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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé - N°10 - NOVEMBRE 2008 DOSSIERS : INFÉCONDITÉ DES RUMINANTS - PORCS : AFFECTIONS BACTÉRIENNES CUTANÉES

N°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 revue de formation à comité de lecture indexée dans les bases de données : • Index Veterinarius (CAB International)

• Veterinary Bulletin (CAB International)

• CAB Abstracts Database

Actualités en perspective - F.C.O. : le fracas européen

Ruminants - La génétique : un outil pour améliorer la fertilité ? - Approche collective d'un trouble de la reproduction en élevage bovin - Comment utiliser les programme de synchronisation de la reproduction chez les vaches laitières : en France et en Amérique du Nord - Méthode d’analyse globale des performances en reproduction chez un troupeau laitier - Exemple d’application d’un cas d’infécondité en elevage bovin laitier

DOSSIERS :

L’INFÉCONDITÉ DES RUMINANTS abord du troupeau AFFECTIONS BACTÉRIENNES CUTANÉES des porcins

FMCvét

formation médicale continue vétérinaire

- Comprendre l’épidémiologie 2e série 3. L’interprétation des résultats d’analyses pour un groupe de sujets

- Étude de cas - Neuropathologie du jeune veau dans des cheptels infectés F.C.O

- Revue de presse internationale - Tests de formation continue et d’épidémiologie

- Synthèse - Intérêts et limites de l’induction de l’ovulation par la GnRH pour une insémination programmée

- Origine alimentaire des troubles de la reproduction et moyens de maîtrise en élevage allaitant - Économie - Comment chiffrer la performance de fécondité d’un troupeau laitier - Observation clinique L’anœstrus post-partum est-il physiologique ou pathologique ?

Porcs - Diagnostic des affections bactériennes cutanées des porcins

Comprendre et agir - Enjeux économiques Lait : une année mouvementée - Management de l’entreprise vétérinaire - La reproduction : toujours une priorité pour l’offre de services des vétérinaires


revue de formation à comité de lecture indexée dans les bases de données :

sommaire

• Index Veterinarius (CAB International)

N°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

• Veterinary Bulletin (CAB International)

DOSSIERS

• CAB Abstracts Database

- L’INFÉCONDITÉ

Éditorial par Gilles de Crémoux 7 Test clinique - Une affection ulcéreuse et contagieuse du trayon dans trois exploitations laitières Henri Gesché, Nadia Amenna, Jean-Marie Gourreau 4

DES RUMINANTS : abord du troupeau

ACTUALITÉS EN PERSPECTIVE - Fièvre catarrhale ovine : le fracas européen Zénon

6

- Diagnostic

RUMINANTS Dossier Infécondité : l’abord du troupeau - La génétique : un outil pour améliorer la fertilité ? Pascale Le Mézec, Anne Barbat-Leterrier, Pierre Paccard - Approche collective d'un trouble de la reproduction en élevage bovin Nicole Picard-Hagen, Didier Raboisson, Xavier Nouvel, Fabien Corbière, Xavier Berthelot - Comment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction en France chez les vaches laitières Nicole Picard-Hagen, Mathieu Saint-Blancat, Claire Ponsart, Marc Ennuyer, Jérôme Defachelles, Luc DesCôteaux - Comment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction en Amérique du Nord chez les vaches laitières Luc DesCôteaux, Pascale Aubry, Émile Bouchard, Nicole Picard-Hagen - Méthode d’analyse globale des performances en reproduction chez un troupeau laitier Luc DesCôteaux, Pascale Aubry - Un exemple d’application à un cas d’infécondité en élevage bovin Nicole Picard-Hagen, Didier Raboisson, Xavier Nouvel, Fabien Corbière, Xavier Berthelot - Nutrition - Origine alimentaire des troubles de la reproduction et moyens de maîtrise en élevage allaitant Francis Enjalbert - Économie - Comment chiffrer la performance de fécondité d’un troupeau laitier Henri Seegers - Observation clinique - L’anœstrus post-partum est-il physiologique ou pathologique ? La preuve par l’absurde Gilles de Crémoux

des affections bactériennes cutanées chez les porcins

8 14

21

26 32 37 41 46 51

PORCS - Diagnostic des affections bactériennes cutanées des porcins Jean-Marie Gourreau

55

COMPRENDRE ET AGIR - Enjeux économiques - Lait : une année mouvementée Anne Richard - Management de l’entreprise vétérinaire - La reproduction : toujours une priorité pour l’offre de services des vétérinaires Philippe Baralon

61 64

FMCvét - formation médicale continue vétérinaire Comprendre l’épidémiologie 3. L’interprétation des résultats d’analyse pour un groupe de sujets Bernard Toma - Étude de cas - Neuropathologie du jeune veau dans des cheptels infectés F.C.O. : étude dans six exploitations de l’Yonne Adrien Bernard, Caroline Lacroux, Hélène Benoit-Valiergue, Isabelle Leroy - Synthèse - Intérêts et limites de l’induction de l’ovulation par la GnRH pour une insémination programmée Nicole Picard-Hagen - Revue de presse internationale - Rubrique dirigée par François Schelcher et Henri Seegers. Notre sélection d’articles par Sébastien Assié, Cécile Enault, Marie-Anne Lefol, Marie Martorello, Didier Raboisson, Lucie Trencart - Test clinique - Les réponses - Tests de formation continue et d’épidémiologie - Les réponses

Souscription d’abonnement en page 83 68

ACTUALITÉS 72

RUMINANTS 80

PORCS-VOLAILLES COMPRENDRE ET AGIR

84 88 90

FMC Vét

Observations originales

3

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 359


test clinique

NÉVA Europarc - 15, rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 Courriel neva@neva.fr

Conseil scientifique

une affection ulcéreuse

Jean-Pierre Alzieu (praticien), Xavier Berthelot (E.N.V.T) Didier Calavas (A.F.S.SA.), Gérard Desjouis (praticien) Philippe Dorchies (E.N.V.T.), Marc Gogny (E.N.V.N.) Arlette Laval (E.N.V.N.), Marc Savey (A.F.S.S.A.) François Schelcher (E.N.V.T.), Henri Seegers (E.N.V.N.) Bernard Toma (E.N.V.A.), Pierre-Louis Toutain (E.N.V.T.)

et contagieuse du trayon dans trois exploitations laitières

Rédacteurs en chef Sébastien Assié (E.N.V.N.) Nicole Picard-Hagen (E.N.V.T.)

Comité de rédaction Marie-Anne Arcangioli (Pathologie des ruminants, E.N.V.L.) Philippe Baralon (Management de l’entreprise, Phylum) François Baudeau (Gestion de la santé animale, E.N.V.N.) Nathalie Bareille (Gestion de la santé animale, E.N.V.N.) Catherine Belloc (Médecine des animaux d’élevage, E.N.V.N.) Florence Buronfosse (Toxicologie, E.N.V.L.) Alain Chauvin (Parasitologie, E.N.V.N.) Alain Douart (Pathologie des ruminants, E.N.V.N.) Francis Enjalbert (Nutrition, E.N.V.T.) Gilles Foucras (Pathologie des ruminants, E.N.V.T.) Norbert Giraud (praticien) Jean-Marie Gourreau (A.F.S.SA. Alfort) Jean-Luc Guérin (Élevages avicoles et porcins, E.N.V.T.) Jacques Guillot (Parasitologie - mycologie, E.N.V.A.) Hervé Hoste (Parasitologie, E.N.V.T.) Philippe Jacquiet (Parasitologie, E.N.V.T.) Guy-Pierre Martineau (Élevages porcins, E.N.V.T.) Gilles Meyer (Pathologie des ruminants, E.N.V.T.) Yves Milleman ((Pathologie des ruminants, E.N.V.A.) Pierre Philippe (praticien) Didier Raboisson (Pathologie des ruminants, E.N.V.T.) Frédéric Rollin (Liège) Jean-Louis Roque (praticien) Pascal Sanders (A.F.S.SA. Fougères) Pierre Sans (Économie, E.N.V.T.) Stephan Zientara (E.N.V.A.) Gestion des abonnements et comptabilité : Marie Servent Publicité : Maryvonne Barbaray NÉVA - Europarc - 15, rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 Courriel neva@neva.fr

Directeur de la publication Maryvonne Barbaray Revue bimestrielle éditée par LES NOUVELLES ÉDITIONS VÉTÉRINAIRES ET ALIMENTAIRES - NÉVA Prix de vente au N° : 37€, U.E. :38€ Tarifs d’abonnement : voir p. 83 S.A.R.L. au capital de 7622€ Siège social : Europarc 15, rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX C.P.P.A.P 0508 T 88300 I.S.S.N. 1777-7232 Impression : Imprimerie Nouvelle Normandie Avenue des lions Ste-Marie des Champs B.P. 14 - 76191 YVETOT Cedex

Toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, de la présente publication sans autorisation est illicite et constitue une contrefaçon. Aux termes de l’article 40 de la loi du 11 mars 1957 “toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayant droit ou ayant cause est illicite”. L’article 41 de la même loi n’autorise que les “copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destiné à une utilisation collective, sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la source”. Le non respect de la législation en vigueur constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et 429 du Code pénal. LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 360 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

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Henry Gesché1 Nadia Amenna2 Jean-Marie Gourreau3

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n novembre, un éleveur de 70 bovins laitiers (de races Prim’Holstein et Normande) de Mayenne constate l’apparition brutale de lésions ulcéreuses sur les trayons de deux animaux normands de son troupeau : il s’agit d’ulcères superficiels probablement consécutifs à la rupture de vésicules (photos 1, 2). L’anamnèse permet de préciser que ces lésions, très douloureuses, localisées au corps de un à trois trayons selon l’animal, entraînent des difficultés de traite et une diminution de la production laitière. Elles s’étendent assez rapidement pour atteindre de 10 à 30 p. cent de la surface des trayons. Lorsque le vétérinaire traitant intervient une semaine plus tard, l’affection s’est étendue à huit vaches du troupeau en lactation. La visite de l’exploitation effectuée, à ce moment, révèle la présence d’ulcères de taille impressionnante à différents stades, certains d’entre eux englobent la quasi-totalité du trayon (photo 3). ● Les deux premiers animaux atteints voient leurs lésions cicatriser lentement. ● À l’examen clinique des vaches les plus atteintes, le trayon entier est tuméfié, la peau est de couleur bleue et laisse exsuder une sérosité ambrée. Peu à peu, elle se détache, laissant un large ulcère superficiel à vif. Dans les cas les moins graves, des plaques circulai-

1Clinique

vétérinaire Route de Couterne 53110 Lassay-les-châteaux 2L.D.A. 22 5-7 rue du sabot, BP 54 22440 Ploufragan 3A.F.S.S.A. 23, Avenue du Général De Gaulle 94706 Maisons-Alfort

1

Ulcère superficiel sur un trayon (extrémité distale) (photo H. Gesché).

res de 0,5 à 2 cm de diamètre, de couleur rouge foncé à bleu qui se transforment en ulcères plats sont observées (photo 6). Une croûte a tendance à se former, enlevée par la machine à traire. Les lésions bénignes guérissent en une dizaine de jours (photos 3, 4).

comité de lecture Laurent Alves de Oliveira, Thierry Baron, Jean-Jacques Bénet, Maud Belliard, Dominique Bergonier, Pierre Bézille, Henri-Jean Boulouis, Cyril Boissieu, Alain Bousquet-Melou, Gilles Bourdoiseau, Régis Braque, Christophe Chartier, Sylvie Chastant-Maillard, Jean-Luc Chatré,

René Chermette, Eric Collin, Fabien Corbières, Stéphane Daval, Jean-Claude Desfontis, André Desmecht (Liège), Alain Ducos, Barbara Dufour, Pascal Dubreuil (Québec) Gilles Fecteau (Québec) Cécile Ferrouillet (U.S.A.), Christine Fourichon, Bruno Garin-Bastuji, Olivier Gauthier, Norbert Gauthier,

Christian Gipoulou, Denis Grancher, Raphaël Guatteo, Nadia Haddad, Christophe Hugnet, Jean-François Jamet, Alain Joly, Martine Kammerer, Caroline Lacroux, Dominique Legrand, Xavier Malher, Jacques Manière, Hervé Morvan, Hervé Navetat, Jean-Marie Nicol,

Philippe Le Page, Bertrand Losson (Liège), Renaud Maillard, Hervé Pouliquen, Xavier Pineau, Jean-Dominique Puyt, Paul-Pierre Pastoret, Nicolas Roch, François Roumegous, Adrian Steiner (Suisse), Étienne Thiry (Liège), Olivier Salat, Brigitte Siliart, Henri Viel, Lionel Zenner.


test clinique - une affection ulcéreuse et contagieuse du trayon

2

Ulcère superficiel sur un trayon (extrémité distale et corps).

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Lésion ulcéreuse du trayon en voie de guérison.

7

6

Ulcération limitée n’affectant que la mamelle.

Ulcération de la peau de la mamelle et de la base du trayon.

Trayon tuméfié et ulcère plat.

L’examen de la totalité des vaches a révélé que, sur deux d’entre elles, parmi les plus récemment vêlées (2 ou 3 semaines) et en début de 2nde lactation, l’affection atteint la peau de la mamelle située au-dessus du trayon atteint (photo 5), et n’affecte même parfois que celle-ci (photo 7). ● Sur quelques uns d’entre eux, des lésions circulaires plus petites, plus ou moins croûteuses et bien délimitées évoquant une paravaccine, (pseudo cow pox) sont remarquées (photo 8). ● Sur la totalité de ces vaches, ni hyperthermie, ni abattement, ni perte d’appétit ne sont notés. Aucun autre signe clinique ou lésion (en particulier des lésions buccales ou podales) n’est décelable. L’éleveur n’a constaté qu’une baisse de production laitière modérée sur les animaux atteints les 1res semaines. Au total, une trentaine de vaches ont été atteintes avec des signes plus ou moins sévères ; de nombreuses mammites se sont déclarées alors entraînant une chute de production. ● Le troupeau est en bon état général, sans antécédents, ni introduction de nouveaux animaux d’élevage dans le cheptel depuis des années. Les animaux sont élevés en stabulation libre et nourris avec une ration à base d’ensilage de maïs.

Les introductions annuelles concernent des bovins d’engraissement destinés à la production de taurillons de boucherie. Ces animaux peuvent occasionnellement entrer en contact avec les génisses d’élevage. ● Des lésions similaires sont apparues 3 semaines avant sur les trayons et les quartiers d’une laitière Prim’holstein de 2 ans, en début de 1re lactation, dans un troupeau d’une quarantaine de vaches élevées à 3 km environ de la 1re exploitation. Un seul animal a été atteint et a guéri rapidement ; des investigations n’ont donc pas été menées. ● Par ailleurs, 4 jours après avoir effectué les biopsies sur les animaux, le même type de lésions apparaît sur les quartiers et les trayons de deux vaches récemment vêlées d’une 3e exploitation de 75 vaches laitières de race Prim’holstein.

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3

Ulcère étendu sur la quasi totalité du trayon.

8

Petites lésions circulaires de paravaccine (photos H. Gesché).

1 Quelle est votre suspicion diagnostique ? 2 Comment la confirmer ? 3 Existe-t-il une relation entre les trois foyers et, dans l’affirmative, comment l’expliquez-vous ? Réponses à ce test page 88

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 361


actualités en perspective

fièvre catarrhale ovine le fracas1 européen La situation en matière de Fièvre catarrhale ovine (F.C.O.) n’a cessé de s’aggraver en Europe durant l’été et l’automne 20082.

