Kurt Hostettmann, docteur en chimie, est professeur honoraire aux Universités de Genève, Lausanne, Nanjing, Shandong et à l’Académie chinoise des sciences à Shanghai. Spécialisé dans les plantes médicinales et phytomédicaments, il jouit d’une renommée internationale et a reçu en septembre 2014 la médaille d’or Egon Stahl de la Society for Medicinal Plant and Natural Product Research pour ses remarquables travaux en pharmacognosie et en phytothérapie. Il est l’auteur de plus de six cents publications et d’une vingtaine de livres, dont certains ont été traduits en japonais, chinois, indonésien, farsi, espagnol et portugais.
ISBN 978-2-8289-1759-3
9 782828 917593
Dr K. Hostettmann
La flore d’altitude est particulièrement riche en espèces les plus diverses. Celle des Alpes nous révèle souvent des fleurs magnifiques aux couleurs très vives. Mais derrière leur beauté se cachent aussi des propriétés thérapeutiques remarquables ou des poisons violents : les plantes peuvent guérir ou tuer ! Pour leur survie dans des conditions extrêmes en très haute altitude, les plantes élaborent des substances de défense contre les grands froids, les vents, la sécheresse et le rayonnement UV , dont l’homme a pu tirer avantage. On trouvera dans la première partie de ce livre une sélection de plantes médicinales des montagnes et on apprendra comment les utiliser : des conseils pratiques sont donnés, qui vont de la préparation des tisanes au mode d’action pharmacologique et aux mises en garde en cas d’effets secondaires ou d’interactions médicamenteuses. La seconde partie présente quelques plantes toxiques aux très belles fleurs ou aux fruits alléchants qui peuvent induire des intoxications graves. Les symptômes sont clairement décrits, ainsi que les mesures à prendre. En cas d’intoxication, on appellera le 112 en Suisse et dans l’Union européenne. Ce guide scientifique, illustré de belles photos, rapporte aussi de nombreuses anecdotes historiques qui rendent sa lecture agréable. Accessible et utile, il s’adresse à toutes les personnes qui aiment la nature et qui voudraient utiliser le potentiel gigantesque des plantes pour améliorer leur qualité de vie. Il plaira aussi à ceux qui aiment faire des promenades en montagne et qui découvriront peut-être au bord d’un sentier une plante dont ils ne soupçonnaient pas le potentiel…
Plantes médcinales et plantes toxiques des Alpes
Plantes médicinales et plantes toxiques des Alpes
Dr Kurt Hostettmann
Plantes médicinales et plantes toxiques des Alpes Les reconnaître, les utiliser correctement, ne pas les confondre
Dr K. Hostettmann
Plantes médicinales et plantes toxiques des Alpes Les reconnaître, les utiliser correctement, ne pas les confondre
, 2014
Éditions Favre SA 29, rue de Bourg CH – 1002 Lausanne Tél. : +41 21 312 17 17 Fax : +41 21 320 50 59 lausanne@editionsfavre.com Adresse à Paris 7, rue des Canettes F – 75006 Paris Dépôt légal en Suisse en juin 2019. Tous droits réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par tous procédés, y compris la photocopie, est interdite. Photos : Kurt Hostettmann, sauf indications contraires. Montage : Jean-Daniel Pellet ISBN : 978-2-8289-1759-3 © 2019, Éditions Favre SA, Lausanne Les Éditions Favre bénéficient d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2016-2020.
