Adehan et al raspa (Vol 3, N°3-4, 2005)

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Revue Africaine de Santé et de Productions Animales © 2005 E.I.S.M.V. de Dakar

A RTICLE ORIGINAL Prévalence de la brucellose bovine dans les fermes d’Etat du Bénin de 2000 à 2003 R. ADEHAN1, B. KOUTINHOUIN1, L.S. BABA-MOUSSA2, L. AIGBE1, P.M. AGBADJE3 et I.A.K. YOUSSAO1* 1Université d’Abomey-Calavi – Ecole Polytechnique d’Abomey-Calavi - Département des Productions Animales- B. P. 2009 Cotonou - Bénin. 2 Université d’Abomey-Calavi – Faculté des sciences et techniques - Département de Biochimie et de Biologie cellulaire –– 04 BP0320 Cotonou – Bénin. 3 Laboratoire de diagnostic vétérinaire de Bohicon, Bohicon, Bénin.

* Correspondance et tirés à part , e-mail : iyoussao@yahoo.fr

Résumé L’étude de la prévalence de la brucellose bovine a été réalisée dans les fermes d’Etat du Bénin (Okpara, Bétécoucou et Samiondji) de 2000 à 2003. Un prélèvement sanguin a été réalisé sur tous les animaux en âge de reproduction (N=11609) et trois techniques ont été utilisées pour les analyses sérologiques : Réaction de Fixation de Complément (RFC), ELISA indirecte (indirect enzyme – linked immunosorbent assay) et l’EAT (épreuve à l’antigène tamponné). Les infections brucelliques les plus élevées ont été obtenues à Okpara avec des prévalences annuelles qui varient de 2,06 à 3,4%. La ferme d’élevage de Bétécoucou vient en deuxième position avec des prévalences qui varient de 0 à 2,8 %. A Samiondji, la brucellose a été seulement dépistée en 2002 avec une prévalence de 1,9 %. De 2000 à 2003, la prévalence moyenne a été de 1,9 % avec des variations observées d’une année à l’autre dans la zone d’étude. Ces variations pourraient être liées à la diversité de la sensibilité des tests sérologiques utilisés. (RASPA, 3 (3-4) : 200 - 204).

Mots-clés : Prévalence - Brucellose bovine - Bovin - Bénin Abstract Prevalence of bovine brucellosis in Benin states farm from 2000 to 2003 A study on the prevalence of bovine bucellosis was carried out in Benin state farm (Opkara, Betecoucou and Samiondji) from 2000 to 2003. Blood was collected on all of the mature cattle (N=1109). Three tests were used for serological analysis: RFC (Réaction de fixation de complement), EAT (épreuve à l’antigène tamponné) and Indirect Enzyme –Linked Immunosorbent Assay (ELISA). The highest brucellic infection was obtained in Okpara farm with an annual prevalence varying from 2.06 to 3.4 %. Betecoucou farm was the second in an importance and the prevalence was between 0 and 2.8%. At Samiondji farm, however, brucellosis was only identified in 2002 and varied from one year to another in this study area. This variation could be tied to the variability of the tests’ sensitivity.

Key-Words: Prevalence - Bovine brucellosis - Bovine - Benin.

Introduction La brucellose est une maladie infectieuse, contagieuse, commune à de nombreuses espèces animales et à l’homme. C’est une anthropo-zoonose bien connue qui est à l’origine des pertes économiques dans les élevages où elle sévit et une menace permanente pour la santé publique. L’existence de la brucellose bovine a été longtemps méconnue en Afrique subsaharienne jusque dans les années 70 [3]. Au Bénin, les premières études sur la brucellose ont été réalisées par AKAKPO et al. [2] et les résultats ont montré que 10% des bovins étaient infectés. Dès lors, le dépistage et l’éradication de la brucellose ont été entrepris dans les fermes d’Etat (Okpara, Bétécoucou, Samiondji et Kpinnou) dans le cadre des différents projets d’élevage. Au démarrage de la seconde phase du Projet de Développement de la Production Animale (PDPA) en 1990, la prévalence de la Brucellose bovine dans les anciens troupeaux des fermes d’Etat était de 15,5, 12 et 3,8 %, respectivement pour Bétécoucou, Okpara et Samiondji [6]. Une étude ponctuelle de la situation de la brucellose bovine a été réalisée de juin à août 2001 dans les fermes d’Etat et dans les élevages encadrés par le PDE [5].Il ressort de cette étude que des prévalences de 6,2 % et 15,2 % ont été obtenues en utilisant respectivement les RASPA Vol.3 N03-4, 2005

