N°14 AOÛT SEPTEMBRE OCTOBRE 2003 LES DIARRHÉES AIGUËS Conduites à tenir, fiches pratiques :
lumiere digestive flore residente nutriments
lamina propria mucus
DOSSIER :
LES DIARRHÉES AIGUËS CHEZ LE CHIEN ET LE CHAT Les diarrhées aiguës sont à considérer comme un véritable syndrome clinique, d’étiologie mutifactorielle, aux conséquences parfois dramatiques ...
Management et entreprise Dossier - Comment répondre à la remarque : “c’est cher !”: sept scénarios pratiques pour s’y préparer Fiche-action - Votre client s’exprime, écoutez-le
Témoignage - “L’hospitalisation de convenance, dans l’intérêt du client et du praticien...” Tribune - Quand la consultation conduit à la prescription de nutritionnel santé ...
REVUE DE FORMATION CONTINUE À COMITÉ DE LECTURE
- Conduite à tenir face à une diarrhée aiguë isolée - Quels examens complémentaires choisir ? - Conduite à tenir face à une diarrhée aiguë en élevage canin - Fiche - Comment réaliser une coproscopie - Reconnaître et traiter les diarrhées d’origine toxique - Prescrire ou non des antibiotiques - Prescrire un pansement gastro-intestinal - Comment bien utiliser les modérateurs du transit intestinal - Fiche Pharmacovigilance
Observation : - Une diarrhée aiguë liée à une infection parasitaire en élevage
Féline - Conduite à tenir face aux diarrhées aiguës chez le chaton - Les spécificités thérapeutiques des diarrhées du chaton
Rubriques - NAC : La diarrhée aiguë, une urgence chez les rongeurs et les lagomorphes - Nutrition : Diète et réalimentation lors de diarrhée aiguë - Principe actif : Le lopéramide - Immunologie et le B.A. BA en BD : La réponse immunitaire digestive
sommaire Éditorial par Patrick Lecoindre Test clinique : Douleur à la flexion et à l’extension du coude Cyrille Martin, Claude Carozzo réponses page 81 Questions-réponses sur les diarrhées aiguës chez le chien et le chat Jean-Luc Cadoré, Christophe Hugnet
N°14 AOÛT SEPTEMBRE OCTOBRE 2003
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CANINE - FÉLINE Conduite à tenir lors de diarrhée aiguë isolée chez le chien et le chat Brice Reynolds Quels examens complémentaires choisir lors de diarrhée ou de vomissements aigus chez le chien et le chat ? Brice Reynolds Conduite à tenir face à un épisode de diarrhée aiguë en élevage canin Philippe Pierson Fiche - Comment réaliser une coproscopie à la clinique Gilles Bourdoiseau Reconnaître et traiter les diarrhées aiguës d'origine toxique Thierry Buronfosse, Marcos Perès-Lopez, Florence Buronfosse Fiche - Les points forts de l’examen clinique Colette Arpaillange Observation clinique - Une diarrhée aiguë liée à une infection parasitaire dans un élevage canin Philippe Pierson Thérapeutique - Prescrire ou non des antibiotiques lors de diarrhée aiguë chez le chien et le chat Armelle Diquelou, Alain Bousquet-Melou Thérapeutique - Prescrire un pansement gastro-intestinal chez le chien et le chat Marc Gogny Thérapeutique - Comment bien utiliser les modificateurs du transit intestinal Colette Arpaillange, Dominique Fanuel, Marc Gogny Fiche - Pharmacovigilance : deux exemples en gastro-entérologie chez le chien et le chat Xavier Pineau, Florence Buronfosse, Stéphane Queffélec
DOSSIER
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LES DIARRHÉES AIGUËS chez le chien et le chat
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FÉLINE Conduite à tenir diagnostique face aux diarrhées du chaton Sandra Brau Les spécificités thérapeutiques des diarrhées du chaton Sandra Brau
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RUBRIQUES NAC - La diarrhée aiguë, une urgence chez les rongeurs et les lagomorphes Samuel Boucher Nutrition - Diète et réalimentation lors de diarrhée aiguë chez le chien Géraldine Blanchard, Bernard-Marie Paragon Principe actif - Le lopéramide Marc Gogny Immunologie - La réponse immunitaire digestive Séverine Boullier Le B.A.BA en BD - La réponse immunitaire digestive Frédéric Mahé Geste chirurgical - Le lavage gastrique chez le chien et le chat Christophe Hugnet
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MANAGEMENT ET ENTREPRISE Dossier - Comment répondre à la remarque : “c’est cher !” Fabrice Labadie 75 Fiche action - Votre client s’exprime, écoutez-le 77 Témoignage - L’hospitalisation de convenance Laurent Guilbaud 78 Tribune - Quand la consultation conduit à la prescription de nutritionnel santé Fabrice Crépin, Directeur activité vétérinaire France - Royal Canin 80 Test clinique - Les réponses Tests de formation continue - Les réponses
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Fiche ophtalmologique - Kératites chroniques du chien et du chat : complément et rectificatif du Nouveau Praticien Vétérinaire N° 13
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CANINE - FÉLINE FÉLINE RUBRIQUE MANAGEMENT
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 243
NÉVA Europarc - 15, Rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 e-mail neva@neva.fr
Conseil scientifique
test clinique
douleur à la flexion et à l’extension du coude
Gilles Bourdoiseau (E.N.V.L.) Jean-Luc Cadoré (E.N.V.L.) Dominique Fanuel (E.N.V.N.) Pascal Fayolle (E.N.V.A.) Marc Gogny (E.N.V.N.) Jean-François Guelfi (E.N.V.T.) Jean-Pierre Jégou (praticien) Roger Mellinger (praticien)
Cyrille Martin Claude Carozzo
Rédacteurs en chef
Unité de Chirurgie et Anesthésiologie E.N.V.L. 1 Avenue Bourgelat , 69280 Marcy l’Étoile
Colette Arpaillange (E.N.V.N.) Christophe Hugnet (praticien)
Rédacteur en chef management Philippe Baralon (Phylum)
Comité de rédaction Xavier Berthelot (Reproduction, E.N.V.T.) Géraldine Blanchard (Alimentation - nutrition, E.N.V.A.) Corine Boucraut-Baralon (Diagnostic, E.N.V.T.) Florence Buronfosse (Toxicologie, E.N.V.L.) Luc Chabanne (Immunologie - Hématologie, E.N.V.L.) Bernard Clerc (Ophtalmologie, E.NV.A.) Valérie Chetboul (Cardiologie, E.N.V.A.) René Chermette (Parasitologie - mycologie, E.N.V.A.) Olivier Dossin (Médecine interne, néphrologie, E.N.V.T.) Valérie Dramard (Comportement, praticien) Olivier Jongh (Ophtalmologie, praticien) Fabrice Labadie (Management) Alain Fontbonne (Reproduction, E.N.V.A.) Alain Ganivet (Élevage et collectivité, praticien) Laurent Marescaux (Imagerie, praticien) Séverine Boullier (Microbiologie, E.N.V.T.) Claude Petit (Pharmacie - toxicologie, E.N.V.T.) Patricia Ronsin (Reproduction, E.N.V.T.) Etienne Thiry (Virologie, Liège)
Chargées de mission rédaction
U
n chiot Berger allemand de six mois est présenté à la consultation pour une boiterie de l’antérieur gauche qui évolue depuis quinze jours. - L’examen clinique général est normal. - L’examen à distance de l’animal permet de mettre en évidence une boiterie sévère de l’antérieur gauche. - L’examen rapproché révèle une tuméfaction importante du coude gauche, ainsi qu’une douleur à la flexion et à l’extension. Des radiographies du coude gauche sont réalisées : - une radiographie de face (photo 1) ; - une radiographie de profil du coude en flexion (photo 2).
1 Radiographie de face du coude gauche (clichés Unité clinique d’imagerie E.N.V.L.)
Valérie Colombani Anne Quinton
1 Quelles sont vos hypothèses diagnostiques ?
Abonnement et Promotion Marie Servent Publicité Maryvonne Barbaray Anne Quinton - Marie Servent
2 Quelles sont les lésions présentes sur les radiographies ?
NÉVA Europarc - 15, Rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX Tél. 01 41 94 51 51 • Fax 01 41 94 51 52 e-mail neva@ neva.fr
3 Quelles attitudes thérapeutiques envisagez-vous ?
Directeur de la publication Maryvonne Barbaray Revue bimestrielle éditée par LES NOUVELLES ÉDITIONS VÉTÉRINAIRES ET ALIMENTAIRES - NÉVA
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Réponses à ce test page 81
SARL au capital de 7622€ Siège social : Europarc - 15, Rue Le Corbusier 94035 CRÉTEIL CEDEX
comité de lecture
C.P.P.A.P 1007 T801 21 I.S.S.N. 0399-2519 Impression - photogravure : Imprimerie Nouvelle Normandie 24, rue Haëmers B.P. 14 - 76191 YVETOT Cedex
Reproduction interdite Toute reproduction ou représentation, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, de la présente publication sans autorisation est illicite et constitue une contrefaçon. L’autorisation de reproduire un article dans une autre publication doit être obtenue auprès de l’éditeur, NÉVA. L’autorisation d’effectuer des reproductions par reprographie doit être obtenue auprès du Centre français d’exploitation du droit de la copie (C.F.C.). LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 244 - AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
Radiographie de profil du coude gauche en flexion.
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Hélène Arnold-Tavernier, Jean-François Bardet, Michel Baron, Jean-Jacques Bénet, Emmanuel Bensignor, Juliette Besso, Gérard Bosquet, Vincent Boureau, Didier Boussarie, Stéphane Bertagnoli, Stéphane Bureau, Jean-Jacques Bynen, Claude Carozzo, Sylvie Chastant-Maillard, Claude Chauve, Yan Cherel,
Cécile Clercx (Liège), Jean-Pierre Cotard, Jack-Yves Deschamps, Pierre Desnoyers, Gilles Dupré, Patrick Devauchelle, Brigitte Enriquez, Pascal Fanuel, Frédéric Gaschen (Berne), Olivier Gauthier, Emmanuel Gaultier, Sébastien Géroult, Jean-Pierre Genevois, Isabelle Goy-Thollot, Laurent Guilbaud, Jacques Guillot,
Philippe Hennet, Marc Henroteaux, Gérard Le Bobinnec Yves Legeay, Bertrand Losson (Liège), Leila Loukil, Sandrine Macchi, Lucile Martin-Dumon, Philippe Masse, Martine Mialot, Jean-Paul Mialot, Pierre Moissonnier, Patrick Pageat, Pierre Paillassou, Didier Pin, Xavier Pineau,
Luc Poisson, Jean-Louis Pouchelon, Pascal Prélaud, Nathalie Priymenko, Alain Régnier, Dan Rosenberg, Yannick Ruel, Yves Salmon, Odile Sénécat, Brigitte Siliart, Isabelle Testault, Jean-Jacques Thiébault, Bernard Toma, Patrick Verwaerde, Muriel Vabret, Isabelle Valin.
éditorial L’étude des diarrhées chroniques occulte souvent l’importance des diarrhées aiguës, pourtant considérable...
L
e développement des techniques d’investigations instrumentales du tube digestif, comme l’endoscopie ou l’échographie, une meilleure interprétation des résultats de l’histologie de la muqueuse digestive, l’apparition de tests biologiques fiables, ont permis ces dernières années de mieux appréhender les syndromes de malassimilation et les problèmes de diarrhées chroniques des carnivores domestiques. De nombreuses et récentes publications témoignent de l’engouement des gastro-entérologues pour ces questions si difficiles à gérer. Ceci a semblé occulter l’importance pratique de l’étude des diarrhées aiguës, qui est pourtant considérable. Si la diarrhée aiguë est une affection le plus souvent bénigne, qui guérit spontanément sans séquelles, une surveillance médicale est indispensable en raison du risque initial de déshydratation et de perturbations électrolytiques, suivi d’un risque de malnutrition très préjudiciable chez le jeune animal en croissance ou chez l’animal âgé. En effet, sur le plan physiopathologique, une diarrhée aiguë se résume essentiellement à une perturbation des échanges hydriques et électrolytiques au travers de la muqueuse intestinale. Parmi les différents mécanismes susceptibles de perturber ces échanges, l’augmentation des pertes passives d’eau d’origine osmotique est le plus fréquent chez le chien, et le plus souvent, la conséquence d’erreurs alimentaires. Si la diète constitue le principal traitement de ce type de diarrhée, d’autres mécanismes physiopathologiques peuvent apparaître et entraîner une déshydratation avec perte d’eau, et surtout d’électrolytes. C’est le cas des diarrhées sécrétrices, dont les principaux agents sont des endotoxines bactériennes. La prise en charge de l’animal atteint de diarrhée aiguë de ce type nécessite une correction rapide et appropriée des complications hydro-électrolytiques. Certaines diarrhées aiguës sont la conséquence d’affections gastro-intestinales graves, qui déterminent des lésions sévères de la muqueuse de l'intestin grêle, comme une atrophie villositaire par destruction élective des cellules entérocytaires des villosités (gastroentérite à parvovirus) ou de sévères altérations de la perméabilité intestinale (gastroentérite hémorragique idiopathique (G.E.H.I.), surtout observée chez de jeunes chiens de races miniatures). Ces lésions de la muqueuse intestinale entraînent non seulement une fuite de liquides et d’électrolytes mais aussi une malabsorption et une prédisposition à l'apparition d'une bactériémie et d'un syndrome septique. Les signes cliniques qui caractérisent ces affections associent des diarrhées souvent hémorragiques et des signes de septicémie, fièvre, dépression, choc. - Les symptômes observés dans les diarrhées d'origine infectieuse associent une diarrhée profuse, souvent hémorragique, à des signes d'infection systémique (salmonelloses, colibacilloses). Certaines infections intestinales peuvent être foudroyantes chez le chiot (colibacillose néonatale). Les campylobactérioses provoquent généralement des diarrhées aiguës de type colite. - Ces diarrhées bactériennes frappent plus souvent les sujets jeunes en collectivité, les sujets immunodéprimés (chats infectés par les virus immunodépresseurs, corticothérapie), les animaux en état de stress (traumatisme, chirurgie, maladie grave). La salmonellose et la campylobactériose sont des zoonoses, et les risques de contamination doivent être évalués, surtout en présence de jeunes enfants. Notons l’importance des agents parasitaires, particulièrement en élevage canin ou félin, et le grand nombre de toxiques ménagers industriels, voire médicamenteux, qui peuvent occasionner une inflammation aiguë de l’intestin. L’emploi souvent systématique et irraisonné des antibiotiques, particulièrement dans le traitement des diarrhées aiguës, me semble un point essentiel, comme la notion d’écosystème digestif, souvent méconnue (cf. Définitions). - Les bactéries de la flore normale jouent un rôle essentiel dans les facteurs de régulation. Elles sont capables de s'opposer à l'implantation et à la multiplication de bactéries pathogènes. La capacité essentielle à protéger le tube digestif et l'organisme a été appelé "effet de barrière” ou encore “résistance à la colonisation". Ce terme est aussi employé pour désigner les interactions entre les bactéries de la flore normale, qui visent à limiter la croissance anormale de certaines d'entre elles.