NOTES 1 Fracas : rupture ou fracture violente et bruyante (Littré). 2 cf. la chronique “Fièvre catarrhale ovine” et pénurie alimentaire mondiale. “Un double choc européen” dans LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé, 2008,8,187-88. 3 cf. la chronique “Productions animales et épizooties en Europe : 2007 une rupture sans précédent, 2008, une année pivot ?” dans le NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé, 2008,7,94-95. 4 cf. l’article “Etude des cas : neuropathologie du jeune veau dans les cheptels infectés F.C.O. : étude dans six exploitations de l’Yonne” par A. Bernard, C. Lacroux, H. Benoît-Valiergue, I. Leroy dans ce numéro P. 428-435. 5 cf. chronique “La bluetongue dans le nord de la France. Beaucoup de questions restent sans réponse” dans LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé, 2006,3,194-195

A

la mi-novembre, on dénombrait en France plus de 23 000 cas de F.C.O. à B.T.V8 et plus de 3500 cas de F.C.O.à BTV1. Notre pays voit même apparaître dans le sud-ouest plus de 70 foyers mixtes à B.T.V1 et B.T.V8. Cette dernière situation paraît aussi exister dans le nord de l’Espagne sans que l’on puisse mieux l’expliquer qu’en France. ● Ces constatations démontrent que les campagnes de vaccination entreprises, qu’elles aient été obligatoire pour le B.T.V1 ou “libre” pour le B.T.V8, n’ont pu influer significativement l’irrésistible évolution de l’épizootie dans notre pays. Nature de la maladie, pénurie de vaccin, stratégie inadaptée se sont conjuguées pour expliquer cet échec. A cette aune, on peut mesurer le caractère “décalé” des querelles francofrançaises du printemps dernier qui n’ont probablement pas stimulé l’indispensable mobilisation qui aurait dû avoir lieu autour d’une épizootie trop longtemps sous-estimée par les autorités nationales et européennes3. ● Au cours de l’été 2008, deux publications [1, 2] ont souligné la biologie très originale du sérotype B.T.V8 sévissant en Europe du nord. En effet, celui-ci est capable d’atteindre par voie transplacentaire le fœtus d’une mère infectée. En fonction de la date d’infection du fœtus au cours de son développement in utero, celui-ci peut devenir immunotolérant au B.T.V8 ou développer une atteinte du système nerveux central (hydranencéphalie), dans un schéma pathogénique assez comparable à celui connu pour les pestivirus (où l’atteinte du système nerveux central est limité le plus souvent à une hypoplasie cérébelleuse). ● Ces effets tératogènes ont été bien caractérisés en Belgique [1], l’article de A. Bernard et coll., dans ce numéro4, les identifient pour la première fois en France. ● Les auteurs belges [1] rappellent que seules des souches de B.T.V. préalablement adaptées en laboratoire sont capables de provoquer, à la différence des souches sauvages, des effets tératogènes. C’est ce que

Références 1. Desmecht D et coll. Evidence for transplacental transmission of the current wild type strain of bluetongue virus serotype 8 in cattle. Vet. Rec., 2008,163(2),50-52. 2. Menzies FD et coll. Evidence for transplacental and contact transmission of bluetongue virus in cattle. Vet. rec.,2008,163(7),203-09. 3. Promed 2008.10.28 3410 Bluetongue-Europe (66) –Netherlands, BTV6 vaccine strain suspected.

ACTUALITÉS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 362 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

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montrent les résultats expérimentaux ou ceux obtenus dans les pays (USA et Afrique du sud) employant des souches vaccinales atténuées. Ces auteurs en déduisent que la souche de B.T.V8 sévissant en Europe du nord depuis 2006 est différente des souches sauvages identifiées jusque là. ● Le comportement tout à fait original du B.T.V8, maintenant prouvé en terme pathogénique, ne peut que renforcer les interrogations sur son origine [2], notamment vaccinale (vaccin vivant atténué). L’émergence d’un nouveau sérotype le B.T.V6, fin octobre 2008 en Hollande et en Allemagne, a réactivé les interrogations sur cette origine, comptetenu de la très grande proximité, décrite par le laboratoire communautaire de référence, de la souche BTV6 isolée en Europe et d’une souche vaccinale sud-africaine [3]. Si leur identité venait à être confirmée, il resterait à savoir comment la souche vaccinale B.T.V6 est arrivée en Europe continentale où les vaccins vivants atténués ont toujours été officiellement interdits ; aucune information de ce type n’est, jusqu’à présent, disponible pour le B.T.V8. ● Au total, en moins de 10 ans, l’Union européenne aura vu émerger et se pérenniser la plus grande épizootie depuis celles de la fièvre aphteuse des années 50 et l’I.B.R. des années 70, sans pouvoir la maîtriser. Sept des 24 sérotypes de Bluetongue identifiés dans le monde sont maintenant présent sur son territoire. On ne peut que constater sa faillite dans la maîtrise d’une maladie animale dont le statut non zoonotique n’a sans doute pas permis d’en mesurer l’importance réelle aussi bien sanitaire que commerciale. ● Fin septembre 2008, 17 pays de l’UE (tous les pays touchés sauf la France, le Danemark et le Royaume-Uni) sont intervenus au Conseil de l’Union Européenne pour déclarer que “la F.C.O.est devenue ces dernières années une des plus grandes menaces pour le bétail européen avec une épidémiologie atypique et imprévisible” et pour affirmer : - qu’ils étaient “favorables à une approche harmonisée européenne dans le but d’éradiquer l’épizootie et basée sur une vaccination à grande échelle” ; - qu’ils invitaient “la Commission européenne à en assurer la coordination et à l’encourager par un financement adéquat”. Puissent-ils être entendus ! ❒


éditorial Un dossier pour résoudre les problèmes d’infécondité dans les troupeaux que nous sommes amenés à rencontrer sur le terrain ...

D

ans le cadre de nos suivis de reproduction, nous sommes tous confrontés un jour ou l’autre à un problème d’infécondité au niveau collectif, que ce soit le motif initial de la mise en place du suivi ou, plus grave, au cours d’un suivi établi. À nous, alors, l’obligation d’apporter une solution à ce problème souvent d’origine multifactorielle … Une approche collective est donc préconisée comme le montre l’article introductif de ce dossier spécial sur l’infécondté : abord du troupeau* de N. Hagen et coll. L’infécondité d’origine infectieuse est le fantasme de l’éleveur et de l’inséminateur, le rêve du vétérinaire ! Quatre ou cinq prises de sang, l’entité pathologique responsable est trouvée (bienveillantes et ubiquistes chlamydies et coxielles), un plan de prophylaxie est instauré et la conduite d’élevage blanchie. Nul besoin de se remettre en question : même en cas d’insuccès, la faute reste aux agents incriminés. Malheureusement, les cas d’infertilité de troupeau liés à une origine infectieuse sont loin d’être majoritaires même s’il nous est interdit de passer à côté (cf. l’article de X. Berthelot dans le prochain numéro). L’infécondité est donc le plus souvent liée à la conduite du troupeau : la main d’œuvre dans les exploitations diminue, le temps consacré à la surveillance des animaux aussi. Les vaches laitières expriment de moins en moins les chaleurs à fortiori lorsque les sols des bâtiments sont inadaptés et glissants. De plus, la génétique n’a pas toujours été un facteur d’amélioration de la fécondité, loin s’en faut, notamment en Prim’hostein (cf. “La génétique, un outil pour améliorer la fécondité” de P. Le Mézenc et coll). S’il est possible de remédier à une carence du bâtiment, il est difficile de revenir sur l’évolution des ressources humaines dans les élevages : peut-être nous faudra-t-il donc suivre les exemples des conduites zootechniques nord-américaines et réfléchir à des protocoles thérapeutiques permettant de s’affranchir de la détection des chaleurs. C’est pourquoi, ce dossier présente une “Méthode d’analyse globale des performances en reproduction dans un troupeau laitier” (L. DesCôteaux, P. Aubry) et montre comment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction en France chez les vaches laitières (N. Hagen, M. Saint-Blancat, C. Ponsart, M. Ennuyer, J. Defachelles) et les compare avec les données nord-américaines (L. DesCôteaux, P. Aubry. E. Bouchard). Un exemple d’application à un cas d’infécondité en élevage bovin est proposé (N. Hagen et coll). L’infécondité d’origine alimentaire est bien sûr la cause la plus répandue des problèmes de fertilité, que ce soit en atelier bovin laitier ou allaitant. C’est aussi la cause la moins facile à faire admettre à l’éleveur : si certains outils (taux protéiques, taux butyreux, hydroxybutyrate, suivi de l’état corporel) permettent aujourd’hui de valider et de conforter nos hypothèses, nous ne sommes pas perçus (parfois à juste titre) comme des interlocuteurs valables en matière d’alimentation. De plus, les modifications de ration, voire de distribution, peuvent entraîner un surcroît de travail ou d’investissement à l’éleveur, soit une remise en cause de ses pratiques qu’il n’est pas toujours prêt à accepter (F. Enjalbert). Une observation clinique illustre un problème pratique fréquent : l’anœstrus post-partum (G. de Crémoux). Les performances économiques des cheptels bovins sont étroitement corrélées aux performances de reproduction. C’est particulièrement vrai en troupeau allaitant où le revenu est directement lié au nombre de veaux produits mais cela l’est aussi en élevage laitier (“Signification économique de la performance de la fécondité d’un troupeau laitier” de H. Seegers). De plus, pour le vétérinaire, une bonne fécondité se traduit, sur le plan pratique, par un nombre d’actes limité, ce qui ne peut qu’encourager les suivis de reproduction rémunérés au forfait par vache. e numéro du NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé devrait vous aider à résoudre les problèmes d’infécondité que vous serez amenés à rencontrer sur le terrain. Et même si l’éleveur ne souhaite pas se remettre en cause, vous verrez : à force de lui répéter tous les mois la même chose lors des suivis, petit à petit, l’évolution se produit et l’amélioration suit ... Bonne lecture ! ❒

Gilles de Crémoux Clinique Vétérinaire du Cérou 1 ter, avenue Albert Thomas 81400 Carmaux

NOTE *

Ce dossier complète ainsi LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé, N°8 (avril 2008) consacré à l’infécondité des ruminants : abord individuel.

C

7

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 363


la génétique : un outil Pascale Le Mézec1 Anne Barbat-Leterrier2 Pierre Paccard1

pour améliorer la fertilité ?

1Institut

de l’Élevage 149, rue de Bercy 75595 Paris cedex 12

La fertilité des vaches des trois principales races laitières s’est dégradée depuis une dizaine d’années, pour des raisons diverses et difficiles à dissocier. Les performances de reproduction semblent maintenant se stabiliser, en même temps que le niveau génétique de fertilité des femelles. Est-ce durable ?

2Inra-SGQA Domaine de Vilvert 78352 Jouy-en-Josas

Objectifs pédagogiques ❚ Dresser le bilan de l’évolution des paramètres de la reproduction en races bovines laitières depuis 10 ans. ❚ Évaluer la part de la génétique dans la dégradation de la fertilité.

L

a reproduction est une préoccupation constante des éleveurs laitiers, en raison de son impact sur la conduite du troupeau, sur l'organisation du travail, et des conséquences économiques : les résultats sont en effet inférieurs aux objectifs fixés. ● La performance globale de reproduction résulte de plusieurs composantes (dont la reprise de cyclicité après le vêlage, le délai de mise à la reproduction, la réussite aux inséminations, …) et dépend de nombreux éléments qui interagissent. ● Les paramètres génétiques de la fertilité la désignent comme un caractère dont l’évaluation est plutôt difficile en raison de sa faible héritabilité (les différences génétiques sont masquées par de nombreux facteurs non génétiques), et dont la sélection s’oppose à celle de la production laitière (tableau 1). Mais la variabilité génétique importante permet des possibilités d’amélioration (ou de dégradation, …). ● L’I.N.R.A. propose une méthode d’évaluation génétique des animaux (ou indexation*) fondée sur le résultat final des inséminations en termes de vêlage [1]. Celle-ci tient compte, le mieux possible, des effets de milieu identifiés. Le caractère étudié est ainsi le “taux de réussite des inséminations”*.

NOTE * cf. l’encadré Définitions.

Essentiel ❚ Le taux de réussite des inséminations artificielles pour les vaches Prim’holstein a baissé de plus de 5 p. cent entre 1999 et 2004. ❚ Les mises à la reproduction trop précoces (moins de 50 jours après le vêlage) sont minoritaires, les tardives (plus de 110 jours) deviennent plus nombreuses en Prim’holstein.

1

La sélection génétique sur la production laitière a entraîné une dégradation de la fertilité (photo E.N.V.T.).

À partir des résultats issus de ces indexations, des travaux récents ont permis de porter un regard sur l’évolution passée des paramètres de la reproduction et de leur composante génétique en élevage laitier [2]. UN BILAN SUR 37 MILLIONS D’INSÉMINATIONS RÉALISÉES EN 10 ANS L’identité, la généalogie, les performances contrôlées et les événements survenant dans la vie des bovins (mouvements de cheptel, inséminations, …) sont enregistrés dans le Système National d’Information Génétique (S.N.I.G.). Celui-ci constitue une vaste base de données utilisée pour la traçabilité des animaux et les évaluations génétiques. ● Le bilan de la fertilité des trois principales races laitières en France (Montbéliarde, Normande, Prim’holstein) s’appuie sur ces informations et concerne plus de 9 millions de femelles et leurs inséminations (I.A.*). Ces données ont été enregistrées durant les campagnes 1997 à 2006, dès lors que le résultat est définitif, c’est-à-dire qu’il est établi avec un recul suffisant pour constater un éventuel vêlage (tableau 2). ●

Tableau 1 - Paramètres génétiques de la fertilité chez les bovins laitiers

RUMINANTS

Héritabilité * ●

Fertilité femelle : taux de réussite de l’insémination artificielle

1à2% [2]

Corrélation génétique Variabilité génétique : avec la production écart entre extrêmes laitière -0.11 à -0,32 % [2]

15 % [3]

* Héritabilité : part des différences d’origine génétique parmi l’ensemble des différences entre animaux LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 364 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

8


approche collective

Nicole Picard-Hagen Didier Raboisson Xavier Nouvel Fabien Corbière Xavier Berthelot

d’un trouble de la reproduction en élevage bovin

Département Élevage, Produits et Santé Publique, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex

Les troubles de la reproduction ont des conséquences importantes sur la rentabilité de l’élevage bovin, en raison notamment de l’augmentation des réformes non souhaitées*. Ils ont des répercussions sur l’organisation du travail et sur la conduite d’élevage avec le groupage des vêlages par exemple.

Objectifs pédagogiques ❚ Acquérir des bases méthodologiques pour mettre en œuvre une démarche diagnostique dans un élevage qui présente un problème d’infécondité. NOTE * cf. l’article “Économie : comment chiffrer la performance de la fécondité d’un troupeau laitier” de H. Seegers, dans ce numéro.