épreuves sérologiques EAT et ELISA. S’il est bien connu que la prévalence de la brucellose est fortement influencée par la saison et peut même varier d’une année à l’autre [1], il est peut-être probable que les résultats issus de l’étude de KOUTINHOUIN et al. [5] ne révèlent pas la prévalence réelle de la brucellose bovine compte tenu de la durée de la période des prélèvements sanguins (juin à août). Le but de cette étude est d’évaluer la prévalence de cette anthropo-zoonose dans les fermes d’Etat de l’Okpara, de Bétécoucou et de Samiondji de 2000 à 2003 dans le cadre de l’éradication de cette maladie.

Matériel et Méthodes 1. ZONE D’ETUDE

Cette étude a été réalisée dans le cadre du Projet pour le Développement de l’Elevage (PDE) au Bénin. La zone d’intervention de ce Projet occupe une superficie de 23 533 km2, soit environ 20% du territoire national et concerne les troupeaux des fermes d’Etat et ceux des fermes privées. Dans le cadre de ce projet, la sérosurveillance de la brucellose bovine a été réalisée dans les fermes d’Etat de l’Okpara, de Bétécoucou et de Samiondji de 2000 à 2003 sur un effectif de 11609 bovins de races Borgou et Lagunaire.

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Les fermes d’élevage de l’Okpara et de Bétécoucou sont peuplées essentiellement de race Borgou, alors que la race Lagunaire est uniquement élevée à Samiondji. La ferme de l’Okpara est située dans le Département du Borgou à une quinzaine de kilomètres de la ville de Parakou et bénéficie d’un climat de type soudanien. Quant à la ferme de Bétécoucou, elle est située dans le Département des Collines et bénéficie d’un climat de type soudano-guinéen. Enfin, la ferme de Samiondji est située dans le Département du Zou et bénéficie d’un climat de type guinéen. Les analyses sérologiques ont été réalisées par le laboratoire de diagnostic vétérinaire installé à Bohicon dans le département du Zou.

4. COLLECTE ET DÉPOUILLEMENT DES DONNÉES Cette étude a été réalisée à partir de la base de données contenue dans les rapports annuels d’activité du PDE de 2000 à 2003. A l’issue du dépouillement, les données sur les bilans de santé ont été éliminées. Les animaux de la ferme de Kpinnou n’ont pas également été pris en compte dans le traitement des données en raison de son statut de récupérateur des animaux éliminés des autres fermes du PDE pour des causes diverses. Les données finalement prises en compte ainsi que les tests utilisés sont récapitulés dans le tableau I.

2. SYSTÈMES D’ÉLEVAGE

4. ANALYSE STATISTIQUE

Le système d’élevage est de type amélioré dans les trois fermes d’élevage. L’alimentation est basée sur le pâturage naturel avec un apport de compléments alimentaires sous forme de foin et d’ensilage et, un supplément minéral sous forme de bloc à lécher. Dans les élevages privés, le système d’élevage est de type traditionnel, basé essentiellement sur le pâturage naturel.

La prévalence de l’infection individuelle (Pi) a été estimée en rapportant le nombre de sérums ayant donné un résultat positif, au nombre de sérums testés.

3. SUIVI SANITAIRE Dans les fermes d’Etat, le suivi sanitaire est basé sur les vaccinations contre les grandes épizooties telles que la Pasteurellose, la Péripneumonie Contagieuse Bovine (PPCB) et les traitements spécifiques pratiqués pour les maladies occasionnelles en fonction des cas cliniques. Les activités du laboratoire vétérinaire de Bohicon sur les fermes d’Etat ont porté sur : - La surveillance et le contrôle de l’alimentation du bétail grâce aux examens bromatologiques et biochimiques ; - La surveillance et le contrôle des maladies abortives grâce aux examens sérologiques, parasitaires et bactériologiques ; - La surveillance et le contrôle des maladies parasitaires, bactériennes grâce aux prélèvements adaptés. Tous ces examens ont été suivis des recommandations adaptées à chaque situation.

