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PRÉSENTATION DES CARACTÉRISTIQUES DES CHAPITRES La proposition Quelques philosophes ne sont pas heureux ne se convertit pas. L’inférence est indécidable, car il se peut que : a) tous les gens heureux soient philosophes sans que tous les philosophes soient heureux ; ou
SAVOIR-FAIRE À DÉVELOPPER La philosophie n’est pas un certain savoir, elle est la vigilance qui ne nous laisse pas oublier la source de tout savoir. MAURICE MERLEAU-PONTY
CHAPITRE 1
LE PASSAGE VERS LA PRÉOCCUPATION PHILOSOPHIQUE
Signes
b) quelques gens heureux soient philosophes bien que certains philosophes ne soient pas heureux ; ou
Chaque chapitre est orienté vers le développement de trois habiletés principales – analyse, rédaction et débat – par des moyens clairement posés.
SAV O IR - FAIR E À DÉV ELO PPER A N A LY S E Déterminer à la lecture d’un texte : le sujet de préoccupation de l’auteur du texte ; les problèmes d’ordre philosophique soulevés par le sujet ; les champs de la philosophie dans lesquels se loge le propos (par exemple éthique, politique, anthropologique ou épistémologique).
Heureux
Philosophes
Philosophes
Heureux
Philosophes
Heureux
LES INFÉRENCES COMPLEXES Les inférences complexes partent d’au moins deux propositions, dites prémisses, qui, mises en lien, permettent d’en tirer une troisième nommée la conclusion. Nous aborderons trois formes d’inférences complexes, soit le syllogisme, les propositions hypothétiques et le raisonnement par analogie. Le syllogisme Le syllogisme est une forme de déduction qui met en lien deux prémisses qui conduisent à une conclusion. L’une des prémisses est dite majeure et l’autre mineure. Les deux prémisses ont un élément en commun qui permet d’établir le lien ; on le nomme moyen terme. Les autres éléments sont nommés grand terme pour la prémisse majeure et petit terme pour la mineure. La conclusion ne comprend que le grand terme et le petit terme ; le moyen terme disparaît dans l’opération. Par exemple, le syllogisme suivant3 :
RÉDACTION
D É B AT
Formuler la problématique du sujet à traiter en déterminant : les problèmes d’ordre philosophique suggérés par le sujet ; les champs de la philosophie dans lesquels il peut se situer.
Chapitre 1
c) aucune personne heureuse ne soit philosophe.
Circonscrire l’objet du débat en identifiant : les problèmes philosophiques soulevés par chacun des partis pris dans le débat ; les champs de la philosophie auxquels ils peuvent être associés.
Le passage vers la préoccupation philosophique
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Cependant, le caractère distinctif de notre époque, de l’époque de la bourgeoisie, est d’avoir simplifié les antagonismes de classes. La société se divise de plus en plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat.
EXPOSÉ THÉORIQUE COHÉRENT ET PROGRESSIF Une première partie théorique se concentre sur l’accès à la dimension philosophique de toute question et sur l’apprentissage progressif des exigences et des particularités de l’argumentation en philosophie. Elle vise le développement d’une pensée rigoureuse et critique. Les notions théoriques sont présentées en regard de problématiques actuelles qui aident les élèves à mieux comprendre la pertinence de la logique et de l’argumentation.
KARL MARX, FRIEDRICH ENGELS. Le manifeste du Parti communiste.
Prémisse majeure : Les philosophes (moyen terme) sont heureux (grand terme). Prémisse mineure : Les étudiants de ce cours (petit terme) sont philosophes (moyen terme). Conclusion : Donc les étudiants de ce cours (petit terme) sont heureux (grand terme).
Chapitre 3
Karl Marx est né en 1818 à Trèves en Allemagne et est mort en 1883 à Londres. Ayant étudié en droit, en histoire et en philosophie, il devient rédacteur en chef du journal Gazette rhénane; puis, ayant perdu son emploi pour avoir donné au journal une tendance trop révolutionnaire, il s’exile alors à Paris, à Bruxelles, puis à Londres où il rédigera son œuvre principale, Le capital. Il a donné son nom au marxisme, mouvement révolutionnaire qui a marqué l’histoire politique du monde, et a également fourni les bases théoriques de nombreux courants scientifiques et sociologiques.
(8) Ce qui est contraire est utile ; ce qui lutte forme la plus belle harmonie ; tout se fait par discorde. (10) Joignez ce qui est complet et ce qui ne l’est pas, ce qui concorde et ce qui discorde, ce qui est en harmonie et en désaccord ; de toutes choses une, et d’une, toutes choses. (23) On ne connaîtrait pas le mot de justice, s’il n’y avait pas d’injustice. (88) Même chose ce qui vit et ce qui est mort, ce qui est éveillé et ce qui dort, ce qui est jeune et ce qui est vieux ; car le changement de l’un donne l’autre, et réciproquement. HÉRACLITE. Fragments. (Traduction de Paul Tannery.)
FAUT-IL OBÉIR AUX LOIS ? Socrate fut condamné à boire la ciguë, un poison mortel, au terme d’un procès dans lequel on l’accusait de corrompre la jeunesse et de ne pas croire aux dieux. Il fut victime de ses idées progressistes et du fait qu’il incitait ses concitoyens à remettre en question leur préjugés pour chercher la connaissance. Pour situer le contexte de l’extrait ci-après, tiré du Criton de Platon, il faut imaginer Criton, l’ami de Socrate, qui vient le visiter en prison et tente de le convaincre de s’enfuir. Socrate imagine alors ce que les Lois justes d’Athènes diraient de ce plan d’évasion si elles pouvaient s’exprimer. Voici une partie de leurs arguments.
Chapitre 4
Le discours argumentatif
PROPOS DE PHILOSOPHES
a. universels ; b. fondamentaux ; c. problématiques. Définition
3. Pourquoi affirme-t-on que le concept est une représentation générale ? 4. Pourquoi affirme-t-on que le concept est une représentation abstraite ?
Les « Propos de philosophes » regroupent des textes de philosophes d’hier et d’aujourd’hui, choisis pour leur lien avec les questions abordées et les notions à maîtriser, et servent d’exemples concrets d’application des principes théoriques étudiés.
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15. Expliquez en vos mots en quoi les concepts philosophiques sont :
COMPRÉHENSION
2. Donnez trois exemples de concepts.
Karl Marx (1818-1883)
Le jugement et le raisonnement
À VOTRE TOUR D’ARGUMENTER
1. Expliquez en vos mots ce qu’est un concept.
Héraclite était qualifié d’obscur et il aimait provoquer ses interlocuteurs. Les fragments qui suivent paraissent contradictoires. Pourtant, ils ne le sont pas, car, selon lui, le monde est fait de l’unité des contraires.
Étudiants
3. Quatre figures de syllogismes sont possibles selon que le moyen terme est sujet ou attribut dans les prémisses.
Conceptualisation
L’UNITÉ DES CONTRAIRES
Heureux Philosophes
5. Qu’est-ce que la conceptualisation ? 6. Expliquez en vos mots l’affirmation suivante : L’aac quis iti on de c onnai ssanc es, la r éf le xi on et le di alog ue sont des facteurs qui concourent à la construction des concepts. 7. Trouvez un exemple de concept dont le sens varie selon le domaine, le contexte ou les circonstances dans lesquels il est utilisé. 8. Expliquez le lien entre le concept et le mot. 9. Qu’entend-on par compréhension du concept ? 10. Identifiez un concept commun sous lequel vous pourriez placer le concept de philosophie. 11. Identifiez quelques attributs spécifiques du concept de philosophie.
16. Définissez la philosophie… a. … par le sens du mot au dictionnaire ; b. … par son étymologie ; c. … par sa compréhension (concept commun et attributs spécifiques). 17. Complétez la définition… a. … en identifiant des concepts qui sont dans l’extension du concept de philosophie ; b. … en illustrant par un exemple. 18. Identifiez au moins une erreur dans les définitions suivantes : a. La liberté est un droit garanti par les chartes. b. La liberté est de faire librement ce que l’on a projeté. c. La liberté n’est pas de vivre sans aucune contrainte. d. La liberté est une perle rare.
A N A LY S E
12. Qu’entend-on par extension du concept ? 13. Identifiez deux concepts qui sont dans l’extension du concept de philosophie. 14. Expliquez pourquoi plus l’extension du concept est large moins sa compréhension est grande.
1. Après avoir lu le texte de Platon intitulé Qu’est-ce que l’être humain ?, page 40, répondez aux questions suivantes : a. Pour définir le concept d’humain, Socrate se demande sous quel concept commun le loger. Entre lesquels doit-il choisir ?
115 Chapitre 2
Conceptualisation et définition
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À VOTRE TOUR D’ARGUMENTER Dans la section « À votre tour d’argumenter », des exercices de divers types, ordonnés par habiletés, servent à vérifier l’assimilation de la matière et à faciliter la réflexion critique et la maîtrise de l’argumentation.
Socrate (v.~470-~399)2 Socrate, natif d’Athènes, en Grèce, est l’un des initiateurs de la pensée rationnelle telle que nous la concevons en Occident. Il bouleverse les habitudes de pensée de ses concitoyens en les invitant à se servir de leur raison comme guide d’une vie vertueuse ; ces derniers lui en tiennent rigueur à tel point qu’il est condamné à mort et doit boire la ciguë. Socrate, le premier, fonde la réflexion sur l’argumentation philosophique. Il pratique la philosophie en conversant avec ses concitoyens. La conversation s’amorce habituellement sur un sujet d’ordre pratique qui préoccupe ses interlocuteurs ; il les amène, par une série de questions, à prendre conscience de leur incapacité à développer une opinion éclairée et rationnelle sur le sujet. On appelle ce procédé maïeutique, ou « art d’accoucher les esprits ». Poursuivant ses interrogations, Socrate conduit ses amis à un niveau plus général de réflexion. Le sujet traité, qui semblait concerner une situation particulière, est alors inscrit dans une préoccupation plus large qui concerne les humains dans leur ensemble. Les intervenants constatent ainsi qu’il leur faut situer leur réflexion à un niveau universel.
