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CODE DE PRODUIT : 216676 ISBN 978-2-7617-8874-8
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L’EXISTENTIALISME
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Imprimé sur papier contenant 100 % de fibres recyclées postconsommation.
L’ EXISTENTIALISME
La collection PHILOSOPHIES VIVANTES présente des œuvres de philosophes majeurs, d’hier et d’aujourd’hui, choisies pour leur contribution à l’histoire des idées et leur pertinence pour l’approfondissement de notre réflexion sur des sujets contemporains. Dans une perspective pédagogique, les textes originaux s’accompagnent d’informations et de pistes d’analyse essentielles à leur étude. Rendre la philosophie vivante, c’est nous permettre d’amorcer un dialogue direct avec ces auteurs et, dans cet échange, de stimuler notre pensée, d’aiguiser notre esprit critique et d’enrichir notre connaissance du monde.
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L’existentialisme est une école philosophique qui prend pour objet l’existence humaine, non pas pour spéculer sur elle ou sur ce qu’elle pourrait devenir idéalement, mais pour la décrire telle qu’elle est vécue concrètement. Son objectif est de questionner ce qui semble des évidences sur notre existence, de les critiquer et d’ouvrir de nouveaux horizons de réflexion à leur sujet. Projet philosophique ambitieux, l’existentialisme consiste à rendre compte simultanément de l’être humain dans sa singularité, tout en montrant que l’expérience particulière que nous faisons de l’existence permet d’en tirer des leçons qui s’appliquent à l’ensemble de la condition humaine. L’ouvrage présente : • les nombreuses facettes de l’existentialisme à travers ses auteurs les plus influents : Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Albert Camus, Eugene Fink, Emmanuel Levinas, Maurice Merleau-Ponty ; • un large recueil des textes les plus pertinents ; • les principaux thèmes explorés par l’existentialisme : l’être et l’existence, le sens de la vie, l’absurde et l’angoisse, la liberté, le temps, la mort, l’autre, la morale, l’éthique et la politique, le corps. Benjamin Bélair détient une maîtrise et une scolarité de doctorat en philosophie, une maîtrise en science politique, ainsi qu’une maîtrise en administration publique. Il enseigne la philosophie au Collège Montmorency depuis 2005. Il est également chercheur à la Chaire du Canada en économie internationale comparée à l’ENAP. Il en est à sa sixième collaboration avec les Éditions CEC. Hugo Doyer a étudié la philosophie à l’Université de Montréal (baccalauréat, maîtrise et études doctorales) et à l’Université de Paris IV-Sorbonne (études de licence et recherche et rédaction de maîtrise), la pédagogie de l’éducation supérieure à l’Université du Québec à Montréal (PCPES) et la philosophie pour les enfants à l’Université Laval. Il enseigne la philosophie au niveau collégial depuis 2008.
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L’EXISTENTIALISME
SIMONE DE BEAUVOIR ALBERT CAMUS EUGEN FINK EMMANUEL LEVINAS MAURICE MERLEAU-PONTY JEAN-PAUL SARTRE Présentation et notes Benjamin Bélair Hugo Doyer
9001, boul. Louis-H.-La Fontaine, Anjou (Québec) Canada H1J 2C5 Téléphone : 514-351-6010 • Télécopieur : 514-351-3534
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AVANT-PROPOS Il est aujourd’hui de bon ton de rappeler l’inutilité de la philosophie. Pour certains, il s’agit d’une forme de discours flou qui ne renvoie à aucune réalité ; pour d’autres, à l’inverse, elle traite, dans un vocabulaire incompréhensible, d’évidences que nous pouvons aisément connaître par nous-mêmes. Dépassée depuis longtemps par la science, elle détourne l’esprit des formations scientifiques et techniques réellement susceptibles de donner une prise tangible sur le monde. Formation obligatoire dans plusieurs pays, on souhaite sa disparition, car elle nuit à l’accès rapide au marché du travail. Derrière ses concepts millénaires, elle assoit la domination culturelle d’une minorité d’intellectuels qui empêche le « vrai monde » de parler des « vraies affaires ». Ce scepticisme envers la philosophie est d’autant plus justifié lorsque celle-ci prétend traiter d’un vécu aussi singulier que l’existence. Après tout, ne s’agit-il pas d’une expérience intuitive et spontanée qui ne s’apprend d’aucun professeur et encore moins dans les livres ? Lorsque l’on se fait demander de parler de notre existence, nous n’avons aucune difficulté à décliner nos goûts, nos passe-temps, nos valeurs, nos projets de vie, etc. Le rapport sans médiation et privilégié que nous entretenons avec nous-mêmes nous semble authentique. Il s’agit d’une certitude évidente pour tout le monde : on ne peut mieux comprendre son existence que par soi-même. Pourtant, la philosophie existentialiste, qui est au cœur de cet ouvrage, n’est pas dénuée de pertinence pour réfléchir à notre existence. Elle s’intéresse aux expériences fondamentales de la condition humaine, pour lesquelles nous avons souvent l’impression d’être démunis, comme le bonheur, l’amour, l’amitié, le doute, l’angoisse, le temps, la mort, notre rapport au corps, à l’autre et la vie politique. Ces expériences sont fondamentales en ce que le fait de les vivre et de les concevoir d’une certaine façon engage notre existence dans sa globalité. On s’en convaincra facilement en prenant pour exemple le
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bonheur : si notre expérience du bonheur change, notre existence entière en sera bouleversée, nous choisirons une « nouvelle vie » et délaisserons l’ « ancienne ». Le but de l’existentialisme est de questionner ce qui semble évident concernant notre existence, de le critiquer et d’ouvrir de nouveaux horizons de réflexion à son sujet. Projet philosophique ambitieux, il consiste à rendre compte simultanément de l’être humain dans sa singularité, tout en montrant que l’expérience particulière que nous faisons de l’existence permet de tirer des leçons qui s’appliquent à l’ensemble de la condition humaine. L’existentialisme ne vise donc pas à donner des conseils pratiques pour guider notre existence. Ce n’est pas non plus une thérapie pour guérir les blessures de l’âme. Il ne prétend nullement se substituer au travail du psychologue. Son objet de recherche est la condition humaine. Il analyse comment notre condition se dévoile à travers les expériences existentielles fondamentales que nous faisons. Quel est le sens de l’existence ? Comment devons-nous penser notre rapport à l’autre ? Comment devons-nous faire face à la mort ? Comment penser notre rapport au corps ? Le lecteur pourra trouver des éléments de réponse à ces questions dans les prochaines pages, qui le convient à cette aventure philosophique : s’interroger sur l’existence humaine.
