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Shigéo ANZAI, photographe

Né en 1939, Japon 1978 Reçoit une bourse de la Fondation J. D Rockfeller III, recherches sur l’Art Contemporain aux États-Unis 1978-1979 vit à New York Photographie, depuis 1969 jusqu’à nos jours, les artistes, les évènements, les œuvres d’art contemporain de la scène internationale.

Alain BÉRAUD 1926–2002

Artiste peintre, Docteur ès Lettres Diplômé de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs, Paris 1959 Grand Prix Othon Friesz 1963-1992 Professeur à l’École des Beaux-Arts de Brest 1980 Docteur IIIe cycle ès Lettres « Grosz, Piscator, Brecht, trois acteurs pour un théâtre » 1993 Docteur d’État ès Lettres « “Montrer”, contribution prospective à l’étude, au niveau des arts, d’un dialogue réel »

Yoji HAIJIMA, artiste

Né en 1931, Japon 1960-1999 Éditeur de la revue d’Art et d’Ikébana « Ikébana Ryusei »

Né en 1935, Japon Diplômé de la Faculté de Calligraphie de l’Université Gakugei de Tokyo Pratique le Zen sous la direction de Ban Tetsugyu, puis de Inoué Gien, tous deux maîtres de l’école Zen Soto Membre fondateur et Vice President del’école de Calligraphie Ichigen 2004 Exposition personnelle à la Galerie Ombre et Lumière

Éditions Apogée 28 € en France

ISBN 2-84398-252-9

ÉDITIONS APOGÉE

Hazan KIMURA, calligraphe

ÉDITIONS APOGÉE

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Couverture D. Hézard


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Collection Ombre et Lumière

En hommage à Alain Béraud Kanyo Nakamura Ta Yu Tseng Akira Uéda

© Éditions Apogée 2006 ISBN 2-84398-252-9


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Textes Alain Béraud Yoji Haïjima Hazan Kimura

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CETTE RÉSONANCE

Détail du texte manuscrit de

Hazan Kimura Mutsuo

Depuis de longues années, Dominique Hézard étudie également la calligraphie. Elle affectionne particulièrement Ko Teiken, Taigu Ryokan et Takamura Kotaro. La vulgarité en calligraphie était ce qui répugnait le plus à Ko Teiken. L’écriture du moine zen Ryokan, tout comme l’homme, est pénétrée de la vraie nature, illusoire et précaire, de toutes formes et tous phénomènes. C’est une calligraphie empreinte de calme et de vide, et qui plus est, d’une douceur raffinée. Takamura Kotaro nous lègue, tout autant que sa sculpture et sa poésie, une calligraphie d’une grande pureté. Ce qui, comme une eau souterraine, coule et relie ces trois hommes, à savoir une pureté d’esprit, il m’est arrivé maintes fois de le ressentir dans le travail de Dominique Hézard. Les œuvres de ces trois hommes tendent et

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atteignent à la liberté du non-faire. De même, il me semble que son travail, pas à pas, pénètre plus profondément dans la voie orientale du non-faire. Pour tout moyen, une encre pâle, et de l’angle humidifié du bâton d’encre, de cet angle seul, quelques lignes sur la feuille de papier ; parfois, dans certains travaux, la feuille se remplit de lignes tracées vers le haut. Plutôt que tracées, comme d’un esprit tendu, incisant le papier japonais, ces lignes sont écrites. Ce ne sont pas de simples lignes uniformes. Ce sont des traits expressifs, chargés d’émotion, comme en calligraphie, ce que l’on nomme hitsui (pinceau-esprit). Ce sont des traits puissants comme un arbre dépouillé s’étirant dans le froid intense du vaste ciel, quand les dix-mille existants, du mouvement, sont retournés au calme. Parfois encore, ces traits ont l’aspect d’un jeune arbre respirant le printemps humide et flou. Ces traits sont des dessins sans doute. Dessin, en japonais shasei, s’écrit avec sei vie (énergie du cosmos) et sha représenter. Shasei a pour sens : rendre la vie. Par conséquent, un dessin authentique n’est ni figuratif ni abstrait, il est en lui-même, emblème de l’Univers. Ce que l’on peut percevoir, c’est la haute résonance du Ciel-Terre. Sans pensée élevée, une haute résonance ne saurait naître. La vraie nature de la Voie est insaisissable et vague, dit Lao Tseu. La nature de