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Sommaire Plantes médicinales
Plantes toxiques
L’absinthe 8 15 L’achillée millefeuille L’airelle 19 L’alchémille 22 L’argousier 25 L’arnica 29 La bistorte 33 Le bouillon blanc (molène) 36 39 Le droséra L’edelweiss 42 L’églantier 46 L’épilobe 51 L’euphraise 55 Le génépi 58 61 Les gentianes L’impératoire 70 73 La myrtille L’orpin rose (rhodiole) 81 Le pétasite 87 Le raisin d’ours 91 La reine-des-prés et le saule 94 La sarriette des montagnes 98 Le sorbier 101 Le sureau 104 La verge d’or 108
L’aconit 114 117 La berce du Caucase Le bois-gentil 121 Les chèvrefeuilles 124 Le colchique d’automne 128 La digitale 132 La jonquille et le narcisse 136 Le rhododendron 139 145 Le vératre
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AVANT-PROPOS
L
A FLORE D’ALTITUDE est l’une des plus fascinantes et compte une grande diversité d’espèces. Les fleurs, souvent de couleurs intenses et très lumineuses, ne nous laissent pas indifférents : elles nous attirent par leur beauté. Le bleu de certaines gentianes est simplement sublime ! Les gentianes sont, avec l’edelweiss et le rhododendron, les plantes emblématiques des Alpes. On y trouve une trentaine de gentianes différentes et pas seulement de couleur bleue, mais aussi de couleur pourpre, jaune ou encore mauve. L’edelweiss, originaire de l’Himalaya, ne compte qu’une espèce, tandis que le rhododendron (rose des Alpes) en compte deux. Les plantes des montagnes poussent dans des conditions climatiques extrêmes selon l’altitude : grands froids avec sols gelés pendant plusieurs mois, neige, vents violents et exposition à une lumière UV très intense. Elles ont su s’adapter à ces conditions en synthétisant des constituants pour se protéger. Par exemple, ces espèces contiennent beaucoup d’antioxydants et des capteurs de radicaux libres pour résister à la radiation UV intense. Ces substances peuvent aussi servir à l’homme. Ainsi, par exemple, l’edelweiss riche en antioxydants sert à la préparation de produits cosmétiques et dermatologiques pour ralentir le vieillissement de la peau. Les fleurs sont aussi utilisées sous forme d’infusions pour lutter contre les diarrhées et bronchites. Les gentianes, riches en polyphénols et en substances amères entrent dans la composition de produits cosmétiques et leurs racines amères améliorent la digestion. Quant aux rhododendrons, malgré leur beauté, ils sont classés dans les plantes toxiques à cause de la présence d’une substance qui peut
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abaisser subitement la tension artérielle. On retrouve parfois cette substance dans les miels de la rose des Alpes qui peut poser problème aux personnes souffrant d’hypotension. Dans le présent ouvrage, les principales plantes des Alpes utilisées en médecine traditionnelle ou ayant conduit déjà à des médicaments enregistrés seront présentées par leurs aspects botaniques, phytochimiques et pharmacologiques. Des conseils pratiques seront donnés afin de ne pas les confondre avec d’autres espèces toxiques ou non toxiques. Il faut aussi savoir les utiliser correctement pour traiter une pathologie donnée, soit en usage interne ou en usage externe. Des recettes pour préparer des tisanes, décoctions, huiles, teintures mères et autres seront expliquées avec leurs modes d’utilisation. Des effets secondaires éventuels ou des interactions avec d’autres médicaments seront indiqués. Les plantes bénéfiques pour la santé sont nombreuses. Cependant, les montagnes recèlent aussi passablement d’espèces toxiques qui causent surtout des troubles gastro-intestinaux et autres désagréments, mais un nombre restreint de plantes peuvent même induire une intoxication mortelle. Gare aux pièges : les très belles plantes sont souvent les plus dangereuses ! L’aconit napel avec ses superbes fleurs bleues en forme de casque de Jupiter peut conduire à la mort ! Par ailleurs, en très faibles doses (homéo pathie, spagyrie), elle devient un médicament pour lutter contre les troubles circulatoires. Malgré son nom de bois-gentil, cette plantes aux fleurs roses qui dégagent une odeur agréable, proche de celle du lilas, et aux jolies baies rouges, est très dangereuse ! Les principales plantes toxiques des Alpes seront décrites avec des indications pour les reconnaître facilement. Les circonstances d’une intoxication, les symptômes, les mesures à prendre et les premiers secours seront clairement indiqués.
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Les montagnes représentent un immense réservoir de plantes médicinales pour soulager les affections les plus diverses… à condition de les utiliser correctement ! Il faut aussi savoir éviter les plantes toxiques que l’on trouve dans nos montagnes. Ce livre présente une sélection de plantes et pas une liste exhaustive de toutes les espèces bénéfiques ou toxiques. Les plantes sont classées par l’index alphabétique de leur nom vernaculaire français. Mais on peut aussi les retrouver par leur nom latin dans l’index. Ce guide pratique, illustré par des photographies en couleurs de chaque plante traitée, s’adresse au grand public, mais également aux professionnels de la santé. Un outil utile pour toutes les personnes désireuses de connaître les plantes qu’elles rencontrent lors de promenades et d’excursions dans le massif alpin. L’auteur tient à remercier la Loterie Romande, son président M. Jean-René Fournier et M. Jean-Maurice Tornay, président de la délégation valaisanne, ainsi que M. Daniel Monnin, président de la Conférence des présidents des organes de répartition, pour leurs encouragements et pour le soutien financier accordé à la production de ce livre. Il remercie aussi son épouse Maryse, très malade, pour ses conseils et sa patience, malgré le fait qu’il l’a délaissée un peu pendant la rédaction du manuscrit. Champex-Lac, mai 2019 Dr Kurt Hostettmann Professeur honoraire aux Universités de Genève et de Lausanne
Cette publication a bénéficié du soutien de la Loterie Romande. L’éditeur se joint aux remerciements de l’auteur.
