Vivre à Koenigshoffen à l'époque romaine. Un quartier civil de Strasbourg-Argentorate

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La naissance de Koenigshoffen à l’ouest de Strasbourg est étroitement liée à l’implantation de l’armée romaine dans la ville dès le début du Ier siècle après J.-C. Le long de l’actuelle route des Romains (l’ancien decumanus) s’est développé, entre le Ier et le IVe siècle, un important habitat civil. Plusieurs grandes nécropoles − dont certaines ont livré de remarquables stèles funéraires de légionnaires, de vétérans et de cavaliers auxiliaires − étaient également établies aux sorties de cet axe central qui structure la topographie du vicus antique. La voirie, l’organisation de l’espace et des vastes quartiers d’habitation, l’implantation des activités artisanales (fours de potiers et de tuiliers) ont été précisées peu à peu grâce aux observations régulièrement effectuées depuis le milieu du XIXe siècle ; un sanctuaire du dieu oriental Mithra a également été exploré au début du XXe siècle par Robert Forrer. Ces découvertes initiales ont été largement complétées au cours des dernières décennies grâce aux fouilles archéologiques préventives réalisées sous l’égide du Service régional de l’Archéologie à l’occasion de grands travaux d’infrastructures et d’aménagements urbains. Celles récemment menées par Alsace Archéologie dans le cadre du projet « Porte des Romains » ont mis une nouvelle fois en lumière le riche patrimoine archéologique de ce secteur : stèles funéraires de légionnaires, fondations de mausolées en bordure de la voie antique, fragments sculptés de lions et de sphinges funéraires, ainsi que de nombreuses informations nouvelles sur l’urbanisme de ce secteur civil proche du camp légionnaire. Synthèse de ces découvertes, cet ouvrage propose un large bilan actualisé des connaissances sur le passé antique du vicus de Koenigshoffen et sur les relations entretenues avec le proche camp militaire d’Argentorate.

ISBN  9782351251539 | 32 €

Vivre à koenigshoffen à l’époque romaine

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Le temps des premières découvertes (du xvie au milieu du xixe siècle)

Ⅰ [1]  Fig. 1 : La construction d’une tombe à coffrages de tuiles par des légionnaires. Gravure de Weis publiée en frontispice du premier chapitre de J. A. Silbermann, Localgeschichte der Stadt Strassburg, 1775. [2]  Fig. 2 : Tombe à tuiles d’après J.-D. Schœpflin. Dessin à la plume rehaussé d’aquarelle (doc. Musée archéologique de Strasbourg ; don M. et Mme Schang). [3]  Fig. 3 : La tombe de Licinius lors de sa découverte en 1568. Gravure de Weis, d’après J. A. Silbermann, op. cit., 1775, p. 39. [4]  Fig. 4: J. A. Silbermann, Localgeschichte der Stadt Strassburg: Die Befestigungen der Stadt. Plan XVI, II : Die Gegend des WeissenthurmThors (en l : chapelle Saint-Michel ; en m : couvent Sainte-Marguerite ; en n : église Sainte-Aurélie ; r : Weissenthurm-Thor). Ce plan indique les principaux sites où ont été retrouvées des sépultures antiques lors de travaux de fortification. [5]  Fig. 5 : Stèle funéraire du légionnaire Lucius Autronius (photo M. Bertola, Musées de la Ville de Strasbourg).

Le passé antique de Koenigshoffen resurgit pour la première fois à l’occasion des vastes travaux de fortification entrepris par la Ville de Strasbourg sous la conduite de l’architecte Daniel Specklin dans la seconde moitié du xvie siècle. Contrairement à Strasbourg, où des vestiges de l’enceinte du camp légionnaire étaient encore visibles dans la ville, l’histoire du faubourg ouest et des canabae avait disparu quasi entièrement de la mémoire collective et les premières découvertes vont fasciner historiens et amateurs d’antiquités [1].

pleines de cendres, deux têtes sculptées en pierre, deux patères en terre rouge, deux vases en pierre pleins d’une eau limpide et au-dessus de laquelle surnageait une espèce d’huile, et enfin deux lampes en argile. Au sarcophage était jointe une tablette en partie brisée sur laquelle était tracée l’inscription suivante que j’emprunte aux manuscrits du célèbre De Klinglin, conseiller d’État et prêteur royal de la ville de Strasbourg : « L. LICINIUS L. F./ CLAUD. MAXIM/ US. AEQUO/ F. C.V » [3].

Travaux de fortifications et premières découvertes (xvie-xviie siècle)

Le temps des collectionneurs (fin du xviiie siècle – première moitié xixe siècle)

