Miroirs de méduse (Les)

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Jacqueline Goy

Les miroirs de Méduse

Méduse

biologie et mythologie

Les miroirs de

Jacqueline Goy

Illustrations de couverture : © Guido Mocafico, Studio Kofi ; détail d’un tableau de Mignard, Persée délivrant Andromède, © RMN, Musée du Louvre.

29 , en 5 € Fr TT an C ce

Éditions Apogée Diffusion PUF ISBN 2-84398-115-8

Éditions

Apogée

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Il y a Méduse et méduses… La première relève de la mythologie, les secondes de la zoologie. Méduse, l’une des trois gorgones de la mythologie grecque, pétrifiait ses adversaires par la seule force de son regard. Elle est représentée avec des yeux immenses et la chevelure envahie par des serpents. Il n’en fallait pas plus pour que Linné, au XVIIIe siècle, nomme méduses ces animaux marins transparents, gélatineux, dotés de tentacules serpentiformes au pouvoir urticant venimeux. Biologie et mythologie sont réunies dans cet ouvrage pour montrer, à travers les méduses, que la nature n’est pas moins inventive dans la diversité des formes et des modes de reproduction que les fabuleuses aventures échafaudées par l’esprit des Grecs. Au fil des pages, le lecteur découvrira qu’une continuité existe entre culture et science et que l’art n’exclut pas la beauté de la nature. Jacqueline Goy est spécialiste des méduses qu’elle étudie depuis plus de trente ans. Elle nous fait partager sa passion et nous entraîne, grâce à des images très spectaculaires, dans un univers fascinant. Jacqueline Goy, docteur ès sciences, est maître de conférences au Muséum national d’histoire naturelle à Paris.


Recherches iconographiques Thierry Auffret Van Der Kemp, Espace des Sciences de Rennes Brigitte Tailliez, Musée du Louvre

© Éditions Apogée 2002 ISBN 2-84398-115-8


Jacqueline Goy

Les miroirs de Méduse mythologie et biologie

Éditions Apogée


1. MĂŠduse Catostylus.


avant-propos Mettre les sciences à la portée du plus grand nombre, à Rennes, en Bretagne et au-delà, tel est l'objectif que s'est fixé l'Espace des sciences dès sa création en 1984. Installé dans le centre Colombia à Rennes, l'Espace des sciences rejoindra en 2004 la Bibliothèque de Rennes et le Musée de Bretagne au sein du Nouvel équipement culturel actuellement en cours de construction. Géré par une association loi 1901 que préside M. Paul Tréhen, l'Espace des sciences est un centre de culture scientifique, technique et industrielle qui rassemble toutes celles et ceux qui sont persuadés que la culture scientifique est une composante essentielle de la culture, de l'éducation et du savoir lui-même. Il organise son activité en : - réalisant et animant de nombreuses expositions ; - éditant une revue mensuelle de la recherche Sciences Ouest et un site multimédia www.espace-sciences.org ; - diffusant ses productions sur l'ensemble de la région Bretagne ; - organisant des conférences publiques sur des thèmes d'actualité. Au cours de l'année 2000, Mme Jacqueline Goy et M. Thierry Auffret Van der Kemp m'ont proposé de créer une exposition scientifique sur le thème des méduses. C'est avec beaucoup d'enthousiasme que j'ai accepté l'idée. Le programme original qui met l'accent sur la biologie et la mythologie m'a particulièrement séduit et au cours de nos nombreuses réunions de travail j'ai pu apprécier l'exceptionnelle compétence que Jacqueline Goy possède sur les méduses. Prolongation de l'exposition, le livre nous invite à un voyage artistique et scientifique au travers des images que se renvoient la Gorgone Méduse et les animaux méduses. Je ne résiste pas à citer le professeur Jean Dorst qui, dans une récente correspondance, nous manifestait son soutien et soulignait que Mme Jacqueline Goy présentait ces fabuleux animaux d'une manière parfaitement scientifique mais sans quitter la science : « Vous y joignez toute la mythologie dont les méduses sont le support, et cela depuis la plus lointaine antiquité… La zoologie, d'une manière générale l'histoire naturelle, font bon ménage avec les mythes sortis de l'esprit de l'homme, les seconds méritant d'être interprétés d'une manière objective par les hommes de science. » Bravo à Mme Jacqueline Goy pour son approche exemplaire à cet égard. Michel Cabaret Directeur de l'Espace des sciences

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2. Chrysaora Melanaster.


