazione generale è particulare di ogni affissu ritinutu. L’affissi prisintati quì còntanu una storia, quella di a Corsica di l’anni settanta è ottanta, è sò infatti un invitu à scopre o riscopre quella storia. Noi l’avemu fatta ind’è a difficultà quant’è ind’è u piacè. In ogni casu, simu stati furtunati d’esse una squadra abbastanza plurale, in u sensu chì certi avìanu una leia famigliale assai forte incù sta storia, invece chì d’altri ùn ne sapìanu guasi nunda. Precisemu dinò chì stu libru ùn pretende mancu appena prisintà a tutalità di l’affissi è di i fatti pulìtichi impurtanti accaduti in Corsica in quell’èpica. Quessa saria forse una dimarchja vana. Ùn si parla mai di tuttu, è quellu chì vole parlà di tuttu si scorda à spessu di l’essenziale. Ma in tutti i casi, speremu d’arricà qualcosa à a capiscitura di un èpica decisiva per a Corsica qualsìasi u livellu, pulìticu, ecunòmicu, suciale o culturale.
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Qualchì cummentu hè statu fattu da 21 Vannina Bernard-Leoni è Jean-Joseph Albertini. Quand’ellu hè u casu, u cummentu hè zifratu VBL o JJA.
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U sviluppu di una cuntestazione nova
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’hè forse qualcosa di stranu ind’è u naziunalismu corsu. Una strana capacità à passà da a fama à u smintecu in qualchì decina d’anni. In u XVIIIu sèculu, u naziunalismu corsu s’hè fattu cunnosce da l’Auropa sana, da i rivuluziunarii mericani, è interessava filusoffi trà i più famosi di l’èpica, soprattuttu Voltaire è Rousseau. È quellu interessu si capia bè : da u 1729, i Corsi si sò rivultati è si sò affrancati da l’antica duminazione di Genuva ; anu adupratu una Custituzione puntellata nant’à a suvranità di u pòpulu (1755), è principiatu à custruisce un Statu naziunale induve ùn s’era mai pinsata (1755-1769) ; anu cumbattutu per ùn esse suttumessi à a munarchia francese (1768-1769)1 ; si sò rivultati torna contr’à a Cunvenzione naziunale, anu fattu secessione cù a Francia (1793), pruvatu à stabilisce un Regnu anglocorsu (1794-1796), ecc. Invece, in u XIXu sèculu, beatu quellu chì busca una traccia di mubilizazione naziunalista in Corsica. Micca chì l’integrazione fussi stata fàciule, è chì i prublemi d’òrdine pùblicu fùssinu smarriti… quessa mancu appena. Ma u naziunalismu ùn era più un prugettu pulìticu ind’è l’ìsula, mentre ch’ellu si sparghjia in l’Auropa sana è in America latina, è ch’ellu cuminciava ancu à tuccà territorii sìmuli à a Corsica, integrati più o menu per forza ind’è quadri naziunali stragneri : l’Irlanda, a Catalogna, ecc. D’altronde ùn basta à parlà di una disparizione di u naziunalismu. Di modu più generale, dopu compiu u Primu Imperu, si puderia
