Il y a fort à parier qu’en 2020, de nombreuses petites «Angèle » voient le jour. À l’image d’une Brigitte Bardot dont le prénom fut donné à de nombreux bébés dans les années 60, la chanteuse Angèle Van Laeken connaît un début de carrière fulgurant. En trois ans, elle est passée d’Instagrameuse à phénomène de mode, puis icône. Ses clips en forme de courts métrages sont admirés par des millions de fans, son dernier album, « Brol », s’est vendu à 750 000 exemplaires (plus grosse vente de disques en France en 2019 !) et sa tournée « Brol Tour » a fait le plein jusqu’à l’AccorHotels Arena en février.
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YVES QUITTÉ
Fille et sœur de chanteurs et musiciens (ses parents Laurent Bibot et Marka, son frère Roméo Elvis), la jeune Belge née en 1995 connaît même un succès phénoménal outre-Atlantique. Pianiste émérite, elle sait tout faire. La preuve puisqu’on parle déjà d’elle au cinéma dans le prochain film de Leos Carax, Annette, aux côtés de Marion Cotillard et Adam Driver. Et ce n’est pas tout, puisque Angèle est aussi une auteure-compositrice-interprète complète, douée, libre et engagée… et pas que sur Instagram (bientôt 3 millions d’abonnés), grâce notamment à sa chanson Balance ton quoi considérée comme un hymne féministe pour toute la jeune génération. Parallèlement, elle est également la marraine particulièrement impliquée d’une association luttant contre le cancer pédiatrique. Journaliste, auteur et papa de quatre enfants, Yves Quitté a collaboré à de nombreux titres dans la presse écrite française (VSD, Ici Paris, Gala, Point de Vue). Actuellement rédacteur en chef adjoint de France Dimanche, il est coauteur de Complètement Stone (Robert Laffont), Sébastien Cauet, t’es habillé comme tout le monde mais tu ressembles à personne (Robert Laffont) et de Parents, ados, on se détend ! (Flammarion).
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On l’a vue se produire sur scène avec MC Solaar, elle apparaît sur l’album de Damso et participe à de grands festivals d’été. Sauf en cette année 2020 où, pour cause de confinement, elle a dû se contenter de faire de la musique de chez elle, comme lors du concert Together at home organisé par Lady Gaga où elle a été la seule chanteuse à se produire uniquement en français.
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ISBN 978-2-8289-1853-8
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13/05/2020 16:11
Éditions Favre SA Siège social et bureaux : 29, rue de Bourg – CH-1002 Lausanne Tél. : (+41) 021 312 17 17 – Fax : (+41) 021 320 50 59 lausanne@editionsfavre.com www.editionsfavre.com Groupe Libella Dépôt légal en Suisse en juin 2020. Tous droits réservés pour tous pays. Sauf autorisation expresse, toute reproduction de ce livre, même partielle, par tous procédés, est interdite. Couverture : Sonia Lurienne-Prestataire en solutions éditoriales Mise en pages et graphisme : recto verso, Gletterens Photo de couverture : © Olivier Borde / Bestimage Photos 4e de couverture : Photonews / Bestimage, Dominique Jacovides / Bestimage, Alexandre Fumeron / Bestimage, Cyril Moreau / Bestimage ISBN : 978-2-8289-1853-8 © 2020, Éditions Favre SA, Lausanne, Suisse. Les Éditions Favre bénéficient d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2016-2020.
