Sommaire Le poète des Vernecs L’obsession de son coin de pays
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Première partie : la vie de Roger Theytaz Qu’est-ce qu’un Anniviard de Sierre ?
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L’entrée dans la vie et les identités plurielles
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Première éclosion de l’âge adulte (1958-1964) : le métier, le judo, les Beaux-Arts
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Premier drame de la vie : la mort de la maman Eveline
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Deuxième éclosion de la vie d’adulte : autonomie, enracinement et engagement social
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Le cri dans la montagne (1970) : la mort du père Edouard, l’amitié de Jean-Pierre et le caractère de Roger
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L’amour et l’abîme (1970-1993) : bonheurs d’un coup de foudre et interminables années de souffrance
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Troisième période (1996-2015) : dans l’intimité du terroir et le bonheur du paradis retrouvé, mais avec des turbulences dans la crèche de Noël
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Principales expositions de Roger Theytaz
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Petite chronologie de Roger Theytaz
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Portrait de Roger Theytaz par sa fille Evelyne Theytaz Ricciardi
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Roger Theytaz, de Villa et du Vernec
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Deuxième partie : l’œuvre de Roger Theytaz L’artiste Roger Theytaz – Premier regard
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La vie traditionnelle des Anniviards selon l’œuvre de Roger Theytaz
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Le monde des légendes
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Du berceau au tombeau : Scènes de l’ancienne vie anniviarde
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La vie de Roger Theytaz
Qu’est-ce qu’un Anniviard de Sierre ? Par Bernard Crettaz
Voilà un « type » de population que nous, Anniviards de la montagne, pensons bien connaître et qu’en réalité connaissons mal : l’Anniviard du dehors et surtout l’Anniviard de Sierre né en plaine. Ce type d’humains particuliers et métissés peut se rencontrer de façon isolée ou en tribus. Dans ce cas, les tribus de Noës, Villa, Muraz, Tservettaz, Borzuat, Glarey et Veyras, peuvent se définir de façon différente les unes des autres dans le bricolage de leurs identités alpino-urbaines. Il est intéressant de noter qu’aucune étude d’ensemble n’a été réalisée dans leurs vies réelles en plaine et leurs liens effectifs avec Anniviers. Dans l’attente, nous répétons tous les mêmes stéréotypes comme les liens super privilégiés des « aristocrates » de Muraz au village de Saint-Luc, ou encore la fierté particulière des Grimentzards de Villa au village de Grimentz. Tout cela mérite de sérieuses remises en question. Selon les cas individuels, nous les Anniviards d’en haut croyons reconnaître les types différents dans les Anniviards d’en bas : le supérieur, le donneur de leçons, le paternaliste, le vaniteux,
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le profiteur, le tout moderne urbanisé, le demeuré terrien et paysan… et il en reste beaucoup d’autres parmi nos amis parents ou inconnus. Ou encore les grands personnages et les « engagés » au service de la vallée. Dans cette étude, je n’ai aucune prétention d’établir une typologie générale. Je tente seulement d’approcher l’individu Roger Theytaz, son quartier sierrois de Villa et sa montagne d’Anniviers. Roger me paraît à la fois un type ordinaire des liens de Villa à la vallée et une personnalité hors norme ayant participé de façon exceptionnelle à l’invention moderne de l’anniviardité. Avec plusieurs autres, on peut dire qu’en pleine urbanisation, il a fait le Villa anniviard tout en inventant l’Anniviers de la tradition. Et ce double processus s’est inscrit en lui depuis son enfance. •
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Portrait de Roger Theytaz Par sa fille Evelyne Theytaz Ricciardi
Vous parler de mon papa, ce n’est pas chose facile, par où commencer ? Par Evelyne Theytaz Ricciardi
Peut-être bien par le début, le commencement. Papa est le fruit d’une union sacrée, celui de la plaine et de la montagne, de Granges et de Mission, de la tendre Eveline et du rude Edouard. Papa a toujours été très attaché aux anciens, à l’histoire de sa famille. Histoire bien commune en fin de compte mais qui a fait de lui ce qu’il est. Souvent il me racontait l’histoire de sa maman de Granges, partie en place dans des hôtels ou familles pour se retrouver même à Paris. Paris c’est très loin de sa ferme de la CrêteBlanche au milieu de la plaine de Granges isolée et adossée à la colline. Quel dépaysement pour cette jeune fille de passer du village à Zermatt, Genève ou Paris. Passer de la vie à la ferme à la splendeur des palaces de Caux. C’est peut-être ce qui a fait d’elle cette personne facile, discrète qui s’adapte aux lieux et aux conditions de vie.
