sique de l’âme. Celle des innombrables rivières coulant des glaciers, des cascades jaillissant du basalte, des vents cin-
glants venus de l’Arctique, des éruptions ayant tatoué depuis des millénaires sa géographie tourmentée. Et de toutes ces sonorités vikings qui ont franchi les époques : Jökulsárlón, Eyjafjallajökull,
Olivier JOly
L
’Islande est plus qu’une destination de voyage : c’est une mu-
Thórsmörk, Landmannalaugar… Pour qui sait s’éloigner des sentiers battus, c’est un ailleurs imentre vallées et champs de lave, déserts noirs et toundra moussue, fjords et falaises, le regard sur une carte et non sur l’écran d’un GPS. Ils dévoilent un monde sublime, où des lumières singulières dessinent selon les saisons mille paysages en un. Une terre âpre qui a façonné des hommes à son image : fatalistes et volontaires, autonomes et solidaires, toujours droits sous les tempêtes. Pourquoi l’Islande fascine-t-elle autant ? Parce qu’elle est l’antidote à la frénésie des villes. A une époque formatée d’où le risque est banni. Parce que sur ces arpents de liberté, demain ne ressemble jamais à aujourd’hui. On vient ici écrire sa propre saga. Plus qu’ailleurs, on s’y sent intensément vivant.
Olivier Joly est journaliste, photographe et auteur. Passionné des terres froides et venteuses, il a sillonné l’Islande du nord au sud, été comme hiver, avant d’y poser son sac. Ce livre présente son travail photographique, mais aussi les bons plans pour organiser son voyage.
ISBN 978-2-8289-1634-3
9 782828 916343
Quatre saisons en islande
prévisible. Les chemins de l’aventure franchissent les rivières à gué,
Quatre saisons en islande olivier Joly
olivier Joly
Quatre saisons en islande
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dépôt légal en suisse en 2019. isBn 978-2-8289-1779-1 © 2019, Éditions Favre s.a. adresse à Paris 7, rue des Canettes F-75006 Paris
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la maison d’édition Favre bénéficie d’un soutien structurel de l’office fédéral de la culture pour les années 2016-2020.
Vivre, c’est s’obstiner à achever un souvenir.
René ChaR
à lili, dalva et suzanne.
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Quatre saisons en Islande Printemps
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Métaphore d’une île jeune, en perpétuelle évolution géographique, c’est une saison de transition marquée par le retour des oiseaux, les tapis de fleurs, l’agnelage et les longues journées qui retrouvent des couleurs.
Eté
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L’intérieur de l’île s’ouvre enfin. Les hautes terres sont accessibles, les randonneurs arpentent les sentiers et les déserts, les rivières gonflent et déferlent dans les vallées. Eloge d’une incroyable terre d’aventure.
Automne
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Un superbe été indien avant le retour des tempêtes. C’est le temps d’une très ancienne coutume, le réttir : les fermiers partent à l’assaut des montagnes reculées, à cheval, pour aller chercher leurs moutons à l’estive.
Hiver
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Les cascades se figent, la neige griffonne des paysages de bande dessinée et les aurores boréales illuminent les nuits. Mais l’Islande n’hiberne pas, tiraillée entre son pouvoir d’attraction touristique et la protection du patrimoine naturel.
En route
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10 excursions à Reykjavik 8 cascades à découvrir 7 glaciers craquants 10 sources chaudes 10 champs de lave à explorer 10 randonnées immanquables 10 balades à cheval 11 coins de nature où observer la faune 10 piscines où plonger 10 lieux où s’imprégner des sagas 9
«
S
i tu n’aimes pas le temps qu’il fait, attends cinq minutes... » Le dicton local a beau confiner au cliché, l’Islande mérite sa réputation de versatilité. Il n’est pas rare de voir briller le soleil sous une averse de pluie, une tempête de neige se lever au cœur de l’été et l’automne offrir des jours étonnamment doux. L’ancien calendrier norrois, allant au plus simple, considérait qu’il n’existait que deux saisons : l’hiver et l’été. Les croyances ont la vie dure. L’été islandais commence donc aujourd’hui encore, par tradition, le premier jeudi suivant le 18 avril. C’est un jour férié. Allez enfiler un maillot de bain pour fêter ça sur une plage du Sud... Si vous tenez une minute, ce sera un exploit. Les Islandais vous le confirmeront : chaque saison a tout de même ses spécificités. Et c’est valable aussi pour les voyageurs qui découvrent le pays. Il faut savoir qu’il n’y a que pendant la période juillet-septembre que les pistes de l’intérieur sont ouvertes. Le reste de l’année, une chaîne interdit l’accès aux déserts, aux lacs et aux zones géothermiques des Highlands. C’est évidemment frustrant de se voir privé d’un terrain de jeu équivalent aux deux-tiers de l’île, les plus spectaculaires. Mais ça évite aux conducteurs novices de plonger leur 4x4 dans un mètre de neige. Cela dit, les neuf autres mois de l’année, l’Islande a encore beaucoup à offrir. Il suffit de chercher un peu. Ce livre n’a pas le pouvoir de faire disparaître les cohortes de touristes qui essaiment sur les sites les plus réputés du pays. Autocars, 4x4 géants et stands à hot-dogs font désormais partie du paysage, en certains lieux tout au moins. Mais il suffit parfois de se lever tôt, de prendre un chemin alternatif ou de bien choisir sa saison pour s’extraire du troupeau. Les photos de cet ouvrage vous convaincront peut-être que les charmes de l’Islande se dévoilent partout, même loin de Blue Lagoon et du Cercle d’Or. Dans un champ de lave en apparence anodin, sur un petit coin de mousse qu’il ne faut surtout pas piétiner. En surplomb d’un fjord. Dans les bains naturels d’une vallée éloignée. A chacun son émotion. Encore faut-il savoir organiser un voyage qui vous ressemble.