4. ECHANTILLONNAGE ET PRÉLÈVEMENT Le prélèvement sanguin a été réalisé sur tous les animaux en âge de reproduction (taurillon, génisse, vache, taureau). Le sang a été prélevé à la veine jugulaire dans un tube sec stérile. Chaque prélèvement est identifié par le numéro de la boucle de l’animal et sa catégorie sur le tube le contenant. La récolte de sérum se fait sur le terrain ou au Laboratoire Vétérinaire de Bohicon selon le nombre de jours que dureront les prélèvements. Quelque soit le lieu de récolte, les sérums ont été conservés à -20°C. Trois techniques ont été utilisées pour les analyses sérologiques : la Réaction de Fixation de Complément (RFC), l’Epreuve à l’Antigène Tamponné (EAT) ou Rose Bengale et celle de ELISA indirecte (indirect enzyme – linked immunosorbent assay). Les périodes d’utilisation des trois tests sont données par ferme dans le tableau I.

Tableau I : Nombre de sérums analysés et tests sérologiques utilisés

Année 2000 2001 2002 2003

Ferme d’élevage FEO FEB FES FEO FEB FES FEO FEB FES FEO FEB FES

Nombre de sérums analysé

Tests sérologiques sutilisés

1648 617 597

RFC + EAT EAT EAT

1852 577 593

ELISA ELISA ELISA

1530 733 686

1735 622 419

EAT+ RFC EAT EAT

ELISA ELISA ELISA

FEO : Ferme Elevage de l’Okpara ; FEB : Ferme d’Elevage de Bétécoucou ; FES : Ferme d’Elevage de Samiondji.

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Effectif de sérums positifs Pi = Effectif de sérums analysés Les prévalences ont été calculées par ferme d’Etat (Okpara, Bétécoucou et Samiondji) et par année de prélèvement (2000, 2001, 2002 et 2003). Ces prévalences ont été également calculées par année, toutes fermes confondues. Pour chaque prévalence, un intervalle de confiance (ICP) à 95% a été calculé suivant la formule ci-dessous : [P(1 - P)] ICP = 1,96 N P est la prévalence de l’infection et N la taille de l’échantillon. Les différentes prévalences ont été comparées par le test bilatéral de Z.

Résultats Les prévalences de la brucellose bovine dans les fermes d’élevage d’Okpara, de Samiondji et de Bétécoucou de 2000 à 2003 sont données au tableau II. En 2000, aucun cas de brucellose n’a été décelé dans les fermes d’élevage de Bétécoucou et de Samiondji. Par contre, à l’Okpara, la prévalence a été de 2,16 ± 0,76%. Les contrôles sérologiques réalisés en 2001, ont permis de dépister à Bétécoucou deux cas de brucellose sur 617 sérums analysés, soit une prévalence de 0,32 ± 0,45%. Cette prévalence étant faible, l’intervalle de confiance montre que la probabilité de ne pas déceler un cas de brucellose est élevée. Pour la même année 2001, la prévalence de la brucellose a peu varié (2,06 ± 0,68%) à l’Okpara par rapport à 2000, alors qu’aucun cas n’a été dépisté à Samiondji. En 2002, la prévalence de la brucellose à l’Okpara (3,4 ± 0,15%) a été le double de celle de Bétécoucou (1,6 ± 0,99%) et c’est pendant cette année que des cas d’infections brucelliques ont été décelés pour la première fois à Samiondji en considérant la période d’enquête (2000 – 2003). Pendant cette année, 8 cas de brucellose ont été dépistés sur 419 sérums analysés, soit une prévalence de 1,9% à Samiondji. Un an plus tard, les analyses sérologiques n’ont pas détecté de cas positifs de la brucellose à Samiondji alors qu’à l’Okpara le taux d’infection a peu varié (3,24 ± 0,81%) et a augmenté à 2,77 ± 1,43% à Bétécoucou. L’évolution de la brucellose bovine de 2000 à 2003 à la ferme de l’Okpara est présentée à la figure 2 et montre que l’infection brucellique a peu varié de 2000 à 2001 et de 2002 à 2003, alors qu’elle a considérablement augmenté de 2001 à 2002 (P<0,001). A Bétécoucou, la figure 2 montre que le pourcentage d’animaux infectés est en augmentation linéaire de 2001 à 2003. Quant à Samiondji, des cas d’ infections brucelliques ont été seulement dépistés en 2002. RASPA Vol.3 N03-4 2005


Prévalence de la brucellose dans les fermes d’état du Bénin

Tableau II : Prévalence de la brucellose bovine dans les fermes d’élevage de l’Okpara (FEO), de Samiondji (FES) et de Bétécoucou (FEB) de 2000 à 2003.

