L D LC I 23 M CHJBPZ GHJNS CHJ E O
u
Ghjaseppiu Gaggioli
La langue corse en lettres Précis alphabétique de grammaire, d’usage et de vocabulaire du corse
A
27
A
La lettre A
A
-a en tant que terminaison
1
Au singulier, la plupart des mots terminés par -a sont féminins. A donna corsa La femme corse
A casa bianca La maison blanche
E donne corse Les femmes corses
E case bianche Les maisons blanches
Au pluriel, le -a devient toujours -e dans la zone nord. Au sud, il devient -i.
2
Certains mots se terminant par -a au singulier sont masculins. U pueta Le poète
U prublema Le problème
U prugramma Le programme
REMARQUE : Mais selon les variantes, ils sont plus ou moins nombreux, et on peut trouver notamment les mots en -ista. Dans certains parlers on a ainsi u dintista, l’artista… Dans tous les cas, on peut toujours mettre -u à la fin de ces mots.
Au pluriel, le -a devient -i, sauf dans certains parlers où ces mots sont invariables (on trouve les deux cas à Marignana). U boia (le bourreau) et les adjectifs rosa (rose) et viola (violet) sont invariables partout : i pueti/i pueta
i prublemi/i prublema
29
i prugrammi/ i prugramma
A – LA LETTRE A – [3] 3
-a peut aussi être la marque du pluriel dans les parlers de l’extrême-sud [M 4].
4
Dans la zone sud, où la lettre -e (ouvert) est impossible en position atone, elle est remplacée par -a à la n de certains termes : – l’innitif des verbes qui se terminent par -e ailleurs : metta, capiscia… – les mots en -unque : dunqua/dunca, quantunqua/quantunca… – les mots en -udine : sulitudina, gratitudina… – quelques autres mots : forsa, saluta…
Terminaisons en -à
5
Les mots se terminant par -à, qui sont toujours accentués sur la dernière syllabe, sont invariables. a cità ► e cità (la ville ► les villes) a nuvità ► e nuvità (la nouveauté ► les nouveautés) a vulintà ► e vulintà (la volonté ► les volontés)
REMARQUE : Dans le parler de Marignana ainsi que dans d’autres parlers, on peut trouver également occasionnellement la terminaison -ai au lieu de -à : a libertai (la liberté), a prupietai (la propriété)… mais ces mots restent aussi invariables.
-a à l’intérieur des mots
6
À l’exception de la zone nord-est, -a peut se rencontrer à la place de -e, -o et plus rarement -u à l’intérieur des mots. Ce sont des phénomènes complexes qui l’expliquent, liés à des ouvertures de voyelle différentes selon les régions (voir annexe « La mutation vocalique »), et aux systèmes vocaliques qui permettent ou non la présence de -è ou -ò (notamment) en position atone. lettara/lettera appone/oppone
arba/erba accupà/occupà
asempiu/esempiu tafone/tufone
A en tant qu’article
7
a est l’article déni féminin singulier [A 7480]. 30
adore/odore
[8] – LA LETTRE A –
A
A en tant que complément d’object direct
8
A peut aussi être complément d’objet direct. Il peut alors prendre d’autres formes, -la, -lla, dans des cas bien déterminés [O 17 18], mais il peut aussi se retrouver tel quel : ► En tant que COD placé avant le verbe (pour l’accord, [P 14]) ; A vecu chì ghjunghje. Je la vois arriver.
A ci hà prisintata. Il/elle nous l’a présentée.
A me vittura, a li lasciu vulinteri. Ma voiture, je la lui laisse volontiers.
A vi faraghju vede. Je vous la montrerai.
► En tant que COD en enclise si les deux conditions suivantes sont
réunies : – il y a un COI à la suite, – l’accent tonique ne porte pas sur la dernière syllabe de la forme verbale.
Dateaci. Donnez-la moi.
Ci vurrà à rendeali. Il faudra la lui rendre.
Fateami vede. Montrez-la moi.
Scialaati ! Amuse-toi bien !
► En tant que COD en enclise, comme « redoublement », si les deux
conditions suivantes sont réunies : – il y a un COI à la suite, – l’accent tonique porte sur la dernière syllabe de la forme verbale.
Dallaaci ! Donne-la nous !
Ci vurrà à dillaali. Il faudra le leur dire.
Fallaami vede. Montre-la moi.
Mi piace à scialallaami ! J’aime m’amuser.
Cela ne se retrouve semble-t-il que dans les parlers de la région de Marignana et quelques autres. Ailleurs on aura par exemple : datelaci, dallaci. ► A est notamment le neutre : A sò. Je le sais.
A l’aghju detta. Je le lui ai dit.
31
A – LA PRÉPOSITION À – [9] La préposition
À
à en tant que préposition entre deux verbes
9
10
À est obligatoire également après tout verbe de déplacement s’il est suivi d’un autre verbe à l’innitif. Sò andatu à nutà. Je suis allé nager.
Hè vinutu à vedemi. Il est venu me voir.
Hè corsa à basgiammi. Elle a couru m’embrasser.
Sò partuti à piscà. Ils sont partis pêcher.
Sete ghjunte à aiutacci ? Vous êtes venues nous aider ?
Sè cullatu à piglià a roba ? Tu es monté prendre les affaires ?
Avec le verbe fà [F 27]. Comu fate à suppurtallu ? A li faremu1 à ghjunghje à l’ora ? Comment faites-vous pour le supporter ? Réussira-t-on à arriver à l’heure ?
11
12
On retrouve à dans un certain nombre de constructions, notamment les constructions impersonnelles du français : Ci vole à pagà. Il faut payer.
Ci accorre2 à parte subitu. Il nous faut partir tout de suite.
Ti tocca à vene ancu tù. Tu dois venir toi aussi.
Ùn vale à matriculà. Inutile de s’encombrer de soucis.
Mi piace à corre. J’aime courir.
Mi (di)spiace à ùn pudecci esse. Je regrette de ne pouvoir y être.
À est également utilisé après un certain nombre de verbes (esse notamment) et avant un innitif, pour exprimer l’idée d’une action ou d’une activité qui dure, s’étire dans le temps :
1. Dans la zone nord-est, on trouve a ci faremu à (…) 2. Dans de nombreuses régions existe le verbe bisugnà ou abbisugnà qui est alors préféré à accorre : (bi) sogna/abbisogna à parte subitu.
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[15] – LA PRÉPOSITION À –
Stava à pusà ore sane. Il/elle restait assis(e) des heures entières.
A
Eranu à vighjà ind’un bar. Ils passaient la soirée dans un bar.
REMARQUE : En particulier, c’est cette idée de durée qui est contenue dans le verbe stà à sente.
On peut utiliser cette construction au présent (pour une activité prolongée), et elle est alors à peu près synonyme de esse in traccia di (être en train de) [T 2426] : Sò à fà a cucina avà. Je suis en train de faire la cuisine pour le moment.
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Avec l’auxiliaire avè ou esse, on retrouve à dans la construction ùn... ancu à + innitif [A 60].
À en tant que préposition avant un verbe
14
On utilise souvent à avec des verbes à l’innitif [I 3646] ou substantivés : À sapè ciò ch’ellu hà fattu. Allez savoir ce qu’il a fait.
À sente à tè. À t’entendre
À u sorte da a ghjesgia. À la sortie de l’église
À dorme ! Au lit !
À en tant que préposition devant les COD
15
La préposition à est utilisée entre tout verbe et son COD dès lors que celui-ci est un nom propre, un pronom ou un nom faisant référence à quelqu’un de la famille quand on n’utilise pas l’article. Avà s’avvede à Bastia. On aperçoit Bastia à présent. L’aghju trovi à elli. Je les ai trouvés, eux.
Sì tù vedi à calchì unu dumandaali, ma ùn si vede à nimu. Si tu vois quelqu’un, demande-le lui, mais on ne voit personne.
Ete intesu à me fratellu ? Avez-vous entendu mon frère ?
Aghju chjamatu à Petru. J’ai appelé Petru.
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A – LA PRÉPOSITION À – [15] Ai vistu à babbu ? As-tu vu mon père ?
Vogliu vede à qual’ellu hè. Je veux voir qui il est.
Vai è chjama à mammata ! Va appeler ta mère !
En pratique, les mots concernés sont : – tous les noms propres ; – mè, tè, ellu, ella, noi, voi, elli, elle ; – babbu, mamma, babbitu, mammata, me fratellu, to fratellu, so fratellu, vostru fratellu et de même avec surella, ziu, zia, cugnatu, cugnata, gliolu, gliola, nipote, sociaru, sociara, nora, ghjennaru, cuginu, cugina, minnanna, missiavu, arciminnanna, arcimissiavu… dans les cas où l’on n’utilise pas l’article [F 1112]. À dans les locutions
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Dans de nombreux cas, à correspond à la préposition à en français et s’utilise comme elle, c’est-à-dire avec ou sans l’article. À a scola À l’école
À meziornu À midi
À u principiu Au début
À a sda Au dé
À mità prezzu À moitié prix
À u teatru Au théâtre
À a volta À la fois
À sett’ore À sept heures
À l’antica À l’ancienne
(à) causa/cagione di À cause de
À l’infora À l’extérieur
À l’ingrentu À l’intérieur
On trouvera à en concurrence avec da dans casa à/da vende [D 8], à u principiu et à principiu.