Patrick Lecoindre Clinique vétérinaire des Cerisioz 5, route de St-Symphorien d’Ozon 69800 Saint Priest
Essentiel ❚ Il est essentiel pour le clinicien de connaître les facteurs de gravité, afin d’identifier les cas sévères qui nécessitent une prise en charge médicale immédiate. Les diarrhées aiguës peuvent relever de causes multiples : les plus fréquentes sont parasitaires, toxiques, alimentaires, médicamenteuses ou infectieuses, virales ou bactériennes. Des organismes endogènes ou exogènes ont été reconnus responsables de diarrhées aiguës chez le chien et le chat. Leur pouvoir pathogène s'exerce selon les modalités : adhésion, production d'entérotoxines, invasion de la muqueuse, abrasion villositaire, lésion d'attachement-effacement. ❚ Les diarrhées aiguës se rencontrent au cours de l’évolution d’affections extradigestives, métaboliques ou systémiques. Des examens complémentaires sont nécessaires pour établir un diagnostic étiologique, puis une stratégie thérapeutique. NOTE * Un écosystème se définit comme l'ensemble de toutes les populations vivantes, ainsi que de tous les composants inertes qui interfèrent dans une région définie de l'espace et du temps. LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 246 - AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
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Définitions
éditorial - Les diarrhées aiguës chez le chien et le chat
❚ Flore normale et flore de passage La flore normale ou autochtone, saprophyte, ou résidente, est l'ensemble des espèces microbiennes présentes de façon constante dans l'écosystème* digestif et capables de s'y multiplier. Par opposition, la flore de passage ou flore allochtone concerne les espèces bactériennes qui traversent le tractus digestif sans pouvoir le coloniser, en dehors de certaines circonstances pathologiques. La flore intestinale autochtone présente une relative stabilité quantitative et qualitative, ce qui suggère l'idée d'une régulation et un concept d'écosystème intestinal. La flore intestinale fait ainsi partie intégrante de l'hôte, et il existe d'étroites et de multiples interactions entre les bactéries elles-mêmes et entre les bactéries et les autres éléments de cet écosystème. Différents facteurs participent à son équilibre.
- L’emploi des antibiotiques de façon systématique dans le traitement des diarrhées aiguës est dangeureux car il favorise un déséquilibre de la microflore. Celle-ci ne peut plus jouer son rôle de régulateur, et des bactéries pathogènes comme les clostridies peuvent se manifester, notamment chez le chiot ou chez l’animal hospitalisé et malade. - Peu décrite chez l’animal, la notion de diarrhée nosocomiale ou de diarrhée post-antibiotiques comme les colites pseudomembraneuses est bien connue chez l’homme. Il semble que les carnivores domestiques soient moins sensibles que les humains à l’action délétère des antibiotiques sur la flore intestinale. Il est vraisemblable aussi que des diarrhées aiguës qui auraient bien répondu à des mesures diététiques se transforment, après des traitements antibiotiques, en diarrhée chronique, qui occasionnent des syndromes de malassimilation. Motif de consultation fréquent en médecine vétérinaire, les diarrhées aiguës sont un véritable syndrome clinique d’étiologie souvent multifactorielle aux conséquences parfois rapidement dramatiques. La nécessité d’une démarche clinique cohérente, la difficulté du choix des examens complémentaires et la nécessité d’une stratégie thérapeutique adaptée à la gravité du cas illustrent l’importance de l’étude des diarrhées aiguës ❒ et des articles de ce Dossier spécial du NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE.
questions réponses sur… la diarrhée aiguë du chien et du chat
■ Dans l'arsenal thérapeutique, les pré- et probiotiques ont-ils une utilité ? Les probiotiques sont très largement étudiés en médecine humaine. Ce sont des composés dont l’intérêt est de permettre l'ensemencement de la flore digestive par des levures ou des bactéries. ■ Doit-on employer les mêmes probiotiques chez les carnivores et chez l'homme, alors que les flores digestives sont différentes ? ● Dans le domaine vétérinaire, les probiotiques sont fréquement employés chez les chevaux et chez les ruminants. Chez les carnivores domestiques, aucun produit contenant des probiotiques ne dispose d'A.M.M. actuellement. ● L'utilisation chez l’animal d'un probiotique destiné à l'homme n'est fondée sur aucune étude scientifique : leur utilisation reste du domaine de l'expérimentation clinique. ■ Quels sont les risques zoonosiques lors de diarrhée aiguë ? ● Les facteurs zoonosiques sont principalement parasitaires : helminthoses, giardioses, et bactériens : salmonellose, campylobactériose, ... La toxoplasmose garde une place particulière puisque les carnivores domestiques semblent n'être excréteurs que quelques jours. Une diarrhée transitoire peut être observée chez l’animal pendant la période d’excrétion. ● Il est essentiel que les personnes à immu-
nité déficiente prennent des précautions lors de la manipulation des excréments de leur chien ou de leur chat atteint de diarrhée, voire lorsqu’elles caressent leur animal. Les enfants en bas âge, les femmes enceintes, les malades atteints de syndrome d’immunodéficience acquise (S.I.D.A.), les personnes qui ont reçu une greffe et qui sont traitées par un immunodépresseur, les personnes qui reçoivent un traitement anticancéreux, ... sont concernés par ces mesures. ■ Quelle est la place des réhydratants per os dans le traitement des diarrhées aiguës ? Sont-ils efficaces ? ● La réhydratation per os est un élément souvent négligé de la réanimation médicale. Elle est très efficace tant que le transit est conservé, et en l’absence de vomissements. De nombreuses solutions reconstituées avec des électrolytiques déshydratés ont une A.M.M. pour les carnivores domestiques. ● Leur utilisation permet une récupération fonctionnelle des organismes malades aussi efficace que les perfusions, lorsque le degré de gravité n’est pas trop élevé. Ainsi, un chiot convalescent qui a repris de la vigueur après une diarrhée aiguë, et qui risque d'arracher les perfusions et les cathéters malgré les précautions prises (collerettes, bandages, ...), peut recevoir un réhydratant per os dans son eau de boisson, à condition de lui proposer une gamelle ❒ d'eau en plus.
réponses de Jean-Luc Cadoré E.N.V.L., Département hippique Médecine interne 1, avenue Bourgelat, BP 83 69280 Marcy l’Étoile
Christophe Hugnet Clinique vétérinaire des Lavandes 8, rue Aristide Briand 26160 La Bégude de Mazenc
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 247
conduite à tenir
lors de diarrhée aiguë isolée chez le chien et le chat La conduite à tenir face à une diarrhée est différente s’il s’agit d’une diarrhée aiguë ou d’une diarrhée chronique, d’un cas observé chez un animal isolé ou dans un élevage. Cet article présente l’approche diagnostique et thérapeutique recommandée devant un épisode de diarrhée aiguë isolée.
L
’apparition d’une diarrhée aiguë est un motif de consultation très fréquent en médecine des carnivores domestiques. La démarche diagnostique et l’approche thérapeutique sont adaptées de façon individuelle et rationnelle à la nature et à la gravité des troubles digestifs. La plupart des affections digestives aiguës sont limitées et ne requièrent qu'un traitement symptomatique. Lors de diarrhée aiguë sévère, hémorragique ou accompagnée de signes généraux, la prise en charge fondée sur la thérapeutique liquidienne nécessite d’hospitaliser l'animal. Des examens complémentaires nécessaires au diagnostic étiologique sont pratiqués. COMMENT ÉTABLIR LE DIAGNOSTIC ? Trois étapes sont nécessaires au diagnostic : le recueil de l’anamnèse et des commémoratifs, l’examen clinique et les examens complémentaires. Étape n°1 : le recueil de l’anamnèse et des commémoratifs
● Le recueil de l’anamnèse et des commémoratifs s’attache : - au mode de vie de l’animal : contact avec d’autres animaux, exposition à une alimentation non contrôlée ou à des produits toxiques, … ; - à son statut vaccinal ; - aux dernières vermifugations ; - à ses antécédents médicaux ; - aux éventuels traitements en cours. ● Les circonstances d’apparition, les modalités d’évolution de la diarrhée, les caractéristiques des défécations et des matières
Brice Reynolds E.N.V.T. Unité de médecine interne du chien et du chat 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex
Objectif pédagogique Adopter une démarche diagnostique systématique lors de diarrhée aiguë chez un animal isolé.
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Cytologie fécale : nombreuses clostridies sporulées (aspect en épingle à nourrice) (photo C. Trumel).
Essentiel
fécales sont aussi riches d’enseignement. De même, un vomissement associé est distingué de la dysphagie, de la régurgitation ou encore de l'expectoration. ● Une diminution de l’appétit, une altération de l’état général ou des saignements digestifs (méléna ou sang frais en nature), observés par le propriétaire, doivent retenir l’attention du praticien. La présence de sang dans les vomitats (hématémèse) ou dans les selles (méléna, hématochésie), des vomissements incoercibles malgré une diète totale, une diarrhée profuse sont observés dans les affections les plus sérieuses. ●
❚ L’examen clinique général comprend une palpation abdominale et un toucher rectal. ❚ Il est indispensable d’identifier les formes graves, qui nécessitent une hospitalisation (prise en charge thérapeutique offensive, examens complémentaires). ❚ Lors de diarrhée aiguë, la première mesure à prendre est la diète hydrique. ❚ Le suivi effectué au cours de l’hospitalisation comprend : - une courbe de poids ; - une évaluation clinique biquotidienne ; - une estimation quantitative et qualitative des pertes fécales ; - des mesures régulières de paramètres sanguins (ionogramme ou kaliémie, hématocrite, protidémie, …).
Étape n°2 : l’examen clinique général 1. L’examen clinique général évalue tout d’abord l’attitude de l’animal, son état d’hydratation, sa température rectale, son statut cardiovasculaire (la couleur des muqueuses, la fréquence cardiaque, les caractéristiques du pouls, le temps de remplissage capillaire). 2. La palpation abdominale est rigoureuse et attentive. Elle peut mettre en évidence une anomalie, toujours préoccupante : douleur, masse, polyadénopathie mésentérique, … 3. Le toucher rectal, lorsqu'il est autorisé par le format de l'animal, est systématique. Outre l'exploration anatomique, il permet aussi de suspecter un syndrome occlusif (absence de matières fécales, muqueuse rectale sèche et collante), de confirmer l'ingestion de corps étrangers, de visualiser et de prélever un échantillon de selles, … Ces étapes permettent de préciser, en fonction de critères classiques, si l’animal présente :
CANINE - FÉLINE
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 249
quels examens complémentaires choisir lors de diarrhée ou de vomissements aigus chez le chien et le chat ?
Brice Reynolds
E.N.V.T. Unité de médecine interne du chien et du chat 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex
Lors de diarrhée ou de vomissements aigus, les examens complémentaires sont indispensables pour quantifier le degré d’atteinte de l’animal et pour établir le diagnostic. Quand y recourir, lesquels choisir et comment les interpréter ?
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ans les formes de diarrhée graves, la prise en charge médicale de l’animal implique de rechercher et de corriger les complications secondaires à l'évolution des troubles digestifs, et de mettre en œuvre des examens complémentaires indispensables au diagnostic étiologique. ● La diarrhée est fréquente chez les carnivores, et rétrocède spontanément dans la plupart des cas. Sans symptôme associé et sans répercussion sur l'état général, elle relève d'un traitement simple, le plus souvent symptomatique. ● Parfois, le recueil des commémoratifs, complété par l’examen clinique, met en évidence des signes d'affection extra-digestive ou multisystémique. Ces formes graves (atteinte générale) nécessitent l’hospitalisation de l’animal, afin de procéder à une prise en charge thérapeutique offensive, et de réaliser des examens complémentaires spécifiques. ● Dans le diagnostic de la diarrhée aiguë, les informations fournies par les examens complémentaires ne sont pas d’un intérêt constant. Ceci dépend de l’affection en cause et de l’état de l’animal. Les examens sont choisis en fonction : - du degré d'urgence de la prise en charge thérapeutique de l’animal ; - de l’orientation diagnostique suspectée lors de l’examen clinique ; - de leur facilité de réalisation ; - du délai de retour des résultats. COMMENT CHOISIR ET INTERPRÉTER LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES ? L’examen coproscopique doit être systématique. ● En fonction des premiers éléments cliniques et paracliniques, des examens plus spéci●
Objectif pédagogique Choisir les examens complémentaires appropriés lors de diarrhée ou de vomissements aigus chez un chien ou un chat.
1 Ce cliché radiographique montre une dilatation gazeuse d’une portion importante de l’intestin grêle. Elle provient d’une obstruction intestinale (photo B. Reynolds).
fiques peuvent être mis en œuvre (encadré). Lors d’altération sévère de l’état général, d’autres analyses sont effectuées en priorité. Ainsi, les tubes à micro-hématocrite et le réfractomètre permettent une approche paraclinique immédiate de l'état d'hydratation.
●
L’analyse des selles L’analyse des selles est systématique. Elle permet de mettre en évidence des agents parasitaires, bactériens ou viraux, dont la présence ou l’absence orientent le diagnostic étiologique de la diarrhée (tableau 1). ● Trois examens sont utiles lors de diarrhée aiguë : l’examen direct, la méthode par flottation et la cytologie fécale. 1. L'examen direct entre lame et lamelle montre les trophozoïtes de flagellés et les bactéries spiralées : une goutte de matière fécale diluée avec une goutte de solution de ●
Essentiel ❚ Les examens complémentaires sont réalisés lors de troubles digestifs graves, qui engendrent des complications et/ou nécessitent un diagnostic étiologique. ❚ Les examens complémentaires sont choisis en fonction : - du degré d'urgence ; - de l’orientation diagnostique ; - de la facilité de réalisation ; - du délai de retour des résultats. ❚ Pour améliorer la valeur diagnostique de l’analyse coproscopique systématique, trois examens à 48 h d’intervalle sont nécessaires.