1. Si puderia aghjunghje a rivolta niulinca è a so ripressione di u 1774, chì sò firmate in e mimorie.
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U SVILUPPU DI UNA CUNTESTAZIONE NOVA • C
parlà di un assenza guasi tutale di mubilizazione pulìtiche è suciale… cum’è s’ùn ci fussi più nunda à cuntestà ind’è un paese pòvaru pòvaru, è ch’avia da cunnosce prestu un esiliu tremendu. Infatti, à pàrtesi di a munarchia di Lugliu, i guverni francesi avìanu capitu benìssimu chì era u modu u più còmudu è ecunòmicu per ammansà i Corsi : quellu di dà à i nutàbuli isulani tuttu u putere lucale, incù unipochi di mezi da distribuisce per accuntintà i so parenti è partigiani. Sicura chì l’essenza di quellu sistema era l’inghjustizia, è chì l’inghjustizia hà sempre favurizatu a rivolta. Ma cusì ùn hè stata… I Corsi anu priferitu fraiassi trà di elli per impatrunìscesi di u putere cuncessu da a Francia, eppo’ sò stati sempre più numarosi à sceglie a partenza, à andà à stantà u so pane in cuntinente o in i quattru scorni di l’imperu culuniale. Sicondu à Martini, ind’è l’anni 1930 i Corsi raprisentàvanu 22 % di l’effettivi di l’amministrazione è di l’armata culuniale2, quandì a pupulazione di a Corsica raprisentava trà 0,7 è 0,8 % di a pupulazione di a Francia. Da a fine di u XIXu sèculu à l’iniziu di a Siconda Guerra mundiale, si sò visti i primi segni di scuntintezza, di pettu à quella via dramàtica ch’ella pigliava a Corsica. U so sìmbulu u più chjaru hè statu u sviluppu di una prima mubilizazione chì si dicia cursista, è per certi autunumista. Senza dubbiu, ci vole à avvalurà u bilanciu culturale è linguìsticu di quelli cursisti è autunumisti. Ma puru s’elle ci sò state tensione altìssime ind’è l’anni 1938-39, si pò dì ch’elli ùn sò mai stati una vera minaccia pulìtica, nè per u Statu, nè per l’eletti corsi. Invece, e mosse di l’anni settanta è ottanta anu trasfurmatu in veru a sucetà è a pulìtica in Corsica. Qualcosa di a tradizione si mantene sempre, ma u quadru hè altru. Puru s’ellu ci vole à mintuà chì ste mosse sò nate è sò crisciute in un cuntestu mundiale bullente, ùn si pò minimizà a so capacità à impone temi novi – cum’è quellu di a lingua corsa – ind’è u dibàttitu pùblicu, è à cuntestà i fundamenti stessi di a rilazione ch’adunisce a Corsica à a Francia, è di un modu di putere lucale chì paria sempiternu. U sìntimu d’appartinenza à a Francia hè calatu assai ; u discorsu di l’integrazione s’hè impettatu à quellu di a differenza ; a brama di cuntinente hè sminuita assai, è si sò sviluppate attività ecunòmiche nove in Corsica ; u munupoliu 2. Marien Martini, Les Corses dans l’expansion française, Aiacciu/Bastia, Les Myrtes, 1953, p. 13.
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pulìticu di e rete claniste ùn esiste più, ecc. Benintesu, ùn si tratta mancu appena di fà quì un bilanciu in tutti i so particulari, ma pare assai chjaru chì l’effetti di ste mosse – ch’elli sìanu ghjudicati pusitivi o negativi – sò stati impurtantìssimi nant’à e raprisentazione di i Corsi è di u so sistema pulìticu. In un primu tempu, bisogna à parlà di e cagione di quelle mubilizazione, chì sò belle diverse. Prima di tuttu, c’hè statu un mumentu decisivu : l’aduzzione di u Programme d’action régionale di u guvernu in u 1957. Tandu i dui pilastri di u rinnovu di a Corsica devìanu esse l’agricultura è u turismu. Si pò pinsà chì a riflessione hè stata un pocu corta è ch’elle si pudìanu imaginà d’altre vie, ma u prublema ùn era quì. U prublema era a dimensione neoculuniale di stu prugramma, ind’ellu si tratta bè d’altronde di « culunizazione interna ». L’autori lamintàvanu « l’individualismu isulanu », « l’assenza d’iniziativa ecunòmica », « l’assenza d’urganizazione cummerciale », « l’usi pasturecci lucali », ecc., è accertàvanu l’ubligazione di fà ghjunghje parechji agricultori è travagliadori da l’infora. Insomma, era guasi scritta chì stu prucessu di mudernizazione, iniziatu da u guvernu, avia da generà angosce, frastorni, è riazzione assai negative. À u livellu ecunòmicu è suciale, da un latu, a capacità di i Corsi à apprufittà di quellu prucessu era scarsa. Quantu èranu à pudè investisce per apprufittà di l’aiuti di u Statu ? Sicuramente pochi. In quantu à l’agricultura hè stata peghju. S’hè vista una priferenza chjara data à i Pedineri, attraversu a ripartizione di e terre, i prèstiti di e banche, ecc. Bella capita chì dopu à l’indipendenza di l’Algeria, a so sorte era una priurità pulìtica naziunale, ma forse ch’ùn li si pudia dà tali vantaghji senza fà disguasti3. Da l’altru latu, aldilà di a simbòlica di a pèrdita, u sciuglimentu di l’imperu culuniale avia cunseguenze terrìbule per i Corsi. Millaie èranu custretti à vultà – fussi in cuntinente, fussi ind’è l’ìsula – senza sapè troppu ciò ch’elli avìanu da divintà. Soprattuttu, sparia tandu ciò ch’era a più grande ufferta d’uppurtunità per i giòvani crisciuti in Corsica. À u livellu identitariu, a spupulazione di a Corsica ùn s’era piantata dopu compia a guerra. Trà u 1954 è u 1962, almenu 23 000 Corsi
3. Da vede assulutamente u riportu televisivu di Cinq colonnes à la une : « Le tournant corse », 10 di sittembre 1965, http://www.ina.fr/video/CAF89015893/ le-tournant-corse-video.html [cunsultatu u 22 di ghjugnu 2016].