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Š Photonews/Bestimage
SOMMAIRE
Introduction 7
Chapitre 1
Bruxelles ma belle 11
Chapitre 2
Belle enfant de la balle 15
Chapitre 3
Cachée derrière son piano… 23
Chapitre 4
Démarrage… insta(ntané) 31
Chapitre 5
Succès f(l)ou ! 43
Chapitre 6
Le début du « brol » 53
Chapitre 7
Tout contrôler 61
Chapitre 8
Son Roméo 71
Chapitre 9
Le « phénomène Angèle » 77
Chapitre 10
Sauvée par un virus ? 89
Chapitre 11
Anti-sexisme théorie 95
Chapitre 12
En vert et contre tous ! 105
Chapitre 13
Privée de vie privée… 109
Chapitre 14
Angèle fait son cinéma 117
Chapitre 15
Video « clip » the radio star 131
Chapitre 16
Le rêve américain 145
Chapitre 17
Vous croyiez tout connaître sur Angèle ? 153
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Label Angèle
Il était une fois… Angèle. Comment ne pas démarrer une biographie sur le phénomène musical de ce début de siècle comme un conte de fées ? À l’image de son clip, Balance ton quoi, multidiffusé sur les chaînes européennes et likés par des millions de fans sur YouTube où, sur le premier plan la belle Angèle est grimée en jolie princesse, grandeur nature, que l’on pourrait poser sur une gigantesque pièce montée de mariage. Blonde comme Cendrillon, avec le même sourire gracieux et de grands yeux noisette tout ronds, on lui donnerait le bon dieu sans confession. Mais ne nous fions pas aux apparences, notre somptueuse créature à la Walt Disney n’a rien d’une oie blanche, ce que nous prouve son doigt d’honneur adressé à la caméra, et plus particulièrement aux sexistes de tout bord, à la fin de ce plan. Comme l’indique son titre parodique Balance ton quoi en référence au #balancetonporc, version française de #metoo. Un mouvement auquel la demoiselle est tout particulièrement attachée, n’est-ce pas Pierre Niney ? (Voir le clip pour comprendre cette subtile allusion au jeune acteur français.) Il est donc bien loin le temps des années 60 où il suffisait de disposer d’une jolie frimousse, d’un look sympa et (un peu) original pour faire une carrière fulgurante dans la chanson et avoir sa tête en quatre par trois sur toutes les colonnes Morris de Paris dès le premier 45 tours. Le brin de voix s’arrangeant au fur et à mesure des orchestrations en studio. Soixante ans plus tard, il est une jeune femme de 24 ans qui possède elle aussi une « gueule » et le style, mais qui a en plus la voix, la tchatche, l’ambition, la créativité, le jeu de scène… bref, n’en jetez plus : Angèle a tout ! Et contrairement à ses « aïeules » des sixties, elle ne se contente pas de poser un fragile filet de voix sur des adaptations françaises de tubes anglo-saxons. Outre son minois et son côté girl next door, cette pianiste surdouée se distingue déjà comme auteure-compositrice et interprète ! Juillet 2019. « Armée » d’une kalachnikov gonflable, Angèle enflamme les 5000 spectateurs du festival de Poupet à Saint-Malô-du-Bois en Vendée © Serge Jolivel_ DALLE/DUKAS
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INTRODUCTION
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Personne ne s’y trompe et tout le monde la suit. Elle devant et nous derrière… Ou devant elle. Comme ce 18 février 2020 sur la scène monumentale de l’AccorHotels Arena de Paris (ex-Bercy). Bien malin celui qui pourra établir une moyenne d’âge de son public. À l’image de Tintin, son célèbre compatriote de fiction, Angèle plaît à tous ses contemporains de 7 à 77 ans. Un véritable spectacle familial dont les parents ressortent aussi « emballés » que leurs enfants !
Une icône qui chante pour toutes les causes. Ici aux Solidays de l’hippodrome de Longchamp de Paris (2019) © Lionel Urman/Bestimage
Plus aucun doute n’est permis : Angèle rassemble et fait du bien. À tout le monde. Et quand on dit tout le monde, c’est vraiment tout le monde ! Car son charisme séduit désormais bien au-delà de la chanson et de son public de fans. Le cinéma est déjà sous le charme et comme souvent, le monde du luxe, toujours très fort pour s’approprier les phénomènes de… mode, la compte dorénavant parmi ses égéries. À l’image de la prestigieuse marque Chanel qui, forcément, rime avec Angèle.
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Introduction
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De là à lui prédire une carrière aussi prolifique que Vanessa Paradis, l’une de ses célèbres devancières (et modèle ?), une autre bête de scène et de pub…
© Dior via Bestimage
CACHÉE DERRIÈRE SON PIANO…
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CHAPITRE 3