Encadré - Les examens complémentaires spécifiques La coproculture nécessite l’envoi de selles fraîches ou placées dans un milieu de transport spécifique, en fonction du délai d’acheminement au laboratoire de microbiologie. Son interprétation est toujours délicate car la frontière entre flore fécale saprophyte et pathogène est ténue. ● Pour le diagnostic de certaines maladies virales (parvovirus canin et félin, coronavirus canin), la P.C.R. est utile (cf. Les techniques P.C.R. et la recherche d'agents pathogènes, par C. Boucraut-Baralon, LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE N°3 , Novembre/Décembre/ Janvier 2001, p. 225-226). ● Pour le diagnostic de la parvovirose ●
canine et de la giardiose, des kits de détection d’antigènes dans les matières fécales selon la technique ELISA sont commercialisés. ● L’identification spécifique d’entérotoxines bactériennes, indispensable au diagnostic des entérites toxi-infectieuses, est peu pratiquée en médecine canine et féline en France.
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 253
conduite à tenir
face à un épisode de diarrhée aiguë en élevage canin
Royal Canin 30470 Aimargues
Objectif pédagogique
En collectivité, les diarrhées aiguës sont souvent multifactorielles. Une démarche globale, qui prend en compte l'ensemble des causes possibles, est nécessaire.
Adopter une démarche systématique face à un épisode de diarrhée aiguë en collectivité canine.
L
a pathologie d’élevage présente les particularités suivantes, qui la différencient de la pathologie individuelle. 1. Les commémoratifs recueillis au cours d’une visite d’élevage permettent souvent d'émettre des hypothèses diagnostiques plus vite que dans les cas de diarrhée chez un animal isolé (cf. Conduite à tenir devant une diarrhée aiguë isolée chez le chien et le chat, par B. Reynolds, dans ce numéro). 2. Dans un élevage, les diarrhées sont fréquemment dues à de multiples facteurs (polyparasitisme, association virose, parasitose et surinfection bactérienne). Aussi, le diagnostic ne doit pas être établi sur un résultat positif isolé (photo 1). 3. Le traitement ne se limite pas à une prescription médicale : il prend en compte les formes de résistance des agents pathogènes dans l’environnement, prévient les récidives en préservant les autres animaux et s'appuie sur les impératifs économiques de l’éleveur. ● Les hypothèses diagnostiques dépendent : - de l’âge des animaux atteints, ; - de la gravité des symptômes ; - de l’évolution épidémiologique (anazootie, épizootie, enzootie) ; - des troubles associés (respiratoires lors de maladie de Carré, troubles de la reproduction et troubles hépatiques et rénaux lors de leptospiroses, troubles du comportement alimentaire lors de parasitose digestive) ; - de l’environnement (intoxications, leptospiroses, colites de stress) ; - des modalités de distribution alimentaire (diarrhées de surconsommation). ● Devant un épisode de diarrhée dans un élevage, la démarche consiste à recueillir des informations sur l'aspect des selles, sur le mode de contagion, sur la gravité des symptômes et sur la catégorie d'animaux affectés. Des examens complémentaires sont réalisés en fonction des hypothèses diagnostiques, afin de confirmer le diagnostic et d'orienter vers un traitement.
Philippe Pierson
Définitions
❚ Épizootie : maladie animale dont l'incidence subit de fortes variations dans le temps. ❚ Enzootie : maladie animale dont l'incidence reste assez stable.
1 En élevage, les diarrhées sont souvent multifactorielles. Pour établir le diagnostic, il importe de recueillir soigneusement les informations, et de ne pas s’arrêter à un premier résultat positif (photo P. Pierson).
❚ Anazootie : maladie animale contractée à partir d'une source commune.
L'ASPECT DES SELLES L’aspect des selles représente l’élément directement visible pour l’éleveur, et motive son inquiétude (encadré 1). LE MODE DE CONTAGION ● Les informations épidémiologiques et l'extension de la diarrhée peuvent orienter le praticien vers un agent pathogène. ● Par exemple, une diarrhée aiguë qui évolue sur un mode épizootique et qui affecte l’ensemble de l’effectif peu après l’introduction d’un nouvel arrivant dans un chenil évoque une coronavirose. ● Une contagion plus lente oriente vers une affection bactérienne (leptospirose, colibacillose, salmonellose) en fonction du contexte environnemental (respectivement invasion de rongeurs, inondation récente, proximité de volailles, ...). ● Une contagion encore plus lente évoque une origine parasitaire (giardiose). Lorsque la diarrhée évolue sous forme anazootique (contamination à la même source), l’eau d’abreuvement et l’alimentation doivent être contrôlées (conservation, bactériologie alimentaire, ...).
Essentiel ❚ Recueillir tout d’abord des informations sur l’aspect des selles, sur le mode de contagion, sur la gravité des symptômes et sur la catégorie d’animaux affectés. ❚ Une odeur aigrelette accompagne souvent les maldigestions glucidiques, une odeur putride les maldigestions protidiques. ❚ L’évolution de la diarrhée sur un mode épizootique peut évoquer une virose, une contagion plus lente une affection bactérienne, et une dissémination encore plus lente, une origine parasitaire.
CANINE
LA GRAVITÉ DES SYMPTÔMES Le vétérinaire, qui connaît bien l’éleveur, sait interpréter son inquiétude. En règle gé-
●
17
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 257
Fiche
comment réaliser
une coproscopie lors de diarrhée aiguë chez le chien et le chat
Objectif pédagogique
Lors de suspicion de diarrhée aiguë d’origine parasitaire chez le chien et le chat, la coproscopie, un examen facile à réaliser, peut confirmer l'hypothèse formulée. Cette fiche présente la flottation et la sédimentation, les deux techniques de choix.
L
’examen des selles d’un animal atteint de diarrhée aiguë nécessite le respect de règles générales, auxquelles s’ajoutent celles, particulières, liées à la nature des symptômes. ● Les règles générales concernent : - la réalisation et l'identification du prélèvement : récolte de matières fraîches, en quantité suffisante, à conserver au réfrigérateur lors d'analyse différée ; - le matériel : matériel usuel de prélèvement, microscope) ; - la technique retenue : sédimentation, flottation, technique de Baermann, de Télémann, ... (encadré 1) [1]. ● Les règles particulières sont liées à la nature des symptômes : par définition, en cas de diarrhée aiguë, les matières fécales sont liquides, parfois souillées de sang, et émises en grandes quantités. Les éléments parasitaires éventuels sont par conséquent "dilués", et les faux négatifs risquent d'être plus nombreux. ● Aussi, il convient : - soit de multiplier les prélèvements ; - soit de recourir à une sédimentation suivie d'une flottation. ● Les parasites à rechercher dans les cas de diarrhée aiguë des carnivores sont décrits dans l’encadré 2. ● L’examen coprologique comprend un examen macroscopique et un examen microscopique*. L’EXAMEN MACROSCOPIQUE DES SELLES L’examen coproscopique macroscopique
NOTE * cf. Conduite à tenir face à une diarrhée aiguë isolée, par B. Reynolds, et Conduite à tenir face à une diarrhée aiguë en élevage canin, par P. Pierson, dans ce numéro.
Gilles Bourdoiseau Unité de parasitologie, E.N.V.L. 1, avenue Bourgelat, BP 83 69280 Marcy l’Étoile
Procéder à un examen coproscopique adapté lors de diarrhée aiguë chez le chien et le chat.
Essentiel 1
Ookyste d’Isospora. Les méthodes de flottation et de sédimentation permettent la mise en évidence des coccidies (photo G. Bourdoiseau).
est systématiquement réalisé, afin de détecter des formes de dissémination de grande taille (supérieure à quelques millimètres) qui échapperaient à l’observation microscopique : parasites entiers (trichures, ascaridés, ankylostomes), segments ovigères de cestodes. L’EXAMEN MICROSCOPIQUE DES SELLES : QUELLE TECHNIQUE CHOISIR ? L’examen direct n’est pas recommandé, en raison des très nombreux faux négatifs obtenus (effet de dilution lié au volume émis, aux selles liquides, à l’augmentation du transit). ● La sédimentation simple n’est pas la méthode de choix, en raison de sa faible sensi●
❚ Lors de diarrhée aiguë, l’examen coproscopique est indispensable. ❚ Il est très important chez le jeune animal et/ou l’animal issu d’une collectivité, (prévalence parasitaire forte). ❚ Dans les matières fécales liquides, parfois souillées de sang, les faux négatifs risquent d’être plus nombreux. ❚ Pour éviter les risques d’erreur, procéder à trois prélèvements à 48 heures d’intervalle.
Encadré 1 - Comment réaliser un prélèvement coproscopique ? Tout prélèvement doit être identifié et associé à une feuille de commémoratifs qui rassemble les informations suivantes : date, caractéristiques propres de l’animal, hypothèses diagnostiques envisagées, troubles observés, traitements éventuels. ● Le prélèvement doit être représentatif, suffisant et peu souillé, c’est-à-dire : - supérieur à un poids de 5 g (plusieurs prélèvements effectués au cours de la journée). Éviter si possible toute souillure de terre et de gravier, ce qui peut gêner la technique, compliquer et fausser la lecture (observation de faux positifs). L’idéal est de récolter les fèces intrarectales ou dès leur émission, et de les conserver dans un bocal en verre (propre, non stérile) ou en plastique, ou ●
une boîte de Pétri ; - conserver le prélèvement à une température de + 4°C (dans un réfrigérateur plusieurs jours, car le froid bloque toute évolution possibledes éléments de dissémination (arrêt des divisions cellulaires). ● Du formol peut être ajouté au prélèvement sans fausser le résultat. Toutefois, il interdit toute coproculture ultérieure, les formes disséminées ne pouvant reprendre leur évolution.
CANINE - FÉLINE
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 265
reconnaître et traiter
les diarrhées aiguës d’origine toxique chez le chien et le chat
* C.N.I.T.V., B.P. 83 69280 Marcy l’Etoile **Service de Toxicologie Faculté Vétérinaire 10071 Càceres - Espagne ***Centre de pharmacovigilance vétérinaire de Lyon E.N.V.L., B.P. 83, 69280 Marcy l’Etoile
Des toxiques peuvent parfois être à l’origine d’une diarrhée aiguë. Quelles sont les causes à envisager et quelles questions poser aux propriétaires pour infirmer ou confirmer cette hypothèse ?
L
es carnivores domestiques sont en contact constant avec un grand nombre de toxiques ménagers, des polluants, des plantes, des médicaments, … ● Chez les jeunes animaux, les comportements d’exploration ou le jeu peuvent mener à l’ingestion d’une grande variété de composés. Parmi eux, de nombreux toxiques ou médicaments sont susceptibles de provoquer des diarrhées aiguës. ● Le mécanisme peut en être mécanique. Il peut aussi être dû à une inflammation, à un effet osmotique ou à une augmentation du péristaltisme. ● Établir une liste de tous les composés qui peuvent induire des diarrhées est impossible : cet article a pour objectif de proposer quelques orientations, afin de faciliter le questionnement des propriétaires au moment de la consultation (tableau). LES DIARRHÉES D’ORIGINE MÉCANIQUE
● Lors de troubles digestifs liés à l’ingestion d’un produit, les effets mécaniques peuvent être à l’origine d’une diarrhée. Ils sont souvent négligés. ● Le Centre d’informations toxicologiques vétérinaires de Lyon (C.N.I.T.V.) est régulièrement interrogé sur la toxicité des plantes ou des produits ménagers. Inquiétés par la composition des produits et leur réputation toxique, les propriétaires font abstraction du risque traumatique. Pourtant, l'ingestion de plastique, de morceaux de verre ou de bois peut provoquer une obstruction, une diarrhée ou une diarrhée hémorragique. ● Le traitement passe soit par une intervention chirurgicale, soit par l’évacuation du corps étranger à l'aide d’huile de paraffine. Le traitement de l’inflammation intestinale le complète (cf. infra). ● Dans certains cas, le caractère traumatisant des composés est moins important que la
Thierry Buronfosse* Marcos Peres Lopez ** Florence Buronfosse***
Objectif pédagogique Orienter l’enquête menée auprès des propriétaires pour cerner l’étiologie d’une diarrhée d’origine toxique.
1
Le Ricin (Ricinus communis) provoque une diarrhée hémorragique sévère. Les chiens, particulièrement sensibles, s’intoxiquent en mâchonnant des graines (photo P. Pierson).
quantité ingérée : l’ingestion d’une centaine de comprimés de complément alimentaire par un chien peut conduire à une diarrhée par "surcharge" (constipation puis "débâcle diarrhéique"). ● L’aspect traumatique ne doit pas faire oublier le potentiel toxique des produits (contenu des flacons, toxicité des branches de lauriers roses, chlorates de l’extrémité des allumettes, contenu caustique des piles, …). LES DIARRHÉES PAR INGESTION D’UNE SUBSTANCE OSMOTIQUE Des substances telles que les laxatifs, les anti-acides, le sucre et le sel peuvent être à l’origine de diarrhée osmotique. ● À forte dose, les substances osmotiques induisent des diarrhées en augmentant le gradient osmotique au profit de la lumière intestinale. Leur élimination permet le rétablissement d’un transit digestif normal. Les substances osmotiques les plus connues sont les laxatifs (sorbitol, mucilages, polysaccharides, …) [6, 8]. Elles sont utilisées en cas de constipation ou pour favoriser l’élimination des toxiques. ● Certains autres médicaments, comme les anti-acides, ont les mêmes propriétés et peuvent être à l’origine de diarrhée lors d’ingestion massive. ● Le sucre provoque aussi une diarrhée osmotique. Une phase d’hyperglycémie, de diarrhée, de polydipsie et de polyurie est observée dans un premier temps. Ensuite, le métabolisme glucidique permet l’élimination du sucre et le rétablissement de l'animal.
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Essentiel ❚ Lors de troubles digestifs liée à l’ingestion d’un produit, des effets mécaniques peuvent être à l’origine d’une diarrhée. ❚ Les laxatifs, les anti-acides, le sucre et le sel peuvent être à l’origine de diarrhée osmotique. ❚ Les composés inhibiteurs des cholinestérases (organophosphorés ou carbamates), les prostaglandines, des médicaments digestifs anti-reflux ou antivomitifs comme le cisapride peuvent augmenter le péristaltisme. ❚ La plupart des diarrhées aiguës toxiques observées chez les chiens et les chats provient de l’ingestion d’un produit irritant.