Année 2000 2001 2002 2003

Ferme Nombre d’élevage de sérums analysés FEO FEB FES

1530 733 686

FEO FEB FES

1648 617 597

FEO FEB FES

33 0 0 34 2 0

1735 622 419

FEO FEB FES

Nombre de positifs

59 10 8

1852 577 593

60 16 0

Prévalence (%) 2,16a 0,00b 0,00b 2,06a 0,32b 0,00b 3,40a 1,61b 1,91b 3,24a 2,77a 0,00b

Intervalle de confiance

[1,43 - 2,88] -

[1,38 - 2,75] [-0,12- 0,77] [2,55 - 4,25] [0,62 - 2,60] [0,60 - 3,22] [2,43 - 4,05] [1,43 - 4,11] -

Les pourcentages suivis des lettres différentes sont statistiquement différents au seuil de 5%

Tableau III : Prévalence de la brucellose bovine de l’ensemble des fermes d’élevage (Okpara, Bétécoucou et Samiondji) de 2000 à 2003.

Année

2000 2001 2002 2003 Moyenne

Nombre de sérums analysés 2949 2862 2776 3022 11609

Nombre de positifs 33 36 77 76 222

Prévalence (%) 1,12a 1,26a 2,77b 2,51b 1,91

Intervalle de confiance

[0,74 - 1,50] [0,85 - 1,67] [2,16 - 3,38] [1,95 - 3,07] [1,66 - 2,16]

Les pourcentages suivis des lettres différentes sont statistiquement différents au seuil de 5%

4,50 4,00 Prévalence (%)

3,50 3,00 2,50 2,00 1,50 1,00 0,50 0,00

2000

2001

2002

2003

Figure 1 : Evolution de la brucellose bovine de 2000 à 2003 à la ferme de l’Okpara. RASPA Vol.3 N03-4, 2005

4,50 4,00 3,50 Prévalence (%)

Le tableau III récapitule le nombre de sérums prélevés par année, le nombre de cas positifs et la distribution annuelle de la prévalence de la brucellose bovine dans les trois fermes d’élevage de 2000 à 2003. En considérant l’ensemble des trois fermes, la prévalence moyenne de la brucellose bovine a été de 1,91 ± 0,25 % pour la période d’études. Le pourcentage de sérums positifs par an a augmenté de 1,12 % en 2000 à 2,77 % en 2002 et décroît à 2,51 % en 2003.

3,00 2,50 2,00 1,50 1,00 0,50 0,00

-0,50

2000

2001

2002

2003

Figure 2 : Evolution de la brucellose bovine de 2000 à 2003 à la ferme de Bétécoucou.