17
Dans certaines expressions, la préposition à s’utilise seule en corse, contrairement au français qui lui adjoint un article : À nome di Au nom de
À (di)scapitu di Jouer aux cartes
Ghjucà à carte Au détriment de
Ghjucà à bucce Jouer aux boules
Andà à caccia Aller à la chasse
Ghjucà à ballò Jouer au ballon
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[18] – LA PRÉPOSITION À –
REMARQUE : On trouve aussi les formes suivantes :
À favore di (à Marignana, on dit plutôt in favore di) En faveur de
A
À contu di Sur le compte de
À dans les locutions prépositives (de lieu et de temps en particulier)
18
Comme préposition dans toutes les locutions prépositives de lieu, de temps et autres, sauf avec sicondu, dopu, fora, trà/frà, versu/versi/ver di, dès lors qu’il y a un mot à la suite : À buleghju à Au milieu de, parmi
Attempu à En même temps que
Di paru à Au niveau de
Accantu à À côté de
Contru à Contre
Di pettu à Face à
Accora à D’ici à, dans
D’appressu à D’après
Di punta à En face de
Addossu à Sur soi
Da culandi à De l’autre côté de
Di tondu à Autour de
Afancu à3 Au côté de
Da mezu à Au milieu de, entre
Finu 5 à Jusqu’à
Alloccu 3 à D’ici à, dans
Da quì à Dans, d’ici à
In cima à/di Au sommet de
Annantu à Sur
Dallandi à De l’autre côté de
In faccia à En face de
Appetu 4 à Derrière
Daretu à Derrière
In fondu à Au fond de
In quantu à Quant à
Intornu à Autour de
Sopra à5 Au-dessus de
Arrente à Au ras de
Listessu(a) à Identique à
Sottu à En dessous de
3. Ailleurs, on trouve à tà à, à tale à comme synonymes. 4. Ailleurs on trouve appossu à comme synonyme. 5. À Marignana, on trouve tout aussi bien selon les locuteurs : nu à, sinu à, namente à, sinamente à, insinu à (rare) avec le même sens.
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A – LA PRÉPOSITION À – [18] Ingiru à Autour de
Longu à Le long de
(À) vicinu à Près de
Ingrentu à À l’intérieur de
Riguardu à Concernant
Rispettu à Par rapport à
Innanzu à/di Avant de
Dananzu à Devant
Davanti à Devant
REMARQUE : On trouve aussi bien in tagliu di que tagliu à pour dire au bord de.
On dit dopu à (après) devant un nom propre ou un pronom personnel. Dans les autres cas, à n’est pas obligatoire. On dit prima di (avant), fora di ou for di (sauf). Sicondu (selon), frà (parmi), versu/versi (vers) ne veulent pas de préposition. Pour ver di (vers), on peut considérer qu’elle est partie intégrante de la locution. Trà (entre ; parmi) s’utilise avec la préposition di (sans élision) devant un pronom personnel : trà di elli, trà di noi… En revanche, là où l’on dit in trà di, on fait l’élision : in trà d’elli. REMARQUES :
– Il est très important de noter que l’on n’entend jamais la dernière lettre de l’adverbe quand on parle : on dit ainsi annant’à, davant’à, in fond’à, sott’à… et il est donc possible d’écrire de cette façon. – Longu à peut s’utiliser dans un sens spatial ou temporel. Appetu à n’est pas exactement synonyme de daretu à, qui a un sens plus large. – Les adverbes de beaucoup de ces locutions prépositives peuvent se trouver seuls en tant qu’adverbes de lieu ou de temps, sans la préposition à [L11] : Hè statu daretu. Dov’esse sottu. Prima ùn si facia micca cusì. Ai fidiatu in fondu ? Il est resté derrière. Il doit être dessous. Avant on ne faisait pas comme ça. Tu as regardé au fond ?
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Dans certaines locutions adverbiales pour indiquer le lieu, le moment ou la manière. Dans les cas où à introduit systématiquement la locution, il est fréquent d’écrire la locution en un seul mot en doublant la première consonne de l’adverbe de façon à respecter la prononciation : Abbastanza (à bastanza) Annantu (à nantu) Apposta (à posta) Accantu (à cantu) Appetu (à petu) Appena (à pena)
Addossu (à dossu) Attempu (à tempu) À vicinu Afancu (à ancu) Appressu (à pressu) Appuntu (à puntu)
REMARQUE : On écrira plutôt à vicinu, car on trouve aussi fréquemment vicinu seul, avec la même signification.
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[21] – LA PRÉPOSITION À –
A
À dans les locutions distributives
20
On utilise également à dans la locution distributive à chì, qui signie qui, qui que ce soit (bien que qui se dise quale par ailleurs). Plus rarement, on peut rencontrer chì tout seul [C 5]. À ch’ùn hè cuntente hè listessa ! Si quelqu’un n’est pas content, c’est pareil ! À ch’ùn face nulla ùn disterba nulla. Qui ne fait rien ne dérange rien. Chì di ghjallina nasce in tarra ruspa. Les chiens ne font pas des chats. À chì vole compra ! Quiconque (la) veut peut (l’) acheter ! À chì và in Portu, à chì và in Saone… Certains vont à Sagone, d’autres à Porto… À chì l’hà fatta ùn t’arriguarda ! Qui l’a fait, ça ne te regarde pas ! ► Dans le parler d’Evisa, et dans le parler de Marignana (rarement), à chì
peut signier dès que :
À ch’ellu ci hè u ventu cascanu e fronde. Dès qu’il y a du vent, les feuilles tombent.
À ch’ellu affacca u sole, ugnunu si ralegra (Cecc.). Dès que le soleil se fait voir, tout le monde se réjouit.
À dans les compléments circonstanciels
21
La préposition à est utilisée : ► Pour indiquer la manière dans des constructions du type à + radical d’un verbe du 1er groupe + -era. Cette tournure est très fréquente : À branculera En se traînant
À rinculera À reculons
À bughera À verse, sans retenue
À spiccera À la hâte 37
A – LA PRÉPOSITION À – [21] À fughjera Comme en se sauvant
À strampalera Maladroitement
À ghjittera À foison
À straziera Avec peine, difculté
À inciartera Au hasard, au petit bonheur ► Pour indiquer la manière dans des constructions du type à (ou in) + radi-
cal d’un verbe + -oni. C’est une tournure moins fréquente : À palponi À tâtons
(In) ridoni En riant
In cavalcioni À califourchon
In fughjoni À la dérobée
► Pour indiquer la manière (souvent pour des coups donnés, mais aussi
pour la quantité) dans des constructions du type à + radical d’un nom commun + -ate. Cette tournure est très fréquente : À andate En grande quantité
À cultillate À coups de couteau
À barcate, à brancate En très grande quantité
À manate En quantité modérée
À bastunate, à batarchjate À coups de bâton
À palate En grande quantité (avec la pelle)
À cazzuttate À coups de poing
À pitrate À coups de pierre
► Pour indiquer le « débit », la fréquence. On répète alors deux fois la
locution :
À pocu à pocu Petit à petit
À goccia à goccia Goutte par goutte
À unu à unu Un par un
À piuma à piuma s’empie u cuscinu (Cecc.) Plume par plume, on remplit le coussin, i. e. petit à petit l’oiseau fait son nid.
► Dans un nombre incalculable d’expressions, dont certaines sont parfois
toutes faites (sprissione fatte lestre, fatt’è lestre). 38
[21] – LA PRÉPOSITION À –
A
À bella megliu Du mieux possible
À disgrazia Malencontreusement
À (manu) manca À gauche
À belli dui/trè… Jusqu’à deux à la fois
À (manu) dritta À droite
À manera Juste ce qu’il faut
À bocca aparta La bouche ouverte
À l’affuria/infuria En toute hâte
À manu à manu Tout à coup
(Minà) à bracciu altu De toutes ses forces
À l’insù, à l’inghjó En haut, en bas
À mente Mentalement, par cœur
À buzeffe En grande quantité
À l’oziu Oisif
À mezu Pour la moitié
(À) capu ghjó/sù Vers le bas/le haut
À la lestra À la va-vite
À mimoria De mémoire, par cœur
(À) casimai/casu mai Au cas où
À la longa Niais, simple
À momenti/minuti… Dans un moment
À casu, à capitu Au hasard
À lascita En héritage
À nisun contu/prezzu À aucun prix
À cavallu À cheval
À legnu pienu En bois plein
À ochji aparti Les yeux ouverts
À chjosi ochji Les yeux fermés
À long andà Avec le temps
À pianu À plat
À contracore À contrecœur
À lume spentu Avec la lumière éteinte
À pighjò En loyer
À corpu/voltu inghjó Sur le dos
À mala pena Avec difculté
À più pudè À n’en plus pouvoir
À corpu/voltu insù Sur le ventre
À/di mala voglia À contrecœur
À quell’epica À cette époque
(esse) À cunsoltu Faire des messes basses
À malincore À contrecœur
À quelli tempi En ces temps
À spassu En promenade
À tuttu frombu6 À toute allure
À vituperiu De manière honteuse
6. À dirotta/trunchera di collu, à frombu battutu, à briglia sciolta.