Préface En choisissant le titre de son livre Les miroirs de Méduse, Jacqueline Goy a voulu d’entrée de jeu avertir ses lecteurs de la double lecture que l’on peut en faire, de la mythologie grecque à la biologie générale, sans jamais perdre de vue le sujet central de l’ouvrage, le groupe des méduses. Les méduses forment un ensemble d’invertébrés presque exclusivement marins appartenant à l’embranchement des Cnidaires, caractérisé par la présence de cellules venimeuses dotées d’un minuscule harpon, les cnidocytes ou nématocytes. Comme les Spongiaires ou éponges, les Cnidaires ne possèdent que deux feuillets cellulaires : ce sont des animaux diploblastiques. Nos connaissances sur les méduses, en particulier le fait qu’elles appartiennent au règne animal, remontent à deux siècles à peine. Comme le souligne très justement l’auteur, c’est à François Péron et à ses remarquables recherches pratiquées pour partie sur le vivant au cours de l’expédition de Nicolas Baudin sur les côtes australiennes, que l’on doit ce qu’il n’est pas exagéré d’appeler « l’invention » du groupe des méduses. Jusqu’à cette époque, les méduses étaient largement méconnues par les zoologistes, qui utilisaient volontiers, pour les décrire, un vocabulaire emprunté au monde végétal et parlaient de Zoophytes ou animaux plantes. Mais Méduse est aussi l’une des trois Gorgones de la mythologie grecque et François Péron a d’ailleurs suivi à la lettre les légendes mythologiques des Grecs lorsqu’il a forgé la plupart des noms de genres nouveaux de méduses qu’il a créés. La légende des Gorgones remonte à l’aube du monde divin des Grecs. Au commencement des temps était Gæa, la Terre, la déesse-mère principe de toutes choses et à l’origine de l’humanité. De l’union de Gæa avec Pontos, la Mer, naquirent plusieurs enfants, dont Phorcys l’intrépide et Céto aux belles joues. À son tour, en s’unissant à son frère Phorcys (les unions incestueuses sont chose courante dans la mythologie grecque), Céto conçut et mit au monde les Grées (les Vieilles), qui naquirent avec des cheveux déjà blancs, puis les trois Gorgones, qui habitent au-delà de l’Océan, au pays des Hespérides : Sthéno, Euryale et Méduse. La réputation des trois sœurs était pour le moins sinistre : « les monstres abhorrés des mortels, à la chevelure de serpents, et que jamais nul homme n’envisagea sans expirer » selon Eschyle. Elles avaient pour dents des défenses de sanglier, leurs mains étaient d’airain, des ailes d’or étaient attachées à leurs épaules, et quiconque osait les regarder en face était pétrifié sur le champ. L’une d’entre elles était mortelle, Méduse. C’est donc à elle que Persée s’attaqua, laissant Athéna guider son bras en lui présentant l’image de Méduse dans le miroir de son bouclier poli, avec le succès que l’on sait. Grâce au cheval Pégase, Persée parvint à échapper aux deux autres Gorgones, qui ne pouvaient pas quitter le pays des pommes d’or… Au fil des pages, le lecteur apprendra bien d’autres détails singuliers sur la Gorgone Méduse, et chacun de ces détails trouvera chez les méduses des parallèles inattendus et souvent surprenants. Par exemple, du sang