Plantes médicinales
© Jean-Daniel Pellet
Plantes médicinales
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Plantes médicinales
L’absinthe
H. Zell
L’
ABSINTHE, Artemisia absinthium L. (Asteraceae), est une plante qui aime les terrains secs et les pentes arides. Elle est assez commune dans les vallées bien exposées des Alpes et du Jura et peut être trouvée jusqu’à environ 1500 m d’altitude. C’est une espèce vivace de 30 à 90 cm de hauteur, très odorante et au goût amer. La tige et les feuilles bi- et tripennées sont couvertes d’un duvet blanc argenté. Les fleurs très petites en capitules jaunes sont disposées en grappes. L’absinthe fait partie de la grande famille Asteraceae (anciennement Compositae) qui compte près de 23 000 espèces et 1500 genres répartis sur tous les continents. En Suisse et en France, on trouve plus de 350 espèces différentes. Le nom du genre Artemisia provient d’Artémis, divinité grecque et fille de Zeus (Diane chez les Romains). qui est la déesse de la chasse, mais aussi des femmes et des accouchements. Dans le genre ArteGrappes de très petites fleurs misia, on trouve des espèces comen capitules jaunes. munes comme l’estragon ou Artemisia dracunculus L., l’armoise vulgaire ou Artemisia vulgaris L., l’armoise champêtre ou Artemisia campestris L., le génépi, ou Artemisia glacialis L. et d’autres espèces, et encore la fameuse plante antimalarique chinoise, l’armoise annuelle ou Artemisia annua L. Quant au mot absinthium, il dérive du grec et veut dire « sans douceur », en allusion au goût amer de l’absinthe.
Absinthe
De l’absinthe à la fée verte : une longue et passionnante histoire
Valérie75
L’absinthe est déjà citée dans le Papyrus d’Ebers (XVIe siècle av. J.-C.). Ce dernier a été découvert à Louxor en 1862 par Edwin S. Smith (1822-1906), qui le vendit à l’égyptologue allemand Georg M. Ebers (1837-1898), qui en fit la traduction. Ce parchemin de 110 pages (18,6 cm × 30 cm) décrit plus de 700 substances médicamenteuses, dont le pavot, le saule, l’aloès, le safran, l’absinthe, etc. Il se trouve actuellement à la Bibliothèque universitaire de Leipzig. Hippocrate (Ve siècle av. J.-C.) prescrit l’absinthe contre les règles douloureuses et Pythagore (580-495 av. J.-C.) la fait macérer dans le vin pour favoriser l’accouchement. La plante est citée dans le célèbre ouvrage de Caton le Censeur (243-149 av. J.-C.) intitulé De Agri Cultura. Quant à Dioscoride (Ier siècle apr. J.-C.), le père de la
Plantes d’absinthe dans leur habitat naturel.
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Plantes médicinales
ballonnements et les flatulences. L’infusion se prépare de la façon suivante : verser environ 100 ml d’eau bouillante sur 1 g de parties aériennes séchées (une cuillère à café), filtrer après une dizaine de minutes. Cette tisane est très amère et ne devrait pas être consommée en cas d’ulcères de l’estomac ou du duodénum. Elle ne contient pratiquement pas de thuyone, cette substance n’étant pas soluble dans l’eau. On peut préparer soi-même un vin d’absinthe comme suit : remplir un flacon de feuilles et fleurs fraîches d’absinthe (ne pas tasser), recouvrir d’un mélange vin blanc et eau-de-vie en proportion 9:1, faire macérer à température ambiante pendant une semaine, filtrer et sucrer à volonté. Boire un petit verre à vin avant les repas pour faciliter la digestion. Les alcools d’absinthe du commerce (apéritifs), bus une trentaine de minutes avant les repas, favorisent l’appétit et aident à mieux digérer. Mais à boire avec grande modération car ils contiennent le plus souvent plus de 50 degrés d’alcool. Pourquoi autant d’alcool ? Tout simplement parce que l’absinthe étant très amère, ces boissons contiennent beaucoup d’anis comme correcteur de goût : avec une teneur faible en alcool, elles auraient l’aspect blanc laiteux. À titre comparatif, les apéritifs à base de gentiane (p. ex. Suze, Avèze) ne contiennent que 20 degrés d’alcool.