Discussion 1. PRÉVALENCE

INDIVIDUELLE DE LA BRUCELLOSE BOVINE DANS LES FERMES D’ÉTATS L’évolution de la prévalence de la brucellose dans les fermes étudiées (figures 1 et 2) montre que les prévalences de 2000 et 2001 sont apparemment faibles par rapport à celles de 2002 et 2003. Cette apparence s’explique par la faible sensibilité du test EAT utilisé en 2000 et en 2001 par rapport à celle du test ELISA utilisé de 2002 à 2003. C’est d’ailleurs grâce au test ELISA que des cas sérologiques de la brucellose ont été observés en 2002 à Samiondji alors qu’aucun cas n’avait été décelé en 2000 et en 2001. Par rapport aux résultats des rapports d’activités du PDE (1998-2002), il apparaît clairement que la prévalence de la brucellose décroît dans toutes les fermes du PDE de 1998 (7,2% à l’Okpara, 2,1% Samiondji et 2,5% à Bétécoucou) à 2001. Pendant cette période, les tests EAT et RFC avaient été utilisés pour la sérosurveillance. L’utilisation du test ELISA à partir de 2002 a permis d’augmenter le nombre de séropositifs lors de la sérosurveillance. En conclusion, la prévalence de la brucellose n’augmente pas dans les fermes du PDE, mais c’est la bonne sensibilité du test ELISA qui permet de dépister un plus grand nombre de séropositifs. Une étude ponctuelle de la situation de la Brucellose bovine a été réalisée de juin à août 2001 dans les élevages encadrés par le PDE [5]. Dans ces élevages composés de races Borgou et Lagunaires, le système d’élevage est de type traditionnel [5]. Il ressort de cette étude que la prévalence de la brucellose est de 5,25 et 8,3%, respectivement dans ces élevages traditionnels à Bétécoucou et à l’Okpara pour le test sérologique EAT alors qu’elle est respectivement de 13,26 et 25,7% pour le test ELISA. De même, les prévalences observées dans les élevages traditionnels à Samiondji sont légèrement en dessous de celles de Bétécoucou. Ces prévalences sont très élevées par rapport à celles de notre étude. Toutefois, les mêmes tendances ont été observées : l’infection la plus importante est à l’Okpara, suivie de Bétécoucou et la faible à Samiondji. La prévalence individuelle moyenne de 2000 à 2003 de la brucellose bovine est de 1,91% pour l’ensemble des trois fermes (Okpara, Bétécoucou et Samiondji). Une prévalence plus élevée (10,4 %) avait été obtenue par AKAKPO et al. [2] en 1984, AKAKPO et BORNAREL [1] en 1987,

202


R. ADEHAN et al.

en utilisant la séro-agglutination de Wright et l’agglutination rapide sur lame à l’aide d’un antigène tamponné en milieu acide coloré au Rose Bengale. Au démarrage de la seconde phase du Projet de Développement de la Production Animale (PDPA) en 1990, la prévalence de la brucellose bovine dans les anciens troupeaux des fermes d’Etat était de 15,5, 12,2 et 3,8%, respectivement pour Bétécoucou, Okpara et Samiondji [6]. Selon KOUTINHOUIN et al. [5], ce taux n’est que de 6,25% en utilisant l’EAT et de 15,2% pour le test sérologique ELISA dans les élevages traditionnels encadrés par le PDE. Les taux obtenu dans notre étude sont très bas par rapport à ceux observés dans les années antérieures. Tenant compte des résultats de notre étude, il est possible de conclure que la réduction de ces prévalences est le résultat du programme de lutte contre la brucellose bovine entrepris dans les fermes d’Etat dans le cadre des projets PDPA et PDE. La lutte contre cette maladie a consisté au dépistage et à l’élimination des animaux reconnus séropositifs.

2. COMPARAISON

TRADITIONNELS

AVEC

LA SITUATION

DES

ÉLEVAGES

Par rapport aux résultats de notre étude, des prévalences élevées de 10, 2, 13, 45 et 4,16% ont été respectivement obtenues par NOUDEKE [8] dans les élevages traditionnels situés aux environs des fermes de l’Okpara, de Bétécoucou et de Samiondji en utilisant le test EAT, lors d’un bilan de santé. Ces prévalences pourraient être encore plus élevées si le test ELISA était utilisé comme test sérologique car ce test est reconnu pour sa bonne sensibilité par rapport à l’EAT [5, 10]. Des prévalences supérieures à 65% ont été enregistrées dans les élevages traditionnels encadrés par le PDE, avec une moyenne d’environ 26% selon les rapports d’activités du PDE de 2000 à 2003. Ces prévalences élevées par rapport à celles des trois fermes étudiées dans notre étude s’expliquent par le fait que dans ces élevages, les prélèvements se font souvent sur les vaches ayant avorté et parfois sur le géniteur du troupeau. Ce mode d’échantillonnage dans les élevages privés est dû au rejet du coût des analyses sérologiques par les propriétaires d’animaux. Si après analyses sérologiques il ressort des cas positifs de brucellose, le laboratoire propose à l’éleveur un prélèvement sur tous les animaux en âge de reproduction. Dans d’autres cas, un échantillonnage représentatif des animaux peut être également proposé dans ces troupeaux où des cas d’avortements ont été signalés. De tout ce qui précède, il ressort que le taux d’infection brucellique élevé obtenu dans les élevages privés est d’abord lié à la méthode d’échantillonnage, ensuite à l’absence de séro-surveillance depuis de nombreuses années et enfin, aux contacts réguliers des troupeaux au pâturage et au niveau des points d’eau.