Avec sa petite bouille et ses joues bien rondes, sa coupe au carré ornée d’une frange de blondinette et sa bouche aux dents de lait irrégulières, on imagine cette petite fille passer plus de temps à jouer à la poupée qu’à refaire ses gammes derrière un piano. Or, dès l’âge de 5 ans, la jeune Angèle, sans doute influencée (ou poussée ?) par ses parents saltimbanques prend ses premiers cours de piano. Elle s’en souvient encore comme si c’était hier, dans Le Parisien, en novembre 2019 : « À 5 ans, j’ai commencé avec une prof de piano à qui j’ai dit : “je veux chanter du Hélène Ségara”. Elle m’a d’abord accompagnée au piano et, petit à petit, m’a laissé jouer. Et c’est resté ma prof jusqu’à mes 18 ans ! » Elle ajoute même dans Télérama en novembre 2018 : « Je dois beaucoup à ma prof de piano qui ne m’imposait pas un enseignement académique. Ainsi qu’à mes parents, qui m’ont De sa chambre de Linkebeek aux plateaux de télévision, toujours le même prodige derrière son piano © Guillaume Gaffiot/ Bestimage
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payé ses cours tous les mercredis pendant treize ans. Le piano a très vite occupé une place centrale. » Et il continue aujourd’hui… Commence alors l’un des « paradoxes Angèle » qui oscille entre jouer et chanter seule ou en public… Car, cela ne saute pas aux yeux lorsqu’on la voit désormais sur scène, mais la jeune Angèle Joséphine Aimée a été longtemps handicapée par une timidité quasiment maladive ! Certes, comme se souviennent ses parents, leur petite tête blonde ne cessait de fredonner à la maison. Mais juste pour elle, en jouant dans sa chambre. Sans doute pour combler les silences. Elle chantait comme d’autres écoutent en permanence de la musique en bruit de fond, presque sans s’en rendre compte. Et surtout des tubes de son idole de jeunesse : « Je suis de la génération streaming et iPod, confie-t-elle dans Télérama. À l’âge de 12 ans, je me faisais des playlists dans lesquelles je mettais des morceaux électro écoutés par ma mère, des groupes anglais genre Clash, qu’adorait mon père, des classiques de jazz vocal, des chansons à la mode chez les gens de mon âge… Mon père ne comprenait pas comment je pouvais écouter un morceau des Beatles, puis un autre d’Hélène Ségara sans me poser la moindre question ! » Dithyrambique sur son icône absolue, elle poursuit dans Le Parisien en novembre 2019 : « Hélène Ségara était une demi-déesse pour moi. Je rêvais que mes parents participent à l’émission de télé “Stars à domicile” pour qu’elle débarque chez nous ! » Sur l’une des nombreuses vidéos familiales qu’elle a mises en ligne, on la découvre en contre-plongée, sans doute filmée par son papa, en train de chanter avec émotion Il y a trop de gens qui t’aiment, le tube absolu de sa divinité de la chanson sur terre. Aussi, inutile de préciser que l’un des plus beaux tweets qu’elle ait jamais reçus, une fois devenue célèbre, soit provenu de l’interprète d’Esmeralda dans « Notre Dame de Paris » : « Hélène Ségara avait twitté : “elle me chante si bien”, pour moi, c’était la consécration ! », clame-t-elle encore fièrement dans une interview citée dans ELLE, avec sans doute encore des frissons lui parcourant les avant-bras. Seulement, comme elle l’a dit, toute petite déjà, la gamine possède des goûts très éclectiques. À l’instar de ses parents, elle 14 février 2020. Angèle reçoit une Victoire de la Musique pour son « Brol Tour » sacré concert de l’année © Cyril Moreau/Bestimage
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ne possède pas vraiment d’esprit de chapelle. Aussi chante-t-elle à tue-tête tous les morceaux qu’elle attrape sur internet ou à la radio : d’Amy Winehouse à France Gall en passant par Stromae, son modèle belge. Baignant dans un univers familial artistique, cela lui semble naturel : « Enfant, j’ai toujours été habituée à l’art, la musique et le monde du spectacle en fait », témoigne-t-elle dans une vidéo qu’Instagram lui consacre. La musique, le chant et la danse ont toujours fait partie de sa vie. « Tenez, la semaine dernière, se souvient-elle encore dans Marie-Claire en 2019, j’étais chez mes parents, un dimanche soir. Mon père a passé de la salsa. Et quand nous avons accueilli leurs amis, nous étions tous en train de danser en pyjama. Un classique ! » Seulement, si Angèle trouve naturel de chanter partout dans la maison durant son enfance, cela l’est beaucoup moins en public, devant les autres. Même des proches. Car la petite possède déjà un joli brin de voix et ses experts de parents ne tardent pas à le pressentir. Mais ils demeurent impuissants face au mur de timidité dressé par leur cadette. Elle explique dans Télérama, en novembre 2018 : « Quand j’étais petite, les gens pensaient que j’aimais forcément chanter en public, à cause de mon père. Comme si un fils d’avocat rêve forcément de défendre ses copains dans la cour de récré… J’en ai fait un blocage. Même avec ma mère. Quand je chantais, c’était toujours seule. Pour m’entendre, ma mère avait trouvé