Les éditions du Lumignon présentent dans cet extrait à feuilleter en ligne les premières pages du livre
Sur la piste des Chimères Texte : Catherine Latteux Illustrations : Pauline Berdal Parution : 26 mars 2018 ©2018 Editions du Lumignon
Tout autour de ma maison s’est déversé un sac de coton.
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Dans les bois, j’observe chaque buisson, chaque tronc où une Chimère pourrait se camoufler tel un caméléon.
Soudain, il saute à terre : droit sur ses grosses pattes arrières, le Dragollécorce se dresse devant moi, me considérant comme un adversaire. Gueule béante, il déploie sa collerette de feu et tape de la queue.
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Face Ă ce monstre hostile, je file !
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Tandis que je coupe à travers la lande de bruyères, je découvre une nouvelle Chimère. La Rosoépigrue toilette avec un soin méticuleux ses plumes jusqu’au bout de sa queue. Le vent se lève brutalement, alors la Chimère replie sur son dos sa tête couronnée d’épis pour la mettre à l’abri.
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Une patte relevĂŠe, la RosoĂŠpigrue ne bouge plus. Aussi je me retire et la laisse dormir.
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Je chemine maintenant dans une prairie sous-marine où vit une Chimère chevaline : l’Hipposidonie.
Elle attend le moment venu où elle donnera vie à ses petits.
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C’est pour bientôt, si la Chimère n’est pas emportée par les flots. Afin de ne pas la déranger, je m’efface et retrouve la surface, où colère et tonnerre malmènent l’océan.
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Tandis que le ciel se dégage, je me retrouve dans le sillage du Rorqu’île
boréal.
J’aimerais me reposer, amarrée à son aileron rocheux, car le suivre m’épuise, mais il n’en fait qu’à sa guise; il file rejoindre les zones tempérées et déjà je ne vois plus que sa queue.
De toute manière, son chant mêlé de grognements n’était guère encourageant.
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Il vaut mieux que je vogue sous d’autres cieux...
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J’avance dans des herbes brûlées par un soleil ardent, jusqu’au pied d’un Païlion. Couché sur le flanc, il paresse, à moins que ce ne soit un signe de faiblesse ?
Car la queue du majestueux fouette l’air pour se rafraîchir, mais cela ne saurait suffire !
Attendrie, je le caresse mais la Chimère méfiante en rugit. Je fuis loin d’ici !
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Dans une forêt ombrageuse, la peur ralentit mes pas quand, par bonheur, un tapis de fougères baigné de lumière se déroule devant moi.
Mais quelle est donc cette Chimère qui s’agite sous les feuilles ? De couleur rousse et vu qu’elle glousse, c’est sans doute un écureuil. Quoique, à découvert, elle tient aussi du hamster. C’est donc le Fougécureuil !
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Je la dessine à la va-vite avant qu’elle ne prenne la fuite. Emportant sa provision de graines, elle n’est pas prête de revenir dans la clairière car elle passera l’hiver en haut d’un vieux chêne.
À l’approche de la mauvaise saison, il est temps pour moi aussi de rentrer à la maison.
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Et là, sur la margelle de la fontaine, je la vois : elle peigne ses longs cheveux d’or flottants dans la brise du soir. Je la dépeins du regard quand, sans crier gare, elle me fausse compagnie. Je tente de la retenir par ses ailes mais elle disparaît dans l’eau qui ruissèle.
Chaque détail de ma Muse bien en mémoire, je rentre me mettre au travail.
Finalement, partir loin pour trouver ma Chimère n’était guère nécessaire car toutes se cachent simplement
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aux portes de l’imaginaire.