Pour en savoir plus https://www.labsinthe.ch/absinthe-chonologie.html https://www.labsinthe.ch/thuyone-absinthe.html Andres, U., Wermutkraut senkt den TNF-alpha-Spiegel bei Morbus Crohn, Zeitschrift für Phytotherapie, Infos 32, 93-94 (2011).
Airelle
L’airelle
C’
EST LE NOM d’un sous-arbrisseau de la famille Ericaceae ou Vaccinium vitis-idaea L. et aussi de son fruit. La plante est petite, ne dépassant guère 30 cm de hauteur et pousse sur les sols acides.
Les feuilles persistantes de couleur vert foncé ont une longueur de 1-3 cm. Sur la face inférieure se trouvent des petits points de couleur brune qui sont en réalité des petites glandes. Cette particularité permet de distinguer l’airelle d’une espèce proche, à savoir le raisin d’ours ou Arctostaphylos uva-ursi (L.) Spreng. Les fleurs sont blanches ou de couleur rose clair, en grappes terminales. Les fruits sont de petites baies à saveur acide de couleur rouge. L’airelle se rencontre au nord de l’Europe et dans les Alpes, en Amérique du Nord et en Asie septentrionale. Il existe des espèces proches
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Plantes médicinales
comme Vaccinium oxycoccos L. et Vaccinium microcarpum (Ruprecht) Schmal. (canneberge à petits fruits qui sont rares et, de ce fait, pas utilisés en thérapeutique).
Aspects phytochimiques et pharmacologiques L’airelle est surtout utilisée pour faire des confitures et des gelées qui accompagnent les viandes blanches et rouges, ainsi que le gibier. Ses vertus thérapeutiques ne sont pas connues depuis bien longtemps. On utilisait les fruits pour leur réputation d’antidiarrhéique lors de coliques. D’après des données assez récentes, l’airelle possède des phytoestrogènes et de ce fait pourrait être recommandée pour le traitement de problèmes liés à la ménopause, comme les bouffées de chaleur et les transpirations nocturnes. L’airelle contient des anthocyanosides (pigments rouges) aux propriétés antioxydantes, des glucides, des flavonoïdes, de la vitamine C (env. 12 mg/100 g de fruit frais), les vitamines B1, B2 et B3, la provitamine A, du potassium, du calcium, du magnésium, du manganèse et des tanins. Le jus d’airelle est surtout indiqué pour le traitement des infections des voies urinaires et des cystites. Ses pigments rouges (anthocyanes) inhibent l’adhérence des bactéries (p. ex. colibacilles) à la paroi de la vessie, mais ne détruisent pas les bactéries. Il faut en conséquence boire beaucoup pour éliminer les bactéries pathogènes. L’airelle est apparentée à la canneberge (airelle du Canada), bien connue sous le nom de cranberry ou Vaccinium macrocarpon Aiton. Les fruits de la canneberge sont plus grands et atteignent la taille d’une cerise. Ils sont de plus en plus utilisés pour la prévention et le traitement des cystites, en particulier des cystites récidivantes chez les femmes ménopausées. Les anthocyanes des deux espèces, non seulement inhibent l’adhérence de diverses bactéries sur les voies urinaires, mais aussi celle de Helicobacter pylori sur les muqueuses de l’estomac. De ce fait, la canneberge et l’airelle pourraient contribuer
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Airelle
Mariluna
à la prévention, voire au traitement des ulcères gastriques.
Canneberge (airelle du Canada).