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II • E S T È T I C A È M U B I L I Z A Z I O N E : D U I D E C E N N I I D I M O S S E I N C O R S I C A
Fondu Albertini / 1972 / 33 x 25,5 cm
L’idea di « Corsica corsa », chì si ritrova ind’è a Chjama di u Castellà, significheghja a vuluntà d’affrancassi da a dipendenza pulìtica, ecunòmica è culturale rispettu à a Francia. L’acrònimu MPA – per Mouvement populaire anticolonialiste – era statu appiccicatu à quellu di FRC dopu à u cungressu d’aostu 1972. Palisava in particulare a necessità d’accresce l’impegnu ind’è i sindicati, è di sinsibilizà l’uperaii corsi. U fattu si stà ch’ùn hè stata una rièscita, è chì u FRC-MPA – malgradu l’impattu di u libru Main basse sur une île – firmava incapace di sviluppà e so strutture ind’è l’ìsula. D’altronde a maiò parte di i dirigenti – è forse di i militanti – campava sempre in Parigi. Face chì à a fine di u 1972, u FRC hà ricentratu u so discorsu nant’à a dimensione naziunale di u prublema corsu.
« Le salut ne peut venir de l’autre, du colonisateur, ni d’une imitation servile de celui-ci. Le Corse s’aperçoit qu’il est acculé à chercher lui-même, et en lui-même, dans ses manières de penser, de concevoir et d’agir, les solutions originales aux problèmes de son existence. […] Le propre de l’homme est de créer. On ne peut créer qu’en étant soi-même. Ceci est certain pour les individus, comme pour les peuples. Le Corse est condamné à créer les conditions de sa vie, à prendre en main sa destinée, ou à disparaître. Cette prise de conscience, qui est une prise de conscience nationale, se manifeste confusément, sur les terres de la plaine orientale ou les chemins de Porto, dans les stades, dans les amphithéâtres des universités, dans les réunions culturelles, dans les écoles de Corse, dans les journaux corses, les prétoires, et surtout dans les propos et les réflexions de chaque jour de notre peuple. Fidèle à lui-même, Populu corsu est amené aujourd’hui à prendre acte de ce phénomène : les masses populaires corses, de plus en plus, sont en train d’affirmer le fait national corse. » « Corsica corsa », Populu corsu, n° 34, ghjennaghju 1973, p. 8.
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A PRIMA RADICALIZAZIONE • 1
Fondu Castellani / Didier Vignon / 1973 / 35 x 50 cm
Ind’è l’anni 1972-1973, u tema di l’urgenza era à u centru di u discorsu di l’ARC. Basta à vede i tìtuli di certi edituriali d’Arritti – « Le dernier combat », « Demain il sera trop tard », « L’escalade ? », ecc. –, o a muzione aduttata da l’assemblea generale di u 1972, ch’accerta chì « le génocide s’accentue ». St’affissu, ch’ammenta tutte e grande dinunzie fatte da l’urganizazione, hè sciutu di maghju 73. In u frattempu, Arritti publicava un artìculu nant’à a strategia di l’ARC, chì palisava bè a necessità di parà e brame di piglià l’arme, è di firmà à u centru di u muvimentu rivendicativu. Da una parte, si criticava l’attentati, ghjudichendu chì l’ora era gravìssima ma ch’ùn era ancu ghjuntu u tempu di a viulenza. Da l’altra parte, s’assicurava chì l’ARC saria capace di radicalizà assai u so missaghju è a so azzione : « Si la situation l’exigeait, l’ARC pourrait à mon sens aussi bien préconiser l’autonomisme avancé, ou même peut-être l’indépendance de la Corse. Si cela était une nécessité, l’ARC pourrait décider un jour d’organiser la violence, ou même peut-être d’entrer dans la clandestinité 1 ».