Benjamin Bélair Hugo Doyer
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TABLE DES MATIÈRES LES THÈMES DE L’EXISTENTIALISME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Les difficultés à définir ce qu’est l’existentialisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Qu’est-ce que l’existentialisme ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Les sources de l’existentialisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Les grands thèmes de l’existentialisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 L’être et l’existence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Le sens de la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 L’absurde et l’angoisse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 La liberté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 Le temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 La mort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 L’autre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Morale, éthique et politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Le corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 ÉLÉMENTS DE BIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Jean-Paul Sartre (1905-1980) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Eugen Fink (1905-1975) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Emmanuel Levinas (1906-1995) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Simone de Beauvoir (1908-1986) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Maurice Merleau-Ponty (1908-1961) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 Albert Camus (1914-1960) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 LE CONTEXTE HISTORIQUE ET CULTUREL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Critique de l’héritage des Lumières et du rationalisme scientifique . . . . . . 31 Émergence de l’individualisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 L’horreur des deux guerres mondiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 REPÈRES HISTORIQUES ET CULTURELS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 LA RÉSONANCE ACTUELLE DE L’EXISTENTIALISME . . . . . . . . . . . . . . . 43 Une nouvelle méthode pour la philosophie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 Françoise Dastur : la mort, le temps et la culture occidentale . . . . . . . . . . 45 Le féminisme existentialiste : la construction des sexes . . . . . . . . . . . . . . . 48 QUESTIONS D’ANALYSE ET DE SYNTHÈSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
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LES TEXTES EXISTENTIALISTES PAR THÈME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 Les sources de l’existentialisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 Platon, Alcibiade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .59 Pascal, Blaise, Les pensées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Kierkegaard, Søren, Traité du désespoir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67 Husserl, Edmund, d’après Sartre, Jean-Paul (1947). « Une idée fondamentale de la phénoménologie de Husserl : l’intentionnalité », Situations I, Paris, Gallimard, p. 29-32 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 L’être et l’existence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 Sartre, Jean-Paul (1946). L’existentialisme est un humanisme, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », p. 26-27, 29-30 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 Levinas, Emmanuel (1979). Le temps et l’autre, Saint Clément de Rivière, Fata Morgana, p. 21-22 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .76 Fink, Eugen (1969). Metaphysik und Tod, Stuttgart, Kohlhammer, p. 31, 50-52 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 Le sens de la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Sartre, Jean-Paul (1946). L’existentialisme est un humanisme, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », p. 38-40, 76-77 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 de Beauvoir, Simone (1949). Le deuxième sexe, Tome I, Paris, Gallimard, p. 74-77, 89-93, 95-97, 400-402 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Camus, Albert. Le mythe de Sisyphe, le suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 L’absurde et l’angoisse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Sartre, Jean-Paul (1946). L’existentialisme est un humanisme, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », p. 33-34, 36-37. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Camus, Albert. Le mythe de Sisyphe, le sentiment absurde . . . . . . . . . . . . . . 92 Camus, Albert. Le mythe de Sisyphe, l’absurde comme fait fondamental de l’existence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Le temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Fink, Eugen (1969). Metaphysik und Tod, Stuttgart, Kohlhammer, p. 11-12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Levinas, Emmanuel (1993). Dieu, la mort et le temps, Paris, Le livre de poche, coll. « Biblio essais », p. 126 . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
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La mort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .103 Fink, Eugen (1969). Metaphysik und Tod, Stuttgart, Kohlhammer, p. 9-10 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 L’autre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Sartre, Jean-Paul (1946). L’existentialisme est un humanisme, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », p. 58-59. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Sartre, Jean-Paul (1943). L’être et le néant. Paris, Gallimard, coll. « Tel », p. 413-414. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Levinas, Emmanuel (1982). Éthique et infini, Paris, Le Livre de poche, p. 79-83, 91-93, 97. 1984 © Libraire Arthème Fayard, 1982 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .109 Merleau-Ponty, Maurice. Phénoménologie de la perception, Autrui et le monde humain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 Fink, Eugen (1969). Metaphysik und Tod, Stuttgart, Kohlhammer, p. 59 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Morale, éthique et politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 de Beauvoir, Simone (1947). Pour une morale de l’ambiguïté, Paris, Gallimard, p. 31-32, 160,193-197 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 Camus, Albert, Le mythe de Sisyphe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 Camus, Albert, L’homme révolté, la révolte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137 Camus, Albert, L’homme révolté, la révolte métaphysique . . . . . . . . . . 141 Camus, Albert, L’homme révolté, la révolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 de Beauvoir Simone (1949). Le deuxième sexe, Tome 2, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », p. 648-649 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 Le corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149 Merleau-Ponty, Maurice, La phénoménologie de la perception . . . . . . . . .149 de Beauvoir, Simone (1949). Le deuxième sexe, Tome I, Paris, Gallimard, p. 74-77, 89-93, 95-97, 400-402. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
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LES THÈMES DE L’EXISTENTIALISME Identifier les thèmes de l’existentialisme relève d’un formidable pari. En effet, il n’y a pas de consensus sur ce qu’est ce courant philosophique, sur la période historique qu’il couvre, ni même sur les thèmes et les philosophes qui en sont à l’origine. Malgré tout, un ouvrage portant sur l’existentialisme ne peut échapper à définir l’objet de sa recherche. Cette section vise donc à présenter les problèmes entourant la définition de l’existentialisme, ses sources et ses thèmes principaux.