Conseils pratiques Le jus d’airelle, tout comme le jus de canneberge, est indiqué pour lutter contre les infections des voies urinaires comme les cystites. Mais l’effet est surtout préventif car la consommation régulière diminue la fréquence des cystites. Les constituants du jus d’airelle n’ont pas de propriétés antibactériennes, mais inhibent l’adhérence des bactéries sur les parois des voies urinaires. De ce fait, il faut boire beaucoup (au moins 1,5 l par jour) pour éliminer les bactéries avec l’urine. On peut préparer soi-même du jus d’airelle ou l’acheter dans les commerces spécialisés ou même dans les grandes surfaces. Il existe aussi des gélules et comprimés à base d’airelle. À consommer plusieurs fois par jour avec au moins 2-3 dl d’eau.
Pour en savoir plus www.creapharma.ch/airelles-rouges.htm Matsushima et al., Growth inhibitory action of cranberry on Helicobacter, Journal of Gastroenterology and Hepatology 23, 175-180 (2008) www.e-sante.fr/cystites-tentez-grande-airelle-rouge/actualite/1019
Arnica
L’arnica
L’
ARNICA ou Arnica montana L. (Asteraceae) est une plante vivace répandue en montagne sur les terrains humides et acides, sur les prairies maigres jusqu’à une altitude de 2800 m environ. En Europe, elle pousse des Pyrénées jusqu’au sud de la Norvège en passant par les Alpes, le Jura et les Vosges. On la trouve aussi dans les Apennins, les Carpates et en Lettonie. Il existe aussi des sous-espèces et
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Droséra
Le droséra
L
Ryzhkov Sergey
E DROSÉRA, appelé aussi rossolis à feuilles rondes ou Drosera rotundifolia L. (Droseraceae) est l’une des rares plantes carnivores d’Europe. Le genre compte plus de 180 espèces localisées principalement dans l’hémisphère Sud et notamment dans la province du Cap et dans le sud-ouest de l’Australie. Droséra dérive du grec droseros qui veut dire « couvert de rosée ». Le droséra pousse dans les parties les plus humides des marécages d’altitude. Dans le sol acide de ces derniers, la teneur en azote est très faible. Le droséra, comme une autre plante carnivore qui pousse dans le même milieu, la grassette ou Pinguicula vulgaris L. (Lentibulariaceae), a élaboré un système qui permet d’accéder à l’azote, essentiel à la vie de la plante, par digestion d’insectes. Le droséra est une plante vivace très petite,
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Plantes toxiques
Plantes toxiques
L
ES PLANTES qui poussent en altitude sont souvent très belles avec des fleurs de couleurs vives et des fruits luisants et appétissants. Mais elles peuvent aussi être toxiques et conduire à des désagréments, des malaises et parfois jusqu’à la mort. Il ne faut cependant pas oublier la fameuse maxime de Paracelse : « Tout est poison et rien n’est sans poison ; la dose seule fait que quelque chose n’est pas poison. » Des plantes très toxiques peuvent devenir des plantes médicinales, selon la dose. D’autres contiennent des principes actifs présentant une marge thérapeutique très étroite. De ce fait, seul le principe actif isolé que l’on peut dès lors doser d’une manière très précise peut être utilisé comme médicament : le colchique d’automne peut conduire à la mort, mais un de ses alcaloïdes, la colchicine, est un anti-inflammatoire spécifique contre les crises de goutte.
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Plantes toxiques
L’aconit
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ETTE CÉLÈBRE PLANTE de nos montagnes que l’on peut trouver jusqu’à 2500 m d’altitude a pour nom scientifique Aconitum napellus L. Elle appartient à la famille Ranunculaceae. Il s’agit d’une espèce herbacée vivace pouvant atteindre 120 cm de hauteur qui a une racine tubéreuse de forme irrégulière. La tige érigée porte des feuilles divisées en segments étroits et se termine par une inflorescence en grappe de fleurs de couleur bleu violacé à aspect typique de casque. Ce qui explique le nom de casque de Jupiter donné parfois à cette plante. Signalons que l’on trouve aussi dans les montagnes d’Europe des espèces du genre Aconitum qui ont des fleurs jaunes, par exemple Aconitum vulparia Rchb. ou aconit tue-loup. Cette appellation indique immédiatement la toxicité de ces plantes qui étaient utilisées dans la Grèce antique et à l’époque romaine pour tuer les loups. Et pas seulement les loups… Ovide (43 av. J.-C.–18 apr. J.