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du cou de Méduse décapitée par Persée naissent selon la mythologie des rameaux de ce corail rouge de Méditerranée utilisé depuis l’Antiquité en bijouterie ; dans la réalité, nous découvrons que sur le manubrium de certaines méduses, assimilé avec le cou de Méduse, puisqu’il est comme ce dernier placé entre la bouche et le corps, naissent par bourgeonnement asexué de jeunes méduses ! On ne peut qu’être frappé par la comparaison entre l’œil au pouvoir pétrificateur de Méduse et les ocelles parfois complexes qui garnissent le bord de l’ombrelle des méduses, ocelles dont la structure annonce le développement de l’œil des Vertébrés. Passionnée qu’elle est par son sujet, l’auteur se complaît à développer une série de questions intéressant la biologie en général, pour la compréhension desquelles le groupe des méduses a joué un rôle important : la découverte de l’anaphylaxie au début du XX e siècle, manifestation allergique pouvant conduire à la mort des animaux touchés par les redoutables cellules à venin des méduses et de leurs congénères, les siphonophores, la bioluminescence, que certaines méduses pratiquent sans même avoir besoin pour cela, comme c’est le cas chez les poissons de profondeur, de faire appel à des bactéries bioluminescentes, le développement d’un système musculaire formé de fibres striées, et bien d’autres remarquables propriétés qui font des méduses des organismes parfaitement adaptés à leur milieu et évolués sous bien des aspects. Chez ces êtres constitués à plus de 98 % d’eau, la plupart des variantes connues dans le monde animal en matière de reproduction sont déjà présentes, allant jusqu’à l’alternance de générations se reproduisant de manière sexuée et asexuée, c’està-dire de l’hétérogenèse ! Vivre en pleine eau, parfois à de grandes profondeurs dans l’obscurité permanente des abysses, exige de disposer d’un sens de l’orientation particulièrement développé : les méduses y sont parvenues grâce au statocyste, petite cavité fermée tapissée de cellules ciliées à l’intérieur de laquelle se déplace une minuscule concrétion, le statolithe. Les naturalistes du début du XIXe siècle se sont demandés si les méduses ne constituaient pas de bonnes candidates à l’origine de la vie sur notre planète. En effet, comme l’écrivait Jean-Baptiste de Monet, chevalier de Lamarck, la vie « peut naître lorsque les matières gélatineuses se réunissent en masse ». Cette hypothèse a été très vite abandonnée à la suite des travaux de François Péron démontrant notamment que les méduses sont carnivores, ce qui implique la préexistence d’autres êtres vivants… Carnivores voraces, capables de paralyser littéralement leurs proies par injection de venin, les méduses n’hésitent pas à s’attaquer à des alevins de poissons et à des crustacés d’une taille aussi grande qu’elles. Contrairement à ce que croyaient les zoologistes il y a une quarantaine d’années, les méduses ne constituent pas le dernier maillon d’une chaîne alimentaire ; elles ont aussi leurs ennemis, telles les tortues marines qui exploitent les concentrations de méduses, les crustacés Hypérides ou les mollusques nudibranches ; l’homme lui-même n’hésite pas à consommer une espèce de méduse de l’Indo-Pacifique. Les méduses et le souvenir de la Gorgone Méduse sont encore très présents dans notre société, en particulier dans l’art, où la symétrie radiaire des méduses et l’étrangeté de leurs formes ont tenté plus d’un peintre, plus d’un sculpteur et plus d’un maître verrier. On doit à Ernst Haeckel, spécialiste des méduses et naturaliste plus connu pour le soutien qu’il apporta à Charles Darwin, de nombreux exemples d’utilisation des méduses dans les décors de bâtiments prestigieux, comme ceux édifiés par SAS le prince Albert Ier de Monaco, le Musée océanographique à Monaco et l’Institut océanographique à Paris, pour abriter la Fondation qu’il a créée en 1906 : mosaïques, peintures murales, lustres, vitraux, autant d’occasions de rendre hommage à la beauté des méduses. Mais le mythe de Méduse vit encore de nos jours, comme pour mieux illustrer l’éternel combat de l’homme contre les forces maléfiques…

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Jacqueline Goy nous propose un ensemble de connaissances extrêmement variées sur ce groupe et la place qu’il occupe dans la mythologie grecque et dans notre culture. Spécialiste des méduses qu’elle étudie avec la passion que l’on devine depuis plus de trente ans, elle a su s’affranchir des limites de la spécialité, pour aborder avec succès des sujets beaucoup plus vastes appartenant à des domaines très variés. C’est probablement de cette manière qu’il convient, à l’heure de la biodiversité, de faire mieux connaître la zoologie et de lui insuffler un nouvel essor. Lucien Laubier Membre correspondant de l’Académie des sciences Directeur de l’Institut océanographique de Paris