LES DIFFICULTÉS À DÉFINIR CE QU’EST L’EXISTENTIALISME Les difficultés à définir ce qu’est l’existentialisme commencent dès le moment où l’on constate que la plupart des philosophes qualifiés d’« existentialistes » ont refusé l’étiquette et se sont même, pour quelques-uns, montrés très critiques envers ce terme. Par ailleurs, le terme d’existentialisme ne décrit de prime abord rien de précis : il renvoie certes à une philosophie de l’existence, mais tous les philosophes ou presque s’intéressent à l’existence. On peut aussi difficilement rassembler l’existentialisme autour de grands thèmes communs puisque, même lorsque les existentialistes s’intéressent à un même sujet, ils adoptent très souvent des positions divergentes, parfois contradictoires. Finalement, circonscrire historiquement l’existentialisme ne donne pas de repères plus précis. Un premier découpage passablement vague et imprécis inclut tous les penseurs depuis Socrate (~469-~399) qui se sont intéressés à l’existence, un second vise une partie de la pensée moderne qui débute avec Kierkegaard (1813-1855) et Nietzsche (1844-1900), un troisième se restreint à la philosophie française d’après-guerre (1945-1960).
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Malgré tous les problèmes et les difficultés qui viennent d’être soulevés, le terme d’existentialisme s’est néanmoins imposé. Il semble qu’il ait été employé pour la première fois dans un texte italien publié dans les années 1930. Il est ensuite utilisé sporadiquement par les philosophes Karl Jaspers (1883-1969) et Gabriel Marcel (1889-1973), mais c’est en 1945, dans une conférence de Jean-Paul Sartre (1905-1980) intitulée « L’existentialisme est un humanisme », qu’il devient un mot usuel à la fois du vocabulaire philosophique, mais aussi du langage courant. Aujourd’hui, une simple recherche sur Internet donne accès à plusieurs centaines de milliers de liens traitant en partie ou en totalité de l’existentialisme. Entre 1945 et 1960, l’existentialisme décrit non plus seulement une école philosophique, mais un ensemble de productions littéraires, théâtrales et cinématographiques. L’existentialisme dépasse alors le cadre de la philosophie pour devenir un concept de la culture populaire, voire un véritable mode de vie qui suscite parfois la caricature, la controverse ou des réactions haineuses comme en témoigne cet extrait d’un article de journal au sujet de Jean-Paul Sartre : « L’armée de Jean-Paul Sartre ne pouvait être qu’une armée de moutons, de brebis... nègres et négrillons... aux mains moites, dégoûtantes... odeur de sexe et de poils souillés de sperme qui émanait de ces nègres obsédés... le troupeau lâche et féroce des enfants de la liberté1. »
Dans les années 1960, à la suite de l’émergence de nouveaux courants philosophiques tel le structuralisme2, l’existentialisme disparaît progressivement. Cependant, bien que peu de philosophes aujourd’hui se disent existentialistes, les thèmes et les problématiques de l’existentialisme occupent toujours une place prépondérante dans la réflexion philosophique. 1. CURZIO, MALAPARTE (1960). Il y a quelques choses de pourri. Paris, Denoël, cité par HENRY-LEVY, BERNARD (2000). Le siècle de Sartre. Paris, Grasset. 2. De manière générale, le structuralisme désigne des théories dont le point commun est de considérer quʼun objet doit être appréhendé à partir de sa structure, et qui postule que les éléments qui composent cette structure nʼont de sens que mis en relation les uns avec les autres.
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QU’EST-CE QUE L’EXISTENTIALISME ? Comme nous venons de le voir, une définition de l’existentialisme ne peut qu’être partiale, tant elle est déterminée par le choix des philosophes considérés comme existentialistes et de l’étendue de la période historique dans laquelle nous situons ce courant philosophique. Malgré les divergences de définitions possibles, on s’entend généralement pour dire que l’existentialisme est une doctrine philosophique qui prend pour objet l’existence humaine, non pas pour spéculer sur elle ou sur ce qu’elle pourrait devenir idéalement, mais pour la décrire telle qu’elle est vécue concrètement. L’être humain, dans ce contexte, n’est pas une conscience désincarnée dont on peut parler comme d’une chose avec un regard extérieur objectif, mais une expérience propre du monde, de soi et de l’autre, qui se définit par sa subjectivité, sa sensibilité. La philosophie traditionnelle peine à rendre compte de la vie humaine telle qu’elle est réellement vécue, car elle se consacre souvent à des entités abstraites et désincarnées, comme la raison, les lois de la logique ou la cité politique idéale. L’originalité des philosophes existentialistes est de recentrer la philosophie sur la totalité de l’expérience de l’existence humaine. Il s’agit d’une démarche qui cherche simultanément à circonscrire les conditions ou déterminations essentielles de l’existence humaine et à mesurer leur influence sur la spéculation (philosophique, mais aussi scientifique et religieuse). Il ne faut donc pas s’étonner de trouver dans les textes existentialistes aussi bien des analyses d’éléments de la vie quotidienne (la drague, l’atelier et ses outils, le garçon de café), d’émotions (la joie, l’amour, l’angoisse) que de concepts fondamentaux de la philosophie (le monde, la liberté et la conscience), ces concepts provenant des émotions et des éléments de la vie quotidienne. Les grandes thèses philosophiques sur le monde, le temps, la nature humaine ou le bien sont des productions humaines et, en tant que telles, elles sont conditionnées par l’existence humaine : si nous n’avions pas de mains, ne vivions pas en société ou n’éprouvions pas d’angoisse face à la mort, notre discours à leur sujet serait entièrement différent.
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Cet intérêt pour l’existence humaine telle qu’elle est vécue amène la plupart des existentialistes à développer leur philosophie à partir de quelques-uns ou de l’ensemble de ces énoncés : 1) Les sciences de la nature et les sciences sociales n’arrivent pas complètement à rendre compte de ce qu’est l’existence. 2) L’existence est première par rapport à l’être. 3) L’existence de l’être humain est absurde ou son sens reste à déterminer. 4) L’être humain en tant qu’existant se caractérise par sa finitude, c’est-à-dire par son rapport à la mort. 5) L’être humain est libre. 6) L’être humain vit l’absence de sens de son existence sous le mode de l’angoisse. 7) L’être humain est responsable de ce qu’il est. 8) La révolte contre l’absurdité et la mort donne à l’existence un sens et une dignité. Cet ouvrage ne prétend pas circonscrire définitivement ce qu’est l’existentialisme ni fixer une fois pour toutes la liste des philosophes qui font partie de ce courant de l’histoire de la pensée. Notre parti pris est que tout ouvrage présentant une synthèse de l’existentialisme est forcément en partie arbitraire et est malheureusement largement tributaire des textes rendus accessibles par les différents éditeurs des penseurs existentialistes. Les auteurs sélectionnés dans cet ouvrage appartiennent au courant athée de l’existentialisme (à l’exception de Levinas), car ce sont les textes qui correspondent le plus à notre sensibilité moderne et qui sont les plus lus aujourd’hui. Nous avons de plus choisi de présenter des auteurs dont l’œuvre est postérieure à Être et temps (1927) de Heidegger. Aucun texte philosophique ne vise plus explicitement l’objectif de reconduire l’histoire de la philosophie dans son ensemble (comprise comme synonyme de la métaphysique) à l’existence humaine en tant que telle, à son monde, à ses rapports à autrui, à son souci, à sa quotidienneté, à sa temporalité. Ce choix est d’autant plus justifié qu’historiquement, la plupart des philosophes
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qualifiés d’existentialistes ont écrit leur œuvre en grande partie en réaction ou en continuité avec la philosophie de Heidegger. Dans cette optique, cet ouvrage présente des textes d’Emmanuel Levinas, Albert Camus, Jean-Paul Sartre, Maurice Merleau-Ponty, Simone de Beauvoir et Eugen Fink. Avant de nous intéresser aux thèmes centraux de l’existentialisme, nous allons présenter brièvement quelques auteurs qui ont inspiré les penseurs existentialistes.