-C.), célèbre poète latin, cite l’aconit comme un des principaux ingrédients des poisons de Médée (mythologie grecque). Les Gaulois en enduisaient les flèches et les lances et les criminels étaient exécutés par absorption d’aconit. Pline l’Ancien (23-79), naturaliste et écrivain latin, qualifia l’aconit d’arsenic végétal. Toute la plante est toxique, mais la racine est de loin l’organe le plus dangereux. Elle contient des alcaloïdes de type diterpénique, dont l’aconitine. Cette substance excite, puis paralyse les terminaisons nerveuses en provoquant des troubles de la sensibilité. Des teintures d’aconit furent employées pour le traitement de névralgies faciales, de la fièvre et des toux irritatives. À l’heure actuelle, l’aconit est encore utilisé en homéopathie où les doses d’aconitine sont tellement faibles que le danger d’intoxication est nul. En médecine spagyrique, l’aconit sert à améliorer la circulation sanguine. À signaler une autre plante toxique poussant entre 1500 et 2500 m
Aconit
d’altitude appartenant aussi à la famille Ranunculaceae, à savoir l’ancolie des Alpes ou Aquilegia alpina L. Cette plante rare et protégée aux fleurs magnifiques de couleur bleu azur contient également des alcaloïdes toxiques, mais moins dangereux que ceux de l’aconit. L’ancolie est surtout irritante pour la peau. Vu la rareté de l’espèce, les intoxications sont peu nombreuses. Les aconits susmentionnés et Aconitum variegatum L. ou aconit panaché sont le plus souvent impliqués dans les intoxications. En médecine traditionnelle chinoise, plusieurs espèces d’aconit sont couramment utilisées. Elles sont une cause fréquente d’intoxication en République populaire de Chine. L’attrait des Européens pour les médecines orientales engendre des intoxications dues à des doses inadaptées.
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Plantes toxiques
L’ancolie des Alpes est aussi une plante toxique de la famille Ranunculaceae.
Symptômes d’une intoxication Ce sont les ingestions de racines qui causent les intoxications les plus graves, voire mortelles. La dose létale chez l’homme est de 3 mg d’aconitine, ce qui correspond à environ 2 g de racines d’aconit napel. La confection de bouquets est aussi dangereuse si on porte les tiges ou les fleurs à la bouche. Il faut éviter de cueillir cette plante car l’alcaloïde toxique peut pénétrer à travers la peau et provoquer des dermatites et même une légère intoxication. Les premiers signes d’une intoxication sont des troubles nerveux : picotement de la langue et des lèvres, fourmillements de la face et des extrémités, puis anesthésie des extrémités, angoisse, altération du rythme cardiaque, hypersalivation, vomissements, diarrhées. En cas d’ingestion massive de racines, la mort peut survenir rapidement du fait de la paralysie de la commande respiratoire et/ ou des troubles cardiaques. Les cas mortels sont heureusement devenus assez rares.
Berce du Caucase
Mesures à prendre Lorsque l’ingestion de la plante est récente, la décontamination digestive est indiquée : lavage gastrique, administration de charbon actif. Il n’existe pas d’antidote spécifique. Très souvent, le médecin administre des antiarythmiques. D’autres substances sont également employées selon la gravité de l’intoxication.
Pour en savoir plus Hostettmann, K., Tout savoir sur les poisons naturels, Éditions Favre, 2006, Lausanne. https://dicocitations.lemonde.fr/citations/citation-98117.php https://www.toxiplante.fr/monographies/aconit.html
La berce du Caucase
L
ORSQUE L’ON PENSE aux plantes toxiques, ce sont sur celles que l’on ingère que porte notre attention et qui provoquent des désagréments comme des troubles gastro-intestinaux, brûlures dans la bouche, palpitations et des problèmes bien plus graves encore. On ne pense pas forcément aussi à celles qui induisent des lésions plus ou moins graves par simple contact avec la peau. C’est le cas des berces, dont la plus connue est la patte d’ours ou Heracleum spondylium L. (Apiaceae) qui est très répandue dans les prairies et les pâturages jusqu’à 1700 m d’altitude. La plante fraîche peut provoquer un érythème de la peau et même des vésicules très douloureuses après exposition au soleil. Le tout sera suivi d’une hyperpigmentation persistante de la peau (taches de couleur brun foncé) car pour se défendre la peau produira plus de mélanine. Ceci est dû à la présence de furanocoumarines qui provoquent, suite à l’exposition à la lumière, des dermatites, appelées phytophotodermatites.
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Daniel Fuchs
Plantes toxiques
Ci-dessus : baies de Lonicera xylosteum, le chèvrefeuille des haies. Ci-dessous : baies de chèvrefeuille des Alpes, Lonicera alpigena.