39
A – LA PRÉPOSITION À – [22] À stonde7 Par à-coups
À tuttu prezzu 8 À tout prix
À voline più À volonté
À (a) sulana À l’adret
À (l’)umbriccia À l’ubac
À (le) volte Parfois
À tagliu paru7 Indistinctement
À vista d’ochji8 À perte de vue
Adasgiu (ad asgiu) 9 En prenant son temps
À tardi Tard
À vista d’ochju À vue d’œil
Cas où l’on utilise à en français et pas en corse
22
En corse in est utilisé dans certaines expression où l’on emploie à en français : par exemple in ghjesgia, à l’église.
23
On utilise di et non pas à pour exprimer la possession [D 39] : Di quale hè ? À qui est-ce ?
Cas où l’on utilise à en corse et pas en français
24
À l’inverse, le corse préfère à à di dans certaines expressions qui appellent de en français : Carcu à/di soldi Plein d’argent
Pienu à/di mele Rempli de miel
Cupartu à/di coppi Couvert de tuiles
REMARQUE : Parfois le sens change selon la préposition utilisée (capace à : il est possible que…, capace di : avoir la capacité de).
25
Le corse privilégie l’emploi de à avec des verbes ou des expressions qui veulent la préposition de en français : Aghju drittu à passà. J’ai le droit de passer.
Faristi megliu à parte. Vous feriez mieux de partir.
7. À una para a un sens voisin. 8. À ogni costu. 9. À devient parfois ad. Les locutions gées forment souvent un seul mot : à bastanza abbastanza ; ad asgiu adasgiu.
40
[28] – LA PRÉPOSITION À – ACCUNCIÀ –
26
27
Hè capace10 à piove. Il risque de pleuvoir.
Sò ubbligatu à vene. Je suis obligé de venir.
S’hè avvicinata à/da mè. Elle s’est approchée de moi.
Mi sò scurdatu à/di dilli. J’ai oublié de lui dire.
Aghju pruvatu à fà bè. J’ai essayé de bien faire.
Ai fattu bè à chjamallu. Tu as bien fait de l’appeler.
A
Pour indiquer la fréquence, le corse emploie à là où le français utilise par : (À) u ghjornu / à ghjornu Par jour
(À) a sittimana / à sittimana Par semaine
(À) u mese / à mese Par mois
(À) l’annu Par an
Quand le sujet d’une proposition principale et d’une subordonnée est le même, on peut utiliser esse + pron. pers. + à + inf. Semu sempre noi à fà a cucina. C’est toujours nous qui faisons la cuisine.
Hè stata ella à pagà. C’est elle qui a payé.
REMARQUE : On rencontre cependant plus fréquemment les formes de types : hà pagatu ella, hè ella ch’hà pagatu.
Accuncià 28
Accuncià, dont le participe passé est acconciu dans la région de Marignana (voir annexe participe passé), s’utilise dans des contextes différents mais contient toujours l’idée d’arranger. ► Réparer Ai acconciu a porta ? Est-ce que tu as réparé la porte ? ► Arranger, aider. Souvent sous la forme pronominale, parfois avec un
sens péjoratif.
10. Voir remarque [A. 24].
41
A – ACCUNCIÀ – [29] Ma dopu elli s’acconcianu. Mais eux ils s’arrangent ensuite.
Ùn ti ne fà, s’hà da accuncià. Ne t’en fais pas, ça va s’arranger.
U tempu s’acconcia, mi pare. Le temps s’arrange il me semble. Par istrada/viaghju s’acconcia a soma. La charge (de l’âne) se règle, s’équilibre en chemin, i.e. on verra à l’usage. ► Préparer, arranger (un plat)
Ci vole ch’e’ acconci a carne. Il faut que j’accommode la viande.
Les
adjectifs
Adjectif qualificatif : accord
29
L’adjectif s’accorde en genre et en nombre avec le nom auquel il se rapporte. Il peut y avoir quelques différences régionales. ● Dans le quart nord-ouest de la Corse (Cinarca, Cruzine, Sorru, Seve, Sia, Salogna, Niolo, Filosorma, Balagna) : ► Si l’adjectif ne se termine pas par -e au singulier, il prend comme termi-
naisons -u au masculin singulier, -a au féminin singulier, -i au masculin pluriel et -e au féminin pluriel.
► Si l’adjectif se termine par -e au singulier, il garde -e comme terminai-
son sauf au masculin pluriel où il prend -i.
Masculin Féminin
Singulier
Pluriel
corsu verde corsa verde
corsi verdi corse verde
42
[29] – LES ADJECTIFS –
A
► Si l’on a la lettre -c- ou -g- avant la terminaison, il faut ajouter -h-
devant -i- et -e-, pour garder le son guttural : riccu ► ricchi, longa ► longhe… (il y a localement des exceptions : amici…)
► Dans les cas où l’on a -iu en nale au masculin singulier, l’usage est
plutôt de doubler le -i, surtout en cas de diérèse : seriu ► serii, et fattiu
► fattii.
► Quand le -i- n’est là que pour garantir le son chuintant « ch » ou
« je » devant -a ou -u (au singulier), on ne le conserve pas devant -e ou -i (au pluriel) : lisciu ► lisci et liscia ► lisce. De même avec -sg-, -c- et -g-.
► Quelques adjectifs de couleur sont invariables quand ils correspondent
à un nom commun, notamment : rosa, viola, aranciu.
► Lorsqu’un même adjectif épithète caractérise plusieurs noms féminins,
l’accord se fait avec le dernier : on dira donc lingua è cultura corsa et non lingua è cultura *corse 11.
● Dans certains parlers de la zone nord-est (en Castagniccia notamment), l’accord change au féminin pluriel dans le cas où -e est la terminaison au singulier : Masculin Féminin
Singulier
Pluriel
corsu verde corsa verde
corsi verdi corse verdi
● Dans la zone sud, le -e est systématiquement remplacé par -i, dans tous les cas. On a ainsi : Singulier Masculin Féminin
corsu verdi corsa verdi
Pluriel
corsi verdi corsi verdi
11. L’astérisque qui précède un mot signale que son usage n’est pas attesté sous cette forme.
43
A – LES ADJECTIFS – [30] ● Dans la zone extrême-sud, la situation est plus complexe : au singulier, le -e est remplacé soit par -i (masculin ou féminin), soit par -u (masculin), soit par -a (féminin) et on rencontre de nombreux pluriels en -a [M 4]. Pluriel de généralité
30
Le corse utilise le pluriel (masculin) pour les adjectifs dans des tournures impersonnelles (ci vole, phrase avec omu, etc.) : chacun est concerné pour ce qui est énoncé, on pourrait appeler cela un « pluriel de généralité » en quelque sorte. Hè megliu à esse prudenti. Il vaut mieux être prudent.
Quand’omu hè giovani sì. Quand on est jeune oui.
Ci vole à esse belli maiò. Il faut être bien grand. Quand’omu hè vechji si rivedenu vulinteri. Quand on est vieux, on les revoit volontiers. Adjectif qualificatif : position
31
L’adjectif qualicatif est le plus souvent placé après le nom (même si parfois il n’est pas fautif de le placer avant). ► On dira ainsi : Una donna ricca Una femme riche
Una storia longa Une longue histoire
Un battellu largu Un bateau large
Un omu povaru Un homme pauvre ► La position de l’adjectif qualicatif en corse n’est pas aussi anodine
qu’en français. Dans les exemples suivants, le sens change en fonction de la place de l’adjectif :
U vechju portu L’ancien port
U portu vechju Le vieux port
Una vechja canzona Une mauvaise chanson
Una canzona vechja Une vieille chanson 44
[32] – LES ADJECTIFS – LES ADVERBES –
A
► Picculu se place toujours avant le nom, chjucu après (ne pas oublier
qu’on utilise souvent les sufxes diminutifs à la place de ces deux adjectifs [S 37]) : Un picculu arbure Un petit arbre
Un arbure chjucu Un petit arbre
► Grande, maiò sont toujours placés après le nom. Gran’ est placé avant
et s’utilise souvent au sens guré. De manière générale, grande s’utilise plus volontiers au sens guré que maiò :
Una casa grande Une grande maison
Una casa maiò Une grande maison
Un gran’ parsunaghju Un grand personnage
Un parsunaghju maiò Un grand personnage
REMARQUE : Dans le cas des adjectifs numéraux, et de ultimu (-a…), on dira mieux :
I dui prima Les deux premiers
A siconda volta La deuxième fois
I trè cavalli Les trois chevaux
L’ultimi dui cavalli Les deux derniers chevaux
Adjectif employé comme participe passé
32
L’adjectif fait souvent ofce de participe passé, en concurrence ou bien tout simplement en lieu et place du participe passé attendu. Le nombre d’adjectifs qui font ofce de participe passé varie selon les régions (voir annexe 2). Les règles d’accord sont évidemment celles d’un participe passé classique. Anu nettu / nittatu. Ils/elles ont nettoyé.
Les
Aghju tombu. J’ai tué.