Platon (~429-~347) D’origine noble, Platon aspire à une carrière politique, mais sa rencontre avec Socrate le gagne à la cause de la philosophie. Il voyage beaucoup, principalement en Égypte et en Sicile, et il rencontre de nombreux sages. Il fonde l’Académie à Athènes en ~387 ; on y enseigne les disciplines scientifiques de l’époque, comme les mathématiques, l’astronomie et la médecine. Il voue à Socrate une admiration indéfectible et en fait le personnage principal de ses dialogues. C’est grâce à lui que nous connaissons Socrate, car celui-ci n’a rien écrit.
NOTES BIOGRAPHIQUES
2. Le tilde (~) est utilisé dans ce livre pour désigner une date avant l’ère chrétienne.
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Petit traité de l’argumentation en philosophie
Lorsque nous pensons, nous utilisons des concepts et les mettons en relation pour formuler des jugements exprimés dans des propositions. À partir de ces jugements, que l’on enchaîne vers une conclusion, nous construisons des raisonnements.
QUALITÉ ET QUANTITÉ DES PROPOSITIONS Les propositions qui servent de matériau aux raisonnements seront affirmatives ou négatives et elles seront universelles ou particulières. L’identification de la qualité et de la quantité des propositions est l’opération première qui nous permet de juger de la validité d’un raisonnement qui nous est présenté ou que nous développons. La proposition est universelle si le jugement qu’elle représente porte sur un ensemble considéré comme un tout. Elle est particulière si elle ne concerne qu’une partie de cet ensemble. Chacune de ces propositions peut être affirmative si elle suppose une association entre les concepts. Elle est négative, si elle suppose une dissociation.
Des notes biographiques font état de la contribution des penseurs étudiés à la philosophie.
LES QUATRE SORTES DE PROPOSITIONS Quantité
Inférence Acte qui consiste à tirer une ou plusieurs propositions nouvelles jugées vraies ou fausses (appelées conclusions) d’une ou de plusieurs propositions données et connues comme vraies ou fausses.
Platon développe un système philosophique fondé sur la conviction que les Idées, essences éternelles et immuables, existent indépendamment de la pensée humaine dans un monde autre que celui dont nous avons l’expérience. C’est par la recherche philosophique que l’âme humaine, ellemême issue du monde des Idées, peut y accéder, s’en souvenir (par la réminiscence). On connaît quarante-deux dialogues de Platon dont certains ne seraient pas authentiques. Une dizaine sont dits socratiques car ils cherchent simplement à définir des notions.
LE RAISONNEMENT
Raisonnement Opération qui consiste à lier logiquement des jugements et à en tirer une conclusion. Enchaînement de raisons préparant une conclusion.
Qualité Affirmatives
Négatives
Universelles
Tout P est H
Aucun P n’est H
Particulières
Quelques P sont H
Quelques P ne sont pas H
Nous décrirons deux manières de développer un raisonnement à partir de jugements, soit l’induction et la déduction. Par la suite, nous étudierons différentes formes de déductions, soit l’inférence simple et les inférences complexes. Puis, nous distinguerons le raisonnement valide du raisonnement vrai, et enfin nous nous attarderons à trois axiomes qui forment des règles indispensables dans l’art de penser.
L’INDUCTION L’ induction est un raisonnement qui consiste à tirer, de plusieurs jugements portant sur des cas qui ont des caractéristiques communes, une règle générale (un nouveau jugement) s’appliquant à l’ensemble des cas de même type. Par exemple, à partir d’un certain nombre de chats observés auxquels on peut associer le concept de griffe rétractile, nous pourrons conclure que tous les chats ont des griffes rétractiles. Ou encore, à
GLOSSAIRE EN MARGE 66
Petit traité de l’argumentation en philosophie
Les termes définis en marge apparaissent en caractères gras dans le texte.
philosophe Simone n’est pas heureuse ou de soutenir qu’aucune de ces personnes n’est heureuse.
A I D E - M É M O I R E
la suite de nombreux exemples de guerre, nous associerons le concept de violence à l’humain et nous pourrons métaphoriquement conclure, suivant la locution latine, que L’ homme est un loup pour l’homme.
Si nous pouvons tirer toutes ces conclusions d’une seule affirmation, c’est que notre raison considère que les parties (quelques) sont comprises dans le tout (tous) et que ce qui se dit du tout se dit des parties. De même, nous ne pouvons affirmer logiquement que ce qui se dit du tout ne se dit d’aucune de ses parties (aucun). On ne peut affirmer qu’aucune des parties n’a la qualité du tout.
TABLEAUX ET FIGURES
Cependant, nous pourrions affirmer que Quelques philosophes sont heureux; nous saurions dès lors qu’il est faux qu’aucun philosophe n’est heureux, mais nous resterions dans le doute quant à savoir si certains sont malheureux ou s’il faut inférer que tous sont heureux. Nous resterions silencieux là-dessus. Car, si j’affirme que Quelques philosophes sont heureux parce que ceux que je connais le sont, je ne peux rien dire des quelques autres philosophes que je ne connais pas. Notre connaissance ne porte alors que sur une partie du tout. Cependant, elle est suffisante pour conclure sur la vérité ou la fausseté d’autres propositions.
Des tableaux et des figures permettent de mieux illustrer et résumer les notions apprises.
Sapere aude ! « Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! » EMMANUEL KANT
L’OPPOSITION DES PROPOSITIONS S’IL EST VRAI QUE…
S’IL EST FAUX QUE…
tous les philosophes sont heureux, • il est vrai que quelques-uns d’entre eux sont heureux ; • il est faux que quelques-uns ne soient pas heureux ; • il est faux qu’aucun ne soit heureux.
tous les philosophes sont heureux, • il est impossible de déterminer que quelques-uns d’entre eux sont heureux ; • il est vrai que quelques-uns ne sont pas heureux ; • il est impossible de déterminer qu’aucun n’est heureux.
quelques philosophes sont heureux, • il est impossible de déterminer que tous sont heureux ; • il est impossible de déterminer que quelques-uns ne sont pas heureux ; • il est cependant faux qu’aucun philosophe ne soit heureux.
quelques philosophes sont heureux, • il est faux que tous soient heureux ; • il est vrai que quelques-uns ne sont pas heureux ; • il est vrai qu’aucun philosophe n’est heureux.
aucun philosophe n’est heureux, • il est donc vrai que quelques-uns d’entre eux ne sont pas heureux ; • il est par contre faux que quelques-uns d’entre eux soient heureux ; • il est aussi faux que tous soient heureux.
aucun philosophe n’est heureux, • il est impossible de déterminer que quelques-uns d’entre eux ne sont pas heureux ; • il est vrai que quelques-uns d’entre eux sont heureux ; • il est aussi impossible de déterminer que tous sont heureux.
quelques philosophes ne sont pas heureux, • il est impossible de déterminer qu’aucun n’est heureux ; • il est impossible de déterminer que quelques-uns sont heureux ; • il est cependant faux que tous soient heureux.
quelques philosophes ne sont pas heureux, • il est donc faux qu’aucun ne soit heureux ; • il est vrai que quelques-uns sont heureux ; • il est vrai que tous sont heureux.
Chapitre 3
Le jugement et le raisonnement
AIDE-MÉMOIRE Chaque étape de l’apprentissage est résumée dans un aide-mémoire synthétique.
L’induction est valable si l’on a fait appel à un nombre suffisant de cas particuliers. Toutefois, il faut tenir compte non seulement de l’ampleur de l’échantillonnage, mais aussi de sa représentativité. En ce sens, les sondages sont apparentés à l’induction. Les cas choisis doivent en effet bien représenter l’ensemble. Ainsi, quel que soit le nombre de chats ayant les yeux verts, ces derniers ne sont pas représentatifs de l’ensemble puisqu’il existe des chats qui ont les yeux bleus. De la même façon, l’induction qui aurait pu nous conduire à la thèse que L’homme est un loup pour l’homme est remise en cause par les exemples de générosité et d’altruisme. La proposition qui sert de point de départ à un raisonnement est appelée prémisse. L’induction part de prémisses qui portent sur des cas particuliers et conduit à une conclusion qui est une proposition universelle. Autrement, ce n’est pas une induction. Les raisonnements inductifs peuvent permettre de tirer des règles générales, mais ils conduisent aussi à des définitions. Si chaque situation que l’on considère comme juste comporte un élément d’égalité proportionnelle, nous conclurons que l’égalité est un élément de la définition de la justice.
Le jugement est l’union de deux concepts ou groupes de concepts, en vue de les associer ou de les dissocier. Seuls les énoncés déclaratifs, susceptibles d’être vrais ou faux, contiennent des jugements. Les énoncés impératifs ou interrogatifs n’en contiennent pas. Nous classons les jugements selon quatre types : de réalité, de préférence (assimilé au jugement de réalité), de valeur et de prescription. Le jugement de réalité porte sur ce qui est observable et se vérifie donc par l’observation ou l’expérimentation. Le jugement de préférence exprime un goût, une impression et sa valeur ne se vérifie pas. Le jugement de valeur est une appréciation ; comme il fait intervenir les valeurs de celui qui le pose, il est subjectif mais non arbitraire. Il se vérifie par la discussion de la définition des valeurs interpellées et de la hiérarchie instaurée entre elles. Le jugement de prescription énonce un conseil, une recommandation ou affirme une obligation. Il se fonde sur un ou plusieurs jugements de réalité et/ou de valeur. Ce sont ces jugements que l’on vérifie pour s’assurer de sa pertinence. Prémisse Proposition dont découle une conclusion, fondement d’un raisonnement.