LES SOURCES DE L’EXISTENTIALISME On dit de Socrate (~469-~399) qu’il est le «père de la philosophie», non pas qu’il soit le premier philosophe – ce titre revient d’ordinaire à Thalès de Milet (~625-~546) –, mais il serait le premier à avoir préféré l’étude des affaires humaines à la connaissance de la nature3. Il fait de l’existence de l’être humain le problème premier de la philosophie. Par le biais de l’ironie, il nous invite à remettre en question notre savoir, principalement notre savoir moral et éthique, et à admettre notre ignorance. C’est lorsqu’on fait le constat de ses insuffisances que l’on s’engage dans un processus de remise en question et que l’on cherche à combler ses manques. Son objectif premier est de nous amener à chercher les meilleures manières de vivre en conformité avec le bien. Il souhaite que chacun cherche ce qu’est la justice, l’amour, l’amitié pour devenir un meilleur citoyen, amant, ami, etc. Bien que la référence à Socrate puisse sembler s’appliquer à tous les philosophes de l’histoire, les existentialistes ont toutefois la particularité de mettre davantage l’accent que d’autres auteurs sur le désir tout socratique de placer l’existence humaine au cœur de la réflexion philosophique. 3. Il sʼagit ici de Socrate tel quʼil est présenté dans lʼœuvre de Platon.
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L’œuvre de Pascal (1623-1662) ramène l’être humain préoccupé par la vie quotidienne à une méditation sur sa propre condition. Loin d’être une occasion de s’épancher sur la grandeur de son existence, l’être humain ne peut conclure, devant la contemplation de sa vie, qu’à sa misère et à sa faiblesse. Pascal affirme que, créature vile, démunie et dénuée de qualité morale, l’être humain n’est « qu’un imbécile ver de terre». C’est lorsque nous prenons conscience de l’écart entre la finitude et la petitesse de notre existence et l’éternité et l’infinité de l’univers que le sentiment de notre faiblesse est le plus accablant. Nous sommes abandonnés sans raison dans un univers vide et dénué de sens. Nous ne pouvons ressentir qu’un sentiment d’effroi, d’inquiétude et d’angoisse devant les limites de notre condition humaine. Seuls la foi et l’amour de Dieu permettent à l’être humain de surmonter le vide de sa vie. Les existentialistes reprennent de Pascal et développent le thème de l’être humain jeté dans l’univers sans aucune raison apparente et voué à l’angoisse et au souci de soi. Kierkegaard (1813-1855) est considéré par plusieurs philosophes comme le précurseur de l’existentialisme. Il s’oppose aux philosophies idéalistes4 et rationalistes5 parce qu’elles sont coupées de l’existence concrète, telle qu’elle est réellement vécue. Il redonne ainsi une place centrale à la subjectivité. Kierkegaard étudie à travers son œuvre diverses manières de vivre son existence, comme l’existence esthétique (notre rapport à la sensibilité), l’existence éthique (notre rapport à la morale) et l’existence religieuse (notre rapport à Dieu). Comme Pascal, il constate 4. Courant philosophique dans lequel lʼexistence est subordonnée à la pensée. 5. Doctrine selon laquelle tout ce qui existe possède sa raison dʼêtre et, par conséquent, peut être considéré comme intelligible.
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l’absurdité de la condition humaine face à Dieu. Pour lui, l’existence est toujours vécue sous la forme du manque et de l’inachevé. Il est ainsi amené à analyser les différents états existentiels reliés à cette incomplétude, tels l’angoisse et le désespoir. Les existentialistes présentés dans cet ouvrage délaissent la portée religieuse de la pensée de Kierkegaard, mais sont influencés par ses analyses sur l’angoisse et le désespoir qui dévoilent les modes d’être de la condition humaine (il existe néanmoins une branche de l’existentialisme que l’on nomme l’existentialisme chrétien qui s’intéresse aux rapports entre l’existence humaine et Dieu et qui s’inspire largement de Kierkegaard). L’existentialisme doit à Nietzsche (18441900) le fait d’avoir transformé la pratique de la philosophie en une enquête généalogique6. Aux yeux de Nietzsche, le contenu des différentes philosophies peut se comprendre comme le produit de pulsions dominantes, et non le fruit de pures réflexions rationnelles, désintéressées et neutres (objectives). On peut donc en définitive reconduire toute croyance à une valeur, et cette dernière à la domination d’une pulsion donnée sur les autres dans le corps qui en est à l’origine. Si certes l’existentialisme ne prolonge pas la démarche de Nietzsche en accordant le même statut aux pulsions, il garde intacte l’idée de faire de la philosophie une réflexion sur l’origine humaine des concepts et des théories. Il ne faut donc jamais perdre de vue que les doctrines philosophiques ne sont que des productions humaines, trop humaines – et cela signifie, pour Nietzsche comme pour l’existentialisme, que l’on en apprend 6. La généalogie est la discipline qui cherche à établir la filiation ou parenté entre les personnes. Une enquête généalogique a donc dʼordinaire pour fonction lʼidentification des aïeux dʼune personne ou famille. Sous la plume de Nietzsche, la généalogie devient lʼétude génétique des idées, à savoir lʼobservation de leur filiation, de leur engendrement et maturation. Ainsi voit-il les idées dans des rapports de filiation, ce qui lui permet dʼen remonter lʼhistoire et dʼen identifier les ancêtres.