1. « Les données de base », Arritti, n° 7319, 23 di maghju 1973.
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II • E S T È T I C A È M U B I L I Z A Z I O N E : D U I D E C E N N I I D I M O S S E I N C O R S I C A
Fondu ADECEC / 1973 / 32,5 x 50 cm
A caratterizazione è a dinunzia di u culunialismu francese in Corsica èranu centrale ind’è u discorsu di u FRC. Senza suspresa, u Partitu di u pòpulu corsu, ch’hà pigliatu a sèguita d’aprile 73, hà ripigliatu dinò quellu tema. Si vede bè nant’à st’affissu, duve i trè culori di a bandera francese accècanu, strangùlanu, è imbavagliulèghjanu u Corsu, simbulizatu da a testa di Moru.
« Considérant que les revendications du peuple corse depuis les années 60 ont clairement montré l’accélération d’une prise de conscience nationale en Corse. Considérant que la nation corse a ainsi survécu manifestement à deux siècles de colonisation française et de prétendue assimilation. Considérant que seule la destruction de l’exploitation colonialiste permettra d’ouvrir la voie à un socialisme authentiquement corse et que seul le socialisme permettra la libération véritable du peuple corse. Considérant que les émanations en Corse des partis français se réclamant du socialisme nient l’existence d’une nation corse colonisée. Considérant d’autre part que la simple revendication régionaliste ne permet d’aboutir qu’à une variante de l’exploitation capitaliste. La VIe Veduta : affirme la nécessité de construire un véritable parti luttant pour la libération nationale de la Corse, pour la restitution au peuple corse de ses moyens de production et d’échange. Décide de modifier dans ce sens l’orientation et la structure du Front régionaliste corse en le dénommant “ Partitu di u populu corsu”. » 32
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Arritti, n° 7318, 15 di maghju 1973 (ùn c’hè statu manera di truvà u nùmaru di Populu corsu).
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A PRIMA RADICALIZAZIONE • 1
Fondu Albertini / 1973 / 26,5 x 38 cm
I primi anni, u FRC era pocu avvezzu à parlà di nazione corsa o di fattu naziunale corsu, ma quellu puntu hè statu sviluppatu assai à pàrtesi di a Chjama di u Castellà, di ghjennaghju 73. E cunclusione di l’ùltima veduta di u FRC, ch’annunzia a creazione di u PPC a mòstranu benìssimu. Eppuru u cambiamentu di nome era statu cagiunatu dinò da cunfronti interni. Sò partuti i militanti trutschisti è, soprattuttu, i militanti FRC in Corsica campàvanu male u fattu chì e decisione fùssinu sempre pigliate in Parigi. Incù a creazione di u PPC, l’amministrazione di l’urganizazione è di u giurnale Pòpulu corsu sò state tramutate ind’è l’ìsula, hè statu aduttatu u principiu di l’autunumia di e diverse sezzione, è per a prima volta l’esecutivu ùn era più cumpostu in maiò parte da militanti campendu in cuntinente. Un ubbiettivu essenziale era di pudè accresce u putenziale umanu – ch’ùn c’era cà 80 aderenti à u FRC in u 1972 –, ma l’autunumismu sucialistu infatti ùn ci riescerà mai.
« Nous, militants socialistes et patriotes corses, réunis les 14 et 15 avril 1973 à Corti, avons clairement défini notre objectif immédiat : l’autonomie de la Corse. Notre revendication est absolue. Elle ne permet plus aucune ambiguïté, aucune dérobade, aucune reculade. En choisissant de mener le combat de la décolonisation, nous avons choisi l’épreuve de vérité. Nous refusons d’être des quêteurs de réformes. Nous refusons de confondre notre revendication et, à travers elle, le surgissement de la conscience nationale corse, avec la supplique dérisoire des réformistes de tous bords. Au nom de quel humanisme accepterions-nous plus longtemps une condition qui non seulement nous dégrade mais encore nous nie ? Le réformisme c’est l’assimilation et l’assimilation c’est l’assassinat d’un peuple. La libération, par contre, c’est la voix du passé et l’appel du futur. Le colonialisme n’a pas d’excuse. Ceux qui l’acceptent ou qui en acceptent l’aménagement n’en ont pas plus. » « Partitu di u Populu corsu », Populu corsu, n° 38, maghju/ghjunghju 1973, p. 1.