69 Chapitre 3
Le jugement et le raisonnement
Présentation des caractéristiques des chapitres
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TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION Argumenter en philosophie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 CHAPITRE 1 Le passage vers la préoccupation philosophique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Saisir l’aspect philosophique d’une question . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Élaborer une réflexion critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Identifier les questions fondamentales et élaborer une réflexion critique – quelques exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Les champs de la philosophie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Propos de philosophes Albert Camus Le sens de la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Platon L’enseignement de l’escrime . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 Platon La carrière politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 À votre tour d’argumenter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Compréhension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Débat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 CHAPITRE 2 Conceptualisation et définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Le concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Qu’est-ce qu’un concept ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 La conceptualisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Le mot et le concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 La hiérarchie des concepts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 La compréhension du concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 L’extension du concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Le rapport entre la compréhension et l’extension du concept . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Les concepts philosophiques : universels, fondamentaux et problématiques . . . . . . 30 La définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Les règles utiles à l’élaboration d’une définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 La mise en situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 L’approche par le sens des mots . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 L’approche par la compréhension du concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 L’approche par l’extension du concept . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 Le rôle de l’exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 En résumé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 Les erreurs à éviter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 La définition trop large ou trop restreinte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 La définition circulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 La définition négative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 D’autres erreurs à éviter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .37 Définition de concepts : quelques exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Propos de philosophes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 Platon Qu’est-ce que l’être humain ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 Platon Qu’est-ce que le courage ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Aristote Qu’est-ce que le bonheur ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Alain Du devoir d’être heureux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
IV
Petit traité de l’argumentation en philosophie
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Erich Fromm La définition de l’amour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50 À votre tour d’argumenter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Compréhension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 Débat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 CHAPITRE 3 Le jugement et le raisonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 Le jugement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Le jugement de réalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Le jugement de préférence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 Le jugement de valeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Le jugement de prescription . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Le raisonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 Qualité et quantité des propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 L’induction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 La déduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 Les inférences simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 L’opposition des propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 La conversion des propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70 Les inférences complexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Le syllogisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .71 Les propositions hypothétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 Le raisonnement par analogie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 La validité et la vérité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 Les axiomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Le principe d’identité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Le principe de non-contradiction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Le principe du tiers exclu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 Propos de philosophes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Sénèque Le temps est à nous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Hubert Reeves Vers un régime végétarien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Xénophon Socrate est-il sage ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 À votre tour d’argumenter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Compréhension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 Rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 Débat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 CHAPITRE 4 Le discours argumentatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 La thèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 Liens entre les concepts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 Définition des concepts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 Les arguments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 L’énoncé de l’argument est un jugement de réalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 L’énoncé de l’argument est un jugement de valeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 L’énoncé de l’argument est un jugement de prescription . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Des arguments rationnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Des arguments ordonnés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 Des arguments pertinents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Des arguments cohérents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Des arguments suffisants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Table des matières
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Les objections . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Dénoncer l’apparente inadmissibilité de la thèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Défendre une thèse différente ou contraire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Attaquer la valeur des arguments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Critique du bien-fondé des jugements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Critique de la pertinence d’un argument . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Critique de la cohérence d’un argument . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 Critique de la suffisance d’un argument . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 Critique de la définition des concepts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 La réfutation des objections . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 Thèse, arguments, objections, réfutations : un exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 Les sophismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 L’appel à la majorité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 L’appel au clan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 L’appel à l’autorité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 L’appel à sa propre compétence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 L’attaque à la personne ou argument ad hominem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 L’appel aux sentiments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 L’appel à la tradition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 L’appel à la nouveauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 La caricature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 L’exagération des conséquences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 Le faux dilemme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 La généralisation hâtive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 La fausse analogie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 La fausse causalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 La pétition de principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 L’appel à l’ignorance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 Propos de philosophes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .110 Épicure Le plaisir : principe et but de la vie bienheureuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 Sénèque Accepter ce que je ne peux changer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Emmanuel Kant Se libérer des tuteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Karl Marx La lutte des classes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 Héraclite L’unité des contraires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Platon Faut-il obéir aux lois ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Henry David Thoreau La loi et le bien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Gaston Bachelard Rien ne va de soi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 À votre tour d’argumenter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Compréhension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Rédaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Débat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 CONCLUSION Cerner la réalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 ANNEXES Annexe 1 Analyser une argumentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Annexe 2 Rédiger un texte argumentatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128 Annexe 3 Débattre de façon rationnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 INDEX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
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Les jugements de contradicteurs, donc, ne me choquent pas ni ne me troublent ; ils m’éveillent seulement et m’exercent. MICHEL DE MONTAIGNE
CHAPITRE 4
LE DISCOURS ARGUMENTATIF
Essais
SAVOIR-FAIRE À DÉVELOPPER A N A LY S E Repérer la thèse de l’auteur. Repérer les arguments. Découvrir le schéma de l’argumentation. Juger de la pertinence, de la cohérence et de la suffisance de l’argumentation. Repérer les sophismes. Formuler un jugement sur le bien-fondé de la thèse.
RÉDACTION
D É B AT
Formuler une thèse en un seul énoncé et l’expliquer. Établir un plan d’argumentation. Énoncer chaque argument en un seul énoncé et le développer de façon rationnelle. Juger de la pertinence, de la cohérence et de la suffisance de l’argumentation. Choisir les objections contredisant un argument, remettant en question la thèse ou appuyant une thèse différente. Formuler chaque objection en un seul énoncé et la développer de façon rationnelle. Réfuter chaque objection. Reconduire la thèse. Chapitre 4
Établir les thèses envisageables sur le sujet à débattre. Choisir la thèse défendue. Établir un plan d’argumentation. Énoncer et développer les arguments au soutien de la thèse choisie. Prévoir les arguments au soutien des autres thèses envisageables. Formuler les objections à ces arguments. Prévoir les objections à ses propres arguments. Formuler la réfutation de chacune de ces objections. Prévoir les concessions.
Le discours argumentatif
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rgumenter, c’est élaborer un discours en vue de défendre une opinion sur un sujet. Il y a argumentation lorsque plusieurs opinions sont possibles ; en effet, devant l’évidence, personne n’argumente. Le parti pris défendu est exprimé dans une thèse et soutenu par les arguments.
A
Thèse
Arguments
Objections
Réfutations et concessions
Conduite de bonne foi, l’argumentation est une recherche de l’opinion la plus juste par la réflexion et la confrontation des idées. Pour cette raison, le discours argumentatif ne peut faire fi des divergences d’opinion et des avis contraires. Une fois les arguments présentés, il faut tenir compte de la pensée adverse et étudier ses arguments. On nommera ces prétentions contraires à notre thèse des objections. Elles seront énoncées et développées à leur tour, mais elles devront être réfutées de la façon la plus efficace possible afin de rétablir la thèse. Évidemment, il se peut que notre opinion de départ soit fragilisée par le processus d’élaboration des objections, au point de devoir inclure des concessions dans les réfutations. Cependant, il faut aller jusqu’au bout du processus de réfutation, afin de voir où le chemin de notre discours conduit. S’il s’avère que nos convictions personnelles s’en trouvent ébranlées, c’est que l’argumentation aura joué son rôle de faire avancer notre pensée. Sinon, elle les aura renforcées. Notre étude du discours argumentatif se divise en quatre parties : la première s’intéresse au choix et à la présentation de la thèse, la deuxième à l’élaboration des arguments, la troisième à la formulation des objections et à leur réfutation, et la dernière aux erreurs d’argumentation que sont les sophismes.
LA THÈSE La thèse est l’énoncé qui exprime le point de vue que l’on entend défendre. Elle est à la fois le point de départ et le point d’arrivée du propos. En effet, elle est établie préalablement et tout le discours argumentatif consiste à faire cheminer vers l’acceptation de son bien-fondé. Elle devient ainsi la conclusion à laquelle l’ensemble du propos doit nous conduire. Identifier la thèse de l’auteur d’un texte à analyser ou choisir la thèse à défendre dans la rédaction d’un texte argumentatif ou dans la préparation d’un débat est la première étape du travail. Dans l’analyse, elle permet de comprendre le sens ou la portée du texte ; il s’agit alors de répondre à la question : De quoi l’auteur veut-il me convaincre ? Dans la rédaction et le débat, elle oriente l’articulation du discours et l’on se demandera : De quoi dois-je convaincre ?
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La thèse se présente comme un jugement de réalité si elle porte sur un fait observable, un évènement, une réalité existante. Elle est l’énoncé d’un jugement de valeur si elle implique une appréciation, une évaluation fondée sur des critères discutables. Elle se présente comme un jugement de prescription si elle émet un conseil, une recommandation, une obligation. Selon la nature de l’énoncé, le jugement sera appuyé en démontrant l’existence du fait affirmé, en justifiant la valeur défendue ou en motivant la prescription suggérée. Un processus argumentatif contient une seule thèse. La thèse est un choix. Elle exprime l’opinion qu’on entend défendre. Elle doit être le résultat d’une réflexion sur le sujet proposé. Tout auteur que nous lisons, pour autant que son texte soit argumentatif, a réalisé ce parcours et choisi sa thèse en fonction de ses opinions. Lorsqu’il s’agit de rédiger soi-même un texte ou de participer à un débat, l’élaboration de la thèse est le résultat d’un processus qui nécessite de se documenter sur le sujet proposé, afin de parfaire ses connaissances et de prendre parti sur les questions philosophiques fondamentales interpellées. Il faut ensuite identifier les concepts philosophiques sur lesquels appuyer notre discours et les définir.