Muritatis
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soudés seulement à la base. Quant au chèvrefeuille bleu fréquent dans les Alpes, ses fruits ne sont pratiquement pas toxiques.
Symptômes d’une intoxication Chez des enfants âgés de 2 à 4 ans, deux ou trois baies peuvent déjà provoquer des vomissements et des douleurs abdominales, ainsi que des diarrhées virulentes. Pour un adulte pesant 70 kg, une vingtaine de baies produiront les mêmes effets. Une ingestion de
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Plantes toxiques
Le colchique d’automne
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Dr. Killer
N TROUVE cette plante dans les prairies grasses et humides jusqu’à une altitude de 1800 m environ. Son nom latin est Colchicum autumnale L (Liliaceae). Son nom provient de Colchide, ancien pays de l’Asie mineure situé à l’extrémité orientale de la mer Noire, où se trouvait la Toison d’or, d’après la mythologie grecque. C’est une plante vivace tubéreuse aux fleurs de couleur rose lilas qui ressemblent à celles des crocus, mais possèdent six étamines. Le colchique est parfois aussi dénommé tue-chien ou safran des prés, mais il ne faut surtout pas le confondre avec le vrai safran ou Crocus sativus L. qui appartient à la famille Iridaceae. Les confusions sont cependant très rares, voire impossibles, car les différents crocus fleurissent au printemps et le colchique, comme son nom l’indique, en automne. On trouve aussi dans les Alpes une espèce semblable, mais de taille plus petite et aux feuilles plus étroites, à savoir Colchicum alpinum DC.
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Index des noms latins A
C
F
Achillea millefolium 15 Aconitum napellus 114 Aconitum variegatum 115 Aconitum vulparia 114 Alchemilla alpina 23 Alchemilla glacialis 23 Alchemilla saxatalis 23 Alchemilla xanthochlora 22 Allium ascalonicum 138 Allium cepa 138 Allium porrum 138 Allium ursinum 130 Aquilegia alpina 115 Arctostaphylos uva-ursi 19, 91 Arnica chamissonis 30 Arnica montana 29, 30 Artemisia 58 Artemisia absinthium 8 Artemisia annua 8 Artemisia campestris 8 Artemisia dracunculus 8 Artemisia genepi 58 Artemisia glacialis 8 Artemisia nivalis 58 Artemisia umbelliformis 58 Artemisia vulgaris 8, 13
Clivia 137 Colchicum alpinum 128 Colchicum autumnale 128 Crocus sativus 128
Filipendula ulmaria 94
D Daphne 122 Daphne alpina 122 Daphne laureola 122 Daphne mezereum 121 Digitalis 134 Digitalis grandiflora 133 Digitalis lutea 133 Digitalis purpurea 132 Doronicum 30 Drosera rotundifolia 39
E Epilobium 51 Epilobium angustifolium 51, 53 Epilobium hirsutum 52 Epilobium montanum 51, 53 Epilobium parviflorum 51, 52, 53 Epilobium roseum 51, 53 Eucalyptus 74 Euphrasia 55 Euphrasia rostkoviana 55
G Galanthus nivalis 137 Genepi 58 Genepi glacialis 58 Gentiana acaulis 61 Gentiana amarella 68 Gentiana campestris 63 Gentiana lutea 64, 66, 146 Gentiana pannonica 64 Gentiana purpurea 64 Gentiana scabra 68
H Heracleum mantegazzianum 118 Heracleum spondylium 117 Hibiscus sabdariffa 49 Hippeastrum 137 Hippophae rhamnoides 25
L Leontopodium 42, 43 Leontopodium alpinum 44 Leontopodium verum 44 Leucojum vernum 137 Lonicera 124
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Lonicera alpigena 125 Lonicera caerulea 124 Lonicera nigra 125 Lonicera xylosteum 125
M Malpighia punicifolia 26 Myrtus communis 74
N Narcissus 136 Narcissus poeticus 137 Narcissus pseudonarcissus 136 Narcissus radiiflorus 136
P Petasites albus 88 Petasites hybridus 87 Peucedanum ostruthium 70 Pinguicula vulgaris 39 Polygonum 33 Polygonum aviculare 33 Polygonum bistorta 33
R Rhodiola 82 Rhodiola rosea 81, 83, 84 Rhododendron ferrugineum 139 Rhododendron ponticum 142 Rhododendrum hirsutum 139 Rosa canina 46, 47 Rosa pendulina 47 Rosa rugosa 47