Ci ai pensu / pinsatu. Tu y as pensé.
adverbes On distingue plusieurs types d’adverbes : de quantité, de lieu, de temps, d’attitude, de manière. 45
A – LES ADVERBES – [33] 33
Adverbes de quantité Pocu, bellu, puchissimu, troppu, tantu, assai, piuttostu, abbastanza… seront, de préférence, sinon obligatoirement, placés après le verbe :
34
Aghju magnatu troppu. J’ai trop mangé.
Aghju magnatu abbastanza. J’ai assez mangé.
Aghju magnatu pocu. J’ai peu mangé.
Aghju magnatu assai. J’ai beaucoup mangé.
Adverbes de lieu Induva, duva, inde, (à) vicinu, luntanu, accantu, davanti, daretu, (in) altrò, quì, chivi, quassù, quallà, culà… [L 1113]
35
Adverbes de temps Oghje, dumane, arrimane, innanzu, dopu, prestu, subitu, suvente, à spessu, spessu… [T 19]
36
Adverbes d’attitude (In) ridoni, à pasponi, in cavalcioni, in fughjoni, in timiconi…
37
Adverbes de manière ● Les locutions adverbiales Extrêmement nombreuses, elles sont formées à l’aide des prépositions à, di, in, da et par notamment. ► Avec à (cas le plus général) À spiccera À la hâte
À l’affuria, à la lestra À la hâte
À straziera Avec peine, difculté
À mimoria De mémoire
À mente De mémoire, par cœur
À lume spentu Avec la lumière éteinte
A bracciu altu Sans retenir ses coups
À bocca aparta Bouche bée
À (le) volte Parfois
À tradimentu Par traîtrise
À silenziu Silencieusement
À sicretu Secrètement
À prupiziu À l’appiattu À propos, opportunément De manière dissimulée 46
À l’istrettu À l’étroit
[37] – LES ADVERBES –
A
À palesu Ouvertement
À a/’ssa ceca En aveugle
À a prima D’abord
À parpetu Éternellement
À causa persa Pour rien, sans attendre de résultat
À causa nita En n de compte
Di regula En règle générale
D’abitudine D’habitude
Di solitu D’habitude
Di sicuru, di certu Bien sûr, certainement
Di (me/to…) vulintà Volontairement
D’incantu À merveille
Di ghjusta Juste, équitable
Di raghjone Raisonnable
Di pocu Récemment
Di frescu Récemment
Di ricente Récemment
Di prima Auparavant
Di cuntinua Continuellement
Di core Sincèrement
Di nettu Nettement
Di pricisu Précisément
Di logica Logiquement
Di mala voglia À contrecœur
In seriu Sérieusement
In particulare En particulier
In eternu Éternellement
In sempiternu Éternellement
In tuttu En tout
In sicundaria En second lieu
In brulle Par plaisanterie
In n di conti En n de compte
In ultimu En dernier lieu
► Avec di
Di nicissità Nécessairement ► Avec in
► Avec da
Daveru Pour de bon, vraiment ► Avec par (parfois synonyme de di -) :
Par regula En règle générale
Par sicuru Certainement 47
Par (i)sfurtuna Malheureusement
A – LES ADVERBES – [37] Par furtuna Heureusement
(Pà) u più Essentiellement
Par brulle Par plaisanterie
Anc’assai, anc’assa’ Encore heureux
Ancu di grazia Encore heureux
► Autres
For di regula Hors-normes Fatta ne Finalement
● Les « adverbes-adjectifs » En corse comme en français, un adjectif peut faire ofce d’adverbe sans être modié. Cet emploi est plus fréquent qu’en français même si cet usage se perd et est souvent concurrencé par des adverbes en -mente. Ces derniers ne peuvent cependant pas être utilisés en apposition. Ce type d’adverbe varie en genre et en nombre comme l’adjectif. Adverbes
Exemples d’utilisation
Forte
Piove forte, parla forte, mena forte Il pleut fort, il parle fort, il frappe fort
Faciule
Pienghje faciule, si capisce faciule Il pleure facilement, on comprend facilement
Difciule
Ci si ghjunghje difciule On y arrive difcilement
Francu
A ti dicu franca, à dilla franca Je te le dis franchement, pour parler franchement
Rigulare
Vene rigulare Il vient régulièrement
Tipicu
Hè tipicu corsu Il est typiquement corse
Seccu
L’aghju rispostu seccu Je lui ai répondu sèchement
Chjaru
A vecu chjara chì… Je vois clairement que…
Dirrittu
Sò andati dirritti à a era Ils sont allés directement à la foire 48
[37] – LES ADVERBES –
Solu
Hè solu par viricà C’est seulement pour vérier
Naturale
Mi vene naturale Ça me vient naturellement
Currente
U corsu, u parlu currente Le corse, il le parle couramment
Tranquillu
Pudarè dorme tranquillu Tu pourras dormir tranquillement
Pianu
Viaghja pianu, parla pianu Il va doucement, il parle doucement
A
● Les adverbes en -mente ► Leur utilisation est polémique car ils sont « suspectés » de ne pas être
typiquement corses. Leur usage est certes moins fréquent en corse qu’en français ou en italien et, dans bien des cas, ils font double emploi avec d’autres types d’adverbes. En outre, le recours à ces adverbes contribue à l’oubli de tournures idiomatiques plus typiques, ce qui est regrettable. Un certain nombre de ces adverbes n’en est pas moins utilisé régulièrement, y compris par de très bons locuteurs de corse, et les auteurs, quels qu’ils soient, en ont toujours fait usage à l’écrit. Les adverbes en -mente sont incontournables lorsqu’ils ne sont en concurrence avec aucune autre forme adverbiale.
► On les forme en ajoutant le sufxe -mente aux adjectifs féminins dans
la plupart des cas :
Sicura ► sicuramente
Franca ► francamente
Quand l’adjectif se termine par -le, l’usage majoritaire est de placer -mente immédiatement après le -l- : Nurmale ► nurmalmente
Semplice donne simpliciamente.
Finale ► nalmente
REMARQUE : On trouve également les usages suivants, plutôt dans le Nord, avec notamment des formes allongées par « hypercorrection » : Franca ► Francatimente Vera ► Veratimente Nurmale ► Nurmalamente Finale ► Finalamente
49
A – LES ADVERBES – [37] ► Voici une liste des adverbes en -mente couramment employés :
Viramente Vraiment
Francamente Franchement
Finalmente Finalement
Esattamente Exactement
Simpliciamente Simplement
Largamente Largement
Ultimamente Dernièrement
Ghjustamente12 Justement, équitablement
Cumplit(t)amente Complètement
(In)dirittamente (In)directement
Faciulmente Facilement
Difciulmente Difcilement
Rigularmente Régulièrement
Particularmente Particulièrement
Naturalmente Naturellement
Sistimaticamente Systématiquement
Tranquillamente Tranquillement
Currittamente Correctement
Spizialmente Spécialement
Sicuramente Sûrement
REMARQUE : Oh viramente ! s’emploie fréquemment pour exprimer la surprise indignée.
► Voici une liste des adverbes en -mente que l’on peut trouver à l’écrit13 :
Pusitivamente (Cecc.) Positivement Sinciramente (Cecc.) Sincèrement Priziusamente (Cecc.) Précieusement
(Dis)ugualmente (Cecc.) (In)également Ufcialmente (Cecc.) Ofciellement Eccizziunalmente (Cecc.) Exceptionnellement
Pinalmente (Cecc.) Pénalement Lucalmente (Cecc.) Localement Praticamente (Cecc.) Pratiquement
Umilmente (Cecc.) Humblement
Orribilmente (Cecc.) Horriblement
Gintilmente (Cecc.) Poliment
Civilmente (Cecc.) Civilement, poliment
Onestamente (Cecc.) Honnêtement
Publicamente (Maistr.) Publiquement
Cumunamente (Min.) Communément
Alegramenti (D.F.) Joyeusement
Apartamente (Ger.) Ouvertement
12. Souvent employé à la place de (ghjust’) appuntu (justement, à propos). En toute rigueur, ghjustamente signie justement, équitablement. 13. Pour les abréviations, voir table page 26.
50
[40] – L’EXPRESSION DE L’ÂGE –
Riccamente (Cis.) Richement
A
Scimiscamente (Ger.) De manière insensée
REMARQUE : D’autres adverbes en -mente existent mais ils sont un peu différents dans la mesure où ils n’expriment pas forcément la manière : Pianamente Subitamente Talmente Sulamente Malamente Tranquillement Immédiatement Tellement Uniquement Avec difficulté
Disgraziatamente Malheureusement
Altrimenti/inaltrimenti Autrement
âge
L’expression de l’
38
On peut formuler la question Quel âge as-tu ? de diverses manières : Quantu anni ai ? Chì anni ai ? Quantu ai anni ?
REMARQUE : La dernière formulation est plutôt spécifique de la région de Marignana semble-t-il. Chì anni ai s’entend beaucoup à Evisa.
39
Donner son âge Aghju dodeci anni. J’ai douze ans.
Hà sissant’anni. Il/elle a soixante ans.
ATTENTION ! Dans le cas de vintunu, trentunu, quarantunu… annu se laisse au singulier [C 17].
Hà vintun annu. Il/elle a vingt et un ans.