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CAPITULU 2
L’action de la cave d’Aleria, conduite par Edmond Simeoni les 21 et 22 août 1975, est certainement l’événement politique le plus important de
la seconde moitié du XXe siècle en Corse. La
disproportion des moyens utilisés afin de déloger
Viulenza o micca ?
les occupants a provoqué un choc énorme sur les représentations de milliers de Corses, et elle a légitimé de façon décisive l’usage de la violence, fondant ainsi une seconde phase de radicalisation. L’union des groupes clandestins au sein du FLNC, apparu le 5 mai 1976, a remis plus fortement en question le leadership exercé par l’autonomisme sur la mobilisation nationaliste. Il y avait désormais deux voies politiques bien distinctes, et qui affirmaient tout haut leur caractère inconciliable. En vérité, il n’y avait pas de fracture irrémédiable, d’autant que la violence du FLNC restait dans des limites acceptables pour les militants autonomistes. Les attentats antinationalistes et la répression étatique ont ainsi tôt fait de recréer de profondes solidarités entre les deux tendances.
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L
’azzione d’Aleria, i 21 è 22 d’aostu 1975, hè forse l’avenimentu u più maiò di a siconda mità di u XXu sèculu in Corsica ; l’avenimentu ch’hà culpitu e raprisentazione di millaie di Corsi, è ch’hà legitimatu di modu decisivu l’usu di a viulenza. À l’iniziu, un gruppu d’una dodecina di parsone, ch’esibiva pòvari fucili di caccia è ch’era cunduttu da Edimondu Simeoni, hè ghjuntu à uccupà a pruprietà di u Pedineru Henri Depeille. Quellu era idintificatu cum’è un spezialistu di a sciaptalizazione, vale à dì u fattu d’aghjunghje u zùccaru ind’è u vinu per fà cresce u gradu. Pocu primura s’ellu si vindia un veru stumacheghju, sta pràtica pruibita permittia à parechji viticultori d’avè rindimenti sprupusitati (150 ettulitri di vinu à l’èttare1 !), è d’accresce assai i so prufitti. Attraversu quella pruduzzione di vinaccia, l’uccupazione avia per scopi più generali di dinunzià u culunialismu agrìculu, e cumprumissione di u Statu è di e banche, è l’incapacità di u guvernu à ascultà a cuntestazione. Benintesa, l’uperazione devia còmpiesi incù una grande adunita, di manera à galvanizà i militanti, è à cunvince i media isulani, naziunali è internaziunali, chì l’ARC ùn dicia cà a verità, è chì u Statu francese era ubligatu à cambià di
1. Sicondu à Pierre Dottelonde (Corse. La métamorphose, Livia, Albiana, 1987, p. 71). Oghje in Francia, un èttare di vigna pruduce in media circa 60 ettulitri di vinu (circa 50 quandu si tratta di un vinu AOC).