un truc : elle laissait son téléphone en douce dans ma chambre, en mode enregistrement… Finalement, j’ai chanté pour la première fois en public l’année du bac, avec une copine, pour un concert à l’école. Le fait d’être deux m’a débloquée ! » « J’avais une sorte de privilège qui créait pourtant un paradoxe chez moi. Du coup, j’ai joué profil bas longtemps. Mes parents, mes proches m’ont entendue chanter tard », ajoute-t-elle dans Grazia en 2019, avant de témoigner encore dans Paris-Match : « Jouer du classique pour faire plaisir aux grands-parents, pas de problème. Mais chanter aux repas de famille était ma phobie. C’est pour ça que j’aimais tant le piano. Je pouvais faire de la musique sans que le son vienne directement de moi. » Il est vrai aussi qu’avant le bac, une fois sortie du cocon familial, la jeune Angèle n’évolue pas forcément dans un univers l’incitant à devenir la plus grande des extraverties. Car c’est dans une institution « hyper catho » que les parents Van Laeken placent
leurs deux rejetons : « Il s’agissait d’un collège hyper fermé alors qu’on avait grandi dans un esprit très libertaire, hyper élitiste alors que nous n’étions pas particulièrement riches, hyper catholique alors que la famille était athée », déplore la chanteuse dans Psychologies Magazine en juillet 2019. Mais ni elle ni Roméo ne s’épanouissent dans cette école et leurs parents finissent par s’en apercevoir. Aussi, après le collège très strict, Angèle intègre l’école Decroly à Uccle où l’on privilégie le « développement de l’enfant au sein de nos sociétés contemporaines », comme il est inscrit sur la plaquette de présentation et où elle peut étudier à loisir la musique et les arts. Enfin une école où la jeune mélomane se trouve à son aise ! Alors, si elle continue à souffrir d’une certaine timidité, c’est comme si sa personnalité se transformait quand il s’agissait d’organiser un spectacle : « J’étais timide, mais dès qu’il s’agissait d’être sur scène, pour un spectacle de fin d’année par exemple, j’y allais à fond » (Grazia). Le côté « bête de scène », qui est un marqueur génétique dans cette famille, se devine déjà chez la petite Van Laeken. Ainsi, sur une autre vidéo amateure, on la découvre en train de chanter Comment te dire ?, l’un des tubes de Marka, sur la scène des Francofolies de Spa, aux côtés de son père et de son groupe. Elle n’a alors que 9 ans ! Autant de paradoxes qui expliquent peut-être pourquoi la jeune fille envisageait de poursuivre des études… de psy ? « En fait, je n’avais pas l’intention de faire de la musique. Je voulais suivre des études de psychologie » (Le Parisien, novembre 2019). À vrai dire, l’adolescente qu’elle est devenue n’est pas encore fixée. Et comme beaucoup d’ados, elle se cherche et n’est pas forcément très bien dans sa peau comme elle l’a expliqué plus tard dans une interview du magazine ELLE : « J’étais très impatiente de devenir une femme. Mais je faisais partie des gens un peu en retard. C’était une grande frustration et ça m’a laissée un peu enfant. Jusqu’à ce que j’aie mes règles et que j’en sois complètement traumatisée. Ma mère est beaucoup moins angoissée et stressée que moi et elle ne m’avait pas prévenue. Du coup ça m’a fait un choc. Avoir attendu ses règles toutes ces années et flipper en les ayant… » Ce mal-être et ces angoisses rejaillissent forcément sur sa scolarité qui n’est pas des plus rectilignes. Et pourtant, en plus de la musique et de la psychologie, Angèle a plein d’autres
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Cachée derrière son piano…
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envies. Ainsi, l’histoire et l’anthropologie la passionnent également. Mais un autre handicap de taille se dresse sur sa route car tous ces beaux métiers nécessitent « trop d’études », rigolet-elle encore dans Paris-Match. En effet, si la jeune Belge possède un indéniable talent pour les domaines artistiques, elle a moins d’appétence pour les études dites « sérieuses » et plus classiques. Aussi pense-t-elle même un temps à travailler dans la mode. Mais sa passion pour la musique et les arts en général revient toujours comme un leitmotiv. Difficile aussi d’y échapper entre un père et un frère chanteurs à succès outre-Quiévrain. Ainsi, vers l’âge de 16 ans, son père lui paye une « session studio pour qu’elle aille enregistrer » (Le Parisien). « J’étais là, avec elle, et j’écoutais mais je ne disais rien », se souvient encore papa Marka. On sent cependant qu’il commence à imaginer que sa fille pourrait en faire son métier… À ce propos, deux versions s’opposent plus ou moins selon les interviews ; ainsi, d’après un entretien issu du Parisien, il semblerait que ce soit plutôt sa mère, Laurence, qui ait été décisive quant au choix de son avenir