CANINE - FÉLINE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 267
Fiche
les points forts de l’examen clinique
et des examens complémentaires
Colette Arpaillange Service de médecine E.N.V.N. Atlanpole la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes cedex 03
Q
uand décider d’hospitaliser un chien ou un chat atteint de diarrhée aiguë ? Avant de définir la conduite à tenir, le praticien tente d’abord de déterminer rapidement la cause de l’affection, puis d’en évaluer la gravité. La décision dépend ensuite de l’intensité des symptômes et du degré d’atteinte observé.
ÉTAPE ❶
ÉTAPE ❷
Rassembler les commémoratifs - Vermifugation récente ? - Vaccination à jour ? - Séjour récent en collectivité ? - Alimentation habituelle ? - Écarts alimentaires ? - Indigestion possible ? - Traitements récents ou en cours ? - Ingestion de toxiques ?
ÉTAPE
❸
Symptômes mineurs
Typer la diarrhée : grêle ou côlon ? - Aspect des selles (présence de mucus, de sang en nature, …)
- Volume des selles - Fréquence des défécations - Répercussions sur l’état général (amaigrissement, déshydratation, …)
Évaluer la gravité de la diarrhée - Abattement - Fièvre - Anorexie - Jeune chiot - Vomissements
Symptômes majeurs
- Douleur abdominale - Déshydratation - Signes généraux (cardiovasculaires, nerveux, hépatiques, rénaux, …)
1 symptôme majeur ou plus d’1 symptôme mineur
De 0 à 1 signe
Diarrhée bénigne
Traitement symptomatique À adapter selon diarrhée grêle / côlon - Diète hydrique - Pansements - Modificateurs du transit - Réhydratant par voie orale - Adaptations diététiques
- Guérison
- Récidive - Aggravation - Pas d’amélioration
Diarrhée grave
-
Examens complémentaires Radiographie (transit baryté) Coproscopie Bilan rénal, hépatique Ionogramme Numération formule (Échographie)
CANINE - FÉLINE Traitement étiologique
- Intervention chirurgicale - Élimination du toxique - Antibiothérapie LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 272 - AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
32
Hospitalisation
- Thérapeutique liquidienne Traitement symptomatique
- Diète hydrique - Pansements gastro-intestinaux - Modificateurs du transit - Adaptations diététiques
observation clinique
d’une diarrhée aiguë liée à une infection parasitaire dans un élevage canin
L
LA VISITE D’ÉLEVAGE Certains chiots de race Labrador accusent des retards de croissance et semblent plus sévèrement atteints que les Épagneuls bretons. Les animaux sont logés dans des boxes cimentés, dont le revêtement est bien entretenu (photo 1). ● Les selles des chiots sont parfois moulées, et "coiffées" de mucus et de sang rouge en fin de défécation. Elles sont quelquefois très liquides. Tous les chiots sont atteints de coprophagie, de pica et de géophagie (l’animal mange de la terre). ● L’éleveur constate une amélioration en changeant l’alimentation (transfert d’un aliment de sevrage vers un aliment enrichi en fibres et de moindre densité énergétique) et en administrant à ses chiots un traitement symptomatique à base d’argiles (kaolin, smectite) et de néomycine. ●
LES HYPOTHÈSES DIAGNOSTIQUES ● Face à ce tableau clinique : absence de mortalité, atteinte des chiots en période de sevrage uniquement, peu de retentissement sur l’état général des animaux, les hypothèses diagnostiques sont : - une inadéquation alimentaire, fréquente chez les chiots à cet âge ; - une infestation parasitaire. ● La présence de selles mucoïdes coiffées de sang en nature oriente en priorité vers une coccidiose de sevrage. ● Le pica et la coprophagie évoquent une
Royal Canin 30470 Aimargues
Objectif pédagogique
Dans un élevage reproducteur, les chiots sont régulièrement atteints de diarrhée aiguë au moment du sevrage. Cette observation clinique montre comment traiter une infection parasitaire en collectivité. e propriétaire d’un élevage-pension de 30 chiens reproducteurs de races Labrador Retriever et Épagneul breton consulte le vétérinaire pour des diarrhées de sevrage, qui atteignent les chiots entre l’âge de 4 semaines et de 2 mois, âge de la vente des chiots.
Philippe Pierson
Illustrer la conduite à tenir devant une diarrhée aiguë dans un élevage canin.
Motif de consultation 1
Les chiots de race Labrador sont plus sévèrement atteints que les Épagneuls bretons (photo P. Pierson).
irritation duodéno-gastrique, qui pourrait être liée à la présence de parasites du duodénum (Giardia duodenalis) ou de l’intestin grêle (ascarides). LES PRÉLÈVEMENTS ● Un prélèvement alimentaire est effectué pour contrôler la digestibilité iléale protéique, par reproduction in vitro des attaques enzymatiques protéolytiques. ● Un examen coprologique est également mis en œuvre, pour les animaux suivants : - une chienne Épagneul Breton : portée âgée de 2 mois (sevrée à l'âge de 6 semaines) (1) (tableau 1) ; - une portée de chiots de race Labrador, âgée de 4 semaines (prélèvement de selles collectif dans le box) (2) ; - une chienne Labrador : portée âgée de 2 mois (3) ; - deux portées de chiots Labradors âgés de 3 mois (4) ; - deux chiennes Labradors adultes (5), (6). ● Les six prélèvements sont adressés au laboratoire (service de parasitologie de l'E.N.V. d’Alfort), pour des coproscopies parasitaires et une recherche de larves par la méthode de Baermann.
INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS
❚ Diarrhée aiguë chez des chiots en période de sevrage.
Hypothèses diagnostiques ❚ Ration alimentaire inadaptée. ❚ Infestation parasitaire : - coccidiose à Isospora sp.; - Giardia duodenalis ; - ascarides.
Essentiel ❚ La quantité d’ookystes observés n’est pas corrélée à la gravité des symptômes. ❚ Toxocara canis est inféodé à tous les élevages reproducteurs. ❚ Un prélèvement trop précoce ou trop tardif par rapport au pic d’excrétion du parasite peut fausser les résultats des analyses.
● L'analyse de l'échantillon alimentaire, réalisée par le laboratoire central Royal Canin, montre une bonne digestibilité iléale protéique (90,5 p. cent). Les résultats des analyses coprologiques mettent en évidence la circulation de trichures, d’ascarides, de Giardia et de coccidies dans l'élevage (tableau 1).
CANINE
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / SOCTOBRE 2003 - 273
Fiche
diagnostic différentiel des kératites chroniques
chez le chien
En complément de l’article des mêmes auteurs paru dans LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE N°13 juin-juillet 2003, pages 15-20,
1 Ulcère central chez un Pékinois (photo T. Tavernier).
4
Kératite d’exposition chez un Pékinois (photo H. Arnold-Tavernier).
7
Kératite profonde d’origine leishmanienne sur un chien Griffon vendéen (photo O. Jongh)
10
Kératite chronique superficielle évoluée chez un Berger allemand : la pigmentation gêne considérablement la vision (photo H. Arnold-Tavernier).
voici une fiche pratique illustrée, qui récapitule les lésions les plus fréquentes, et rectifie l’inversion des photos n°1, 2 et 4.
2 Cil ectopique responsable de l’ulcère du Pékinois de la photo 1 (photo T. Tavernier).
5
Kératite mécanique surinfectée chez un Cocker américain (photo H. Arnold-Tavernier)
8
Kératoconjonctivite sèche avec un Schirmer nul chez un Westie. La pigmentation complète masque la pupille (photo H. Arnold-Tavernier).
11
Kératite chronique superficielle chez un Berger allemand : une infiltration lymphoplasmocytaire de la nictitante est associée à la lésion temporale cornéenne (photo H. Arnold-Tavernier).
Hélène Arnold-Tavernier* Olivier Jongh** * Clinique vétérinaire Chrétien-Guilhot 13, rue de Mulhouse 90000 Belfort ** 2 bis, rue Jacques 69250 Neuville sur Saône
3
Pigmentation du canthus médial chez un Carlin (photo H. Arnold-Tavernier).
6
Épisclérokératite nodulaire sur un chien Shih-Tzu (photo O. Jongh).
9
Kératoconjonctivite sèche chez un Pékinois : une croûte de mucopus adhère à la cornée centrale (photo H. Arnold-Tavernier).
12
Kératite ponctuée superficielle du Teckel à poil long (photo O. Jongh).
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 276
thérapeutique prescrire ou non des antibiotiques lors de diarrhée aiguë chez le chien et le chat
Confronté à un animal atteint de diarrhée aiguë, le praticien vétérinaire a souvent la tentation de prescrire systématiquement des antibiotiques. Cependant, ceux-ci ne sont pas toujours utiles, ils peuvent même parfois se révéler néfastes. Quand prescrire des antibiotiques, et comment les administrer ?
L
a prescription d'antibiotiques n'est jamais anodine : elle doit résulter d'une juste analyse de leur nécessité, de leurs indications et de leurs contre-indications. Elle ne dispense pas des mesures de réanimation médicale ni du traitement hygiénique de la diarrhée aiguë (cf. Conduite à tenir face à une diarrhée aiguë isolée chez le chien et le chat, par B. Reynolds, et Prescrire un pansement gastro-intestinal chez le chien et le chat, par M. Gogny, dans ce numéro). RECONNAÎTRE LES SIGNES CLINIQUES D'UN PHÉNOMÈNE INFECTIEUX
● La diarrhée aiguë des carnivores domestiques peut être d'origine bactérienne, virale, alimentaire ou parasitaire, voire métabolique, toxique ou mécanique, dans quelques cas. ● Parmi les différents agents, virus ou bactéries, reconnus capables de provoquer une diarrhée chez le chien et le chat, certains passent la barrière intestinale et se disséminent à l'ensemble de l'organisme (tableau 1). Ceci concerne les parvovirus au cours de la phase de virémie ou, dans certains cas, les salmonelles [1, 2, 6, 9]. D'autres, comme les coronavirus ou les campylobacters, restent dans la sphère digestive [1]. La cause exacte d'une diarrhée aiguë n'est pas déterminée, lors de la première consultation. Toutefois, une hyperthermie, une atteinte marquée de l'état général et/ou une leucopénie ou une leucocytose avec des polynucléaires jeunes ou cytotoxiques sont des éléments cliniques en faveur d'un phénomène infectieux généralisé (figure).
Armelle Diquélou* Claude Petit** *Unité de Médecine interne ** Unité de Pharmacie-Toxicologie Département des Sciences cliniques des animaux de compagnie, E.N.V.T. 23, chemin des Capelles 31067 Toulouse cedex 03
1
Objectif pédagogique Choisir de prescrire ou non des antibiotiques face à une diarrhée aiguë chez le chien et le chat.
Frottis de selles avec éléments pathogènes (1) ronds, réfringeants, qui évoquent des Clostridies (photo service de médecine, E.N.V.T.).
Essentiel
● Le tube digestif est un milieu hautement septique, composé de bactéries aérobies et anaérobies, Gram “+” et Gram “-”. Les anaérobies et les germes à Gram “-” prédominent. ● Lors de lésions de la paroi digestive, quelle qu'en soit l'origine, certaines bactéries de la flore digestive peuvent provoquer une septicémie, notamment lorsque l'animal est immunodéprimé, âgé ou atteint d'affections intercurrentes.
LES INDICATIONS DES ANTIBIOTIQUES Lors de diarrhée aiguë, les antibiotiques sont indiqués avec : 1. la présence de méléna ou de sang en nature dans les selles. Lors de saignements digestifs, un contact peut s'établir entre le compartiment vasculaire et les bactéries du tube digestif. Des emboles septiques sont donc possibles, voire une septicémie si les capacités de défense de l'organisme sont insuffisantes ou dépassées ; 2. une immunodépression et/ou une leucopénie importante (globules blancs < 2.109/L) concomitantes de la diarrhée, quelle qu'en soit la cause ; 3. des signes cliniques et biologiques qui évoquent une dissémination de bactéries ou d'endotoxines bactériennes dans l'organisme (hyperthermie, leucopénie, apparition d'un souffle cardiaque qui suggère une endocardite, ...), voire un choc septique (hypotension, hypoglycémie, ...) ; 4. des bactéries entéropathogènes dans les selles (mise en évidence par étalement de selles
37
❚ Une hyperthermie, une atteinte marquée de l'état général et/ou une leucopénie sont des éléments cliniques en faveur d'un phénomène infectieux généralisé. ❚ Lors de diarrhée aiguë, les indications des antibiotiques sont : - la présence de méléna ou de sang dans les selles ; - une immunodépression et/ou une leucopénie importante ; - des signes cliniques et biologiques évocateurs de dissémination de bactéries ; - la mise en évidence de bactéries entéropathogènes dans les selles. ❚ Les antibiotiques n'ont aucune action contre les virus : lors de diarrhée d'origine virale, ils peuvent juste prévenir les surinfections.
CANINE - FÉLINE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 277
thérapeutique prescrire
un pansement gastro-intestinal chez le chien et le chat Un fort pouvoir couvrant et adsorbant, associé à peu d’effets indésirables, font des pansements gastro-intestinaux un traitement privilégié lors de diarrhée aiguë. Parmi les différents produits disponibles, lequel choisir et selon quels critères ?
L
es pansements gastro-intestinaux, encore appelés topiques ou protecteurs de muqueuse, sont ainsi nommés en raison de leur aptitude à tapisser la muqueuse digestive après administration orale, la protégeant ainsi des attaques chimiques ou bactériennes du contenu luminal. Ils ont d'autres propriétés intéressantes et leur efficacité a été démontrée dans un certain nombres d'affections digestives chez l'homme et l'animal. Ainsi, bien qu'ils ne soient pas toujours faciles à administrer, ils représentent une alternative ou un complément au traitement parentéral. LES PROPRIÉTÉS DES PANSEMENTS Les caractéristiques structurales Les caractéristiques structurales des pansements expliquent certaines de leurs propriétés, et sont présentées dans l’encadré.
Le pouvoir protecteur Le pouvoir protecteur est très variable d'un composé à l'autre, car il résulte de la combinaison possible de quatre propriétés : 1. l'aptitude à tapisser la muqueuse : pouvoir couvrant ; 2. la capacité d'adsorber et de piéger des composés variés : pouvoir adsorbant ; 3. l'activité anti-acide : pouvoir tampon ; 4. la stimulation de la barrière mucus-bicarbonates gastroduodénale : pouvoir cytoprotecteur.