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Quatre saisons en islande Au printemps, les jours s’allongent rapidement, après de longs mois sombres. Il peut arriver que quelques heures de soleil permettent de s’asseoir en terrasse d’un café, en conservant son lopapeysa, le fameux pull en laine tricoté par une tante ou une amie. C’est surtout la période où la vie végétale et animale reprend ses droits. Les oiseaux migrateurs reviennent en masse. Les Islandais sont sensibles au retour du pluvier doré, qui signifie symboliquement que l’hiver est terminé. C’est aussi la saison la plus propice à la pêche. Et celle où renaissent les fermes. Il y a peu, un programmé télé a permis de suivre une nuit durant l’agnelage dans différentes bergeries. L’émission a réalisé l’une des meilleures audiences de l’année. C’est dire si les Islandais sont des gens étranges. Capables d’obtenir un prix au festival de Cannes avec un film intitulé Béliers. L’été reste le moment le plus couru de l’année pour une excellente raison : c’est le seul qui permet de découvrir les Highlands, ces terres d’altitude du centre de l’île, sauvages et désertiques, assurément les plus envoûtantes qui soient. Chaque jour, dès la mi-juin, les Islandais guettent tout changement sur le site internet (www.road.is) qui indique heure par heure les routes et pistes enfin rouvertes à la circulation. C’est simple, elles figurent en vert, quand toutes les autres demeurent en rouge. Celles menant à Landmannalaugar, terre géo-magique située à quatre heures de Reykjavik, sont tradi-
tionnellement les premières à ouvrir. Mais les amateurs de grands espaces doivent parfois attendre mi-juillet pour rejoindre la caldeira d’Askja, au cœur de l’île, tant les chutes de neige sont tardives. Pourquoi croyez-vous que c’est là, dans le désert minéral et hostile de l’Ódádahraun (« désert des bannis » en islandais), que fuyaient les criminels et brigands d’antan ? Ils étaient à peu près sûrs d’échapper aux recherches. Un peu moins de survivre aux nuits glacées.
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uatre merveilles marquent l’automne, la saison préférée des initiés. 1. Le temps se radoucit souvent, offrant un véritable été indien. 2. Les arbustes et les buissons se parent de couleurs dorées. 3. Le gros des touristes est rentré gentiment à la maison – cela est moins vrai depuis que leur contingent dépasse les deux millions par an, soit sept fois la population de l’île. 4. Les aurores boréales sont de retour. Sachant que les routes de l’intérieur demeurent ouvertes jusqu’aux premières tempêtes de neige, cela fait de l’automne la saison idéale pour retrouver le goût authentique de l’Islande, qui inclut une forme de solitude, ou tout au moins un sentiment d’éloignement – et non un défilé de doudounes et de perches à selfies. L’hiver est d’abord réputé pour les aurores boréales. Les longues nuits sont favorables à l’apparition de ce merveilleux phénomène, provoqué par des tempêtes solaires, qui transforme le ciel en tableau expressionniste. Les anciens Islandais y voyaient la marque de créatures maléfiques. Elles sont aujourd’hui hautement bénéfiques au tourisme hivernal, notamment venu d’Asie où des croyances mythifient la conception des enfants sous cette féerie. Mais il n’y a pas que les lueurs nocturnes à admirer en hiver. Les cascades ne sont jamais aussi belles que prises dans les glaces. De petits icebergs bleutés aux formes étranges s’échouent sur le sable noir pendant les grandes marées à Jökulsárlón, l’acmé des photographes. Les paysages deviennent étrangement monochromes. Il est aussi arrivé que le temps d’une nuit, Reykjavik soit recouverte de cinquante-cinq centimètres de neige, record des temps modernes. L’Islande n’est jamais avare de poésie.
Elle n’est évidemment pas un monde parfait. La grave crise financière de 2008, qui a vidé les comptes des particuliers et placé l’Islande sur la liste des états terroristes établie par la Grande-Bretagne, a rappelé que la cupidité n’a pas de frontières. Mais au moins le pays a-t-il réagi en refusant par référendum les conditions de remboursement proposées, puis en condamnant et emprisonnant (dans des conditions privilégiées, certes…) les financiers qui l’avaient mené au désastre. Des citoyens lambda ont écrit une nouvelle constitution – vite tombée dans l’oubli. Et la population a resserré les rangs. La traditionnelle transhumance automnale des moutons, qui fait appel à des volontaires menés par un homme curieusement appelé « le roi des montagnes », n’a jamais connu autant de succès que durant ces années de crise. Bravant le blizzard et la fatigue, traversant les rivières à cheval comme autrefois, ces descendants de Vikings venaient chercher, sur les crêtes enneigées et dans les canyons profonds, dans le froid des jours et la chaleur des soirées en refuge, une part ancestrale d’eux-mêmes. Appelons cela l’âme islandaise. C’est elle que vous êtes invités à découvrir à travers ces photos et ces textes.
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Les charmes de l’Islande se dévoilent partout. Dans un champ de lave en apparence anodin, sur un petit coin de mousse qu’il ne faut surtout pas piétiner. En surplomb d’un fjord. Dans les bains naturels d’une vallée éloignée. A chacun son émotion.