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Eveline Theytaz née Germanier, mère de Roger
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Je n’ai pas connu mes grandsparents mais j’ai la chance, grâce à mon père, de connaître leur histoire et d’avoir pu les « apprendre » à travers lui. Il y a quelques années nous avons fait un voyage à Paris, chez des cousins et nous avons eu la chance de pouvoir aller en pèlerinage à Notre-Dame de Clignancourt, où ma grand-maman allait prier régulièrement lors de son séjour là-bas. Ce fut un moment d’une grande émotion, pour mon père d’abord, de se retrouver un peu en communion avec sa maman et pour moi de voir les larmes dans ses yeux. Se retrouver là 81 ans plus tard avec sa fille et sa petitefille, c’était quelque chose de puissant, pour lui comme pour nous.
Edouard Theytaz, père de Roger
Les grands-parents maternels de Roger Marguerite Théodoloz et Dominique Germanier
La famille de Dominique Germanier, grand-père de Roger, prise en 1917, avec au centre l’arrière- grand-père de Roger, Augustin Théodoloz Debout : Dominique / Eveline (14 ans) Devant : Hermann / Marguerite / Germaine / Augustin / Marcel / Lucie
La famille de Dominique et Marguerite au complet en 1926 Lucie / Germaine / Marguerite / Hermann / devant Marie-Anne / Dominique / Eveline / Marcel
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La plaine du Rhône en 1945 avec, entre le pont et le village, la ferme de Crête-Blanche adossée à la colline 82
La maison de Dominique et Marguerite Germanier 1924 La mère de Roger est en place à Champéry
1930 La mère de Roger travaille à Genève à L’Hospice du Prieuré, où elle est rejointe en 1931 par sa sœur Germaine
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Lucie (à gauche) et Eveline la mère de Roger (à droite) en 1930 sur le pont du Mont-Blanc à Genève
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La vie traditionnelle en Anniviers
Les lĂŠgendes dans le val d'Anniviers
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La nuit des Quatre Temps Avec le vieux tronc qui crache le feu, portrait de l'artiste Huile sur toile, 85 / 70 cm, 1981
Porte de l'enfer
Procession des vivants et des morts Le bien et le mal Sur la gauche le diable: portrait de l'artiste Huile sur toile, 160 / 100 cm, 1981
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Le monde des lĂŠgendes
Le monde des légendes Texte par Bernard Crettaz Fusains par Roger Theytaz
Dans son œuvre, Roger Theytaz a fait une place aux grandes légendes qui ont retenti dans sa vie depuis son enfance. On y trouve principalement les représentations fantasmatiques du glacier, mais également de vastes mises en œuvre de la porte de l’enfer ou de la nuit des Quatre-Temps où les âmes en peine reviennent de l’au-delà pour y accomplir leur procession. Dans le sillage de ses œuvres, nous avons accompli un travail commun, Roger Theytaz et moi-même, où j’ai choisi le texte de douze légendes que Roger a représentées au fusain. Dans ma perspective, et dans mes analyses, ces récits que l’on appelle « légendes » portent la trace de grands mythes ancestraux ou récits fondateurs. Dans plusieurs écrits, j’ai tenté de résumer ainsi le message de ces récits initiaux : nous sommes nés de la montagne, mais nos ancêtres venaient d’ailleurs, du Sud lointain. A notre origine, nous sommes des passeurs de cols. Venant d’autres mondes et d’autres cultures, les fondateurs trouvent dans les hauteurs d’Anniviers, une sorte de paradis. Dans ce bonheur premier, les vaches produisent un lait si abondant que les humains vivent