professionnel : « C’était ma dernière année de lycée. J’étais avec ma mère, nous réfléchissions à l’avenir et je pleurais comme si c’était la fin du monde, me demandant ce que j’allais faire de ma vie. Pour m’aider, maman m’a demandé ce que j’aimais faire. J’ai dit : de la musique. Ce n’était pas plus compliqué. » Et d’ajouter dans Tsugi, un mensuel indépendant sur les nouvelles tendances musicales : « Tous mes amis étaient en train de galérer pour essayer de prouver à leurs parents que c’était bien de se lancer dans l’art. Moi c’est ma mère qui me poussait, alors que j’étais à deux doigts de partir en psycho ou en histoire par défaut. » Et un peu plus loin, dans l’interview du Parisien, on s’aperçoit que le consensus familial est de mise et que les deux parents étaient finalement sur la même longueur d’onde : « Mes parents m’ont dit : “tu ne vas quand même pas faire d’études, fais de la musique ! Tu aimes faire du piano, commence par ça !” » Alors qu’elle doutait de son avenir, il n’en faut pas plus pour que la jeune adolescente se lance dans le grand bain et tente de braver sa timidité. C’est ainsi qu’elle coupe le cordon et quitte le foyer familial en s’inscrivant dans une école de jazz à Anvers, située à 66 kilomètres d’Uccle. Mais dans la famille Van Laeken, c’est aussi l’école de la débrouille. Car cela coûte cher et il faut
donc que l’étudiante contribue à l’investissement. Aussi se faitelle engager en même temps dans un bar comme serveuse. Un établissement où tout le monde joue de la musique. « Je composais déjà quelques chansons. Mais je ne pensais pas que tout cela pouvait vivre hors de ma chambre », se remémore-t-elle dans Paris-Match en janvier 2019. Seulement, l’adolescente indécise ne va pas au bout de ses engagements : « J’ai arrêté l’école de jazz au milieu de la deuxième année parce que j’avais l’impression de ne plus apprendre. Et j’ai quitté mon job parce que le patron essayait de m’arnaquer », regrette-t-elle, toujours dans le même hebdomadaire. Son père la rattrape alors au vol et saisit l’occasion pour l’intégrer dans sa propre tournée comme claviste et chœur ! « D’après moi, y a rien de mieux que de jouer sur scène », confirme son père. Aussi, pour leur plus grand bonheur commun, père et fille jouent ensemble pendant une année de tournée. « Et puis on verra. » Finalement, Marka a bien vu car l’ado rebelle a encore quitté le navire avant la fin : « Elle n’a pas fini la tournée et on s’est un peu fâchés », glisse-t-il dans un demi-sourire. L’entente n’était peut-être pas si harmonieuse qu’il l’aurait souhaité. « Mon père me parlait beaucoup de son métier lorsque je jouais du piano sur sa tournée, mais comme c’est mon père, j’écoutais à moitié », rigole la « vilaine » fille dans une interview citée dans le magazine ELLE. Une fille enfin sûre d’elle aussi qui confesse à son mentor de père qu’elle veut se lancer « toute seule » ! « Franchement je ne comprenais pas. J’avais peur pour elle ! », conclut Marka au Parisien. Mis devant le fait accompli, le paternel n’a pas d’autre choix que d’accepter la décision de sa fille. « Je pouvais juste lui dire : “au revoir” », témoigne-t-il encore avec nostalgie. Mi-fier, mi-ému. Comme un père. Seulement, sa petite chérie est encore très jeune. Qui plus est, il ne comprend pas très bien ce qu’elle traficote dans sa chambre à chanter derrière son piano en se filmant continuellement au téléphone…
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Cachée derrière son piano…
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En novembre 2018, pour sa 11e édition, le festival Sonic Visions de Esch-sur-Alzette accueille les deux stars tendance de la scène francophone : Eddy de Pretto et Angèle.
Premier concert sur une scène parisienne.
ANTI-SEXISME THÉORIE « Les meufs sont en train de niquer le game ! » C’est par ces mots que certains, selon l’âge, trouveront très crus ou très actuels, qu’Angèle reçoit, en larmes, le prix dans la catégorie « Artiste Féminine Francophone » aux NRJ Music Awards de novembre 2019. Une punch-line de plus dont elle concédera humblement deux mois plus tard, face à Yann Barthès, qu’elle n’a pas dû « être la seule à dire ça ». Puis, comme pour s’excuser timidement, elle ajoute : « C’était peut-être un peu violent, dit sous le coup de l’émotion. Mais on sent un truc de fort en ce moment. Et même un vrai soutien entre artistes féminines, même si c’est bizarre d’avoir une catégorie à part. Je voulais les remercier en disant ça. » À l’image de la question récurrente de son succès fulgurant, il n’est pas une interview non plus sans qu’on lui demande son avis sur l’avancée du féminisme depuis l’avènement du mouvement #metoo. Il est vrai que la belle l’a bien cherché avec son clip de Balance ton quoi, en référence