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davantage à leur sujet par l’étude de leur genèse (et les motifs de celle-ci) que par celle de leurs arguments. Si l’existence humaine devient l’objet d’enquête philosophique par excellence, c’est en grande partie en raison d’un tel pari généalogique. Husserl (1859-1938) est sans aucun doute l’auteur qui entretient le plus directement une relation de filiation avec les existentialistes. Heidegger, Sartre, Fink, Merleau-Ponty et Levinas suivront son enseignement à l’université de Fribourg-en-Brisgau. D’abord intéressé par la philosophie des sciences et des mathématiques, il fonde un courant philosophique, la phénoménologie, dont le mot d’ordre, qui fascine les existentialistes, est « le retour aux choses elles-mêmes ». Il s’agit de s’émanciper des différentes formes de savoir afin d’interroger sans aucun préjugé les choses telles qu’elles se donnent directement à la conscience. La phénoménologie questionne notre vie concrète telle que nous la vivons et non telle qu’elle est expliquée par les différentes formes de connaissances scientifiques. L’idée cardinale de la pensée d’Husserl est que « la conscience est toujours conscience de quelque chose ». Nous sommes toujours conscients de X, c’est-à-dire que notre conscience est toujours en rapport à quelque chose d’autre qu’ellemême, qu’elle existe seulement en tant qu’elle entretient un rapport au monde. Les existentialistes développent chacun à travers leur œuvre cette idée d’Husserl qui veut que l’existence propre à la conscience consiste en cette capacité à se dépasser, à se transcender vers le monde. Ils vont notamment décrire les différents états de la conscience en fonction de ses différents rapports au monde. L’ensemble de l’œuvre de Martin Heidegger (1889-1976), du « Rapport Natorp » (Interprétations phénoménologiques d’Aristote) de 1922 aux derniers colloques et séminaires, vise à comprendre l’être. Il fonde cette recherche sur l’étude de l’existence humaine, qui seule
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fait l’expérience de l’être. L’œuvre de Heidegger fait le pari philosophique suivant : c’est en étudiant et en comprenant les différentes possibilités de l’existence humaine qu’un accès à l’être est possible. L’existence, c’est la plupart du temps l’existence quotidienne (dominée par le bavardage, le « on » et la fuite de la mort), mais ce n’est là qu’une possibilité de l’existence humaine. Car l’existence peut aussi devenir authentique (se comprendre comme possibilité propre, finie, définie par la mortalité) et l’être devient alors l’horizon de mon séjour – mien sans être à moi – et de mon existence. L’être, dans toute l’œuvre de Heidegger, se donne donc dans l’existence humaine sous l’apparence de l’étant (de l’objet que je manipule et mesure), tout en se cachant en tant que tel : l’être en tant qu’être est, en définitive, ce double mouvement de don et de retrait.
LES GRANDS THÈMES DE L’EXISTENTIALISME Le choix des textes de cet ouvrage prend acte du caractère extraordinairement diversifié des différents thèmes traités par les existentialistes. L’idée n’est pas tant de prétendre présenter les thématiques abordées par les existentialistes dans leur incommensurable diversité (tâche bien entendu impossible dans un ouvrage de cette taille), mais de se limiter à quelques thèmes qui soulignent leur volonté de s’intéresser à l’existence humaine.
L’être et l’existence Même s’il est forcément injuste de réduire deux mille ans d’histoire en une formule, on peut se risquer à dire que le problème de l’être et de l’existence est à l’origine même de la philosophie (on n’a qu’à penser au poème de Parménide sur l’être7). Il faut également 7. Parménide est un philosophe grec qui aurait vécu entre ~515 et ~450. Son poème intitulé De la nature est considéré comme la première théorie sur lʼêtre de lʼOccident.
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admettre que ces deux concepts n’ont pas été également traités par la tradition, l’être occupant toujours une place prépondérante par rapport à l’existence. Pourquoi en est-il ainsi ? L’être est un terme qui peut se comprendre de multiples façons : il peut désigner soit les choses qui sont (l’être vivant est la chose vivante) et il est alors synonyme d’étant (« être » est ici un substantif), ou bien le fait d’être, le processus ou l’action d’être (être vivant, c’est vivre : « être » est ici un verbe infinitif), ou bien encore à la nature de quelque chose, son essence (c’est souvent cette dernière définition de l’être qui fait l’objet de l’analyse des philosophes). En revanche, l’existence renvoie à une possibilité. Je peux décrire l’être d’une chose sans que celle-ci existe ou que son existence ait une quelconque importance. Lorsque je dis qu’une chose existe, j’affirme en quelque sorte qu’elle « est », qu’elle possède une réalité, mais je n’affirme rien sur son « être ». L’existence apparaît alors comme un simple accident auquel l’être viendrait conférer un ensemble de propriétés ou de caractéristiques. Si je pense à la définition de la musique, le fait que celle-ci soit sur un disque, un appareil électronique, jouée par un orchestre ou simplement entendue dans ma tête ne change rien à ce qu’est la musique. La manière dont elle existe n’altère pas son être. En raison de sa permanence, l’être devient ainsi l’objet privilégié du savoir. Pour cette raison, la tradition philosophique s’est construite autour d’une réflexion sur l’être et non sur l’existence. Platon (~428-~348) construit une partie de son œuvre autour de la recherche de l’être de l’idée qu’il qualifie d’éternelle, immuable, constante et caractérisée par l’unicité. La tradition chrétienne se penchera pendant des siècles sur l’être ultime, Dieu. Kant (1724-1804) examine les limites de la raison afin de rendre possible une connaissance « scientifique » de l’être de la nature et du devoir-être. Ce n’est pas que les philosophes ne réfléchissent pas à l’existence ; ils développent de brillantes théories sur le sujet, mais elle n’est pas au centre de leurs préoccupations. Pour reprendre la célèbre formule d’Aristote, il existe une science de « l’être en tant qu’être », mais pas de « l’existence en tant qu’existence ».