La philosophie est une lutte contre la manière dont le langage ensorcelle notre intelligence. LUDWIG WITTGENSTEIN Tractatus logico philosophicus
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LIENS ENTRE LES CONCEPTS La thèse étant un jugement, elle met en lien des concepts. Il faut prêter attention à la nature du lien qui unit les concepts et à leur définition. Plusieurs relations entre les concepts sont possibles. On peut reconnaître l’identité de deux concepts : ainsi, le jugement de Socrate à l’effet que « l’homme est son âme7 » affirme l’identité des concepts d’homme et d’âme. On peut aussi reconnaître leur différence : la conclusion des propos de Socrate et de Lachès, selon laquelle le courage est différent de la témérité8, fait ressortir en quoi ce second concept limite le premier et ne saurait l’inclure. On pourra également juger que les concepts sont contradictoires ou encore qu’ils sont complémentaires : ainsi, les Grecs s’entendaient pour affirmer que la passion est le contraire de la vertu, et jugeaient complémentaires la connaissance du bien et la maîtrise de soi. D’autres formes d’associations sont possibles, telles l’antériorité ou la postériorité d’un concept par rapport à un autre. Par exemple, en prétendant que la connaissance du bien est la condition de l’action droite, Socrate affirme que la connaissance est antérieure à l’action et, inversement, que l’action est postérieure à la connaissance. L’analogie est une autre forme d’association entre les concepts : ainsi, Socrate soutient que l’éducation des jeunes est analogue au dressage des chevaux. Il arrive également que l’on établisse des relations d’inclusion, d’exclusion ou de dépendance entre les concepts. Il faut porter une attention particulière aux mots qui énoncent la thèse et saisir les nuances qu’ils transmettent. Par exemple, l’affirmation On doit accepter de mourir pour ses idées n’a pas le même sens que celle qui soutient qu’On peut mourir pour ses idées. Dans le cas de la thèse Jamais le corps humain ne doit faire l’objet de rapports marchands, le terme « jamais » revêt une importance décisive, car il suppose qu’aucune exception n’est possible.
DÉFINITION DES CONCEPTS Les concepts que contient l’énoncé de la thèse doivent être définis, sauf si leur sens est manifestement connu. S’il s’agit de concepts philosophiques, cette définition peut nécessiter, lors de la rédaction, une réflexion critique et l’identification d’un parti pris sur des questions fondamentales. Dans l’analyse de textes, l’ensemble de l’argumentation nous renseigne sur les choix idéologiques de l’auteur et sur la définition qu’il donne des concepts philosophiques qu’il utilise de façon explicite ou implicite. 7. Platon. Qu’est-ce que l’être humain ?, p. 38-40. 8. Platon. Qu’est-ce que le courage ?, p. 40-45.
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Prenons pour exemple le sujet suivant, soit la relation entre la qualité de la vie et le développement du système capitaliste, que nous problématiserons ainsi : Pour bien vivre, faut-il sortir du capitalisme ? La réponse à cette question demande de mettre en lien, pour les associer ou les dissocier, les concepts de capitalisme et de bien vivre. La thèse sera donc soit que l’épanouissement du système capitaliste peut nous aider à bien vivre, soit qu’il faut sortir du capitalisme pour bien vivre. Aussi, avant de prendre parti, il faut acquérir une certaine connaissance des principes et des rouages de ce système économique, de ses règles de fonctionnement, de son histoire et de ses effets sociologiques. Il faut également déterminer ce qu’on entend par bien vivre. Cet exercice fait appel à des questions fondamentales portant notamment sur les valeurs que nous adoptons, notre conception de l’humain et du bonheur : plus précisément, il met en cause le sens que nous donnons et l’importance que nous accordons à la liberté, à la dignité, à l’autonomie, à la justice, à la propriété, à la réussite personnelle et au bien commun. Enfin, quelle que soit la thèse choisie, il est nécessaire, afin de bien préparer le lecteur ou l’auditeur, de procéder à une brève définition du terme capitalisme, à la dénomination des concepts philosophiques interpellés et à une courte discussion sur leur définition. Choisir et poser la thèse n’est que la première étape ; il faut maintenant l’argumenter.
LES ARGUMENTS Un argument est un raisonnement qui tend à prouver la thèse. L’argumentation peut être considérée comme un art qui sert à persuader son interlocuteur. La rhétorique, essence de cet art, étudie les lois et les mécanismes du discours argumentatif et les conditions de son efficacité pratique. L’échange d’arguments fait partie des rapports sociaux. Il est un outil privilégié de la vie politique et économique. L’argumentation est aussi essentielle à l’affirmation de l’identité personnelle et sociale et à l’élaboration d’une civilisation. L’art d’argumenter est un objet de spécialistes qui ont élaboré des théories complexes, mais nous nous intéressons ici plus précisément à l’argumentation telle que la pratiquait Socrate : celle qui sert à mieux comprendre et connaître en s’approchant de l’opinion la plus juste. Elle est ainsi intimement liée au processus par lequel nous construisons notre pensée de façon claire et rigoureuse. C’est la raison pour laquelle le choix de la thèse que vous voulez défendre doit correspondre à votre conviction. L’argumentation permettra d’en vérifier les forces et les faiblesses, et soit vous confortera dans votre idée, soit vous fera évoluer vers une opinion différente.
Chapitre 4
Rhétorique La rhétorique est la technique ou l’art oratoire. Elle s’est développée suivant la tradition grecque comme dialectique et art d’argumenter, de persuader, puis subséquemment selon la tradition romaine comme art de bien dire, d’orner le discours par des effets de style de manière à toucher l’auditoire. Sommairement, elle se distingue comme art de la persuasion et art de l’éloquence (stylistique).
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Lorsque la raison, compte tenu des arguments qui lui sont présentés, est conduite à accepter la thèse, le discours argumentatif a pleinement atteint son but. Les arguments tendront à établir le fait affirmé par la thèse si cette dernière est un jugement de réalité, à justifier la valeur défendue si elle est un jugement de valeur et à motiver l’incitation à agir si elle est un jugement de prescription.
Probant Qui prouve de manière concluante, convaincante, décisive.
L’argument est formulé en un seul énoncé. Ce dernier sera un jugement de réalité, de valeur ou de prescription qui devra être appuyé selon sa nature. Le développement de l’argument vise à établir le bien-fondé de l’énoncé en l’expliquant, en le démontrant et en l’illustrant, et à convaincre de sa valeur probante pour faire accepter la thèse.
L’ÉNONCÉ DE L’ARGUMENT EST UN JUGEMENT DE RÉALITÉ Les faits servant d’arguments auront été directement observés ou seront relatés. Dans ce dernier cas, on s’enquerra de la fiabilité des sources. Par exemple, en ce qui concerne les statistiques, on s’assurera de la valeur de la méthode utilisée pour les établir ; on sera en outre prudent quant à leur interprétation. Si la source est un témoignage, il faudra convaincre de la crédibilité du témoin. L’argument fondé sur un fait sera développé en exposant ce dernier, en démontrant les raisons de croire à son existence et en justifiant qu’il s’interprète comme on le suggère ; enfin, on expliquera en quoi il confirme la validité de la thèse. L’énoncé portant sur une réalité s’appuie fréquemment sur des connaissances. Il faudra les distinguer des faux savoirs, des pseudosciences ou de l’opinion commune. L’énoncé portant sur une connaissance sera développé en exposant la connaissance, en citant les sources et en établissant la fiabilité de ces dernières.
L’ÉNONCÉ DE L’ARGUMENT EST UN JUGEMENT DE VALEUR L’importance de défendre une valeur plutôt qu’une autre ne saurait s’appuyer sur une démonstration objective ; cependant, le choix n’est pas non plus arbitraire. Il doit être justifié. De plus, nous savons que la définition des valeurs est problématique. Le juste ou le beau font l’unanimité comme valeurs, mais prêtent à discussion quant à leur définition ou quant à leur application.
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Les arguments fondés sur les valeurs sont développés en justifiant le choix de celles-ci, en proposant et en défendant une certaine définition de ces dernières, et en établissant leur lien avec la thèse.
L’ÉNONCÉ DE L’ARGUMENT EST UN JUGEMENT DE PRESCRIPTION L’énoncé de ce qu’il faut faire ou de ce qu’on a le devoir de faire repose sur des jugements de réalité ou de valeur qui conduisent à une prescription. Il est donc nécessaire, dans le développement de l’argument, d’identifier ces jugements et de les justifier selon leur nature. LES ARGUMENTS ÉNONCÉ D’UN FAIT
•
Exposition du fait
Preuve de son existence Observation • Valeur du témoignage • Valeur de la connaissance
ÉNONCÉ PORTANT SUR UNE VALEUR
ÉNONCÉ PORTANT SUR UNE PRESCRIPTION
Justification du choix de cette valeur Définition adoptée
•
•
Identification du jugement initiant la prescription
•
Lien entre cette valeur et la thèse
•
Justification de ce jugement selon qu’il est un jugement de réalité ou un jugement de valeur
•
Lien entre le jugement de prescription et la thèse
•
• •
•
Justification de l’interprétation du fait
•
Valeur probante au soutien de la thèse
Les arguments doivent faire appel à la raison et non à l’émotion. De plus, l’argumentation ne doit pas s’appuyer sur les préjugés, qui sont des idées reçues sans l’examen de la raison. Certes, la référence aux préjugés et aux idées généralement admises, comme le recours aux émotions, facilite la persuasion. Cependant, en philosophie, l’argumentation vise à convaincre rationnellement et se situe d’emblée au niveau des idées. Pour être efficaces, les arguments doivent être rationnels, ordonnés, pertinents, cohérents et suffisants.
DES ARGUMENTS RATIONNELS En philosophie, les arguments sont développés en s’assurant de définir convenablement les concepts utilisés, en justifiant les jugements selon leur nature et en construisant des raisonnements respectant les règles de la logique. Ils s’adresseront à la faculté de juger de l’interlocuteur sans tenter de jouer sur ses préjugés ou sur ses émotions.
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Quiconque a détruit un préjugé, un seul préjugé, est un bienfaiteur du genre humain. NICOLAS DE CHAMFORT
DES ARGUMENTS ORDONNÉS
Subsidiaire Donné accessoirement pour venir à l’appui de quelque chose de principal.