S Salix alba 95 Salix herbacea 96 Sambucus ebulus 104 Sambucus nigra 104 Sambucus racemosa 104, 106 Satureja hortensis 98 Satureja montana 98 Sedum rosea 82 Senecio 30, 88 Solidago canadensis 109 Solidago virgaurea 108 Sorbus aria 102
Sorbus aucuparia 101 Symphytum officinale 135
T Thuja occidentalis 60
V Vaccinium corymbosum 73 Vaccinium macrocarpon 20 Vaccinium microcarpum 20 Vaccinium myrtillus 73 Vaccinium oxycoccos 20 Vaccinium vitis-idaea 19, 91 Veratrum album 65, 145 Verbascum 36 Verbascum thapsus 36 Vitex agnus-castus 99
Ouvrages disponibles du même auteur aux Éditions Favre
Les drogues d’origine naturelle, 2018 Les plantes antidouleur, 2017 Les plantes pour prévenir et soigner les affections du système nerveux central, 2014 Tout savoir sur les plantes anti-âge : santé, longévité, beauté, 2013 Tout savoir sur les vertus thérapeutiques des fruits exotiques, 2011 Tout savoir sur les plantes pour la femme, 2008 Tout savoir sur les poisons naturels, 2006
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EXTRAIT d'un livre paru aux Éditions Favre.
Tous droits réservés pour tous les pays. Toute reproduction, même partielle, par tous procédés, y compris la photocopie, est interdite. Éditions Favre SA Siège social 29, rue de Bourg CH – 1002 Lausanne Tél. : +41 (0)21 312 17 17 lausanne@editionsfavre.com www.editionsfavre.com
Kurt Hostettmann, docteur en chimie, est professeur honoraire aux Universités de Genève, Lausanne, Nanjing, Shandong et à l’Académie chinoise des sciences à Shanghai. Spécialisé dans les plantes médicinales et phytomédicaments, il jouit d’une renommée internationale et a reçu en septembre 2014 la médaille d’or Egon Stahl de la Society for Medicinal Plant and Natural Product Research pour ses remarquables travaux en pharmacognosie et en phytothérapie. Il est l’auteur de plus de six cents publications et d’une vingtaine de livres, dont certains ont été traduits en japonais, chinois, indonésien, farsi, espagnol et portugais.
ISBN 978-2-8289-1759-3
9 782828 917593
Dr K. Hostettmann
La flore d’altitude est particulièrement riche en espèces les plus diverses. Celle des Alpes nous révèle souvent des fleurs magnifiques aux couleurs très vives. Mais derrière leur beauté se cachent aussi des propriétés thérapeutiques remarquables ou des poisons violents : les plantes peuvent guérir ou tuer ! Pour leur survie dans des conditions extrêmes en très haute altitude, les plantes élaborent des substances de défense contre les grands froids, les vents, la sécheresse et le rayonnement UV , dont l’homme a pu tirer avantage. On trouvera dans la première partie de ce livre une sélection de plantes médicinales des montagnes et on apprendra comment les utiliser : des conseils pratiques sont donnés, qui vont de la préparation des tisanes au mode d’action pharmacologique et aux mises en garde en cas d’effets secondaires ou d’interactions médicamenteuses. La seconde partie présente quelques plantes toxiques aux très belles fleurs ou aux fruits alléchants qui peuvent induire des intoxications graves. Les symptômes sont clairement décrits, ainsi que les mesures à prendre. En cas d’intoxication, on appellera le 112 en Suisse et dans l’Union européenne. Ce guide scientifique, illustré de belles photos, rapporte aussi de nombreuses anecdotes historiques qui rendent sa lecture agréable. Accessible et utile, il s’adresse à toutes les personnes qui aiment la nature et qui voudraient utiliser le potentiel gigantesque des plantes pour améliorer leur qualité de vie. Il plaira aussi à ceux qui aiment faire des promenades en montagne et qui découvriront peut-être au bord d’un sentier une plante dont ils ne soupçonnaient pas le potentiel…
Plantes médcinales et plantes toxiques des Alpes
Plantes médicinales et plantes toxiques des Alpes
Dr Kurt Hostettmann
Plantes médicinales et plantes toxiques des Alpes Les reconnaître, les utiliser correctement, ne pas les confondre