L’

infécondité est une maladie polyfactorielle. Elle résulte le plus souvent de l'interaction de nombreuses causes [4]. Les causes infectieuses (B.V.D., fièvre Q, ...) ont des répercussions directes ou indirectes sur la fonction de reproduction mais elles peuvent être maîtrisées par des programmes de prophylaxie adaptés. ● D'autres causes, non infectieuses, agissent de façon plus insidieuse et se traduisent par une dégradation des performances de reproduction, notamment en élevage bovin laitier. Ainsi, la sélection génétique intensive sur la production laitière a conduit à une dégradation progressive de la fertilité des vaches laitières hautes productrices ces 20 dernières années [2, 19, 20], en raison notamment de la difficulté à maîtriser le déficit énergétique en début de lactation. ● Les vaches hautes productrices présentent une expression plus fruste des chaleurs et des altérations de la qualité des ovocytes ou des embryons. Elles sont plus sensibles aux infections utérines [6]. Ces animaux sont en permanence à la limite du déséquilibre ("sur le fil du rasoir") et une modification, même minime, de cet équilibre (nutrition, stress ou autre) peut entraîner une maladie dite de production (maladie induite ou exacerbée par une conduite d’élevage inadaptée) et une dégradation des performances de reproduction [16]. ● L’approche d'un problème de reproduction en élevage bovin s’inscrit dans un programme intégré de gestion de la santé du troupeau. Celui-ci prend en compte la reproduction, les affections, la conduite d’élevage et sa gestion technico-économique.

Essentiel ❚ L’approche d'un trouble de la reproduction en élevage bovin fait partie d’un programme intégré de gestion de la santé du troupeau. ❚ Une visite d’élevage méthodique permet d’objectiver les facteurs de risques impliqués dans la dégradation des performances de reproduction.

RUMINANTS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 370 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

14

1

Le tri des animaux à examiner (photo E.N.V.T.).

D’une manière générale, les manifestations des troubles de la reproduction ne sont pas pathognomoniques mais leur description, associée à une analyse rigoureuse du bilan de reproduction, permet d'élaborer des hypothèses étiologiques [25]. Cependant, la précision est souvent insuffisante pour proposer des mesures de contrôle concrètes. Parallèlement, une évaluation fine des facteurs sanitaires et de la conduite d’élevage est nécessaire. ● L’approche d’un problème de troubles de la reproduction comprend : 1. une phase de description de l’élevage et, surtout, de ses performances de reproduction à l'issue de laquelle des hypothèses sur l'origine des problèmes sont formulées et hiérarchisées ; 2. une phase d'analyse, dans l'élevage, des facteurs de risques impliqués dans la dégradation des performances de reproduction ; 3. une phase de synthèse, qui correspond à la confrontation des hypothèses et des facteurs de risques identifiés. Cette phase doit aboutir à la confirmation des hypothèses ; 4. une phase opérationnelle, qui consiste à formuler des propositions hiérarchisées de maîtrise des problèmes (traitement, prévention) et de suivi. ●

LA PHASE DESCRIPTIVE Présentation de l’élevage et des troubles ● Lors de l’approche collective d’un trouble de la reproduction, il est nécessaire dans un


comment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction

en France chez les vaches laitières La mise en perspective de l’utilisation des programmes de synchronisation des chaleurs dans le contexte technico-économique et sociétal actuel en France, et la comparaison avec le Canada, permet de comprendre et d’envisager de manière prospective les orientations raisonnées des traitements de maîtrise des cycles pour les années à venir.

Figure 1 - Nombre de traitements

1Département Elevage et Produits, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse cedex 3Docteur vétérinaire, 81110 Castres 2Coopelso, 81580 Soual 4Département recherche et développement, UNCEIA, 13, rue Jouët 94704 Maisons-Alfort 5Docteur Vétérinaire, 80560 Mailly Maillet 6Docteur vétérinaire, 62610 Ardres 7Professeur-clinicien Faculté de médecine vétérinaire Université de Montréal 3200 Sicotte - St-Hyacinthe (Québec) J2S 7C6 – Canada

de maîtrise des cycles à base de progestagènes (PRID® et CRESTAR®) utilisés en France sur la période 2004 à septembre 2008 (source CEVA et Intervet-Schering Plough) Nombre de traitements de progestagènes

200 000

100 000

E

n Europe comme au Canada, les élevages laitiers sont confrontés à une diminution préoccupante de la fertilité des vaches*. En outre, la détection des chaleurs est devenue difficile en raison d’une expression plus fruste de l’œstrus, de la réduction du temps consacré à l’observation des femelles et de l’augmentation de la taille des troupeaux (38 vaches/exploitation en 2006 contre 16 vaches/exploitation en 1980) [3]. ● Les programmes de synchronisation de la reproduction visent à induire de façon synchrone l'ovulation d'un groupe de femelles, ils permettent ainsi de s’affranchir de la détection des chaleurs et d’inséminer les vaches à un moment déterminé. En France, ces traitements hormonaux peuvent être mis en place par les inséminateurs dans le cadre de programme sanitaire d’élevage, ou par les vétérinaires praticiens. ● Les protocoles de synchronisation des

0

2004

2005

2006

2007

2008

Objectif pédagogique

(janvier à septembre)

chaleurs sont rapidement passés en revue, puis leur utilisation est envisagée dans le cadre strict des programmes de synchronisation de la reproduction et dans le cadre des suivis de reproduction. Le contexte socioéconomique de l’utilisation de ces programmes en France et au Canada est comparé.

Deux protocoles sont classiquement utilisés en France : - deux administrations de prostaglandine F2α à 11-14 jours d’intervalle ; ●

Tableau 1 - Taux de fertilité à l’œstrus induit après un traitement hormonal (source Intervet-Schering Plough - UNCEIA)

106 génisses de race Prim’Holstein (année 2007)

134 vaches Montbéliardes, 99 Normandes et 94 Prim’Holstein (année 2005)

Traitements

Fertilité à l’œstrus induit

CRESTAR SO® + buséréline2

63 %

CRESTAR® 1

46 %

CRESTAR

SO®

1. Méthode CRESTAR® (implant + surcharge) ou CRESTAR SO® + buséréline, pendant 10 jours : dans les deux lots, injection d’une dose lutéolytique de prostaglandine F2 alpha 2 jours avant retrait de l’implant, injection d’eCG (400 UI) au retrait. Une I.A. systématique a été réalisée. La fertilité a été évaluée par échographie à 42-48 jours après I.A. ou dosage de la PSPB.

❚ Connaître les orientations des méthodes de maîtrise des cycles en fonction du contexte socio-économique de l’élevage bovin laitier et de leur évolution en France par rapport aux pays d’Amérique du Nord.

UTILISATION DES PROTOCOLES HORMONAUX DANS LE CADRE STRICT DES PROGRAMMES DE SYNCHRONISATION DE LA REPRODUCTION

avec la méthode CRESTAR chez des femelles de races laitières lors d’études terrain Types de femelles traitées

Nicole Picard-Hagen1 Mathieu Saint-Blancat2 Christian Gipoulou3 Claire Ponsart4 Marc Ennuyer5 Jérôme Defachelles6 Luc DesCôteaux7

+

buséréline1

44 %

NOTE * cf. les articles : - “La génétique : un outil pour améliorer la fertilité ?” de P. Le Mézec - “Coment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction?” de L. DesCôteaux et coll dans ce numéro.

RUMINANTS

2. Méthode Crestar SO® (9 ou 10 jours) plus injection de prostaglandine F2 alpha (Prosolvin®) 2 jours avant retrait de l’implant ; injection de buséréline (Réceptal®) le jour de la pose. L’insémination a été réalisée 48 h après le retrait de l’implant. Un constat de gestation a été effectué entre 36 et 80 jours après I.A. par échographie.

21

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 377


comment utiliser les programmes de synchronisation de la reproduction Luc DesCôteaux1 Pascale Aubry1 Émile Bouchard1 Nicole Picard-Hagen2

en Amérique du Nord chez les vaches laitières

1 Professeur-clinicien

Faculté de médecine vétérinaire Université de Montréal 3200 Sicotte - St-Hyacinthe (Québec) J2S 7C6 – Canada 2 Département

Élevage et Produits, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex

Objectifs pédagogiques ❚ Comprendre les définitions des principaux indices utilisés en reproduction. ❚ Connaître les avantages et les inconvénients de trois programmes de synchronisation. ❚ Comprendre les attitudes des utilisateurs face aux programmes de synchronisation de la reproduction.

Essentiel ❚ Le taux de gestation est de plus en plus utilisé comme indicateur de l’efficacité reproductive d’un troupeau. ❚ Les protocoles de synchronisation raccourcissent l’intervalle entre le vêlage et l’insémination fécondante des vaches laitières, en améliorant surtout le taux de détection des chaleurs ou d’insémination.

La performance de reproduction d'un troupeau laitier dépend de la période d'attente, de la détection des chaleurs, du succès à l'insémination et d'un faible taux d'avortement. La détection des chaleurs ou le taux d'insémination est le principal facteur sur lequel le vétérinaire peut intervenir. Plusieurs protocoles de synchronisation des chaleurs et de l'œstrus permettent d'améliorer le taux d'insémination, mais ils ont peu d'effet sur la fertilité. Le choix du protocole et son application dépendent de l'évaluation des bénéfices, selon la situation du troupeau.

L

a performance de reproduction des troupeaux laitiers est un sujet qui soulève beaucoup de questions chez les producteurs. Le maintien de l’efficacité des paramètres de reproduction, tels que l’intervalle entre le vêlage et l’insémination fécondante et le taux de conception, demeure un défi à relever pour la majorité des producteurs laitiers. En raison d’une sélection

génétique de plus en plus axée vers des critères de conformation et de performance de la production laitière, la fertilité des vaches laitières canadiennes s’est détériorée depuis le début des années quatre-vingts. ● Cet article présente d’abord quelques définitions pour mieux comprendre les indices utilisés en reproduction. Les protocoles de synchronisation de la reproduction les plus utilisés actuellement sont ensuite présentés. Enfin, les attitudes des utilisateurs canadiens de ces programmes sont passées en revue afin de mieux définir les enjeux et les possibilités d’étendre leur utilisation pour améliorer in fine la performance de reproduction des troupeaux laitiers.

Encadré 1 - Définitions de quelques indices de reproduction - Jours ouverts (J.O.) : synonyme de l’intervalle entre le vêlage et l'insémination fécondante (IVIAF). On définit une "vache ouverte" comme étant une vache non gravide. - Période d'attente (P.A.) : intervalle entre le vêlage et le moment où l’on décide de procéder à l'insémination chez les vaches normales dans un troupeau (habituellement 50 jours). - Taux de détection de chaleurs (T.D.C.) : proportion de vaches non gravides au delà de la période d'attente, qui sont détectées en chaleurs sur une période de 21 jours. Le T.D.C. est une mesure de l'intensité de la détection de l'œstrus. En pratique, il devrait correspondre au taux d'insémination. - Taux d’insémination (T.I.) : proportion de vaches non gravides au delà de la période

RUMINANTS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 382 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

1

Suivi de la reproduction à l'aide de dossiers de santé informatisés (photo L. DesCôteaux).

26

d'attente, qui sont inséminées sur une période de 21 jours. Normalement, le TI devrait correspondre au taux de détection de chaleurs. - Taux de conception (T.C.) ou succès à l'insémination : proportion d’inséminations réussies (gestation), par rapport au nombre total d’inséminations durant la même période de temps. Le T.C. est une mesure de la fertilité. - Taux de gestation (T.G.) : proportion de vaches diagnostiquées gravides par rapport au nombre de vaches éligibles, sur une période de temps donné (habituellement, un cycle). Les vaches élligibles sont celles ayant dépassé la période d’attente. Le taux de gestation est équivalent au taux d’insémination multiplié par le taux de conception.


méthode d’analyse globale Luc DesCôteaux Pascale Aubry Faculté de Médecine Vétérinaire Université de Montréal 3200 Sicotte - St-Hyacinthe (Québec) J2S 7C6 – Canada

Objectifs pédagogiques ❚ Développer une approche méthodique pour évaluer un troupeau laitier avant de modifier un programme de reproduction. ❚ Corriger les facteurs limitant les performances de reproduction. ❚ Utiliser des méthodes d'identification simples et pratiques pour cibler les vaches à observer plus attentivement.

Essentiel ❚ Un système d’identification unique pour chacune des vaches en lactation dans le troupeau permet de minimiser les erreurs d’administration des médicaments.

RUMINANTS

des performances en reproduction chez un troupeau laitier Une démarche systématique pour évaluer un problème de troupeau en reproduction peut être utilisée. La méthode présentée ici utilise des critères faciles à analyser lorsque ceux-ci sont bien suivis dans l’élevage concerné.

A

vant de choisir un programme de synchronisation de la reproduction (P.S.R.), il convient d’identifier les facteurs affectant la reproduction des vaches car les problèmes associés à la reproduction des troupeaux laitiers sont multifactoriels (figure 1). ● Plusieurs études ont démontré une association entre les affections pathologiques de la période péripartum et le succès de l’insémination des vaches laitières. Il est donc primordial pour le vétérinaire impliqué en médecine préventive de contrôler ces facteurs de risque, le plus tôt possible, pour minimiser leur impact sur la reproduction. ● Cet article présente une méthode d’analyse globale et systématique d’un problème de reproduction dans un troupeau laitier, puis recommande un protocole de synchronisation de la reproduction, justifie son choix en fonction des objectifs de l’éleveur et pour assurer une optimisation des résultats après sa mise en place. Il propose également une méthode d’identification complémentaire des animaux en utilisant différentes couleurs de rubans adhésifs sur la queue des vaches laitières. Simple et efficace, cette méthode d’identification pourrait être utilisée plus fréquemment et inciterait certains producteurs laitiers à penser au suivi de la reproduction dans leur élevage une fois par semaine au moins, en classant leurs vaches prêtes à l’insémination ou retardataires. TENUE DE DOSSIER ET IDENTIFICATION DES ANIMAUX Une tenue adéquate de dossier permet au vétérinaire d’être plus précis et efficace dans l’évaluation du problème de troupeau et plus ciblé dans ses recommandations à l'éleveur. ●

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 389 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

32

Une approche complémentaire pour identifier les vaches prêtes à inséminer ou retardataires est d’utiliser des rubans adhésifs de couleurs différentes sur la queue des vaches laitières (photo E.N.V.T.).

Un dossier complet inclut les données relatives à la naissance, au vêlage, aux maladies et à leurs traitements, aux signes de chaleur, aux inséminations, aux examens réalisés par le vétérinaires et aux données de production. ● Ces données permettent d'évaluer les performances zootechniques, d'analyser l'efficacité des actions de suivi sur le contrôle des maladies et de la reproduction. En outre, certains facteurs de risque pouvant expliquer les situations problématiques peuvent être ainsi identifiés. ● La mise en place d’un système d’identification unique pour chacune des vaches en lactation dans le troupeau permet de minimiser les erreurs d’administration des médicaments et s’avère essentiel à la mise en place de tout protocole thérapeutique à la ferme. ● L’identification des vaches avec un ruban adhésif de couleur sur la queue est une méthode complémentaire très efficace (photo). Elle peut faciliter la mise en place de programme de synchronisation de la reproduction (P.S.R.) qui nécessitent une détection des chaleurs avant l’insémination des vaches, ou dans le cadre de programme d’insémination systématique “sur rendezvous”, ou d’ovulations synchronisées actuellement plus répandues chez les producteurs laitiers [1] (encadré). Cette méthode convient bien aux exploitations en stabulation entravée, mais peut ●


un exemple d’application à un cas d’infécondité en élevage bovin

Nicole Picard-Hagen Didier Raboisson Fabien Corbière Xavier Nouvel Xavier Berthelot Département Élevage, Produits et Santé Publique, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex. n.hagen-picard@envt.fr

L’approche collective d’un trouble de la reproduction est illustrée à travers un cas d’infécondité en élevage bovin laitier.