40
Aghju cinquantun annu. J’ai cinquante et un ans.
Parler de l’âge ► Il est de mon âge.
Hè di i me tempi.
Hè di i me anni.
Hè di a me ità.
► À son âge.
À i so anni.
À a so ità.
► Quand tu auras mon âge.
Quandì t’avarè i me anni.
Quandì t’avarè a me ità.
► Une personne entre deux âges.
Una parsona di mez’ità. 51
A – AILLEURS – LE VERBE AIMER – [41] Ailleurs 41
Ailleurs se traduit par in altrò ou bien altrò, quand il a un sens spatial. Dov’esse in altrò. Il doit être ailleurs.
In altrò si dice cusì. Ailleurs on dit comme ça.
Quessu vinarà da in altrò (da ‘n altrò). Celui-là il vient sûrement d’ailleurs.
42
D’ailleurs se dit d’altronde. D’altronde, ùn hà micca primura. D’ailleurs, c’est sans importance.
D’altronde, ecculu. D’ailleurs, le voici.
Dans le premier cas, d’altronde est synonyme de di u restu, dans le second cas, de ghjustamente, ghjust’appuntu, appuntu.
43
Par ailleurs se dit paraltru (par altru). Paraltru si sà ch’elli sò scillerati. Par ailleurs, on sait que ce sont des vauriens.
Paraltru est à peu près synonyme de d’altronde, di u restu.
Le verbe
44
aimer
Pour exprimer un attachement très fort (amoureux, lial, fraternel…), on emploie tene caru (-a) ou tene tout seul. Ti tengu cara. Je t’aime (homme à femme).
Ti tengu caru. Je t’aime (femme à homme).
I tengu cari. Je les aime.
Ti tene. Il/elle t’aime.
REMARQUE : L’accord de caru se fait seulement dans certaines régions. Ailleurs, on a tout le temps caru.
45
Pour exprimer le goût que l’on a pour une chose ou une activité, on emploie piace (à). 52
[47] – LE VERBE AIMER –
Mi piace à ghjucà à ballò. J’aime jouer au foot.
Ti piace st’adore ? Tu aimes cette odeur ?
À elli li piace, mì ! Ils aiment ça, eux !
Mi piacenu e custigliole. J’aime les côtelettes.
A
► On utilise la préposition à devant un autre verbe à l’innitif. ► Le verbe piace s’accorde en nombre avec la chose aimée : on dira
piacenu s’il s’agit d’un pluriel.
►
On peut utiliser une proposition subordonnée, qui veut le subjonctif (présent ou autre, selon l’actualité des faits) : Mi piace chì tù dica cusì. J’aime que tu parles ainsi.
Li piace ch’e’ sia sola. Ça lui plaît que je sois seule.
► Piace veut l’auxiliaire esse.
T’hè piaciuta ‘ssa storia ? Cette histoire t’a plu ? REMARQUE : Spiace (rare) et dispiace peuvent signifier ou bien déplaire, ou bien regretter, déplorer. Ils se conjuguent aussi avec l’auxiliaire esse.
Mi dispiace, ma ùn possu vene. Je regrette, mais je ne peux pas venir.
L’hè dispiaciuta ma hà accittatu. Ça lui a déplu, mais il/elle a accepté.
► Garbà (à), d’un usage moins courant, signie plutôt plaire à l’esprit. Il
y a d’autres synonymes (voir dans les dictionnaires).
46
Vulè bè s’emploie assez peu, et est plutôt affectueux. Ti vogliu bè. Je t’aime bien.
Chì mi risparmia mi vol bè. (prov.) Celui qui ne me fait pas de mal me veut du bien.
► On note également les expressions : ben vulè, mal vulè :
S’hè fattu ben vulè. Il s’est fait apprécier.
47
À chì dice a virità si face mal vulè. Qui dit la vérité s’attire la malveillance.
Amà s’emploie très peu en corse, et essentiellement à la forme passive. Aghju da ritruvà u me paese amatu. Je vais retrouver mon village adoré. 53
A – AIÓ – LE VERBE ALLER [48] Aió 48
Aió est avant tout une interjection qui équivaut en français à Allons ! Allez !, même si elle peut être plus énergique, voire plus brutale. Aió ! Escimi di/da quì ! Allez ! Sors-moi de là !
Aió ! Andemu ! Allons ! Allons-y !
Elle peut avoir valeur de reproche en s’adressant à quelqu’un qui gêne : Aió !
49
Aió est également un impératif équivalent à andemu et qui s’utilise comme ce dernier. Aioccine ! Allons-nous-en !
Aió à vede à qual’ellu pare ! Allons voir de quoi il a l’air !
Aió à a posta ! Allons à la poste !
Le verbe
50
aller
Pour le mouvement, aller se dit andà. Il a le même sens et les mêmes emplois qu’en français. Comme pour tout verbe de mouvement, quand il est associé à l’innitif, il est suivi de la préposition à [A 9]. (Voir la conjugaison de ce verbe en annexe). Vacu à cumprà u pane. Je vais acheter le pain.
Si ne vanu sta sera. Ils/elles partent ce soir.
Ci andemu subitu. Nous y allons tout de suite.
Cumu ci si và ? Comment s’y rend-on ?
► Andà s’utilise à l’impératif dans un grand nombre d’expressions toutes
faites, en particulier pour les ghjasteme [Ghj 5]. Souvent il y a concurrence entre la forme attendue vai à + innitif et la forme vai è + verbe à l’impératif : 54
[53] – LE VERBE ALLER –
Vai à empiemi stu bidone di l’acqua. Va me remplir ce seau d’eau.
A
Vai è empiimi stu bidone di l’acqua. Va me remplir ce seau d’eau.
Vai à fatti leghje ! Va te faire voir ! (litt. : lire) ► La locution vai chì est d’un usage très courant, même sans autre mot.
On n’emploie jamais le pronom personnel après cette construction. Elle sert à donner de la force au propos qui la suit.
Vai chì !… Mais attends voir !…
51
Vai ch’hà da vene ! Tu verras qu’il/elle va venir !
Pour l’état (de santé ou autre) et son évolution, on utilise andà comme aller en français, à côté de esse et stà [E 17 25 et S 30]. Comu và ? Comment ça va ?
Và bè ? Vai bè ? Ça va ? Tu vas bien ?
Hè andata bè ? Ça s’est bien passé ?
Avà và megliu. Maintenant ça va mieux.
► Andà di bè/male indique l’évolution de l’état. On peut aussi rencontrer
andà (di) megliu/peghju. Hè andatu di male l’affare. Les choses se sont gâtées.
► Une autre construction est possible en corse, mais pas en français. Elle
traduit l’idée d’une issue défavorable (favorable avec bè) à une personne et est synonyme de riesce/resce male (ou bè) :
Vai chì l’hà da andà male ! Tu verras que ça va mal nir pour lui !
Un ghjornu m’hà da andà male. Un jour ça va mal se passer pour moi.
52
Pour exprimer l’idée de futur, le corse emploie avè da + innitif [F 33].
53
Pour dire aller dans le sens de convenir, être aux bonnes proportions, on emploie stà, ou plus rarement sende (convenir). Ti stà bè ! Ça te va bien ! (iron.)
Istu vistitu ti stà binissimu. Cette robe te va très bien.
Sò manere chì mi sendenu pocu. Ce sont des manières qui ne me conviennent guère. 55
A – ALTRU – [54] Altru 54
Dans son sens premier, altru(-a) signie autre comme en français, que ce soit en tant qu’adjectif ou en tant que pronom. Vinaraghju un altru ghjornu. Je viendrai un autre jour.
Ci ne era un’altra. Il y en avait une autre.
► On le retrouve dans un certain nombre d’expressions gées. Avec l’arti-
cle un, il peut être remplacé par antru(-a) dans certains cas. On trouve également astru, qui peut parfois remplacer altru ou antru.
55
Quill’altru L’autre
L’altru ghjornu L’autre jour, avant-hier
Dammine un altru/antru pocu. Donne-m’en encore un peu.
L’altri dui Les deux autres
Senz’ altru Sans faute
Ci ne hè un altru/antru. Il y en a un autre.
Altru se retrouve dans les locutions altru nimu et altru nulla, qui signient respectivement personne d’autre et rien d’autre. Altru nimu est un pronom personnel et, à ce titre, il est précédé de la préposition à s’il est COD. Ùn ai vistu à altru nimu ? Tu n’as vu personne d’autre ?
56
Ùn hà compru altru nulla. Il/elle n’a rien acheté d’autre.
Altru seul, en tant que pronom, a un sens similaire à autre chose, mais est d’emploi plus large. Un dicu altru, eiu. Je ne dis pas autre chose, moi.
Aghju altru à/da fà ! J’ai autre chose à faire !
Ma ùn facciu altru ! Mais je ne fais pas autre chose !
Ùn mancaria altru / Bastaria ! Il ne manquerait plus que ça.
Ùn si parla d’altru. On ne parle que de ça.
Ùn aspetta altru. Il/elle n’attend que ça. 56
[59] – ALTRU – ANCU –
57
A
On retrouve aussi altru dans altrettantu (parfois on écrit altru è tantu), en tant que pronom ou adverbe qui signie autant. Bon appitittu ! – Altrettantu ! Bon appétit ! – Vous de même !