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Les existentialistes reprochent à la tradition philosophique de trop souvent réduire le réel à l’être et ainsi d’escamoter la réalité fondamentale de l’être humain qui est de porter le fardeau et le tragique de l’existence, d’en assumer le sens, bref, de vivre concrètement. De ce point de vue, ce n’est pas le problème de l’être qui est le plus important, mais celui de l’existence et, plus précisément, de son existence.
Le sens de la vie Le premier problème que nous rencontrons lorsque nous nous intéressons à la question du sens de la vie, c’est que l’expression « sens de la vie » est polysémique8. Il y a, pour notre compréhension contemporaine de l’expression « sens de la vie », cinq sens au mot « sens » qui peuvent conduire à des interprétations multiples. Tout d’abord, il peut avoir une signification directionnelle. Ainsi, le sens de la vie suit une direction qui part de la naissance et qui s’achève avec la mort. Ensuite, il peut être « signifiant ». Selon cette définition, la vie est susceptible d’être significative : nous avons le pouvoir de lui donner un sens. Le sens peut aussi être saisi comme une sensibilité à bien vivre. Le sens de la vie est ainsi une capacité de sentir et de jouir de la vie. De plus, le sens peut être défini comme une capacité réflexive. C’est cette conception du sens que le langage commun vise lorsqu’il parle d’une personne de « bon sens ». Finalement, le sens peut-être conçu comme une certaine maîtrise de la vie : « Le sens se trouve ici accouplé à une certaine sagesse où se conjuguent l’expérience, la raison, et même une certaine simplicité naturelle9. » Comme nous le verrons en détail dans la section sur le contexte culturel et politique ayant contribué à l’émergence de l’existentialisme, il est relativement nouveau pour l’humanité de s’interroger sur le sens de l’existence ; cette question a longtemps été dénuée de signification. En effet, pendant des millénaires, le sens de la vie était déterminé par le discours religieux et par la tradition. Un croyant 8. Se dit dʼun signe, dʼun énoncé qui possède plusieurs sens. 9. GRONDIN, JEAN (2003). Du sens de la vie. Montréal, Bellarmin, p. 34.
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n’enquête pas sur le sens de sa vie. Il suit le parcours que lui imposent ses dogmes. Ce n’est pas que sa vie n’ait pas de sens, mais il n’a pas à s’interroger sur ce sens qui lui est donné par la tradition et la religion. Si les époques précédentes ne se posaient pas la question du sens de la vie aussi explicitement, c’est parce que, d’une certaine façon, ce sens allait de soi. Il semble que Nietzsche, en 1875, dans un texte n’ayant jamais été publié de son vivant, utilise pour la première fois l’expression « sens de la vie ». Si le monde moderne depuis Nietzsche se pose la question du sens de la vie avec autant d’urgence, c’est parce qu’il présuppose que la vie doit bien avoir un sens ou, du moins, qu’idéalement elle devrait en avoir un, mais que, pour plusieurs raisons, contrairement à l’époque prémoderne, ce sens n’est plus univoque, mais équivoque. Les premiers jalons d’une réflexion sur le sens de la vie ayant été posés, les existentialistes (du moins pour la plupart d’entre eux) donnent une réponse radicale à la question du sens de la vie : elle est absurde.
L’absurde et l’angoisse Le concept d’absurde évoque plusieurs choses selon le contexte dans lequel on l’utilise. Pour plusieurs, la première réaction que nous avons lorsque nous pensons à l’absurde, c’est de se référer à l’humour qui se réclame de ce concept. Une blague absurde met en relation des choses ou des évènements qui ne vont pas ensemble. Nous avons tous déjà vu des films ou des spectacles utilisant ce genre de procédé. Pour d’autres, l’absurde est un raisonnement illogique. Il est absurde de dire que l’on déteste l’opéra et d’aller ensuite s’acheter des billets pour Madame Butterfly10. D’autres encore utilisent l’absurde pour qualifier un certain nombre d’expériences de vie trau10. Opéra de Puccini composé en 1903.
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matisantes. En ce sens, la mort d’un enfant, l’apparition soudaine de la maladie, un cataclysme naturel, sont tour à tour qualifiés d’absurdes. L’absurde est alors ce qui échappe à la compréhension humaine. Pour plusieurs existentialistes, l’absurde signifie que nous sommes jetés dans un monde que nous n’avons pas choisi, nous sommes plongés dans l’existence par hasard, notre vie est fortuite, nous n’avons aucune explication pour rendre compte de notre présence au monde. Pourquoi suis-je né dans une société riche ou pauvre ? Pourquoi suis-je né homme ou femme ? Quelle est la raison d’être de mon existence ? Pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas rien ? Ces questions n’appellent pas de réponse. Notre existence est un accident. Aucune prédestination ne peut expliquer que nous existons, encore moins donner un sens à notre existence. C’est ce qu’en philosophie on appelle la contingence. Face à cette situation, nous éprouvons de l’angoisse Il ne faut pas confondre l’angoisse avec la peur ou l’anxiété. La peur est toujours la crainte de quelque chose, d’un objet ou de quelqu’un. On a peur de ce qui nous est extérieur et qui a comme caractéristique de se présenter sous le mode du redoutable. L’anxiété quant à elle est une profonde inquiétude face à un évènement que nous appréhendons. Comme la peur, nous sommes anxieux au sujet de quelque chose. L’angoisse, en revanche, n’a pas d’objet particulier, ce qui angoisse ne représente pas un danger au sens habituel du mot, ni n’est l’objet d’une appréhension. Pour les existentialistes, l’angoisse désigne une expérience fondamentale de la condition humaine. Nous sommes toujours placés dans une situation où nous sommes susceptibles d’éprouver de l’angoisse, parce que les choix qui se présentent à nous sont toujours multiples et il n’y a rien qui puisse nous dire comment choisir, en premier lieu, le sens que devrait avoir notre vie. L’être humain est fondamentalement angoissé parce qu’il ne peut trouver sur terre aucun signe pour l’orienter, aucune norme sur laquelle s’appuyer, aucune morale pour le guider. Il n’y a rien dans le monde qui fasse signe à l’être humain pour le prendre en charge. Nous vivons avec
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l’incertitude devant les choix qui s’offrent à nous. L’angoisse est en quelque sorte l’expérience que nous éprouvons lorsque nous sommes confrontés au néant de notre destin, au vide de signification du monde et à la vacuité de notre existence.