L’argument peut être en relation directe avec la thèse, mais sans rapport avec un autre argument : il est indépendant. Par exemple, si la thèse est La raison est un malheur pour l’humanité (T) et que l’argument est La conscience de notre sort de mortel est la principale cause de nos angoisses (A), on schématisera la relation de l’argument à la thèse tel qu’indiqué ci-contre.
T
A
T
A1
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Pour construire un texte argumentatif, il faut tout d’abord ordonner les arguments, c’est-à-dire leur donner un ordre afin qu’ils s’enchaînent de façon à toujours renforcer la thèse défendue. Chaque argument doit être en rapport avec la thèse et celui-ci sera direct dans le cas des arguments principaux, ou indirect s’il s’agit d’arguments subsidiaires. Quatre schémas permettront de visualiser les rapports possibles entre les arguments et la thèse.
A2
Des arguments peuvent être complémentaires tout en étant indépendants; le second ajoute au premier, mais chacun peut se suffire. Par exemple, la thèse étant toujours La raison est un malheur pour l’humanité (T), imaginons comme arguments La raison nous donne l’illusion de connaître alors que nous ignorons tout (A1), et La raison limite les élans du cœur (A2). Ces deux arguments ne sont pas en relation, mais ils ont chacun un lien avec la thèse. Si l’un ne convainc pas, cela n’entame pas la valeur de l’autre. Le schéma est reproduit ci-contre.
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Les arguments peuvent aussi être dépendants en plus d’être en relation avec la thèse. Ils prouvent la valeur de la thèse, à la condition d’être tous deux exacts. Si la thèse est toujours La raison est un malheur pour l’humanité (T) et que les arguments sont La raison est destructrice de la nature (A1), et La sauvegarde de la nature est indispensable à l’existence des humains (A2), ces deux arguments doivent être vrais pour justifier la thèse. Peu importe que la raison soit destructrice de la nature : si la survie de l’humain n’en dépend pas, cela n’en fait pas un malheur pour l’humanité. De la même façon, bien que la sauvegarde de la nature soit indispensable à la survie de l’humain, la raison n’est pas un malheur pour l’humanité si elle n’est pas destructrice. Le schéma de ces liens est présenté en marge. Il arrive souvent qu’il soit nécessaire de développer des arguments afin de justifier le bien-fondé de l’argument principal qui servira à valider la thèse. Prenons comme exemple la thèse suivante : Une société doit assurer une égale satisfaction des besoins de tous ses membres (T). L’argument sera La société a pour fondement l’association de personnes libres qui aliènent leur liberté en échange des avantages de la collectivité (A1). Cet argument sera développé en démontrant que si tous aliènent également leur liberté, tous doivent y trouver une égale compensation. Cependant, il devra être introduit par un autre argument qui affirme qu’Il n’y a pas chez l’humain d’instinct qui le force à vivre dans une société et qui y détermine un ordre hiérarchique (A1a). Cet énoncé sera développé en faisant intervenir les connaissances actuelles sur la nature humaine. Un deuxième argument principal pourra être Les humains ont un droit égal à la satisfaction de leurs besoins (A2). Cet argument sera développé, d’une part, en justifiant la valeur d’égalité par l’apport de chacun à la construction de la civilisation. Cette affirmation aura une valeur probante plus forte si vous avez préalablement développé un argument selon lequel La différence n’empêche pas l’égalité (A2a). En effet, nous savons que tous ne produisent pas, de par leur vie, les mêmes effets sur la société et que tous ne naissent pas avec les mêmes talents. Il est important que notre interlocuteur comprenne que les humains, bien que différents, peuvent être égaux. Les arguments 1 et 2 sont ceux qui appuient la thèse. Cependant, chaque argument a besoin d’être soutenu par un argument subsidiaire : l’argument 1 l’est par l’argument 1a, et l’argument 2 par l’argument 2a, comme le montre le schéma de l’argumentation ci-contre.
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T
A1
+
A2
Valider Rendre valable, recevable, acceptable.
Thèse
Argument 1
Argument 2
Argument 1a
Argument 2a
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Donnez le même esprit aux hommes, vous ôtez tout le sel de la société. L’ennui naquit un jour de l’uniformité. ANTOINE HOUDAR DE LA MOTTE Fables nouvelles
La réorganisation de l’argumentation en schéma est une façon d’en faire le plan ; en outre, elle favorise grandement la précision, la pertinence et la cohérence. Évidemment, ce schéma est plus utile pour évaluer ou pour organiser et corriger un propos déjà formulé que pour trouver des idées. Il est en quelque sorte une manière de s’assurer de la qualité formelle de l’argumentation : il sera approprié lors de l’analyse d’un texte argumentatif et servira à s’assurer de la bonne construction d’un texte avant la rédaction finale. Ensuite, il est nécessaire que les arguments jouissent de trois qualités fondamentales : pertinence, cohérence et suffisance.
DES ARGUMENTS PERTINENTS Sont pertinents les arguments qui sont en rapport avec la thèse et visent à la justifier ; ils s’appuient sur des faits ou des valeurs qui soutiennent effectivement la thèse. Il faut, dans le développement d’un argument, mettre en évidence son lien avec la confirmation de la thèse. Cohérent Qui présente une liaison, un rapport étroit d’idées qui s’accordent entre elles, ne se contredisent pas.
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DES ARGUMENTS COHÉRENTS Pour qu’une argumentation soit jugée cohérente, les raisonnements doivent être valides : les règles élémentaires de la logique devront donc être appliquées.
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THÈSE, ARGUMENTS, OBJECTIONS, RÉFUTATIONS : UN EXEMPLE Prenons pour exemple la thèse suivante : Il faut sortir du capitalisme pour bien vivre. L’énoncé du premier argument peut être le suivant : Le capitalisme est un système économique qui réduit les relations humaines à des rapports marchands. Un second argument peut être que Ce système économique menace l’équilibre de la nature. Une première objection attaquera la thèse en affirmant qu’Il n’y a pas de rapports entre la qualité de la vie et l’économie. La thèse est alors d’emblée non pertinente. Une seconde objection proposera la thèse contraire : Le capitalisme permet de mieux vivre car il favorise le libre épanouissement des individus. L’objection pourrait aussi attaquer le premier argument et prétendre que Le capitalisme ne concerne que les rapports d’échange de biens entre les individus et non les rapports affectifs. Ou encore, elle attaquera le deuxième argument et elle sera à l’effet que L’équilibre de la nature n’est pas menacé par le développement du capitalisme mais par l’absence de réglementation. Enfin, on peut discuter la définition des concepts et attaquer le premier argument en affirmant que Bien vivre suppose avant tout la satisfaction des besoins et non la qualité des rapports humains. Évidemment, le processus d’argumentation ayant pour but de défendre la thèse initiale, il faudra réfuter les objections en démontrant qu’il y a un rapport direct entre la qualité de la vie et les conditions de l’économie, que le capitalisme ne favorise ni la liberté ni l’épanouissement, que les rapports marchands conditionnent l’ensemble des rapports humains dans les sociétés capitalistes, que la réglementation nécessaire à la protection de l’environnement est incompatible avec le développement du capital, et finalement que la profondeur des rapports affectifs est un besoin essentiel pour les humains. Cela permet de rétablir la thèse qui veut que pour bien vivre, il faut sortir du capitalisme. Bien entendu, si nous choisissons maintenant de défendre la thèse que l’épanouissement du système capitaliste peut nous aider à bien vivre, les idées qui nous ont permis de formuler les objections nous serviront d’arguments, et les idées à la source des arguments et des réfutations nous serviront à formuler les objections. Le processus d’argumentation décrit dans les pages qui précèdent est un canevas de base qui devra être peaufiné si vous voulez parfaire votre talent d’orateur et de rédacteur, ou améliorer votre analyse des textes argumentatifs. De plus, vous pourrez embellir votre discours en vous servant de tous les outils de la persuasion. Les sophistes sont les premiers philosophes connus en Occident à avoir travaillé l’art du langage et plus particulièrement l’argumentation. Ils se sont intéressés, bien avant
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qu’Aristote ne formalise les règles de la logique, à l’organisation rationnelle du discours. Hélas, le témoignage du philosophe Platon ne leur a pas rendu justice et l’histoire les a longtemps retenus comme des gens qui visaient à persuader, sans respect de la rationalité. Nous allons voir à présent quelques-uns de ces artifices qu’on nomme les sophismes, non pas qu’il soit souhaitable de les utiliser, mais plutôt parce qu’il faut les connaître pour éviter de tomber dans leur piège. Vivre tous simplement pour que tous puissent simplement vivre. GANDHI
LES SOPHISMES Étymologiquement, le mot sophisme provient du grec sophisma, « invention habile », puis « trait d’esprit propre aux sophistes ». Le sophisme est un argument ou un raisonnement erroné malgré une apparence de vérité. Il est généralement construit dans l’intention de tromper, à la différence du paralogisme, qui est une erreur de raisonnement commise sans intention de tromper. Nous présentons les sophismes les plus fréquents. Certains prétendent garantir la valeur de vérité d’une affirmation par la qualité ou le nombre de celui ou de ceux qui partagent la même opinion ; a contrario, d’autres se servent d’un artifice semblable pour prouver la fausseté d’une affirmation par le peu de valeur de son auteur. Quelques sophismes s’appuient sur les sentiments de l’auditeur ou du lecteur, sur sa confiance en la tradition ou en la nouveauté pour le convaincre d’une opinion. Il y a aussi
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ceux qui sont des attaques déloyales contre la thèse ou les arguments de la partie adverse. Enfin, un dernier groupe de sophismes enfreint les règles de la logique tout en donnant l’illusion de s’y conformer.