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PrintemPs L’île ne cesse de se réinventer. Comme chaque nouvelle éruption redessine le paysage, chaque printemps fait renaître fleurs et mousses, arbustes tordus, toundra et forêts. Puis c’est le vol des oiseaux, sternes, pluviers, bécassines des marais, qui marque le retour d’une vie bruissante.
Flore arctique et mousses, région de Skaftafell.
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e printemps, c’est d’abord un chant. Ou plutôt un cri, court, aigu, impératif. Celui du pluvier doré, l’oiseau dont le retour en Islande annonce traditionnellement celui des beaux jours. Dès qu’elles aperçoivent le premier petit limicole au ventre noir strié de blanc et aux ailes mouchetées de jaune, les sociétés d’ornithologie font une annonce sur tous les réseaux d’information. Qu’importe si le volatile peut encore subir quelques tempêtes de neige dans son exil printanier. C’est le symbole qui compte. « Le loa siffle ici pour souffler la neige au loin », dit à peu près la comptine que tous les petits Islandais ont entendue un jour. Arrivent ensuite d’autres migrateurs : courlis corlieu, barge à queue noire, bécassine des marais, chevalier gambette, les emblématiques macareux moine et sterne arctique… Une foule bruyante et gaie qui envahit Reykjavik, les lacs, les pâturages, les landes et les falaises. Dans les airs et dans les cœurs, le printemps est une renaissance. Les oiseaux sont chers aux Islandais qui n’hésitent pas à donner à leurs enfants le nom de quelques-unes des 373 espèces nichant sur l’île : Lóa évidemment, mais aussi Hrafn (corbeau), Örn (aigle), Kría (sterne), Svana (cygne)... La nature est dans le quotidien. A l’échelle géologique, l’Islande est au printemps de sa vie : elle n’a que vingt-cinq millions d’années. C’est une enfant turbulente, imprévisible, au caractère volcanique. Il y a de quoi : née en surplomb de la dorsale médio-atlantique, elle a aussi grandi au-dessus d’un point chaud. Elle est à cheval sur deux plaques continentales qui s’écartent selon un axe sud-ouest nord-est, comme on peut le voir sur la péninsule de Reykjanes. Et à la verticale d’un endroit où le manteau terrestre se trouve soumis à des remontées régulières de magma. Ce qui explique les deux cents volcans actifs, les cent trente éruptions du millénaire ou le fait qu’un tiers des laves produites dans le monde depuis cinq siècles l’aient été sur ce gros caillou. Pour qui n’a pas la chance de visiter l’île pendant une éruption, il existe d’autres signes du volcanisme actif. La terre fumante, que
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l’on aperçoit dès Hveragerdi, à vingt minutes de route de Reykjavik. Les innombrables champs de lave, nus ou moussus. Les fumerolles et marmites de boue des zones géothermiques. La rhyolite, roche acide qui dessine des veines rouges, vertes ou bleues sur le flanc des montagnes. La silhouette conique de certains volcans (Keilir, Baula, Maelifell), pourtant moins redoutables que d’autres à la forme plus grossière (Hekla, Krafla) et que ceux qui font le dos rond sous les glaciers (Grímsvötn, Katla, Eyjafjöll). Et bien entendu les geysers, un mot venu de l’islandais gjósa, « jaillir ».
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vec une avifaune et une géothermie très actives, le lac Mývatn est une ode à la vie. Pas besoin d’avoir les yeux collés aux jumelles. Le ballet des grands oiseaux au-dessus des pseudo-cratères est un spectacle en soi. La fonte des neiges laisse entrevoir les laves extravagantes de Dimmuborgir et de Leirhnjúkur. Les cônes volcaniques à l’horizon prennent du relief. Les fumerolles de Námafjall se détachent sur un ciel crépusculaire, pendant que les locaux mettent à cuire en pleine terre, à proximité d’une source chaude, le pain de seigle appelé Hverabraud, délicieux avec la truite locale. Si le soleil de minuit ne peut s’apercevoir qu’à l’extrême nord en juin, les nuits sont claires dans le reste du pays. Le printemps marque la renaissance des couleurs. Le jaune paille des herbes rases s’enflamme sous un soleil bas. Sur la péninsule de Snæfellsnes sont célébrées les noces païennes de la faune et de la flore. Les sternes forment un nuage piaillant qui houspille les marcheurs menaçant leur nid. A Hellnar et Arnarstapi, les falaises de basalte sont le donjon des goélands et des guillemots, sur lequel viennent s’abattre les vagues écumantes après un périple transatlantique. A quelques pas de l’église noire de Búdir, à la beauté presque mystique, un phoque accompagne le promeneur à dix brasses du rivage. Puis le vert revient. Et le pays se couvre de tapis de couleurs. La dominante est mauve : les lupins. Une fleur importée d’Alaska en 1945
pour lutter contre l’érosion des sols. Et qui a réussi sa mission, essaimant jusque dans les zones semi-désertiques au point d’étouffer nombre de plantes endémiques. Pas l’angélique, heureusement, qui s’épanouit en terrain humide, comme à Veidivötn où son vert-jaune tranche sur le noir des roches. Connue depuis le Moyen Age pour ses vertus médicinales, l’angélique parfume le brennivín, alcool traditionnel aussi appelé « mort noire », un régal avec la truite et le requin faisandé (hákarl), à condition d’avoir le gosier exercé.