Objectifs pédagogiques

LA PHASE DESCRIPTIVE

❚ Appliquer une méthodologie diagnostique à l’échelle collective lors de problème d’infécondité en élevage laitier.

Présentation de l’élevage et des troubles ● Le troupeau est composé de 38 vaches laitières Prim’Holstein dont 13 primipares, de 13 génisses de 1-2 ans et de 10 génisses âgées de moins d’un an. Le quota laitier s’élève à 300 000 L par an, soit une moyenne économique d’environ 7800 L/vache et par an. ● Le foncier comprend 64 ha de surface agricole utile (S.A.U.), dont 22 ha de maïs irrigué, 22 ha de céréales (triticale et orge) et 15 ha de prairie permanente de ray-grass. Les unités de travail agricole sont constituées de l’éleveur, avec l’aide de son frère handicapé. ● Le mode de reproduction est l’insémination animale (I.A.), exclusivement en race Prim’Holstein ou en croisement lors d’échec à l’IA. Les chaleurs sont détectées deux fois par jour. Les vêlages sont étalés sur toute l’année. Le troupeau est en auto-renouvellement, excepté en 2003, année durant laquelle des achats de génisses ont été effectués. ● Le bâtiment est relativement classique, c’est une stabulation libre avec une aire de repos paillée (photo 1). L’aire d’exercice est couverte et rainurée. Elle est râclée quotidiennement. ● Le bilan de reproduction a été établi sur une période de 12 mois, d’octobre 2005 à septembre 2006 (tableau 1). - La fertilité est fortement dégradée, bien en-deçà des objectifs de reproduction acceptables : la réussite en première I.A. est faible (21 p. cent), et le nombre de vaches à trois I.A. et plus est élevé (37 p. cent). Les vaches sont mises à la reproduction en moyenne à 65 jours postpartum et huit vaches sont mises à la reproduction trop tôt, avant 50 jours. - Cette dégradation de la fertilité entraîne un allongement de l’intervalle vêlage-I.A.

1

Le bâtiment est une stabulation libre sur aire paillée (photo E.N.V.T.).

Tableau 1 - Calcul du bilan de reproduction Période octobre 2005-octobre 2006 (source Contrôle laitier)

Fertilité

n = 38

Objectifs

R.I.A. 1

21 %

> 50 %

% 3 I.A. et plus

37 %

< 20 %

Nombre I.A. / I.A.F.

4,3

< 1,8

65 j (n = 38)

= 70 j

8 16 11 3

0%

Essentiel

Fécondité Intervalle vêlage-I.A. 1 < 50 j 50-70 j ● 70-90 j ● > 90 j ● ●

80 % < 20 %

Intervalle vêlage-I.A.F.

117 j (n = 25)

< 70 j 70-90 j ● 90-110 j ● > 110 j

3 7 4 11 (44 %)

< 20 %

9/38 (24 %)

-

● ●

% vaches vides

❚ L’utilisation prévisionnelle d’un planning permet une surveillance ciblée des vaches susceptibles de venir en chaleurs et améliore la détection des œstrus. ❚ L’analyse des animaux en sous-groupe révèle que les primipares ont une fertilité particulièrement dégradée. ❚ Le déficit énergétique peut expliquer l’expression fruste des chaleurs et la dégradation de la fertilité.

= 100 j

Tableau 2 - Analyse des intervalles entre inséminations artificielles Intervalles entre I.A.

n = 38

< 18 jours

3

18-24 jours

14

25-35 jours

4

36-48 jours

11

> 48 jours

9

RUMINANTS

fécondante avec 44 p. cent des vaches fécondées plus de 110 jours après le vêlage. ● L’examen des intervalles entre I.A. (tableau 2) montre un grand nombre de retours en chaleurs à 6 semaines (11 sur 40), voire au delà de 48 jours, et quelques

37

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 393


origine alimentaire

des troubles de la reproduction et moyens de maîtrise en élevage allaitant

L'état corporel des vaches allaitantes peut varier au cours du cycle de reproduction en fonction des ressources fourragères, et ces variations peuvent affecter les performances de reproduction.

E

n élevage bovin allaitant, les performances de reproduction conditionnent largement les résultats économiques. Le plus souvent, les vaches allaitantes sont nourries au pâturage du printemps au milieu de l'automne, puis reçoivent des fourrages conservés en période hivernale. Les vêlages ont lieu l'hiver. ● Pour des raisons de coût, le recours à des aliments concentrés est limité en période hivernale. La tolérance des vaches allaitantes à de telles sous-alimentations, en particulier en énergie, conditionne les stratégies d'alimentation hivernale. ● La sous-alimentation est la situation la plus fréquemment rencontrée en élevage allaitant, et la plus documentée en ce qui concerne son impact sur la reproduction. Néanmoins, il est possible d'observer une suralimentation des animaux dans des zones à bonne disponibilité de fourrages conservés, ou dans des élevages où cohabitent des vaches allaitantes et des vaches laitières. ● Cet article développe le lien entre reproduction en élevage allaitant et alimentation énergétique, d’une part, et alimentation protéique, minérale et vitaminique, d’autre part. ALIMENTATION ÉNERGÉTIQUE ET REPRODUCTION

● La relation entre alimentation énergétique et reproduction chez la vache allaitante relève à la fois : d'effets de moyen et de long terme, qui conditionnent l'état corporel d'une vache à un moment donné (vêlage ou mise à la reproduction) ; et d'effets de court terme, qui induisent un déficit ou un excès d'apport énergétique entre le vêlage et la mise à la reproduction [3] (photo). ● Pour ces aspects énergétiques, la priorité est donnée dans cet article aux résultats obtenus sur des races françaises.

Francis Enjalbert Département Élevage et Produits, Unité d'Alimentation U.M.R. 1289 I.N.R.A.-I.N.P./E.N.S.A.T. E.N.V.T. 'TANDEM' École Nationale Vétérinaire 23, Chemin des Capelles BP 87614 31076 Toulouse Cedex 3

Objectif pédagogique ❚ Connaître les relations alimentation - reproduction chez la vache allaitante, les tolérances de déficit et les moyens de correction d'un état corporel insuffisant.

La relation entre alimentation énergétique et reproduction chez la vache allaitante relève d'effets de moyen et de long terme et d'effets de court terme (photo E.N.V.T.).

Les races anglo-saxonnes (Angus, Hereford), sont précoces et répondent différemment aux variations d'apport énergétique [4]. Les conséquences d'un état corporel insuffisant Conséquences zootechniques ● La durée de l'anœstrus postpartum est accrue lorsque la note d'état corporel (N.E.C.) au vêlage est médiocre et/ou lorsque les vaches maigrissent après vêlage [5, 10]. Cet effet peut être très important. Houghton et coll. ont montré chez des vaches croisées Charolais x Angus que des vaches maigres au vêlage présentent une durée d'anœstrus postpartum supérieure de 1 à 2 mois à celle de vaches ayant vêlé avec un état corporel moyen ou bon [12]. ● La note d'état corporel (N.E.C.) quelques semaines après vêlage, qui est la résultante de la N.E.C. au vêlage et de sa variation postpartum, est aussi liée à la reprise d'activité ovarienne. ● Humblot et coll. ont constaté que moins de 5 p. cent des Charolaises primipares maigres étaient cyclées moins de 70 jours postpartum, contre 25 p. cent des animaux en bon état [13]. ● Gary et coll. ont montré que 45 jours après vêlage, 60 p. cent des Blondes d'Aquitaine de tous rang de vêlage en bon état corporel étaient cyclées, contre 5 p. cent des vaches en mauvais état corporel [8, 13]. En revanche, un mauvais état corporel à la saillie ou à l'insémination n'est pas préjudiciable au taux de réussite [12, 20]. ● L'effet d'un état corporel médiocre est beaucoup plus important chez les primipares que chez les multipares [20].

Essentiel ❚ Les vaches allaitantes maigres au vêlage ont un anœstrus prolongé, surtout les primipares. ❚ Une suralimentation après vêlage permet de limiter les effets d'un mauvais état corporel au vêlage. ❚ Une insuffisance de complémentation minérale peut avoir des répercussions négatives sur la reproduction.

41

RUMINANTS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 397


économie

comment chiffrer

Henri Seegers Unité d’enseignement de Zootechnie et Économie E.N.V.N. - Nantes Équipe de recherche Modélisation et Décision U.M.R. 1300 E.N.V.N.-I.N.R.A. Nantes

Objectif pédagogique ❚ Comprendre les effets économiques de la dégradation de la fécondité d’un troupeau laitier et savoir les estimer.

NOTE *Cf. l’article “La génétique, un outil pour améliorer le fertilité ?” de P. Le Mézec et coll, dans ce numéro.

Essentiel ❚ Les répercussions économiques d’une baisse des performances de reproduction sont indirectes et différées sur plusieurs années. ❚ La perception de l’impact économique par l’éleveur est donc très incomplète.

RUMINANTS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 402 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

la performance de fécondité d’un troupeau laitier Savoir ce que peut rapporter une modification de conduite ou une intervention vétérinaire sur la reproduction d’un troupeau laitier est nécessaire avant de s’y lancer … En effet, ce gain espéré doit être mis en balance avec le coût supplémentaire de cette modification ou d’une nouvelle intervention.

L

es performances de reproduction, notamment des troupeaux Prim Holstein, se sont très sensiblement dégradées au cours des trois dernières décennies, aussi bien en France qu'ailleurs en Europe*. Cette évolution a été constatée malgré les progrès sensibles effectués sur les connaissances de physiologie et de physiopathologie, et malgré la disponibilité accrue de moyens de gestion préventive ou corrective, présentés comme efficients par leurs prescripteurs. ● Bien que des chiffres importants sur l’impact économique d’un jour de retard de fécondation soient parfois diffusés (sans garantie évidente sur leur validité), beaucoup d’éleveurs acceptent avec une relative fatalité de réformer plus et d’entretenir un troupeau plus grand pour arriver à un même résultat global. Ce fatalisme des éleveurs est-il dû à leur perception très approximative d’un tel impact (notamment les réformes), ou au fait qu’il soit surestimé, ou encore au fait que les éleveurs ne croient pas en l’efficacité de certains plans proposés ? Sans doute ces trois raisons expliquent-elles cette situation. ● Cet article s’intéresse à l’infécondité du troupeau en production et ne considère pas le pré-troupeau. Une approche pratique d’évaluation est proposée après la mise en place de quelques éléments de compréhension.

46

1

La première finalité de la reproduction dans le troupeau est de générer un calendrier prévisionnel de production laitière, avec un an de décalage (photo H. Seegers).

UN LIEN DIFFICILE À ÉTABLIR ENTRE LES PERFORMANCES DE REPRODUCTION ET LES RÉSULTATS ÉCONOMIQUES Le lien entre les performances de reproduction du troupeau et le résultat économique de l'atelier laitier est difficile à établir avec précision, car il repose sur des mécanismes principalement indirects et en bonne partie différés. En effet, la reproduction, en dehors de la production de veaux, ne correspond pas à un volume de produits commercialisables, pour lequel toute variation est directement convertible en euros, et donc perçue et évaluée par l’éleveur. ● Pour l’intervenant ou le conseiller, aussi compétent soit-il sur le plan technique, il est important de connaître aussi les principaux mécanismes à l’origine de l’impact économique de la performance de reproduction, afin d’en proposer ou d’en valider un chiffrage. Il peut ainsi proposer à un éleveur d’adopter un schéma rentable (ou éviter de formuler un schéma inapproprié de par ses coûts) à la situation de l’exploitation. ●

FINALITÉS DE LA REPRODUCTION ● Schématiquement, trois finalités peuvent être assignées à la reproduction : 1. assurer un calendrier prévisionnel de production laitière à partir des vaches et des génisses aptes à être mises à la reproduction, et par celui-ci, assurer la réalisation du quota, avec presque un an de décalage ; 2. assurer l’entrée en production de génisses d’auto-renouvellement, avec un décalage de 3-4 ans environ ; ceci participe


observation clinique

observation originale

l’anœstrus post-partum est-il physiologique ou pathologique ?

Gilles de Crémoux Clinique vétérinaire du Cérou 1 ter, avenue Albert Thomas 81400 Carmaux

la preuve par l’absurde Dans le cadre d'un suivi reproduction en élevage allaitant, nous avons observé un anœstrus postpartum induit par un déficit énergétique en début d'allaitement et mesuré ses conséquences sur la période de reproduction suivante. Les différentes causes d’anœstrus vrais et les traitements à envisager sont présentés.

I

l est souvent considéré comme normal que les vaches notamment en races allaitantes présentent un anœstrus après le vêlage pendant les premiers mois d’allaitement. Cependant, dans le type d’élevage que nous suivons (veaux d’Aveyron), des intervalles vêlage-vêlage moyen (I.V.V.) entre 340 et 365 jours avec des minima individuels à 315 jours sont couramment observés dans les troupeaux bien suivis et bien alimentés. Ceci prouve une reprise de cyclicité extrêmement rapide après le vêlage. Dans cette observation clinique, nous montrons comment un anœstrus postpartum peut être induit par un déficit alimentaire en début d’allaitement et quelles sont ses répercussions sur la reproduction. DESCRIPTION DE L’ÉLEVAGE ● L’élevage de race limousine est destiné à la vente de reproducteurs : génisses prêtes à saillir, et éventuellement, mâles futurs taureaux. Il est constitué de deux groupes d’animaux distincts : 1. un troupeau reproducteur en contrôle de performance (pesées trimestrielles des veaux) jusqu’en 2005 et en suivi mensuel de reproduction depuis début 2002. L’effectif s’est fortement réduit entre 2005 et 2006 puisqu’il est passé de 59 vaches à une trentaine ; 2. un lot de génisses issues de l’élevage ou achetées entre 6 mois et un an et vendues prêtes à saillir ou prêtes à vêler suivant les opportunités du marché. Ces animaux ne sont pas suivis en reproduction et ne sont

Objectifs pédagogiques ❚ Montrer l’importance du déficit énergétique de la ration, en début d’allaitement, dans l’anœstrus postpartum et dans la dégradation des résultats de reproduction. 1

Élevage type veaux d'Aveyron : séparation des couples mères-veaux" (photo G. de Crémoux).

donc pas considérés dans cette étude. ● Les animaux sont essentiellement mis à la reproduction entre novembre et avril afin de grouper les vêlages entre août et février (figures 1, 2). Jusqu’en 2006, celle-ci se faisait par insémination artificielle les quatre premiers mois, puis par monte naturelle. Depuis deux ans, toutes les saillies sont effectuées par le taureau. ● Jusqu’en juin 2007, la conduite et l’alimentation du troupeau sont de type “veau d’Aveyron” : de mars à novembre, les vaches sont au pré et sont rentrées matin et soir afin d’allaiter les veaux qui restent en stabulation. Elles reçoivent alors du foin et de la farine (2 kg environ d’un mélange blé/triticale/orge) au cornadis tant qu’il y a de l’herbe à l’extérieur (photo 1). En période hivernale, les mères ne sortent plus et sont nourries avec du foin enrubanné et du foin séché à volonté et de 2 kg à 3 kg de farine suivant leur stade de lactation. Ce régime est aussi appliqué en période de sécheresse (juillet à septembre en général). ● Cependant, l’an dernier, l’éleveur a décidé d’arrêter la production de céréales et de foin enrubanné. Le foin a été récolté au printemps dans des conditions exécrables : temps humide et pluvieux, survenu brutalement, alors qu’une partie de l’herbe était fauchée et persistance du mauvais temps pendant un mois et demi. Une analyse de foin dans un élevage voisin montre des valeurs nutritionnelles équivalentes, voire inférieures à celles de la paille. Vaches et veaux sont au pré, avec à partir de juillet 2007 un apport de foin.