L’APPEL À LA MAJORITÉ Il faut bien admettre qu’il peut arriver à un menteur de dire la vérité et à une personne estimable et bien informée de faire erreur. Il peut aussi arriver que tout le monde se trompe et qu’une personne marginale et isolée défende une vérité que la majorité admettra comme valable plus tard. Fonder la vérité d’un propos sur la valeur de la personne ou du groupe de personnes qui parlent, c’est renoncer à utiliser sa raison pour juger. Nous substituons alors la confiance aveugle à l’analyse et au jugement. L’un des sophismes de ce genre est l’appel à la majorité, qui fonde la valeur d’une thèse sur le fait que la plupart des gens l’ont acceptée. Cette façon de s’appuyer sur le consensus est inacceptable parce qu’elle conduit à baser ses opinions sur des préjugés populaires ; en effet, l’opinion générale se fait trop souvent à partir de sentiments mal définis et à la suite de manipulations de toutes sortes plutôt qu’en prenant comme point de départ une analyse rationnelle. L’argument faisant appel à l’approbation de la majorité trouve sans doute sa force dans le sentiment de sécurité que peut procurer le fait de penser comme tout le monde. Il est efficace dans les faits, mais nul en raison. L’énoncé suivant est un exemple de ce type d’argument : Tout le monde s’accorde à dire qu’une société ne peut être fondée sur la solidarité, il faut donc considérer la compétition comme socialement indépassable. Que penser alors de l’argument suivant qui avait cours il y a quelques siècles : Tout le monde s’accorde à dire que le pouvoir d’un roi est indispensable pour maintenir l’ordre social et, en conséquence, la démocratie est une utopie ?
L’APPEL AU CLAN L’appel au clan est un argument qui consiste à faire accepter une thèse parce qu’elle est endossée par un certain groupe de personnes que le lecteur ou l’auditeur juge estimables. Cet artifice de la persuasion mise sur le désir de marquer son appartenance à un groupe social estimé. Par exemple, si les jeunes, les gens instruits et les personnes qui réussissent pensent d’une certaine façon, on sentira le besoin de s’associer à ces groupes en partageant leur opinion. L’affirmation Le groupe Untel est moche, aucune personne un tant soit peu branchée ne s’y intéresse est un appel au clan.
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L’APPEL À L’AUTORITÉ Souvent, on nous suggère d’adhérer à une opinion parce qu’une personne dont nous reconnaissons le mérite le fait. Il est certain que chacun ne peut pas reprendre le processus de la connaissance dans tous les domaines avant d’admettre une thèse. Nous faisons confiance à différents spécialistes en de multiples circonstances ; si une communauté de chercheurs donne son aval à une théorie après analyse, on peut raisonnablement accorder de la valeur à cette dernière. Cependant, la confiance ne doit pas être aveugle et il faut se réserver le privilège d’exercer son jugement ; il arrive qu’une personne dont la compétence est reconnue paralyse l’avancement des recherches parce qu’une trop grande confiance en ses théories interdit le questionnement. De plus, il ne faut accorder de crédibilité qu’à la personne qui parle de ce qu’elle connaît bien. Ainsi, si quelqu’un dont on reconnaît l’autorité dans une matière émet une opinion dans un domaine étranger à sa spécialisation, il n’aura pas de crédibilité particulière. Les publicités où des vedettes vantent les mérites d’un produit de consommation sont fondées sur ce genre de sophismes. Quel crédit devons-nous accorder, par exemple, à un joueur de hockey ou à une vedette de la chanson qui cherche à nous vendre une automobile ou un shampoing ?
L’APPEL À SA PROPRE COMPÉTENCE On peut aussi tenter de faire admettre une thèse en évoquant sa propre compétence et en usant d’autorité pour gagner la confiance de l’auditeur ou du lecteur. L’argument pourrait prendre la forme suivante: Moi qui ai tant d’années d’expérience en ce domaine, moi dont la compétence est reconnue, moi qui ai vécu la même situation que vous, comment pouvez-vous ne pas me faire confiance ? Bien que l’expérience d’une personne et ses compétences ne soient pas négligeables et l’aident à se faire une opinion éclairée et nuancée, elles ne sont pas suffisantes pour faire la démonstration de la valeur d’une thèse. Une autre façon plus triviale d’utiliser ce sophisme est de prétendre qu’une thèse est valable parce qu’elle correspond à notre opinion, qu’elle est vraie parce que j’en ai la conviction, comme si le fait de penser une chose lui conférait de la vérité. Ce genre de prétention est évidemment une négation de la valeur de l’analyse et de la démonstration.
L’ATTAQUE À LA PERSONNE OU ARGUMENT AD HOMINEM Cet argument vise à convaincre de la fausseté d’une thèse en se fondant sur le peu de valeur intellectuelle ou morale de la personne qui la sou-
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tient. Au lieu de s’en prendre à la crédibilité de la thèse, on attaque la personne qui la défend : comment endosser en effet une théorie soutenue par un chercheur qui s’est déjà trompé, ou comment accorder crédit aux propos de quelqu’un qui s’est mal conduit ou a déjà menti ? En raison, ces arguments sont inadmissibles, car la valeur d’un propos se juge indépendamment de la personne qui le tient. Un autre mode d’utilisation de ce genre de sophisme est le procès d’intention ; au lieu de mettre en cause la valeur d’un propos, on fait appel aux intentions répréhensibles de celui qui le tient. On pourra, par exemple, inciter les gens à rejeter les dénonciations d’un chef syndical à l’endroit des politiques gouvernementales en prétendant que ce dernier cherche ainsi à se donner du pouvoir.
L’APPEL AUX SENTIMENTS Faire appel à un sentiment chez une personne pour la persuader d’accepter une thèse est une façon d’éviter de faire la démonstration de son bien-fondé. Ce sentiment pourra être la pitié, la peur, l’amour, la fierté, l’insécurité. Par exemple, au lieu d’analyser rationnellement la question de l’avortement, on projettera des films dans lesquels on fera appel à la pitié des gens pour le fœtus, et où on les impressionnera en leur faisant sentir qu’ils auraient pu ne pas naître si leur mère avait eu recours à l’avortement. Ces arguments fallacieux bloquent la réflexion.
L’APPEL À LA TRADITION Il peut être rassurant de répéter le passé, quitte à reproduire des erreurs. L’appel à la tradition est un argument qui, pour convaincre du bien-fondé d’une thèse, invoque le fait qu’elle est depuis longtemps admise. On pourrait par exemple soutenir qu’il est normal que ce soient les femmes qui prennent en charge les tâches domestiques puisque par le passé elles l’ont toujours fait. Cet argument est faible, car il entend juger le présent à la seule lumière du passé, sans autre forme d’analyse. N’est-il pas effarant de se représenter ce que serait la condition humaine si au cours de l’histoire les choses n’avaient pas changé ?
L’APPEL À LA NOUVEAUTÉ On peut inverser le processus de l’appel à la tradition et avoir recours à la nouveauté d’une thèse pour en prouver la valeur ; là encore, l’argument est faible, car ce qui est nouveau n’est pas nécessairement valable. La publicité se sert souvent de ce type d’argument lorsqu’elle cherche à nous convaincre d’acheter un produit en invoquant le motif qu’il est le plus récent sur le marché. Changer son ordinateur parce qu’il y en a un
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nouveau sur le marché révèle qu’on est tombé dans le piège de ce sophisme, sauf si l’amélioration de la technologie correspond réellement à ses besoins.
LA CARICATURE Certains sophismes ne sont pas destinés à appuyer une thèse, mais à invalider la thèse adverse et ses arguments. À ce type appartient le sophisme de la caricature ; il consiste à déformer la thèse ou les arguments afin de les rendre manifestement non crédibles. On pourra ainsi rendre une position trop radicale ou simpliste. Par exemple, si des gens affirment qu’il faut remédier aux échecs scolaires en incitant les étudiants à diminuer les heures où ils peuvent occuper un emploi rémunéré, on pourra caricaturer leur position en leur faisant dire qu’il faut interdire aux étudiants de travailler. Pourtant, les tenants de cette thèse ne préconisent qu’une diminution des heures de travail.
L’EXAGÉRATION DES CONSÉQUENCES Ce sophisme infirme une thèse ou un argument en en exagérant les conséquences néfastes. L’analyse des conséquences d’une thèse est un procédé qui permet d’évaluer sa valeur. Cependant, le fait d’imaginer une chaîne de conséquences catastrophiques possibles, mais dont rien ne permet de croire qu’elles soient nécessaires, est un sophisme. Par exemple, on pourra tenter d’invalider l’idée qu’il faut légaliser l’euthanasie pour les malades en phase terminale qui en font la demande, en faisant valoir que, si l’on permet de causer la mort dans ce cas, on le permettra bientôt dans le cas où le malade n’est pas consentant, et ensuite dans le cas des handicapés mentaux et, enfin, dans le cas des personnes socialement indésirables. La conséquence est possible, mais rien ne permet de la croire probable.
LE FAUX DILEMME Le dilemme est une alternative contenant deux propositions contraires ou contradictoires entre lesquelles il faut choisir. Le sophisme du faux dilemme consiste à faire croire qu’il n’y a de choix qu’entre deux propositions alors que d’autres options sont possibles. De plus, l’une des deux propositions de l’alternative est manifestement inacceptable, d’où la nécessité de choisir l’autre. Par exemple, la proposition suivante : Ou nous allons établir la démocratie dans ce pays par les armes, ou nous laissons des tyrans massacrer le peuple. Et si ces deux solutions étaient également inacceptables et qu’il faille emprunter la troisième voie de la négociation et de l’influence positive accompagnée de soutien psychologique et matériel ?
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LA GÉNÉRALISATION HÂTIVE Certains sophismes donnent l’illusion du raisonnement logique, mais pèchent par manque de rigueur. La généralisation hâtive en est un exemple. Elle est une induction faite à partir d’un trop petit nombre de cas ou d’un échantillonnage trop peu représentatif pour que la conclusion soit valide. Ce sophisme est souvent utilisé dans les propos sexistes, racistes ou sectaires. Par exemple, je ne peux conclure que tous les habitants d’un pays sont racistes du fait que plusieurs d’entre eux votent pour un parti qui prône l’inégalité des races.