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i les zones de plaines sont riches en fleurs (linaigrettes, silènes, épilobes, dryades, renoncules des glaciers, thym arctique, etc.), on en trouve jusque dans la toundra. Elles luttent contre les vents fous, arc-boutées le nez au sol. Les lichens et les mousses s’accrochent eux aussi à la pierre. Le végétal fait corps avec le minéral car le froid, le vent et l’appétit des moutons rendent son destin fragile. Voilà pourquoi il faut s’interroger avant de poser le pied sur une mousse, même hors d’une zone protégée. Ou à l’heure de rapporter un morceau de lave chez soi. Glissée dans un sac plastique, la lave pleure beaucoup d’eau. On peut y voir un symbole. La végétation n’a pas toujours la vie facile. Très boisée à l’arrivée des premiers Vikings au IXe siècle, l’Islande compterait aujourd’hui 1% de forêts. Elles ont été rasées pour bâtir les habitations, servir de bois de chauffe ou forger des outils. Pas la peine de chercher trop haut la cime des arbres. Ne restent que des bouleaux nains et de petits
A l’échelle géologique, l’Islande est au printemps de sa vie : elle n’a que vingt-cinq millions d’années. C’est une enfant turbulente, imprévisible, au caractère volcanique.
saules de la forêt originelle. Mais ils ont un vrai charme, notamment dans la vallée de Thórsmörk, dont le caractère reposant vient aussi de cette verdure à hauteur d’elfes, où il fait bon cheminer. Les parcs de Jökulsárgljúfur (nord) ou de Skaftafell (sud) figurent aussi parmi les très beaux endroits où admirer ce qui demeure des bois d’antan. A l’avenir, cela devrait être plus facile. Une vaste campagne de reforestation, à base de bouleaux et d’épineux divers, est menée depuis plusieurs décennies afin de stabiliser les sols. Des études récentes de l’Université agricole d’Islande ont noté qu’en raison du réchauffement climatique, les arbres poussaient huit fois plus vite en 2016 qu’en 1970. Et qu’une végétation verte est en train de prendre le pas sur la lande, ce qui pourrait, à terme, changer le visage du pays. Les scientifiques s’en inquiètent. Les fermiers s’en réjouissent. Jamais l’île n’a été aussi hospitalière. Elle qui, au cœur de la funeste « longue nuit » (XIIIe-XIXe siècles) marquée par les éruptions, le refroidissement du climat, les épisodes de peste... avait failli être vidée à tout jamais de ses habitants. Façonnée par le feu, l’Islande a aussi été sculptée par la glace, l’eau et le vent. Cela se voit notamment dans l’est et le nord-ouest. Les plateaux formés par des couches successives d’écoulements basaltiques ont été rabotés par les glaciers. Qui en se retirant ont laissé des fjords et des vallées profondes. Dans ces régions particulièrement vertes, très accueillantes pour les familles, on est entouré de myrtilles sauvages durant les longues promenades sous un soleil haut. A Látrabjarg, on peut observer des macareux, qui ressemblent à des vigies postées sur les plus hautes falaises d’Europe. En fin de journée, ils reviennent vers leur terrier, des poissons translucides dépassant de leur bec comme de drôles de moustaches. Si l’Islande est d’abord connue pour son sable noir, notamment autour de Vík, on trouve de superbes plages blanches dans les fjords de l’Ouest. Et même, à Raudasandur, une plage de sable rouge. Ou presque. L’imagination fait le reste.
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Sur les rives du lac Mývatn. On distingue au loin les pseudo-cratères, créés par des explosions de vapeur lorsque la lave et l’eau du lac sont entrées en contact. Ils sont dépourvus de cheminée volcanique.
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Deux exemples de géothermie active témoignant de l’intense activité magmatique. Les fumerolles et boues acides de Námaskard, au pied du mont Námafjall. Et les sources chaudes de Hveravellir, durant un long crépuscule de fin de printemps.
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Dans tout le pays, le moindre petit hameau, parfois même une simple ferme, est flanqué d’une église. Ici à Stóri-Ás, près de Husafell.
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Double page précédente Lac Langisjór.
C’est ici, à Godafoss (la chute de Dieu), qu’aux alentours de l’an 1000, un chef local jeta ses icônes païennes (Thor, Odin, Freyja...), après que le pays se fut converti au christianisme.
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Flatey est une petite île du Breidafjördur, dans l’ouest de l’Islande. Elle est interdite aux voitures. Seule une poignée d’habitants y ont leur résidence à l’année. Mais au printemps, avec le retour des familles et l’arrivée des oiseaux, l’île revit. Elle devient un fabuleux terrain de jeux pour les enfants, Halldór, Loá et Baldur. Ce dernier n’hésite pas à plonger dans une eau à 7°C.
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Il désirait avoir l’âme en paix. Il désirait voir les étoiles cachées par les nuages afin d’y trouver la tranquillité, l’assurance qu’il existait quelque chose de plus vaste et de plus important que sa propre conscience, l’assurance de pouvoir se perdre, ne serait-ce qu’un instant, dans les immensités de l’espace et du temps.
aRnalduR indRidaSon « hivEr arctiquE »
Mi-avril, l’une des dernières aurores boréales de la saison, péninsule de Snæfellsnes.
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en route Découvrir Reykjavik, la capitale sur le toit du monde. Randonner au soleil de minuit, chevaucher sur une plage déserte, observer les macareux depuis la plus haute falaise d’Europe. Dénicher cascades, champs de lave et zones géothermiques sur son itinéraire. Marcher sur un glacier. S’immerger dans une source chaude en plein désert. S’abandonner dans une piscine en surplomb d’un fjord. Humer le parfum des sagas d’antan. Voyager hors des sentiers battus. Partir à l’aventure. Vivre intensément l’Islande, en immersion, en toutes saisons. 263
Le top 7 des glaciers svinafellsjökull skaftafellsjökull Breidarmerkurjökull nordurjökull
snæfellsjökull kviarjökull Hoffellssjökull
Comme partout dans la zone arctique, les glaciers islandais fondent en accéléré. Le Breidarmerkurjökull, qui tombait dans l’océan au début du XXe siècle, a reculé de trois kilomètres depuis, et de deux kilomètres rien qu’entre 1974 et 2004, créant la lagune de Jökulsárlón. Sur la trentaine de glaciers étudiés dans les années 2000, vingt-huit reculaient. Voilà pourquoi il ne faut pas hésiter à prendre le temps d’observer longuement ces merveilles de la nature lorsque l’occasion se présente : c’est une manière très agréable de lutter contre l’inexorable.