58
De manière extrêmement courante, altru (var. : altruchè) s’utilise comme interjection (invariable) pour signier que le propos de l’interlocuteur est très en dessous de la vérité : « Ne hà avutu abbastanza ? – Altru ! » « Il en a eu assez ? – Et comment ! »
« Parchè ? Hè vechja ? – Altru ! » « Pourquoi ? Elle est vieille ? – Et comment ! »
Altru cà, altru chì
Avec le même sens on utilise très couramment aussi les locutions invariables altru cà + adj. ou proposition nominale [S 46] et altru chì + proposition subordonnée (avec pronom personnel). Altru cà scemi, sò liatoghji ! Ils sont plus que fous, ils sont fous à lier !
Altru cà à a risa ! Bien plus que ridicule !
Altru chì tù a poi lughjà quessa ! Et comment que tu peux la louer celle-là !
Ancu 59
1
Selon le contexte, ancu signie aussi ou même. Hà mughjatu anch’ellu ! Il a crié lui aussi !
Ne voli ancu tù ? Tu en veux toi aussi ?
Ancu u pesciu mi piace. J’aime aussi le poisson.
Ci sò andatu anch’eiu. J’y suis allé moi aussi.
Anch’ellu hà dettu a soia ! Même lui a dit la sienne ! REMARQUE : Souvent, eiu ou eu se trouve sous sa forme contractée : anch’e’.
57
A – ANCU – [60] 60
Ancu signie aussi encore, surtout dans les phrases négatives, et micca est alors facultatif (et même rare), à l’exception de l’expression ancu micca (var. : unancu surtout dans la zone nord, employé seul dans une réponse ; très rare, dans quelques parlers de la zone sud, ùn… ancora). Ne vole ancu/torna/dinó. Il/elle en veut encore.
Un hè ancu (micca) ghjuntu. Il n’est pas encore arrivé.
Un sai ancu nulla ? Tu ne sais encore rien ?
Hè ghjuntu ? – Ancu micca Il est arrivé ? – Pas encore.
REMARQUE : « Il est encore là » se traduit par « Hè sempre quì ».
► L’idée de pas encore se traduit aussi de manière très courante par la
construction ùn (esse/avè)… ancu à + innitif. Le choix de l’auxiliaire esse ou avè se fait comme si la phrase utilisait la construction ùn esse/ avè ancu + part. pass. Ùn hè anc’ à ghjunghje. Il/elle n’est pas encore arrivé.
Ùn emu anc’à magnà. Nous n’avons pas encore mangé.
Vai ch’ùn l’anu anc’à vende a casa ! Dis-toi qu’ils/elles ne l’ont pas encore vendue la maison !
Ùn hè anc’à fà. Ce n’est pas encore fait.
Ùn l’anu anc’à fà u muru ! Ils/elles ne l’ont pas encore fait le mur !
Ùn hè anc’à ghjudicallu14. Il n’est pas encore jugé.
Ancu chì, ancu sì
61
Ancu sert également à construire les locutions de subordination ancu sì + indicatif et ancu chì + subjonctif, qui se traduisent toutes les deux par même si mais ne formulent pas tout à fait la même idée : – Ancu chì envisage une hypothèse très incertaine ; – Ancu sì exprime plutôt une concession. Ancu sì tù sai ghjucà, stà à sente ! Même si (c’est vrai que) tu sais jouer, écoute !
Ancu chì tù sappia ghjucà, stà à sente ! Même si (il s’avère que) tu sais jouer, écoute !
14. Le complément -lu sert peut-être à garder la marque du genre et du nombre qui se perd avec
l’emploi de l’innitif au lieu du participe passé. 58
[63] – ANCU –
Ancu ch’ellu tocchi in tarra, ùn face nulla. Même ça devait toucher par terre, ça ne fait rien.
A
Ancu ch’elli ùn magnessinu micca, vinianu à beie un colpu. Même si en dénitive ils ne mangeaient rien, ils venaient (quand même) boire un coup.
Il arrive toutefois qu’elles soient interchangeables : ancu ch’ella sia vera / ancu s’ella hè vera, même si c’est vrai. Ancu puru
62
On utilise souvent la locution ancu puru, qui a le sens de même, quand bien même, suivie d’un gérondif ou bien d’une proposition subordonnée. Si la conjonction de subordination est chì, il faut le subjonctif. Què ùn si pó apre ancu puru sciappendu. Ça, ça ne peut pas s’ouvrir même en cassant.
Ancu puru ch’ellu piovi, ci saraghju. Quand bien même il pleuvrait, j’y serais.
Ancu puru quandì tù sè malatu, a poi fà. Même si tu es malade, tu peux le faire. Ancu et puru ► Ancu est parfois remplacé par puru qui reste cependant d’un emploi
plus rare :
Ci si ghjunghje faciule in vittura ma puru à pedi ! On y arrive facilement en voiture, mais même à pied ! Ancu par
63
Ancu par + innitif a à peu près le sens que même si je devais + innitif : Ancu par esse malatu, andaraghju. Même si je devais être malade, j’irais.
REMARQUE : On pourrait dire aussi par esse malatu, andaraghju, ou bien ancu ch’e’ sia malatu, andaraghju.
59
A – ANCU – ANNU, ANNATA – [64] Neancu, neppuru, nemmancu, nemmenu
64
On peut citer neancu : ni même, non plus, qui a pour synonymes nemmenu, neppuru, nemmancu et surtout mancu, de très loin le plus employé [M 7].
Annu, annata 65
Annu signie à la fois an et année. Quist’annu Cette année
Bon dì è bon annu ! Bonjour et bonne année !
Ogni annu Tous les ans, chaque année
Aghju vintitrè anni. J’ai vingt-trois ans.
L’Annu corsu L’Année corse
REMARQUE : Comme pour tous les autres noms, annu reste au singulier après vintunu, trentunu… [A 39
et P 43].
66
Annata fait référence à l’année de production (surtout pour les cultures). On parle alors de bon’annata ou de mal’annata. L’ajout du sufxe -ata peut également signier que l’on entend insister sur la durée de la période : tutta l’annata (ou tuttu l’annu), l’annata sana (ou l’annu sanu).
67
On retrouve annu dans des expressions idiomatiques. Annu L’année dernière
Anni passati Ces dernières années
Anni passatoni (Cecc.) Il y a de nombreuses années
Sò dill’anni 15 Ça fait des années
Quist’annu chì vene L’année prochaine
Sti pochi anni Ces dernières années
15. Même sens que sò anni, mais plus fort. On garde le double -l- à l’écrit car il est très marqué à l’oral.
60
[70] – L’ANTIPHRASE –
L'
A
antiphrase Il est extrêmement fréquent en corse de recourir à l’antiphrase pour exprimer une idée. Le ton et/ou le contexte permettent dans tous les cas de comprendre le propos.
68
Certaines expressions sont utilisées de manière récurrente. Les traductions qui suivent reètent l’idée et ne sont pas forcément littérales : Semu belli ! Tamant’affare ! Nous voilà dans de beaux draps ! (iron.) Quelle importance ! (iron.) Semu affullati ! Nous sommes bien aidés ! (iron.) Poca ghjente ! Que de monde !
69
Tamantu tippu ! Quel homme ! (iron.)
Bella roba ! Voilà des choses (ou des gens) de peu de valeur !
De manière occasionnelle, on peut entendre : Tù sè spertu mì ! Toi oui, tu es intelligent ! (iron.)
Li pare pocu ! Ça lui semble un exploit ! (iron.)
Cusì sgualtra quessa ! Qu’est-ce qu’elle est douée ! (iron.)
Poc’acquisti ! Que de mauvaises affaires !
Chì valioni ! Quels bons à rien !
Pochi l’affari ! Tant de choses !
Emu fattu un bell’acquistu ! On a fait une belle affaire ! (iron.)
Quessi i zitelli sò appurtunati ! Voilà des enfants bien servis, qui ont tout ce qui leur faut ! (iron.)
Sò valenti, sò tutti valenti ! Ce sont des champions, ce sont tous des champions ! (iron.)
70
Il arrive même dans certains cas que le sens d’un mot change complètement, sans doute dans le cas où il est pratiquement toujours utilisé par antiphrase. Ainsi, l’adjectif quentu, qui signie qui a de l’allure, est-il dorénavant compris comme l’exact contraire à Marignana. 61
A – LE VERBE ARRIVER – [71] Le verbe
arriver
Le verbe polysémique arriver se traduit en corse de différentes manières selon le contexte.
71
Arriver quelque part se traduit par ghjunghje principalement. Arrivà a le même sens, mais est plus rare. Semu ghjunti à l’ora. Nous sommes arrivés à l’heure.
Attempu ghjuntu, hà cumenciu. Il a commencé sitôt arrivé.
À chì ora ghjunghje u pane ? À quelle heure arrive le pain (i.e. le boulanger) ?
Sarà arrivata a me lettara ? Se peut-il que ma lettre soit arrivée ?
REMARQUE : Dans certains cas, vene est préférable. En particulier, a ghjunta est synonyme de a vinuta.