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VIULENZA O MICCA ? • 2
pusizione. L’azzione d’Aleria hè dunque stata prisintata cusì da Edimondu Simeoni : « Notre action d’aujourd’hui n’est pas dirigée dans le sens d’une modification des institutions. Ce n’est pas la revendication d’un statut d’autonomie interne. Ce n’est pas une manifestation de racisme ou de xénophobie. Ce n’est pas une chasse aux sorcières. Nous demandons simplement justice sur un point particulier. Il n’y aura pas de provocation de notre part. […] Les ordres sont rigoureux et strictement suivis. S’il devait y avoir provocation, elle ne pourrait venir que de la police ou des services parallèles. Nous demandons : – La libération, avec un non-lieu, de Dominique Capretti. Nous ne comprenons pas qu’on le garde en prison alors que les escrocs sont en liberté. – L’arrestation des escrocs. – La saisie conservatoire de leurs biens. – La redistribution sous forme communautaire des 2 000 hectares et des caves des escrocs aux agriculteurs locaux les plus défavorisés2. » U Statu ùn l’hà intesa cusì. U ministru di l’Internu, Michel Poniatowski, hà sceltu u modu u più pèssimu di risponde à un azzione di prutestazione : quellu di mubilizà mezi sprupurziunati. Hè vera chì u gruppu iniziale era statu sùbbitu rinfurzatu – soprattuttu da giòvani militanti in brama di radicalità –, ma u guvernu hà mandatu forse 2 000 giandarmi, pulizzeri è guardii mubili, incù alicòtteri, veìculi militarii è mitragliose. Sò affaccate tandu cintinaie di naziunalisti intornu à u locu, ma u gruppu di l’ARC ùn pudia risiste à l’assaltu. Eppuru s’hè cartucciatu quantunque, è ci sò stati dui morti trà e forze di l’òrdine. Dopu vistu feritu unu di i so militanti, Edimondu Simeoni s’hè arresu, in cambiu chì l’altri pudèssinu avviassi fieri è l’arme in manu. Ciò chì s’hè passatu in Bastia u 27 d’aostu hè statu podassi peghju. L’ARC hè stata sciolta da u guvernu, ciò ch’hà scatinatu una zerga terrìbule, è un attaccu nant’à e forze di l’òrdine è a sottuprifettura3. C’èranu digià i cocktails molotov appruntati in quantità, ma à mumentu datu sò affaccati parechji militanti incù pistole è fucili. C’hè statu un rimusciu scemu guasi tutta a nuttata, è à mumentu datu s’hè tiratu. Un CRS hè statu tombu è 18 altri feriti. Ind’è a storia di u muvimentu naziunalistu corsu, 2. E. Simeoni, Le piège d’Aleria, op. cit., p. 119. 3. A decisione era digià stata cunsacrata da a lege, ma a creazione di u dipartimentu di Cismonte tandu ùn era effettiva.
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hè forse l’ùnicu mumentu chì sumiglii in veru à una situazione insurrezziunale, quandu sò manse di partigiani armati chì si fràianu incù u Statu in carrughju. Cusì a Corsica hè divintata un prublema pulìticu naziunale. C’era l’inchietùdine à l’ingrossu, è i partiti di manca – in cuntinente è ind’è l’ìsula – anu circatu à prumove suluzione di cumprumessu, di natura regiunalista, sapendu chì tandu e regione ùn èranu cullettività elette direttamente da i citadini. Ma soprattuttu èranu i dirigenti autunumisti chì devìanu fà una scelta stòrica, è anu dicisu di fà calà a tensione. Edimondu Simeoni devia esse ghjudicatu da a Corte di sicurezza di u Statu, è pudia esse cundannatu à morte. È a prima chjama, chjarìssima, l’hà lanciata ellu : « pas plus les solutions à base d’économisme (mission Libert Bou) que des solutions terroristes ne sont viables. […] Par ailleurs je désavoue, par avance, ceux qui exigeront ma libération et celle de mes camarades par des meurtres et des prises d’otages et je refuserai toute éventuelle tractation induite par ces méthodes 4 ». Tandu s’hè capita prestu chì i soii s’avìanu da impignà soprattuttu ind’è a so difesa, è ghjè stata sviluppata una dimensione nova di a mubilizazione : a dinunzia di a ripressione è u sustegnu à i militanti incarcerati. Fucalizatu ch’ellu era nant’à st’aspettu, l’Associu di i patriotti corsi – creatu di farraghju 76 per rimpiazzà à l’ARC – avia un andatura muderata, ind’è a tunalità di u discorsu cum’è ind’è a strategia. U 22 di ghjunghju di u 76, Edimondu Simeoni era cundannatu à cinqui anni di prigiò incù trè fermi, ciò chì sumiglia à una decisione savia5. Si timia una vindetta di Statu, mutivata da a morte di i giandarmi è CRS. Si sarà imaginatu chì un verdettu severu faria cresce assai a radicalità, è ch’ella era megliu à scumette nant’à u capimachja di l’ARC cum’è fattore di muderazione. Pudia ancu esse cappiatu nanzi, ma Edimondu Simeoni ùn hà fattu mancu a mità di i so trè anni fermi, escendu di prigiò u 14 di ghjennaghju 77. Invece ci sarà statu un sacrificatu… U pricuratore generale di a Corte hà palisatu chì u direttore di scagnu di u ministru di a Ghjustizia l’avia dumandatu contr’à Serghju Cacciari, arristatu dopu à l’avenimenti di Bastia, « une
4. Arritti, n° 490, 5 di sittembre 1975, p. 2. 5. Sicondu à u pricuratore generale di u primu prucessu di u FLNC, era un « verdict d’apaisement » (A Riscossa, Le procès d’un peuple, Bastia, 1980, p. 265).