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En routE
sourCes CHaudes
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our le réconfort sensoriel, l’Islande offre le meilleur : un bain chaud dans des sources naturelles. Au plaisir d’une eau avoisinant les 38°C-40°C, d’autant plus grand que la température ambiante est froide, s’ajoute le plaisir des yeux, qui se posent sur un paysage souvent vierge, parfois désertique. On a alors la sensation physique de faire corps avec la nature. Et c’est encore meilleur après une belle journée de randonnée. Bien sûr, ça se sait. On se retrouve rarement seul au moment de poser les orteils dans l’eau chaude après avoir couru pour échapper à la morsure du froid. Mais cela n’enlève rien à la magie du moment. Il est même possible de se sentir vivre une forme de communion païenne, à condition de s’extraire des commentaires de voisins trop bruyants, à base de « Oh, my god ! » et « It’s amazing ». Fermez les yeux un instant, plongez en vous-même en sentant la brise fraîche vous frôler la nuque, laissez la chaleur vous envahir jusqu’au sommet du crâne. C’est divin. Il n’est plus rien qui compte.
Fermez les yeux un instant, plongez en vousmêmes en sentant la brise fraîche vous frôler la nuque
Par la magie du feu intense qui bouillonne sous la croûte terrestre juste au niveau de l’Islande, ces sources naturelles sont nombreuses. Il y en a dans la plupart des régions. Les plus accessibles sont toutes répertoriées, même si certains fermiers gardent jalousement le secret d’un trou d’eau utilisé depuis l’ère des premiers Vikings, pas plus large qu’un demi-jacuzzi, au fin fond de leur propriété. Situées dans des zones hautement géothermiques, Blue Lagoon et les Mývatn Nature Baths n’entrent pas ici dans la catégorie des sources naturelles, mais plutôt des piscines, très agréables mais bétonnées. La reine des sources naturelles est celle de Landmannalaugar, auquel elle donne d’ailleurs son nom : « Les bains chauds des gens du pays. » A quelques dizaines de mètres du camping et du refuge 270
– distance interminable pour qui a décidé de se mettre en maillot sous sa tente – elles attirent les trekkeurs à l’issue d’une journée de marche. A la descente du petit escalier de bois, l’eau paraît encore un brin fraîche. Mais elle se réchauffe à mesure qu’on s’approche de la source elle-même. Chacun choisit sa distance idéale du robinet naturel. Sachant que l’eau varie en température selon la profondeur, qui n’excède pas cinquante centimètres. D’autres lieux moins fréquentés des hautes terres abritent leur source chaude. A Hveravellir, il s’agit d’un bassin de pierres rustique surplombant une rivière au milieu d’un superbe terrain de jeu géothermique. A Kerlingarfjöll, les propriétaires ont donné un petit coup de main à la nature en créant un hot pot à l’orée d’une vallée encaissée, ceinte de collines de rhyolite aux ocres mêlés de bleus et de gris. Tant de beauté ne fait qu’augmenter le plaisir des sens. On trouve aussi un bassin à Laugafell, dans le nord pelé des Highlands, ainsi qu’à proximité de l’hôtel de montagne Laugarfell, à l’est du Vatnajökull. La plus belle de ces oasis de montagne se situe à trois-quarts d’heure de marche du refuge de Strútur, dans la réserve de Fjallabak, à proximité du volcan Maelifell. Un site suffisamment éloigné des pistes principales des Highlands pour s’affranchir de la foule. Il est impossible de citer toutes les sources chaudes. Parmi les plus étonnantes, il y a le Víti, dans la caldeira d’Askja. Il faut descendre au fond d’un cratère profond pour atteindre ce petit lac d’un turquoise laiteux. Seul inconvénient, la température de l’eau ne dépasse pas les 28°C, ce qui est peu dans un désert souvent froid et connu pour être venteux. Mais l’endroit est tellement magique qu’il vaut bien d’y plonger tête la première. D’autant qu’on peut, semble-t-il, y entendre les grondements des bulles sorties de terre juste en dessous, Askja étant encore un volcan actif. A moins que ce ne soit le fruit de l’imagination, dopée par tant de beauté. Non loin de Reykjavik, à quelques minutes de marche de Hveragerdi, remarquable pour les innombrables fumées qui émergent de ses
Le top 10 des sources chaudes
environs, se trouve la source de Reykjadalur (« la vallée des fumées »), où l’on se baigne directement dans la rivière – mais rarement seul. Un peu plus loin en direction du Cercle d’Or, le village de Fludir a rénové la plus ancienne piscine de l’île, rebaptisée The secret Lagoon. C’est en 1909 qu’y a été donnée la première leçon de natation. Un siècle plus tard, des tour-opérateurs de la capitale proposent d’y aller observer des aurores boréales au cours d’un
landmannalaugar kerlingarfjöll víti strútslaug laugafell
Hveravellir Hellulaug grettislaug Heydalur laugarfell
bain nocturne. La minuscule Landbrotalaug, dissimulée à deux heures de Reykjavik sur le chemin de la péninsule de Snæfellsnes, vaut par son caractère intimiste. Grettislaug, non loin de la ville de Saudárkrókur (nord) est remarquable par sa situation entre mer et montagnes. La région des fjords de l’Ouest, enfin, compte nombre de sources chaudes. Mention pour Hellulaug, en raison de sa situation, nichée dans des rochers à quelques pas de la mer, ce qui rend possible de se plonger quelques secondes pour un chaud-froid très revigorant. Comme dans nombre de ces lieux de baignade très sommaires, il n’y a pas d’endroit pour se changer. Les instants de bonheur demandent parfois de menus sacrifices. Qui se plaindra de laisser une nature aussi somptueuse en l’état ? 271