●
Le pouvoir couvrant
Tous les pansements cités dans l’encadré possèdent un bon pouvoir couvrant. Le pouvoir couvrant permet la cicatrisation des lésions et/ou prévient leur apparition
Marc Gogny Unité de Pharmacologie et Toxicologie E.N.V.N. BP 40706 44307 Nantes Cedex 03
Objectif pédagogique Choisir un pansement gastro-intestinal adapté aux troubles digestifs observés chez un chien ou un chat.
1
Vue vidéo-endoscopique de l'antre pylorique d'un chien après administration de phosphate d'aluminium (1 mL/Kg) (photo M. Gogny) [4].
en isolant la muqueuse du contenu luminal. Celle-ci est donc protégée de l'action délétère des protons, des sels biliaires, des toxines bactériennes ou de tout toxique éventuellement présent. ● L'adhésion du topique à la paroi intestinale
Essentiel ❚ Le pouvoir protecteur d’un pansement gastro-intestinal résulte de la combinaison de ses pouvoirs : - couvrant ; - adsorbant ; - tampon ; - cytoprotecteur.
Encadré - Caractéristiques structurales des pansements gastro-intestinaux ● Sur le plan chimique, les pansements gastro-intestinaux appartiennent à trois groupes de substances d'importance inégale : - les sels minéraux insolubles, les plus nombreux et les plus employés ; - les polyholosides d'origine végétale ; - les silicones. ● En médecine vétérinaire, les sels minéraux sont surtout des sels d'aluminium. Ils existent sous deux formes principales : une solution colloïdale, dans laquelle les molécules se regroupent en micelles chargées électriquement, et des solutions dans lesquelles elles s'organisent en cristaux polymérisés, superposés en plusieurs couches lamellaires. - La forme colloïdale concerne le phosphate d'aluminium (Phosphaluvet®), ou le sucralfate (sulfate d'aluminium associé à du saccharose, Kéal®*). - Les structures lamellaires sont toutes des argiles, formées de silicates d'aluminium. Chaque atome de silicium est entouré d'un maillage tétraédrique d'oxygène ou d'hydroxyles, superposé à un octaèdre du même type pour l'aluminium, et formant des feuillets, ou lamelles, organisé en deux ou trois
couches suivant les argiles. La kaolinite (Kaopectate®, Kaomycin®) et la smectite, encore appelée montmorillonite (Smectivet®, Diarsanyl®) sont les plus utilisées. Les producteurs d'aliment pour animaux de compagnie incorporent aussi dans certains produits de leur gamme des polymères non lamellaires de la famille des zéolites, utilisée ailleurs comme agent filtrant et absorbeur d'humidité. ● Les polyholosides naturels utilisés comme pansements sont les pectines (Kaopectate® en association avec la kaolinite, Verdural®), extraites des écorces et pelures de diverses plantes, et les alginates tirées d'algues brunes comme la laminaire (Gaviscon®*). ● Les silicones sont des polymères synthétiques d'oxyde de silicium, comme le diméthylpolysiloxane ou diméticone (Gastro-gel®).
CANINE - FÉLINE NOTE* Spécialité humaine
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 281
thérapeutique comment bien utiliser les modérateurs du transit chez le chien et le chat
Colette Arpaillange* Dominique Fanuel-Barret* Marc Gogny** * Unité de médecine ** Unité de Pharmacologie et Toxicologie
Lors de diarrhée aiguë ou chronique, l’augmentation de la motricité intestinale n’est pas systématique. Mal employés, les modificateurs du transit, de puissants anti-diarrhéiques, peuvent occasionner des troubles sévères. Cet article décrit les propriétés de ces composés, leurs indications et leurs contre-indications.
L
es modérateurs du transit intestinal permettent de limiter l'augmentation de la fréquence d'émission des selles, et pour certains d'entre eux, d'en normaliser la consistance. Ils s'opposent de façon non spécifique à la diarrhée et sont très employés en médecine vétérinaire. ● Cet usage répandu est doublement justifié : 1. grave ou bénigne, la diarrhée est toujours mal vécue par les propriétaires ; 2. les médicaments qui permettent de s'opposer à ces troubles sont généralement très efficaces et répondent bien à l'attente des propriétaires d'animaux. ● Cependant, leur principal danger est justement représenté par leur grande efficacité : leur action est puissante et peut générer des accidents liés aux effets recherchés, aux effets latéraux ou à une utilisation inadéquate. LES PRINCIPES ACTIFS DISPONIBLES
● L'activité péristaltique tend à augmenter le transit et l'activité segmentaire à la freiner. Le transit intestinal dépend de l'harmonisation de ces deux phases (encadré 1). ● Pour provoquer un ralentissement du transit intestinal, il est possible : - d'inhiber l'activité péristaltique ; - de renforcer l'activité segmentaire.
Les inhibiteurs du péristaltisme Ce sont les spasmolytiques ou antispasmodiques. Leur action ne se limite pas à la lutte contre les spasmes (contractures prolongées des muscles lisses). Elle s'étend à l'activité physiologique, circulaire et longitudinale, d'où leur effet inhibiteur du transit.
Tableau 1 - Les spasmolytiques neurotropes et mixtes Principe actif
Nom déposé
E.N.V.N. Atlanpole, la Chantrerie, BP 40706 44307 Nantes Cedex 03
Dose
- Canidiarix® - Entérotab® - Félidiarix®
●
Atropine
●
N-butyl - Estocelan® scopolamine - Buscopan®*
- 1 mg/kg - PO, SC, IR** - toutes les 8 h
●
Propanthéline - Probanthine®*
- 0,22 mg/kg - PO - toutes les 8 h
●
Prifinium
- 5-7 mg/kg - Prifinial® - Riabal enfants®* - PO, SC
●
Clidinium
- in Librax®*
●
Dihéxyvérine - Spasmodex®*
●
Tiémonium
- Spasmodol®
Objectif pédagogique Prescrire les modificateurs du transit à bon escient.
non déterminé non déterminé - 0,5-2 mg/kg - PO, IV, SC
Essentiel Les spasmolytiques neurotropes
Les spasmolytiques neurotropes s'opposent à la transmission cholinergique en bloquant les récepteurs muscariniques de l'acétylcholine (ex : atropine) (tableau 1). Ce sont les parasympatholytiques. ● Leur action antidiarrhéique est puissante, mais ils présentent deux inconvénients majeurs : 1. ils inhibent le péristaltisme de façon importante et prolongée, avec une diminution nette de l'amplitude et de la fréquence des contractions. Les effets sont manifestes dans l'intestin grêle comme dans le côlon, ce qui limite l'emploi de ces molécules à une utilisation ponctuelle ; 2. ils bloquent l'ensemble du système parasympathique, d'où des effets indésirables extradigestifs non négligeables : tarissement des sécrétions, troubles de la miction, tachycardie, troubles de la vision, ... Des contre-indications en découlent, comme le glaucome et l'existence d'un obstacle à l'évacuation vésicale (affection prostatique, par exemple). ● L'atropine est le chef de file historique de cette classe de médicaments. Elle n'est toutefois utilisée qu'en appoint dans des spécialités à visée surtout anti-infectieuse, et à des doses parfois insuffisantes. ●
45
❚ La diarrhée est souvent associée à une hypomotilité digestive, qui peut être aggravée par un usage intempestif des modérateurs du transit intestinal. ❚ Les modérateurs du transit intestinal ne peuvent être utilisés que de manière palliative, temporaire ou les deux à la fois. ❚ Les spasmolytiques neurotropes bloquent le péristaltisme intestinal et présentent des effets indésirables extradigestifs marqués. NOTES * Spécialité humaine. ** IR : voie intrarectale
CANINE - FÉLINE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 285
Fiche
Xavier Pineau* Florence Buronfosse* Stéphane Queffélec*
pharmacovigilance deux exemples en gastro-entérologie chez le chien et le chat
* Centre de Pharmacovigilance Vétérinaire de Lyon, E.N.V.L. 1, avenue Bourgelat BP 83 69280 Marcy l’Étoile Tél : 04-78-87-10-40, Fax : 04-78-87-80-12 cpvl@vet-lyon.fr
T
** Centre de Pharmacovigilance Vétérinaire de l'Ouest, E.N.V.N. Atlanpôle la Chantrerie BP 40706 44307 Nantes Cedex 03 Tél : 02-40-68-77-40, Fax : 02-40-68-77-42 cpvo@vet-nantes.fr
Objectif pédagogique Comprendre l’intérêt de la pharmacovigilance vétérinaire.
Essentiel ❚ Métoclopramide : dans les races de poids < 10 kg, un strict respect de la dose est recommandé. ❚ Lopéramide : - les symptômes d’intoxication par les morphiniques ne s’observent qu’après un surdosage massif ; - une sensibilité raciale a été mise en évidence chez le Colley.
Références 1. Pinault XS. Pharmacovigilance du métoclopramide chez les carnivores domestiques. Thèse de doctorat vétérinaire. Université Paul-Sabatier, Toulouse, 1998;104 p. 2. Hugnet C, Cadoré JL, Buronfosse F, al.. Loperamide poisoning in the dog. Vet hum Toxicol 1996;38(1):31-3. 3. Mealey KL, Bentjen SA, Waiting DK. Frequency of the mutant MDR1 allele associated with ivermectin sensitivity in a sample population of collies from the northwestern United States. Am J Vet Res 2002;63(4):479-81.
CANINE - FÉLINE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 290 - AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
out vétérinaire qui constate un effet indésirable grave* ou inattendu**, susceptible d'être dû à l'utilisation d'un médicament vétérinaire, doit en faire la déclaration au centre de pharmacovigilance vétérinaire (C.P.V.) auquel il est rattaché : Lyon* ou Nantes** (ci-contre) (décret du 2 juillet 1999). ● Les signalements, établis le plus souvent par contact téléphonique ou par une fiche de déclaration, font l’objet d’une analyse d’imputabilité : elle estime la probabilité de la relation de causalité entre l’effet indésirable observé et le(s) médicament(s) administré(s). ● Les déclarations sont informatisées par le C.P.V., puis centralisées à l'Agence Nationale du Médicament Vétérinaire (A.N.M.V.) avec copie anonyme aux firmes, afin de respecter la confidentialité du déclarant. POURQUOI DÉCLARER UN EFFET INDÉSIRABLE ?
● Au-delà de cette obligation réglementaire, le praticien peut trouver deux intérêts à déclarer un effet indésirable : 1. il peut obtenir des conseils sur la conduite immédiate à tenir face à l’animal : traitement "correctif" adapté, pronostic, ... ; 2. seule la centralisation des cas permet de mettre en évidence des effets rares, non détectés au cours des études cliniques du dossier d'A.M.M., d'estimer l'incidence réelle des effets indésirables sur la population traitée et de mieux cibler les facteurs de risque : sensibilité d'espèce ou de race, interactions médicamenteuses, ... ● L'évaluation des données collectées permet aux autorités (A.N.M.V.), le cas échéant, de prendre des mesures réglementaires de nature à améliorer la sécurité du médicament : ajout d'une précaution d'emploi, d'une contre-indication, amélioration de la lisibilité de la notice ou de l'emballage, voire retrait d'une spécialité du marché. L’A.N.M.V. informe la profession vétérinaire sur les facteurs de risque identifiés. ● Les C.P.V. assurent aussi une mission de renseignement sur le médicament : risques d'interaction entre deux médicaments, risque sur les femelles gestantes, etc. Deux exemples de molécules utilisées en, gastro-entérologie peuvent illustrer l'intérêt de la pharmacovigilance pour les praticiens.
50
Exemple 1 - Le métoclopramide Le métoclopramide est un anti-émétique central qui peut entraîner des troubles neurologiques ou comportementaux chez le chien : ataxie, tremblements, agitation, agressivité. ● Une étude conduite d'après les données du C.N.I.T.V. (avant la création des C.P.V.) a mis en évidence que ces effets, bien décrits chez l'homme, sont plus fréquents chez les chiens de petite taille : Yorkshire, West highland white terrier et Caniche. ● Plutôt qu'une sensibilité raciale, un surdosage relatif est suspecté d’en être à l’origine : dans les races de poids inférieur à 10 kg, un strict respect de la dose préconisée est recommandé [1]. ●
Exemple 2 - Le lopéramide Le lopéramide est un anti-diarrhéique humain. Il est donc hors du champ du décret qui ne concerne que les spécialités vétérinaires. ● Utilisé fréquemment en gastro-entérologie, il peut être à l'origine chez le chien de symptômes d'intoxication par les morphiniques : constipation, somnolence, voire dépression respiratoire. ● Une étude du C.N.I.T.V., a montré que dans la plupart des races, ces effets ne s'observent qu'après un surdosage massif (ingestion accidentelle notamment) et a mis en évidence une sensibilité raciale chez le Colley [2]. ● Dans cette race, ces symptômes s'observent à la dose usuelle, et ils peuvent nécessiter le recours à la naloxone (antagoniste morphinique). Des données récentes permettent d'en comprendre le mécanisme : le lopéramide a la même protéine de transport membranaire que l'ivermectine (glycoprotéine P), protéine déficiente en raison d'une mutation génétique fréquente chez le Colley [3]. ●
CONCLUSION L'organisation de la pharmacovigilance française suit un modèle "interactif", par contact direct entre le praticien et un centre spécialisé, unique en Europe. Ces exemples montrent ce que la pharmacovigilance peut apporter, pour une utilisation plus sûre des médicaments. ❒
DÉFINITIONS
* Effet indésirable grave : effet létal, ou susceptible d'entraîner la mort, ou qui provoque des symptômes permanents ou prolongés. ** Effet indésirable inattendu : effet qui n'est pas mentionné dans le résumé des caractéristiques du produit. En l'état actuel des R.C.P. (R.C.P. = notice), les informations sur les effets indésirables sont peu fournies. Presque tous les effets indésirables sont donc "inattendus".
conduite à tenir diagnostique face aux diarrhées du chaton
Chez le jeune animal, une diarrhée aiguë peut avoir des conséquences graves, car il ne dispose pas des mêmes défenses que l’adulte, et son métabolisme est différent. Comment se manifestent les diarrhées chez le chaton, et comment y faire face ?