évidemment au « #balancetonporc », un peu plus franco… de port. Avec la petite saynète de fin hilarante, dans laquelle joue Pierre Niney perdu dans l’« Anti-Sexism Academy », Angèle ne démontre pas seulement ses talents naturels de comédienne mais aussi son côté porte-drapeau anti- harcèlement : « Quand c’est non, c’est non ! » Cependant, une fois n’est pas coutume, la jeune artiste semble surprise par la vague qu’elle a elle-même déclenchée. Comme le sujet, très tendance, passionne au plus haut point tous les médias, elle se défend presque à chaque fois d’être l’étendard de ce mouvement grandissant : « Je ne peux pas être la porte-parole de toutes les femmes, je peux juste être une des figures du féminisme, et d’ailleurs malgré moi », balance-t-elle dans Madame Figaro. Avant d’analyser plus avant : « Quelques mois après la sortie de l’album, je me suis dit que le morceau Balance ton quoi devenait malgré moi politique alors que j’avais écrit un état des lieux, un truc que je vivais en tant que jeune fille, dans la rue, au travail, n’importe où. »
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Sans imaginer un seul instant qu’Angèle serait trop jeune pour se forger, seule, ses convictions, elle reconnaît volontiers qu’une personne a développé chez elle cette conscience féministe, à savoir : Charlotte Abramov. La réalisatrice de ses premiers clips devenue une fidèle compagne de route. « Une artiste qui m’a bien accompagnée. Une vraie partenaire pour tout l’album et notamment sur Balance ton quoi. Elle a eu un regard extérieur qui m’a beaucoup aidée », reconnaît Angèle lors de la sortie de « Brol ». En fait, comme le note Le Soir Mag en novembre 2018, « c’est sur les réseaux sociaux qu’Angèle repère le travail particulier de Charlotte ». Cette dernière est née à Bruxelles en 1993. À 16 ans, elle fait une rencontre décisive en la personne du grand photographe de mode Paolo Roversi. Celui-ci la convainc alors d’en faire son métier. Trois ans plus tard, Charlotte suit les cours aux Gobelins, la grande école parisienne de l’image, avant de faire carrière dans la capitale française. En charge des visuels d’Angèle, elle fait ses premiers pas en tant que réalisatrice de clips avec La loi de Murphy et Je veux tes yeux, avant de publier le livre de photos et textes Maurice. Tristesse et rigolade, consacré à son père. Angèle ne s’en cache pas, avec Ophélie Secq, sa maquilleuse, Charlotte exerce une certaine influence sur elle. « Elles m’en apprennent tous les jours ! », dit d’elles la chanteuse. « Elles sont très féministes et elles font office de grandes sœurs », rajoute-t-elle sur France Inter. « Elles m’ont beaucoup appris sur ce combat qui est sérieux. Mais j’ai plein de choses à apprendre là-dessus. C’est donc rigolo d’être devenue moi-même une icône de ce combat alors que je suis moi-même en phase d’apprentissage. » Lors de cet entretien sur la station phare de Radio France, on ne peut plus arrêter Angèle sur le sujet du féminisme en ce mois de janvier 2020. Comme si finalement, elle assumait de plus en plus d’en être l’une des porte-parole. Jugez plutôt : « Quand j’ai écrit Balance ton quoi il y a deux ans, c’était très naïf en fait. Cela partait juste du sentiment de partager que lorsque l’on est une femme, une fille, on grandit avec une vulnérabilité que les hommes ne peuvent pas comprendre ; mais on ne peut pas les blâmer non plus car malheureusement c’est comme ça. Mais je me rendais compte que cette crainte que j’avais dans « Balance ton quoi », « #metoo », « #balancetonporc », mêmes combats… féministes © Eklectique/DALLE/DUKAS
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Anti-sexisme théorie
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les transports ou dans la rue, c’était un poids que je partageais avec la majorité des femmes qui m’entourent. J’ai donc écrit juste après cette sorte de délivrance que « #metoo » et « balancetonporc » ont apportée. Mais j’ai écrit cette chanson sans connaître vraiment grand-chose au combat du féminisme, de manière extrêmement naïve. Sincère… mais léger. » BALANCE TON QUOI
© Warner Chappell Music France