72
Arriver, parvenir, réussir (à faire quelque chose) se dit riesce (à fà calcosa), fallaali (à fà calcosa) (var. : fallali, fallaci/faccila). On peut également entendre ghjunghje (à fà calcosa), mais il semblerait que cet emploi soit impropre. Ùn ci riescu mai. Je n’y réussis jamais.
A l’ai fatta à chjamallu ? As-tu réussi à l’appeler ?
REMARQUE : Aux temps composés, sous la pression du français, le corse utilise très souvent (sinon toujours) l’auxiliaire avè avec les verbes riesce et fiascà, au lieu de l’auxiliaire esse [A 97].
73
Arriver, se produire se dit stalbà, accade, succede, et plus rarement capità. Ces verbes se construisent tous avec l’auxiliaire esse. Oh ciò chì mi stalba ! Oh ce qui m’arrive !
Sò cose ch’accadenu. Ce sont des choses qui arrivent.
Ogni tantu mi capita di vedelu. De temps à autre, il m’arrive de le voir.
Ch’hè successu ? Que s’est-il passé ?
62
[75] – LES ARTICLES –
A
articles
Les
Ne pas oublier que le -e- non tonique n’existe pas dans la zone sud, et est remplacé par -i-. Articles définis
74
Les différentes formes sont les suivantes :
► Formes courantes Singulier
Pluriel
Masculin
u
i
Féminin
a
e
► Formes pleines
On peut trouver les formes fortes lu, la, li, le en poésie, dans les chansons, après des voyelles toniques dans certaines expressions ou tournures, ou après -n (ùn, in). Les usages peuvent varier d’une région à l’autre. ● Dans la région de Marignana-Evisa, les formes fortes sont employées dans les cas suivants : – toujours après in et la négation ùn ; – on dit à la lestra, à la longa, à le volte, trà li pedi ; – après oh dans les exclamations de type « oh la ghjente chì ci hè ! », « oh la vita ! »… – Dans certaines questions (dans les parlers de Vico, Evisa, Marignana, etc.) : ailu vistu ? ● Dans le Cap Corse, les formes lu, la, li, le sont la règle.
75
En général, tous sans exception deviennent l’ devant une voyelle.
► Cependant, devant les groupes in- et im-, il est fréquent que l’on utilise
u, a, i ou e malgré tout, et dans ce cas le i- ne se prononce jamais [I 34-35]. Cet usage est obligatoire, possible ou impossible selon les 63
A – LES ARTICLES – [76] mots. Il semble qu’il varie aussi en fonction des régions. Dans celle de Marignana-Evisa, on a ainsi : A insalata La salade
E infurmazione Les informations
A inrmiera L’inrmière
U insignante L’enseignant
L’intrata L’entrée
L’invernu L’hiver
L’/u impiegatu L’employé
U impiastru L’emplâtre
REMARQUE : Dans la mesure où un i- initial suivi de -n- ou de -m- ne se prononce jamais (on dira toujours : aghju ‘ntesu, ùn m’hà micca ‘mpiditu), on n’éprouve généralement pas le besoin de répercuter la prononciation à l’écrit. Il reste cependant possible d’adopter les graphies a’nsalata, u ’mpiastru.
► Emploi de l’article déni
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L’emploi de l’article déni est plus fréquent en corse qu’en français et en italien. ● À la forme afrmative, dans les tournures avec les verbes avè et fà [A 108 et F 3]. Aghju a fame. J’ai faim.
Anu a sete. Ils/elles ont soif.
Hà (a) raghjone. Il/elle a raison.
Avemu a brama di parte. Nous avons envie de partir.
Aghju u laziu di sorte. J’ai envie de sortir.
Face u fretu. Il fait froid.
REMARQUE : L’article défini disparaît à la forme négative : ùn aghju (micca) fame, ùn face (micca) fretu…
● Très fréquemment, là où le français utilise de, du, des, le corse emploie l’article déni (ou rien, mais c’est plus rare). On observe notamment cet emploi dans les expressions ci hè et ci sò.
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Ci hè a ghjente. Il y a du monde.
Ci hè u ventu. Il y a du vent.
Mì chì s’hà compru i libri ! Tu vois qu’il a acheté des livres !
Ci vole ch’e’ compri (e) mele. Il faut que j’achète des pommes.
Quand le rapport d’appartenance est clair (avec la famille en particulier [F 11 -12]), l’article déni remplace l’adjectif possessif. À Francescu ùn l’aghju vistu, ma aghju vistu u babbu. Je n’ai pas vu Francescu, mais j’ai vu son père. 64
[81]– LES ARTICLES –
78
A
Quand le complément du nom (CDN) exprime la matière, le contenu ou l’usage et le but, et qu’il complète un nom introduit par un article déni ou démonstratif (u, ‘ssu, stu, quellu), il se construit avec l’article. U pezzu di u tarrenu Le morceau de terrain
‘ssu pezzu di u tarrenu Ce morceau de terrain
I pacchetti di e crêpe Les paquets de crêpes
A buttiglia di u gaz La bouteille de gaz
U bidone di l’acqua Le seau d’eau
Cù ‘ssu mazzulu di a nocca Avec ce bouquet d’ellébore
U marcante di i ligumi Le marchand de légumes
E forbice di a vigna Le sécateur
U segnu di a croce Le signe de croix
On dira en revanche : a libertà di cuscenza…
79 80
Avec le jour et l’année, même si ce n’est pas obligatoire :
marcuri u vintisei di nuvembre di u 2008, in lu vintiquattru (1924)… Mais on entend aussi : marcuri vintisei nuvembre 2008, in vintiquattru…
Pour indiquer la cause, quand on utilise la préposition da (tantu,-a…). Cela ne se fait pas avec la préposition di [D 4 et D 35]. Mi face more da a risa. Il/elle me fait mourir de rire.
Mi face more di risa Il/elle me fait mourir de rire.
Articles indéfinis
81► Formes Singulier
unu, un una, un’
Masculin Féminin ► Élision
● On dira una devant un mot féminin commençant par une consonne, ou devant un mot commençant par in- ou im- quand il veut a comme article déni. Dans les autres cas, on dit un’ : 65
A – LES ARTICLES – LE VERBE ATTACCÀ, -SSI –[82] un’ intrata une entrée
un’ invirnata un hiver (durée)
una insalata une salade
una inrmiera une inrmière
una tavula une table
una femina une lle
una ghjurnata une journée
una chjave une clé
● On dit unu devant un mot commençant par in- ou im- et qui veut l’article u, on dit un dans les autres cas : un omu un homme
82
un arbure/alberu un arbre
unu impiastru un emplâtre
unu insignante un enseignant
Cas des mots masculins commençant par st, sc, sd, sb, sp. Selon les régions, on peut laisser l’article un inchangé, utiliser unu ou encore garder l’article un et ajouter un i- euphonique au début du mot (choix privilégié dans la région de Marignana-Evisa) [U 7] : un istudiante unu studiante
un isbarcamentu unu sbarcamentu
un isceccu unu sceccu
un istracciu unu stracciu
► Emploi de l’article indéni
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L’article indéni s’emploie comme en français de manière générale. Aghju coltu un ore. J’ai cueilli une eur.
L’hà datu una tribbia. Il/elle lui a donné une raclée.
Dans le cas de la famille, il a le sens de un de mes (tes, ses, leurs) : un to gliolu un de tes ls
una so cugina une de ses cousines
un me fratellu un de mes frères
Pour nos, vos, il y a hésitation entre un nostru, et unu di (i) nostri.
Le verbe
84
attaccà, -ssi
Le sens premier de attaccà est attaquer, assaillir comme en français. Il a alors pour synonyme assaltà.
REMARQUE : Il signifie également attaquer en justice.
66
[90]– LE VERBE ATTACCÀ, -SSI – ATTENTION –
85
A
Dans un deuxième sens, attaccà signie entamer, commencer, notamment pour la nourriture. Hà attaccatu u discorsu.
Aió ! Attachemu !
On peut l’employer dans un sens intransitif, et il veut dire alors commencer à être malade (Cecc.) : hè attaccatu martissera.
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Atteler un cheval (Cecc.). Il est alors l’antonyme de staccà.
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Unir, attacher (accrocher, accoler), au sens guré comme au sens propre. Sò attaccati. Ils sont attachés.
L’anu attaccatu bè st’afsciu ! Ils/elles l’ont bien accrochée cette afche !
Au sens propre, on dira mieux cependant appiccià (pour une maison…), appiccicà (coller), appitticà, azzingà (accrocher, suspendre…) selon le contexte, voire lià (pour une ceinture, une corde par exemple).
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Attaccatu(-a) à signie comparé à et s’emploie surtout pour des personnes. Attaccat’ à mè, hè in forma. Comparée à moi, elle est en forme
Attaccat’à ellu, sè bellu. À côté de lui, tu es beau.
Cette locution a pour synonymes (ap)paragunatu(-a) à, di/à pettu à, in paragone di, cumparatu(-a) à, in cumparazione di…
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La forme pronominale a les mêmes sens (propre et guré) qu’en français. Si sò attaccati. Ils se sont attachés l’un à l’autre.
Mi sò attaccatu à ella. Je me suis attaché à elle.