La liberté De manière générale, on peut définir la liberté négativement comme l’absence de contrainte ou positivement comme la capacité à réaliser nos désirs. Par opposition, on dit d’une conception de l’être humain qui nie sa liberté qu’elle est déterministe. Bien que l’on puisse avoir l’impression d’être libre, ce n’est pas nécessairement le cas. Ainsi, notre comportement peut être causé par l’organisation biologique de notre corps, nos pulsions ou l’organisation de la société (sans être un déterminisme absolu, on sait que les enfants provenant d’une famille pauvre auront tendance à faire de moins longues études que ceux provenant d’une famille plus aisée). La science tend à montrer que nous sommes sous l’influence de déterminants qui orientent nos actions. Si la liberté et le déterminisme sont deux concepts aisément compréhensibles théoriquement, la difficulté consiste à mesurer si l’être humain est libre ou déterminé ou bien à quel degré il est l’un et l’autre. Les existentialistes apportent une contribution incontournable aux débats sur la liberté et le déterminisme. Exister, c’est faire de soi ceci ou cela, c’est se définir en tant que dessein particulier, c’est se choisir tel ou tel. Il n’est donc pas surprenant que la liberté soit un thème central et récurrent dans la philosophie existentialiste. S’il fallait expliquer en un mot en quoi réside la différence entre l’existence et la vie, le concept de liberté serait probablement le plus approprié pour y arriver. Le terme « existence » lui-même, dans son étymologie (qui renvoie à la projection de soi vers l’extérieur), est donc tout entier construit autour de la notion de projet et, par conséquent, de choix. En effet, réfléchir à la liberté ne se résume pas simplement à aborder un sujet purement abstrait, car cela implique nécessairement comme conséquence une définition donnée de notre existence.
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LA RÉSONANCE ACTUELLE DE L’EXISTENTIALISME Même si les philosophes d’aujourd’hui se définissent très rarement comme existentialistes, l’existentialisme a néanmoins marqué l’histoire de la philosophie et ses thèmes sont toujours bien vivants. Il est impossible ici de rendre compte de tous les apports de Sartre, Fink, de Beauvoir, Camus, Merleau-Ponty ou Levinas. Trois thèmes permettent toutefois de bien comprendre en quoi l’existentialisme est toujours pertinent à notre époque : il bonifie la méthodologie philosophique que l’on nomme généalogique, il enrichit notre réflexion sur la mort et le temps et contribue aux débats sur le féminisme.
UNE NOUVELLE MÉTHODE POUR LA PHILOSOPHIE L’ existentialisme contribue à prolonger la transformation de la démarche philosophique qu’a amorcée Nietzsche : il paraîtrait maintenant tout bonnement naïf d’aborder « directement » les questions fondamentales, comme si elles existaient en elles-mêmes, comme des problèmes absolus, et de proposer des réflexions universelles ou « désincarnées ». Certes l’influence de la phénoménologie sur les existentialistes est incontestable (elle est explicitement revendiquée, quoique repensée en profondeur par Heidegger). Cependant, en raison de la primauté qu’accorde l’enquête existentialiste à la condition humaine sur la conscience, on peut voir le caractère crucial de l’héritage nietzschéen de l’existentialisme. Là où Husserl et son retour « aux choses mêmes » centre l’enquête philosophique sur la conscience, son flux et ses données, la démarche généalogique en cherche l’origine dans les existentiaux, c’est-à-dire les structures mêmes de l’existence (la relation à l’être, à l’autre, au temps, à la mort, au sens, etc.).
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Si, avant Nietzsche et l’existentialisme, l’enquête du métaphysicien constituait le questionnement le plus fondamental – la prima philosophia – et celle du sociologue, de l’économiste, du politologue, un travail secondaire, postérieur, dont il ne faut s’acquitter qu’une fois les fondements métaphysiques assurés, c’est précisément l’inverse qui se produit sous l’effet de la pensée existentialiste : la métaphysique, si elle aspire à être plus qu’un simple produit dérivé, purement circonstancié, doit, avant même de se mettre en œuvre, s’enquérir des conditions d’existence de l’être humain, de ses besoins, etc. Il faut savoir en quoi les conditions de notre existence déterminent notre pensée pour la débarrasser pleinement de tout un ensemble d’évidences et de préconceptions potentiellement trompeuses. L’héritage généalogique de l’existentialisme doit, avant de chercher à répondre à une question philosophique (qu’est-ce que la vérité ? L’être ? Le temps ? Le monde ? L’être humain ?), s’enquérir de l’auteur de la question. Qui demande ? Dans quelles conditions existe-t-il ? Quelle est sa situation ? Au vu de ces conditions, qu’estil porté à croire, à tenir pour vrai ? Quelle part de ce qu’il tient pour vrai est purement le fruit des conditions de son existence ? Y a-t-il des avenues philosophiques, des pistes de réflexion et des réponses qu’il ne peut voir, qu’il est voué à refuser ? Ce sont certes des questions que l’on retrouve régulièrement sous la plume de Nietzsche, mais également dans l’œuvre de Heidegger (c’est tout le sens de l’analytique du Dasein), Sartre (c’est le cas de ses biographies existentielles de Flaubert, de Baudelaire et de Genet), Simone de Beauvoir (l’étude de la situation de la femme) et Eugen Fink (réflexion sur la condition humaine). Le succès de l’existentialisme peut donc se mesurer à l’aune du grand nombre de discours contemporains ayant intégré cette nouvelle pratique de la pensée. Il est certes ici malheureusement impossible de recenser l’ensemble de ces discours et de démontrer en quoi ils sont tributaires de la révolution intellectuelle existentialiste.