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II • E S T È T I C A È M U B I L I Z A Z I O N E : D U I D E C E N N I I D I M O S S E I N C O R S I C A
Fondu ADECEC / Ghjiseppu Orsolini / 1980 / 28 x 49 cm
St’affissu di Ghjiseppu Orsolini acconcia un tìtulu di una canzona di I Chjami aghjalesi sciuta l’annu nanzi : Lotta si chjama vita. Hè statu fattu in u quadru di e mubilizazione di sustegnu à l’incarcerati di l’affare Bastelica-Fesch, è in particulare in u Cullettivu di Corti. Tandu èranu stati creati un pocu dapertuttu cullettivi ch’includìanu dinò parechje urganizazione naziunale cum’è u PS, u PCF, a CFDT, u SNES, u CDJA, ecc. Sti cullettivi anu duratu sin’à a fine di marzu 1980, è si sò mossi soprattuttu attraversu l’uccupazione d’unepoche di merrie ; d’altronde l’autore era anch’ellu uccupante di a merria di Corti. Certi merri – in particulare quelli di Calvi è di Venacu – ci si sò upposti, ma di règula st’azzione sò state accittate bè.
« Si vede u ricordu di u famosu “ritrattu” d’Iwo Jima, ritrattu ch’infatti era una cumpusizione. I ricordi cusì sò sempre impurtanti ind’è u disegnu. A prima volta ch’aghju intesu parlà d’Iwo Jima, ghjera à u postu quandu era chjucu, in un emissione chì si chjamava “Vous avez vécu cela”. M’avia marcatu assai, ma ghjè bellu più tardi ch’aghju vistu u “ritrattu”, è sò anni è anni dopu chì l’idea hè risurtita in quellu affissu, senza ch’o mi riferissi à u mudellu. » 44
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Testimunianza di Ghjiseppu Orsolini, racolta in Corti u 2 di sittembre 2016.
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VIULENZA O MICCA ? • 2
Fondu Castellani / 1976 / 32 x 43 cm
Dopu à a strage d’Aleria, u Cunsigliu di i ministri hà scioltu l’ARC u 27 d’aostu 75, nant’à a basa di a lege di u 1936 « sur les groupes de combat et milices privées ». Sta decisione hè stata à l’urìgine di un altra strage, in Bastia, u ghjornu stessu. Eppo’ ghjè apparsu un certu viotu. I militanti firmàvanu mubilizati, ma u sforzu era cunsacratu à a difesa di l’incarcerati più cà quella di una visione pulìtica glubale. Ghjera un perìculu per l’autunumismu, soprattuttu chì a dumanda di radicalità era crisciuta torna dapoi Aleria. Tandu hè statu creatu, sempre in Aleria, u primu di farraghju di u 76, l’Associu di i patriotti corsi. Nant’à u fondu, ùn c’era nunda – o guasi – di cambiatu rispettu à l’ARC, ma a tunalità era assai menu agressiva. Trè mesi dopu, a nàscita di u FLNC hà rinfurzatu i dùbbiti nant’à a capacità di mubilizazione di l’autunumisti. Ghjè cusì chì a sera di u primu cungressu di l’APC, urganizatu u ghjornu anniversariu d’Aleria, un gruppu cunduttu da Massimu Simeoni (quellu era à visu scupartu) hè andatu à uccupà a pruprietà di Cohen-Skalli à l’Aghjone, à urganizacci una cunfarenza di stampa dinunziendu l’attitùdine di u Statu, è à plasticcalla. Si cummemurava l’azzione fundatrice di u fratellu, è si circava à mustrà chì a determinazione era a listessa. Eppuru l’affare ùn hà cunvintu tantu mondu. L’annu dopu, s’hè sceltu di rimpiazzà l’APC da una nova urganizazione : l’Unione di u pòpulu corsu.