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Une reproduction sans sexualité La méduse est la partie du cycle de vie pendant laquelle les organes de la reproduction sexuée se développent. Toutefois, elle peut aussi être le siège d’une reproduction asexuée. Toutes les espèces de méduses n’ont pas cette capacité de multiplication empruntant une voie sans recours aux cellules sexuelles. Quand elle se manifeste, cette reproduction asexuée donne naissance à des méduses-filles par bourgeonnement sur le corps de la méduse-mère, bourgeonnement qui précède toujours la formation des gonades. On voit apparaître une protubérance qui, en quelques jours, évolue en petite méduse, se détache et poursuit sa vie libre en pleine eau. Dans d’autres cas, la méduse se scinde en deux ou trois méduses-filles comme chez Aequorea. À cette division très exceptionnelle on a donné le nom de scissiparité. Il y a déjà là une certaine exubérance dans les capacités de multiplication, mais ce n’est pas tout ! Il faut y ajouter les adaptations des espèces aux conditions limites et extrêmes rencontrées dans des milieux hostiles comme les eaux froides des zones polaires. Une méduse des eaux canadiennes, dédiée au naturaliste allemand Ernst Haeckel, le plus grand spécialiste des méduses du XIXe siècle, Margelopsis haeckeli, pond en été de petits œufs à développement rapide qui donnent un hydraire pélagique et en hiver un œuf unique très gros, riche en réserves pour survivre sous la couche de glace. D’autres espèces se multiplient aussi au stade larvaire, augmentant ainsi considérablement les densités d’individus ; d’autres enfin se multiplient encore au moment de la formation du bourgeon avant qu’il n’évolue en méduse. On assiste alors à une véritable explosion du nombre de méduses qui sont toutes du même sexe. C’est ce phénomène que l’on observe souvent chez la seule méduse d’eaux douces en France, Craspedacusta sowerbyi, méduse que les pêcheurs connaissent bien. Dans ce groupe zoologique auquel appartiennent les méduses, une grande variété Bourgeonnement de méduses-filles. 44. En haut chez Arctapodema. 45. En bas chez Scolionema.

de mécanismes assure la production d’individus. La reproduction asexuée par bourgeonnement sur le corps, soit du polype soit de la méduse, contribue à une augmentation du nombre d’individus à l’identique : ce sont des clones. Toutefois, à un moment bien précis du cycle, il se forme sur le polype des bourgeons qui évoluent en méduses et là il n’y a plus reproduction à l’identique dans la forme ; mais le patrimoine génétique est rigoureusement conservé. Dans la reproduction sexuée, la formation des cellules sexuelles, les gamètes, et la fusion des gamètes mâles et des gamètes femelles provoquent une recombinaison du patrimoine génétique dont la moitié provient du père et l’autre moitié de la mère ; il y a brassage génétique. Et c’est dans cet unique moment de la recombinaison au hasard des gênes des deux parents que peut se produire une petite péripétie, une mutation qui n’engendre pas rigoureusement les mêmes formes dont sont issues les cellules sexuelles. Cet incident,

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46. Division en trois méduses-filles de la méduse Aequorea.

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La grande diversité des méduses D’une grande simplicité dans l’organisation puisqu’il n’y a qu’un unique système interne qui assure digestion, circulation et reproduction, les méduses présentent une variation dans la disposition des caractères anatomiques si extraordinaire qu’environ un millier d’espèces sont connues à ce jour. La taille par exemple varie de 1 mm chez Podocoryne, à plusieurs mètres chez Chrysaora achlyos qui est la seule à atteindre 6 m de haut et fait partie des plus grands invertébrés. La forme de l’ombrelle peut être le disque plat d’Obelia, la demi-sphère de Clytia ou la véritable cloche de Pandea. La bouche, unique orifice de l’appareil digestif, est une simple ouverture circulaire chez Zanclea – petite méduse découverte près de Zancle, l’ancien nom du port de Messine – ou bordée de quatre petits tentacules oraux simples chez Lizzia ou encore ramifiés dichotomiquement chez Koellikerina. Le bord de l’ombrelle peut porter de un à plus de 800 tentacules, mais en règle générale il reste un multiple de quatre pour maintenir la symétrie radiaire.