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FRANÇOISE DASTUR : LA MORT, LE TEMPS ET LA CULTURE OCCIDENTALE Sans nul doute largement inspirée de la pensée de Martin Heidegger et de Eugen Fink, Françoise Dastur a proposé une explication généalogique de la spéculation humaine comme occultation de la mort. Comme Fink, elle a cherché les « origines thanatologiques des arrières-mondes21 » et en a conclu que toute la spéculation humaine se laisse reconduire à un vaste effort d’occultation de la mort22. Lorsque l’humain s’interroge sur l’existence d’un « autre » monde, ou d’une partie de lui-même autre que le corps, les théories qu’il fournit ne cherchent pas seulement à répondre à des questions cosmologiques abstraites, mais également (et principalement selon Dastur) à la question personnelle qu’ouvre le vide de la mort. L’existence humaine, l’expérience de la mort et son rejet spontané précèdent toutes les questions abstraites concernées par la mort (qu’est-ce qui est vraiment ? Qu’est-ce que le temps ? Etc.) et transforment celles-ci aussi bien que les réponses jugées acceptables. Naïvement, on pourrait croire que réfléchir sur l’être, le temps, l’âme, est une entreprise purement abstraite, entièrement désintéressée et que le traitement des différentes hypothèses sera parfaitement neutre et objectif. Il n’en est rien. Pour Dastur, comme pour Fink, la mort n’est rien de moins que le moteur de la métaphysique et de la spéculation en général. Les différents religions, systèmes philosophiques, discours, ne sont que des produits dérivés d’une existence désireuse de fuir la mort, de la nier, de la limiter ou de la contenir – par exemple dans un ensemble plus grand incluant un « après », à même de n’en faire qu’un simple passage d’un lieu à un autre, bref rien de plus traumatisant qu’un simple voyage, une translation, et certainement pas un terme 21. Il sʼagit du nom du cinquième cours de Metaphysik und Tod, Stutttgart, Kohlhammer, 1969, p. 49-59. 22. Cette dernière, pour sa part, semble largement influencée par Heidegger de même que par Fink (dont elle a suivi le cours de 1964), auquel elle « sʼefforce à demeurer fidèle », de son propre aveu, dans son essai La mort, essai sur la finitude, p. 35, note 62.
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définitif. La mort, ou plutôt son évitement, est donc le but ultime de la réflexion humaine, qui redouble d’inventivité, de créativité et d’imagination pour relativiser la mort. La plus importante des productions de cette volonté d’évitement et d’occultation est le dualisme ontologique, véritable fondement des traditions religieuses et philosophiques. C’est à lui que nous devons d’être « naturellement » portés à croire que la réalité dans son ensemble est double – d’une part matérielle, d’autre part spirituelle – et que l’humain n’échappe pas à cette division – d’une part corps, d’autre part âme. Le caractère dérivé du dualisme apparaît plus clairement lorsque l’on tient compte du fait que ce discours n’est pas une simple description, neutre, de la réalité, mais bien davantage. En effet, le dualisme ontologique ne se contente pas d’affirmer l’existence de deux dimensions, côte à côte pour ainsi dire, mais il se définit aussi et peut-être surtout par un jugement de valeur unilatéralement en défaveur de la matière, et donc du corps. Mais pourquoi cette préférence ? Les philosophes ont fait grand cas du caractère trompeur des perceptions, des changements incessants des corps, des dérives causées par la toute-puissance de pulsions qui ne seraient freinées que par le pouvoir de l’âme rationnelle, des représentations abstraites du bien, de la propriété, de l’égalité, etc. Le monde matériel est changeant, trompeur, donc faux. Le corps pousse à agir sans délibération, instinctivement, et les pulsions mènent aux excès et sont donc mauvaises. Pas de doute : il faut préférer le vrai au faux, le bien au mal – et cela signifie se détourner des apparences et du corps, respectivement. Ainsi parle le dualisme. Dans la foulée de Heidegger et Fink, Dastur voit une tout autre explication à cette préférence. Si les religions et systèmes philosophiques dualistes ont connu un tel succès et une si grande postérité, c’est moins en raison de la qualité de leur argumentation qu’en raison des besoins fondamentaux auxquels ils répondent. Ce serait la peur de l’anéantissement qui œuvrerait derrière l’assentiment spontané que suscite une doctrine décrivant l’univers de telle sorte que
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La collection PHILOSOPHIES VIVANTES présente des œuvres de philosophes majeurs, d’hier et d’aujourd’hui, choisies pour leur contribution à l’histoire des idées et leur pertinence pour l’approfondissement de notre réflexion sur des sujets contemporains. Dans une perspective pédagogique, les textes originaux s’accompagnent d’informations et de pistes d’analyse essentielles à leur étude. Rendre la philosophie vivante, c’est nous permettre d’amorcer un dialogue direct avec ces auteurs et, dans cet échange, de stimuler notre pensée, d’aiguiser notre esprit critique et d’enrichir notre connaissance du monde.
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L’existentialisme est une école philosophique qui prend pour objet l’existence humaine, non pas pour spéculer sur elle ou sur ce qu’elle pourrait devenir idéalement, mais pour la décrire telle qu’elle est vécue concrètement. Son objectif est de questionner ce qui semble des évidences sur notre existence, de les critiquer et d’ouvrir de nouveaux horizons de réflexion à leur sujet. Projet philosophique ambitieux, l’existentialisme consiste à rendre compte simultanément de l’être humain dans sa singularité, tout en montrant que l’expérience particulière que nous faisons de l’existence permet d’en tirer des leçons qui s’appliquent à l’ensemble de la condition humaine. L’ouvrage présente : • les nombreuses facettes de l’existentialisme à travers ses auteurs les plus influents : Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Albert Camus, Eugene Fink, Emmanuel Levinas, Maurice Merleau-Ponty ; • un large recueil des textes les plus pertinents ; • les principaux thèmes explorés par l’existentialisme : l’être et l’existence, le sens de la vie, l’absurde et l’angoisse, la liberté, le temps, la mort, l’autre, la morale, l’éthique et la politique, le corps. Benjamin Bélair détient une maîtrise et une scolarité de doctorat en philosophie, une maîtrise en science politique, ainsi qu’une maîtrise en administration publique. Il enseigne la philosophie au Collège Montmorency depuis 2005. Il est également chercheur à la Chaire du Canada en économie internationale comparée à l’ENAP. Il en est à sa sixième collaboration avec les Éditions CEC. Hugo Doyer a étudié la philosophie à l’Université de Montréal (baccalauréat, maîtrise et études doctorales) et à l’Université de Paris IV-Sorbonne (études de licence et recherche et rédaction de maîtrise), la pédagogie de l’éducation supérieure à l’Université du Québec à Montréal (PCPES) et la philosophie pour les enfants à l’Université Laval. Il enseigne la philosophie au niveau collégial depuis 2008.
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13/05/16
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Existentialisme-2016:Mise en page 1
SIMONE DE BEAUVOIR ALBERT CAMUS EUGEN FINK EMMANUEL LEVINAS MAURICE MERLEAU-PONTY JEAN-PAUL SARTRE