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dans la richesse, connaissant aussi les bienfaits de la vigne et des cultures céréalières. Un jour la catastrophe se produit et le malheur pénétre la vallée. Ce drame se passe ainsi : la richesse endurcit les cœurs et les premiers habitants de l’heureuse haute montagne deviennent avares et méchants. Lorsque le mendiant, passant à son tour le col, réclame un peu d’aumône, on la lui refuse. Alors la malédiction s’abat sur les humains. Les grandes altitudes se font inhospitalières, soumises aux glaciers menaçants, aux avalanches, aux torrents dévastateurs. Ailleurs des lacs alpins enfouissent dans leurs profondeurs menaçantes, de riches prairies verdoyantes. Les habitants sont condamnés à descendre dans la vallée, jusqu’en plaine, et ils sont soumis à une pérégrination continuelle de la ville à la montagne : dissociant le monde de la vache de celui de la vigne, produisant en haut dans les alpages, le lait pour la survie, et cultivant en bas, dans la région de Sierre, les vignes pour le vin de la fête. Depuis cette perte initiale, le mal habite les humains. La « remue » pratique du nomadisme, au-delà de ses exigences économiques, prend un sens symbolique éminent : c’est un pèlerinage de rachat vers une unité initiale, marcher le plus haut possible vers le paradis perdu, traverser cette vallée de larmes par la peine et la fête, pour que la mort donne accès plus haut encore, vers le paradis réel et invisible, dans l’énigme de l’au-delà.
Voici maintenant les textes originaux des légendes soumis à l’artiste : (Archives privées, Bernard Crettaz, Zinal)
Le bonheur premier Autrefois vivaient à l’Alpitetta un homme veuf avec sa fille unique. Il s’appelait Riborrey. Son occupation ordinaire était l’agriculture. Il possédait de nombreux troupeaux qu’il nourrissait dans les pâturages de l’alpe de ce nom. Alors, les temps étaient bien meilleurs et la terre plus prospère. Riborrey n’avait pas encore vu geler sa fontaine ni rester toute l’année un névé ou un reste d’avalanche. Il vivait du revenu du bétail. Il y demeurait toute l’année, les produits du sol suffisaient amplement à ses besoins. Il y cultivait avec succès des céréales et avait planté la vigne. Les récoltes étaient toujours abondantes et l’appartement s’emplissait bientôt de riches provisions. Le père et la fille vivaient heureux et tranquilles dans cette paisible situation. Ils ne correspondaient qu’avec le meunier de la Cota de Meya, où ils allaient cuire leur pain. Leurs mœurs étaient douces, simples et pures. • (Récit de l’ancien président d’Ayer, Joachim Peter, à la fin du 19e siècle)
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Du berceau au tombeau
VI. La grande expérience de l’école primaire
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L’entrée à l’école constitue un événement fondamental : c’est un rite de passage de la première enfance à la seconde enfance. L’école traditionnelle est tenue par un « régent ». Les écoliers sont divisés en trois divisions, les grands, les moyens, les petits. A cette époque, on accorde une importance capitale à la calligraphie où l’enfant doit écrire avec l’encre et le porte-plume. Son sac d’école est de fabrication maison. Dans le système nomade du val d’Anniviers, il y a une école au village et en plaine et le régent suit les écoliers. Pour le cas particulier de Zinal, il y a également une école durant l’hiver.
La grande expérience de l’école primaire Acrylique sur panneau, 1975
VII. Jeunes filles en fleurs Après la période scolaire, les jeunes filles suivent des cours d’école ménagère. Elles aident ensuite leurs parents aux tâches ménagères et aux travaux de la campagne. Certaines partent en ville : on dit alors qu’elles vont « en place », ce qui permet d’apporter un peu d’argent. Durant cette période, les jeunes filles sont en attente d’un mari qui provient le plus souvent de l’entourage parental ou villageois. D’autres, de même que les jeunes hommes, sont forcées
Jeunes filles en fleurs Acrylique sur panneau, 1975