En routE
CHamPs de lave
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vec deux cents volcans actifs répartis le long d’un axe sud-ouest–nord-est suivant la dorsale médio-atlantique, et cent trente éruptions de mémoire d’homme, l’Islande est littéralement recouverte de coulées de lave. Il ne faut pas imaginer une surface rocheuse uniformément grisrouge mat, mélancolique et sans relief. Ces champs de lave (drôle de nom, assurément, pour le fruit des colères de la terre) présentent au contraire une grande variété d’étendues, de formes, de textures, de teintes… Ils forment de véritables univers, très particuliers, qui racontent chacun à sa manière l’histoire géologique de l’île. Certains sont incontournables, à l’image de l’Eldhraun, que la route circulaire traverse sur une trentaine de kilomètres entre Vík et Kirkjubaejarklaustur. Celui-ci est né de la gigantesque éruption de Laki, qui dura huit mois en 1783-1784. Des fontaines de lave, dont la hauteur atteignait plusieurs centaines de mètres, et d’innombrables coulées venues des cent quinze cratères ouverts, ont emprunté le lit des rivières jusqu’à la plaine côtière, formant un immense territoire fumant. C’est d’abord la taille de l’Eldhraun (565 km2) qui impressionne aujourd’hui. Mais aussi ce couvert de mousses vert-de-gris, dont la couleur varie en intensité selon l’humidité. Plus en amont, dans la zone de Lakagígar elle-même, l’Eldhraun a conservé un caractère brut, auquel l’isolement et l’environnement grandiose donnent une beauté presque inquiétante. Plus récent, totalement différent d’aspect, le Leirhnjúkshraun est issu de l’éruption du volcan Leirhnjúkur, dans l’immense système volcanique du Krafla, entre 1975 et 1984. Situé à proximité du lac Mývatn, ce lieu fantasmagorique s’atteint par un chemin balisé, qui traverse un champ de lave du XVIIIe siècle, puis des collines d’un ocre tirant sur l’orange, une zone de solfatares et de boues acides, avant d’atteindre la coulée récente. D’une hauteur atteignant huit mètres par endroit, ce champ de lave noire dissimule quelques grottes d’effondrement, mais aussi des zones de fumerolles colorées. Son relief vallonné permet d’apercevoir la coulée dans toute sa longueur, près de vingt kilomètres. La
L’isolement et l’environnement grandiose donnent une beauté presque inquiétante
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région de Mývatn abrite aussi l’une des plus étonnantes créations volcaniques d’Islande : Dimmuborgir, littéralement « les châteaux noirs ». En réalité, il s’agit d’immenses piliers de basalte qui ont été créés par un long cheminement géologique, dont le point de départ a été une coulée de lave venue d’une fissure du Threngslanorgir jusqu’à une zone humide. Ces formations rocheuses, qui évoquent un parc d’animation fantastique dans lequel on peut se promener à toute heure, sont uniques au monde. Parmi les champs de lave plus classiques, mais immanquables, figure celui du Laugahraun, au pied duquel a été construit le refuge de Landmannalaugar. Des chemins permettent de le sillonner en tous sens, de s’imprégner de sa poésie abrasive, voire de se lover en toute discrétion dans le creux d’un rocher moussu. La courte ascension du Bláhnúkur offre une vue exceptionnelle sur la coulée et les collines de rhyolite qui l’entourent. En continuant le sentier jusqu’à la Hrafntinnusker, première étape du trek de quatre jours appelé Laugavegur, on atteint un magnifique champ d’obsidienne. Une pierre noire, presque luisante, dont l’aspect vitreux provient du refroidissement très rapide de la lave. Moins intimistes, mais faciles d’accès et sacrément spectaculaires, les alentours du massif stratovolcan Hekla (1488 mètres d’altitude) sont un fabuleux terrain de jeu minéral. On voit ici toute la puissance dont est dotée « La montagne au manteau », son nom traduit de l’islandais. Les premiers chrétiens de la région ne s’y étaient pas trompés, qui l’avaient eux surnommée « la porte des enfers ». Il faut dire qu’on y dénombre au moins vingt éruptions – particulièrement destructrices dans cette région habitée – depuis un millénaire. Certains blocs de lave crachés lors des régulières colères de Hekla (l’un des rares volcans islandais à être du genre féminin avec Askja et Katla) sont d’une taille gigantesque. Imaginez un caillou gros comme un 4x4 tombant de quelques centaines de mètres de haut. De quoi dissuader ceux qui rêvent de s’approcher au plus près de la prochaine éruption. A l’heure d’écrire ces lignes, la dernière à avoir secoué l’Islande, celle du volcan sous-glaciaire Bárdarbunga, a eu pour cadre le Holuhraun, un immense champ de lave à mi-chemin d’Askja et de la partie nord