Essentiel ❚ Le déficit énergétique est la première cause d’anœstrus en race allaitante. ❚ Lors d’un anœstrus à l’échelle d’un cheptel, il n’existe aucune solution à court terme.

51

RUMINANTS

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 407


diagnostic

des affections bactériennes cutanées des porcins

Les dermatoses bactériennes sont relativement nombreuses et encore mal connues en raison de la multiplicité des germes mis en évidence dans les grands syndromes rencontrés sur le terrain.

LE ROUGET Le rouget est une affection bactérienne cosmopolite due à un petit bacille gram positif, Erysipelothrix rhusiopathiae. Elle se caractérise cliniquement par de la fièvre, des lésions cutanées, des arthrites, des endocardites et une mort brutale. ● Si le porc est le plus fréquemment atteint, la maladie, répandue dans le monde entier, est rencontrée chez la plupart des espèces ●

A.F.S.S.A. 23, Avenue du Général De Gaulle 94706 Maisons-Alfort

Objectif pédagogique ❚ Savoir identifier l’origine d’une affection cutanée et établir un diagnostic.

L

a nécrobacillose, le rouget, la pyobacillose et l’épidermite exsudative mis à part, les affections bactériennes cutanées proprement dites ou les infections systémiques à répercussions cutanées chez le porc sont rares en raison des modifications des modes d’élevage. L’élevage porcin de plein air tend en effet à se réduire au profit d’un élevage intensif hors-sol, au sein duquel des mesures d’hygiène draconiennes des locaux sont souvent préconisées et adoptées. L’aération est régulée. L’adoption de telles mesures a donc entraîné une diminution de l’impact de certaines maladies, voire leur éradication. ● L’objet de cet article est cependant de répertorier les affections dermatologiques que l’on peut rencontrer, classées et traitées selon leur importance et leur fréquence par ordre décroissant, afin de pouvoir les diagnostiquer. ● Quelle que soit la maladie en cause, le diagnostic fait appel au laboratoire pour l’isolement du germe (bactériologie, histologie éventuellement) et le traitement mis en place, impérativement après isolement du germe et réalisation d’un antibiogramme, est l’antibiothérapie. Cette précaution est indispensable pour toutes les infections microbiennes, à l’exception du rouget, qui ne soulève jamais de difficulté en termes d’antibiosensibilité.

Jean-Marie Gourreau

1 Rouget du porc : lésions sur une carcasse échaudée à l’abattoir. Les lésions, en relief, ont pris une teinte pourprée (photo P. Tassin).

animales [9], même celles à sang froid, ainsi que chez l’Homme (Erysipéloïde de BakerRosenbach). ● Actuellement, elle semble en recrudescence aujourd’hui en France et aux U.S.A. Le stress, les modes d’élevages et les maladies intercurrentes favorisent l’apparition de l’affection. Trente à 50 p. cent des animaux sains hébergeraient cette bactérie dans les amygdales, les nœuds lymphatiques ou la valvule iléo-caecale. Ces porteurs sains excrètent le germe dans leurs fèces, leurs sécrétions orales et nasales. ● Cette excrétion conduit à une contamination du milieu environnant. - En effet, la bactérie résiste plusieurs années dans du fumier de porc, plusieurs mois dans des matières organiques en putréfaction, 9 mois dans les cadavres, 6 mois dans les salaisons. - Elle est cependant sensible à tous les désinfectants usuels et est détruite par un chauffage de 15 minutes à 55° C. - D’autres espèces animales constituent également un réservoir puisque plus de 50 espèces de mammifères (dont la moitié sont des rongeurs), plus de 30 espèces d’oiseaux, des reptiles (crocodiles, caïmans), des poissons, des crustacés, des coquillages et des arthropodes en sont porteurs. ● Les voies d’inoculation sont essentiellement cutanée et intradermique (écorchures, lésions podales). La contamination peut aussi se faire au niveau des amygdales,

Essentiel ❚ Le rouget est actuellement en recrudescence en France et aux U.S.A. ❚ Le stress, les modes d’élevages et les maladies intercurrentes favorisent l’apparition de l’affection. ❚ La maladie touche surtout les animaux âgés de 3 mois à 3 ans.

PORCS- VOLAILLES

55

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 411


enjeux économiques lait :

une année mouvementée Anne Richard CNIEL Directrice Économie et Qualité 42, rue de Châteaudun 75314 Paris Cedex 09

La filière laitière mondiale vient de vivre une année atypique. Après plusieurs années d’excédents, les stocks de produits mondiaux ont été ramenés à zéro en 2007, entraînant la hausse des cours des produits laitiers, et par voie de conséquence celle du prix du lait, sur l’année 2007/2008. Toutefois, cette période euphorique a été de courte durée. La filière doit désormais affronter la hausse des coûts de production, conjuguée à un retour des cours des produits laitiers à un niveau proche de 2006.

L

a France est le 2e producteur de lait en Europe, derrière l’Allemagne, avec 22,2 milliards de litres produits par 88 000 producteurs de lait, et valorisés par 300 entreprises. Après plusieurs années de difficultés consécutives aux réformes européennes successives, les filières laitières française et européenne ont connu un revirement très net des tendances au cours de l’année 2007. DES STOCKS MONDIAUX DE PRODUITS LAITIERS RAMENÉS À ZÉRO Les cotations de produits laitiers “ingrédients”, comme les poudres de lait ou le ●

beurre vrac, ont été en très forte hausse, suite à un déséquilibre entre l’offre et la demande de lait et de produits laitiers au niveau mondial. ● La conjoncture laitière a en effet été déséquilibrée par des éléments à la fois structurels et conjoncturels.

Objectif pédagogique ❚ Comprendre la situation actuelle de la filière laitière.

Le déséquilibre conjoncturel Le déséquilibre conjoncturel a été provoqué en 2007 par la poursuite d’une sécheresse importante en Australie qui s’est traduite par une baisse de la production de lait. ● En année normale, ce pays est un acteur important des échanges mondiaux de produits laitiers. En raison du déficit hydrique important, notamment dans l’état de Victoria (1er état producteur laitier en Australie), les prairies se sont desséchées et les fourrages ont manqué pour l’alimentation des troupeaux, avec pour résultat des baisses de production et une augmentation des mortalités de vaches laitières dans le pays. ● En Argentine, outre les réorientations de certaines surfaces vers la production de soja, des conditions climatiques défavorables ont aussi pénalisé la production laitière de ce pays. En effet, les inondations au printemps 2007 dans la Pampa, grosse région de production laitière, ont provoqué des baisses de volumes pour l’offre de lait. ● Cette situation a pénalisé l’offre argentine sur le marché mondial, d’autant plus que le gouvernement argentin taxait alors les ●

Essentiel ❚ Dès le printemps 2007? une baisse des stocks mondiaux de produits laitiers est observée. ❚ Fin 2007 - début 2008, le prix du lait payé aux producteurs français est en hausse.

Figure 1 - Evolution du nombre de producteurs laitiers et production moyenne en France Litres/an

Nombre

140 000

130 005

120 000

300 000 125 050

120 406

116 220

112 322

100 000

107 970

250 000 103 051

97 975

94 322

80 000

87 789

200 000 150 000

60 000 100 000

40 000

0

COMPRENDRE ET AGIR

50 000

20 000 1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

0

61

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 417


management de l’entreprise la reproduction :

toujours une priorité pour l’offre de services des vétérinaires

Philippe Baralon1 1 Phylum

BP 17530 31675 Labège Cedex

La question revient périodiquement. Confrontés à l'évolution des structures d'élevage, les vétérinaires s'inquiètent et s'interrogent sur les domaines prioritaires pour proposer de “nouveaux” services. Les réponses varient selon les époques et les personnes interrogées. Pourtant un élément ne varie pas – ou ne devrait pas varier – dans la stratégie d'offre de services des entreprises vétérinaires : la reproduction reste un secteur prioritaire.

Objectif pédagogique ❚ Comprendre l'intérêt des services "innovants" en matière de reproduction et les conditions à satisfaire pour les proposer avec succès. NOTES *Lors de sa mise sur le marché, la césarienne est évidemment plus rentable pour l'éleveur et pour le vétérinaire que le service auquel elle s'est substituée, l'embryotomie. De plus, la césarienne reste le meilleur choix pour un éleveur confronté à une vache gestante, à terme, dans l'impossibilité de vêler par les voies naturelles.

F

** En 1982, au cours de conférences données à l'ENVT, deux pionniers des suivis de reproduction avaient annoncé aux étudiants ébahis (dont l'auteur) que, dans les 10 ans, cette approche deviendrait la forme exclusive de l'exercice rural en élevage laitier !

Essentiel ❚ La maîtrise de la reproduction représente un objectif technique majeur dans les ateliers naisseurs, dans la plupart des contextes économiques. ❚ Les vétérinaires ont développé une offre de services performants en matière de reproduction.

COMPRENDRE ET AGIR

ondamentalement, la zootechnie des productions animales est une discipline qui ne consiste qu'à maîtriser deux paramètres : l'efficacité de la reproduction d'une part, celle de la conversion alimentaire (en lait, en viande, en œufs, …) d'autre part. ● Dans tous les ateliers naisseurs ou presque, maîtriser la reproduction constitue une condition nécessaire à la réussite économique. Plus intéressant, ceci reste vrai dans la plupart des contextes économiques. ● Que l'on souhaite maximiser la production, que l'on cherche des produits spécifiques, différenciés et/ou que la maîtrise des coûts figure au premier plan des objectifs, il est nécessaire de maîtriser la reproduction du troupeau. ● Avant les quotas laitiers, une reproduction efficace était le moyen d'augmenter les volumes commercialisés, donc le chiffre d'affaires de l'entreprise. ● Avec les quotas laitiers, le chiffre d'affaires étant plafonné, l'amélioration du résultat économique passe notamment par une réduction des charges de pré-troupeau, ce qui suppose une reproduction optimisée. LA CÉSARIENNE, BLOCKBUSTER DE LA RURALE Très tôt les vétérinaires ruraux ont développé des services performants répondant

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 420 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

64

à des besoins urgents des éleveurs. Par exemple, l'obstétrique a représenté et représente encore un domaine majeur d'intervention, en élevage allaitant surtout. La césarienne constitue probablement la meilleure illustration des services utiles, performants, car rentables et pour l'éleveur* et pour le vétérinaire, qui ont rencontré un formidable succès. Ce succès, qui ne se dément pas, explique le faible effort commercial requis pour “vendre” une césarienne. ● A la fin des années 70 et au début des années 80, quelques vétérinaires français, à la suite de travaux de recherche notamment le Programme d'Action Vétérinaire Intégré de Reproduction (PAVIR) [2], ont proposé une approche nouvelle de la reproduction bovine inspirée de l’étranger, notamment en élevage laitier. Ils inauguraient l'ère des “suivis”. Il s'agissait d'une approche collective, au niveau du troupeau, visant à optimiser les performances de reproduction. Cette innovation a connu quelques succès réels, parfois très significatifs. Cependant, dans une majorité de cas, la réussite n'a pas été durable. Si au contraire, dans une forte minorité de cas, le niveau de consommation de ces services s'est maintenu à un niveau élevé (10 à 25 p. cent des élevages laitiers d'une clientèle), les “suivis” n'ont jamais constitué en France la révolution culturelle annoncée par leurs promoteurs de la première heure**. LES ”SUIVIS DE REPRODUCTION” HÂTIVEMENT RINGARDISÉS ● Ce succès – ou cet échec – relatif a conduit nombre de praticiens à un diagnostic pour le moins hâtif : la reproduction ne serait pas un thème suffisamment intéressant pour les éleveurs. Sur la base de ce postulat, il était logique de vouloir dépasser cette première génération de “suivis” pour aborder d'autres thèmes – qualité du lait, alimentation, … – et ainsi, arriver au “suivi global”, dont le contenu n'a jamais été clairement énoncé. ● Les suivis de reproduction ont été en quelque sorte trop rapidement ringardisés. Pourtant, à l'analyse de ce qui se pratique dans les clientèles qui proposent toujours ce type de services, on observe, qu'avec le


FORMATION MÉDICALE

CONTINUE VÉTÉRINAIRE FMCvét comprendre l’épidémiologie

2e série d’articles

l’interprétation revue internationale des résultats d’analyses un panorama 3. pour un groupe de sujets par Bernard Toma des meilleurs articles

Après la définition des notions de sensibilité et de spécificité d’un test ainsi que celle de valeur prédictive d’un résultat positif ou d’un résultat négatif dans les deux articles précédents (1. et 2.), comment comprendre les valeurs de sensibilité, spécificité et prédictives de résultats d’analyses au plan d’un troupeau. Page 68 observation originale

Page 84 Sous la direction de François Schelcher et Henri Seegers, avec Sébastien Assié et Didier Raboisson - Comparaison de quatre méthodes de dosage des IgG colostrales chez la vache laitière par Cécile Enault (E.N.V.N.) - La pasteurisation du colostrum réduit l’incidence de la Paratuberculose chez des veaux laitirers nouveau-nés par Lucie Trencart (E.N.V.N.) - Efficacité curative et préventive du lactate d’halofuginone contre Cryptosporidium parvum chez des veaux infectés naturellement : un essai avec placebo, en double aveugle, randomisé, centralisé par Héloïse Ader (E.N.V.N.) - Association entre la sévérité de l’inflammation granulomateuse de l’intestin avec infection systémique par Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis chez les vaches laitières par Marie-Anne Lefol (E.N.V.N.) - Refroidissement des vaches laitières par tunnel d’évaporisation par Marie Martorello (E.N.V.N.)

étude de cas

neuropathologie

du jeune veau dans des cheptels infectés F.C.O. étude dans six exploitations de l’Yonne par Adrien Bernard, Caroline Lacroux, Hélène Benoit-Valiergue, Isabelle Leroy Dans un contexte de vague post-épizootique de bluetongue virus, sérotype 8 (BTV8), cette étude de cas présente une enquête réalisée dans six élevages, sur des animaux qui présentent des troubles nerveux compatibles avec des malformations tératogènes du système nerveux central. Page 68

synthèse intérêts et limites de l’induction de l’ovulation par la GnRH pour une insémination programmée par Nicole Picard-Hagen

Page 80

67

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 423


comprendre l’épidémiologie l’interprétation

des résultats d’analyses 3. pour un groupe de sujets

Bernard Toma Service Maladies contagieuses E.N.V.A. 7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort cedex

L

es deux articles précédents ont mis en place les notions de sensibilité et de spécificité d’un test ainsi que celle de valeur prédictive d’un résultat positif ou d’un résultat négatif. Ces quatre concepts ont été définis et présentés pour l’interprétation des résultats obtenus au plan individuel, c’est-àdire lors de l’utilisation d’un test sur un sujet. Ceci correspond notamment au cas des animaux de compagnie qui vivent isolément chez leurs propriétaires. Mais, pour des élevages d’animaux de compagnie ou pour les animaux de rente, les tests sont souvent appliqués, non pas à un seul sujet mais à plusieurs (voire à tous), et les résultats à interpréter doivent l’être en tenant compte de l’ensemble des résultats, et non pas d’un seul. ● Dans ce genre de situation, si les règles cidessous sont appliquées, les valeurs de sensibilité et de spécificité ne sont plus les mêmes qu’au plan individuel et les valeurs prédictives des résultats sont différentes !

