P H I L I P P E B OY E R
Abeilles sauvages
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L’abeille mellifère, espèce sociale L’abeille mellifère est un insecte social formant un organisme fait de milliers d’individus dépendant les uns des autres : l’essaim. À l’état sauvage, elle fonde sa colonie à l’abri d’un rocher ou d’un arbre creux. Devenue domestique, on ne la trouve pratiquement plus que dans la ruche. Essaimer est le mode de propagation de la société des abeilles mellifères. Quand la population devient trop importante au sein de la ruche, elle se divise en deux corps : - le 1er, constitué de milliers d’abeilles, choisira de quitter la ruche avec la « vieille reine » pour fonder une nouvelle colonie. Dans un lieu choisi par les « éclaireuses », les ouvrières « bâtisseuses » construiront des rayons de cire verticaux constitués d’alvéoles hexagonales qui serviront à entreposer miel, pollen et couvain (les œufs et les larves). Sitôt l’ouvrage suffisamment avancé, la reine se remettra à pondre, ce qui impliquera la réorganisation de la société. - le 2e corps, resté dans la ruche, verra naître une nouvelle reine qui s’empressera de tuer ses sœurs, élevées comme elle dans des cellules de grandes tailles et nourries de gelée royale. Le vol nuptial aura lieu quelques jours plus tard et la jeune reine s’accouplera en vol avec plusieurs mâles appelés « faux bourdons ». Elle se mettra alors à pondre des milliers d’œufs au cours d’une vie qui peut durer cinq ans. L’organisation très complexe de la ruche est régie par les phéromones (communication chimique) de la reine et des ouvrières. La vie de la ruche s’organise autour de la répartition des tâches. Organisées en castes, les ouvrières stériles seront nettoyeuses, nourrices, bâtisseuses puis elles transformeront le nectar en miel pour devenir dans un premier contact avec l’extérieur de la ruche, ventileuses et gardiennes. Elles finiront butineuses à récolter pollen et nectar afin de pourvoir à l’approvisionnement de la ruche. Les réserves de nourriture permettront à la société de survivre à l’hiver pour s’agrandir le printemps suivant et essaimer à nouveau, assurant la continuité de l’espèce. ci-contre : Rayon de cire naturel. Huit à dix kilos de miel devront être consommés pour que l’abeille mellifère produise un kilo de cire à l’aide de ses glandes cirières. Avec un kilo de cire, elle pourra construire 80 000 alvéoles.
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ci-dessus :
Abeille mellifère dans un pétale de rose.
ci-contre : Abeille mellifère sous une feuille d’ortie. Après avoir butiné, l’abeille s’est immobilisée quelques minutes, certainement surprise par la fraîcheur d’un soir du mois de septembre.
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ci-dessus : Ouverture d’une fleur de pissenlit. Visitée dès le début du printemps pour sa production de pollen qui servira à nourrir les larves, sa floraison annonce la reprise d’activité au sein de la ruche. ci-contre : Abeille mellifère sur la floraison du lierre. Pour récolter le pollen, l’abeille utilise sa langue et ses mandibules ainsi que ses pattes antérieures. Les grains saupoudrant son corps seront humectés de nectar lors de son vol pour être amassés sur les brosses des pattes arrières jusqu’à en faire une pelote compacte. double page suivante : L’abeille mellifère est la seule espèce d’abeille à posséder des soies entre les facettes de ses yeux : elles font office de cils. L’ensemble des facettes, ou ommatidies, compose l’œil et procure une vision adaptée au mode de vie de l’abeille. Celle-ci se déplace de 7 mètres par seconde. Les facettes sont au nombre de 3 500 chez la reine, 4 500 chez les ouvrières et 7 500 chez les mâles.
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Les bourdons, espèces sociales À la différence de la reine des abeilles mellifères, la reine des bourdons fonde seule la colonie. Il existe une quarantaine d’espèces de bourdons en France. Après avoir hibernée à l’abri d’une couverture végétale ou d’une cavité dans la profondeur du sol, la reine de bourdon, qui est une femelle fécondée, se met à la recherche d’un lieu pour y construire son nid. Avant d’en entreprendre l’édification, elle aura passé une quinzaine de jours à se chauffer au soleil et à s’alimenter dans les premières fleurs du printemps. Elle peut s’approprier l’ancien nid d’un petit rongeur, celui d’un oiseau, un endroit plus insolite encore où elle fera une petite cavité d’herbes et de mousses sèches qu’elle enduira de cire. Elle y construira un petit pot ainsi qu’une cellule en cire ; le premier servant de réserve en miel en cas de mauvais temps, la seconde consacrée à la ponte d’une dizaine d’œufs reposant sur un tapis de pollen. L’éclosion aura lieu après 4 à 5 jours et suivant l’espèce, les larves se nourriront seules du pollen réservé dans de petites loges attenantes à la cellule de naissance ou bien c’est la reine qui régurgitera la nourriture pour la distribuer. Après une semaine, les larves tisseront leur cocon pour s’en délivrer une quinzaine de jours plus tard, la métamorphose accomplie. Leur envol annonce le commencement de la société. La reine qui, jusqu’alors, avait pourvu à la récolte du pollen et du nectar, se consacrera principalement à la ponte et ne quittera pratiquement plus le nid. Ses filles, des ouvrières stériles, effectueront les travaux de récolte, de construction et s’occuperont des jeunes larves. La colonie s’agrandira progressivement (d’une soixantaine d’individus jusqu’à 300, suivant l’espèce) donnant naissance, du début au milieu de l’été, à des mâles et à des femelles fécondes. C’est à ce moment qu’à l’issue des accouplements et jusqu’à l’automne, le nombre des ouvrières et des mâles décroît pour disparaître totalement à la mort de la vieille reine, laissant seulement de jeunes femelles fécondées aptes à fonder leur propre colonie au printemps suivant. Toujours suivant les espèces, il existe des comportements sensiblement différents, comme chez le bourdon terrestre où il y a deux générations de reines pondeuses par an. ci-contre : Bourdon des champs sur un bouton de rose fanée.
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La vie secrète des abeilles sauvages : un monde insoupçonné à nos portes ! Si tout le monde connaît l’abeille domestique, on sait moins qu’il existe en France 800 à 1 000 autres espèces d’abeilles sauvages. Rien qu’en plein cœur des villes, des dizaines d’espèces d’abeilles sont visibles, pour peu qu’on sache les observer : osmies à l’abdomen doré, mégachiles découpeuses de feuilles, andrènes terricoles, abeilles charpentières, collètes du lierre… Comme l’abeille domestique, elles sont indispensables à la reproduction des plantes et à la diversité biologique, et certaines sont tout aussi menacées d’extinction. Apprendre à les connaître, c’est aussi contribuer à leur sauvegarde. Grâce à ses photographies d’une incroyable beauté et d’une grande poésie, Philippe Boyer nous fait entrer dans leur vie intime. Leur diversité, leur élégance, leurs amours, leurs ennemis, leurs relations avec les fleurs… toute cette vie insoupçonnée qui est à nos portes, il nous la révèle comme on ne l’a jamais vue.
Philippe Boyer est caméraman et photographe. Il a acquis depuis l’enfance une grande curiosité pour le monde sauvage et plus particulièrement celui des oiseaux et des insectes. La lecture des écrits emplis de poésie de Jean-Henri Fabre ont été déterminants dans son intérêt pour le monde singulier des abeilles et plus particulièrement celui des abeilles solitaires. Il réalise ses photos sans flash pour éviter les artifices et être au plus près de la réalité.
ISBN : 978-284138-733-5
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