La première mention de trouvailles antiques est faite en 1568 : Daniel Specklin relate dans sa chronique1 la découverte de plus d’une centaine d’urnes cinéraires et d’une vingtaine de sarcophages en pierre lors du nivellement du terrain « hors la porte Blanche, vers SaintGall ». Leur description est reprise par Jean-Daniel Schœpflin et Jean-André Silbermann dans les ouvrages qu’ils consacrent l’un à l’histoire de l’Alsace, l’autre à celle de Strasbourg2. L’importance en nombre et en qualité de ces premières découvertes a permis d’en préserver le souvenir, mais elles ne constituent probablement qu’une faible partie des sépultures détruites par les travaux de terrassement lors de la construction des fortifications urbaines qui éventrent des pans entiers de la nécropole antique ; seules les découvertes les plus impressionnantes ont été consignées. De nouvelles mentions apparaissent pour le même secteur, jalonnant les années 1603, 1604, 1609, 1627, 1634, 1671 et 1674. Une tombe à coffrage de tuiles avec estampilles de la VIIIe légion est mise au jour en 1603 près de l’Achträdermühle. Ce type de « sépulcres » semble avoir tout particulièrement frappé les esprits et plusieurs gravures nous en restituent l’aspect, associant une vue générale de la tombe et les objets qu’elle renfermait [2]. Des sarcophages en plomb sont mis au jour en 1604 devant la Porte blanche. En 1663, lors de la construction d’un bastion entre l’hôpital et la tour Sainte-Élisabeth, apparaît une stèle portant le nom de L. LICINIUS MAXIMUS qui fait l’objet de diverses exégèses – parfois quelque peu fantaisistes – par les historiens régionaux : « Le plus remarquable de ces sarcophages est celui de Licinius ; il contenait deux urnes

La collection de Jean-Daniel Schœpflin La démolition de l’ancienne chapelle Saint-Michel et les travaux de nivellement du Michelsbühl en 1767 amènent la découverte de nouveaux et abondants vestiges : verreries, céramiques, lampes, monnaies, tuiles estampillées au chiffre de la VIIIe légion Auguste, ainsi que la stèle funéraire, « brisée par la maladresse des ouvriers », du légionnaire Titus Flavius Peregrinus, originaire de Milan et qui s’est engagé dans la VIIIe légion Auguste. Celle-ci a été donnée par les religieuses de Sainte-Barbe à l’archéologue Jean-Daniel Schœpflin dont la collection d’antiquités est alors célèbre dans l’Europe entière3. Elle comprenait, outre des antiquités régionales, des œuvres égyptiennes, grecques, romaines acquises au fil de ses voyages ou offertes par ses nombreux élèves et admirateurs. Cette remarquable collection sera vendue en « viager » à la Ville de Strasbourg le 27 mai 1765 ; à la mort de Schœpflin, en 1771, elle rejoint les autres collections municipales dans le chœur de l’ancienne église des Dominicains, ce qui va la condamner à périr un siècle plus tard, dans la nuit du 24 août 1870, lors du bombardement de Strasbourg. L’intérêt des descriptions parvenues jusqu’à nous à travers les écrits des premiers « antiquaires » est d’autant plus grand que ceux-ci sont souvent témoins oculaires des découvertes qu’ils relatent. Tel est le cas de JeanJacques Oberlin ou de Jean André Silbermann [4], qui fournit, par exemple, des détails sur la présence d’un verre fondu dans une urne à crémation, ou encore sur la marque du potier Strobili sur une lampe à huile.

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De nouvelles collections naissent au début Bernadette Schnitzler


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[8]  Fig. 8 : StrasbourgKoenigshoffen, route des Romains : coupes stratigraphiques relevées par F. A. Schaeffer lors de travaux dans l’enceinte de la brasserie Prieur (inv. MAS 22194-22198). (crédit ?) [9]  Fig. 9 : Coupure de presse du 26 mars 1936 sur les découvertes faites au 5763, route des Romains (inv. MAS 40264) (crédit ?) [10]  Fig. 10 : StrasbourgKoenigshoffen, 88, rue des Capucins : photo et plan de localisation de la sépulture, placée dans un grand récipient circulaire (inv. MAS 39405) (crédit ?).

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La naissance de Koenigshoffen à l’ouest de Strasbourg est étroitement liée à l’implantation de l’armée romaine dans la ville dès le début du Ier siècle après J.-C. Le long de l’actuelle route des Romains (l’ancien decumanus) s’est développé, entre le Ier et le IVe siècle, un important habitat civil. Plusieurs grandes nécropoles − dont certaines ont livré de remarquables stèles funéraires de légionnaires, de vétérans et de cavaliers auxiliaires − étaient également établies aux sorties de cet axe central qui structure la topographie du vicus antique. La voirie, l’organisation de l’espace et des vastes quartiers d’habitation, l’implantation des activités artisanales (fours de potiers et de tuiliers) ont été précisées peu à peu grâce aux observations régulièrement effectuées depuis le milieu du XIXe siècle ; un sanctuaire du dieu oriental Mithra a également été exploré au début du XXe siècle par Robert Forrer. Ces découvertes initiales ont été largement complétées au cours des dernières décennies grâce aux fouilles archéologiques préventives réalisées sous l’égide du Service régional de l’Archéologie à l’occasion de grands travaux d’infrastructures et d’aménagements urbains. Celles récemment menées par Alsace Archéologie dans le cadre du projet « Porte des Romains » ont mis une nouvelle fois en lumière le riche patrimoine archéologique de ce secteur : stèles funéraires de légionnaires, fondations de mausolées en bordure de la voie antique, fragments sculptés de lions et de sphinges funéraires, ainsi que de nombreuses informations nouvelles sur l’urbanisme de ce secteur civil proche du camp légionnaire. Synthèse de ces découvertes, cet ouvrage propose un large bilan actualisé des connaissances sur le passé antique du vicus de Koenigshoffen et sur les relations entretenues avec le proche camp militaire d’Argentorate.

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Vivre à koenigshoffen à l’époque romaine

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