Objectif pédagogique ❚ Faire comprendre les valeurs de sensibilité, spécificité et prédictives de résultats d’analyses au plan d’un troupeau.

NOTE *Cf. l’article “L’interprétation des résultats d’analyse : la valeur prédictive d’un résultat”, dans LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé 2008;9:346-8.

RÈGLES POUR INTERPRÉTER DES RÉSULTATS OBTENUS SUR UN GROUPE DE SUJETS (TROUPEAU)

- Cette figure est limitée à trois étapes successives (c’est-à-dire trois sujets) afin de ne pas compliquer inutilement l’aspect de l’arbre de probabilité. - La seule branche qui ne correspond qu’à des résultats négatifs est la branche inférieure de l’arbre. - Plus le nombre d’étapes (de sujets) augmente, plus la feuille portée par cette branche se trouve minoritaire par rapport à l’ensemble des autres feuilles, portées par des branches qui comportent un ou plusieurs résultats positifs. - De même, plus le nombre d’étapes (de sujets) augmente, plus le nombre de feuilles correspondant à au moins une réponse positive, augmente.

1. Dès lors qu’un sujet du groupe fournit une réponse positive, le groupe est considéré comme infecté (ou, en tout cas, suspect de l’être).

Pour les sensibilités

+

Pour les spécificités

montrant la seule branche (inférieure) et l’ensemble des autres branches correspondant à un ou plusieurs résultats positifs

+ + -

+ + +

Au moins une réponse positive

-

68

L’explication du principe du pourquoi est simple et peut faire appel au principe de fonctionnement d’un arbre de probabilité (figure 1). ● Si l’on applique ce principe à la sensibilité et à la spécificité d’un test, on obtient les résultats suivants pour la sensibilité et pour la spécificité. ●

La sensibilité ne concerne que les sujets infectés (puisqu’elle correspond à la capacité de détecter les sujets infectés). ● Donc, si on applique un test à plusieurs sujets infectés, la figure 1 montre que le risque de n’avoir que des résultats négatifs (la branche du bas) devient de plus en plus faible (minoritaire) avec le nombre de sujets infectés soumis au test. ● Si le risque de n’avoir que des résultats négatifs diminue, ceci veut dire que la probabilité d’en avoir au moins un positif augmente. Donc, la sensibilité du test appliqué à un groupe de sujets infectés est bien meilleure que la sensibilité individuelle.

ne correspondant qu’à des résultats négatifs

-

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 424 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

POURQUOI ?

Figure - Arbre de probabilité

+

FMC Vét

2. Pour qu’un groupe de sujets soit considéré comme indemne de la maladie recherchée, tous les sujets du groupe doivent fournir une rèponse négative au test utilisé. ● Ces règles d’interprétation des résultats d’un test appliqué à tous les sujets d’un groupe conduisent à : - augmenter la puissance de détection d’une maladie (autrement dit, la sensibilité du test), et ce d’autant plus que le nombre de sujets infectés est élevé ; - augmenter le risque d’erreur par excès (autrement dit, diminuer la spécificité du test), et ce d’autant plus que l’effectif du groupe de sujets indemnes est grand. ● Il reste à voir pourquoi et de combien sont modifiées les performances interprétées au niveau d’un groupe par rapport à celles d’un individu.

Que des réponses négatives

La spécificité ne concerne que les sujets indemnes (elle correspond à la capacité à identifier correctement les sujets indemnes).


étude de cas

observation originale

neuropathologie du jeune veau Adrien Bernard1 Caroline Lacroux2 Hélène Benoit-Valiergue3 Isabelle Leroy3 1 E.N.V.A.

7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort Cedex 2 E.N.V.T

Unité d’Anatomie pathologique 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex 3

3 Centre

d’Application de Champignelles E.N.V.A. Domaine de Croisil 89350 Champignelles

Objectif pédagogique ❚ Montrer les conséquences cliniques et lésionnelles du passage transplacentaire du Blue-tongue virus, sérotype 8 (BTV8) sur le système nerveux du jeune veau.

Essentiel ❚ Des études récentes ont confirmé l’hypothèse d’un passage transplacentaire du BTV8. ❚ Les conséquences de l’infection varient en fonction de l’âge du fœtus. ❚ Les fœtus qui survivent à une infection par le BTV8 durant la 1re moitié de gestation présentent des malformations congénitales du système nerveux.

dans des cheptels infectés F.C.O.

étude dans six exploitations de l’Yonne Dans un contexte de vague post-épizootique de blue-tongue virus, sérotype 8 (BTV8), cette étude de cas présente une enquête réalisée dans six élevages, sur des animaux qui présentent des troubles nerveux compatibles avec des malformations tératogènes du système nerveux central.

N

ous nous sommes intéressés à six exploitations du département de l’Yonne (89) durant la période du 17 mars au 16 avril 2008. Ces exploitations ont déjà été touchées par la fièvre catarrhale ovine (F.C.O.) (statut sérologique positif associé à des manifestations cliniques de la maladie sur le cheptel) l’automne précédent. ● Pendant la durée de notre étude, ces exploitations sont en période de vêlages et les éleveurs ont noté des modifications comportementales chez leurs veaux. Après le recueil des informations auprès de ces derniers, nous avons réalisé une étude clinique complète sur chaque veau qui présentait des signes neurologiques (sept au total). ● Le but de notre étude est de décrire ces affections, d’établir un diagnostic étiologique pour essayer de corréler ces tableaux cliniques avec l’épisode automnal de F.C.O., grâce à des examens complémentaires adaptés et à une analyse nécropsique complète. ● En effet, si les modalités classiques de transmission de cette maladie (horizontale et vectorisée) sont bien connues, quelques études ont déjà montré l’existence d’une transmission verticale du BTV8 par passage transplacentaire de la mère au fœtus [2, 8, 9, 10, 15, 16]. En revanche, peu se sont intéressées aux conséquences cliniques de ces affections congénitales. ● Cet article présente sept cas de neuropathologie chez des veaux issus de cheptels infectés de F.C.O. en essayant de replacer ce tableau clinique au sein du diagnostic différentiel. MATÉRIEL ET MÉTHODES Les grandes étapes

FMC Vét LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 428 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

Pour atteindre cet objectif, nous avons décidé de réaliser une étude sur le terrain et de

72

1 Décubitus latéral droit et autoauscultation (photos A. Bernard, centre d’Application Champignelles, E.N.V.A.).

2

Mouvements circulaires de la tête

- Arrêt en opisthotonos, puis reprise des mouvements circulaires.

procéder par étapes : 1. échantillonnage : sélection des élevages participant à notre étude ; 2. anamnèse et commémoratifs : recueil des informations concernant l’évolution de l’état clinique depuis la naissance du veau ; 3. étude clinique : examen clinique général associé à un examen neurologique précis ; 4. classification des hypothèses diagnostiques ; 5. examens complémentaires ; 6. autopsie et analyse lésionnelle ; 7. synthèse diagnostique : établissement du diagnostic étiologique. Échantillonage ● Les différentes exploitations participant à notre étude ont été sélectionnées suivant plusieurs critères : - leur type : élevage bovin ; - leur localisation : département de l’Yonne (89) en région Bourgogne ; - leur statut : exploitations déclarées “infectées F.C.O.” ;


synthèse

intérêts et limites de l’induction Nicole Picard-Hagen Département Élevage et Produits École Nationale Vétérinaire de Toulouse 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex

Objectif pédagogique

de l’ovulation par la GnRH pour une insémination programmée Les protocoles associant la GnRH et la prostaglandine F2α peuvent-ils dégrader la fertilité ?

D

ans les élevages laitiers, la détection des chaleurs est en effet devenue difficile, en raison d’une expression plus fruste de l’œstrus, de la réduction du temps consacré à l’observation des femelles, et de l’augmentation de la taille des troupeaux.* Les traitements de maîtrise des cycles visent à induire de façon synchrone l'ovulation d'un groupe de femelles. Cela permet de s’affranchir de la détection des chaleurs, et d’inséminer les vaches à un moment déterminé.

Connaître le principe, les intérêts et les limites des protocles d’induction de l’ovulation par la GnRH chez la vache laitière.

NOTE * cf. l’article “La détection des chaleurs : quels sont les problèmes rencontrés chez les vaches laitières hautes productrices” de C. Disenhaus, dans LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé 2008;8:215-9.

LES PRINCIPES DU PROTOCOLE G.P.G.

Synthèse d’après les études : - Perry GA, Smith MF, Lucy MC, coll. Relationship between follicle size at insemination and pregnancy success. Proc. Natl.Acad. Sci. USA. 2005;102:5268-73. - Souza AH, Gümen A, Silva EPB, coll. Supplementation with estradiol-17, before the last gonadotropinreleasing hormone injection of the ovsynch protocol in lactating dairy cows. J. Dairy Sci. 2007;90:4623-34. - Busch DC, Atkins JA, Bader JF, coll. Effect of ovulatory follicle size and expression of estrus on progesterone secretion in beef cows. J. Anim. Sci. 2008;86:553-63.

● Le protocole GnRH-PGF2α-GnRH (G.P.G. ou Ovsynch) est apparu en France à la fin des années 90, en provenance des ÉtatsUnis (figure 1) [8]. Plusieurs variantes ont ensuite été proposées (figure 1). Le protocole “Cosynch” permet de réduire le nombre d’interventions sur les animaux, en réalisant la 2nde administration de GnRH en même temps que l’insémination artificielle, et non pas 8 à 24 heures avant celle-ci. ● Les associations PGF2α et GnRH visent à maîtriser la vague de croissance folliculaire et à induire la lutéolyse et l’ovulation,

7 jours PGF2α 14 jours

PGF2α

GnRH 7 jours

Progestagène PGF2α 7 jours

PGF2α

GnRH 12 jours

Insémination artificielle programmée

GnRH 2 jours

PGF2α

7 jours

8-24 heures Insémination artificielle programmée GnRH 2 jours 8-24 heures

2 jours

GnRH et insémination artificielle programmée

2 jours

GnRH et insémination artificielle programmée

PGF2α 7 jours

80

Coupe de l’ovaire (photos E.N.V.T.).

PGF2α

GnRH

GnRH

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé 436 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

2

Figure 1 - Protocoles (GnRH-PGF2α-GnRH) de synchronisation de l’ovulation

GnRH

FMC Vét

1

Ovaire présentant un follicule de 13 mm de diamètre et un corps jaune en régression.

Insémination artificielle sur chaleurs détectées


revue internationale un panorama des meilleurs articles COMPARAISON DE QUATRE MÉTHODES de dosage des IgG colostrales chez la vache laitière Contexte

Objectif de l’étude ❚ Déterminer la sensitivité et la spécificité de 4 méthodes (réfractomètre, hydromètre de sortes, pèse colostrum) pour juger de la qualité du colostrum (c’est-à-dire IgG ≥ 50 g/L. ❚ Déterminer la valeur pivot optimale pour chacune de ces méthodes.

XComparison of four methods to assess colostral IgG concentration in dairy cows JAVMA, Vol 233 : 761-766, No. 5, September 1, 2008. Chigerwe M, Tyler JW, Middleton JR, Spain JN, Dill JS, Steevens BJ.

L’hydrométrie ou la réfractométrie électronique sont des méthodes satisfaisantes pour juger d’une qualité insuffisante du colostrum (concentration en IgG < 50 g/L). ● Les seuils doivent être déterminés pour chacun des appareils. Les données du fabricant surestiment la concentration en IgG. ● Les pèse-colostrum ont une sensibilité insuffisante pour servir à la détection des “mauvais” colostrums.

Matériel et méthodes

Discussion

● Animaux : 160 vaches Holstein (primipares et multipares) suivies sur 3 années (logettes, ration complète, libre accès au pâturage). ● Protocole expérimental : recueil de 171 échantillons de colostrum dans les 2 h suivant le part ● Calcul de la sensibilité et de la spécificité de chacune des méthodes pour différentes valeurs pivot. La valeur pivot optimale est déterminée en choisissant le seuil permettant d’obtenir le meilleur couple sensibilité, spécificité.

Les facteurs de variation de la concentration en IgG sont : - le délai entre la mise bas et la collecte du colostrum ; - le moment de récolte par rapport à la traite (plus faible en fin de traite) ; - la gestion de l’élevage, alimentation, environnement (un seul élevage pris en compte dans cette étude). ● Les hydromètres et le réfractomètre électronique sont sensibles à la température (conditionne la répétabilité des mesures). ● L’avantage du réfractomètre : pas de réfrigération du colostrum nécessaire. ● Les limites à l’utilisation des hydromètres : [IgG] ≠ densité (= concentration en protéines) affectée par saison, n° de lactation, température, élevage. ❒

Résultats

Synthèse par Cécile Enault, Interne en Médecine Bovine. École Nationale Vétérinaire de Nantes, BP 40706, F-44307 Nantes Cedex 03

NOTES *Sensibilité : capacité du test à détecter les colostrums

Le transfert colostral d’Ig est important pour la survie et la santé du veau. ● Aussi, plusieurs méthodes de mesure de la concentration IgG ont été développées : - la méthode de référence est l’immunodiffusion (celle-ci n’est pas utilisable sur le terrain car délai = 2-3j) ; - Les autres méthodes possibiles sur le terrain sont : - les hydromètres (mesure la masse volumique d’un liquide) ; - les réfractomètres électroniques ; - les pèse-colostrum. ● Mais il n’existe pas de données sur la sensitivité et la spécificité de ces techniques. ●

Seuil 70 g/L

Hydromètre 1

Hydromètre 2 87,5 g/L

Sensibilité* Spécificité** 0,75

0,78

0,76

0,66

Réfractomètre

22 %

0,75

0,78

Pèse colostrum 8,5 kg

0,42

0,74

inadéquats (IgG < 50 g/L)

**Spécificité : capacité du test à détecter les colostrums adéquats (IgG ≥ 50 g/L)

Conclusion ●

LA PASTEURISATION DU COLOSTRUM réduit l’incidence de la Paratuberculose chez des veaux laitiers nouveau-nés Objectif

Objectif de l’étude ❚ Évaluer si la pasteurisation du colostrum peut être bénéfique, pour retarder l'infection de veaux nés de mères infectées par l’agent de la paratuberculose.