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Dominique Hézard, la porte à ne pas négliger le vague, l’infime. C’est précisément de sa prédilection pour l’insignifiant que ses travaux ont pu naître. Le poète Matsuo Basho réaffirme l’irréfutable existence de l’insignifiant, dans ce haïku : En regardant bien Près de la haie La bourse-à-pasteur fleurit (Elle passe inapercue, pourtant tout autant qu’une autre fleur et tout aussi belle, cette mauvaise herbe, sans titre de noblesse, de tout son être fleurit dans le Ciel-Terre.) Devant le travail de Dominique Hézard, qui ne saurait être rafraichi par cette pure résonance.

Hazan Kimura Mutsuo mai 2006

Notes

–- Ko Teiken (1045-1105) Huang Tingjian De son nom de calligraphe Sangoku. Poète, lettré de l’époque song, Chine. –- Taigu Ryokan (1758-1831) Communément appelé Ryokan. Moine zen de l’époque Edo, Japon. –- Takamura Kotaro (1883-1956) Poète, sculpteur. Japon.


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papier craft papier japonais fils de papier acrylique Galerie Nisshin, Tokyo 1981 Photographies : S. AnzaĂŻ 8


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empreinte papier encre soie thé feuille d’argent 1990 26


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papiers encre pigments fibres végétaux safran feuille d’argent empreinte d’arbre

45x37 cm

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papiers encre pigments fibres végétaux safran feuille d’argent empreinte d’arbre

98x31 cm 35


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papiers encre pigments soie fibres végétaux feuille d’argent empreinte d’arbre 1997 35x92 cm 44


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papiers encre pigments feuille d’argent empreinte d’arbre sanguine 1997 26x67,5 cm 45


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Cette chose qu’on ne peut dire avec ces mots. Cette chose qu’on ne peut chevaucher avec cette façon de penser. Cette chose qu’on ne peut traduire avec cette couleur. Cette chose qu’on ne peut dessiner avec cette façon de voir. Ce chemin qui diffère complètement de celui-ci. Cette figure qui ne peut en aucun cas se fondre dans celle-ci. Cette chose qui sature cet espace. Cette chose qui à l’intérieur même d’un atome s’agite. Seule cette chose contre mon gré même me fait bouger. Seule cette chose met des points rouges à l’herbe mizuhiki.

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Mizuhikiso : Polygonum filiforme (Chine, Japon)

Takamura Kotaro (1883-1956)


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feuille de bois papiers encre 2002 43x31 cm 65


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C o n v e r s a t i o n D o m i n i q u e H é z a r d et M i c h e l et C h r i s t i n e S é g a l e n e n t r e

MS : Quand fais-tu démarrer ton travail artistique proprement dit ? DH : Dès 1977, aux Beaux-Arts de Brest, je faisais des travaux sur papier canson, le papier tendu sur une planche. Le travail terminé, j’en découpais le tour. Toujours insatisfaite du travail lui-même, j’étais fascinée par les chutes, les bords. Un jour, j’ai commencé à découper ces travaux en fines lamelles au cutter. Le papier coupé ainsi, très finement, ondulait. Cela faisait une ligne superbe, naturellement. J’ai réalisé des travaux d’après des dessins de nu, le papier kraft déchiré était collé sur la feuille, puis arraché, les fils de papier venaient en relief… MS : À quand remonte ta première exposition ? DH : Ma première exposition, c’était en 1981, à Tokyo, à la Galerie Nisshin. J’y présentais des travaux à partir de dessins de nu, de kraft, de papiers japonais et de fils de papier. Le papier n’était plus tendu, il était libre. Et la colle, un médium acrylique qui conserve cette qualité du mouillé prend une importance toute particulière. MS : Le rapport à l’espace, la ligne et les assemblages sont déjà là. Quelles furent les influences qui t’ont marquée ?