Deux ans après l’écriture de ce texte et sans doute aussi à force d’en parler, Angèle mesure un peu plus la gravité du sujet. Toujours sur France Inter : « En fait c’est très complexe car le féminisme englobe énormément de combats. J’ai appris pas mal de choses par rapport à ma position. J’ai appris que je suis une femme qui a des privilèges ; aussi, je ne veux pas porter le combat du féminisme seule. Non pas parce que j’ai peur mais je pense que beaucoup de femmes portent le féminisme avec plein d’autres combats que moi je n’ai pas à vivre. Je ne me vois pas être porte-drapeau du féminisme alors que j’occupe une place super confortable. Du coup je me suis intéressée à plein d’autrices qui m’ont complètement ouvert l’esprit. Notamment Virginie Despentes. À 16 ans, ma mère m’avait donné à lire King Kong théorie mais je n’avais rien compris à l’époque. Et puis, il y a peu de temps, je l’ai relu deux fois avec d’autres ouvrages, dont des BD, des livres historiques, etc. Aussi, quand on commence à s’y intéresser on se rend compte qu’il y a beaucoup de chemin. » Oui mais qui sait si, sur cette question sensible du féminisme, elle en a déjà tracé sa propre route justement ! Notamment depuis sa participation à la tournée de Damso, qui n’est pas réputé pour être le meilleur apologiste de la cause féministe… loin de là ! Une proximité avec le rappeur que certains médias n’ont pas hésité à lui reprocher, récemment, alors que le prénom
de la chanteuse est désormais associé à ce beau et légitime combat. Ainsi, dans le magazine Sept à Huit diffusé sur TF1 le dimanche 25 août 2019, Angèle est revenue sur cette collaboration avec William Kalubi dit « Damso » dont les paroles souvent violentes et sexistes suscitent de grandes polémiques en Belgique. Elle reconnaît qu’à l’époque elle s’était longuement interrogée sur cette opportunité. Et finalement, si elle l’avait acceptée c’était aussi pour mettre en avant sa posture contradictoire : « Bien sûr, j’y ai pensé, bien sûr je me suis demandé : “Est-ce que j’ai ma place là ? Est-ce que je cautionne ses textes ?” Et puis je me suis dit, arriver en première partie seule sur scène avec mes chansons, j’avais un peu l’impression d’aller sur le terrain ! Je me suis dit que j’allais être face à des mecs qui ne savent peut-être même pas ce qu’est le féminisme. Arriver moi, en tant que jeune fille toute seule, c’était une manière de me dire “Moi aussi j’ai des c***lles et je suis là !” » Aura-t-elle convaincu ? Rien n’est moins certain. Mais peut-on mettre tout le monde d’accord ? Déjà, il faut bien imaginer que ce fut un combat de tous les instants pour elle durant cette tournée. Avec le chanteur belgo-congolais notamment : « Il sait très bien ce que je pense de ses textes », martèle encore Angèle, « mais on ne peut pas demander du jour au lendemain à un rappeur qui a ses codes de changer »… Espérons seulement qu’elle a fait naître chez lui un début de prise de conscience… De là à le faire participer aux manifestations en faveur de la Journée de la Femme, comme celle du 8 mars 2020, il y a un pas de géant à effectuer ! L’Europe n’est pas encore confinée et la moitié du genre humain peut encore manifester dehors pour crier haut et fort contre tous les abus d’ordre sexiste. La vague #metoo n’a pas encore atteint son creux ni son pic. C’est juste un flux, une marée montante, lente et régulière, qui n’a pas besoin d’aller aussi vite qu’un « cheval au galop », comme en baie du Mont-Saint-Michel, pour démontrer sa triste réalité désormais tangible. Parmi les milliers de manifestantes bravant la pluie et s’élançant dès 14 heures de la place d’Italie, à Paris, se cache une jeune femme sous un bonnet et un foulard, un peu façon Ninja. Sur le couvre-chef vissé sur la tête est inscrit : « MAKE WOMEN SAFE AGAIN ! » Alors que le tee-shirt dénonce : « Les femmes
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ont plus besoin de dormir que les hommes car le combat contre le patriarcat est épuisant ». Et enfin sur son foulard lui masquant la bouche, comme une bannière qui la prémunirait contre un virus mâle, est affiché : « non c’est non ». Une référence à la chanson Balance ton quoi, considérée désormais comme un hymne féministe pour toute la jeune génération. Car évidemment, vous l’aurez bien compris, la jeune fille « masquée » n’est autre qu’Angèle ! À l’instar de ses consœurs d’un jour, dont sa manageuse, Sylvie Farr qui l’accompagne, elle lance à la volée tous les slogans en vogue : « Vous n’aurez plus jamais notre silence ! », « Les hommes tuent plus que le coronavirus ! », « Égalité de salaire, moins de paroles en l’air ! », « Ovaire et contre tous ! », etc. Et durant cette journée, on ne fait pas que marcher, on danse aussi. Sur des chansons de Beyoncé, Cindy Lauper et… Angèle ! Balance ton quoi passe en boucle. Forcément. Assez rapidement, la jeune Belge au survêtement couleur lilas est repérée par les journalistes couvrant l’événement. Là aussi, les micros se tendent. La star de 24 ans n’a alors d’autre choix que d’ôter son masque et prendre la parole dans un discours désormais bien rodé : « C’est bien joli de faire des chansons dans lesquelles je parle de féminisme mais c’est aussi important pour moi d’être présente aujourd’hui et pas juste en tant que personne publique mais aussi pour moi, en tant que femme. Je suis hyper touchée d’entendre qu’on chante mes chansons. Et si je me suis autant