85. Koellikerina fasciculata en position de pêche.

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Obelia

Solmundella

Rathkea

Steenstrupia

Clytia

Leuckartiara jeune

Rhopalonema

Zanclea

Cirrholovenia

86. Différentes méduses communes au printemps en Méditerranée.

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Vivantes lumières La plupart des animaux du plancton émettent de la lumière, on a donné à ce phénomène le nom de luminescence, et même de bioluminescence pour bien insister sur la nature biologique de cette lumière. Homère, le premier, n’a pas manqué de signaler ce phénomène tant il est spectaculaire, sorte de lumière qui danse la nuit à la surface de la mer et il décrit « des matelots (qui) aperçoivent parfois, depuis la haute mer, la lueur d’une flamme ». Pendant des siècles seuls les marins vont évoquer ces gerbes de feu qui jaillissent à l’étrave comme un feu d’artifice magique. D’ailleurs, le premier livre d’observations scientifiques en mer, publié en 1800, est le journal de bord d’Étienne Marchand, capitaine au long cours et armateur d’une flotte de commerce. Si ce « phosphore » de la mer est un spectacle inoubliable, il faudra attendre le tout début du XIXe siècle pour comprendre qu’il s’agit de la « phosphorescence active des animaux » comme l’écrit François Péron en 1807 précisant qu’elle est due aux Mollusques et aux Zoophytes mous. Lors de cette étude, il découvre un animal auquel il donne le nom de Pyrosome, animal qui fait du feu, parce qu’il resplendit au cœur de la nuit et constate que les Zoophytes, c’est-à-dire les méduses, « brillent au milieu des ténèbres comme autant de globes de feu ». S’il rompt définitivement le mystère qui entoure cette manifestation réellement féerique, Péron démontre que ce phénomène a un authentique pouvoir révélateur de la présence des méduses la nuit à la surface des flots. On les voit grâce à la production de mille et mille lumières. Cette vision au cœur des Ténèbres est aussi une des caractéristiques de la Gorgone Méduse. Le rôle biologique de la bioluminescence est encore mal connu. On suppose qu’il s’agirait d’un système de communication entre les individus d’une même espèce par exemple pour trouver un partenaire pour la reproduction comme le ver luisant, c’est alors l’analogue de l’émission des phéromones par les papillons. Certaines méduses luminescentes, Pelagia noctiluca en particulier, forment des essaims denses qui favorisent la rencontre des gamètes mâles et femelles. Ce phénomène aurait un rôle de leurre pour tromper les prédateurs. Les calmars ont des organes lumineux dispersés sur le corps, en cas de danger ils sont activés, le dessin que forment alors les taches lumineuses n’a rien à voir avec un calmar et déroute l’ennemi. On l’observe aussi chez les méduses Periphylla. Autre leurre que la mythologie n’a pas manqué d’aborder, celui des dispositions des taches de couleurs sur des animaux, taches qui dessinent des yeux que la zoologie nomme justement ocelles. De nombreux papillons, mais aussi des poissons et des oiseaux possèdent de telles ornementations interprétées comme des livrées dissuasives, qui inversent souvent l’orientation du corps ou donnent l’illusion d’un autre animal au regard terrifiant. Le paon, dont le mâle arbore triomphalement des ocelles sur les plumes vivement colorées de sa queue, a obtenu ce décor, dit la mythologie, directement de la main même d’Héra, la femme de Zeus, pour immortaliser les cent-yeux d’Argus. La luminescence des méduses ne se produit pas dans un organe particulier, elle est due à des protéines diffuses dans le corps, souvent concentrées au niveau du bord ombrellaire ou le long des canaux radiaires. Ainsi, la lumière émise donne l’image d’un cercle ou de rayures en étoile, ce qui ne ressemble pas à une méduse. Deux mécanismes différents interviennent dans ce processus. Le premier est celui de Pelagia noctiluca qui émet une lumière bleue de 460 à 485 nm de longueur d’onde. La réaction fait intervenir un couple d’enzymes solidaires :

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135. Pelagia émet de la lumière.

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136. Eirene lacteoides produit de la lumière au niveau des gonades et des tentacules.

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Table des matières Avant-propos .................................................................. 5 Préface .............................................................................. 7 Présentation .................................................................. 11 Description et cycle de vie des méduses .......... 15 Le mythe de Méduse ................................................ 16 Les symboles : miroir, œil, cercle ............................ 17 Histoire d’un mythe .................................................... 22 De Méduse aux méduses ........................................ 24 Le face à face des héros ............................................ 25 Une vie de Méduse .................................................... 29 La sexualité des méduses ........................................ 34 La gestation chez les méduses .............................. 36 Une reproduction sans sexualité .......................... 38 De microscopiques harpons venimeux .............. 42 Alors que mangent les méduses ? ........................ 48 Les mangeurs de méduses ...................................... 50 L’œil .................................................................................. 54 Des organes pour s’orienter .................................... 60 La grande diversité des méduses .......................... 62 L’invention des méduses .......................................... 66 Autre miroir du mythe de Méduse ...................... 74 La nage des méduses ................................................ 80 Camouflées dans le grand bleu ............................ 88 Vivantes lumières ........................................................ 92 La sensibilisation aux venins .................................. 96 Un mal pour un bien ................................................ 100 Des méduses pétrifiées .......................................... 104 Méduse et méduses dans l’art ............................ 106 Conclusion .................................................................. 121 Remerciements et crédits photographiques

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Bibliographie .............................................................. 127

Imprimé en France Dépôt légal : avril 2002

Éditions Apogée 11, rue du Noyer 35000 Rennes T : 02 99 32 45 95 F : 02 99 32 45 98 e-mail : apogee.rennes@wanadoo.fr


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