papiers acrylique 1977 100 x 70 cm 80

DH : Après les Beaux-Arts, en 1978, je suis allée à San Francisco et j’y suis restée jusqu’en décembre 1979. Là-bas, il y a eu la rencontre avec le professeur chinois, Tseng Ta Yu qui m’a enseigné la peinture à l’encre et tant de choses…, de la pensée chinoise aux classiques français, je pense entre autres à George Sand qu’il m’a fait découvrir. Par ailleurs, je lisais Antonin Artaud, un autre choc… « l’air est plein de coups de crayon ». Et je dessinais sur de grandes feuilles au sol ; les lignes, les corps se superposaient… MS : Ensuite, dans les années 1980, tu es partie au Japon. Combien de temps y es-tu restée ?

DH : Un an et demi, puis je suis arrivée à Rennes, en 1981. Là, j’ai fait de la cuisine et j’ai commencé à « écrire » des lettres. La lettre pliée, dépliée, c’est un volume que l’on tient dans la main. « Lettre » en japonais, s’écrit avec les caractères : main et papier… MS : As-tu poursuivi également ton travail sur le nu ? DH : Je n’avais plus de modèle, alors j’ai abandonné, je suis entrée dans une période « oignons et cuisine ». On pourrait dire : « Du nu à la cuisine » ! (rires). Mais aux Beaux-Arts, j’avais déjà commencé par la cuisine : j’avais fait toute une série d’assiettes… CS : Comment sont arrivées les lettres, en fait ? DH : Du désir de garder le contact avec les amis rencontrés au Japon. De ma réticence à me servir des


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mots. J’étais dans une période « cuisine », je l’ai dit, j’ai commencé à faire des petits collages avec des épluchures d’oignons et les exercices de calligraphie déchirés. Je collais le tout sur le frigidaire. J’en suis aussi venue à de plus grands formats. Je recopiais des pages de Virginia Woolf au pinceau assez souvent, je déchirais, j’incorporais les épluchures d’oignons, d’ail… MS : Y avait-il du texte ? DH : Ce sont des lettres sans mots. Plutôt que de dire : je vais bien, je fais beaucoup de cuisine, autant mettre des épluchures d’oignons ! Et puis il y a la fascination du végétal : les oignons, leurs peaux translucides, et ce haïku, de Nagata Koi, qui m’accompagne toujours : « Dans ce monde de rêves, je cultive des oignons, solitude 1 ». On m’avait demandé d’écrire un texte pour une revue d’art au Japon 2, un numéro spécial Femmes Artistes. Je présentais des photos de lettres, j’y disais ma méfiance des mots. Je citais Matisse, recommandant aux étudiants de se couper la langue s’ils souhaitaient se consacrer à la peinture. Je parlais d’un espace sans dessus-dessous, sans envers-endroit, sans commencement-fin, lettre pliée, repliée sur elle-même qu’un ami ouvrirait en laissant sa trace. CS : Ce travail, tu l’as poursuivi ? DH : Et je le poursuis encore ! CS : Oui, nous recevons ces lettres chaque année, au Nouvel An… MS : Quand as-tu commencé ton travail d’installation ? DH : En 1982. J’habitais Visseiche, à 35 km de Rennes, à la Basse Bouinière. Je louais une vieille maison, avec beaucoup d’araignées, de grosses araignées, de belles toiles, et j’ai commencé à tendre des fils. « Sous une chaise » fut ma première installation que j’ai présentée par la suite au Mans, Art Provisoire. Puis j’ai préparé l’exposition de la MJC du Grand Cordel à Rennes. Au grenier, avec le balai, j’écrivais de grands caractères que je déchirais ensuite…