LA FAUSSE ANALOGIE Le sophisme de la fausse analogie consiste à se servir de comparaisons afin de frapper l’imagination et de convaincre. Comme le raisonnement par analogie, il affirme que la relation existant entre deux réalités est transposable à la relation entre deux autres réalités. Cependant, la faiblesse du raisonnement vient de la non-pertinence de la comparaison. Par exemple, on pourra dire que, comme le loup mange la gazelle, il est normal que dans nos sociétés le plus fort exploite le plus faible. Est-il vraiment pertinent de faire un parallèle entre les réalités du monde animal et celles des sociétés d’humains raisonnables et capables de faire des choix moraux ?
LA FAUSSE CAUSALITÉ La recherche des causes est le fondement du processus de connaissance, mais encore faut-il que le lien de causalité soit sérieusement établi entre deux phénomènes pour que l’on puisse affirmer que l’un est la cause de l’autre. La pensée magique voit souvent des liens de cause à effet entre des événements qui ne sont que concomitants, c’est-à-dire simultanés ou coexistants. Le sophisme de la fausse causalité consiste à suggérer à tort un lien causal entre des événements qui ne font que se succéder dans le temps ou qui apparaissent toujours ensemble. Ainsi, si l’augmentation des familles monoparentales dans un groupe social va souvent de pair avec la hausse de la criminalité, on pourrait être tenté d’établir un lien de causalité entre ces deux phénomènes alors que cela peut indiquer que ces derniers sont la conséquence d’une même cause, comme la pauvreté ou la disparition des valeurs familiales.
LA PÉTITION DE PRINCIPE La pétition de principe est un raisonnement circulaire qui prouve la validité de la thèse par un argument qui n’a de valeur que si la thèse est admise. Imaginons que l’on veuille prouver que tous les gestes que posent les humains visent à leur procurer du plaisir en invoquant l’argument que le but de la vie humaine est d’avoir du plaisir.
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A I D E - M É M O I R E La thèse Argumenter, c’est défendre une opinion exprimée dans la thèse. La thèse met en lien des concepts. La thèse est un jugement de réalité, un jugement de valeur ou un jugement de prescription. On doit définir les concepts contenus dans la thèse. Les arguments L’argument soutient la thèse. Il est formulé dans un énoncé qui est ensuite développé. Les arguments s’élaborent en démontrant l’existence des faits et en justifiant leur interprétation, ou en discutant les valeurs auxquelles ils réfèrent. Les arguments doivent être rationnels, ordonnés, pertinents, cohérents, suffisants. Les objections Les objections remettent en question la thèse et/ou les arguments. L’objection dénonce l’inadmissibilité de la thèse, défend une thèse différente ou attaque les arguments. Les réfutations La réfutation a pour but d’invalider les objections afin de réhabiliter la thèse. Les sophismes Les sophismes sont des arguments rationnellement inadmissibles. Les sophismes doivent être évités et dénoncés.
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L’APPEL À L’IGNORANCE L’ignorance ne peut procurer la connaissance. Ainsi, si nous ignorons qu’une chose existe, cela ne prouve pas qu’elle n’existe pas. L’inverse est aussi vrai : si nous ne pouvons pas prouver qu’une chose n’existe pas, cela ne signifie pas qu’elle existe. Le sophisme de l’appel à l’ignorance consiste à affirmer que le contraire de ce que l’on ignore est vrai. Ainsi, on pourra prétendre que, puisqu’on n’a jamais prouvé l’influence du psychisme sur le développement du cancer, il est clair que cette influence n’existe pas. Un sophisme présent dans l’argumentation n’invalide pas une thèse ; cependant, il constitue un argument dont il ne faut pas tenir compte du point de vue de l’argumentation rationnelle. Pour cette raison, il faut savoir le repérer dans le discours : une fois démasqué, il perd en efficacité. Technique habile de manipulation en vue de persuader, le sophisme doit être banni de la discussion philosophique, puisque cette dernière se veut rationnelle et respectueuse de l’autonomie de la raison.
PROPOS DE PHILOSOPHES L’histoire de la philosophie est une longue discussion où les thèses s’opposent et où les arguments se développent et se réfutent. Nous vous proposons quelques textes d’auteurs qui défendent leur opinion. À vous de juger de la force de leurs arguments ou de défendre vos convictions si elles sont différentes des leurs. Dans la section « À votre tour d’argumenter », nous traiterons ces textes à partir d’une question unique: La vie estelle un combat ? Dans cette perspective, nous vous présentons également un texte de Platon sur la nécessité d’obéir aux lois et un appel de Thoreau à la conscience morale que nous mettrons en lien avec la problématique de l’intégration des individus ou des groupes dans la collectivité.
LE PLAISIR : PRINCIPE ET BUT DE LA VIE BIENHEUREUSE
Seul est digne de la vie celui qui chaque jour part pour elle au combat. GOETHE Maximes et réflexions
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Les épicuriens considèrent qu’il faut s’en remettre à la sensation pour guider notre réflexion quant au but de la vie. Or, la sensation nous apprend que le plaisir est un bien et que la douleur est un mal. Cependant, tout n’est pas aussi simple puisque certains plaisirs doivent être différés ou écartés dans la mesure où ils occasionnent une grande douleur. Et cette dernière doit être acceptée dans le cas où l’on peut en attendre un plaisir futur. La maîtrise du désir est donc indispensable afin de maximiser le plaisir de vivre.
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Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est le principe et le but de la vie bienheureuse. C’est lui que nous avons reconnu comme bien premier, né avec la vie. C’est de lui que nous recevons le signal de tout choix et rejet. C’est à lui que nous aboutissons comme règle, en jugeant tout bien d’après son impact sur notre sensibilité. Justement parce qu’il est le bien premier et né avec notre nature, nous ne bondissons pas sur n’importe quel plaisir : il existe beaucoup de plaisirs auxquels nous ne nous arrêtons pas, lorsqu’ils impliquent pour nous une avalanche de difficultés. Nous considérons bien des douleurs comme préférables à des plaisirs, dès lors qu’un plaisir pour nous plus grand doit suivre des souffrances longtemps endurées. Ainsi tout plaisir, par nature, a le bien pour intime parent, sans pour autant devoir être cueilli. Symétriquement, toute espèce de douleur est un mal, sans que toutes les douleurs soient à fuir obligatoirement. C’est à travers la confrontation et l’analyse des avantages et désavantages qu’il convient de se décider à ce propos. Provisoirement, nous réagissons au bien selon les cas comme à un mal, ou inversement au mal comme à un bien. Ainsi, nous considérons l’autosuffisance comme un grand bien: non pour satisfaire à une obsession gratuite de frugalité, mais pour que le minimum, au cas où la profusion ferait défaut, nous satisfasse. Car nous sommes intimement convaincus qu’on trouve d’autant plus d’agréments à l’abondance qu’on y est moins attaché, et que si tout ce qui est naturel est plutôt facile à se procurer, ne l’est pas tout ce qui est vain. Les nourritures savoureusement simples vous régalent aussi bien qu’un ordinaire fastueux, sitôt éradiquée toute la douleur du manque : galette d’orge et eau dispensent un plaisir extrême, dès lors qu’en manque on les porte à sa bouche. L’accoutumance à des régimes simples et sans faste est un facteur de santé, pousse l’être humain au dynamisme dans les activités nécessaires à la vie, nous rend plus aptes à apprécier, à l’occasion, les repas luxueux et, face au sort, nous immunise contre l’inquiétude. Quand nous parlons du plaisir comme d’un but essentiel, nous ne parlons pas des plaisirs du noceur irrécupérable ou de celui qui a la jouissance pour résidence permanente – comme se l’imaginent certaines personnes peu au courant et réticentes, ou victimes d’une fausse interprétation – mais d’en arriver au stade où l’on ne souffre pas du corps et où l’on n’est pas perturbé de l’âme. Car ni les beuveries, ni les festins continuels, ni les jeunes garçons ou les femmes dont on jouit,
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ni la délectation des poissons et de tout ce que peut porter une table fastueuse ne sont à la source de la vie heureuse : c’est ce qui fait la différence avec le raisonnement sobre, lucide, recherchant minutieusement les motifs sur lesquels fonder tout choix et tout rejet, et chassant les croyances à la faveur desquelles la plus grande confusion s’empare de l’âme. ÉPICURE. Lettre à Ménécée.
ACCEPTER CE QUE JE NE PEUX CHANGER
Épicure (~341-~270) Épicure naît à Athènes en ~341. Il enseigne que la recherche du plaisir, celui du corps, est le but de la vie. C’est l’inclination naturelle, et non la volonté, qui nous porte vers le plaisir. Cependant, il appartient à la raison de juger si un plaisir peut entraîner un déplaisir plus grand. C’est aussi grâce à la raison que nous pouvons différencier les plaisirs nécessaires des plaisirs superflus. Il faut aussi comprendre que le plaisir se définit d’abord comme l’absence de douleur et le repos de l’âme.
Les stoïciens croient que la raison humaine doit accepter l’ordre du monde puisqu’elle ne peut le changer. Par contre, un travail sur nousmêmes permet de changer nos représentations et notre perception des choses qui nous arrivent. Sénèque, qui est stoïcien, donne ici un conseil à son ami Lucilius.
Veille à ne jamais rien faire contre ton gré. Tout ce qui est une contrainte pour celui qui regimbe n’est pas une contrainte pour celui qui accepte. Je m’explique : celui qui se soumet de bon cœur aux ordres échappe à la part la plus douloureuse de la servitude : faire ce qu’on ne veut pas. On est à plaindre non pas de recevoir tel ou tel ordre mais de l’exécuter à son corps défendant. Préparons donc notre âme à vouloir tout ce que les circonstances exigeront d’elle et, avant tout, à envisager sans tristesse notre propre fin. SÉNÈQUE (1990). Lettres à Lucilius, extrait de la Lettre LXI (p. 64). Paris, ©Arléa. (Lettres choisies et traduites par Alain Golomb.)