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II • E S T È T I C A È M U B I L I Z A Z I O N E : D U I D E C E N N I I D I M O S S E I N C O R S I C A
Fondu Castellani / 1976 / 32 x 45 cm
A Cunsulta di a ghjuventù naziunalista corsa hè stata fundata à l’entre di l’estate 1976, dopu à u prucessu d’Edimondu Simeoni, à l’iniziativa d’anziani di u sindicatu studiantinu CSC. E scelte di l’APC ùn li cunvinìanu, ma ùn avìanu raghjuntu u FLNC. Eccu l’affissu di a grande reunione pùblica di a CGNC in Corti, in u quadru di l’Università d’estate. Sicondu à Leò Battesti c’èranu 500 o 600 parsone. Petru Poggioli conta ch’era affaccatu Massimu Simeoni è chì l’era statu ricusatu u micròfunu ; perchè parechji li rimpruveràvanu un edituriale d’Arritti chì criticava l’avventurismu di i giòvani naziunalisti. A CGNC hà fattu strada, sviluppendu u cuncettu d’autodeterminazione, è creendu ancu una struttura clandestina. Si capisce dunque chì u FLNC avessi prestu circatu à integrà i so militanti, ciò ch’hè statu fattu à pàrtesi di u veranu 77. Tandu hè stata sciolta a prima CGNC.
« […] l’État colonialiste et les clans ne reculeront devant aucun moyen pour écraser le mouvement national corse, cherchant à tout prix l’affrontement. Ils sont les seuls responsables de la violence actuelle et à venir. […] Nous nous engageons à : – Organiser partout, l’union de toutes les forces nationalistes révolutionnaires dans la lutte anti-colonialiste sur le terrain. – Refuser la voie électorale source de compromis avec le colonialisme. – Refuser toute solution économique de type réformiste et toute solution politique octroyée. – Refuser tous les compromis et compromissions avec l’État et ses alliés. Nous nous engageons à lutter pour : […] – Le départ de tous les colons et la redistribution de leurs terres, ainsi que celles de Casabianda à des jeunes Corses sous forme communautaire. – Le départ des trusts touristiques et la redistribution de leurs biens à des jeunes Corses sous forme communautaire. […] – La corsisation des emplois à tous les niveaux (mutation en particulier des fonctionnaires et enseignants non corses). […] Nous sommes conscients que toutes ces revendications ne pourront être réellement concrétisées que par la prise du pouvoir politique par une assemblée populaire, émanation des forces nationalistes révolutionnaires ayant mené la lutte pour abattre le colonialisme et les clans. » 46
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Muzione aduttata da a CGNC u 31 di lugliu 1976, in U Ribombu, n° 5, estate 1976.
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VIULENZA O MICCA ? • 2
Fondu Castellani / 1977 / 39 x 57 cm
Dopu à a liberazione d’Edimondu Simeoni, di ghjennaghju 77, l’autunumismu era di pettu à a cuncurrenza putente di u FLNC, ma dinò à un novu perìculu, quellu di FRANCIA. Per stu gruppu antinaziunalistu clandestinu, apparsu d’aprile 1977, i militanti autunumisti pùblichi èranu nemichi quant’è i più radicali. Cusì a stamperia d’Arritti, u settimanale autunumistu, hè stata distrutta di maghju da una bomba di FRANCIA. Cunsiderendu ch’ellu c’era forse troppu pocu fede ind’è l’APC, s’hè dicisu tandu di creà una nova urganizazione, apprufittendu di u ritornu è di a dimensione eròica di l’omu d’Aleria. U primu cungressu di l’UPC, in Furiani u 14 d’aostu 77, s’annunziava cum’è un avenimentu maiò, ch’avia da purtà in Corsica una sterpa di giurnalisti di Francia, d’Auropa è ancu d’altrò. U FLNC hà sceltu di ghjuvàssine, fendu saltà l’antenna di televisiò di u Pignu, sopr’à Bastia, a vigilia di u stessu cungressu di l’UPC. I clandestini mustràvanu dunque ch’ùn èranu disposti à lascià à E. Simeoni ridivintà u grande capifila di u naziunalismu. E. Simeoni l’hà rispostu incù un discorsu famosu, induv’ellu hà differenziatu di modu chjaru l’autunumismu pùblicu da l’indipendentismu clandestinu, è accertatu l’incumpatibilità di e duie vie.
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