MS : Tu avais déjà étudié la calligraphie ? DH : Oui, j’ai commencé à San Francisco en 1978, puis au Japon. En fait, à San Francisco, j’ai surtout étudié la peinture à l’encre, découverte à 17 ans au Japon, lors de mon premier séjour, en 1969. Mon rêve était alors de retourner au Japon pour y étudier la peinture à l’encre, mais le Professeur Tseng Ta Yu m’a dit : « La peinture, oui, mais il faut également faire de la calligraphie pour avoir la puissance du trait », ce qui à l’époque me paraissait inconcevable pour une occidentale. Après San Francisco, à Tokyo, j’ai étudié un peu la peinture à l’encre, et finalement, je suis allée vers la calligraphie. Mais si pour moi, l’étude de la calligraphie est essentielle, il n’était pas question de ne faire que ca. Les années 1980, 1981, à Tokyo, ont été des années riches en rencontres, et en découvertes de l’art contemporain au Japon ; le mouvement mono-ha m’attirait particulièrement.

1. Fourmis sans ombre Maurice Coyaud Phébus 2. Bijutsu Techo n° 515 1983 3. Ikebana Ryusei n° 291 1984 (revue d’art et d’ikebana de l’École Ryusei).

MS : Pour l’exposition au Grand Cordel, en 1983, tu as conçu une installation ? DH : Oui, j’ai tendu des fils dans l’espace, autour des tables, collé les papiers dans les fils, j’avais intitulé l’exposition « Papiers en l’air »… Les enfants jouaient avec les fils et les personnes âgées s’y emmêlaient. Au mois de juin, j’ai ressorti les papiers dans le champ, à la Basse Bouinière, avec les vaches noires et blanches au loin. Une installation d’un jour, pour moi toute seule, dans la lumière de juin. Des photos de ce travail avec un texte ont été publiées dans la revue « Ikebana Ryusei 3 », au Japon. MS : Tu as poursuivi ton travail d’installation ensuite ? DH : Oui, quand je suis retournée au Japon, j’ai exposé en 1987, à la Galerie Ueda Warehouse, à Tokyo. C’était un ancien entrepôt, sans ouverture, tout noir, avec quatre énormes piliers. Il me fallait utiliser l’obscurité. C’était un peu sombre, je crois ! MS : C’étaient des papiers encrés ? 81


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dominique hézard née en 1951 à Paris vit à Tokyo 1973-78 1978-80 1980-81 1985-87

École des Beaux-Arts de Brest Étudie la peinture et la culture orientale à San Francisco Étudie la calligraphie à Tokyo Boursière du gouvernement japonais Étudie la calligraphie à l’Université Gakugei de Tokyo

Expositions personnelles 1981 Galerie Nisshin, Tokyo 1983 MJC du Grand Cordel, Rennes 1987 Galerie Ueda Warehouse, Tokyo 1988 Centre Culturel Le Triangle, Rennes 1989 « Sakaki Bakuzan et Dominique Hézard », Galerie Ueda, Tokyo 1989, 90, 92 Art Space Mauve, Kobe 1991, 93, 97, 2005 Galerie Ombre et Lumière, Rennes 1993 Galerie Ueda Décor, Tokyo Espace Arénicole, Brest 1995 Espace Japon, Paris 1997 « Dominique Hézard et 4 écrivains japonais » HOTTA Yoshie, NAKAMURA Shinichiro, OOKA Makoto, TAKAHASHI Osamu, Galerie Ueda, Tokyo

1998 2000 2000, 02 2003 2004 2005, 06

Galerie Ikkon, Rennes Galerie Ueda, Tokyo Galerie Soh, Tokyo Galerie Ségalen, Saint-Malo Nishimoto bldg. Projet de Renaissance I, Wakayama Galerie Gala, Tokyo Galerie Ombre et Lumière, Saint-Malo

Expositions collectives 1982 Art Prospect, « 14 à l’affiche », Rennes 1983 Art Provisoire, Le Mans 1989 Arénicole, « Bleu, blanc, bouge », Brest 1997 Galerie Artem, Quimper 1998 Fiac-Saga, Paris, Galerie Patrick Gaultier 2000 Combles de la Maison des Princes, Pont-Scorff


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