P
lus ou moins importante, la diarrhée aiguë est toujours un objet d’inquiétude et de préoccupation pour le propriétaire. Elle est caractérisée par l’émission de selles trop liquides et/ou trop fréquentes. Sa durée d’évolution est inférieure à quinze jours. ● Les jeunes animaux sont particulièrement sensibles à la déshydratation et aux déséquilibres électrolytiques et acido-basiques. Plusieurs facteurs expliquent cette prédisposition chez le chaton nouveau-né : - l’eau représente 82 p. cent et la peau 25 p. cent de son poids ; - sa surface cutanée est très importante ; - la couche kératinisée cutanée est quasi inexistante à la naissance ; - son système rénal est immature : la récupération de l’eau filtrée par le rein ne représente que 20 à 50 p. cent de celle d’un animal adulte, ce qui est insuffisant pour une bonne régulation du métabolisme de l’eau. ● La diarrhée résulte de mécanismes physiologiques différents (cf. encadré 1 de l’article de C. Arpaillange et coll., dans ce numéro). ● Dans la plupart des cas, son étiologie est difficile à préciser : les diarrhées néonatales ont le plus souvent une origine alimentaire, tandis que les diarrhées de sevrage peuvent être dues à des facteurs parasitaires, viraux ou bactériens. LES DIARRHÉES NÉONATALES (0 À 15 JOURS) Il est très difficile de déceler une diarrhée néonatale chez le chaton : la mère, qui stimule l’élimination par léchage, fait disparaître les selles (photo 2). Des souillures en région périnéale peuvent parfois être observées. La pesée journalière de l’animal donne les meilleures indications : ●
Sandra Brau Service de néonatalogie Unité de Médecine de l’élevage et du sport, E.N.V.A. 7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort Cedex
Objectif pédagogique ❚ Établir le diagnostic d’une diarrhée aiguë chez le chaton.
1
La diarrhée n’est pas facilement détectée chez le très jeune animal, car la mère lèche les souillures. Un bon moyen de savoir si le chaton se développe normalement est de le peser chaque jour.
ce moyen de surveillance, à conseiller au propriétaire, peut être utilisé pendant les quinze 1ers jours (photo 1). ● En période néonatale, la diarrhée aiguë est due à la saturation des capacités lactasiques du chaton, ou au syndrome du lait toxique.
2
Aspect normal des selles du chaton après la naissance (ici, à deux jours) (photos S. Brau).
La saturation des capacités lactasiques ● Une déficience en lactase ou une quantité élevée de lactose dans l’alimentation peut être à l’origine de diarrhée, par non absorption du lactose dans l’intestin grêle. ● Le lactose non absorbé s’accumule dans la lumière intestinale. Il provoque, par un mécanisme osmotique, l’apparition d’une diarrhée souvent aqueuse, qui contient parfois du sang en nature. C’est pourquoi il est très important, en alimentation artificielle, de bien respecter les proportions entre la poudre de lait et l’eau. ● Lorsque les chatons sont alimentés artificiellement, la malnutrition est la cause la plus fréquente de diarrhée. - Dans ce cas, il convient tout d’abord de réduire de moitié la partie solide de la préparation. Dès que la consistance des selles redevient normale, la quantité est augmentée graduellement jusqu’à la dose préconisée. - Chez un chaton mal nourri, l’hypoglycémie et la déshydratation s’instaurent rapidement : une bonne fluidothérapie est donc essentielle.
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Essentiel ❚ En alimentation artificielle, bien respecter les proportions entre la poudre de lait et l’eau. ❚ Lorsque les chatons sont alimentés artificiellement, la malnutrition est la cause la plus fréquente de diarrhée. ❚ Chez un chaton mal nourri, l’hypoglycémie et la déshydratation s’installent vite : une bonne fluidothérapie est essentielle.
FÉLINE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 291
spécificités thérapeutiques des diarrhées du chaton
Sandra Brau
Service de néonatalogie Unité de Médecine de l’élevage et du sport, E.N.V.A. 7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort Cedex
1
Lors de diarrhée aiguë d’origine parasitaire, un traitement par voie orale s’impose : le choix du principe actif dépend des résultats de l’examen coproscopique.
L
’absorption, la distribution, la métabolisation et l’élimination des principes actifs ne sont pas identiques chez le jeune et chez l’adulte : - le rapport surface/poids est plus important ; - le chaton dispose de peu de réserves de matières grasses et d’un faible taux sanguin de protéines, et surtout d’albumine ; - les capacités excrétrices du rein sont réduites, le pH gastrique est plus élevé et les systèmes enzymatiques hépatiques ne sont pas totalement fonctionnels. Tous ces facteurs contribuent à altérer l’efficacité pharmacologique des composés administrés.
Tableau - Le traitement des diarrhées d’origine parasitaire chez le chaton Parasites
Fenbendazole (50 mg/kg)
- Sulfamides (au moins 5 jours) - Hors AMM : (responsabilité ●
LES MÉDICAMENTS
2
Les jeunes animaux ont un métabolisme différent de celui des adultes (photos S. Brau).
Comment alimenter un chaton en diarrhée de sevrage ? Lors de diarrhée de sevrage, la mise au repos du tube digestif est très importante. ● Il est possible de supprimer toute nourriture pendant 24 h. De l’eau peut être donnée, sauf lors de vomissement associé : dans ce cas, supprimer l’eau. ● La ration idéale est très digestible, pauvre en fibres et en graisses. Il convient de la fractionner (3 à 6 repas par jour). Ex : du riz bien cuit, du fromage avec peu de graisse, et de la viande de bœuf ou de poulet cuite. ● Maintenir ce régime pendant une semaine et reprendre ensuite l’alimentation normale progressivement. ●
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 294 - AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
La voie d’administration des médicaments est très importante, notamment pour les antibiotiques. ● Chez le jeune, la flore intestinale est en pleine croissance. Elle est très sensible à l’action des antibiotiques donnés par voie orale : si la diarrhée a une origine infectieuse, il est nécessaire d’effectuer un antibiogramme, afin de ne pas trop la déstabiliser. Les voies parentérales semblent être les plus recommandées, notamment la voie intraveineuse et intra-osseuse, plutôt que les voies sous-cutanée ou intramusculaire. ● Les antibiotiques conseillés sont les pénicillines et les céphalosporines. ● Si la diarrhée provient d’une destruction de la flore intestinale par des antibiotiques, le yaourt est conseillé. Il est riche en Lactobacillus acidophilus et en L. bulgaricus, qui colonisent l’intestin grêle et remplacent les bactéries défavorables. Le lactose du yaourt est mieux digéré que celui du lait, grâce aux lactases produites. Une réduction de 30 à 50 p. cent de la dose préconisée pour l’adulte, et un allongement de 4 h de l’intervalle entre chaque administration sont recommandés. Aucune étude n’a réellement pu établir de dosage ou d’intervalle de temps standard à suivre, pour respecter la physiologie du jeune. ● Pour les diarrhées d’origine parasitaire, plusieurs principes actifs sont utilisés (tableau). Contre les cestodes, le traitement le plus efficace est le praziquantel (5mg/kg),
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Molécules actives
- Praziquantel (5 mg/kg) ● Cestodes - Mébendazole (20-30 mg/kg) - Niclosamide (125 mg/kg) - Piperazine (50-60 mg/kg) - Pamoate de pyrantel (20 mg/kg) ● Nématodes - Febantel (15 mg/kg) - Mébendazole (22mg/kg) - Métronidazole (30 mg/kg PO) ● Giardiose - Hors AMM :
Coccidiose
du vétérinaire traitant) après le diagnostic, diclazuril (produits ruminants) : 2,5 mg/kg, prise unique PO, à renouveler 15 j plus tard si besoin)
mais il est conseillé attendre l’âge de 6 semaines pour l’utiliser (photo 1). ● Lors de diète chez un nouveau-né, les besoins en calories chez le chaton en alimentation lactée sont de 22-26 kCal pour 100 g de poids corporel. Un chaton devrait recevoir 13 ml de lait pour 100 g/jour la 1ère semaine, 17 ml/100g/jour la 2e semaine, 20 ml/100gr/jour la 3e semaine (photo 2). LES PERFUSIONS Pour les perfusions, l’abord jugulaire est préféré, parce qu’il permet une diffusion uniforme des fluides. Lorsque les voies veineuses sont inaccessibles, la voie osseuse est utilisée : elle permet une bonne dispersion des liquides thérapeutiques, grâce aux sinusoïdes de la moelle osseuse et aux veines médullaires. ● Le volume de perfusion nécessaire au chaton est plus important que celui d’un adulte : il varie de 60 à 180 ml/kg/j. - Pour les animaux très déshydratés, il est conseillé de perfuser en 20 min un mélange de soluté colloïde (10 à 15 ml/kg), associé à 4 ml/kg de NaCl hypertonique à 7,5 p. cent. - Pour les chatons en hypoglycémie, administrer un bolus de 1 ml/kg de dextrose à 25 p. cent, suivi d’un soluté isotonique à 2,5 ou 5 p. cent de dextrose en débit continu. ● Les modificateurs de la motricité digestive ne sont pas conseillés chez le jeune animal : limiter la motricité longitudinale peut aboutir à une prolifération bactérienne, à l’origine de nouvelles perturbations diarrhéiques. ❒ ●
N.A.C. la diarrhée aiguë, une urgence chez les rongeurs et les lagomorphes Les conséquences d’une diarrhée aiguë chez un rongeur ou un lagomorphe peuvent être dramatiques. Le praticien ne doit pas hésiter à mettre en œuvre les examens complémentaires indispensables et à l’hospitaliser si nécessaire.
L
es diarrhées aiguës sont fréquentes en consultation des lapins et des rongeurs de compagnie. Elles sont d’autant plus graves chez ces animaux de petit volume que la déshydratation survient très vite et que le propriétaire a souvent tardé à consulter. La conduite à tenir face à une diarrhée aiguë est simple dans son raisonnement, complexe dans son application. Il convient en effet de juger de critères de gravité et d’aller au plus pressé : rétablir l’hydratation et le transit digestif, arrêter les éventuels saignements et corriger le métabolisme hépatique. Le praticien doit également prendre le temps nécessaire pour établir le diagnostic étiologique, indispensable à la mise en place d’un traitement efficace. COMMENT JUGER DE LA GRAVITÉ DE LA DIARRHÉE ?
Le lapin et la majorité des rongeurs ne vomissent jamais.
●
S.C.P. NSBABGVC Réseau Cristal Z.A.C. La Buzenière BP539 85505 Les Herbiers cedex
Objectif pédagogique Évaluer la gravité d’une diarrhée chez les N.A.C., réaliser les examens complémentaires nécessaires et mettre en place un traitement adapté.
1
Lapin nain atteint de typhilite hémorragique suite à l’administration par voie orale d’ampicilline.
En revanche, chez ces animaux, les maladies de l’estomac sont nombreuses (sténoses du pylore, syndrome entérocolite épizootique, ulcères, graphidose, etc.). Elles sont souvent accompagnées de diarrhée ou d’obstruction intestinale et/ou cæcale et de troubles du péristaltisme. L’anamnèse et l’examen clinique permettent de recueillir les 1ers renseignements utiles (encadré 1). ● Seuls les examens complémentaires permettent de mettre en évidence les maladies de l’estomac. Il est indispensable de les rechercher en présence de diarrhée aiguë (figure).
Essentiel
Quels examens complémentaires réaliser ?
❚ Le lapin et la majorité
Selon l’équipement du cabinet ou de la clinique, selon la proximité ou non d’un labo-
des rongeurs ne vomissent jamais. ❚ Les maladies de l’estomac sont nombreuses chez ces animaux. ❚ Si une intoxication est suspectée, une analyse des aliments complets consommés peut être réalisée. Il est conseillé d’appeler le fabricant auparavant : la contamination peut être connue de ses services-qualité.
●
Encadré 1 - Les renseignements fournis par l’anamnèse et l’examen clinique 1. L’anamnèse permet de définir : - l’âge de l’animal ; - ses conditions de vie : son alimentation et son environnement ; - les éventuels changements de mode de vie récents : alimentation, lieu de vie ; - les autres maladies ; - la prophylaxie effectuée : vermifuges et anticoccidiens avec date, dose et durée d’administration. La fréquence de l’alimentation, la quantité d’aliments ingérés et d’eau bue sont indicateurs du bon état du transit digestif. La découverte de cæcotrophes tombés à terre est significative d’un désordre digestif chez le lapin. En revanche, la coprophagie peut être considérée comme physiologique chez certaines espèces comme le cobaye.
Samuel Boucher
2. L’examen clinique vise à déterminer : - le degré de déshydratation : pli de peau, globe oculaire, hématocrite ; - la perte de masse corporelle ; - la fréquence de la défécation ; - la consistance des selles et leur couleur. Ces renseignements permettent de mettre en évidence le caractère aigu ou chronique de la diarrhée, la présence de méléna, la possibilité d’occlusion intestinale ou de sténose pylorique : l’animal est alors prostré, replié sur lui-même et semble souffrir quand on veut le faire avancer. La présence d’un ictère ou un subictère est appréciée par l’observation des muqueuses. La température corporelle est mesurée. L’hypothermie est d’un pronostic sombre. Une douleur, la présence de gaz ou d’occlusion sont appréciés à la palpation.
55
2
Lapin de la photo 1 : lésions de typhilite hémorragique, sur le tube digestif, visibles à l’autopsie.
RUBRIQUE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 295
nutrition diète et réalimentation lors de diarrhée aiguë chez le chien
Souvent imposée en cas de diarrhée aiguë, la diète est-elle toujours un bon réflexe ? Comment la gérer et comment reprendre une alimentation progressive, puis normale, chez le chien ?
L
e premier réflexe, lorsqu’un chien présente une diarrhée aiguë, est en général d’imposer une diète. Il est impératif de savoir pourquoi on la met en place, combien de temps elle doit durer, et comment restaurer une alimentation. ● Une diarrhée aiguë peut avoir diverses causes qui ont néanmoins un effet commun : l’accélération brutale du transit digestif, avec un effet "chasse d’eau" qui a pour conséquence de léser la muqueuse digestive. ● La diète permet de s’assurer de la vidange du bol alimentaire résiduel qui pourrait se trouver dans le tube digestif, et des éléments pathogènes qu’il peut englober. ● La diète s’applique à l’aliment et non à l’eau (encadré 1). Si le tableau clinique n’est pas compliqué d’une pancréatite (non traitée ici), l'intérêt de la diète réside presque uniquement dans cette vidange. Combien de temps doit durer une diète ? ● Le transit digestif du chien est physiologiquement très rapide. En 24 heures, avec une alimentation équilibrée pour chien adulte, le bol alimentaire est déjà en partie terminale du tube digestif. ● Lors de diarrhée aiguë, le transit est accéléré, et ce temps est donc raccourci.