Le but de cette étude est d'évaluer si la pasteurisation du colostrum peut être potentiellement bénéfique, pour retarder l'infection de veaux nés de mères infectées par l’agent de la paratuberculose, en comparaison avec des veaux recevant le colostrum et le lait de leurs mères. Matériels et méthodes L'étude a été réalisée dans le troupeau du National Animal Disease Center (Iowa) sur 12 mois. Le statut vis-à-vis de la paratuberculose des vaches de ce troupeau a été défini par dosage des antigènes spécifiques de la réponse IFN-γ,, la mesure du titre en Ac et l’évaluation du portage fécal 21 jours avant le vêlage. ● L’étude a porté sur 11 veaux : neuf nés de ●

REVUE INTERNATIONALE LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 440 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

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Paratuberculose

Subclinique

Clinique

Réponse IFN-γ

+

-

Titre en Ac

Portage fécal

-

+

< 10 cfu/ slant

>100 cfu/ slant

mères infectées sub-cliniquement par la paratuberculose, et deux nés de mères infectées cliniquement. - Les 11 veaux ont été répartis à la naissance en deux groupes (un veau issu de mère infectée cliniquement par groupe). - Un groupe de 6 veaux ont reçu du colostrum de leur mère (CoM) et un groupe de 5 veaux du colostrum pasteurisé (CoP).


revue internationale - un panorama des meilleurs articles - Les veaux du groupe CoM ont été séparés de leur mère 8 heures après la naissance, et ont reçu du lait de celles-ci pendant 3 semaines avant d'être nourris avec du lait de remplacement. - Les veaux du groupe CoP ont été séparés dès la naissance et nourris avec un pool de colostrum (deux fois 2 litres) issu de mères du troupeau non infectées par la paratuberculose (trois tests négatifs successifs, sérologie et culture fécale négatives) pasteurisés (30 min à 65°C), suivi par du lait de remplacement. ● Des cultures des fèces de chaque veau ont été réalisées une fois par mois pendant 12 mois. ● Les veaux ont été euthanasiés à la fin de l’étude et 25 échantillons tissulaires ont été prélevés et analysés par veau. Résultats La réponse en IFN-γ (mesure de l'exposition des veaux aux bactéries pathogènes) débute après 3 mois d'âge pour les veaux CoM et après 5 mois pour les veaux CoP.

● Après 5 mois d'âge, la réponse est supérieure pour le groupe CoM par rapport à CoP. ● La plus faible réponse en IFN-γ chez les veaux CoP suggèrent que l'exposition aux bactéries est plus faible chez ces veaux. ● Le nombre de d’échantillons tissulaires positifs est plus élevé chez les veaux CoM par rapport aux veaux CoP, ce qui indique que le pathogène est capable de se disséminer plus efficacement chez les veaux qui ont bu le colostrum de leurs mères infectées.

Cryptosporidium parvum est reconnu comme un agent majeur d’entérite et de diarrhée néonatale chez le veau, cependant le traitement est difficile. Le lactate d’halofuginone semble être une molécule intéressante, et est recommandée tant pour la prévention que pour le traitement curatif. ● Le but de cette étude est de comparer les effets d’une utilisation de l’halofuginone-lactate (H.F.L.) durant une période de 7 jours à une dose de 0,1 mg/kg comme recommandé par l’AMM pour la prévention et le traitement de la cryptosporidiose chez des veaux spontanément infectés. Matériels et Méthodes L’étude s’est déroulée de novembre 2004 à mars 2005, sur 260 veaux Holstein d’une ferme du centre de la Bohème en République Tchèque dans laquelle la prévalence de la cryptosporidiose chez les nouveau-nés est élevée (100 p. cent chez les veaux entre 9 et 13 jours d’âge). ● Pendant toute la période d’étude, tous les nouveau-nés ont été répartis en quatre groupes en fonction de l’ordre de naissance : - A : 64 veaux ont reçu l’H.F.L entre 1 et 7 jours d’âge ; - B : 64 veaux ont reçu un placebo au même âge ; - C : 65 veaux ont reçu de l’halofuginone-lactate entre 8 et 14 jours d’âge ; - D : 67 veaux ont reçu un placebo au même âge. ● L’H.F.L a été administré oralement une fois par jour à une dose de 0,1 mg/kg, 1h après le repas du matin, sous forme de solution aqueuse à 0,05% (Halocur®). ● Une solution de la même composition mais sans l’agent actif a été administré dans les même conditions dans les lots témoins. ●

2008; 91:3600-3606 Pasteurization of Colostrum Reduces the Incidence of Paratuberculosis in Neonatal Dairy Calves. J. R. Stabel.

Discussion La distribution de colostrum pasteurisé, issu de vaches non paratuberculeuses, associée à la séparation précoce de la mère, peut diminuer l'exposition initiale à l'agent de la paratuberculose des veaux nés de mères infectés. ● Cependant, les bénéfices à long terme d’une telle mesure sont encore à étudier. ❒ ●

EFFICACITÉ CURATIVE ET PRÉVENTIVE DU LACTATE D’HALOFUGINONE contre Cryptosporidium parvum chez des veaux infectés naturellement : un essai avec placebo, en double aveugle, randomisé, centralisé Objectif de l’étude ● La qualité des fèces était notée chaque jour ●

XJournal Dairy Science.

pour chaque veau. Des échantillons fécaux ont été collectés directement dans le rectum, pour un comptage des oocystes, chaque jour pendant les 31 premiers jours de vie. Résultats L’H.F.L diminue significativement l’excrétion d’oocystes ainsi que l’intensité de la diarrhée pendant les 31 premiers jours de vie, qu’il soit administré préventivement ou curativement. ● Le pic d’excrétion dans les lots non traités de situe entre les 12e et 14e jours. L’excrétion d’oocystes évolue dans le temps se fait selon le même schéma dans les deux groupes placebo et le groupe traité entre 8 et 14 jours (avec un pic d’excrétion moins élevé chez ce dernier). Dans le groupe traité préventivement (entre 1 et 7 jours), les comptages d’oocystes ont été basaux pendant les 9 premiers jours, puis augmentaient ensuite pour atteindre un pic au 20e jour, correspondant à une prévalence plus élevée de diarrhées. ●

Conclusion L’halofuginone-lactate diminue l’excrétion de Cryptosporidium parvum ainsi que l’intensité des symptômes associés, mais ceci indépendamment de l’utilisation préventive ou curative. ● La seule différence entre ces deux stratégies est un allongement du délai d’apparition de l’excrétion et des symptômes lors d’une utilisation préventive. ● L’intérêt d’une utilisation préventive de l’halofuginone-lactate est donc essentiellement de retarder l’apparition des symptômes à une période où les veaux, un peu plus âgés, sont plus résistants aux troubles provoqués par les diarrhées. ❒ ●

Synthèse par Lucie Trencart Interne en Médecine Bovine. E.N.V. de Nantes, BP 40706, F-44307 Nantes Cedex 03

Objectif de l’étude ❚ Comparer les effets d’une utilisation de l’halofuginonelactate durant une période de 7 jours à une dose de 0,1 mg/kg comme recommandé par l’AMM pour la prévention et le traitement de la cryptosporidiose chez des veaux spontanément infectés.

XThe Veterinary Journal 2008;177 429-431. Pasteurization and therapeutique efficacy of halofuginone-lactate against Cryptosporidium parvum in spontaneusly infected calves : a centralised, randomised, double-blind, placebo-controlled. Pavel Klein.

Synthèse par Héloïse Ader Interne en Médecine Bovine. E.N.V. de Nantes, BP 40706, F-44307 Nantes Cedex 03

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 441


revue internationale - un panorama des meilleurs articles ASSOCIATION ENTRE LA SÉVÉRITÉ DE L’INFLAMMATION GRANULOMATEUSE DE L’INTESTIN AVEC INFECTION SYSTÉMIQUE par Mycobacterium avium subsp. paratuberculosis et les résultats des tests ante-mortem de recherche de la paratuberculose chez les vaches laitières Matériels et Méthodes ❚ Étudier le lien entre les lésions de l’intestin, la dissémination du bacille paratuberculeux, les signes cliniques et les résultats de coprocultures et de sérologies. ❚ Déterminer si la sévérité des lésions histologiques peut permettre d’estimer le risque de dissémination du bacille paratuberculeux dans l’organisme.

XThe Veterinary microbiology 2008;article in press Association of severity of enteric granulomatous inflammation with disseminated Mycobacterium avium subspecies paratuberculosis infection and antemortem test results for paratuberculosis in dairy cows. Dennis MM, Antognoli MC, Garry FB, Hirst HL, Lombard JE, Gould DH, Salamn MD.

L’étude a été réalisée sur 40 vaches laitières adultes. Les animaux ont été sélectionnés sur la base d’un résultat sérologique positif, ou sur de l’existence d’une cachexie. Par ailleurs, six vaches en bonne santé et sérologiquement négatives ont servi de témoins. ● Les vaches qui présentaient des signes cliniques avaient une note d’état corporelle < 2,5 et une diarrhée. ● La recherche du bacille paratuberculeux (Mycobacterium avium subsp. ou M.A.P.) a été réalisée sur des prélèvements ante mortem de sang et de matières fécales, puis de tissus au cours de l’autopsie (iléon, jéjunum, nœuds lymphatiques iléo-cæcaux, mésentériques, hépatiques, mammaires, retropharyngés, préscapulaires et poplités, foie, rein, poumon, myocarde, muscles coliques et muscle extenseur radial du carpe). ● L’ensemble de ces prélèvements ont permis d’aboutir à la classification suivante : - vaches avec infection systémique = M.A.P. isolé dans des tissus en plus de l’iléon, du jéjunum, et des nœuds lymphatiques mésentériques et iléocæcaux ; - vaches avec une infection limitée au tube digestif = M.A.P. isolé dans les matières fécales, l’iléon, le jéjunum et les nœuds lymphatiques mésentériques et iléo-cæcaux ; - vaches non infectées = absence de M.A.P. dans les matières fécales et les tissus. ● La sévérité de l’inflammation granulomateuse de l’intestin a été évaluée lors d’une analyse histologique de l’iléon, du jéjunum, des nœuds lymphatiques mésentériques et iléo-cæcaux et du foie. ● Un nombre de points (entre 0 et 3) a été attribué à chaque tissu, en fonction de la quantité et de la distribution des leucocytes observés. La somme des points des quatre tissus analysés à l’histologie a permis d’exprimer le degré d’inflammation global de l’intestin. ●

Objectifs de l’étude

Total de points

Synthèse par Marie-Anne Lefol E.N.V.N.

Sévérité de l’inflammation

Degré d’inflammation global de l’intestin

0

Absente

0

2-3

Légère

1

4-6

Modérée

2

7-8

Sévère

3

Résultats Vingt-huit vaches (70 p. cent) étaient infectées. Parmi elles, 21 avaient une infection systémique, et 7 avaient une atteinte limitée au tube digestif. ● Toutes les vaches avec un degré d’inflammation ●

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global de l’intestin de 3 avaient une infection systémique. Les vaches avec un degré 2 ou 3 avaient quant à elles 40 fois plus de chance d’avoir une infection systémique. ● Cinquante-six p. cent des vaches avec une inflammation de degré 2 ou 3 avaient des signes cliniques. Deux vaches sur 11 avaient des signes cliniques de la maladie, mais n’étaient pas infectées, et ne présentaient pas d’inflammation entérique granulomateuse. ● Toutes les vaches avec un degré d’inflammation de 2 ou 3 avaient des lésions entériques macroscopiquement visibles. Cependant, 29 p. cent des vaches sans lésions histologiques présentaient des lésions légères à modérées à l’autopsie. ● Toutes les vaches avec un degré d’inflammation intestinale global de 2 ou 3 avaient une sérologie et une coproculture positives. Cependant, 18 p. cent des animaux avec une coproculture positive n’avaient pas de lésions inflammatoires granulommateuse détectables. Discussion ● Le stade avancé de l’infection est un facteur déterminant de l’atteinte systémique. Cette dernière est presque toujours présente chez les vaches avec une forte inflammation de l’intestin. Elle est présente également dans les stades précoces de la maladie. En effet, 57 p. cent des vaches ont une infection systémique sans signes cliniques et des lésions d’inflammation intestinale légères à absentes. ● L’étude met en évidence que la majorité des individus qui ont des signes cliniques ont des lésions très sévères, mais qu’une partie des vaches ont des lésions modérées sans signes cliniques. ● L’estimation de l’intensité des lésions intestinales permet de mieux estimer le risque d’infection systémique que les méthodes sérologiques ou de cultures fécales. En effet, 61 à 76 p. cent des vaches ont correctement été classées par cette méthode. ● Si un lien entre la paratuberculose et l’inflammation intestinale de l’homme est établi, il sera nécessaire d’écarter de la consommation humaine les tissus infectés par le bacille. L’évaluation histologique des tissus intestinaux pourrait alors être un moyen efficace d’identifier les vaches ayant une dissémination du bacille dans tout l’organisme.

Conclusion La prévalence de l’infection systémique par le bacille paratuberculeux est importante chez les animaux avec une inflammation granulomateuse de l’intestin sévère à modérée.


revue internationale - un panorama des meilleurs articles Cependant, chez certaines vaches, l’infection systémique survient dans les premiers stades de la maladie, en l’absence de lésions entériques identifiables. ● Il existe un lien entre la sévérité des lésions entériques, les signes cliniques, l’excrétion

fécale et le taux d’anticorps. L’histologie du petit intestin peut être intéressante pour dépister les vaches avec une atteinte systémique à l’abattoir en vue d’écarter les tissus infectés de la consommation humaine. ❒

REFROIDISSEMENT DES VACHES LAITIÈRES par tunnel d’évaporation Chez la vache laitière, le stress thermique provoque une augmentation de la fréquence respiratoire et de la température, une diminution de l'activité et de la prise alimentaire, une chute de la qualité et de la production de lait et une chute de la fonction de reproduction. ● Le principe d’un tunnel de ventilation est de créer un courant d’air entre une entrée et une sortie (extracteurs). Dans les tunnels d’évaporation, un système de rafraîchissement de l’air par évaporation d’eau est placé à l’entrée d’air. ●

Matériels et Méthodes L’étude est menée sur deux périodes de 10 semaines, dans une stabulation libre munie de quatre ventilateurs et de quatre brumisateurs d'eau, et d’un tunnel d'évaporation avec deux cellules de refroidissement (21,1°C) et quatre extracteurs d'air. ● Les animaux sont constitués de quatre lots de 10 vaches à lait Prim’holstein. ●

Résultats La vitesse de l’air sur l’ensemble du bâtiment et à différentes hauteurs varie entre 1,46 et 2,59 m/s. La vitesse optimale qui permet des pertes de chaleur par convection est de 1 m/s, la vitesse critique inférieure est de 2,04 m/s. ● Le taux de renouvellement de l’air est de 1 800 l /s/vache. Le minimum recommandé est de 200 l /s/vache. ● Les minima des températures ambiantes sont identiques dans les deux systèmes, mais les températures maximales sont de 3,1 et 5,2°C de moins dans le tunnel. ● Le rétablissement de la température dans le tunnel s’opère en deux minutes après une ouverture des portes. ● L’humidité relative est de 20 à 30 p. cent supérieure dans le tunnel d’évaporation, et approche, ●

certaines semaines, le seuil de saturation. ● Le temps passé en conditions de stress thermique (80 < THI < 90) est réduit de 84 p. cent (335 min/jour vs 54 min/jour) avec le tunnel. ● La température rectale des vaches en stabulation augmente avec la température ambiante, mais elle est stable pour les vaches en tunnel (p < 0,01). ● La fréquence respiratoire augmente au cours du temps dans les deux groupes, mais beaucoup plus fortement pour les vaches en stabulation (p < 0,01). ● En période de fortes chaleurs (28-39°C), la température rectale baisse de 0,6°C (p < 0,01), et la fréquence respiratoire de 13 à 15 mpm (p < 0,01) avec le tunnel. ● Avec le tunnel, l’ingestion augmente de 1,6 kg M.S./j (+ 11 p. cent) à + 1,9 kg/j (+12 p. cent) (p < 0,05), et la production de 2,6 à 2,8 kg/j (p < 0,05). ● Il n’y a pas de modification de la composition du lait (taux protéique, taux butyreux et lactose), ni de la biochimie sanguine (glycémie et acides gras non estérifiés). ● Une baisse du comptage cellulaire somatique est notée pour les vaches en tunnel pendant la période d’étude (-27 et 49 p. cent, p < 0,05).