Le top 10 des champs de lave leirhnjúkshraun Berserkjahraun laugarhraun Hrafntinnusker eldhraun du Vatnajökull. La fissure éruptive s’est ouverte à plus de trente kilomètres du volcan d’origine, ce qui a eu pour effet de limiter ses conséquences humaines. Si l’éruption avait eu lieu sous la glace, elle aurait entraîné des coulées de boue aux effets potentiellement destructeurs dans la zone des rivières Thjórsá et Skaftá, menaçant notamment plusieurs centrales électriques. Au lieu de quoi, la coulée de 2014 a créé un nouveau champ de lave sur l’ancien, dans un paysage désertique presque monochrome. Moins connu, moins étendu, moins récent, mais avec une singularité à couper le souffle, il ne faut surtout pas manquer le Berserkjahraun, sur la péninsule de Snæfellsnes. Située
dimmuborgir Holuhraun skjolkviahraun Ódádahraun Hallmundarhraun
à une vingtaine de kilomètres du village de Stykkishólmur, cette coulée tire son nom des Berserkir, les guerriers-fauves de la mythologie viking, dont deux spécimens auraient été tués ici par un fermier roué. Vieux de plusieurs milliers d’années, ce champ de lave, ponctué d’étranges saillies rocheuses et recouvert de mousses, est inclus dans un magnifique environnement de collines et de pics acérés. Le tout dans une région aux lumières souvent claires-obscures, qui ajoutent à son aspect mystérieux. Il est même possible de planter sa tente sur de petits coins d’herbe à ses pieds, pour mieux s’emplir de sa beauté presque mystique. 273
En routE
randonnÉes
S
i vous cherchez la terre promise des randonneurs, n’allez pas plus loin. On trouve ici tout ce qu’il faut pour combler les trekkeurs au long cours, les marcheurs à la journée et même les spécialistes de la haute montagne. Des paysages grandioses et variés, des sentiers balisés, une centaine de refuges allant du confortable au basique… Bien sûr, on ne peut pas toujours faire abstraction d’une météo cyclothymique. « Il n’existe pas de mauvais temps, juste des mauvais vêtements », disent parfois les Islandais, taquins. La reine des randonnées s’appelle Laugavegur : « La route des sources. » Elle est classée parmi les plus mémorables treks du monde, à juste titre. En quatre jours, elle relie Landmannalaugar à Thórsmörk, soit deux des plus belles réserves naturelles d’Islande. Ce faisant, elle traverse la région de Fjallabak (« derrière les montagnes »), un univers de collines multicolores, de déserts noirs, de mousses vertes fluorescentes et de rivières puissantes. A chaque étape, il est possible de dormir en camping ou dans des refuges. Le Laugavegur n’est ouvert, en fonction des chutes de neige, que de début juillet à fin septembre, plus ou moins quinze jours. Ce trek ne présente aucune difficulté technique, hormis la traversée de rivières chaussures à la main. Chaque étape est longue de douze à quinze kilomètres de long, soit quatre à six heures de marche quotidiennes. Les puristes n’hésitent pas à ajouter deux tronçons pour rejoindre Skógar, sur la côte sud, en passant par les cendres de la fameuse éruption de 2010, jusqu’à l’une des plus belles cascades du pays. La seule épreuve pour les randonneurs serait une pluie ininterrompue ou un vent extrême. Ça arrive. Le trek peut alors se transformer en chemin de croix.
« Il n’existe pas de mauvais temps, juste des mauvais vêtements »
Des agences de tourisme-aventure proposent des marches itinérantes dans les hautes terres, sur des parcours moins populaires que le Laugavagur. Elles présentent l’avantage de régler les questions de logistique. Ces randonnées permettent l’accès à des paysages rares, 274
dans des régions isolées et parfois difficiles d’accès pour qui voyage seul et sans véhicule : Herdubreid, Askja, Kverkfjöll, Hvítárvatn… C’est un moyen de découvrir des spots superbes, dans des conditions s’approchant de l’authentique aventure. Pour qui préfère marcher plus léger, les régions de Landamannalaugar et Thórsmörk offrent chacune de magnifiques randonnées de quelques heures. On peut facilement s’y balader quatre jours. A Landmannalaugar, plusieurs sentiers empruntent les lignes de crêtes, offrant un panorama splendide. Thórsmörk est une vallée plus intime, abritant l’une des rares forêts d’Islande. Sa particularité est d’être entourée de trois glaciers : Mýrdalsjökull, Eyjafjallajökull et Tindfjallajökull. Du chemin, le regard embrasse Godaland (« pays de Dieu »), l’un des paysages les plus majestueux du pays. On trouve aussi à Thórsmörk un très beau canyon. C’est au cœur du pays que se situent les plus spectaculaires randonnées. L’ascension du Sveinstindur (1090 mètres d’altitude) permet d’atteindre l’un des plus beaux points de vue d’Islande, à la fois sur le lac de Langisjór et la vallée de la Skaftá. De là, il est possible d’emprunter le chemin de crête qui longe le lac avant de redescendre jusqu’aux rives. Par un jour de grand vent, le spectacle des vaguelettes sur les eaux de Langisjór est absolument fascinant. Le massif de Kerlingarfjöll permet également de magnifiques randonnées, à la journée ou sur un circuit de trois jours. La plus populaire permet de longer la vallée des sorcières, une zone géothermique fumante et colorée. Attention aux étourdis ! Pour trouver des paysages similaires, il est possible de se rendre à Lónsöraefi, dans le sud du pays. Une zone de collines ocres et rouges, qui attire cent fois moins de marcheurs que Landmannalaugar en raison de son éloignement. Facile d’accès, extrêmement fréquenté, le parc de Skaftafell n’en offre pas moins un superbe espace naturel pour se dégourdir les jambes. Niché au pied du gigantesque Vatnajökull (troisième calotte glaciaire de la planète par son importance), cet espace verdoyant, empli d’oiseaux en été, permet d’approcher une très jolie cascade (Svartifoss), les glaciers Skaftafellsjökull et Svinafellsjökull, tout en surplombant