3. COMPARAISON AVEC LA SITUATION L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE

DE CERTAINS PAYS DE

Dans certains pays de l’Afrique de l’Ouest, la prévalence de la brucellose oscille entre 4% et 16% dans les zones d’élevage extensif, avec des variations imprévisibles [3]. Selon ces auteurs, le taux d’infection peut atteindre des niveaux très variables selon les régions, comme dans certaines zones du Niger ou du Tchad (25% à 40%), du Sénégal (Casamance), du Nigeria, du Ghana où l’infection peut intéresser 60% à 75% des troupeaux.

203

Une étude épidémiologique réalisée par AKAKPO et BORNAREL [1] dans sept pays de l’Afrique tropicale a donné une prévalence sérologique moyenne de 22,5%. Cette prévalence varie selon les pays de 30% à 41% (Niger, Rwanda et Togo) et de 10% à 12% (Bénin, Burkina-Faso et Cameroun). Il est important de souligner que cette étude a été réalisée à partir des prélèvements de sérums de bovins d’élevage traditionnel extensif ou sédentaire et dans les fermes ou ranch d’élevage. Les sérums provenaient de zébus, de taurins et parfois de métis, de tous âges. Les prélèvements ont été réalisés en 1975 au Sénégal, d’août à octobre 1977 au Togo, en 1980 au Cameroun, 1980 et 1981 au Bénin et au Niger, 1981 et 1982 au Burkina Faso et enfin, 1982 et 1983 au Rwanda. Les tests sérologiques utilisés sont la séro-agglutination de Wright, l’agglutination rapide sur lame à l’aide d’un antigène tamponné en milieu acide coloré au Rose Bengale et la Fixation du complément. Le sondage épidémiologique de la Brucellose réalisé chez la N’Dama par SYLLA et al. [9] en Guinée a donné un pourcentage moyen de sérums positifs de 6,9%. Pour cette étude, chaque sérum a été soumis à trois épreuves sérologiques classiques : la séro-agglutination lente de Wright, l’épreuve à antigène tamponné et la Fixation du complément. Dix ans plus tard, cette prévalence a peu varié (6,5%) dans la même région, dans la même race (N’Dama) et en utilisant l’épreuve à antigène tamponné et la Fixation du complément [4].

Conclusion L’étude de la prévalence de la brucellose bovine dans les fermes d’élevage de l’Okpara, de Bétécoucou et de Samiondji révèle que l’infection est plus fréquente à l’Okpara que dans les autres fermes. L’évolution de la brucellose bovine à la ferme de l’Okpara montre que l’infection brucellique a peu varié de 2000 à 2001 et de 2002 à 2003, alors qu’elle a considérablement augmenté de 2001 à 2002. A Bétécoucou, le nombre d’animaux infectés est en augmentation de 2001 à 2003 alors qu’à Samiondji, des cas d’infections brucelliques ont été seulement dépistés en 2002. Ce taux d’infection brucellique obtenu dans les fermes d’Etat est très bas par rapport à ceux observés dans les années antérieures. Tenant compte des résultats de notre étude, il est possible de conclure que ces prévalences sont les résultats du programme de lutte contre la brucellose bovine entrepris dans les fermes d’Etat dans le cadre des projets PDPA et PDE depuis les années 1990. La poursuite de la lutte contre la brucellose dans les fermes du PDE doit se faire en étroite collaboration avec les élevages traditionnels situés de la zone d’intervention du PDE où la situation est beaucoup plus complexe. Le renforcement de la séro-surveillance dans ces élevages est nécessaire. La sensibilisation et la participation la plus large possible des éleveurs doivent être envisagées.

Remerciement Les auteurs remercient le Projet de Développement de l’Elevage au Bénin et le Laboratoire Vétérinaire de Bohicon en particulier pour nous avoir fourni les données. RASPA Vol.3 N03-4 2005


Prévalence de la brucellose dans les fermes d’état du Bénin

Bibliographie

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