Encadré 1 - De l’eau à volonté Un chien en diarrhée aiguë subit des pertes massives en eau et en électrolytes qui viennent s’ajouter à ses besoins d’entretien. Il est inconcevable de l’empêcher de s’abreuver, sauf s'il présente en parallèle des vomissements aigus [1]. ● De l’eau propre fréquemment renouvelée doit être mise à disposition du chien, en petites quantités, mais à volonté. Cet abreuvement est nécessaire, même si le chien est par ailleurs perfusé par voie parentérale. ● Des solutés d’électrolytes dits réhydratants peuvent être mis à sa disposition, mais toujours dans un bol séparé placé à côté du bol d’eau. ●
Dans la grande majorité des cas, pour ne pas dire tous, poursuivre une diète plus de 24 heures n'offre aucun intérêt. En revanche, une diète prolongée présente des inconvénients (encadré 2). ● La durée de la diète imposée doit intégrer une éventuelle période d’anorexie présente avant la consultation, ou une diète qui aurait été imposée au chien par son propriétaire. Les commémoratifs alimentaires doivent donc être enregistrés lors de la consultation, et ils doivent être pris en compte pour imposer ou non une diète de 24 heures. Si le chien est déjà anorexique ou à la diète depuis un ou deux jours, la diète ne doit pas être poursuivie. LA REPRISE DE L’ALIMENTATION ● Le praticien doit être extrêmement vigilant sur la reprise de l’alimentation, sur sa qualité, sur la quantité d'aliments ingérés et sur la fréquence des repas. ● L’apport de certains nutriments, à la fois
Géraldine Blanchard Bernard Paragon U.P. de Nutrition E.N.V.A. 7, avenue du Général de Gaulle 94704 Maisons-Alfort cedex
Objectif pédagogique Prescrire une diète à bon escient lors de diarrhée aiguë chez le chien et réalimenter l’animal de façon adéquate.
Essentiel ❚ La diète permet de vider le bol alimentaire résiduel et d’éliminer les éléments pathogènes contenus dans le tube digestif. ❚ Poursuivre une diète plus de 24 heures le plus souvent ne présente aucun intérêt. ❚ Si un chien est déjà anorexique ou à la diète depuis 1 ou 2 jours, la diète ne doit pas être poursuivie. ❚ Réalimenter l’animal avec un aliment facilement digestible, voire avec des nutriments directement absorbables.
Encadré 2 - Les inconvénients d’une diète prolongée ● La muqueuse digestive se nourrit en premier lieu de nutriments qui se trouvent dans le chyme. La présence physique du chyme, sa composition, et la présence de nutriments dans le tube digestif stimulent l’irrigation sanguine mé sentérique, la sécrétion d’hormones gastrointestinales et d’enzymes digestives.
En l’absence d’alimentation entérale, les villosités intestinales s’atrophient, les activités enzymatiques digestives diminuent, et l’intégrité de la barrière digestive est menacée.
●
Des modifications de la flore intestinale sont observées, ainsi que la présence de bactéries exogènes dans l’intestin grêle… Tout cela favorise les translocations bactériennes depuis le tube digestif vers l’organisme [2, 3]. Plus la diète dure longtemps, plus le tube digestif perd sa fonctionnalité, plus la diarrhée risque de s’aggraver, et plus l’état général de l'animal se dégrade. Prolonger une diète a donc de nombreux inconvénients, même lors de diarrhée aiguë.
Partenariat
●
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RUBRIQUE
LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 301
principe actif
Wajdi Souilem* Marc Gogny**
le lopéramide
*Laboratoire de PhysiologiePharmacologie E.N.M.V. 2020 Sidi Thabet, Tunisie
S
ynthétisé pour la première fois en 1969, le lopéramide est un antidiarrhréique opioïde souvent préféré aux spasmolytiques anticholinergiques ou papavériniques. Il est normalement dénué de propriétés analgésiques et stupéfiantes, ce qui justifie son inscription sur la liste II des substances vénéneuses. Malgré son efficacité et son tropisme intestinal, le lopéramide doit être utilisé avec prudence, car des effets indésirables sont décrits chez le chien. PHARMACOLOGIE Pharmacocinétique
Après administration orale, le lopéramide n'est que peu, voire pas résorbé dans le tube digestif, et subit un effet de premier passage hépatique important. Les concentrations plasmatiques atteintes sont donc faibles. En cas de surdosage cependant, elles peuvent devenir suffisantes pour provoquer l'apparition d'effets centraux. ● Chez le chien, le temps de demi-vie plasmatique varie de 6 à 14 heures. L’élimination a lieu à près de 90 p. cent par le tube digestif, d’où les concentrations importantes obtenues dans la paroi colique. ● Chez le chat, les données pharmacocinétiques sont inexistantes. ●
Pharmacodynamie À la différence de l'atropine ou de la papavérine, le lopéramide n'est pas un antispas●
PROPRIÉTES PHYSICO-CHIMIQUES
modique digestif. Il appartient au contraire aux "prokinétiques", et agit par stimulation locale des récepteurs morphiniques mu et delta. Les récepteurs kappa et sigma ne sont pas activés. ● L’effet antidiarrhéique résulte d’une action spasmogène et d’une stimulation de l'absorption d'eau et d'électrolytes. Action spasmogène
Le lopéramide renforce la motricité segmentaire. En contractant les fibres musculaires lisses circulaires du colon, il induit un effet de frein, qui s’oppose à l’accélération secondaire du transit. Cet effet a été démontré sur l’intestin grêle et le colon du chien. ● L’activité des fibres longitudinales est au contraire abolie, ce qui inhibe l’activité péristaltique propagée. Le transit intestinal se trouve ainsi fortement ralenti, ce qui favorise indirectement les phénomènes d’absorption. ● Contrairement à la morphine et à ses dérivés, le lopéramide ne retarde pas la vidange gastrique. ● L’augmentation du tonus du sphincter anal pourrait contribuer à limiter l’incontinence fécale associée à la diarrhée. Ainsi, au niveau du colon, le lopéramide restaure un profil moteur proche des conditions physiologiques, à l’opposé des autres antidiarrhéïques qui dépriment toute activité motrice. ●
Action sur les transferts hydro-électrolytiques
Le lopéramide stimule l’absorption nette d’eau, de sodium, de glucose et, à un
●
**Unité de pharmacologie et de toxicologie E.N.V.N. Atlanpôle la Chantrerie BP 40706, 44307 Nantes cedex 03
Classe pharmacologique - Anti-diarrhéique (spasmogène) - Dérivé morphinique de synthèse
Indications ❚ Traitement symptomatique des diarrhées aiguës.
Essentiel ❚ Le lopéramide agit en restaurant un profil moteur proche des conditions physiologiques. ❚ Des effets secondaires centraux ne sont pas rares. ❚ L'association avec un atropinique est déconseillée.
Figure - Structures du lopéramide et de la morphine
● Dénomination chimique : [(Chloro-4phényl)-4 hydroxy-4 pipéridino]- 4 N,Ndiméthyl-diphényl-2,2 butyramide. ● Dénomination commune internationale : Lopéramide ● Structure et filiation : L'analogie structurale entre le lopéramide et la morphine n'est pas évidente. Pourtant, le lopéramide a été construit à partir de la morphine, en conservant le noyau γ-phénylpipéridine, responsable de la fixation sur les récepteurs morphiniques (figure). ● Caractéristiques : Le lopéramide est un composé liposoluble, légè-
rement basique, très peu soluble dans l’eau, stable, non hygroscopique et non sensible à la lumière.
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 305
immunologie la réponse immunitaire digestive L’appareil digestif doit faire face à un dilemme : permettre le passage des aliments au travers de la muqueuse intestinale et rester imperméable aux micro-organismes présents dans la lumière digestive.
L
a muqueuse intestinale est en contact permanent avec la flore digestive. Le nombre de bactéries dans l’intestin est plus important que le nombre de cellules dans l’organisme. Dans le tube digestif, les mécanismes de protection non spécifiques sont très développés (encadré 1). Mais ils ne sont pas assez efficaces pour protéger le tube digestif contre des infections par des agents pathogènes spécifiques. L’élimination de ces agents nécessite l’intervention d’une réponse immunitaire adaptée. LES MÉCANISMES IMMUNOLOGIQUES SPÉCIFIQUES DU TUBE DIGESTIF
Le système immunitaire digestif ou G.A.L.T. (“gut associated lymphoïd tissue”) est divisé en deux sites : - un site inducteur, dans lequel l’antigène est pris en charge et où la réponse immunitaire se met en place ; - un site effecteur, dans lequel les effecteurs de la réponse se déploient et agissent. Le site inducteur : les plaques de Peyer ● Les sites inducteurs sont des formations lymphoïdes spécialisées qui appartiennent au système digestif. Ils captent et identifient les antigènes présents dans la lumière
digestive. Dans la muqueuse digestive, ces formations lymphoïdes sont appelées les plaques de Peyer. ● Les plaques de Peyer sont des formations lymphoïdes secondaires qui contiennent tous les effecteurs nécessaires à la mise en place d’une réponse immunitaire*. Des cellules spécialisées dans le transport des antigènes, les cellules M (pour "microfold") sont présentes sur l’épithélium des plaques de Peyer. Ces cellules captent les macromolécules (aliments non digérés) et les micro-organismes (flore commensale ou agents pathogènes) présents dans la lumière digestive et les transportent au travers de l’épithélium pour les présenter intacts aux cellules présentatrices de l’antigène (C.P.A.) et aux lymphocytes B (L.B.) naïfs présents sous l’épithélium. Ils sont alors phagocytés par les C.P.A. et présentés aux lymphocytes T (L.T.) naïfs des plaques de Peyer. ● Après la phagocytose de l’antigène, les C.P.A. activées, les L.T. et les L.B. spécifiques de l’antigène migrent dans les nœuds lymphatiques mésentériques où ils terminent leur activation et leur différenciation. Lorsque la réponse immunitaire est correctement contrôlée, une réponse de type Th-2 se met en place. ● Après leur différenciation, les effecteurs quittent les nœuds lymphatiques mésentériques et retournent spécifiquement dans le tissu où ils ont été activés. Les effecteurs activés dans les muqueuses retournent dans les muqueuses et ne participent pas à la réponse immunitaire systémique. C’est le système immunitaire commun aux muqueuses et aux téguments,
Séverine Boullier Service de Microbiologie Immunologie E.N.V.T. 23, chemin des Capelles 31076 Toulouse cedex 3
Objectif pédagogique Comprendre les mécanismes de défense immunologiques spécifiques du tube digestif.
NOTE * cf. article de S. Boullier et S Bertagnoli, Le NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE n°5, juin-septembre 2001.
Essentiel ❚ Dans le tube digestif, les mécanismes de protection non spécifiques sont très développés. ❚ Le système immunitaire digestif est réparti en : - un site inducteur : les plaques de Peyer ; - un site effecteur : la lamina propria.
Encadré 1 - Les mécanismes de protection non spécifiques Les cellules épithéliales intestinales sont liées les unes aux autres de façon imperméable par des jonctions serrées. Ces cellules permettent uniquement le passage des molécules de très faible poids moléculaire. Les macromolécules (aliments non digérés par exemple) et les microorganismes ne peuvent pas traverser ces jonctions serrées. Seuls les agents pathogènes les mieux adaptés peuvent franchir cette barrière. ● Il existe une desquamation naturelle perma●
nente de l’épithélium qui permet d’éliminer, grâce au péristaltisme intestinal, les cellules sur lesquelles sont fixés des micro-organismes. ● En plus de ces facteurs mécaniques, il existe des facteurs de résistance chimique : la muqueuse intestinale est recouverte d’un mucus riche en de nombreuses substances anti-bactériennes, comme le lysozyme ou les défensines. ● La flore résidante exclut les autres microorganismes et protège le tube digestif de la colonisation par des agents pathogènes.
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 307
geste chirurgical
le lavage gastrique
chez le chien et le chat Le lavage gastrique est un geste simple, rapide et efficace. Il est utilisé dans le traitement de certaines intoxications récentes.
Apprendre la technique de réalisation d’un lavage gastrique.
L
Le praticien choisit cette technique lorsque les vomissements sont contre-indiqués en raison de l’état de l’animal : inconscience, convulsions, ou lorsque les vomitifs administrés sont inefficaces (encadré). ● Le lavage gastrique est proscrit lors d’ingestion de caustiques (eau de javel, ...) et de dérivés volatils du pétrole (white spirit, etc.) en raison des risques d’inhalation et de pneumopathie secondaire. ●
Clinique Vétérinaire des Lavandes 8, rue Aristide Briand 26160 La Bégude de Mazenc
Objectif pédagogique
e lavage gastrique est un geste d’urgence qui permet d’évacuer rapidement le contenu gastrique lors d’ingestion récente (inférieure à deux heures) de substances toxiques. INDICATIONS ET CONTRE-INDICATIONS
Christophe Hugnet
Geste ❚ Facile d’exécution.
1
Le matériel minimum se compose d’une seringue à droguer (en haut), d’une sonde trachéale (au milieu) et d’une sonde gastrique (en bas) (photos C. Hugnet).
RÉALISATION PRATIQUE Pour réaliser un lavage gastrique, il convient de : 1. réaliser une anesthésie générale de courte durée ; 2. mettre en place une sonde endotrachéale et insuffler le ballonnet ; 3. placer l’animal en décubitus latéral, la tête en position déclive par rapport au corps ; 4. repérer, sur la sonde gastrique, la distance entre l’ouverture de la gueule et la dernière côte (photo 2). 5. introduire la sonde gastrique via l’œsophage jusqu’au repère prémarqué (photo 3) ; 6. administrer de l’eau (ou du NaCl isotonique à 0,9 p. cent) tiédie à température du corps à l’aide de la seringue à droguer ou via un entonnoir (photo 4). Le volume à administrer est de 5 à 10 ml/kg de poids vif par cycle de lavage. Il est indispensable d’évaluer l’état de réplétion de l’estomac par palpation régulière de l’abdomen ; 7. récupérer le contenu gastrique à l’aide de cette même sonde ou par l’intermédiaire d’une seconde sonde gastrique de même ●
2 Étape 1 : repérer la longueur de sonde gastrique nécessaire pour atteindre l’estomac de l’animal.
3
Étape 2 : introduire la sonde gastrique jusqu’à l’estomac. Ne pas dépasser le repère (photo 2).
4
Étape 3 : injecter puis aspirer l’eau ou le soluté physiologique tiédi à l’aide de la seringue à droguer.
Matériel et médicaments ●
Matériel :
> Le lavage gastrique nécessite au minimum : - un anesthésique ; - une sonde endotrachéale (de 1 à 30 €); - une sonde gastrique, d’un diamètre au moins égal à celui de la sonde endotrachéale et munie de plusieurs orifices ; - une seringue à droguer, d’une contenance de 500 ml, par exemple (de 10 à 20 €) (photo 1).