Le top 10 des randonnées laugavegur landmannalaugar thórsmörk sveinstindur, langisjór eldgjá le plus grand désert de cendres du pays. Skaftafell s’adresse d’abord au grand public, mais les marcheurs exigeants peuvent aussi trouver des randonnées longue distance. C’est aussi depuis Skaftafell que sont organisées les ascensions vers le sommet de l’Islande, le Hvannadalshnúkur (2110 mètres d’altitude). On entre là dans le domaine de la haute montagne. Dès la fonte des neiges, toute l’île se prête à merveille aux randonnées. Les fjords de l’Est et de
kerlingarfjöll skaftafell Bakkagerdi askja Hellnar, arnarstapi, Búdir
l’Ouest se font une spécialité des longues balades en famille, souvent ensoleillées à la belle saison. Le très agréable village de Borgarfjördur Eystri (aussi appelé Bakkagerdi), au nord-est de l’île, revendique cent quarante kilomètres de sentiers dans une région de montagnes de rhyolite, de prés et de lacs. Plus au sud, on peut aussi passer d’un fjord à l’autre en franchissant les crêtes. A l’image de Nordurfjördur, chaque village des fjords de l’Ouest et du Nord a ses chemins de randonnée. En été, on peut même y cueillir des myrtilles sauvages à chaque pas. 275
© Sigrún Kristjánsdóttir
Retrouver le plus vieil All Black vivant dans un hospice d’Auckland, partager un grand cru avec Jim Harrison dans sa maison du Montana, tirer le portrait d’un manchot royal en Géorgie du Sud, traverser à pied les rivières d’Islande… Journaliste et photographe, Olivier Joly a toujours laissé ses pas le guider vers l’éclectisme, au carrefour des émotions et des rencontres. Diplômé de l’ESJ Lille, il a été grand reporter au Journal du Dimanche, avant de choisir la voie de l’indépendance en 2015. Parallèlement, il a nourri durant toutes ces années son goût de l’image, menant des projets photographiques sur les routes du monde, de Madagascar à la Patagonie. Il en a tiré trois beaux livres, mais aussi de nombreux reportages photo
dans les magazines, en France et à l’étranger. Arpenteur de grands espaces géographiques et d’intimités humaines, il a vu au fil du temps sa boussole intime pointer obstinément vers les bouts du monde: Terre de Feu, Lofoten, Antarctique, Spitzberg... En 2009, il trouve sa terre promise : l’Islande. Continuant à jongler entre stylo et appareil photo, il a sillonné l’île en toutes saisons avant d’y poser durablement son sac, écrivant plusieurs reportages sur ses merveilles cachées et ses habitants un brin givrés. Ce livre n’est pas seulement un regard subjectif porté sur sa beauté. C’est une véritable déclaration d’amour à l’Islande. Et à tous ceux de ses habitants qui ont fait de ces périples une magnifique aventure humaine. Takk Fyrir !
Vous venez de consulter un EXTRAIT d'un livre paru aux Éditions Favre. Tous droits réservés pour tous les pays. Toute reproduction, même partielle, par tous procédés, y compris la photocopie, est interdite. Éditions Favre SA Siège social 29, rue de Bourg CH – 1002 Lausanne Tél. : +41 (0)21 312 17 17 lausanne@editionsfavre.com www.editionsfavre.com
sique de l’âme. Celle des innombrables rivières coulant des glaciers, des cascades jaillissant du basalte, des vents cin-
glants venus de l’Arctique, des éruptions ayant tatoué depuis des millénaires sa géographie tourmentée. Et de toutes ces sonorités vikings qui ont franchi les époques : Jökulsárlón, Eyjafjallajökull,
OLIVIER JOLY
L
’Islande est plus qu’une destination de voyage : c’est une mu-
Thórsmörk, Landmannalaugar… Pour qui sait s’éloigner des sentiers battus, c’est un ailleurs imentre vallées et champs de lave, déserts noirs et toundra moussue, fjords et falaises, le regard sur une carte et non sur l’écran d’un GPS. Ils dévoilent un monde sublime, où des lumières singulières dessinent selon les saisons mille paysages en un. Une terre âpre qui a façonné des hommes à son image : fatalistes et volontaires, autonomes et solidaires, toujours droits sous les tempêtes. Pourquoi l’Islande fascine-t-elle autant ? Parce qu’elle est l’antidote à la frénésie des villes. A une époque formatée d’où le risque est banni. Parce que sur ces arpents de liberté, demain ne ressemble jamais à aujourd’hui. On vient ici écrire sa propre saga. Plus qu’ailleurs, on s’y sent intensément vivant.
Olivier Joly est journaliste, photographe et auteur. Passionné des terres froides et venteuses, il a sillonné l’Islande du nord au sud, été comme hiver, avant d’y poser son sac. Ce livre présente son travail photographique, mais aussi les bons plans pour organiser son voyage.
ISBN 978-2-8289-1634-3
9 782828 916343
QUATRE SAISONS EN ISLANDE
prévisible. Les chemins de l’aventure franchissent les rivières à gué,
QUATRE SAISONS EN ISLANDE OLIVIER JOLY