SE LIBÉRER DES TUTEURS Le 18 siècle est appelé le Siècle des Lumières en référence aux lumières de la raison qui nous permettent de comprendre le monde et de nous diriger dans les affaires humaines. Dans le très célèbre texte qui suit, Kant nous rappelle qu’il est difficile de se servir de son propre jugement, car plusieurs obstacles s’y opposent. Cela prend principalement du courage. e
Les lumières se définissent comme la sortie de l’homme hors de l’état de minorité, où il se maintient par sa propre faute. La minorité est l’incapacité de se servir de son entendement sans être dirigé par un autre. Elle est due à notre propre faute quand elle résulte non pas d’un manque d’entendement, mais d’un manque de résolution et de courage pour
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s’en servir sans être dirigé par un autre. Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! Voilà la devise des Lumières. La paresse et la lâcheté sont les causes qui expliquent qu’un si grand nombre d’hommes, alors que la nature les a affranchis depuis longtemps de toute direction étrangère (naturaliter majorennes), restent cependant volontiers, leur vie durant, mineurs ; et qu’il soit si facile à d’autres de se poser comme leurs tuteurs. Il est si commode d’être mineur. Si j’ai un livre qui me tient lieu d’entendement, un directeur qui me tient lieu de conscience, un médecin qui juge de mon régime à ma place, etc., je n’ai pas besoin de me fatiguer moi-même. Je ne suis pas obligé de penser, pourvu que je puisse payer ; d’autres se chargeront pour moi de cette besogne fastidieuse. Que la plupart des hommes finissent par considérer le pas qui conduit à la majorité, et qui est en soi pénible, également comme très dangereux, c’est ce à quoi ne manquent pas de s’employer ces tuteurs qui, par bonté, ont assumé la tâche de veiller sur eux. Après avoir rendu tout d’abord stupide leur bétail domestique, et soigneusement pris garde que ces paisibles créatures ne puissent oser faire le moindre pas hors du parc où ils les ont enfermées, ils leur montrent ensuite le danger qu’il y aurait à essayer de marcher tout seul. Or le danger n’est sans doute pas si grand que cela, étant donné que quelques chutes finiraient bien par leur apprendre à marcher ; mais l’exemple d’un tel accident rend malgré tout timide et fait généralement reculer devant toute autre tentative. EMMANUEL KANT. Réponse à la question « Qu’est-ce que les lumières ? ».
LA LUTTE DES CLASSES Dans l’extrait suivant, nous vous présentons un texte de Marx, cet auteur qui a entrepris de faire une analyse de la société de son temps en décrivant les étapes de son développement et les rouages de son fonctionnement. Il en conclut qu’au cours de l’histoire, les humains se sont regroupés en classes selon la place qu’ils occupaient dans la production des biens. De ces classes, une seule domine et tente d’exploiter les autres. Il faut que les individus membres des classes exploitées prennent conscience de cette réalité et luttent pour mettre fin à leur oppression. Un certain optimisme est présent chez Marx puisqu’il croit que le développement des moyens de production et notre combat contre l’exploitation nous conduiront à une société sans classe, où l’on exigera de chacun selon ses capacités et où l’on donnera à chacun selon ses besoins.
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Emmanuel Kant (17241804) Kant est né en 1724 à Königsberg, en Prusse-Orientale (aujourd’hui Kaliningrad en Russie) et y a vécu toute sa vie, jusqu’à son décès en 1804. Il a été bibliothécaire, précepteur, puis professeur à l’université. Connu pour sa rigueur et sa droiture, il était aussi ordonné dans ses habitudes, à tel point que ses concitoyens réglaient leur montre sur son passage lors de sa promenade quotidienne. Kant est l’un des philosophes les plus influents de la pensée occidentale. Son ouvrage le plus important est la Critique de la raison pure qui examine, entre autres, les limites du pouvoir de la raison.
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ANNEXE 2 RÉDIGER UN TEXTE ARGUMENTATIF La rédaction d’un discours argumentatif comporte plusieurs étapes cruciales : elle consiste à présenter la problématique et à énoncer la thèse dans l’introduction, à annoncer et à élaborer les arguments, les objections et les réfutations dans le développement, et enfin à établir une synthèse et un retour à la thèse dans la conclusion. Il n’est pas exclu que la conclusion fasse état de nuances à apporter à la thèse initiale, la rejette sans suggérer une nouvelle position ou suspende le jugement en raison d’une aporie. Tous les objets de votre réflexion lors de la préparation d’un discours argumentatif n’ont pas à être expliqués ou mentionnés : il faut faire des choix. Votre pensée sera bien servie par un discours clair, vivant et original. Bien que l’analyse préalable soit rigoureuse, le discours doit, sans abandonner cette rigueur, faire preuve de souplesse et même se permettre une certaine fantaisie. Le style appartient à l’auteur : il reflète sa personnalité. Le tableau qui suit vous présente, d’un côté, les étapes à suivre dans la rédaction d’un texte argumentatif et, de l’autre, les éléments de réflexion indispensables à la réalisation de chacune de ces étapes. TABLEAU DE RÉDACTION D’UN TEXTE ARGUMENTATIF RÉDACTION DU TEXTE
TRAVAIL DE RÉFLEXION
INTRODUCTION 1. Exposer le sujet.
1. Expliciter les termes du sujet proposé afin de le comprendre.
2. Dégager la problématique : en soulevant les questions ; en suggérant des pistes de réponse.
2. Dégager la problématique du sujet : en soulevant les questions d’ordre philosophique et en les discutant ; en déterminant les champs de la philosophie dans lesquels elles se situent ; en déterminant les concepts philosophiques utiles à la discussion du sujet ; en explorant des pistes de réflexion.
3. Poser la thèse.
3. Choisir une thèse et formuler l’énoncé de la thèse de façon claire.
4. Définir les termes.
4. Définir les termes qui posent problème et les concepts philosophiques.
5. Souligner les enjeux.
5. Souligner les enjeux : a. reconnaître les problèmes liés à la définition des concepts d’ordre philosophique mis en jeu par la thèse et dégager une définition ; b. réfléchir aux conséquences de la thèse.
6. Annoncer les parties du développement.
6. Faire part de l’ordre qui sera suivi pour l’argumentation, soit annoncer qu’il y aura des arguments, puis des objections qui seront réfutées.
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TRAVAIL DE RÉFLEXION
DÉVELOPPEMENT Les arguments 1. Énoncer chaque argument.
1. Énoncer chaque argument : a. explorer les champs de la philosophie et du savoir qui peuvent fournir les arguments à l’appui de la thèse ; b. déterminer les faits et les valeurs qui serviront de base à l’argumentation ; c. trouver les arguments ; d. formuler chaque argument en un seul énoncé ; e. déterminer s’il s’agit d’un jugement de réalité, de valeur ou de prescription.
2. Développer chaque argument en expliquant, en démontrant et en illustrant l’énoncé.
2. Développer les arguments: a. faire le schéma de l’argumentation ; b. identifier les faits ou les valeurs qui fondent l’énoncé ; c. s’assurer que les arguments sont : rationnels ; pertinents – démontrant la validité de la thèse ; cohérents – conformes à la logique et conduisant à l’acceptation de la thèse ; suffisants en nombre et en qualité afin de convaincre ; d. définir si nécessaire les concepts philosophiques utilisés ; e. rédiger dans un langage clair chacun des arguments de façon à les expliquer, à les illustrer et à démontrer en quoi ils sont valables et soutiennent la thèse ; f. prévenir les objections : en vérifiant les faits et les connaissances qui soutiennent les arguments ; en discutant les valeurs ; en faisant la critique de la pertinence, de la cohérence et de la suffisance des arguments ; en discutant les définitions de concepts philosophiques ; en évaluant les conséquences des arguments.
Les objections 3. Énoncer chaque objection.
3. Énoncer les objections : a. préparer les objections : en imaginant des arguments démontrant l’inadmissibilité de la thèse ; en imaginant des thèses différentes ou contraires à celle que l’on défend et en apportant des arguments à l’appui de ces thèses ; en mettant en lumière des faiblesses apparentes dans ses propres arguments ; b. formuler les objections en un seul énoncé pour chacune.
4. Développer chaque objection en expliquant, en démontrant et en illustrant chaque énoncé.
4. Développer les objections de la même manière que les arguments en faisant le schéma des objections ; en s’assurant que les objections sont rationnelles, pertinentes, cohérentes (conduisant au rejet de la thèse) et suffisantes ; en définissant si nécessaire les concepts philosophiques utilisés ; en rédigeant dans un langage clair chacune des objections de façon à les expliquer, à les illustrer et à démontrer en quoi elles sont valables et contredisent la thèse.
Annexe 2
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RÉDACTION DU TEXTE La réfutation des objections 5. Énoncer la réfutation.
6. Développer l’énoncé en l’expliquant, en le démontrant et en l’illustrant.
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TRAVAIL DE RÉFLEXION
5. Énoncer une réfutation : a. préparer la réfutation en cherchant la faiblesse dans la cohérence, la pertinence et la suffisance de l’objection ; en imaginant une raison de rejeter ce qui est affirmé dans l’objection ; en formulant un argument plus fort que l’objection soutenant une thèse différente ou contraire, afin de revenir à la thèse défendue ; en corrigeant son argument s’il est attaqué avec raison par l’objection ; en défendant la valeur de son argument si l’attaque est mal fondée ; en prévoyant une concession si nécessaire. 6. Développer l’énoncé : en ayant pour but de dévaloriser l’objection ; en plaidant pour un retour à la thèse.
CONCLUSION 1. Rappeler la thèse ou la modification à la thèse s’il y a lieu.
1. Ne rien ajouter à l’argumentation.
2. Faire une synthèse de l’argumentation.
2. Réaliser la synthèse des arguments.
3. Faire une ouverture.
3. Présenter une question qui aurait pu être traitée si la discussion s’était poursuivie ou élargir l’horizon par la suggestion d’un sujet de réflexion en lien avec la thèse.
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