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 311
comment répondre à la remarque : “c’est cher !” Les propositions de soins ou de traitements du vétérinaire sont parfois accueillies d’un “c’est cher !” gêné ou indigné du client. Comment réagir et que répondre à cette objection ? Cet article présente quelques scenarios et apporte des réponses pratiques.
A
cteur de la santé de son animal, le propriétaire attend une explication claire et précise sur les soins prodigués chez le vétérinaire. Selon son tempérament, il met en concurrence plusieurs praticiens, tente de négocier les prix, les prestations, remet en cause le diagnostic, ... Face à cette évolution de comportement, les vétérinaires ont adapté leur savoir-faire et leur savoir-être. ● Lorsqu’un acte médical ou chirurgical, ou un traitement est prévu, une discussion a lieu pour exposer les bénéfices et les risques pour l’animal, et annoncer le prix de la prestation. - Si l’entretien est bien mené, les questions du propriétaire entendues et les réponses acceptées, les objections reformulées et traitées, avec des réponses courtes et adaptées, la conclusion de la consultation par la proposition d'un acte ou d'un traitement, accompagné ensuite de la demande de règlement, ne doit pas poser de problème. - Si un désaccord est en revanche resté dans l'ombre, la phrase couperet peut tomber : “c'est cher !” POURQUOI LE CLIENT RÉAGIT-IL MAL À L’ANNONCE DU PRIX ?
La problématique est différente selon l’activité du vétérinaire. - En clientèle canine, la relation est affective, voire passionnelle. - En exercice rural, la discussion porte sur les coûts de production. Elle a lieu dans une relation entre professionnels. ● Dans tous les cas, il est nécessaire d’identifier pourquoi le client réagit négativement à l'annonce d'un prix, afin de pouvoir justifier ses honoraires. En aucun cas, il ne s'agit d'emblée de proposer une remise. ● A l'annonce du prix le client réagit négati●
vement, pourquoi ? - Il ne peut pas payer en ce moment. - Il n'avait pas prévu une telle dépense. - Il n'avait pas idée de la valeur d’une telle prestation. - Il tente de demander une ristourne, au cas où... - Il juge le prix excessif. - Il compare parfois avec les soins donnés à un autre animal, ou réalisés par un confrère. ● En réalité, l’objection “c’est cher”sert le plus souvent au client à exprimer un malaise : dans la majorité des cas, le prix n'est pas jugé trop élevé (encadré 1).
Fabrice Labadie IDDEM 89, boulevard de Sébastopol 75002 Paris e-mail : fabrice.labadie@iddem.com
Objectif pédagogique Réagir efficacement lorsqu’un client remet en cause le prix des prestations vétérinaires.
ENCHAÎNER À la fin de la réponse, le praticien enchaîne simplement en redonnant la parole au client : "Ai-je été clair ?" ● Deux alternatives sont possibles puisqu'il s'agit d'une question fermée : - la réponse est affirmative : conclure par une proposition acceptable par le client, qui tient compte des informations recueillies ; - la réponse est négative : dans ce cas, éviter de tomber dans le piège qui consiste à reprendre l'argumentation depuis le début, en étant un peu plus énervé ! Si le client répond "non", c'est que le motif de son décsaccord est ailleurs. Il est important dans ce cas de trouver quoi en lui redonnant la parole. Cette attitude l’oblige à donner les vraies raisons de son appréciation négative. ● Cette situation est très confortable puisqu'elle ne peut générer de conflit : le vétérinaire cherche simplement à mieux connaître son client. Il est possible de rester dans cette phase de découverte jusqu’au moment où le praticien pense avoir bien compris le fonctionnement de son interlocuteur. Ceci permet ensuite de conclure par une proposition acceptable. ● Ne jamais redonner d’argument justifiant le prix, ce qui pourrait engendrer de nouvelles idées pour de nouvelles objections. ●
VALIDER L’ACCORD ET CONCLURE Pendant les échanges précédents, il convient d'être attentif aux attitudes qui traduisent un accord : un sourire, un acquiescement, une position détendue, ouverte.
●
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Le devis écrit ou la facture détaillée est un excellent outil pour aider à comprendre l’élaboration d’un prix.
Essentiel ❚ Identifier pourquoi le client réagit mal à l’annonce d’un prix. ❚ Après avoir compris pourquoi la facture semble “trop chère”, s’assurer que les explications fournies sont satisfaisantes pour le client. ❚ Ne pas proposer une remise sans avoir d’abord compris les raisons du client. ❚ Éviter de se justifier en invoquant les charges de la clinique ou du cabinet.
MANAGEMENT LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT/ SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 315
tribune Fabrice Crépin “quand la consultation conduit à la prescription Fabrice Crépin Directeur activité vétérinaire France
de nutritionnel santé”...
Royal Canin 30470 Aimargues
Comment vendre un aliment lorsque l’on se sent avant tout médecin et chirurgien ? Comment exploiter la consultation, moment propice lors de certains événements pathologiques comme les troubles digestifs ?
L Fabrice Crépin Profiter d’une consultation sur les troubles digestifs, les troubles de l’animal âgé ou la stérilisation, ... pour apporter à l’animal un aliment "idéal", sans souci de variété, parce que nous disposons de gammes cohérentes et de qualité.
a sagesse populaire nous dit que notre alimentation est notre première médecine, un précepte vieux d’Hippocrate, dont la validité se vérifie encore de nos jours chez l’homme et nos compagnons à quatre pattes. Pour autant, il demeure dans l’esprit de nombreux vétérinaires, qui sont avant tout des médecins, des réticences sur l’approche de l’aspect nutritionnel de leur consultation, qu’ils jugent "mercantile". ● La consultation chirurgicale ou médicale est une occasion rêvée d’aborder l’aspect nutrionnel dans un contexte propice, non "dramatique" mais sérieux. À ce moment, le propriétaire est dans un état d’esprit tourné vers la santé de son animal. Il est plus aisé de lui expliquer comment nous disposons maintenant de gammes cohérentes et de qualité grâce aux recherches en nutrition menées ces vingt dernières années et surtout, depuis les années 90. ● L’exercice pratique offre de nombreuses occasions de tenir ce discours, par ailleurs, attendu et souhaité par nos clients. DES CONSEILS ADAPTÉS POUR VOS CLIENTS ...
MANAGEMENT LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE 320 - AOÛT/ SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003
● Quelques exemples pris dans l’exercice quotidien le montrent rapidement. 1. la consultation du chien ou du chat âgés permet au praticien de rappeler que les progrès de la médecine ont eu des conséquences favorables sur l’augmentation de la longévité. Les besoins nutritionnels spécifiques de ces animaux sénescents sont évidents et faciles à expliquer. 2. la stérilisation du chat : acte chirurgical simple, la stérilisation est le moment pour proposer un "pack de stérilisation". ● La prescription d’un aliment adapté s’intè-
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gre dans la liste des modifications majeures ou subtiles dues à la stérilisation, qui peuvent influencer le mode de vie de l’animal, que présente le praticien. ● La nutrition dans ce "pack de stérilisation"répond là encore à une attente de notre client, qu’il exprime parfois auprès de son vétérinaire, parfois auprès de l’A.S.V. La stérilisation est ainsi médicalisée et valorisée. 3. Les troubles digestifs offrent aussi l’occasion au praticien de faire valoir les gamme diponibles chez le vétérinaire. Ces troubles peuvent avoir de multiples causes, parmi les quelles la variété des régimes alimentaires. ... POUR UNE CONSOMMATION RAISONNÉE ET PLUS JUDICIEUSE N’oublions pas que nous pouvons nous interroger nous-mêmes sur des questions simples mais pleines de bon sens que se pose notre client. ● Pourquoi est-ce que j’achèterai demain la nourriture de mon animal chez le vétérinaire, et non au supermarché, en même temps que j’achète de l’alimentation pour ma famille ? À chacun sa réponse mais une certitude : - l’aliment que vous proposez est plus digestible, sa précision nutritionnelle est meilleure, tout comme son appétence ; - l’aliment sec présente aussi des avantages, comme un stockage et une conservation faciles. Ainsi, pour nourrir un chien de 30 kg pendant un an, 11 sacs de 14 kg de Vet Size Maxi young adulte® sont nécessaires, contre 425 boîtes de 1,2 kilos d’aliment humide vendu au supermarché ! ● L’argument économique n’est pas négli geable non plus : en passant d’un aliment humide haut de gamme à Vet Size Mini young adult®, pour un chien de 6 kilos, le propriétaire économise environ 1 000 € dans l’année.
V
endre un nouvel aliment lors d’une consultation, moment propice à entendre un nouveau discours, permet donc de faire valoir les arguments de qualité, prix, facilité d’emploi, pour une gamme dont le vétérinaire possède l’exclusivité. ❒
test clinique les réponses
Cyrille Martin Claude Carozzo
dysplasie du coude
1 Quelles sont vos hypothèses diagnostiques ? ● À ce stade, les principales hypothèses diagnostiques sont les ostéopathies du jeune en croissance. D’autres causes, comme les fractures épiphysaires et l’arthrite pourraient être évoquées. ● L’âge, la race de l’animal et les commémoratifs orientent le praticien vers l’hypothèse d’une dysplasie du coude gauche, avec un ou plusieurs éléments suivants : - une fragmentation du processus coronoïde médial ; - une ostéochondrite disséquante du condyle médial de l’humérus ; - une non union du processus anconé ; - une incongruence articulaire. 2 Quelles sont les lésions présentes sur les radiographies ? ● La zone radio-transparente qui sépare l’olécrâne du processus anconé est compatible avec une non-union du processus anconé (photo 1). L’incidence crânio-médiale permet de mettre en évidence un processus coronoïde médial volumineux et déplacé (photo 2). ● Ce chien présente donc à la fois une nonunion du processus anconé et une fragmentation du processus coronoïde médial, ce qui est peu fréquent. 3 Quelles attitudes thérapeutiques envisagez-vous ? ● En ce qui concerne la fragmentation du processus coronoïde médial, le traitement est chirurgical : il consiste à retirer le processus coronoïde fragmenté, soit par arthrotomie classique, soit par arthroscopie (photo 3). Cette intervention, qui nécessite une certaine dextérité et l’emploi d’un matériel coûteux, est pratiquée par un spécialiste, son coût varie de 380 à 750 € environ. Les résultats sont d’autant plus favorables que l’animal est jeune et non arthrosique. ● Le traitement de la non-union du processus anconé peut être médical, chirurgical ou l’un, puis l’autre, si le 1er s’avère insuffisant : - le traitement médical seul est conseillé chez les jeunes animaux (de moins de cinq mois) pour lesquels une soudure est encore possible, ou bien chez les individus âgés qui présentent un degré d’arthrose important. Des anti-inflammatoires non stéroïdiens sont prescrits (Métacam® : 0,1 mg/kg/j pendant 15 jours à un mois, Rimadyl®: 4 mg/kg/j pendant 15 jours à un mois) ; - chez les animaux âgés qui présentent une atteinte rénale, des dérivés morphiniques comme le tramadol sont à préférer. Dans ce cas, utiliser le Topalgic LP®* (libération pro-
Unité de Chirurgie et Anesthésiologie E.N.V.L., 1, avenue Bourgelat 69280 Marcy l’Étoile
longée) ou le Contramal®* à la dose de 5 à 15 mg/kg une fois/j. Cependant, ce traitement médical s’accompagne souvent d’une arthrose précoce et d’une boiterie persistante ; - le traitement chirurgical se décline en trois techniques différentes : 1. le retrait du processus anconé non-uni : c’est probablement la technique la plus pratiquée et la plus simple (photo 4). Son coût est d’environ 300 à 500 €. Elle entraîne une récupération rapide de l’animal. Mais cette intervention peut être à l’origine d’une arthrose secondaire grave et d’une diminution sévère de l’amplitude articulaire. Malgré cela, les résultats peuvent être considérés comme acceptables pour un animal de compagnie ; 2. la fixation par vissage : elle est recommandée chez les animaux jeunes et contreindiquée chez les animaux arthrosiques, ou ceux qui présentent une incongruence du coude pour lesquels cette fixation est associée à une ostéotomie ulnaire. Elle consiste à stabiliser le processus anconé par un vissage compressif, associé le plus souvent à une broche anti-rotatoire. La fixation par vissage ne doit être envisagée que si elle permet une reconstruction anatomique de l’articulation du coude. Cette technique délicate à réaliser nécessite l’intervention d’un chirurgien spécialisé. La fusion osseuse est très tardive (3 ans), voire inexistante ; 3. l’ostéotomie ulnaire associée à la stabilisation du processus anconé permet de rétablir la congruence articulaire. Ainsi, les sollicitations du processus anconé sont atténuées, les complications que l’on rencontrait lors de fixations seules (ruptures d’implants fréquentes) sont évitées et le processus anconé peut se souder. Les résultats sont encourageants, puisque certaines études rapportent pas ou peu d’arthrose, avec une clinique très satisfaisante, sur des suivis sur 23 à 40 mois : absence de boiterie, aucune douleur et une amplitude articulaire normale. La non-union du processus anconé et la fragmentation du processus coronoïde médial sont deux processus pathologiques fréquemment rencontrés chez les chiens de grande race en croissance. Pour que le traitement soit efficace, le diagnostic doit être précoce. Pour la non-union du processus anconé, les techniques de préservation (fixation lors de congruence normale ou fixation associée à une ostéotomie lors d’incongruence) ne sont efficaces que si elles sont mises en ❒ œuvre tôt.
Processus anconé non uni à l’olécrâne
1 Coude, vue de profil : une zone radio-transparente sépare l’olécrâne du processus anconé.
Processus coronoïde médial fragmenté
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Coude, vue de face : le processus coronoïde médial est volumineux et déplacé.
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Coude, vue de face : la totalité du processus coronoïde médial a été retirée.
4 Coude, vue de profil après exérèse du processus anconé (clichés unité clinique d’imagerie E.N.V.L.)
NOTE * Spécialité humaine.
Pour en savoir plus ● Brinker WO, Piermattei DL, Flo GL. Non union du processus anconé. Manuel d’orthopédie et de traitement des fractures des petits animaux 2e ed, collection médecine vétérinaire, 1994:494-5. ● Thacher C. Ununited anconeal process. In Slatter, Textbook of small animal surgery, WB Saunders Company, Philadelphia 1993:1977-81.
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LE NOUVEAU PRATICIEN VÉTÉRINAIRE AOÛT / SEPTEMBRE / OCTOBRE 2003 - 321