Attention 90
En tant qu’avertissement, mise en garde, attention se traduit par attentu(-a) ou attinzione. Attentu s’accorde en genre et en nombre avec 67
A – ATTENTION – AUCUN – [91] la ou les personnes à qui on s’adresse. Localement (région de Marignana-Evisa en particulier), on dit attente et donc dans ce cas la terminaison ne change qu’au masculin pluriel [A 29]. Attinzione ! Ti mengu mì ! Attention ! Je vais te frapper !
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Attenti o zitelli, chì ci hè u piriculu. Attention les enfants, car c’est dangereux.
Faire attention peut se dire de plusieurs manières selon les nuances de sens : – fà attinzione : sens le plus général, recouvre tous les autres ; – stà attente(-i) : faire preuve de prudence ; – dà/purtà capu : prêter attention ; – fà casu : relever, remarquer ; veiller. L’expression dà retta a le même sens mais est aujourd’hui peu employée.
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On peut également utiliser le verbe vardà/guardà [V 3], ou encore abbadà, badà. Ce dernier cependant ne semble plus utilisé partout (il s’entend dans le Fiumorbu notamment). Varda ch’ellu ùn caschi. Fais attention à ce qu’il ne tombe pas.
Abbada ! Fais attention !
Aucun Plusieurs termes permettent de traduire aucun, que ce soit en tant que pronom ou adjectif : manc’unu, alcunu, nisunu (var. : nisgiunu), et dans certaines régions varunu.
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S’il s’agit d’un dénombrable, on utilisera de préférence manc’unu(-a), même si nisunu est possible. Un hà dettu manc’una parolla. Il n’a pas dit un mot.
Ùn ci ne era manc’una. Il n’y en avait aucune. 68
[96] – AUCUN – LES AUXILIAIRES –
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A
Si aucun est employé avec une valeur indénombrable, à l’exception de manc’unu, tous les autres synonymes sont utilisés. Le fait d’utiliser l’un ou l’autre semble relever d’une préférence locale. In alcuna manera. En aucune manière.
Un hà nisun drittu à fà cusì. Il n’a aucun droit à agir ainsi.
Par varun mutivu. Sans aucun motif.
Senza ritegnu alcunu. Sans aucune retenue.
REMARQUE : S’ils sont placés en tête de phrase, ces termes ne veulent pas la négation ùn : nisuna scusa pó ghjustificà ciò ch’ellu hà fattu (aucune excuse ne peut justifier ce qu’il a fait).
Les
auxiliaires
95
Les auxiliaires sont avè et esse. Pour les conjugaisons et les usages de ces verbes ainsi que pour les expressions dans lesquelles ils sont employés, se référer aux chapitres voulus [A 105 108, E17 25 et conjugaisons en annexe].
96
La règle générale d’emploi des auxiliaires est la même qu’en français, à la différence qu’elle ne souffre en corse aucune exception (ou presque). On la formulera de la manière suivante : Les verbes transitifs veulent l’auxiliaire avè et les verbes intransitifs l’auxiliaire esse, à l’exception des verbes indiquant une action humaine (volontaire ou non) qui se conjuguent tous avec l’auxiliaire avè.
REMARQUE : Un verbe transitif est un verbe qui accepte un complément d’objet direct ou indirect, c’est-à-dire un verbe après lequel il est possible de poser la question qui ? quoi ? ou à qui ? à quoi ? Par exemple, « manger » est transitif, car on peut dire « manger quoi ? » Les verbes intransitifs n’admettent pas de complément d’objet direct, comme par exemple venir.
On note en particulier que : – avè est son propre auxiliaire, esse aussi ; – les verbes de mouvement veulent tous l’auxiliaire esse ; 69
A – LES AUXILIAIRES – [97] – les verbes pronominaux veulent tous l’auxiliaire esse ; – les verbes qui parlent du temps veulent tous l’auxiliaire esse. REMARQUE : Dans certains usages locaux, des verbes comme piove, grandinà… peuvent se conjuguer avec l’auxiliaire avè. On évoque parfois une nuance de sens : dire hà piuvitu a ghjurnata sana signifierait qu’il pleut encore au moment où l’on parle, et hè piuvitu a ghjurnata sana que la pluie a cessé.
97
Le cas de ascà (échouer) et riesce (réussir) est particulier : la logique et un usage plus ancien les associent à l’auxiliaire esse, mais on entend couramment l’auxiliaire avè, sans doute sous la pression du français. On peut donc considérer les deux comme acceptables.
► Le cas des verbes serviles (pudè, vulè, turnà à) sera examiné au chapitre
« Verbes serviles » [S 16 18].
► Le cas des verbes pronominaux « apparents » (i. e. verbes pronominaux
qui ont le même sens que la forme non pronominale correspondante) sera examiné au chapitre « Verbes pronominaux » [P 52-53]. Hà compru una pera. S’hà compru una pera. S’hè compru una pera.
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Il a acheté une poire.
Aux temps composés, vulecci veut l’auxiliaire esse, de même que tuccà : Ci hè vugliutu à magnà tuttu. Il a fallu tout manger.
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M’hè toccu à magnà tuttu. J’ai dû tout manger.
Campà, quand il a le sens de vivre et donc le participe passé campatu, se conjugue avec l’auxiliaire esse, alors que vive s’emploie avec l’auxiliaire avè. Ùn hè campatu tantu. (Cecc.) Il n’a pas vécu longtemps.
Ùn hà vivutu 16 tantu. (Cecc.) Il n’a pas vécu longtemps.
100 Voici une liste de verbes intransitifs mais voulant l’auxiliaire avè (car ce sont des actions humaines) :
16. Vive a aussi vissutu comme participe passé.
70
[102] – LES AUXILIAIRES –
marchjà marcher
saltà sauter
corre courir
dorme dormir
esità hésiter
ghjucà jouer
ride rire
scaccanà caqueter
parlà parler
discorre discuter
chjachjarà bavarder
starnutà éternuer
piscià uriner
boccamanzulà bâiller
mughjà crier
briunà crier
stridà pousser des cris
A
REMARQUE : Certains de ces verbes peuvent requérir l’auxiliaire esse dans un emploi différent :
Aghju corsu un pocu sta mane. J’ai couru un peu ce matin.
Hè corsu à vedemi. Il a accouru pour me voir.
Aghju saltatu altu. J’ai sauté haut.
A casa hè saltata. La maison a sauté.
101 Verbes ayant trait au temps et voulant l’auxiliaire esse (sauf dans certains parlers – remarque[A 96]) : piove pleuvoir
piuvicinà pleuviner
candillà pleuviner
stancià arrêter de pleuvoir (un moment)
grandinà grêler
nivà neiger
aduchjà arrêter de pleuvoir (vraiment)
102 Verbes divers exigeant l’auxiliaire esse en corse et avoir en français : durà durer
custà coûter
sparisce disparaître
corre courir
cambià changer
ingrandà grandir
achjuculisce rapetisser
esiste exister
ingrussà grossir
ingrassà engraisser
inguffà enlaidir
imbillisce embellir
scunciassi avorter
prugridisce progresser
parturisce accoucher
cresce croître
sculiscià glisser, chuter
sguillà glisser
schiattà éclater
sbuttà éclater
invichjà vieillir
vulecci falloir
tuccà incomber
bastà sufre
…
REMARQUE : Employés en tant que transitifs, ces verbes veulent évidemment l’auxiliaire avè : sò cambiatu assai (j’ai beaucoup changé), mais aghju cambiatu (di) casa (j’ai changé de maison), hè falatu in cacciare (il est descendu à la cave) mais hà falatu u prisuttu (il a descendu le jambon).
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A – AVÀ – LE VERBE AVÈ – [103] Avà 103 Avà signie maintenant. Il s’agit de l’apocope de avale (avali dans
le Sud) que l’on entend dans certaines régions. On retrouve -le dans la forme sufxée avalella qui signie à l’instant. Elle est synonyme des locutions avà avà (aval’avale), appena avà, et de à ‘n par avà, parfois écrit amparavà (Cecc.), selon la prononciation, ou encore ad in par avà, plus rare. Par avà Pour le moment
Ad avà, n’à avà Jusqu’à maintenant
À parte da avà À partir de maintenant
104 Avà est également très usité comme interjection marquant ou bien une dénégation catégorique, ou bien une incrédulité teintée de surprise, selon l’intonation. Sarà malatu daveru ? – Avà ! Pensa tù ! Figurati ch’ellu hè malatu ! Il est vraiment malade ? – Pas du tout ! Je voudrais voir ça qu’il est malade ! Hè statu arristatu oghje. – Avà ?! Ùn hè micca pussibule ! Il a été arrêté aujourd’hui. – Vraiment ?! Ce n’est pas possible !
Le verbe
avè
105 Pour la conjugaison de avè, voir en annexe. 106 Pour l’utilisation de avè en tant qu’auxiliaire, [A 95-102]. 107 Avè sert à former le futur (plus ou moins) proche dans l’expression avè da [D 34-F 33].
108 Avè est utilisé dans un certain nombre de tournures, toujours avec l’article déni à la forme afrmative, mais toujours sans à la forme négative : Avè a fame Avoir faim
Avè a sete Avoir soif 72
Avè u fretu Avoir froid