Objectif de l’étude ❚ Évaluer l'efficacité du refroidissement des vaches laitières par tunnel d'évaporation.

XJournal Dairy Sci. 2008;89:3904-23 Evaporative tunnel cooling of dairy cows in the southeast. I: Effect on body temperature and respiration rate. II: Impact on lactation performance. Smith TR, Chapa A, Willard S, Herndon Jr C, Williams RJ, Crouch J, Riley T, Pogue D.

Conclusion Le tunnel d’évaporation est un moyen efficace pour réduire la température ambiante. ● Son efficacité est maximale lors de fortes chaleurs et d’humidité relative faible, donc limitée la nuit, lors de pluie ou de chaleur humide. ● L’investissement reste important, mais doit être évalué en fonction des gains de productivité et des économies en eau (consommation de 2 p. cent de l’eau nécessaire en stabulation avec brumisateurs). ❒ ●

Synthèse par Marie Martorello Médecine Bovine. École Nationale Vétérinaire de Nantes, BP 40706, F-44307 Nantes Cedex 03

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test clinique les réponses

test clinique - une épizootie de thélite ulcérative herpétique

une épizootie

Henry Gesché1 Nadia Amenna2 Jean-Marie Gourreau3

de thélite ulcérative herpétique dans trois exploitations laitières

1Clinique

vétérinaire Route de Couterne 53110 Lassay-les-châteaux

2L.D.A.

22 5-7 rue du sabot, BP 54 22440 Ploufragan

1 Quelle est votre suspicion diagnostique ? La paravaccine, ou pseudo cow pox, dénommée aussi pseudo-variole, est l’affection la plus courante du trayon (dans plus de 70 p. cent des troupeaux dans certaines régions). Due à un Parapoxvirus, elle se transmet essentiellement par les gobelets de la machine à traire. Bien que des lésions caractéristiques de paravaccine soient présentes (photo 8), ce diagnostic est à écarter au vu des lésions les plus fréquentes. ● La présence d’ulcères superficiels doit faire penser à la fièvre aphteuse. En effet, lors de l’apparition de cette maladie en France en 2001, les premières lésions découvertes étaient des vésicules et des ulcères superficiels localisés sur les trayons. Il se trouve que, par coïncidence, l’exploitation dont nous parlons ici se trouve à 3 km du foyer de fièvre aphteuse de 2001. Mais, contrairement à ce qui avait été observé dans le foyer de fièvre aphteuse, la présence de vésicules n’a pas été constatée dans l’exploitation, et aucun animal faisant l’objet de ce cas clinique ne présentait de lésions buccales ou podales. ● La 3e affection se manifestant par la présence d’ulcères superficiels sur les trayons, la seule plausible après exclusion successive des deux hypothèses précédentes est la thélite ulcérative herpétique. Elle est peut-être sous-diagnostiquée car les lésions ont une tendance naturelle à régresser rapidement, ●

3A.F.S.S.A.

23, Avenue du Général De Gaulle 94706 Maisons-Alfort

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Lésions cutanées dans un cas de lumpy skin disease (photo J.-M. Gourreau).

Encadré 1 - L’analyse histopathologique L’examen des biopsies montre que l’évolution des lésions peut être schématiquement divisée en trois phases : 1. La 1re survient au cours des 24 premières heures suivant l’infection : elle se caractérise par l’apparition d’un œdème (photo 10) et de foyers de nécrose affectant la basale, l’épiderme proprement dit et la paroi des follicules pileux. Les cellules des stratum germinativum et spinosum contiennent des inclusions intra-nucléaires éosinophiles ou légèrement basophiles entourées d’un halo clair. La formation de micro-vésicules par suite de la dégénérescence de la couche de Malpighi peut aussi être observée. Le derme est le siège d’infiltrats de leucocytes, d’éosinophiles, de mononucléaires et d’histiocytes. 2. La 2nde phase, qui s’étend de la 24e heure à la 96e heure, se caractérise par la présence de réactions inflammatoires ●

LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 444 - SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008

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dans le derme et les vaisseaux sanguins. L’œdème superficiel s’étend progressivement aux couches profondes de l’épiderme. Il s’en suit une nécrose épidermique, surtout marquée autour des follicules pileux et des glandes sébacées. Quelques vésicules couvertes par un stratum corneum fin, sont délimitées latéralement par de nombreux syncitia (photo 11). La surface épidermique se nécrose totalement aux environs du 3e jour qui suit l’infection, et les glandes sudoripares se dilatent. Des inclusions éosinophiles et basophiles peuvent alors être observées (photo 12) : elles marquent le passage du virus dans le cytoplasme. 3. La 3e phase débute aux environs du 4e jour après l’infection et se caractérise par le développement progressif d’un processus de régénérescence de l’épiderme, lequel est remplacé vers le 11e jour.

notamment celles qui se développent sur le corps de la mamelle. En revanche, les ulcérations présentes sur les trayons sont souvent entretenues par la traite mécanique qui n’est pas favorable à la cicatrisation d’une plaie de trayon, qu’elle qu’en soit sa nature. ● Cette affection a été décrite en Europe pour la 1ère fois en 1966 par Martin et coll. en Ecosse [7], et par Moussa et coll. en 1981 en France [8]. Elle est due à un Herpesvirus, le B.H.V.2 (Bovine Herpes virus de type 2), qui présente une parenté antigénique avec les virus 1 et 2 de l’Herpès simplex humain et avec le virus de l’herpès B du singe. En revanche, il n’a qu’une très faible parenté avec le B.H.V.1 (Bovine Herpes virus de type 1), l’agent de la rhinotrachéite infectieuse, et aucune avec l’O.H.V.1 (ovine herpes virus de type 1), le virus associé au coryza gangreneux en Europe [5]. 2 Comment la confirmer ? ● Le diagnostic de la thélite herpétique ulcérative fait appel à l’identification du virus après culture et à la mise en évidence de l’effet cytopathogène caractéristique des Herpès (syncitia, margination de la chromatine, inclusion intranucléaire éosinophile), ou à celle de son génome par P.C.R. [2]. ● L’examen histopathologique peut être utilisé, car il donne des images caractéristiques cf. ce cas (encadré 1). ● La thélite ulcérative herpétique sévit classiquement sous trois formes : - Elle se traduit par l’apparition d’ulcères douloureux localisés aux trayons. - Elle débute par la formation de plaques blanchâtres, indurées et douloureuses localisées au sein de la paroi. Un œdème les accompagne. Des vésicules de 0,5 à 2 cm apparaissent alors mais celles-ci passent souvent inaperçues car elles se rompent lors de la traite. La peau s’indure, devient sèche et acquiert une coloration bleu-noirâtre en 24 h. - Des ulcères se forment vers le 3e jour : ils contiennent du matériel nécrotique qui persiste durant 5 à 10 jours, temps au bout duquel ils se recouvrent d’une croûte de couleur variable du brun-jaunâtre au rouge foncé et qui est éliminée au cours de la traite. - Un néo-épithélium se forme au bout de 15 jours à 3 semaines et la cicatrisation se fait de manière centripète au bout d’un mois. Cette évolution peut être plus rapide mais aussi plus lente, jusqu’à 3 mois. Il arrive que les lésions s’étendent à la peau de la mamelle et soient


test clinique - une épizootie de thélite ulcérative herpétique parfois tellement profondes que le lait sourd du fond de l’ulcère. Une mammite par rétention est souvent associée à ces lésions, surtout chez les animaux dont l’extrémité du trayon (sphincter) est affectée. - Reed et coll. [9] et Gibbs et Collings [3] ont décrit une forme exclusivement mammaire, la peau des trayons n’étant pas affectée. Les lésions disparaissaient à la fin de la lactation pour réapparaître au part suivant. Cette forme s’observerait plus souvent sur les femelles récemment vêlées. Mais il n’est pas rare de voir les deux formes coexister. La cicatrisation des lésions mammaires serait plus rapide que celle des lésions du trayon. - Une forme généralisée (maladie d’Allerton, pseudo lumpy skin disease) a été décrite par Johnston et Deas en Grande-Bretagne. Les lésions étaient réparties sur l’ensemble du corps, évoquant celles de la maladie nodulaire cutanée (lumpy skin disease), due à un Poxvirus (photo 9) [6]. - Des formes bucco-nasales strictes ont été observées chez les veaux tétant leur mère malade. ● Les lésions les plus importantes et les plus profondes se situent classiquement sur les zones à peau froide. Elles y persistent plus longtemps. Les animaux les plus fréquemment atteints sont souvent les primipares, juste après le vêlage. Les animaux s’infecteraient durant la gestation suite à une blessure cutanée, mais ne développeraient de lésions qu’après le stress du part et les modifications hormonales qui lui sont liées [10]. Au niveau de la peau, le virus se multiplie essentiellement dans les cellules de la couche de Malpighi. Il est détecté aussi dans les ganglions lymphatiques et le tissu nerveux. Il persisterait dans l’organisme au moins pendant 2 ans. ● L’animal infecté réagit en produisant un taux élevé d’interféron par l’intermédiaire de ses monocytes sanguins et des anticorps protecteurs qui apparaissent dès le 4e jour post-infection pour persister durant 2 à 4 ans [10]. Cette persistance relativement longue s’explique par le jeu des ré-infections asymptomatiques successives ou par la réactivation de virus latents dans l’organisme d’animaux convalescents ou guéris (encadré 2). 3 Existe-t-il une relation entre ces cas ? ● La thélite herpétique est une affection assez contagieuse qui se transmet, au sein de l’exploitation, d’un animal à l’autre par la traite (gobelets trayeurs, mains de l’éleveur). Le taux de morbidité varie de 15 à 90 p. cent, avec une moyenne de 50 p. cent. La transmission est favorisée par la présence d’érosions, de crevasses, d’œdème mammaire (fréquent avant la mise bas) ou d’une affection intercurrente comme le cow pox [5].

10

Épiderme. Infiltration œdémateuse et neutrophilique du derme superficiel et de l’épiderme. Grossissement x 200 H.E.S.

Encadré 2 - Une origine et une pathogénie qui restent mystérieuses La survenue de la maladie dans une exploitation saine peut aussi se faire suite à l’introduction d’un animal porteur latent. En effet, il est acquis que les herpèsvirus (le virus de la thélite ulcérative herpétique se comporte comme le virus de l’I.B.R.) s’installent à l’état latent après une infection primaire, voire après une ré-infection. Le mécanisme du maintien de l’état latent n’est pas encore bien connu. Il se pourrait qu’intervienne un système complexe de répression de l’expression des gènes viraux. Ainsi, expérimentalement, une injection de dexaméthasone est rapidement suivie d’une induction du cycle de multiplication virale dans les cellules infectées. ● Le processus de réactivation virale est provoqué dans les conditions naturelles par des stimuli très divers (vêlage, stress, …), rencontrés par l’animal durant sa vie, qui provoquent la réexcrétion de l’herpèsvirus (plus ou moins importante en fonction du taux des anticorps présents), éventuellement associée à la survenue de signes cliniques de la maladie, et à une réponse immune secondaire, qui stoppe rapidement le processus de multiplication virale sans empêcher une nouvelle survenue de la latence virale.

11

Nécrose épidermique entraînant la formation d’une pustule recouverte d’une couche cornée fine (croûte), (petite flèche). - Noter l’exsudat purulent entourant un syncytium (grande flèche) épithélial. Grossissement x 400 H.E.S.

● La thélite hépertique se manifeste sous une forme plus grave dans les effectifs infectés pour la 1re fois. Les années suivantes, elle ne s’observe que sur les primipares. La maladie apparaît généralement dans les élevages en automne et au début de l’hiver, sa plus haute incidence étant à la mi-octobre, notamment après les grosses pluies, au moment où les diptères hématophages sont nombreux. Par ailleurs, des anticorps neutralisants ont pu être mis en évidence chez des génisses gestantes qui n’ont jamais été en contact avec des animaux infectés [10]. ● Plusieurs auteurs ont suggéré la transmission du virus par l’intermédiaire de diptères piqueurs. La preuve n’en a jamais été apportée, bien que le virus ait pu être isolé de Musca fasciata nourrie sur un bovin infecté [1, 4]. ● Dans ce cas, le fait de trouver à quelques jours d’écart trois exploitations atteintes et n’ayant aucune relation directe entre elles corroborerait cette explication . ❒

12

Derme à plus fort grossissement, nécrose et formation de syncytia au niveau d’une glande sébacée. - Noter les inclusions intranucléaires avec marginalisation de la chromatine (flèche) : elles marquent le passage du virus dans le cytoplasme. Grossissement x 400 H.E.S.

Références 1. Castrucci G, Rampichini L, Frigeri F, coll. Preliminary studies on the diffusion ob bovidherpesvirus 2 in experimentally infected calves. Folia Vet. Lat.,1977;(7)3:242-51. 2. De Giuli L, Magnino S, Vigo PG, coll. Development of a polymerase chain reaction and restriction typing assay for the diagnosis of bovine herpesvirus, bovine herpesvirus 2 and bovine herpesvirus 4 infection. J. Vet. Diagn. Invest., 2002;14:353-6. 3. Gibbs EPJ, Collings DF. Observations on bovine herpes mamillitis (BHM) virus infections of heavily pregnant heifers and young calves. Vet. Rec., 1972;(90)3:66-8. 4. Gibbs EPJ, Johnson RH, Osborne AD. Experimental studies of the epidemiology of bovine herpes mamillitis. Res. Vet. Sci., 1973; (14)2:139-44. 5. Gourreau JM, Pauluzzi L. La thélite ulcérative des bovins. Le Point Vét., 1988;(20)114:55-68. 6. Johnston WS, Dean DW. Production of generalised skin lesions in calves inoculated with bovine mamillitis virus. Vet. Rec., 1967;(80) 13:420. 7. Martin WB, Martin B, Lauder IM. Ulceration of cow’s teats caused by a virus. Vet. Rec., 1964; (76)1:15-6. 8. Moussa AY, Fedida M, Millet A, coll. Étude clinique et virologique de cas de thélite ulcérative bovine apparus dans l’Orne en 1981. Rec. Méd. Vet., 1982;(158)2:197-203. 9. Reed DE, Langpap TJ, Anson MA. Characterization of herpesviruses isolated from lactating dairy cows with mammary pustular dermatitis. Am. J. Vet. Res, 1977;(38)10:1631-4. 10. Scott FMM, Holliman A. Serum antibodies to bovine mamillitis virus in pregnant heifers. Vet. Rec., 1984;114:19.

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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE élevages et santé vol 2 / n°10 SEPTEMBRE / NOVEMBRE 2008 - 445


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