intéressée à cette cause, c’est parce que je me suis rendu compte que j’avais un certain nombre de privilèges qui faisaient que j’étais plus écoutée »… Et, toujours honnête, la chanteuse avoue aussi dans ParisMatch qu’elle n’a « pas souffert du sexisme ordinaire autant que d’autres ». Mais désormais, elle le constate « dans toutes les classes sociales, toutes générations confondues. Il est temps qu’on comprenne que les femmes sont égales aux hommes ! » C’est pour cela que dans Télérama, quelques mois plus tôt, elle se voulait encore plus à la pointe du combat. À la question de savoir si elle se sent féministe ? On la sent presque offusquée derrière son « évidemment ! » D’après elle, « l’égalité hommesfemmes est une évidence. Dans le monde musical, je sens un sexisme encore très fort. Notamment du côté des médias. La femme est toujours ramenée à son physique. Qu’il soit flatteur ou pas, il la définit ! Et puis je réalise que beaucoup n’ont pas encore intégré qu’une jeune femme comme moi pouvait écrire,
composer et produire seule ses chansons. Quand je fais la bêtise d’aller me balader dans les commentaires YouTube, je lis des choses du genre “quelqu’un d’autre écrit tout pour elle !”. On n’est pas sorti du sexisme ordinaire et assumé. » Avant de terminer par cet aveu : « Ça me blesse ». Comme beaucoup de femmes, Angèle souffrirait-elle du « syndrome d’imposture » ? Un phénomène étudié dans les années 70 par Pauline Rise Clance et Suzanne Imes, deux psychologues américaines qui désignent « une difficulté à se valoriser et à reconnaître son mérite personnel ». Une sorte de paroxysme du manque de confiance en soi car ces personnes touchées pensent qu’elles ont « réussi grâce à la chance, à la sympathie des autres ou à une erreur de casting, et qu’elles peuvent à tout moment être démasquées », comme l’explique Elisabeth Cadoche et Anne de Montarlot dans un ouvrage récent et très intéressant sur la question (Le syndrome d’imposture, Les Arènes). Nul doute qu’Angèle, qui avait pensé un temps étudier la psycho, s’est déjà interrogée sur la question. Comme elle l’avait fait pour Télérama en novembre 2018, repris par Grazia : « Je me dis que je ne mérite pas tout ça. C’est mon grand problème ! Rien que le quotidien de ce métier : quand je me retrouve à chanter dans de trop bonnes conditions, je me dis que je ne le mérite pas, que certains travaillent toute leur vie et n’en ont pas autant. Mon frère fait de la musique depuis bientôt dix ans, il a grandi tout seul. Et moi, en un an, j’arrive à remplir les mêmes salles que lui. Évidemment, ce n’est pas comparable. Ma musique peut passer à la radio plus facilement que la sienne, donc fatalement, les portes s’ouvrent plus vite. Mais quand même, je ne peux pas me défaire d’une forme de culpabilité. » Il n’empêche que, même encore maintenant, même après une telle réussite, Angèle doit toujours mettre en avant sa légitimité en tant que femme dans ce milieu : « Les mecs veulent tout le temps m’apprendre mon métier », avait-elle lâché sur le site Trends. Le combat n’est donc pas fini… Mais déjà, elle peut être très fière d’avoir sensibilisé les jeunes générations au fléau du sexisme : « Des filles et des garçons me disent : “on l’écoute tous à l’école !” » Elle, à leur âge, essayait de lire Despentes, sa déesse du féminisme. Elle aussi a lu la chronique de la romancière dans Libération : « On se lève, on se casse, on gueule », qu’elle a
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artagée sur Insta, suite à la très houleuse cérémonie des Césars p de février 2020… Toujours est-il qu’en plein confinement, invitée à distance de Quotidien sur TMC, elle a de nouveau brandi son ouvrage de chevet, King Kong théorie, lorsque Yann Barthès lui a demandé ce qu’elle lisait en ce moment. Preuve que le combat n’est vraiment pas fini et que, même recluse, il ne faut pas oublier que le mot « artiste » est de genre neutre et se décline aussi bien au masculin qu’au féminin…
Livre de chevet et pamphlet féministe transmis de mère en fille.
Ni short ni jupette de tennis, mais un chaps de cuir lors du mini-concert commercial de l’Etam Live Show à RolandGarros ! © Rachid Bellak/Bestimage
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Journée de la femme du 8 mars 2020 : ou quand les slogans du clip de Balance ton quoi sont repris par les manifestant(e)s en plein Paris ! © Stéphane Lemouton/Bestimage
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Vous croyiez tout connaître sur Angèle ?
Catapultée pop star en moins de trois ans ! La tête dans les nuages mais les pieds bien sur terre… © Alexandre Fumeron/Bestimage
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EXTRAIT d'un livre paru aux Éditions Favre.
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